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Full text of "Revue et gazette musicale de Paris"

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ÎBIE  PUBSLIie  UIBIAKY  ©F  ÎHi  GOITY  OIT  ®©S¥OKI. 
ÎGaiE  MILIEIS9   A.  Bmwti  C@ILILIEeTa@tJI. 


REVUE 


ET 


GAZETTE    MUSICALE 

DE  PARIS 


I 


REVUE 


ET 


GAZETTE   MUSICALE 


DE  PARIS 


RÉDIGÉE     PAR     MESSIEDBS 


C.  BANNELIER, 
G.  BÉNÉDICT, 
HECTOR  BERLIOZ, 
P.  BERNARD, 
MAURICE  BOURGES, 
OSCAR  COMETTANT, 
MAURICE  CRISTAL, 
ELWART, 


FÉTIS  père, 
EDOUARD  FÉTIS, 
ARMAND  GOUZIEN, 
MAURICE  GRAY, 
STÉPHEN  HELLER, 
LÉON  KREUTZER, 
DE  LAUZIÈRES, 
ED.  MONNAIS, 
MATHIEU  DE  MONTER, 


EDMOND  NEUKOMM, 
ARTHUR  POUGIN, 
ELIAS  DE  RAUZE, 
ERNEST  REYER, 
THOMAS  SAUVAGE; 
SAINT-YVES, 
PAUL  SMITH, 
THURNER. 


TRElVTE-CmQUIÈME  ANNÉE 


1868 


PARIS 


A«J   BUREAU  DU  JOUn:VAI>,   1,  BO(JL.EVARD  DE»  ITAL.IEX'S 

1868 


TABLES  DU  TRENTE-CINQUIÈME  VOLUME 

DE  LA 

REVUE 

ET 

GAZETTE    MUSICALE 

mm  wAWktB. 


TABLE  AlVALYTIQUE  DES  MATIÈRES. 


Académies  des  Be^nx-Artg. 

(iNSTITDT    BE    FRANCE.) 

Eleciion  de  M.  le  comte  Walewski,  comm«  académi- 
cien libre,  en  remplacement  de  Georges  Kastner,  54. 

Prix  d'encouragemeut-Frémont  décerné  à  M.  Léonce 
Cohen,  366. 

Prix  annnel  de  la  musique  de  chambre  décerné  à  M. 
Ch.  Dancla,  390. 

Associations, 

Election  de  deux  vice-présidents  par  le  comité  de  la 
Société  des  artistes  musiciens,  62. 

Don  d'une  somme  de  5,000  francs  par  Mme  G.  Kastner 
à  la  même  association,  110. 

Assemblée  géni'rale  de  cette  Société,  158,  162. 

Assemblée  générale  de  la  Société  des  auteurs  et  com- 
positeurs dramatiques,  174. 

Assemblées  générales  des  trois  Sociétés  pour  la  percep- 
tion des  droits  d'auteurs,  art.  de  T.  Sauv;ige,  195. 

Assemblée  générale  de  la  même  Société  pour  la  ques- 
tion de  révision  des  statuts,  384. 

Anditions  musicales  de  Paris. 

(Voyez  aussi  Concerts.] 
MATINÉES,  SOIRÉES,  CONCERTS,  ETC. 


Baur  (J.),  133. 
Bedel  (Mlle  L.),  133. 
Béguin -Salomon    (Mme), 

101. 
Benoiton    (La    petite  Fan- 
fan),  109. 
Bériot  fils  (C.  de),  93. 
Bonewitz,  43.  24.  125. 
Boscowitz  (F.),  109. 
■Callias  (Mlle  N.  de),414. 
•Carreno  (Mlle  T.),  93. 
Caussemille  (Mlle  G.),  141. 
Charles  (A.),  60. 
Colonne  (E.),  77. 
Console  (F.),  125. 
Delaborde  E.),  133. 
Delahaye  (L.),  95. 
J)elgado  ,  S>3 . 
Ernesti  (T.  d'),  93. 
Errera  (U.),  190. 
Tibre  (Mlle  A.),  116, 
Firmin  (N.).  101. 
Frémeaux    (La    famille), 

141. 
Gagliano  (Mme),  93. 
Garcin,  198. 
Gernsheim  (F.),  art.  de  C. 

Bannelier,  148. 
Golduer  iW.),  117. 
■jGouffé   (A.),  93,165,  414. 
Grignon  (H.),  141. 
Guzmun  (F.),  70. 
Jacobi  (G.),  93. 
Jellsch  (C),  133. 
JCowalski  ;H.),  93. 
Kruger  (W.),  93. 
Lamoureux   (C),    art,  de 

C.  Bannelier,  51. 
Xanghans     [  M.    et     Mme 

W.),  109. 
Lapret  (L.),  85. 
Larg.jntière  (Mlle  de),  173. 
Lalapie  (Mlle  de),  77. 
Lavini  (Mlle),  101. 
Xebouc,  29, 109,  116,  141, 

350,  :«9. 


Lemmens,  374. 

Lévy  (Mlle  C),  101. 

Leybaque  (Mlle  H.),  141. 

Liebé  (Mlle  T.),  141, 

Lopez,  190. 

Magnus  (D.),  60. 
Id.  (2"  concert),  93. 

Martin  (Mlle  J.),  125. 

Martin-Robinet  (Mme),  70. 

Monbelli  (Mme),  193 

Mortier  de  Fontaine,  141. 

NormanNéruda  (Mme) art. 
de  Mathieu  de  Monter, 
98. 

Pellini  sœurs    (Mlles),  93. 

Pénavaire,  109. 

Pérelli  (G.),  77. 

Pfeifi-er  (G.),   93. 

Potier  (Mlle  D.  de),  77. 

Régnier  (Mlle  P.),  193. 

Rendano  (A,),  133. 

Rosenhain  {J.),101. 

Rouxel  (Mme),),  93. 

Rubinstein  (A.' — 1"  con- 
cert, art.  de  C.  Banne- 
lier, 89. 

Id.  (2'  concet),  101. 
Id.  (3"  concert),  108. 
Id.   (4*  concert),  116. 
Id.  (5» et  6  concert),  125, 
141. 

Saint-Saëns  (C),  157. 

Sauret  fr.,  93. 

Sécrétain  (Mlle  M.),  37. 

Simonet  (Mme  M.),  101. 

Skiwa  (Mlles  C),  70. 

Staps  (Mlle  A.),  70. 

Teysson,  53. 

Valdès  (R.),  85. 

Van-Lier  (Mlle  R.),  70. 

Villa,  37. 

Vivier,  art.  de  C,  Banne- 
lier, 130. 


B 
Biographies. 

Etudes  sur  Charles-Marie  de  Weber,  d'après  la  bio- 
graphie écrite  par  son  fils  (suite),  art.  de  Paul 
Smith,  1. 

Gi'orges  Kastner  et  son  œuvre,  par  E.  Reyer  (Extrait  du 
Journal  des  Débats],  44. 

Détails  biographiiiues  sur  Edouard  Monnais,  par  J. 
Janin  (Extrait  du  Journal  des  Débats),  85. 

Troisième  partie  des  Etudes  sur  Charles-Marie  de  We- 
ber, art.  d'E.  Neukomm,  139,  16?,  179,  193,  217,242, 
284,  3(i6,  353,387,  393,  401. 

Mortier  de  Fontaine,  155. 

Stephen  Heller  (Etudes  biographiques  et  critiques),  par 
Mathieu  de  Monter,  329.  337. 

Léon  Kreutzer,  art.  d'A.  Pougin,  347,  363. 

Minnie  Hauck  (Détails  extraits  de  l'Illustraled  London 
NeivsJ,  403. 


Concerts  à  Paris. 

(Voir  aussi  Auditions  musicales.] 

Audition  des  sœurs  Pellini  à  la  Société  philharmonique 
de  Rueil,  14. 

Première  audition  du  psaume  CXXXVII,   mis  en  musi- 
que par  M.  Jules  Béer,  art.  signé  S.  D.,  27. 

Premier  concert  de  l'année,  donné   à    l'Institution   des 
Jeunes  Aveugles,  29. 

Grande  soirée  musicale  à  la  salle  Herz,  29. 

Concert  de  la   Société  chorale  allemande  Liederkranz, 
37. 

Concert  de  la  Société  Sainte-Cécile,  sous  la  direction  de 
M.  Wekerlin,  53. 

Soirée  musicale    à    l'Institution    impériale  des   Jeunes 
Aveugles,  60. 

Concerts  du  ministère  de   la  marine   et  de  la  surinten 
dance  des  Beaux-Arts,  69,  7G,  100,  116. 

Concerts  des  Tuileries,  76,  85,  92,  100. 

Concert  donné  pour  l'Orphelinat  de  Sainte-Marie,  77. 

Second  concert  de  Mme  la  duchesse  de  Galiera,  85. 

Concert  de  la  loge  maçonnique  les  Frères-unis-insépara- 
bles, art.  de  Mathieu  de  Monter,  90 . 

Concerts  de  l'HOtel-de-Ville,  92,  100,  116. 

Concert  au  profit  de  la  crèche  du  quartier  des  journaux, 
93. 

Concerts  do  la  princesse  Malhilde,  100,  116. 

Matinée  musicale  à  Notre-Dame  des  Arts,  100. 

Audition    de   fragments  du    Dante,  opéra  .du    duc   de 
Massa,  art.  d'A.  Gouzien,  106. 

Soirée  musicale  pour  l'inauguration  de  la  mairie  du  3" 
arrondissement,  109. 

Soirées  musicales  du  comte  d'Osmont,  de  M.  Ed.  Four- 
nier  et  de  Mme  la  baronne  de  Maistre,  116. 

Concert,  à  la  Sorbonne,  au  profit  de  la  crèche  de  Sainte- 
Geneviève,  116. 

Concert  de  l'Institut  de  la  Providence,  à  la  Sorbonne, 
133. 

Concert  annuel  de  la  Société    des   concerts   de   chant 
classique,  150. 

Concert  pour  la  fondation  d'une  crèche,  150. 

Concerts  de  la  Société  académique  de  musique  sacrée, 
157,  173. 

Concert  au  profit  de  l'Orphelinat  des  jeunes  filles  d'Al- 
ger, 165. 

Concert  à  Notre-Dame  des  Arts,  173. 

Concirt  annuel    des    élèves   de   l'institution  de  Notre- 
Dame  d'Autouil,  182. 

Audition  de  la  musique  d'un  ballet  chez  le  comte  d'Os- 
mont, 206. 

Séance  musicale  des  Enfants  d'Apollon,  374  . 
Concert    de   la   Société   chorale  allemande   la    Lieder- 
kranz, au  Grand-Orient,  390. 
Nouvelles  séances  théâtrales  à  l'Ecole  spéciale  de  chant, 
art.  signé  M.  M.,  411. 


Concert  de  la  Sorbonne,  au   profit   de   l'Institut  de   la 

Providence,  414. 
Concerts  du  Conservatoire,  14,   22,  37,  45,  60,  69,  85, 
92,  108,  116,125. 
Premier  concerts  delà  nouvelle  saison,  art.  de  C. 

Bannelier,  403. 
Deu.îième  concert,  414. 
Concerts   populaires  de  musique  classique,   au  cirque 
Napoléon  : 
Léonard,  art.  signé  P.  S.,  12. 
L'ouverture    de    Manfred,  et    la  Sicilienne  de  S. 

Bach,  22. 
Joachim  Raff,  37. 

Suite  d'orchestre,  par  M.  Masscnet,  art.  d'A.  Gou- 
zien, 42. 
Marche  religieuse  de  Lohengrin,  53. 
Mme  Néruda-Norman,  art.  d'A.  Gouzien,  59,  69,  77. 
Symphonie  posthume   de   Mendelssohn  ;  adapo  de 

M.  Garcin,  art.  d'A.  Gouzien,  99. 
Fragment  de  Roméo  et  Juliette,  116. 
Concert  spirituel  du  vendredi  saint,  125. 
Réouverture,  art.  de  C.  Bannelier,  340,  350. 
Concerts  de  la  saison  nouvelle,   350,  366,  374,  389, 
397,  406. 

Opéras  de  salon. 

Le  Double  Piège,  opéra-comique  en  un  acte,  musique 
de  G.  Douay,  représenté  à  la  salle  Herz,  182. 

Le  RÉve  d'un  écolier,  opéra-comique  de  Gariboldi,  re- 
présenté par  les  élèves  de  l'Ecole  internationale  de 
Saint-Germain  en  Laye,  206. 

Conservatoire  impérial  de  musique 
et  de  déclamatiou. 

Nomination  de  M.  Charles  Colin,  comme  professeur  Je 
hautbois,  en  remplacement  de  AI.  Barthélémy,  62. 

Concours  ouvert  pour  les  paroles  de  la  cantate  du  grand 
prix  de  Rome,  68. 

Nomination  de  M.  G.  Hainl  comme  membre  du  comité 
des  études  musicales,  86. 

Composition  du  jury  pour  le  prix  de  Rome,  151 . 

Souscription  pour  élever  un  monument  à  la  mémoire 
d'Ed.  Monnais,  165,  190,  206,  229,  253. 

Examens  préparatoires  pour  l'admission  aux  concours 
publics,  191, 

Décision  du  jury  au  sujet  du  grand  prix  de  composition 
musicale,  214. 

Concours  à  huis  clos,  225. 

Concours  publics,  art.  de  Ch.  Bannelier,  233. 

Concours  publics  (suite),  241. 

Distribution  des  prix,  249. 

Examens  annuels  pour  l'admission  dans  les  classes  de 
chant,  358. 

Démission  de  M.  Révial,  professeur  de  chant,  366. 

Son  remplacement  par  Roger,  374. 

Nomination  de  M.  Jules  Cohen  comme  professeur  de  la 
classe  d'ensemble  vocal,  374. 

Résultat  du  concours  d'harmonie  écrite  et  d'orchestra- 
tion des  élèves  militaires,  389. 

Nomination  de  M.  Altès  comme  professeur  de  flttte,  en 
remplacement  de  M.  Dorus,  démissionnaire,  398. 

Résultat  du  concours  de  solfège  de  la  classe  des  élèves 
militaires,  206. 

Nomination  de  M.  Leroy,  comme  professeur  de  clari- 
nette, en  remplacement  de  M.  Klosé,  406. 

D 
Départements. 

THÉÂTRES,  CONCERTS,  NOUVELLES  MUSICALES, 

ETC.,   ETC. 

Alger.  —  Représentation  de  la  Grande-Duchesse,  166. 
—  Représentation  de  Fleur  de  Thé,  389. 


Amiens.  —  Grand  Concert  de  la  Sociiîté  Pliilliarnionique, 
29,  37.  —  Nouveau  concert  au  profit  rUs  pauvres,  93. 

—  Concert  avec  le  concours  d'Adelina  Patii,  157.  — 
Concert  des  Orpliéonisles,  iil4. 

BAGNÈnBs-DE-BiGoiiRE.  —  Inauguration  du  nouveau  Ca- 
sino,  263. 

Baïonne.  —  Inauguration  du  grand  orgue  de  l'église 
Saint-Esprit,  294. 

Besançon.  —  Représentation  de  la  Grande-Duchesse,  30. 

Biarritz.  —  Concours  de  sociétés  chorales  et  inbtru- 
mentales,  318. 

Bordeaux.  —  Association  des  artistes  du  Grand  Théâ- 
tre, 21.  —  Représentation  de  la  Leçon  d'Ainoui-,  opéra- 
comique  de  M.  Alphonse  Varncy,  5i.  —  Norainaiion 
de  M.  Halanzicr  comme  directeur  du  Grand  Tliéàlre. 
se.  —  Reprise  do  l'Africaine,  102.  —  Représentation 
de  Quand  les  C/tals  n'y  soni  pas,  opérette  do  L,  La- 
laste,  110.  —  Représentations  de  Hiibinson  Cnisoé  et 
de  kl  Grande-Duchesse,  134.  —  Repréâcnlation  de 
Fleur  de  Thé  au  théâtre  Français,  24û.  —  Représen- 
tation de  Peau  d'Ane  au  Grand  Théâtre,  2:8.  —  Ou- 
verture du  nouveau  théâtre  Louit,  i94. 

BouLOG^E-sl^n-MER.  —  Représentation  de  Stais  un  Bal- 
con, opérette  n'A.  Sergent,  110.  —  Conceit  de  la  So- 
ciété philharmonique  au  profit  des  pauvres,  117.  — 
Inauguration  de  l'église  Notre-Dame,  151.  —  Premier 
concert  de  la  saison  d'été,  2d3. 

Brest.  —  Représentation  de  la  Grande-Dïichcsse.  342. 

Breteuil.  —  Concours  de  musiques,  173. 

Caen.  —  Représentation  de  la  Grande-Duchesse,  71.  — 
Inauguration  du  nouvel  orgue  de  l'église  Saint-Sau- 
veur, 198.  —  Concert  à  l'occasion  des  Courses,  255. 

CARC.\ssoi\KE.  —  Représentation  des  Drarjons  ae  Yillars, 
246. 

Chartres.  —  Concours  musical,  190. 

CoLSiAn.  —  Don  fait  au  Conservatoire  en  voie  de  for- 
mation, par  Mme  veuve  Kastncr,  d'un  exemplaire  des 
oeuvres  de  son  mari  (e\tr.  du  journal  l'Alsace),  3G5. 

Contrexeville.  —  Concert  de  bienfaisance  organisé  par 
E.  Ettling,  294. 

Deauville. —  Correspondance  de  Paul  Cernard  :  courses 
annuelles;  bal  des  courses,  etc. ,  25').— Grand  bal  au 
bénéfice  de  M.   Desgranges,  279. 

DiEPFE. —  Représentation  île  ta  Ciande-Ducliessc;con- 
cert  do  la  compagnie  Ulmann-Patti,  202.— Fêtes  et 
concerts,  286. 

Dijon.—  Représentation  du  Pardon  de  Ploërmel,  14. 

Dreux. —  Inauguration  d'un  orgue  dans  l'église  parois- 
siale, 263. 

Dukkerque. —  Représentation  au  Casino  des  Noces  Bre- 
tonnes, opéra-comique  nouveau  de  M.  V.  Buot,  262. 
—Inauguration  du  Casino  de  la  villa  des  Dames,  279. 

Grenoble.  —  Représentation  de  l'Africaine,  38.  —  Rè- 
glement d'un  giand  concours  musical,  158.  —  Médaille 
offerte  par  les  religieux  de  la  Grande  -  Chartreuse 
pour  ce  concours,  174. —  Procès-verbal  du  classement 
des  Sociétés  chorales  et  instrumentales,  231.  —  Cor- 
respondance de  Mathieu  de  Monter  :  grand  concours 
musical  et  inauguration  de  la  statue  de  Napoléon  l'', 
267. —  Election  de  M.  J.  Monesiier  comme  président 
des  Sociétés  musicales  de  cette  ville,  343. 

Havre  (i.e). —  Représentation  de  II  Barbicre  avec  Ade- 
lina  Paiti,  46,  54.  —  Représentation  de  l'Africaine, 
126.  —  Cértmonie  d'ouvcTluie  de  l'Exposiliou  mari- 
lime,  182.  — Correspondance  de  Fr.  Crisson  ;  la  mu- 
sique à  TExpcsilion,  301. 

Lille. — Reprise  de  /aCïj'aîirff-Dwc/iesse,  avccMmeUgalde, 
102.  —  Distribution  des  prix  au   Conservatoire,  271. 

—  Reprise  de  Fleur  de  Thé,  302.— Représentation  de 
laPériclwle,  383. 

LïOH. —  Succèsde  rj/)icaiiie,  6. —  Représentation  d'un 
opéra-comique  de  M.  E.  Pichoz,  Dans  les  Gardes 
françaises,  30. —  Représentation  (le  Robinson  Crusoé, 
61.  —  Concert  de  la  compagnie  Patti-Ulmanu,  77.  — 
Xa  Grande-Duchesse  aux  Célestins,avec  Zulma-Bouf- 
far,  274.  —  Fleur  de  Ilié,  au  même  théâtre,  3i6. 

Lorient. —  Représentation  de  la  Grande-Duchesse,  35'7. 

Marseille.  —  Conceit  donné  par  la  compagnie  Patti- 
Ulmann,  60.  —  Représentation  du  Pelil-I'ouce/,  opé- 
rette nouvelle  d'Ed.Audran,  118.— Concert  de  Mlle  A. 
Meyer,  157.  —  Représentation  de  la  Grande-Du- 
chesse, au  Gymnase,  262.  —  Réouverture  du  Grand- 
Théâtre  par  te  Tromèrc,  317.  —  Représentation  de 
Fleur  de  Thé,  au  Gjœase,  366.  —  Débuts  du  té- 
nor Lbérie,  390 

Mabeelce.  —  Inauguration  du  grand  orgue  de  Merklin- 
Schutze.lll. 

Montpellier. —  Reprise  de  l'Africaine,  30. 

Moulins.- Médaille  décernée  au  concours  pour  la  com- 
position d'un  chant  choral,  190. 

Nancy.—  Réouverture  du  Théâtre,  avec  les  Dragotis  de 
Villars,  334. 

Nantes.  —  Reprise  de  l'Africaine.  —  Représentation  de 
la  Grande-Duchesse  avec  Mme  Dgalde,  246.— Grand 
concert  au  bénéfice  de  la  caisse  de  secours  de  l'Asso- 
ciation philharmonique,  358. 

Nice.  —  Succès  de  l'Africaine,  6.  —  Concert  de  la  com- 
pagnie Patti-Ulmann,  70. —  Accident  arrivé  à  H.Ber- 
lioz, 118.  —  Repiise  de  la  Grande-Duchesse,  avec 
Mlle  Géraldine,  326.  —  Représentations  de  Mme  Bor- 
ghi-Mamo,  406. 

NÎMES.  —  Représentation  de  VElo'ile  du  Nord,  62. 

Orléans.- Représentations  de  la  Grande- Duchesse,  avec 
Mme  Ugalde,  206. 

Rennes. —  Concert  au  profit  des  pauvres,  101. 

RoDEN.  —  Représentation  de  la  Luria.  avec  Adelina 
Patti,  38.— Représentation  de  l'Africaine,  62.—  Con- 
cert annuel  de  bienfaisance  de  la  Société  lyrique,  86. 

.  —  Inauguration  de  l'Exposition  régionale,  173. —  Con- 
cours d'Orphéons;  exécution  du  Salut  Impérial,  d'A. 


TABLE  ANALYTIQUE  DES  MATIERES. 

Ehvart,  en  présence  de  Leurs  Majestés,  182.  —  Ban- 
quet offert  â  M.  A.  Méreaux  par  ses  élèves,  207. 

Strasbourg.  —  Conceits  classiques  de  la  Société  du  con- 
servatoire, 70. —  Exécution  d'une  messe  de  F.  Schwab, 
231.  —  Reprise  des  Dragons  de  Viltars,3lt'>. 

Toulon.  —  Première  représentation   do  l'Afiicaine,  30. 

Tooloise.  — Reprise  de  l'Africaine,  21.—  Reprise  du 
Prophète,  W2.  —  Mlle  Schneider  dans  la  Grande-Du- 
chesse, 166.  —  Inauguration  de  l'orgue  du  chœur  de 
la  cathédrale,  175. 

Tboyes.  —  Représentation  de  l'Africaine,  230 

'i^ERSAiLLES. —  Cérémonie  religieuse  au  profit  de  l'Œuvre 
des  Crèches,  1^2.  —  Messe  de  Hajdji,  exécutée  pour 
la  fête  de  Sainte-Cécile,  390. 

ViCBV.  —  Ouverture  de  la  saison,  191.  —  Capoul  et 
MmeCabel  dans  la  Fille  du  Héyiment,  222.  —  Corres- 
pondance signée  S.  D.  :  Exécution  d'une  œuvre  de 
M.  Schimon,  253. 


Ëtraug^er. 

THÉÂTRES,   CONCERTS,  NOUVELLES    MUSICALES, 

ETC.,    ETC. 

Aix-ia-Chapelle.  —  Représentation  de  l'Africaine,  302. 

Amsterdam.  —  Concerts  d'Arban,  dans  le  Parc,  255,  - 
Concours  international  d'Orphéons,  271. 

Anvers.  —  Représentations  de  Mme  Marie  Sass,  47. 

Bade.  —  Inauguiaiion  de  la  saison,  167.  —  Audition 
des  enfants  Frémeaux,  182.  —  Représentation  de 
l'Ogre,  opérette  de  Mme  P.  Viardot,  à  la  villa  Tour- 
gucnicf,  183.  —  Premières  fêtes  musicales,  191.  — 
Concerts  de  la  salle  Louis  XIII,  215.  —  Correspon- 
dance signée  M.  S.  :  Fête  musicale  à  la  villa  Viardot, 
271.  —  Correspondance  signée  S.  :  Débuts  de 
l'Opéra  allemand  par  Lohcngrin,  293.  —  Grand  con- 
cert à  l'occasion   de  la  fête  du  gtrnd-duc,  294,  302. 

—  Représentations  de  l'Opéra  Italien,  3i0.  — Concert 
de  Besekirsky,  311. 

Barcelone.  —  Représentation  du  Pardon  de  Ploérmel, 
63.  —  Repiésentation  des  Dragons  de  Villars  par  la 
troupe  française  d'Opéra-Co'.iiique,  223. 

Berlin.  —  Rentrée  de  Mlle  Artôt  dans  te  Domino  noir, 
15.—  Représentation  de  Dvu  Parasol,  ballet  nouveau 
de  Taglioni.  Représentation  de  la  Grande-Duchesse 
au  théâtre  de  Friedrich-Wilhemstadt,  23.  —  Repré- 
sentation au  théâtre  Kroll  de  In  loyaije  d'artiste, 
opérette  nouvelle,  47.  —  Représentation  de  Die  Fii- 
bier,  opéra  de  Langert,  72.  —  Rentiée  de  Pauline 
Lucca  à  l'Opéra,  79.  —  Rentrée  de  Kiemann  dans  le 
Prophète,  87.  —  Représentation  de  Die  llerren  Ter- 
tianer,  opérette  de  A.  L'Arronge,  183.  —  Représen- 
tation de  la  Plus  belle  Fille  du  b'  urg,  opéra-comique 
en  deux  actes  de  A.  Conradi,  lSi9.  —  Mise  au  con- 
cours par  l'éditeur  Bock  d'un  opéra-comique,  texte  et 
musique,  214. —  Représentation  du  Templier  et  de  tu 
,luice,  de  Marschner,  327.  —  Mlle  J.  David  dans  les 
.loyeux  Mouscjuetairts,  ballet  nouveau  de  P.  Tcglioni, 
335.  —  Mlle  Oigéni  dans  les  huguenots,  343.  — 
Début  de  Mlle  M.  Calisto  dans  la  Travialu:  concerts 
de  Tausig,  301. 

Birmingham.  — Représentation  de  la  Grande-Duchesse, 
127. 

Bologne.  —  Représentation  à'IlBarhiere  di  Scviglia,  de 
■  Liall'Argine,  375,  391.  — Cérémonie  funèbre  en  l'hon- 
neur de  Rossini,  415. 

Bonn.  —  La  musique  au  congrès  international  archéo- 
logique, 319. 

Breslau.  —  Repiésentation  de  l'Afrcaine,  183. 

Bruxelles.  —  Correspondance  signée  E.  F.  :  nouvelles 
musicales,  19.  —  Second  concert  du  Conservatoire, 
31.  —Représentation  du  Bramais,  opéra-comique  en 
trois  actes,  de  M.  Radoux,  19.  —  Représentation  de 
Robinson  Crusoé,  61.  —  Nouveau  concert  du  Con- 
servatoire, 62.  —  Représentation  de  ZJoii  Carlos,  87. 

—  Dernier  concirt  du  Couservatoiie:  représentation 
du  Tricorne  emhan/é,  cpéra-comique  de  M.  L.  Jouret, 
113.  —  Représentation  de  Don  Carias,  119.  —  Re- 
présentations de  Mme  Marie  Sass,  120.—  Représen- 
talions  de  la  Compagnie  Italienne,  151.  —  Mme  Car- 
valho  dans  Roméo  et  Juliette,  159.  —  Audition  du 
grand  oigue  au  Palais-bucal,  166.  —  Représentations 
de  la  troupe  de  l'Athénée  de  Paris,  222.  —  Grand 
concert  militaire,  239.  —  Nomination  d'un  jury  pour 
le  concours  international  de  musique  religieuse, 
263.  —  Résultat  de  ce  concours,  26b.  —  Réouverture 
du  théâtre  de  la  Monnaie,  287.  —  Séance  publique 
de  l'Académie  royale,  sous  la  présidence  de  M.  Féiis, 
319.  —  Correspondance  de  M.  Féiis:  inauguration 
d'un  nouvel  oigue  à  Iselles,  325  —  Débuts  de  Warot, 
dans  la  Muette;  sérénade  donnée  l^  M.  Fétis  par 
YOrplwon,  327.  —  Correspondance  signée  F.:  com- 
mencements difficiles  de  l'année  théâtrale,  332.  — 
Représentation  du  Premier  Jour  de  bonheur,  359.  — 
Réouverture  des  concerts  populaires,  367.  —  Reprise 
de  l'Africaine  ;  lepréseniation  de  la  Périchole  aux 
Galeries-Saint-Hub«rt,  397.  —  Audition  de  Mme  Plej  el 
dans  nu  concert,  398.  —  Reprise  du  Pardon  de 
Ploérmel,  415. 

Cablsrcue.   —   Représentation  de  la  Fiancée  d'Asola, 

opéra  nouveau  de  L.  Liebé,  310. 
Cologne.  —  Célébration  du  45«  festival  Bas  Rhénan,  181. 

—  Examens  publics  du  Conservatoire,  287. —  Audi- 
tion de  G.  Saint-Saéns,  367. 

Constant.  NOPLE.  —  Représentation  de  gala  au  théâtre 
Naum,  135. 

Darmstadt.  —  Sixième  festival  du  Rhin  central,  327. 

Ems.  —  Inauguration  de  la  saison,  207.  —  Théâtre  el 
concerts,  255.  —  Représentations  des  Bouffes-Pari- 
siens, 270. 


Florence.  —  Inauguration  de  la  saison  d'hiver  de  la 
Pergola  par  Vn  Ba'lo  in  Mascliera,  15.—  Représen- 
tation de    Rosmunda,  opéra  nouveau  de  Gialdini,  87. 

—  Représentation  de  la  Schiaca  Greca,  de  l'ontoglio, 
335.  —  Réouverture  de  la  Pergola  par  le  Prophète, 
367.  —  Concerts  de  Sivori  ;  fermeture  du  théâtre  Pa- 
gliano,  391. 

Fraicfort-sub-le-Mein.  —  Audition  de  Rosenhain,  22. 

Gand.  —  Reprise  de  l'Africaine,  399. 

GÊNES.  —  Réouverture  du  Carlo-Felice  par  le  Prophète, 
8.  —  Représentation  de  (/  Sugno  d'Inès,  ballet  nou- 
veau de  Piuzuti,  79. 

Genève.  —  Représentation  de  Rob'mson  Crusoé,  134. — 
Représentations  de  Montaubry,  174. 

GoTiiA.  —  Représentation  de  la  Nuil  de  Sainl-Jean, 
opéra-comique  d'EUers,  87. 

Haïe  (La).  —  Grand  concert  national  â  l'occasion  du 
congrès  des  savants,  319. 

HosiBoiRG.  —  Ouverture  du  théâtre  Italien,  239.  — 
Réprésentation  de  Faust,  247.  —  Le  Domino  noir, 
avec  Mlle  Artût,  255.  —  Représentations  diverses  de 
la  Société  italienne,  263.  —  Repiésen talions  d'Ade- 
lina Patti,  271,  295. 

KœNiG;BEriG.  —  Représentations  de  la  la  Grande-Du- 
chesse, 247. 

Leipzig.  —  Inauguration  du  nouveau  Théâtre  d'opéra, 
47.  —  Exécution  de  la  Symphonie  fantastique  et  du 
Reguiem  d'H.  Berlioz,  238.  —  Représentation  de  la 
Phœdra,  de  Taubeit,  311.  —  Audition  de  C.  Saint- 
Saiins  au  Gevatidhaus,  343. 

Liège.  —  Représentation  des  Bavards,  d'Ofl'enbacb,  95. 

Lisbonne.  —  Représentation  de  la  Grande-Duchesse,  96. 

—  Représentation  de  l'^rco  de  Smita-Anna  opéra 
nouveau  de  Kororha,  111.  —  Représentation  de  F(cMr- 
de-Thé,  327. 

Livebpool.— Représentation  de  la  Grande-Duchesse,  143. 
Londres.  —  Incendie  de  The  Oxford  Music-Hall,   55. 

—  Programme  de  Covent-Garden,  102.  —  Ouverture 
de  //(•»■  Majesty's  Opéra  et   de    Covent-Garden,  111. 

—  Rentrée  de  Mario;  concert;  divers,  119.  —  Ren- 
trées d'Adelina  Patti,  de  Mlle  P.  Lucca  et  de  Mlle 
Nilsson,    i52.   —  Grand  concert  annuel  d'Aiditi,  175. 

—  Reprise  de  la  J/ct/cc,  do  Cherubini,  à  Drury-Lane; 
concerts  divers,  183.  —  Grand  mteting  annuel  des 
Charitij  Childrcn,  191.  —  L'Afiicaine  h.  Covent-Gar- 
den ;  grand  l'estival  triennal  de  Haendcl,  199,  207.  — 
Mlle  Schneider  dans  ta  Grande- Duchesse  au  théâtre 
Saint-James,  206.  — Représentations  et  concerts,  215. 

—  Correspondance  de  C.  L.  Gruneisen  :  Représenta- 
tion du  Domino  noir  â  Covent-Garden,  237. —  Mariage 
d'Adelina  Patti  avec  le  inarqi  is  de  Caux,  246.  —  Re- 
présentation de  clôture  à  Covent-Garden,  au  béné- 
fice d'Adtlina  Patti;  rfpréstnt,ations  de  cltiture  de 
Her  Majesty's  Opéra,  2.'i7.  —  Concerts-promenades  du 
Fairy-Palace,  319.  —  Concerts  du  Palais-de-Cristal, 
sous  la  direction  de  M.  Matins,  327.  —  Ouverture  de 
la  saison  d'automne  â  Covent-Garden,  avec  Lucrezia 
Borcjio,  351.  —  Construction  d'un  nouveau  théâtre 
dans  le  Strand,  357.  —  Début  de  Mlle  de  Murska 
dans  Lvcia,  367.  —  Concerts  populaires  de  Saint- 
James  Hall,  375.  —  Représentation  de  Dinorah  à 
Covent-Garden,  et  de  lu  Grande-Duchesse  au  Sten- 
dard,  384. 

Madrid.  —  Arban  et  son  orchestre  au  théâtre  des  Jo- 
vellanos,  159.  —  Représentation  de  la  Muette  au  bé- 
néfice des  blissis  d'Alcoléa,  335.  —  Reprise  de  l'Afri- 
caine, 351.  —  Début  de  Mme  (jueymard  dans  le 
Troralore,  359.  —  Représentation  de  la  Grande-Du- 
chesse aux  Bufos  Ardenius,  375. 

Magdebourg.  —  Représentation  de  lUro  el  Léandre, 
opéra-comique  de  ^V.  Steinhart,  79. 

Manchester.  —  Représentation  de  la  Grande-Duc.hcsse, 
167.  —  Accident  arrivé  dans  une  salle  de  concert. 
255. 

Mannheiu.  —  Représentation  du  Voisinage  dangereux, 
opérette  nouvelle  de  Langer,  207.  —  Repiise  de  l'A- 
fricaine, 280. 

Milan.  —  Représentation  de  la  Camurgo,  ballet  nou- 
veau de  Monplaisir,  23.  —  Représentation  de  Pielro 
da  Padova,  opéra  nouveau  de  Fioii,  72.  —  Représen- 
tation de  Biahma,  ballet  de  Monplaisir,  79.—  Repré- 
sentation de  Mefistofete,  opéra  nouveau  d'A.  Boiio, 
96.  —  Embarras  ûe  la  Scala,  247.  —  Représentation 
de  la  Grande-Duchesse  au  théâtre  de  Santa-Rade- 
gonda,  294:  —  Ouverture  du  Carcano  avec  Dinorah, 
295,  311.  —Brochure  du  directeur  Lamperti  relative  à 
la  dotation  du  Grand-Théàlre,  357.  —  Programme  de 
la  Scala,  415 . 

MoNS.  —  Représentation  de  l'Etoile  du  Nord,  72. 

Moscou.  —  Début  de  Mlle  Artot  dans  Faust,  143.  -- 
Représentation  â  son  bénéfice,  166. —  Représentations 
brillantes  du  théâtre  Italien,  357,  365.  —  Début  de 
Mlle  Sarolta  dans  Don  Giovanni,  399.  —  Représen- 
tation de  Faust  au  bénéfice  de  Mlle  Artôt,  407,  414- 

Munich.  —  Représentation  des  Maîtres  chanteurs  de 
Nuremberg,  opéra-comique  en  trois  actes,  de  Richard 
\Vagner,  art.  de  Ch.  Banuelier,  205-210.  —  Représen- 
tation du  Manteau  rouge,  opéra-comique  de  Krem- 
peisefzer,  415. 

Naples.  -  Programme  du  Théâtre  San  Carlo,  319.  — 
Ouverture  de  ce  'i  héâtre  avec  Jone,  opéra  nouveau  de 
Pétrella,  359. 

New-York  .  —  Ouverture  du  Théâtre  Pike,  55.  —  Re- 
préseniation  des  Dragons  de  Villars,  175.  —  Repré- 
sentations de  l'Opéra-bouffe  Français,  254  —  liarbe 
Bleue  et  la  Grande-Duchesse,  325.  —  Début  de  miss 
Kellogg,  358. 

Oldenbourg.  —  Grand  festival  des  Sociétés  chorales  de 
l'Allemagne  du  Nord,  263. 

Pesth.  —  Représentation  des  Zrinyi,  opéra  nouveau 
d'Adelburg,  215,  223, 


Pmi.AOELPeiE.  — Représentation  do  la  Grande- IJucliesse, 

199. 
Phacue.  —  Représentation  de  la  Cronde  Viicliesse,  39. 
—  Représentation  de  lins  Kaelhchen  von  Iffilbronu, 
opéra  noincau  de  Jaffé,  119.  —  Représentation  de 
Ain  Itiiiieins/ein,  opéra  nouveau  de  MM.  de  Flotow 
et  R.  Gênée,  127,  1.35.  —  Représentation  dn  Dniibor, 
opéra  nouveau  de  Smolana,  175.  —  Mlle  Yilali  dans 
le  Pardon  de  Ploermel,  303.  —  Représentation  au 
Théâtre  Tchfci|ue  de  la  Fiancée  Jlussile,  opéra  nou- 
veau de  Seiror,  :M3. 

Rio-i)E-jANEino.  —  Représentation  de  la  Grandc-Du- 
c/icsse,  102. 

Rome.  —  Représentation  de  la  Tombola,  opéra  nouveau 
de  Cagnoni,  39  —  Représentation  de  la  Grande-Du- 
c/iessi\  78.  —  Représentation  de  Dinorah  au  théâtre 
Arfrentina,  375. 

SAiNT-PiÎTPiisniiuiio.  —  Concerts  dirigés  par  Berlioz,  15. 

Ri'prespnuuions  de  Pauline  Lucca,  Ï|7.  — Ovations 

laites  à  iMlles  Lucca  et  Granlzofî,  63.  —  Prcgrammedu 
Théâtre  italien,  103.  —  Exécution  de  la  symphonie 
héroîi|tie  Jeanne  d'.-IccdeA.  Holmes,  1/i3. —  Représen- 
tation dn  liai  Canrlaale,  ballet  de  MM.  de  St-Georges, 
Marius  Petipa  et  Pugni  ;  F/eur  de  TM  au  théâtre 
Michel,  357.  —  Représentation  de  Lohengrin,  367.  — 
liéouverture  du  théâtre  italien  par  Maria,  38i.  — 
Rentrée  de  Mlle  P.  Lucca  dans  Don  Juan  et  dans 
l'Africaine,  lilô . 

Solf.uhe.  —  Fêles  fédérales  suisses,  2i6. 

Spa.  —  Programme  de  1".  saison,  li3.  —  Premier  con- 
cert, 247.  —  Grands  concerts  à  la  Redoute,  203,    295. 

Stottcabd.  —  Reprise  de  l'Africaine,  31.  —  Exécution 
A' Elle,  oratorio  de  Michel  Costa,  359. 

Tkèves. —  Représentation  de  l'Africaine,  79. 

Trévise.  —  Incendie  du  T/téûtre  sociale,  326. 

Trieste.  —  Représentation  de  Fiamclta,  ballet  nouveau 
de  Saint-Léon,  95. 

Tdbin.  —  Incendie  du  Théâtre  Alberto-Nota,  230.  — 
Réouverture  de  la  saison  avec  Dinorah,  335,  —  Re- 
présentation de  Gli  arlisli  alla  Fiera,  opéra  comique 
de  L.  Rossi,  au  théâtre  Carignan,  375.  —  Représenta- 
tion de  Un  Fallo,  ballet  nouveau  de  Rota,  39]. 

Venise.  —  Représentation  de  l'Africaine,  81. 

Vienne.  —  Représentation  de  Lucifer,  opérette  de  S. 
Duniecki,  au  théâtre  An  derVien,15.  —  Représenta- 
tion de  Nana-Sahib,  ballet  nouveau  d'H.  Desplaces,  23. 

—  Représentation  de  Madame,  la  maîtresse,  opérette 
de  Suppé,  et  de  la  Somnambule,  opérette  de  Zaytz, 
30.  —  Représentation  de  Roméo  et  Juliette,  de  Gou- 
nod,  55.  —  Représentations  dn  ténor  Sontheim  ,  143. 

—  Réouverture  de  l'opéra  avec  Guillaume  Tell,  223. 
Constitution  de  la  Sociéié  des  auteurs  et  compositeurs 
allemands,  263.  —  Début  de  Mlle  Gindele  dans  l'A- 
fricaine, 263,  —  Début  de  Mlle  Salvioni  dans  le  Dia- 
ble amoureux,  279.  —  Premier  jubilé  de  l'orphéon 
Viennois,  343.   —  Représentation  de  Mijnon,  351. 

Weimar.  —  Représentation  des  Héros  du  Nord,  nouvel 

opéra  de  C.  Gcetze,  31. 
Wiesbaden.  —   Représentation   du  Prophète  et  concert, 

223.  —  Concert  en  l'honneur  du  roi  de  Prusse,  271. 
WoBHS.  —  Inauguration  du  monument  de   Luther,   223. 

H 

Hommages,  décorations  et  récompenses 

accordés  aux  artistes. 

(  Voyez   aussi    Nominations.) 

Arban,  décoration  d'Isabclle-la-Catholique,  d'Espagne, 
198. 

Arditi,  décoration  d'officier  du  Medjidieh,  de  Turquie, 
262. 

Bagier,  décoration  de  l'ordre  des  Saints  Maurice  et 
Lazare,  d'Italie,  62. 

Capoul,  décoration  d'officier  du  Nischam,  de  Tunis.  287. 

Caire  M.),  décoration  de  l'ordre  de  la  Légion  d'hon- 
neur, 270. 

Choudens,  décoration  de  l'ordre  de  Gustave-Wasa,  de 
Suède,  23. 

Dauverné,  décoration  de  l'ordre  de  la  Légion  d'honneur, 
270. 

Elwart  (A.),  médaille  d'argent  offerte  par  le  départe- 
ment de  la  Seine-Inférieure  254. 

Gautier  (E.),  décoration  de  l'ordre  de  la  Légion  d'hon- 
neur, 270. 

Gérard  (E.),  décoration  de  l'ordre  de  Charles  III,  d'Es- 
pagne, 174. 

HainI  (G.),  décoration  de  l'ordre  de  la  Légion  d'hon- 
neur, 270. 

Lachner  (F.),  décoration  de  commandeur  de  l'ordre  du 
mérite  de  Saint-Michel,  de  Bavière,  55. 

Le  Couppey  (F.),  décoration  de  commandeur  de  l'ordre 
du  Lion  de  Perse,  183. 

Massé  (V.),  décoration  de  l'ordre  de  Charles  III,  d'Es- 
pagne, 30. 

Masset  (J.-J.),  décoration  de  l'ordre  de  Gustave-Wasa, 
de  Suède,  415. 

Mercadante,  décoration  de  l'ordre  du  Mérite  d'Italie, 
287. 

Méreaux  (A.),  décoration  de  l'ordre  de  la  Légion  d'hon- 
neur, 183. 

Roger,  grande  médaiUe  des  Arts  et  Sciences,  décernée 
par  l'empereur  d'Autriche,  23. 

Rossini,  décoration  du  grand-cordon  do  l'ordre  de  la 
Couronne,  d'Italie,  143. 

Saint-Saéos  (C),  décoration  de  l'ordre  de  la  Légion 
d'honneur,  270. 

Sivori  (C.),  décoration  de  l'ordre  de  la  Couronne,  d'Ita- 
lie, 318. 

Stoltz  (Mme  R.),  décoration  de  l'ordre  du  Mérite,  de 
Saxe,  318. 


TABLE  ANALYTIQUE  DES  MATIERES. 

Strakosch  (Maur.),  décoration    d'officier  du  Medjidieh, 

de  Turquie,  374. 
Thomas  (A.),  décoration  do  commandeur  de   l'ordre  de 

la  Légion  d'honneur,  254. 


Jarisprudencc   artistique,  scicnfiflque 
et   théâtrale. 

Jugement  de  la  Cour  impériale  relatif  ù  Mme  Monbelli, 

ô. 
Jugement  de  la    Cour  impériale  de  Rennes,  confirmant 

la  jurisprudence  relative  aux  droits  d'autoris.ation  des 

composiieiirs  do   musique  pour    l'exécution    de  leurs 

œuvres,  8. 
Jugement  du  Tribunal   correctionnel  d'Arras    dans  une 

action  intentée  par  la  Société  des  sutcurs  dram.aiiques 

contre  la  musique  des  amateurs,  118. 
Arrêt  du  Tribunal  civil  relatif  aux  billets  de  faveur  dans 

les  théâtres,  174. 
Arrêt  du  Tribunal  civil  de  la   Seine  (1"  chambre)  dans 

le  procts  intenté  par  M.  Blaze  de  Bury  aux   héritiers 

Meyerbeer,  à  propos  de  la  Jeunesse  de  Gœthe,   plai- 
doiries, 273,  281. 
Arrêt  de  la  Cour  impériale  dans    un  appel  relatif   à  la 

contrefaçon  d'objets    d'art;  application    de   la  loi  sur 

la  propriété  littéraire  et  artistique,  356. 
Jugement  du  Tribunal   de  première   instance    dans   un 

procès  entre   la  direction  des    théâtres  impériaux  de 

Russie  et  le  ténor  Fraschini,  414. 


Iiettres . 

H.  Berlioz  à  un  ami,  20. 

Otto  Nicolai  à  son  ami  M.  deFilippi,  46. 

M.  Fétis  père  au  directeur  du  journal,  à  propos  de  M. 
Edouard  Monnais,  84. 

M.  N.  Noetinger  aux  membres  de  l'Association  des  so- 
ciété chorales  d'Alsace,  au  sujet  de  G.  Kastner,  115. 

Roger  â  H.  de  Pêne,  â  propos  de  son  engagement  à  la 
Porte-Saint-Martin,  270. 

F.  A.  Gevaërt,  au  directeur  du  journal,  à  propos  d'une 
note  de  M.  Fétis,  404. 

liiltérature  musicale. 

Histoire  de   la  musique    instrumentale  (suite),   art.  de 

Maurice  Cristal,  17,  65,  73,  113,  129. 
Du  nouveau  en  musique,  art.  d'Ed.  Fétis,  25. 
Les  droits  des  auieurs  (suite),  par  Thomas  Sauvage,  49, 

66,  169,  201,  211,  219,  226,  258. 
Les  théâtres  lyriques  secondaires  à  Paris  depuis  1820, 

art.  d'A.  Pougin,  106,  203,  228,  243,  259,  263,   290, 

299. 
Songe  de  Ch.-M.  de  Weber  écrit  par  lui-même,  257. 
La  critique  musicale,  par  Mathieu  de  Monter,  289. 
Armide,  étude  par  A.  Thurner,  305,315. 

M 

Slnsiiiae  militaire. 

Dernier  concert  de  la  garde  de  Paris,  318. 

SInsiqne  religieuse. 

MESSES,  ORATORIOS,    SOLENNITÉS   RELIGIEUSES, 
ORGUE. 

Inauguration  du  grand  orgue  de  Notre-Dame,  recons- 
truit, 79, 85,  95. 

Messe  de  Weber,  exécutée  à  Notre-Dame  par  l'Associa- 
tion des  artistes  musiciens,  102. 

Messe  solennelle  du  prince  Poniatowski  à  Saint-Eusta- 
che(2«  audition),  102. 

Audition  du  Jugement  dernier,  oratorio  de  J.  Duprez, 
art.  d'A.  Gouzien,  106. 

Solennités  religieuses  de  la  seaiaine  s.ainte,  118. 

Les  Se/it  paroles  du  Chri.il,  oratorio  de  Th.  Dubois  ; 
Stabat,  de  Palestrina,  exécuté  par  plusieurs  sociétés 
chorales;  Messe  solennelle,  de  Fr.  Schwab,  à  Saint- 
Eostache;  La  Création,  d'Haydn,  exécutée  par  le 
Lieder-Kranz  de  Paris,  art.  de  Mathieu  de  Monter, 
121. 

Exécution  du  Stabat  â  la  chapelle  des  Tuileries,  125. 

Rapport  adressé  au  ministre  des  cultes  sur  la  recons- 
truction du  grand  orgue  de  l'église  Notre-Dame,  131. 

Visite  au  grand  orgue  par  les  délégués  des  sociétés  sa- 
vantes de  France,  134. 

Exécution  de  la  6°  messe  solennelle  d'A.  Leprévost,  à 
Notre-Dame  de  Bonne-Nouvelle,  141. 

Première  communion  du  Prince  Impérial,  à  la  chapelle 
des  Tuileries,  art.  signé  A.  E.,  148. 

Messe  de  Ch.  Vervoitte  exécutée  à  l'église  de  Saint- 
Cloud,  173. 

Application  de  l'électricité  aux  grandes  orgues,  à  propos 
du  grand  orgue  de  la  nouvelle  église  Saint-Augustin, 
art.  de  Mathieu  de  Monter,  180. 

Bénédiction  solennelle  de  cet  orgue,  198. 

Audition  des  grandes  orgues  de  Notre-Dame  par  les 
membres  de  l'Association  scientifique  dn  France,  222. 

Solennité  religieuse  à  l'institution  impériale  des  Jeunes 
Aveugles,  238. 

Distribution  des  prix  à  l'Ecole  de  musique  religieuse 
Niedermeyer,  246. 

Inauguration  du  grand  orgue  de  la  nouvelle  église  pa- 
roissiale de  Saint-Denis,  271,  219. 

Inauguration  d'un  nouvel  orgue  à  l'église  Saint-Ambroise, 
334. 


Messe  de  Sainte-Cécile,  d'A.  Thomas,  exécutée  à  Saint- 
fjiistache,  pour  la  fête  de  l'Associ.ition  des  artistes 
musiciens.  —  Messe  de  Sainte-Cécile ,  de  Mme  de 
Gramlval,  à  Sainte-Geneviève,  art.   signé  M.  M.,  388. 

Société  des  oratorios,  sous  la  direction  de  J.  Pasdeloup: 
l"    e.'iécution,    au    Panthéon  :    la  Passion,  de  J.-J. 
Bach  ;  Ode  à  sainte  Cécile,  de  Haendel,  art.  de  Ma- 
thieu do  Monter,  145. 
2"  exécution,  157. 

N 
Xôcrologie. 


Alsaniello    (Mlle  E.),  247. 

Arban  père,  95. 

Artois      de      Bournonville 

(A.  d').  398. 
Barrez,  390. 
Barsotti,  111. 
Barthélémy,  55. 
Béquignolles  (de),  7. 
Ber  (E.;,  203. 
Berwald  (F.),  151. 
Bessems  (A.).  343. 
Blanchard  (Mlle),  297. 
Blaquières  (P.),  126. 
Bocquillon,     art.     nécrol. 

par  T.  Sauvage,  20. 
Bovery  'J.j,  239. 
Brendel,  390. 
Calderon,  359. 
Challiot,  351. 
Chevé    (Mme    veuve    E.>, 

215. 
Cicéri  père,  279. 
Conti  (C),  255. 
Cotta  (J.),  lis. 
Cruvelli  (Mlle  M.),  255. 
Dauprat  (L.  F.),  255. 
Delavigne  (G.),  359, 
Deleurie  (L.),  263. 
Desnoyers  (L.),  407, 
Ducis  (Mme  L.),  39. 
Duponchel,  118. 
Eberwein  (C),  103. 
Empis,  407. 
Epagny  (V.  d'),  367. 
Favarger  (R.),  287. 
Ferrand  (H.),  311. 
Franck  (li.),  103. 
Franck-Marie,  15. 
Ganz  (M.),  39. 
Gaspérini  (de),  135. 
Gaudonnec  fils,  143. 
Gide  (CI,  62. 
Harrison  (W.),  374. 
Hauptmann  (M.),  15. 
Hugo  (Mme  V.),  279 
Hûttenbrenner  (A.),  297. 
Ketterer  (.Mme),  325. 
Kistner  IJ.),  175. 
Kittl  (J.-F.),  255. 
Kolesowsky  (S.),  287. 
Kreutzer  (L.),  327. 
Kriiger  père,  158. 
Laborie    (le    docteur).    23. 
Lacombe    (Mme  L.),  280. 
Lacour  (Mme),  263. 
La  Madeleine  (S.  de),  237. 
Leduc  (A.),  199. 


Fétis 


Lemoine  (R.),  95. 

Lomagne  (J.),  271. 

Louis   I'',  roi  de  Bavière, 

79. 
Lover  (S,),  239. 
Margueritat  (R.),  31. 
Marck  (le  docteur),  31. 
Marque  (A.),  398. 
Mazrtti  (R.),  39. 
Mazilier,  107. 
Mercier  (J.),  87. 
Mévil  (C),  55. 
Michel  (Cam.),  239. 
Michel  (Marc),  87. 
Mitheli  (J.),  407. 
Monnais  (E.),  68. 

Ses  obsèques,  69. 

art.    nécrol.    p&.r 

père,  75. 
Monpou  (Mme  veuve),  135. 
Montoriol,  5ô. 
Morelly  (L.l,  287. 
Mouravieff  (Mlle),  359. 
Naum  (M.),  223,  302. 
Paulowna  'Anna)  Frarevna, 

de  Géorgie,  71. 
Péronnet,  279. 
Pillet  (L.),  102. 
Ponchard  (Mlle  J.),  55. 
Prémaray  (J.  de),  191. 
Prumier  (A.),  31. 
Reinecke  (Aime),  287. 
Remack  (E.).  398. 
Ronzoni,  398. 
Rossini  (note),  371. 

Ses  funérailles,    art.    de 

Mathieu  de  Monter,  367, 

381. 
Ryan  (D.-H.l,  398. 
Schnyder     de     Warlensée 

(X  ),  287. 
SchrœdRr  (Mme  S.),  87. 
Simon  (F.-J.),  374. 
Simrock  (N.),  415. 
Stigelli,  223. 
Taglioni  ,S.),  335. 
Tromba  (Mlle  A.),  247. 
Ugalde  (Mlle),  135. 
Van-Eyken  (J.-A.),  335. 
Viennet,  231. 

Vieuxtemps    (Mme),     207, 
Vieyra  (A.),  215. 
Vitali  (Mme),  118. 
Walewski  (le  comte),  219. 
Wurtemberg   (le  prince  E. 

de),  359. 
Zabalza  (A.),  62. 


IVominati  ons. 

Baille  (G.),  comme  directeur  du  Conservatoire  de  Per- 
pignan, 326. 

Baneux  (G.),  comme  sous-chef  de  musique  de  la  5"  sub- 
division de  la  garde  nationale,  30. 

Beauplan  (A.  de),  comme  commissaire  impérial  près  les 
théâtres  lyriques  et  le  Conservatoire,  78. 

Cabanis,  comme  inspecteur  des  théâtres  des  départe- 
ments, 30. 

Dessane,  comaie  organiste  du  choeur,  à  Saiut-Sulpice, 
158. 

Dubois,  comme  maître  de  chapelle  de  la  Madeleine, 
374. 

Eigenschenck,  comme  officier  d'.Vcadémie,  294. 

Ferrand  (E.),  comme  chef  du  bureau  des  théâtres,  au 
ministère  de  la  maison  de  l'Empereur,  30. 

Fissot  (H.),  comme  organiste  de  Saint-Merri,  151. 

Gautier  (T.),  comme  bibliothécaire  de  S.  A.  I.  la  pria- 
cesse  Mathilde,  351. 

Hess  (H.),  comme  maître  de  chapelle  de  la  cathédrale 
de  Nancy,  414. 

Hurand,  comme  officier  d'Académie,  113. 

Jancourt,  comme  capitaine  de  musique  de  la  5=  subdi- 
vision de  la  garde  nationale,  6. 

Jonas  (E.),  comme  inspecteur  général  des  corps  de  mu- 
sique de  la  garde  nationale  de  la  Seine,  6. 

Pasdeloup,  comme  directeur  privilégié  du  théâtre  Lyri- 
que impérial,  278. 

Id.     comme  officier  d'Académie,  279. 

Thibaut,  comme  capitaine  de  musique  de  la  2"  subdivi- 
sion de  la  garde  nationale,  6. 

O 
Orphéons. 

Festival  donné  au  cirque  de  l'Impératrice,  par  l'Associa- 


4 

tion  des  sociélc's  chorales  de  Paris   et   du  départe- 
ment de  la  S^ine,  60. 

Médailles  distribuées  par  le  préfet  de  la  Seine ,  à  la 
suite  du  concours  ouvert  pour  la  composition  de 
chœurs  sans  accompagnement,  l^^  ■ 

Séance  solennelle  de  l'Orphéon  de  Paris  (rive  gauche), 
article  de  Mathieu  de  Blonter,  99. 
Séance  annuelle  de  la  Société  chorale  d'amateurs,  141. 

Séance  solennelle  de  l'Orphéon  de  Paris  (rive  droite), 
art.  de  Matliieu  de  Monter,  146. 

Concours  choral  et  instrumental  à  Melun,  art.  d'A.  EI- 
wart,  156. 

Concours  d'Orphéons  à  Choisy-le-Roi,  206. 

Concours  d'Orphéons,  de  Fanfares  et  de  Musiques  mili- 
taires à  Senlis,  art.  d'A.  Ehvart,  229. 

Concours  de  musique  entre  les  écoles  communales  de 
la  ville  de  Paris  dirigées  par  M.  F.  Bazin,  2(i6. 

Concert  de  la  Société  choiale  des  Enfants  de  Saint- 
Denis,  318. 

Concert  donné  à  la  salle  Dourlens  par  quatre  sociétés 
chorales  allemandes  de  Paris,  414. 


Questious  arliiitiiiues,  miusicaJcB 
et  théâtrales. 

Concours  pour  la  composilion  d'un  poëme  d'opéra,  75. 

Election  d'un  jury  pour  ce  concours,  100. 

Rapport  de   la  rommissioii  instituée  par  le  ministère  de 

la  maison  de  l'Empereur  pour  juger  les  poèmes,  123. 
Avis  relatif  à  la  délivrance  du  poëme,  141. 
Nouveau  traité  intervenu  entre  la  direction  de  l'Opéra- 

Comique  et   la   Société   des  auteurs   et    compositeurs 

dramatiques,  222. 
Concours  pour  la  mise  en   musique  de  l'opéra-comique 

le  Flurtnlin,  229,  254. 
Reconnaissance  du  traité   international    pour  les  droits 

de  propriété  des  auteurs  français,  par  la  Hongrie,  229. 
Vote  des  subventions  théâtrales  par  le  Corps  législatif, 

238. 
Constitutions  du  jury  pour  le  concours   de  l'Opéra-Co- 

mique, 332 . 
Nomination  des  jurys  pour  le  concours  du  théâtre  Lyri- 
que impérial,  366,  373,  40f'. 


IKcvue  critique. 

L'acoustique,  ou  Les  phénomènes   du  son,  par  R.    Ra- 

dau,  art.  d'Arthur  Pougin,  19. 
Le  trésor  des  pianistes  (11»  et  12°   livraisons),  art,  de 

Fétis  père,  4^. 
La    musique    ta-]jliquée  aux    gens  du  monde,    par  A. 

Meliot,  art.  de  Maurice  Bourges,  51. 
Galerie   des    musiciens  célèbres   anciens  et   nouveaux, 

92. 
Compositions  diverses  d'E.  Stœger,  art.  signé  C.  B.,  98. 
Un  nouveau  système  d'acoustique  musicale,  par   M.  G. 

Bertrand,  art.  d'A.  Pougin,  108. 
La    musique  et  l'amour,    pai  A.    de   Lasalle,   art.   de 

Mathieu  de  Monter,  140,  164. 
Chœurs    suédois    et  nurrégiens,  à  quatre    parties  pour 

voix  d'hommes,  art.  de  Maurice  Bourges,  154. 
■  Un  livre  incomplet,  art.  d'A.  Pougin,  156. 
Etudes  pratiques  de  sli/le  vocal,  par  S.  de  la  Madelaine, 

art.  de  A.  Pougin,  171. 
La  notation  de  la   musique   classique  comparée  à  la 

notation  de    la  musique    moderne,   etc.,    par   M.  E. 

Deldevez;  De  l'émission  de  la  voix,  par  Jules  Lefort, 

art.  d'A.  Pougin,  181. 
La  musique,  le  théâtre   et  la    danse,  à  l'exposition  des 

Beaux-Arts  (salon  de  1868),  art.  de  Mathieu  de  Mon- 
ter, 185. 
Bellini,  sa  rie,  ses  œuvres,  par  A.  Pougin,  art.  de  Ma- 
thieu de  Monter,  220. 
lUisères  d'un  prix   de   Rome,  par  A.  Second,   art.   de 

Mathieu  de  Monter,  235. 
Lettre  allemande  stir  la   musique  française,  par  Szar- 

vady,  244. 
Les  étoiles  du  c/iant  (Adelina  Patti),  par  Guy  de  Char- 

nacé,  art.  de  Mathieu  de  Monter,  250. 
Etude  en  taniineiir,  de  Mcndelssohn;  Tzigane,  marche, 

souvenir  de  Hongrie,  par   D.  Magnus;  Gavotte,  par 

Ch.  Lecoq  ;  Ma,  par  Martin  de  Fontaine,  pour  piano, 

261. 
Abrégé  du  système  d'acoustiqiie  musical  de  Belmholtz, 

par  E.  Mach,  art.  de  C.  Bannelier;  Adagios  de  Beethoven, 

transcrits  par  F.  Brisson,  292. 
Phénomènes  musicaux-pliysiologiqucs,  par  Ch.  Meerens, 

art.  signé  C.  D.  G.,    300. 
Chœur    des     Evèques,    de    l'Africaine,    transcrit    pour 

piano,  par    J.    Baur;    fantaisie    sur    l'Africaine,  par 

Teresa  Carreno  ;    trois  morceaux  de  concert,  par  E. 

Stœger;  Murmures,  nocturue    pour   piano  et  si  vous 

n'avez    rien  à  me    dire,    pour    le  chant  par  C.  A. 

Palmer;  le  Message,  mélodie  pour    piano   par   J.   P. 

Goldberg;    fantaisie  sur  les  Dragons  de  f'illars,  par 

J.    B.    Duvernoy;    fantaisie    sur  le  même  opéra   par 

E.  Ketteier,  355. 
La  musique  de  la  Périchole,  art.  de  P.  Bernard,  412. 


Théâtres  lyriques  de  Paris. 

OPÉRA. 

Sérénade  donnée  à  Rossini  par  les  artistes  de  l'Opéra,  à 
l'occasion  de  la  500=  représentation  de  Guillaume 
Tell,  53. 

Début  de  Maurel  dans  le  Trouvère,  78. 


TABLE  ANALYTIQUE  DES  MATIERES. 

Première  représentation  à'Hamlel,  opéraen  cinq  actes, 
musique  de  M.  Ambroise  Thomas,  art.  de  Paul  Ber- 
nard, 81. 

Rentrée  de  Mlle  Granzow,  dans  le  Corsaire,  126. 

Représentation  au  bénéfice  de  la  caisse  des  pensions  de 
retraite,  142. 

Rentrée  de  Mme  M.  Sass  dans  Don  Juan,  150. 

Représentation  extraordinaire  au  profit  de  la  Caisse  de 
secours  des  acteurs  et  compositeurs  dramatiques,  150. 

Début  de  Mazzoleni  dans  le  Trouvère,  166. 

Reprise  A' Herculanuni ,  de  F.  David,  art.  de  Paul  Ber- 
nard, 209. 

Début  de  Mlle  J.  Hisson  dans  le  Trouvère,  230. 

Représentation  gratuite  du  15  août  ;  l'Hymne  de  Ros- 
sini, 261,  ï69. 

Rentrée  de  Mlle  M.  Battu  dans  Berculanvm,  301. 

Devoyod  dans  le  rôle  de  Guillaume  Tell,  350. 

Reprise  des  Huguenots,  art.  de  E.  de  Rauze,  361,  373. 

Mme  Carvalho  dans  les  Huguenots,  art.  d'E.  de  Rauze, 
377. 

Représentation  solennelle  de  Guillaume  Tell,  à  la  mé- 
moire de  Rossini,  389. 

OPÉRA-CUMIQUE. 

Première  représentation  du   Premier  Jour  de  bonheur, 

opéra-comique  en  trois  actes,  musique  d'Auber,    art. 

de  Paul  Bernard,  57. 
Début  de  Hayet  dans  Zampa,  78. 
Représentation  au  bénéfice  de  la  Caisse  de  secours  de  la 

Société  des  auteurs  dramatiques,  94. 
Reprise  de  la     Part  du  Diable,  art.  de  Maurice  Gray, 

97. 
Picmière  représentation  de  Mademoiselle  Sylvia,  opéra- 
comique  en  un  acte,   musique   de   M.  Samuel  David, 

art.  de  Paul  Bernard,  121. 
Reprise  des  ]'oilures  versées,  142. 
Première  représentation  lu  Pénitente,  opéra-comique  en 

un  acte,  musi(|ue  de  Mme  deGrandval,  art.    de  Paul 

Bernard,  153. 
Première  représentation    (â  ce  théâtre)  des  Dragons  de 

Vilturs,     opéra-comique    en     trois    actes,    musique 

d'Aimé  Maillarl,  art.    de  Paul  Bernard,  117. 
Reprise  du  Docteur  Mirobolan,  222,  230. 
Représentation  gratuite  du  15aoilt;  la  Honnc  Moisson, 

cantate  de  M.  Chariot,  261,  269,  271. 
Début  de  Mlle  Guillot  dans  le  Chalet,  356. 
Première  représentation  du  Corrlcolo,  opéra- comique  en 

trois    actes,    musique  de   M.   Ferdinand  Poise,   art. 

de  Paul  Bcrnaid,  385. 
Représentation  au  bénéfice  de  Mme  Ugalde,  413. 

THÉÂTRE  IMPÉRIAL  ITALIEN. 

Reprise  de  la  Gazza-Ladra,  21. 

Grand   concert  donné    par  la  Société  italienne  de  bien- 
faisance, 29. 
Première    représentation   de  H    Temptario.  opéra-seria 

en    trois      actes,    musique    d'Otto    Kicolai,     art.     de 

Maurice  Gray,  33. 
Reprise  de  Don  Giovanni.  54. 
Reprise    de  Malilda    di  Shabran;   débuts  de  M.  et  de 

Mme  Tiberini,  art.  de  Maurice  Gray,  84. 
Adelina  Patti  dans  le  Trovatore,  86. 
Première  représentation  de  Giovanna  d'Arco,  opéra  en 

quatre  actes,  musique  de  T.  Soléra,  art.  de  Maurice 

Giay,  105. 
Concert  spirituel  du  jeudi  saint,  117. 
Représentation  au  bénéfice  d'Adelina  Patti,  134. 
Première  représentation  de  la  Conlessiiui,   opéra  semi- 

spria  en    trois   actes,  musique    du    prince  J.    Ponia- 

touwski,  art.  de  Maurice  Gray,  137. 
Représentation  au  bénéfice  de  Mlle  Krauss,  142. 
Pi  ogranime  de  la  saison  nouvelle,  286. 
Réouverture  par  la  Lncia,    art.    signé  E.  R.,  313. 
Rigoletio;  Crispino  e  la  Comare,  art,  d'E.  deHauze,  321. 
Ld   Trariala,  art.  d'E.  de  Rauze,  330. 
La  Conlessina  ;    Maria  ;  Don  Pasquale,    art.    d'E-    de 

Rauze,  338. 
Lucrezia  Borgia,  art.  d'E.  de  Rauze,  355. 
Semiramide,  art.  signé  E.  R.,  378. 
Otello  ;  In  Serva  padrona,  art.  d'Elias  de  Rauze,  410. 
Adieux  d'Adelina  Parti,  414- 

THÉÂTRE  LYRIQUE  IMPÉRIAL. 

Première  représentation    de    la  Jolie   Fille  de   Perth, 

opéra  en  4  actes  et  5  tableaux,  musique  de  M.  Georges 

Bizet,  art.  d'A.  Gouzien,  3. 
Reprise  de  la  Fanchonnette,  13. 
Soirée  d'inauguration  du  théâtre  de  La  Renaissance,  par 

Faust,  94. 
Roméo  et  Juliette  à  ce  même  théâtre,  110. 
Secours  accordé  aux   choristes  par   le   Ministère   de  la 

Maison  de  l'Empereur,  166. 
Prise  de  possession  du  théâtre  Lyrique   par  M.  Pasde- 

loup,  293. 
Personnel  et  travaux  artistiques,  301. 
Réouverture,  art.  d'A.  Gouzien,   345. 
Reprise    du    Barbier  de  Séville;  début  de  M.  Aubéry, 

357. 
Reprise  à'îphigénieen  Tauride,  de  Gluck,  art.  de  Paul 

Bernard,  379. 
Reprise  du  Maître  de  Chapelle,  405. 
Reprise  du    Brasseur  de   Preston,  d'A.  Adam,  art.  de 

P.  Bernard,  409. 

BOUFFES-PARISIENS. 
Réouverture  :   l'A:r<:he  Marion,  opérette  de  M.  Adolphe 

Nibelle;    le    Fifre    enchanté,    opérette    d'Offenbach; 

l'Ile  de  Tulipalan,  opérette  du  même,  art.  d'Elias  de 

Rauze,  313. 
Reprise  des  Deux  Aveugles,  342. 


Reprise  de  la  Chanson  de  Forlunio  et  de  Jeanne  qui 
pleure  et  Jean  qui  rit;  rentrée  de  Désiré,  357. 

Petit  Bonhomme  vit  encore,  opéra-comique  en  deux 
actes,  musique  de  L.  Defl'ès,  art.  signé  D.,  411. 

FANTA ISIES-PARISIENNES . 

La  Croisade  des  Dames,  opéra-comique  en  un  acte,  de 
François  Schubert;  l'ÉUjAr  île  Cornélius,  opéra-co- 
mique en  un  acte  de  M.  Em.  Durand;  reprise  du 
Farfadet,  d'Ad.  Adam,  art.  signé  D.,  41. 

Roger  llonlemps ,  opéra- comique  en  deux  actes,  de 
M.  Debillemont,  art.  signé  D.,  91. 

Reprise  du  Midetier,  d'Hérold,  101. 

Le  Barbier  de  Séville,  de  Paësiello,  art.  signé  D.,  163. 

L'Amour  mouillé,  opérette  en  un  acte,  musique  d'E.  de 
Bartog,  art.  signé  D  ,  178. 

Fermeture  annuelle,  198. 

Réouverture  par  le  Barbier  de  Séville,  art.  signé  M.  G., 
215. 

Le  Soldat  malgré  lui ,  opéra-comique  en  deux  actes, 
musique  de  F.  Barbier,  art.  signé  D.  A.  D.,  339. 

Reprise  de  la  Fêle  du  Village  voisin,  art.  signé  D., 
362. 

Reprise  de  Gilles  ravisseur,  art.  signé  D.,  411. 

THÉÂTRE  BE  L'ATHÉNÉE. 
L'Amour  et  son  carquois,  opéra-bouffe  en  deux  actes, 

musique  de  Ch.  Lecocq,  art.  signé  D.,  35. 
Fleur  de  Thé,  opéra-bouffe    en   trois  actes,  musique  de 

(h.  Lecocq,  art.  signé  D.,  122. 
Fermeture  annuelle,  206. 
Réouverture  par  Fleur  de  Thé,  286. 
Le  Petit  Poucet,  opéra-boufl'e  en  trois  actes,  musique  de 

Laurent  de  Rillé,  art.  signé  D.,  324- 
Le  Vengeur,  opéra-boufl'e  en  un  acte,  musique  d'Isidore 

Legouix,  art.  signé  D.,  380. 
Les  Horreurs  de  la  guerre,  opéra-bouffe  en  deux  actes, 

musique  de  M.  Jules  Cosié,  art.  signé  D.,  395. 

REVUE  DES  THÉ.4.TRES 
Par    D.-A.-D.    Saint-  Yves. 
12,  28,  36,  52,  75,  91,  114,  132,  149,  172,  189,  213,  237, 
^45,  268,  277,  292,  308,  332,  348,  372,  396. 

Au  théâtre   des  Menus-Plaisirs,   Geneviève  de  Brabant, 

opéra- bouffe  en   trois   actes  et  dix  tableaux,  musique 

de  J.  Offenbach,  art.  signé  D.,  5. 
Au  théâtre   de  Cluny,    Un  Cousin  de  retour  de  l'Inde, 

opérette  de  Bovery,  134. 
Au  théâtre   des   Jeunes-Artistes,    un    opéra-comique  de 

M.  Mailyns,  142. 
X\i  llu-âtru  du  Palais-Royal,  le  Château  à  Toto,  opéra- 
bouffe  en   trois   actes,   musique  de  J.  Offenbach,  art. 

signé  D.,  147. 
Au  théâtre  des  Variétés,   reprise  du  Pont  des  Soupirs, 

opéra-boufl'e  en  cinq  tableaux,   musique  d'Offenbach, 

art.  signé  D.,  148. 
A  l'Eldoiado,  \'énus  infidèle,  opérette  de  M.  L.  Roques, 

278. 
Aux  Menus-Plaisirs,  les  Croqwusesde  Pommes,  opérette 

eu  cinq  actes,  musique  de  L.  Deffès,  art.  de  Maurice 

Gray,  314- 
Aux  Variétés,  la  Périchole,  ipéra-bouffe  en  deux  actes, 

musique  de  J-  Offenbach,  art.  signé  D.  A.  D.,  322. 
Aux  Folies-Dramatiques,  Chilpéric,  opéra-boufl'e  en  trois 

actes,  d'Hervé,  art.  signé  D. ,  346. 
Aux  Folies-Marigny,   J(_nn    qui  pleure  et  Jean  qui  lit, 

opérette  de  Marc-Chautagne,  ;i57. 
Aux  Menus-Pluibirs ,  le  Grand  Duc  de  Matapa,  opéra- 
bouffe  en  cinq  tableaux,  musique  de  M.  Debillemont, 

art.  signé  D.,  380. 

CONCERTS,  BALS  ET  SPECTACLES  DIVERS. 

Grand  Festival  donné  au  Casino,  par  Arban,  109. 

Ouverture  du  Jardin  Mabille,  135. 

A  l'Eldorado,  débuts  des  frères  Guidon,  150. 

Ouverture  du  Pré-Catelan,  151. 

Réouverture  du  Casino-Cadet,  310. 

Réouverture  de  l'Alcazar,  326. 

Concerts  d'Arban  à  la  salle  Valentino,  334.  —  Festival 

Meverbcer,  342.  —  Mme  Taroni,  366. 
Inaugurati'-n  des  Bals  du  Cirque  de  l'Impératrice,  374. 
Bals  de  l'Opéra,  415. 


Variétés. 

Revue  musicalp  de  l'année  1867,  art.  de  Em.  Mathieu 
de  Monter,  9. 

A  propos  de  la  Jeunesse  de  Goethe,  drame  de  M.  Blaze 
de  Bury,  45. 

Un  inconnu,  art.  d'A.  Pougin,  68. 

Une  séance  de  musi<iue  intime,  art.  de  L.  Kreutzer,  74. 

A  propos  d'une  erreur  commise  dans  la  distribution  des 
médailles,  à  la  suite  de  l'Exposition  internationale,  au 
détriment  de  Ph.  Herz  neveu,  172,  239,  396. 

Beethoven  à  Tœplitz,  267. 

Le  Chant  hturgique  au  monastère  de  la  Grande  Char- 
treuse (extrait  d'un  nouvel  ouvrage  de  M.  E.  Mathieu 
de  Monter,  297). 

Vl'achtel  et  le  Postillon  de  Lonjumeau,  art.  signé  XX., 
316. 

La  Périchole  (opinion  de  la  presse),  331,  340. 

L'Hymne  de  Riego,  art-  d'A.  Pougin,  341. 

Note  sur  un  poiut  de  l'histoire  de  l'Harmonie  et  de  la 
Tonalité,  art.  de  Fétis,  381. 

Catalogue  des  œuvres  posthumes  de  Rossini  (extr.  du 
Mémorial  diplomatique),  406. 


TABLE  ALPHABÉTIQUE   DES  NOMS. 


Abel  (MUeL.j,  123,  286. 

Abraham  (E.),  300. 

Achard  (L.),  97,   144,    214,   215, 

222,   201 
Accursi  (M.  et  Mme  R.),  191,  237, 

253,  302,  320. 
Adam  (A.),  41,  409. 
Adelburg  Id'),  63,  213. 
Adenis  (J.),  3. 
Agnesi,    21,    30,    35,   61,    84,  S6, 

107,  124,    125,   215,    239,   247, 

203,    280;   313,    322,  339,    370, 

3T8,  389,  41('- 
Alary  (G.),  117. 
Alboni   (Mme),  370. 
Alplioûsine  (Mlle),  147. 
Altbs,  374,  398. 
Ambioselli,  326. 
Ancoiia  (d'),  370,  383. 
Andréeff,  63. 
Aniigny  (Mlle  B.  d'),  347. 
Arbaa,  37,  95,  109,  143,  151, 159, 

191,   198,   255,    263,  302,    334, 

342. 
Archainbaud,  77,  93. 
Arditi,  175,  262,  358,  377,  391. 
Arnaud  (Mlle),  42. 
Arrouge-Sury  (M .  et  Mme  L.),  175 

Arsandaux,  164,  315,  362. 

Artois  de  Bournonville  (A  d'),398. 

Artot  (Mlle  D,),  15,  23,  31,  47, 
63,  72, '103,111,143,  159,  166, 
174,  191,  239,  247,  255,  263, 
271,  279,  294,  317,  327,  357, 
365,  407,  414. 

Artus  (A.),  318. 

Asantchewski  (d'),  109. 

Auber,  39,  57,  62,  97,  116,  148, 
233,  237,  244,  405,  411. 

Aubéry,  234,  270,  357,  380. 

Audran  (E.),  118. 

Audran  fils  (A.),  60,  78,  158. 

Auer,   311. 

Augier  (E.),   36,  270. 

Aurële,  381. 

Auzende,  2:î3. 

Avenel(P.),  195. 

B 

B«  (D.),  B. 

Bach,  215. 

Bach  (Les),  17. 

Bacqaié,  270. 

Baëtz  (E.),  246. 

Bagier,  33,  54,  6Î,  198,  270,  286, 

378. 
Baille  (G.),  320. 
Balakireff,  391. 
Baltard,  180. 
Baneux  (G.),  30. 
Barbier  (F.),  317,  333,  339. 
Barbier  (J.)  81. 
B:irbot,  01. 
Barbot(Mme),  397. 
Barker,  180. 
Baraolt,  164,  178,  411. 
Barré,  5,  94,  174,  178,  254,  255, 

386. 
Banez,  390. 
Barrière  (A.),  182. 
Barsctti,  111. 
Barth  (H.),  47. 

Barthe-B:inderali   (Mme),    53,   90. 
Baiiste  (E.),  198,  207,   279,   334, 

388. 
Batia  (A.),  255,  390. 
Battaille,  102,  182,  388. 
Battu  (Mlle  M.),   10,    29.  45,  92, 

100,  125,  150,    209,    222,    245, 

301,  350,  372,  389. 
Baudier  (Mlle),  6. 
Baunay  ((Mlle  de),  109,  334,  342. 
Baur  (J.j,  133,  301,  305,355,367. 
Bausewein,  211. 
Bayeux  (M.),  28, 
Bazin  (F.),  99,  246. 
Bazzini,  47,  135. 
Beaugrand  (Mlle),  362,  378, 
Beaiiplan  (A.  de),  78. 
Beck.-r  (J.)    31. 
Bédel  (Mlle  L.),  133. 
Bédora  (Mlle),  126,  230. 
Boer  (J.),  27. 
BOguin-Salomon    (Mme),   29,    93, 

lui,  374. 
Bélia  (Mlle),  97,  2)4,  230. 
Bell  de  La  Porrmcraye  (Mme  R.), 

21,   54.  81'.,    1.15,  134,  246,   262, 

327,  34^,  350,  306. 
Bellini,  220. 

Belval,  51,  83,  222,  302,  378. 
Bcnaben,  i30. 


Benati  (Mme),  357. 

Bénazet  (E.i,  7,  390. 

Bencteux,  111. 

Bender  (V.),  229, 

BiiiiiSdict  (I,),  207. 

Bennett  (W.  S.),  39. 

Beiiou,  3111. 

Bcnza  (Mlle),  167. 

Béquignolles  (de),  7. 

Bir  (E.),  203. 

Bergson  (M.),  231. 

Bériot  fila  (C.  de),  03, 

Berlioz   (II,),    15,   20,   46,   63,  87, 

116,  118,  175,  183,  238,  267. 
Berlyn  (A.),  30,  127,  167. 
Bernard      [de    l'Opéra-Comique], 

7,  286. 
Bernard  (P.),  60,  109. 
Bernardi,  254. 

Bernardin,  36,  123,  325,  380. 
Berthélemy,  55. 
Berthelier,  22,  102,  116, 125, 150, 

183,    230,    240,    279,    314,  342, 

411. 
Berton  (P.),  28. 
Bertrand  (G.),  108. 
Berwald  (F.),  151, 
Besekirski,   103,  280,  311,  375. 
Bessems  (A),  93,  231,  343. 
Bessin-Pouilley  (Mme),  02. 
Bettini  (Mlle) ,  247. 
Betz,  72,  211,  280,  293. 
Beumer,  398. 
Biancolini  (Mlle),  391. 
Biron,  141. 
Bischoffbheim,  11. 
BIzet  (G.),  3,  10,  174. 
Blanc  (A.),  7),  263,  374. 
Blanc  (C),  384. 
Blanchard  (Mme),  295. 
Blanche  (A.),  91,  99,  146. 
Blaquières  (P.),  127. 
Blau  (E  ).  123. 
Blaze  de  Biiry  (H.),  45,  238,270, 

273,  281,  364. 
Bléaii  (Mlle),  110,  294. 
Bloch  (Mlle),  85,  90.  93,  110,301, 

350,  370. 
Blondelet,  323. 
Blot-Dermilly    (M.    et  Mme),   70, 

117. 
Blum,  357. 

Boccherini,  19,  65,  113, 129. 
Boccolini,  351. 
Bock  (E.),  214. 
Bockhoitz  -  Falconi  (Mme),     207, 

318. 
Bo  quillon,  20. 
Boieldieu  (A.),  182. 
Boissier-Duran  (Mlle  C),  95. 
Boito  (A.),  96. 
Bonelli  (Mlle),  395. 
Bonewitz  (H.),  14,  45,  94,  125. 
Boniiehée,  3;0. 
Iloniiesseur,  90. 
Bonnet,  42,  164,  233,  411. 
lionnet  (G,),  91,  340,  411. 
Bonola  (G.),  247. 
Bord.'t  (Mlle),  134. 
Borghèse  (Mme  J.),  47,  311. 
Borjihi-Maino  (Mme),  23. 
Borri,  359. 
Boscowitz  (F.),  109. 
Bosquin,  38,  346,  370. 
Bossclct,  319. 
Bouché  (.\Ille  L.),  117. 
Bouctard   A.),  254. 
Boudias,  334. 
Boudié  (Mlle),  45. 
Bouffar  (Mlle  Z.),  5,  147,  294. 
Boulangeot  (Mme),  14. 
Boullard  (M.),  31,5. 
Boiirgault-Ducoudray,   118,    358, 

414. 
Bourgeois,  233. 
Bourges  (M,),  146,  147. 
Bovery  (J.),  134,  239. 
Brandt  (lllle),  152,  295. 
Brasseur,  147. 
Brendel,  390. 
Brière  (H),  383. 
Brignoli,  327. 
Brisebarre  (E.),  195. 
Brisson  (F.)  292,  315,  407. 
Brunet-Lalleur  (Mlle),  13,  97, 117, 

222. 
Brunetti,  73. 
Bruiietti    (Mlle),    190,    207,    215, 

247. 
Brunswik,  409. 
Brzowski  (J,),  239. 
r.ninw  fn,  (]<■•■.  l'il. 
Bulterini,  247. 
ISuonomo,  15. 
Buot  (V.),  202. 
Busch  (Mlle  de),  141. 


Rusnach  (W.),  35,  153. 
Bussine,  390. 
Bussmeyer,  53. 


Cabanis,  30. 

Cabel  (Mme  M.),  58,70,  214,222, 

254,  309,  386. 
Cagnoni,  39. 
Caillot,  380,  405. 
Calderon  (MmeD.),  li'O,  359. 
Calislo  (Mlle  M.',  391. 
Caillas  (Mlle  N.   de),  414. 
Callou  (A.),  236. 
Capoul,  580,  70,  76,  109,  222,254, 

287,  309,  398. 
Capurro,  151. 
Cariicciolo   (Mme  L.  ),    63,    239, 

Cariez  (J.),  81. 
C.arman,  415. 
Carron,    27,   93,   108,  124,  150, 

389. 
Carré  (M.),   81. 

Carreno  (Mlle  T.),   92,  223,  355. 
Carretier,  30Î. 
Carrier,  71,  134. 
Carrion,  87. 
Carrodus,  343. 
Carvallio,54,  61,78,  94,150,278, 

Casvallio  (Mme  M.)  13,  21,85,86, 
94,  100,  110,  134,  142,  159, 
215,  239,  255,  294,  378,  383. 

Casabon,  62. 

Casimir  (Mme),  142. 

Castel,  14- 

Castelraary,  84,  142. 

Caters  (Mme  la  baronne  de),  389. 

Caussemille  (Mlle  0.),  141. 

Caux  (Le  marquis  de),  238,  246. 

Cav.iillé-CoU  (A.),  85,  131,  134. 

Cave  (A.),  30. 

Cazat  (Mlle),  315,  362. 

Cazaux,  62,  332. 

Celentano  (L.),  7. 

Cervantes,  93. 

Challiot,  351. 

Chantepie,  124. 

Cliarle  (J.)    !229. 

Charlts  (a'.),  60,  101,  116,  151. 

Chariot,  201,  209. 

Charnacé  (G.  de),  231,  250. 

Chanon-Demeur  (Mme),  173,  182. 

Chautagne  (M.),  13,  357. 

Chauvet  (A.),  111,  370. 

Chevé  (Mme  V  E.),  215. 

Chopard-Chas^ant  (Mme),  6. 

Choudens,  23,  229 

Christian,  323,  341. 

Ciampi,  21,  54,  61,  237,  271,  322, 
339,  411- 

Cicéri  père,  279. 

Cico  (Mlle),  0,  142,  154,  206,  262. 

Coedès,  191. 

Ccevoel  (Mlle),  7. 

Cohen  (J,),  10,  369,  374. 

Cohen  (L.),  306. 

Colin  {de  l'Opéra),  84,  209,  254, 
362,  378. 

Colin  (C),  02. 

Colini,  135. 

Colombier.  196. 

Colonne  (E.),  77. 

Comettant  (M.  et  Mme  O.j, 14,  77, 
150,  158,  239,  294,  302. 

Comte  (C),  94. 

Conneau  (Mme),  100. 

Conradi  (A.).  199. 

Consolo  (F.),  125,  190. 

Constantin  (C),  42,  91,  164,  174, 
315. 

Constanzia  (Mme  A.),  141, 

Conti  (C),  255. 

Conti  (Mlle),  240. 

Cordier  (Mlle  A.),  38,76,  94. 

Corelli,  18. 

Coruion  (E.),  57. 

Corradi  (Mlle  E.),  190, 

Cortez  (Mme),  61. 

Cossmann,  253. 

Costa  (M.),  199,307,  234,  359. 

Costé  (J.),  395,  414. 

Cotogni,  7. 

Cotta  (J.),  118. 

Couder,  02. 

Couderc,  230,  3Ô6. 

Crémiciix,  274,  281. 

Ciémic.ux  (H.),  5,  148. 

C.'Psci,  13,  55, 


:iG7 


Cros,  234. 

Cro»ti,  76,  93,  142,  190, 
Cruvelli  (Mlle  M,),  455. 
Cuvillon  (de),  77,  125, 


Cuvreau,  21. 
Cyriali,  47. 
Czéké  (A.  de),  173. 
Czillag'(MmeR.),  15,  355,  51,  415. 


Dall'ArgiTie,  23,  l.'J9,  375,  391. 
Dalli-Guadognini  (Mme),  47. 
Damcke  (M.  et  Mjnej,  74. 
Danioreau-Wekerlin  (Mme C), 29, 

37. 
Dancla  (C),  390,  398. 
Daniel  (S.),  183. 
Daaiele(Mlle),  61,  151,  350. 
Daram  (Mlle),  38,  346,  410. 
Darcier  (Mlle),  158,  104. 
Dard,  141. 
Dassier  (A.),  567. 
Daubray,  280,  324. 
Dauprat,  (L.  F.),  255. 
Dautresme  (L.),  10,  64,  314. 
Dauverné,  270. 
David    (rie   l'Op.),  83,  150,    183, 

552,  378. 
David  (Fél.),  209. 
David  (Ferd.),  335. 
David  (S.),  121. 
Duvid  (MlleJ.),  335. 
Davidoff,  39, 
Davoust,  348. 

Debillemont,  13,  91, 1,50,  380. 
Debrigny-Varney  (Mme),  6,  381. 
Decroix'(Mme),  42,  440,  362. 
Deffès  (L.).  280,  314,  320,  4(1. 
Déjazet  (Mlle  V.),  294. 
Diiiazet  (E.l,  53,  133,  383. 
Delaborde  (E.),  110,  133. 
Delacour,  385, 
Delafontaine,  00. 
Delahaye  (L.),  45,  83. 
Uelapone  (E.),  118,  155,  173. 
Delavigne  (A.),  41. 
Delavigne  (G.)  359. 
Dt'ldevez,  Idl. 
Deleurie  (L.).  263. 
Delgado,  93. 
Delibes  (L.),  214.  ■a4. 
Della-Rosa  (Mme),  93. 
Delle-Sedie,  29,  60,   90,  98,   157, 

173    321. 
Deloffre,  62,  383,  380. 
Delvil  (M.  et  Mme),  311,  397. 
Demunck,  70,  117. 
Denay,  (Mlle),  223. 
Deneux  (J),  29,  57,  93,  167. 
Denis  (A.),  143,  231. 
Dennery  (A.),  57. 
Depoitier  (M.  et  Mme),  30. 
ûerasse  (Mlle),  37,  142. 
Oerval,  42,  91. 
Desaint,  37. 

Deschamps  (Mlle),  282. 
DesgiangHs  (E.),  253,  279,  406. 
Deshorties,  196. 
Désiié,  36,  122,  537. 
Desmet  père  et  fils  (V),  190,  318. 
Desnoytrs  (L.),  407. 
Desplaces  (H.),  23. 
Dessane  (L.  A.),  158. 
Destin  (Mlle  M,).  215,  263,  319, 
Devoyod,  230,  350,  413,  414. 
Devriës  (Mlle  F.),  107,  125,  345. 
Devriès  (Mlle  J.),  5,  94,  357. 
Diez  (Mme),  211. 
Dœrfeldt,  63. 
Dolmetsch  (Mlle  C),  109. 
IJomei'gue,  302. 
Doppler,  127. 
Dor  (Mlle  H.),  311,357. 
Doré  (Mlle  P),  77. 
Dorn  (H.),  111,  391. 
Dorus,  39*. 
Dory  (Mme),  55, 
Douau  (Mlle),  01. 
Douay  (G,),  182. 
Doucet  (C),  106,  370. 
Drigo,  254. 

Dubois,  111,  325,  374. 
Dubois  (T.),  124,  125. 
Ducasse(Mlle),  4,  346. 
Ducci,  23. 
Duchesne,  134. 
Ducis(Mme  L.),  39. 
Duhaupas,  271,  390. 
Dulaurens,  20,  310. 
Dumestre  (M.  et  Mme),  20,  61. 
Duniecki    (S,),  15. 
DuMkU-r  (E),  55,  159,  287,  415. 
Dupiii,  Si:!. 
Duplan,  Ù7. 
Dii|Miiiclip|,  118. 
Uu|)oiit  (J  ),  Ou,  305,  414. 
Diiprat,  71. 

Dn|iresboir,  101,  230,  151. 
Duprey,  267. 


Duprez    (G.),  106,  165,  3S8,    &05, 

411. 
Duprez  (E.),  411. 
Dupuia,  148,  323,    331,  341. 
Dupuy  (Mlle  M.),  223,  239. 
Durand  (A  ),  85,  118,  134. 
Durand  (E.),  41. 
Durand  (Mlle),  117. 
Dustmann  (Mme),  181. 
Duval  (Mlle),  405. 
Duvernoy  (A.),  116. 
Duveruoy  (J.-B.),  350. 


Eberlé,  247. 
Eberwein  (C),  103. 
Ebrard-Gravière  (Mme),   21,  102. 
Ecarlat-Geismar  (Mme),  21 . 
Eckert  (C),  293,  367,  391. 
Edeisberg  (Mlle  P.  d'),  15,  303. 
Ehmant,  37,  390. 
Ehnn  (Mlle),  39,  110. 
Ehriich,  263,  399. 
Eigenscheiick,  294. 
EUers,  87. 
Elwart  (A,),  53,  93, 151,  182,  239, 

254,  287,  382. 
Empis,  407. 
Enaux  (Mlle),  334- 
Enequist  (Mlle),  191. 
Engel  (L.j,  119,  191,  334. 
Epaguy  (V.  d'),  367. 
Erl,  119. 

Ernesti  (T.  d'),  93,  398. 
Ernst  (Mme),  263. 
Errera  (U.)  190. 
Escudier-Kastner  (Mme),  27,  230, 

287. 
Etcheverry  (d'),  295. 
Etex,  389. 
Etienne,  61,  320. 
Ettling  (E.)  204. 
Eugénie  (S.  M.  l'Impératrice),  29, 

01,  148. 
Everardi,  31,  70. 


Fabre,  287. 

Fabre  (Mlle  A.),  116. 

Faccio  (F.),  263. 

Faivret,  126,  230. 

Farrenc   A.),  42. 

Farreric  (Mme),  7,  42,  62. 

Fauquez,  412. 

Faure,  10, 13,  29,  09,  83,  85,  92, 

100,   110,    125,   142,   150,   157, 

254,  269,  325,  362,370,  378,  389. 
Favarger  (R.),  281. 
Félix  (R.),  174,  23tf. 
Féret.  61. 

Féri-Kletzer,  96,  103,  127. 
Ferni  (Mme),  343. 
Ferrand  (E.),  iO. 
Ferrand  (H,),  311. 
Ferraris  (Mme  A.),    23,   79,  359. 
Fcrrier,  14. 
Feruci  (Mme),  357. 
Fétis  père,  31,  103,129,156,106, 

299,  319,    327,    330,    334,   347, 

404,  413,  415. 
Fiocre  (Mlle),  84,  378. 
Fioretti  (Mlle),  84. 
Fiori  (E.),  72. 
Firmaui  (Mme),  247. 
Fi.-min  (N.),  101. 
Fissot  (H,),  29,  151  390,  414. 
Flachat  (Mlle),  340,  362. 
Florimo  (de),  287. 
Flotow  (de),  14,127, 135,  303,  311, 

325,  339. 
Flynn  (Mlle),  279. 
Fogliari  (Mlle),  412. 
Fonta  (Mlle  L.),  206,  210. 
Fonti  (Mlle),  357,  411. 
Fortuna  (Mlle),  133. 
Fournier  (E.),  28,  45,  364. 
Fournier(N.),  121. 
Franccschi,  116. 
Franchino  (Mlle),  38,  397,  407. 
Friinchorame,  100. 
Franck  (E.),  103. 
Franck-Marie,  134,  222. 
Fratjco-Mendès,  133. 
François  (A.),  109. 
Fraschini  111,  117,  313,  321,  339, 
350,  384,  414- 
Frémeaux     (Fam.),  77,   133,  141, 

151,  182,  191,  253. 
Fricri  (Mme),  7. 
Friderici  (Mme),  55,  135. 
Krigcila,  18i. 
Fumagalli  (Mlle  E.),  45,  109. 


TABLE  ALPHABÉTIQUE  DES  NOMS. 


Gabel,  5. 

Gagliaiio  (>'me),  93. 

Oailhard,  37,    97,   2U,    254,  269. 

Galetti  (Mlle),  23. 

Galilzin  (Mlle  M.),  100,  173,  254. 

Gallet  (L.),  123. 

Galli-Marié  (Mme),   86,  178,  301, 

356. 
Gamelin,  86. 
Gandonnet  (A.),  143. 
Ganz  (M.),  39. 
Garait  (Mlle),  383,  389. 
Garciu,  12.  99,  108. 
Gardoni,  21,  76,  85,  100,  133. 
Garfounkel,  100. 
Gariboldi,  206. 
Gasperini  (de),  11,  54,  135. 
Gastoldi  (Mlle),  45. 
Gautliier  (Mlle),  311. 
Gautier  (E.),  150,  222,  270, 
Gautier  (T.),  351. 
Gênée  (R.),  295,  303,  311. 
Génibrel,  6. 
Geniien  (Mme),  302. 
Geoffroy  (Mme)  134,  373, 
Géraizer,  42,  164,  293. 
Géraldine  (Mlle),    71  ,   206,    262. 

326. 
Géraldi,  247. 
Gérard  (E.),  174. 
Gernslieim  (F.),  148,  263. 
Gevaort,  370,  381. 
Gialdini,  87. 
Gide  (C),  62. 
Gigout,  198. 
GilPérez,  147. 
Gilbert,  357. 
Gilbert-David,  102. 
Gilbert  (Mlle),  411. 
Gille  (P.),  395. 
Ginet  (P.),  5,  38Î. 
Giovanonni-Zucclii     (Mme) ,     47  , 

391. 
Girard     (Mlle),    121,     178,     280. 
Giraudet,  319,  410. 
GiudÈle  (Mlle),  i63. 
Goby-Fontanel  (Mme),  110. 
Goddard-Davison  (Mme  A.),   103. 
Godebski.  384. 
Godpfroid  (F.),  173. 
Godefroid    {Mlle    A.),     77,    117, 

332. 
Godefroy  (Mlle),  255. 
Godin  (Mme),  109. 
Gœtze  (C),  31. 
Goldberg  (J.-P.),    159,    193,    356, 

390. 
Goldner  (W.).  117. 
Goldschmidt  (O.),  247. 
Gondinet,  28. 
Gonetti  (Mlle),  237. 
Goud,  30. 

Gouflfé  (A.),  93,  165,  414- 
Gounod    (C),    10,  55,    157,   229, 

397. 
Gourdon,  6,  315,  381. 
Goury  (Mmel,  230. 
Gouvy  (T),  403,  414. 
Grandval    (Mme  la  vie.    de),  153, 

389. 
Granier,  134. 
Granzow  (Mlle),  47,  63,  126,  142, 

166,  222. 
Graziani,  47,  365. 
Gréef  (de),  55. 
Grenier,  148,  323,  341. 
Grignon  (H.),  141,  214. 
Grisar  (A.),  411. 
Grisez,  374. 
Grison,  111. 

Grisy,  84,  148,  373,  388. 
Grossi    (Mlle),    21,    84,    86,    117, 

138,  263,    321,  339,     355,    370, 

378,  389. 
Gruneisen,  246. 
Grûtzmacher  (F.),  391. 
Guédéonoff  (del,  198. 
Gueymard  (M.    et  Mme),    60,  83, 

16ô,  198,  209,  245,  271,  359. 
Guffroy,  415. 
Guibert  (Mlle  N.),  93. 
Guidon  fr.,  21,  77.  150. 
Guilbaut,  151. 

Guillot   de  Sainbris,   93,  141. 
Guillot  (Mlle),  356. 
Gunz  (le  docteur),   159,  181. 
Guzman   (M.  et  Mme  F.),  60,  70, 

215. 

H 

Hainl  (G.),  10,    53,    84,    86,    95, 

270,  294,  378.  388. 
Halanzier,  86,  100,  278,  294,  326. 
Halanzier  (Mlle  E.j,  39. 
Halévy    (L.),  147,    148,  175,  215, 

Halle '(C.),  375. 

Hamackers   (Mlle),  190,  373,  378. 


Hammer,  6,  93. 
Hammerick  (A.),  358. 
Harriers-Wipperc  (Mme),  303. 
Harris  (Mlle   L.),    6,    10,   29,  30, 

37,    61,    70,  71,    78,     116,  223, 

255,  263,  406. 
Harrisson  (W.),  374. 
Hartog  (E.  de),  178. 
Hasselmans,  70. 
Hauck  (Mlle  M.),    262,    270,  310, 

351,  359,    387,    334,    389,  398, 

403. 
Haulard,  198. 
Dauptmann  (M.),  15. 
H  yet,  78,  173. 
Hebbé  (Mlle),  31. 
Heilbron  (Mlle  A.),  93,  206,   286, 

386. 
Heinz  (J.l.  367,  398. 
Heller   (S.),  244,  273,  329,  337. 
Hnlmhollz,  108. 
Hemmerlé,  151,  311. 
Herbeck,  343. 
Herman  (A.),  374,  414. 
Hérold,  102. 

Hervé  (F.),  13,  277,  346. 
Heiz  (H.l.    15. 
Herz  neveu    (P.),   172,   191,  239, 

262,  374,  3!  6. 
Hess  (H.)    414. 
Hesselboin  (Mlle),  238. 
Heyberger  (J.),  15. 
Heymann,  397. 
HiRUard  (A.),  86. 
Hill,  181. 

Hiller  (F.),  181,  359,  391. 
Hisson  (Mlle  J.),    174,    183,    230, 

238. 
Hocbheimer,  271. 
Hochstetter,  198. 
Hol,  31t!. 

Holmes   (A.),  31,  143,  318,  358. 
Holmts  (Mlle),  77. 
Holzl,  211. 
Howiird-Paul    (Mme) ,   127,    143, 

107. 
Hubans  (C),  38. 
Huerii,  in:i. 
Huberti  (Mlle],  38. 
Huberta.  341. 
Hup.t  (Mlle  V.),  398. 
Hugo  (Mme  V.l,  277. 
Hulsen  (de),  72. 
Hurand,  27,    102,  118,    124. 
Hnstailie  (Mlle  A.),  38. 
Huttenbrenner  (A.),  207. 
Hyacinthe,  147 

I 

Isturitz  (Mme),  327. 

J 

J.icobi  (G.),  47,  93,  99,  222,  314. 
Jacquard  (L.),  /4,  101,  150. 
Jacquin,  301. 
JaëU  (M.  et  MmeA.),  22,38,  94, 

152,  183,  263,  342,  390,   415. 
.lafifé  (M.),  119. 
Jancourt,  6. 
Janin  (J.),  85. 
Jeltsch  (C),  133. 
Joachim,  15,  63,  118,    119,    181. 

351. 
Joël  (Mlle  G.),  359. 
Joly  (Mme  de),  174- 
Jonas  (E.),  6,  196,  370. 
Joncières  (V.),  10. 
Jourdun,  61,  159,  295,  359,  391. 
Jouret  (L.),  103. 
Jouvin   (B.),  30,  157. 
Juvin,  414. 
Justamenî,  350,  389. 

K 

Kaler  (Mlle  de,,  39. 

Kapfelmann,  155. 

Karl  (Mlle  L.),  110. 

Karren,  198. 

Kastner  (G.),  44,   115,    162,  246, 

250,  311,  3Ô5. 
Kastner  (Mme  Vve),  110, 115, 163 

363. 
Kellogg    (Miss).    119,    127,    215, 

358. 
Kemp  (R.),  279. 
Ketten  (L.),  151,  397. 
Ketterer  (E.),  116,  255,  301,  335, 

356. 
Kieffer,  301. 
Kipper,  ,37. 
Kistner  (J.l,  175. 
Kittl  (J.  F,),  255. 
Klein  (A.),  406. 
Klein  (J.),  167. 
Kliuworth  (C),  287. 
Kœnnemann,  167. 
Kolesowski  (S.),  287. 
Kopp,  148. 


Kowalski  (H.),  37,  93,  358. 
Krauss  (Mlle),  30,  35,  61,  71,  117, 

142,  355,  370,  378,  397,  410. 
Krempelsetzer,  415. 
Kretschmer  (E.),  263. 
Kreutzer  (L.),327,  347,  363. 
Kropp  (Mlle),  303. 
Krùger  (W.),  45,  60,  62,  93,  109, 

118,  127,  157,  158,  398. 


Labarre  (Mlle),  42,  91. 

Labiche  (E.),  385. 

Laborie  (le  Dr.),  23. 

Laboureau,  53. 

Labrunie  (Mlle),  13. 

Lacaze  (Mme),  380. 

Lachner  (F.),  55,  63,  280. 

Lacombe  (L.),  70,  280. 

Lacour  (Mme),  263. 

Lafaye,  294. 

Lafon  (Mme).  15. 

La  Grange  (Mme  A.  de),  55. 

La  Grua  (Mlle  E.  de),  23. 

Lalliet  (T.),  166. 

La  Madelaine  (S.   del,  171,  287. 

Lamarre  (Mlle  E.),  79. 

Lamoureux  (C),  51. 

Lamoury  (Fr.),  90,  95. 

Laniperti  (le  Dr.  G.),  357. 

Lanjallais,  411. 

Langer  (F.),  207. 

Langert,  63,  72. 

Langhaiis  (M.  et  MmeW.),  109. 

Langlois,  151. 

Lapret  (L.l,  85. 

La  Rounat  (C),  275,  283. 

Lasalle  (\.  del,  140,  164. 

Lassabathie,  110, 

Lasscn  (E.),  311. 

Lasséuy  (Mlle),  325. 

Lassere  (J.l,  37,  03,  203,  390. 

Lassouche,  147. 

Latapie  (Mme    C..  de),  77,  94. 

Lataste  (L.),  110. 

Laiih,  20. 

Laurent,  42,  164,  386. 

Laurent  (Mme  A.),  100. 

Laurentie,  363. 

Lauterbach,  39. 

Larergne  (A.  de),  55. 

Lavignac  (A.),  37,  1J8. 

Lavini  (Mlle),  93,  101. 

Lawrowski  (Mlle),  167. 

Lebeau,  301. 

Lebel,  238. 

Lebouc  (C),  29,  117,  366,  390. 

Lecocq  (C),    35,    117,   122,    150, 

191,  222,    255,    246,    286,  302, 

311,     26,  327,  373,  383,  414. 
Lecomte,  246,  323. 
Le  Conppey  (F.),  183. 
Lédérac,  (S2. 
Leduc  (A.),  199. 
Lee  (S.),  294. 
Lefébure-Wély,  53. 
Lofébure-Wélv  'Mlle  M.),  238. 
Lefebvre  (Mile  V.),  30) . 
Lefort  (J,),  135,  18J. 
Lefranc,  143,  415. 
Legouii  ;I.),  380. 
Legrand,  405,    80. 
Lemercier  de  Neuville,  125. 
Lemmens,  166,  374. 
Lemoine  (E.),  95. 
Lentz  (Mllei,  36. 
Léonard  (AI.  et  Mmel,  12,  19,37. 

60,  93,  109,131,  263,  271,374. 
Léonce,  36,  122,    286,    JOl,    325, 

380,  395. 
Leprévost  (A.l,  141. 
Leroy  (de  l'Op.  Com.),  122,  154, 

414. 
Leroy  {du  Conserv.,',  406. 


Lespès  (L.),  196. 
Lestrade  (Mme),  166. 
Letellier,  332. 

Leuven  (A.  de),  183,  262,  409. 
Léveillé  (A.),  395 
Léïêque  (E.l,  390. 
Lévy  (J.),  198r 
Lévy  (Mlle  C.),  101. 
Leybaque  (Mlle  H.l,  141. 
Lliérje,  178,  365,  390. 
Libert  (Mme),  357. 
Liebé  (L.),  lis,  310. 
Liebé  (MlleT.l,  117,141,  335. 
Ligner,  318. 

Lindheim,  148,  229,  324. 
Liszt  (l'abbé  F.),  326. 
Litolff  (H.l,  15,  327. 
Lœbmaa  (J.),  268. 
Lceffler  (Mme),  223. 
Lomagne  (J.),  271. 
Lopez,  190. 

Loiti  délia  Santa  (Mme),  7,87,119. 
Lotto,  167. 

Lovato  (Mlle),  36,   142,  286,  325. 
414. 


Lover  (S.),  239. 

Lowenlbal,  133. 

Lubeck  (H.),  22. 

Lucas  (G.),  39,  390. 

Lucca  (Mlle  P.),  6,  23,  47,  63,  72, 
79,  95,  111.  152.  175.  198,  215, 
295,  303,  307,  391,  414,  415. 

Luce,  286,  334,-  395. 

Luigini  (L.).  61,  267. 

Lust  (C),  268. 

Lulz,  5,  70,  346,  405. 

M 

Mach  (E.),  292. 

Mackonsie  (Mme),    36,    279,  318, 

?35. 
Maësen  (Mlles  C.  et  L.  de),  15,  23, 

143,  311,  335. 
Magnien  (V.),  271. 
Miignus  (D.),  60,  70,  93,  261,  301 
Maillart    (A,),  86,  174,   177,    238, 

311. 
Mailly  (A.),  166. 
Maistre  (Mme  la  baronne  de),  270. 
Mallard  iMllej,  238. 
Mallinger  (Mlle),  211,  293. 
Alangeant  (S  ),  86. 
Mangin,  301,  346,  357. 
Mangold  (C),  39,  327. 
Manns,  327. 
MaplesoD,   14,  61,  78,    111,    231, 

302.  351,  367,   391. 
Marchand  (Mme),  315,  381. 
Marchusi  (Vl.  et  .Mme),  231. 
Marchisio  sœurs  (Mlles),  31. 
Marciis  (Mlle),  142,  315. 
M:irgucrilat  (R.),  31. 
Marie  (F.l,  15. 
Marié  (Mlle  L),  21,  36,  123,  25'i, 

3.)5. 
Jlarimon  (Mlle),  37,  94.  101,  295, 

327,  332,  359,  391,  407,  415. 
Marini  iJ.  M.),  33. 
Slario,  6,  47,  72,  79,  119,   175. 
Marion,  30. 
Mariquita  (Mlle),  13. 
Mark  (le  D'),  31. 
Marlois  (E.),  246. 
Marochetii,   99. 
Marque  (A.)  398. 
Marquet,  35. 
Martin  (E.),  110,  293. 
Martin  (Mlle  .1.),  125. 
Martin-Robinet  (Mme),  70,  133. 
Martinet,  164,  174,  278,  357,  397, 

411. 
Marty  (Mlle),  302. 
Martyns,  142. 
Marx  (A.),  6,  374. 
Massa  (le  duc  de),  102, 106,  118, 

143. 
Massart  (M.  et  Mme),  74,  398. 
Alassé  (V.),  10,  30. 
Alassenet,  10,  42. 
Masset  (J.-J.),  415. 
Masson,  91. 

Massy,  5,  94,  302,  310. 
Massy  (Mme),  72. 
Alaton,  107. 
Mauduit  (JlUe),   27,    51,   70,   85, 

101,  116,  148,  150,  158,  350. 
S!aurel,  78. 
Maury,  151. 
Mayeur  (L.),  93. 
Mayr  (Aille  L.),  23. 
Mayr-Olbricli  (Mme),  271. 
Mazilier,  167. 
Mazurini,  102. 
Mazzoleni,  38,  166. 
Aleerens  (C),  300. 
Meilbac  (H.),  41,  147,  153,  322. 
Meillet  (M.  et  MœeJ,  94,  254,310, 

346,  410. 
Aleinardi  (F.),  157. 
Melchissédec,  59. 
Méliot  (A.),  51.- 
Mellinet  (le  général),  91. 
Membrée,  384. 
Meudelssohn-Bartlioldy,   99,    261, 

390. 
Alengal,  262. 
Mérante,  210. 
Alercadante,  287. 
Mercier  (J.),  87. 
Alercklin-Scbiitze,  294,  325. 
Alercuriali,  322. 
Méreaux  (A.),  172, 173,  183,  207, 

262. 
Merly,  23,  87. 
Mévil  (C.),  55. 

Mey  (A.),  135,  223,  271,  310. 
Meyer  (L.  de),  142. 
Aleyer  (Aille  A.),  157,  406. 
Meyer  (Mlle  C),  77. 
Meyerbeer  (G.),  45,   62,273,  281, 

309,  364. 
Meyerbeer  (Mme),  273,  281. 
Mézeray  (Mlle),  61. 
Michel  (Cam.),  239. 
Jlichel  (Alarc),  87. 


Alicheli  (J.),  407. 

Alicliotte,  372. 

Milher,  347. 

Ali  Met  (V.),  190. 

Mmetti,  23,  311,  335. 

Mineur  (Mlle  M.),  55, 

Alinier,  29 'i. 

Minkus,  96. 

Hiretzky  (de),  234. 

Alocker,  309. 

Alohr,  42. 

Aloisset  (Mlle  G.),  309 

Monbelli  (Mme),   6,    70,    93,  293, 

391. 
Monsstier  (J.),  174,  343. 
Mongin  (Mlle  M.),  62,  116. 
Alongini.    10,  167,  175,  317,  351. 
Aloniot  (E.),  350. 
Monjauze,  14,  254,  203,  346. 
Monnais  (E.),  08,  75,  84,  85,   162, 

165,  250,  252,  253. 
Alonplaisir,  23,  79. 
Alonpou  (Aime  Vve),  135. 
Aloniaubry,  71,  174,  206,  214,  350, 

396. 
Alontauriol,  55. 

Montant-Lambert  (Aime),  134. 
Montellio  (Aime).  159. 
Alonler  (M.  de),  38. 
Montigny  (Mme),  85. 
Moreau  lE.l,  176. 
Morel  (A.),  125. 
Morel  (Mlle  Y.),  173,  254. 
Morelly  (L.),  287. 
Alorére,  373. 
Moriani,  335. 
Morini,  90. 
-Alortier    de  Fontaine,     129,  141, 

155,  201. 
Mouravieff  (Mlle),  359. 
Alouren,  90. 
Mousskon'(P.),  71. 
Aloya  (Aille),  6,  36. 
Alubldorfer,  31. 
Alunclieimer,  152. 
Murer  (Aille  L.),  109,  150. 
Murska    (Mlle    J.    de),    55,    159 

367,  384. 
Muzio,  334. 

N 

Nachbaner,  211,  293,  327. 

Napoléon  III  (S.  M.  l'Empereur), 
61,  148,  319. 

Napoléon  (S.  A.  le  Prince  Impé- 
rial), 148. 

Nathan,  122,  142. 

Nau  (Aille),  61,  310. 

Naudin,  103,  237,  263,  271,  319 
415. 

Naum  (AI.),  223,  302. 

Nègre,  63. 

Néruda  (Mlle  M.),  98. 

Nibelle  (A.),  313. 

Nicodami  (Aime),  250. 

Kicolaï  (0.),  33,  46,  319. 

Nicolai  (le  baron),  326. 

Nicolini,  35,  38,  86,  106,  117, 
1.58,  331,  370,  378. 

NicoUe,  301. 

Nicot  (C.),  234,389. 

Niemann,  7,  87,  95,  111. 

Nilsson  (Mlle),  76,  83,  90,  92, 
100,  lOl,  107,  125,  142,  152, 
155,  159,  167,  175,  191,  215, 
239,  254,  269,  294,  302,  325, 
370,  383,  388,  415. 

Nissen-Saloman  (AI.  et  Mme),  159, 
311. 

Noetinger,  115. 

Nohl  (L.),  62. 

Nondin  (Mlle  M.),   358. 

Norblin,  335. 

Noriac  (J.),  94,  270,  313.  411. 

Norman-Néruda  (Mme),  59,  69, 
76,  77.  90,  68,  100,  108,  109, 
116.  167,  230. 

Noronha,  111. 

Nuiter  ^C.),  305. 


Obin,    150,   183,  209,    245,   370, 

389. 
Obiols  (L.),  7. 
Odezenne.  47. 
OEschner,  182. 
Offenbach  (J.),  5,46,61,91,147, 

148,    239,    254,  311,  313,    322, 

320,    331,  337,    340,  350,    357, 

365,  402,  414. 
Offermans  Van-Hove  (Mme),  319. 
OUvier  (Mlle),  62. 
Orgéni    (Mlle    A.),  63,  135,    199. 

3ll,   343,  407,  415. 
Osmont    (le  comte   d'),  116,  290. 
Otto  (Mllei,  223. 
Oudshorn,  263. 


TABLE  ALPHABÉTIQUE  DES  NOMS. 


Pacini  (E  ),  27,  55. 

Pacius,  155. 

Paisiello,  103. 

PiiliTmi,  aai,  :i39,  355,  378,  410. 

Palianti  flls,  300. 

Palmei-  (C.A.),  356. 

Palmer  (T.),  I^l. 

Pancani,  175,  313,  /il5. 

Panofka  (H.),  262,  311,  334. 

Papini,  23. 

Pardon  (F.),  268. 

Pasdeloup,  11,  22,  37.  47,  99,  143, 
145,  187,  244,  245,  254,  20i, 
278,  279,  280,  293,  301,  340, 
345,  350,  379,  389,  397. 

Putt',  marquise  deCaux  (Mme  A.), 
JO,  13.  21,  29,  30,  38,  46,  ."j4, 
61,  71,  76,  78,  86,  101,  106, 
110,  117,  134,  l'l2,  152,  157, 
■159,  107,  l'Jl,  199,  2^3,  iSl, 
238,  2.i9,  245,  246,  247,  251, 
271,  280,  295,  310,  313,  321, 
331,  339,  357,  365,  370,  373. 
389,  397,  398,  405,  414. 

Patti  (Mlle  C),  10,  173,  230,  3G6. 

Pauer,  327. 

Paul   (V.),  29,  60. 

Paulus,  68,  318. 

Paurelle  (Mlle),  147. 

Pélardy,  301. 

Pellini  sœurs  (Mlles),  14,  93. 

Pénavaire,  199  133. 

Penco  (Mme),  23. 

Pêne  (H.  de),  358,  406. 

Perafailo,  117. 

Pereira  (Mlle  A.),  327. 

Perelli  (G.),  77. 

l'érez(Mlle  M.),  255. 

Périer  (Mlle),  357. 

Péronnet,  279. 

Perrin  (E.),  84,  209,  269  319 
389, 

Persini  (Mlle),  362,  411. 

Peschard,  61,  180,  397. 

Pesclika-Leuluer  (Mme),  39,  327, 
335. 

Pessard,  10 

Petipa  (M.)  357. 

Petit,  63,  92. 

Peudefer  (Mme),  45. 

Pfeiffer  (G.),  11,  37,  45,  93. 

Pfeiffer  (Mme  C),  37,  77, 125. 

Piatti,  302. 

Piazuii,  79. 

Piazza,  327. 

Pichoz  (E.),   30. 

Pickaért,  102,  388. 

Pierson-Bodin  (Mme),  6,  45,  70, 
109    398. 

Pillet  (L.),  102. 

Pisano,  135. 

Placet,  62,  262,  386. 

Plantade  (C),  196. 

Pleyel  (Mme),  398. 

Poëncet  (H.),  99,  246. 

Poinsoi  (Mlle),  373,  390. 

Poise  (F.),  385. 

Poisson,  390. 

Poil  da  Silva,  71. 

Ponchard  (C),  142,  178. 

Poncliard  (Mlle  J.),  55. 

Ponialowski  (Le  prince  J.j,  102, 
137,338. 

Pons,  310. 

Pontoglio,  303,  335. 

Potel,  6,  154. 

Potier  (C),  37. 

Potier  (Mlle  D.  de),  77. 

Pougin  (A.),  71,  127,  158,  320, 
280,  258,  371,  398. 

Poiiilley,  62. 

Prémaray  (J.  de),  191. 

Prilleux,  59,  97,  222,  230,  386. 

Priohi  (Mlle),  380. 

Prumier  (A.),  31. 

Puget,  117. 

Pugoi,  357. 

Pujol  (J.-P.),  246. 


Quercy  (de),  134. 


U 


Radau  (R.),  19. 

Radccke  (Mlle),  319. 

Radoux,  30. 

Rair  (J.),  37. 

Raoult,  166. 

Raymondu  (Mlle),  397. 

Raynal,  120. 

Reboux  (Mlle),  351. 

R(ignier  (Mlle  P.),  93. 

Reicliardt,  61. 

Reinecke  (C),  111,  183. 

Reiuecke  (Mme),  287. 

Reis  (Mlle  A.),  350. 

Remack  (E),  398. 

Rémusat,  358. 

Renard  (E. 1,390. 

Rendauo  (A.),  70,  85,  109,  133. 

Réty  (E.),  158,  162. 

Révial,  306,  374. 

Révilly  (Mme),  97,  342,  346. 

Rey-Balla  (Mme),  111,  215. 

Reycr,  44. 

Rheiuberger  (J.),  350. 

Ricci  (F.),  72,110,  280,  301,325, 

342,  405. 
Ricci  (Mlle  L.),   317,  321. 
Richald,  327. 
Richter  (E.-F.l,  207. 
Riedel,  157,  374. 
Ries  [¥.),  22,  70.  223,  234. 
Rigby  (V.),  327. 
Rillé  (L.  de),  157,  267,  324. 
Rionnelle    (Mlle   N.   de),   g,   134. 

Iii7,  414. 
Ritter  (Mlle  W.),  318,  343. 
Rives  (Mlle),  89,.  90,  99,  100. 
Roche,  141. 

Rœdern  (Le  comte  de),  111, 
Roger,  7,  23,  71,  223,  276,  374. 
Roger  (Mlle  P.),  141. 
Rolland    (Mlle),  306. 
Romani  (C),  367. 
Rondeau,  190,  246. 
Ronzoni,  398. 
Roqueplan  (N.),  188. 
Roqnes    (L.),  94,    125,  261,   254, 

278,  377,  397. 
Rose,  6,  37. 
Rosello  (Mlle),  30,  84. 
Rosenhain  (J.),  22,  90,  93,  101. 
Rossi  (L.),  375,  382. 
Rossi-Galicno  (Mme),  150. 
Rossini,  53,  61,  71,  84,  143,  174, 

223,  269,  351,  359,    361,  369, 

378,  382,  389,  399,  400. 
Rossini  (Mme),  372,  382,  406. 
Rota,  391. 

Roubaud  (Mlle  AL),  29. 
Roubin  (A.   de),  294. 
Roudil,  21. 
Roulle  (Mlle),  93. 
Roussel,  29,  60,  238. 
Rouxel  (Mme),  93. 
Royer  (A.),  398. 
Roze  (Mlle  M.),  59,  76,  109,  182, 

214,  230,  263. 
Rubinstein   (A.  et  N.),  15,"  45,  72, 

77,  86,  87,  89,  100,  108,  lld, 

125,  141,  149,  157,  214,   359, 

375,  414. 
Ruelle  (J.),  262,  301. 
Ryan(D.-H.),  398. 


SaSnger,  109. 
Saffray  (Mme  de),  45,  101. 
Saiii-d'Arod,  223,  268, 
Sainte-Beuve.  158. 
Sainte-Foy,  59,  93,  262,  386. 
Saint-Geoiges  (de),  3,  69, 162,  337, 

371,  382. 
Saint  Léon,  95. 
Saint-Saëns  (C),  14,  29,  95,  109, 

157,  263,  270,  343,  367,  406. 
Saint-Urbain  (Mlle),  389. 
Saint-Victor  (P.  de),  23. 
Sallard    (Mme  F.),  20,    39,    222, 

391. 
Salom.in  (S.),  47. 
Salomé,  369. 


Salvioni  (Mlle),  10,  05,  270,  391. 

Samuel,  367. 

San-Miguel  (E.),  341. 

Sannen,  325. 

Sunnier  (Mlle  M.),  111. 

Sarasate,  100,  182. 

Sarolta  (Mlle),  399. 

Sartiges  (de),  62. 

Sass  (Mme  M.),  0,  29,37,  46,  47, 

86,  92,  94,   100,  110,  150,  183, 

222,   304,  325,  333,  362,  373, 

378. 
Sauret  frtres,  93. 
Sauvage  (T),  196,  206,  397,  411. 
Sauzai,  100. 
Sax  (A.),  93. 
Scalclii  (Mlle),  94, 
Scaleso,  37,  84,  138. 
Schebor,  343. 
Schepers  (Mlle),  295. 
Schiever,  351. 
Scbimon,  236. 
Schlosser,  211. 
Schlotmann,  374. 
Schmitt  (A),  135,198. 
Schnaabelt  (H.),  119. 
Schneider  (Mlle),  21,  30,  78,  110, 

126,  166,    206,  323,    331,    337. 

341,  413. 
Schnyder  de  Wurtens(5e.(X.),  287, 

391. 
Schott,  268. 
Sohrœder(Mlle),  27,  239,  287,  363, 

390,  414. 
Schrœder  (Mme  S.),  87. 
Schrœtter  (Mlle),  175. 
Schubert  (F.l,  41. 
Schumann  (Mme  C),  20,  63,  119. 
Schwab  (F.),  124,  231. 
Scoffino,  71. 
Scudéri,  :i3. 
Si'cond  (A.l,  78,  235. 
Sécrétain  (MlhvM.),  37,  93,  801. 
Segri-Segara,  15. 
Séligmann  (P.),  6,  37,  00,  70,  87, 

125,  280,  334. 
Selva,  335. 
Semet  (T.),  269. 
StTgeat  (A.),  85,  110,  222. 
Séroff,  414. 
Serrier  (P.),  183. 
Servais  (J.),  6,  384. 
Sessi  (Mlle),  159,  384. 
Séveste  (Mlle),  121. 
Sézanne  (Mlle),  342. 
Slierrington  (Mme  L.),  237,    375. 
Sichel  (Mlle),  381. 
Sighicelli,  37,  173. 
Simon  (F.-J.  ),  374. 
Simonet  (Mme  M.),  101. 
Simoni  (Mlle),  34,  302. 
Simrock  (N.),  415. 
Sims-Reeves,  391. 
Singelée  (Mme),  134. 
Sinico  (Mlle),  31. 
Sivori  (C),  37,  46,  85,  157,  175, 

199,  246,  311,  318,  375,  390, 

391. 
Smetana,  175. 
Smidt  (Mlle  M.),  412. 
Smitz-Èrambert  (Mme),  399. 
Solera  (T  ),  105. 
Selon,  234. 
Solvi,  30. 

Sonieri  (MlleR.),  351. 
Sontheim.  31,  U3,  159,  223,  239, 

325. 
Soto,  315,  340,  411, 
Souviran,  156, 
Spay,  294. 

Stagno,  63,  111,  327,  357. 
Stanni  (Mlle),  133. 
Slanio,  317. 
Staps(Mlle  A.),  70. 
Steenmann,  388. 
Steger  391 . 
Stehle  (Mlle),  327. 
Steinhart  (W.),  79. 
Stella  (Mlle  G.),  327,  335,  415. 
Steller,  35,  61,  71,  76,   84,     101, 

106,279,  331,  355,  399. 
Stennebruggen,  70. 
Sternberg  (H.),  119. 
Sternberg  (Mlle),  7,  327. 


Stigoll,  7,  223. 

Stockhauscn  (J.),  47. 

Siœger    (E.),    93,    98,   116,    125, 

280,  356. 
Stollz,  (Mme.  R.),  318. 
Strakoscli  (Maur.),  206,  251,  270, 

286,  374. 
StrakobCh  (Max),  300,  415. 
Straus  (L.l,  319. 
Strauss  (J.).  38. 
Stubel  (Mlle),  247. 
Sunimers  (S.),  268. 
Suppù,  3'). 
Swert  (J.  de),  135. 
Sylva,  30, 
Sytter,  122. 
Szarvady,  244. 

T 

TafTanel,  414. 

Taffanel  (Mlle),  30. 

ïagliafico,  237. 

Taglioni  (P.),  23. 

Taglioni  'S.),  335. 

Taisy  (Mme  de)  110,  294. 

ïamberlick,    103,  335,  351,    359, 

410. 
Tamburiul,  370. 
Tapie-Brune,  30. 
Tarbé  (E.),  30. 

Tarbé  des  Sablons  (Mme),   71, 
Tardieu  de  Malleville  (Mme),  14. 
Taroni  (Mme),  366. 
Taubert,  117,  311,  391. 
Tausig,  391. 

Tautiu  (Mlle  L.),  148,  238. 
Tavernier  (Mlle  N,),  60. 
Tayau  (Mlle),  00,  77. 
Taylor    (le  baron),  69,    158,  162, 

173,  198,415. 
Teste,  151. 

Testot  de  Beauregard,  334. 
Teysson,  53. 

Thér&a  (Mlle),  13,  322,  286,  373. 
Thibaut,  6,  39,  287. 
Thierret  (Mme),  314, 
Thierry,  30. 
Thiron,   148. 
Thomas  (A.),  22,  47,  81,102,155, 

183,     244,  250,  254,    370,  374, 

388. 
Thouret  (Mlle),  301. 
Thuot  (Mme),  367. 
Tiberini    (M.  et  Mme),    84,    101, 

117.  138. 
Titjens    (  Mlle) ,   143,    255,     279, 

335,  367. 
Tilmant,  317. 
Tombesi,  151,  159. 
Tornquist  (Mlle  O.),  23,  72. 
Torriani  (Mlle  0.],  215,  263. 
Testée  (Mlle),  199. 
Toudouze  (Mlle),  326. 
Tourguénief  (L),  199, 
Tournade,  134. 
Trébelli  (Mme),  47. 
Tréfeu,  5. 

Trél;it(Mme  M.),  225, 
Trombetia,  29. 
Troy,  38,  94. 
Tuai  (Mlle),  86. 

U 

Ogalde  (Mme), 102,  110,198,206, 
214,  222,  236,  246,  270,  279, 
405,  413. 

Ulbach  (L.),  253. 

Ulmann,  367. 

Urban  (Mlle),  138,  339,  411. 

Usiglio,  173. 


Vaillant  (S.  Exe.  le  maréchal),  14, 

Valdès  (R.),  85. 

Valiquet  (H.),  182. 

Van    den    Heuvel-Duprez    (Mme), 

21,  146, 
Van  der  Beck  (Mlle),  101. 
Van  der  Gucht,  237. 
Van  Eyken  (J.  A.),  335. 
Van  Ghell  (Mlle)  324,380,  395. 


Van  Ghelnwe,  319. 

Van  Lier  (Mlle  R.j,  70. 

Vannier,  301. 

Vanzini  (Mlle),  127. 

Varney  (A.),  54,  158,  174. 

Vast  (E.j,  301. 

Vauquehn,  86. 

Verdcllet,  340,  410. 

Verdi,  87,  105,  280,  382. 

Verger,  38,  Cl,  80,  133,  159,  26S, 

271,  313,  339,  410. 
Verhulst,  319. 
Verreyt  (J.),  62. 
Vervoitte  (C),  102,  151,  157,173, 

198,  318,  319,  372,  398,  406. 
Viardot  (Mme  P.),  175,  183,  199, 

Î71,  293,  374,  384. 
Victor,  80,  314. 
Viennet,  231, 

Vieuxtemps,  37,  00,  70,  87,  207. 
Vieyra  (A.),  215. 
Vilbac  (R.   de),    279,    295,    325, 

334. 
Villa,  37. 
Villani,  21.5,  319. 
Villaret,    92,    94,    124,  150,    183, 

222,  389,  413. 
Vitali  (Mlle),  37,  63,  72,  118,  303. 
Vivier,  76,  100,  130, 
Vizcntini   (A.),  13,  262,  286,  333. 
Voggenhuber  (Mme  de),  79. 
Vogt  (Mlle  A.),  141. 
Vois,  (E.),  412. 
Vois  (MllR  A.),  42,  91. 
Volpini    (Mme)  ,   23,   47,  63,    72, 

373,  399. 
Vroye  (de),  15,  247,  415. 

W 

Wachtel,  55,  316,  407. 

Wagner  (R.),   25,    37,    183.    205, 

210,  293,  340,  397. 
Waldteufel,  407. 
Walewski    (le    comte) ,   54,    246, 

319. 
Walter,  55. 

Warnots,  166,  295,  398. 
Warot,  14,  27,  37,  45,    150,  327, 

332,  390,  397,  407,  415. 
W<artel,  5,  410. 
VVeber  (C.  M.  de),    1,   138,    161, 

179,   193,    217,    242,    257,  284, 

306,  353,  387,  393,  401. 
Wehii  (J.),  95. 
Wekerlin,  53. 
Wertheimber  (Mlle),  22,116,  236. 

253 
Wesley  (le  Dr.),  95. 
Whist  (Mme),  101. 
White,  117,  141. 
Widor  (C.),175.  Il,  Si, 
Wieniawski  (H.  et  J.),  15,  335. 
Wieprecht,  63,  118,  311,  327. 
Wilden  (Mlle),  116. 
Wilder(V.),41,  164. 
Wilhelmy,  23,  63. 
Wilhelm-Massé  (Mme),  102. 
Winzweiler,  214. 
Wittmann  (H.),  414- 
Wolff   (Ë.),    37,  60,    70,  86,    87, 

131,  150,  167. 
Wolowski  (B.),  7. 
Worms  (Mlle),  147. 
Wugk  (Mlle),  412. 
Wuille,  94,  167. 
Wurtemberg  (le  duc  E  de),  359. 


Zabalza  (A.),  62. 

Zapater  (Mlle  R.),  390. 

Zaytz,  39. 

ZEllner  (L.  A.),  215. 

Zenger  (M.),  175,  263. 

Ziua-Mérante  (Mme),  13, 133. 


TABLE  ALPHABETIQUE  DES  REDACTEURS. 


TABLE  ALPHABÉTIQUE  DES  BÉDACTEUBS. 


Bannelier   (Charles),  51,    Ss»,    130,  IftS,  210,  233,  292, 

Sao,  i03. 
Bernard  (Paul),  57,    81,    121,   153,   177,  209,  253,  379, 

385,  409,  412. 
Bourges  (Maurice),  51,  154. 
Brlsson  (Frédéric),  301. 
Chavornay  (Louis  de),  36. 
Cristal  (Maurice),  17,  65,  73,  113,  129. 
Elwart  (A.),  157,  229. 
Fétispère,  42,  75,  325,  381. 
Fétis  (Edouard),  25. 

Gouzien  (Armand),  3,  42,  59,  99,  106,  345. 
Gray  (Maurice),  33,  84,  97,  105, 137,  314. 
Gruneisen  (C.-L.),  237. 
Kreutzer  (Léon),  74. 


Monter  (Em.   Mathieu  de),  9,  90,  98,  99, 123,  140,  145, 

146,  164,  180,  185,  220,  235,   250,   267,  289,  297,  329, 

337,  369. 
Noukomm   (Edmond),  138,  IGl,  179,  193,  217,  242,  284, 

306,  363,  387,  393,  401. 
Pongin  (Arthur),  19,  68,  108,  156,  171,  181,  196,  203,  228, 

243,  259,  265,  290,  299,  341,  3(|7,  363. 
Rauze  (Elias  de),  313,  321,  330,  338,  355,  361,  377,  410. 
Keyer  (Ernest),  44. 
Saint-Yves  (D.-A.-D.),  12,  2b,  36,  52,  75,  91,  114,  132, 

149,  172,  189,  213,  237,  245,  2G8,  277,  292,  308,  322, 

339,  348,  372,396. 
Sauvage  (Thomas),  20,  49,66,  169,  195,  201,  211,  219, 

226,  258. 
Smith  (Paul),  1. 


Thurner  (A.),  305,  315. 

Article  signé  A.  E.,  148. 

Article  signé  C.  B.,  99. 

Arlicle  signé  C.  D.  G.,  300. 

Articles  signés  D.,  5,  35,  41,  91,  122,  147,  148,  163, 178, 

324,  346,  36-2,  380,  395,  411. 
Article  signé  E.  F.,  19. 
Articles  signés  E.  R.,  313,  378. 
Article  signé  F.,  332. 
Article  signé  M.  G.,  315. 
Articles  signés  M.  M.,  388,  411. 
Article  signé  M.  S.,  230. 
Article  signé  P.  S.,  12. 
Article  signé  S.,  293. 
Articles  signés  S.  D.,  27,  236,  252. 
Article  signé  X.  X.,  316. 


MORCEAUX  DE  MUSIQUE  DONNÉS  COMME  SUPPLÉMENTS   DANS  LE  COURANT  DE  L'ANNÉE  1867 


ATec  le  n°  1  !  (en  primes)  :  le  deuxième  volume  du 
Répertoire  de  musique  classique  de 
piano,  par  Stéphen  Hellerj  Album 
Offenbach,  pour  chant. 

Avec  le  n"  6  :  Si  vous  n'avez  rien  à  me  dire,  romance 
nouvelle  de  Th.  Palmer. 

Avec  le  w  13  :  L'Elude  en  fa  mineur,  de  Mendelssohn. 


Avec  le  n"  17  :  Ida,  rêverie  pour  le  piano,  par  Mor- 
tier de  Fontaine. 

Avec  le  n°  21  :  Clicquol-polka ,  d'après  Fleur  de  Thé, 
de  C.  Lecocq,  par  L.  Roques, 

Avec  le  n»  25  :  Le  Message,  mélodie  caractéristique,  de 
J.-P.  Goldberg. 

Avec  le  n°  29  :  Gavotte  pour  piano,  par  Ch.  Lecocq. 


Avec  le  n°  35  :  Sonnet,  prélude  pour  le  piano,  par  Sté- 
phen Heller. 

Avec  le  n"  39  :  Le  chœur  des  Evéques,  de  l'Africaine, 
transcription  pour  le  piano,  par  J. 
Baur. 

Avec  le  n°  43  :  La  Lettre  de  la  Périchole,  dans  le  nou- 
vel opéra  d'Offenbach. 

Avec  le  n°  48  :  Kellogg-Valse,  d'Arditi,  arrangée  pour 
le  piano  par  Roques. 


CnKTBALE  DES  CHEUL'VS  1 


BUE  BEnCE&E, 


BUREAUX    A    PARIS  '•    BOULEVARD   DES  ITALIENS.  1. 

35'  Année.                                 N'  l  5  Janvier  4868. 

ON  S'ABONNE:                                                                                                            >^S'^à^^<         •      ■  PRIX    DE    L'ABONNEMENT: 

Dnns  les  Déporlcmcnts  et  û  l'Élraniîcr,  '"''"' -*   ■■•  P'"' "" 

Départements,  Belgique  et  Suisse —    :J0  n       id. 

Chei  tous  les  Jlnrchunds  de  Musique,  IfS  Libraire»,                                                     ^^^     ^^^   _____  .^^  __^_  j-,                                                              ii           .^ 

V%    W^   ^  VWT  H^  Étranger 34.       Id. 

et  OUI  Dureaui  dcr.  Kessageries  et  des  Postes.  Hf     B<â     «»      H  I     l^â 

1^^^^  iHllI      ^V       ^H^    ^h4  ^  Joomal  parait  le  Dimanche. 


GAZETTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


1868 


PRIMES 


1868 


Offertes  aux  Abonnés  de  la  Revue  et  Gazette  musicale, 
A  l'occasion  du  renouvellement  de  l'année. 

(33'  ANNÉE    DE  soif   existence) 


PIANO 

Le  deuxième  volume  du 
RÉPERTOIRE     DE     MUSIQUE    CLASSIQUE     DE     PIANO 

Contenant  22  morceaux  de  piano,  composés  par 


1.  Op.  24. 

2.  Op.  29. 

3.  Op.  42. 

4.  Op.  44. 

5.  Op    45. 

6.  Op.  49. 

7.  Op.  52. 

8.  Op.  33. 

9.  Op.  54. 

10.  Op.  56. 

11.  Op.  39. 


Scherzo . 
La  Chasse. 
Valse  élégante. 
Valse  villageoise. 
Valse  sentimentale. 
Quatre  arabesques. 
Vénitienne. 
Tarentelle. 
Fantaisie. 
Sérénade. 
Valse  brillante. 


Op.  60.  — 
Op.  73.  — 
Op.  73.  — 
Op.  73.  — 
Op.  81.  — 
Op.  81.  — 
Op.  81.  — 
Op.  81.  — 
Op.  81.  — 
Op.  81.  — 
Op.  81.— 


Canzonetta. 
Chantdu  chasseur. 
Adieu   du  soldat. 
Chant  du  berceau. 
Chanson  de  mai. 
Rêverie. 
Feu  follet. 
Arabesques. 
Berceuse  et  deuil. 
Sonnet. 
Appassionato. 


Vn  volume,  format  in-S',  de  200  pages. 


CHANT 

-;       CONTENANT  : 

Roblnaon  C^rQsaé  :  Si  c'est  aimer.  -......: Romance. 

Cirande-Dncliesae  :  Dites-lui Déclaration. 

Violoneux  (le)  :  Le  violon  brisé  Mélodie. 

Bavarda  (les)  :  Chantons  l'Espagne Brindisi. 

IVait  blancbe  :  La  nuit  du  mystère Romance. 

Cirande-Oocliesse  :  Pour  épouser  une  princesse Chronique. 

Bobinaon   Craaoé  :  C'est  un  brun Ariette. 


Ces  primes  sont  à  la  disposition  des  anciens  et  nouveaux  Abonnés. 


SOMMAIRE.  —  Études  sur  Charles-Marie  de  Weber  (deuxième  partie,  8'  article), 
par  Paul  Smith.  —  Théâtre  Lyrique  impérial:  la  Jolie  Fille  de  Perlh, 
opéra  en  quatre  actes  et  cinq  tableaux,  paroles  de  MM.  de  Saint -Georges  et 
Jules  Adenis,  musique  de  Georges  Bizet,  par  Armand  douzien. —  Théâtre 
des  Menus-Plaisirs  :  Geneviève  de  Brabant,  opéra-bouffe  en  trois  actes  et  dix 
tableaux,  de  MM.  Hector  Crémieux  et  Tréfeu,  musique  de  J.  Offeobach.  — 
Nouvelles  des  théâtres  lyriques.  —  Nouvelles  diverses.  —  Annonces. 


ÉTUDES  SUR  GHÂRLES-fflÂRIE  DE  WEBER. 

D'après   la   blograpble    écrite   par   son   flls. 


SECONDE  PARTIE. 


VIII  (1). 


Malgré  ce  retour  à  d'anciennes  habitudes  de  gaieté,  de  folie, 
Weber  n'en  persistait  pas  moins  dans  sa  résolution  de  quitter 
Prague.  Le  bruit  en  vint  jusqu'au  bon  Liebich,  et  le  frappa  au 
cœur.  Les  larmes  dans  les  yeux,  il  demanda  à  Weber  si  c'était 
vrai,  et,  sur  la  réponse  affirmative  du  jeune  chef  d'orchestre,  il  le 
supplia  de  ne  pas  l'abandonner,  avec  une  éloquence  si  touchante, 
qu'il  lui  devint  bien  difficile  de  se  montrer  inflexible.  Il  y  a  même 
des  raisons  de  croire  que  Weber  se  serait  laissé  vaincre  (au  moins 
pour  une  année  encore)  par  les  supplications  de  son  vieil  ami,  si 
une  circonstance  n'était  venue  le  confirmer  plus  que  jamais  dans 
son  dessein .  Un  changement  s'était  opéré  dans  la  présidence  du 
théâtre  ;  un  mémoire  avait  été  remis  à  Liebich  par  le  nouveau 
président,  et  Weber  ne  put  y  voir,  sans  surprise  ni  douleur,  que, 
tout  en  reconnaissant  ses  services,  on  y  désapprouvait  complète- 
ment sa  manière  de  conduire  l'Opéra  depuis  l'année  1812.  Dès 
lors  le  parti  qu'il  avait  pris  de  renoncer  à  son  poste  fut  irrévo- 
cable. A  son  tour  il  adressa  à  Liebich  un  mémoire,  qui  devait 
être  lu  par  des  personnes  plus  haut  placées  que  lui:  il  y  donnait 
le  détail  de  tout  ce  qu'il  avait  fait  dans  l'intérêt  du  théâtre,  au  péril 
de  sa  santé,  de  sa  vie;  il  y  défendait  son  honneur  d'un  ton  simple 
et  modeste,  mais  comme  un  galant  homme  profondément  blessé  : 

■   (1)  Voir  les  n"  7,  17,  19,  24,  32,  44  et  47' de  l'année  1867. 


UEVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


«  Mes  détracteurs,  y  disait-il,  m'ont  pris  sans  doute  pour  un  second 
»  Prométhée  musical;  ils  ont  cru  que  je  tirerais  des  chanteurs  du 
»  limon  de  la  terre  !  »  Immédiatement  après  ce  mémoire,  Weber 
envoya  sa  démission, et  cependant  ne  continua  pas  de  remplir  avec 
moins  de  zèle  et  d'activité  des  fonctions  auxquelles  il  avait  sacrifié  trois 
des  meilleures  années  de  sa  vie.  Les  opéras  se  succédaient  l'un  à 
l'autre,  et,  dans  le  nombre,  il  fit  jouer  cette  Athalie,  de  son  ami 
PoissI,  dont  les  beautés  l'avaient  vivement  frappé,  et  qu'il  eut  le 
plaisir  de  voir  approuvée  par  un  public  qu'il  avait  l'habitude 
d'appeler  le  froid  public.  Il  semblait  que  son  zèle  augmentât,  de- 
puis qu'il  n'avait  plus  l'espoir  d'en  recueillir  la  récompense. 

Au  printemps  de  1816,  il  fit  relier  avec  élégance  et  richesse  plu- 
sieurs copies  de  sa  cantate.  Lutte  et  Victoire,  pour  les  offrir  à  l'em- 
pereur d'Autriche,  au  roi  de  Prusse,  au  prince  régent  d'Angleterre, 
au  roi  de  Hollande,  de  Saxe,  Bavière  et  Danemark  et  à  quelques  autres 
princes  souverains.  En  l'envoyant  au  roi  de  Prusse,  il  lui  demanda 
l'autorisation  de  faire  exécuter  sa  composition  nouvelle  ii  l'Opéra 
de  Berlin,  le  18  juin,  pour  l'anniversaire  de  Waterloo,  au  bénéfice 
des  soldats  invalides.  L'autorisation  fut  accordée,  mais  le  comte 
Briihl,  chargé  de  la  transmettre,  l'était  en  même  temps  d'informer 
Weber  qu'il  ne  fallait  plus  penser  à  la  position  qu'il  se  flattait 
toujours  d'obtenir  à  Berlin.  C'était  Bernard  Romberg  qui  allait 
remplir  la  place  vacante  de  directeur  musical,  et  la  cantate  môme 
était  une  des  raisons  qui  éloignaient  Weber  du  service  de  la 
Prusse.  Les  conseillers  qui  entouraient  le  roi  et  le  roi  lui-même 
n'étaient  nullement  tentés  de  s'attacher  aucun  de  ceux  qui  avaient 
quelque  part  à  réclamer  dans  la  grande  œuvre  de  l'aiîranchissement 
national. 

Le  S  juin,  Weber  se  remit  en  route  pour  Berlin,  accompagné 
du  jeune  pianiste  Freytag,  qui  devait  l'aider  pour  les  répétitions 
de  sa  cantate  et  qui  était,  après  Jules  Benedict,  le  meilleur  de  ses 
élèves.  A  son  passage  à  Dresde,  il  trouva  une  lettre  du  comte 
Witzthun,  grand  écuyer  du  roi  de  Saxe,  qui  le  priait  de  venir  le 
trouver  à  Pillnitz  :  il  avait  une  communication  à  lui  faire,  une  très- 
belle  tabatière  en  or  à  lui  remettre,  au  nom  du  roi,  en  remercî- 
ment  de  sa  cantate.  Il  était  alors  bien  loin  de  penser  que  cette 
courte  entrevue  dût  exercer  sur  sa  destinée  une  si  grande  in- 
fluence. 

Il  arriva  le  9  juin  à  Bei'lin,  où  il  retrouva  l'affection  de  la 
famille  de  son  ami  Meyerbeer,  qui  habitait  alors  une  splendide 
villa  dans  le  Thiergarten,  et  qui  était  toujours  prête  à  offrir 
l'hospitalité  à  son  bien-aimé  Charles.  Un  soir,  chez  Gubitz,  il  re\it 
ce  personnage  étrange,  qu'il  se  souvenait  d'avoir  aperçu  en  1811, 
à  Bamberg,  à  la  lueur  des  éclairs  ;  c'était  Hoffmann,  l'auteur  des 
Contes  fantastiques,  qui  venait  d'écrire  un  ouvrage  nouveau, 
l'EHxir  du  Diable.  Il  le  lui  donna  à  lire,  et  qui  réveilla  en  lui 
l'envie  de  travailler  à  ses  Voyages  d'artiste.  Quoique  Weber  ne  dût 
pas  compter  sur  une  position  fixe  à  Berlin,  il  y  était  fort  bien 
traité  à  tout  autre  égard  :  un  de  ses  plus  grands  désirs  était  d'ob- 
tenir pour  Caroline  Brandt  un  engagement  extraordinaire,  à  titre 
d'Etoile,  et  le  comte  Brûhl,  pour  lui  faire  plaisir,  se  hâta  d'ar- 
ranger l'affaire.  Mlle  Brandt  fut  engagée  pour  jouer  dans  six  rôles 
différents,  à  raison  d'un  louis  d'or  par  représentation,  et  c'était 
pour  l'époque  un  prix  très-élevé  :  «  Vous  serez  contente  de  votre 
>  commissionnaire,  lui  écrivait-il,  et  vous  lui  devrez  un  bon  nom- 
»  bre  de  baisers  extra  pour  son  retour.  »  Weber  était  flatté  de 
voir  sa  réputation  et  son  crédit  grandir  :  «  Tout  va  bien  ici  pour 
»  moi,  écrivait-il  encore  ;  les  habitants  de  Prague  finiront-ils  par 
»  ouvrir  les  yeux,  et  verront-ils  comment  on  honore  un  artiste?  » 

Les  puissances  théâtrales  avaient  cessé  d'être  hostiles  à  Weber  : 
protégé  par  Brûlil,  il  vit  tous  les  obstacles  s'abaisser  devant  lui. 
Les  répétitions  de  sa  cantate  commencèrent  sans  aucun  empêche- 
ment. La  première  donna  une  si  haute  idée  de  l'ouvrage  entier  à 


tout  l'orchestre,  que  chacun,  de  son  côté,  s'en  alla  colporter  son 
admiration  et  emboucher  la  trompette;  à  la  seconde,  on  eut  de  la 
peine  à  empêcher  la  foule  des  musiciens  d'envahir  la  salle.  La 
dernière  fut  un  véritable  triomphe.  L'orchestre  et  les  chanteurs  y 
allaient  d'enthousiasme  ;  à  chaque  pause,  les  musiciens  et  les 
hommes  influents  se  pressaient  sur  le  théâtre,  entouraient  le  mu- 
sicien en  témoignage  d'admiration  et  de  joie.  Bernhard-Anselme 
Weber,  fidèle  à  sa  vieille  haine,  voulut  en  vain  détruire  d'avance 
l'effet  du  petit  élève,  en  faisant  exécuter  quelques  jours  auparavant 
la  Bataille  de  Viltoria,  de  Beethoven  :  l'intention  réussit  mal,  et 
ne  servit  qu'à  rendre  plus  désireux  de  savoir  comment  Weber 
avait  traité  un  sujet  à  peu  près  semblable. 

La  mauvaise  étoile  se  montra  encore  un  peu  dans  cette  cir- 
constance. De  tels  torrents  de  pluie  tombèrent  le  soir  même  que 
le  théâtre  ne  fut  rempli  qu'à  moitié.  Weber  en  était  d'autant  plus 
désolé  que  la  recette  avait  une  destination  charitable.  Briihl  avait 
fait  de  son  mieux  pour  illuminer  la  salle  et  pour  donner  un  air 
de  fête  à  toute  la  cérémonie,  dont  le  résultat  fut  des  plus  saisis- 
sants :  (t  D'aliord,  écrit  le  lendemain  Weber  à  Caroline,  je  dois 
vous  dire  le  brillant  succès  de  la  soirée  d'hier.  L'ouverture  de 
Bernhard  Anselme  fut  jouée  dans  un  silence  solennel.  Ensuite 
vinrent  mes  chants  patriotiques,  la  Chasse  sauvage  de  Lutzow,  qu'il 
fallut  répéter,  —  chose  inouïe  à  l'Opéra  de  Berlin.  Puis  ma  can- 
tate, qui,  admirablement  exécutée  par  l'orchestre  et  les  chanteurs, 
excita  un  enthousiasme  frénétique;  à  l'endroit  où  j'ai  introduit, 
après  la  bataille,  le  God  save  the  King,  j'ai  cru  que  les  bravos  ne 
finiraient  pas.  Le  roi  m'envoya  directement  le  comte  Brûhl  pour 
me  dire  qu'il  avait  été  profondément  ému,  et  qu'il  désirait  l'enten- 
dre encore  une  fois.  Ainsi,  volens,  nolens,  me  voilà  forcé  de  rester 
ici  quelques  jours  de  plus,  et  de  recommencer  la  semaine  pro- 
chaine. Du  reste,  je  ne  puis  douter  du  succès  de  la  seconde  exé- 
cution, car  l'admiration  a  été  générale,  on  s'élançait  de  tous  les 
côtés  sur  le  théâtre,  et  j'étais  presque  assommé  par  la  violence  de 
mes  admirateurs.  » 

Ce  second  concert,  dont  le  succès  semblait  infaillible,  fut  cepen- 
dant fort  compromis  par  l'arrivée  de  Mme  Catalani,  qui  menaçait 
de  tout  envahir  et  de  tout  absorber.  Il  était  certain  qu'on  ferait 
des  économies  pour  l'entendre.  Il  n'y  eut  qu'une  voix  pour  con- 
seiller à  Weber  de  remettre  son  concert  après  celui  de  la  célèbre 
cantatrice;  il  ne  voulut  jamais  y  consentir,  et  son  courage  fut  ré- 
compensé. Mme  Catalani  put  bien  faire  tort  de  100  louis  à  sa  re- 
cette, mais  les-  applaudissements  eurent  quelque  chose  de  formi- 
dable, et  il  reçut  une  lettre  de  tous  les  chanteurs  qui  faisaient 
partie  du  chœur,  et  qui  renonçaient  à  la  rémunération  de  leurs 
services;  ils  se  trouvaient  assez  payés  par  l'honneur,  et  désiraient 
le  témoigner.  Il  fut  présenté  à  la  reine  de  Hollande,  qui  le  com- 
bla d'éloges  ;  c'était  à  un  concert  donné  par  le  prince  Radziwill,  où 
de  plus  il  eut  le  plaisir  d'entendre  Mme  Catalani. 

L'effet  de  ces  deux  concerts  avait  été  si  grand,  et  le  roi  de 
Prusse  se  montra  si  aimable  pour  Weber  dans  son  audience  de 
congé,  qu'il  croyait  encore  obtenir  quelque  titre  officiel,  comme 
celui  de  compositeur  de  sa  chambre.  Weber  n'avait  jamais  été 
de  ces  artistes  qui  affectent  de  dédaigner  les  distinctions  de  ce 
genre;  au  contraire  il  en  reconnaissait  la  valeur  et  l'avantage  ma- 
tériel dans  la  société  et  dans  les  voyages.  Un  mémoire  dans  ce 
sens  fut  présenté  au  roi  par  le  comte  Brûhl ,  mais  les  conclusions 
en  furent  rejetées.  Sans  se  décourager,  Brûhl  se  flattait,  tout  au 
moins,  d'obtenir  le  titre  purement  honorifique  de  maître  de  cha- 
pelle. On  lui  répondit  par  un  refus  plus  formel  encore  :  on  ne 
voulait  rien  accorder  de  ce  qui  pouvait  éveiller  des  espérances 
qui  ne  devaient  pas  se  réaliser.  Brûhl  voulait  insister,  mais  We- 
ber ne  le  permit  pas,  et  quitta  Berlin,  persuadé  que  les  princes  ne 
feraient  rien  pour  lui. 


DE  PARIS. 


En  revenant  à  Prague,  il  avait  rc'solu  de  s'arrêter  quelque  temps 
à  Carlsbad,  où  il  rencontra  quelques  amis.  En  passant  par  Leipzig, 
on  lui  offrit  la  direction  de  l'Opéra  de  celle  ville  et  dans  les 
meilleures  conditions  ;  l'offre  venait  de  Kulsner,  le  nouvel  entre- 
preneur; mais  il  était  bien  décidé  à  ne  plus  s'allaclier  désormais 
à  aucun  établissement  fondé  sur  une  spéculation  particulière.  Il 
n'existe  pas  de  renseignements  positifs  sur  ce  que  Weber  venait 
faire  à  Carlsbad,  mais  la  suite  prouve  qu'il  avait  entrepris  ce 
voyage,  en  conséquence  de  ce  qui  s'était  passé  entre  lui  et  le  comte 
de  Witzthun,  lorsque  ce  dernier  lui  avait  remis  une  tabatière  de 
la  part  de  son  souverain.  Le  grand  maréchal,  comte  Henri  Witzhun, 
frère  de  celui-ci,  était  aloi's  directeur  royal  du  théâtre  de  Dresde,  et 
se  trouvait  à  Carlsbad.  Weber  fut  mis  en  communication  immédiate 
avec  lui,  sous  le  sini])le  prétexte  de  l'engagement  d'un  chanteur, 
mais  il  parait  que  l'idée  lui  était  venue  de  s'assurer  du  jeune 
maître  de  chapelle  et  de  l'altaclier  à  l'Opéra  allemand  qu'il  était 
sur  le  point  d'organiser  à  Dresde.  Il  écrivit  de  Carlsbad  à  son  frère 
l'offre  qu'il  avait  faite  à  Weber  et  le  grand  désir  qu'il  avait  de  la  lui 
faire  accepter,  mais  Weber  hésita  beaucoup  sur  la  durée  de  l'enga- 
gement; il  résulte  de  plusieurs  lettres  qu'on  finit  par  s'entendre 
et  convenir  des  termes  d'un  traité  soumis  à  l'approbation  royale. 
Dans  un  passage  d'une  lettre  du  comte  Henri  à  son  frère,  les 
avantages  de  la  fondation  d'un  théâtre  allemand  sont  ainsi  mis  en 
relief  :  «  C'est  maintenant  le  sentiment  général  des  musiciens  et 
des  artistes  que  la  Saxe  doit  profiter  de  sa  position  exceptionnelle 
pour  la  culture  des  arts  et  des  sciences,  puisque  toute  espérance 
d'autre  gloire  est  à  jamais  perdue.  De  toutes  les  villes,  c'est  la 
plus  riche  en  trésors  de  l'art,  celle  qui  offre  l'aspect  le  plus  sédui- 
sant; elle  peut  devenir  un  foyer  intellectuel,  une  espèce  d'arène  où 
les  grands  esprits  du  jour  se  disputent  la  palme  d'honneur  et  atti- 
rent l'attention  de  l'Europe  entière.  »  Pendant  les  négociations 
avec  le  comte  Witzthun,  Weber  eut  le  temps  de  jouir  des  eaux 
bienfaisantes  du  pays  et  de  la  société  la  plus  élevée.  Ce  ne  fut 
qu'à  Prague  que  se  conclurent  les  arrangements  qui  lui  ouvrirent 
une  perspective  nouvelle. 

A  son  retour,  il  trouva  les  affaires  du  théâtre  dans  le  plus  triste 
état  :  le  pauvre  ^ieux  Liebich,  papa  Liebich,  comme  on  l'appelait 
toujours,  était  entré  dans  la  dernière  période  du  mal  dont  il  souf- 
frait si  longtemps  ;  il  était  étendu  sur  le  lit  d'où  il  ne  devait  plus 
se  relever.  Ou  attendait  sa  mort  en  même  temps  que  la  fin  de 
l'engagement  de  Weber  et  le  théâtre  allait  perdre  ses  deux  meil- 
leurs soutiens.  Mme  Liebich,  qui  remplaçait  son  mari  malade, 
était  peu  aimée,  à  cause  de  son  cai'actère  et  de  ses  manières  impé- 
rieuses. Jusqu'à  ce  que  la  direction  pût  être  remise  à  un  successeur, 
tout  reposait  sur  Weber,  qu'on  accusa  bien  à  tort  de  négliger  les 
fonctions  qu'il  allait  bientôt  quitter.  On  étudiait  les  opéras,  on  les 
jouait  avec  autant  d'activité  que  jamais.  Pour  rendre  à  celui  qui 
viendrait  après  lui  la  tâche  plus  facile,  il  mit  en  ordre  les  archives 
de  l'Opéra,  dressa  des  catalogues  de  la  mise  en  scène,  des  costumes, 
décors,  et  de  ce  qui  appartenait  à  chaque  pièce  avec  des  l'emarques 
et  observations  sur  ce  qui  convenait  à  la  nature  et  au  goiit  du 
public  de  Prague.  Ce  fut  avec  une  conscience  parfaitement  nette 
qu'il  quitta  son  poste  après  plusieurs  années,  mais  ce  ne  fut 
pas  sans  chagrin  qu'il  se  démit  de  ses  pouvoirs  entre  les  mains 
de  la  directrice  et  qu'il  fit  ses  adieux  à  sou  vieil  ami  Liebich,  déjà 
trop  affaibli  pour  rien  sentir  et  comprendre.  La  troupe  entière  en- 
tourait la  voiture  dans  laquelle  il  monta  le  7  octobre,  emmenant 
Caroline,  qui  allait  remplir  à  Berlin  l'engagement  qu'il  lui  avait 
préparé. 

Il  y  eut  un  parfait  contraste  entre  ses  adieux  à  Prague  et  sa 
réception  à  Berlin;  il  y  arrivait  avec  sa  bien-aimée,  avec  celle  qui 
devait  être  bientôt  sa  femme,  et  dans  le  grand  monde  de  Berlin 
il  la  présentait  déjà  comme  sa  fiancée.  CaroUne  produisit  partout  i 


l'impression  la  plus  favorable  par  la  grâce  et  par  la  finesse  de  son 
esprit.  Au  théâtre  elle  ne  réussit  pas  moins;  en  peu  de  jours  on 
ne  parla  que  du  talent  et  des  charmes  de  Caroline.  Jamais  enga- 
gement d'étoile  n'avait  obtenu  un  pareil  succès. 

Caroline  Brandt  quitta  Berlin  le  7  novembre  pour  aller  donner 
quelques  représentations  à  Dresde,  tandis  que  le  comte  Witzthun 
ne  cessait  de  s'occuper  de  l'engagement  de  Weber  pour  la  créa- 
tion d'un  Opéra  allemand  dans  cette  ville;  il  avait  à  lutter  contre 
le  ministre ,  comte  Einsiedel,  qui  d'abord  lui  avait  répondu  que 
c'était  une  affaire  trop  peu  mûre  pour  songer  à  engager  un  chef 
d'orchestre.  Witzthun  n'était  pas  homme  à  se  laisser  abattre  ni 
détourner  ;  il  produisit  mémoires  sur  mémoires.  Enfin  la  question 
se  réduisit  à  celle  du  traitement,  et  l'on  voulut  que  l'engagement 
ne  fut  que  d'une  année  :  Weber  y  consentit,  tout  en  protestant 
que,  sans  sécurité  pour  l'avenir,  il  lui  serait  impossible  d'obtenir 
quelque  résultat  important. 

Le  matin  du  jour  de  Noël  1816,  Weber  reçut  le  brevet  de  sa 
nomination.  En  même  temps  deux  boites  renfermant  des  cadeaux 
de  Noël  lui  étaient  remises,  l'une  contenant  une  bague,  de  la  part 
du  roi  de  Hanovre,  l'autre  une  tabatière  de  la  part  du  roi  de  Ba- 
vière. «  Je  regardai  longtemps  la  lettre  du  comte  Witzthun,  sans 
oser  l'ouvrir,  écrivait-il  à  sa  bien-aimée  ;  était-ce  de  la  joie?  était- 
ce  du  chagrin?  Enfin  je  pris  courage.  C'était  de  la  joie.  Alors  je 
courus  chez  tous  mes  amis,  qui  m'accueillirent  en  riant  et  sa- 
luèrent profondément  le  royal  maître  de  chapelle.  Je  dois  main- 
tenant me  conformer  moi-même  au  style  de  la  cour.  Peut-être 
devrai-je  porter  une  perruque,  pour  plaire  aux  gens  de  Dresde? 
Qu'en  pensez-vous?  Toujours  est-il  que  je  réclame  un  baiser  extra 
pour  cette  bonne  nouvelle.  » 

Ainsi,  peu  de  temps  après  son  mariage  résolu,  Weber  trouvait 
une  position  qui  lui  permettait  d'assurer  à  sa  compagne  chérie 
bonheur  et  distinction. 

Paul  SMITH. 
{La  suite  prochainement.) 


THEATRE  LYRIQUE  ïlttPÉRIÂl. 

Mj/k  aOLIE  FILiIii;  DE  PERTH, 

Opéra  en  quatre  actes  et  cinq  tableaux,  paroles  de  MIL  de  Saint- 
Georges  et  Jules  Adenis,  musique  de  M.  Georges  Bizet. 

(Première  représentation  le  26  décembre  1867.) 

De  tous  les  emprunts,  dérangements,  mutilations  auxquels  se 
sont  livrés  depuis  quelque  temps  les  librettistes,  à  bout  de  scé- 
narios :  les  uns,  empruntant  à  Wilhelm  Meister  un  épisode  pour 
habiller  Mignon;  les  autres,  dérangeant  une  des  Chroniques  de  la 
Canongate  pour  en  créer  Deborah,  —  paix  à  sa  tombe  !  —  ceux-ci, 
prenant  à  Shakspeare  trois  duos  d'amour  pour  en  composer  cinq 
actes,  et  assez  heureux  pour  se  faire  absoudre  entièrement  par 
Gounod;  ceux-là,  étirant  jusqu'à  ce  qu'elle  se  brise  pitoyablement, 
tiraillée  encore  par  le  musicien,  une  ^simple  ballade  d'Hugo;  de 
tous  ces  livrets  pris  dans  Goethe,  dans  Walter  Scott,  dans  Shakspeare 
ou  dans  Victor  Hugo,  aucun  ne  se  rapproche  moins  de  son  ori- 
gine que  celui  de  la  Jolie  Fille  de  Perth.  En  vérité,  il  eût  été  dé- 
raisonnable de  chercher  aux  librettistes  une  querelle  de  critique 
si,  débaptisant  leurs  personnages  et  leur  pièce,  ils  en  avaient 
simplement  accepté  la  paternité  tout  entière  :  la  part  que  Walter 
Scott  a  dans  ce  livret  est  fort  modeste,  il  en  est  tout  au  plus  le 
parrain. 

Nous  ne  pouvons  donc  cette  fois,  pour  nous  épargner  l'ana- 
lyse  de  la  pièce,  renvoyer    le    lecteur   à  l'œuvre  dans  laquelle 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


elle  a  été  puisée;  il  nous  faut,  pour  être  le  consciencieux  rappor- 
teur de  celte  première  représentation,  —  la  seule  qui  ait  vraiment 
réussi  au  théâtre  Lyrique  depuis  Roméo  et  Juliette,  —  prendre  le 
parti  d'en  condenser  en  quelques  lignes  le  sujet. 

L'armurier  Henri  Smith  aime  la  fille  du  gantier  Glover;  une 
fleur  d'or  offerte  par  lui  à  Catherine  est  le  gage  d'espérance  ac- 
cepté par  la  jolie  fille  de  Perth  ;  mais,  un  jour,  la  fiancée  a  ren- 
contré chez  Smith  une  bohémienne  que  celui-ci  avait  arrachée 
aux  insuites  delà  foule;  sous  l'influence  d'un  soupçon  jaloux,  elle 
lui  rend  la  fleur  des  fiançailles,  et,  pour  éveiller  aussi  la  jalousie 
de  Smith,  elle  profite  de  l'entrée  d'un  jeune  seigneur  pour  feindre 
d'accepter  de  lui  un  rendez-vous. 

Au  second  acte,  le  carnaval  joyeux  ébranle  ses  chariots  enguir- 
landés, fait  sonner  les  grelots  de  ses  marottes  et  couler  à  longs 
flots  le  wisky  d'Ecosse  dans  les  tavernes  de  Perth.  Le  jeune  sei- 
gneur, qui  n'est  autre  que  le  gouverneur  de  la  ville,  préside  à  la 
mascarade;  elle  passe,  bruyante  et  tumultueuse;  le  majordome 
seul  guette  la  belle  Catherine  pour  la  conduire  au  rendez-vous. 
Un  domino  sort  de  la  maison  de  Glover  et  le  suit.  Ralph,  l'ap- 
prenti, a  tout  vu  et  court  appeler  Smitli  pour  arracher  la  fille  de 
son  maître  au  déshonneur. 

Le  domino  mystérieux  s'est  glissé  au  milieu  du  bal  masqué 
donné  par  le  gouverneur,  et,  sous  le  masque,  l'incognito  de  la  bo- 
hémienne, —  car  c'est  elle  qui  a  pris  la  place  de  Catherine  Glo- 
ver, —  sera  respecté.  Après  quelques  madrigaux  échangés,  la  ru- 
sée s'esquive,  mais  en  laissant  imprudemment  aux  mains  du  duc 
la  fleur  d'or  qu'elle  gardait  à  la  ceinture,  afin  de  la  rendre  bientôt 
à  la  jolie  fille  de  Perth  apaisée.  Smith  aussi  a  pénétré  dans  le  pa- 
lais et  s'est  soustrait  aux  regards.  Le  jour  venu,  le  duc  a  reçu 
en  audience  Glover,  que  sa  fille  a  voulu  accompagner,  et  c'est  alors 
que  l'armurier  se  montre.  Ralph  disait  donc  vrai  ;  tout  accable  la 
malheureuse  fille  :  sa  présence  à  cette  heure  matinale  chez  le  gou- 
verneur, la  fleur  d'or  que  le  duc  porte  à  son  pourpoint  !  Le  violent 
Smith  n'écoute  point  Catherine  et  maudit  celle  qu'il  nommait 
sa  fiancée.  Ralph  seul  a  cru  à  la  sincérité  de  celle  qu'il  aime  aussi 
en  secret,  et  il  propose  de  se  soumettre  au  jugement  de  Dieu 
en  provoquant  l'armurier.  Mais  celui-ci,  le  lendemain,  avant 
l'heure  du  combat,  a  revu  Catherine,  mourante  et  désolée,  et,  mieux 
que  l'indignation,  les  larmes  de  la  jeune  tille  l'ont  convaincu  de 
sou  innocence.  Cruelle  alternative!  s'il  meurt  dans  le  combat,  l'hon- 
neur de  celle  qu'il  aime  est  sauf;  s'il  est  vainqueur,  Dieu  affirme 
ainsi  le  déshonneur  de  Catherine.  Les  librettistes  savent  seuls  dé- 
nouer ces  situations  gordiennes.  Ce  coup  terrible  frappera  la  raison 
de  la  pauvre  fille,  mais,  le  jour  de  la  Saint-Valentin,  on  improvi- 
sera une  scène  où  la  bohémienne,  prenant  encore  la  place  de  Ca- 
therine, jouera  le  rôle  de  Valentine  et  Smith  celui  de  Valentin. 
La  vue  de  cette  scène  réveillera  les  souvenirs  de  la  fille  de  Glover,  et 
la  fleur  d'or  reconquise  par  le  duc  reprendra  sa  place  au  corsage 
de  la  jolie  fille  de  Perth,  qui  épousera  enfin  son  fiancé  !  Tout  cela 
est  bien  un  peu  naïf  et  décousu,  mais  il  y  a  des  situations  heu- 
reuses pour  le  musicien  dans  ce  libretto  et  il  a  su  en  profiter. 

M.  Georges  Bizet,  que  l'honorable  succès  des  Pêcheurs  de  perles 
avait  placé  au  rang  des  compositeurs  sur  lesquels  l'avenir  devait 
compter,  a  écrit  sur  ce  poëme  une  partition  qui  tient  toutes  les 
promesses  de  ses  débuts  au  théâtre.  En  raison  même  du  cas  que 
nous  faisons  de  son  talent,  nous  devions,  en  examinant  l'œuvre 
qui  nous  occupe,  critiquer  ce  qui  nous  a  semblé  le  moins  digne 
des  qualités  dont  il  a  fait  abondamment  preuve  dans  la  Jolie  Fille 
de  Perth  :  c'est  envei's  ceux  sur  lesquels  l'art  fonde  de  réelles 
espérances  que  la  critique  a  le  devoir  de  se  montrer  d'une  impar- 
tialité plus  sévère.  Nous  aurons  assez  d'éloges  à  faire  par  la  suite 
pour  commencer  cette  appréciation  rapide  par  un  reproche  qui 
n'accuse  d'ailleurs  que  la  mémoire  surprise  du  compositeur  :  le 


motif,  qui  est  comme  une  préface  déclamée  par  les  violoncelles 
dans  l'introduction,  est  vraiment  trop  parent  d'une  phrase  célèbre 
de  Gounod;  d'ailleurs  elle  ne  se  montre  que  tout  juste  le  temps 
de  se  faire  reconnaître  au  passage,  et  les  développements  qui  la 
suivent  sont  absolument  affranchis  de  toute  ressemblance  volon- 
taire. 

Le  chœur  des  armuriers  est  d'une  carrure  extrême  ;  si  le  nombre 
des  ténors  avait  été  doublé  et  s'ils  avaient  franchement  attaqué  la 
deuxième  phrase  syncopée  en  la  bémol,  ce  chœur  eût  produit  un 
grand  effet;  il  est  très-ingénieusement  orchestré.  La  phrase  de 
Smith  qui  l'interrompt  : 

Ce  soir,  amis,  c'est  grande  fête... 
est  d'une  grande  franchise  et  d'un  bon  effet  reprise  par  le  chœur. 

Il  faut  surtout  citer  dans  cet  acte,  qui  a  été  moins  goûté  que 
les  autres,  deux  quatuors  très-habilement  étudiés  ;  le  second 
surtout,  — qui  précède  le  finale, — est  une  des  bonnes  pages  de  la 
partition  ;  les  voix  y  sont  adroitement  groupées  et  le  rhythme  qui 
domine  le  morceau  est  des  plus  heureux. 

Citons  aussi  dans  cet  acte  un  air  de  Catherine  ; 
Vive  l'hiver  et  vive  son  cortège  ! 
qui  est,  en  réalité,  fort  original.  —  Dans  le  duo  d'amour,  qui  nous 
a  paru  inégal  (est-ce  la  faute  des  exécutants  qui  ont  montré  plu- 
sieurs fois  de  l'indécision?)  nous  avons  remarqué  un  ensemble 
où  le  soprano  brode  sur  le  chant  simple  du  ténor  une  charmante 
arabesque. 

Le  second  acte  a  été  accueilli  avec  une  grande  faveur  ;  il  faut  à 
peu  près  signaler  tous  les  morceaux  qui  le  composent;  la  ronde  de 
nuit  n'a  guère  été  goûtée  ;  un  jeu  de  scène  oblige  les  bourgeois 
peureux  qui,  sous  la  conduite  du  père  Glover,  font  la  police  noc- 
turne des  rues  de  Perth,  à  trembler  de  tous  leurs  membres  à 
chaque  alarme  nouvelle,  un  nuage  qui  passe,  un  fanal  qui  s'éteint, 
un  rat  qui  rentre  dans  son  trou  ;  or  comme  cette  faiblesse  armée 
est  couverte  d'armures  préservatrices,  il  en  résulte  à  chacun  de 
ses  mouvements  de  terreur  un  bruit  de  ferraille  qui  domiue  les 
voix  et  l'orchestre. 

Après  un  chœur  de  masques,  le  morceau  qui  a  enlevé  tous  les 
suffrages,  c'est  la  danse  bohémienne,  d'une  allure,  d'un  caractère 
vraiment  étranges  :  la  harpe  détache  son  pizzicato  clair,  pendant 
que  la  flûte  brode  un  motif  très-rhythmé  d'une  délicieuse  mono- 
tonie ;  peu  à  peu  les  instruments  divers  s'enlacent  dans  ce  motif 
principal,  le  crescendo  éclate  enfin  en  tutti  brillant  en  si  majeur.  Le 
motif  du  tutti  passe  ensuite,  légèrement  transformé  dans  son  rhythme, 
aux  bassons;  cette  ingénieuse  transformation  a  bien  certainement 
échappé  aux  plus  attentifs,  grâce  à  la  violence  avec  laquelle  a 
été  battu  le  trille  qui  le  domine.  Au  lieu  d'un  détail  ingénieux, 
il  en  est  résulté  une  grande  confusion.  Cette  petite  tache  d'exécu- 
tion a  été  effacée  par  la  fin  de  la  danse,  à  laquelle  se  mêlent 
quelques  notes  du  chœur  ;  on  a  bissé  ce  très-piquant  morceau. 

Il  eût  fallu  plus  de  finesse  et  d'intention  que  n'y  en  a  mis 
Mlle  Ducasse  pour  faire  valoir  ses  couplets  : 

Les  seigneurs  de  la  cour... 
d<mt  elle  précipite  trop  la  fin;  il   y  a  de  charmants  dessins  de 
violons  sur  les  tenues,  qui   terminent   chaque  membre  de  phrase 
de  la  mélodie. 

Nous  n'aimons  pas  beaucoup  le  motif  de  la  sérénade  de  Smith  : 
il  n'a  pas  l'originalité  que  nous  eussions  voulu  rencontrer  après 
cette  danse  de  bohémiens ,  si  pittoresque,  et,  sans  le  soin  de  l'ac- 
compagnement qui,  chez  les  musiciens  du  savoir  de  M.  Bizet, 
sauve  souvent  bien  des  défaillances  d'inspiration,  ce  morceau  ne 
nous  eût  laissé  nul  souvenir. 

Mais,  en  revanche,  nous  n'aurons  que  des  éloges  pour  l'air  de 
Ralph;  cela  est  d'une  étrangeté  toute  particulière,  et  la  difficulté 


DE  PARIS. 


de  ce  récit  entrecoupé  a  été  vaincue  très-habilement  ;  le  cri  de 
désespoir  de  Ralph  : 

Hé!  l'hôtesse,  mon  flacon. 
Que  j'y  laisse  ma  raison  ! 
rendu,  il  faut  le  dire,  avec  un  véritable  sentiment  dramatique  par 
M.  Lutz,  a  fait  éclater  toute  la  salle  en  applaudissements  prolongés. 

Le  morceau  capital  du  troisième  acte  n'a  pas  été  compris 
comme  il  devait  l'être  par  le  public  de  la  première  représentation; 
nous  avons  à  en  accuser  encore  une  certaine  indécision  des  exécu- 
tants, indécision  assez  facile  à  concevoir;  ce  morceau,  en  ett'et  (duo 
entre  le  duc  et  Mab),  est  accompagné  par  l'orchestre  de  danse 
jouant  un  menuet  dans  la  coulisse.  Cet  accompagnement,  très-pi- 
quant, oîi  flûte  et  violon  se  mêlent  harmonieusement  dans  le  même 
motif,  troublait  peut-être  les  chanteurs  qui  quelquefois  perdaient 
la  mesure  ;  quand  ce  duo  sera  bien  exécuté,  il  produira  un  effet 
très-original,  car  la  franchise  de  la  mélodie  chantée  n'est  nulle- 
ment contrariée  par  celle  qui  se  joue  dans  la  coulisse. 

Enfin,  le  finale  dramatique  de  cet  acte  a  révélé  chez  IVI.  Bizet, 
d'une  façon  décisive,  une  véritable  habileté  scénique,  qualité 
rare  et  précieuse  sur  laquelle  il  nous  est  permis  de  fonder  pour 
l'avenir  de  l'auteur  de  la  Jolie  Fille  de  Perih  de  très-légitimes  es- 
pérances. 

Le  chœur  de  la  provocation,  au  quatrième  acte ,  est  franc,  mais 
la  scène  du  démenti  ne  nous  a  pas  paru  assez  énergique.  Il  y  a 
des  phrases  pleines  de  charme  et  de  tendresse  dans  le  duo  qui 
suit  cette  scène,  entre  autres  la  phrase  en  vii  bémol,  à  trois 
temps  : 

0  beaux  rêves  d'or  ! 
0  souvenirs  de  mon  enfance  ! 

La  fête  de  la  Sainte-Valentin  vient  égayer  le  dernier  tableau, 
assombri  un  moment  par  la  scène  de  folie  de  Catherine,  oiî  nous 
avons  remarqué  surtout  un  accompagnement  d'une  oppression  dou- 
loureuse, tout  à  fait  en  situation.  Un  motif  du  second  acte,  repris 
tour  à  tour  par  Smith  et  par  Catherine,  conduit  au  finale  ;  celui-ci 
clôt  dignement  cette  partition,  qui  permettra  au  théâtre  Lyrique, 
grâce  au  succès  qu'elle  aura  certainement,  de  préparer  à  loisir  ses 
nouveautés,  auxquelles  la  Jolie  Fille  de  Perth  fera  de  charmants 
lendemains. 

La  débutante,  Mlle  Devriès,  a  une  très-jolie  voix,  facile,  se 
jouant  de  la  difficulté,  et  l'on  ne  peut  refuser  à  la  jeune  artiste 
beaucoup  de  bonne  volonté  et  un  grand  instinct  du  théâtre,  encore 
mal  servi  peut-être  par  la  nature  un  peu  saccadée  de  son  jeu. 
L'étude  en  fera,  sans  doute,  une  artiste  qui  rendra  de  réels  ser- 
vices au  théâtre  Lyrique  dans  des  rôles  plus  importants  que  celui 
de  Catherine  Glover. 

MM.  Barré  et  Massy  jouent  et  chantent  convenablement  les  rôles 
du  duc  et  de  l'armurier;  M.  Warlel  ne  s  écoute  pas  assez,  ce  qui 
fait  qu'on  entend  trop  certaines  notes  passant  trop  facilement  à 
côté  du  ton.  Mlle  Ducasse  joue  avec  intelligence  le  rôle  de  la  bo- 
hémienne; mais  le  succès  a  été  pour  M.  Lutz  qui  a  chanté,  d'une 
manière  fort  remarquable,  son  air  très-difficile  du  deuxième  acte. 

La  pièce  nouvelle  méritait  mieux ,  comme  mise  en  scène  :  nous 
y  avons  revu,  sur  le  dos  des  seigneurs  et  des  grandes  dames  de 
la  cour  du  duc  de  Rothsay,  des  pourpres,  des  brocarts  et  des 
hermines  qui  ont  depuis  longtemps  acquis  des  droits  à  la  retraite 
pour  ancienneté  de  service. 

A  part  la  légère  critique  que  nous  avons  faite  à  propos  d'un 
trille  trop  forcé  dans  la  danse  bohémienne,  l'orchestre  ne  mérite 
que  des  éloges  pour  la  façon  dont  il  a  su  faire  ressortir  l'orches- 
tration très-habile  et  très-touffue  de  M.  Georges  Bizet. 

L'auteur  de  la  Jolie  Fille  de  Perth  vient,  par  le  succès  de  son 
ouvrage ,  de  prendre  l'engagement,  vis-à-vis  du  public,  de  le  faire 


bientôt  juge  d'une  œuvre  nouvelle  qui  pourra  le  placer  d'une 
manière  décisive  au  rang  des  compositeurs  éminents  de  l'école 
française  contemporaine. 

Armand  GOUZIEN. 


THÉÂTRE  DES  HENnS-PLUSIRS. 

«ENEVIÉVE  DE  BRAUANT, 

Opéra-bouffe  en  trois  actes  et  dix  tableaux,  de  MM.  Hector 
Crémieux  et  Tréfeu,  musique  de  J.  Offenbach. 

(Première  représentation  le  26  décembre  1867.) 

Lorsque  la  première  Geneviève  de  Brabant  fut  représentée  aux 
Bouffes-Parisiens  en  1859,  ce  théâtre  était  alors  à  l'apogée  de  son 
succès.  La  pièce  était  magnifiquement  montée;  elle  avait  pour 
principaux  interprèles  Désiré,  Léonce,  Mlle  Lise  Tautin  et  la  belle 
Mlle  Maréchal  dans  le  rôle  de  Geneviève.  Offenbach  y  avait  pro- 
digué de  charmants  motifs,  dont  quelques-uns  sont  restés  célèbres. 
Et  cependant  tous  ces  éléments  favorables  ne  purent  lutter  contre 
l'indifférence  du  public.  La  faute  en  était  évidemment  aux  au- 
teurs des  paroles,  qui  avaient  fait  fausse  route  en  poussant  la  fan- 
taisie au  delà  des  limites  permises,  même  dans  un  genre  où  l'on 
permet  tant  do  choses. 

La  musique  d'Offenbach  méritait  de  survivre  à  ce  naufrage; 
aussi  doit-on  savoir  gré  au  petit  théâtre  des  Menus-Plaisirs  de  la 
tentative  qu'il  vient  de  faire  en  ce  sens  et  des  sacrifices  de  toute 
espèce  qu'il  y  a  consacrés.  Avant  tout,  il  fallait  remanier  l'ouvrage 
de  MM.  Jainie  fils  et  Tréfeu.  C'est  M.  Hector  Crémieux,  l'un  des 
auteurs  de  Robinson  Crusoé,  qui  a  entrepris  cette  tâche,  et  il  faut 
convenir  qu'il  était  difficile  de  s'en  mieux  acquitter.  Nous  ne  lui 
reprocherons,  surtout  dans  la  première  partie,  que  certaines  lon- 
gueurs qu'on  peut  aisément  faire  disparaître.  Mais,  en  revanche,  il 
a  introduit  dans  l'économie  de  la  pièce  deux  créations  nouvelles, 
qui  lui  ont  donné  le  ressort  qu'elle  n'avait  pas.  C'est  d'abord  l'in- 
tervention du  page  Drogan  dans  les  aventures  de  Geneviève,  dont 
il  se  fait  le  protecteur,  et  puis  l'action  épisodique  des  deux  gens- 
d'armes  indiqués  par  la  complainte,  et  qu'on  avait  maladroitement 
oubliés  dans  l'opérette  des  Bouffes-Parisiens.  Ces  deux  gens-d'ar- 
mes, parfaitement  joués  par  MM.  Ginet  et  Gabel,  sont  tout  simple- 
ment le  moyen  d'attraction  le  plus  certain  de  la  Geneviève  des 
Menus-Plaisirs  ;  ils  deviendront  légendaires  comme  leurs  confrères 
de  Gustave  Nadaud. 

Hâtous-nous  d'ajouter  que  la  partition  d'Offenbach,  revue  et 
considérablement  augmentée,  n'aura  pas  une  médiocre  influence 
sur  le  succès  qui  se  dessine  en  ce  moment  dans  de  très-vastes  pro- 
portions. Nous  y  avons  retrouvé  avec  plaisir  les  couplets  drola- 
tiques de  la  Poule  sur  un  mur,  la  gracieuse  sérénade  :  Ohé!  de 
la  fenêtre,  ohél  la  chanson  de  Charles  Martel,  et  le  fameux  finale  : 
Le  clairon  qui  senne,  encore  dans  la  mémoire  de  tout  le  monde. 
L'autre  soir,  en  l'entendant,  les  spectateurs  n'ont  pas  pu  se  dé- 
fendre d'un  enthousiasme  frénétique,  et  il  a  fallu  relever  le  rideau 
pour  le  redire  en  entier. 

Parmi  les  nouveaux  morceaux  d'Offenbach,  il  y  en  a.  plusieurs 
qui  ont  provoqué  de  légitimes  bravos,  notamment  la  chanson  du 
pâtissier,  le  très-joli  trio  de  femmes  :  Chérubin,  qu'il  a  l'air  doux  ! 
les  couplets  du  page,  au  sixième  tableau,  la  scène  de  l'ermite  et, 
en  première  ligne,  les  couplets  des  deux  gens  d'armes,  qui  sont  très- 
bien  réussis,  et  qu'on  a  eu  raison  de  faire  bisser. 

Le  rôle  du  page  Drogan,  la  cheville  ouvrière  de  l'ouvrage,  est 
joué  et  chanté  par  Mlle  Zulma  Boufifar  avec  un  brio,  avec  une 
facilité  que  n'ont  pas  même  effleurés  les  trois  cents  représentations 
consécutives  de  la  Vie  Parisienne,  dont  elle  sort  à  peine. 


REVUE  ET  GAZIiTTE  MUSICALE 


Mlle  Baudier  n'a  pas,  à  beaucoup  près,  le  charme  de  Mlle  Ma- 
réchal sous  les  traits  de  Geneviève;  mais  elle  chante  avec  goût. 
Mme  de  Brigny-Varney,  dans  yon  rôle  de  soubrette,  t'ait  preuve  de 
vivacité  piquante  et  vocalise  agréablement. 

Gourdon,  que  nous  avons  souvent  applaudi  aux  Fantaisies- 
Parisiennes,  tire  un  excellent  parti  du  rôle  de  Siffroid  ;  Daniel  Bac 
fait  tout  ce  qu'il  peut  de  celui  de  Golo;  quant  à  Lesage,  qui  re- 
présente Charles  Martel,  nous  n'avons  pas  reconnu  en  lui  l'ancien 
baryton  du  théâtre  Lyrique. 

Une  mise  en  scène  brillante,  de  riches  costumes,  un  intermède 
de  danse,  avec  Mlle  Battagliri,  des  chants  tyroliens,  exécutés  par 
la  famille  Martens,  qu'on  a  tant  entendue,  cet  été,  à  l'Alcazar  des 
Champs-Elysées,  d'intelligents  artistes  secondaires,  un  essaim  de 
jolies  femmes  dans  les  petits  rôles  et,  enfin,  un  bon  orchestre,  con- 
duit avec  verve  par  M.  BouUard,  \oilà  certes  plus  qu'il  n'en  faut 
pour  aider  à  rendre  plusieurs  lois  centenaire  la  nouvelle  Geneviève 
de  Brabant   de  l'heureux  et  universel  maestro  Jacques  Offenbach. 

D. 


Une  indisposition  de  notre  collaborateur  M.  Mathieu  de  Monter 
nous  force  de  renvoyer,  à  dimanche  prochain ,  notre  Revue  habi- 
tuelle de  l'année  écoulée. 


NOUVELLES  DES  THËÀTBES  LYRIQUES. 

^*^  Ou  a  donné  lundi  au  théâtre  impérial  de  l'Opéra  Guillaume  Tell. 
—  Une  indisposition  de  Faure  a  fait  changer  mercredi  le  spectacle  ;  on 
a  représenté  Robert  le  Diable  et  vendredi  le  Trouvère  et  la  Source. 

^*^  Mme  Marie  Sass  est  engagée,  pour  le  mois  d'avril,  au  théâtre  de 
la  Monnaie,  à  Bruxelles. —  Elle  chantait  la  semaine  dernière,  au  théâtre 
d'Anvers,  le  rôle  de  Valentine,  des  Huguenots;  elle  y  a  été  applaudie 
avec  enthousiasme. 

^*^  Toujours  salle  comble  à  l'Opéra-Comique  avec  Robinson  Crusoé. 

^*^  Mlle  Brunet-Lafleur  répète  en  ce  moment  le  rôle  de  Carlo  dans 
la  Part  du  Diable.,  qu'on  va  reprendre  au  théâtre  de  l'Opéra-Comique. 

,(:.*»  La  direction  de  ce  théâtre  vient  de  renouveler  les  engagements 
de  Mlle  Cico  et  de  Potel. 

^%  Par  son  jugement  rendu  vendredi,  la  Cour  impériale  a  infirmé  ce- 
lui du  Tribunal  civil  qui  avait  autori-é  Mme  Monbelli  (Mme  Crémieux)  à 
s'engager  comme  cantatrice  au  théâtre  de  l'Opéra-Comique. 

^*^  Marta  a  de  nouveau  été  donnée  hier  au  théâtre  Italien,  avec  Mlle 
Harris  qui  s'y  fait  de  plus  en  plus  applaudir.  —  On  annonce,  pour  la 
semaine  prochaine,  la  Gazsa  ladra  avec  Adelina  Patti. 

^**  Le  théâtre  Lyrique  annonce ,  pour  mardi ,  la  reprise  de  la  Fan- 
chonnette . 

^**  La  direction  de  l'Athénée  a  engagé  Mlle  Moya,  une  jeune  et 
charmante  personne  qui  joua,  il  y  a  deux  ans,  aux  Italiens  dans  le  Ballo 
et  la  Sonnambiila,  et  trouva  moyen  de  se  faire  applaudir  à  côté  d'Ade- 
lina  Patti.  —  On  parle  aussi  de  l'engagement  de  Désiré  à  ce  théâtre. 

5^**  VAfrieaine  poursuit  à  Nice  le  cours  de  ses  brillantes  représenta- 
tions. Genibrel  qui  vient  de  faire  ses  débuts  au  Grand-Théâtre,  et  Mlle  de 
Rionnelle  y  ont  été  l'objet  de  bravos  et  de  rappels  enthousiastes;  ces 
deux  artistes  n'ont  pas  eu  moins  de  succès  dans  Robert  le  Diable.  Le 
rôle  d'Alice  a  été  un  nouveau  triomphe  pour  Mlle  de  Rionnelle  qui,  après 
l'air  du  premier  acte,  la  scène  de  la  croix  et  le  trio  sans  accompagne- 
ment, a  été  applaudie  à  tout  rompre.  —  Quelques  jours  après,  dans  un 
rôle  tout  à  fait  opposé,  celui  de  Rose  Friquet  dans  les  Dragons  de  Vil- 
lars,  la  jeune  artiste  a  donné  une  preuve  non  moins  heureuse  de  la 
flexibilité  de  son  chant  et  de  son  talent  de  comédienne.  Elle  a  été  rap- 
pelée plusieurs  fois. 

„;**  Le  Grand-Théâtre  de  Lyon  fait  de  magnifiques  recettes  avec 
l'Africaine.  Les  étrangers  de  passage  dans  cette  ville  abondent  aux  belles 
places  et  rendent  à  la  salle  la  physionomie  caractéristique  des  soirées  de 
l'Africaine  de  l'an  passé. 

^*^  Les  journaux  de  Lisbonne  constatent  unanimement  et  en  termes  en- 
thousiastes le  succès  de  Mongini  dans    les  Huguenots  et  la  Sonnambula. 

**5f  On  nous  écrit  de  Saint-Pétersbourg  que  Fausto  vient  d'être  repré- 
senté au  théâtre  Italien  avec  Mme  Pauline  Lucca,  qui  a  été  admirable 
dans  le  rôle  de  Marguerite.  Mario  s'est  relevé,  dans  celui  de  Fausto,  de 
l'échec  qu'il  avait  subi  à  son  début  dans  il  Barbiere;  toutefois,  une  dé- 


pêche a  été  envoyée  à  Tambcrlick  pour  l'inviter  à  revenir  s'il  était  dis- 
ponil)le. 

**„j  La  construction  de  nouveau -i  théâtres  étant  à  l'ordre  du  jour,  — 
le  moment  viendra  où  il  faudra  construire  des  spectateurs!  —  on  prête 
à  M.  de  Salamanca  le  projet  d'édifier  sur  le  boulevard  Haussmann  une 
scène  spécialement  affectée  à  l'exploitation  du  genre  dramatique  et  bouffe 
italien . 

^''ij:  Les  abords  du  nouvel  Opéra  sont  complètement  régularisés,  et  les 
rues  qui  entourent  l'édifice  en  construction  portent  définitivement,  par 
décret  spécial,  les  noms  de  Meyerbeer,  Halévy,  Scribe  et  Gluck.  Le  nom 
de  Mozart  a  été  donné  à  une  avenue  conduisant  de  la  Muette  à  Auteuil. 

^*,i,  Toujours  même  affluence  aux  bals  masqués  de  l'Opéra.  Ce  résultat 
est  particulièrement  dû  à  l'orchestre  de  Strauss,  qui  exécute  avec  un 
entrain  diabolique  les  morceaux  de  l'album  composé  par  son  habile  chef. 


NOUVELLES  DIVERSES. 


^%  M.  le  général  Mellinet  a  nommé,  par  un  arrêté  récent,  M.  Emile 
Jonas,  inspecteur  général  des  corps  de  musique  de  la  garde  nationale  de 
la  Seine;  M.  Jancourt,  l'éminent  basson  solo  de  la  Société  des  concerts 
du  Conservatoire,  capitaine  de  musique  de  la  cinquième  subdivision,  en 
remplacement  de  M.  Forestier,  décédé;  M.  Thibaut,  l'excellent  chef  de 
la  fanfare  des  cuirassiers  de  la  Garde,  licenciée,  capitaine  de  musique  de 
la  deuxième  subdivision,  en  remplacement  de  M.  E.  Jonas. 

^*»  La  Société  des  Concerts  du  Conservatoire  donne  aujourd'hui  di- 
manche, à  2  heures,  son  troisième  concert,  dirigé  par  Georges  Hainl.  En 
voici  le  programme  :  1"  symphonie  en  la,  de  Beethoven  ;  —  2°  chœur  de 
Psijclié,  d'Ambroise  Thomas; —  3°  concerto  en  ré  mineur  pour  piano,  de 
Mozart  (exécuté  par  Mme  Tardieu  de  Malleville);  —  A"  air  de  Slratouice, 
de  Méhul  (cliauté  par  M,  VVarot);  —  5°  marcliedu  Tannhauser  (chœur), 
de  Wagner. 

jt(t  Aujourd'liui,  à  2  lieures,  au  cirque  Napoléon,  dixième  concert 
populaire  de  musique  classique,  sous  la  direction  de  J.  Pasdeloup.  On  y 
entendra  :  J"  ouverture  de  Fidelio,  en  mi  majeur,  de  Beethoven;  — 
2°  symphonie  en  mi  bémol,  n°  53,  de  Haydn  (introduction,  allegro, 
adagio,  menuet,  finale,  adagio),  de  Gnunod;  —  3°  concerto  pour  violon, 
de  Léonard  (exécuté  par  l'auteur)  ;  —  A"  ouverture  {la  Mer  calme),  pre- 
mière audition,  de  Mendelssohn  ;  —  S°  Imitation  à  la  Fofcc  (orcliestrée 
par  Berlioz),  de  Weber. 

,ll*^,  La  seconde  matinée  de  Mme  Pierson-Bodin  a  eu  lieu  dimanche  der- 
nier en  présence  d'un  nombreux  auditoire.  Outre  le  délicieux  chanteur 
Pagans,  don!  le  succès  a  été  immense,  on  a  vivement  applaudi  dans  la 
partie  instrumentale  une  sonate  de  Beethoven,  exécutée  par  Mme  Pierson- 
Bodin  et  M.  Hammer,  et  un  très-beau-  trio  de  Mme  Farrenc  pour  piano, 
clarinette  et  violoncelle,  dont  l'adagio  a  surtout  produit  une  grande  impres- 
sion. Ajoutons  que  Mme  Pierson,  MM.  Ruse  et  Alfred  Marx  ont  grandement 
contribué  à  son  succès.  Des  variations  de  Beethoven,  exécutées  par  Mme 
Chopard-Chassant,  un  solo  de  violon  par  M.  Hammer,  et  une  fantaisie 
sur  la  Juive  par  M.  A.  Marx,  ont  tour  à  tour  ému  et  charmé  l'auditoire. 
Enfin,  les  belles  variations  de  Weber  pour  piano  et  clarinette  ont  été 
brillamment  enlevées  par  Mme  Chopard  et  M.  Rose.  Mentionnons,  en 
terminant,  un  air  italien  chanté  avec  beaucoup  de  charme  par  Mlle  C. 
M***,  et  une  pièce  de  vers  dite  d'une  manière  ravissante  par  Mme  Ar- 
mand-Richault. 

^*^  La  Société  centrale  d'éducation  et  d'assistance  pour  les  sourds- 
muets  de  France  donnera,  le  18  de  ce  mois,  salle  Herz,  une  grande 
soirée  musicale  et  dramatique  à  laquelle  Mlles  Battu  et  Favart,  MM. 
Delle-Sedie,  Delaunay,  Leroy,  Werroust,  Saint-Saëns,  etc.,  prêteront 
leur  concours. 

»**  Nous  disions  dans  notre  dernier  numéro  que  Ulmann  avait  eu 
l'heureuse  idée  de  s'attacher  Seligmann  pour  sa  prochaine  tournée;  nous 
apprenons  qu'il  a  eu  également  la  bonne  fortune  de  décider  Ed.  Wolff 
à  faire  partie  de  son  personnel  d'artistes.  C'est  là  certes  un  excellent 
choix,  car  des  morceaux  exécutés  par  Wolff  et  Yieuxtemps  ne  peuvent 
manquer  d'attirer  la  foule  et  de  la  passionner. 

^*t  A  une  très-belle  soirée  donnée  la  semaine  dernière  chez  M.  et 
Mme  Garfounkel,  où  chantaient  plusieurs  artistes  du  théâtre  Italien  et 
du  théâtre  Lyrique,  Seligmann  s'est  fait  applaudir  avec  enthousiasme  en 
jouant,  avec  ce  sentiment  profond  qui  caractérise  le  talent  du  célèbre 
violoncelliste,  la  Kouitra,  morceau  de  sa  composition,  et  VEloge  des  larmes 
de  Schubert. 

^*ji:  Sivori  vient  d'arriver  à  Paris. 

ai*5R-  M.  Joseph  Servais  marche  brillamment  sur  les  traces  de  son  père; 
il  vient  de  recevoir  au  Cercle  philharmonique  de  Bordeaux,  qui  l'avait 
engagé,  l'accueil  le  plus  sympathique.  Des  bravos  enthousiastes  ont,  à 
plusieurs  reprises,  salué  divers  morceaux  de  la  composition  du  célèbre 
défunt  exécutés  par  son  fils  avec  une  vigueur  d'archet,  une  puissance  de 
son,  un  sentiment  exquis  qui  rappelaient  étonnamment  à  l'auditoire  le 
talent  de  celui  qu'ils  avaient  si  souvent  applaudi. 


DJi  PAKIS 


^""^  Mme  Farrenp  nous  écrit  pour  rectifier  une  allégation  de  la  France 
musicale,  relative  k  une  jeune  pianiste  de  beaucoup  de  talent,  Mlle  Cœvoel, 
qui  s'est  l'ait  entendre  la  semaine  dernière  dans  une  matinée  musicale 
de  Mme  Pellereau.  Mme  Farrenc  rappelle  que  l'honneur  de  l'avoir 
formée  n'appartient  pas  à  Mme  Escudier  Kastner,  dont  elle  a  pu  rece- 
voir quelques  conseils,  mais  à  Mme  Pellereau  d'abord,  et  au  Conserva- 
toire ensuite,  où  elle  a  suivi  successivement  les  classes  de  Mme  Maucorps, 
de  Baillot,  pour  l'accompagnement,  et  la  classe  de  Mme  Farrenc  elle- 
même,  d'où  elle  est  sortie  en  remportant  avec  éclat  un  premier  prix  de 
piano. 

51;-*,  Un  jugement  rendu  par  la  Cour  impériale  de  Rennes,  dans  un 
procès  intenté  par  Rossini,  Plantade,  Haas,  etc.,  conjointement  avec  la 
Société  des  auteurs,  compositeurs  et  éditeurs  de  musique,  vient  de  confir- 
mer encore  une  fois  la  jurisprudence  adoptée  par  les  tribunaux,  à  savoir 
que  :  "  les  compositeurs  de  musique,  leurs  héritiers  et  représentants  ont 
le  droit  d'empêcher  que  des  morceaux  leur  appartenant  et  non  encore 
tombés  dans  le  domaine  public  soient  exécutés  publiquement,  sans  leur 
autorisation  formelle  et  préalable.  »  Pareil  procès  a  été  intenté  à  la 
Société  des  eaux  de  Dinan. 

.^.%  L'Ami  des  Arts,  dont  nous  avons  déjà  annoncé  la  fondation,  vient 
de  paraître  sous  la  direction  de  M.  Bronislas  Wolowski.  Voici  le  som- 
maire de  son  premier  numéro:  une  Causerie  de  M.  Henry  Maret  (rédac- 
teur en  chefj;  un-.  Lettre  de  M.  Francisque  Sarcey;  la  Femme  et  les 
Beaux-Arts,  par  M.  Oscar  Comettant;  Victor  Jacquemont,  par  M.  Jules 
Levallois;  Beethoven,  par  M.-J.  Weber;  les  Echos  de  Paris,  par  M.  Emile 
Blavet,  et  les  comptes  rendus  des  premières  représentations  par  MM.  B. 
Wolowski,  Félix  Jahyer  et  Charles  Giquel,  etc..  etc.  M.  Francisque  Sar- 
cey publiera  dans  l'Ami  des  Arts  des  portraits  d'artistes  dramatiques  qui 
auront  un  succès  égal  à  tout  ce  qui  est  sorti  de  la  plume  de  ce  critique, 
un  des  plus  justement  estimés  de  nos  écrivains  contemporains.  M.  Albert 
Vizentini  fera  dans  l'Ami  des  Arts  les  bruits  des  coulisses.  —  M.  B.  Wo- 
lowski, voulant  se  consacrer  tout  entier  au  journal,  a  chargé  de  la  di- 
rection de  son  Agence  des  concerts  son  frère  cadet,  M.  Ladislas  Wolowski. 
Bonne  chance  et  bonne  réussite  à  notre  nouveau  confrère. 

,f't  Un  professeur  de  Naples,  Luigi  Celentano,  vient  de  faire  paraître 
Une  brodiure. intitulée:  Intorno  all'arle  del  cantare  in  Ilalia  nel  secolo  xix, 
où  sont  traitées  avec  beaucoup  de  sagacité  et  à  un  point  de  vue  élevé 
d'importantes  questions  relatives  à  l'art  du  chant.  L'auleur  insiste  prin- 
cipalement sur  l'abandon  du  chant  orné,  abandon  qui  lui  paraît  regret- 
table en  ce  que  jadis  les  études  de  chant  étaient  forcément  plus  com- 
plètes et  plus  sérieuses  qu'aujourd'hui,  et  que  la  force,  l'expression  et 
l'émission,  qualités  seules  nécessaires  pour  l'exécution  de  la  musique 
moderne,  ne  peuvent  pas  plus  se  dispenser  d'études  que  l'agilité;  enfin, 
que  la  multitude  de  chanteurs  improvisés  qui  surgissent  de  nos  jours  ne 
peut  qu'entraîner  l'art  du  chant  sur  une  pente  fatale. 

**:t  Un  Almanaque  musical,  le  premier  de  ce  genre  qui  ait  paru  en 
Espagne,  vient  d'être  publié  à  Barcelone  par  M.  F.  Luis  Obiols,  jeune 
compositeur  et  critique  de  talent.  Ce  recueil  contient  des  documents 
statistiques  et  historiques  d'un  grand  intérêt. 

jf*:^  Croirait-on  que  l'harmonica  fut  inventé,  en  1740,  par  Richard 
Pochrich,  un  fils  de  la  verte  Eryn  ?  Les  bardes  irlandais  adoptèrent  aus- 
sitôt cet  instrument  mélodieux,  et  l'oi  ajoute  même  que  Pochrich  jouait 
de  son  harmonica  avec  une  perfection  telle  que  deux  gendarmes,  —  ô 
rochers  d'Orphée!  —  étant  venus  pour  l'arrêter  (la  loi  anglaise  décrétait 
alors  les  musiciens  d'infamie),  leur  émotion  fut  telle  qu'ils  ne  purent 
accomplir  leur  mandat.  La  musique  adoucit  les  mœurs  ! 

^**  Au  service  funèbre  célébré  la  semaine  dernière  à  Bade,  en  mémoire 
de  M.  Ed.  Benazet,  en  présence  d'une  affluence  extraordinaire  de  monde, 
la  partie  musicale  de  la  solennité  a  été  dirigée  par  M.  Kœnnemann,  et 
remplie  par  les  artistes  du  théâtre  Grand-Ducal  de  Carlsruhe,  les  chœurs 
religieux  de  Bade  et  l'orchestre  de  la  Conversation.  On  a  exécuté  un 
Requiem  de  Xavier  Schmid,  dans  lequel  se  trouvaient  intercalés  un  mor- 
ceau de  Cherubini  pour  soprano,  dit  par  Mlle  Ludecke,  et  un  Benedictus 
composé  pour  la  circonstance  par  Kalliwoda,  et  chanté  par  le  ténor  Stol- 
zenberg.  L'exécution  a  produit  un  effet  saisissant  sous  les  voûtes  de  la 
vieille  église. 

^*j,  On  annonce  la  mort,  à  Wiesbaden,  de  l'intendant  des  théâtres 
royaux,  M.  de  Béquignolles  ;  il  n'était  âgé  que  de  quarante-deux  ans. 


ÉTRANGER 

»*»  Baden-Baden. —  La  nouvelle  direction  de  l'établissement  thermal  de 
Baden  apportera  certaines  modifications  dans  les  plaisirs  qu'elle  offre  à 
ses  visiteurs.  Les  représentations  théâtrales  y  auront  moins  d'impor- 
tance, et  on  renonce  aux  pièces  inédites.  Par  compensation,  le  nombre 
des  concerts  serait  doublé.  —  Une  feuille  quotidienne,  servant  de  pro- 
gramme, remplacera  V Illustration  de  Bade,  qui  est  supprimée. 

^*t  Stuttgart.  —L'Africaine  est  à  l'étude;  on  en  attend  la  reprise  vers  le 
milieu  de  janvier. 

iVf*»  Stettin.  —  Roméo  et  Juliette,  de  Gounod,  représenté  pour  la   pre- 


mière fois  le  i8  de  ce  mois,  y  a  été  reçu  avec  indifférence.  Plusieurs 
morceaux  ont  cependant  été  applaudis;  les  artistes  ont  fait  de  leur 
mieux,  et  le  public  leur  en  a  témoigné  sa  satisfaction. 

^,**  Vienne.  —  Le  célèbre  t(:nor  Roger  a,  paraît-il,  accepté  un  engage- 
ment qui  l'attache  à  l'Opéra  impérial  en  qualité  de  régisseur.— Niemann 
a  signé  pour  trois  ans  avec  le  même  théâtre;  il  doit  chanter,  à  dater  de 
l'ouverture  de  la  nouvelle  salle,  quarante  fois  chaque  année  pendant  les 
mois  de  septembre,  octobre,  novembre  et  décembre. 

^%  Venise.  —  L'ouverture  de  la  saison  d'hiver  (ou  de  carnaval)  à  la 
Fenice  a  eu  lieu,  comme  c'est  l'habitude  pour  les  théâtres  italiens,  le 
26  décembre,  jour  de  la  Saint-Etienne.  On  a  donné  Un  Ballo  in  maschera, 
mais  avec  un  succès  plus  que  douteux.  Seule,  la  prima  donna  Lotti  délia 
Santa  a  été  applaudie. 

***  Turin.  —  Don  Carlos,  de  Verdi,  vient  d'être  donné  au  Théâtre- 
Royal.  C'est  un  grand  succès  pour  Verdi  et  pour  les  artistes  chargés  des 
principaux  rôles,  Cotogni  et  la  Fricci,  qui  ont  été  couverts  d'applaudis- 
sements bien  mérités.  —  11  est  question  de  monter  l'Africaine  avec 
Mme  Destin. 

^  ***  Sologne.  —  L'imprésario  Scalaberni  a  l'intention  de  reprendre 
l'Africaine  après  l'hiver;  il  a  déjà  engagé  à  cet  eflet  le  baryton  Cotogni. 
»*^  Gènes.  —  La  soirée  de  réouverture  du  Carlo-Felice,  le  jour  de  la 
Saint-Etienne,  a  été  très-belle,  grâce  à  une  bonne  exécution  d'il  Profeta. 
Mlle  Sternberg,  jeune  cantatrice,  quoique  novice  sur  la  scène,  s'y  est  dis- 
tinguée par  toutes  les  quahtés  qui  annoncent  une  artiste  de  grand  avenir; 
elle  a  été  très-applaudie.  Le  ténor  Stigelli,  un  peu  faible  pour  le  rôle 
écrasant  de  Jean  de  Leyde,  a  cependant  eu  de  Irè.s-beaux  moments. 


Chez  Hhne  MAEYENS-COVVREUR,  40,  rue  du  Bac,  à  Paris. 

L.-D.    BESOZZI 
Deux  fantaisies  pour  six  petites  mains:  i .  Au  clair  de  la  lune    7  50 
2.  Rondino  (très-facile) 7  SQ 

C.    SAINT-SAENS 

Morceau  de  concert,  fantaisie  sur  les  airs  de  ballet  d'Al- 

ceste,  de  Gluck 9    ,, 

Ttois  rhapsodies  (airs  bretons  pour  l'orgue),  arrangées  pour 

le  piano  à  quatre  mains,  les  deux  premières,  ch.     7  SO 
La  troisième 9     , 

A.    CHAUVET 

Quatre  offertoires  pour  le  temps    de   Noël,    pour   orgue 

sans  pédales  ou  harmonium g    » 

CÉSAR     FRANCK 

(Incessamment) 
Six  pièces  d'orgue,  dont  une  arrangée  pour  piano  et  harmonium. 


En  vente  chez  AYMARD  DIGNAT  et  C»,  9,  rue  de  Paradis-Poissonnière. 

T£>'iD'T  3i]B  ]&e39r©,  "s^m  laum^  mis  mirnssm^is 

Mélodie  dédiée  à  M.  Victor  Capoul,  paroles  et  musique  de 

CARI.,  VA^   BERGHE 

Pour  piano  et  chant,  prix  :  3  fr.  —  La  même,  sans  accompagnement,  1  fr. 

DU  MÊME  auteur:  BONSOIR,  SOLEIL!   mélodie. 


Valse  chantée,  paroles  françaises  et  italiennes,  musique  de 
RODOIiPUE  IIATTIOZZI 

1.  En /a  pour  soprano 6    «    2.  En  mi  b.  pour  contralto.     6    » 

Pour  piano  seul 6    »  Pour  piano  à  i  mains. . .     7  30 

Pour  orchestre  de  danse. .     7  50         Pour  musique  militaire. .  13    » 


par 
liUDWici  JtescnKO 

Pour  piano  seul,  prix  ;  3  fr.  —  Pour  piano  à  i  mains,  prix  :  i  fr.  50. 

La  même ,  arrangée  pour  orchestre  français,  prix  :  3  fr  , 

Par    STRAUSS, 

Chef  d'orchestre  des  bals  de  la  Cour  et  de  l'Opéra, 


REVUE  ET  (lAZKTTE  MUSICALE  DE  PAKIS. 


CHEZ  G.  BRANDUS  ET  S.  DUFOUR,  EDITEURS,  105,  RUE  DE  RICHELIEU. 

LA 

Partition  pour  Chant  et  Piano 

De  r opéra-comique  en  trois  actes  {cinq  tableaux) 

ROBINSON  CRUSOË 


PAROLES  DE  MM.   E.    CORMON    et    HECTOR    CRÉMIEUX,  musique  de 
FORMAT  IN -80.  I  — ^  C^CPkiO  Ar^LJ  RICHEMENT  RELIÉE, 

BROCHÉE,  NET  :  IS  Fr.  J  .  LJ  1      Ft-ÎMoAL/M  PRIX  NET  :  20  Fb. 


um  AiR^  de:  chamt  déta€Hi:§ 


L'Ouverture 


Entr'acte  symphonique    —     Marche   des   Sauvages 

Transcrits  pour  le  piano  par  L.  Soumis. 

ARRANGEMENTS  : 


Chœur   dansé 


CRAIIIE6..  —  Deux  bouquets  de  mélodies  pour  le  piano,  ch.    9    « 

E.  KETTEBER.  —  Fantaisie  brillante  pour  le  piano 9     » 

LECÂRPENTIER.  —  Deux  bagatelles  pour  le  piano,  chaque    5    » 


A.  HERMÂN.  —  Divertissement  pour  piano  et  violon 9    •» 

ROSELLEN.  Fantaisie  de  salon  pour  le  piano 7  SO 

RUISSEL,  —  Fantaisie  élégante  pour  le  piano 6    » 


STRÂDSS.  —  Grande  valse  pour  le  piano 6    » 

La  même,  à  quatre  mains 7  50 

Id.      Grand  quadrille  des  bals  de  l'Opéra 4  SO 

LÉON  ROQOES. — Polka  brillante  pour  piano  et  à  4  mains  .  4    » 


ÂRBÂN.  —  Quadrille  pour  le  piano 4  50 

Le  même,  à  quatre  mains 4  50 

ISÂBX.  —  Deuxième  quadrille  pour  le  piano 4  50 

STRAUSS.  —  Polka-Mazurka  pour  le  piano 5    « 


PRIX  ACCORDÉ  A  L'onAniHITÉ  A  i'expo3ition 
UNIVERSELLE  DB   LONDRES  1851. 

Vonrnlsseur  des  ministères  de  la 
Cliierre  et  de  In  Marine  de  France. 

Seul   agent   à    Londres 

S.  ARTHUR    CHAPELL, 

45,   New  Bond  Street. 


MAISON  FONDÉE  EN  1803.  médaille  d'argent  deI'*  classe 

INSTRUMENTS    DE    MUSIQUE    EN    CUIVRE     *  i-'ekposh.on  oniveeselle  de  paris  isss. 
Exposition  Universelle  de  Londres  1862 

MM.  les  Membres  du  Jury  International  décernent  la  Médaille  à 


ANTOINE  COURTOIS 

POUR  l'EXCELLENCE  DE  SES  COMETS  A  PiSTOSS,  CORS,  ALTOS,  BASSES, 

ET   POUR   TOUTE  SA   COLLECTION   d'iNSTRUMENTS   EN   GÉNÉRAL. 

AS,   rue    des    llaral«- Saint -Slartin,    S8. 

Ci-devant  rue  du  Caire,  21. 


Facteur  du    Conservatoire  et  de 
l'Académie  Impériale  de  Paris. 


Agent  à  Saint-Pétersbourg: 

A.  BUTTNER, 

Perspect.Newsky, maison  de  l'égliseSt-Pierre 


La  -naison  ANTOINE  COURTOIS  ayant  iKjrnndi  ses  ateliers  ,  est  en  mesure  de  satisfaire  a  toutes  vss  demandes  qui  pourront  lui  être 
adressées;  elle  garantit  réellement  a  sa  clientèle  des  instrvwents  irréprochables  sous  tous  les  rapports. 


VIENT    DE    PARAITRE    CHEZ  CH.   CiROU, 
Musique  de  P.  Henrion. 

Les  Larmes,  mélodie,  de  Mme  Adam-Boisgontier 2  50 

Au  temps  des  Roses,  six  rondes  enfantines,  de  J.-B.  Clément  : 
i.  Petit  mouton  blanc.  4.  Encore  une  chanson. 

2.  Malinette.  5.  Saint-Bon-Enfant. 

3.  Petit  bonhomme  Lonlà.      6.  Vive  la  Ronde! 

Les  six  rondes  réunies  en  album,  net  :  8  francs.  —  Chaque,    2  50 

Musique  de  H.  de  la  HauUe. 

Les  Etrennes  du  cœur,  historiette  avec  chœurs  (ad  libitum),  de  ***, 

dédiée  à  S.  A.  le  Prince-Impérial 3    » 

Musique  de  Clavier  père. 

L'Ogre,  beillade  enfantine  avec  chœurs  {ad  libitum),  de  Ch.  Grou; 

petite  partition,  net 1  SO 

Musique  de  F.  Jouffroy. 

La  Crèche  Sainte  -  Marie,  chanson  de  J.  de  Blainville,  vendue  au 

profit  de'  l'Œuvre  des  crèches 2  50 


KDITKVII    DE   MUSIQUE,  8,  RUE  CADET. 
Musique  de  Ch.  Hubans. 

Le  Cantonnier,  chanson  d'Alexandre  Flan,  pour  baryton    ....  3  » 

Vive  l'eau  !  chanson  de  Degeorge,  pour  baryton 3  » 

A  chacun  sa  part  de  soleil,  chanson  de  Ch.  Grou,  n°  i,  pour  ténor, 

n°  2,  pour  baryton 3  » 

Musique  de  L.-C.  Desormes. 

Luciols,  légende  d'Alexandre  Flan 2  50 

Le  Grand  Voyage,  chanson  d'Alexandre  Flan 2  50 

Musique  de  H.  Cellot. 

On  vous  dira  qu'ça  n'est  pas  vrai  !  chanson  héroïque  d'Al.  Flan .   .     3     » 
Musique  de  A.  Coedès. 

Oh!  eh!  mon  chien  Picard!  chanson  rustique  d'A.  Bouvier.    ...     3     » 

pour  paraitre  incessamment 

(musique  de  a.  coédès.) 
Roulez  les  dés.  mes  fils,  chanson  dramatique  d'Alexandre  Flan.   .     3    » 
Les  Deux  Hirondelles,  fabliau  de  Ch.  Grou 3     » 


lUPBiaEBIE  CENTBAI.E  BES 


DE  FEB.  —  Jl.  CH&IZ  ET  I 


:  BEUGEBE,  30,  A  PABIS. 


BUREAUX    A    PARIS  :    BOULEVARD   DES   ITALIENS,  1. 


3S^  Année. 


W  2. 


12  Janvier  1868. 


ON  S'ABONNE  : 

DoDS  les  Départements  et  A  l'Êlranerpr, 

chez  tous  les  Marchands  de  Musique,  I<  s  I.ibrairt 

et  QUI  Uureaux  der  Messageries  et  des  Postes. 


REVUE 


PRIX    DE    L'ABONNEMENT: 

Paris '24    r.  par  Ui 

Diipûrtcaïunts,  Bt-Igiquc  et  Suisse...,    30  u       Jd. 
Étrupgcr .•.    34  "       Id, 

Le  Journal  paraît  le  Dimanche , 


GAZETTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


S051MAIRE.  —  Revue  musicale  de  l'Année  1867,  par  Em.  Uathien  de 
Monter,  —  Concerts  populaires  de  musique  classique  au  cirque  Napoléon  : 
Léona-.d.  —  Revue  des  tliiiâtres,  par  O.  A.  D.  Saint-Yves.  —  Nouvelles 
des  tliéâtres  lyriques.  —  Nouvelles  diverses.  —  Annonces. 


REVDE  fflUSIGÀLE  DE  L'ANNÉE  1867. 

Mil  huit  cent  5oixante.-sept,  —  An  luusjcal  et  international  entre 
tous,  —  a  vécu,  et  ses  lauriers  sont  coupés. 

Eclectique,  lahatieux,  vaillant,  avec  un  grand  air  de  gloire, 
généreux  jusqu'à  IÇ prodigalité,  actif  et  non  pas  sans  fièvre;  tout 
imprégné  de^  cet  èsprii  de.  la-  patrie  qui,  aux  heures  sévères  et 
aux  moments  décisifs-,-' a  su  toujours  donner  le  signal  et  la  vie  à 
des  floraisons  inattendues,  à  des  renaissances  ;  profondément 
creusé  et  presque  meurtri  par  la  lutte  de  l'intelligence  et  de  l'in- 
térêt; traversé  par  tant  et  de  si  divers  courants,  1867  a  une  his- 
toire agitée,  contrastée,  autant  que  brillante.  Rien  ne  lui  a  man- 
qué des  qualités  nombreuses,  et  des  défauts  essentiels  qui  font  de 
lui  l'image  accomplie  d'une  période  lyrique  caractéristique;  on  le. 
croirait  destiné  à  eh  offrir  le  modèle.  Alors  que  la  paix  elle-même 
était' sans  trêve,  tant  elle  était  occupée  à  l'utile;  que,  jusque 
dans  les  journées  sereines.,. les  arrière-pensées  et  les  soins  étaient 
en_^bien,des  âmes,  la  musique  af. sonné  le  réveil,  escorté  la  marche 
de  tout  ce  que  le  monde- galue  s'oùs  le. nom  de  civilisation  fran- 
çaise, de  tout  ce  qui  devait,  une  fois  encore,  le  surprendre  et 
le  réjouir. 

Aux  faits  et  aux  circonstances  artis.Jiques  des  douze  derniers 
mois,  —  la  placem'étant  ici  mesurée  Strictement,  r—  je  ne  veux 
emprunter  que  leur  physionomie  générale  et  leur  mouvement 
d'ensemble. 


L'année  écoulée  a  été  et  restera  frappée  à  l'effigie  de  l'Exposi- 
tion universelle,  qui  la  guide,  la  caractérise  et  la  domine.  Tandis 
que  la  fleur  des  beaux-arts  s'épanouit,  se  surmène  presque  pour 
couronner  cette  grandiose  manifestation  du  génie  hunjain,  et  n'en 
retire  que  des  compensations  insuffisantes,  la  Musique,  elle,  en 
reçoit  une  impulsion  énergique  et  y  recueille  de   merveilleux  ré- 


sultats. Il  ne  pouvait  guère  en  être  autrement.  Dans  ce  rappro- 
chement des  peuples,  dans  ces  luttes  artistiques,  littéraires  et  in- 
dustrielles, dans  ce  congrès  des  mœurs,  des  usages  et  des  langues, 
la  musique  ne  devait-elle  pas  se  montrer  l'art  suprême  de  la  fu- 
sion des  cœurs  et  de  la  pénétration  mutuelle,  l'âme  même  du 
monde  moderne,  la  langue  universelle  par  excellence,  familière  à 
tous,  où  tout  passé  et  tout  avenir  sont  contenus? 

A  peine  l'année  s'ouvre-t-elle,  que  les  envois,  les  adhésions  com- 
mencent à  affluer  au  Champ  de  Mars,  et  que  les  notabilités  artis- 
tiques et  industfi^ês  accourent  des  quatre  coins  du  monde  à 
Paris  ;  on  dirait  d'une  surexcitation  générale.  Il  semble  que  toutes 
les  nations  ont  hâte  de  venir  plaider,  preuves  en  main;  dans  ce 
solennel  prétoire  pour  leurs  foyers  de  Matière,  pour  leurs  autels 
d'Idéal.  La  galerie  des  arts  hbéraux  s'emplit  rapidement  d'instru- 
ments de  prix  et  de  marque,  de  belles  éditions,  d'innovations 
curieuses,  de  découvertes  intéressantes.  Il  est  décrété  que  l'his- 
toire de  la  Musique  sera  admise  dans  le  Palais,  suivant  le  plan 
adopté  pour  l'histoire  du  travail;  que  l'art  de  la  Musique  y  sera 
représenté  au  triple  point  de  vue  de  la  composition,  de  l'exécu- 
tion, de  l'histoire.  Trois  comités  se.  coiistituent  sous  la  présidence  des 
compositeurs  et  musiciens  les  plus  célèbres  de  l'Europerpar  les  résul- 
tats de  leurs  travaux,  on  a  pu  juger  ide  l'étendue  de  leur  tâche  et 
de  leur  dévouement,  ainsi  que  de  la  science  profonde ,  de  la  haute 
expérience  qui  avaient  dicté  leurs  programmes,  dont  la  réalisation  a 
sombré  sous  le  poids  de  considérations  étrangères  à  l'art.  On  met 
au  concours,  avêcdes"  prix'  d'une  valeur  totale  de  10,000  francs,  l^ 
cantate  dé  l'Exposition ,  Thyhine  de  la  paix.  On  offre  à  l'émulation 
des  Sociétés  .,orphéoniques  f  vocales  et  instrumentales,  des  récom- 
penses qui  s'élèvent  à  plus  de  30,000  i'rancs.  Elles  sont  chaude- 
ment disputées  —  j'ai  dit  comment  et  en  quelles  t;irconstances , 
—  par  la  nombreuse  élite  de  cette  institution  populaire,  qui  pos- 
sède à  un  degré  si  développé  le  goût  et  le  sentiment  musical, 
institution  dont  l'extension  rapide  prou\e  la  vitalité  et  qui  s'appuie 
sur  l'esprit  de  solidarité,  ce  mot  d'ordre  de  l'avenir. 

Aux  facteurs  d'instruments,  aux  luthiers,  aux  éditeurs,  aux  au- 
teurs d'ouvrages  didactiques  et  d'enseignement,  on  décerne  trois 
brevets  de  légionnaire,  neuf  médailles  d'or,  soixante-quatre  mé- 
dailles d'argent,  quatre-vingt-quinze  de  bronze,  soixante-treize 
mentions  honorables.    Le  jour    de  cette    distribution    de  récom- 


10 


UEVUE  ET  GAZETTE  MUSICAL!-. 


penses ,  pendant  cette  fête  ciu  travail  et  de  la  paix  féconde,  sous 
ce  vélum  constellé  d'étoiles  comme  un  symbole  d'espérance  et 
d'union,  un  orchestre  imposant  exécute  l'hymne  de  Rossini  qui 
veut,  pour  cette  circonstance  unique,-  joindre  sa  gloire  à  tant  de 
gloires.  De  longtemps  on  n'oubliera  ces  magnifiques  fêtes  du  mois 
de  juillet.  Lors  du  Festival  de  la  Commission  impériale,  quatre 
mille  exécutants  interprètent,  sous  la  direction  de  Georges  Hainl, 
l'homme  des  masses,  un  programme  composée  d'oeuvres  popu- 
laires, de  celles  que  l'on  aime  à  entendre  lorsque  l'âme  s'ouvre 
aux  sentiments  généreux,  aux  émotions  entraînantes  et  qui  sem- 
blent nées,  au  surplus,  pour  traverser  de  leur  chaud  rayonnement 
les  frémissements  enthousiasfes  des  foules.  On  sera  lier,  plus  tard, 
d'avoir  assisté  au  concours  international  des  musiques  militaires. 
Neuf  peuples  en  présence!  Et  quelle  effervescence!  Et  quel  délire! 
Et  que  de  beaux  rêves  de  concorde  universelle  caressés  en  ces 
heures  rapides  et  mélodieuses  ! 

Réveillerai-je  ici  les  échos  de  ce  Champ  de  Mars  tout  vibrant, 
tout  bruissant  de  l'orchestre  de  Strauss,  de  Bilse,  des  Tziganes  et  de 
la  ChapeOe  hongroise,  du  Théâtre  chinois  et  du  Café  tunisien,  de 
la  Brasserie  bavaroise  et  de  l'orchateria  espagnole,  de  la  salle 
Suffren  et  des  Salons  français  ?  Musique,  musique  partout  et  du 
matin  au  soiv.  Dans  les  galeries,  cent  pianistes  s'escriment  sur 
autant  de  pianos;  là-bas  les  orgues  tonnent;  le  Théâtre  interna- 
tional essaie  de  se  faire  entendre  au  milieu  de  la  gigantesque  sym- 
phonie ;  mais,  hélas!  ses  ariettes  s'envolent  dans  un  rayon  de  la 
lumière  électrique  des  phares.  Tout  cela,  j'ai  tenté,  cet  été,  de  le 
dire,  de  le  peindre  ici  même. 

A  distance,  et  toutes  réflexions  faites,  je  ne  vois  )'ien  à  changer 
à  mes  conclusions.  L'art  musical,  ses  procédés  pratiques,  ses  créa- 
tions et  ses  constructions,  tous  leurs  contingents  ont  grandi  dans 
cette  chaude  atmosphère.  Semblable  à  la  vapeur  sortie  de  la  four- 
naise ardente  et  soulevant  de  sa  puissante  expansion  l'outillage  de 
vingt  industries  à  la  ibis,  le  souffle  d'émulation  engendré  par  la 
grande  fédération  pacifique  du  Champ  de  Mars  animera  longtemps 
la  facture  instrumentale,  la  lutherie  et  fécondera  ainsi  les  progrès 
de  l'art  musical. 

Les  théâtres  lyriques,  littéralement  assiégés  pendant  l'été  par 
les  visiteurs  de  l'Exposition,  ont  été  à  la  hauteur  de  leur  glorieux 
renom. 

L'Opéra  poursuit  le  cours  de  ses  magnifiques  représentations  de 
l'Africaine,  chantée  aujourd'hui  sur  toutes  les  scènes  un  peu  im- 
portantes de  notre  pays  et  de  l'étranger,  et  avec  un  succès  toujours 
plus  grand.  Mlle  Battu  s'approprie  le  personnage  de  Sélika,  si  puis- 
samment créé  par  Marie  Sass,  car  «  c'est  le  privilège  des  beaux  rôles 
—  écrivait  à  cette  occasion  le  critique  ingénieux  et  sûr,  M.  Paul 
Smith,  que  j'essaie  de  suppléer,  mais  que  je  ne  remplace  pas,  —  de 
se  prêter  aux  talents  divers  et  de  fournir  à  chacun  d'eux  le  moyen 
de  briller  sans  se  nuire  réciproquement,  par  les  qualités  qui  leur 
sont  propres.  »  A  V Africaine  succède  Don  Carlos,  œuvre  inégale,  qui 
recèle  néanmoins  d'incontestables  beautés.  Mlle  Salvioni  rajeunit 
la  Fenella  de  la  Muette  au  feu  de  son  jeune  et  gracieux  talent. 
Robert  le  Diable  atteint  la  cinq  centième  de  ses  représentations, 
événement  unique  dans  les  fastes  de  l'Opéra  et  qui  atteste  la  pro- 
digieuse vitalité  des  inspirations  et  du  génie  de  Meyerbeer.  A  son 
répertoire  habituel,  à  Guillaume  Tell  et  au  Corsaire  solennellement 
repris,  ce  théâtre  ajoute  la  Fiancée  de  Corinthe,  qu'appuie  brillam- 
ment le  talent  de  Faure.  Des  représentations  de  gala  offertes  aux 
souverains,  hôtes  de  la  France,  l'audition  des  étudians  Scandina- 
ves, aux  voix  pures,  aux  chœurs  d'une  poésie  originale,  et  les 
concerts  des  meilleures  musiques  étrangères,  la  musique  de  Prusse 
entre  autres,  complètent  le  bilan  de  l'Académie  impériale  de  mu- 
sique. 

L'Opéra-Comique,  de  son  côté,  reprend  VEloile  du  Nord,  produit 


quelques  débutants  d'avenir  et  présente  au  public  plusieurs  opéras 
nouveaux.  Le  Fils  du  Brigadier  n'ajoute  rien  à  la  réputation  de 
V.  Massé.  Chez  la  Grand'Tante  de  M.  Massenct,  la  froideur  est 
compensée  par  l'éclat  du  coloris.  La  cantate  du  grand  prix  de 
composition  révèle  chez  M.  Pessard,  son  auteur,  une  expérience 
précoce  et... des  idées. floômsow  Crusoé  clôt  spirituellement  l'année: 
Offenbach  s'y  révèle  sous  un  jour  nouveau  qui  frappe  le  public,  et 
paralyse  la  critique  de  certaines  coteries  jalouses.  Dans  ce  style 
vif,  gracieux,  pétillant,  dans  cet  esprit  humoristique,  dans  cette 
fécondité  toujours  heureuse,  dans  cette  appropriation  exacte  et  pit- 
toresque à  la  fois  de  la  mélodie  au  sujet  lui-même,  dans  cette  vi- 
vacité d'une  imagination  piquante  et  délicate,  on  se  plaît  ù  pres- 
sentir une  voie  nouvelle  ouverte  à  ropéra-comique,  et  comme  la 
modernisation  do  ce  genre. 

Au  théâtre  Lyrique,  les  nouveautés  sont  moins  rares.  Déborah 
disparaît  écrasée  sous  l'ennui  ((u'elle  provoque  ;  Sardanapale  met 
M.  Victorin  Joncières  en  lumière,  mais  sans  trop  d'éclat,  et,  en 
ramassant,  avec  une  mémoire  remarquable  des  bons  endroits 
et  des  riches  propriétaires,  des  Bleuets  dans  les  blés,  M.  Jules  Cohen 
no  cueille  pas  le  rameau  d'or  du  succès  et  de  la  vogue.  Le  Car- 
dillac  de  M.  Dautresme,  plus  incidente  et  plus  retentissant  à  la 
ville  qu'au  théâtre  ,  sans  forcer  l'admiration  du  publie,  trouve 
pourtant  des  appréciateurs.  De  tous  les  sujets  empruntés  à 
Waltor  Scott,  aucun  ne  se  rapproche  moins  de  son  origine  que 
la  Jolie  Fille  de  Perth,  mais  sur  ce  livret  assez  riche,  néan- 
moins, en  situations  musicales,  M.  Georges  Bizet  écrit,  avec  une 
véritable  entente  de  la  scène,  une  partition  mélodique,  mou- 
venienlée,  intéressante,  qui  tient  les  promesses  des  débuts'  de 
ce  compositeur.  L'événement  de  l'année,  au  théâtre  Lyrique,  —  où 
se  produisent  entre  temps  la  beauté  luxuriante  et  la  voix  agile 
jusqu'à  l'excès  de  Carlotta  Patti,  —  c'est,  incontestablement,  l'appa- 
rition de  Rome}  et  Juliette.  La  muse  de  Charles  Gounod  traduit 
passionnément  ce  drame  féodal,  couleur  d'aurore  et  de  sang,  oii 
chantent  l'alouette  et  l'amour,  où  se  heurtent  le  fer  et  la  haine. 
Cette  œuvre  restera  acquise  à  l'honneur  du  mouvement  musical 
de  l'année  et  de  la  jeune  école  française.  La  «  jeune  école  fran- 
çaise !  »  Devant  les  regretteurs  jurés  du  passé,  les  douleurs  de 
l'avenir,  les  mécontents  et  les  sceptiques,  n'est-ce  point  là  un  mot 
bien  ambitieux?  Non,  car  elle  existe,  s'il  .suffit  pour  être  école,  de 
posséder  la  science  de  l'harmonie,  la  puissance  de  la  couleur,  la 
vérité  de  l'accent,  le  secret  des  rhythmes,  le  charme,  le  sourire, 
l'émotion  aussi.  Ne  nous  plaiguons  donc  pas,  sachons  attendre; 
n'allons  pas,  dans  l'acuité  de  nos  souvenirs  ou  dans  l'excès  de 
nos  impatiences,  nous  faire  plus  pauvres  que  nous  ne  sommes  et 
méconnaître  injustement  nos  richesses. 

Aux  Italiens,  Adelina  Patti  soutient  le  répertoire  de  la  lin  de  la 
dernière  campagne  et  du  début  de  celle-ci. 

Parmi  les  beaux  soirs  de  Norma,  d'I  Purilani,  d'Otello,  de  la 
Traviata,  de  la  Gassa,  de  Lucrezia,  de  Maria,  se  glisse  le  Columella, 
de  Fioravanti,  olla-podrida  de  vieilles  rengaines,  et  la  Locanda 
gratis  d'Alary,  où  il  n'y  a  qu'à  louer  une  facilité  de  plume  poussée 
jusqu'à  l'abandon.  La  province  et  l'étranger  affluent  aux  représen- 
tations exceptionnelles  que  M.  Bagier  a  l'heureuse  idée  de  donner 
eu  septembre.  Après  avoir  déployé  un  entrain  inouï  et  un  goût 
adorable  dans  l'Angiolina  de  ce  Don  Desiderio,  qui  est  comme  le 
résumé  touffu  des  errements  de  l'ancien  genre  bouffe  italien,  Ade- 
lina Patti  s'empare  du  répertoire  dramatique  avec  une  autorité, 
une  passion,  un  charme. pénétrant  indicibles:  toute  une  révéla- 
tion !  Mlle  Harris  gravite  et  se  fait  remarquer  autour  de  l'étoile. 
Mongini,  plus  artiste  que  virtuose,  d'un  talent  qui  déborde  plutôt 
qu'il  ne  se  possède,  servi  par  une  voix  fort  belle,  mais  capricieuse 
et  rétive,  disparaît  bientôt   de  ce  ciel  où  il  comptait  briller  d'un 


DE  PARIS. 


H 


éclat  plus  vif.  On  sait  le  reste  :  c'est  l'histoire  que  nous  écrivions 
au  jour  le  jour. 

Aux  Fantaisies-Parisiennes,  sept  l'cpriscs  intéressantes  et  six  pe- 
tits opéras-comiques  nouveaux  témoignent  de  l'activité  et  du  désir 
de  bien  faire  de  M,  Martinet,  et  justifient  les  encouragements  gé- 
néreusement accordés  à  cette  scène  lilliputienne,  mais  vaillante  et 
bien  musicale. 

La  musique  règne  du  reste  partout  en  mil  huit  cent  soixante- 
sept,   et   même  sur  les  scènes  les  plus  modestes. 

Le  théâtre  Rossini,  qui  n'est  jamais  plus  fermé  que  lorsqu'il  est 
ouvert,  débute  par  une  pâle  opérette;  l'Athénée  réunit  chanteurs 
et  danseuses  là  oîi  trônait  le  fauteuil  des  conférences;  l'Odéon 
déclame  Athalie ,  avec  les  cliœurs  de  Mendelssohn  ;  la  Gaîté, 
Hamlet,  avec  les  mélodrames  de  M.  Joncières:  ce  qui  permet  d'é- 
tablir une  comparaison.  Les  cafés-concerts  ,  émancipés ,  jouent 
des  opérettes,  des  revues,  des  actes  d'opéras,  renforcent  leur 
orchestre   et  deviennent   de  véritables    scènes  lyriques. 

Dominant  ces  entreprises,  aux  fortunes  diverses,  de  toute  la  hau- 
teur que  peuvent  donner  une  origine  illustre  et  l'habitude  de 
vaincre,  la  Grande-Duchesse  séduit ,  pendant  deux  cents  jours , 
rois,  princes,  bourgeois  et  manants;  elle  disparaît,  dans  sa  gloire, 
de  la  scène  des  Variétés,  et  poursuit  sa  marche  triomphale  au 
milieu  des  populations  de  la  France  et  de  l'étranger  accourues  sur 
son  passage  ^ 

J'aurais  aimé  à  indiquer  les  causes,  les  résultats  du  succès  de 
nos  œuvres  lyriques  à  l'étranger,  et  à  présenter  en  même  temps  le 
tableau  des  travaux  des  principales  scènes  de  l'Europe  en  1867; 
mais  ces  colonnes  s'emplissent  avec  une  incroyable  rapidité... 
Je  me  bornerai  à  mentionner  la  fécondité  italienne  :  vingt-neuf 
grands  opéras  en  une  année!  Le  lyrisme  italien  a  de  la  force, 
mais  pas  d'énergie,  plus  de  muscles  que  de  talent  vrai,  du  feu 
sans  éclat,  de  l'explosion,  de  la  verve,  mais  pas  d'inspiration,  pas 
de  délicatesse,  celte  condition  suprême  de  l'art.  Cela  remue,  mais 
n'émeut  point. 

Du  théâtre  passant  au  concert,  nous  verrons  que  durant  le  cours 
entier  de  1867,  l'Europe  entière  applaudit  à  l'interprétation  des 
chefs-d'œuvre  classiques.  Le  goût  public  veut  bien  reconnaître  que 
les  anciens  ont  enrichi  la  pensée  humaine,  qu'ils  ont  exprimé  leur 
sentiment  d'une  manière  large  et  grande,  fine  et  sensée,  belle  en 
soi,  qu'ils  ont  parlé  à  tous  dans  un  style  à  eux  et  qui  se  trouvait 
aussi  celui  de  tout  le  monde,  style  nouveau  et  antique,  aisément 
contemporain  de  tous  les  âges.  Aussi  voyons- nous  la  Société  des 
concerts  du  Conservatoire — déjà  obligée  de  doubler  le  nombre  de 
ses  séances  habituelles — provoquer  autour  de  ses  manifestations 
artistiques  un  intérêt  d'autant  plus  vif  que  l'admiration  s'imprègne 
là  d'une  sorte  de  respect,  et  attirer  au  moment  de  l'Exposition 
un  public  cosmopolite  ,  auditoire  sympathique  qu'elle  séduit  et 
qu'elle  entraîne.  Les  concerts  populaires  gagnent  encore  en  per- 
fection et  en  succès:  Pasdeloup  y  livre  de  glorieuses  batailles  dont 
les  généraux  s'appellent  Joachim,  Koempel,  "Wilhelmy. 

L'Athénée  s'ouvre  sous  une  inspiration  philanthropique  et  qui 
honorera  le  nom  de  Bischoffsheim.  Il  accorde  à  la  musique  classi- 
que une  hospitalité  remplie  de  bonnes  intentions  :  au  lendemain 
de  conférences,  souvent  intéressantes,  un  public  de  choix  et  de 
haute  élégance  vient  applaudir  dans  ce  luxueux  sous-sol  le  Struen- 
sée  de  Meyerbeer,  dont  on  ne  connaissait  jusqu'alors  que  l'ouver- 
ture et  la  polonaise,  exécutées  par  les  soins  de  Pasdeloup  à  ses 
concerts  populaires,  et  que  le  célèbre  chef  d'orchestre  tient  à 
honneur,  dans  son  amour  pour  ce  chef-d'œuvre,  de  faire  connaî- 
tre tout  entier  à  son  nouvel  auditoire;  les  chœurs  d'Ulysse  et  d'^l- 
thalie;  M.  de  Gasperini  et  ses  gloses  passionnées  sur  les  anciens 
traduits — je  ne  ne  dis  pas  trahis  —  par  Georges  Pfeiffer;  le  Désert, 
de  Félicien  David,  présage  poétique,  mais  fatal,  du  sort  réservé  à 


la  salle.  De  leur  côté,  les  concerts  de  la  Société  libre  des  beaux- 
arts,  de  la  Société  séculaire  des  Enfants  d'Apollon,  de  la  Société 
académique  de  nmsique  sacrée,  etc.,  puisent  largement  au  trésor 
lyrique  du  siècle  dernier. 

Si  les  chefs-d'œuvre  de  l'art  sont  partout  vulgarisés,  et  si  des 
esprits  d'élite  en  assurent  la  tradition  en  y  faisant  entrer  plus  ou 
moins  chacun,  et  en  les  plaçant  sous  la  sauvegarde  universelle, 
hsCénades,  les  l'cunions  artistiques  choisies,  entre  soi,  à  huis  clos, 
n'en  (lorissent  pas  moins,  et  l'on  pourrait  citer  nombre  de  ces 
petits  «  cabinets  bleus  »  dans  lesquels  les  jouissances  rallinées  de 
l'oi-eille  et  du  goût  se  mêlent  aux  plus  délicates  théories.  La 
grande  société  substitue,  en  effet,  dans  ses  plaisirs,  la  musique  à 
la  danse  et  l'harmonie  est  la  conviée  du  monde  officiel.  Quant 
aux  concerts,  il  suffira  de  constater  leur  marée  inexorablement  en- 
vahissante ! 

La  musique  religieuse  n'est  pas  moins  bien  partagée  en  1867 
que  la  profane  :  je  ne  parle  pas  d'une  exécution  incomplète  de  la 
messe  en  ré  de  Beethoven;  mais  les  messes  du  prince  Ponia- 
towski,  de  Duprez,  de  Ch.  Colin,  de  Cauvin,  de  Lajarte,  de 
Mme  de  Granval,  d'autres  encore  ont  prouvé  que  la  source  des 
éludes  sérieuses  et  du  sentiment  musical  religieux  n'était  pas  en- 
core tarie.  L'adoration  est  un  état  de  l'âme  que  la  musique  peut 
seule  exprimer  et  qu'elle  a  traduit  en  des  pages  immortelles. 

Dans  ce  tableau  rapide  du  mouvement  musical  de  l'année,  je 
n'aurais  garde  d'oublier  les  développements  de  la  virile  institution 
du  chant  choral  populaire.  Les  sociétés  orphéoniques ,  vocales  ou 
instrumentales,  enserrent  aujourd'hui  l'Europe  de  leur  réseau  mé- 
lodieux. Obéissant  à  des  chefs  habiles,  encouragées  par  les  gou- 
vernements, ralliant  à  elles  la  sympathie  des  intelligences  les  plus 
élevées,  elles  savent  comprendre  le  beau  et  faire  le  bien  :  en 
France,  ces  paysans-musiciens,  ces  artisans-chanteurs  ont  versé, 
cette  année,  près  d'un  demi-million  dans  les  caisses  de  la  bien- 
faisance publique. 

L'année  1867  a  vu  naître  environ  seize  journaux  de  théât'-e  et  de 
musique  et  paraître  un  grand  nombre  d'ouvrages  et  traités  con- 
cernant notre  art,  sans  compter  les  almanachs.  Dans  l'examen 
détaillé  de  ce  mouvement  littéraire  spécial  et  des  judicieux  travaux 
de  la  presse  musicale  de  Paris,  de  Londres  et  d'Allemagne,  il  y 
aurait  certainement  matière  à  un  chapitre  riche  en  documents  in- 
téressants, en  révélations  curieuses  et  en  piquants  contrastes. 

Parmi  les  faits  généraux  à  porter  à  l'actif  de  l'année  défunte, 
je  signalerai  le  licenciement,  regrettable  à  bien  des  points  de  vue, 
des  corps  de  musique  de  la  cavalerie  française  et  italienne  ;  plu- 
sieui's  conventions  nouvelles  internationales  relatives  à  la  propriété 
artistique;  un  prix  de  20,000  francs  accordé  à  l'auteur,  favorisé 
des  dieux,  de  LaltaRouck;  la  création  de  nouveaux  conservatoires 
en  Angleterre  et  en  Russie  ;  la  destruction  complète  par  le  feu  du 
théâtre  de  Sa  Majesté,  à  Londres;  les  concours  d'opéras,  enfin, 
ouverts  par  décision  ministérielle,  à  l'Académie  impériale  de  mu- 
sique, à  rOpéra-Comique  et  au  Théâtre-Lyrique.  En  présence  des 
progrès  du  sentiment  musical  en  France,  l'administration  a  com- 
pris qu'il  était  juste  d'aider  les  jeunes  compositeurs  à  surmonter 
ces  obstacles  du  début  qui  enchaînent  parfois  l'essor  de  toute  une 
carrière;  elle  a  cherché,  par  ces  concours,  à  offrir  au  talent  l'ap- 
pui le  plus  digne  et  le  plus  enviable,  c'est-à-dire  l'occasion  d'un 
jugement  impartial  et  la  perspective  d'une  publicité  fructueuse  et 
brillante. 

Il  me  reste  la  douloureuse  tâche  de  compter  nos  morts.  Ils  sont 
là,  quatre-vingt-dix-huit,  couchés  dans  le  tombeau,  compositeurs, 
écrivains,  chanteurs,  cantatrices,  artistes,  virtuoses,  professeurs, 
éditeurs,  auteurs  dramatiques,  dilettantes,  protecteurs  de  l'art. . . 
Mmes  Méric-Lalande,  Nantier-Didiée,  Masson,  Rita  Favanti,  Lagel, 
Saint-Aubin,  Persiani,  les  belles  voix,  le  charme  et  l'émotion  du 


12 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


passé;  Paulin  Lespinasse,  Mercadier,  Pierre  Gross,  Triébert,  Sin- 
gelée,  Mattau,  Meifred,  de  Kontski,  Wéry,  Forestier,  Maussant, 
artistes  au  talent  sympathique,  au  cœur  généreux;  Ernst  Neu- 
mann ,  Perelli,  Immler,  Barbieri,  auteurs  d'œuvres  estimables; 
Pacini,  compositeur  fécond;  miss  Glover,  directrice  de  la  Tonic 
fa  sol  Association,  de  Londres,  couronnée  aux  concours  choraux 
de  l'Exposition  ;  Smart,  doyen  des  musiciens  anglais  ;  Mellon,  di- 
recteur des  célèbres  concerts  de  ce  nom;  Legouix,  Metzler,  édi- 
teurs ;  Ludwig  Bischoff,  de  Bougé,  Malliot,  critiques  d'art  et 
musicologues;  le  docteur  Véron  ;  Crosnier,  ancien  administrateur 
de  l'Opéra  ;  notre  regretté  Georges  Kastner,  noble  et  laborieuse 
existence  dont  aucun  feuillet  n'est  à  arracher...  Combien  d'autres 
encore  qui  furent  utiles,  aimés,  amusants  et  célèbres  dans  le 
monde;  malheureux  ou  maltraités  autant  qu'intelligents,  choyés, 
dévoués  et  courageux  :  preuves  frappantes  pour  qui  les  étudie 
qu'il  faut  toujours  faire  son  devoir,  puisque  la  belle  mémoire  qu'on 
laisse  est  la  vie  éternelle  qui    récompense    et   qui  venge! 


Riche  des  exemples  du  présent  et  des  traditions  du  passé  qu'il  lui 
a  été  donné  de  comparer  ;  fortifié  au  contact  de  ces  robustes  in- 
fluences; en  quelque  sorte  pénétré  d'une  substance  où  s'est  épan- 
chée lai'gcment  la  véritable  volonté  des  peuples,  1867,  et  ce  ne  sera 
pas  sa  moindre  gloire,  a  donné  pour  la  première  fois  le  consolant 
spectacle  d'une  haute  sanction,  d'une  protection  efficace,  de  récompen- 
ses précieuses,  prêtées  et  accordées  à  la  musique,  le  seul  art  à  com- 
pléter, en  effet,  le  seul  qui  progresse,  le  seul  nouveau;  pour  la 
première  fois,  dis-je,  car  auparavant  on  ne  protégeait,  on  ne  con- 
sacrait soigneusement  que  la  peinture,  la  sculpture,  tous  les  arts 
du  dessin.  De  l'année  écoulée,  grâce  à  la  concentration  des  for- 
ces vives  de  l'intelligence  qu'elle  a  magnifiquement  suscitée,  grâce 
à  la  mémorable  sanction  donnée  par  elle  à  l'âge  héroïque  du  tra- 
vail, datera  la  vulgarisation  et  comme  la  preuve  pratique  de  cette 
grande  vérité,  à  sa^•oir  que  la  recherche  du  beau  ne  se  divise  pas 
en  études  rivales  et  en  manifestations  d'antagonisme.  Mozart  et 
Racine,  Beethoven  et  Shakspeare,  Meyerbeer  et  Rubens,  et  tous 
les  vrais  génies  ont  marché  aussi  droit  les  uns  que  les  autres  vers 
l'éternelle  lumière  où  se  complète  l'harmonie  des  sublimes  inspi- 
rations. 

Em.-iAUthieu  UE  monter. 


CONCERTS  POPDLÂIBES  DE  fflDSIQUE    CLASSIQUE 

AU    CIRQUE    NAPOLÉON 
l.éoiiard. 

Aux  concerts  populaires  de  musique  classique  fondés  par 
M.  Pasdeloup,  il  y  a  toujours  un  pupitre  dressé  pour  tous  les 
grands  violonistes  de  l'Europe  :  Sivoi'i,  Alard,  Joachim,  Wilhelmy, 
l'ont  occupé  tour  à  tour,  et,  dimanche  dernier,  Léonard  y  compa- 
raissait, Léonard,  connu,  aimé  de  tous,  qui  dernièrement  a  jugé 
à  propos  de  quitter  la  Belgique  pour  la  France,  et  d'établir  son 
quartier  général  à  Paris. 

Dès  son  arrivée,  le  célèbre  artiste  nous  donna  un  charmant  con- 
cert, où  son  talent  s'appuyait  sur  celui  de  sa  charmante  femme, 
l'un  des  fleurons  les  plus  brillants  de  la  famille  des  Garcia.  Di- 
manche, il  a  paru  seul  dans  un  beau  et  large  morceau,  son  qua- 
trième concerto,  où  il  a  montré  successivement  toutes  les  qualités 
dont  son  art  se  compose  :  sûreté  d'archet,  justesse  de  son,  gran- 
deur et  force  de  style,  élégance  et  finesse.  Aussi  Léonard  a-t-il  été 
reçu  les  bras  ouverts,  acclamé  à  plusieurs  l'eprises  par  toute  la  salle 
et  spontanément  par  les  musiciens  mêmes  de  l'orchestre.  Jamais  il 


n'y  eut  de  succès  plus  général,  plus  enthousiaste  et  plus  significatif; 
on  a  reconnu  le  professeur  que  la  Belgique  voulait  retenir  à  tout 
prix  et  dont  ses  regrets  attestent  la  valeur.  Heureusement  la  France, 
qui  la  première  consacra  son  talent,  n'est  pas  ingrate  et  elle  saura 
lui  faire  retrouver  ce  qu'il  a  quitté  pour  elle. 

Le  concert  dans  lequel  s'encadrait  ce  morceau  était  fort  habi- 
lement composé  ;  d'abord,  :  la  belle  ouverture  en  mi  majeur  de 
Fidelio,  la  ravissante  symphonie  en  mi  bémol  d'Haydn  ;  puis  un 
adagio  fort  remarquable  de  Gouuod  ;  après  le  concerto,  venait 
l'ouverture  de  Mendeissohn,  la  Mer  calme,  dont  le  charme  et  le 
mérite  consistent  dans  de  belles  et  pures  harmonies,  et  enfin,  Yin- 
vitation  à  la  valse,  avec  la  célèbre  instrumentation  de  Berlioz. 
Léonard  rayonnait  au  milieu  de  toute  cette  musique  si  variée,  il 
rayonnait  de  manière  à  laisser  un  long  souvenir-  de  lui,  comme 
virtuose  et  comme  compositeur.  La  France  a  prouvé  qu'elle  était 
heureuse  et  fière  de  sa  conquête  :  elle  a  pris  Léonard  et  elle  le 
gardera . 

P.  S. 


REVUE  DES  THEATRES. 

Odéon  :  la  Saint- François,  comédie  en  un  acte  et  en  prose,  par 
Mme  Amélie  Perronnet;  les  Amoureux  de  Marton,  comédie  en 
un  acte  et  en  vers,  par  M.  Léon  Supersac.  —  Porte  Saint-Mar- 
tin :  IS67,  revue  eu  cinq  actes  et  vingt-cinq  taJjleaux,  par 
MM.  Clioler  frères  et  Koning.  —  GArrÉ  :  les  Treize,  drame  en 
cinq  actes  et  six  tableaux,  par  iMiVl.  F.  Dugué  et  G.  Peaucellier. 

En  attendant  la  grande  pièce  de  M.  Pierre  Bei'ton,  sur  laquelle 
rOdéon  croit  pouvoir  fonder  de  légitimes  espérances,  ce  théâtre 
vient  de  donner  coup  sur  coup,  dans  la  même  soirée,  deux  petites 
comédies  qui  ont  complètement  réussi.  La  première  est  en  prose 
et  s'appelle  la  Saint-François.  C'est  le  début  littéraire  d'une  dame 
qui  s'est  déjà  fait  connaître  dans  le  monde  artistique  comme  pia- 
niste distinguée.  Les  sympathies  du  public  ont  suivi  Mme  Amélie 
Perronnet  à  la  scène,  et  lui  ont  prodigué  des  encouragements  qui 
la  décideront  sans  doute  à  persévérer  dans  cette  nouvelle  et  pé- 
rilleuse carrière.  La  Saint-F  ançois  n'est  cependant  qu'une  promesse 
où  l'on  voit  poindre  d'aimables  qualités,  de  la  grâce  et  du  senti- 
ment. C'est  un  tableau  de  famille  qui  rappelle  les  sujets  préférés 
de  Greuze.  Tout  le  monde  est  réuni  pour  célébrer  la  fête  du  chef 
de  maison  ;  mais  un  couvert  est  vide  à  la  table  du  festin,  c'est 
celui  du  fils  qui  a  encouru  la  disgrâce  paternelle  pour  avoir  préféré 
la  fortune  des  lettres  aux  hasards  du  commerce. 

En  dépit  de  ses  propres  rigueurs,  le  père  regrette  son  enfant 
chéri,  dont  il  se  ci'oit  oublié.  Mais,  à  cet  instant  même,  le  jeune 
homme  risque  sa  vie  pour  l'honneur  de  son  nom.  On  comprend 
les  angoisses  de  toute  cette  famille  rassemblée  pour  une  fête,  et  le 
bonheur  du  père  quand  son  fils,  sain  et  sauf,  vient  se  jeter  dans 
ses  bras. 

La  seconde  pièce,  agréablement  versifiée  par  M.  Léon  Supersac, 
est  intitulée  les  Amoureux  de  Marton.  Marton,  la  fine  soubrette,  a, 
en  effet,  trois  amoureux,  mais  tous  trois  de  commande.  Son  maître, 
M.  Géronte,  l'a  léguée  avec  tous  ses  biens  à  celui  de  ses  collaté- 
raux qui  se  ferait  aimer  d'elle.  Un  tabellion,  madré  et  retors,  l'em- 
porte sur  ses  concurrents;  mais  quand  il  a  épousé  Marton,  il  re- 
connaît qu'il  a  été  mystifié  par  le  défunt,  dont  les  trésors  sont  au 
fond  de  la  mer.  La  fortune  lui  échappe,  mais  Marton  lui  reste  ; 
l'avenir  lui  apprendra  s'il  y  a  compensation. 

Il  faut  dire,  à  la  louange  des  artistes  de  l'Odéon,  que  ces  deux 
comédies  sont  fort  bien  interprétées,  la  dernière  surtout,  par  Mar- 
tin et  par  Mlle  Damain. 


DE  PARIS. 


13 


—  La  Porte-Saint-Martin  a  joué  sa  grande  revue,  (|uc  l'on  pfut 
même  traiter  de  grandissime,  car  elle  dure  de  sept  heures  à  mi- 
nuit. C'est  une  lanterne  magique,  où  tout  est  pour  les  yeux.  La 
part  des  auteurs  se  borne  à  la  préparation,  à  l'eneliaîiiemcnt 
d'une  foule  de  tableaux  splendides,  dont  l'honneur  appartient  au 
metteur  en  scène,  au  machinisle  et  au  décorateur.  Ne  soyons- 
donc  pas  aussi  sévère  pour  ces  messieurs  que  l'a  été  le  public  de 
la  première  représentation.  Constatons  d'ailleurs  que  l'enthou- 
siasme maladroit  de  la  claque  patentée  a  été  pour  beaucoup  dans 
l'esclandre  qui  a  troublé  cette  soirée  et  qui  a  nécessité  une  en- 
quête de  la  part  du  préfet  de  poiic3.  Les  spectateurs  ont  protité 
de  cette  circonstance  pour  affirmer  leur  di'oit  de  siffler  en  opposition 
avec  les  applaudissements  payés  par  les  directeurs  de  théâtre,  et 
nous  avons  tout  lieu  de  croire  que  ce  droit  ne  sera  plus  contesté. 
Les  auteurs  de  la  Revue  ont  eu  le  contre-coup  du  débat  engagé 
en  dehors  d'eux,  et  ils  ont  reçu  les  horions  de  la  foule  agacée. 
Mais,  en  somme,  ils  n'ont  pas  tout  à  fait  mérité  leur  sort.  Le  ca- 
nevas de  leur  pièce  n'est  pas  plus  mauvais  que  tant  d'autres,  et 
il  remplit  exactement  son  but,  qui  consiste  à  nous  montrer  toutes 
les  curiosités,  toutes  les  magnificences  de  l'année  1867.  Avec  un 
aussi  charmant  cicérone  que  Mlle  Honorine,  et  un  aussi  joyeux 
compère  que  Laurent,  on  ne  sent  pas  trop  la  fatigue  de  ce  long 
voyage  à  travers  le  passé.  Et  puis,  que  de  merveilles!  quelles  ri- 
chesses et  quelles  splendeurs!  Les  Champs-Elysées,  le  Palais  de 
l'électricité,  Paris  à  vol  d'oiseau,  le  jardin  réservé  de  l'Exposition, 
la  galerie  des  machines,  le  champ  de  course,  et  il  est  probable  que 
nous  en  oublions. 

Quant  aux  exhibitions  d'artistes,  il  faut  avouer  qu'elles  ne  sont 
pas  toutes  très-lieureuses.  On  a  eu  tort  de  déranger  Mme  Thierret 
pour  si  peu.  Les  formes  plastiques  de  Mlle  Delval  sont  beaucoup 
trop  connues  pour  l'abus  qu'on  en  fait.  Les  parodies  de  Mlle  Silly 
ne  sont  généralement  pas  marquées  au  coin  du  bon  goût,  et  sa 
camarade  Schneider  a  été  bien  vengée  de  ses  attaques  malséantes 
par  le  mauvais  accueil  qu'on  leur  a  fait. 

En  revanche,  la  réapparition  de  Mlle  Thérésa,  après  une  longue 
absence,  a  été  l'objet  d'une  chaleureuse  ovation,  que  nous  com- 
prenons jusqu'à  un  certain  point,  car,  en  vérité,  l'art  n'est  pas 
aussi  étranger  que  bien  des  gens  le  disent  au  succès  de  cette 
Reine  de  la  chanson  populaire.  Darcier  n'est  pas,  non  plus,  un 
chanteur  à  dédaigner  ;  mais  sa  manière  discrète  pâlit  singulière- 
ment auprès  de  la  rondeur  toute  prime-sautière  de  Thérésa. 

Nous  ne  parlerons  que  pour  mémoire  des  deux  nains  Primo  et 
Ernesto,  sur  qui  repose  la  critique  de  M.  de  Camors,  d'Octave 
Feuillet. 

La  partie  chorégraphique  a  de  l'ampleur  et  de  l'éclat  :  le  ballet 
des  Francs-Tireurs  ne  manque  pas  d'originalité,  celui  des  Japonais 
de  bizarrerie,  et  le  grand  ballet  du  Sport,  légèrement  contesté  le 
premier  soir,  est  aujourd'hui  l'un  des  plus  précieux  attraits  de  la 
pièce,  grâce  au  talent  sérieux  de  Mme  Zina-Mérante  et  aux  pi- 
rouettes fantaisistes  de  Mlle  Mariquita. 

Enfin,  nous  devons  dire  que  la  musique  occupe  une  large  place 
dans  cette  immense  Revue.  Parmi  les  morceaux  nouveaux,  nous 
citerons  les  deux  chansons  de  Thérésa,  la  ronde  de  Mlle  Silly,  le 
chœur  de  la  Vapeur,  par  Hervé,  la  grande  scène  de  Darcier,  la 
Tyrolienne  et  les  couplets  de  la  Poule,  par  Chautagne,  un  rondeau 
et  deux  chœurs  d'eunuques  et  de  Chinois,  par  DebiUemont,  l'ou- 
verture, la  musique  de  scène  et  celle  des  ballets  par  le  nouveau 
chef  d'orchestre,  Albert  Vizentini. 

—  Bien  différente  de  la  Porte-Saint-Martin,  la  Gaîté  abandonne 
la  féerie  pour  se  retremper  dans  le  drame  pur-sang,  qui  parais- 
sait être  passé  de  mode.  La  l'cprésontation  des  Treize  laisse  au 
moins  la  chose  en  suspens,  et  ce  genre  condamné  n'en  aura  pas 
en  Vain  appelé  à  ses  juges.  Balzac  est-il  d'un  grand  poids  dans  ce 


moiivcnienl  de  lu  iialance?  Quoi  qu'en  disent  les  auteurs  du  drame 
nouveau,  qui  ont  V(julu  pailager  leur  gloire  avec  le  romancier  de 
la  Comédie  humaine,  nous  ne  le  pensons  pas.  Leur  Fcrragus  est 
bien  un  empi'unt  fait  à  Balzac;  le  point  do  départ  de  leur  pièce 
est  bien  le  même  que  celui  du  livre.  Mais  à  cela  se  borne  la  simi- 
litude des  deux  œuvres.  Ferragiis,  l'ancien  forçat,  le  chef  des 
Treize,  se  sert  de  son  redoutable  pouvoir  pour  protéger  l'honneur 
et  le  repos  de  sa  lille  Clémence:  mais  ici  l'action  bifurque  et  ne 
se  rattache  plus  à  Balzac  que  par  l'intervention  de  la  duchesse  de 
Langeais,  une  autre  de  ses  créations,  absente  du  roman  de  Fcrra- 
gus. Cette  duchesse,  qui  veut  perdre  Clémence,  est  condamnée 
par  les  Treize,  et  Ferragus  est  chargé  de  la  marquer  au  front 
d'un  fer  chaud;  par  bonheur,  Clémence  a  appris  que  la  duchesse 
est  sa  sœur,  et,  pour  épargner  un  abominable  crime  à  son  père, 
elle  la  sauve,  et  court  s'enfermer  avec  elle  dans  un  couvent  sur 
les  bords  de  la  mer.  Un  général,  qiii  aime  la  duchesse,  la  poursuit 
jusqu'au  fond  de  son  asile;  Ferragus  vient  l'arrêter  en  le  menaçant 
de  son  épée,  mais  au  même  instant  on  entend  les  prières  des 
morts,  et  le  couvent  rend  à  Ferragus  le  cadavre  d'une  de  ses 
filles.  Laquelle?  L'aspect  de  la  duchesse  apprend  que  c'est  Clé- 
mence, et  le  père  désolé  ne  songe  plus  à  disputer  l'autre  à  l'amour 
du  général. 

Ce  drame,  très-intéressant  et  ti'ès-habilement  conduit,  a  été  très- 
applaudi,  surtout  dans  sa  dernière  partie.  Dumaine  est  parfait  dans 
le  rôle  de  Ferragus,  et  il  y  est  fort  bien  secondé  par  Lacresson- 
nière,  par  Mlle  Lia  Félix  et  par  Mme  Juliette  Clarence. 

D.  A.  D.  SAINT-YVES. 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 

:i*jg  Le  théâtre  impérial  de  l'Opéra  a  donné  lundi  l'Africaine.  —  Mer- 
credi, le  Trouvère  et  la  Source.  —  Faure,  remis  de  son  indisposition,  a 
repris  vendredi  son  rôle  dans  Guillaume  Tell. 

a,*jtf  Les  études  A'Hamlci  sont  poursuivies  avec  activité,  et  l'on  compte 
que  l'œuvre  nouvelle  d'Ambroise  Thomas  fera  son  apparition  à  la  fin  de 
février  au  plus  tard. 

if*^  liohinson  Crusoè.  Tait  toujours  de  belles  chaudjrécs  au  théâtre  de 
l'Opéra  Comique.— Mlle  Brunet-Lafleur  continue  avec  beaucoup  de  succès 
ses  débuts  dans  le  rôle  d'Angèle  du  Domino  Jioir.,  qui  attire  beaucoup  de 
monde. 

**^  Les  études  d'Un  jour  de  bonheur  sont  activement  suivies.  Les  répé- 
titions générales  vont  commencer  incessamment. 

^*^  MM.  de  Leuven  et  Ritt  viennent  d'engager  une  jeune  élève  du 
Conservaloii'e,  Mlle  Labrunie. 

^*^,  La  Traviata  a  été  donnée  au  théâtre  Italien  mardi,  avec  Adefina 
Patti  et  Steller  dans  le  rôle  de  Germond.— JeuOi  le  célèbre  baryton  chan- 
tait avec  Mlle  Kraiiss  dans  la  Lucrezia  Borgiti. —  Hier  on  a  repris  la 
Gasza  ladra  avec  Mlle  Patti,  Gardoni,  Agnesi,  Mlle  Grossi  et  Ciampi. 

^*^  L'engagement  qu'Adelina  Patti  a  contracté  avec  le  théâtre  de  Saint- 
Pétersbourg  ne  privera  pas  le  public  parisien  de  son  talent  pour  l'année 
prochaine.  Elle  chantera  au  théâtre  Italien  pendant  les  mois  d'octobre  et 
novembre,  en  Russie  de  décembre  à  février,  et  de  nouveau  à  Paris  en 
mars  et  avril. 

***  Cresci  vient  de  résilier  à  l'amiable  l'engagement  qui  le  liait  à 
M.  Bagier.  Il  est  reparti  pour  l'Italie. 

.j*^  Depuis  longtemps,  les  échos  du  théâtre  Lyrique  n'avaient  retenti 
d'applaudissements  pareils  à  ceux  qui  ont  accueilli  jeudi  soir  la  reprise 
de  fa  Fanchonnelle.  C'est  qu'aussi  Mme  Garvalho,  dont  ce  rôle  avait 
établi  si  solidement  la  réputation  au  moment  où  elle  passait  du 
théâtre  de  l'Opéra-Coniiq-ie  à  celui  du  boulevard  du  Temple,  y  repa- 
raissait dans  tout  l'éclat  de  son  magnifique  talent,  mûri  par  les  grands 
rôles  qu'elle  a  créés  depuis  onze  ans.  Si,  dans  la  classification  des . 
œuvres  lyriques,  la  Fanchonnotle  n'occupe  qu'un  rang  secondaire,  elle 
n'en  est  pas  moins  un  des  opéras -comiques  contemporains  les  plus  amu- 
sants et  les  plus  sympathiques.  Les  nombreux  morceaux  qu'elle  contient 
sont  admirablement  écrits  pour  faire  briller  une  première  chanteuse,  et 


14 


KEVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


quand  cette  première  clianteiise  est  de  la  force  de  Mme  Carvallio  on 
comprend  le  parti  qu'elle  en  devait  tirer.  Aussi  la  romance  :  Mon  pauvre 
cœur,  lais-toi,  la  ronde  qui  termine  le  premier  acte,  le  Noël  de  M.  Jean, 
le  boléro  et  parliculièrement  le  délicieux  duo  de  la  vieille  tante  avec 
son  neveu,  au  troisième  acte,  la  portèrent-ils  aux  nues.  Ce  triomphe 
s'est  reproduit  jeudi.  Les  mélodies  faciles,  mais  séduisantes,  de  Clapisson, 
dites  avec  une  pareille  perfection,  ont  valu  à  leur  interprète  bravos  sur 
bravos,  rappels  et  couronnes  Monjauze  rentrait  ce  jour-là,  sur  la  scène 
qu'il  avait  momentanément  quittée,  et  sa  part  dans  le  succès  a  été  d'au- 
tant plus  grande  qu'un  repos  de  quelques  mois  a  l'endu  beaucoup  de 
fraîcheur  à  sa  voix.  Aussi  a-t-on  bissé  ses  coup!els  d'entrée  et  a-t-il  été 
applaudi  chaleureusement  après  sa  romance  du  deuxième  acte  et  le  duo 
du  troisième.  Cette  reprise,  par  .«-on  éclat  et  sa  solennité,  présage  à  la 
direction  une  suite  de  fructueuses  repré.senlalions. 

^*^  C'est  sous  le  titre  de  Elisabelh  en  Hongrie  et  non  du  Hoi  de  la 
Montagne,  comme  nous  l'avons  annoncé  par  erreur,  qu'on  répète  en  ce 
moment  au  théâtre  Lyrique  le  nouvel  ouvrage  de  M.  Jules  Béer  Mlles 
Schroeder  et  Ducasse,  MM .  Massy,  Ismaël  et  Barré  y  rempliront  les  prin- 
cipaux rôles. 

,j*^  Aux  litres  d'opérettes  que  l'actif  Athénée  se  propose  de  jouer  pro- 
chainement et  dont  nous  avons  donné  la  liste,  nous  ajouterons  un 
Riquet  à  la  houppe  dont  la  musique  est  due  à  la  plume  élégante  et  fine 
de  Deflès. 

,*;:-  Ainsi  que  nous  en  avions  donné  la  nouvelle,  le  Pardon  de  Plocrmel 
a  été  récemment  et  pour  la  première  fois  représent(;  à  Dijon.  Les  difficul- 
tés qu'il  a  fallu  vaincre  ont  été  grandes;  la  direction  a  fait  rie  vaillants 
efforts  pour  que  la  mise  en  scène,  les  décors,  le  torrent,  les  effets  de 
lumière  électrique,  les  chœurs,  l'orchestre,  les  artistes,  tout  enfin  con- 
courût à  la  réussite  complète  de  l'œuvre.  Le  rôle  de  Dinorah  a  été  un 
triomphe  pour  Mme  Boulangeot.  M.  Ferrier  joue  et  chante  Hoël  avec 
beaucoup  d'énergie;  MM.  Fetlinger  et  Delparle  ont  fait  bisser  l'air  du 
Chasseur  et  celui  du  Faucheur.  Le  public  se  presse  aux  représentations 
de  ce  bel  ouvrage  qu'aucune  direction  dijonnaise  n'avait  encore  osé 
aborder. 

^"^  Les  théâtres  de  Reims  et  d'Avignon  viennent  de  jouer  la  Grande- 
Duchesse,  avec  un  égal  succès.  Sur  ces  deux  scènes,  l'ouvrage  a  été 
bien  monté  et  convenablement  distribué.  Mme  Vauthier,  MM.  Minne  et 
Châtillon  ont  reçu  du  public  rémois  un  accueil  sympathique.  On 
écrit  d'Avignon  que  l'espèce  de  pruderie  introduite  dans  son  rôle  par 
Mlle  Coinde  (la  Grande-Duchesse),  ne  saurait  porter  atteinte  à  la  pièce 
qui  gagne  presque  à  être  jouée  de  la  sorte  et  sans  cascades  exagérées. 

,^*^  Les  "répi'titions  de  Robinson  Crusoé  sont  poussées  avec  une  grande 
activité  à  Bruxelles,  à  Lyon,  à  Bordeaux  et  à  Genève;  le  théâtre  de 
Marseille  se  dispose  également  à  le  mettre  à  l'étude 

^*if  I.es  Nuits  de  Florence  :  tel  est  le  titre  d'un  nouvel  opéra  en  trois 
actes,  qui  doit  être  représenté  prochainement  sur  le  Grand-Théâtre  de 
Lille.  Cet  ouvrage  est  dû  à  la  collaboration  de  MM.  Brun  Lavainne  pour 
les  paroles,  et  Ferdinand  Lavainne  pour  la  musique;  la  réputation  de  ce 
dernier,  comme  compositeur,  est  une  garantie  de  succès.  Aussi  la  direc- 
tion eompte-t-elle  Sur  cet  ouvrage,  et  sur  Roméo  et  Juliette  de  Gounod. 
pour  clôturer  dignement  l'année  théâtrale. 

^"^  Martha  ne  ralentit  pas  ses  pérégrinations  heureuses  «  aux  rives 
étrangères.  «  On  l'a  représentée  la  semaine  dernière,  sous  des  cieux  bien 
différents  :  à  Genève  et  à  Alger.  Ici  comme  là,  comme  partout,  le  mélo- 
dieux opéra  de  Flotow  a  su  plaire  et  a  été  un  succès  de  partition  et  d'ar- 
tistes. 

„;**  On  lit  dans  la  Gazette  des  Étrangers  :  «  L'opéra  italien  en  Chine  ! 
Une  troupe- italienne  et  un  ballet  sont  attendus  à  Hong-Kong  au  prin- 
temps prochain,  pour  donner  des  représentations  au  Teatro^  Lusitano. 
L'ouverture  aura  lieu  par  //  Trovatore.  Les  prix  d'entrée  sont  à  peu 
près  les  mêmes  qu'à  Paris  et  à  Londres;  une  stalle  est  cotée  25  francs; 
une  loge  de  six  personnes,  123  francs.  » 

^*,t.  On  écrit  de  Londres  que  la  reconstruction  du  théâtre  de  Sa 
Majesté,  décidée  en  principe,  va  commencer  prochainement.  Les  entrepre- 
neurs se  sont  engagés  à  la  livrer  pour  le  l"  janvier  1869.  M.  Mapleson 
fait  rafraîchir  la  salle  de  Drury  Lane  pour  y  donner  ses  représentations 
la  saison  prochaine. 


NOUVELLES  DIVERSES. 


3^*,  A  l'occasion  du  jour  de  l'an,  S.  Exe.  le  maréchal  Vaillant,  ministre 
de  la  Maison  de  l'Empereur,  a    reçu  aux  Tuileries  le  haut  personnel 


du  Conservatoire  Impérial  de  Musique  et  MM.  les  directeurs  des  théâtres 
de  Paris. 

if*^  Au  troisième  concert  du  Conservatoire,  l'exécution  de  la  symphonie 
en  la  de  Beethoven,  qui  figurait  en  tête  du  programme,  a  été  de  tous 
points  magnifique  :  précision,  nuances,  mouvements,  rien  n'a  laissé  à 
désirer. —  Le  délicieux  chœur  des  nymphes  de  Psgché,  d'Ambroise  Tho- 
mas, si  scénique  et  d'une  si  délicate  contexture,  a  été  bissé.  —  Mme  Tar- 
dieu  de  Malleville,  qui  a  exécuté  le  huitième  concerto  pour  piano  en  ré 
mineur  de  Mozart,  a  eu  de  beaux  moments  dans  la  poétique  et  suave 
romance  en  si  bémol;  mais  son  succès  n'a  pas  été  très-vif  dans  le  pre- 
mier et  le  dernier  morceau,  et  force  nous  est  de  dire  que  le  public  a 
élé  juste.  C'est  un  léger  échec  qu'elle  eût  pu  éviter  en  comptant  moins 
sur  elle-même  et  sur  ce  concerto,  qui  lui  est  familier  depuis  longtemps, 
et  dont  l'exécution  a  péché  principalement  du  côté  technique.  —  M.  Wa- 
rot  a  chanté  l'air  célèbre  de  Slralonice  :  Versez  tous  vos  chagrins,  avec 
un  bon  style;  il  a  été  justement  applaudi.  On  a  également  fait  très-bon 
accueil  à  la  marche  du  Tannlmuser,  qui  terminait  le  concert,  et  qui  a 
été  fort  bien  dite. —  Le  programme  d'aujourd'hui  comporte  quelques  chan- 
gements, par  suite  de  la  décision  prise  au  commencement  de  cette  année 
par  le  Comité  de  ne  pas  faire  entendre  deux  fois  de  suite  les  mêmes 
soHstes;  ainsi  le  concerto  de  Mozart  est  remplacé  par  un  concerto  de 
violon  composé  et  exécuté  par  M.  Garcin,  membre  de  l'orchestre,  et 
l'air  de  Slralonice  par  le  chœur  Alla  beala  Irinità.  Cette  mesure,  établie 
en  vue  de  permettre  à  un  plus  grand  nonibre  d'artistes  de  se  produire, 
les  prive  aussi  de  la  moitié  de  leur  public,  puisqu'une  seule  série  d'a- 
bonnés pourra  désormais  entendre  chacun  d'eux. 

*'**  Voici  le  programme  du  onzième  concert  populaire  de  musique 
classique  qui  sera  donné  aujourd'hui  à  2  heures,  au  cirque  Napoléon, 
sous  la  direction  de  J.  Pasdeloup  :  1°  Symphonie  en  sol  mineur  de  Mo- 
zart (allegro,  andante,  menuet,  finale);  —  2°  Ouverture  de  Manfred  de 
Robert  Schuinann,  \"^  audition;  —  3° Sicilienne,  menuet  de  J. -Sébastien 
Bach  [V  audition);  —  i"  9«  symphonie  de  Beethoven  (i'"  partie  :  alle- 
gro un  poco  maestoso,  adagio  cantabile,  scherzoj;  3°  —  Ouverture  de 
Guillaume  Tell  de  Rossini  :  soli  par  MM.  Brunot  (flûte);  Casleignier  fcor 
anglais);  Poëncet  (violoncelle). 

^,*t  La  cinquième  séance  de  musique  de  chambre  donnée  par  M.  Bo- 
newilz  le  29  décembre,  offrait  l'intérêt  d'une  nouveauté  qui  avait  son 
prix  pour  les  amateurs  de  bonne  musique.  Nous  voulons  parler  d'un 
trio  (op.  18)  pour  piano,  violon  et  violoncelle,  de  M.  Saint-Saëns,  œuvre 
d'un  très-grand  mérite,  et  qui,  fort  bien  exécutée  par  M.M.  Bonewitz, 
Telesinski  et  Norblin,  a  produit  un  excellent  effet.  —  M.  Bonewitz  an- 
nonce une  nouvelle  série  de  matinées,  à  dater  du  19  janvier,  dans  les 
salons  Kriegelstein.  On  entendra  dans  la  première  un  tiio  de  Charles 
Dancla . 

^*^  Une  très-belle  salle  de  concert,  à  laquelle  on  a  donné  pour  parrain 
l'illustre  auteur  des  Huguenots,  a  été  inaugurée  à  Liverpoul  le  31  dé- 
cenibre  dernier.  La  Meyerbeer-Hall  est  située  dans  Hardman  Street.  La 
première  soirée  a  été  splendide:  après  un  prologue  en  vers  lu  par  M.  H. 
Edward  Hime,  et  couvert  d'applaudissements,  un  concert  a  eu  lieu  au 
profit  des  Israélites  pauvres  de  Liverpool.  La  fête  s'est  terminée  par  un 
bal  qui  a  largement  empiété  sur  Tannée  nouvelle. 

i*,j,  L'inauguration  du  grand  orgue  de  Notre-Dame,  aura  lieu  pro- 
chainement, avec  une  solennité  exceptionnelle.  Les  organisles  les  plus 
célèbres  de  l'Europe,  convoqués  à  cette  occasion,  .'e  feront  entendre  dans 
l'église  métropolitaine,  et  se  réuniront  en  un  congrès  où  seront  agitées 
plusieurs  questions  intéressantes  relatives  à  la  musique  religieuse. 

»*,^  Mme  Oscar  Comettant  a  repris,  dans  son  salon  de  Versailles,  les 
soirées  musicales  qui  ont  le  rare  privilège  d'attirer  la  meilleure  Société 
de  la  ville  du  grand  roi.  A  la  dernière  de  ces  réunions,  Mme  Comet- 
tant a  chanté,  avec  un  sentiment  exquis  et  la  méthode  à  laquelle  elle  doit 
sa  réputation,  le  Vallon  de  Gounod  et  une  sonate  en  la,  de  Mozart,  arran- 
gée pour  la  voix.  On  a  chaleureusement  applaudi  Alard,  dans  un  solo 
de  sa  composition . 

^*^  Nous  sommes  heureux  de  constater  le  nouveau  succès  que  les 
deux  charmantes  sœurs  Rila  et  Nina  Pellini  viennent  d'obtenir  en 
chantant  pour  la  seconde  fois  de  cet  hiver  au  concert  donné  par  la 
Société  philharmonique  de  Rueil.  On  leur  a  fait  l'accueil  le  plus  flatteur, 
et  les  applaudissements  les  plus  chaleureux  leur  ont  été  prodigués  après 
le  duo  de  la  Pia  di  Potolomci  et  dans  un  autre  duo  de  Géraldy,  les  Prés 
verts,  qui  a  été  expressément  écrit  pour  les  deux  gracieuses  cantatrices. 
Mlle  Rita,  l'aînée  des  deux  sœurs,  n'a  pas  été  moins  heureuse  dans  un 
air  russe  et  dans  une  romance  française.  A  côté  d'elles,  on  a  remarqué 
et  applaudi  le  jeune  pianiste  Kowalski,  qui  a  exécuté  à  merveille  un 
morceau  de  sa  composition  sur  Don  Juan,  et  le  chanteur  M.  Castel,  qui 
a  égayé  son  auditoire  par  ses  chansonnettes. 

^^"-^  Deux  œuvres  magistrales,  du  genre  le   plus  opposé,  le  Désert  de 
Félicien  David  et  Der    Rose  Pilgerfahrt,   de  Robert  Schumann  formaient 


DE  PAKIS 


15 


le  programme  du  dernier  concert  de  la  Cônconlia  de  Mullioiit;e.  Celle 
jeiuie  et  vaillante  Société  orphéoniquo,  dirigée  par  M.  J.  Heyber^cr 
avec  tant  de  zèle  et  de  talent,  et  renforcée  par  un  orcliestrc  de  mérite, 
s'est  réellement  surpassée  dans  l'interprétation  de  ces  deux  importants 
poëmes  mélodiques.  Le  public  n'a  pas  ménagé  les  marques  de  sa  vive 
sympathie  aux  membres  de  la  Concordia  qui,  répudiant  les  succès  faciles 
consacrent  de  longs  mois  à  l'étude  des  œuvres  sévères  et  en  révèlent,  à 
un  Jour  donné,  les  beautés  saisissantes. 

^*^  Berlioz  continue  d'être,  à  Saint-Pétersbourg,  l'objet  des  plus  sym- 
pathiques manifestations.  Déjà  on  a  pu  remarquer,  dans  notre  dernière 
correspondance,  que  l'une  de  ses  œuvres  (igurait  au  programme  du 
second  concert,  bien  qu'il  eut  été  convenu  que  le  dernier  .seul  lui  serait 
réservé;  mais  le  dilettantisme  russe,  qui  a  voué  un  véritable  culte  à 
notre  illustre  compalriote,  n'a  pas  eu  la  patience  d'attendre  et  a  voulu 
l'applaudir  dès  le  début.  Au  troisième  concert,  Berlioz  a  dirigé,  avec  cet 
admirable  talent  de  chef  d'orchestre  que  per.ionne  peut-être  ne  possède 
comme  lui,  l'exécution  de  la  symphonie  en  ut  mineur  de  Beethoven,  le 
second  acte  A'Orphéc  de  Gluck,  dont  les  -soli  ont  été  chantés  par  une 
élève  du  Conservaloii-e,  Mlle  Nawroski,  douée  d'une  magnifique  voix  rie 
contralto,  et  son  ouverture  du  Carnaval  romain;  son  caprice  pour  violon 
a  été  joué  avec  un  très-grand  succès  par  Henri  Wieniawski.  On  répète, 
pour  les  concerls  suivants,  la  symphonie  de  HaroU,  la  seconde  partie  de 
l'Enfance  du  Ciirist,  d'importants  fragments  des  Troyens  et  la  belle  mélo- 
die de  la  Captive,  avec  accompagnement  d'urcheslre;  autant  de  triomphes 
qui  attendent  l'éminent  compositeur. 

t*jf  Ullmann  vient  d'augmenter  sa  compagnie  d'artistes  de  l'excclent 
flûtiste  M.  Do  Yroyes;  il  l'a  engagé  pour  huit  concerls. 

,;;%,  L'excellent  violoniste  Alfred  Holuies  est  engagé  pour  jouer  diman- 
che prochain  19  janvier,  au  concert  du  Conservatoire  de  Bruxelles.  Il  y 
exécutera  le  concerto  de  iMendelssohn  et  un  amiante  avec  orchestre,  VA- 
doralion,  de  sa  composition. 

5);*^  Le  Chant  de  guerre,  à  quatre  mains,  par  M.  Henri  Herz,  vient  de 
paraître,  et  nous  nous  empressons  de  l'annoncer.  Nous  avons  eu  la 
bonne  fortune  d'entendre  ce  délicieux  morceau  exécuté  par  MM.  Henri 
Litolfl'  et  Henri  Herz,  et  d'après  l'effet  qu'il  a  produit,  nous  croyons 
pouvoir  lui  prédire  un  grand  succès. 

3,*!,  Hier  a  eu  lieu  le  quatrième  bal  de  l'Opéra.  Grande  foule  et  mu- 
sique entraînante  de  l'orchestre  de  Strauss,  dirigé  par  son  habile  chef. 

i*4  Un  nouveau  journal  de  musique  vient  de  se  fonder  h  Londres, 
sous  le  titre  d't'xeler-HaU.  11  est  consacré,  comme  son  aîné  The  Choir, 
à  la  muMque  l'oligieusc,  et  spécialement  à  celle  qui,  d'après  un  usage 
anglais  très-répanclu,  s'(xécute  en  famille  le  dimanche  soir.  Des  compo- 
siteurs de  mérite  collaboreront  à  cette  feuille,  que  publie  la  maison  d'é- 
dition Motzler  et  C=. 

,^*^  Au  nombre  des  nouvelles  publications  musicales  appelées  à  obte- 
nir un  succès  mérité,  nous  signalerons  l'heureux  débutd'un  jeune  com- 
positeur espagnol,  M.  Edouard  Ocon,  dont  plusieurs  salons  parisiens  ont 
déjà  pu  apprécier  le  talent  original  et  .sympathique.  Sa  barcai'olle.  Hérons 
à  notre  amour,  dont  les  paroles  sont  traduites  do  l'espagnol,  est  une  de 
ses  plus  charmantes  inspu'ations,  et  nous  comprenons  que  Mme  Marie 
Cabel  en  ait    accepté  la    dédicace. 

^*^.  Un  des  vétérans  de  l'art  niusical,  le  cantor  de  la  Thoraasschule 
de  Leipzig,  Moritz  Hauptmann,  vient  de  mourir  dans  cette  ville  à  l'âge 
de  soixante-quinze  ans.  Il  était  né  à, Dresde  le  13  octobre  1792.  La  place 
de  cantw  de  la  célèbre  école  de  Saint-ïhomas  avait  été  jadis  occupée, 
comme  on  sait,  par  Sébastien  Bach.  Moritz  Hauptmann  laisse,  comme 
professe'ur  de  contrepoint  et  compositeur,  un  nom  honoré;  les  artistes 
les  plus  distingués  d'Allemagne  se  font  gloire  d'avoir  reçu  sas  leçons  au 
Conservatoire.  Son  caractère  plein  de  noblesse  et  de  bienveillance  ne  lui 
avait  attiré  que  des  amis. 

.^*^  M.  Franck-Marie,  qui  fut  longtemps  critique  musical  à  la  Patrie, 
vient  de  mourir  à  Rome  dans  un  âge  peu  avancé;  il  n'avait  que  trente- 
deux  ans. 


ÉTRANGER 


^*jf  Berlin.  —  A  peine  de  retour  de  Varsovie,  où  elle  avait  été  escortée 
par  les  adieux  enthousiastes  du  public,  et  oi^i  son  directeur  lui  avait 
offert  une  belle  bague,  Mlle  Artôt  a  fait  sa  rentrée  à  Berlin  avec  le  suc- 
cès qui  l'accompagne  partout.  Elle  y  a  chanté  le  Domino  noir,  et  à  la 
première  représentation  de  cet  ouvrage,  on  a  fait  bisser  plusieurs  mor- 
ceaux à  l'éminente  cantatrice  et  on  lui  a  jeté  de  nombreux  et  magni- 
fiques bouquets.   Mlle  Artôt  a,   depuis,  reçu  dans   la  Somnambule  un 


accueil  aussi  brillant  ;  elle  doit  encore  pa.sser  Ici  mois  de  février  à  Var- 
sovie, à  la  grande  joie  du  dilettantisme  di;  celte  ville,  puis  elle  reviendra 
à  Berlin  pour  le  reste  do  la  siiisoji.— Le  théàlre  de  Friedrich-Wilhclms- 
tadt  a  encaissé  pendant  l'année  JH(i7:  111,000  thalcrs;  les  receltes  de  la 
Vie  Parisienne,  d'Oflenbach,  entrent  dans  ce  total  pour  p'ès  de  la  moitié. 

jf*sf:  Cologne.  —  Roméo  cl  Juliette  a  été  donné  le  4  de  ce  mois;  l'œuvre 
de  Gounod  a  été  favor-aldement  accueillie  du  public. 

***  Vienne.  —  Mlle  d'EdeIsberg  a  fait  un  heureux  début  dans  le  rôle 
de  Fidès  du  Prophète.  —  Roméo  et  Juliette  de  Gounod  est  prêt  à  passer. 
Mignon  .sei-a  monté  ensuite.  —  Une  opérette  de  Stanislas  Duniecki,  Lu- 
cifer, a  été  donnée  avec  succès  au  théâtre  An  der  Vien  ;  Zampa,  avec 
Robinson  dans  le  rôle  principal,  attire  la  foule  à  ce  théâtre.  Les  répéti- 
tions de  Robinson  Crusoé  .se  poursuivent  aclivemenl.  —  Joachim  et  Ru- 
binstein  ont  fait,  chacun  de  leur  côté,  leurs  adieux  au  public  do  Vienne, 
où  ils  ont  recueilli  d'enthousiastes  bravos. 

^*^  Madrid.  —  Itiyolctto  a  servi  aux  débuts  de  Mlle  Léontine  de  Mae- 
sen,  qui  a  pleinement  réussi.  Bonnehéo  a  été  superbe  dans  le  rôle  de 
Rigoletto.  —  Dans  Un  Ballo  in  mischera  ,  Mme  Lafont,  dont  l'engage- 
ment vient  d'être  prolongé  d'un  mo's  et  demi,  s'est  fait  chaleureuse- 
ment applaudir  avec  Tamberlick,  Bonnehée  et  Mme  Sonieri. 

^*^.  Barcelone.  —  Fra  Diavolo  et  le  Pardon  de  Ploërmel,  avec  récitatifs 
et  pai'oles  italiennes,  viennent  d'être  mis  à  l'élude  au  théâtre  du  LIceo. 

,,•"%  Rome.  —  La  censure  ayant  refusé  d'approuver  le  libretto  de  Don 
Carlos,  l'imprésario  .lacovacci,  désireux  de  donner  l'œuvre  de  Verdi,  y  a 
laissé  introduire  d'impurlanis  changements,  qui  dénaturent  complète- 
ment certaines  situations  et  certains  caractères. 

^■■,,  Florence.  —  La  Pergola  a  inauguré  la  saison  d'hiver  le  31  dé- 
cembre avec  Un  llallo  in  mascliera.  Mlle  Rusa  Csillag,  pour  ses  débuts,  y 
a  i-emporté  un  très-beau  succès,  qui  a  augmenté  encore  le  lendemain  à 
la  représentation  de  gala  donnée  en  présence  du  roi  et  de  la  cour. 

f*^;  Modène.  —  Gli  Vgonotti  ont  brillamment  ouvert  la  campagne  le 
29  décembre.  La  basse  Segri-Segarra  s'est  particulièrement  distingué 
dans  le  rôle  difficile  de  .Marcel. 

.J'.^:  Milan.  —  Le  théâtre  Santa-Radegonda  se  fait  de  belles  soirées  avec 
Ciceo  e  Cola,  opéra-bufifa  en  quatre  actes  du  maestro  napolitain  Buo- 
nomo. 


Quatre  morceaux  nouveaux  pour  le  Piano 

Chez  Gérard  et  C",  12,  boni,  des  Capucines  (maison  du  Grand-Hôtel). 

1.  —  fSoMveuir  «!«  l'iinge    et  t'enfant,    dédié    à    Mme    la   ba- 

ronne de  Bosmelet  (née  de  Virieu). 

2.  —  Galop,  à  M.  Francis  Sandford. 

3.  --  Atlegretlo  ft,cIierzuu<Bo,  à  Mme  Levasseur  (née  Wo'owski). 

Chez  Gamuoci  fi'ères,  112,  rue  de  Richelieu  (maison  Frascati). 
i.  --  AHdantc  cuntuliilc,  à  M.  de  Cutloli. 


Publication  de  G.  Brandus  et  S.  Dufour,  éditeurs, 
103,  RUE  DE  Richelieu. 


LA  ISIOi  i 


CARTES-PORTRAITS,  AVEC  MUSIQUE,  PHOTOGRAPHIÉES 

Cette  nouvelle  collection  se  recommande  parliculièrement  par  ses  por- 
traits tout  artistiques  et  d'une  grande  ressemblance;  par  la  perfection  de 
la  musique  photographiée,  dont  les  types,  quoique  aussi  réduits  que  pos- 
sible, sont  cependant  très-lisibles;  enfiii  par  un  format  exceptionnel  qui 
la  rend  vraiment  portative.  Rien  de  plus  commode,  en  effet,  que  de 
pouvoir  ]ilacer  dans  sa  poche  un  étui  renfermant  vingt  à  trente  cartes- 
musique;  rien  de  plus  gracieux  à  oftrir  comme  cadeau. 

N.B.  —  La  collection  s'augmentera  successivement  et  de  façon  à  offrir 
le  choix  le  jilus  varié. 


16 


HEVUE  ET  GAZETTE  MLSICALE  DE  l'AUlN. 


(Eiivres  de  Georges  Kastner 

PUBLIÉES     PAR     G.     BBANDUS     ET     S.     DUFOUR,     ÉDITEURS,     103,     RUE     DE     RICHELIEU. 


DE    LA    LANGUE    FRANÇAISE 

Ou  Explication  des  proverbes,  locutions  proverbiales,  mots  figurés,  qui  tirent  leur  origine  de  la  musique. 
Accompagnée  de  Recherches  sur  un  grand  nombre  d'expressions  du  même  genre  empruntées  aux  langues  étrangères,  et  suivie  de 

1  VOL.  GRAND  iN-4°,  LA    SAINT -JULIEN    DES    MÉNÉTRIERS  i  vol.  grand  in-4% 

cartonné,  SO  fr.;  vélin,  80  fr.  Symphonie-cantate  à  grand  orchestre  avec  solos  et  cliœurs.  cartonné,  30  fr.;  vélin,  80  fr. 


LA  HARPE  D'EOLE 

ET 

LA  MUSIQUE  COSMIQUE 

Etudes  sur  des  rapports  de*  phénomènes  sonores  de  la  nature 
avec  la  science  et  l'art, 

SUIVIES   DE 

STÉPHEN,    OU    LA    HARPE    D'ÉOLE 

Grand  monologue  lyrique  avec  chœurs. 
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LES  DAKSES  DES  MORTS 

DISSERTATIONS    ET    RECHERCHES     HISTORIQUES, 

PHILOSOPHIQUES ,  LITTÉRAIRES  ET  MUSICALES 

Sur  les  divers  Monuments  de  ce  genre  qui,  existent  ou  qui  ont  existé 

tant  en  France  qu'à  l'Etranger, 

ACCOMPAGNÉES   DE 

LA     DANSE    MACABRE 

GRANDE    RONDE   VOCALE   ET   INSTRUMENTALE 

ET  D'UNE  SUITE  DE  PLANCHES 

Représentant  des  sujets  tirés  d'anciennes  danses  des  morts  des  xiv«,  xv'', 
xvi«  et  xvn"  siècles,  la  plupart  publiés  en  France  pour  la  première  fois, 
avec  les  figures  d'instruments  de  musique  qu'ils  contiennent,  ainsi  que 
d'autres  figures  d'instruments  du  moyen  âge  et  de  la  renaissance. 


LES  CHANTS  DE  LA  VIE 

CYCLE  CHORAL 
Ou  Recueil  de  2S  morceaux  à  4,  S,  6  et  8  parties,  pour  ténor  et  basse 

PRÉCÉDÉS   DE 
RECHERCHES    HISTORIQUES 

ET   DE  CONSIDÉRATIONS    GÉNÉRALES    SUR   LE   CHANT  EN   CHOEUR 

1  vol.  in-4''.  POUR  VOIX  d'hommes.  net...    13  fr. 


■1 .  Chant  de  fête. 

2.  Prière. 

3.  Chant  de  baptême. 

4.  Sérénade. 

5.  Sur  la  mort  d'un  artiste. 

6.  Guitare. 

7 .  Le  Cri  d'alarme . 

8.  Le  Commencement  du  voyage. 

9.  Chant  d'hymen. 

10.  Chant  des  batehers. 

11.  Primavera,  tyrolienne. 

12.  Chant  d'hymen. 

13.  L'Asile,  tyrolienne. 

14.  Pensée  d'amour. 


13.  Les  Matelots. 

16.  Chant  de  victoire. 

17.  Barcarolle. 

18.  Sur  la  mort  d'un  guerrier. 

19.  L'Eté  tyrolien. 

20.  Pendant  la  tempête. 

21.  Le  Printemps. 

22.  Chant  bachique. 

23.  La  Chasse. 
2-4.  Valse. 

23.  Polka. 
2lj-   Marche. 

27.  Pas  redoublé. 

28.  Galop. 


LES    VOIX    DE    PARIS 

ESSAI  mn  DhTOIitE  IITTÉRIIRE  ET  HUSIGAIE 
DES    GRIS    POPULâlRES    DE    LA    CAPITALE 

Depuis  le  moyen  Age  Jusqu'à  nos  Jours, 

PRÉCÉDÉ    DE 

CONSIDÉRATIONS  SDR  L'ORIGINE  ET  LE  CARACTÈRE  DD  CRI  EN  GÉNÉRAI 

ET   SUIVI    DE 


mm    FAiiis 

Grande  Symphonie  humoristique  vocale  et  instrumentale. 
1  vol.  grand  m-i",  net 13  fr. 


MANUEL    GÉNÉRAL 

DE 

A  L'USAGE  DES    ARMÉES  FRANÇAISES 

COMPRENANT 

1°  L'esquisse  d'une  Histoire  de  la  musique   militaire  chez  les  différents 
peuples,  depuis  l'antiquité  jusqu'à  nos  jours. 

2°  La  nouvelle  organisation    instrumentale    prescrite    par    l'ordonnance 
ministérielle  du  19  août  1843. 

3°  La  description  et  la  figure  des  instruments  qui  la  composent,  notam- 
ment des  nouveaux  instruments  de  M.  Adolphe  Sax. 

i°  Quelques  instructions  pour  la  composition  et  l'exécution  de  la  musique 
militaire. 

1  vol.   in  -i",  net 20  /'r. 

LES  CHA]\TS 

DE    L'ARMÉE   FRANÇAISE 

OU  RECUEIL  DE  MORCEAUX  A  PLUSIEURS  PARTIES 

Composés  pour  l'usage  spécial  de  chaque  arme 

ET   PRÉCÉDÉS    d'un   ESSAI    HISTORIQUE    SUR 
liES    CHANTS    HII>iTAIRESi    DES    FRANÇAIS 

1  fort  vol.  grand  in-i",  net 13  fr. 

DEUXIÈME   SÉRIE. 

1 .  Les  Carabiniers. 

2.  Les  Cuirassiers. 

3.  Les  Dragons. 
i.  Les  Lanciers. 


PREMIERE    SERIE. 

1.  L'Armée. 

2.  La  Garde. 

3.  Les  Guides. 

4.  Les  Soldats  du  génie. 
b.  Les  Artilleurs  à  cheval. 

6.  Les  Artilleurs  à  pied. 

7.  Les  Pontonniers. 

8.  L'Infanterie  de  marine. 

9.  Les  Matelots. 

10.  Les  Gendarmes. 

1 1 .  Les  Pompiers. 

Chaque  série,  net  :  3  fr.  SO. 


5.  Les  Hussards. 

6.  Les  Chasseurs  à  cheval. 

7.  Les  Spahis. 

8.  LTnfanlerie  de  ligne. 

9.  L'Infanterie  légère. 

10.  Les  Chasseurs  à  pied. 

11.  Les  Zouaves. 

12.  Les  Tirail).  indig.  de  l'Algérie. 
-  Chaque  numéro,  net  :  iO  c. 


1» 


Essai  sur  les  principaux  mytbes  relatifs  à  l'incantation,  les  enchanteurs,  la  musique  magique,  le  chant  du  cjgne,  etc . 

Considérés  dans  leurs  rapports  avec  l'histoire,  la  philosophie,  la  littérature  et  les  beaux-arts. 
Ouvrage  orné  de  nombreuses  figures  représentant  des  sujets  mythologiques  tirés  des  monuments  antiques  et  modernes ,  et  suivi  de 

LE    RÊVE    D'OSWALD    ou    LES    SIRÈNES 


1  VOL.  G*  IN -4°.  nkt:  20  fr. 


Grande  symphonie  dramatique  vocale  et  instrumentale. 


i  VOL.  G^  iN-4»,  net:  20  fr. 


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S5"  Année. 


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ON  S'ABONNE  : 

Dans  les  Déparlements  et  â  l'Étranger» 

chez  tous  [es  Marchands  de  Musique,  les  LibraÎH 

et  aux  Bureaux  des  Messageries  et  des  Postes. 


REVUE 


19  imm  1868. 


PRIX    DE    L'ABONNEMENT: 

Paris. 24    r.  par  on 

Départements,  Belgique  et  Suisse...,    30  ».       id. 

Étranger 31  »       id. 

Le  Journal  paraît  le  Dimanche. 


GAZETTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


SOMMAIRE.  —  Histoire  de  la  musique  instrumentale  (9'  articlel,  par  Mau- 
rice Cristal.  —  Littérature  musicale:  l'Acouslique-i  ou  les  Phénomènes  du 
son,  de  R.  Radau,  par  Arthur  fou^in.  — Correspondances  :  Bruxelles  et 
Moscou.  —  Nécrologie:  Bocquillon,  par  Thomas  SauTage.  —  Nouvelles 
des  théâtres  lyriques.  —  Nouvelles  diverses.   —  annonces. 


HISTOIRE  DE  l  MUSIQUE  INSTRUMENTALE 

(6=  article)  (1). 

On  n'ignore  pas  que  tous  les  peuples  ont  eu,  en  général,  une 
prédilection  marquée  pour  les  timbales,  les  tambours  et  les  trom- 
pettes. C'est  un  goût  que  les  Allemands,  tout  aussi  bien  que  les 
Russes  et  les  Anglais,  ont  constamment  gardé,  n'en  déplaise  aux 
nations  du  Midi  qui  ne  dédaignent  pas  non  plus  ces  bruyants  en- 
gins musicaux!  Unies  aux  trompettes,  les  timbales  servaient  à 
former  des  espèces  de  fanfares  qui  se  nommaient  entrées,  parce 
qu'elles  retentissaient  pour  saluer  l'arrivée  des  grands  personna- 
ges. Ces  fanfares  acclamatives,  ces  toasts  musicaux,  comme  les 
appelle  spirituellement  M.  Kastner,  se  sont  perpétués  jusqu'à  nos 
jours  dans  le  Nord,  en  Angleterre,  en  Russie,  en  Allemagne,  et 
le  tusch,  sorte  d'impromptu  musical  au  moyen  duquel  les  artistes 
des  orchestres  d'Allemagne  manifestent,  sous  forme  d'ovation, 
leur  sympathie  pour  un  illustre  compositeur,  pour  un  habile  vir- 
tuose, qui  vient  d'obtenir  un  succès  brillant,  en  est  sans  doute 
dérivé. 

Dans  les  pays  du  Nord,  point  de  belles  fêtes  sans  timbales  et 
sans  trompettes  :  les  noces  et  les  festins  s'animaient  à  leur  fière 
harmonie,  à  leurs  accents  enthousiastes!  Seulement,  les  lois  de 
l'étiquette  n'en  permettaient  la  jouissance  qu'aux  princes,  aux  no- 
bles, aux  riches,  aux  puissants  ;  ce  n'est  qu'en  de  rares  occasions 
que  les  personnei  investies  de  charges  importantes,  s'aventuraient 
à  les  utiliser  pour  les  plaisirs  concertants  de  leur  société  fami- 
lière. 

La  faveur  toute  aristocratique  réservée  alors  à  ces  énergiques 
voix  englobées  aujourd'hui  dans  nos  orchestres,  tenait  surtout  aux 

(1)  Voir  les  n'^"  38,  40,  42,  44  el  46  de  l'année  1867. 


idées  guerrières  et  chevaleresques  qu'on  y  attachait  en  souvenir 
des  vieilles  traditions  de  la  féodalité.  La  musique  instrumentale 
du  xvni'=  siècle  rallia  ces  instruments  d'accents  divers  et  les  utilisa, 
mais  en  les  perfectionnant  et  les  remaniant.  Les  plus  bruyants 
n'étaient  pas  les  moins  recherchés;  cependant  tout  s'harmonisa,  et 
vers  le  milieu  du  xvni*  sièsle,  des  différentes  formes  de  la  musi- 
que, la  musique  instrumentale  fut  celle  qui  réalisa  les  progrès  les 
plus  remarquables,  surtout  en  Allemagne  où  le  style  et  le  génie  de 
l'instrument  se  manifestèrent  tout  à  coup  avec  un  éclat  incompara- 
ble. C'est  alors  que  le  concerto,  le  trio,  le  quatuor,  le  quintette, 
la  sonate  à  plusieurs  instruments  prirent  à  peu  près  le  caractère 
qu'on  remarque  dans  les  premières  productions  de  Boccherini  et 
d'Haydn. 

Les  jalons  des  progrès  accomplis  peuvent  être  ainsi  marqués. 
Ce  genre  de  pièces,  par  l'usage  fréquent  qu'on  en  avait  fait  au 
xvie  et  au  xvn"^  siècles,  avait  pris  entre  les  mains  des  grands 
maîtres,  Bach,  Haendel,  Corelli,  Tartini,  des  proportions  et  des 
développements  qui,  en  répondant  également  au  mérite  musical  et 
à  l'intérêt  de  la  composition,  devaient  amener  progressivement  l'art 
à  la  forme  sous  laquelle  il  se  manifeste  aujourd'hui.  Kobrich, 
Agrel,  Janitsch,  Radecker,  Camerloer,  avivèrent  l'intérêt  de  ces 
compositions  déjà  en  vogue.  Après  eux,  Craft,  Kurtzinger,  Tele- 
mann,  Schwindel,  Mislivecek,  Toeski,Wagenseil,  Stamitz  et  Wanlial, 
iirent  pressentir  que  le  cadre  symphonique  pouvait  s'agrandir,  et 
qu'il  serait  aisé  de  multiplier  et  de  varier  la  petite  armée  instru- 
mentale, mais  les  essais  étaient  encore  timides  ou  inhabiles  ;  il  y 
manquait  l'impulsion  d'un  homme  de  génie. 

Les  écrivains  de  l'époque  se  plaignaient  surtout  du  peu  d'audace 
des  compositeurs;  ils  sentaient  germer  toute  une  oeuvre  nouvelle 
et  ne  se  rendaient  pas  compte  que  c'est  par  l'effort  de  tous  les 
maîtres,  aujourd'hui  un  peu  délaissés,  que  le  fruit  si  longtemps  at- 
tendu put  atteindre  à  sa  maturité.  Il  est  bon  de  constater  en  quel- 
ques mots  quelle  part  chacun  prit  au  progrès  général  et  ce  que 
leur  intervention  présenta  de  profitable  et  de  fécond. 

La  musique  de  Bach,  peu  répandue  au  dehors,  ne  put  exer- 
cer qu'une  médiocre  influence  sur  les  compositeurs  contem 
porains;  elle  montre  ce  que  l'art  instrumental  était  à  cette 
époque,  déduction  faite  du  génie  immense  du  maître.  La  re- 
nommée du   grand    Bach  fut  en  effet  immense,  même  longtemps 


18 


UEVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


avant  sa  mort.  Toutefois  on  peut  affirmer  que  le  grand  homme 
n'a  pas  été  apprécié  à  toute  sa  valeur.  Ses  auditeurs,  les  maîtres 
célèbres  de  cette  époque,  ont  reconnu  qu'il  était  le  plus  habile  des 
organistes,  le  plus  merveilleux  des  improvisateurs,  le  plus  docte 
des  musiciens  de  l'Allemagne.  Ses  fugues  étaient  considérées  par 
quelques  artistes  comme  les  plus  belles  qui  eussent  été  écrites  pour 
l'orgue  ou  pour  le  clavecin  ;  ils  y  avaient  distingué  l'œuvre  d'un 
esprit  profond  et  hardi  dans  un  genre  qui  semble  exclure  l'inven- 
tion ;  mais  on  était  loin  de  soupçonner  toute  la  diversité  et  la  puis- 
sance du  talent  de  cet  homme  qui  portait  en  lui  tout  un  monde 
nouveau.  Sa  musique  d'orgue  et  de  clavecin,  bien  que  nombreuse 
et  toujours  admirable,  n'est  que  la  minime  partie  des  productions 
d'une  verve  originale  qui  semble  avoir  été  inépuisable.  L'existence 
calme  et  régulière  de  Bach  avait  favorisé  son  pencliant  au  travail. 
Son  activité  égalait  son  talent  et,  comme  il  vivait  éloigné  des 
grandes  villes,  il  resta  étranger  aux  variations  de  goût  et  de  mode 
que  l'art  subissait  de  son  temps.  La  personnalité  si  énergique  qui 
caractérise  chacune  de  ses  compositions  se  maintint  intacte,  grâce 
à  l'isolement  où  il  se  confina  pendant  toute  salaboricusecarriere.il 
fuyait  les  applaudissements,  ne  travaillait  que  pour  lui  et  pour 
quelques  amis,  et  condamnait  en  quelque  sorte  à  l'oubli  les  ou- 
vrages qu'il  produisait  et  qui,  exécutés  au  moment  oîi  il  venait  de 
les  ternn'ner,  étaient  aussitôt  enfermés  dans  une  armoire  d'oîi  ils 
ne  sortaient  plus. 

Les  effets  d'instrumentation,  dans  les  compositions  de  Bach, 
sont  si  variés  et  si  remarquables  qu'on  a  peine  à  comprendre 
comment  cet  homme,  qui  longtemps  a  vécu  dans  de  petites  villes 
et  qui  avait  peu  d'occasions  d'étudier  les  instruments ,  a  pu  si 
bien  les  connaître  et  devancer  son  siècle  dans  l'art  de  les  em- 
ployer. Dans  l'œuvre  de  Bach,  l'harmonie,  plus  hardie  que  cor- 
recte, saisit  toujours  l'auditeur  par  l'imprévu  et  par  l'énergie. 

Le  caractère  sérieux  et  même  austère  de  ce  maître  le  portait 
aux  amplifications  magistrales  de  la  symphonie,  et  s'il  eût  pu  dis- 
poser de  la  virtuosité  d'instrumentistes  de  mérite,  il  etit  été  aussi 
créateur  en  ce  gem-e  que  Haydn  et  que  Beethoven  ;  la  richesse 
d'instrumentation,  la  virilité  de  pensée  qu'il  a  déployées  dans  sa 
musique  pour  divers  instruments,  dans  les  sonates,  dans  les  con- 
certos, dans  les  ouvertures  et  les  symphonies  qu'il  a  laissés,  font 
regretter  que  les  circonstances  n'aient  pas  contraint  son  génie  à 
se  développer  spécialement  dans  ce  genre  de  composition  qui  était 
si  conforme  à  ses  aptitudes. 

Guillaume-Friedmann  Bach,  fils  aîné  de  Jean-Sébastien,  a  été, 
après  son  père,  un  des  musiciens  les  plu3  savants  de  l'Allemagne. 
Malheureusement  il  préférait  l'improvisation  à  la  composition  mé- 
ditée; mais  les  œuvres  peu  nombreuses  qu'il  a  laissées  dénotent 
la  science  la  plus  profonde  et  une  imagination  très-vigoureuse. 
Sa  Cmnposi'.ion  de  musique  complé/e  pour  la  Pentecôte,  avec 
orcheftre  et  orgue,  est  admirable  de  tous  points;  ses  œuvres  con- 
certées sont  toujours  intéressantes  et  quelquefois  d'une  rare  va- 
leur. On  exécute  encore  en  Allemagne,  avec  succès,  ses  composi- 
tions pour  les  fêtes  principales  de  l'église,  pour  voix,  orgue  et 
instruments.  Il  est  à  regretter  que  ces  œuvres  n'existent  qu'en 
manuscrits  et  n'aient  pu  se  répandre. 

Les  compositions  instrumentales  de  Charles-Philippe-Emmanuel 
Bach,  deuxième  fils  de  Jean-Sébastien,  ont  été  bien  plus  décisives 
pour  les  progrès  de  la  symphonie.  Actif  et  perspicace,  cet  artiste 
avait  fondé  à  Francfort  une  Académie  de  musique  dont  il  se  ré- 
serva la  direction,  et  pour  laquelle  il  composait  dans  les  occa- 
sions solennelles  des  œuvres  qui  sont  restées  des  modèles.  Il  entra 
aussi  au  service  de  Frédéric-le-Grand,  pour  lequel  il  écrivit,  beau- 
coup de  musique  instrumentale.  Il  fut  ensuite  nommé  directeur 
de  la  musique  à  Hambourg,  où  il  remplaça  Telemann.  Les  socié- 
tés artistiques  de  cette  ville  le  prirent  pour  chef;  sous  sa  direction 


elles  arrivèrent  à  une  exécution  chorale  irréprochable,  et  lui  durent 
leur  transformation.  Enfin,  il  fut  nommé  maître  de  chapelle  de  la 
princesse  Amélie  de  Prusse. 

Tout  ce  qu'il  écrivit  de  musique  dans  ces  différentes  positions 
officielles  a  un  cachet  de  nouveauté  et  de  génie.  Sa  musique  s'ac- 
cuse par  l'originalité,  la  grâce,  la  souplesse  et  le  dédain  des  phra- 
ses conventionnelles,  des  formules  vieillies,  de  toute  cette  rétho- 
rique  routinière  que  le  pédantisme  scientifique  traîne  après  lui. 
En  France  et  en  Angleterre  le  succès  de  ce  novateur  fut  à  la  hau- 
teur de  son  talent;  mais  en  Allemagne,  où  l'on  était  accoutumé 
au  style  doctrinaire,  alourdi  des  maîtres  scolastiques  de  second 
ordre,  on  ne  sut  pas  appi-écier  tout  son  mérite  ;  c'est  cependant  le 
style  d'Emmanuel  Bach,  perfectionné  par  Haydn  et  Mozart  qui 
depuis  a  charmé  toute  l'Europe. 

Jean-Christophe-Frédéric  Bach  a  aussi  écrit  des  œuvres  sym- 
phoniqucs  d'un  très- haut  intérêt  ;  mais  il  est  moins  connu  que 
Jean-Chrétien  Bach,  onzième  fils  de  Jean-Sébastien.  Sa  célébrité 
lui  vient  de  ses  succès  de  théâtre;  tels  sont  les  avantages  de  la 
carrière  dramatique.  Pendant  longtemps  son  nom  et  ses  ouvrages 
furent  plus  généralement  répandus  que  ceux  du  grand  Bach  lui- 
même  dont  cependant  il  fut  loin  d'avoir  le  génie.  Elevé  dans  les 
principes  de  la  scolastique  la  plus  austère,  il  eut  la  chance  de  se 
passionner  pour  des  cantati'ices  italiennes;  il  leur  fut  redevable 
d'étudier  la  musique  de  leur  pays,  de  la  comprendre  et  de  l'aimer. 
Plein  d'admiration  pour  l'art  nouveau  qui  se  révélait  à  lui,  il  ré- 
solut de  faire  pénétrer  le  sentiment  italien  dans  les  procédés  alle- 
mands. Il  voyagea  en  Italie  et  en  revint  avec  un  programme  mu- 
sical tout  réformé.  C'est  à  Londres  qu'il  donna  son  premier  ou- 
vrage :  Orione  ossia  Diana  vcndicala.  On  y  remarqua  la  vive 
originalité  de  quelques  beaux  airs  et  des  effets  nouveaux  d'instru- 
ments à  vent.  C'est  dans  cette  partition  que  les  clarinettes  furent 
entendues  pour  la  première  fois  en  Angleterre. 

Sans  avoir  la  puissance  d'invention,  la  richesse  d'harmonie, 
l'ampleur  instrumentale  de-  son  père,  ni  la  variété  d'idées  et  la 
profondeur  de  son  frère,  Cliarles-Philippe-Emmanuel-Chrétien 
Bach  fut  cependant  un  des  musiciens  les  plus  remarquables  du 
xvni*^  siècle.  Ses  airs  sont  fort  l'cmarquables  et  plusieurs  ont 
joui  d'une  grande  célébrité.  Son  chant  n'a  point  de  caractère  qui 
lui  soit  particulier;  il  se  rapproche  beaucoup  de  la  manière  des 
maîtres  italiens  de  l'époque  où  il  écrivait,  et  surtout  de  ceux  de 
l'école  de  Naples;  mais  il  a  du  brillant,  de  la  facilité.  Ses  mélodies 
sont  favorables  aux  voix,  les  accompagnements  sont  élégants  et 
d'une  heureuse  appropriation;  il  a  eu  le  mérite  de  doter  les  airs 
d'opéra  d'efi'ets  plus  dramatiques  et  ne  ramenant  pas  après  l'allé- 
gro le  mouvement  lent  du  commencement,  comme  l'avaient  fait 
tous  les  compositeurs  italiens  qui  l'avaient  précédé.  Son  orchestra- 
tion était  aussi  marquée  d'un  énergique  cachet  d'originalité  dont 
les  mérites  se  retrouvent  dans  la  musique  instrumentale  que  ce 
maître  nous  a  laissée  et  qui  jette  un  jour  très-vif  sur  l'histoire  de 
l'orchestration  à  ceite  époque. 

Le  nom  de  Corelli  est  justement  célèbre  dans  les  fastes  de 
la  musique  et  il  traversera  les  siècles  sans  rien  perdre 
de  son  illustration,  quelles  que  soient  les  révolutions  auxquelles 
cet  art  sera  soumis.  Le  grand  artiste  n'est  pas  moins  remarquable 
comme  compositeur  que  comme  violoniste.  Comme  directeur 
d'orchestre,  il  s'est  montré  aussi  d'une  incomparable  habileté,  et 
c'est  ainsi  qu'il  a  influé  si  magistralement  sur  les  progrès  de  la 
musique  de  chambre  et  de  la  symphonie.  L'élévation  de  son  style, 
les  prodiges  de  son  exécution,  tout  se  réunissait  pour  étendre  la 
réputation  de  Corelli.  Ce  'n'est  point  par  une  pureté  d'harmonie 
irréprochable,  ni  par  une  entente  très-grande  des  combinaisons 
sonores  que  brillent  les  compositions  si  importantes  de  ce  maître; 
mais  par  une  variété    de   chants,  une   richesse   d'invention,    une 


DE  PARIS. 


19 


ampleur  j,'raiidiose,  qu'ont  rarement  atteintes  les  compositeurs  con- 
temporains. L'étude  de  ces  ouvrages  est  encore  une  des  meilleures 
et  plus  profitables  études  que  l'on  puisse  taire,  et  le  public  les 
écoute  toujours  avec  une  satisfaction  marquée.  Le  nom  qui,  en 
musique,  mérite  le  plus  d'être  cité  comme  résumant  l'ensemble 
des  compositions  du  quatuor,  est  celui  de  Boccberini,  admirable 
compositeur  qui  vivait  en  même  temps  qu'Haydn,  et  qui  a  si 
puissamment  contrijjué  à  la  création  de  la  musique  de  chambre; 
mais  ce  génie  original,  qui  pour  ne  rien  perdre  de  son  individua- 
lité s'interdisait  jusqu'à  la  bcture  des  grands  maîtres  ses  contem- 
porains, se  refuse,  par  ses  qualités  mêmes,  à  un  parallèle  qu'on 
cherche  toujours  à  établir  entre  les  maîtres  du  genre.  11  doit  être 
envisagé  à  part,  et  sa  mimographie,  quoi  qu'on  fasse,  se  détache 
toujours  du  cadre  où  ses  travaux  semblent  l'enfermer. 

Mauiuce  cristal. 
{Ln  suite  prochainement.) 


LITTÉRATURE  MUSICALE. 

L'ACOUSTIQUE,    OU    LES    PHÉNOMÈNES    DU    SON, 
Par  R.  RADAU  (1). 

La  science  de  l'acoustique  est  une  de  celles  qui  ont  été  le  plus 
négligées  en  France  jusqu'à  ce  jour.  A  part  les  écrits  du  baron  de 
Prony  et  du  baron  Blein,  à  part  le  livre  ultra-fantaisiste  de  Louis 
Lucas,  l'Acoustique  nouvelle,  nous  ne  possédions  sur  ce  sujet,  jus- 
qu'à ces  derniers  temps ,  que  quelques  rares  brochures  de  peu  de 
valeur. 

Un  mathématicien  flamand,  M.  Delézenne,  s'est  occupé  cepen- 
dant de  ces  questions  délicates,  sur  lesquelles  il  a  publié  plusieurs 
opuscules  intéressants,  insérés  d'abord  dans  les  Mémoires  de  la 
Société  des  sciences,  de  l' agriculture  et  des  arts,  de  Lille.  Un  an- 
cien officier  de  marine,  M.  Edouard  Patau,  a  fait  paraître  tout  ré- 
cemment une  brochure  intitulée  :  Science  et  Musique.  Enfin,  un 
travailleur  instruit  et  consciencieux,  M.  R.  Radau,  auquel  nous 
devions  déjà  sous  ce  titre  :  Sur  la  hase  scientifique  de  la  musique, 
analyse  des  recherches  de  M.  Hebnholts,  un  excellent  résumé  des 
doctrines  et  des  travaux  du  célèbre  physicien  allemand ,  vient  de 
■publier,  il  y  a  un  mois  environ,  le  livre  plein  d'attrait  et  d'intérêt 
dont  nous  avons  inscrit  le  titre  en  tête  de  cet  article. 

Ce  livre  n'est  point,  à  proprement  parler,  un  traité  scientifique  , 
mais  c'est  un  travail  vulgarisateur  destiné  à  faire  connaître,  à 
l'aide  d'une  forme  familière,  attachante  et  sans  pédantisme,  les 
étonnants  phénomènes  de  la  production  du  son,  et  à  donner  sur 
ce  sujet  des  renseignement  puisés  dans  l'observation  des  faits, 
tout  en  ne  tirant  de  ces  faits  que  les  déductions  bornées  au  peu 
de  certitude  que  l'on  possède  encore  sur  le  rapport  des 
effets  et  des  causes,  relativement  à  une  science  dont  l'élude  re- 
monte pourtant  à  une  haute  antiquité. 

Le  livre  de  M.  Radau  est  divisé  en  quinze  chapitres,  dont  nous 
allons  reproduire  les  titres  pour  donner  une  idée  de  son  impor- 
tance :  —  l.  Le  son  dans  la  nature.  —  II.  Effets  du  son  sur  les 
êtres  vivants.  —  III.  Propagation  du  son  dans  les  différents  mi- 
lieux. —  IV.  Intensité  du  son.  —  V.  Vitesse  du  son.  —  \'I.  Ré- 
flexion du  son.  —  VIL  Résonnance.  —  VIII.  Le  son  est  une  vibra- 
tion. —  IX.  Hauteur  des  sons.  —  X.  Les  notes.  —  XL  Le  Timbre. 
—  XII.  Interférences.  —  XIII.  La  voix,  —  XIV.  L'oreille.  — 
XV.   Science  et  Musique. 


(1)  Volume  faisant  partie  de  la  Bibliothèque  des  Merveilles.  Paris,  Ha- 
chette, 1867,  in-J2,  orné  de  114  vignettes. 


Ce  qu'il  y  a  d'érudition,  d'observation,  de  savoir  et  de  finesse 
d'analyse  dans  ce  petit  livre  est  incalculable,  et  témoigne  chez  son 
auteur  d'une  lecture  prodigieuse,  d'une  connaissance  vaste  et 
étonnamment  étendue  du  sujet  qu'il  avait  à  traiter.  Les  observa- 
tions physiques  et  mathématiques,  les  phénomènes  naturels,  les 
faits  tirés  des  nombreuses  expériences  auxquelles  se  sont  livrés  les 
savants  de  tous  les  pays,  les  lois  particulières  de  racousti([ue,  la 
formation  de  l'écho,  les  études  sur  les  ondulations  de  l'eau,  sur 
les  vibrations  des  corps  solides,  sur  le  sonomètre,  sur  l'étendue  de 
l'échelle  générale  de  sons  appréciables,  sur  les  limites  de  la  voix 
humaine,  sur  le  diapason  normal,  sur  la  résonnance  multiple,  le 
mécanisme  de  l'audilion,  la  direction  naturelle  des  sons,  tout  y  est 
abordé,  expliqué,  élucidé,  autant  du  moins  que  le  permet  l'état 
actuel  d'une  science  peu  avancée  encore  à  certains  points  de  vue. 

Et  tout  cela,  je  le  répèle,  est  présenté  sous  une  forme  claire, 
lucide,  facilement  saisissable,  qui,  au  lieu  de  rebuter  le  lecteur, 
comme  il  arrive  trop  souvent  dans  cet  ordre  particulier  d'idées 
abstraites,  l'attache  d'une  façon  prodigieuse  par  suite  de  l'intérêt 
que  l'auteur  a  su  donner  à  sa  narration,  dont  la  rapidité  est  éton- 
nante. 

Dans  le  dernier  chapitre,  le  plus  important  sous  le  rapport  vrai- 
ment scientifique,  M.  Radau  analyse  les  travaux  et  les  expérien- 
ces des  hommes  distingués  qui  se  sont  principalement  occupés  de 
CCS  questions:  Euler,  Rameau,  Sauveur,  Helmholtz,  etc.  Enfin, 
son  livre  est  orné  d'une  multitude  de  vignettes  destinées  à  rendre 
plus  facile  encore  la  compréhension  des  phénomènes  dont  il  en- 
tretient le  lecteur. 

Et  pour  montrer  que  la  forme  de  ce  livre  en  rend  la  lecture  fa- 
cile et  agréable,  je  vais  terminer  en  lui  empruntant  une  des  nom- 
breuses anecdotes  que  l'auteur  a  su  y  enchâsser  pour  donner 
plus  de  poids  à  ses  assertions. 

Dans  le  but  de  démontrer  que  l'écho,  ce  phénomène  souvent 
incompréhensible,  «  est  une  personne  exigeante  dont  il  n'est  pas 
toujours  facile  de  deviner  les  caprices,  »  M.  Radau  rapporte  le  fait 
que  voici  : 

«  Un  Anglais  qui  voyageait  en  Italie  rencontra  sur  sa  route  un 
écho  tellement  beau  qu'il  voulut  l'acheter.  L'écho  était  produit  par 
une  maison  isolée.  L'Anglais  la  fit  démolir,  numérota  toutes  les 
pierres  et  les  emporta  avec  lui  en  Angleterre,  dans  une  de  ses 
propriétés,  où  il  fit  rebâtir  la  maison  exactement  comme  elle  avait 
été.  Il  choisit  pour  emplacement  un  endroit  de  son  parc  qui  était 
à  une  distance  du  château  égale  à  celle  où  l'écho  avait  été  distinct 
en  Italie.  Quand  tout  fut  prêt,  l'heureux  pi'opriétaire  résolut  de 
pendre  la  crémaillère  de  son  écho  d'une  manière  solennelle.  Il 
invita  tous  ses  amis  à  un  grand  dîner  et  leur  promit  l'écho  pour 
le  dessert.  On  mangea  bien,  l'histoire  ne  dit  pas  si  l'on  ne  but  pas 
mieux...  Quand  on  fut  arrivé  au  dessert,  l'amphitryon  annonça 
qu'il  allait  inaugurer  son  phénomène,  et  se  fit  apporter  sa  boîte 
aux  pistolets.  Après  avoir  chargé  lentement  les  deux  armes,  il  s'ap- 
procha de  la  fenêtre  ouverte  et  tira  un  coup.  Pas  l'ombre  d'un 
écho!  Alors  il  prit  le  second  pistolet  et  se  brûla  la  cervelle.  On  n'a 
jamais  su  quel  défaut  de  construction  avait  été  la  cause  de 
cet  échec.  » 

Arthur  POUGIN. 


CORRESPONDANCE. 

Bruxelles,  47  janvier. 

On  a  vu  avec  grand  plaisir  de  quelle  manière  mesurée,  délicate  et 
vraie  le  réJacteur  de  la  Gazelle  musicale,  rendant  compte. du  concert 
populaire  où  s'est  fait  entendre  dernièrement  M.  Léonard,  aux  applau- 
dissements du  public  parisien,  a  parlé  de  la  résolution  prise  par  ce  vir- 
tuose de  transporter  sa  résidence  de  Belgique  en  France.  Un  critique 
1 


20 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


moins  bien  renseigné  et  peu  bienveillant  pour  notre  pays,  a  dit,  en  par- 
lant (tu  brillant  succès  obtenu  par  M.  Léonard  à  ce  même  concert,  qu'il 
était  ■.  bien  vengé  des  absurdes  dédains  de  la  Belgique,  sa  patrie,  qui 
n'avait  su  ni  l'apprécier,  ni  le  retenir.  »  11  n'y  a  rien  de  fondé  dans 
celte  allégation.  Loin  d'être  l'objet  d'absurdes  dédains  dans  sa  patrie, 
M.  Léonard  y  jouissait,  au  contraire,  de  la  considération  méritée  par  un 
talent  tel  que  le  sien.  Ce  talent  était  hautement  apprécié  et  n'a  pas  été 
moins  applaudi  à  Bruxelles  qu'à  Paris.  Ainsi  que  le  dit  fort  bien  le  rédac- 
teur de  la  Gazette  musicale,  on  a  fait  de  grands  efforts,  en  Belgique,  pour 
dissuader  M.  Léonard  d'aller  se  fixer  à  Paris;  mais  pouvait-on  le  retenir 
de  force?  Sa  position  au  Conservatoire  de  Bruxelles  était  la  même  que  celle 
de  Servais  et  de  Mme  Pleyel,  et  je  puis  vous  affirmer  que  les  professeurs 
les  plus  renommés  du  Conservatoire  de  Paris  sont  loin  de  jouir  d'avan- 
tages pécuniaires  aussi  considérables.  Nous  avons  vu  avec  beaucoup  de  regret 
M.  Léonard  s'éloigner  de  la  Belgique  ;  mais  si  nous  n'avons  pas  trouvé 
mauvais  qu'il  allât  s'établir  là  oii  il  croyait  exploiter  plus  fructueusement 
son  talent,  nous  ne  pouvons  nous  empêcher  de  protester  contre  Its 
injures  que  nous  adressent  des  écrivains  mal  informés,  pour  le  fait  de 
l'expatriation,  tout  à  fait  volontaire,  du  célèbre  virtuose  liégeois.  La  ma- 
nière dont  les  choses  sont  présentées  par  votre  honorable  collaborateur 
est  infiniment  plus  digne  d'un  artiste  tel  que  M.  Léonard,  plus  conve- 
nable pour  la  Belgique  et  plus  exacte  en  même  temps. 

Nous  venons  d'avoir,  au  Théâtre  royal  de  Bruxelles,  un  incident  sem- 
blable à  celui  qui  survint  à  l'Opéra  lors  de  la  mise  en  scène  de  Don 
Carlos.  Pendant  les  répétitions  du  Béarnais,  opéra-comique  de  deux  au- 
teurs belges,  une  jeune  cantatrice  renvoya  le  rôle  dont  on  l'avait  chargée, 
alléguant  qu'il  était,  non  trop  peu  important,,  mais  trop  difficile  pour 
elle.  Était-ce  de  sa  part  modestie  ou  amour-propre  déguisé'?  C'est  ce  que 
je  ne  saurais  dire.  Quoi  qu'il  en  soit,  le  directeurn'admit  pas  queles  chan- 
teurs qu'il  paie  pour  tenir  leur  emploi  s'attribuassent  le  droit  de  ne 
remplir  que  des  rôles  à  leur  convenance.  Il  intenta  un  procès  à  sa  pen- 
sionnaire; celle-ci  demanda  la  résiliation  de  son  engagement,  et  comme 
elle  n'était  pas  trop  dans  les  bonnes  grâces  du  public,  on  la  prit  au  mot. 
L'aventure  était  fâcheuse  pour  les  auteurs  du  Béarnais  dont  l'espoir  de 
voir  leur  ouvrage  représenté  pouvait  être  ajourné  indéfiniment.  Heureu- 
sement, il  se  trouva  une  cantatrice  complaisante  qui  déclara  se  charger 
du  rôle  délaissé!  Cette  cantatrice,  vous  la  connaissez.  C'est  Mme  Ferdi- 
nand Sallard,  que  notre  imprésario  venait  précisément  d'aller  engager 
à  Paris  pour  l'aider  à  monter  Don  Carlos,  et  qui,  en  arrivant  à  Bruxelles, 
eut  le  bon  goût  de  s'annoncer  par  un  acte  de  gracieuseté  vis-à-vis  d'un 
compositeur  belge. 

Mme  Sallard  a  débuté  dans  Rigoleilo.  11  n'y  a  eu  qu'une  voix  sur  ses 
avantages  physiques;  s'il  avait  fallu  lui  délivrer  un  brevet  de  jolie 
femme,  tous  les  spectateurs  l'eussent  signé;  comme  cantatrice,  il  a  pai-u 
qu'il  lui  manquait  de  la  sûreté, do  la  justesse,  et  l'expression  dramatique, 
qu'il  ne  faut  pas  confondre  avec  les  grands  éclats  de  voix.  Du  reste,  ce 
n'est  pas  à  une  première  audition  qu'on  peut  juger  une  cantatrice 
s'e.ssayant  devant  un  public  nouveau,  et  sous  l'Influence  de  l'émotion 
causée  par  une  semblable  épreuve.  Les  spectateurs  ont  fait  à  Mme  Sal- 
lard un  accueil  bienveillant,  attendant,  pour  se  prononcer  sur  son 
niérlle,  qu'elle  soit  plus  maîtresse  d'elle-même.  M.  Dumestre  a  réussi 
dans  le  rôle  de  Rigolelto.  M.  Dulaurcns  ne  s'était  pas  mis  suffisamment 
dans  la  voix  celui  du  ténor,  qu'il  a  chanté  avec  peu  de  justesse. 

Au  dernier  Concert  populaire  on  a  entendu  Mme  Clara  Schumann, 
qui  était  venue  exprès  d'Allemagne  pour  participer  à  cette  séance.  La 
célèbre  virtuose  a  joué  le  concerto  de  son  mari,  qui  est,  depuis  tant 
d'années,  la  pièce  principale  de  son  répertoire,  puis  un  caprice  de  Men- 
delssohn,  suivi  d'une  fantaisie  de  Hiller  et  d'une  étude  d'Henselt.  L'au- 
ditoire a  payé  un  large  tribut  d'applaudissements  à  son  talent  si  ferme, 
si  sur,  si  vigoureux  et  si  délicat.  Il  est  douteux  qu'elle  ait  jamais  été 
l'objet  d'une  ovation  plus  chaleureuse,  même  e.i  Allemagne  où  cepen- 
dant on  ne  manque  jamais  de  lui  faire  fête.  Dimanche  prochain  on  en- 
tendra au  Conservatoire  M.  Holmes,  qui  se  propose,  dit-on,  de  donner 
ensuite  au  théâtre  Royal  un  concert  composé  de  ses  œuvres  instrumen- 
tales, symphoniques  et  autres. 

E.  F. 


Nous  devons  à  l'obligeance  de  l'ami  auquel  elle  est  adressée 
communication  de  la  lettre  intime  qui  suit.  Nous  ne  doutons  pas 
qu'elle  ne  soit  lue  avec  intérêt,  quoique  n'étant  pas  destinée  à  la 
publicité. 


Moscou,  vendredi  40  janvier. 


Mon  cher  ***. 


J'étais  si  fatigué  ces  jours-ci  que  je  n'avais  pas  le  courage  de  vous 
écrire;  et  pourtant  il  m'est  arrivé  un  grand  événement  musical.  Les 
directeurs  du  Conservatoire  de  Moscou  sont  venus  me  chercher  à  Saint- 
Pétersbourg  et  ont  obtenu  de  S.  A,  la  grande-duehesse  un  congé  de  douze 
jours  pour  moi.  J'ai  accepté  l'engagement  de  diriger  deux  concerts.  Ne 


trouvant  pas  une  salle  assez  grande  pour  le  premier,  ils  ont  eu  l'idée  de  le 
donner  dans  la  salle  du  manège,  un  local  grand  comme  la  salle  du 
milieu  de  notre  palais  de  l'Industrie  aux  Champs-Elysées.  Cette  idée,  qui 
me  paraissait  folle,  a  obtenu  le  plus  incroyable  succès.  Nous  étions  cinq 
cents  exécutants,  et  il  y  avait,  au  compte  de  la  police,  douze  mille  six 
cents  auditeurs.  Je  n'essaierai  pas  de  vous  décrire  les  applaudissements 
pour  la  Fête  de  Roméo  et  Juliette,  et  pour  l'offertoire  du  Requiem.  Seu- 
lement j'ai  éprouvé  une  mortelle  angoisse  quand  ce  dernier  morceau, 
que  l'on  avait  voulu  absolument,  à  cause  de  l'effet  qu'il  avait  produit  à 
Saint-Pétersbourg,  a  commencé.  En  entendant  ce  chœur  de  300  voix 
répéter  toujours  ses  deux  notes,  je  me  suis  figuré  tout  de  suite  l'ennui 
croissant  de  cette  foule,  et  j'ai  eu  peur  qu'on  ne  me  laissât  pas  achever. 
Mais  la  foule  avait  compris  ma  pensée  :  son  attention  redoublait  et  l'ex- 
pression de  cette  humilité  résignée  l'avait  saisie.  A  la  dernière  mesure 
une  immense  acclamation  a  éclaté  de  toutes  parts;  j'ai  été  rappelé 
quatre  fols,  l'orchestre  et  les  chœurs  .s'en  sont  ensuite  mêlés,  je  ne  sa- 
vais plus  où  me  mettre.  C'est  lapins  grande  impression  que  j'aie  produite 
dans  ma  vie.  On  a  aussitôt  envoyé  une  dépêche  à  S.  A.  la  grande-du- 
chesse pour  l'informer  de  cette  émotion  populaire. 

Le  Conservatoire  donne  un  second  concert,  demain  samedi  soir,  avec  son 
orchestre  de  70  musiciens  seulement.  11  a  remis  encore  l'offertoire  dans 
le  programme.  Laub  joue  l'alto  solo  dans  ma  symphonie  d'Harold  et 
nous  commençons  par  l'ouverture  du  Roi  Lear.  Laub  joue  ensuite  le 
concerto  de  violon  de  Beethoven.  Nous  avons  fait  la  dernière  répétition 
ce  matin  et  cela  va  à  merveille. 

Après-demain  on  me  donne  une  fête,  dans  la  salle  de  l'assemblée  des 
Nobles,  où  sera  loule  la  ville  artiste  de  Moscou.  Après  quoi  je  repartirai 
pour  Saint-Pétersbourg,  où  me  restent  deux  concerts  à  donner.  Je  suis 
bien  exténué,  mais  heureux  aussi  de  ce  beau  résultat. 
Adieu,  mon  cher  ami,  etc. 

H.  Berlioz. 


NÉCROLOGIE. 

BOCQUIIiEiON. 

Une  individualité  singulière,  originale,  vient  de  disparaître,  c'est 
Bocquillon. 

Je  le  rencontrai  en  1819  ou  1820.  Ami  de  M.  Tissot,  j'avais  été 
chargé  par  lui  du  feuilleton  dramatique  du  journal  le  Pilote,  dont 
il  était  directeur  et  rédacteur  en  chef.  Un  jour,  du  fond  de  l'im- 
primerie, je  vis  monter  au  bureau  de  rédaction  un  de  nos  com- 
positeurs qui  venait  timidement  soumettre  un  article  à  mon  ap- 
préciation. Ce  garçon  était  fort  laid,  fort  disgracieux;  défiguré 
par  une  brûlure  qui  avait  affligé  l'un  de  ses  yeux  d'une  sorte  de 
plaie  permanente  et  qui  rendait  cet  organe  à  peu  près  inutile; 
de  plus,  son  autre  œil  était  myope,  ce  qui  constituait  le  pauvre 
diable,  propriétaire  de  ces  deux  mauvais  meubles,  dans  un  état 
très-voisin  de  la  cécité. 

Et  cet  homme  s'était  fait  compositeur  typographe! 

C'est  que  cet  homme  était  doué  d'une  force  de  volonté  prodi- 
gieuse, 

Bocquillon  possédait,  dit-on.  une  petite  rente  viagère;  mais  il 
s'était  imposé  l'obligation  de  vivre  de  son  travail  pour  capitaliser 
ses  arrérages  et  se  ménager  ainsi  une  existence  plus  douce  dans 
sa  vieillesse.  Il  y  est  parvenu. 

C'est  en  faisant  des  expériences  de  chimie  qu'il  avait  acquis  son 
infirmité. 

Il  voulait  écrife  et  il  écrivit  des  articles  dans  Is  Pilote  et  autres 
journaux. 

Il  publia  des  brochures  politiques. 

Puis  il  retourna  aux  sciences  :  il  y  obtint  une  certaine  notoriété 
comme  technologiste,  qui  lui  valut  la  place  de  bibliothécaire  du 
Conservatoire  des  arts  et  métiers. 

Tout  ceci,  malgré  nos  vieilles  et  bonnes  relations,  ne  motiverait 
pas  le  souvenir  que  je  lui  donne  dans  cette  Revue  musicale,  si 
Bocquillon,  qui  touchait  à  tout  par  curiosité,  n'eût  pas  touché 
aussi  à  la  musique. 

Je  ne  sais  pourquoi  ni  comment  il  se  mit  à   tapoter  un  piano; 


DE  PARIS. 


21 


bientôt  il  put  déchiffrer  un  air  ;  puis  en  déchiffrant  les  airs  de 
nos  vieilles  chansons,  dominé  par  son  goût  de  collectionneur,  par 
ses  habitudes  de  bibliothécaire,  il  se  prit  à  cataloguer  les  airs  qui 
lui  passaient  sous  les  yeux  et  les  diverses  chansons  faites  sur  ces 
airs;  enfin  il  arriva  à  réunir  un  grand  nombres  de  cartes  et  de 
fiches. 

11  y  a  trois  ans,  il  vint  me  voir  :  il  pensait  à  sa  fin,  il  prévoyait 
avec  chagrin  la  dispersion  de  sa  chère  collection  ;  mais  qu'en 
faire?  Il  me  consulta  sur  une  place  à  lui  donner,  un  emploi  à  lui 
trouver.  Il  demandait  au  président  de  la  Société  des  auteurs, 
compositeurs  et  éditeurs  de  musique  si  cette  Société  ne  pourrait 
pas  acquérir  ce  fruit  de  ses  longs  travaux,  de  ses  recherches  per- 
sévérantes. 

J'allai  au  Conservatoire  examiner  les  casiers  et  les  tiroirs  de  Boc- 
quillon. 

Mais  il  ne  s'était  imposé  aucune  règle  de  classement ,  ni  par 
dates,,  ni  par  genres,  ni  par  auteurs;  enregistrant  seulement  les 
timbres,  c'est-à-dire  le  premier  vers  de  chaque  chanson,  il  n'avait 
pas  distingué,  indiqué  le  primitif,  l'original,  celui  pour  lequel  l'air 
avait  été  composé,  de  tous  les  timbres  des  chansons  faites  depuis 
sur  le  même  air  :  ce  que  l'on  appelle  les  faux  timbres.  Enfin,  sur 
ses  cartons  tout  était  confus  et  confondu. 

Cependant  il  y  avait  là  tant  de  renseignements,  et  je  désirais 
tant  être  agréable  à  cet  excelbnt  Bocquillon,  que  je  crus  devoir 
appeler  sur  sa  collection  l'attention  de  notre  agent  général  et  le 
prier  de  venir  la  voir  à  son  tour. 

Après  l'avoir  compulsée  de  nouveau,  nous  tombâmes  d'accord 
qu'elle  n'offrait  aucun  intérêt  à  notre  Société,  et  que,  par  consé- 
quent, l'acquisition  n'en  pouvait  être  faite  par  son  syndicat. 

J'ignore  maintenant  ce  que  deviendra  ce  monceau  de  notes;  il  y 
a  certainement  là  une  mine  de  renseignements  inconnus  sur  les 
deux  parties  constitutives  de  la  chanson,  l'air  et  les  paroles,  qui 
pourrait  piquer  et  satisfaire  la  curiosité  des  chercheurs,  —  mais 
être  utile?...  là  est  la  question! 

Thomas  SAUVAGE. 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 


^.*,i-  Deux  représentations  de  Guillaume  Tell,  lundi  et  mercri'di,  et  ven- 
dredi le  Trouvère  et  la  Source  ont  défrayé  le  réperloire  de  la  semaine  au 
théâtre  impérial  de  l'Opéra.  -  -  On  annonce  la  Juive  pour  la  semaine 
prochaine. 

^*^  C'est  au  plus  tard  du  lo  au  20  février  qu'aura  lieu  la  première 
représentation  d'Hamlet.  Hier  soir,  a  eu  lieu  la  première  répétition 
complète  à  l'orchestre. 

^*t  Depuis  quelques  jours,  on  répète  à  l'Opéra-Comique,  avec  le  titre 
provisoire  de  Sylvia,  sous  lequel  il  a  été  reçu  il  y  a  plus  d'un  an,  un  acte 
de  M.  Samuel  David,  prix  de  Rome,  œuvre  do  laquelle  on  dit  déjà 
le  plus  grand  bien. 

^*^  Samedi  dernier,  la  reprise  de  la  Gazza  ladra  avait  attiré  un  bril- 
lant auditoire  au  théâtre  Italien,  et  l'on  a  fait  un  bon  accueil  à  tous  les 
morceaux,  depuis  l'ouverture  bien  exécutée,  du  reste,  le  fait  mérite  une 
mention,  jusqu'au  rondo  final.  Cet  accueil  s'expliqi  e  par.les  beautés  mé- 
lodiques, quoiqu'un  peu  vieillissantes  peut-être,  mais  d'un  efiet  puissant 
encoe,  do  la  partition.  D'ailleurs,  Adelina  Patti,  tour  à  tour  émouvante 
cl  gracieuse,  apportant  àcette  création,  comme  à  tout  ce  qu'elle  chanie, 
de  la  simplicité,  du  charme  et  une  émotion  communicative  ;  applaudie 
dans  la  cavatine  célèbre  Di  placer  du  premier  acte,  dans  le  duo  avec  son 
père,  dans  la  scène  du  signalement  avec  le  podestat,  dans  le  duetto  avec 
Pippo,  dans  la  prière,  Mlle  Patti  a  remporté  les  honneurs  de  la  soirée. 
Agnesi  s'est  montrée  digne  de  figurer  à  côté  de  la  diva.  Dans  ce  rôle  de 
Fernando,  où  excellèrent  et  Galli  et  Tamburini,  Agnesi  ne  déploie  pas 
seulement  une  belle  voix,  il  fait  aussi  preuve  du  style  dramatique  large 
et  sûr  de  l'ancien  drame  lyrique.  Gardoni  se  tire  à  merveille  de  la  cava- 
tine et  des  morceaux  d'ensemble.  Au  duo  de  la  prison,  Mlle  Grossi  a 
fait  briller  ses  qualités  vocales  scéniques,  et  Ciampi,  dont  le  talent  souple 
et  varié  gagne  de  plus  en  plus  dans  l'estime  du  public,  donne  un  relief 
plaisamment  accentué  à  la  personnalité  libertine  et  prévaricatrice  du  Po- 


dcsta.  La  deuxième  représentation  a  obtenu  encore  plus  de  faveur  que 
la  première,  l'interprétation  ayant  été  meilleure  et  plus  sûre. 

***  On  poursuit  activement  à  ce  théâtre  les  études  du  Te.mplario  (Ivanlioë), 
œuvre  éminemment  dramatique  dans  la(|uelle  la  mélodie  italienne  est 
vigoureusement  appuyée  par  une  orchestration  savante  et  puissante,  tout 
à  la  fois.  L'opéra  renommé  de  Nicolaï  nous  paraît  appelé  à  avoir  à  Paris 
le  succès  qu'il  a  remporté  sur  les  scènes  les  plus  importantes  de  la  Pé- 
ninsule. 

***  Les  trois  représentations  de  la  Fanchonnelle  qui  ont  été  données 
cette  semaine  au  théâtre  Lyrique  ont  amplement  confirmé  le  succès  de 
cette  reprise  et  de  son  interprète  hors  ligne,  Mme  Carvalho  ;  succès 
triomphal  pour  la  grande  artiste  et  que  nous  nous  empressions  de  cons- 
tater dimanche  dernier. 

^**  Le  baryton  Ismaël,  du  Théâtre-Lyrique,  utilisera  le  congé  auquel 
il  a  droit  en  allant  chanter  à  Marseille,  avec  Michel  et  Mlle  Monrose,  tout 
son  répertoire,  entre  autres  ouvrages,  Guillaume  Tell  et  l'Africaine. 

45%  Six  opéras-comiques,  rien  que  cela!  sont  en  ce  moment  à  l'étude 
aux  Fantaisies  Parisiennes.  Sur  les  six,  nous  en  avions  nommé  trois.  Il 
nous  reste  à  pn'îsenter  à  nos  lecteurs:  le  Farfadet,  d'Ad.  Adam,  Mam'selle 
Pénélope,  de  M.  deLajarte  elle  Muletier,  d'Hérold.  On  comprend  que  les 
répétitions  de  ces  actes  nombreux  doivent  nécessiter  une  .série  de  re- 
lâches qui  commenceront  demain,  et  que  l'administration  mettra  à 
profit  pour  approprier  la  salle  aux  exigences  légitimes  du  public. 

^*ii  Mlle  Irma  Marié,  annonce-t-on,  est  engagée  à  l'Athénée  pour  jouer 
dans  l'Amour  et  son  carquois,  avec  Léonce  et  Désiré. 

.*«  L'apparition  d'une  chanteuse  masquée  dans  le  4=  acte  des  Plaisirs  de 
Paris,  au  théâtre  Déjaz^t,  a  excité  cette  semaine  une  sorte  de  curiosité. 
Cette  cantatrice,  grande  dame  ou  artiste,  est  douée  d'un  physique 
agréable  et  distingué;  mais  soit  peur,  soit  inexpérience,  elle  n'a  pas 
réali.sé  ce  qu'on  devait  attendre  d'une  semblable  tentative.  Les  deux 
morceaux  choisis  par  elle — des  paroles  sur  l'air  de  la  romance  de  Mme  de 
Rothschild  et  la  valse  si  connue  du  Bacio  —  ne  pouvaient  d'ailleurs  don- 
ner une  grande  opinion  de  ses  facultés  musicales.  Toutefois,  les  encou- 
ragements ne  lui  ont  pas  manqué,  et  la  courtoisie  du  public  l'a  applaudie 
et  même  rappelée. 

i^*jf,  Au  théâtre  des  Jeunes-Artistes  de  la  rue  de  la  Tour  d'Auvergne, 
jeudi  dernier  nous  avons  entendu  le  Chien  du,  Jardinier,  de  Grisar,  exé- 
cuté d'une  façon  charmante  par  MM  Davy  et  Poulmier,  Mlles  Durand 
et  Alice  C. . .  Il  y  a  certainement  beaucoup  d'avenir  chez  ces  jeunes  ar- 
tistes, et  nous  indiquons  aux  directeurs  en  quête  d'une  gracieuse  et  in- 
telligente Dugazon,  Mlle  Alice  C.  dont  la  voix  est  aussi  fraîche  que  sym- 
pathique. 

i*:^  Léo  Delibes  compose  en  ce  moment  la  musique  —  presque  une 
partition  — de  Nos  Ancêtres,  le  drame  nouveau  ri'Amédée  Rolland,  qui 
va  être  représenté  au  théâtre  de  la  Porte-Saint-Martin.  Cet  élément  essen- 
tiellement artistique  ne  peut  qu'ajouter  grandement  au  succès  littéraire 
que  l'on  se  plaît  dès  à  présent  à  prédire  à  cet  ouvrage. 

^,%  Le  traité  qui  liait  Mlle  Schurider  au  Châtelet  ayant  été  résilié  à 
l'amiable,  ainsi  qu'il  était  facile  de  le  prévoir,  l'artiste  aimée  du  public 
des  Variétés  est  rentrée,  hier  soir,  à  ce  théâtre  dans  Barlie-Bleue,  avec 
son  partenaire  Dupuis.  MM.  Kopp,  Grenier,  Christian,  Hittemans,  Ham- 
burger, Mlles    A.  Duval  et  G.  Vernet  avaient  repris  leurs  rôles. 

i*,,.  Les  recettes  brutes  réalisées  pendant  le  mois  de  décembre  dernier 
dans  les  théâtres  impériaux,  théâtres  secondaires,  concerts,  etc.,  ont  été 
de  1,711,603  fr.  75  c. 

,t*j  La  direction  du  Grand-Théâtre  de  Rordeaux  étant  tombée  en  dé- 
confiture, les  artistes  de  ce  théâtre  se  sont  immédiatement  et  à  l'unani- 
mité constitués  en  Société,  sous  la  gérance  de  M.  Cuvreau,  le  chefd'or- 
che.-lre.  Le  cours  des  représentations  n'a  été  interrompu  qu'un  jour.  La 
nouvelle  commi.ssion  a  pour  elle  l'appui  de  la  Mairie,  et  les  vœux  du 
public  qu'elle  a  su  se  rendre  symphalique  par  quelques  modifications 
apportées  à  l'ancien  état  do  choses  ;  on  ne  doute  pas  que  sa  tentative 
n'ait  un  heureux  résultat. 

^*if:  La  direction  du  théâtre  de  Toulouse  vient  de  reprendre  avec  de 
nouveaux  artistes  V A f ri-aine,  attendue  avec  impatience  par  le  public. 
Mme  Ecarlat-Geismar,  par  son  interprétation  du  rôle  de  Sélika,  a  justifié 
sa  réputation  de  cantatrice  et  d'actrice  et  a  répondu  aux  espérances  des 
.'■pectateurs.  Mme  Ebrard-Gravière  chante  avec  sentiment  et  délicatcs-e. 
Une  grande  part  du  succès  de  cette  reprise  revient  à  M .  Roudil,  naguère 
encore  à  l'Opéra. 

t*^  La  semaine  dernière,  Mme  Vandenheuvel  se  trouvait  à  Monaco,  et 
elle  a  chanté  les  Noces  de  Jeannette  sur  la  petite  scène  de  cette  plage 
aimée  du  soleil.  L'éminente  artiste  y  a  remporté  le  plus  franc  des  succès. 
Le  public  monégasque  et  cosmopolite  ne  ménage  pas  non  plus  ses  bra- 
vos aux  frères  Guidon  qui  interprètent,  dans  les  Etats  de  S.  A.  Char- 
les 111,  le  Violoneux,  d'Ofténbach,  avec  leur  goût  et  leur  esprit' habituels. 

,j;*,p  A  la  dernière  représentation  de  la  Grande-Duchesse,  à  Liège,  ven- 
dredi de  l'autre  semaine,  les  abonnés  du  théâtre  ont  fait  remettre  sur 
la  scène  à  Mme  Rose  Rell,  tandis  que  la  foule  éclatait  en  bravos  enthou- 
siastes, un  bouquet  splendide  aux  couleurs  françaises  et  une  magnifique 
bague  en  diamants.  Mme  Rose  Bell,  sur  la  demande  formelle  du  public 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


de  Liège,  donnera  pendant  un  mois  encore  des  représentsitions  au  théâtre 
de  cette  ville. 

,*»  Hier,  le  cinquième  bal  masqué  de  l'Opéra,    sous   la   direction  de 
fctrauss,  a  été  aussi  brillant  et  aussi  nombreux  que  les  précédents. 


NODVELLES  DIVERSES. 

,**  Le  quatrième  concert  du  Conservatoire  a  eu  lieu  dimanche  der- 
nier pour  les  abonnés  anciens,  avec  les  modifications  que  nous  avons  in- 
diquées dans  le  programme  On  avait  bissé,  au  dernier  concert,  le  char- 
mant chreur  de^  nymphes  de  Psyché,  d'Ambroise  Thomas;  cette  fois 
c'est  Valkgretto  àc,  la  symphonie  en  ta  qu'on  a  fait  répéter.  Pour  qui 
connaît  les  deux  niorocaux,  ce  choix  est  caractéristique.  La  jeune  séné- 
ration  d'abonnés,  qui  n'a  pas  encore  fait  de  .stage  à  la  salle  de  la  rue 
Bergère,  se  laisse  plus  facilement  prendre  par  le  côté  gracieux  que  l'ina- 
movible première  série,  stylée  depuis  Habeneck  à  réserver  son  admiration 
pour  des  beautés  plus  sévères.  Le  concerto  de  \iolon  de  M.  Garcin  a  eu 
un  succès  très-honorable.  On  y  trouve  des  preuves  d'un  talent  incontes- 
table qui  se  révèle  surtout  dans  hs  détails,  dans  les  finesses  et  les  re- 
cherches de  l'harmonie;  mais  le  style  n'est  pas  celui  d'un  concerlo.  On 
cherche  aussi,  et  souvent  en  vain,  un  plan  que  l'auteur  paraît  avoir 
subordonné  aux  effets  isolés  d'Iuirmonie,  de  mouvement  de  parties  et  de 
virtuosité.  L'adagio  a  surtout  fait  plaisir.  M.  Garcin  a  exécuté  son  œuvre 
avec  beaucoup  de  sûreté  et  de  charme. 

»*^  Le  concert  donné  dimanche  au  cirque  Napoléon,  offrait  à  ses  au- 
diteurs ordinnires  deux  nouveautés  intéressantes,  —  et  il  faut  rendre 
cette  justice  à  M.  Pasdeloup,  qu'il  n'épargne  ni  son  temps  pour  les  cher- 
cher, ni  ses  peines  pour  les  faiie  exécuter,  —  l'ouverture  de  Manfred  de 
Schuman  et  la  Sicilienne  de  Séb.  Bach.  Chaque  fois  qu'un  morceau  nou- 
veau est  joué  aux  Concerts  populaires,  il  se  produit  une  sorte  d'hésita- 
tion, fort  naturelle  d'ailleurs,  dans  le  public:  il  se  partage  presque  tou- 
jours en  deux  courants  contraires  se  traduisant,  l'un  par  une  approba- 
tion forcenée,  l'autre  par  une  sorte  de  résistance;  toutefois,  l'intelli- 
gence musicale  qui  distingue  les  habitués  de  M.  Pasdeloup  ne  tarde  pas 
à  prendre  le  dessus,  la  fusion  s'opère  et  l'on  est  tout  étonné  de  voir,  à 
la  deuxième  ou  troisième  audition,  l'œuvre  accueillie  froidement  d'a- 
bord, obtenir  un  succès  enthousiaste.  L'ouverture  de  Manfred  n'a  pas  eu 
dimanche  à  subir  celte  épreuve  :  elle  a  été  tout  d'abord  favorablement 
reçue  et  saluée  de  trois  salves  d'applaudis'-ements  très-francs  et  très-ac- 
centués. C'e.n  d'ailleurs  une  œuvre  qui  recèle  de  grandes  beautés  sym- 
phoniques,  et  l'une  de  celles  qui  ont  dû  contribuer  fortement  à  la  répu- 
tation du  compositeur.  On  ne  .s'est  pas  montré  moins  sympalhique  à  la 
Sicilienne  de  Bach  qui  a  été  également  fort  applaudie.  —  Nous  ne  di- 
rons rien  des  autres  parties  du  concert,  si  ce  n'est  qu'elles  ont  été  ren- 
dues avec  l'excellent  ensemble  qui  distingue  l'exécution  des  artiste:;  de 
M.  Pasdeloup.  On  a  redemandé  de  toutes  parts  le  menuet  de  la  sym- 
phonie eu  sol  mineur  de  Mozart;  la  9»  symphonie  de  Beethoven  a  pro- 
duit un  immense  effet,  et  l'ouverture  de  Guillaume  Tell  a  brillamment 
clos  cette  belle  séance. 

a,*i  Aujourd'hui  dimanche,  à  2  heures,  douzième  concert  populaire  de 
musique  classique  au  cirque  Napoléon.  On  y  entendra  :  1°  ouverture  de 
Strue7isée  de  Meyerbeer;  — 2°  symphonie  en  fa  majeur  de  Beethoven 
(allegro,  allegretto  scherzando,  menuet,  finale); — 3°  adagio  du  qua- 
tuor en  si  bémol  (op.  50),  de  Haydn  (exécuté  par  tous  les  instruments  à 
cordes); — i°  marche  hongroise,  orchestrée  par  Berlioz; — S' Songe 
d'une  Nuit  d'été,  de  Mendelssolm  (ouverture,  allegro  appassionato , 
scherzo,  nocturne,  marche.)  L'orchestre  sera  dirigé  par  M.  J.  Pasde- 
loup. 

*%  Hier  soir  a  eu  lieu  à  la  salle  Herz  une  grande  soirée  musicale  et 
dramatique  au  profit  de  l'œuvre  de  la  Société  d'éducalion  et  d'assis- 
tance pour  les  sourds-muets  de  France.  Mlle  Battu,  Delle-Sedie,  MM. 
Lebouc,  Saint-Saëns  et  un  violoniste  étranger.  M.  Console,  qui  sera  bien- 
tôt célèbre;  Mlle  Favart  et  M.  Delaunay,  de  la  Comédie-Française,  prê- 
taient leur  concours  à  ce  beau  concert  dont  nous  reparlerons. 

-^*sj;  Berthelier,  qui  à  peine  de  retour  de  sa  dernière  campagne  avec 
M.  Ulmann  s'apprête  à  repartir  avec  Carlotta  Patti  et  les  nouveaux 
artistes  engagés,  a  chanté  dans  ses  concerts  successifs  trente-sept  fois 
l'Air  bouffe  anglais  avec  un  succès  qui  a  été  général;  toujours  applaudi 
à  outrance,  l'ex'  client  chanteur  était  obligé  de  répéter  cette  chansonnette, 
l'une  des  plus  originales  d'Otïenbach. 

^*^  La  reprise  des  séances  populaires  de  musique  de  chambre,  par  MM. 
Ch.  Lamoureux,  Colblain,  Adam  et  Poëncet,  est  maintenant  certaine.  La 
première  est,  en  effet,  annoncée  pour  mardi  prochain,  avec  le  concours 
du  pianiste  Henri  Fissot.  On  entendra  les  morceaux  suivants  :  1°  Trio 
en  ré  mineur,  de  Mendelssohn,  pour  piano,  violon  et  violoncelle  ;  2°  Qua- 
tuor en  sol  mineur,  (n°  74),  de  Haydn;  3°  Sonate  en  ut  dièse  mineur 
de  Beethoven,  exécutée  par  M.  Fissot;  i°  Quintette  en  la  mineur,  de 
Mozart.  Les  séances  populaires  de  nmsique  de  chambre  auront  lieu, 
comme  de  coutume,  dans  les  salons  Pleyel,  Wolff  et  C*'. 


**^  Une  jeune  et  charmante  pianiste,  Mlle  Marie  Secretain,  donnera 
le  23  janvier,  dans  la  salle  de  M.  Herz,  .son  maître,  un  concert  à  grand 
orchestre.  Entre  autres  morceaux,  Mlle  Secretain  fera  entendre  le  6° 
concerto  de  Henri  Herz. 

^%  M.  Eugène  Ketterer,  l'excellent  pianiste-compositeur,  qui  faisait 
partie  de  la  dernière  tournée  Ulmann,  est  revenu  à  Paris,  où  il  va  re- 
prendre ses  leçons  et  ses  travaux  de  composition. 

,*»  Nous  annonçons  pour  dimanche  prochain,  26  janvier,  la  matinée 
d'inauguration  des  cours  de  chant,  piano,  accompagnement  et  orgue, 
composée  de  Mme  Anna  Fabre,  MM.  Eugène  Ketterer,  Albert  Vizentini, 
Auguste  Durand,  qui  aura  lieu. chez  Mme  Anna  Fabre,  23,  rue  d'Haute- 
ville,  à  2  heures.  Nous  pouvons  prédire  d'avance  un  grand  succès  à  cette 
matinée  et  à  ces  cours. 

^*^  Aujourd'hui,  à  deux  heures,  a  lieu,  à  la  salle  Herz,  une  belle 
matinée  musicale  et  dramatique  au  bénéfice  de  M.  Nathan,  de  l'Opéra- 
Comique,  Tout  le  personnel  artistique  de  ce  théâtre,  Mme  Marie  Sass, 
les  frères  Lionnet,  Sarasate,  etc.,  prêtent  leur  concours  au  bénéficiaire. 
Entre  autres  attractions  du  programme,  nous  citerons  le  chœur  des  Deux 
Avares,  chanté  par  tous  les  artistes  de  l'Opéra-Comique. 

^*^  La  Société  de  bienfaisance  italienne,  protégée  spécialement  par 
l'Empereur,  donnera,  demain  lundi,  son  grand  concert  dans  la  salle  du 
théâtre  Italien,  avec  le  concours  des  artistes  de  cette  scène;  concours  et 
salle  gracieusement  accordes  par  M.  Bagier.  Le  programme  se  composera 
du  deuxième  acte  de  Norma,  du  premier  acte  de  D>,n  Pasquate,  du 
deuxième  acte  de  Maria  et  du  premier  acte  de  Crispino  c  la  Comare. 

**;^  Mlle  Wertheimber  est  de  retour  à  Paris,  après  une  triomphale 
campagne  que  les  dilettanli  barcelonais  ont  trouvée  trop  courte.  Elle  a 
paru  pour  la  dernière  fois  au  théâtre  du  Liceo  dans  le  Prophète,  après 
l'avoir  chanté  dix  fois  de  suite  avec  un  succès  sans  égal.  Rarement  on 
a  vu  se  produire  un  pareil  enthousiasme  :  Mlle  Weirtheimber  a  été 
maintes  fois  rappelée  et  couverte  de  bouquets.  Elle  est  au  moment, 
paraît-il,  de  signer  un  engagement  avec  une  de  nos  grandes  scènes  fran- 
çaises. 

^*fi.  L'un  des  solistes  les  plus  distingués  de  l'orcfiestre  d'Arban,  M. 
Emile  Dunckler,  violoncelliste,  vient  d'être  eng:)gé  au  Casino  de  Gand 
pour  s'y  faire  entendre  au  concert  qui  sera  donné  par  cet  établissement 
le  23  de  ce  mois. 

-c**  On  nous  écrit  de  Francfort  :  «  M.  Rosenhain,  le  célèbre  pianiste- 
compositeur,  a  passé  quelque  temps  parmi  nous.  Avant  de  partir  pour 
Paris,  où  ses  amis  et  ses  élèves  l'attendent,  il  a  fait  entendre,  devant  une 
réunion  qui  se  composait  de  toutes  les  notabilités  artistiques  de  notre 
ville,  plusieurs  de  ses  nouvelles  compositions  qui  ont  obtenu  l'accueil  le 
plus  chaleureux  :  une  sonate  pour  piano  et  violoncelle  (op.  S3),  œuvre 
magistrale,  dramatique  et  pleine  de  passion,  admirablement  exécutée  par 
l'auteur  et  M.  Lubeck;  une  méditation  pour  le  piano  (op.  77),  remplie  de 
poésie  et  rendue  par  l'auteur  avec  ce  style,  qui  n'appartient  qu'aux 
grands  maîtres;  quatre  mélodies  caractéristiques  (op.  68):  barcarolle, 
Chanson  du  Touriste,  Courante  et  Cloches  du  soir,  véritables  bijoux; 
plusieurs  mélodies  pour  piano  et  violoncelle  et  pour  piano  seul,  entre 
autres  un  morceau  intitulé  :  «  Conte  d'enfant  »,  pétillant  d'esprit,  qui  a 
transporté  l'auditoire.  Toutes  ces  œuvres  nous  ont  ravi  par  leur  richesse 
mélodique  et  par  l'élévation  et  la  variété  de  leur  style.  M.  Rosenhain 
nous  a  prouvé  qu'il  est  à  la  fois  un  grand  pianiste  et  un  de  nos 
meilleurs  compositeuis.  » 

j*^  Les  journaux  de  Berlin  nous  apportent  la  mention  d'un  concert 
donné  dernièrement  par  un  jeune  violoniste-compositeur  dont  l'avenir 
s'annonce  brillamment  et  que  le  Conservaloire  de  Paris  couronnait  der- 
nièrement, Franz  Ries,  le  neveu  du  célèbre  pianiste:  le  programme  était 
composé  exclusivement  de  ses  œuvres,  parmi  lesquelles  on  a  distingué  un 
quatuor,  des  lieder  et  des  solo  de  violon  qui  témoignent  d'un  talent  déjà 
mur  et  formé  à  la  meilleure  école. 

^*,^  Alfred  Jaëll  et  sa  femme  \iennent  de  remporter  de  nouveaux  et 
éclatants  succès  au  Gewandhaus  de  Leipzig,  à  la  Société  philharmonique 
de  Hambourg,  à  Brunswick,  etc.  Les  duos  pour  deux  pianos,  de  Schu- 
mann,  Reinecke  et  autres  auteurs  que  ces  deux  éminents  artistes  exé- 
cutent, sont  bissés  chaque  fois.  Paris  les  possédera  de  muveau,  et  cette 
fois  d'une  manière  durable,  après  leur  tournée  d'Allemagne  qui  se  termi- 
nera en  février. 

^*^  La  saison  prochaine  et  la  nouvelle  direction  seraient,  dit-on,  inau- 
gurées à  Bade  par  plusieurs  innovations.  En  ce  qui  concerne  la  mu- 
sique, on  améliorerait  l'orchestre  du  kiosque,  et  l'opéra  italien  serait 
remplacé  par  un  théâtre  allemand  dont  les  artistes  seraient  recrutés  sur 
les  scènes  les  plus  célèbres. 

^%  S'il  faut  en  croire  les  affirmations  réitérées  et  quasi-officielles  du 
Constitutionnel,  la  réorganisation  des  musiques  militaires  de  la  cavalerie 
française  serait  décidée. 

^*^  Le  populaire  auteur  de  la  Femme  à  barbe,  de  Rien  n'est  sacré  pour 
un  sapeur  et  autres  mélodies  avantageusement  connues,  M.  Villebichot, 
annonce  l'ouverture  prochaine  d'un  théâtre  qui  portera  son  nom  et  qui 
se  transformera,  suivant  les  circonstances,  en  une  vaste  salle  de  concerts. 
Le  Théâtre-Villebichot  sera  situé  boulevard  Lafayetle,  près  de  la  Villette; 


DE  PARIS 


23 


on  pouvait  s'y  attendre,  car  il  est  pour   certains   répertoires    des   lieux 
prédestinés. 

t%  L'éditeur  de  musique  Choudens  vient  de  recevoir  de  S.  M.  le  roi 
de  Suéde  la  décoration  de  son  ordre  de  Gustave  VV;isa. 

^,*^  Nous  apprenons  de  Vienne  que  S.  M.  l'empereur  d'Autriche  vient 
de  faire  remettre  au  célèbre  ténor  Roger,  la  grande  médaille  des  Arts 
et  Sciences,  pour  son  mérite  artistique  et  sa  remarquable  traduction  des 
Saisons  d'Haydn. 

**,  M.  Paul  de  Saint-Victor,  l'érudit  et  brillant  critique  théâtral,  passe 
du  journal  la  Presse  à  la  Liberté;  c'est  une  véritable  bonne  fortune  pour 
les  lecteurs  du  journal  de  M.  de  Girardin. 

»%  Un  praticien  du  plus  grand  mérite,  un  professeur  très-écouté, 
M.  le  docteur  Laborie,  officier  de  la  Légion  d'honneur,  attaché  au  ser- 
vice médical  de  l'Opéra,  vient  de  mourir,  jeune  encore,  et  par  suite  d'un 
accident  survenu  dans  l'exercice  de  son  art.  Ses  obsèques  ont  eu  heu 
mardi  dernier,  en  l'église  Saioi-André.  Cette  perte  sera  vivement  ressen- 
tie par  la  société  parisienne  et  le  monde  artiste,  où  le  docteur  Laborie 
comptait  une  nombreuse,  fidèle  et  sympathique  clientèle. 


ÉTRANGER 

,fc**  Brunswick.  —  On  vient  de  donner  Roméo  et  Juliette  de  Gounod; 
on  ne  compte  pas  sur  une  vogue  pareille  à  celle  de  Faust,  mais  on  a 
bien  accueilli  l'ouvrage  et  on  s'atlend  à  un  nombre  raisonnable  de  re- 
présentations. 

«%  Berlin.  —  Mlle  Artôt,  plus  que  jamais  l'idole  du  public,  a  chanté, 
après  II  Barbiere  et  la  Sonnambida,  le  Faust  de  Gounod,  oii  elle  captive 
par  des  moyens  autres  que  Pauline  Lucca,  mais  aussi  sûrs.  Elle  s'est 
également  fait  entendre  à  la  Cour.  Les  conditions  de  son  réengagement  à 
Varsovie  sont  des  plus  brillantes  :  oO,OOÛ  francs  pour  cinq  mois  et  une 
représentation  i  bénéfice  gaiantie  8,000  francs.  A  Moscou,  oii  elle  doit 
chanter  deux  mois,  son  traité  lui  assure  de  plus  beaux  avantages  encore. 
—  ïaglioni  vient  de  donnerun  nouveau  ballel,  "on  Paraso/,  qui  lui  a  valu 
un  magnifique  triomphe;  il  a  été  rappelé  douze  fols  au  moins.  Mlles 
Girod  et  David,  chargées  des  rôles  principaux,  ont  partagé  ce  succès.  — 
La  Grande  Duchesse  de  Gcrolstein,  vient  de  conquérir,  haut  la  main,  le 
public  de  Berlin,  qui  passera  tout  entier  au  théâtre  de  Friedrich-Wilhelm- 
stadt.  Mlle  Lina  Mayr  est  une  gracieuse  Grande-Duchesse,  un  pej  senti- 
mentale peut-être,  mais  bonne  musicienne  et  chanteuse  expérimentée. 
On  l'a  applaudie  à  diverses  reprises,  et  ses  camarades,  Neumann  (Boum), 
Adolphi  (Frilzj,  Mathias  (le  prince  Paul),  ont  pris  leur  bonne  part  do  ce 
sympathique  accueil.  On  les  a  tous  rappelés  après  chaque  acte.  On  peut 
prédire  maintenant  à  la  Grande  Duchesse  une  longue  série  de  représenta- 
tions. 

^*^  Vienne.  —  Un  nouveau  ballet  de  Henri  Desplaces,  Xana-Sahih,  & 
été  donné  à  l'Opéra  sans  succès,  mais  non  sans  bruit.  Deux  partis  soute- 
nant deux  ballerines  rivales,  Mlles  Couqui  et  Lucas,  en  sont  venus 
presque  aux  mains,  sans  nul  profit  pour  l'ouvrage,  qui  était  la  chose  à  la- 
quelle on  songeait  le  moins  dans  cette  bagarre.  -  Wachtel  fils  et 
Mme  Ehnn  ont  signé  un  engagement  avec  l'Opéra. 

,is**  Venise. —  La  Fenice  est  restée  fermée  dix  jours  pour  préparer  con- 
venalslement  la  représentation  de  Dinorah.  Après  de  nombreux  tiraille- 
ments entre  le  public  et  les  impresarii  successifs,  voici  la  paix  faite  et 
cimentée  par  un  des  succès  les  plus  complets,  les  plus  retentissants  dont 
ce  grand  théâtre  ait  été  témoin.  L'ouvrage  est  allé  aile  stelle;  on  ne  se 
lassait  pas  d'applaudir  cette  musique  si  gracieuse  et  si  forte  en  mê'uie 
temps;  on  prodiguait  les  bravos  aux  artistes,  Camille  de  Maesen,  Minetti, 


Merly,  qui  tous  ont  rivalises  de  talent.  La  soirée  du  8  janvier  marquera 
dans  les  annales  de  la  Fenice,  si  riches  déjà  de  beaux  souvenirs. —  On 
monte  maintenant  à  grands  frais  l'Africaine  pourlaLotli  délia  Santa. 

tf,*^  Florence.  —  Le  jeune  et  déjà  célèbre  violoniste  Wilhelmy  à  prêté 
son  concours  à  la  troisième  et  à  la  quatrième  .séance  de  la  Socicta  dcl 
Quarlello.  On  ne  se  rappelle  pas  ici  avoir  vu  un  succès  pareil  ;  les  ap- 
plaudissements ébranlaient  la  salle,  surtout  après  le  concerto  de  Paganini. 
Wilhelmy  e.st  également  admirable  dans  la  musique  d'ensemble;  il  a 
exécuté,  avec  MM.  Bruni,  Laschi  et  Sbolei,  plusieurs  quatuors  de  Haydn 
et  de  Beethoven  après  lesquels  lesbravo»  ne  finissaient  pas.llest  parti  pour 
Saint-Pétersbourg,  où  un  engagement  l'appelle  jusifu'à  la  fin  de  mars;  .son 
court  passage  ici  aura  été  un  véritable  événement  musical. — A  la  cinquième 
séance,  le  S  janvier,  le  pianiste  Ducci  a  joué  en  maître,  avec  un  excellent 
violoniste,  M.  Papini,  une  sonate  de  Rubinstoin,  puis  le  célèbre  septuor 
de  Hummel. —  Un  comité  vient  de  se  constituer,  .sous  la  présidence  du 
prince  Charles  Poniatowski,  pour  élever  un  monument  à  Pacini. 

ji*^  Milan.  —  La  Camarijo,  ballet  nouveau  de  Monplaisir,  a  très-bien 
réussi  à  la  Scala.  La  première  danseuse  Ferraris  y  a  obtenu  un  grand 
succès.  La  musique  est  de  Dall'Argine;  elle  a  été  également  goûtée.  — 
Mme  Borghi-Mamo  s'e.st  fait  eniendre  dans  une  soirée  donnée  par  l'édi- 
teur Lucca;  le  beau  talent  qui  lui  a  conquis  de  si  fervents  admirateurs 
s'est  mis  en  pleine  lumière  dans  une  Canzone  napolitana,  la  romance 
à'Otello,  le  duo  du  Barbier  et  le?  variations  de  Rode.  Elle  a  recueilli  les 
plus  sincères  et  les  plus  justes  applaudissements.— Au  théâtre  Carcano  ont 
eu  lieu,  dans  le  rôle  de  Gilda,  de  Rigotetto,  les  débuis  d'une  toute  jeune 
et  charmante  artiste,  Mlle  Octawa  Tornsquistqul  parait  réunir  toutes  les 
qualités  désirab.'es  comme  chanteuse  et  comme  comédienne.  Son  succès 
a  été  des  plus  chaleureux.  Voici  comment  la  Gazetta  dei  Teairi  s'exprime 
à  son  égard  :  •  Mlle  Tornqui.st  joint  à  une  belle  voix  limpide  et  métal- 
»  lique  une  habitude  de  la  scène  bien  rare  chez  une  débutante.  Aussi 
»  son  succès  a-f-il  pris  les  proportions  d'un  véritable  triomphe. 
»  .Mlle  Tornquist  a  fait  ses  études  musicales  à  Paris,  et  son  succès  n'é- 
»  tonnera  personne  lorsqu'on  saura  que  Délie  Sedie  ia  comptait  au 
»  nojibre  de  ses  bonnes  élèves. 

^*\p  Cadix.  —  Emmy  La  Grua  maintient  l'enthousiasme  au  même  ni- 
veau depuis  son  arrivée.  Elle  vient  de  chanter  Gemma  di  Veryy  avec  un 
immense  succès  que  la  presse  locale  enregistre  avec  une  significative  una- 
nimité. 

^'.^  .Madrid.  —  On  monte  /a  .l/ue«eavecTamberlick,  Selva,  Mmes  Pa- 
lermi,  Sonieri  et  Roseré  (Fcnella).— .Mme  Penco  a  fait  sa  rentrée  dans  Lu- 
crezia  Borgia,  au  milieu  d'une  pluie  de  fleurs  et  de  couronnes.  Toutefois  la 
santé  de  la  célèbre  cantatrice  est  toujours  fort  précaire.  On  va  reprendre 
pour  elle  Roberto  il  Diacolo. 

jf*t  Barcelone.  —  La  direction  du  Liceo  vient  de  mettre  à  l'étude  le 
Pardon  de  Ploérmel,  qui  y  sera  représenté  très-prochainement.  Mlle  Vi- 
tali  est  engagée  pour  le  rôle  de  Dinorah.  —  On  se  propose  également 
de  monter  ensuite  Fra  Diavoto. 

***  Saint-Pétersbourg.  —  Mme  Volpini  a  débuté  le  7  janvier,  avec  un 
succès  énorme,  dans  Dm  Pasquale;  l'Empereur  l'a  fait  complimenter 
après  la  représentation.  —  Le^<début  de  Mlle  Galetii  a  été  également 
très-brillant;  Mario,  Graziani -et  .\ngelini  l'entouraient  et  n'ont  pas  été 
moins  fêtés.  — Tous  les  journaux  sont  pleins  d'éloges  à  l'adresse  de 
Mme  Pauline  Lucca  et  la  célèbre  cantatiùe  allemande  fait  réellement 
fanatisme  parmi  le  [uiblic  russe. 


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PKIY  ACCOriDÉ  A    l'UNANIMITÉ  A    I'EXPOSITION 
UNIVERSELLE  DE    LOiNDRES  1851. 

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Guerre  et  de  lu  Muriue  de  IPrunce. 

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Exposition  Universelle  de  Londres  1862 

MM.  les  Membres  du  Jury  International  décernent  la  Médaille  à 


POUR  L'EXCELLENCE  DE  SES  CORNETS  A  P1ST0.\S,  CORS,  ALTOS,  BASSES, 

ET   rOOR   TODTE  SA   COLLECTION    d'INSTBCHIENTS   EN    GÉNÉRAL. 

tas,    rue    tiers    llarais  -  Salnl  -  ISitrliii,    8S. 

Ci-devant  rue  du  Caire,  21. 


MEDAILLE  D  ARGENT    DEl"  CLASSE 
A     l'exposition    UNIVERSELLE    DE  PARIS   1855. 

Facteur  du    Conservatoire  et  de 
■'.^cudciule  Impériale  de  Varis. 

Agent  à  Saiut-Pétersbourg  : 

A.  BUTTNER, 

Perspect.Newsky,maisonde  l'égliseSt-Picrre 


Li  Maison  ANTOINE  COUltTOIS  ayant  agrandi  ses  ateliers  ,  est  en  mesure  de  satisfaire  à  toutes  îss  demandes  qui  pourront  lui  élre 
adressées;  elle  garantit  iîéelli;ment  à  sa  clientèle  des  instruments  irréprochables  sous  tous  les  rapports. 


24 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE  DE  PAKIS. 


Pour  paraître  cette  semaine, 
CHEZ    G.     BRANDUS    ET    S.     DUFOUR,    ÉDITEURS,     103,   RUE    DE    RICHELIEU 

La  Partition 

Arrangée  pour  le  PIANO   SEUL,  par  Louis  Soumis. 


Format  in-8°. 


Prix  net  :  10  fr. 


EN  VENTE  : 

TiFim  Ainn  de:  chamt   déta€Héi§ 


L'Ouverture,  6  fr.  —  Entr'acfe  symphonique,  6  fr.  —  Marche  des  Sauvages,  6  fr.  —  Chœur  dansé,  6  fr. 

TRANSCRITS  POUR  LE  PIANO  SEUL. 


IéA    PARTITIOM    pour    CHAIVT    ET    PIAMO 

Format  in-S",  brochée,  net  :  15  fr.     —    Richement  reliée,  prix  net  :  20  fr. 

DE 


Opcra-comique  en  trois  actes 
(cinq  tableaux) 


Musique  de 

.rjieicr:.  ■ 

ARRANGEMENTS  : 


Paroles  de  MM. 
E.  CORMON  et  H.  CRËUIEUX. 


CBÂIBEB..  —  Deux  bouquets  de  mélodies  pour  le  piano,  eh.  9    » 

£.  KETTERER.  —  Fantaisie  brillante  pour  le  piano 9     » 

LECÂRPENTIER.  —  Deux  bagatelles  pour  le  piano,  chaque  5     » 

Â.  HERMÂN.  —  Divertissement  pour  piano  et  violon 9    « 

ROSELLEN.  Fantaisie  de  salon  pour  le  piano 7  SO 


RUISOEL,  —  Fantaisie  élégante  pour  le  piano 6    » 

Id.       Duo  facile  à  quatre  mains 7  SO 

SËLIGHÂNN.  —  Bagatelle  de  salon  pour  violoncelle  et  piano  (sous 

presse). 
WOLFF    (ED.).  —  Duo  élégant  à  4  mains  (sous  presse)  ...     7  50 


STRÂDSS.  —  Grande  valse  pour  le  piano 6    » 

La  même,  à  quatre  mains 7  50 

Id.       Grand  quadrille  des  bals  de  l'Opéra 4  50 

LÉON  ROQUES.— Polka  brillante  pour  piano  et  à  4  mains  .  4    » 


ÂRBÂN.  —  Quadrille  pour  le  piano 4  50 

Le  même,  à  quatre  mains 4  50 

fflARX.  —  Deuxième  quadrille  pour  le  piano 4  50 

STRÂDSS.  —  Polka-Mazurka  pour  le  piano S    « 


Maison  COLOMBIER,  6,  rue  Vivienne,  à  Paris. 

NOUVELLES     PUBLICATIONS 


Pour  le  piano 


J.-L.  Battmann.  op.  275.  Les  Porcherons,  petite  fantaisie 

A.   Croisez.    Op.    146.  Notre-Dame-des- Anges,  prière  de 

jeunes  filles 

—  Op.  147.  Les  Faux  Monnayeurs,  caprice 

J.  Leybach.  Op.  107.  La  Cenerentola,  fantaisie  brillante. 

—  Op.  108.  Tristesse,  élégie 

A.  Le  Carpentier.  Ai7's  et  Rondes  populaires ,  arrangés 

à  quatre  mains,  en  3  livres,  chaque 

L.  Schiffmacher.  Op.  72.  Mon  pays,  transcription  variée 

Danse 

Gaston  de  Lille.  En  avant  !  polka 

—  Biarritz,  polka-mazurka 

—  Sous  la  Feuillée,  valse 

Ad.  Lacout.  Le  Petit  Mignon,  quadrille  très-facile 

—  Baby,  polka  très-facile 

Strauss.  Le  dernier  des  Romains,  quadrille 


5    » 


5    » 
5    » 


7  50 

6  » 

7  50 


5    » 

5  » 

6  » 
4  50 
2  50 
4  50 


Chant 

LE    DERNIER    ROMAIN, 

Tragédie  lyrique  et  comique,  paroles  et  musique  de 

Eugène  MONIOT. 

Partition  piano   et  chant,  et  libretto,  prix  net  :  5  francs. 

D.  Balleyguier.  Douce  chanson 3  » 

G.  Douay.  C'est  plus  fort  que  moi,  chansonnette 3  » 

—  Un  Bourgeois  pour  toîit  faire,  chansonnette 3  » 

J.  Javelot.  Mon  Oscar,  chansonnette 3  » 

P.  Blaquières  et  J.  Moinaux.  Gratteloup  au  camp  de 

Châlons,  chansonnette 3  » 

J.  Moinaux.  Erplication  du  fusil  Chassepot,  chansonnette  3  » 

Duos  pour  ténor  et  baryton 

Léo  de  Libes.  Le  Marchand  d'Oublis 6    » 

Ch.  Lecocq.  Les  Tonneliers 4    » 

—  Le  même  à  une  voix 2  50 


lUPBlMERIE  CEamtALE  BES  CDEHINS  DE  FEB    —  A, 


iBESGUBE,  30,  A  PABI9. 


BUREAUX    A    PARIS  -•    BOULEVARD   DES   ITALIENS.  1. 


35'  Année. 


N'  4. 


ON  S'ABONNE: 

Dans  les  Déporlcments  et  ù  l'Élrongt-r, 

chei  tous  les  Marchands  de  Musique,  li  s  I.ibrairc 

et  aui  Dureaui  der  Messageries  et  des  Posles. 


=S>--^sifc^^',-<^=^ 


REVUE 


U  Janvier  I8«8. 


PRIX    DE    L'ABONNEMENT: 

Puris.. .   -4    r.  pjir  m 

DépQrtcmeuts,  llelgique  et  Suisse....     3(1  »        id. 

lUrunger 34  n       iil. 

Le  Journal  parait  le  Dimanchii. 


GAZETTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


SOMMAIRE.  —  Du  nouveau  en  musique,  par  Edouard  Fétis.  —  Le  Psaume 
CXXXVII,  imité  de  la  Bible  par  M.  Pacini,  mis  en  musique  par  M.  Jules  Béer. 
—  Hevne  des  tli''âtrps,  par  It.  A.  1).  Sain<-'V>«H.  —  Concerts  et  audi- 
tions musicales  de  la  semaine.  —  Nouvelles  des  théâtres  lyriques.  — Nouvelles 
diverses.   —  Annonces. 


DU  NOUVEin  EN  OnSIQUE. 

Bien  des  personnes  se  demandent  avec  inquiétude  si  l'on  peut 
encore  faire  du  nouveau  en  musique,  si  les  combinaisons  aux- 
quelles peuvent  se  prêter  les  éléments  de  cet  art  ne  seront  pas 
bientôt  épuisées,  si  elles  ne  le  sont  pas  déjà. 

Qu'elles  se  rassurent  :  non-seulement  on  peut  encore  faire  du 
nouveau  en  musique,  mais  on  en  pourra  toujours  faire.  Il  n'a  été 
assigné  de  terme  à  l'application  d'aucune  des  facultés  de  l'homme. 

Les  combinaisons  qui  peuvent  fournir  les  éléments  de  l'art  mu- 
sical sont  inépuisables.  Certaines  combinaisons  d'effets  pourront 
s'épuiser,  mais  non  pas  celles  qui  relèvent  du  sentiment.  Ce  qui 
ne  s'épuise  pas,  ce  qui  est  éternel,  c'est  la  puissance  créatrice  du 
génie  humain,  c'est  la  faculté  lu'il  a  de  renouveler  la  forme  de 
toutes  choses. 

On  fait  éternellement  du  nouveau  avec  les  mêmes  mots  de  la 
langue,  avec  les  mêmes  couleurs,  avec  la  même  matière,  quand 
l'esprit  vient  la  vivifier.  On  ne  cessera  pas  d'en  faire  avec  les 
notes  de  la  gamme. 

Lorsqu'une  forme  est  épuis^^e,  il  vient  un  homme  de  génie,  soit 
immédiatement,  soit  après  une  attente  plus  ou  moins  longue,  qui 
prend  une  autre  forme  pour  ex[)rimer  ses  idées,  et  l'art  est  renou- 
velé pour  une  période  d'une  certaine  durée. 

Ce  n'est  pas  d'aujourd'hui  qu'on  s'avise  de  croire  que  les  combi- 
naisons musicales  sont  épuisées.  Nous  gagerions  que  du  temps  de 
Lulli,  il  y  avait  des  gens  qui  doutaient  qu'on  pût  faire  encore  du 
nouveau  en  musique  et  qui  voyaient  dans  les  opéras  de  ce  maitre 
le  suprême  effort,  le  dernier  mot  de  l'art.  Les  contemporains  de 
Mozart  ont  eu  la  même  pensée,  on  n'en  saurait  douter.  Us  ont 
cru  qu'il  n'y  avait  plus  rien  à  faire  après  Don  Juan;  ont-ils  prévu 
Weber,  Rossini,  Meyerbeer?  Certes,  Don  Juan  est  le  chet-d'œuvre 


de  la  musique  dramatique,  dans  une  certaine  forme  ?  msûs  dece  que 
la  perfection  d'une  forme  a  été  atteinte,  il  ne  résulte  pas  que  l'art 
ait  pris  fin.  Il  renaît  sous  une  autre  forme.  Arrivé  à  un  certain 
degré,  l'art  ne  monte  plus,  mais  on  aurait  tort  de  croire  qu'il  doit 
nécessairement  décliner,  il  peut  prendre  d'autres  directions.  Le 
mouvement  est  la  loi  universelle  du  monde;  il  est  à  la  fois  le 
principe  et  le  résultat  de  l'action  vitale.  Cela  posé,  il  faut  recon- 
naître qu'il  y  a  d'autres  mouvements  que  celui  qui  monte  et  que 
celui  qui  descend.  Marcher  au  niveau  d'un  degré  quelconque  d'élé- 
vation, en  prenant  à  droite  ou  à  gauche,  c'est  encore  marcher. 

Comment  peut-on  faire  du  nouveau  en  musique?  C'est  le  secret 
du  génie.  Si  cela  pouvait  s'indiquer,  se  déterminer  par  des  règles 
en  quelque  sorte  mathématiques,  s'il  y  avait  des  procédés  pour 
faire  du  nouveau,  la  chose  serait  trop  facile  et  sans  mérite.  A  quoi 
servirait  d'avoir  du  génie? 

Non,  il  n'y  a  pas  de  méthode  pour  faire  du  nouveau  dans  les 
arts  ;  le  nouveau  se  conçoit,  il  ne  se  prépare  point.  Le  nouveau  est 
toujours  trouvé  instinctivement,  par  des  hommes  inspirés  qui  ne 
savent  pas  qu'ils  font  du  nouveau.  Jamais  l'art  n'a  été  redevable 
de  quelque  innovation  féconde  aux  hommes  à  systèmes  qui  se 
tracent  des  plans  de  conduite  et  s'érigent  en  créateurs. 

Ce  qui  prouve  que  M.  Wagner  n'est  pas  un  homme  de  génie, 
quoi  qu'en  disent  ses  amis,  quoi  qu'il  en  dise  lui-même,  ce  n'est 
pas  tant  la  nature  des  impressions  produites  par  l'audition  de  ses 
œuvres  que  la  prétention  qu'il  a  de  jouer  le  rôle  de  réformateur. 
Il  suffit  de  lire  ses  écrits,  de  voir  les  théories  qu'il  a  exposées, 
pour  être  certain  que  ce  n'est  pas  un  novateur,  dans  la  véritable 
acception  du  mot.  Le  génie  ne  dit  pas:  «Je  vais  faire  telle  chose.» 
Il  la  fait  involontairement  et  pour  ainsi  dire  malgré  lui.  En  la 
faisant,  il  accomplit  une  fonction  dépendante  de  sa  constitution. 

Lorsqu'il  a  transformé  l'art  de  la  peinture,  Giotto  n'a  pas  an- 
noncé qu'il  allait  substituer  à  l'immobilité  byzantine  le  mouvement 
et  la  vie  ;  qu'il  allait  rétablir  la  nature  dans  ses  droits  méconnus 
par  de  nombreuses  générations  d'artistes.  Quand  Monteverdi  dota 
la  musique  des  éléments  dont  s'est  formée  la  tonalité  moderne,  il 
n'avait  pas  lui-même  conscience  de  l'importance  de  ses  innovations. 
Il  faisait,  sans  prétention  et  sans  intention,  ce  que  son  instinct  le 
portait  à  faire.  Ni  Haydn,  ni  Mozart,  ni  Bach,  ni  Haendel,  ne  se 
sont  posés  comme  des  réformateurs.    Ils  ont  commencé  par  em- 


KEVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


ployer  les  formes  techniques  en  usage  de  leur  temps  ;  peu  à  peu 
leur  talent  a  pris  dos  allures  plus  indépendantes,  il  s'est  indivi- 
dualisé; enfin  le  talent  s'est  élevé,  en  eux,  jusqu'au  degré  où  il 
change  de  nom  et  devient  le  génie  dont  les  manifestations  ont  un 
cachet  prononcé  d'originalité.  Tout  cela  s'est  fait  naturellement, 
sans  préméditation  et  sans  etfort. 

C'est  toujours  ainsi  que  les  choses  se  passent  chez  les  hommes 
prédestinés  au  rôle  do  novateurs,  rôle  qu'ils  savent  d'instinct, 
qu'ils  n'ont  pas  besoin  d'apprendre  comme  fait  le  comédien,  et 
qu'ils  jouent  avec  naturel.  Quand  vous  voyez  un  artiste,  peintre 
ou  musicien,  crier  tiès-haut  que  ce  qu'on  a  fait  avant  lui  ne  va- 
lait rien,  et  qu'il  faut  changer  de  route;  quand  vous  lui  voyez 
développer  longuement  et  prétentieusement  des  projets  de  réforme, 
annoncer  les  merveilles  qu'il  se  pi'opose  de  réaliser,  arborer  un 
dfikpeau,  t'eHbl'cer  de  créer  un  parti  pour  soutenir  ses  idées,  soyez 
convaincu  que  vous  avez  alfaire  à  un  ambitieux  incapable,  duquel 
il  n'y  a  à  attendre  aucune  de  ces  nouveautés  qui  font  époque  dans 
l'histoire  de  l'art.  Il  est  sans  exemple  que  de  vrais  hommes  de 
génie,  trouveurs  d'idées  ou  de  formes  nouvelles,  aient  rédigé  des 
programmes  et  les  aient  publiés  à  son  de  trompe. 

Les  maîtres  font  du  nouveau  comme  M.  Jourdain  faisait  de  la 
prose,  sans  le  savoir.  Ils  disent  en  musique,  leur  langue,  ce  qu'ils 
pensent;  ils  expriment  ce  qu'ils  sentent.  Il  se  trouve  que  c'est  du 
nouveau.  Ce  n'est  pas  leur  faute. 

On  peut  faire  avec  intention  des  eilets  nouveaux;  mais  on  ne 
fait  pas  des  idées  nouvelles.  Il  faut  qu'elles  se  présentent  d'elles- 
mêmes.  L'idée  appelle  nécessairement  la  forme  propre  à  l'expri- 
mer. Si  l'idée  est  nouvelle,  la  forme  est  nouvelle  aussi.  Supposez 
que  Beethoven  ne  fût  pas  doué  du  génie  créateur,  mais  qu'il  eût 
simplement  la  science  des  combinaisons,  supposez  qu'il  eût  pensé 
comme  Mozart,  en  développant  seulement  la  puissance  des  compli- 
cations instrumentales,  nous  n'aurions  ni  la  symphonie  en  ut  mi- 
neur, ni  la  symphonie  en  la,  ni  l'Ucro'ique,  ni  la  Pastorale,  aucune 
des  œuvres,  enfin,  dans  lesquelles  nous  admirons  sa  profonde  et 
saisissante  originalité.  Il  a  pensé  comme  Beethoven,  avant  d'écrire 
comme  Beethoven.  Ainsi  que  chez  tous  les  inventeurs,  la  forme 
est,  chez  lui,  la  conséquence  de  l'idée  ;  toutes  deux  sont  le  pro- 
duit de  la  même  conception.  Essayez  de  renforcer  l'instrumentation 
d'Haydn,  ou  de  simplifier  celle  de  Beethoven,  vous  n'aurez  que  des 
productions  sans  unité,  sans  caractère,  des  productions  incohé- 
rentes. On  a  fait  de  ces  tentatives,  et  elles  n'ont  jamais  abouti  à 
des  résultats  approuvés  des  connaisseurs.  Ce  rapport  entre  l'idée 
et  la  forme  existe  dans  tous  les  arts.  Appliquez,  par  la  pensée,  le 
coloris  de  Rubens  aux  compositions  de  Raphaël;  imaginez  une 
figure  dessinée  par  Fra  AngeHco  et  peinte  par  Rembrandt,  au  lieu 
d'œuvres  accomplies,  vous  aurez  des  monstruosités.  Pour  faire  du 
nouveau  en  musique,  il  faut  donc  commencer  par  avoir  des  idées 
nouvelles,  par  en  avoir  naturellement,  comme  en  ont  les  hommes 
de  génie  ;  c'est  une  condition  qu'on  remplit  parfaitement  lorsqu'on 
est  organisé  pour  cela.  En  pareil  cas,  il  est  inutile  de  faire  des 
efforts,  de  formuler  des  théories,  de  publier  ses  intentions;  les 
choses  viendront  d'elles-mêmes  et  le  public  verra  bien  à  qui  il  a 
affaire.  Il  y  en  a  beaucoup  de  variétés  déçues  depuis  que  le  monde 
existe,  mais  on  aurait  vite  dressé  la  liste  des  génies  méconnus. 

Faut-il  absolument  faire  du  nouveau  en  musique?  Comment  re- 
connaît-on qu'il  est  nécessaire  défaire  du  nouveau? 

Pour  répondre  à  cette  double  question,  il  faudrait  commencer 
par  convenir  de  ce  que  l'on  entend  par  du  nouveau;  assurément 
aucun  compositeur  ne  peut  être  autorisé  à  refaire  ce  qu'ont  fait 
ses  prédécesseurs.  S'il  ne  sait  que  répéter  ce  qui  a  déjà  élé  dit,  il 
n'a  qu'à  garder  le  silence.  Tout  musicien  doit  avoir  ses  idées  à 
lui,  ses  propres  inspirations  ;  il  doit  aussi  les  présenter  sous  une 
forme  technique  qui  lui  soit  personnelle.  En  conclure  qu'il  esttenu 


d'opérer  une  révolution  radicale  dans  l'art,  d'innover  en  tout,  ce 
serait  forcer  l'ordre  naturel  des  choses.  Dans  les  arts  comme  en 
politique,  le  besoin  d'une  révolution  se  fait  sentir  de  temps  à 
autre.  La  société  ne  peut  pas  rester  perpétuellement  organisée  sur 
la  même  base;  la  musique,  pas  plus  que  l'architecture,  la  peinture 
et  la  statuaire,  ne  peut  pas  s'immobiliser  sous  une  même  forme. 
D'une  autre  part,  il  est  certain  que  des  révolutions  sans  cesse  re- 
naissantes ne  seraient  admissibles  ni  dans  les  arts,  ni  en  politique. 
Ainsi  donc,  s'il  faut  du  nouveau  en  umsique,  il  n'en  faut  pas  trop; 
il  n'en  faut  pas  au  point  de  troubler  les  amateurs  dans  la  percep- 
tion de  certaines  sensations  qui  leur  plaisent.  Quant  aux  signes 
par  lesquels  on  reconnaît  que  le  moment  est  venu  de  faire  du 
nouveau,  il  est  difficile  de  les  indiquer.  Non-seulement,  c'est  dif- 
ficile, mais  encorj  c'est  inutile  ;  (attendu  que  l'on  ne  fait  pas, 
comme  nous  l'avons  dit,  du  nouveau  de  parti  pris,  et  que  les 
hommes  de  génie  appelés  à  jouer  le  rôle  de  novateurs  tiennent 
leur  mission  de  la  Providence.  En  vain  les  appellerait-on:  i!s 
viennent  à  leur  heure. 

Un  musicien  bien  organisé  et  instruit  fait  du  nouveau  instincti- 
vement. Il  fait  du  nouveau  parce  que  tout  homme  a  son  tempéra- 
ment, sa  manière  de  sentir,  sas  idées  et  sa  manière  de  les  expri- 
mer. Tout  homme  est  original  lorsqu'il  s'abstient  d'imiter.  Il  n'y 
a  pas  moins  de  variété  dans  les  esprits  que  dans  les  visages.  Le 
musicien  dont  nous  parlons  fera  du  nouveau  sans  tomber  dans  le 
bizarre,  qu'il  faut  bien  se  garder  de  confondre  avec  l'original,  dont 
il  diffère  autant  que  le  naturel  diffère  de  l'affectation. 

On  est  passé  d'un  extrême  à  un  autre.  Jadis  on  professait  le 
culte  de  la  tradition;  rien  n'était  bon  que  ce  qui  était  usité;  il 
fallait  des  exemples,  des  autorités.  La  moindre  innovation  était 
imputée  à  crime  aux  compositeurs  qui  osaient  se  la  permettre. 
Les  maîtres  avaient-ils  fait  une  chose,  il  était  bien  de  la  recom- 
mencer; mais  la  faire  pour  la  première  fois,  cette  chose,  c'était 
commettre  un  grave  péché  !  Certes,  c'était  une  singulière  aberra- 
tion d'idées  que  celle  qui  interdisait  à  l'artiste  la  faculté  d'innover; 
mais,  comme  nous  le  disions  tout  à  l'heure,  on  n'a  renoncé  à  un 
préjugé  que  pour  tomber  dans  un  autre.  Le  mépris  de  la  tradition, 
la  crainte  de  la  banalité  font  qu'on  se  torture  l'esprit  pour  trouver 
du  nouveau.  Quant  à  examiner  si  ce  nouveau  est  bon,  on  ne  s'en 
occupe  guère;  on  semble  croire  qu'il  est  de  l'essence  de  la  nou- 
veauté d'être  excellente.  En  portant  ce  principe  jusqu'à  ses  der- 
nières conséquences,  on  perd  de  vue  le  but  de  l'art  et  l'on  s'égare 
dans  des  voies  qui  aboutissent  à  l'erreur. 

On  croyait  que,  sans  tomber  dans  une  simplicité  enfantine,  il 
fallait  faire  de  la  musique  intelligible,  et  ne  pas  multiplier  les  com- 
plications techniques  au  point  de  fatiguer  l'attention  de  l'auditeur. 
Une  école  qui  a  son  siège  en  Alleinagne  et  qui  s'efforce  de  faire 
prévaloir  partout  son  influence  tend,  au  contraire,  à  faire  de 
l'obscurité  la  première  condition  du  mérite  des  œuvres  musicales. 
Il  y  a  longtemps  qu'en  Allemagne  ce  principe  est  appliqué  à  la 
philosophie  et  à  la  littérature.  La  simplicité,  la  clarté,  dans  ces 
matières,  sont  considérées,  au  delà  du  Rhin,  comme  les  signes 
d'un  esprit  médiocre.  L'écrivain  qui  se  fait  comprendre  sans  dif- 
ficulté est  superficiel;  celui  qui  est  obscur  et  dont  la  pensée  n'est 
pénétrée  qu'à  force  d'étude  et  de  méditation  est  profond;  on  l'es- 
time. Il  est  d'autant  plus  considéré  qu'on  a  eu  plus  de  peine  à  le 
deviner.  Le  lecteur  tire  vanité  de  la  sagacité  dont  il  a  fait  preuve 
lorsqu'il  vante  les  œuvres  des  écrivains  qui  lui  ont  donné  l'occa- 
sion de  déployer  sa  pénétration. 

Le  même  principe  a  été  appliqué  à  la  peinture.  Les  grandes 
compositions  de  Sclmorr,  de  Cornélius,  de  Kaulbach,  de  Bende- 
mann,  sont  remplies  d'allégories  subtiles  dont  on  ne  saisit  le  sens 
qu'après  de  longues  études  et  des  journées  entières  d'examen. 
Pour  expliquer  ce  qu'il  y  a  d'idées  dans  un  seul  tableau,  il  faudrait 


I)E  l'AKIS. 


un  volume.  11  y  a  de  ces  peintures  qui  sont  do  vraies  énigmes 
dont  on  n'est  pas  bien  certain  d'avoir  le  mot,  même  lorsqu'on  a 
pris  connaissance  des  volumineux  commentaires  qui  en  donnent 
l'interprétation  avec  commentaires. 

Ce  qui  est  admissible,  jusqu'à  un  certain  point,  en  peinture  et 
en  littérature,  comme  obscurité  systématique,  ne  saurait  l'être  en 
musique.  On  peut  étudier  à  loisir  les  pages  d'un  livre;  on  peut 
réflécliir  des  heures  et  des  jours  entiers  sur  le  sens  allégorique 
d'une  composition  picturale;  mais  la  musique. ne  s'arrête  pas  pour 
laisser  pénétrer  le  mystère  de  ses  combinaison-;;  il  faut  la  saisir, 
la  comprendre  au  passage.  Si  elle  n'est  point  intelligible,  si  l'i- 
dée ne  se  dégage  pas  de  l'ensemble  des  sonorités,  elle  n'est  qu'un 
bruil.  La  prétention  de  faire  du  nouveau  a  mis  l'imprévu  en 
grand  lioimeur  auprès  des  compositeurs  de  l'école  dont  nous  ve- 
nons de  parler.  Leurs  plus  grands  efforts  tendent  à  tromper  les 
prévisions  de  l'auditeur  sur  les  développements  de  l'idée  et  sur  la 
succession  des  effets.  Leur  méthode  supprime  les  affinités  des 
sons,  les  tendances  naturelles  des  résolutions  harmoniques,  les 
préparations  ingénieuses  et  les  progressions  régulières.  Rien  de 
ce  que  l'oreille  attend  n'arrive,  rien  de  ce  qu'elle  espère  ne  lui  est 
accordé.  La  phrase  mélodique  prend  un  autre  chemin  que  celui 
vers  lequel  elle  semblait  se  diriger;  l'accord  qui  s'annonçait  est 
remplacé  par  un  autre;  la  période  se  brise  et  se  transforme  au 
moment  où  l'on  croyait  en  saisir  le  sens  complet.  L'auditeur  est 
trompé  sur  les  dimensions  du  morceau,  comme  sur  tout  le  reste. 
Il  croit  entendre  les  derniers  accords  :  ce  n'est  qu'une  ruse  du 
compositeur  qui  recommence  de  plus  belle  et  fait  longtemps  en- 
core jaser  son  orchestre,  pour  finir  brusquement,  lorsqu'il  est  bien 
persuadé  qu'on  ne  s'y  attend  pas.  Tel  est  le  jeu  auquel  s'amusent 
les  musiciens  qui  spéculent  sur  l'imprévu,  et  font  du  nouveau 
avec  préméditation. 

11  y  a  dans  tout  cela  beaucoup  d'égoïsme  et  beaucoup  d'orgueil, 
deux  maladies  de  la  société  de  notre  temps.  Plaire  à  ses  audi- 
teurs, les  toucher,  les  intéresser  étaient  les  choses  dont  le  musi- 
cien s'occupait  jadis  en  composant.  Il  s'agit  aujourd'hui  d'un 
objet  plus  important;  il  s'agit  de  l'amour-propre  du  compositeur 
qui  veut  étonner,  surprendre,  et  montrer  que  son  savoir  est  su- 
périeur à  l'intelligence  de  ceux  qui  l'écoutent.  Qu'ils  aient  ou  non 
des  jouissances,  peu  importe;  s'ils  l'admirent,  tout  est  dit.  L'a- 
mour-propre des  compositeurs  a  pour  complice  la  vanité  des  pré- 
tendus connaisseurs  qui  rougiraient  de  n'être  pas  au  niveau  de  la 
science  dont  on  fait  étalage,  et  qui  aiment  mieux  applaudir  com- 
plaisamment  ce  qui  ne  les  amuse  guère,  que  d'avouer  qu'ils  ne  le 
comprennent  pas.  Pour  nous,  quand  nous  écoutons  cette  musique 
à  surprises,  nous  nous  prenons  à  regretter  la  bonhomie  des  an- 
ciens maîtres  qui  allaient  tout  droit  leur  chemin,  ne  cherchaient  ni 
à  tromper  ni  à  surprendre  leur  m(mde  et  faisaient  du  nouveau, 
lorsqu'ils  en  étaient  capables,  sans  y  mettre  ni  prétention  ni  va- 
nité. 

Edouard  FÉTIS. 


LE  PS&UfflE   CXXXYII. 

Imité    de    la    Bible    par    U.     Emilien    Paetnl, 
His    rn    Uasique    par    H.    Jules  Béer. 

{Première  Audilion.) 

Un  auditoire  d'élite  remplissait  de  bonne  heure,  jeudi  soir,  les 
salons  de  M.  Jules  Béer,  neveu  de  Meyerbeer,  auteur  de  la  Fille 
d'Egypte,  et  qui  tient  à  perpétuer  dans  sa  famille  les  traditions  de 
l'art  qu'illustra  son  oncle.  On  savait  qu'au  programme  habituel 
d'une  soirée  musicale,  M.  Jules  Béer  ajouterait  la  première  audi- 


tion d'un  morceau  de  sa  composition  :  le  psaume  137,  imité  de 
la  Bible  par  M.  Emilien  Pacini,  et  qui  devait  être  exécuté  par  des 
choristes  du  Conservatoire  et  MM.  Warot,  Caron  et  Mlle  Mauduit 
chantant  les  soli.  Aussi  les  invités  n'étaient-ils  pas  moins  curieux 
qu'empressés  de  fêter  cette  primeur.  Vers  dix  heures,  M.  Jules 
Béer,  qui  joint  à  sa  ([ualité  de  compositeur  celle  d'excellent  accom- 
pagnateur, s'est  mis  au  piano  et  les  chœurs  ont  attaqué  l'introduc- 
tion : 

Près  des  fleuves  de  Bab^lone, 
Nous  nous  étions  assis  en  proie  à  nos  douleurs. 

On  a  pu  voir,  dès  ce  début,  que  pour  traiter  son  sujet  M.  Béer 
s'était  placé  au  point  de  vue  où  s'était  mis  Hossini  en  composant 
son  Stabat,  et  qu'il  s'était  proposé  de  faire  du  psaume  VSl  une 
cantate  avec  ses  développements.  Tout  en  lui  conservant  son  ca- 
ractère biblique,  le  compositeur  lui  a  donné  les  formes  de  la  mu- 
sique dramatique.  Son  intention  s'est  encore  plus  accentuée  dans 
la  strophe  deuxième,  arioso,  chantée  par  Mlle  Mauduit  : 

Dans  la  ville,  aux  branches  des  saules 
Nos  harpes  et  nos  luths  pendaient  silencieux. 

La  jeune  cantatrice  y  a  déployé  beaucoup  de  chaleur  et  de  sen- 
timent; sa  voix  pure  et  sonore  retentissait  dans  ce  salon  avec  un 
éclat  qui  a  produit  la  plus  vive  impression.  Elle  a  dû  répéter 
cette  strophe  aux  acclamations  unanimes  de  l'auditoire. 

Dans  la  troisième  : 

Jérusalem,  reine  éplorée, 
le  compositeur  s'est  élevé  à  une  grande  hauteur  de  style,  le  chant 
en  est  vraiment   très-beau;    interprétée    avec  beaucoup    d'énergie 
par  Warot,  elle  se  fond  avec  habileté  dans  le  trio  qui  suit  : 

Jérusalem,  notre  espérance  ! 
Le  récitatif  et  choeur  : 

Seigneur!  à  l'assaut  de  Solyme, 
est  le  morceau  qui  nous  a  paru  le  mieux  réussi. 

Entonnés  avec  une  grande  puissance  par  M.  Caron,  les  deux 
premiers  vei'S  sont  interrompus  par  le  chœur  : 

. . .  Détruisez,  de  la  cité  sublime, 
Les  derniers  fondements. 

La  répétition  des  syllabes  martelées  de  ces  deux  vers   peint  bien 
l'œuvre  de  destruction  et  la  fureur  sauvage  des  démolisseurs. 
Toutes  les  voix  réunies  pour  la  strophe  sixième  : 

...  Oh!  de  Babel,  fille  altière. 


. . .  Qui  viendra  te  prendre, 
Et  briser  sur  la  pierre 
Tes  exécrables  fils? 


terminent  heureusement  cette  œuvre  dans  laquelle,  ainsi  que  nous 
l'avons  dit,  M.  Jules  Béer  s'est  inspiré  autant  du  sentiment  scé- 
nique  que  du  sentiment  religieux.  Bien  écrite  pour  les  voix,  forte- 
ment colorée,  elle  dénote  chez  l'auteur  une  science  harmonique 
dont  il  avait  d'ailleurs  déjà  donné  des  preuves  incontestables.  11  a 
donc  pu  s'enorgueillir  à  bon  droit  des  félicitations  chaleureuses 
qui  lui  ont  été  adressées. 

Les  trois  solistes  de  l'Opéra  qui  lui  prêtaient  leur  concours,  l'ont 
parfaitement  secondé  et  les  témoignages  de  satisfaction  qu'ils  ont 
reçus  à  plusieurs  reprises  étaient  bien  mérités.  Des  éloges  sont  dus 
également  à  M.  Hurand  pour  la  façon  dont  il  a  dirigé  les  chœurs. 

La  seconde  partie  de  la  soirée  a  été  remplie  par  un  intermède 
musical  dans  lequel  Mme  Marie  Escudier-Kastner,  s'est  fait  en- 
tendre deux  fois  et  a  rencontré  ses  succès  habituels.  La  scène  et 
l'air  de  l'Ombre  du  Pardon  de  Ploërmel,  chantés  par  Mlle  Schroe- 
der,  du  théâtre  Lyrique,  ont  mis  brillamment   en  relief  les  rares 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


qualités  du  talent  de  la  jeune  et  belle  artiste  qu'on  a  de  nouveau 
applaudie  avec  Mlle  Mauduit  dans  le  duo  de  la  Fille  d'Eyypte,  l'un 
des  plus  beaux  morceaux  de  l'opéra  do  M.  Jules  Béer.  Entin,  les 
voix  de  M.  Warot  et  de  M.  Caron  se  sont  admirablement  mariées 
dans  cette  magnifique  page  d'Halévy,  qu'on  regrette  de  ne  pas  en- 
tendre plus  souvent,  le  duo  de  la  Reine  de  Chypre  «  Triste  exilé 
sur  la  terre  étraugèi-e.  » 

S.  D. 


BEVUE  DES  THÉÂTRES. 

Théâtre  Français  :  lu  Valise  de  Molière,  à-propos  en  un  acte  par 
M.  Edouard  Fournier.  —  Odéon  :  Didier,  drame  en  trois  actes, 
par  M.  Pierre  Berton. — Gymnase  :  le  Comte  Jacques,  comédie  en 
trois  actes  et  en  vers,  par  M.  Edmond  Gondinet.  —  Bouffes  Pa- 
risiens :  les  Tribulations  d'un  Témoin,,  vaudeville  en  trois  actes, 
par  M   Adrien  Decourcelle. 

L'anniversaire  de  la  naissance  de  Molière  a  été  célébré,  comme 
de  coutume,  au  Théâtre-Fraufais,  par  un  hommage  rendu  à  la 
mémoire  de  notre  grand  poëte  comique.  On  a  couronné  son 
buste,  on  a  lu  des  stances  dithyrambiques  de  M.  Marc-Baveux,  et 
on  a  joué  une  petite  pièce  de  circonstance,  due  à  la  plume  de  M. 
Edouard  Fournie)',  qui  a  le  monopole  de  ces  sortes  de  choses. 
Du  reste,  on  a  eu  afTaire,  cette  fois,  bien  plus  à  l'érudit  qu'à 
l'auteur  dramatique.  La  Valise  de  Molière  est  un  cadre  dans  le- 
quel viennent  se  grouper  divers  fragments,  en  vers  et  en  prose, 
attribués  au  peintre  immortel  du  Misanthrope,  et  dont  quelques- 
uns  portent  évidemment  son  cachet.  Pour  donner  un  prétexte  à 
l'exhibition  de  ces  documents  plus  ou  moins  précieux,  M.  Four- 
niere  suppose  que  Molière  a  perdu,  dans  une  de  ses  tournées,  sa 
valise  qui  renferme,  outre  les  fragments  en  question,  le  manuscrit 
de  Tartufe.  Un  marchand  d'orviétan,  du  pont  Neuf,  met  la  main 
sur  ce  trésor  et  prétend  se  l'approprier  ;  mais  Molière,  aidé  des 
principaux  comédiens  de  sa  troupe,  entre  au  service  du  sieur  Cor- 
mier pour  reprendre  son  bien,  et,  en  fin  de  compte,  le  charlatan, 
honteux  et  confus,  est  trop  heureux  d'être  accepté  comme  mou- 
cheur  de  chandelles  dans  la  compagnie  du  futur  valet  de  chambre 
du  roi. 

Cet  à-propos  a  été  fort  bien  accueilli  par  les  nombreux  admira- 
teurs de  la  gloire  de  Molière,  qui  s'étaient  donné  rendez-vous  au 
Théâtre-Français,  le  IS  janvier.  Febvre,  sous  les  traits  du  poëte,  a 
été  très-applaudi,  ainsi  que  Kime,  dont  le  début  s'est  eft'ectué 
d'une  manière  satisfaisante.  Les  autres  rôles  sont  tenus  par  Eu- 
gène Provost,  Chéry,  Séveste,  Mlle  Dinah  Félix  et  Mlle  Tordeus. 

—  Le  drame  de  M.  Pierre  Berton,  que  l'on  a  joué  à  l'Odéon, 
sous  le  titre  de  Didier,  n'a  pas  tout  à  fait  répondu  aux  espérances 
qu'il  avait  fait  concevoir.  La  donnée  n'en  a  pas  paru  suffisamment 
neuve,  et  la  coiilexture  des  deux  premiers  actes  a  semblé  parfois 
pénible,  embarrassée.  Mais  il  ne  faut  pas  oublier  que  M.  Pierre 
Berton,  l'estimable  artiste  du  Gymnase,  en  est  encore  à  ses  débuts 
comme  auteur  dramatique,  et  il  faut  lui  tenir  compte  de  certaines 
qualités  qui  dénotent  une  louable  aptitude  et  présagent  d'heureux 
succès. 

Didier  est  un  vieux  savant  plein  d'illusions  naïves,  qui  s'est 
laissé  prendre  à  l'espoir  d'inspirer  une  affection  tendre  à  la  fille 
de  son  ami,  le  docteur  Baymond.  Il  songe  à  l'épouser,  lorsque, 
arraché  brusquement  à  son  rêve,  il  apprend  que  Lucie  a  un  vé- 
ritable amour  dans  le  cœur  pour  un  jeune  médecin,  dont  son  père 
repousse  la  recherche  parce  que,  nouvel  Antony,  on  ne  lui  connaît 
pas  de  famille.  L'excellent  Didier,  comprenant  qu'il  a  fait  fausse 
route,  se  sacrifie  au  bonheur  de  Lucie  et  forme  le  projet  d'adopter  le 
jeune  Henri  pour  anéantir  les  obstacles  qui  s'opposent  à  son  ma- 


riage. Mais  le  pauvre  savant  a  trop  présumé  de  ses  forces,  et  au 
moment  de  la  signature  du  contrat,  il  succombe  et  perd  lu  raison. 
Comme  on  le  pense  bien,  il  ne  peut  plus  être  question  de  l'hymen 
des  deux  amoureux,  et  ils  resteraient  éternellement  étrangers  l'un 
à  l'autre  si  Didier,  retrouvant  peu  à  peu  la  mémoire  et  le  calme, 
ne  se  chargeait  lui-même  de  les  rapprocher  et  de  les  unir. 

C'est  cette  dernière  partie  de  la  pièce  qui  lui  a  fait  trouvei'  grâce 
devant  ses  juges,  non-seulement  par  la  maniera  dont  elle  est  trai. 
tée,  mais  aussi  par  le  talent  sympathique  que  Taillade  y  a  déployé 
dans  le  personnage  de  Didier  revenant  à  la  raison. 

Mlle  Antonine  représente  Lucie  aveu  nue  grâce  touchante  ;  Mar- 
tin tire  le  meilleur  parti  possible  du  rôle  de  Raymond  et  un  dé- 
butant du  nom  de  Kaynald  s'acquitte  très-convenablement  de  celui 
de  Henri. 

—  Le  Comte  Jacques,  du  Gymnase,  e;t  un  peu  parent,  à  la 
mode  de  Bretagne,  de  cet  officier  qui,  dans  Mademoiselle  de  la  Sei- 
ylièrc,  revient  après  une  longue  absence  prendre  possession  de  la 
succession  de  son  père  et  la  trouve  accaparée  pai-  des  intrus.  Au 
lieu  d'une  famille  d'émigrés,  c'est  une  jeune  fille  recueillie  et  élevée 
par  le  vieux  marquis  de  Prignon  que  Jaccjues  rencontre  installée 
dans  la  maison  de  cet  oncle,  mort  intestat.  Blanche  se  croit  vci'itable- 
ment  héritière  du  marquis,  et  Jacques  se  refuse  d'autant  mieux  à 
l'éclairer,  qu'en  la  voyant  il  est  tonabé  sous  le  charme  de  son  es- 
prit et  de  se.-i  attraits.  Il  ouvrirait  bien  son  cœur  à  Blanche,  mais 
il  y  a,  de  par  le  monde,  un  baron  de  Prangy  à  qui  elle  est  enga- 
gée, et,  par  excès  de  délicatesse,  il  préférera  s'éloigner  sans  mol 
dire.  Un  vieux  boule-dogue,  ancien  intendant  du  marquis,  n'a  pas 
les  mêmes  scrupules,  et  révèle  sans  façon  la  vérité  à  Blanche  qui, 
en  apprenant  qu'elle  n'est  pas  chez  elle,  veut  parlir  à  son  tour. 
Quelques  péripéties  de  peu  d'importance  retardent  encore  l'explica- 
.tion  décisive  <iui  doit  avoir  lieu  entre  les  deux  jeunes  gens;  mais 
ils  ne  finissent  pas  moins  par  s'entendre,  le  baron  de  Prangy  est 
congédié  et  tout  s'arrange  par  le  mariage  de  Jacques  avec  Blanche. 
M.  Gondinet,  l'auteur  de  cette  comédie,  réussit  à  merveille  dans 
les  vers  faciles,  si  voisins  de  la  prose  qu'on  aurait  peine  à  y  recon- 
naître la  ligne  de  démarcation.  Deux  petites  pièces  de  même 
nature  ont  précédé  le  Comte  Jacques,  qui  a  plus  d'importance  et 
fera  plus  d'honneur  à  M.  Gondinet.  L'interprétation  en  est  confiée 
à  Pierre  Berton,  l'auteur  de  Didier,  ci-dessus  nommé,  à  Laiidrol, 
à  Blaisot  et  à  Mlle  Massin,  qu'une  fâcheuse  indisposition  de 
Mlle  Delaporte  a  gratifiée  du  joli  rôle  de  Blanche  et  qui  n'y  est 
pas  au-dessous  de  sa  tâche. 

—  Le  vaudeville,  qui  passait  pour  avoir  fait  son  temps,  s'est 
réfugié  aux  Bouffes-Parisiens  et  a  tout  l'air  de  vouloir  y  opérer 
une  réaction  favorable.  Dieu  merci!  il  existe  encore  un  public  pour 
ces  facéties  amusantes  et  spirituelles  qui  dédaignent  le  secours  des 
trucs,  des  jupons  courts  et  des  animaux  rares.  Les  Tribulations 
d'un  témoin  ont  réussi  sans  tous  ces  coûteux  accessoires  et  nous 
souhaitons  qu'un  tel  exemple  trouve  des  imitateurs. 

C'est  la  fête  de  l'opticien  Moutonnet;  il  se  délecte  dans  les  em- 
brassements,  dans  les  cadeaux  de  famille;  il  est  content,  il  est 
heureux.  Tout  à  coup  survient  son  ami  Duvivier  qui  a  un  duel 
et  qui  le  choisit  pour  témoin.  La  première  pensée  de  Moutonnet 
est  de  se  soustraire  à  cette  triste  obligation  ;  mais,  sous  la  promesse 
que  l'affaire  s'arrangera,  il  cède.  Malheureusement,  l'adversaire  de 
Duvivier  a  pris  pour  second  un  sapeur  inaccessible  aux  accommo- 
dements. L'infortuné  Moutonnet,  entraîné  sur  le  terrain,  poursuivi 
par  la  gendarmerie,  en  proie  à  toutes  les  terreurs  imaginables,  est 
prêt  à  fuir  en  Belgique  pour  échapper  à  la  vindicte  des  lois.  Mais 
la  rencontre  que  l'on  croyait  mortelle  s'est  terminée  sans  effusion 
de  sang,  et  Moutonnet  en  est  quitte  pour  la  peur. 
Le  rôle  épisodique  du  sapeur  est  joué  avec  infiniment  d'origi- 


DE  PARIS. 


29 


nalité  par  Lacombe,  et  les  autres  personnages  sont  interprétés  avec 
beaucoup  d'entrain  et  de  gaieté  par  Charles  Perey,  Oscar,  Mme  Da- 
puis  et  Mlle  Jouven. 

D.  A.  D.  SAINT-YVES. 


CONCERTS  ET  AUDITIONS  ISDSICÂLES  DE  LA  SENAINE. 

^*^  Deux  salves  d'applaudissements  ont  accueilli  dimanche  dernier  au 
concert  populaire  l'ouverture  de  Struensée  de  Meyerbeer,  exécutée  avec 
un  ensemble  parfait.  Pour  ce  morceau  comme  pour  ceux  qui  suivaient, 
il  n'y  a  que  des  éloges  à  donner  à  l'interprétalion  du  beau  programme 
qui  composait  le  concert. 

^**  Samedi,  il  y  a  huit  jours,  un  auditoire  nombreux,  distingué  et 
sympathique  assistait  au  premier  concert  de  l'année  scolaire  donné  par 
les  élèves  de  l'institution  impériale-des-Jcunes-Aveugles.  Divers  fragments 
classiques,  le  difficile  anàanle  de  la  sym|.ihoiiie  avec  chœurs  de  Beethoven, 
entre  autres;  un  concerto  de  Kaikbrenner;  une  fantaisie  pour  hautbois; 
le  trio  de  la  Fée  avx  Roses  ;  deux  chœurs  bien  mélodiques  et  parfaitement 
écrit-s  pour  les  voix,  composés  par  deux  professeurs  non-\oyants,  MM. 
Paul  et  Roussel,  formaient  le  programme  de  cette  intéressante  séance  ar- 
tistique qui  empruntait  un  caractère  touchant  à  la  cruelle  intirmité  de 
ses  interprètes.  Nous  unissons  de  tout  cœur  nos  félicitations  aux  applau- 
dissements chaleureux  qui  ont  accueilli  les  voix  iraîchos  et  habilement 
exercées  de  Mlles  Mallard,  Chatrane  et  Bergeret;  la  virtuosité  remarquable 
de  MM.  Larrieux,  Ponnelle,  Alizon,  Gachedaure,  Person  ;  l'ensemble  des 
chœurs,  la  précision  de  l'orchestre.  L'organi-ation  de  ces  fêtes  musicales 
fait  le  plus  grand  honneur  à  la  direction  de  ce  magnifique  établissement 
et  lui  attire  d'unanimes  sympathies.  La  musique  est,  de  tous  les  arts,  ce- 
lui qui  convient  le  mieux  aux  aveugles,  celui  pour  lequel  iis  semblent 
même  avoir  été  formés  par  la  nature  et  le  seul  qui  puisse  leur  donner 
un  plaisir  véritable  et  une  consolation  efficace,  tout  en  assurant  leur 
sort. 

^%  Dans  la  grande  soirée  musicale  donnée,  le  18  janvier,  à  la  salle 
Herz,  on  a  particulièrement  applaudi  Mlle  Battu  et  Délie  Sedie.  Ces  deux 
virtuoses  de  premier  ordre  ont  admirablement  chanté  ;  trois  salves  de 
bravos  sans  fin  ont  accueilli  les  morceaux  chantes  par  Mlle  Battu.  Un 
violoniste  étranger,  qui  a  reçu  des  leçons  de  Léonard,  y  faisait  sa  pre- 
mière apparition  ;  il  s'est  fait  remarquer  par  une,  grande  sûreté  d'archet 
et  un  très-beau  son  ;  il  a  joué  la  ballade  et  polonaise  de  Vieuxtemps,  et  la 
fantaisie  sur  Norma  du  même  maître,  morceau  hérissé  de  difficultés, 
avec  une  fougue  qui  a  provoqué  les  applaudissements  les  plus  enthou- 
siastes. C'est  un  talent  de  haut  goiit  et  destiné  à  faire  sensation. 
MM,  Saint-Saëns  et  Lebouc  prêtaient  aussi  leur  concours  à  celle  belle 
fête  dont  le  produit  aura  dû  satisfaire  la  classe  intéressante  des  sourds- 
muets,  au  profit  de  qui  elle  était  donnée. 

<,*,p  Les  séances  de  musique  de  chambre  de  M.  Lebouc  deviennent  de 
plus  en  plus  intéressantes;  à  chaque  matinée  un  morceau  de  musique 
nouvelle  vient  s'ajouter  aux  chefs-d'œuvre  des  grands  maîtres.  A  l'avant- 
dernière  réunion,  le  ^i"  quintette  d'Ad.  Blanc,  paru  récemment,  a  reçu 
le  meilleur  accueil;  il  a  été  délicieusement  rendu  par  MM.  While, 
Conitat,  Trombetta  et  Gouffé.  Un  charmant  solo  d'alto,  de  Vignier,  exé- 
cuté par  M.  Trombetta,  a  été  aussi  très-applaudi.  Mme  Beguin-Salomon 
a  joué  dans  la  perfection  le  trio  en  si  bémol  de  Beethoven  dans  lequel 
le  clarinettiste  Rose  s'est  également  distingué.  Nous  y  avons  assisté  au 
début  de  Mlle  Marie  Roubaud,  jeune  cantatrice  qui  possède  une  voix 
admirable  et  a  fait  preuve  d'une  bonne  méthode.  A  la  matinée  de  lundi 
dernier,  le  septuor  de  Hummel,  exécuté  par  MM.  Duvernoy,  Donjon, 
Barthélémy,  Baneux,  Trombetta,  Lebouc  et  Gouffé,  a  obtenu  un  succès 
d'enthousiasme.  De  poétiques  mélodies  de  Lacombe,  fort  bien  inter- 
prétées par  Mme  Daraoreau  et  accompagnées  par  l'auteur,  formaient  la 
partie  moderne  du  programme. 

^*jf.  Les  séances  populaires  de  musique  de  chambre  de  MM.  Lamou- 
reux,  Colblain,  Adam  et  Poëncet,  ont  repris  mardi  dernier.  Cette  année, 
c'est  à  la  salle  Pleyel  qu'il  faut  aller  applaudir  ces  vaillants  artistes.  Leur 
public  ordinaire  est  là,  nombreux  et  intelligent.  On  y  a  remarqué  M. 
Fissot,  qui  marche  à  grands  pas  vers  la  célébrité. 

*%  La  Société  des  concerts  du  Conservatoire  donne  aujourd'hui  di- 
manche, à  2  heures,  son  cinquième  concert.  En  voici  le  programme  : 
1°  Symphonie  avec  chœurs  de  Beethoven  (les  soli  seront  chantés  par 
Mlles  Marimon  et  Derasse,  MM.  Warot  et  Gailhard):  — 2°  andante  de  la 
49'"  symphonie  de  Haydn  ;  —  3°  air  de  Monlano  et  Stéphanie  de  Berton 
(chanté  par  Mlle  Marimon)  ;  —  4"  ouverture  d'Ofceron  de  Weber.  —  Le 
concert  sera  dirigé  par  M.  George-Hainl . 

^^:  Voici  le  programme  du  treizième  concert  populaire  de  musique 
elassique  qui  sera  donné  aujourd'hui,  à  2   heures,  au  cirque  Napoléon, 


sous  la  direction  de  J.  PasJeloup:  1°  symphonie  en  la  majeur  de  Mendels- 
sohn  (allegro  vivace,  andante,  scherzo,  saltarelle);  —2°  adagietto,  scherzo, 
de  Joachim  Raff,  (op.  101),  1"  audition; — 3"  symphonie  en  ut  majeur, 
de  Beetlioven  (allegro,  andante,  menuet,  final)  ;  — i"  larghetto  du  quin- 
tette (op.  108),  de  Mozart  (exécuté  par  M.  Grisez  (clarinette)  et  tous  les 
instruments  à  corde.s);  —  ;>'  ouverture  du  V aisseau- l'anlwne,  de  Richard 
Wagner. 

.i*4f  Jeudi,  6  février,  à  la  salle  Herz,  aura  lieu  un  grand  concert  avec 
orchestre  et  chœurs  (1.^50  exécutants)  sous  la  direction  de  M.  Charles 
Lamoureux.  On  y  entendra:  \"  Symphonie  pastorale  (Beethoven);  — 
2"  marche  et  chœur  des  fiançailles  de  Lohemjrin  (Richard  Wagner)  ;  — 
3°  air  de  Fo.raand  Cortez,  chanté  par  Mlle  Mauduit;  —  4°  Canzonetta  du 
quatuor  en  mi  bémol  (Mendelssohn)  ;  —  .'i"  scène  et  finale  du  deuxième 
acte  de  la  Vestale  (Spontini);  —  ti»  ouverture  A'Oberon  (Weber).  Les  .soli 
seront  chantés  par  Mlle  Mauduit  et  M.  Ponsard,  du  Théâtre  Impérial  de 
l'Opéra. 

»*4  On  se  rappelle  la  jeune  pianiste  llachel  Van  Lier,  qui  étonna  l'hiver 
dernier  par  la  précocité  de  son  talent.  Elle  annonce  pour  le  dimanche 
23  février,  à  la  salle  Herz,  une  matini';e  musicale  qui  promet  d'être  fort 
intéressante  et  dont  nous  donnerons  bientôt  le  programme. 

***  On  nous  écrit  d'Amiens  que  le  dernier  concert  de  la  Société  phil- 
harmonique, pour  lequel  le  président  .M.  Jules  Dencux  avait  demandé 
et  obtenu  le  concours  de  Marie  Sass  et  de  Faure,  de  l'Opéra,  a  dépassé 
en  succès  tous  le^  précédents.  Les  deux  éminents  artistes  y  ont  produit 
le  plus  grand  effet  et  ont  été  couverts  d'applaudissements. 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 


,i*if  Le  théâtre  impérial  de  l'Opéra  a  donné,  cette  semaine,  trois  re- 
présentations de  Guillaume  Tell.  —  On  prêle  à  M.  Perrin  Tintenlion  de 
reprendre  VArmide  de  Gluck,  après  VHamlet  de  M.  Ambroise  Thomas. 

^^  Une  indisposition  n'a  pas  permis  au  théâtre  de  l'Opéra-Comique 
de  donner  Robinson  Ciusoé  crtte  semaine;  on  espère  que  les  représenta- 
tions du  charmant  opéra  d'Oft'enbach  pourront  être  reprises  dans  les 
premiers  jours  de  celle-ci. 

^*^^MM.  Henri  Meilhac  et  William  Busnach  ont  lu,  dimanche  dernier, 
aux  artistes  de  l'Opéra-Comique,  un  acte,  le  Pâté  de  grives,  dont  Mme  de 
Granval  a  écrit  la  musique.  Les  rôles  de  cette  pièce  sont  destinés  à  Po- 
tel,  Leroy  et  à  Mlle  Cico. 

,^*,i.  Samedi  dernier,  aux  Italiens,  une  subite  indisposition  de  Mlle 
Patti  n'ayant  pas  permis  de  changer  le  spectacle, — la  Lucia  annoncée — 
Mlle  Laure  Harris  a  dû  chanter  ce  rôle,  au  pied  levé,  comme  l'on  dit, 
sans  préparation,  sans  répétition,  et  ce  page,  cette  Zerline,  cette  jolie  pe- 
tite voix,  cette  agilité,  cet  esprit,  ce  «diable  au  corps,»  tout  cela  subite- 
ment transformé  par  une  de  ces  métamorphoses  dont  le  talent  et  la  jeu- 
nesse ont  seuls  le  secret,  s'est  tiré  de  la  tâche  imprévue  avec  une  am- 
pleur et  une  justesse  de  voix  dignes  d'éloges,  avec  une  exécution  des  plus 
habiles,  et  surtout  avec  l'allure  mélancolique,  noble  et  passionnée  à  la 
fois  que  réclame  le  caractère  du  personnage.  Malgré  le  désap- 
pointement légitime  du  public  de  ne  pas  entendre  sa  favorite,  Mlle  Har- 
ris, qui  la  double,  a  obtenu  un  succès  très-décidé  et  qui  s'est  accentué 
depuis  lors  dans  une  seconde  représentation  du  même  ouvrage  donnée 
jeudi  à  la  place  de  Lucrezia  Borgia.  —  On  s'occupe  beaucoup  de  la  re- 
prise de  Don  Giovanni,  à  ce  théâtre,  avec  la  distribution  suivante  :  A. 
Patti,  Zwlina;  Krauss,  Donna  Anna;  Nicolini,  Don  Otiavio;  Verger,  iJa- 
sctto;  Agnesi,  le  Commendatore.  Quant  à  Elvira,  ce  personnage  redouté, 
que  l'on  ne  peut  remplir  sans  voix,  sans  figure,  sans  intelligence  scéni- 
que,  qui  s'appelle  Nilsson  au  théâtre  Lyrique,  Gueymard  à  l'Opéra,  on 
ne  sait  pas  encore  quelle  sera  son  incarnation  prochaine  aux  Italiens. 

jf*^  Jeudi,  l'Impératrice  Eugénie  a  honoré  de  sa  présence  la  représenta- 
tion de  la  Sonnamhula  au  théâtre  Italien.  Sa  Majesté  a  daigné  faite 
complimenter  Mlle  Patti  et  Gardoni  qui  se  sont  surpassés  dans  cette  re- 
présentation. L'auditoire  était  des  plus  brillants.  —  Du  reste,  on  s'a- 
perçoit que  Mlle  Patti  arrive  au  terme  de  ses  représentations  (elle  n'en 
a  plus  que  dix-huit  à  donner)  ;  on  veut  en  jouir,  et  les  notabilités  pa- 
risiennes abondent  de  plus  en  plus  lorsqu'elle  joue . 

,j*^  Une  indisposition  de  Mlle  Krauss  ajourne  la  première  d't'i  Templario, 
et  il  se  pourrait  même  qu'il  ne  fût  pas  donné  mardi.  Toutefois  la  se- 
maine laissant  Mlle  Patti  libre,  il  est  probable  qu'elle  quittera  Paris  au- 
jourd'hui pour  aller  donner  en  province  ou  à  l'étranger  deux  ou  trois 
représentations  que  plusieurs  directeurs  sollicitent  d'elle  à  la  fois.  Elle 
jouerait  sur  le  théâtre  qui  aura  la  préférence  la  lucia ,  Marguerite  de 
Faust,  et  Valentine  des  Huguenots  en  français. 

^*^  Autant  le  programme  du  grand  concert  donné,  lundi  dernier,  à  la 


30 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


fallc  Vftntadour,  par  la  Société  italienne  de  bienfa'sance,  et  quR  nous 
avons  publié,  était  intéressant  et  varié,  autant  les  résultats  de  cette  nié- 
morable  soiréeont  répondu  à  l'attente  du  public,  qui  y  a  goùlé  les  jouis- 
sances artistiques  les  plus  délicates,  k  celle  des  artistes,  auxquels  de  cha- 
leureuses ovations  ont  été  décernées,  à  celle  des  pauvres  enfin  —  les 
premiers  intéressés  ceux-là  !  —qui  y  ont  recueilli  16,400  francs,  une  des 
plus  fortes  recettes  qui  aient  jamais  été  faites  peul-être  aux  Italieu.s. 
Mlle  Krauss  paraissait,  pour  la  première  fois,  dans  ce  rôle  austère  de 
Norma.,  qui  réclame  autant  d'agilité  de  voix  et  de  puissance  dramatique 
que  de  beauté  plastique;  la  tragédienne  lyrique  a  su  allier  la  noblesse  à 
la  nature  passionnée  de  son  personnage,  qu'elle  a  suffisanmient  traduit, 
du  reste,  au  point  de  vue  musical.  Mlle  Rosello  (Adalgis-e)  s'est  montrée 
séduisante.  Agnesi  a  été  un  grand  prêtre  fort  remarquable  et  d'une  belle 
prestance  Mlle  Patti,  quoique  souffrante,  n'avait  pas  cru  devoir  refuser 
sa  voix  d'or  à  ses  compatriotes  malheureux,  et,  après  avoir  chanté  le 
premier  acte  de  Crispino,  elle  a  dit,  comme  elle  seule  sait  et  saura  Jamais 
le  dire,  ce  premier  acte  de  Don  Pasqualc  que  Donizetti  semblerait,  en 
une  prescience  singulière  de  l'avenir,  avoir  écrit  pour  la  Norina  prédes- 
tinée. Ciampi,  Verger,  Scalese,  Gardoni  ont  vaillamment  contribué  à  la 
perfection  de  l'exécution  en  se  niontrant,  avec  cette  bonne  volonté  qui  ne 
fait  jamais  défaut  aux  véritables  artistes  lorsqu'il  s'agit  d'une  œuvre  de 
charité,  en  se  montrant,  dis-je,  ce  soir-là,  aux  applaudissements  d'une 
salleinagnifique,  dans  les  rôles  les  plus  opposés.  Une  bonne  part  du 
succès  de  la  soirée  revient,  sans  contredit,  à  la  .-émillante  Mlle  Harris, 
qui  vient  de  prendre  son  essor  avec  infiniment  de  grâce  et  [de  légèreté 
vers  la  région  des  étoiles. 

^*jf  Le  théâtre  Lyrique  s'occupe  lieaucoup  de  l'opéra  nouveau  de 
M.  Jules  Béer,  Elisabeth  de  HotiQrie;  Troy  a  pris  le  rôle  qui  avait  été 
primitivement  destiné  à  Ismaël,  maintenant  en  représentation  à  Marseille, 
et  les  répétitions  se  poursuivent  activement. 

^*^  L'Alhénée  annonce  pour  demain  la  première  représentation  de 
V Amour  et  son  carquois,  opéra- bouffe  en  deux  actes,  joué  par  Désiré, 
Léonce,  Mmes  Irma  Marié,  Lovato  et  toute  la  troupe  féminine.  On  re- 
prendra en  même  temps  une  bouffonnerie.  C'est  pour  ce  soir,  jouée  pri- 
mitivement au  théâ're  du  passage  Cboiseul,  et  dans  laquelle  Mlle  Moya 
chantera  deux  chansons  espagnoles  d'Yradier. 

^''^  La  chanteuse  masquée,  dont  nous  avons  parlé,  a  chanté  pour  la 
dernière  fois  jeudi  dernier  au  théâtre  Déjazet,  où,  plus  maîtresse  d'elle- 
même,  elle  avait  su  faire  applaudir  depuis  quelques  soirées  sa  voix  sou- 
ple, étendue  et  bien  menée.  La  i  mélodieuse  mascherirw,  •  ainsi  que 
certains  journaux  la  nomment,  doit  continuer  très-prochainement,  et 
d'une  laçon  plus  régulière,  ses  débuts  à  ce  théâtre,  dans  une  opérette  que 
l'on  dit  charmante.  A  la  scène  dernière,  ô  surprise  !  elle  enlèvera  son 
masque.  En  attendant  elle  n'aura  pas  peu  contribué  aux  Plaisirs  de 
Paris  ! 

^%  Ainsi  qu'il  était  facile  de  le  prévoir,  le  public  des  Variéléjs  a  cha- 
leureusement accueilli  Mlle  Schneider  dans  sa  rentrée  de  Barbe-Bleue. 
Mlle  Schneider  a  chanté  et  joué,  du  reste,  ce  soir-là  (samedi  de  l'autre 
semaine)  avec  sa  verve  la  plus  entraînante  et  sa  gaieté  la  plus  communi- 
cative. 

,*^:  Aujourd'hui,  au  théâtre  des  Variétés,  représentation  extraordinaire 
au  bénéfice  de  Grenier  (le  prince  Paul),  avec  le  concours  d'artistes  de 
l'Opéra,  de  l'Opéra-Coniique,  du  Palais-Royal  et  du  Gymnase. 

»**  On  monte  en  ce  moment,  avec  un  très-grand  luxe,  le  Prophète, 
au  théâtre  de  Versailles. 

;f*»  L'Africaine  a  été  reprise  à  Nantes,  et  les  arti?tes  de  la  campagne 
courante  ont  supporté,  vaillamment  et  sans  faiblir  un  seul  instant,  le 
poids  des  souvenirs  laissés  par  leurs  prédécesseurs,  et  la  charge  des 
comparaisons  et  des  ci-aintes  que  les  rôles  de  Vasco,  de  Selika  et  de  Ne- 
lusko  devaient  nécessairement  produire.  M.  Thierry  a  parfaitement  com- 
po.sé  le  rôle  du  farouche  sauvage  ,  et  il  le  chante  avec  des  effets  d'ex- 
pression bien  calculés.  Dans  le  finale  du  deuxième  acte,  Mme  Barbot, 
une  grand  artiste  entre  toutes,  fait  admirer  la  pureté ,  le  charme  et  la 
puissance  de  sa  voix  essentiellement  dramatique.  Mlle  Franchino  se  tire 
à  son  avantage  du  personnage  écrasant  de  Selika.  M.  Sylva  s'acquitte 
bien  du  rôle  de  Vasco.  L'orchestre  et  les  chœurs  ne  manquent  ni  de 
goût,  ni  d'ensemble. 

^*ji(.  Reprise  également  à  Montpellier,  l'Africaine  a  été  un  succès  pour 
tous  les  interprètes.  M.  Tapie-Brune  s'est  montré  à  la  hauteur  du  rôle 
de  Nelusko.  Marion  a  donné  une  physiunomie  parfaite  à  don  Pedro;  De- 
poitiers  a  parfaitement  rempli  les  rôles  du  grand  brahmine  et  de  l'in- 
quisiteur. Inès  est  chantée  avec  un  talent  réel  par  Mme  Depoitiers.  — 
Le  ténor  Solve  a  fait,  dans  les  Huguenots,  une  réapparition  brillante  sur 
cette  scène. 

5^%  On  nous  écrit  de  Toulon  en  date  du  22  janvier:  «  Hier  a  eu  lieu 
avec  un  succès  immense  la  première  représentation  de  l'Africaine.  Le 
directeur,  M.  Defrenne,  préparait  depuis  longtemps,  avec  un  très-grand 
soin,  la  mise  à  la  scène  du  dernier  chef-d'œuvre  de   Meyerbeer.  Trois 


décors  nouveaux  pour  le  2»,  le  i"  acte  et  celui  du  Mancenillier, 
de  magnifiques  costumes,  de  nombreuses  répétitions  ;  rien  en  un  mot 
n'avait  été  épargné,  négligé  pour  assurer  ce  succès  auquel  ont  vaillam- 
ment contribué  pour  leur  part  les  artistes  et  l'orchestre.  Une  longue 
suite  de  fructueuses  représentations  est  déjà  assurée  à  M.  Defrenne,  et 
viendra  le  récompenser  des  peines  qu'il  s'est  données  et  des  dépenses 
qu'il  a  faites.  —  De  son  côté  la  Grande-Duchesse  en  est  à  sa  dixième  re- 
présentation et  sa  vogue  ne  .se  ralentit  pas;  Mlle  Taffanel  y  fait  fana- 
tisme. » 

j*»  Le  théâtre  de  Besançon  vient  de  jouer  la  Grande-Duchesse,  pour  le 
bénéfice  de  son  chef  d'orchestre,  en  même  temps  directeur  de  l'école 
municipale  de  musique,  M.  Goud,  dont  le  talent  est  fort  apprécié  en 
Franche-Comté.  Exécution  excellente  et  qui  a  fait  honneur  à  Mlle  Marie 
Clément,  à  MM.  Roumégoux,  Saint  Lot  et  Victor.  Ce  succès  très-franc 
fera  attendre  patiemment  au  public  bisontin  l'apparition  des  grands  ou- 
vrages lyriques  qui  doivent  clôturer  la  campagne,  l'Africaine  notamment, 
où  .se  produira  l'impresario-ténor  de  la  troupe,  M.  Duprat,  un  chanteur 
bien  connu  de  l'école  de  Duprez. 

*\  Le  théâtre  d'Anvers  vient  de  mettre  nobinson  Crusoé  à  l'étude. 

^,*^,  Un  opéra-ciiniique  inédit  d'un  compositeur  de  Ljon,  M.  Emile 
Piclioz,  a  été  joué  ces  jours-ci  au  Grand-Théâtre  de  celte  ville,  sous  le 
titre  pimpant  de  Dans  les  (jardis  françaises.  Livret  banal,  pr.sque  en- 
fantin ;  musique  alerte  et  spirituelle  sans  originalité;  interprétation  des 
plus  médiocres,  tel  est  le  ré,>umé  d  s  appréciations  de  la  critique  locale 
sur  coite  tentative  nouvelle  de  décentralisation  artistique. 

,,,*,  Chaque  semaine  apporte,  maintenant,  la  nouvelle  de  l'ouverture, 
ou  plutôt  de  la  construction  d'un  théâthe.  Après  Vil  ebichot- Théâtre  voici 
venir  les  Folies-Trévise  ou  Bergère  qui  s'élèveront  aux  Colonnes  d'Her- 
cule... de  la  rue  Richer.  On  y  jouera  l'opérette  et  la  chanson  populaire 
y  sera  chez  elle. 

»**  On  annonce  que  M.  Eugène  Ferrand,  avocat,  sous-chef  du  bureau 
des  Théâtres  au  Ministère  de  la  Mai.^on  de  l'Empereur  et  des  Beaux  Arts, 
est  nommé  chef  du  même  bureau,  en  remplacement  de  M.  Cabanis,  qui 
serait  appelé  à  l'inspection  des  théâtres  des  départements.  M.  Albert  Cave 
serait  chargé  des  fonctions  de  sous-chef  du  bureau  des  théâtres.  Si  nous 
avons  bonne  mémoire,  M.  Eugène  Ferrand,  très-vers;  dans  la  connais- 
sance du  droit,  était  l'un  des  secrétaires  de  la  Commission  impériale  de 
la  propriété  littéraire  et  artistique,  qui  propo,sa  la  perpétuité  des  droits 
d'autours,  au  moyen  de  la  redevance. 

tf*t,  Le  sixième  bal  masqué  de  l'Opéra,  qui  a  eu  lieu  hier,  a  été  très- 
brillant;  l'affluence  y  était  grande  et  l'orchestre,  dirigé  par  son  habile 
chef  Strauss,  a  fait  merveille. 


NOUVELLES  DIVERSES. 


»%  M.  Victor  Massé  vient  de  recevoir  l'ordre  de  Charles  111  d'Espagne. 

jf*^  M.  Paul  de  Saint-Victor  a  pour  successeur  à  la  Presse  M.  B.  Jou- 
vin,  que  sa  notoriété  comme  critique  de  théâtre  désignait  tout  le  premier 
au  choix  de  la  direction  de  ce  journal. 

,%  Nous  apprenons  la  nomination  de  M.  Gustave  Baneux  au  grade 
de  sous-chef  de  musique  de  la  cinquième  subdivision  de  la  garde  natio- 
nale de  Paris,  en  remplacement  de  M.  Jancourt,  promu  chef.  Cette 
marque  de  distinction  était  bien  due  à  l'eminent  artiste  qui  tient  si 
consciencieu>ement  et  d'une  façon  si  remarquable  l'emploi  de  premier 
cor  de  la  Société  des  concerts  du  Conservatoire. 

^*^  On  nous  écrit  d'Amsterdam  que  M.  A.  Berlyn  vient  d'obtenir  aux 
concerts  de  M.  Stumpf,  au  Parc,  un  grand  succès  avec  une  nouvelle  œu- 
vre de  sa  composition  intitulée  Phantasiestiick,  qu'il  a  fait  exécuter  deux 
fois  dans  la  même  semaine,  sous  sa  direction,  en  présence  d'un  public 
enthousiaste. 

,t%  M.  Gabriel  Baille  nous  prie  d'annoncer  la  publication  prochaine, 
par  livraisons,  d'un  ouvrage  de  sa  composition  qui,  sous  le  litre  de  Proe- 
ludium,  contiendra  cinquante  morceaux  appropriés  à  la  liturgie  catho- 
lique et  pouvant,  quoique  écrits  pour  le  grand-orgue,  être  également 
joués  sur  l'harmonium.  Le  spécimen  de  cette  publication  nous  permet 
de  bien  augurer  de  son  avenir.  Le  prix  de  chaque  livraison  est  de  3  fr. 
net.    Les  souscriptions  sont  reçues  chez  l'auteur,  à  Perpignan. 

^*,t  La  sérénade  du  Page,  les  couplets  de  la  Main  et  de  la  Barbe,  ceux  de 
la  Toilette  et  de  la  Mèche  de  cheveux,  la  fameuse  chanson  des  Deux  hommes 
d'armes,  les  couplets  du  Thé,  de  la  Biche,  la  Tyrolienne  et  tous  les  au- 
tres morceaux  de  la  nouvelle  Geneviève  de  Brabant,  d'Offenbach,  le  grand 
succès  du  théâtre  des  Menus-Plaisirs,  viennent  de  paraître  au  Ménestrel, 
2  bis,  rue  Vivienne. — La  partition  est  sous  presse . 


1>L  l'xVKlS 


31 


***  Le  beau  Stahat  de  Mme  la  barorrne  de  Maistre  vient  de  paraître 
arrangé  pour  le  piano.— 11  ne  peut  mamiuer  d'avoir  comme  édition  le 
beau  succès  qu'il  a  remporté  comme  exécullon. 

^*,  M.  Debillemont,  chef  d'orcliestre  habile  et  compositeur  do  talent, 
dont  nous  avons  eu  souvent  occasion  de  parler,  se  propose  d'ouvrir  pro- 
chainement un  cours  spécial  et  simplifié  d'harmonie,  de  composition 
et  d'inslruircniation  pratique  deMiné  aux  personnes  qui  veulent  s'initier 
rapidement  à  l'art  d'écrire  correctement  la  musique. 

,f*^  La  noravellede  la  mort  subite  de  M.  Antoine  Prumier  a  vivement 
impressionné,  cette  semaine,  deux  branches  m  ttement  tranchées  de  la 
société  parisienne;  car,  si  l'homme  distingué  que  nous  regrettons  appar- 
tenait au  monde  musical  par  son  talent,  par  ses  travaux  et  sa  position, 
d'un  autre  côté  ses  premières  études  et  ses  aptitudes  spéciiiles  rattachaient 
sa  remarquable  personnalité  au  monde  scientifique.  M.  Prumier,  en  effet, 
aprèsavoir  faitd'excellentes  études  classiques  au  lycée  Bonaparte,  avait  été 
élève  du  Conservatoire  de  musique  en  1811,  de  l'Ecole  polytechnique  en 
1813  et  de  l'Ecole  normale,  qu'il  quitta  l'année  suivante  avec  le  diplôme 
de  licencié  ès-sciences.  Les  événements  de  celte  époque  l'ayant  délivré  de 
l'engagement  qu'il  avait  contracté  avec  l'Université,  il  fut  heureux  de 
'  reprendre  ses  études  de  prédilection  el  s'empre.'-sa  de  rentrer  au  Conser- 
vatoire, où  il  reçut  d'Eler  des  leçons  de  contrepoint.  Harpiste  à  l'orchestre 
des  Italiens,  puis  de  1  Opéra-Comique;  piofcsseur  de  harpe  en  rempla- 
cement de  Naderman  (183S)  au  Conservatoire,  où  sa  classe  remporta  plus 
de  quarante  distinctions,  chevalier  de  la  Légion  d'honneur  de  la  promo- 
tion de  18i5,  vice-président  pendant  dix-sept  années  consécutives  de 
l'Association  des  artistes  musiciens  à  laquelle  il  n'a  jamais  cessé  de  prê- 
ter un  concours  actif  et  efficace,  M.  Prumier  a  publié,  en  outre,  près  de 
cent  oeuvres  de  fantaisies,  rondeaux  et  thèmes  variés  pour  son  instru- 
ment. Il  a  été  foudroyé  par  la  rupture  d'un  anéviisme,  mardi  dernier, 
au  Conservatoire,  pendant  une  séance  d'examen  du  Comité  des  études, 
dont  il  était  membre.  Homme  de  bien,  artiste  d'un  mérite  incontesté, 
savant  d'une  intelligence  hors  ligne  et  d'une  vaste  portée,  Ant.  Prumier 
laissera  de  durables  souvenirs  dans  le  cœur  de  tous  ceux  qui  l'ont 
connu,  c'est-à-dire  estimé  et  aimé. 

^""^  Mardi,  les  derniers  devoirs  ont  été  rendus,  en  l'église  Bonne- 
Nouvelle,  à  M.  René  Margueritat,  éditeur  de  musique  fort  connu,  dont 
la  mort  inattendue  a  douloureusement  surpris  ses  amis. 

^*,^  A  Manchester  vient  de  mourir  un  homme  qui  avait  dévoué  sa 
vie  tout  entière  à  la  vulgarisation  de  la  mu.sique,  le  docteur  Mark.  lia 
publié  lui-même  le  nsultat  de  ses  travaux;  on  y  trouve  la  mention  de 
9,380  concerts  donnés  par  lui,  et  de  5,2j;0  conférences  qu'il  a  faites  de- 
vant 7,6i5,791  enfants  et  5,233,689  adultes.  11  a  fait  exécuter  l'hymne 
national  anglais  9,982  fois;  il  a  parcouru  296,690  milles  (95,363  lieues), 
et  a  dépensé  113,000  liv.  sterl.,  en  plus  de  23,000  prises  sur  sa  fortune 
personnelle.  Outre  son  collège  de  musique,  il  a  créé  plusieurs  conserva- 
toires et  organisé  un  grand  nombre  de  petits  corps  de  musique  qu'il 
appelait  Litite  mm  ou  les  petits  hommes  ;  enfin,  l'ir.slruction  musicale 
a  été  départie  d'après  son  système  à  plus  de  3,300  classes  tant  publiques 
que  particulières. 


ÉTRANGER 


^*^  Bruxelles.  —  Le  second  concert  du  Conservatoire  a  offert  un 
puissant  intérêt  par  la  variété  des  œuvres  symphoniques  qu'on  y  a  en- 
tendues. La  pièce  d'introduction  était  l'ouverture  de  lioméo  H  Juliette  de 
Steibelt,  une  très-belle  et  très-vigoureuse  page  instrumentale  que  la  gé- 
nération actuelle  ne  connaît  pas,  et  qui  n'a  pas  causé  moins  de  surprise 
que  de  plaisir  à  nos  amateurs,  étonnés  qu'on  fit  de  pareille  nuisi>|ue  il 
y  a  trois  quarts  de  siècle.  Vint  ensuite  la  première  symphonie  de  M.  Fé- 
tis,  exécutée  pour  la  seconde  fois,  après  un  intei'valle  de  cinq  ans,  et 
qui  a  produit  une  impression  plus  vive  encore  qu'originairement.  Par  la 
fraîcheur  des  idées,  cette  œuvre  semblerait  remonter  à  la  jsune-se  de 
l'auteur;  mais  à  la  science  qui  s'y  trouve,  à  la  richesse  des  combinai- 
sons qui  ne  peuvent  être  que  le  fruit  d'une  longue  expérience,  on  com- 
prend qu'elle  doit  appartenir  à  la  pleine  maturité  de  .sa  carrière.  Léton- 
nement  est  grand  lorsqu'on  sait  que  M.  Fétis  l'a  composée  à  l'âge  de 
soixante-dix-huit  ans.  Rien  de  plus  mélodique,  de  plus  frais,  de  plus 
nouveau,  de  plus  piquant  que  les  idées  qui  sont  d'une  abondance  singu- 
lière; rien  de  plus  intéressant,  de  plus  riche,  de  plus  varié  que  les  Ibrmes 
instrumentales  sous  lesquelles  ces  idées  sont  présentées  et  développées. 
Chaque  morceau  est  marqué  de  l'empreinte  d'une  véritable  originalité 
qui  frappe  dès  le  début  et  se  soutient  jusqu'au  bout.  Des  applaudisse- 
ments enthousiastes  ont  éclaté  après  chacune  des  quatre  parties  dont  se 
compose  cette  œuvre  remarquable,  et  l'auteur,  forcé  par  les  acclama- 
tions obstinées  de  l'auditoire,  a  dû  reparaître  à  la  fin.  L'exécution  a  été 
d'une  perfection  rare.  L'orchestre  du  Conservatoire  s'est  surpassé  pour 
rendre  hommage  au    maître.  La  troisième  page  symphonique  inscrite 


au  programme  de  celle  séance  était  l'ouverlurc  de  concert  de  Beethoven, 
celle  qu'il  composa  pour  répondre  aux  observations  di;  ses  amis  sur  ce 
qu'il  n'avait  fait  des  morceaux  de  ce  genre  que  dans  le  stylo  dramatique, 
et  dans  laquelle  il  se  rapprocha  do  la  manière  de  Haendel.  On  a  en- 
tendu, dans  celte  même  séance,  M.  Holmes,  le  virtuose  anglais,  qui  a 
exécuté  le  concerto  de  Mendelssohii,  un  andanie  de  si  composition  et 
une  gigue  de  Corelli,  instrumentée  par  lui.  Le  lendemain  du  concert, 
M.  Holmes  est  parti  pour  Sainl-Péter.sbourg. 

^*^  Stultqard.  —  La  reprise  de  l'Africaine  est  venue  donner  une  nou- 
velle vie  h  notre  théâtre.  Une  salle  comble  a  applaudi  avec  enthousia.s- 
mo  Sontheim,  aujourd'hui  le  meilieur  ténor  de  l'Allemagne,  Mme  Ellin- 
ger  (Sélika),  Schïittky  (Nélusko)  et  Mlle  Klettner  (Inès).  Ces  quatre  ar- 
tistes con.siituent  l'un  des  plus  beaux  en.>^embles  que  l'Africaine  ait 
jamais  rencontrés. 

^*,Schwerin. — On  vient  de  donner  pour  la  première  fois  la  charmante 
œuvre  de  Flotow,  Zildii,  qui  a  été  trcs-goùtée,  et  dont  l'exécution  n'a  rien 
laissé  à  désirer,  -  Le  quatuor  florentin  dirigé  par  Jean  Becker  s'est  fait 
entendre  ici  plusieurs  fois  avec  succès. 

,*^  Weimar.  —  Un  nouvel  opéra,  le  Héros  du  A'ord  fGustave  "Wasa),  de 
C.  Gœize,  attendu  depuis  longtemps  vient  d'être  représenté  et  a  répondu 
aux  espérances  du  puldic.  L'auteur  est  un  simple  choriste  du  théâtre, 
qui  s'est  déjà  fait  connaître  avantageusement  par  un  opéra  intitulé  les 
Corses. 

^*j,!,  Berlin.  —  Une  brillante  reprise  de  Fcrnand  Cortez  a  eu  lieu  à 
l'Opéra;  le  ténor  Niemann  s'y  est  particulièrement  distingué.— Mlle  ArtOt 
a  eu  de  nouveaux  triomphes  dans  Faust  et  les  Diamants  de  la  Couronne. 
—  La  Grande- Duchesse  a  formé  à  elle  seule  le  répertoire  de  toute  la  semaine 
dernière  au  théâtre  de  Friedrich-Wilhelrastadt. 

^*^  Leipzig.  —  Toute  la  première  partie  du  douzième  concert  du 
Gewandhaus,  le  9  janvier,  se  composait  d'œuvres  de  Moritz  Hauptmann, 
dont  nous  avons  annoncé  la  mort  récente  :  Saloe  Regina,  ouverture  de 
l'opéra  Malhilde,  et  trois  compositions  chorales  d'église.  Des  œuvres  du 
répertoire  classique  complétaient  le  programme.  — Im  Kyffhœuser,  :yçc,rsi- 
comique  el  romaniique  en  deux  actes  de  Mùhldorfer,  a  été  donné  le  4 
janvier  avec  un  complet  succès.  Le  sujet  est  une  histoire  villageoi.-^e  que 
le  compositeur  a  très-hetireusement  traitée,  en  se  renfermant  dans  une 
simphcilé  de  bon  goût.  —  On  pen.se  pouvoir  inaugurer  le  nouveau 
théâtre  d'Opéra  le  28  janvier. 

^*.,  Varsovie.  —  La  cantatrice  suédoise  Mlle  Hebbé  vient  de  débuter 
brillamment  aii  Théâtre  italien  dans  le  rôle  de  Valentine  des  Huguenots; 
elle  est  applaudie  et  rappelée  chaque  soir,  et  le  vice-régent  lui  a  fait  les 
plus  flatteurs  compliments.  Elle  doit  chanter  bientôt  le  rôle  de  Léonore 
du  Trouvère. 

**H.  Barcelone.  —  Guillaume  Tell  vient  d'être  représenté  pour  la  pre- 
mière fois  de  la  saison  el  d'une  manière  splendide.  Le  ténor  Steger, 
Mme  Rey-Balla,  et  le  baryton  Petit,  trois  artistes  de  talent  dont  l'éloge 
n'est  plus  à  faire,  se  sont  surpassés;  le  public  ne  se  lassait  pas  de  les 
acclamer.  —  Le  succès  de  Mme  Sinico,  à  son  début  dans  Lucia,  a  été 
très-grand;  les  journaux  barcelonais  sont  remplis  de  ses  louanges.  Outre 
le  Pardon  de  Pliiërmel  on  va  monter  également  FraDiavoloen  italien. 

,j*^,  Cadix.  —  Dans  Sémiramis,  les  sœurs  Marchisio  et  la  basse  Everardi 
ont  provoqué,  comme  partout  où  on  a  la  bonne  fortune  de  les  entendre, 
un  véritable  enthousiasme.  Avec  de  pareils  artistes  el  Emmy  Lagrua, 
notre  public  ne  pourra  se  plaindre  celte  année  d'avoir  été  mal  partagé. 

^*,  Rome.  —  Des  embarras  pécuniaires  ont  obligé  l'imprésario  Jaco- 
vacci  à  remettre  son  administration  entre  les  mains  de  la  municipalité, 
qui  gérera  probablement  les  alfaires  du  théâtre  jusqu'à  la  fin  de  la 
saison . 


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Air  [  C  '^''^'"  '^'^  Directeurs  de  théâtre  de  France  et  de  l'étranger 
»  1  ij.  sont  informés  que  la  musique  d'orchestre  de  Robii\son 
Crusoé,  est  à  la  disposition  de  ceux  qui  voudront  en  faire  la  demande 
aux  éditeurs  G.  Buandus  et  S.  Dufour,  103,  nie  de  Richelieu. 


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Llnt.  rriHliyHIOC  d'airs  d'opéras,  duos,  roman- 
ces, etc.,  etc.,  sans  accompagnement,  des  meilleurs  auteurs  anciens  et 
modernes, 

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De  l'opéra-comique  en  trois  actes 


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Paroles  italiennes,  imitées  d'IVANHOÈ,  de  Walter  Scott,  par  Marini, 
Musique  de 

OTTO    ]VI€OLAI 

^EDITION  NOUVELLE) 


Prix  net  :  1«  fr. 


H.    RO  SELLEN.  —   Fantaisie  de  salon  sur  il  Templario 9  fr. 


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Les  Larmes,  mélodie,  de  Mme  Adam-Boisgontier 2  50 

Au  temps  des  Roses,  six  rondes  enfantines,  de  J.-B.  Clément  : 
i.  Petit  mouton  blanc.  i.  Encore  une  chanson. 

2.  Malinette.  5.  Saint-Bon-Enfant. 

3.  Petit  bonhomme  Lonlà.      6.  Vive  la  Ronde! 

Les  six  rondes  réunies  en  album,  net  :  5  francs.  —  Chaque,    2  SO 

Musique  de  H.  de  la  Haulle. 

les  Etrenncs  du  cœur,  historiette  avec  chœurs  [ad  libitum),  de  *•*, 

dédiée  à  S.  A.  le  Prince-Impérial 3    » 

Musique  de  Clavier  père. 

L'Ogre,  ballade  enfantine  avec  chœurs  (ad  libitum),  de  Ch.  Grou; 

petite  partition,  net 1  SO 

Musique  de  F.  Jouffroy. 

La  Crèche  Sainte  -  Marie,  chanson  de  J.  de  Blainville,  vendue  au 

profit  de  l'Œuvre  des  crèches 2  SO 


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Musique  de  Ch.  Hubans. 

Le  Cantonnier,  chanson  d'Alexandre  Flan,  pour  baryton    ....  3  » 

Vire  l'eau  I  chanson  de  Degeorge,  pour  baryton 3  » 

A  chacun  sa  part  ch  soleil,  chanson  de  Cli.  Grou,  n°  i,  pour  ténor, 

n°  2,  pour  baryton 3  » 

Musique  de  L.-C.  Desormes. 

Luciole,  légende  d'Alexandre  Flan 2  50 

Le  Grand  Voyaye,  chanson  d'Alexandre  Flan 2  50 

Musique  de  H.  Cellot. 

On  vous  dira  qit'ça  n'est  pas  vrai  !  chanson  héroïque  d'Al.  Flan .    .     3     » 

Musique  de  A.  Coedès. 
Oh!  eh!  mon  chien  Picard!  chanson  rustique  d'A.  Bouvier.    ...     3     » 

pour  paraitre  incessamment 

(musique  de  a.  coédès  ) 
Roulez  les  dés.  mes  fils,  chan.sun  dramatique  d'Alexandre  Flan.    .     3     » 
Les  Deux  Hirondelles,  fabliau  de  (Jh.  Grou 3     » 


Maison  COLOMBIER,  6,  rue  Vivienne,  à  Paris. 

IN^OUVELLES      PUBLIGA.TIONS 


Pour  le  piano 


J.-L.  Battmann.  op.  27S.  Les  Porcherons,  petite  fantaisie 

A.   Croisez.    Op.    146.  Notre- Dame-des- Anges,  prière  de 

jeunes  filles 

—  Op.  147.  Les  Faux  Monnayeurs,  caprice 

J.  Leybach.  Op.  107.  La  Cenerentola,  fantaisie  brillante. 

—  Op.  108.  Tristesse,  élégie 

A.  Le  Garpentier.  Airs  et  Rondes  populaires ,  arrangés 

à  quatre  mains,  en  3  livres,  chaque 

L.  Schiiffniacher.  Op.  72.  Slon  pays,  transcription  variée 

Danse 

Gaston  de  Lille.  En  avant  !  polka 

—  Biarritz,  polka-mazurka 

—  Sous  la  Feuillée,  valse 

Ad.  Lacout.  Le  Petit  Mignon,  quadrille  très-facile 

—  Babij,  polka  très-facile 

Strauss.  Le  dernier  des  Romains,  quadrille 


S     » 
S    1) 


7  SO 

6  » 

7  50 


S     » 

5  » 

6  » 
4  50 
2  50 
4  50 


Chant 

LE    DERNIER    ROMAIN, 

Tragédie  lyrique  et  comique,  paroles  et  musique  de 

Eugène  MONIOT. 

Partition  piano   et  chant,  et  libretto,  prix  net  :  5  francs. 

D.  Balleyguier.  Douce  chanson 3  » 

G.  Douay.  C'est  plus  fort  que  moi,  chansonnette 3  » 

—  Un  Bourgeois  pour  tout  faire,  chansonnette 3  » 

J.  Javelot.  Mon  Oscar,  chansonnette 3  » 

P.  Blaquières  et  J.  Moinaux.  Gratteloup  au  camp  de 

Châlons,  chansonnette 3  » 

J.  Moinaux.  Explication  du  fusil  Chassepot,  chansonnette  3  » 

l>uos  pour  ténor  et  baryton 

Léo  de  Libes.  Le  Marchand  d'Oublis 6    » 

Ch.  Lecocq.  Les  Tonneliers 4    » 

—  Le  même  à  une  voix 2  50 


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REVUE 


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ÉtruDger 3i  ri       id 

Le  Journal  paraît  le  Dimanche, 


TTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


Nos  abonnés  reçoivent,  avec  le  numéro  d'anjonrd'linl, 
la  table  analytique  des  matières  de  Tannée  ISGï. 


SOMMAIRE.  —  Théâtre  impérial  Italien:  il  Templario,  opéra- séria  en  trois 
actes,  inusiqae  d'Otto  Nicolaï,  par  Slaariue  Ciray.  —  Théâtre  de  l'Athénée  : 
l'Amour  et  son  carquois,  opéra-bouffe  en  deux  actes,  de  M.  Marquet,  musique 
de  M.  Ch.  Lecocq;  C'est  pour  ce  soir,  bouffonnerie  de  M.  W.  Busnach.  — 
Revue  des  théâtres,  par  H.  A.  D.  Saiiil-Ytes.  —  Concerts  et  audi- 
tions musicales  de  la  semaine.  —  Nouvelles  des  théâtres  lyriques.  —  Nouvelles 
diverses.  —  Annonces. 


THÉÂTRE  IMPÉRIAL  ITALIEN. 

IL  TEMPLARIO, 

Opéra-seria  en  trois  actes  de  J.-M.  Marini,  musique  d'Orro  Nicolaï. 

(Pjeniière  représentation  le  28  janvier  1868.) 

Depuis  près  de  trente  ans,  la  partition  à' Il  Templario  est  célèbre 
en  Allemagne  et  en  Italie;  depuis  longtemps  déjà  nos  dilettantes 
des  départements  ont  été  mis  à  même  d'apprécier  sa  valeur,  puis- 
qu'une traduction  française  de  cet  ouvrage  intéressant  a  paru  sur 
plusieurs  des  scènes  de  nos  grandes  villes,  Lyon,  Bordeau.K,  Tou- 
louse, etc.,  et  cependant  le  public  parisien  n'en  connaissait  jus- 
qu'ici que  l'ouverture,  exécutée  seulement  l'année  dernière  aux 
concerts  des  Champs-Elysées.  Toutes  les  administrations  qui  se 
sont  succédé  au  théâtre  Ventadour  depuis  1839,  époque  de  la  créa- 
tion A' Il  Templario  à  Turin,  ont  négligé  de  nous  faire  '•  4* 
cette  belle  production,  et  si  le  théâtre  Lyrique  ne  s'étt» 
il  y  a  deux  ans,  à  monter  les  Joyeuses  Commères  de  Windsor  (ex- 
périence qui  du  reste  n'a  pas  été  des  plus  heureuses),  Nicolaï  ne 
serait  absolument  connu  chez  nous  que  de  nom.  On  di  '  onc 
savoir  gré  à  M.  Bagier  de  la  tentative  qu'il  vient  de  fai>' 
comme  tout  portait  à  le  croire,  a  été  couronnée  d'un      ' , 

Mais,  avant  de  parler  de  l'œuvre,  disons  quelques  .•  *'      :,  son 
auteur. 

Otto    Nicolaï,   qui  mourut  avant  d'avoir  accompli  sa  trente-neu- 


vième année,  était  né  en  Prusse,  à  Kœnigsberg,  le  10  juin  1810, 
d'un  père  musicien  qui  l'éleva  assez  rudement,  et  voulut  lui  faire 
embrasser  la  même  carrière.  Elève  d'abord  de  Bernard  Klein, 
un  artiste  distingué,  le  jeune  homme  fit  des  progrès  très-rapides, 
devint  un  bon  pianiste,  et  s'adonna  à  l'étude  de  la  composition.  Il 
n'était  pas  riche,  et  devait  travailler  pour  vivre  en  même  temps 
que  pour  parvenir.  Il  s'en  fut  à  Berlin,  oti  le  concours  et  les 
efforts  de  quelques  amis  contribuèrent  à  faciliter  les  commence- 
ments de  sa  carrière,  et  à  lui  donner  la  possibilité  de  mener  ses 
études  à  leur  terme. 

M.  de  Bunsen,  alors  ministre  de  Prusse  auprès  de  la  cour  de 
Rome,  étant  venu  passer  un  congé  à  Berlin,  remarqua  le  talent 
solide  et  les  qualités  réelles  du  jeune  compositeur,  qu'il  avait 
eu  l'occasion  d'entendre  dans  différents  salons.  11  s'intéressa  à  lui, 
et  lui  proposa  de  l'emmener  à  Rome,  où  il  le  chargerait  des  fonc- 
tions d'organiste  de  la  chapelle  prussienne  en  cette  ville.  Il  faut 
dire  que  M.  de  Bunsen  songeait  à  une  réforme  du  chant  dans 
l'église  protestante,  et  qu'il  comptait,  à  cet  effet,  tirer  parti  des 
talents  de  son  jeune  protégé.  Celui-ci,  que  la  perspective  d'un 
voyage  au-delà  des  Alpes  tentait  comme  elle  doit  tenter  tout  véri- 
table artiste,  accepta  les  propositions  qui  lui  étaient  faites,  et  partit 
pour  Rome  dans  le  cours  du  mois  de  décembre  1833.  Peu  de 
temps  après,  il  prenait  possession  de  son  emploi,  auquel  était 
attachée  une  rémunération  mensuelle  de  15  sciidi,  environ  7S 
francs.  Pour  un  réformateur,  il  faut  avouer  que  M.  de  Bunsen 
manquait  d'ampleur  dans  les  vues. 

Néanmoins,  Nicolaï  passa  à  Rome  les  années  1834,  183S  et  1836, 
et  l'on  peut  dire  qu'il  y  mit  le  temps  à  profit.  Remplissant  avec 
une  scrupuleuse  exactitude  les  devoirs  de  sa  charge,  s'astreignant 
à  donner  des  leçons  pour  augmenter  les  maigres  ressources  que 
celle-ci  lui  procurait,  il  trouvait  encore  le  moyen  de  travailler 
pour  lui-même,  et  s'était  mis  sous  la  direction  du  célèbre  abbé 
Baini,  l'éloquent  et  consciencieux  biographe  de  Palestrina;  il  fit 
avec  lui  un  nouveau  cours  complet  d'études,  nourrissant  son  es- 
prit des  grandes  œuvres  des  anciens  maîtres  de  l'école  romaine, 
et  particulièrement  de  Palestrina  lui-môme. 

Ces  recherches  dans  le  domaine  de  la  musique  scolastique  et 
sacrée  n'amoindrissaient  cependant  pas  ses  aspirations  vers  la  mu- 
sique dramatique.  Alors  qu'il  était  encore  enfant,  à  Berlin,  il  avait 


34 


KEVLE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


entendu,  étudié  lés  opéras  alors  en  vogue  de  Rossini,  de  Mayr,  de 
Generali,  de  Bellini  et  de  bien  d'autres  compositeurs  italiens.  A 
Rome,  où  il  se  mit  à  fréquenter  les  théâtres,  son  goût  pour  ce 
genre  de  composition  ne  fit  que  se  développer  davantage,  et  il  ré- 
solut de  travailler  lui-même  en  vue  du  théâtre. 

Bientôt  il  abandonna  Rome,  se  mit  à  parcourir  l'Italie,  visita 
successivement  Naples,  Florence,  Bologne,  où  il  coimut  Rossini, 
puis  s'en  fut  à  Milan,  que  l'influence  du  théâtre  de  la  Scala,  alors 
possesseur  d'une  troupe  admirable,  rendait  la  première  ville  musi- 
cale de  l'Italie.  La  Scala  offrait,  en  eft'et,  à  cette  époque  une  réu- 
nion d'artistes  incomparables,  la  Malibran,  la  Schoberlecliner,  la 
Tadolini,  Mariotta  Brambilla,  Poggi,  Cartagenova,  Scalese,  etc.v 
et  c'éteît  sur  celte  scène  illustre  qu'apparaissaient  les  plus  gran- 
des parmi  les  œuvres  contemporaines  :  Gemma  di  Vergy,  Lucrezih 
Bor'^ihjde  Donizetti;  Norma,  de  Bellini;  Chiara  diUosembérg,  "Uh' 
avvenlura  di  Scaramuccia,  de  Luigi  Ricci  ;  Catcrina  di  Guisa,  de 
Carlo  Coccia;  Il  Giuramento,  de  Mercadante... 

Nicolaï  se  fixa  à  Milan,  afin  de  pouvoir  prendre  sa  part  du 
grand  mouvement  artistique  qui  animait  cette  ville  intelligente,  et 
c'est  là  qu'il  écrivit  tous  ses  opéi'as  italiens,  s'absentant  seulement 
pour  aller  veiller  à  leurs  études  dans  les  villes  où  ils  devaient  être 
représentés.  Il  donna  d'abord  à  Trieste  (1837)  Enrico  II,  dont  le 
premier  titre  était  Eleonora  di  Guienna,  puis  Uosamonda  d'Inghil- 
terra  ;  peu  après  (décembre  1839),  il  produisait  au  Théâtre  royal 
de  Turin  le  fameu.x  Templario,  dont  le  succès  fut  colossal,  et  qui 
fit  bientôt  le  tour  de  l'Italie  et  de  l'Allemagne  ;  il  donnait  ensuite 
au  Carlo-Felice,  de  Gênes,  Odoardo  e  Giklippe;  et  enfin,  en  1841, 
à  la  Scala,  qui  s'était  emparée  déjà  du  Templario,  son  dernier 
opéra  italien,  //  Proscriito,  lequel,  il  faut  le  dire,  fit  un  fiasco  so- 
lennel. 

Mais  le  succès  de  ses  œuvres  antérieures,  surtout  celui  du  Tem- 
plario, avait  appelé  sur  lui  l'attention  de  ses  compatriotes.  Bientôt 
Nicolaï  fut  mandé  à  Vienne,  où  on  lui  offrait  la  place  de  chef 
d'orchestre  du  théâtre  de  la  Cour,  sur  lequel  les  représentations 
de  l'Opéra  allemand  alternent  avec  celles  de  l'Opéra  italien.  11 
accepta,  entra  en  fonctions  dans  le  cours  de  1842,  et  ne  quitta  ce  poste 
important  qu'en  1847,  époque  à  laquelle  il  fut  appelé  à  diriger  l'Opéra 
royal  de  Berlin.  C'est  dans  cette  dernière  ville  qu'il  écrivit  et  fit 
représenter,  le  9  mars  1849,  son  unique  opéra  allemand,  les 
Joyeuses  Commères  de  Windsor,  dont  le  succès  rappela  les  propor- 
tions de  celui  du  Templario,  bien  que  les  deux  œu\res  fussent  de 
caractère  absolument  opposé.  Malheureusement,  l'artiste  ne  survé- 
cut pas  à  ce  nouveau  triomphe  :  il  mourut  subitement,  à  la  fleur 
de  l'âge,  le  11  mai  18i9,  deux  mois  après  la  représentation  de  son 
dernier  ouvrage. 

Parlons  maintenant  du  Templario. 

Donné  à  Turin,  comme  nous  l'avons  dit,  à  la  fin  de  1839,  cet 
opéra,  qui  était  chanté  alors  par  la  Marini-Raineri  (était-ce  la 
femme  de  Marini,  l'auteur  du  livret?),  le  ténor  Salvi  et  le  baryton 
Ferlotli,  dut  à  son  éclatant]  succès  d'être  représenté  dès  le  mois 
d'août  suivant  à  la  Scala,  où  il  ne  fut  pas  moins  bien  accueilli. 
Bientôt  il  parut  au  San-Carlo,  de  Naples,  puis  au  théâtre  Italien 
de  Vienne,  mais  cette  fois  avec  des  changements  nécessités  par  la 
voix  du  principal  interprète:  le  rôle  de  Rebecca,  qui  avait  été 
créé  par  un  contralto,  la  Marini-Raineri,  passait  aux  mains  d'un 
soprano,  la  Tadolini.  Des  remaniements  étaient  donc  indispensa- 
bles et  Nicolaï  les  opéra  lui-môme.  En  1841,  le  Templario  retrouve 
son  succès  à  Barcelone  et  à  Malaga;  en  1842,  il  est  chanté  à 
Pesth,  puis  à  Grenade  (1843),  à  Berlin  (1844),  à  Saint-Pétersbourg 
(1846).  Enfin,  il  va  charmer  les  échos  du  Bosphore,  paraît  à  Cons- 
tantinople,  puis  traverse  les  mers  pour  se  produire  à  New- York. 
Depuis    lors,  à  l'exception  de  Paris  (exception  qui  n'existe  plus 


aujourd'hui),  il  n'est  pas  une  ville  importante  à  laquelle  il  n'ait 
été  donné  d'entendre  cette  remarquable  partition. 

Le  sujet,  tout  le  monde  le  sait,  est  tiré  du  magnifique  roman 
de  Walter-Scott,  Ivanhoé,  l'un  des  récits  les  plus  émouvants  et  les 
plus  rapidement  menés  (chose  rare  !)  du  grand  écrivain.  C'est 
l'histoire.,  connue  de  tous,  de  la  passion  de  Briand  de  Boisguil- 
bert,  le  templier,  un  chevalier  indigne,  pour  une  juive,  la  jeune 
et  belle  Rebecca.  La  pièce  reproduit  en  raccourci  les  principales 
situations  du  roman;  elle  nous  fait  assister  aux  poursuites  odieuses 
de  Briand,  qui  ne  recule  pas  devant  le  crime  pour  s'emparer  de 
la  jeune  fille;  elle  nous  montre  la  haine  et  le  mépris  qu'il  inspire 
à  celle-ci;  l'amour  qu'elle  éprouve  au  contraire  pour  le  chevalier 
Vilfredo  (Ivanhoé);  la  générosité  de  ce  dernier,  qui  se  dévoue  pour 
la  sauver,  et  enfin  elle  conserve,  en  le  précipitant,  selon  les  be- 
soins de  la  scène  ,  le  dénoûment  touchant  et  pathéti(jue  de 
l'œuvre. 

Le  sujet  était  assurément  digne  d'inspirer  un  musicien  doué  de 
qualités  nombreuses  et  variées,  comme  l'était  Nicolaï.  Aussi  la 
partition  est-elle  complètement  réussie,  et  justifie-t-elle  les  sym- 
pathies qui  n'ont  cessé  de  l'entourer  depuis  sa  naissance. 

L'ouverture,  célèbre  dans  toute  l'Allemagne,  où  elle  fait  partie 
de  tous  les  programmes  de  concerts,  débute,  après  quelques  me- 
sures d'introduction,  par  la  marche  funèbre  du  troisième  acte, 
marche  qui  se  fait  entendre  lors  des  apprêts  du  supplice,  auquel 
Rebecca  échappe  comme  par  miracle.  Après  cette  marche,  vient 
un  allegro  con  fuoco,  d'une  allure  sombre  et  tourmentée  dont  on 
retrouve  plus  tard  des  fragments  dans  la  scène  qui  précède  la 
cavatine  dramati([ue  de  Rebecca.  (^oupé  en  deux  parties  par  un 
andanie  d'un  grand  caractère,  cet  allegro  est  suivi  d'un  motif  ins- 
trumental moins  rapide,  où  la  tonalité  mineure  fait  place  â  la 
tonalité  majeure,  pour  amener  une  péroraison  chaude  et  colorée. 
Cette  ouverture  est  une  page  d'un  ordre  très-élevé,  et  l'on  se  de- 
mande pourquoi  M.  le  directeur  du  chant  du  théâtre  Italien  vou- 
lait la  remplacer  par  celle  des  Joyeuses  Commères  de  Windsor, 
dont  le  moindre  défaut  eût  été  de  former  une  disparate  complète 
avec  l'ensemble  si  dramatique  de  l'ouvrage. 

Le  chœur  d'introduction  est  franc  et  bien  venu  ;  quant  à  la  ca- 
vatine de  Vilfredo,  elle  est  rendue  méconnaissable  par  d'énormes 
coupures,  et  on  a  supprimé  entièrement  la  scène  qui  suit,  dans 
laquelle  pourtant  on  trouve  une  belle  cantilène  chantée  par  Briand. 
Le  chœur  féminin,  Del  cielo  hriianno,  est  adorable  et  d'un  excel- 
lent effet,  surtout  dans  sa  seconde  partie,  où  le  contre-point  des 
violons  le  rend  plus  charmant  encore.  La  romance  de  Rovena,  Il 
cor  gli  affanni...,  est  bien  jolie  aussi,  mais  Mlle  Simoni  l'a  défi- 
gurée par  des  changements  intempestifs  et  par  la  suppression  au 
moins  inutile  de  toute  la  période  finale.  La  cavatine  de  Rebecca, 
très-di'amatiqne  et  d'un  grand  sentiment,  est  encore  relevée  par 
une  instrumentation  très-colorée  et  d'une  l'arc  élégance.  Enfin,  le 
finale  du  premier  acte  est  une  page  splendide  et  de  grand  effet, 
dont  le  public  a  redemandé  ù  grands  cris  l'épisode  principal  : 
Chiuso  nel  sen  di  fremere,  épisode  d'une  grandeur  d'accent  et  d'une 
ampleur  d'inspiration  qui  touche  au  sublime,  surtout  lorsque  le 
motif,  entonné  d'abord  par  les  voix  seules,  est  repris  ensuite  avec 
l'adjonction  de  toutes  les  forces  instrumentales,  au  milieu  desquelles 
se  fait  particulièrement  entendre  la  note  persistante  et  comme  fa- 
tale des  trompettes. 

Le  second  acte  s'ouvre  par  un  duo  très-vif,  très-chaud,  très- 
coloré  entre  Briand  et  Rebecca,  duo  conçu  dans  la  pure  forme 
italienne  et  qui  rappelle  les  meilleurs  moments  de  Donizjtti.  Le 
chœur  des  templiers,  qui  vient  ensuite,  est  large  et  grandiose. 
Après  un  air  de  Briand,  dont  la  coupe  est  franche  et  l'allure  heu- 
reuse, vient  un  duo  entre  Cedrico  et  Vilfredo,    qui   se  transforme 


DE  PARIS. 


35 


en  ti'io  par  l'arrivée  de  Rovcna  ;  c'est  là  un  morceau  dramatique 
très-scéiiiquc,  liicii  campé  et  d'une  facture  trî'S-serrée. 

Nous  retrouvons  au  roramencement  du  troisième  acte  le  chœur 
qui  vient  d'être  cité,  et  qui  est  bientôt  suivi  delà  marclie  funèbre 
annonçant  l'arrivée  de  Rebecca  conduite  au  supplice;  cette  mar- 
che est  caractéristique  et  d'une  couleur  sombre  bien  appropriée  à 
la  situation.  On  a  coupé  à  la  suite  un  morceau  d'ensemble  très- 
important,  et  dont  la  lecture  sur  la  partition  m'a  fait  regretter 
vivement  l'absence.  Quant  à  la  prière  chantée  par  Rebecca  pour 
invoquer  le  secours  du  ciel  en  faveur  du  chevalier  qui,  pour  lui 
sauver  la  vie,  se  bat  contre  le  traître  Briand,  c'est  une  large  et 
belle  inspiration,  pleine  de  grandeur,  d'onction  et  de  poésie;  l'effet 
produit  sur  le  public  par  celte  page  émouvante  et  émue  a  été 
très-grand,  et  Mlle  Krauss,  qui  l'avait  nuancée  avec  un  charme 
rjrc,  a  dû  la  dire  une  seconde  fois..  Le.  finale  n'a  qu'une  impor- 
tance secondaire,  et  peut-être  est-il  un  peu  trop  écourté. 

En  résumé,  si  la  partition  du  Templario  n'est  point  l'œuvre  d'un 
homme  de  génie,  elle  est  du  moins  celle  d'un  artiste  supérieur, 
très-versé  dans  la  connaissance  pratique  de  son  art,  doué  d'un 
juste  et  vrai  sentiment  dramatique,  et  souvent  inspiré.  Si  la  forme 
n'est  pas  toujours  originale ,  elle  est  toujours  très-soignée  ;  l'idée 
est  abondante,  et  l'harmonie  qui  l'accompagne  est  généralement 
fort  distinguée.  Nous  ne  devons  pas  oublier  d'ailleurs  que  le  Tem- 
plario a  été  écrit  en  1839,  en  pleine  période  donizettienno,  que 
l'auteur  devait  être  sous  l'impression  des  grandes  œuvres  produites 
par  le  maître  qui  a  écrit  la  Lucia  et  Lucrezia  Borgia,  et  que  de- 
puis lors  des  formes'  qui  pouvaient  passer  pour  neuves  ont  eu  le 
temps  de  se  mettre  en  cours.  Il  est  un  point,  toutefois,  sur  lequel 
on  ne  saurait  trop  insister  :  c'est  l'intérêt,  l'élégance,  la  richesse  et 
la  couleur  que  Nicolaï  a  su  donner  à  son  instrumentation.  Son 
orchestre  est  soigné  d'un  bout  à  l'autre  et  souvent  traité  de  main 
de  maître;  et  cela  sans  effort  apparent  et  sans  exagération  de  so- 
norité. 

On  ne  peut  donc  que  louer  M.  Bagier  d'avoir  songé  à  nous 
offrir  une  œuvre  absolument  inconnue  à  Paris,  et  de  nous  avoir 
mis  à  même  d'apprécier  le  talent  très-remarquable  d'un  compo- 
siteur dont  la  réputation  est  à  juste  titre  considérable  en  Allema- 
gne et  en  Italie.  Nous  regrettons  seulement  que  des  coupures  fâ- 
cheuses et  souvent  peu  logiques  aient  été  pratiquées  sans  scrupule 
dans  la  partition.  Que  l'on  supprime  un  ou  plusieurs  morceaux 
entiers,  cela  se  comprend  à  la  rigueur,  par  suite  de  telle  ou  telle 
difficulté  d'exécution.  Mais  mutiler  ces  morceaux,  leur  ôter  vingt 
mesures  par-ci,  quarante  mesures  par-là,  écourter  les  modulations, 
changer  les  cadences,  enlever  par  conséquent  à  ces  morceaux  le 
plan  et  la  forme  logiques  dans  lesquels  l'auteur  les  avait  conçus, 
voilà  ce  dont  on  eût  dii  s'abstenir,  et  ce  qui  eût  pu,  avec  une  œuvre 
moins  solide  et  moins  bien  venue,  en  altérer  considérablement 
l'effet  sur  le  public  II  n'en  a  rien  été,  fort  heureusement.  Nous 
nous  bornerons  donc  à  constater  le  fait,  sans  plus  insister. 

L'interprétation  du  Templario  a  été  très-satisfaisante.  11  faut  placer 
en  première  ligne  Mme  Krauss,  qui,  pathétique,  touchante  et  poé- 
tique, a  joué  le  rôle  de  Rebecca  en  grande  comédienne,  comme 
elle  l'a  chanté  en  grande  virtuose  qu'elle  est,  La  nature  de  son 
talent  souverainement  dramatique  convenait  d'ailleurs  on  ne  peut 
mieux  au  personnage.  Après  s'être  montrée  très-brillante  dans  la 
cavatine  du  premier  acte,  elle  a  eu  de  superbes  élans  de  fureur  et 
de  hjine  dans  son  duo  avec  Briand  ;  elle  a  dit  la  prière  avec  une 
très-grande  largeur  de  style,  enfin  elle  s'est  montrée  très-passionnée 
dans  toutes  les  parties  importantes  de  ce  rôle  lourd  et  difficile.  A 
elle  seule,  elle  aurait  assuré  le  succès  de  l'ouvrage. 

M.  Stellcr,  lui  aussi,  a  droit  à  de  grands  éloges.  Il  a  donné  au 
personnage  de  Briand  de  Boisguilbert  l'allui-e  farouche  et  sombre 


(ju'il    comporte ,  et  sa  belle  voix  de  baryton,  si    franche,  si  bien 
timhi'ée,  si  bien  conduite,  a  impressioimé  profondément. 

Bf.  Nicolini  a  vu  malheureusement  les  coupures  s'attaquer  prin- 
cipalement à  son  rôle  (Vilfredo);  comme,  pourtant,  il  était  difli- 
cilc  de  le  supprimer  entièrement,  les  occasions  ne  lui  ont  pas  man- 
qué de  déployer  les  qualités  de  sa  voix  fraîche  et  sympathique 
et  de  son  jeu  distingué. 

Enfin,  M.  Agnesi,  dans  le  personnage  de  Cedrico,  et  Mlle  Simon^ 
dans  celui  de  Rovena  ,  complètent  un  ensemble  qui ,  nous  le 
répétons,   est  aussi  satisfaisant  que  possible. 

Au  surplus,  les  rappels  et  les  applaudissements  n'ont  pas  man- 
qué, le  soir  de  la  première  représentation  et  depuis  lors,  à  ces 
excellents  artistes  qui  assurent  pour  long-temps,  nous  le  croyons 
fermement,  le  succès  A'U  Templario  en  France. 

Maufiice  GRAY. 


THEATRE  DE  L'ATHENEE. 

L'Amour  et  son  carquois,  opéra-bouffe  en  deux  actes,  de 
M.  Marquet  ,  musique  de  M.  Cir.  Lecocq.  —  Reprise  de  C'est 
pour  ce  soir,  bouffonnerie  de  M.  W.  Busnach. 

(Premières    représentations  le  30  janvier  1868.) 

Qui  ne  connaît  ce  fameux  distique  de  Voltaire,  à  propos  de 
l'Amour  : 

Qui  que' tu  sois,  voilà  ton  maître; 
Il  l'est,  le  fut  ou  le  doit  être. 

C'est,  en  quelque  sorte,  l'épigraphe  de  la  pièce  de  M.  Marquet, 
dont  la  donnée  fantaisiste  ne  manque  pas  d'une  certaine  ingé- 
niosité. 

Cupidon  est  un  enfant  fort  mal  élevé  qui  compromet  sans  cesse 
la  gravité  de  l'aréopage  céleste,  et  qui  a  besoin  d'être  remis  sous 
la  férule  pour  apprendre  le  respect  dû  aux  divinités  de  l'Olympe. 
Vénus,  sa  mère,  le  prend  par  la  main  et  le  conduit  chez  un  péda- 
gogue de  l'île  de  Crète,  où  elle  le  laisse,  en  lui  imposant,  pour 
condition  de  son  retour  dans  l'Empyrée,  l'obligation  de  conserver 
précieusement  son  carquois  et  ses  flèches. 

Mais  le  bonhomme  Chrysidès  tient  à  la  fois  école  de  garçons  et 
de  filles;  les  sexes  y  sont  un  peu  mêlés,  et,  dans  ce  tohu-bohu 
anacréontique,  Cupidon-  n'est  que  trop  porté  à  continuer  les  esca- 
pades qui  l'ont  fait  exiler  du  ciel.  Il  jette  principalement  son  dé- 
volu sur  Mlle  Thisbé,  la  gentille  nièce  de  Chrysidès,  que  le  vieux 
barbon  a  l'intention  de  garder  pour  lui,  en  dépit  de  sa  répulsion. 
La  prudence  n'est  pas  une  des  vertus  de  l'amour;  en  courtisant 
Thisbé,  Cupidon  oublie  son  carquois  qui  tombe  entre  les  mains 
de  Chrysidès.  Celui-ci  saisit  une  flèche  pour  en  percer  le  cœur  de 
Thisbé,  mais  le  trait  va  s'enfoncer  dans  la  poitrine  de  son  valet 
Laudanum,  tandis  que  toutes  ses  écolières  prennent  la  clef  des 
champs,  en  compagnie  de  Cupidon  et  de  Zéphire  qui  est  venu  le 
rejoindre. 

La  rnéprise  de  Chrysidès  à  l'endroit  de  Laudanum  n'a  pas  eu 
de  suites,  par  la  raison  que  le  pédagogue,  possesseur  des  flèches 
de  l'Amour,  s'est  mis  à  les  distribuer  à  tort  et  à  travers,  si  bien 
qu'il  en  est  devenu  complètement  idiot.  Sui,vi  de  son  valet  Lau- 
danum, il  est  allé  fonder  à  Athènes  un  restaurant  connu  sous  le 
nom  du  Moulin  rouge;  mais  là,  son  état  de  crétinisme  le  rend 
moins  apte  à  commander  qu'à  obéir.  Laudanum  veut  profiter  de 
l'ascendant  qu'il  a  sur  lui  pour  savoir  où  il  a  caché  le  carquois  de 
l'Amour,  mais  c'est  en  vain,  Chrysidès  a  perdu  la  mémoire  !  Or,  le 
Moulin  rouge  est  le  rendez-vous  de  toutes  les  anciennes  écolières 
de  l'île  de  Crète,  métamorphosées  en  hétaïres,  et  le  hasard  y  amène 
Cupidon  qui,  après  la  perte  de  ses  attributs,  s'est  vu  assaillir  par 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


toutes  les  misères  de  l'humanité,  et  s'est  mis  à  courir  les  aven- 
tures avec  Thisbé  et  Zéphire.  De  concert  avec  Laudanum,  toute 
cette  volée  d'oisillons  échappés  de  leur  cage  s'empare  de  Chrysi- 
dès,  et,  grâce  à  de  nombreuses  libations  bachiques,  on  lui  arrache 
son  secret.  Les  flèches  sont  cachées  dans  les  ailes  du  moulin 
rouge,  que  Zéphire  met  en  mouvement  par  le  pouvoir  de  son 
souffle;  Cupidon  rentre  en  possession  de  son  carquois,  et  il  peut 
aller  reprendre  sa  place  à  la  table  des  dieux.  Emmène-t-il  Thisbé? 
C'est  ce  que  la  légende  de  M.  Marquet  ne  nous  dit  pas, 

Cet  opéra-bouffe,  agréablement  traité,  ofTre  d'excellentes  situa- 
tions musicales,  qui  ont  inspiré  à  M.  Ch.  Lecocq  de  gracieux  et 
piquants  motifs,  déduits  avec  art,  orchestrés  avec  délicatesse.  Nous 
citerons,  entre  autres  choses,  au  premier  acte,  un  air  de  Cupidon, 
son  duo  avec  Thisbé,  où  l'on  remarque  une  phrase  des  plus  mé- 
lodi(iut's,  un  finale  entraînant,  et,  au  deuxième  acte,  la  complainte 
du  Voyage  d'Anacharsis,  chantée  en  trio;  les  couplets  de  Thisbé  ; 
Est-ce  à  moi  de  vous  apprendre^  qui  sont  charmants,  et  l'air  ba- 
chique sur  lequel  on  grise  Chrysidés. 

L'interprétation  est,  en  général,  fort  satisfaisante.  C'est  Désiré 
qui  joue  Chrysidés,  et  Léonce  le  valet  Laudanum  ;  ils  y  sont  tous 
deux  d'un  comique  épatant.  Mlle  frma  Marié  s'acquitte  à  merveille 
du  joli  personnage  de  Cupidon;  Mlle  Lovato  et  Mlle  Lentz  prêtent 
une  physionomie  séduisante  à  ceux  de  Thisbé  et  de  Zéphire. 

La  mise  en  scène  est  fort  soignée  ;  l'orchestre  de  M.  Bernardin 
marche  très-bien  ;  mais,  il  faut  en  convenir,  on  est  un  peu  rebattu 
de  cette  couleur  grecque  et  romaine,  et  nous  dirons  au  lecteur, 
avec  ce  médecin  du  siècle  dernier  :  «  Hâtez-vous  d'aller  prendre 
de  ce  médicament,  pendant  qu'il  guérit  encore.  » 

La  reprise  de  :  C'est  pour  ce  soir,  bouffonnerie  faite  pour  servir 
de  cadre  aux  chansons  de  Thérésa,  à  l'ancien  théâtre  des  Bouffes- 
Parisiens,  a  été  accueillie  avec  plaisir;  Thérésa  y  est  remplacée  par 
une  demoiselle  Moya,  qui  y  chante  des  couplets  d'Yradier,  Juanita, 
en  costume  d'Andalouse;  ce  qui  n'empêche  pas  Léonce  et  Désiré 
d'avoir  tous  les  honneurs  de  cette  facétie  burlesque. 

D. 


REVUE  DES  THÉÂTRES. 

Théâtre-Français  :  Paul  Forestier,  comédie  en  quatre  actes  et  en 
vers  de  M.  Emile  Augier. 

Nous  ne  voulons  pas  attendre  notre  échéance  ordinaire  de  quin- 
zaine pour  solder  le  compte  de  M.  Emile  Augier,  dont  la  comédie 
nouvelle  est  un  de  ces  événements  littéraires  qui  font  époque  et 
qui  excitent  au  plus  haut  degré  l'intéi'êt  du  public.  Il  est  certain 
que  la  portée  de  cette  œuvre  hardie  sera  ardemment  débattue  et 
diversement  jugée  ;  mais  il  n'y  aura  qu'une  voix  sur  le  transcen- 
dant mérite  du  poëte.  Paul  Forestier  restera  comme  un  des  plus 
beaux  titres  de  M.  Emile  Augier  à  sa  couronne  académique. 

Quant  à  la  thèse  soulevée  par  cette  pièce,  nous  croyons,  pour 
notre  paît,  qu'on  ne  peut  l'accepter  sans  réserves.  Tous  les  pro- 
blèmes sociaux  sont  du  domaine  de  l'auteur  dramatique.  Il  lui  est 
permis  de  ne  pas  être  de  l'avis  du  législateur,  qui  a  cru  devoir 
poser  des  barrières  à  la  possibilité  du  divorce  absolu.  Mais  que 
pour  signaler  l'impasse  à  laquelle  aboutit,  en  certains  cas,  cette 
négation  plus  ou  moins  justifiée  des  droits  naturels,  il  ait  recours 
à  des  exemples,  à  des  arguments  d'une  moralité  douteuse,  voilà 
ce  qui  compromet  un  peu  la  bonté  de  sa  cause  et  lui  fait  perdre 
une  pai'tie  de  ses  avantages.  M.  Emile  Augier  est  ainsi  orga- 
nisé qu'il  va  toujours  droit  au  but,  sans  essayer  de  tourner  les 
difficultés  du  chemin,  sans  s'embarrasser   des   ornières.  La  fran- 


chise en  littérature  est  sans  doute  une  qualité  louable,  mais  encore 
faut-il  qu'elle  ne  blesse  ni  le  bon  goût,  ni  la  décence. 

Paul  Forestier  est  engagé  dans  une  intrigue  avec  une  femme 
mariée,  mais  séparée  de  son  mari,  et  qu'il  n'hésiterait  pas  à  épou- 
ser, si  elle  était  libre,  tant  il  a  pour  elle  d'amour  et  d'estime. 
Son  père,  ne  voyant  pas  d'issue  à  cette  situation  irrégulière,  se  met 
en  devoir  de  rompre  la  liaison  de  Paul  avec  Léa  pour  lui  donner 
une  épouse  de  son  choix;  c'est  une  jeune  fille  qu'il  a  élevée,  qu'il 
regarde  comme  son  enfant  et  qui  est  digne,  sous  tous  les  rapports, 
de  la  tendre  affection  d'un  honnête  homme.  Paul  ne  se  rend  pas 
sans  combattre;  mais  Léa,  en  prenant  le  parti  de  s'éloigner,  le 
délie  elle-même  des  serments  qu'il  lui  a  faits. 

Paul  épouse  donc  Camille,  et  tout  fait  espérer  que  la  paix  du 
jeune  ménage  ne  sera  pas  troublée,  lorsque  surviennent  coup  sur 
coup  deux  incidents  qui  bouleversent  ce  frêle  échafaudage.  L'an- 
cien amant  de  Léa  apprend  d'abord  qu'elle  est  veuve,  ce  qui  lui 
inspire  le  regret  de  n'avoir  pas  attendu  ;  puis,  une  confidence  bi- 
zarre lui  révèle  que  cette  même  Léa  s'est  donnée,  comme  une 
courtisane  vulgaire,  à  un  adorateur  de  rencontre. 

Paul  s'aperçoit  alors  qu'il  n'a  pas  cessé  de  l'aimer,  car  il  en  est 
jaloux,  et  il  couit  chez  elle  pour  l'accabler  de  reproches.  Léa  ne 
se  justifie  pas;  elle  fait  mieux,  elle  prouve  à  Paul  que,  si  elle  s'est 
oubliée  un  jour,  un  seul  jour,  c'est  uni(iueinent  par  amour  pour 
lui,  c'est-à-dire  par  un  frénétique,  par  un  délirant  besoin  de  ven- 
geance, lorsqu'elle  a  su  qu'il  se  décidait  à  épouser  Camille.  Cet 
aveu,  au  lieu  de  dégriser  Paul,  ne  fait  que  r.aviver  sa  passion,  et 
il  maudit  les  liens  qui  l'enchaînent  à  Camille,  maintenant  que  Léa 
pourrait  lui  accorder  sa  main. 

La  situation  est  critique,  et  comment  en  sortir?  C'est  là  mal- 
heureusement que  l'impuissance  du  moraliste  se  manifeste  par  un 
retour  forcé  aux  idées  reçues,  et  par  un  dernier  sacrifice  de  Léa, 
qui  plie  bagage  devant  l'épouse  légitime. 

Est-ce  une  solution?  El  peut-on  se  retirer  avec  la  conviction  que 
l'avenir  du  ménage  de  Paul  n'est  pas  gros  de  tempêtes  ?  Alors, 
pourquoi  toutes  ces  audaces  qui  sont  sans  résultat  possible  et  qui 
n'amènent  qu'un  dénoiiment  à  l'eau  rose  ? 

On  peut  donc  affirmer  hautement  que  tous  les  dangers  accumu- 
lés par  l'auteur  dramatique  n'ont  été  conjurés  que  par  le  double 
talent  du  poëte  et  de  ses  interprètes.  Le  rôle  do  Paul  Forestier 
est  joué  par  Delaunay  avec  cette  fougue,  tempérée  de  distinction, 
qui  est  dans  sa  nature  et  qui  confond  les  dispositions  les  plus 
hostiles.  Le  personnage  de  Forestier  le  père  a  des  côtés  périlleux  qui 
sont  admirablement  sauvés  par  l'habileté  de  Got  ;  d'atroces  souffrances 
ont  failli  l'empêcher  d'accomplir  jusqu'au  bout  sa  tâche  du  premier 
soir  ;  mais  il  est  resté  sur  la  brèche  avec  un  courage  héroïque,  et 
deux  ou  trois  jours  de  repos  lu  ont  rendu  lai  plénitude  de  ses 
moyens.  Coquelin  a  su  également  dissimuler,  à  force  de  tact  et 
de  convenance,  les  aspérités  d'un  rôle  aussi  pathétique.  Mlle  Fa- 
vart  est  une  merveilleuse  Léa  ;  elle  y  a  de  ces  élans  soudains  qui 
font  tressaillir  toute  une  salle  et  qui  lui  donnent  le  droit  d'être 
comparée  à  Rachel.  Nous  n'avons  trop  rien  à  dire  de  Mme  Vic- 
toria Lafontaine  dans  le  rôle  de  Camille  ;  elle  y  est  convenable, 
mais  un  peu  effacée,  et  ce  n'est  pas  tout  à  fait  de  sa  faute. 

D.  A.  D.  SAINT-YVES. 


Une  de  nos  pianistes  de  grand  style,  la  meilleure  et  la  dernière 
élève  de  Hummel,  qui  honora  son  enfance  d'une  amitié  paternelle, 
Mme  Mackenzie,  née  Catinka  de  Dietz,  dont  le  nom  ne  peut  être 
oublié  de  nos  lecteurs,  et  dont  les  oeuvres  sont  empreintes  d'un 
profond  sentiment  classique,    se  décide  à  perpétuer  les  traditions 


DE  PAKIS. 


37 


de  la  remarquable  école  à  laquelle  elle  appartient  en  revenant  au 
professorat  dont  elle  s'était  retirée  depuis  quelques  années.  Les  le- 
çons, ou  plutôt  les  séances  toutes  classiques  de  Mme  IVIackenzie 
ont  surtout  pour  but  de  former  les  jeunes  filles,  déjà  bonnes  pia- 
nistes à  l'intelligence  des  œuvres  des  maîtres  et  d'en  faire  des 
musiciennes  à  une  époque  oh  tout  le  monde  joue  du  piano  et  où 
cependant  bien  peu  d'artistes  sont  réellement  dignes  de  ce  nom. 
Travail,  respect  des  traditions  et  consciencieuse  étude  sont  les 
bases  de  l'enseignement  de  Mme  Mackenzie,  qui  compte  déjà  bon 
nombre  d'élèves  dans  la  haute  société  aristocratique  française  et 
étrangère  de  l'Europe,  dont,  au  reste,  elle  parle  presque  toutes 
les  langues  avec  une  égale  facilité.  Nous  croyons,  pour  notre  part, 
que  des  tentatives  de  ce  genre  doivent  être  vivement  encouragées 
et  méritent  une  sérieuse  attention,  non-seulement  de  la  presse 
spéciale,  mais  encore  de  tous  les  amateurs  de  l'art  musical,  qui 
qui  ne  peuvent  qu'y  applaudir. 

Louis  DE  Chavornay. 


CONCERTS  ET  ÀDDITIOUS  fflUSICÀLES  DE  LA  SEUIÂINE. 


***  La  réapparition  de  la  symphonie  avec  choeurs  au  programme  de 
la  Société  des  Concerts  du  Conservatoire  a  été  saluée  avec  bonheur.  11  y 
a,  en  effet,  trois  ans  au  moins  que  le  manque  de  solistes  en  prive  le  public 
de  la  rue  Bergère;  telle  est  du  moins  la  raison  alléguée  par  la  Société. 
Il  s'en  est  enfin  trouvé,  et  nous  sommes  heureux  de  pouvoir  dire  que, 
confiés  aux  voix  exercées  de  Mlles  Marimon  et  Derasse,  de  MM.  Warot  et 
Gailhard,  les  dangereux  soli  de  la  dernière  partie  ont  été  jusqu'au  bout  sans 
encombre;  c'est  tout  ce  qu'on  peut  demander.  M.  Gailhard  s'est  fort  bien 
tiré  du  récitatif  initial  ;  une  bonne  note  aussi  aux  violoncelles  etcontre- 
basses  pour  ce  même  récitatif,  l'écueil  des  orchestres  médiocres.  La  sym- 
phonie entière  a  été,  du  reste,  parfaitement  rendue.  Espérons  que  cette 
œuvre  monumentale  est  revenue  une  bonne  fois  au  répertoire  pour  ne  plus 
le  quitter,  et  qu'il  n'en  sera  pas  d'elle  comme  de  l'ouverture  de  Coriolan, 
par  exemple,  dont  la  dernière  exécution  a  eu  lieu  il  y  a  dix  ans,  en  avril 
■18S8. — Mlle  Marimon  a  dit  très-convenablement,  sans  beaucoup  s'échauffer, 
l'air  ie  Monlano  et  Stéphanie  de  Berton  :  «  C'est  donc  demain  que  l'hy- 
ménée  »,  qui  a  fait  le  bonheur  de  toute  une  génération,  et  dont  la  mé- 
lodie, corrigée  et  raccourcie,  a  eu  l'honneur  d'être  adaptée  aux  paroles 
d'un  cantique  qui  se  chante  encore  dans  nos  éghses.  —  Le  joli  andante 
de  la  49=  symphonie  d'Haydn  et  l'ouverture  à'Oberon,  détaillés  par  l'or- 
chestre avec  sa  finesse  et  son  brio  ordinaires,  complétaient  le  pro- 
gramme. 

5js*^  Au  concert  populaire  de  dimanche  dernier,  un  nom  nouveau 
figurait  au  programme,  celui  de  Joachim  RafT.  Nous  avons  dû  juger  ce 
compositeur,  dont  la  réputation  est  assez  grande  dans  une  partie  de 
l'Allemagne,  et  qui  tient  d'un  peu  loin  à  l'école  wagnérienne,  sur  deux 
échantillons  que  nous  en  a  offerts  M.  Pasdeloup  :  un  adagietlo  et  un 
scherzo  extraits  d'une  de  ses  symphonies.  Il  y  a  chez  ce  compositeur  do 
la  grâce  et  de  la  distinction,  mêlées  malheureusement  à  une  trop  grande 
recherche.  Le  scherzo  a  fait  particulièrement  plaisir.  —  L'ouverture  du 
Vaisseau-Fantôme,  de  Wagner,  a  été,  comme  chaque  fois  qu'on  l'a  exécutée 
(c'est,  si  nous  ne  nous  trompons,  la  troisième  audition),  accueillie  par  une 
double  salve  d'applaudissements  émanant  des  fanatiques  qui  ne  manquent 
pas  plus  aux  concerts  populaires  qu'ailleurs,  puis  par  une  bordée  de 
sifflets  provoquée  par  une  nouvelle  tentative  du  même  genre  en  faveur 
de  cette  œuvre.  —  11  est  à  croire,  du  reste,  que  l'auteur  de  Lohenrjrin 
fait  fi  du  succès,  en  France  du  moins;  comment  expliquer,  en  effet, 
les  outrages  qu'il  nous  prodigue  en  ce  moment  même  dans  une  publi- 
cation violente  et  insensée?  A  moins  que  ce  ne  soit  pour  pouvoir  se 
poser  en  victime  à  l'avance,  ou  pour  décliner  la  compétence  des  juges 
qu'il  pressent  devoir  le  condamner;  mais  alors  dans  quel  but  se  soumet- 
tre à  leur  appréciation? 

^*.^  Un  concert  brillant  a  été  donné  vendredi  dernier  au  ministère  de 
la  marine.  Les  artistes  qui  y  ont  apporté  le  concours  de  leur  talent  s'appe- 
laient :  Mlles  Nilsson  et  Grossi,  MM.  Délie  Sedie,  Gardoni,  AlarJ,  Fran- 
cbomme,  autant  de  noms  aimés  et  à  juste  titre.  On  a  exécuté  entre 
autres  le  ravissant  quatuor  de  Mart/ia,  qui  a  produit  le  plus  grand  efïèt. 

:)f*f.  La  société  chorale  allemande  Liederkram  réunissait  samedi  dernier 
une  société  d'élite  dans  la  salle  du  Grand-Orient,  rue  Cadet,  à  l'occasion 
du  dixième  anniversaire  de  sa  fondation.  Des  chœurs  des  meilleurs  au- 
teurs, Schumann,  Kalliwoda,  Mangold,  ont  été  exécutés  avec  cette  per- 
fection dont  les  Allemands  ont  le  secret,  sous  la  direction  de  l'excllent 
chef  de  la  Société,  M.  Ehmant.  Le  violon  magique  de  Sivori  était  de  la 


fête;  c'est  dire  que  le  grand  artiste  a  été  rolij('t  d'une  chaleureuse  ova- 
tion, après  sa  fantaisie  sur  Faunt  et  colle  de  Thalborg  et  de  Bériot  sur 
les  Hu-jucnols.  MM.  Lasserre  et  Kowalski  lui  ont  dignement  tenu  tête: 
ce  dernier,  dans  sa  paraphrase  d(!  Don  Juan,  pour  piano,  et  M.  La.«serre 
dans  sa  transcription  pour  violoncelle  sur  Marlha.  Une  opérctte-boufTe  en 
deux  actes,  de  Kipper,  Fidelia,  a  gaiement  terminé  cette  charmante  soirée, 
que  les  fidèles  du  Liederkranz  voient  avec  plaisir  revenir  chaque  année. 

„,''*  Le  concert  donné  jeudi  dernier  par  M.  Villa,  à  la  salle  Herz,  au 
bénéfice  des  Arabes  de  l'Algérie,  offrait  un  progranmie  aussi  varié  qu'at- 
trayant. Dans  la  sonate  de  Beethoven  dédiée  à  Kreutzer,  nous  avons 
apprécié  une  fois  de  plus  le  talent  fin  et  sympathique  de  MM.  Sighicelli 
et  Albert  Lavignac.  Ce  dernier  a  été  très-applaudi  dans  la  brillante  po- 
lonaise en  tit  de  Chopin  et  la  fantaisie  de  Prudent  sur  Lucie.  Dans  la 
partie  vocale  brillait  en  première  ligne  Mme  Marie  Sass,  dont  la  voix 
puissante  primait  aisément  celle  de  M.  Villa,  d'un  volume  beaucoup 
moindre,  quoique  d'un  timbre  agréable.  Des  chansonnettes  dites  avec  es- 
prit par  M.  Ch.  Potier  ont  terminé  gaiement  ce  concert. 

^,*^  La  deuxième  matinée  de  Mme  Clara  Pfeiffer  offrait  le  même  intérêt 
varié  que  toutes  celles  que  donne  cette  éminente  artiste.  A  côté  d'elle  se 
sont  fait  applaudir  son  fils  Georges,  Mme  Damoreau,  MM.  Géraldy, 
White,  Lebouc  et  le  flûtiste  Donjon  ;  nous  avons  à  signaler,  parmi  les 
œuvres  exécutées,  un  charm.unt  trio  d'Adolphe  Blanc;  la  nouvelle  trans- 
cription de  l'ouverture  d'Egmont,  par  Georges  Pfeilfer;  enfin  une  jolie 
mélodie  de  Mme  Damoreau  sur  des  stances  d'Alfred  de  Musset. 

***  Mlle  Marie  Secretain,  premier  prix  du  Conservatoire,  élève  de 
MM.  Henri  et  Jacques  Herz,  a  donné  un  brillant  concert  samedi  dernier 
à  la  salle  Herz.  Elle  a  joué  exclusivement  des  œuvres  de  ses  deux  pro- 
fesseurs :  le  6°  concerto  de  H.  Herz,  ses  variations  sur  le  Carnaval  de 
Venise  et  sur  le  Pré  aux  Clercs,  et  la  Valse  orientale  le  J.  Herz.  Elle  a  une 
exécution  souple,  nette  et  bien  nuancée  ;  c'est  une  artiste  d'avenir  et 
qui,  du  reste,  ne  peut  être  à  meilleure  école.  Mlle  de  Beaunay  et  M.  Bac- 
quié  se  sont  tirés  à  leur  honneur  de  la  partie  vocale,  et  l'orchestre,  dirigé 
par  Aug    Mey,  mérite  une  mention  spéciale. 

^*^  Nous  avons  dit  quelques  nnts,  dimanche,  du  beau  concert  que 
venait  de  donner  la  Société  philharmonique  d'Amiens,  sons  la  direction 
de  son  président,  M.  A.  Deneux.  Les  journaux  de  la  localité  sont  rem- 
plis de  détails  sur  l'éclat  de  ce  concert  et  sur  l'effet  qu'y  ont  produit  les 
deux  grands  artistes  de  l'Opéra,  Marie  Sass  et  Faure.  L'orchestre,  com- 
posé d'artistes  et  d'amateurs  de  la  Société,  y  a  donné  de  nouvelles 
preuves  de  sa  supériorité,  et  a  mis  en  grand  relief  un  jeune  violoniste, 
élève  de  MM.  Stoupy  et  Alard,  M.  Desaint,  accueilli  par  d'enthousiastes 
applaudissements.  11  en  a  été  de  même  d'un  jeune  ténor,  M.  Roze,  qui 
a  très-bien  chanté  plusieurs  morceaux,  et,  entre  autres,  la  cavatine  de 
Martha.  En  somme,  ce  concert,  le  premier  de  la  saison,  fait  le  plus 
grand  honneur  à  la  Société  et  à  celui  qui  la  dirige. 

»*,,.  Léonard  vient  de  remporter  un  éclatant  succès,  à  Dijon,  dans  un 
concert  de  bienfaisance.  Le  grand  violoniste  a  joué,  avec  son  charme  or- 
dinaire et  son  style  magistral,  sa  Fantaisie  militaire,  ses  Souvenirs  d'Haydn 
et  sa  Romance  sans  paroles.  A  côté  de  lui,  Mlle  Laura  Harris,  la  gracieuse 
cantatrice,  a  entliousiasmé  l'auditoire  dans  l'air  de  la  Flûte  enchantée,  le 
rondo  de  la  Sonnambula,  la  romance  de  Martha  et  la  valse  de  Roméo. 

^*^  Un  triomphe  signalé  vient  d'accueidir  Arban  à  Nantes,  dans  un 
concert  de  bienfaisance  donne  par  le  Cercle  du  sport.  L'excellent  chef 
d'orchestre  et  non  moins  brillant  virtuoje  a  été  couvert  d'applaudisse- 
ments après  sa  fantaisie  sur  la  Muette;  son  vaillant  orchestre  a  exécuté 
avec  son  entrain  habituel  la  marche  du  Prophète,  et  ses  fantaisies  sur 
Robert,  rAfricaine,  Lucie,  etc.  Nantes  gardera  longtemps  le  souvenir  de 
cette  fête. 

ii*^  A  Orléans,  Mlles  Vitali,  Sivori  et  Scalese  se  sont  fait  entendre  au 
deuxième  concert  de  l'Institut  musical;  les  ovations  ont  été  prodiguées  à 
ces  éminents  artistes,  qui  se  sont  vraiment  surpa,sscs  et  qui  avaient  fait 
choix,  pour  le  public  Orléanais,  des  plus  beaux  joyaux  de  leur  réper- 
toire , 

^f*:jf  La  compagnie  Ulmann,  qui  se  compose  actuellement,  comme  on 
sait,  de  neuf  artistes  du  plus  grand  mérite,  parmi  lesquels  on  remarque 
Carlotta  Patti,  Vieuxtemps,  Seligmann,  Ed.  Wolff,  Godefroid,  etc.,  a 
commencé,  le  22  janvier,  une  nouvelle  tournée  dans  les  villes  principales 
de  France.  A  Nantes,  à  Angers,  à  Tours,  comme  à  Bordeaux  et  à  Agen, 
partout  des  salles  combles,  un  public  enthousiaste,  de  magnifiques  re- 
cettes, des  applaudissements  et  des  couronnes.  Ed.  Wolff  produit  le  plus 
grand  effet  avec  ses  meilleures  compositions,  la  Triomphale,  le  boléro  de , 
V Africaine,  la  Chanson  bachique,  etc.,  et  le  public  ne  se  lasse  pas  de 
l'applaudir,  ainsi  que  Vieuxtemps,  dans  leur  splendideduo  sur  Don  Juan. 
Le  beau  son  que  Sfligmann  tire  de  son  instrument,  la  largeur  et  la 
pureté  de  son  jeu,  dans  sa  fantaisie  sur  Martha,  notamment,  intéressent 
et  émotionnent  profondément.  Aussi,  ces  deux  maîtres  sont-ils  tout 
particulièrement  rappelés,  en  même  temps  que  leurs  camarades,  à  la  fin 
de  chaque  concert.  Nous  reviendrons  sur  les  ovations  que  la  suite  de  ce 
voyage  artistique  et  véritablement  triomphal  réserve  aux  artistes  émi- 
nents qui  l'ont  entrepris  sous  une  direction  aussi  habile  qu'heureuse. 


38 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


**»  La  Société  des  concerls  du  Conservatoire  donne  aujourd'liui  di- 
manclie,  2  février,  à  2  heures  précises,  la  répétition  de  son  S"  concert. 
En  voici  le  programme,  dans  lequel  la  scène  et  le  chreur  d'Ido7ncnéc 
sont  substitués  à  l'air  de  Montana  et  Stéphanie:  i"  symphonie  avec  chœurs 
de  Beethoven  (  les  soli  seront  chantés  par  Mlles  Marimon  et  Derasse, 
MM.  Warot  et  Gailhar.l)  ;— 2«  andante  de  la  {9°  symphonie  de  Haydn; 
—  3°  scène  et  chœur  d'idomcnée  de  Mozart  (le  solo  sera  chanté  par 
M.  Warot;  —  i"  ouvei'ture  à'Oberon  de  Webcr. —  Le  concert  sera  dirigé 
par  M.  Georye-Hainl. 

,*!s-  .aujourd'hui  dimanche,  à  2  heures,  au  cirque  Napoléon,  1  i"  con- 
cert populaii'e  de  musique  cla.ssique,  sous  la  direction  de  J.  Pasdeloup. 
Ou  y  entendra  :  1°  ouverture  de  la  Flûte  cncimntée  de  Mozart;  —2°  suite 
d'orchestre  de  M.  Massenet  (pastorale,  fugue,  thème  hongrois  varié, 
adagio,  marche,  strettej;  —  3°  ouverture  de  la  Belle  Mélusine  de  Men- 
delssohn  (légende  pastorale  du  xu"  siècle);  —  4°  la  Sé/)«rj(io;i,  romance 
pour  cor,  de  Lorenz. 

»**  Dimanche  9  février,  à  2  heures  précises,  salle  Pleyel-Wolff,  deu- 
xième séance  de  musique  de  chanihre  de  MM.  Alard  et  Franchomme. 
On  y  exécutera  :  l"  quatuor  en  ré  de  Meudelssohn  ; — 2°  trio  en  mi  béniol 
de  Mozart;  — 3"  andante  varié  et  Minuetto  à  la  zingarèse  d'Haydn;  — 
•J"  quatuor  pour  piano  et  instruments  à  cordes  de  Beethoven. 

a,**  On  annonce  comme  très-prochaine  la  reprise,  dans  les  salons 
Pleyel-Wolff,  des  séances  de  musique  de  chambre  de  M.  Maurin,  réor- 
ganisées avec  le  concours  de  MM.  C.  Sainl-Saëns  et  Demunck. 

^*»  Mardi  prochain,  2»  séance  populaire  de  musique  de  chambre  de 
MM.  Lamoureux,  Colblain,  Adam  et  Poëncet,  avec  le  concours  de  M. 
Fissot. 

s**  Nous  rappelons  à  nos  lecteurs  le  beau  concert  à  grand  orchestre 
qui  sera  donné,  jeudi  6  février,  par  M.  Ch.  Lamoureux,  à  la  salle  Herz, 
et  dont  notre  dernier  numéro  faisait  connaître  le  programme:  ils  n'au- 
ront pas  d'ailleurs  oublié  le  grand  concert  de  la  o  Société  protectrice,  »  or- 
ganisé également  par  M.  Lamoureux,  et  dans  lequel  il  déploya  les  qua- 
lités d'un  excellent  chef  d'orchestre. 

^*^  Au  nombre  des  artistes  qui  comptent  se  faire  entendre  à  Paris  cet 
hiver,  nous  devons  mentionner  un  jeune  virtuose  qui  arrive  du  Chili, 
où  il  jouit  d'une  grande  réputation  comme  pianiste.  C'est  M.  Fred.  Guz- 
man,  dont  on  a  déjà  pu  apprécier  le  talent  dans  quelques  réunions  pri- 
vées. M.  Guzman  est  aussi  fort  connu  en  Allemagne  grâce  au  mérite  des 
œuvres  qu'il  y  a  publiées. 

:„%  Les  succès  d'Alf.  Jaell  et  de  sa  femme  suivent  une  progression 
croissante,  comme  leur  infatigable  activité.  Bruges,  Gœtlingen,  Brème, 
Aix-la-Chapelle  et  Cassel  viennent  de  les  applaudir;  et  il  y  a  bien  des 
villes  sur  cette  roule  de  Parif,  qu'ils  visiteront  en  reprenant  prochaine- 
ment celle-ci. 

i^*^  Mlle  Angèle  Cordior  vient  d'être  engigée  pour  chanter  dans  les 
trois  concerls  donnés  par  les  .-sociétés  philharmoniques  de  Rennes,  de 
Laval  et  du  Mans. 

,%  S'il  faut  en  croire  les  journaux  américains,  Johann  Strauss  serait 
engagé  pour  diriger  pendant  quatre  mois  des  concerts,  et  il  recevrait 
pour  cela  l'énorme  somme  de  300,000  francs. 


ROUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 


if*^  Le  théâtre  impérial  de  l'Opéra  a  donné  Guillaume  Tell  deux  fois 
pendant  la  semaine,  lundi  et  vendredi  ;  mercredi,  le  Trouvère  et  la 
Source. —  Les  répétitions  à  l'orchestre d'//(7m/p(  ont  commencé  mardi  der- 
nier.— Dès  que  la  primeur  du  sucà's  de  l'œuvre  nouvelle  d'Amb.  Tho- 
mas .'■era  épuisée,  Mazzoleni,  le  ténor  dont  nous  avons  annoncé  l'engage- 
ment par  M.  Perrin,  débutera  dans  Don  Carlos;  le  second  rôle  qu'il 
abordera  sera  celui  de  Jean  de  Leyde,  du  l'rophéte,  et  la  direction  de 
l'Opéra  apportera  à  cette  reprise  le  même  soin  et  le  même  luxe  qu'à 
celle  de  Guillaume. 

^*t  Aujourd'hui,  par  extraordinaire,  Gm'Waunie  7'eH,avec  la  tyrolienne 
dansée  par  les  premiers  artistes  du  ballet,  et  demain   lundi  l'Africaine. 

***  Les  répétitions  à  l'orchestre  d'Un  jour  de  bonheur  ont  commencé 
avant-hier,  vendredi,  à  l'Opéra-Comique.  On  compte  donner  le  nouvel 
opéra  de  M.  Auber,  vers  le  10  février. 

S;"*  La  salle  du  théâtre  Italien  était  comble  jeudi  pour  )a  dernière  re- 
présenla;ion  de  Rigclctto  ;  on  voulait  encore  entendre  Adelina  Patti  dans 
le  rôle  de  Gilda,  l'une  de  ses  plus  brillantes  créations;  elle  s'y  est  sur- 
passée. Nicolini  est  très-élégant  dans  le  rôle  du  duc,  et  Verger  a'  très-bien 
chanté  celui  du  bouffon. 


ji,*ii,  Il  Teniplario,  dont  nous  rendons  compte  aujourd'hui ,  devant  être 
suivi  de  plusieurs  reprises  importantes,  Don  Giovanni,  MathilJa  di  Sha- 
bran,  entre  autres,  Mlle  Patti  ne  chantera  plus  qu'une  fois  les  rôles  les 
plus  brillants  de  son  répertoire.  —  Demain,  par  extraordinaire,  dernière 
représentation  de  la  Traviata,  au  bénéfice  de  Scalese;  le  .spectacle  sera 
complété  par  la  scène  des  fous,  de  Columella,  chantée  par  le  bénéfi- 
ciaire. 

**,  Lundi  dernier,  le  théâtre  Lyrique  a  donné  une  bonne  représenta- 
tion de  Marthn,  avec  Mlle  Daram  dans  le  rôle  principal.  Le  talent,  la 
voix  agréable  et  le  jeu  intelligent  de  la  débutante  ont  surmonté  les 
périls  de  cette  tâche,  et  la  soirée  a  été  de  tous  points  favorable  à  la 
jeune  artiste.  Le  rôle  de  Lyonel  est  bien  dans  la  voix  de  Bosquin  et  le 
fait  applaudir.  Troy  a  obtenu  son  succès  habituel. — La  Fanchonnette  con- 
tinue  d'attirer  beaucoup  de  monde.  —  M.  Carvalho  va  remonter,  dit-on, 
la  Fête  du  villaij-:  voisin,  de  Buïel.lieu.  —  On  répète  le  Lohengrin  de 
Wagner. 

i^'tj:  La  salle  des  Fantaisies  parisiennes  est  complètement  restaurée,  et 
la  direction  en  annonce  pour  demain  la  réouverture  par  te  Farfadet. 

^,*^  L'Africaine  vient  d'être  chantée  pour  la  première  fois  à  Grenoble. 
Cette  représentation  n'a  été  qu'une  longue  ovation  décernée  au  chef- 
d'œuvre  el  couronnée  par  le  rappel  de  ses  excellents  interprètes  sur 
celte  scène.  Mlle  Huberti,  notamment,  s'est  magnifiquement  approprié  le 
rôle  de  Selika. 

,■*,(,  Mardi,  Adelina  Patti  a  donné  au  théâtre  de  Rouen  une  repré.>;enta- 
lion  de  Lucia.  Dès  que  les  aflîches  ont  annoncé  cette  bonne  fortune,  une 
foule  immense  a  assiégé  le  bureau  de  location,  et,  malgré  l'élévation  des 
prix  (23  francs  les  premières),  il  n'y  en  a  pas  eu  assez  pour  contenter 
tout  le  monde.  Il  n'est  sorte  d'ovation  qu'on  n'ait  faite  à  la  jeune  et  célèbre 
diva,  et  la  recette  s'est  élevée  à  près  de  14,000  francs. 

^'''^Ou  nous  écrit  de  Douai  que  Mlle  Alice  Hustache  est  en  ce  moment 
l'éloile  du  théâtre  de  cette  ville.  Dans  Romio  et  Juliette,  les  Dragons  de 
]'illars,  le  Toréador,  elle  fait  applaudir  tour  à  tour  une  merveilleuse 
flexibilité  de  talent  et  une  délicieuse  voix  de  soprano.  Les  journaux  de 
la  localité  sont  pleins  d'éloges  adressés  à  la  jeune  artiste,  et  légitimés 
d'ailleurs  par  son  excellente  méthode  et  son  grand  siyle. 

<,%  On  vient  de  donner  au  théâtre-concert  de  l'Alcazar  une  opérette 
nouvelle  do  MM.  Alph.  Baralle  et  Hubans,  chef  d'orchestre  de  cet  éta- 
blissement . 

^*^  La  représentation  donnée  dimanche  dernier  aux  Variétés,  au  bé- 
nélice  de  Grenier,  a  produit  plus  de  9,000  francs. 

5t;*»  La  Grande-Duchesse  de  Gérolslcin  continue  sa  marche  triomphale 
en  Allemagne.  Briinn,  Posth  et  Glogau  viennent  de  l'applaudir. 

,*<,  Agencer,  transformer  le  théâtre  du  Prince-Impérial  en  Alhani  ra 
londonien,  empruntant  ses  attractions  principales  à  l'art  lyriane  et  cho- 
régraphique, tel  est  le  projet  théâtral  de  la  semaine.  Entrcpiise  liardie  ! 
Que  d'argent  englouti  déjà  dans  et  par  cette  solitude  ! 

i^*^  Londres  possède  actuellement  32  théâtres  avec  des  placrs  pour 
S9,863  spectateurs.  La' salle  la  plus  xi&le e&lceWe  du  liritannia-Theater,  qui 
a 3,923  places;  puis  viennent Driicy-ionc,  qui  en  a  'i,%Oi;  Astley-Theater, 
3,780  ;  le  Pavillon,  3,300  ;  le  Standard-Theater,  nouvellement  inauguré, 
3,i00,  et  le  Victoria-Theater,  3,S00.  VOpéra-Royal-Italien  de  Covent-Gar- 
den  ne  contient  que  2,300  personnes;  sept  autres  théâtres  peuvent  en 
contenir  de  2,000  à  2,300;  douze  autres,  1,000  à  2,000,  et  six,  360  à 
800  personnes  seulement.  Les  deux  plus  petits  théâtres  sont  le  Cabinet- 
Theater  et  h  Galerie  of  illustration.  L'Opéra  incendié,  Her  3Iajcstg's-Theatcr, 
avait  i,6S3  places. 

i*„  Un  riche  négociant  de  New-York,  M.  Pike,  vient  de  faire  élever 
un  théâtre  d'opéra  dans  les  23<=  et  28"^  avenues.  D'après  un  correspon- 
dant, ce  théâtre  est  construit  en  marbre  blanc,  dans  le  style  italien.  La 
salle  peut  contenir  2,000  personnes,  elle  est  décorée  or  et  blanc  ;  les  ri- 
deaux des  loges  particulières  sont  blancs  et  b!eus,  les  fauteuils  rouges, 
et  il  y  a  partout  une  profusion  de  statues,  de  lustres,  de  candélabres  et 
de  peintures.  De  plus,  l'acoustique  y  est  meilleure  que  celle  de  tous  les 
théâtres  de  New-York. 

^*,  M.  Prosper  Pascal  nous  prie  de  faire  savoir,  pour  éviter  toute 
confusion,  que  le  sujet  de  l'opéra  les  Templi>-rs,  dont  il  a  composé  les  pa- 
roles et  la  musique,  n'a  aucun  rapport  avec  celui  d'//  Teniplario  d'Otto 
Nicolaï,  qu'on  représente  au  théâtre  Italien,  et  qui  est,  comme  on  .sait, 
emprunté  au  roman  d'ivanhoé,  de  Walter  Scott. 

^*^  Ce  n'est  qu'avec  peine  que  samedi,  vers  une  heure  de  la  nuit,  on 
pouvait  pénétrer  au  bal  masqué  de  l'Opéra  tant  la  foule  y  était  grande; 
c'était  le  septième,  el  comme  ils  touchent  à  leur  fin,  on  se  presse  de 
jouir  du  coup  d'œil  et  d'entendre  l'orchesire  que  Stauss  dirige  avec  tant 
de  verve  et  d'entrain. 


Uh  PAIUS 


39 


NOUVELLES  DIVERSES. 


^*^,  M.  Aiiber  vient  d'entrer  dans  sa  quatro-vingl-scplifcmc  année.  Pour 
fêter  cet  lienreux  anniversaire,  la  musique  de  la  2°  légion  de  la  garde 
nationale,  dirigée  par' M.  Tliibaut,  a  offert  une  sérénade  ^  l'illustre  re- 
présentant de  l'école  française.  Après  l'ouverture  de  la  Muelle,  les  excel- 
lenls  artistes  du  bataillon  de  l'Opéra  ont  exécuté  une  marcbe  arrangée 
par  M.  E.  Jonas  sur  les  motifs  d'une  sonate  manuserile,  découverte  der- 
nièrement par  M.  le  général  Mellinet  dans  une  boutique  do  bouquiniste, 
et  que  M.  Auber  avait  composée  en  1798,  c'est-à-dire  à  l'âge  de  dix-sept 
ans.  A  soixante-dix  années  de  dislance,  M.  Auber  avait  oublie  cette 
œuvre  de  sa  jeunesse,  et  il  a  été  vivement  touché  de  l'attention  délicate 
qui  la  rappelait,  vivante  et  colorée,  à  son  souvenir. 

^*4  M.  Charles  Lucas,  architecte,  auteur  d'un  travail  fort  complet  sur 
les  travaux  publics  espagnols  >à  l'Exposition  universelle  de  1867,  vient 
d'être  nommé  chevalier  de  l'ordre  royal  de  Cliarles  111,  à  la  suite  de  la 
traduction  de  ce  travail  dans  la  Gaceta  de  Madrid.  M.  Lucas  n'est  pas 
un  inconnu  pour  les  lecteurs  de  la  Gazette,  car  il  s'est  occupé  pendant 
longtemps  de  critique  musicale. 

^*^  L'éminent  pianiste  compositeur  Rosenhain,  qui  habite  Bade  les 
trois  quai'ts  de  'l'année,  est  de  retour  à  Paris  où  il  va  passer  trois  mois. 

^*.jf,  L'Exposition  illustrée,  publication  autorisée  par  la  Commission  impé- 
riale, est  arrivée  à  .sa  soixantième  et  dernière  livraison.  Elle  aura  eu  le 
mérite  de  réunir  dans  le  même  cadre  de  rédaction  les  noms  les  plus 
divers  et  les  plus  opposés  :  MM.  Michel  Chevalier  et  le  baron  Séguier 
(de  l'Institut)  à  côté  de  MM.  Jules  Simon  et  Henri  Martin;  MM.  Auguste 
S'itu,  Ernest  Dréolle,  Valserre  et  Oct.  Lacroix  h  côté  de  MM.  Ducuing, 
Léon  Plée,  Malespine,  Ch.  Sauvesire  et  E.  de  la  Bédollière;  enfin  MM. 
Am.  Achard,  Ed.  About  et  Jules  Janin  à  côté  de  MM.  Alf.  Assollant,  F. 
Sarcpy  et  Louis  Ulbach.  Mais  le  plus  curieux  rapprochement  de  collabo- 
ration aura  été  celui  des  rapporteurs  du  jury  et  des  rapporteurs  de  la 
classe  laborieuse,  délégués  ouvriers,  dont  la  cinquante-neuvième  livrai- 
son publie  des  notices  fort  intéressantes  sur  l'aniline  et  la  galvanoplastie. 
L'Exposition  illustrée  est  une  publication  hors  ligne  et  dont  le  grand 
succès  se  justifie.  Ce  magnifique  recueil,  contenant  six  cent  quatre-vingts 
graDds  dessins  et  sept  cents  articles  différents,  trouvera  des  acheteurs 
tant  que  le  souvenir  du  grand  concours  de  1807,  dont  il  est  la  représen- 
tation fidèle,  se  conservera  parmi  les  hommes.  C'est  une  œuvre  digne 
de  l'événement  qu'elle  célèbre.  Félicitons  M.  F.  Ducuing,  son  rédacteur 
en  chef,  d'avoir  attaché  son  nom  à  une  œuvre  de  cette  valeur  et  si  vive- 
ment conduite.  L'Exposition  illustrée  est  donnée  en  prime,  moyennant 
le  prix  modeste  de  H  francs,  aux  abonnés  de  l'Année  illustrée,  qui  con- 
tinue avec  éclat  la  publication  précédente. 

^^  Mlle  Eugénie  Halanzier,  fille  de  l'ancien  directeur  des  théâtres  de 
Mar.seille,  épouse  M.  Emile  Lachau.^se,  fils  d'un  banquier  de-Troyes.  Le 
mariage  aura  lieu  le  mardi,  4  février,  à  midi  précis,  dans  l'église  de 
Notre-Dame-de-Lorette. 

,,;**  On  annonce  la  mort  à  Paris,  à  l'âge  de  quatre-vingt-quinze  ans, 
de  Mme  Louis  Ducis,  sœur  de  Talnia  et  veuve  du  neveu  du  poète  tragi- 
que, administrateur  général  de  l'Opéra-Comique  sous  la  Restauration,  et 
un  moment  directeur  du  même  théâtre  sous  le  gouvernement  de  Juillet; 
—  A  Iniola  (Italie),  du  co:iipositeur  Ratfaello  Mazetti,  auteur  des  opéras 
Marco  Visconti  et  Gustavo  Tf>sa. 

;^*,i;  A  Berlin  vient  de  mourir,  à  l'âge  de  soixante-quatre  ans,  le  vio- 
loncelliste Morilz  Ganz,  artiste  estimé,  soliste  de  l'orchestre  royal  et  com- 
positeur pour  son  instrument. 


ÉTRANGER 


^*^  Bruxelles. — Le  Béirnais,  opéra  comique  en  trois  actes,  a  été  repré- 
senté, jeudi,  au  Théâtre  royal.  Cette  production  de  deux  auteurs  belges 
a  obtenu  un  succès  très-brillant  et  très-mérité,  surtout  comme  musique, 
car  la  pièce  n'est  qu'une  seconde  édition  du  Capitaine  Henriot,  inférieure 
à  la  première  sous  tous  les  rapports.  La  partition  est  l'œuvre  de  M. 
Radoux,  lauréat  du  grand  concours  de  composition  musicale,  ou  comme 
qui  dirait,  prix  de  Rome  en  Belgique.  Elle  renferme  assez  de  morceaux 
vraiment  distingués  pour  réussir  partout  où  l'on  voudrait  passer  sur  la 
faibles.se  du  poëme  en  faveur  de  la  musique.  M.  Radoux  a  de  la  mélo- 
die, l'instinct  de  la  scène  et  la  fermeté  de  style  que  donne  un  tavoir 
réel.  Peut-être  dépasse-t-il  parfois  les  proportions  du  cadre  dans  lequel 
il  conviendrait  de  renfermer  les  développements  de  ses  idées  ;  mais  c'e«t 
un  défaut  excusable  chez  un  jeune   compositeur  qui,  ayant  pour  la  pre- 


mière Ibis  l'occasion  d'écrire  un  opéra,  .s'en  donne  à  cieurjoie.  Le  prin- 
cipal rôle  de  léniiiu^  celui  de  Gabri(!lle  d'Estrée,  est  rempli  |iar  Mme 
Ferdinand  Sallaivl,  Ia(piellc  a  fait  preuve  de  talent  en  jnême  lemp<  que 
de  complaisance,  en  prenant  la  place  de  Mlle  Wallack,  qui  s'était  récu- 
sée ;  Mme  Sallard  a  recueilli  force  bouquets,  sans  préjudice  des  a|iplau- 
dissements,  pour  le  service  qu'elle  a  rendu  gracieusement  à  de  jeunes 
auteurs.  Les  autres  rôles  du  Béarnais  sont  remplis  par  MM.  Ricqiiier- 
Delaunay,  Jamet,  Laurent  et  Mme  Dumestre. 

^*»  Darmstadt.  —  La  légende  .Scandinave  de  Frithjof,  qui  a  déjà  heu- 
reusement inspiré  Max  Bruch,  vient  d'être  traitée  de  nouveau  par  Man- 
gold,  et  avec  non  moins  de  talent.  Cette  œuvre  a  élé  exécutée  le  13  jan- 
vier, et  a  produit  un  excellent  effet;  le  Festival  rhénan  de  celte  année 
la  comprendra  probablement  dans  son  programme. 

i:*^  Francfort-sur-lc-Mein.  —  Roméo  et  Juliette,  de  Gounoil,  a  été  ac- 
cueilli avec  une  certaine  réserve  à  la  première  représentation  qui  a  eu 
lieu  le  11  janvier. 

»*.;((  Berlin.  —  L'orchestre  de  Bilse  a  inauguré,  le  15  janvier,  sa  nou- 
velle salle  par  un  grand  conce;t  auquel  ont  pris  part  cent  exécutants. 

,if*x  Lnpsig.  —  Au  treizième  concert  du  Gewandhaus,  l'ouverture  des 
Naiades,  du  compositeur  anglais  W.  Sterndale  Bennett,  œuvre  qui  a  con- 
servé assez  longtemps  la  faveur  du  public,  a  été  froidement  reçue;  par 
contre,  on  a  beaucoup  applaudi  la  symphonie  en  si  bémol  de  Schumann, 
et  le  violoniste  Lauterbach,  de  Dresde,  qui  a  joué  le  concerto  de  Beetho- 
ven et  celui  en  la  mineur  de  Bach.  La  cantatrice,  Mme  Peschka-Leutner, 
de  Darmstadt,  qui  se  faisait  entendre  pour  la  première  fois  à  Leipzig, 
a  obtenu  un  très-grand  succès  avec  une  scène  et  air  de  Spohr  et  un  air 
de  la  Flûte  enclwmtée. 

av*:j:  Vienne.  —  Mlle  Ehnn,  attachée  par  un  engagement  durable  à 
l'Opéra,  qui  l'a  possédée  quelque  temps  l'année  dernière,  voit  ses  succès 
se  confirmer.  Après  deux  brillants  débuts,  elle  a  abordé,  pour  .sa  troi- 
sième représentation,  le  rôle  de  Sélika  de  l'Africaine,  où  ses  précieuses 
qualités  dramatiques  se  montrent  dans  tout  leur  jour.  De  Bignio  est  tou- 
jours un  excellent  Nélusko  et  Adams  un  Ya.sco  irréprochable.  —  Deux 
jolies  opérettes  :  l'une  de  Suppé,  Madame  la  Maîtresse  (Die  Frau  Meisterin)  ; 
l'autre  de  Zaytz, 'to  Somnambule,  ont  pleinement  réussi  au  Carltlieater 
et  à  l'Harmonie-theater.  Les  auteurs  sont,  du  reste,  des  vétérans  de  la 
vogue, 

,ij*,f  Prague.  —  La  Grande-Duchesse  de  Gérolstcin  est  venue  et  elle  a 
vaincu...  ailleurs  qu'on  ne  l'attendait,  toutefois,  car  elle  était  promise  de- 
puis longtemps  au  Ihéâtro  Tchèque,  auquel  des  difficultés  de  traduction 
l'auront  vraisemblablement  contrainte  à  renoncer  pour  le  théâtre  alle- 
mand. Elle  a  déjà  assez  prouvé,  d'ailleurs,  que  tous  les  terrains  lui  sont 
bons.  C'est  un  triomphe  de  plus  que  nous  avons  à  enregistrer  à  son  ac- 
tif, triomplie  dont  une  bonne  part  revient  à  la  principale  interprète, 
Mlle  de  Kaler. 

^*,^  Rome.  —  Cagnoni,  l'auteur  de  Dun  Bucefalo  ,  vient  de  remporter 
un  nouveau  succès  avec  la  Tombola,  au  théâtre  Argentina.  Auteur  et 
chanteurs  (Fioravanti  entre  autres)  ont  été  maintes  fois  acclamés  et  rap- 
pelés. Le  librctto  de  la  Tombola  est  de  F.  Piave,  qui  l'a  tiré  de  la  co- 
médie français  la  Cagnotte. 

^*,ii  Saint-Pétersbourg .  —  Le  violoncelliste  Davidoff ,  dont  la  carrière 
de  virtuo.se  avait  été  entravée,  en  1S62  par  sa  nomination  au  Conserva- 
toire, commencera  en  février  une  grande  tournée  artistique  en  Alle- 
magne et  en  France.  Il  se  fera  eotendrre  le  27  février  au  Gewandhaus 
de  Leipzig. 


s.    DUl'ÛCll. 


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MORCEAUX    DIVERS  : 

CBÀ1IICR.  —  Deux  bouquets  de  mélodies  pour  le  piano,  eh.  9     » 

E.  KETTERER.  —  Fantaisie  brillante  pour  le  piano 9     » 

LECÂRP£NTI£R.  —  JJeux  bagatelles  pour  le  piano,  chaque  S     » 

ROSELLEN.  Fantaisie  de  salon  pour  le  piano 7  SO 

RDimiEL,  —  Fantaisie  élégante  pour  le  piano (j    » 

Id.       Duo  facile  à  quatre  mains 7  SO 

A.  HERMAN.  —  Divertissement  pour  piano  et  violon 9    « 

SELIGMAWN.  — Bluette  de  salon  pour  violoncelle  et  piano. .  7  SO 


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Le  même,  à  quatre  mains 

STRAUSS,  —  Grande  valse  pour  le  piano  et  à  quatre  mains 

Id.       Grand  quadrille  des  bals  de  l'Opéra 

MARX.  —  Deuxième  quadrille  pour  le  piano 

LEON  ROQUES.— Polka  brillante  pour  piano  et  à  4  mains  . 

STRAUSS.  —  Polka-Mazurka  pour  le'  piano 

H.  VALIQUET.   vendredi,  quadrille  enfantin  pour  le  piano* 


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4  50 


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INSTRUMENTS    DE    MUSIQUE    EN    CUIVRE     *  '-'exposition  universelle  de  paris  1 855. 
Exposition  Universelle  de  Londres  1862 

MM.  les  Membres  du  Jury  luternational  décernent  la  Médaille  à 

ANTOINE  COURTOIS 

PODR  l'EXCEllENCE  DE  SES  COMETS  A  PISTOSS,  CORS,  ALTOS,  BASSES, 

ET  POUR  toute  sa  collection  d'instruments  en  général. 

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Ci-devant  rue  du  Caire,  21. 


Facteur  du    Conservatoire  et  de 
l'Académie  impériale  de  Paris 

Agent  à  Saint-Pétersbourg  : 

A.  BUTTNER, 

Perspect.Newsky,niaison  de  l'égliseSt-Pierre 


La  maison  ANTOINE  COURTOIS  ayant  agrandi  ses  ateliers  ,  est  en  mesure  de  satisfaire  à  toutes  les  demandes  qui  pourront  lui  être 
adressées;  elle  garantit  kéellement  à  sa  clientèle  des  instruments  irréprochables  sous  tous  les  rapports. 


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35'  Année. 


N'  6. 


9  Février  \m. 


ON   S'ABONNE  : 

Dans  les  DéporU-ments  et  à  l'Élranger, 

cheï  tous  les  Marchands  de  Musique,  les  Librairei, 

et  QUI  Bureaux  der.  Messageries  et  des  Postes. 


REVUE 


PRIX    DE    L'ABONNEMENT: 

Paris 2*  r.pari 

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Étranger ■•■    3*"      li- 

Le  Journal  parait  le  Dimanche. 


GAZETTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


Nos  abonnés  reçoivent,  avec  le  numéro  d'aujourd'hui, 
une  roni,ance  nouvelle  composée  par  Tb.  Palmer,  Inti- 
tulée :  /Si  voMs  n'ave»  rien  à  me  aire,  poésie  de 
Victor  Hugo. 


SOMMAIRE.  —  Théâtre  des  Fantaisies  -  Parisiennes  :  la  Croisade  des  Dames, 
l'Elixir  de  Cornélius  et  le  Farfadet. —  Concerts  populaires  de  musique  classi- 
que au  cirque  Napoléon,  par  Armand  Qonzien.  —  Le  Trésor  des  Pia- 
nistes (11'  et  12'  livraison),  par  Fétts  père. —  Entrefilets. —  Concerts  et  audi- 
tions musicales  de  la  semaine.  —  Nouvelles  des  théâtres  lyriques.  —  Nouvelles 
diverses.  —  Annonces. 


THÉÂTRE  DES  FANTÂISIES-PÂRISIENSES. 

La  Croisade  des  Daines,  opéra-comique  en  un  acte,  paroles 
de  M.  Victor  Wilder,  musique  posthume  de  François  Schubert. 
—  L'Elixir  de  Cornélius,  opéra-comique  en  un  acte,  pa- 
roles de  MM.  Henri  Meilhac  et  Arthur  Delavigne,  musique  de 
M.  Emile  Durand.  —  Reprise  du  Farfadet,  opéra-comique  en 
un  acte,  d'Adolphe  Adam. 

(Réouverture,  le  lundi  3  février  1868.) 

I/intelligent  directeur  des  Fantaisies-Parisiennes  vient  de  rema- 
nier sa  salle,  et  de  lui  donner  enfin  l'aspect  d'un  véritable  théâtre. 
Outre  le  vaste  orchestre  et  les  loges  du  fond  qui  existaient  déjà, 
on  y  trouve  aujourd'hui  une  galerie  flanquée  de  loges,  un  pour- 
tour et  des  avant- scènes  disposés  avec  goût  et  suffisamment  dé- 
gagés. Il  résulte  de  cet  agencement  une  notable  augmentation  de 
places,  auxquelles  le  public  ne  manquera  pas,  si  nous  en  jugeons 
d'après  l'effet  produit  par  la  soirée  de  réouverture. 

La  pièce  de  résistance  de  ce  spectacle  d'inauguration,  la  Croisade 
des  Dames,  est  une  œuvre  posthume  de  François  Schubert,  l'auteur 
du  Roi  des  Aulnes  et  de  tant  d'autres  mélodies  devenues  populaires 
en  Allemagne  et  en  France.  On  ignorait  généralement  que  Schubert 
eût  travaillé  pour  le  théâtre,  et  ses  biographes  nous  apprennent, 
en  effet,  que  ce  compositeur,  mort  jeune  en  1828,  n'a  jamais  eu. 


dans  sa  patrie,  un  opéra  représenté  de  son  vivant.  Mais  il  en  a 
laissé  plusieurs,  et  l'un  d'eux,  celui  qui  nous  occupe,  a  vu  le  jour 
de  la  rampe  à  Francfort,  en  1861,  sous  le  titre  des  Conjurées. 
Nous  ignorons  si  cet  ouvrage  est  le  même  que  la  Croisade  des 
Dames;  cependant,  il  est  supposable  que  M.  Victor  Wilder  en  a 
conservé  le  fond,  qui  d'ailleurs  est  emprunté  à  Lysistrata,  une  co- 
médie d'Aristophane,  tant  il  est  vrai  qu'il  n'y  a  rien  de  nouveau 
sous  le  soleil.  La  guerre  du  Péloponnèse  durait  depuis  vingt  et  un 
ans,  au  grand  dommage  des  Grecs,  lorsque  le  poète  athénien  fit 
entendre  sa  voix  en  faveur  de  la  paix,  et,  par  une  fiction  bizarre, 
suggéra  aux  femmes  la  pensée  de  tenir  leurs  maris  à  distance  jus- 
qu'à la  conclusion  d'un  traité  avec  les  Lacédémoniens.  A  la  place 
des  Athéniennes,  mettez  les  châtelaines  du  xi'  siècle;  à  la  place 
des  Athéniens,  mettez  les  croisés  de  la  Palestine,  et  vous  aurez  la 
pièce  de  M.  Wilder.  Cette  tentative  de  rajeunir  et  de  franciser  Aris- 
tophane avait  déjà  été  faite  en  1801,  au  théâtre  Feydeau,  par 
Hoffmann  le  critique  ;  mais  sa  pièce,  dans  laquelle  on  retrouve  à 
peu  près  les  mêmes  situations  que  dans  celle  de  M.  Wilder,  fut 
défendue  par  ordre.  Pourquoi?  Le  Consulat  avait  ramené  la  paix, 
mais  peut-être  prévoyait-on  déjà  la  reprise  de  la  guerre,  et  dès 
lors  Hoffmann  était  mal  venu  à  donner  de  perfides  conseils  aux 
femmes  de  nos  héros  futurs. 

O,u'on  nous  pardonne  cette  digression  qui  ne  manque  pas, 
croyons-nous,  d'un  certain  intérêt  historique  Nous  revenons  à  la 
Croisade  des  Dames,  et  nous  nous  empressons  de  constater  que  non- 
seulement  le  livret  de  M.  Wilder  est  amusant  et  spirituel,  mais  aussi 
que  la  direction  n'a  rien  négligé  pour  le  faire  valoir.  La  mise  en 
scène  est  aussi  satisfaisante  que  possible,  et  l'entrée  des  femmes 
armées  en  guerre  forme  un  brillant  tableau.  Nous  ne  pensons  pas 
qu'il  soit  possible  de  tirer  un  meilleur  parti  du  cadre  étroit  dans 
lequel  se  meuvent  tant  de  personnages. 

Quant  à  la  musique  de  Schubert,  c'est  la  plus  charmante  des 
surprises.  La  partie  chorale  est  surtout  remarquable;  on  y  ren- 
contre une  puissance,  une  largeur  d'harmonie,  qui  prouvent  que 
si  Schubert  avait  vécu  l'opéra  germanique  compterait  un  digne  re- 
présentant de  plus.  Rien  de  plus  entraînant  que  le  chœur  :  Guer- 
riers et  chevaliers,  que  l'on  a  redemandé  à  grands  cris;  rien  de 
plus  scénique  et  de  plus  coloré  que  l'introduction,  que  le  morceau 
de  la  rencontre  des  croisés  avec  leurs  femmes,  et  que  l'ensemble 


42 


lŒVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


final.  L'orchestration  mérite  aussi  nos  éloges  pour    sa   netteté  et 
pour  sa  sobriété  en  quelque  sorte  substantielle. 

Mme  Décrois  joue  t\  merveille  le  rôle  de  la  baronne,  qui  corres- 
pond à  la  Lysisirata  du  poète  grec.  Géraizer  est  fort  plaisant  sous 
es  traits  du  vieux  croisé  qui  déjoue  la  conjuration  des  femmes. 
L'écuyer  Hector  a  pour  interprèle  Laurent,  qui  est  à  la  fois  un 
bon  comédien  et  un  chanteur  agréable.  Mlle  Arnaud  est  bien 
jolie  sous  son  costume  de  châtelaine,  et  Mlle  Alice  Vois  fait  preuve 
de  finesse  dans  le  rôle  de  la  soubrette  Suzanne. 

La  transmigration  des  âmes,  prise  au  comique,  défraie  le  sujet 
de  VJEliœir  de  Cornélius.  Un  soudard  facétieux  persuade  au  docteur 
Cornélius  qu'il  a  été  victime  d'une  séduction  rétrospective,  il  y  a 
bien  cinq  cents  ans,  de  la  part  de  sa  nièce  Frédérique,  alors  qu'il 
était  fille  et  qu'elle  était  garfon.  Aujourd'hui  que  les  rôles  sont 
changés,-  il  vient  demander  réparation  au  docteur  des  déportements 
de  sa  nièce,  et  celui-ci  est  trop  heureux  de  terminer  le  dill'érend 
par  un  mariage. 

Ce  petit  opéra  comique  est  l'œuvre  fort  réussie  de  deux  liommes 
d'esprit,  M.  Henri  Meilhac,  l'un  des  auteurs  de  la  Grande-Duchesse, 
et  M.  Arthur  Delavigne,  le  fils  du  poëte  des  Messéniennes.  La  mu- 
sique est  le  début  au  théâtre  de  M.  Emile  Durand,  lauréat  du 
Conservatoire,  qui  s'est  fait  connaître  par  quantité  de  jolies  romances, 
parmi  lesquelles  nous  citerons  :  Comme  à  vingt  ans,  l'Arbre  mort, 
la  Vedctie  surprise,  etc.  M.  Emile  Durand  est  mélodiste;  le  motifs 
faciles,  gracieux  et  distingués,  abondent  dans  l'Elixir  de  Cornélius. 
On  y  a  principalement  applaudi  l'air  du  Docteur,  où  il  explique 
son  syslème,  une  chanson  militaire,  une  sérénade  et  un  quatuor 
final. 

Bonnet  a  des  tics  et  parle  un  patois  ébourilfants  dans  le  rôle  du 
faux  soudard.  Celui  du  docteur  Cornélius  est  joué  d'une  façon 
plaisante  par  Derval,  qui,  sans  doute,  aura  montré  plus  de  mémoire 
à  la  deuxième  représentation  qu'à  la  première.  Les  deux  person- 
nages féminins  sont  bien  remplis  par  Mme  Decroix  et  par  Mlle 
Labarre,  la  gentille  nièce  du  docteur. 

H  nous  reste  à  parler  du  Farfardet,  d'Adolphe  Adam,  qui  fut  re- 
présenté à  i'Opéra-Comique  en  18Sâ,  et  que  M.  Martinet  a  eu  la 
bonne  inspiration  de  reprendre  i\  son  théâtre.  Cet  ouvrage,  qui 
avec  la  Poupée  de  Nuremberg  est  une  des  productions  légères  les 
plus  agréables  de  l'auteur  du  Chalet,  n'a  rien  perdu  de  sa  fraî- 
cheur ni  de  son  élégante  vivacité.  Tous  ces  motifs  heureux  qu'A- 
dam semait  avec  tant  de  profusion  et  de  facilité  jusque  dans  ses 
moindres  opéras  sont  toujours  entendus  avec  un  vif  plaisir.  Le 
livret  de  M.  de  Planard,  s'il  a  un  peu  vieilli,  n'en  offre  pas  moins 
des  situations  piquantes  et  musicales,  dont  le  compositeur  a  doublé 
le  prix  par  son  habile  coopération.  A  son  origine,  le  Farfadet 
n'eut  pas  moins  d'une  cinquantaine  de  représentations  consécu- 
tives et  était  fort  bien  joué  par  Lemaire,  Bussine,  Jourdan,  Mlles 
Talmon  et  Lemercier.  Aujourd'hui, il  a  pour  interprètes:  Guyard, 
Masson,  Barnolt,  Mlle  Géraizer  et  Mlle  Deneux,  qui  ne  font  pas 
trop  regretter  leurs  devanciers. 

Nous  ne  finirons  pas  sans  féliciter  M.  Constantin  et  son  or- 
chestre, qui  ont  eu  leur  ample  part  de  succès  dans  cette  soirée 
féconde. 


Quoique  nous  n'ayons  pas  l'habitude  de  relever  toutes  les  fautes 
typographiques  qui  échappent  à  la  rapidité  de  la  composition,  et 
qui  sont  d'ailleurs,  pour  la  plupart,  corrigées  par  la  sagacité  de 
nos  lecteurs,  nous  ne  pouvons  laisser  passer  sans  protestation  la 
coquille  qui  nous  a  fait  dire,  dans  notre  dernière  Revue  des 
Théâtres,  que  le  rôle  de  Coquelin  était  pathétique,  lorsque  nous 
avions  écrit  antipathique,  ce  qui  est  bien  différent. 


COHCERTS  POPOLAIRES  DE  IDSIQUE    CLASSIQUE 

AU    CIRQUE    NAPOLÉON 

L'accueil  très -sympathique  fait,  l'année  dernière,  aux  deux 
premiers  morceaux  de  la  suite  d'orchestre  de  M.  Massenet  a  décidé 
M.  Pasdeloup  à  l'exécuter  en  entier  cette  année,  et  ce  n'était  pas, 
pour  ceux  qui  aiment  à  voir  poindre  l'aurore  des  talents  nou- 
veaux, le  moindre  attrait  du  dernier  concert.  La  petite  tempête 
qu'elle  a  soulevée  a  mis  en  évidence  le  nom  d'un  jeune  composi- 
teur à  qui  on  ne  peut  au  moins  refuser  le  talent  d'agiter  la  foule. 

Nous  avons  rendu  compte  des  deux  frag-ments  exécutés  l'an 
passé. 

Le  thème  de  Vandante  qui  suit  et  qu'on  entendait  pour  la 
première  fois  est  d'une  belle  ligue  mélodique  :  la  clarinette  en  fait 
pressentir  les  développements  en  l'indiquant,  sobrement  accompa- 
gnée par  les  instruments  à  cordes.  La  harpe  joue  ù  notre  avis, 
comme  sonorité,  un  rôle  trop  important  dans  la  composition  har- 
monique du  moi'ceau,  si  l'on  considère  l'obstination  de  ses  arpèges 
ascendants . 

Toutes  les  témérités  et  toutes  les  hardiesses,  qui  ont  excité  les 
applaudissements  et  les  protestations,  sont  renfermées  dans  la 
marche  et  le  finale  :  hardiesse  de  conception,  de  puissante  sono- 
rité, de  développements  d'un  côté  ;  de  l'autre  témérité  d'accouplements 
d'instruments,  et  maigreurs  d'orchestration  que  le  ton  de  fa  mineur 
laisse  entendre  encore  plus  que  le  mariage  des  timbres  de  la  cimbale 
et  de  la  harpe.  Toutefois  de  hardiesse  et  témérité,  le  total  est  talent. 

Aussi  malgré  ces  critiques,  n'oublions  pas  que  M.  Massenet  est  à 
l'âge  où  l'on  copie  encore  et  qu'on  sent  qu'il  s'est  affranchi  et  qu'il 
veut  marcher  librement.  H  a  ce  qu'on  pourrait  appeler  du  «  tempé- 
rament. »  Avec  cela  on  est  discuté,  mais  on  sait  se  faire  une  place 
au  grand  jour  et  la  critique  doit  crier  :  Courage  ! 

Au  même  concert  on  a  beaucoup  applaudi,  et  comme  il  le 
méritait,  un  solo  de  cor,  la  Séparation,  de  Lorenz,  joué  par  M.  Mohr; 
on  l'eût  certes  bissé,  isi  le  thème  de  la  romance  n'eût  été  plu  - 
sieurs  fois  répété  dans  le  morceau.  C'est  la  perfection  absolue;  il 
y  a  des  instants  où  l'on  est  tenté  de  croire  que  l'exécutant  a  sup- 
primé les  «  sons  bouchés,  »  tant  est  grande  l'homogénéité  de  son 
jeu. 

La  splendide  et  immortelle  symphonie  en  ut  mineur  terminait 
le  concert  et  elle  a  eu  son  succès  accoutumé. 

Armand  GOUZIEN. 


LE  TRÉSOR  DES  PURISTES. 

('/'/'  et  IT  livraisons).  (1). 

Un  meilleur  titre  que  Trésor  des  Pianistes  n'aurait  pu  être 
trouvé  pour  la  splendide  collection  des  chefs-d'œuvre  dont  la  pu- 
blication a  été  commencée  par  feu  notre  excellent  ami  Aristide 
Farrenc,  et  que  sa  veuve,  si  digne  d'intérêt  par  son  talent  viril  de 
compositeur  et  par  les  résultats  de  son  enseignement,  continue 
avec  autant  de  goût  et  d'intelligence  que  d'abnégation.  Les  éloges 
que  j'ai  donnés  à  cette  courageuse  entreprise  dans  les  comptes 
rendus  du  contenu  des  dix  premières  livraisons  ont  été  de  nouveau 
justifiés  par  les  onzième  et  douzième,  où  se  trouvent  réunies  des 
compositions  d'une  haute  valeur,  dont  la  plupart  sont  aujourd'hui 
si  rares,  qu'il  serait  à  peu  près  impossible  d'en  prendre  connais- 
sance si  l'éditeur  du  Trésor  des  Pianistes  ne  les  avaient  remises 
en  lumière. 

Le  volume  de  la  onzième  livraison  renferme  :  1°  cinq  sonates  et 

(1)  Paris,  Mme  veuve  Farrenc,  rue  Taitbout,  10. 


DE  PARIS. 


43 


quatre  rondos  pour  clavecin,  10°  recueil  d'Emmanuel  B.icli; 
2°  onze  sonates  de  clavecin,  en  deux  suites,  par  Christophe  Ni- 
chelmann  ;  3°  seize  pièces  de  Dominique  Scarlatti  (n°  78  à  94)  ; 
4°  cinq  caprices  et  six  suites  de  Jacques  Froberger,  dont  la  vie  fut 
un  roman,  et  le  talent  un  digne  précurseur  de  Jean-Sébastien  Bach; 
S"  et  enlin,  la  première  partie  du  premier  œuvre  de  musique  de 
clavecin  de  ce  grand  Bach,  consistant  en  exercices  divisés  en  six 
suites. 

Dans  la  douzième  livraison  se  trouvent  :  1°  le  troisième  livre 
des  pièces  de  clavecin  de  François  Couperin  ;  2°  une  toccate  de 
Jean  Kuhnau;  3°  introduction  et  rondo  par  J.-N.  Hummel,  pour 
piano,  op.  19;  4o  diverses  pièces  de  clavecin,  2'=  et  3«  recueils  de 
Philippe  Kirnberger;  S"  deux  sonates  de  VoUrath  Buttstedt;  6"  six 
préludes  et  fugues  par  Ernest  Eberlin  ;  7°  la  sonate,  œuvre  101, 
et  la  grande  sonate,  œuvre  106,  de  Beethoven.  C'est  le  monde  de 
la  musique  traversé  d'un  pôle  à  l'autre. 

Les  lecteurs  de  la  Revue  et  Gazelle  musicale  n'attendent  pas  de 
moi,  sans  doute,  une  analyse  suivie  de  tant  d'œuvres  de  styles  si 
diiférents;  je  me  bornerai  à  l'aperçu  sommaire  des  choses  les 
moins  connues  aujourd'hui,  lesquelles,  n'eussent-elles  pas  le  mé- 
rite essentiel  qui  les  distingue,  seraient  encore  dignes  d'intérêt, 
ne  fût-ce  que  par  curiosité,  à  cause  de  la  renommée  historique 
de  leurs  auteurs  et  de  leur  rareté  excessive. 

Je  n'ai  plus  d'éloges  nouveaux  à  donner  à  Gharles-Philippe- 
Emmanuel  Bach  ;  je  ne  pourrais  que  répéter  ce  que  j'ai  dit  plu- 
sieurs fois  du  sentiment  exquis  de  ce  grand  musicien  et  de  son 
génie  d'invention  dans  la  forme.  Je  ne  puis  cependant  résister  au 
désir  de  signaler  à  l'attention  des  artistes  la  cinquième  sonate  de 
ce  recueil  (en  fa  mineur),  oij.  tout  est  beau,  original,  inspiré,  et 
que  couronne  si  bien  la  fantaisie  en  ut  mineur  dont  elle  est  suivie. 
Nichelmann,  qui  fut  attaché  à  la  musique  du  roi  de  Prusse  Fré- 
déric II,  n'a  pas  laissé  un  des  grands  noms  qui  traversent  les 
siècles.  Ses  inspirations  ne  vont  pas  très-haut,  mais  elles  ont  du 
charme,  une  certaine  naïveté  gracieuse  et  de  l'élégance  dans  la 
forme.  Il  était  d'ailleurs  claveciniste,  et  sa  musique,  en  dépit  de 
son  apparente  simplicité,  n'est  pas  d'une  exécution  facile,  à  cause 
de  la  rapidité  des  mouvements.  La  troisième  sonate  de  son  pre- 
mier œuvre  (en  ut  mineur)  a  un  parfum  d'Emmanuel  Bach.  Ni- 
chelmann a  fait  un  livre  qui  a  pour  titre  :  La  Mélodie  comidérée 
en  elle-même  ainsi  que  dans  ses  propriétés  (1).  Il  avait  le  droit  de 
parler  sur  ce  sujet,  car  il  était  essentiellement  mélodiste;  ses  Lie- 
der,  pleins  de  sentiment,  sont  répandus  dans  les  recueils  de  son 
temps.  Son  deuxième  œuvre  de  sonates  a  paru  sous  ce  titre  naïf: 
Brevi  sonate  da  cembalo  aU'uso  di  chi  ama  il  cembalo,  massime  délie 
Dame.  Massime  délie  Dame  aurait  dû  procurer  un  succès  de  vogue 
à  l'œuvre  de  Nichelmann  ;  mais  il  est  à  peu  près  certain  qu'il  n'en 
vint  jamais  un  exemplaire  en  France.  Imprimée  à  Nuremberg,  en 
1749,  et  quelques  années  plus  tard,  la  musique  de  cet  artiste  se- 
rait à  jamais  ignorée  si  Mme  Farrenc  ne  l'eût  fait  revivre  dans  sa 
belle  collection. 

Il  n'y  a  guère  de  pianiste  de  talent  aujourd'hui  qui  ne  consi- 
dère Dominique  Scarlatti  comme  un  homme  de  génie,  sauf  ceux  de 
l'école  échevelée  d'il  y  a  quelques  années,  qui  déjà  sont  chauves, 
et  ne  laisseront  rien  dont  on  se  souvienne.  Il  paraît  donc  à  peu 
près  inutile  de  parler  de  la  fécondité  d'inspiration  du  célèbre 
claveciniste,  de  la  variété  de  ses  idées,  de  l'originalité  qui  a  fait 
de  sa  musique  quelque  chose  à  part;  mais  il  n'est  peut  être  pas 
hors  de  propos  de  rappeler  que  cette  musique  si  piquante  d'effet 
est  l'œuvre  d'un  artiste  mort  il  y  a  cent  onze  ans,  dans  un  âge 
avancé. 


(1)  Die  Mélodie  nach  ihren   Wesen  sowohl  als  nach  ihren  Eiyenschaften, 
Dantzlck,  1733. 


Artiste  de  premier  ordre,  par  l'habileté  dans  l'art  d'écrire 
comme  par  le  talent  d'exécution,  Froberger  est,  sans  aucun  doute, 
le  claveciniste  le  moins  connu  chez  les  pianistes  de  notre  époque; 
cependant  il  fut,  ainsi  que  son  maître  Frescobaldi,  le  créateur  de 
la  grande  école  des  instruments  à  clavier;  car  il  n'était  pas  moins 
remarquable  dans  ses  improvisations  sur  l'orgue  que  dans  ses 
pièces  pour  le  clavicorde  et  le  clavecin.  Bien  différent  des  ar- 
tistes de  notre  temps,  Froberger  mourut  sans  avoir  rien  publié  de 
ses  ouvrages.  Des  admirateurs  de  son  talent  en  firent  imprimer 
deux  recueils  à  Mayence  après  son  décès,  en  1696  et  1714.  Les 
exemplaires  en  sont  si  rares,  que  j'ai  fait  chercher  en  vain  ces 
ouvrages  en  Allemagne,  depuis  un  grand  nombre  d'année;.  Pour 
les  insérer  dans  son  Trésor  des  Pianistes,  Mme  Farrenc  u  dû  en 
faire  prendre  des  copies  collationnées  d'après  les  exempkiires  de 
la  Bibliothèque  royale  de  Berlin. 

C'est  donc  dans  le  Trésor  des  Pianistes  que  les  pianistes  jieuvent 
aujourd'hui  connaître  les  titres  de  Froberger  à  la  grande  renommée 
qu'il  obtint  de  son  temps  ;  mais  après  avoir  lu  et  exécuté  cette 
musique  de  grande  école,  personne  ne  sera  tenté  de  lui  contester 
la  légitimité  de  la  réputation  dont  l'artiste  jouit  parmi  ses  con- 
temporains. Prédécesseur  de  Jean-Sébastien  Bach,  il  a,  comme  ce 
grand  homme,  l'art  d'introduire,  dans  ses  caprices  fugues,  des 
épisodes  inattendus  dont  s'accroît  l'intérêt  jusqu'à  la  fin.  des  piè- 
ces. L'harmonie,  riche,  pure,  a  des  cadences  d'inganno  très-pi- 
quantes et  d'heureuses  modulations.  Comme  éludes  pour  les  pia- 
nistes, cette  musique  a  d'ailleurs  de  l'intérêt,  car  elle  offre  d'assez 
grandes  difficultés  d'exécution.  Dans  ses  suites,  Froberger  a  des 
pièces  charmantes  parmi  ses  allemandes,  gigues,  courantes  et  sa- 
rabandes. La  sixième  sonate  est  particulièrement  intéressante  par 
un  air  intitulé  la  Mayerin,  avec  cinq  variations,  une  courante  et 
une  sarabande  sur  le  même  thème. 

Les  suites  de  pièces  de  clavecin  de  Jean-Sébastien  Bach,  où  le 
génie  du  maître  se  montre  à  chaque  page,  sont  moins  connues  en 
France  et  en  Belgique  que  ses  quarante-huit  préludes  et  fugues 
du  clavecin  bien  tempéré  ;  je  ne  puis  donc  que  féliciter  Mme  Far- 
renc de  leur  avoir  donné  une  place  dans  son  Trésor  des  Pianis- 
tes, car  il  n'en  existe  pas,  je  crois,  d'édition  française.  Comme 
toute  sa  belle  collection,  la  sienne  est  splendide  d'exécution  typo- 
graphique et  d'une  correction  irréprochable. 

Tel  est  le  contenu  de  la  onzième  livraison  du  Trésor,  dont  l'in- 
térêt peut  être  apprécié  par  ce  qui  vient  d'être  dit.  La  douzième 
livraison  n'est  pas  moins  digne  d'attention  par  la  variété  de  style 
des  maîtres  dont  les  compositions  y  sont  réunies. 

Dans  les  comptes  rendus  des  premières  livraisons  du  Trésor  des 
Pianistes,  j'ai  dit  ce  qui  distingue  la  manière  de  François  Couperin, 
dit  le  grand  Couperin,  pour  le  distinguer  des  autres  membres  de 
sa  famille,  qui  étaient  néanmoins  d'habiles  artistes.  Cette  manière, 
plus  mélodique  que  celles  de  maîtres  allemands  du  môme  temps, 
se  prononce  davantage  dans  le  troisième  livre  que  dans  les  deux 
précédents.  C'est  ce  troisième  livre  que  Mme  Farrenc  a  reproduit 
dans  la  douzième  livraison  de  sa  collection.  Suivant  l'usage  de  son 
temps  en  France,  Couperin  ne  se  bornait  pas,  comme  les  clavecinis- 
tes de  l'Allemagnt,  à  composer  ses  suites  de  préludes,  allemandes, 
courantes,  sarabandes,  gigues  et  autres  mouvements  de  danse; 
il  leur  donnait  des  titres  de  fantaisie  que  le  caractère  de  la  musi- 
que n'explique  guère,  et  dont  quelques-uns  ne  sont  pas  exempts 
de  ridicule,  comme  la  Pudeur  sous  le  domino  couleur  de  rose, 
l'Ardeur  sous  le  domino  couleur  d'incarnat,  l' Espérance  sous  le  do- 
mino vert,  la  Persévérance  sous  le  domino  gris  de  lin,  et  d'autres 
de  ce  genre.  Il  est  évident  que  la  musique  n'a  rien  à  faire  avec 
ces  fadaises;  mais,  laissant  à  part  le  mauvais  goût  de  ces  inscrip- 
tions qui  appartenait  ù  la  mode  du  temps  de  la  régence,  on  com- 
prend que,  libre  de  ses  allures  dans    cette  voie    de  fantaisie,  au 


44 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


lieu  de  s'astreindre  aux  mouvements  déterminés  de  certaines 
danses,  le  talent  de  Couperin  devait  se  manifester  avec  plus  d'ori- 
ginalité et  de  variété.  Telles  sont  en  réalité  les  qualités  qui  dis- 
tinguent éminemment  ses  œuvres  et  leur  assurent  une  place  très^ 
distinguée  parmi  les  monuments  de  l'histoire  de  l'art.  Couperin 
n'a  pas  la  force  d'harmonie  de  la  grande  école  allemande  de  son 
temps;  mais  il  a  plus  de  grâce,  de  charme,  d'oppositions  heu- 
reuses dans  les  divers  caractères  de  ses  morceaux.  S'il  procède 
jusqu'à  certain  point  de  l'école  française  de  Chambonnières,  il  a 
bien  plus  d'abondance  d'idées,  plus  d'élégance  dans  la  forme  que 
ce  vieux  maître. 

Dans  mes  comptes  rendus  des  premières  livraisons  du  Trésor, 
j'ai  rendu  justice  au  mérite  considérable  des  compositions  de  Jean 
Kuhnau  pour  le  clavecin.  Aux  pièces  déjà  publiées  de  cet  artiste 
dans  cette  collection,  Mme  Farrenc  ajoute  ici  une  toccate  très-di- 
gne d'intérêt  par  le  caractère  dramatique  de  toute  la  première 
partie,  ainsi  que  par  l'élégance  du  mouvement  fugué  dont  elle  est 
suivie. 

L'introduction  et  rondo  de  Hummel,  qui  suit  cette  loccate,  nous 
introduit  dans  une  autre  province  du  monde  musical:  les  allures 
y  sont  très-dilférentes  de  celles  que  nous  venons  de  signaler.  Cette 
composition  est  l'œuvre  dix-neuvième  de  l'artiste  ;  je  ne  la  con- 
naissais pas  avant  de  la  voir  ici,  mais  j'y  reconnais  pourtant  le 
style  du  maître  :  cela  est  mélodique,  gracieux  et  brillant  tour  à 
tour  ;  avec  cela  un  parfum  de  bonne  harmonie  et  de  distinction 
qui  se  sent  d'un  bout  à  l'autre. 

Des  menuets,  des- polonaises,  des  danses  de  divers  caractères,  des 
morceaux  sans  titres,  des  préludes  et  des  thèmes  variés  composent 
les  deuxième  et  troisième  recueils  des  pièces  de  Kirnberger,  dont 
j'ai  signalé  le  talent.  Tout  cela  compte  déjà  plus  d'un  siècle 
d'existence,  car  les  éditions  d'où  Mme  Farrenc  a  tiré  ces  pièces 
ont  paru  depuis  1761  jusqu'en  1766.  Kirnberger  était  un  savant 
musicien  connu  par  des  traités  d'harmonie  et  de  contre-point  qui 
ont  fait  sa  réputation  ;  cependant  il  méritait  davantage  par  ses 
compositions,  qui  sont  à  peine  connues  de  ses  compatriotes.  C'est 
en  quelque  sorte  une  réhabilitation  que  Mme  Farrenc  procure  à 
cet  ancien  maître,  en  reproduisant  des  œuvres  d'un  mérite  réel 
tombées  dans  l'oubli. 

C'est  aussi  une  sorte  de  résurrection  que  la  nouvelle  publication 
dans  le  Trésor  de  deux  sonates  de  Franz-Vollrath  Buttstedt,  pau- 
vre organiste  d'un  comte  de  Weikersheim,  dans  la  principauté  de 
Hohenlohe.  Où  diable  le  talent  va-t-il  se  nicher?  On  peut  le  de- 
mander à  ce  propos,  car  le  talent  et  la  distinction  ne  sont  pas 
contestables  dans  ces  deux  sonates.  Sans  vouloir  trop  insister  en 
faveur  du  thème  des  génies  inconnus,  on  ne  peut  nier  qu'il  a 
existé  des  hommes  heureusement  doués  auxquels  il  n'a  manqué 
que  d'être  placés  dans  un  milieu  favorable  pour  développer  leurs 
facultés  et  lixer  sur  eux  l'attention  générale.  Tel  fut  le  pauvre 
Buttstedt,  comme  on  pourra  en  juger  par  l'exécution  de  ses  so- 
nates. 

En  1847  parut  à  Augsbourg  un  recueil  intitulé  :  IX  Toccate  et 
fugue  per  l'Organo,  par  Jean-Ernest  Eberlin.  L'auteur,  dit  Gerber, 
était  porte-plat  et  maître  de  chapelle  de  l'archevêque  de  Salzbourg. 
En  vérité,  voilà  une  singulière  réunion  de  fonctions  dans  le  même 
homme.  Les  biographes  allemands  ne  savent  rien  de  la  vie  de  ce 
porte-plat,  qui  fut,  sans  aucun  doute,  un  des  grands  musiciens  de 
l'Allemagne  au  xvni'=  siècle,  quoiqu'on  n'en  eût  jamais  entendu 
parler  en  France.  Ce  fut  démenti  qui,  dans  un  voyage  en  Bavière, 
découvrit  l'œuvre  qui  constate  le  grand  talent  d'Eberlin,  et  le  fit 
connaître  en  s'empressant  de  le  publier  dans  sa  collection  de  pièces 
rares  des  grands  maîtres  pour  l'orgue  et  le  clavecin,  qui  parut  à 
Londres,  en  quatre  volumes.  Dès  ce  moment  l'attention  des  ar- 
istes  se  fixa  sur  la  valeur  considérable    de   ces  toccates  et  de  ces 


fugues  dont  Mme  Farrenc  donne  aujourd'hui  une  édition  nouvelle 
et  qui  figureront  toujours  parmi  les  plus  belles  choses  de  ce 
genre. 

Je  n'ai  point  à  parler  ici  des  sonates  de  Beethoven,  œuvres  101 
et  106;  j'en  ai  dit  mon  sentiment  ailleurs;  mais  je  ne  puis  que 
louer  Mme  Farrenc  de  leur  avoir  donné  place  dans  sa  collection, 
qui  doit  présenter  l'art  sous  toutes  ses  formes. 

FËTIS  père. 


Le  numéro  du  19  janvier  du  Journal  des  Débals  contenait  un 
article  très-remarquable  d'Ernest  Reyer  sur  Georges  Ivastner  et  ses 
œuvres.  Il  y  a  trop  peu  de  temps  que  notre  collaborateur  a  été 
enlevé  à  l'art  et  à  ses  amis,  pour  que  les  abonnés  de  la  Gazette 
musicale  ne  lisent  pas  avec  intérêt  la  reproduction  d'uriC  partie  de 
ce  travail,  dans  lequel  M.  Reyer  apprécie  si  consciencieusement 
l'homme  et  l'écrivain  : 

Georges  Kastner  vient  de  mourir.  Peu  de  nmsiciens  ont  eu  une  exis- 
tence aussi  laborieuse,  aussi  bien  remplie  que  celle  du  docteur  Jean- 
Georges  Ka'^tner.  Je  l'ai  beaucoup  connu  :  il  était  bon,  aflfable  et  toujours 
disposé  à  l'obligeance.  La  fortune  dont  il  jouissait  et  la  position  qu'il 
s'était  acquise  par  ses  travaux  sur  l'art  musical  lui  avaient  créé  de 
nombreuses  relations;  son  caraclère  honorable  et  ses  qualités  privées  lui 
avaient  fait  beaucoup  d'amis.  C  était  un  honnête  homme  et  un  homme 
heureux;  une  seule  chose  a  du  manquer  à  son  bonheur  :  très-apprécié 
comme  écrivain,  comme  savant,  Georges  Kastner  était  à  peine  connu 
comme  compositeur.  Et  pourtant  le  talent  qu'il  devait  à  de  sérieuses 
études,  et  dont  il  a  fait  preuve  dans  ses  diverses  compositions,  lui  don- 
nait les  mêmes  droits  qu'à  tant  d'autres  de  prétendre  à  la  renommée  et 
au  succès.  11  a  écrit  pour  le  ihéâtre  et  pour  le  concert.  Ses  opéras,  pas 
plus  que  ses  symphonies, ne  passeront  à  la  postérité;  mais  ses  livres  res- 
teront. La  plupart  sont  extrêmement  volumineux;  il  faut  les  avoir  lus 
(et  l'on  ne  regrette  pas  le  temps  qu'on  a  employé  à  les  lire)  pour  se 
faire  une  idée  de  l'érudition,  de  la  science  et  des  patientes  recherches 
que  l'auteur  y  a  dépensées.  Doué  d'une  activité  peu  commune,  Kastner 
n'a  jamais  refusé  de  faire  partie  d'aucune  commission,  d'aucune  associa- 
tion, d'aucun  jury,  et  partout  oii  son  concours  était  sollicité,  il  s'empres- 
sait d'apporter  son  expérience  et  sa  bonne  humeur,  son  affabilité  et  la 
sûreté  de  son  jugement.  Il  était  né  à  .Strasbourg,  et  c'est  là  qu'il  passait 
ses  vacances  pendant  la  belle  saison ,  mais  le  temps  des  vacances  n'était 
pas  pour  cet  infatigable  travailleur  un  temps  de  repos  absolu  ;  il  possédait 
en  double  une  fort  belle  bibliothèque  et  retrouvait  à  Strasbourg  les 
livres  qu'il  avait  laissés  à  Paris.  «  En  allant  d'une  de  ces  villes  dans 
l'autre,  nous  dit  M.  Fétis  dans  une  notice  fort  intéressante  sur  la  vie  et 
les  ouvrages  de  Georges  Kastner,  il  ne  faisait  que  changer  de  cabinet.  » 

Je  n'ai  point  ici  l'e-pace  nécessaire  pour  publier  la  liste  de  toutes  les 
ceuvres  auxquelles  Kastner  a  attaché  son  nom  ;  on  la  trouvera  très-com- 
plète et  très-détaillée  dans  la  Biographie  des  Musiciens,  de  M.  Fétis;  j'ai 
voulu  seulement,  avant  de  dire  quelques  mots  du  dernier  ouvrage  qu'il 
nous  a  laissé,  donner  un  souvenir,  un  regret  au  savant  écrivain,  au 
musicien  érudil  dont  la  mort  inattendue  a  été  une  douloureuse  surprise 
pour  ses  amis,  une  perte  vivement  sentie  dans  le  monde  des  arts. 

La  Parémiologie  musicale  de  la  langue  française  forme  un  volume  in-4'> 
qui,  avec  la  Saint-Mien  des  Ménétriers,  contient  plus  de  800  pages.  On 
doit  comprendre  que  je  serais  extrêmement  embarrassé  s'il  me  fallait 
faire  un  choix  parmi  la  quantité  innombrable  de  définitions  et  d'étymo- 
logies,  de  locutions  et  de  proverbes,  de  ren.'^eignements  et  de  faiis  histo- 
riques, d'anecdotes  et  de  citations  curieuses  renfermées  dans  ce  volume  ; 
car  ce  n'est  pas  aux  seules  expressions  proverbiales  de  la  France  que 
s'est  arrêté  l'auteur  de  la  Farémiologie  musicale  ;  il  a  poussé  ses  investi- 
gations beaucoup  plus  loin,  et  sa  parfaite  connaissance  des  langues  an- 
ciennes et  modernes  lui  a  permis  de  rechercher  en  Allemagne  et  en 
Italie,  en  Espagne,  en  Russie,  en  Angleterre  et  dans  l'ancienne  Grèce, 
les  locutions  populaires  qui  font  allusion  à  la  musique  et  dont  il  a  eu 
soin  de  conserver  le  texte  en  regard  de  la  traduction.  Georges  Kastner 
nous  dit  lui-même  le  très-grand  nombre  de  documents  auxquels  il  a  dû 
avoir  recours  pour  composer  son  livre,  et  il  nomme,  en  les  remerciant, 
tous  ceux  qui,  •  par  leur  empressement  à  lui  fournir  des  renseignements 
utiles  ou  à  lui  procurer  les  ouvrages  dont  il  avait  besoin,  lui  ont  épargné 
plusieurs  fois  des  retards  et  des  fatigues  qu'il  n'aurait  pu  éviter  sans  ce 
secours.  » 

Je  recommande  tout  particulièrement  au  lecteur  la  partie  du  volume 
consacrée  aux  musiciens  et  aux  artistes  dramatiques. 

«  A  chaque  groupe  de  virtuoses  se  rattache  un  ensemble  d'adages  tour 
à  tour  élogieux  et  s-atiriques.  Les  proverbes  cependant,  on  le  verra,  sont 
généralement  peu  charitables  pour  les  musiciens.  Ils  raillent  le  parasi- 


DE  PARIS. 


të 


tisme  et  la  cupidilé  des  troubadours  et  dos  nicneslrels,  l'insolence  et  la 
vanité  du  chanteur,  l'insouciance  et  la  prodigalité  du  ménétrier,  la  lenteur 
et  la  paresse  du  vielleux,  du  musard  et  du  cornerausard,  l'ignorance  et 
la  rusticité  du  tambour,  l'indiscrétion  et  la  lulLlerie  bouffonne  du  troni- 
pette,  le  cvnisme  et  l'ivrognerie  du  chantre,  et  surtout  l'intempérance  du 
joueur  de  flûte,  si  bien  nonnné  llûleur,  type  du  prodigue  et  du  débauche. 
A  en  croire  l'ironie  proverbiale  de  nos  aïeux,  les  sept  pèches  capitaux 
ont  leurs  représentants  parmi  les  joyeux  adeptes  du  ijay  Saber.  » 

La  plupart  de  ces  proverbes  ont  une  date  qui  doit  rassurer  les  musi- 
ciens d'aujourd'hui. 

Le  livre  de  Georges  Kastner,  d'après  le  conseil  qu'il  donns  lui-même 
dans  sa  préface,  «  doit  être  lu  comme  il  a  été  écrit,  h  loisir  et  non  d'un 
trait.  Il  doit  être  parcouru,  feuillo'é,  ouvert  pour  ainsi  dire  au  hasard,  et 
peut-être  offrira-t-il  aux  uns  quelque  intérêt  scientifique,  aux  autres 
quelque  distraction  instructive  »  Ce  conseil  est  bon  à  suivre,  d'autant 
plus  que  l'ouvrage,  ainsi  que  je  l'ai  dit  plus  haut,  a  une  étendue  consi- 
dérable. 

Dans  la  symphonie-cantate  qui  a  pour  titre  la  Saint-Julien  des  Méné- 
triers, l'auteur,  avec  l'aide  d'une  plume  «  élégante  et  toute  française  », 
celle  de  M.  Edouard  Thierry,  a  cherché  à  grouper  quelques  inspirations 
tirées  de  son  sujet,  ainsi  qu'il  l'avait  déjà  fait  pour  des  œuvres  anté- 
rieures :  les  Voix  de  Paris,  la  Harpe  d'Eole,  les  Sirènes  et  la  Danse  des 
Morts.  La  Saint-Julien  des  Ménélriers,  sans  avoir  peut-être  les  qualités 
originales  qui  distinguent  le  Rêve  d'Oswald  ou  les  Sirènes  et  la  Danse 
Macabre,  mérite  cependant  de  fixer  l'attention  des  musiciens  par  l'intérêt 
du  travail  harmonique  et  les  procédés  ingénieux  de  l'instrumentation. 
{Deba  s.)  Ernest  Rêver. 


Les  journau.x  de  théâtre  se  sont  faits  cette  semaine  les  propaga- 
teurs d'un  canard  ridicule  au  sujet  de  la  Jeunesse  de  Goethe,  drame 
de  M.  Blaze  de  Bury,  pour  lequel  Meyerbeer  avait  composé,  quelque 
temps  avant  sa  mort,  un  intermède  musical.  Dans  l'intérêt  de  la 
vérité,  et  pour  réduire  une  fois  de  plus  à  leur  juste  valeur  les 
excentricités  qu'on  s'est  plu  à  attribuer  à  l'illustre  compositeur, 
nous  croyons  devoir  préciser  la  situation  en  la  dépouillant  des 
enjolivements  fantaisistes  dont  on  se  plaît  à  l'entourer. 

Meyerbeer,  avant  le  dernier  voyage  qu'il  lit  à  Paris  pour  la  re- 
présentation de  l'Africaine,  avait  en  effet  composé,  à  la  sollicitation 
de  M.  Blaze  de  Bury  qu'il  affectionnait,  un  intermède  musical  pour  la 
Jeunesse  de  Goethe,  et,  bien  probablement,  il  s'en  fût  occupé  après 
la  représentation  de  son  dernier  ouvrage.  Malheureusement  la  mort 
vint  mettre  obstacle  à  sa  bonne  volonté.  Or,  son  testament  ayant 
interdit  formellement  à  ses  héritiers  de  ne  rien  laisser  exécuter  de  la 
musique  qu'il  laissait  autre  que  l'Africaine,  il  devenait  impossible 
à  Mme  Meyerbeer  et  aux  exécuteurs  testamentaires  choisis  par  feu 
son  mari,  de  délivrer  à  M.  Blaze  de  Bury  la  partition  dont  il  récla- 
mait la  remise,  et  qui  faisait  partie  des  manuscrits  renfermés,  selon 
les  volontés  du  testateur,  dans  une  caisse  déposée  et  léguée  éven- 
tuellement à  la  Bibliothèque  royale  de  Berlin.  Maintenant  M  Blaze 
de  Bury  affirme  qu'un  eiiaggement,  résultant  de  sa  correspondance 
avec  Meyerbeer,  annule,  en  ce  qui  le  concerne,  l'interdiction  lormulée 
par  le  testament  du  défunt,  et  il  se  propose  d'intenter  aux  exécu- 
teurs de  ce  testament  une  action  en  délivrance  de  la  musique  qui 
lui  avait  été  promise.  M.  Blaze  de  Bury  est  dans  son  droit,  et  un 
jugement  du  tribunal  de  Berlin  peut  seul  en  effet  résoudre  la 
question.  Mais  il  est  assez  difficile  de  comprendre  que  le  nouvel- 
Ifste,  qui  le  premier  rapportait  un  tait  autsi  simple,  ait  cru  devoir 
se  mettre  en  frais  d'imagination  pour  substituer  à  la  Bibliothèque 
royale,  dépositaire  des  manuscrits  de  Meyerbeer,  «  quatre  braves 
corroyeurs  »  d'un  faubourg  de  Berlin,  qui  seraient  sans  doute  bien 
surpris  de  se  voir  figurer  en  cette  affaire  ! 


CONCERTS  ET  AUDITIONS  MSICÀLES  DE  LÀ  SEMAINE. 

if*if,  L'Ave  Maria  et  un  duo  religieux  de  I*  composition  de  M.  Auber, 
doivent  être  chantés,  aujourd'hui,  à  la  messe  de  la  chapelle  des  Tuile- 
ries, par  Mme  Conneau  et    Mlle   Bloch.  —  Dimanche    dernier,  c'était 


Mlle  Marie  Battu  qui  y  chantait  délicieusement  le  beau  Beneiictus  de 
M.  Auber. 

:j*j  Au  sixième  concert  du  Conservatoire,  le  2  février,  la  symphonie 
avec  chœurs,  dont  l'interprétation,  cette  fois  encore,  a  surpassé  en  per- 
fection l'exécution  du  dimanche  précédent,  a  produit  le  plus  ^rand  effet. 
Les  magnifiques  fragments  à'idoménée  de  Mozart,  si  dramatiques,  si  sai- 
sissants qu'on  les  attribuerait  volontiers  à  l'auteur  A'Alcette,  n'étaient  les 
trésors  de  sentiment  et  de  grâce  qu'on  y  découvre  et  qui  restèrent 
presque  toujours  un  livre  fermé  pour  Gluck  ;  les  fragments  A'idoménée 
ont  soulevé  un  véritable  enthousiasme,  qu'une  irréprochable  exécution 
augmentait  encore.  M.  Warot  a  très-bien  dit  le  solo.  Le  reste  du  concert 
se  composait,  comme  le  dimanche  précédent,  de  l'andante  de  la  -iQ» 
symphonie  de  Haydn  et  de  l'ouverture  d'Oberon. 

f*^  Dimanche  dernier,  à  la  seconde  réunion  artistique  donnée  par 
Mme  la  marquise  de  SafFray  à  ses  amis,  on  a  particulièrement  remar- 
qué et  applaudi  de  charmantes  compositions  du  maestro  Mattiozzi, 
Danse  d'amour  et  Polka  chantée,  dits  par  Mnies  Pcudefer  et  Boudié.  Mais 
le  principal  attrait  de  cette  matinée  était  la  lecture  d'un  poème  composé 
par  Mme  de  Saffray  en  l'honneur  du  célèbre  Joseph  Karam,  chef  des 
troupes  chrétiennes  du  mont  Liban  et  qu'elle  a  récité  sur  un  accompa- 
gnement de  piano.  On  a  fort  apprécié  et  chaleureusement  applaudi  les 
pensées  élevées  qui  ont  inspiré  l'auteur  et  la  belle  forme  poétique  qu'elle 
a  su  leur  donner.  Ce  morceau  ne  tardera  pas  a  paraître. 

**«  Dimanche  dernier  a  eu  lieu  chez  W.  Kriiger  la  première  réunion 
de  ses  élèves,  et  on  a  pu  apprécier,  par  la  façon  dont  elles  ont  joué  les 
morceaux  mis  au  programme,  la  supériorité  d'enseignement  de  l'excel- 
lent professeur.  Mlle  Em;na  Fumagaîii,  âgée  seulement  de  treize  ans,  a 
particulièrement  surpris  l'auditoire  par  son  jeu  aussi  brillant  qu'expres- 
sif. Georges  Pfeiffer  a  terminé  la  séance  en  jouant  admirablement  trois 
de  ses  plus  jolies  compositions.  —  C'est  lundi  16  mars  qu'aura  lieu  à  la 
salle  Herz  le  concert  annuel  de  W.  Kriiger. 

**.4f  Les  matinées  de  musique  de  chambre  de  iVl.  H.  Bonewitz  sont 
toujours  fort  suivies  et  très-intéressantes.  Nous  avons  eu  le  plaisir  d'ap- 
plaudir à  celle  de  dimanche  dernier  Mlle  Constance  Skiwa,  qui,  d'un  jeu 
brillant  et  délicat,  a  détaillé  avec  une  imperturbable  assurance  une  sonate 
ento  majeur  de  Beethoven  et  plusieurs  morceaux  de  Chopin,  de  Haendel 
et  de  Schumann.  Le  talent  de  Mlle  Skiwa  est  empreint  d'une  remar- 
quable individualité.  Le  concerto  pour  deux  pianos  de  M.  Bonewitz  est 
une  des  œuvres  les  plus  fouillées  et  les  plus  attrayantes  de  ce  composi- 
teur, qui  se  plaît  aux  savantes  recherches  de  la  forme  Mlle  Gastoldi 
excelle  à  interpréter  les  lieder  de  Schubert  :  il  serait  difficile  d'unir 
plus  de  sentiment  et  d'expression  personnelle  à  un  plus  grani  respect  de 
la  pensée  de  ce  maîire,  dont  1rs  mélo  lies  font  rêver  au  bonheur  quand 
elles  ne  portent  pas  au  désespoir. 

t'^st  Dimanche  dernier,  chez  M.  Edouard  Fournier,  le  critique  théâtral 
de  la  Patrie,  Delahaye,  a  exécuté  en  maître  la  grande  fantaisie  de  Pru- 
dent sur  le  Domino  noir,  et  un  ravissant  nocturne  de  Chopin. —  Ces  deux 
morceaux  et  leur  brillant  interprète  ont  été  l'objet  d'un  succès  très- vif  et 
d'autant  plus  flatteur  que  l'auditoire  était  des  plus  compétents. 

»*j,  La  matinée  donnée  dimanche  dernier  par  Mme  Pierson-Bodin  a 
mis  de  nouveau  en  lumière  les  remarquables  progrès  accomplis  par  ses 
élèves,  et  la  supériorité  de  .'on  enseignement. 

^**  Nous  parlerons  prochainement  dts  remarquables  soirées  musicales 
que  donne  tous  les  quinze  jours  notre  excellent  collaborateur  Paul  Ber- 
nard, et  dans  lesquelles  ses  élèves  se  montrent  de  véritables  artistes. 

^'^*  Un  brillant  festival  sera  donné  dimanche  prochain  16  février,  à 
une  heure  et  demie,  dans  le  cirque  de  l'Impératrice,  aux  Champs-Ely- 
sées, par  l'Association  des  Sociétés  chorales  de  Paris  et  du  département 
de  la  Seine.  Cinq  cents  exécutants  prendront  part  à  cette  solennité,  en 
exécutant  des  œuvres  d'Adolphe  Adam,  François  Bazin ,  Laurent  de 
Rillé,  Rameau,  Weber,  etc.  Les  premiers  artistes  de  la  capitale,  ainsi 
que  l'excellente  musique  de  la  Garde  de  Paris,  prêteront  également  leur 
concours  à  cette  fête  magnifique. 

»'**  Mme  J.  Martin-Robinet,  l'habile  pianiste  qui  se  fait  applaudir 
tous  les  ans  à  Vichy  pendant  la  saison  des  eaux,  et  qui,  l'hiver  à  Paris, 
tient  un  cours  des  plus  intéressants,  doit  donner  un  fort  beau  concert  le 
17  de  ce  mois,  à  huit  heures  et  demie  du  soir,  dans  les  salons  de  Pleyel- 
Wolff,  avec  le  concours  de  MM.  Auguate  Durand,  Penavaire,  Robinet, 
Dragone  et  Cordiez.  On  finira  par  une  opérette. 

^*^  Rubinstein  parcourt  en  ce  moment  l'Allemagne,  et  il  obtient  de 
grands  succès  dans  les  nombreux  concerts  qu'il  y  donne.  Il  se  rendra  de 
là  en  Hollande  oîi  des  engagements  fort  brillants  l'appellent,  et  il  sera  à 
Paris  au  mois  de  mars  pour  se  faire  entendre  dans  plusieurs  grands 
concerts  qui  s'organisent  en  ce  moment  pour  lui. 

^*^  En  attendant  le  grand  concert  qu'il  doit  donner  au  mois  de  mars 
prochain,  le  pianiste  composieur  D  Magnus  va  faire  entendre  samedi 
15,  dans  les  salons  Pleyel-Woltf,  plusieurs  de  ses  dernières  compositions, 
au  nombre  desquelles  la  Tsigane-Marche  destinée  sans  aucun  doute  au 
succès  qui  a  accueilli  la  Taraboukha. 

jf\  Mlle  Marie  Mongin,  l'excellente  pianiste,  sortie  avec  éclat,  il  y  a 
quelques  années,  de  notre  Conservatoire,  est  engagée  pour  jouer  au  pro- 
chain   concert  du   Conservatoire   de  Bruxelles.  Elle  y  exécutera,    sous 


4é 


itEvi;)-.  i;t  c.vzette  musicale 


riiabile  (lirfclion  de  II.  Fétis,  le  concerto  en  ut  mineur  de  Muzart  (n"  7) 
et  une  fantaisie,  avec  orclicstre,  de  Mme  Fiirrenc. 

»**  Lo  pnblic  parisien  va  être  trèK-prochainomenl  appelé  à  juger  un 
talent,  merveillenx,  dit-on,  sur  la  fliite,  M.  Ramirez  Valdès,  d'Orizava, 
en  Amérique.  11  arrive  du  moins  précédé  des  succès  extraordinaires  qu'il 
y  a  obtenus,  et  qu'il  veut  voir  consacrer  à  Paris.  Pour  cela,  il  donnera, 
avec  M.  Louis  Lapret,  pianiste  distingué,  un  concert  samedi  prochain, 
k  8  heures  et  demie,  dans  les  salons  d'Erard,  et  il  sera  certainement  fort 
intéressant  de  l'entendre.  Mlle  Roulle,  MM.  Teysson,  Poëncet  et  Bloch  lui 
prêteront  leur  concoui's. 

.  <^*^  De  même  qu'à  Orléans,  Sivori  vient  d'obtenir ,  au  coecert  donné 
parla  Société  des  benix  aris  de  Nantes,  un  succès  colossal.  On  ne  se 
lassait  pas  d'applaudir  et  de  le  rappeler. 

415*;,  i\IM.  Maurin,  Colblain,  Mas  et  E.  Demunck  vont  reprendre  avec  le 
concours  de  M.  C.  Saint-Saëns  leurs  soirées  de  musique  de  chambre 
spécialement  consacrées  à  l'audition  des  derjiiers  quatuors  de  Beethoven. 
Ces  soirées  seront  au  nombre  de  quatre  et  auront  lieu  dans  les  salons 
Pleyel  Woltî,  les  19  de  ce  mois,  il  mars  1™  et  13  avril. 

,j*^  Berlioz  sera  dans  quelques  jours  de  retour  à  Paris.  Le  dernier 
concert  de  la  série  qu'il  devait  diriger  à  Saint-Pétersbourg,  a  éié  exclu- 
sivement consacré  à  ses  œuvres;  on  y  a  exécuté,  au  milieu  d'un  enthou- 
siasme sans  précédent,  des  fragments  de  Roméo  et  Juliette,  de  la  Damna- 
tion de  Famt,  et  toute lasymphonie  de  Harold.  Les  Troyens  ont  été  traduits 
en  russe  et  l'on  n'attend  pour  les  repr.'senter  qu'une  réunion  suffisante 
du  personnel  chantant. 

.^jA^... Voici  le  programme  du  quinzième  concert  populaire  de  musique 
clctssique  qui  sera  donné  aujourd'hui  dimanche,  à  2  heures,  au  Cirque 
Napoléon,  sous  la  direction  de  J.  Pasdeloup  :  1"  Symphonie  en  ut  mi- 
neur, n»  41,  de  Haydn  (allegro,  —  andante  cantabile,  —  menuet  final; 

—  2°  marche  religieuse  de  iMhengrin  (première  audition),  de  R.  Wagner  ; 

—  3°  canzonetta  du  quatuor  (op.  -là),  de  Mendeissohn  (par  tous  les  ins- 
truments à  cordes;  —  4°  le  Comte  d'Efjmont,  tragédie  de  Gœthe,  de 
Beethoven  ;  —  3°  Jubel-Ouverture,  de  Weber. 


NOUVELLES  DES  THEATRES  LYRIQUES. 

,^*,i;  Le  théâtre  impérial  de  l'Opéra  a  donné  lundi  Guillaume  Tell,  — 
mercredi  l'Africaine,  et  vendredi  la  Muette  de  Porlici.  —  Les  répétitions 
di'Hamlet  avancent  assez  pour  que  l'on  puisse  être  certain  de  le  voir  re- 
présenté immédiatement  après  les  jours  gras. 

^^  Mme  Marie  Sass  passera  le  congé  qui  lui  est  accordé  au  mois 
d'avril,  en  Belgique,  son  pays  natal.  Elle  vient  de  traiter  avec  les  théâtres 
de  Liège,  d'Anvers  et  de  Gand  pour  y  chanter  les  trois  grands  rôles  de 
son  répertoire:  Valentine,  Selika  et  la  Juive. 

,j*,j  Robinsun  Crusoé  continue  d'attirer  la  foule  au  théâtre  de  l'Opéra- 
Comique,  et  les  deux  représentations  du  nouvel  opéra  d'Offenbach  don- 
nées mercredi  et  vendredi,  ont  été  très-brillantes.  Le  public  applaudit 
chaudement  la  plupart  des  morceaux  et  fait  toujours  bisser  la  ronde  du 
Dimanche,  la  délicieuse  romance  chantée  par  Mlle  Cico,  les  couplets  de 
Ponchard,  ceux  de  Mlle  Girard,  Cest  un  brun,  et  la  chanson  si  originale 
du  Pot  au  Feu.  Le  plaisir  que  le  public  trouve  à  entendre  ces  morceaux 
est  le  témoignage  le  plus  significatif  d'un  succès  bien  établi. 

ij,*^  C'est  jeudi  ou  samedi  de  la  semaine  prochaine,  au  plus  tard,  que 
sera  représenté  le  Premier  Jour  de  bonheur,  le  nouvel  opéra  d'Auber. 

^*j^  Le  Templario  a  été  joué  pour  la  troisième  fois  jeudi  et  l'on  a  pu 
voir  que  le  public  appréciait  de  plus  en  plus  les  beautés  incontestables 
que  renferme  cet  ouvrage.  Le  délicieux  chœur  de  femmes  :  «  Del  cielo 
britanno,  »  le  beau  finale  du  premier  acte,  le  grand  duo  entre  le  Templier 
et  Rebecca,  la  marche  funèbre  et  la  prière  de  la  juive,  sont  des  morceaux 
capitaux  et  qu'on  applaudit  spontanément.  A  l'occasion  de  cette  appa- 
rition sur  une  scène  de  Paris  de  l'ouvrage  de  Nicolaï,  il  ne  sera  pas 
sans  intérêt  de  lire  la  lettre  qu'il  écrivait  à  son  ami,  M.  de  Filippi ,  le 
lendemain  de  la  première  représentation  de  son  œuvre  à  Turin,  lettre  que 
nous  trouvons  dans  VEpoque  et  que  voici  : 
5  Ami  très-cher, 

1)  Je  suis  encore  abasourdi  et  doutant  de  la  vérité  même  de  ce  qui 
m'arrive. —  Sache  donc  que  j'ai  fait  fureur,  —  fanatisme!  Le  Templier  a 
été  au  comble  du  succès  avant-hier,  après  trente-quatre  représentations 
de  Guillaume  Tell,  qui  avaient  été  interrompues  par  six  du  Comte  Obcrto  de 
Verdi.  Je  ne  peux  pas  dire  autre  chose  que  le  succès  de  mon  opéra  est 
tel  que  l'imprésario  et  tout  le  monde  disent  qu'on  n'a  jamais  vu  chose 
semblable  au  Théâtre-Royal.  Je  ne  sais,  cela  ne  me  paraît  pas  vrai;  Mais 
à  la  fin  des  fins  je  suis  fou  de  tout  ce  que  j'entends.  Dis-le,  dis-le  à  tous, 
et  avant  tout  dans  ta  maison  où  l'on  prend  intérêt,  je  le  sais,  à  mes 
affaires.  Outre  le  nombre  infini  de  fois  que  j'ai  été  obligé  de  me  lever  de 
mon  siège  pour  remercier  le  public,  jai  été  acclamé  trois  fois  après  le 
premier  acte,  deux  fois  après  le  second,  et  sept  fois  après  le  troisième 
acte  sur  le  théâtre. 

»  Par  Dieu!  Pepino!  qu'en  dis-tu? 


«  Chaque  morceau  a  été  applaudi,  oulre  le  chant  choral  dans  le 
style  du  xvi"  siècle  qu'on  n'a  pas  tout  tle  suite  compris,  étant  une  musique 
qu'on  n'a  jnmais  encore  o.sé  mettre  snr  le  théâtre  Italien  ;  mais  hier  soir 
on  l'a  di'jà  applaudi  aussi.  On  n'a  jamais  remarqué  sur  aucun  point  le 
plus  petit  signe  de  désapprobation  d'un  parti  opposé. 

»  A  la  fin  des  fins,  fanatisme  unanime,  grandisMme.  Je  le  dois  aussi, 
en  partie  aux  chanteurs  excellent.s.  Saivi  est  un  ange  ;  Badiali  est  un  lion: 
la  iMarini  est  la  plus  belle  Rebecca  que,  dans  ce  monde,  on  puisse  voir. 
L'orchi'stre  joue  bien  et  m'aime.  Enfin,  je  n'en  puis  plus  :  j'embrasse 
dans  mon  cœur  tout  ton  monde  et  toi  le  premier. 
»  Adieu...  adieu,  ton  Nicolaï. 

»  Turin,  13  février  18i0.  • 

,t*„  La  représentation  de  Don  Pasquale,  la  dernière  de  la  saison,  avait 
attiré,  mercredi,  une  affluence  aussi  nombreuse  que  brillante  au  théâtre 
Italien.  Hier  .soir,  pour  la  dernière  fois,  on  a  joué  VElisirc  d'Amore. 
Inutile  d'ajouter  que  chacune  de  ces  représentations  a  été  un  triomphe 
pour  Adelina  Patli.  Avant  que  la  jeune  diva  dépose  le  lourd  fardeau  du 
répertoire  de  cette  saison,  mémorable  entre  toules,  nous  l'entendrons  dans 
deux  nouvelles  créations  :  la  Semiramide  et  Giovunna  d'Arco,  sans 
préjudice  de  Zcrlina  de  Don  Giovanni  qui  sera  joué  très-prochainement. 

**>  C'est  demain  que  sera  jouée  la  Traviata  pour  la  représentation  ex- 
traordinaire donnée  au  bénéfice  de  Scalese.  Ainsi  que  nous  l'avons  dit, 
la  scène  des  fous,  de  Columella,  jouée  par  le  bénéficiaire,  complétera  ce 
spectacle . 

,*,!,  Jeudi,  le  Havre  possédait  Adelina  Patti  et  elle  y  a  donné  une  re- 
pi'ésentation  d'il  Barhiere.  L'empressement  pour  aller  l'entendre  n'a  pas 
été  moindre  qu'à  Rouen  et,  malgré  l'élévation  du  prix  des  places,  le 
bureau  de  location,  dès  le  premier  avis,  a  été  littéralement  pris  d'assaut. 
La  r.jcelte  a  dépassé  10,000  francs.  L'espace  nous  manque  pour  dire 
l'enthousiasme  soulevé  par  la  jeune  diva,  et  qui  s'est  encore  accru  lors- 
qu'on l'a  entendue  chanter  l'Éclat  de  rire,  de  Manon  Lescaut,  la  Calesera 
et  la  Gioija  insolita.  Nous   y  reviendrons. 

js*,^  Le  départ  de  Mlle  Nil.sson  n'a  point  suspendu  les  représentations  de 
iMartha  au  théâtre  Lyrique;  on  y  donne  fréquemment  l'opéra  si  popu- 
laire de  Flotow,  qui  remplit  toujours  la  salle  et  dans  lequel  se  font 
légitimement  applaudir  Bosquin  et  Troy,  Mlle  Daram  et  Mlle  Wil- 
leme. 

,^*^,  L'Amour  et  son  Carquois  obtient  un  très-grand  succès  au  théâtre 
de  l'Athénée.  La  réunion  des  talents  de  Mmes  Irma  Marié,  Lovato,  de 
Léonce  et  de  Désiré  est  une  immense  attraction,  et  la  délicieuse  mu- 
sique de  M.  Lecocq  esl  de  plus  en  plus  appréciée.  —  La  bouffonnerie  de 
Busnach,  C'est  pour  ce  soir,  est  un  éclat  de  rire  continuel,  et  la  chanson 
de  Mlle  Moya  est  bissée  à  chaque  représentation. 

,^%  Au  premier  jour,  la  Grande-Duchesse  fera  sa  réapparition  sur  la 
scène  des  Variétés.  La  distribution  sera  la  même  qu'à  la  création  (moins 
toutefois  le  pauvre  et  regretté  Couder),  et  ce  ne  sera  pas  li  le  moindre 
attrait  de  cette  œuvre  populaire  qui  a  déjà  fatigué  de  si  nombreux  inter- 
prètes sans  jamais  lasser  le  public. 

^,%  Une  très-intéressanie  représentation,  avec  le  concours  d'artistes  de 
l'Opéra,  de  rOpéra-Comique,de  la  Comédie-Française,  etc.,  est  annoncée 
pour  ce  soir  aux  Variétés,  au  bénéfice  de  la  veuve  de  feu  l'acteur  Couder. 

i^*t  Le  théâtre  Lafayette  joue  en  ce  moment  avec  un  grand  succès  la 
charmante  opérette  d'Ad.  Adam,  les  Pantins  de  Violette. 

,^*:f  Le  théâtre  de  Versailles  va  donner  incessamment  une  représenta- 
tion au  bénéfice  d'un  de  ses  pensionnaires,  M.  Villefroy,  composée  des 
Dragons  de  Villan,  d'Aimé  Maillart.  C'est  Mme  Galli- Marié  qui  jouera 
le  rôle  de  Rose  Friquet. 

^*,„  Rouen  est  une  des  rares  villes  de  France  où  VAfricaine  n'ait  pas 
encore  été  représentée  Nous  apprenons  que  M.  Derville,  directeur  du 
théâtre  de  cette  ville,  se  prépare  à  donner  le  dernier  chef-d'œuvre  de 
Meyerbeer,  avec  un  soin  d'interprétation  et  un  luxe  de  mise  en  scène 
dignes  de  l'œuvre  et  du  public  foncièrement  artistede  l'ancienne  capitale 
de  la  Normandie. — L'Africaine  sera  suivie  de  Cardi'llac,  dont  l'auteur,  M. 
Dautresme,-  est  Rouennais. 

i*,j,  Robinson  Crusoé  est  en  pleines  répétitions  pour  être  joué  cette  sai- 
son au  théâtre  de  la  Monnaie  de  Bruxelles,  à  Anvers,  à  Genève,  à  Lyon, 
à  Bordeaux,  à  Nan  -y,  à  Toulouse  et  à  Vienne. 

„*,j  Les  Etats  héréditaires  de  la  Grande-Duchesse  ont  changé  de  nom 
en  Amérique.  On  veut  là-bas  que  le  glorieux  père  de  la  souveraine  lui 
ait  transmis,  avec  son  sabre,  le  grand-duché  de  Cancanstein. 

,i,*,  11  y  avait  encore  plus  de  monde  que  samedi  au  huitième  bal  mas- 
qué de  l'Opéra,  qui  a  eu  lieu  hier.  Le  mardi-gras  avance  à  grands  pas, 
et  l'on  se  presse  de  jouir  de  l'entrain  qui  règne  dans  ces  bals,  et  d'enten- 
dre les  derniers  accents  de  l'orchestre  de  Strauss. 


NOUVELLES  DIVERSES. 

^,*,j  Les    candidats  pour  la    place    d  académicien    libre    qu'occupait 


DL  PARIS 


47 


M.  Kastner  ont  été  présoaté.s  à  l'Acadéinie  par  la  commission  mixte, 
dans  l'ordre  suivant':  au  premier  rang,  M.  le  comte  Walewski;  au 
deuxième  rang,  M.  Ciiarles  Blanc;  au  iruisièmo  rang,  M.  Vintt. 

^**  Au  mois  d'août  dernier,  un  concours  a  été  ouvert  pur  le  préfet  de 
la  Seine  pour  la  composition  de  chœurs  sans  accompagnement,  destinés 
plus  particulièreraerit  aux  réunions  de  l'Orphéon  des  écoles  communales 
et  des  classes  d'adultes  de  la  ville  de  Paris.  Un  jury,  pris  dans  le  sein 
de  la  commission  de  surveillance  de  renseignement  du  chant,  a  été  chargé 
d'apprécier  le  mérite  de  142  chœurs  présentés  au  concours.  Trois  mé- 
dailles de  300  francs  ont  été  accordées  à  MM.  Ei'mondde  Polignacet  Léo 
Delibes.  Quatre  médailles  de  200  francs  à  MM.  Jules  Massenet,  Edouard 
Mangin  et  Hemery.  Deux  médailles  de  bronze  à  MM.  Jos  Betjens  et  Fré- 
déric Lentz. 

^*^  On  n'a  pas  oublié  les  succès  remportés  l'été  dernier,  à  Paris,  par 
la  Société  musicale  des  étudiants  de  Copenhague,  d'Upsal  et  de  Lund;  on 
se  souvient  aussi  de  l'intérêt  sympathique,  mélangé  même  d'une  certaine 
émotion,  qui  accueillit  leur  apparition  et  leurs  chants  sur  la  scène  de 
l'Opéra.  Déjà,  la  veille  de  cette  soirée  mémorable,  le  jury  du  Concours 
international,  en  leur  décernant  la  médaille  d'honneur  accordée  par 
S.  M.  l'Impératrice,  leur  avait  témoigné,  par  la  voix  de  M.  Ambroise 
Thomas,  son  président,  l'expression  de  son  «  admiration  »  pour  les 
œuvres  qu'ils  veuaient  de  chanter  autant  que  pour  leur  interprétation. 
Ces  chœurs  Scandinaves,  empreints  d'une  douce  gaieté,  d'une  mélancolie 
pénétrante  ou  d'une  sauvage  énergie,  le  Cortège  de  Noce,  le  Printemps, 
la  Plainte  du  Roi  de  la  mer,  le  Chint  du  liossiijnol,  etc.,  seront  exécutés, 
avec  paroles  françaises,  par  les  classes  de  chant  de  la  ville  de  Paris 
(rive  gauche).  Il  y  a  lieu  de  féliciter  le  directeur  de  cette  subdivision, 
M .  Pasdeloup,  d'iniiier  ses  élèves  et  le  public  à  ces  mélodies  étrange- 
ment belles,  remarquables  par  l'étonnante  franchise  de  leur  accent, 
et  qui  ne  ressemblent  à  rien  de  ce  que  chantent  les  sociétés  chorales 
françaises.  Interprétés  par  nos  artisans-chanteurs,  ces  chœurs  à  quatre 
parties  étonneront  et  impressionneront,  sans  aucun  doute,  autant 
que  lorsqu'on  les  a  entendus  par  les  fils  des  anciens  ScaJdes.  On  peut 
donc  supposer,  sans  exagération  aucune,  qu'après  avoir  renouvelé 
la  veine  à  demi-tarie  du  vieux  monde  et  inspiré  la  muse  populaire 
germanique,  la  poé.-ie  lyrique  Scandinave  pouri'ait  bien  encore  rajeunir 
notre  répertoire  orphéonique,  y  introduire  un  élément  délaissé  jusqu'à 
présent,  et  devenir  en  même  temps,  pour  les  compositeurs  de  chœurs 
d'hommes,  comme  le  souffle  et  l'âme  d'inspirations  nouvelles. 

st*sf  Nous  recommandons  aux  amateurs,  avec  certitude  de  leur  être 
agréable,  une  nouvelle  pubhcation  de  M.  Edouard  Pascal  qui  contient 
12  romances  à  une,  deux  et  quatre  voix  compo.-ées  sur  des  poésies  de 
Victor  Hugo,  Th.  Gautier,  A.  de  Musset  et  F.  Mistral.  Outre  le  charme  de 
la  méloùie  qui  les  distingue,  elles  sont  très-bien  disposées  pour  les  voix, 
aussi  le  succès  qui  a  accueilli  cette  œuvre  à  son  apparition  grandit-il  tous 
les  jours. 

**i  M.  Jacoby,  premier  violon  à  l'orchestre  de  l'Opéra,  épouse  Mlle 
Marie  Pilatte,  qui  fait  partie  du  corps  de  ballet  de  ce  théâtre. 

ÉTRANGER 

^%  Anvers.  —  Mme  Marie  Sass  a  clôturé  la  série  de  ses  représenta- 
tions par  les  Huguenots;  bien  secondée  par  les  artistes  du  théâtre,  son 
succès  a  été  tiès-grand.  —  La  première  représentation  de  la  Grande- 
Duchesse  a  eu  lieu  la  semaine  dernière,  et,  comme  partout,  le  résultat  a 
répondu  à  l'attente  :  ce  fait  est  d'autant  plus  .significatif  que,  jusqu'à 
présent,  le  public  anvcrsois  avait  montré  peu  d'enthousiasme  pour  les 
œuvres  du  maestro.  Mme  Juliette  Borghès-,  qui,  la  veille  encore,  per- 
sonnifiait admirablement  la  noble  et  sévè;-e  figure  de  la  Fidès  du  Pro- 
phète, a  su,  —  contraste  étrange!  —  triompher,  avec  une  singulière  sou- 
plesse de  talent,  des  difficultés  de  son  nouveau  rôle,  et  lui  donner  l'allure 
juvénile  et  crâne  qu'il  comporte.  M.  Odczenne  a  parfaitemen"  mis  en 
relief  la  valeur  militaire  du  général  Boum;  M.  Duplan  ist  un  amusant 
Fritz  et  M.  Cyriali  un  parfait  prince  Paul.  —  Le  succès  de  l'œuvre  po- 
pulaire d'Offenbach  a  décidé  la  direction  à  monter  Robinson  Crusoé. 

^*.ji  Berlin.  —  Mlle  Artût  vient  de  terminer  par  une  splendide  repré- 
sentation des  Diamants  de  la  Couronne  la  première  moitié  de  son  enga- 
gement de  cette  année.  Varsovie  va  l'applaudir  un  mois,  après  lequel 
elle  nous  reviendra  pour  ne  nous  quitter  que  le  i"  aviil;  Moscou,  puis 
Hombourg,  la  réclament  ensuite.  —  La  Grande-Duchesse  fait  de  fruc- 
tueuses soirées  au  théâtre  de  Friedrich-Wilhelrastadt;  le  dimanche,  iio- 
tammcnt,  il  est  bien  difficile  de  trouver  des  places.  On  en  est  à  la  25"  i-e- 
présentation.  —  Au  théâtre  de  Kroll,  que  l'activité  du  directeur  Engel 
maintient  dans  une  situation  prospère,  on  a  donné  une  nouvelle  opé- 
rette :  Un  voyage  d'artiste,  de  Winter  et  Sommer  (comme  qui  dirait 
Hiver  et  Eté;  li^ez :  Winterfeld  et  Richard  Wiierst)  ;  ce  charmant  ouvrage 
a  complètement  réussi. 

^'ji,  Leipzig.  —  La  solennité  de  l'inauguration  du  nouveau  théâti-e 
d'Opéra  a  eu  lieu  le  28  janvier  dernier,  en  présence  du  roi,  de  la  cour 
et  de  beaucoup  de  hauts  personnages.  La  représentation  se  composait  de 
la  Jubel-Ouverture,  de  Weber,  d'un  prologue  de  circonstance,  la  Patrie  des 
Arts,  de  l'ouverture  d'iphigènie  en  Aulide,  de  Gluck,  et  de  la  tragédie  de 


Gœlhe  Iphigénie  en  Tauride,  —  Ce  beau  monument,  l'un  des  modèles  du 
genre,  est  construit  dans  les  meilleures  conditions  d'acoustique  et  de  com- 
modité. Il  peut  contenir  1,800  spectateurs.  —  Au  quatorzième  concert  du 
Gbwandhaus,  le  23  janvier,  le  célèbre  chanteur  Stockliausen  a  concentré 
sur  lui  toute  l'attention  du  public;  il  a  été  acclamé  avec  un  véritable 
enthousiasme  après  chacun  de  ses  morceaux  :  deux  airs  tVEuryanlhe  et 
de  Jean  di  Paris,  et  des  mélodies  de  Schubert.  Un  pianiste  pru.ssien, 
M.  Henri  Barth,  a  quelque  jeu  souHért  de  ce  voisinage;  il  n'est  cepen- 
dant pas  sans  mérite,  surtout  sous  le  rapport  de  l'habileté  technique.  H 
a  joué  un  concerto  de  Henselt  et  divers  morceaux  de  Chopin. 

,ifi*^  Munich.  —  Armide,  de  Gluck,  qu'on  n'avait  pas  entendue  depuis 
trente- cinq  ans,  vient  d'être  repri.se  avec  beaucoup  de  soin  et  d'éclat, 
sous  l'habile  direction  de  Franz  Lachner. 

,,.'',1.  Vienne.  —  Par  suite  d'une  récente  mesure,  l'administration  de 
l'Opéra  dispose  en  ce  moment  d'un  double  personnel  de  chœurs,  qui  ne 
tardera  pas  cependant  à  être  réduit  par  le  renvoi  de  36  anciens  choristes; 
ceux  qui  sont  nouvellement  engagés  .sont  assidûment  exercés,  leurs  ap- 
pointements ont  été  fixés  à  un  taux  raisonnable;  on  espère  arriver  ainsi 
à  former  un  ensemble  irréprochable,  un  Chorpersonal  modèle.  —  La  So- 
ciété des  Amis  de  la  musique  a  constitué  un  Comité  chargé  de  présenter 
un  plan  pour  la  réorganisation  complète  du  Conservatoire. 

^*^  Madrid.  —  Don  Giovanni  vient  d'être  représenté  au  Théâtre- 
Royal  d'une  manière  splendide  par  Mme  Penco,  Tamberlick , 
Bonnehée,  Selva,  autant  de  noms  justement  célèbres.  Ajoutons-y  celui 
de  Mme  Dalti-Guadagnini,  qui  pourra  l'être  bientôt;  cette  jeune  cantatrice, 
qui  progresse  chaque  jour  dans  la  faveur  du  public,  a  rempli  le  rôle  de 
Zerline  de  façon  à  rendre  jalouse  une  Patti  elle-même. 

^*^  Barcelone.  —  On  espère  pouvoir  représenter  le  Pardon  de  Ploërmel, 
au  Liceo,  vers  le  lo  février.  Mlle  Vitali,  le  ténor  Stagno  et  la  basse  Petit 
en  rempliront  les  principaux  rôles.  Ensuite  viendra  II  Bravo,  de  Merca- 
danto,  avec  Steger,  Petit  et  Mme  Rey-Balla  —  Le  Teatro  Principal  ou- 
vrira ses  portes  le  12  avril,  avec  une  troupe  d'élite  oii  figurent  les  noms 
d'Emmy  Lagrua,  des  sœurs  Marchisio,  des  ténors  Tamberlick  et  Corsi, 
des  barytons  Everardi  et  Rota,  de  la  basse  Rossi-Galli  et  du  caricàto 
Alessandro  Bottero. 

«*,  Milan.  —  La  Socielà  del  Quartelto  a  courageusement  repris  ses 
séances,  et  cette  fois  elle  n'a  point  eu  à  s'en  repentir  ;  le  public  est 
accouru  avec  empressement,  surtout  à  la  seconde  séance.  Beethoven, 
Weber,  Haydn,  Boccherini  et  Rubinstein  figuraient  au  programme.  Baz- 
zini  était  au  premier  pupitre. 

^*,fi  Rome. — Do7i  Carlos  a  couru  un  grave  danger,  grâce  au  zèle  de  la 
censure;  mais  le  Saint-Père,  après  avoir  pris  connaissance  du  libretto, 
en  a  libéralement  autorisé  la  représentation,  —  sans  inquisiteurs  toute- 
fois; on  substituera  au  redoutable  tribunal  quelques  inofifensifs  soli- 
taires . 

^*^  Copenhague.  —  La  troupe  italienne  dirigée  par  Lorini  a  fait  cette 
année  son  premier  début  avec  la  Favorita,  sans  beaucoup  de  succès. 
Des  noms  inconnus,  représentant  des  talents  médiocres  ou  nuls,  ne  sont 
point  faits  pour  attirer  la  foule. —  Vn  Ballo  in  maschera  a  dû  être  donné 
ensuite. 

^%  Stockholm.  —  Le  Conservatoire,  sous  l'impulsion  donnée  par  le 
prince  royal  Oscar,  a  subi,  il  y  a  un  an  déjà,  une  transformation  com- 
plète, dont  les  résultats  se  font  sentir  aujourd'hui  de  la  manière  la  plus 
heureuse.  Une  fête  commémorative  de  cette  renaissance  vient  d'être 
donnée;  outre  un  programme  musical  intéressant  et  défrayé  par  nos 
meilleurs  artistes,  on  a  applaudi  un  remarquable  discours  du  prince 
Oscar,  président  de  l'Académie  royale  de  musique,  traitant  très-pertinem- 
ment, et  au  point  de  vue  scientifique,  du  son  musical.  Voilà  un  futur 
souverain  qui  promet  à  l'art  un  protecteur  zélé  et  éclairé  ! 

^*^  Saint-Pélersbourg.  —  Pauline  Lucca  maintient  ici  au  même  degré 
l'enthousiasme  qu'elle  a  provoqué  depuis  son  arrivée,  haas  Don  Giovanni,  elle 
a  été  encore  plusfêtée  qu'auparavant,  s'il  est  possible.  Mme  Trebelli  et  Mario 
ont  eu  un  beau  succès  dans  la  Favorite.  Mario  supplée  avec  son  grand 
art  de  comédien  aux  défaillances  de  sa  voix;  il  a  notamment  été  su- 
perbe dans  les  récitatifs.  On  l'a  beaucoup  applaudi  dans  Un  Bail-  in 
Maschera,  avec  Mme  Yolpini  —  qui  a  partagé  avec  lui  les  honneurs  de  la 
soirée  —  Graziani  (Renato).  et  une  débutante,  Mlle  Giovannoni  (Amelia). — 
Mlle  Grantzoff  vient  de  faire  sa  rentrée  ;  elle  a  été  accueillie  avec  enthou- 
siasme. 

jf.*^  Moscou.  —  La  Rose  des  Carpathes,  de  Siegfried  Saloman,  a  été  re- 
présentée le  7  janvier,  pour  la  première  fois,  au  bénéfice  de  Mme  Alexan- 
droff,  avec  un  complet  succès.  La  bénéficiaire  et  Mme  Honoré  ont  été 
couvertes  d'applaudissements.  Le  sujet  de  cet  opéra  est  un  épisode  de 
l'histoire  moldo-valaque,  vers  la  fin  du  xvii°  siècle. 


s.  DUFoen. 


/l  17  T  C  ^"  concours  aura  lieu  le  mardi  II  février,  à  -4  heures  pré- 
il  V  1  (3 .  cises,  à  l'église  Saint-Eustache,  pour  une  place  de  basse. 
—  On  est  prié  de  se  présenter  à  la  sacristie  pour  se  faire  inscrire. 


48 


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Par  A.  Kappelmann. 
N°  2.  Le  Cortège  de  Noce, 

Par  Kjerulfs. 


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Revus  par 

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N°  3;   Plaintes  du  Roi  des  Mers, 

Par  Svinsk-Folkvisa. 
N"  11.   Le  Chant  du  Rossignol, 

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J.-L.  Battmann.  op.  273.  Les  Porcherons,  petite  fantaisie 

A.   Croisez.    Op.    146.  Notre-Dame-des- Anges,  prière  de 

jeunes  filles 

—  Op.  147.  Les  Faux  Monnayeurs,  caprice 

J.  Leybach.  Op.  107.  La  Cenerentola,  fantaisie  brillante. 

—  Op.  108.  Tristesse,  élégie 

A.  Le  Carpentier.  Airs  et  Rondes  populaires ,  arrangés 

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L.  Schiffmacher.  Op.  72.  Mon  pays,  transcription  variée 

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Gaston  de  Lille.  En  avant!  polka 

—  Biarritz,  polka-mazurka .• 

—  Sous  la  Feuillée,  valse 

Ad.  Lacout.  Le  Petit  Mignon,  quadrille  très-facile 

—  Baby,  polka  très-facile 

Strauss.  Le  dernier  des  Romains,  quadrille 


S     » 


S    » 
5    .) 


7  30 

6  » 

7  30 


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5  » 

6  » 
4  30 
2  50 
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LE    DERNIER    ROMAIN, 

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D.  Balleyguier.  Douce  chanson 3  » 

G.  Douay.  C'est  plus  fort  que  moi,  chansonnette 3  » 

—  Vn  Bourgeois  pour  tout  faire,  chansonnette 3  » 

J.  Javelot.  Mon  Oscar,  chansonnette 3  » 

P.  Blaquières  et  J.  Moinaux.  Gratteloup  au  camp  de 

Châlons,  explication  du  fusil  Chassepot,  chansonneite.  3  » 

Duos  pour  ténor  et  baryton 

Léo  Delibes.  Le  Marchand  d'Oublis 6    » 

Ch.  Lecocq.  Les  Tonneliers 4    » 

—  Le  même  à  une  voix 2  30 


laipamEniE  cEnrrBALE  des  cuesiii 


ÏRSBGERE,  30.  A  PABlâ. 


BUREAUX    A    PARIS  :    BOULEVARD   DES   ITALIENS,  1. 


35'  Aimée. 


N»  7. 


U  Février  1868. 


ON  S'ABONNE  : 

Dons  les  Diipartomenls  et  ù  riUranger, 

chez  tous  les  UoTchnnds  de  Musique,  Us  Libraires, 

et  aux  Cureûux  der.  Jffessugeries  et  des  Postes. 


REVUE 


PRIX    DE    L'ABONNEMENT: 

Paris 24   r.  pur  Qi 

DuparleniLutB,  Belgique  et  Suisse.,..    30  »       id. 

Étranger 34  »       i<i. 

Le  Journal  parait  le  Dimanche. 


GAZETTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


SOMMAIRE.  Les  droits  des  auteurs  (deuxième  partie,  6°  article],  parVhomaB 
Sauvage.  —  Grand  concert  avec  orcliestre  donné  par  Charles  Lamoureux  à 
la  salle  Herz,  par  Charles  Bannelier.  —  Bibliographie  musicale  :  la  Mu- 
sique expliquée  aux  gens  du  monde,  de  A.  Meliot,  par  Maurice  Bourges. 
—  Revue  des  théâtres,  par  D.  A.  O,  Saint-Yves.  — Concerts  et  audi- 
tions musicales  de  la  semaine.  —  Nouvelles  des  théâtres  lyriques.  —  Nouvelles 
diverses.  —  Concerts  et  auditions  musicales  annoncés.  —  Annonces. 


LES  DROITS  DES  AUTEURS. 

(Deuxième  partie.) 

SOCIÉTÉS  DES  AUTEURS,   COMPOSITEURS  ET   ÉDITEURS   DE    MUSIQUE. 

(6=  arlicle)  (d). 

Il  y  avait  alors  à  l'Opéra-Comique  une  actrice,  fort  jeune  en- 
core, dont  cependant  la  réputation  était,  pouvait-on  dire,  déjà 
vieille;  enfant,  elle  avait  débuté  à  la  foire  Saint-Laurent,  avec 
d'autres  artistes  de  son  âge,  dans  un  opéra-comique  de  Panard 
intitulé  :  la  Nièce  vengée.  Dans  le  prologue,  La  Rancune,  comé- 
dien de  campagne,  venait  annoncer  que  la  chaiTette  qui  portait 
ses  camarades  avait  versé  ;  que  tous,  plus  ou  moins  écloppés,  se 
trouvant  hors  d'état  de  paraître,  il  offrait  en  remplacement  ses 
enfants  ,  pour  lesquels  il  réclamait  l'indulgence  en  ces  termes: 

S'ils  n'ont  pas  l'honneur  de  vous  plaire, 
Epargnez-les;  c'est  moi,  Messieurs, 
Qui  dois  porter  votre  colère . . . 
J'ai  fait  la  pièce  et  les  acteurs. 

Dans  la  comédie,  la  jeune  enfant  qui  jouait  un  rôle  de  tante, 
disait  au  dénoûment,  en  s'adressant  au  parterre  : 

«  Messieurs,  si  quelqu'un  de  vous  veut  épouser  une  petite  veuve, 
je  suis  à  lui,  et  je  vous  assure  qu'il  trouvera  mieux  qu'il  ne 
croit.  »  Puis  elle  chantait  : 


(1)  Voir  les  n»=  33,  40,  il,  43  et  49  de  l'année  1867. 


J'ai,  sous  des  cheveux  gris, 

L'humeur  assez  jolie  ; 

Sans  trop  de  flatterie, 

Je  vaux  encor  mon  prix. 

Vive,  fringante  et  preste. 
On  me  trouve  encor  des  appas  ; 

Et  zeste,  zeste,  zeste, 
Bien  des  jeunes  filles  n'ont  pas 
Un  si  beau  reste. 

Je  me  suis  permis  ces  citations  un  peu  gaillardes,  pour  montrer 
à  quelle  école  avait  été  élevée  la  petite  tante,  car  le  nom  lui  en 
resta  pendant  longtemps,  et  pour  expliquer  l'aventure  que  je  vais 
raconter. 

La  petite  tante  était  devenue  grande  fille.  Favart,  juste  appré- 
ciateur du  talent,  l'avait  distinguée  et  lui  fit  des  rôles  dans  ses 
pièces.  C'est  de  l'École  des  amours  grivois  (1)  que  date  la  réputa- 
tion de  cette  jeune  merveille  :  c'est  là  qu'elle  créa  le  rôle  de  ma 
MIE  Babichon,  paysanne  naïve,  personnage  épisodique  qui  n'arrivait 
qu'à  la  fin  de  la  pièce  avec  le  niais  Nicodème  pour  chanter  des 
couplets  sans  rimes  et  danser  un  menuet  grotesque.  Il  paraît  que 
l'effet  de  cette  scène  fut  extraordinaire,  incroyable,  grâce  au  jeu 
des  acteurs,  tel  enfin,  que  Favart,  pour  contenter  le  public,  se  vit 
obligé  de  reproduire  dans  une  seconde  pièce  (2),  puis  dans  une 
troisième  (3),  ces  deux  personnages  accueillis  avec  tant  d'enthou- 
siasme. 

Alors  le  nom  de  petite  tante  disparut  sous  celui  du  nouveau 
rôle  et  l'actrice  fut  pour  tout  Paris  ma  mie  Kabichon. 

On  pense  bien  qu'un  tel  triomphe  n'avait  pas  peu  développé  les 
dispositions  audacieuses,  effrontées  même,  de  la  jeune  élève  de  la 
foire.  Il  arriva  ce  que  nous  voyons  chaque  jour  se  renouveler  dans 
nos  théâtres  :  — les  prétentions,  les  exigences  de  l'actrice  en  vogue 
augmentèrent  en  raison  de  ses  succès.  De  là  :  indisposition  dès 


(1)  A -propos  composé  à    l'occasion   des   victoires   de  Louis  XV  dans 
les  Flandres. 


(2)  Les  Fêtes  publiques. 

(3)  Le  Dil  de,  Strasbourg. 


50 


lŒVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


qu'on  avait  quelque  partie  avec  un  beau  mousquetaire  gris  ou  noir; 
demandes  de  coiie'és  pour  se  refaire  dans  la  petite  maison  de 
quelque  galant  fermier  général,  puis  l'inexactitude  aux  répétitions, 
les  refus  de  rôles,  la  suffisance  avec  les  auteurs,  l'impertinence 
avec  les  camarades...  Enfin  ma  mie  Babichon  devint  une  créature 
insupportable, —  comme  la  plupart  (je  dis  la  plupart  et  non 
tovs  I)  de  nos  artistes  à  réputation,  qui  sont  ou  se  croient  indis- 
pensables. 

Un  jour,  on  répétait  le  Trompeur  trompé,  de  Vadé.  —  Clairval, 
qui  venait  de  sauter  de  la  boutique  d'un  perruquier-barbier  sur 
les  planches  de  l'Opéra-Comique  (1),  et  qui  commençait  à  la  foire 
l'immsnse  réputation  que  lui  acquirent  plus  tard  tant  de  brillants 
succès  à  la  Comédie  italienne  et  auprès  des  belles  dames,  —  Clair- 
val  jouait  le  trompeur.  Ifa  mie  Babichon  devait  représenter  la  com- 
tesse qui  mystifie  le  trompeur.  Plusieurs  airs  nouveaux  avaient 
été  composés  pour  cet  ouvrage  par  M.  Exaudet,  chef  d'orchestre 
du  théâtre,  —  M.  Exaudet,  l'auteur  du  charmant  menuet  venu 
jusqu'à  nous!  —  On  était  arrivé  à  des  couplets  fort  jolis  : 
Clairval  chante  le  premier,  M.  Exaudet  est  satisfait  ;  ma  mie  Ba- 
bichon commence  le  sien,  mais  avec  mollesse,  sans  mesure  et  sans 
expression. — M.  Exaudet  se  récrie,  l'air  est  syllabique  et  rhylhmé, 
il  faut  marquer  le  mouvement.  —  Ma  mie  Babichon  affirme  que 
l'air  ne  peut  et  ne  doit  être  dit  que  comme  elle  le  chante;  au  reste, 
elle  ne  le  dira  pas  autrement  ! 

On  comprend  la  situation  de  M.  Exaudet,  blessé  dans  son  cœur 
paternel  et  dans  ses  oreilles  musiciennes  !  —  Vadé,  Clairval  veu- 
lent s'interposer;  ma  mie  Babichon  les  envoie...  infiniment  loin!  et 
persiste  dans  son  obstination.  Tous  ses  camarades,  —  qui  demain 
feront  peut-être  comme  elle,  —  la  blâment  et  essaient  de  la  ra- 
mener à  la  raison  :  peine  perdue  !  Babichon  ne  cédera  pas  :  «  l'or- 
chestre doit  la  suivre,  l'orchestre  doit  être  à  ses  ordres  !  » 

A  de  telles  prétentions,  M.  Exaudet  se  lève  furieux,  les  musiciens 
s'insurgent  et  prennent  son  parti;  tout  le  monde  crie...  on  ne 
s'entend  plus...  le  désordre  est  au  comble...  quand  paraît  Favart, 
le  directeur.  Il  veut  d'abord  arranger  amiablement  l' affaire  ;  mais 
M.  Exaudet,  trop  exaspéré,  déclare  qu'il  se  retire  si  l'on  ne  fait 
justice  de  l'insolence  de  ma  mie  Babichon.  Favart  est  donc  obligé 
de  reprendre  le  rôle  à  la  coupable  ;  il  le  donne  à  Mlle  Rosaline. 

La  pièce  est  jouée,  elle  obtient  le  plus  Êirand  succès.  Les  airs  de 
M.  Exaudet  sont  fort  applaudis,  et  Mlle  Rosaline,  jusque-là  ina- 
perçue, est  tout  à  coup  distinguée  par  le  public. 

Remarquez,  je  vous  prie,  que  semblable  scène  se  représente  à 
peu  près  chaque  semaine  sur  chacun  de  nos  théâtres,  et  plaignez, 
en  passant,  les  auteurs  et  les  directeurs  ! 

Ma  mie  Babichon,  comme  bien  vous  pensez,  n'oublie  pas  la  cou- 
rageuse résistance  de  M.  Exaudet;  et  ne  pas  oublier  une  offense, 
pour  une  femme,  c'est  en  désirer  la  vengeance  !  et  la  désirer,  c'est 
la  méditer,  c'est  s'en  occuper  à  chaque  instant,  c'est  la  préparer 
à  chaque  minute! 

Cependant,  en  habile  comédienfte,  Babichon  dissimula:  trois  jours 
après  l'événement,  le  passé  semblait  pour  elle  à  cent  ans  de  date; 
on  la  voyait  gracieuse  et  avenante  avec  tout  le  monde,  même  avec 
M.  Exaudet! 


(1)  Transition  que  Clairval  n'oublia  jamais;  mais  il  craignait  tellement 
de  la  rappeler  que,  pour  ne  pas  jouer  le  rôle  de  figaro,  il  fît  refuser 
le  Sarbier  de  Séville  de  Beaumarchais,  présenté  par  l'auteur  à  la  Comédie 
italienne.  D'autres  la  lui  rappelaient  trop  bien  : 

Clairval,  d'un  beau  Pierrot  étalant  tout  l'éclat, 

A  repris  la  couleur  de  son  premier  état. 
disait  Parissot  dans  son  Epître  à  mon  digne  ami  Nicolet. 
Et  Guichard  écrivait  au  bas  du  portrait  de  l'artiste  : 

Cet  acteur  minaudier,  san»  talent  et  sans  voix, 

Ecorche  les  auteurs  qu'il  rasait  autrefois! 


Pauvre  Exaudet!  il  ne  se  doutait  pas  du  malheur  qui  menaçait 
sa  tétel 

A  quelque  temps  de  là,  autre  pièce  nouvelle,  autre  répétition  ; 
mais  celle-ci  devait  être  plus  solennelle.  M.  Berger,  directeur  de 
l'Opéra,  depuis  peu  titulaire  du  privilège  de  l'Opéra-Comique,  avait 
fait  annoncer  qu'il  y  assisterait;  tout  le  personnel  était  donc  venu 
dans  la  toilette  la  plus  soignée  :  femmes  en  paniers,  avec  des  mou- 
ches et  du  rouge;  hommes  en  habits  droits  et  pinces,  amples  per- 
ruques frisées  et  poudrées,  rien  ne  manquait  pour  que  l'aspect 
cérémonieux  de  ses  humbles  sujets  flattât  l'amour-propre  de  l'au- 
tocrate des  fions- fions,  —  du  Perrin  de  ce  temps-là. 
.  Tout  le  monde  est  en  place  :  à  l'orchestre,  les  musiciens  devant 
le  pupitre  ;  au  milieu  d'eux,  M.  Exaudet,  ainsi  qu'un  maréchal  de 
France,  le  bâton  de  commandement  à  la  main  (4);  sm'  le  théâtre, 
les  acteurs  exercent  leur  gosier  en  filant  des  sons,  ou  réveillent 
leur  mémoire  en  repassant  leur  rôle;  les  danseurs  rappellent  par 
des  plies  et  des  ronds  de  jambes  la  souplesse  et  l'élasticité  dans 
leurs  muscles  et  leurs  articulations.  L'auteur,  sa  famille  et  quel- 
ques-uns de  ses  amis  sont  à  la  galerie;  dans  l'ombre,  au  parterre, 
se  cachent  trois  ou  quatre  auteurs  jaloux  et  envieux,  qui  viennent 
épier  les  endroits  faibles  de  l'ouvrage  pour  les  signaler  d'avance 
dans  les  cafés! 

Çà  et  là  circulent  dans  la  salle  ou  sur  la  scène  les  membres  de 
la  troupe  qui  ne  sont  pas  employés  dans  l'ouvrage  nouveau.  Les 
uns  causent  avec  les  acteurs,  qui,  plus  heureux,  ont  des  rôles,  et 
cherchent  à  leur  faire  entendre  que  ces  rôles  sont  mauvais,  sans 
quoi  ils  ne  les  auraient  pas.  Les  autres  font  des  courbettes  devant 
l'auteur,  pour  qu'il  ne  les  oublie  pas  dans  une  prochaine  distribu- 
tion. Ma  mie  Babichon,  qui,  comme  je  vous  l'ai  dit,  semble  vouloir 
faire  oublier  ses  anciens  torts,  cause  à  l'orchestre  avec  les  musiciens 
s'informe  de  leur  santé,  présente  à  chacun,  et  souvent  en  planant 
par-dessus  les  têtes,  son  élégante  bonbonnière  et  ses  pastilles  à  la 
duchesse.  M.  Exaudet  et  sa  brigade  sont  touchés,  attendris  par 
tant  de  politesse  ! 

Mais  un  carrosse  s'arrête  à  la  porte  de  la  Loge  (2)  :  un  gagiste 
annonce  M.  le  directeur  de  l'Opéra  !  A  ce  nom  tout  se  met  en 
mouvement  :  chacun  regagne  sa  place  et  ma  mie  Babichon,  après 
avoir  serré  la  main  de  M.  Exaudet,  va  s'installer  aux  troisièmes 
loges. 

Anteaume  (auteur  depuis  du  Tableau  parlant,  alors  répétiteur... 
on  dirait  aujourd'hui  régisseur)  donne  le  signal  pour  qu'on  se 
tienne  prêt,  et  Taconnet,  qui  n'a  bu  que  trois  bouteihes  pour  con- 
server la  liberté  de  sa  langue  et  la  netteté  de  sa  prononciation,  se 
précipite  dans  le  trou  du  souffleur. 

Monsieur  Berger  paraît  !  —  Aspect  demi-financier,  demi-petit 
maître,  air  important  et  protecteur,  dédaigneux  et  ennuyé;  il  salue 
à  peine,  passe  la  main  sous  le  menton  de  la  gentille  Luzy,  donne 
un  petit  soufflet  à  Gogo-Beauminard  et  sourit  à  Mlle  Chantilly 
(Mme  Favart);  —  il  se  place  nonchalamment  sur  un  fauteuil,  à 
l'avant-scène  ;  Favart  s'assied  près  de  lui,  modestement  sur  une 
chaise. 

On  va  commencer  :  le  chef  d'orchestre  a  frappé  légèrement  sur 
son  pupitre,  les  archets  sont  suspendus  au-dessus  des  cordes,  les 
lèvres  sont  avancées  sur  les  instruments  à  vent  et  les  joues  gonflées 
vont  leur  envoyer  le  souffle,  l'âine  et  l'expression. 

Thomas  SAUVAGE. 
(La  suite  prochainement.) 


(1)  Les  chefs  de  nos  orchestres  de  théâtre  sont  aujourd'hui  privés  de 
cet  insigne,  qu'Alexandre  Piccini,  chef  d'orchestre  de  la  Porte-Saint- 
Martin,  a  porté  le  dernier. 

(2)  C'est  ainsi  que  l'on  appelait  à  la  foire  la  salle  de  l'Opéra-Comique. 


DE  PARIS. 


Î51 


GRAND  CONCERT  AVEC  ORCHESTRE 

Donné  par  U.  Charles  liamonreux  à  la  salle  Ilerz, 

Le  8  février  186S. 

La  plupart  des  habitués  des  séances  populaires  de  musique 
de  chambre  ne  connaissent  Lamoureux  que  comme  un  virtuose 
éminent,  interprétant  en  grand  artiste  la  musique  classique;  ils 
ont  pu  se  convaincre,  samedi  dernier,  que  c'est  encore  un  habile, 
un  consciencieux  chef  d'orchestre.  Je  dis  la  plupart ,  parce  que 
Lamoureux  n'en  est  pas  à  son  coup  d'essai,  et  que  plusieurs  se 
souviendront  encore  du  concert  qu'il  dirigea  avec  tant  de  succès 
l'année  dernière.  Je  n'étais  pas  de  ceux-là,  je  ne  puis  donc  ap- 
prendre aux  lecteurs  de  la  Gazette  musicale  s'il  a  fait  des  progrès; 
mais  je  leur  affirme  aujourd'hui  que  c'est  un  maître  qui  possède 
la  sûreté  de  coup  d'œil ,  la  finesse  de  perception  musicale,  le  tact 
et  l'expérience;  on  sent  qu'il  a  soigneusement  étudié  tout  ce  qu'il 
fait  exécuter,  qu'il  ne  livre  rien  au  hasard,  que  tous  les  fils  de 
cette  intrigue  compliquée  qu'on  appelle  une  partition  sont  dans  sa 
içain,  que  ses  quatre-vingts  artistes  le  comprennent  et  savent  à 
qui  ils  ont  affaire . . .  Cela  s'appelle,  pour  parler  comme  Berlioz, 
jouer  de  l'orchestre.  Ce  soir-lîi,  le  superbe  stradivarius  de  Charles 
Lamoureux  se  reposait. 

La  Symphonie  pastorale,  —  le  morceau  de  résistance,  le  «  great 
feature  »  — du  concert,  a  été  rendue  avec  un  admirable  ensemble, 
et  je  dirai  presque  avec  un  luxe  de  nuances  auquel  nos  meilleurs 
orchestres  ne  nous  ont  point  accoutumés.  Contrairement  à  l'usage, 
M.  Lamoureux  ne  fait  pas  ralentir  le  mouvement  au  début  du 
premier  morceau  avant  d'arriver  au  point  d'orgue  de  la  quatrième 
mesure;  c'est  affaire  de  goût,  et  en  l'absence  de  toute  indication  sur 
la  partition,  il  n'y  a  pas  d'autre  raison  que  le  sentiment  personnel 
pour  suivre  ou  abandonner  la  tradition.  Reste  à  savoir  si,  du 
temps  de  Beethoven,  il  était  convenu  qu'un  rallentando  précédait 
toujours  les  points  d'orgue;  M.  Lamoureux  n'en  paraît  pas  con- 
vaincu. —  Il  a  parfaitement  senti  que  la  plus  grande  précision 
métronomique  est  de  rigueur  dans  Vandante,  sous  peine  de  faire 
d'un  magnifique  poëme  un  gâchis  insupportable;  aussi,  tout  a  mar- 
ché à  souhait,  et  un  tonnerre  d'applaudissements  a  prouvé  à  l'intelli. 
gent  artiste  qu'on  l'avait  compris.  —  Une  idée  qui  a  bien  sa  valeur, 
et  qu'il  a  mise  en  pratique  le  premier,  consiste  à  prendre  le  scherzo  tant 
soit  peu  moins  vite  qu'on  ne  le  fait  d'habitude,  pour  pouvoir  en- 
suite animer  le  mouvement  lorsque  approche  le  trait  en  arpèges 
ascendants  des  altos  et  des  violons  que  suivra  bientôt  la  mélodie 
agreste  et  boiteuse  du  hautbois,  et  plus  tard  l'orage.  Ce  contraste 
est  d'un  effet  très-heureux.  —  Le  finale  tout  entier  a  été  glorieu- 
sement enlevé;  on  ne  fait  mieux  nulle  part. 

La  Symphonie  pastorale  nous  a  entraînés  un  peu  loin;  il  nous 
faut  cependant  réserver  quelques  lignes  pour  payer  un  juste  tribut 
d'éloges  à  la  splendide  exécution  de  l'ouverture  d'Oberon,  —  de  la 
Marche  et  du  Chœur  des  fiançailles  de  Lohengrin,  dont  les  chœurs 
ont  été  chantés  avec  justesse,  ensemble  et  entrain,  et  qui  ont  été 
bissés;  — de  la  canzonetta  du  quatuor  en  mi  bémol  de  Mendelssohn, 
aujourd'hui  populaire;  pour  constater  enfin  le  grand  et  légitime 
succès  obtenu  par  Mlle  Mauduit  et  M.  Bel  val  dans  un  air  de  Fer- 
nand  Cariez  et  dans  le  puissant  finale  du  deuxième  acte  de  la  Ves- 
tale. 

L'orchestre  était  composé  d'artistes  de  la  Société  du  Conserva- 
toire et  des  concerts  populaires;  la  besogne  de  M.  Lamoureux 
était  donc  déjà  bien  avancée  avant  même  de  la  commencer,  ce 
qui  n'a  pas  empêché  de  nombreuses  et  laborieuses  répétitions. 
Un  regret  en  terminant  :  c'est  que  les   frais  et  les  difficultés  de 


semblables  entreprises  ne  permettent  pas  de  les  renouveler  plus 
souvent,  et  que  M.  Lamoureux  ne  dispose  pas  d'un  orchestre  cons- 
titué en  société. 

Chaules  BANNELIER. 


BIRLI06RAPHIE  MUSICALE. 

liJk  MUSIQUE  EXPIilQUÉE  AUX   «BRISi  DU  »0\DE, 

Pau  A.  MELIOT  (i). 

Le  voilà  déjà  bien  loin  le  temps  où  la  science  et  l'art  consti- 
tuaient le  lot  exclusif  et  comme  le  domaine  privé  d'un  petit  nombre 
de  doctes  initiés.  L'esprit  de  curiosité  s'est  fait  populaire.  Chacun' 
veut  savoir,  savoir  un  peu  de  tout,  mais  surtout  savoir  vite  et 
sans  peine.  Aussi  les  gros  ouvrages  font-ils  peur,!  Comment  penser 
à  s'y  arrêter,  quand  la  vie  a  des  allures  de  locomotive  courant  à 
toute  vapeur,  quand  le  loisir  est  une  vraie  rareté?  Que  le  spécia- 
liste studieux  compulse,  médite,  approfondisse  de  volumineux  re- 
cueils, à  la  bonne  heure.  Mais  la  foule!  Il  lui  faut  un  aliment 
plus  léger,  plus  émietté  et  de  digestion  bien  autrement  rapide. 
La  librairie  moderne  s'est  hâtée  de  le  lui  offrir  dans  ces  petits  livres, 
de  format  commode  et  portatif,  qui  ont  aujourd'hui  mission  de  vul- 
gariser, en  quelques  pages  sommaires  et  d'une  lecture  facile,  la 
science,  l'histoire,  l'industrie,  les  beaux-arts. 

La  musique,  dont  le  goût  et  la  culture  vont  se  propageant  de 
plus  en  plus  en  France,  ne  pouvait  manquer  de  trouver  tout  aussi- 
tôt sa  place  dans  cette  collection  d'abrégés  instructifs.  Parmi  ceux 
qui  ont  sa  théorie  pour  objet,  on  peut  se  souvenir  que  le  public 
a  remarqué  naguère  les  Principes  de  musique  de  M.  A.  Méliot. 
Accueillera-t-il  avec  une  faveur  égale  le  nouveau  petit  ouvrage  du 
même  auteur,  la  Musique  expliquée  aux  gens  du  monde  ?  La  chose 
n'a  rien  que  de  fort  probable,  si  l'on  tient  compte  de  l'intérêt  qui 
s'attache  au  sujet,  et  des  qualités  honorables  qui  distinguent  l'exé- 
cution et  la  forme  de  ce  travail.  Quant  au  fond,  il  n'y  avait,  on  le 
comprend,  rien  à  innover.  Les  éléments  constitutifs  d'un  art  ne 
sont  ni  à  refaire,  ni  à  modifier.  Le  seul  mérite  consiste  à  les  ren- 
dre aisément  intelligibles  par  la  méthode,  la  simplicité  et  surtout 
la  clarté  de  l'exposition.  Les  matériaux  sont  partout.  Partout  aussi 
est-il  avantageux  de  savoir  les  choisir  et  les  prendre,  un  peu  à  la 
façon  de  l'abeille,  qui  ne  compose  le  meilleur  miel  que  pour  avoir 
butiné  les  meilleurs  calices. 

L'auteur  ne  se  défend  en  aucune  sorte  d'user  amplement  de  ce 
droit.  Bien  au  contraire,  il  confesse  avec  loyauté  tout  ce  qu'il  doit 
aux  théoriciens  les  plus  en  renom  qu'il  a  mis  à  contribution  sans 
scrupule.  Sa  plus  grosse  dette  est  évidemment  contractée  envers 
M.  Fétis,  dont  la  Musique  mise  à  la  portée  de  tout  le  monde, 
fort  bon  livre,  tout  de  première  main,  et  déjà  âgé  de  plus  de 
trente  ans,  a  sans  aucun  doute  servi  de  prototype  et  de  guide  à 
M.  Méliot.  Cependant  le  nouvel  Abrégé  en  diffère  fréquemment 
sous  le  rapport  du  plan  et  des  divisions  générales. 

La  matière,  développée  dans  les  quatre  sections  du  volume  de 
M.  Fétis,  est  ici  condensée  en  trois  livres  seulement, parfois  même 
dans  un  ordre  peut-être  plus  logique. 

Le  premier  livre  n'a  que  huit  chapitres,  oiî  se  trouvent  résumées 
les  notions  relatives  au  son,  à  la  notation,  aux  intervalles,  gam- 
mes, tons  et  modes,  aux  mesures,  au  mouvement,  à  la  mélodie  et 
à  l'harmonie,  en  un  mot  aux  éléments  du  Système  musical  propre- 
ment dit.  Dans  le  deuxième  livre,  borné  à  trois  chapitres,  il  est 
donné  un    aperçu   très-succinct  de  la  Composition  scientifique,  à 


(1)  Un  volume  in-18.  Paris,  G.  Delagrave,  1867. 


52 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


laquelle  se  rattachent  le  contre-point  et  ses  nombreuses  variétés, 
l'imitation  et  le  canon,  enfin  la  fugue.  Les  sept  chapitres  du  troi- 
sième livre  passent  rapidement  en  revue  les  diverses  ressources  de 
l'Exécution  dans  leurs  principales  combinaisons  vocales  et  instru- 
mentales au  concert,  au  salon,  à  l'église,  au  théâtre. 

A  l'instar  du  livre  de  M.  Fétis,  un- Vocabulaire-Index  des  termes 
techniques  les  plus  usités  complète  cette  brochure,  qui  trouve  moyen, 
en  moins  de  cent  soixante-dix  pages,  de  mêler  au  texte  quatre  cent 
cinquante  exemples  de  musique  d'une  bonne  gravure.  Impossible 
de  donner  davantage  sous  un  si  mince  volume.  Nécessairement  les 
détails  sont  écartés.  L'auteur  se  borne  à  tracer  d'une  main  vive 
et  assurée  les  contours  d'une  esquisse  franche,  arrêtée,  suffisante. 
Il  vise  à  la  précision  en  même  temps  qu'à  la  lucidité.  En  général 
ni  l'une  ni  l'autre  ne  lui  font  faute. 

Reconnaissons  cependant  que  le  chapitre  relatif  à  la  transposi- 
tion, un  peu  chargé  et  confus,  ne  convient  guère  à  la  clientèle  de 
lecteurs  un  peu  superficiels  pour  lesquels  M.  Méliot  a  écrit.  Certes 
les  observations  qu'il  y  prodigue  ne  sont  pas  sans  utilité  pour 
aider  l'exécutant  à  substituer  tel  accident  à  tel  autre  dans  l'opé- 
ration souvent  embarrassante  de  la  transposition  à  première  vue  ; 
mais  tout  cela  est  trop  spécial,  trop  compliqué  pour  figurer  dans 
un  modeste  abrégé,  dans  une  véritable  réduction,  qui  n'est  pas 
d'ailleurs  destinée  aux  artistes.  L'auteur  fera  sagement  de  refondre 
ce  chapitre  dans  les  prochaines  éditions  auxquelles  son  petit  livre 
nous  semble  justement  appelé  à  parvenir.  Qu'il  y  accorde  aussi 
une  mention  à  un  instrument  fort  populaire,  au  cornet  à  jÂslons, 
employé  si  souvent  aujourd'hui  dans  les  orchestres  de  tous  les  de- 
grés. Qu'il  se  décide  encore  à  remplacer,  aux  pages  101  et  102, 
les  deux  exemples  anonymes  de  contre-point  simple  à  trois  et  à 
quatre  parties,  par  des  spécimens  écrits  d'un  style  moins  libre  et 
plus  châtié,  qui  puissent  donner  une  idée  exacte  de  ce  que  l'école 
nomme  le  style  sévère. 

Grâce  aux  retouches  indiquées,  M.  Méliot  aura  fait  disparaître 
les  seuls  légers  délauts  qui  jettent  un  peu  d'ombre  sur  les  nom- 
breuses et  incontestables  qualités  de  la  Musique  expliquée  aux  gens 
du  monde.  Mais  pourquoi  aux  gens  du  monde  seulement  ?  Serait-ce 
par  hasard  que  la  rédaction  affecte  un  tour  de  style  raffiné, 
aristocratique?  Nullement.  Courante,  aisée,  limpide,  n'est  elle  pas 
accessible  aux  intelligences  déjà  quelque  peu  dégrossies,  aux 
hommes  de  labeur,  qui  pour  la  plupart  ne  sont  plus  dépourvus 
de  lecture?  L'auteur  a  eu  beau  limiter  son  public.  Le  livre  portera 
plus  loin  que  ne  le  veut  le  titre.  N'en  déplaise  à  M.  Méliot,  il  sera 
lu,  et  beaucoup,  autre  part  que  dans  les  salons  et  les  boudoirs. 

Maurice  BOURGES. 


REVUE  DES  THÉÂTRES. 

Palais-Royal  :  Le  Papa  du  prix  d'honneur,  comédie-vaudeville  en 
quatre  actes,  par  MM.  Eugène  Labiche  et  Théodore  Barrière. 
—  Ambigu  :  Le  Crime  de  Faverne,  drame  en  cinq  actes  et  huit 
tableaux,  par  MM.  Théodore  Barrière  et  Léon  Beauvallet.  — 
Gaité  :  Reprise  de  Jean  la  Poste.  —  Théatre-Déjazet  ;  Corna- 
val  vit  encore,  mascarade  en  huit  tableaux^  de  MM.  A.  de  Jallais 
et  A.  Flan. 

La  collaboration  de  3IM. Théodore  Barrière  et  Eugène  Labiche 
promettait  des  merveilles  au  Palais-Royal  ;  on  s'attendait  à  un  heu- 
reux mélange  des  qualités  qui  ont  fait  le  succès  des  Faux  Bons 
hommes  et  du  Chapeau  de  paille  d'Italie.  Mais  le  Papa  du  prix 
d'honneur  a  trompé  en  partie  ces  espérances.  Il  y  a  pourtant  dans 
cette  pièce  un  point  de  départ  excellent,  l'orgueil  naïf,  la  joie 
aveugle  des  parents  du  jeune  lauréat  qui  a  obtenu  au  grand  con- 
cours  le   prix  d'honneur  pour  sa  dissertation  latine,  tandis  que. 


par  un  contraste  piquant,  ce  dernier  ne  voit  dans  son  triomphe 
que  l'affranchissement  d'un  joug  insupportable  et  la  conquête 
d'une  liberté  illimitée.  Les  deux  premiers  actes,  soutenus  par  cette 
donnée,  se  présentent  favorablement  ;  on  rit  volontiers  des  préten- 
tions opposées  du  père  et  du  fils ,  on  se  demande  qui  l'emportera, 
de  ce  brave  M.  Gobaille  qui,  ne  pouvant  rien  faire  de  son  glorieux 
rejeton,  se  décide  à  le  marier  brusquement,  ou  de  l'ex-prix  d'hon- 
neur Achille  qui  veut  mener  la  vie  de  garçoi)  sans  qu'on  l'ennuie 
ou  qu'on  le  dérange.  Surpris  par  son  père  et  par  celui  de  sa  fu- 
ture dans  un  tête-à-tête  suspect  avec  une  femme  mariée,  il  n'a  que 
le  temps  de  la  faire  cacher  dans  un  cabinet,  dont  la  porte  se  re- 
forme sur  un  pan  de  sa  robe.  Le  père  Gobaille  aperçoit  ce  pan 
révélateur,  en  coupe  un  morceau  et  le  met  dans  sa  poche. 

Jusque-là  tout  va  bien,  mais  nous  ne  sommes  qu'à  la  moitié  de 
la  pièce,  et,  encore  une  fois,  la  déplorable  nécessité  d'occuper  tout 
un  spectacle  va  entraîner  les  auteurs  au  delà  des  limites  qu'ils 
auraient  dû  raisonnablement  s'imposer. 

Nous  sommes  à  Guéret,  où  M.  Gobaille  s'acharne  à  l'idée  de 
marier  son  fils  et  de  lui  donner  une  place  qui  appartient  en  ce 
moment  au  mari  d'Hermance,  la  maîtresse  d'Achille.  Cette  dame 
s'oppose  naturellement  au  double  projet  de  M.  Gobaille;  mais  ce- 
lui-ci reconnaît  la  robe  dont  il  a  dérobé  un  morceau,  et,  cette 
preuve  à  la  main,  il  force  Hermance  à  se  désister  de  ses  droits  sur 
Achille,  et  il  en  obtient  la  démissio.i  de  son  mari.  Rien  ne  fait 
plus  obstacle  à  l'établissement  du  prix  d'honneur,  qui  enterre  défi- 
nitivement ses  lauriers  dans  le  fond  d'une  province  obscure. 

Cette  seconde  partie,  longue. et  traînante,  n'est  un  peu  égayée 
que  par  l'intervention  de  deux  personnages  originaux,  le  mari 
d'Hermance,  ganache  de  la  plus  belle  espèce,  et  un  certain  Bufquin, 
que  l'on  suppose  en  fort  bons  termes  auprès  d'un  ministre  à  qui  il 
recommande  tout  le  monde,  moyennant  récompense  honnête,  et 
qui,  en  réalité,  n'a  été  que  son  valet  de  chambre. 

Si  le  Papa  du  prix  d'honneur  exerce  quelque  influence  sur  les 
recettes  du  Palais-Royal,  il  faudra  bien  certainement,  en  attribuer 
l'honneur  à  ses  inimitables  interprètes  Geoffroy,  Lhéritier,  Bras- 
seur, Hyacinthe,  Priston  et  à  une  débutante,  Mlle  Rosa  Didier,  qui 
vient  en  droite  ligne  du  Théâtre-Français. 

—  Nous  retrouvons  M.  Théodore  Barrière  à  l'Ambigu,  où  il  a 
fait  représenter,  avec  M.  Léon  Beauvallet,  un  drame  ayant  pour 
titre  le  Crime  de  Faverne.  Quoique  cette  pièce  ait  été  fort  bien 
accueillie  par  le  public,  nous  devons  constater  qu'il  y  règne  un 
fâcheux  embarras  qui  est  dû  au  manque  d'unité  et  à  la  bifurca- 
tion de  l'intrigue.  Il  s'agit  d'adultère,  mais  non  d'un  seul  ;  il  y  en 
a  trois  qui  se  croisent  et  s'enchevêtrent  de  manière  à  laisser  flot- 
ter l'intérêt  au  gré  du  hasard.  L'un  de  ces  adultères  est  même 
épisodique,  et  c'est  néanmoins  celui  qui  produit  le  plus  d'effet, 
paz-ce  qu'il  met  en  relief  tout  ce  qui  reste  aujourd'hui  de  l'ancien 
génie  créateur  de  Frederick  Lemaître.  Nous  y  reviendrons;  occu- 
pons-nous d'abord  de  l'incident  principal  et  tâchons  de  le  dégager 
de  ces  accessoires  parasites. 

Le  comte  de  Faverne,  retiré  dans 'une  terre  des  environs  de 
Blois,  a  conservé  des  relations  avec  une  jeune  fille  qu'il  a  connue 
quelques  années  auparavant  et  qui  est  devenue  la  femme  de 
M.  Mauclerc,  substitut  du  procureur  du  roi,  car  l'action  se  passe 
au  temps  de  la  Restauration.  Ce  substitut  est  dans  une  situation 
de  fortune  très-précaire,  et  le  comte  de  Faverne,  inquiet  de  l'ave- 
nir de  Jeanne,  annonce  l'intention  de  lui  léguer  tous  ses  biens. 
Mais  il  a  un  frère,  un  assez  vil  particulier,  qu'on  nomme  le  cheva- 
lier Balthazar,  et  qui  a  la  conscience  chargée  d'un  bon  nombre  de 
turpitudes.  Pour  empêcher  Jeanne  d'hériter  à  son  détriment,  il  lui 
verse  un  poison  subtil  qui,  par  malheur,  va  tout  droit  à  l'adresse 
de  son  frère,  le  comte  de  Faverne.  Ce  crime  est  attribué  à  Jeanne, 
et  c'est  son  mari,  le  substitut,  qui  est  chargé  d'instruire  contre 


DE  PARIS. 


53 


elle.  Il  n'obtient  pas  l'aveu  fie  l'empoisonnement,  mais  il  acquiert 
la  preuve  de  son  propre  déshonneur.  En  ce  moment,  le  chevalier 
Balthazar  vient  disculper  Jeanne  de  la  première  accusation  qui  pèse 
sur  elle;  le  misérable  entretenait,  de  son  côté,  un  commerce  cri- 
minel avec  une  jeune  Icnime  dont  le  mari  s'est  vengé  en  lui  tirant 
un  coup  de  fusil.  Avant  de  mourir,  il  proclame  l'innocence  de 
Jeanne ,  et  quant  à  la  seconde  faute,  qui  atteint  plus  directement 
le  mari ,  elle  reste  dans  l'ombre  où  l'on  prévoit  que  le  temps  la 
fera  oublier. 

Sur  une  ligne  parallèle  à  l'adultère  de  Favernc,  se  développe 
l'adultère  posthume  de  la  femme  du  notaire  Séraphin,  et  c'est  là 
l'élément  capital  du  succès  de  la  pièce.  Ce  notaire  est  veuf,  et  se 
complaît  dans  l'adoration  rétrospective  de  sa  Thérèse.  Tout  à  coup, 
une  indiscrétion  de  ses  clercs  en  goguette  lui  apprend  que  cette 
Thérèse,  qu'il  aimait  tant,  l'a  trompé  avec  l'un  d'entre  eux.  La 
raison  du  pauvre  homme  ne  peut  résister  à  une  aussi  terrible  ré- 
vélation, et  il  ne  recouvre  par  instants  quelques  lueurs  de  bon  sens 
que  pour  prêcher  à  tous  l'oubli  et  le  pardon.  Notre  grand  comé- 
dien Frederick  Lemaître  prête  à  ce  rôle  du  notaire  Séraphin  un 
attrait  magique  qui,  à  lui  seul,  expliquerait  l'empressement  du 
public  à  aller  applaudir  le  Crime  de  Faverne. 

Les  autres  rôles  sont  tenus  avec  ensemble  par  Brindeau,  Clé- 
ment-Just,  Castellano,  Mlles  Rousseil  et  Debreuil.  La  partie  comi- 
que est  confiée  à  Schey  et  à  Allart,  qui  s'en  acquittent  à  la  satis- 
faction générale. 

—  A  la  Gaîté,  on  a  repris  Jean  la  Poste,  qui  va  reconquérir  son 
ancienne  vogue,  grâce  au  jeu  sympathique  de  Dumaine  et  au  su- 
perbe décor  de  cette  tour  qui  s'enfonce  peu  à  peu  jusqu'au  niveau 
du  vaste  Océan  éclairé  par  les  reflets  argentés  de  la  lune.  Ce  drame 
a  été  donné  en  été,  et  il  sera  nouveau  pour  beaucoup  de  gens. 

Les  pièces  de  cai'naval  s'en  vont  à  peu  près  comme  les  Revues 
de  fin  d'année.  Quelques  théâtres  persistent  à  réagir  contre  cette 
tendance  des  mœurs  nouvelles.  Ont-ils  raison?  Il  y  aurait  lieu  de 
le  supposer  en  voyant  le  triomphe  remporté  par  la  pièce  du 
théâtre  Déjazet,  Carnaval  vil  encore.  Il  est  vrai  qu'indépendam- 
ment de  la  donnée  qui  a  pour  but  de  nous  prouver  que  le  goût 
des  saturnales  n'est  pas  aussi  loin  de  nous  qu'on  veut  bien  le  dire, 
il  y  a  dans  cette  mascarade  à  grand  spectacle  plusieurs  tableaux 
pleins  de  mouvement  et  de  gaieté.  Nous  citerons  ceux  qui  repré- 
sentent le  carnaval  sur  les  toits ,  le  carnaval  à  la  caserne  et  le 
bal  de  l'Opéra,  dont  l'effet  est  splendide.  La  mise  on  scène  est 
très-soignée  ;  les  airs  d'Eugène  Déjazet  sont  charmants,  et  les 
principaux  rôles  sont  joyeusement  remplis  par  Daubray,  Legrenay, 
Mme  Eudoxie  Laurent  et  Mlle  Daudoird. 

D.  A.  D.  SAINT-YVES. 


CONCERTS  ET  AUDITIONS  IDSICÀIES  DE  LÀ  SEMAINE. 

;,;**  Le  principal  inlérêt  du  Concert  populaire  de  dimanche  dernier 
était  l'excciition,  pour  la  première  fois,  de  la  marche  religieuse  du  Lo- 
hengrin  de  Wagner.  L'orchestre  de  Pasdeloiip  a  mis  tous  ses  soins  à  la 
faire  bien  comprendre  à  son  auditoire.  Aussi  ce  morceau,  l'un  de  ceux 
du  compositeur,  le  plus  capable  d'impressionner  les  masses,  a  été  fort 
bien  exécuté  et  fort  applaudi  par  la  très-grande  partie  du  pubhc  qui  l'a 
redemandé.  —  Le  reste  du  concert  offrait  son  intérêt  habituel. 


goùlée.  — M.  Wekerlin  annonce  une  dernière  séance,  par  invitation,  pour 
le  22  février  courant. 

***  Nous  dev  ons  une  mention  p.-irllculière  au  concert  donné  mercredi 
dernier,  à  la  .salle  Pleyel,  par  M.  Te.ys.son,  chanteur  de  mérite  et  qui  s'y 
est  fait  légitimement  applaudir.  Nous  aurions  d'autant  moins  lieu  de  passer  ce 
concert  .sous silence  qu'un  piani.'-to  américain,  M.  Biissmeycr,  s'y  est  révélé 
à  l'audiloire  avec  un  éclat  dont  personne  ne  pouvait  se  faire  une  idée. 
M.  Bussmeyer  a  exécuté,  avec  une  perfection  et  un  talent  qui  justifiaient 
d'ailleurs  cette  surprise,  un  morceau  de  GotLschalk  et  une  transcrip- 
tion de  Mendelssolin,  connue  il  est  rare  de  les  voir  interpréter.  L'émi- 
nent  virtuo.se— car  il  mérite  largement  cette  qualification — possède  son 
instrument  en  maître,  il  en  obtient  une  puissance  de  .sonorité  étonnante; 
il  joini  en  outre,  à  la  distinction  du  style,  une  vélocilé  qui  rend  son 
jeu  magistral  des  plus  brillants  et  une  grande  observation  des  nuan- 
ces. En  un  mot,  M.  Bussmeyer  nous  paraît  destiné  à  faire  sensation  à 
Paris. 

,j*5S  La  Société  des  concerts  donnera  aujourd'hui  dimanche,  à  2  heures 
précises,  son  septième  concert,  sous  la  direction  de  Georges  Hainl.  En 
voici  le  programme  :  1"  symphonie  militaire  (48"),  de  Haydn  ;  —  2"  chœur 
des  Pèlerins  du  Tannhauser,  do  Wagner;  —  3°  air  de  danse  iVfphigénie 
en  Aulide,  de  Gluck:  —  i"  motet  (double  chœur  sans  accompagnement), 
de  S.  Bach;  —  5°  symphonie  en  fa  (8=)  de  Beethoven. 

"^Ï^J  Aujourd'hui  dimanche,  à  2  heures,  au  cirque  Napoléon ,  seizième 
concert  populaire  de  musique  classique,  sous  la  direction  de  J.  Pa.sdeloup. 
On  y  entendra  :  1°  ouverture  de  Don  Juan  de  Mozart; —  2o  symphonie  en 
mi  bémol  de  Robert  Schumanu  (allegro,  scherzo,  andante,  finale)  ;  — 
3°  Bourrée  (1720)  deJ.-Séb.  Bach;  i'  concerto  pour  violon  de  Mendel.s- 
sohn,  exécuté  par  Mme  Norman  -  Neruda,  professeur  au  Conservatoire 
de  Stockholm;  —  S°  septuor  de  Beethoven  (introduction,  allegro,  adagio 
cantabile,  menuet,  andante  con  variazoni,  scherzo,  finale),  exécuté  par 
M.  Grisez  (clarinette),  Espeignel  (basson),  Mohr  (cor),  et  tous  les  ins- 
truments à  cordes. 

***  Pendant  la  cérémonie  du  mariage  de  M.  Lafleur,  fils  aîné,  un 
0  Salutavis  et  un  Ave  Maria  d'A.  Elwart  ont  été  chantés  par  le  ténor 
Marty  et  le  baryton  MInart.  —  Un  Laudate  remarquable  de  Laboureau, 
le  maître  de  chapelle  de  Saint-Laurent,  a  brillamment  terminé  cette 
cérémonie. 

^*^  Alfred  Jaell  et  sa  femme,  née  ïrautmann,  viennent  d'arriver  à 
Paris. 

»**  La  grande  salle  du  Casino  de  Nice  a  été  témoin,  le  6  février,  du 
triomphe  remporté  par  un  jeune  violoniste  sicilien,  M.  Scuderi,  dont 
l'avenir  s'annonce  de  la  manière  la  plus  favorable.  Mécanisme,  style  et 
sentiment  se  trouvent  chez  cet  artiste  à  un  égal  degré,  et  nous  serions 
surpris  s'il  ne  faisait  pas  parler  de  lui  avant  peu  de  temps. 


^*^,  Le  concert  que  la  Société  Sainte-Cécile,  sous  la  direction  de 
M.  Wekerlin,  a  donné  samedi  dernier,  était  particulièrement  consacré  à 
l'audition  de  musique  ancienne  :  Une  Berceuse  du  xin"  siècle,  un  air  du 
Convito  d'Alessandro  de  Haendel  ;  une  Sojiate  chantée  de  Mozart;  l'ariette 
des  Trc  giorni  de  Pergolèse;  un  air  d'Anacréon  de  CherubinI,  etc.,  ont 
mis  tour  à  tour  en  relief  le  talent  de  Mmes  Barthe,  E.  Bertrand  et  de 
MM.  Hermann-Léon  et  Pagans.  —  M.  Lefébure  a  fait  entendre  le  nouvel 
orgue  Mustel,  instrument  dont  il  a  tiré  des  effets  qui  ont  charmé  l'audi- 
toire. La  Berceuse  de  H.  Reber,  écrite  originairement  pour  violon  et  piano, 
a  été  dite  avec  des  paroles    italiennes  par  Mme  Barthe,  et  a  été  fort         ***  Au  théâtre  Italien,  dans  la   brillante   représentation    de   VEtisi, 


NOUVELLES  DES  THEATRES  LYRIQUES. 

^*^  Le  théâtre  Impérial  de  l'Opéra  a  donné  deux  fols  Guillaume  Tell 
cette  semaine  :  lundi  pour  la  300°  représentation,  puis  vendredi. —  Mer- 
credi, on  a  joué  la  4i2<'  de  la  Muette. 

**#  A  l'occasion  et  à  l'issue  de  la  S00«  représentation  de  Guillaume 
Tell,  les  principaux  sujets,  les  artistes  de  l'orchestre  et  des  chœurs  de 
l'Opéra  ont  donné,  lundi  dernier,  dirigés  par  M.  Georges  Hainl,  une 
sérénade  à  Ros,sIni.  Sur  une  sorte  d'estrade  construite  à  la  hâte  dans  la 
cour  de  la  maison  de  la  Chaussée-d'AntIn  qu'habite  l'Illustre  maître, 
l'ouverture,  le  solo  de  baryton  du  premier  acte  et  le  chœur  des  fian- 
çailles de  Guillaume  Tell  ont  été  admirablement  joués  et  chantés  aux 
applaudissements  de  la  foule  Immense  qui  stationnait  sur  le  boulevard. 
Rossini,  retenu  chez  lui  par  son  état  de  souffrance,  a  paru  un  instant  à 
une  fenêtre,  d'où  II  a  salué  tous  les  artistes  et  tous  ces  amis  inconnus 
qui  venaient  rendre  hommage  à  son  génie.  11  a  reçu  ensuite  Mlle  Battu, 
MM.  Faure  et  Villaret,  qui  lui  ont  offert  une  couronne  d'or,  au  nom  de 
tout  le  personnel  de  l'Opéra.  En  1829,  une  sérénade  avait  aussi  été 
donnée  à  l'auteur  de  Guillaume  Tell,  le  soir  de  la  première  représentation. 
Après  trente-neuf  ans,  après  cette  longue  période  de  repos  et  de  gloire, 
le  retour  du  même  hommage  a  profondément  touché  Rossini, 


^*^  Tandis  que  l'Académie  Impériale  de  musique  célébrait  le  cinq- 
centenaire  de  Guillaume  Tell,  l'Opéra-Comique  donnait,  sans  sérénade, — 
ceux-là  sont  morts,  hélas  !  —  la  856°  représentation  du  Chalet,  et  la 
M 66°  de  la  Dame  Blanche. 


,t*s  Au  moment  où  nous  mettons  sous  presse,  ce  soir  samedi,  nous 
assistons  à  la  première  représentation,  si  intéressante  à  plus  d'un  titre, 
à'Vn  Premier  Jour  de  bonheur,  le  nouvel  opéra  d'Auber.  — Nous  en  ren- 
drons compte  dimanche. 


u 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


(TAmore  qui  a  eu  lieu  samedi,  il  y  a  huit  jours,  Adelina  Patti,  toute  ra- 
dieuse encore  de  son  nouveau  triomphe  du  Havre,  a  déployé  une  verve 
et. une  maestria  auxquelles  l'assistance  a  répondu  par  un  enthousiasme 
,  du  plus  franc  aloi.  Son  duo  avec  Ciampi,  qui  abordait  pour  la  première 
fois  le  rôle  de  Dulcamara,  a  été  redemandé.  Gardoni  et  Agnesi  sont  ex- 
cellents. —  Succès  encore  pour  la  grande  artiste  dans  la  Traviata,  qu'elle 
a  merveilleusement  chantée  lundi  dernier  pour  la  dernière  fois,  au 
bénéfice  de  son  camarade  Scalese.  S.  A.  1.  la  princesse  Mathilde 
assistait  à  cette  représentation. —  Hier  on  reprenait  Don  Giovanni.  M.  Ba- 
gier  n'a  rien  négligé  pour  donner  le  plus  grand  éclat  à  la  reprise  du 
chef  d'œuvre  de  Mozart.  Ainsi,  outre  Adelina  Patti  dans  le  rôle  de  Zer- 
lina,  les  autres  rôles  étaient  confiés  à  l'élite  des  artistes  :  Steller  chan- 
tait celui  de  Don  Giovanni,  qui  fut,  dit-on,  son  triomphe  à  l'étranger; 
Ottavio,  c'était  Gardoni  ;  Leporello,  c'était  Ciampi  ;  Verger,  c'était  Mazetto, 
et  Agnesi  n'avait  pas  dédaigné  celui  du  Commandeur.  Enfin  dona  Anna, 
c'était  la  dramatique  Mlle  Krauss  et  Donna  Elvira,  la  charmante  Mlle 
Harris.  Le  succès  qu'a  eu  la  répétition  générale  fait  présager  celui  de 
la  représentation.  Nous  y  reviendrons. 

^*^  Les  journaux  du  Havre  ne  tarissent  pas  d'éloges  sur  le  merveil- 
leux talent  d'Adelina  Patti;  à  l'issue  de  sa  brillante  représentation,  les 
artistes  de  l'orchestre  et  les  chœurs  fqui  ne  sont  pas  aussi  médiocres 
qu'on  s'est  plu  à  le  dire,  bien  loin  de  là)  ont  donné  une  .sérénade 
à  Rosine,  sérénade  composée  de  l'Ouverture  et  du  premier  acte  du  Barbier. 
«  C'est  l'ouverture  de  la  Sirène,  disait  à  ce  propos  le  Journal  du  Havre, 
qu'on  eut  dû  exécuter  en  l'honneur  de  la  diva.  »  Nous  partageons  en 
cela  l'avis  de  notre  confrère. 

,**  S.  Exe.  le  maréchal  Vaillant,  ministre  de  la  maison  de  1  Empereur 
et  des  beaux-arts,  vient  d'autoriser  M.  Bagier  à  louer  la  salle  Ventadour 
à  M.  Carvallio,  poury  donner  des  représentations  les  jours  non  employés 
par  la  troupe  italienne,  c'esl-à-dire  les  lundis,  mercredis  et  vendredis. 
M.  Carvalho  conserve  la  direction  du  théâtre  Lyrique  avec  sa  subvention; 
mais  son  projet  consiste  à  réserver  exclusivement  et  quotidiennement 
cette  scène  aux  œuvres  françaises  du  répertoire  et  aux  productions  des 
jeunes  auteurs,  dans  le  domaine  de  l'opéra-comique,  tandis  que  les  grands 
opéras  et  les  traductions,  Faust,  Roméo  et  Juliette,  le  Lohengrin,  par 
exemple,  émigreront  à  la  salle  Ventadour,  et  y  trouveront  le  vaste  cadre 
qu'ils  méritent.  Cette  combinaison  fonctionnera  à  partir  du  lo  mars 
prochain.  —  Le  Quentin  Metzyz,  de  MM.  E.  Dubreuil  et  Cherouvrier, 
opéra  en  deux  actes;  depuis  longtemps  reçu,  va  entrer  en  répétition  à 
ce  théâtre. 

*■*»  Mlle  Brache,  naguère  danseuse  à  l'Opéra,  vient  d'être  engagée 
pour  jouer  un  rôle  de  mime  dans  le  Timbre  d'argent  de  MM.  Carré  et 
Barbier,  musique  de  M. 'Camille  Saint-Saëns,  dont  la  représentation  n'est 
pas  éloignée.  Les  principaux  rôles  seront  tenus  par  Mmes  Schroeder  et 
Irma  Marié,  MM.  Troy -et  Puget.  C'est  un  opéra  légendaire  en  quatre 
actes  avec  prologue.  Le  prologue  y  précédera  l'ouverture;  on  dit  beaucoup 
de  bien  de  l'œuvre,  qui  participe  du  drame,  de  la  fantaisie  et  du  ballet. 
— Ce  dernier,  à  l'instar  de  celui  des  Xiebelungen,  se  passerait  dans  l'eau. 

^*^  On  répète  en  ce  moment  au  théâti'e  de  l'.\thénée  une  pièce  en 
trois  actes,  de  MM.Chivot  et  Duru,  dont  M.  Lecocq,  auteur  de  la  parti- 
tion de  VAmour  et  son  carquois,  a  composé  la  musique. 

**t  Le  Théâtre  du  Palais-Royal  va  faire  construire,  au  n"  15  de  la  rue  de 
Richelieu,  une  salle  annexe  de  celle  qu'il  occupe,  pour  y  utiliser  ceux 
de  ses  artistes  qu'un  succès  de  longue  durée  laisserait  inoccupés.^On  con- 
struit également  au  boulevard  de  Strasbourg  un  café-concert-spectacle- 
gymnase-cirque-funambule,  etc.  11  doit  coûter  200,000  francs. 

,'*^  11  est  fortement  question  d'une  réunion  des  directeurs  de  théâtres 
qui  aurait  pour  objet  de  frapper  d'une  rétribution  les  billets  dits  de 
faveur.  Toutes  les  personnes  que  leur  profession  on  leurs  relations  mettent 
dans  le  cas  d'être  assiégées  de  demandes  de  ces  billets,  ne  pourraient 
qu'applaudir  à  l'adoption  générale  d'une  mesure  qui  mettrait  un  terme 
à  l'abus  qu'on  en  fait  ou  du  moins  qui  le  restreindrait  considérablement. 

»*,  Nous  recevons  à  l'instant  même  de  M.  Am.  Mereaux,  l'éminent 
professeur  et  compositeur,  une  dépêche  télégraphique  annonçant  que  ven- 
dredi soir  a  eu  lieu,  au  Giand-Théâtre,  la  première  représentation  de 
l'Africaine  avec  un  succès  digne  du  chef-d'œuvre  de  Meyerbeer, — Bien  chan- 
tée, belle  mise  en  scène,  recettes  fructueuses  assurées,  tels  sont  les  termes 
de  la  dépêche. 

»**  On  vient  de  jouer  au  Gymnase  de  Marseille,  sans  qu'il  y  ait  lieu 
à  éloge  ou  à  blâme,  un  opéra-comique  inédit  et  décentralisateur,  sous  ce 
titre  qui  ne  manque  pas  d'une  piquante  hardiesse  :  l'Enfant  des  flots. 
Pourquoi  pas  Moise?  Est-ce  à  cause  de  Rossini? 

t%  Le  conseil  municipal  de  la  même  ville,  par  un  vote  récent,  a  coa- 
firmé  pour  deux  années  nouvelles  le  privilège  de  l'exploitation  de  l'Opéra 
accordé  à  M.  Husson,  avec  la  subvention  annuelle  de  la  ville. 

,*^  On  nous  écrit  de  Lyon  que  Bobinson  Crusoé  vient  d'être  représenté 
au  grand  théâtre  de  cette  ville  avec  tout  le  succès  sur  lequel  comptait  la 
direction.  Très-bien  monté,  l'opéra  nouveau    d'Ofienbach  a  été  applaudi 


d'un  bout  à  l'autre.  A  la  chute  du  rideau  on  a  rappelé  tous  les  ar- 
tistes qui  avaient  lutté  de  zèle  et  de  talent  dans  l'interprétation  de 
l'ouvrage.  Nous  reviendrons  avec  plus  de  détails  dans  notre  prochain 
numéro  sur  cette  belle  représentation. 

»■**  Au  théâtre  Français  de  Bordeaux,  la  Leçon  d'amour  a  parfaitement 
réussi.  La  musique  de  cet  opéra-comique,  de  M.  Alphonse  Varney,  l'an- 
cien chef  d'orchestre  des  Bouffes-Parisiens,  aujourd'hui  fixé  à  Bordeaux, 
et  de  son  fils  Edouard,  a  été  attentivement  écoutée,  et  le  public  nom- 
breux a  chaudement  applaudi  tous  les  morceaux.  L'exécution  a  été  satis- 
faisante. —  Les  artistes  en  société  du  Grand-Théâtre  vont  reprendre 
l'Africaine,  et  ils  viennent  à  cet  etfet  d'engager  Mme  Massé-'Wilhem  pour 
chanter  le  rôle  de  Sélika. 

***  Le  théâtre  de  Saint-Etienne  se  prépare  à  jouer  un  drame  moyen- 
âge,  le  Gouffre  d'Enfer,  pour  lequel  M.  Dard,  compositeur  de  talent  et 
directeur  de  la  Chorale  Forézienne,  a  écrit  plusieurs  morceaux  de  musi- 
que et  de  chant. 

^*^  Ce  n'est  pas  sans  avoir  eu  à  supporter  de  rudes  épreuves  que  la 
Compagnie  lyrique  et  dramatique  française,  dont  nous  avons  annoncé  le 
départ  l'été  dernier  pour  Buenos-Ayres,  et  qui  se  composait  de  Mlle  Phi- 
lippe, de  MM.  Rozier,  Hoffmann,  d'Hôte,  Colette,  Cœdès,  chef  d'or- 
chestre, etc.,  a  atteint  le  but  de  son  voyage.  La  traversée  a  été  effroyable, 
elle  navire  qui  portait  ces  artistes  .s'est  vu  à  deux  doigts  de  sa  perte.  Pour  com- 
blede  malheur,  elle  trouve  au  port...  le  choléra.  D'une  lettre,  écrite  par  l'un 
de  ces  vaillants  voyageurs,  il  résulte  que  cependant  personne  d'entre  eux 
n'est  malade,  que  chacun  fait  son  devoir  et  que  le  succès  n'est  pas  dou- 
teux. La  troupe  a  dû  débuter  par  les  Bavards,  d'Offenbach.  Après  tant 
de  dangers  affrontés,  nous  devions  bien  à  ces  exilés  volontaires  un  sou- 
venir et  un  gage  de  sympathie. 

,j**  Mme  Rose  Bell  continue,  avec  son  talent  souple,  sympathique  et 
spirituel ,  à  initier  les  Belges  au  répertoire  populaire  d'Offenbach.  Ces 
jours-ci,  elle  a  chanté  Barbe-Bleue  à  Liège,  et  .';on  jeu  piquant,  sa  grâce, 
son  entrain  et  sa  jolie  voix  lui  ont  complètement  rallié  le  public  liégeois, 
—  et  ce  n'est  pas  peu  dire,  —  qui  l'a  applaudie  avec  enthousiasme.  Les 
élèves  de  l'Université  lui  ont  donné  une  sérénade,  et  les  journaux 
de  la  province  constatent  unanimement  «  le  tact  et  la  spontanéité  de 
ces  ovations.  »  Ce  succès  d'artiste  et  de  femme  est  trop  accentué  pour  que 
nous  ne  nous  empressions  pas ,  à  notre  tour,  de  le  mentionner  et  d'en 
féliciter  l'excellente  artiste. 

^^'^i  Une  correspondance  de  Saint-Pétersbourg  nous  apporte  la  nou- 
velle d'une  belle  exécution  du  Stabat  de  Rossini  par  les  élèves  de  l'école 
des  théâtres  impériaux,  sous  la  direction  du  maestro  Ricci.  Mmes  Pauline 
Lucca,  Trebelli,  Giovannoni  et  Volpini,  Mario  et  Graziani  chantaient  les 
soli  de  cette  œuvre  admirable  du  maître. 

„;**  Hier  samedi  a  eu  lieu  l'avant- dernier  bal  masqué  de  l'Opéra. 
Strauss  conduisait  l'orchestre,  et  comme  toujours  il  y  avait  foule. — Sa- 
medi prochain,  dernier  bal  avant  celui  du  mardi  gras . 


NOUVELLES  DIVERSES. 


*%  LL.  MM.  l'Empereur  et  l'Impératrice  ont  bien  voulu  honorer  de 
leur  patronage  le  bal  annuel  de  l'Association  de  secours  mutuels  des 
artistes  dramatiques.  Cette  fête  aura  lieu  samedi  14  mars,  dans  la  salle 
du  théâtre  impérial  de  l'Opéra-Comique.  La  tombola  se  composera,  cette 
année,  d'un  seul  lot  qui  consistera  en  un  bijou  acheté  dans  ime  des 
premières  maisons  de  Paris,  et  à  l'acquisition  duquel  l'Association  con- 
sacrera une  somme  d'au  moins  3,000  francs. 

^*^  La  critique  musicale  du  Paris-Magazine  vient  d'être  confiée  à 
M.  L.  Dautresme,  qui  jusqu'à  présent  a  fait  preuve  de  savoir  et  de  talent, 
en  composition  musicale,  du  moins. 

,*=s  M.  le  comte  Walewski  succède  au  regretté  Georges  Kastner,  comme 
membre  libre,  à  l'Académie  des  beaux-arts. — Avant  Georges  Kastner,  ce 
fauteuil  avait  été  occupé  par  M.  le  comte  Turpin  de  Crissé,  qui  fut  un 
protecteur  éclairé  de  l'art  et  des  artistes. 

»*„;  Dans  une  lettre  que  M.  A.  de  Gasperini  vient  d'adresser  à  plu- 
sieurs journaux,  il  se  plaint  amèrement  de  s'être  vu,  pendant  qu'il  était 
malade  à  Nice,  dépouillé  par  M.  E.  de  Girardin  de  ses  fonctions  de  cri- 
tique musical  à  la  Liberté,  malgré  promesse  formelle  de  ce  dernier  de  les 
lui  conserver.  Celte  lettre  étant,  jusqu'à  présent,  restée  sans  réponse, 
il  serait  difficile  de  se  prononcer  sur  une  question  aussi  délicate. 

5^%  L'autre  jour,  à  Livourne,  un  vapeur  de  guerre  anglais  et  un  va- 
peur de  guerre  américain  demandaient  en  même  temps  l'entrée  du  port. 
Pendant  que  Ton  remplissait  les  formalités,  les  deux  navires  étant  bord  à 
bord,  le  commandant  anglais  fit  jouer  à  sa  musique  l'air  connu  Bonnie 
blue  flag.    Le  capitaine  américain  écoute  jusqu'au  bout  cette  mélodie 


DE  i'AIUS 


S5 


anti-yankeese  et  ordonne  ensuite  à  son  orchestre  d'attaquer  l'hymne  na- 
tional irlandais  IVraring  of  tbe  Gretn,  qui  n'est  pas  précisément  agréable 
aux  oreilles  anglaises.  Puis,  les  deux  navires  se  saluent  le  plus  cour- 
toisement du  monde,  du  pavillon  et  du  porte-voix.  La  musique  ouvre 
une  ère  nouvelle  aux  combats  et  aux  rapports  internationaux  maritimes  ! 

^**  M.  Alexandre  de  Lavergne,  réminent  critique  théâtral  de  l'Indépen- 
dance belge,  vient  d'augmenter  d'un  nouvel  ouvrage  la  collection  de  ceux 
auxquels  il  doit  la  place  élevée  qu'il  occupe  dans  la  littérature  contem- 
poraine. 11  est  pou  de  nos  lecteurs  qui  ne  se  rappellent  la  Recherche  de 
l'inconnu,  la  Duchesse  de  Mazarin,  l'Aine  de  la  famille,  i'Utde  poitrine, 
et  ce  beau  volume:  Ruines  historiques  des  châteaux  de  France,  qui  atteste 
de  lu  part  de  l'auteur  une  si  parfaite  connaissance  des  choses  du  grand 
siècle.  Le  Lieutenant  Robert,  tel  est  le  titre  du  nouveau  roman  de  M.  de 
Lavergne,  que  l'éditeur  Cadot  vient  de  publier  en  deux  volumes,  dont 
le  premier  a  paru.  —  Le  journal  le  Siècle,  qui  en  a  eu  la  primeur,  l'a 
donné  en  feuilletons  dans  les  derniers  mois  de  l'année  dernière,  et  l'on 
sait  avec  quel  empressement  ces  feuilletons  furent  lus  par  les  abonnés. 
Réunis  aujourd'hui,  ils  ne  rencontreront  pas  un  moindre  succès  parmi 
ceux  qui  veulent  dans  un  livre  de  ce  genre  des  situations  intéressantes, 
des  caractères  vrais  et  bien  tracés,  enfin,  véritable  mérite  de  style  ce  si 
rare  aujourd'hui. 

**;>  On  annonce  le  mariage  de  M.  Emilien  Pacini,  membre  de  la 
commission  d'examen,  avec  Mme  Jules  Cohen,  la  mère  du  compositeur. 

,*^  Mlle  Julie  Ponchard,  fille  de  l'ancien  organiste  de  Saint-Eustache 
et  sœur  du  célèbre  chanteur,  vient  de  mourir  à  l'âge  de  soixante-dix 
ans.  Élève  distinguée  de  son  père,  elle  professa  le  piano  et  l'orgue  avec 
succès . 

**;^  Vendredi  est  mort  subitement  un  artiste  distingué  M.  Berthelemy, 
hautbois  à  l'orchestre  du  théâtre  de  l'Opéra  et  à  celui  de  la  Société  des 
concerts  du  Conservatoire.  11  était  en  outre  professeur  au  Conservatoire. 

,15**  On  annonce  la  mort  de  M.  Montauriol,  artiste  de  la  chapelle  im- 
périale, de  celle  de  Saint-Eustache  et  membre  de  la  Société  des  concerts 
du  Conservatoire. 

^**  M.  Ch.  Mevil,  qui  fut  longtemps  le  secrétaire  de  M.  Benazet  pour 
la  partie  artistique  de  l'établissement  thermal  de  Bade  et  son  ami,  vient 
de  mourir.  11  avait  occupé,  en  juillet  1830,  le  poste  de  secrétaire  géné- 
ral du  ministère  de  l'intérieur  et  il  était  décoré. 

DÉPARTEM  ENTS 

^*i  Beauvais.  —  Le  4  de  ce  mois,  la  Société  philharmonique  a  donné 
son  deuxième  concert  avec  Mlle  Marie  Mineur,  élève  du  Conservatoire, 
le  violoncelliste  distingué  Dunkler  et  Charles  Pottier,  chanteur  comique. 
Mlle  Mineur  a  bien  rempli  la  partie  vocale  qui  lui  était  confiée,  etDunkler, 
dans  l'exécution  de  ses  œuvres  et  le  Carnaval  de  Venise,  a.  obtenu,  comme 
toujours,  un  succès  éclatant.  M.  Pottier  a  été  également  applaudi  pour 
ses  chansonnettes.  L'orchestre,  dirigé  par  M.  Félix  Dubray,  a  fait  honneur 
au  talent  de  son  chef,  et  mérite  une  mention  spéciale  pour  l'exécution 
de  la  seconde  symphonie  de  Beethoven  et  des  ouvertures  de  la  Ceneren- 
tola  et  de  Sémiramis. 

ÉTRANGER 

^"^  Londres.  —  Un  incendie  vient  de  détruire  une  des  plus  belles 
salles  de  concert  de  Londres  :  [The  Oxford  Music-hall).  Elle  datait  seule- 
ment de  mars  -1861.  Beaucoup  d'artistes  célèbres  s'y  étaient  fait  entendre. 
On  ignore  la  cause  de  ce  sinistre,  qui  heureusement  s'est  produit  passé 
minuit,  après  la  fermeture  de  la  salle.  Celle-ci  était  assurée. 

^**  Berlin.  —  Pour  la  première  fois  dans  le  cours  de  sa  longue  car- 
rière artistique,  Wacbtel  a  chanté  la  Muette,  le  i  février.  Depuis  long- 
temps ou  n'avait  vu  un  empressement,  une  fièvre  semblables  dans  le 
public;  on  allait  assister  à  un  début,  et  le  débutant  s'appelait  Wachtel. 
Le  célèbre  artiste  a  remporté  un  de  ces  triomphes  signalés  qu'il  a-  dû 
renoncer  à  compter  depuis  longtemps.  Il  a  rétabli,  pour  ainsi  dire,  la 
vérité  historique,  si  souvent  altérée  par  les  ténors  de  tous  les  pays,  en 
chantant,  dans  les  tons  où  ils  furent  écrits,  le  duo  (en  ré)  et  l'air  du 
Sommeil  (eu  sol),  qui  y  gagnent  plus  qu'on  ne  saurait  croire.  —  Au 
théâtre  de  KroU,  encore  un  succès  dû  à  Off'enbach  :  Vne  Nuit  blanche, 
vient  d'être  représentée  pour  la  première  fois  :  elle  est  allée  aile  slelle.  Il 
doit  rester  maintenant  bien  peu  d'œuvres  du  maestro  que  Berlin  ne 
connaisse  pas,  c'est-à-dire  n'ait  pas  encore  applaudies,  car  pas  une  n'y  a 
rencontré  l'indifférence. 

,^*:t  Leipzig.  —  Chose  bien  rare,  l'élément  classique  faisait  absolument 
défaut  au  quinzième  concert  du  Gewandhaus.  Deux  œuvras  seulement 
figuraient  au  programme  et  toutes  deux  appartiennent  à  des  compositeurs 
vivants  :  la  Fille  du  roi  des  Aulnes,  ballade  pour  soli,  chœurs  et  orchestre, 
de  W.  Gade,  et  le  Ver  sacrum  ou  la  Fondation  de  Rome,  cantate  de  F. 
Hiller.  Ces  deux  compositions  ont  été  bien  reçues  du  public. 

^*^  Munich.  —  Le  directeur  général  de  la  musique,  l'éminent  compo- 
siteur Franz  Lachner,  vient  d'obtenir,  pour  raisons  do  santé,  un  congé 
d'un  an  ;  il  a  reçu  en  même  temps  la  croix  de  commandeur  de  l'ordre 
du  mérite  de  Saint-Michel,  qu'accompagnait  une  lettre  flatteuse  du  roi. 


^*;i,  Vienne.  —  Le  ti  février  a  été  donnée  la  première  représentation  de 
Roméo  et  Juliette.  Bien  que  les  avis  soient  partagés  dans  la  presse  musi- 
cale sur  la  valeur  de  l'œuvre,  l'attitude  du  public  lui  a  été  constamment 
favorable.  On  a  beaucoup  applaudi  l'air  de  la  reine  Mab,  la  valse  de 
Juliette  au  premier  acte  et  le  cinquième  acte  tout  entier.  Gounod  diri- 
geait l'orchestre;  on  lui  a  fait  une  ovation  après  chaque  acte.  Walter 
(Roméo)  a  été  très-remarquable;  Mlle  de  Murska  a  moins  bien  rendu  le 
rôle  de  Juliette,  qui  est  d'ailleurs  trop  sentimental  pour  la  nature  de 
son  talent.  Quoique  monté  en  très-peu  de  tonips,  la  mise  en  scène  est 
splendide,  grâce  à  l'activité  et  à  l'expérience  du  directeur  Dingclstedt, 
qui  a  vonlu  faire  un  coup  de  maître  pour  son  début  et  qui  y  a  réussi. 
—  Sur  la  demande  de  l'ex-roi  de  Hanovre,  et  à  l'occasion  de  la  Noce 
d'Argent  ou  du  25"  anniversaire  de  .son  mariage,  le  théâtre  An  der 
Wien  a  donné,  le  19  et  le  20  janvier,  Barbe-bleue  et  la  Grande-Ducliesse;  on 
avait  fait  réserver  toutes  les  premières  loges,  tout  le  parterre  et  toutes 
les  stalles  de  balcon.  —  Au  Cartheater,  on  répète  la  l'ermission  de  dix 
heures . 

^*^  Prague.  —  Deux  opéras,  dont  les  sujets  sont  empruntés  à  l'his- 
toire de  la  Bohême,  viennent  d'être  représentés  avec  succès  au  théâtre 
National  :  Leijla,  de  Cari  Bendl,  et  Halka,  de  Moniuszko. 

»*.f  Rome.  —  La  Favorite  est  devenue  Dàila,  de  par  la  censure  ponti- 
ficale; elle  n'en  a  pas  moins  obtenu  un  très- grand  succès  au  théâtre 
Apollo.  La  prima  donna  Dory  y  a  été  très-applaudie. 

^''îif  Florence.  —  Mlle  Rosa  Csillag  est  en  ce  moment  l'objet  d'ovations 
enthousiastes  à  la  Pergola.  Elle  a  chanté  trois  fois  la  Favorite ,  et  à  cha- 
que représentation  elle  a  vu  son  succès  grandir.  Le  baryton  Cresci  s'est 
véritablement  distingué  à  côté  d'elle. 

^*^  Milan.  —  La  Scala  continue  à  faire  le  désespoir  des  amis  de  l'art. 
Don  Giovanni  vient  d'y  être  massacré  d'une  façon  honteuse. 

^**  Netv-York.  —  Le  théâtre  Pike  a  fait  son  ouverture  avec  II  Tro- 
vatore;  Mme  De  Lagrange  est  rentrée,  après  plusieurs  années  d'absence, 
d'une  manière  brillante.  On  attend  le  début  de  Brignoli. 

j,*^  Constanlinople.  —  Le  théâtre  Italien  a  donné  Marta  au  bénéfice 
de  la  prima  donna  Mme  Friderici,  qui  a  fait  preuve,  dans  le  rôle  prin- 
cipal, des  plus  sérieuses  qualités. 

^*^  Batavia.  —  Notre  troupe  d'opéra  possède  une  excellente  basse, 
M.  de  Greef,  au  bénéfice  duquel  a  été  représentée  l'Etoile  du  Nord. 
L'œuvre  et  son  interprète  ont  été  unanimement  acclamés. 


CONCERTS  ET  AUDITIONS  MSICÂLES  ANNONCÉS. 

Salon  Kriegelstein,  aujourd'hui  dimanche  à  2  heures:  matinée  de  musi- 
que de  chambre  de  H.  Bonewitz,  avec  MM.   Telesinski,  Norblin  et 

Mlle  Gasloldi. 
Salons  Pleyel-Wolff,  mardi  18  février:   troisième  séance  de  musique  de 

chambre  de  Lamoureux,  Colblain,  Adam  et  Poencet. 
Salons  Pleyel-Wolff,   mercredi  19  février:  première    soirée    de  musique 

de  chambre  donnée  par  MM.  Maurin ,  Colblain ,  Mas  et  Ernest  De- 

munck,  avec  le  concours  de  M.  C.  Saint-Saëns. 
Salle  Herz,  vendredi  21   février:  concert  de   Mlle  Amélie   Staps  avec  le 

concours  de  Mlle  Lavini  et  de  MM.  Raoult,  White,  Demunck,  Trom- 

betta,  Comtat  et  Maton. 
Salons  Erard,  samedi  22  février;  concert  de  MM.  Louis  Lapret    et  Ra- 

mirez  Valdès,  avec  le  concours  de  Mlle  Roulle  et  de  MM.  Teysson, 

Poencet  et  Bloch . 
Salle  Herz,  dimanche  23  février:  matinée  musicale  de  Mlle  Rachel  Van 

Lier. 
Salons  Erard,   lundi  24  février:  concert  de  Mlle  Constance  Skiwa,  avec 

le  concours  de  MM.  Birkinger,  Ries  et  E.  Norblin. 
Salle  Herz,  jeudi  27  février  :  grand  concert  à  orchestre  de  M.  Fr.  Guz- 

man,  pianiste  chilien,  avec  le  concoiu-s  de  Mme  Guzman,  Mme  Mon- 

belli  et  M.  Lutz,  du  théâtre  Lyrique. 

Le  Directeur  :  S.  DUFOUH. 


Quatre  morceaux  nouveaux  pour  le  Piano 

Chez  Gérard  et  C%  12,  boul.  des  Capucines  (maison  du  Grand-Hôtel). 

1.  —  iSouirenlr  de  l'ango    et  l'enfant,    dédié   à  Mme   la  ba- 

ronne de  Bosmelet  (née  de  Virieu). 

2.  —  Cialop,  à  M.  Francis  Sandford. 

3.  —  Allegretto  scUerzando,  à  Mme  Levasseur  (née  Wolowski), 

Chez  Gamuogi  frères,  112,  rue  de  Richelieu  (maison  Frascati). 

4.  —  Andante  cantublle,  à  M.  de  Cuttoli. 


S6 


KEVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE  DE  PAKIS. 


CHEZ    G.     BRANDUS    ET    S.     DUFOUR,    ÉDITEURS,    lOô,   RUE    DE    RICHELIEU 


ECOLE  DE  CHANT  DE  H.  PAIVOFRA 


L'ART  DE  CHANTER 

Op.  81.  —  NOUVELLE  MÉTHODE  DE  CHANT.  —  Op.  81. 

Biétiioile  complète  pour  soprano,  mezzo  soprano  ou  ténor.  .     40  fr. 
Mélhodc  comi»lèle  pour  contralto,  baryton  ou  basse  .   .   .    .     i")  îr. 

PUDLIÉ    SÉPARÉMENT  : 

Ving^t-qaaire  voralî«<>>9  pour  soprano,  niczzo  soprano  ou  ténor,  25 f. 
Vinsct-qiintre   l'ornllKeM   pour  contralto,  baryton  nu    basse,  25  f. 
Vadc-lUecnni   «lu    ritantciir     recueil  d'Exercices  d'ag'ilité, 
de  port  de  voix,  de  tilé,  etc.,  pour  toutes  les  voix 23  f. 

DOUZE  VOCALISES  D'ARTISTE 

POUR  SOPRANO  on  lOEZZO  SOPRANO 

Préparation  à  l'exécution  et  au  style  des  œuvres  modernes 
de  l'Ecole  italienne. 

Op.  86.  Dédiées  au  Conservatoire  de  Milan.  Prix:  25  fr. 


ABÉCÉDAIRE  VOCAL 

Forinatin-8°.      MÉTHODE  PRÉPARATOIRE  DE  CHANT      Prix  net:  3  fr. 
Pour  apprendre  à  émettre  et  à  poser  la  voix. 


2°  ÉDITION.  —  Le  même  ouvrage  traduit  en  espagnol .  .net .     4  fr. 


Suite  de  l'Abécédaire  vocal: 

VINGT-QUATRE  VOCALISES  PROGRESSIVES 

POUR  TOUTES  LES  VOIX  (la  voix  de  basse  exceptée), 

DANS  L'ÉTENDUE  D'UNE  OCTAVE  ET  DEMIE  (du  DO  au  FA). 

Op.  85.  Prix  ;  «5  francs.  Op.  85. 

12  VOCALISES  A  DEUX  VOIX,  SOPRANO  &  CONTRALTO 

Op.  83.  (Publiées  par  Jefferys,  à  Londres.)  Op.  83. 


Publications  nouvelles  : 

ADAGIOS     DE    L.    VAN     BEETHOVEN 

Extraits  des  SONATES  pour  piano  seul, 
N°l.  PAR  N»  2. 

LARGO  DE  LA  GRANDE  SONATE  I         p  P  Tî  T  Q  Q  H  IVT         I  AD  AGIO- OANTABI  LE 

Op.  7.  —  Prix  :  7  ti-.  50.  |  J-   •        Jj  IV  1  O  O  U  il  |  Op.  13.—  de  la  sonate  pathétique.—  7  50 


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CHARLES  PALMER 


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Op.lZiS.  Par  F.  DE  CROZE.  7  50 


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N°  1.  Chant  du  Printemps, 

Par  A.  Kappelmann. 

N°  2.  Le  Cortège  de  Noce, 

Par  Kjerulfs. 


Adoptés  par  tes  Orphéons  de  la  ville  de  Paris. 
Revus  par 

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N°  3.   Plaintes  du  Roi  des  Mers, 

Par  Svinsk-Folkvisa. 
N°  Z(.    Le  Chant  du  Rossignol, 

Par  Pacius. 


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UNIVERSELLE  DE   LONDRES  1851. 


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N'  8. 


23  Fémr  1868. 


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Dons  les  Départements  et  à  l'Étranger, 
tous  les  Marchands  de  Musique,  Us  Libraires, 
aux  bureaux  der  Messageries  et  des  Postes. 


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Départements,  Belgique  et  Suisse...      '.91  " 

Étranger 34  >i       î 

Le  Journal  paraît  le  Dimanche. 


GAZETTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


SOMMAIRE.  —  Théâtre  impérial  de  l'Opéra-Comique:  le  Premier  Jour  de 
bonheur,  opéra  -  comique  en  trois  actes,  paroles  de  MM.  dEiineryet  Cormoo, 
musique  de  M.  Auber,  par  Paul  Bernard.  —  Concerts  populaires  de  mu- 
sique classique  au  cirque  Napoléon,  par  Armand  Conzien.  —  Concerts  et 
auditions  musicales  de  la  semaine.  —  Nouvelles  des  théâtres  lyriques.  — Nou- 
velli's  diverses.  — Concerts  et  auditions  musicales  annoncés.  —  Annonces. 


TH£âTB£  mPÉRIÂL  DE  L'OPERÂ-COMIOnE. 

LE  PREMIER  JOUR  DE  B01WHEC7R, 

Opéra-comique  en  trois  actes,   paroles  de  MM.  d'Ennery  et 
CoRMON,   musique   de  M.  D.-F.-E.  Auber. 

{Première  représentation  le  15  février  1868.) 

Samedi  IS  de  ce  mois,  il  nous  était  donné  d'assister  à  un  évé- 
nement qui  fera  époque  dans  les  annales  de  l'art  musical!  A 
quatre-vingt-sept  ans  un  compositeur  qui  compte  ses  triomphes 
par  le  nombre  de  ses  pièces ,  qui  se  rit  des  années  et  les  porte 
avec  une  liberté  d'allures  souvent  inconnue  à  l'âge  mûr,  enfante 
une  œuvre  riche  de  tous  les  dons  d'un  esprit  actif  et  sain ,  ferme 
et  inspiré,  une  œuvre  virile,  charmante  sous  toutes  ses  faces,  fraî- 
che comme  un  printemps,  vivace  comme  un  liseron. 

Parmi  les  compositeurs,  Mozart  se  présente  en  première  ligne 
comme  un  enfant  prodige  ;  en  sens  inverse  on  pourra  crier  au 
prodige  en  la  personne  de  notre  curieux,  inimitable  et  extraordi- 
naire maestro  Auber. 

D'où  sort  ce  flot  de  mélodie,  cette  richesse  d'harmonies  fines  et 
distinguées,  cette  grâce  exquise,  ce  tour  délicat?  A  quoi  tient  cette 
sûreté  de  touche,  ce  tact  merveilleux,  cette  connaissance  des  voix 
et  de  l'orchestre?  Où  est  la  source  inépuisable  que  ce  maître  des 
maîtres  connaît  si  bien?  Qu'il  le  dise  au  moins  â  ceux  de  nos  com- 
positeurs qui,  vieux  avant  l'âge,  nous  parlent  prématurément  le 
langage  ennuyeux  dans  un  art  qui  demande  avant  tout  à  plaire  et 
à  captiver. 

Quelle  bonne  réponse  aussi  à  ceux  de  MM.  les  critiques  qui,  se 
prenant  trop  au  sérieux,  prétendent  que  le  genre  de  l'opéra- 
comique  est  mort  et  enterré.  Et  pourquoi  cela,  s'il  vous  plaît? 
Est-ce  donc  un  genre  si  faux  que  celui  qui  nous  a  donné  tant  de 


vrais  et  délicieux  chefs-d'œuvre?  Voudriez-vous  donc  d'un  traif 
de  plume  biffer  la  Dame  blanche,  le  Prévaux-Clercs,  le  Dom.ino  noir, 
l'Éclair?  Laissez  M.  Auber  nous  donner  le  plus  longtemps  possible 
de  mélodieuses  partitions  comme  "elle  qu'il  vient  de  terminer; 
laissez  ceux  qui  pourront  l'imiter  essayer  leurs  forces  dans  un 
genre  éminemment  français  et  qui  n'a  pas  dit  son  dernier  mot, 
croyez-le  bien. 

Pour  ma  part,  je  suis  sorti  enchanté  de  la  première  représenta- 
tion de  la  nouvelle  pièce  de  M.  Auber. 

J'étais  heureux  de  voir  une  si  belle  vieillesse  fêtée  par  le  public 
si  spontanément  et  si  brillamment.  J'étais  charmé  de  constater  une 
œuvre  réactive  dans  le  courant  musical  qui  nous  emporte  ou 
trop  haut  ou  trop  bas.  J'étais  fier  de  me  sentir  les  mains  chaudes 
encore  des  applaudissements  que  je  venais  de  prodiguer  à  cette 
œuvre  essentiellement  mélodique,   fine  et  distinguée. 


L'accueil  fait  à  la  partition  de  M.  Auber  a  été  général.  Cependant 
les  opinions,  se  concentrant  toutes  vers  la  louange,  divergeaient  un 
peu  dans  les  détails.  Chacun  tirait  de  son  côté,  naturellement.  — 
C'est  du  pur  Auber,  disait  tout  le  monde; — avec  les  tendances  mo- 
dernes, ajoutait  celui-ci; —  retournant  en  arrière,  reprenait  celui- 
15.  Notre  opinion  personnelle  consiste  à  dire  que  c'est  de  l'Auber 
du  bon  temps,  moins  ambitieux  que  Manon  Lescaut,  plus  corsé  quels 
Maçon,  une  œuvre  côtoyant  la  Sirène,  la  Part  du  Diable  et  les  Dia- 
mants de  ta  couronne.  C'est  bien  la  clarté  de  facture  de  cette 
époque  du  maître,  la  finesse  dans  les  détails,  la  coquetterie  dans 
la  phrase,  l'art  de  faire  chanter  la  voix  de  ténor  comme  personne, 
l'esprit  dans  l'orchestre  depuis  la  contre-basse  jusqu'à  la  petite 
flûte;  les  accompagnements  pétillants  de  détails  ou  charmeurs  par 
l'accouplement  des  timbres.  Ah!  c'est  bien  là  du  pur  Auber,  et 
les  jeunes  compositeurs  ont  pu  prendre  l'autre  soir  une  excellente 
leçon,  en  suivant  pas  à  pas  les  délicats  contours  de  cette  musique 
à  la  fois  simple  et  savante,  où  la  science  est  cachée  sous  la  grâce 
et  dans  laquelle  les  surprises,  toujours  agréables,  ne  prennent  pas 
pour  caresser  l'oreille  les  allures  de  l'épingle  ou  du  fer  rouge. 
On  sort  de  l'audition  d'une  œuvre  semblable  reposé  et  non  cour- 
baturé; les  nerfs  sont  calmes,  la  digestion  est  faite;  rentrez  chez 
vous,  la  nuit  sera  bonne. 


S8 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


Il  faut  pourtant  parler  du  scénario  de  MM.  Germon  et  d'Ennery. 
En  parler,  c'est  en  faire  la  louange.  Ces  messieurs  ont  emprunté 
leur  sujet  à  une  comédie  représentée  avec  succès  à  l'Odéon  en 
1816,  le  Chevalier  de  Canolle,  par  Souques.  Je  ne  vous  nommerai 
pas  les  trois  ou  quatre  essais  transportés  sur  plusieurs  théâtres,  et 
inspirés  par  cette  pièce  primitive,  pour  arriver  de  suite  à  vous 
raconter  rapidement  la  donnée  du  nouvel  opéra-comique.  Nous 
sommes  devant  Pi  nlichéry,  que  les  Anglais  et  les  Français  se 
disputent.  Un  jeune  officier,  Gaston  de  Maillepré,  commande  le 
camp  français,  sur  lequel  la  toile  se  lève,  et  commence  par  déli- 
vrer de  la  brutalité  des  soldats  les  prêtresses  d'une  pagode  voisine 
que  ceux-ci  viennent  de  capturer.  Ce  jeune  officier  semble  né  sous 
une  singulière  étoile;  le  bonheur  et  le  malheur  se  disputent  sa 
vie,  mais  le  malheur  surtout  vient  toujours  poser  sa  griffe  sur 
l'événement  heureux.  Fait-il  un  héritage,  cela  lui  suscite  vint 
procès  et  lo  brouille  avec  un  parent  qu'il  aimait  ;  est-il  nommé 
colonel,  un  de  ses  amis,  blessé  de  la  préférence,  le  provocjue  en 
duel;  rencoutre-t-illa  femme  qu'il  aime  et  qu'il  cherche  vainement 
depuis  deux  ans,  c'est  pour  la  retrouver  (lancée  à  un  autre.  Bret, 
le  pauvre  garçon,  ballotté  par  ce  combat  des  événements,  en  arrive 
à  considérer  comme  impossible  de  rencontrer  jamais  son  premier 
jour  de  bonheur  parfait. 

Celle  qu'il  aime  est  une  de  ces  veuves  qu'on  ne  trouve  (pi'au 
théâtre,  ayant  été  mariée  trois  heures  et  quart  à  un  homme  qu'elle 
n'aimait  pas.  Elle  est,  de  plus,  nièce  du  gouverneur  anglais  de 
Madras.  C'est  pendant  une  trêve  qu'elle  est  venue  avec  son  fiancé, 
naturaliste  enragé  mais  amoureu.\.  transi,  se  promener  vers  le 
camp  français.  La  trêve  expire  sur  ces  entrefaites,  et  les  deux  im- 
prudents promeneurs  sont  fait  prisonniers.  On  renvoie  la  jeune 
femme,  et  l'on  garde  le  pauvre  naturaliste  qui  pour  comble  de 
malheur  est  surpris  desshiant  par  désœuvrement  les  fortilications 
du  camp;  considéré  comme  espion,  le  voilà  condamné  à  mort.  De 
son  côté,  Gaston  de  Maillepré,  dans  une  rencontre,  est  pris  par 
les  Anglais,  et  nous  le  retrouvons  au  second  acte  au  milieu  d'une 
fête  donnée  par  le  gouverneur.  Prisonnier  sur  parole  il  participe 
à  la  fête  et  fait  sa  cour  à  l'indifférente  Hélène.  Cependant  les  évé- 
nements vont  prendre  un  autre  cours.  On  apprend  chez  les  An- 
glais la  condamnation  à  mort  du  pauvre  sir  John.  Les  représailles 
sont  toutes  tracées  et  le  jeune  colonel  devra  payer  de  sa  vie  le 
supplice  du  prisonnier  anglais.  Lui  seul  ignore  la  fatale  sentence  et 
chacun,  pris  d'intérêt  pour  une  si  grande  infortune,  lui  témoigne 
des  sentiments  quirétonnentetrenchantent.  Hélène,  elle-même,  sent 
son  cœur  s'ouvrir  à  l'amour  et  se  laisse  deviner.  Gaston  se  croit 
au  comble  du  bonheur,  mais  le  destin  est  implacable  et  la  jeune 
Indienne  qu'il  a  protégée  au  premier  acte,  voulant  le  sauver  à  son 
tour,  lui  apprend  le  sort  qui  lui  est  réservé.  Prisonnier  sur  parole, 
l'honneur  le  force  à  rester  :  soldat,  il  saura  mourir.  Le  dernier 
acte  ramène  sir  John  qui,  sur  parole  aussi,  vient  offrir  l'échange 
des  prisonniers  s'il  arrive  à  temps  pour  sauver  le  jeune  colonel, 
mais  dans  un  troisième  acte  d'opéra-comique  les  affaires  ne  se 
débrouillent  pas  si  facilement.  Sir  John  vivant,  Hélène  sa  fiancée 
est  perdue  pour  le  pauvre  Gaston  qui  préfère  mourir  et  force  ainsi 
le  piteux  naturaliste  à  retourner  se  faire  fusiller.  Fort  heureuse- 
ment les  choses  s'arrangent  de  plus  haut.  Pondichéry  se  rend, 
sir  John  capitule,  les  prisonniers  sont  libres  et  le  premier  jour  de 
bonheur  brille  enfin  sans  mélange  pour  le  jeune  officier  de  for- 
tune, qui  finalement  n'est  pas  trop  à  plaindre  puisqu'au  premier 
acte  il  gagne  un  héritage,  au  second  le  grade  de  colonel  et  au 
troisième  la  femme  qu'il  aimait  sans  espoir.  Avouez  qu'à  ce  pris 
on  accepterait  volontiers  quelques  vicissitudes,  telles  désagréables 
qu'elles  pussent  être. 


La  pièce,  intéressante  d'un  bout  à  l'autre,  garde  les  allures  de 
l'ancien  opéra-comique.  C'est  un  canevas  à  la  Scribe,  auquel  il 
manque  peut-être  les  broderies  que  ce  riche  dessinateur  savait 
semer  partout.  Le  dialogue  est  un  peu  languissant,  le  trait 
manque  parfois;  mais  les  situations  sont  attachantes  et  très- 
favorables  au  développement  musical.  Il  faut  donc  louer  les  au- 
teurs de  leur  tentative  et  les  remercier  de  nous  avoir  donné  une 
simple  comédie  lyrique. 

Entre  les  mains  de  M.  Auber,  cette  simple  comédie  lyrique  est 
devenue  un  délicieux  écrin.  La  sève  mélodique  y  coule  dans  un 
harmonieux  printemps.  Il  semble  que  le  vieux  maître,  qui  n'a  com- 
mencé sa  carrière  de  compositeur  que  fort  tard,  —  ((uarante  ans  — 
retrouve  une  à  une  toutes  les  inspirations  de  la  vingtième  année. 
C'est  peut-être  le  dernier  baiser  do  la  muse  créatrice,  mais  quelle 
suprême  caresse  elle  a  su  donner  à  son  fidèle  et  fervent  adora- 
teur !  11  est  beau  de  voir  les  grandes  intelligences  se  renouveler 
dans  l'art  comme  dans  un  sanctuaire,  et  défier  les  atteintes  du 
temps  sous  la  sauvegarde  du  travail  et  du  génie.  Ce  spectacle  est 
assez  rare  pour  qu'on  l'acclame  quand  il  se  présente,  et  c'est  ce 
qui  a  eu  lieu  dans  la  soirée  mémorable  du  IS  février  dernier. 


L'ouvertuie,  qui  n'est  pas  très-développée,  présente  cependant 
trois  mouvements  bien  tranchés  :  un  trois  temps  militaire,  un  dé- 
licieux andaule  i(ui  plus  tard  deviendra  le  bijou  de  la  partition, 
la  ballade  des  Djinns,  et  un  allegro  des  plus  coquets.  L'instrumen- 
tation en  est  d'un  bout  à  l'autre  liue,  alerte,  intéressante,  et  le 
public  a  vu  de  suite  qu'il  retrouvait  l'auteur  de  ses  prédilections 
passées.  La  toile  se  lève  sur  un  chœur  de  soldats  nonchalamment 
enivrés  par  les  brises  asiatiques.  On  sent  toutefois  percer  l'allure 
guerrière  sous  ces  délices  de  Capoue,  et  le  compositeur  a  rendu 
avec  un  grand  bonheur  la  double  teinte  de  cette  curieuse  opposi- 
tion. Cette  jolie  introduction  est  coupée  par  les  couplets  de  la  jeune 
Indienne,  dans  lesiiuels  elle  célèbre  les  qualités  du  dieu  Indra, 
tout  à  la  fois  son  idole  et  son  époux.  Une  couleur  religieuse  et 
passionnée  préside  à  ce  morceau.  Le  mysticisme  des  cloîtres  greffé 
sur  la  voluptueuse  indolence  des  pays  chauds,  voilà  ce  que  le 
musicien  a  jeté  dans  le  môme  moule,  d'où  il  est  sorti  une  mélodie 
étrange  et  délicieuse,  inflexible  comme  un  article  de  foi,  caressante 
comme  un  baiser.  Un  madrigal  charmant  chanté  par  le  jeune  offi- 
cier suit  cette  remarquable  inspiration,  et  le  chœur  des  soldats 
recommence  pour  terminer  cette  introduction  traitée  de  main  de 
maître. 

Maintenant  va  commencer  la  série  des  jolies  choses  semées  à 
profusion  dans  le  rôle  du  ténor.  Il  semble  que  Capoul,  l'heureux 
privilégié  de  cette  heureuse  partition,  ne  puisse  ouvrir  la  bouche 
sans  laisser  tomber  une  perle.  Sa  première  romance  est  un  trésor 
de  grâce  et  de  sentiment.  Sur  ces  paroles  : 
Attendons,  attendons' encore 
'  Notre  premier  jour  de  bonheur... 

la  salle  n'a  pas  attendu,  elle,  poui-  bisser  par  acclamation  cette 
chaleureuse  phrase  musicale. 

Le  premier  acte  comporte  encore  des  couplets  très-coquettement 
détaillés  par  Mme  Cabel  (Hélène),  mais  d'un  ordre  plus  inférieur; 
puis  un  duo  charmant  entre  Capoul  et  Mme  Cabel,  et  enfin  un 
finale  très-mouvementé,  rempli  de  motifs  gracieusement  accouplés 
et  joyeusement  teintés. 

Le  second  acte,  qui  est  sans  contredit  le  plus  riche  de  la  parti- 
tion, se  trouve  précédé  d'un  petit  morceau  symphonique  d'une 
exquise  délicatesse.  Le  hautbois  y  soupire  une  phrase  adorable, 
discrètement  accompagnée  par  de  piquants  contre-temps.  J'aime 
beaucoup  l'air  que  chante  Mme  Cabel  :  Vn  époux,  chez  vous.  Cet 
air  qu'elle  adresse  à  Djelma,  la  jeune  Indienne,  établit  la  différence 


DE  PA'tlS. 


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entre  un  époux  de  bois  et  un  mari  véritable.  Le  motif  mineur, 
essentiellement  rlistingué,  s'y  prêle  admirablement  à  bien  détailler 
les  paroles.  Mme  Cabel  le  dit  à  ravir. 

Un  chœur  charmant  ouvre  la  fête  qui  se  donne  chez  le  gouver- 
neur de  Madras.  C'est  frais  et  pimpant  ;  il  est  facile  de  reconnaître 
la  touche  qui  a  présidé  aux  ravissants  chœurs  de  la  Muette  et 
d'Uayrlée.  Ce  joyeux  ensemble  sert  de  prélude  à  la  déjà  célèbre 
ballade  des  Djinns.  Quel  succès!  La  salle  entière  est  restée  comme 
électrisée  devant  cette  musique  pénétrante,  devant  cette  mise  en 
scène  orientale,  devant  la  beauté  de  Mlle  Marie  Roze,  idéalisée 
encore  parson  costume  de  houri.  Quel  prestidigitateur  que  ce  M.  Au- 
berl  Lui,  le  Parisien  pur  sang,  il  a  trouvé  moyen  d'arrêter  au 
passage  une  mélodie  retour  de  l'fnde.  C'est  naïvement  voluptueux; 
cela  sent  l'ambre,  le  bois  de  santal  et  les  roses;  on  est  fasciné, 
ensorcelé,  magnétisé;  on  crie  bis,  on  crierait  ter  si  l'on  osait,  et 
l'on  garde  devant  les  yeux,  dans  le  cœur  et  dans  les  oreilles  le  sou- 
venir de  cette  ivresse  d'un  instant  arrachée  au  paradis  de  Ma- 
homet . 

Que  si  vous  me  demandiez  par  quels  moyens  le  compositeur  a 
pu  créer  ce  prodige,  je  vous  dirais  que  c'est  par  une  phrase  mu- 
sicale très-simple,  sobrement  accompagnée  par  une  note  de  cor, 
persistante  comme  la  goutte  d'eau  qui  tombe  ;  que  le  morceau  est 
en  si  bémol,  tonalité  assez  ordinairement  insignifiante,  et  que,  pour 
le  chanter,  iVfHe  Roze  a  trouvé  la  corde  essentiellement  sympathique. 

La  chanson  qui  vient  après,  forme  une  opposition  peut-être 
trop  tranchée.  Nous  tombons  du  septième  ciel  sur  la  terre;  heu- 
reusement que  c'est  en  la  compagnie  de  Mme  Cabel  et  que  cela 
atténue  la  secousse.  L'espèce  de  gigue  qui  termine  ce  train  express 
vocal  est  enlevée  par  Mme  Cabel  avec  une  maestria  peu  commune, 
et  le  succès  qui  avait  paru  s'arrêter  à  la  station  précédente  revient 
à  toute  vapeur  pour  ne  plus  s'en  aller. 

Il  se  fixe  d'abord  sur  un  ravissant  trio  d'hommes  dans  lequel 
nous  citerons  la  phrase  de  ténor  sur  ces  mots  : 

Quel  espoir,  quel  rêve  enchanteur! 

Il  se  fixe  ensuite  sur  un  délicieux  duo  entre  Gapoul  et  Mme  Ca- 
bel, et  surtout  sur  cet  élan  chaleureux  du  ténor  (  encore  le 
ténor)  : 

J'aime,  j'aime  la  vie 
Pour  la  première  fois. 

Il  se  fixe  enfin  sur  la  valse  chantée  dans  le  finale  par  le  ténor 
(toujours  le  ténor),  et  caresse  en  passant  une  phrase  à  parte  dite 
en  duo  par  les  deux  femmes.  Le  jeune  officier  apprend  qu'il  va 
mourir  ;  mais  il  est  aimé  et  dans  l'ivresse  de  ce  premier  bonheur 
il  quittera  la  vie  en  homme  de  cœur  et  en  joyeux  compagnon. 
Cette  valse  chantée  est  pleine  de  crânerie,  c'est  comme  un  défi  jeté 
au  sort. 

Le  troisième  acte  nous  apporte  encore  de  charmantes  jouissances. 
Voici  d'abord  un  nocturne  à  deux  voix,  délicieux  crépuscule  mu- 
sical adorablement  soupiré  par  Mme  Cabel  et  Mlle  Marie  Roze. 
Voici  des  stances  d'un  sentiment  exquis  et  qui  semblent  du  Mozart 
rajeuni.  Les  paroles,  du  reste,  en  sont  fort  jolies. 

Ce  nom,  un  jour  peut-être. 
Lorsque  mon  cœur  brisé  cessera  de  souffrir, 
A  mon  dernier  ami  je  le  ferai  connaître 

Dans  "mon  dernier  soupir. 

J'aime  moins  un  air  syllabique  alloué  comme  de  raison  à  Sainte- 
Foy  et  que  celui-ci  chante  très-comiquement.  Enfin  le  finale  nous 
offre  un  chœur  avec  accompagnement  de  clochettes  bien  réussi,  et 
une  cantilène  de  Mme  Cabel,  dans  un  très-pur  sentiment,  qui  vient 
clore  avec  éclat  cette  riche  partition  de  son  auteur  déjà  si  riche. 


La  part  des  interprètes  est  très-belle  ;  tous  ont  concouru  au  suc- 
cès. La  justice  ici  nous  oblige  à  mettre  Capoul  en  tête.  Il  s'est 
montré  d'un  bout  à  l'autre  chanteur  élégant  et  chaleureux,  acteur 
plein  de  feu  et  de  jeunesse,  artiste  de  goût  et  de  bormcs  traditions. 
De  son  gosier  s'échappent  véritablement  des  effluves  sympathiques; 
il  possède  des  demi-teintes  charmantes  et  des  élans  irrésistihh^s. 
Mme  Cabel  est  toujours  la  fauvette  métamorpliosée  en  femme  que 
vous  savez;  c'est  un  peu  froid,  mais  c'est  étourdissant  d'audace  et 
de  réussite.  Mlle  Marie  Roze  était  faite  pour  le  rôle  de  l'Indienne. 
Djelma.  Elle  y  a  trouvé  un  succès  de  poésie  et  de  beauté  qui  fera 
époque.  Du  reste,  elle  est  en  voie  de  progrès  comme  chant;  on  ne 
smrait  mieux  dire  la  caressante  ballade  des  Djinns,  et  le  public  le 
lui  a  prouvé  avec  insistance.  Sainte-Foy  est  amusant  comme  tou- 
jours, mais  .son  rôle  est  un  peu  sacrifié.  Prilleux,  Rernard,  Mel- 
ciiissédec,  remplissent  avec  zèle  leur  trio  de  second  plan.  H  n'y  a 
que  des  couronnes  à  décerner.  Venez  mesdames,  venez  messieurs; 
choisissez  et  prenez. 

* 
*  * 

Mais  la  couronne  d'or  rehaussée  de  diamants,  le  signe  distinctif 
de  la  gloire  et  du  mérite,  c'est  à  ce  jeune  vieillard,  c'est  à  ce 
vaillant  producteur,  c'est  à  Auber  enfin  qu'elle  appartient  de  droit. 
Les  exemples  de  longévité  artistique  aussi  prolongée  sont  assez 
rares  pour  qu'on  les  salue  avec  vénération,  avec  enthousiasme. 
Cependant  ces  considérations  ne  devraient  pas  entrer  dans  la  ba- 
lance si  l'œuvre  produite  était  inférieure  et  se  ressentait  du  poids 
des  ans.  L'art  passe  avant  la  créature.  Mais  si  au  contraire  cette 
œuvre  est  pleine  de  vie,  de  talent  et  de  génie,  si  elle  est  plus 
fraîche  que  le  printemps,  plus  riche  que  l'été,  plus  expérimentée 
que  l'automne,  si  l'hiver  seul  y  fait  défaut,  oh!  alors  on  peut 
s'extasier  sur  une  telle  exception  et  jeter  une  double  dose  d'ad- 
miration dans  la  coupe  du  succès,  ainsi  que  l'a  fait  l'auditoire  de 
la  première  soirée,  ainsi  que  le  feront  tous  ceux  qui  entendront 
la  nouvelle  partition  de  l'illustre  maître,  à  telle  école  qu'ils  ap- 
partiennent, de  tel  pays  qu'ils  soient. 

Paul  BERNARD. 


CONCERTS  POPULAIRES  DE  MUSIQUE   CLASSIQUE 

AU    CIRQUE    NAPOLÉON 

Mme  Neruda-Norman,  dont  le  début  aux  concerts  populaires 
vient  d'avoir  un  certain  retentissement,  est  née  en  Moravie  j  c'est  au 
Conservatoire  de  Vienne  qu'elle  développa  un  talent  qu'une  pré- 
coce vocation  faisait  pressentir,  car  dès  l'âge  de  sept  ans  elle 
donnait  son  premier  concert.  Son  professeur  fut  Janza,  aujourd'hui 
fixé  en  Angleterre.  La  Hollande  lui  donna  le  baptême  de  la  célé- 
brité et  la  Russie  l'accueillit  comme  elle  sait  accueillir  les  artistes 
de  talent.  Puis  elle  se  rendit  à  Stockholm  et  s'y  fixa  après  avoir 
épousé  M.  Neruda,  maître  de  chapelle.  Cette  artiste  distinguée  est 
aujourd'hui  professeur  au  Conservatoire  de  Stockholm.  Il  y  avait 
quelque  péril,  malgré  tout  son  talent,  à  affronter  ce  public  avec  les 
mêmes  armes  dont  Joachim  s'était  servi  pour  le  vaincre  à  sa  pre- 
mière bataille.  Bravement  Mme  Neruda-Norman  a  subi  l'épreuve! 

Nous  ne  suivrons  pas  l'exemple  de  quelques  confrères  qui  se 
croient  forcés  de  faire  des  rapprochements  et  qui  bâtissent  un 
piédestal  à  l'artiste  d'aujourd'hui  avec  les  débris  de  l'artiste  d'hier, 
trop  vite  oublié;  Mme  Neruda  -Norman  est  une  violoniste  de  trop 
belle  race  pour  aimer  à  voir  ainsi  traiter  des  ancêtres  qu'elle  doit 
vénérer.  On  sait  fort  bien  qu'il  est  des  qualités  de  puissance 
qu'une  femme  ne  saurait  avoir  au  même  degré,  et  il  est  mala- 
droit, selon  nous ,  de  faire  de  ces  rapprochements  dont  nous  par- 
lons. 


60 


REVUK  ET  GAZETTE  JILSICAEE 


Mme  Neruda  a  un  jeu  d'une  irréprochable  justesse  et  d'une 
grande  tMégance;  le  style  en  est  pur  et  exempt  de  ces  ornementations 
plus  au  moins  fantaisistes  qui  gâtent  plus  d'un  beau  talent.  Les 
phrases  tendres  de  l'andanle  sont  de  celles  qui,  sous  ses  doigts, 
prennent  un  charme  pénétrant,  presque  virginal.  Les  finesses  du 
finale  sont  détaillées  d'un  archet  habile,  ramenant  ce  motif  ù  la  dé- 
sinvolture vive  avec  une  grâce  toute  féminine.  Enfin,  un  je  ne 
sais  quoi  de  sérieux  et  de  chaste  en  même  temps,  dans  la  ma- 
nière de  phraser,  donne  au  talent  remarqualile  de  cette  artiste 
une  originalité  toute  personnelle.  Le  succès  qu'elle  a  obtenu  au 
premier  concert  a  décidé  M.  Pasdeloup  à  la  l'aire  entendre  de 
nouveau  aujourd'hui.  Nous  souhaitons  que  le  concerto  de  Vieux- 
temps  lui  soit  aussi  favorable  que  celui  de  Mendelssohn,  qui  a  fait 
ressortir  ses  exquises  qualités  et  lui  a  conquis  du  premier  coup  la 
sympathie  du  public  et  les  éloges  de  la  critique. 

Armand  GOUZIEN. 


CONCERTS  ET  ÂUDITIOSS  SUSICÂLES  DE  LÀ  SERÂINE. 


^%  Au  septième  concert  du  Con.servatoirj,  dim;uiche  dernier,  pro- 
gramme emprunté  au  répertoire  ordinaire,  sauf  le  cliceur  des  Pèlerins 
du  Tannhœuscr.  On  a  honoré  d'un  bis  ce  dramatique  morceau,  dont 
l'ouverture  tout  entière  n'est  qu'un  développement.  La  pensée  en  est 
saisissante  et  originale,  les  harmonio'i  y  sont  hardies  et  neuves,  mais 
l'effet  nous  paraît  résider  bien  plus  encore  dans  le  luxe  des  sonorités 
auquel  Wagner  a  si  souvent  recours,  immédiatement  après  venait,  à 
dessein  peut-être  (car  les  idées  avancées  ont  maintenant  des  champions 
dans  le  comité  de  la  Société),  un  air  de  danse  A'Iphiyénic  en  Aiilide,  l'une 
des  pages  les  plus  incolores  échappées  à  la  plume  de  Gluclt,  et  qui  a  été 
écoutée  avec  la  plus  complète  indifférence.  — Un  autre  bis  a  été  adressé 
à  Yallcgretto  scherzando  de  la  symphonie  en  fa  de  Beetho\eM  ;  le  motet 
de  Bach,  Qui  propicr  me,  et  la  symphonie  militaire  de  Haydn,  ont  été 
rendus  par  l'orchestre  et  les  chœurs  avec  leur  .«oin  et  leur  talent  ordi- 
naires. 

^^^  Un  public  nombreux  et  choisi  se  pressait  mardi  dernier  dans  l'élé- 
gante salle  de  concert  de  l'institution  impériale  des  Jeunes- Aveugles. 
Une  brillante  soirée  musicale  y  était  organisée  au  profit  des  éiôves  sor- 
tis de  l'institution.  Outre  l'orchestre,  dirigé  avec  talent  par  M.  Roussel, 
professeur  aveugle,  nous  avons  applaudi  la  jeune  et  charmante  violoniste 
Mlle  Tayau,  qui  mérite  tous  les  encouragements;  Mlle  iNelly  Tavernicr, 
une  pianiste  de  la  bonne  école,  et  pour  la  partie  vocale,  Mme  Léonard 
etM.Delle-Sedie,deux  éminents  artistes  qui  ont  conservé  intactes  les  grandes 
traditions  de  l'art  du  chant;  deux  chœurs  de  MM.  Roussel  et  Y.  Paul, 
professeurs  à  l'institution,  YAubespin  et  un  Sanctus,  ont  également  reçu 
le  meilleur  accueil. 

^*^  Dimanche  dernier,  le  cirque  de  l'Impératrice  regorgeait  d'auditeurs 
attirés  par  le  festival  annuel  des  Sociétés  chorales,  composant  l'Association 
parisienne  et  séquanaise  dirigée  par  M.  Delafontaine.  L'admission  des 
billets  de  faveur  a  fait  beaucoup  de  m  contents  qui  n'ont  pu  être  placés, 
les  grilles  ayant  été  fermées  bien  avant  l'heure  indiquée.  Le  programme 
de  cette  plantureuse  séance  ne  comprenait  pas  moins  de  dix-neuf  mor- 
ceaux :  le  chœur  des  chasseurs  à'Euri/aiithe  entre  autres,  celui  du  Voyage 
en  Chine,  de  Bazin,  l'Enclume  à' kdam,  VHijmne  à  la  nuit,  de  Rameau,  etc. 
Ces  chœurs,  qui  ne  sont  pas  des  chœurs  d'ensemble  à  proprement 
parler,  font  depuis  longtemps  partie  du  répertoire  plus  que  courant  des 
orphéonistes  parisiens;  l'étude  de  morceaux  nouveaux  ne  serait  donc  pas 
inopportune  dans  l'Association,  si  cet  effort  devait  avoir  pour  consé- 
quences une  articulation  mieux  accentuée  et  une  prononciation  plus 
correcte.  Le  remarquable  orchestre  de  la  garde  de  Paris  a  magnifique- 
ment exécuté,  sous  la  direction  de  M.  Paulus,  l'ouverture  d'Oberon,  la 
marche  de  Lohengrin,  le  Cornauai  rfe  T>nM:e,  fantaisie  de  Ch.  Colin,  etc., 
tour  à  tour  salués  par  de  véritables  tonnerres  d'applaudissements  et  des 
clameurs  entiiousiastes.  Le  violoncelliste  Lasserre,  le  pianiste  Kowalski, 
Géraldy  et  Mlle  Brunetti  ont  eu  leur  large  part  de  ces  ovations  d'un  public 
facilement  impressionnable  et  naturellement  porté  à  une  aimable  indul- 
gence . 

^*t  Trois  artistes  qui  ont  déjà  commencé  à  faire  parler  d'eux,  M.  Fré- 
déric Guzman  et  sa  femme,  pianistes,  et  le  frère  de  M.  Guzman,  violo- 
niste, tous  trois  du  Chili,  sont  à  Paris  depuis  quelques  mois.  Ils  se  sont 
jusqu'à  présent  peu  prodigués,  et  c'est  dans  les  soirées  hebdomadaires 
données  chez  eux  et  auquelles  ils  ont  convié  des  artistes  et  des  ama- 
teurs compétents  qu'il  a  été  donné  d'apprécier  leur  talent.  Nous  avons 
également  eu  la  chance  de  les  entendre  mercredi  dans  une  réunion 
particulière  presque  eniièremeut  composée  d'artistes,  et  nous  devons  dire 


que  M.  et  Mme  Guzman  y  ont  produit  beaucoup  d'effet  non-.seuIemenl 
par  le  grand  style  avec  lequel  ils  interprètent  la  hiu.--ique  classique, 
mais  par  l'originalité  cl  la  cuuLur  étrange  de  composition-;  fantaisistes 
exécutées  par  eux  avec  non  moins  d'oiiginalilé  que  de  talent.  —  Au 
reste,  le  monde  musical  ne  tardera  pas  à  être  mis  à  même  de  les  juger, 
car  ils  donnent  jeudi  27  de  ce  mois,  à  la  salle  Herz,  un  beau  concert  à 
orchestre  dont  on  trouvera  le  progiuninio  plus  loin,  et  il  n'est  pas  diffi- 
cile de  prévoir  qu'il  attirera  un  nombreux  auditoire. 

***  L'excellent  pianiste  D.  Miignus  donnait  samedi  dernier,  à  la  salle 
Pleyel,  une  audition  de  ses  meilleures  et  plus  récentes  compositions. 
Nous  y  avons  distingué  une  jolie  Berceuse  orientale,  une  Villanelle,  un 
Caprice-mazurka  et  surtout  une  brillante  Tzigane-marebe  po  r  deux 
pianos,  que  l'auteur  et  M.  Kriiger  ont  exécutée  avec  un  très-grand 
succès.  lia  vogue  attend  certainement  ce  charmant  morceau,  tout  em- 
preint de  couleur  locale  et  vraiment  original  par  le  rliythme  et  les  har- 
monies. —  Magnus  annonce  son  Cdnccrt  annuel  pour  le  14  mars  à  la 
.salle  Pleyel.  En  attendant,  il  est  p;irli  pour  Gand,  oii  il  a  du  donner  hier 
soir,  22  février,  un  brillant  concert. 

***  Le  dernier  mardi  de  Paul  Bernard  était  fort  brillnnl.  Henri  Herz, 
Léonard  et  sa  femme  et  beaucoup  d'autres  noictbilités  artistiques  y  étaient 
venus  applaudir  les  élèves  de  l'excellent  professeur;  élèves  qui,  ainsi  que 
nous  le  disions  dernièrement,  pourraient,  à  bon  droit,  prétendre  au 
diplôme  d'arliste.s,  à  en  juger  pir  la  perfection  avec  laquelle  elles  ont 
exécuté  nombre  de  morceaux  des  plus  difficiles.  Il  est  vrai  que  la  présence 
de  leur  rnaîlre,  i[ui  dans  ces  soirées  paie  toujours  largement  de  ^a  per- 
•sonne  el  de  son  tdent  et  celle  de  personnes  compétentes  à  les  apprécier, 
n'excitaient  pas  peu  le  zèle  et  l'émulation  de  ces  jeunes  personnes.  Léo- 
nard et  sa  femme  n'ont  pas,  de  leur  côté,  contribué  pour  peu  aux  plai- 
sirs de  la  réunion,  l'un  en  jouant  avec  Paul  Bernard  la  délicieuse  .'-onate 
de  Beethoven  dédire  à  l'empereur  de  Russie,  l'autre  en  disant  unecavatine 
italienne,  des  chansons  espagnoles  et  l,i  sérénade  de  Gonnod,  admirable- 
ment accompagnée  par  son  mari  el  par  le  maître  de  la  maison. 

**,^  A  la  dernière  réunion  musicale  du  docteur  MandI,  un  jeune  chan- 
teur très-intére.ssant  s'est  révélé  d'une  façon  qui  lui  promet  de  grands 
succès  comme  chanteur  de  chansonnettes.  C'est  le  plus  jeune  fils  d'un 
ténor  bien  connu,  M.  Audrm  ;  il  esl  d'un  physique  agréable,  il  a  une 
jolie  voix  et  il  est  bon  musicien  ;  de  plus,  il  a  la  mimique  voulue  pour  ce 
genre,  et  tous  les  salons  ne  tarderont  pas  à  se  le  disputer.  Mercredi,  il 
s'est  fait  entendre  de  nouveau  dans  une  .soirée  tout  arlislique  chez  l'un 
de  nos  principaux  éditeurs  de  musique,  et  il  y  a  recueilli  les  plus  .sym- 
pathiques bravos. 

***  Nous  avons  jusqu'à  présent  on>is  de  mentionner  l'arrivée  à  Paris 
d'un  flùtiïte  belge,  qui  jouit  d'un  grand  renom  à  l'étranger,  M.  Aug. 
Charles.  —  Du  reste,  en  l'entendant  la  semaine  dernière  à  la  salle  Herz, 
on  a  jugé  de  suite  qu'on  avait  affaire  à  un  artiste  d'élite  et  comme  on 
n'en  entend  pas  souvent,  et  l'on  a  été  émerveillé  de  l'aisance  avec  la- 
quelle il  triomphe  des  difficultés  les  plus  ardues.  —  Une  composition  de 
Reichert  lui  a  valu  un  triomphe  mérité.  Le  point  d'orgue  qui  termine 
l'andanle  de  ce  morceau,  et  qui  renferme  des  gammes  en  échos,  a  été 
couvert  d'applaudissements.  Un  style  élevé,  une  pureté  extraordinaire, 
beaucoup  de  sentiment,  telles  sont  les  qualités  qui,  jointes  à  une  exécu- 
tion mécanique  entièrement  nouvelle,  reconmiandent  cet  artiste  à  l'atten- 
tion du  public  parisien. 

»*»  Voici  le  programme  du  concert  qui  sera  donné  aujourd'hui  di- 
manche, à  2  heures  précises,  par  la  Société  des  concerts,  dans  la  salle 
du  Conservatoire  impérial  de  musique  :  1°  symphonie  militaire  (48")  de 
Haydn; — 2°  chœur  des  Pèlerins  du  Tannhœuser  de  Wagner;  -  3°  air  de 
dans-e  d'Iphiçiénie  en  Aulide  de  Gluck  ;  —  i°  motet  (double  chœur  sans 
accompagnement)  de  S.  Bach; — o"  symphonie  en  fa  {8«)  de  Beethoven. 
—  Le  concert  sera  dirigé  par  M.  George  Hainl. 

^*t  Aujourd'hui,  à  2  heures,  au  Cirque  Napoléon,  dix-.septième  concert 
populaire  de  musique  classique,  sous  la  direction  de  J.  Pasdeloup.  En 
voici  le  programme:  1»  Symphonie  en  ré  majeur,  de  Beethoven  (allegro, 
larghetto,  scherzo,  finale)  ;  —  2o  adagio  d'un  quatuor  de  Mozart,  exécuté 
par  tous  les  instruments  à  cordes;  —  3°  symphonie  en  sol  majeur  (29), 
de  Haydn  (allegro,  largo,  menuet,  finale)  ;  —  i"  concerto  en  mi  ma- 
jeur, pour  violon,  de  Vieuxtemps  (andante,  rondo),  exécuté  par  Mme  Nor- 
man-Neruda  ;  —  o°  ouverture  du  Tannhauser,  de  R.  Wagner. 

,*,(;  La  Compagnie  Patii-Uhnann  est  en  ce  moment  à  Marseille.  Un 
magnifique  et  fructueux  concert  a  été  donné  au  théâtre .  Tous  les  mem- 
bres de  la  caravane  artistique,  la  Palti,  Vieuxtemps,  Ed.  Wolff,Séligmann, 
Godefroid,  Berthelier,  ont  recueilli  des  bravos  sans  fin.  Ed.  Wolff,  no- 
tamment, s'est  fait  beaucoup  applaudir  avec  son  boléro  sur  r  Africaine, 
qu'on  veut  toujours  entendre  deux  fois,  et  il  a  produit  un  très-grand 
effet  dans  le  duo  qu'il  a  composé  avec  Vieuxtemps  sur  Oberon;  celui  de 
Don  Juan  n'est  pas  moins  goûté.  Quant  à  Séhgrnann,  il  est  toujours 
aussi  fêté;  «  le  16,  à  Avignon,  dît  la  Gazette  des  Étrangers,  lorsqu'il  eut 
achevé  de  jouer  son  morceau  sur  Martha,  la  salle  entière  se  leva  pour 
demander  l'Éloge  des  larmes  de  Schubert,  qu'on  se  souvenait  de  lui 
avoir  entendu  jouer  il  y  a  quelques  années.  Trois  rappels  enthousiastes 
suivirent  l'exécution  du  morceau.  »  —  Le  prochain  concert  aura  lieu  à 
Nice. 


DE  PARIS. 


61 


.^*,  La  Société  philharmonique  d'Amiens,  dirigée  par  M.  Deiieux,  or- 
ganise au  profit  des  pauvres  un  grand  concert,  qui  aura  lieu  le  29  fé- 
vrier, et  dans  lequel  le  Désert  de  Félicien  David  sera  exécuté  sdus  la 
direction  de  l'auteur.  M.  Ad.  Sax  a  égalemeni  promis  le  concours  de  sa 
fanfare,  qu'il  conduira  en  personne. 

**i)..  On  vient  d'inaugurer,  à  Uoulogne-sur-Mer,  le  Cercle  Beethoven,  des- 
tiné à  la  musique  cl.is^ique.  Au  premier  concert,  un  chanteur  de  talent, 
M.  Reicliardf,  a  été  longuement  et  justement  applaudi  dans  plusieurs 
lieJer  de  Beethoven,  Mcndelssohn  et  Schubert. 

^*^  Un  grand  concours  d'orphéons,  de  musiques  d'harmonie  et  de 
fanfares,  sera  ouvert,  le  7  juin  prochain,  à  Chartres,  par  la  Sociolé  cho- 
rale et  la  P'anfare  de  cette  ville,  sous  les  auspices  de  l'administration 
municipale. 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 

^*»  Le  théâtre  impérial  de  l'Opéra  a  donné  lundi  le  Trouvère  et  la 
Source.  —  Mercnidi,  Guillaume  Tell,  et  vendredi  l'Africaine.  —  Aujour- 
d'hui dimanche,  représentation  extraordinaire  de  Robert  le  Diable. 

^*^  Les  répétitions  d'Hamlet,  à  l'orchestre,  se  poursuivent  depuis  le  13 
et  la  premiète  représentation  reste  fixée  à  la  fin  de  ce  mois.  Voici  au 
complet  la  liste  des  artistes  qui  interpréteront  l'opéra  de  M.  Amhroise 
Thomas  :  MM.  Faure,  Hamlet;  Belval,  Claudius;  Fréret,  Polonius;  Morère, 
Laërte;  Castelmary,  Horatio;  Grisy,  Marcellus  ;  Gaspard,  !«■■  Fossoyeur; 
Mermant,  2"  Fossoyeur;  David,  l'Ombre  du  feu  roi;  Mmes  Gueymard, 
Gerlrude;  Nilsson,  Ophéhe. 

=it*»  A  l'occasion  de  la  SOO"  représentation  de  Guillaume  Tell,  Ro-sini 
a  envoyé  son  portrait  photographié,  à  la  date  du  13  février,  à  M.  E.  Per- 
rin  et  à  tout  le  personnel  de  l'Opéra.  L'illustre  maestro  a  de  plus  aban- 
donné à  la  caisse  des  pensions  de  l'Opéra  ses  droits  sur  cette  représenta- 
tion. 

^*,t  Vendredi,  LL.  MM.  l'Empereur  et  l'Liipératrice  honoraient  de  leur 
présence  la  quatrième  représentation  de  :  le  Premier  Jour  de  bonheur,  au 
théâtre  impérial  de  l'Opéra-Comique.  —  Mlle  Derasse  va  continuer  ses 
débuts  dans  la  Dame  blanche,  et  M.  Hayet,  ténor  qui  se  fit  entendre  pour 
la  première  fois  dans  l'Ange  de  Rothsay ,  au  théâtre  international  de 
l'Exposition  universelle,  oii  sa  jolie  voix  fut  remarquée,  va  débuter  dans 
Zaïnpa. 

**:t  La  représentation  de  Don  Giovanni,  donnée  sameli  15, a  eu  lieu 
devant  une  salle  comble  et  resplendissante  de  toilettes.  Outre  l'attrait  de 
revoir  Adelina  Patli  dans  le  rôle  de  Zerlina,  on  était  curieux  de  juger 
Steller  dans  celui  de  don  Juan,  l'une  de  ses  meilleures  créations,  disait- 
on.  Le  célèbre  baryton  n'a  point  trompé  l'attente  du  public;  il  soutient 
très-noblement  d'un  bout  à  l'autre  ce  rôle  écrasant,  sans  toutefois  lui 
donner  d'une  façon  assez  accentuée  le  cachet  d'élégance  et  de  désinvol- 
ture scélérate  qu'il  comporte;  coinme  chanteur,  il  y  déploie  avanta- 
tageusemeni  les  belles  qua'ités  de  sa  voix  et  son  excellence  méthode.  — 
Adelina  Patti,  c'est  tour  à  tour  le  charme  qui  séduit,  la  câlinerie  qui 
apaise,  la  mutinerie  qui  excite;  après  le  duo  La  ci  darem,  après  les 
célèbres  complets  Uatti,  batli,  Mazetto  qu'elle  a  dû  répéter,  l'incomparable 
diva  a  été  saluée  des  plus  enthousiastes  bravos.  —  Il  est  dommage  que 
les  moyens  de  Mlle  Krauss  ne  secondent  plus  qu'iniparfaiienient  ses 
accents  dramatiques;  c'est  toujours  la  granile  artiste,  mais  ce  n'est  pas 
la  dona  Anna  que  nous  avons  été  habitués  à  entendre.  —  11  est  égale- 
ment fâcheux  que  le  personnel  de  M.  Bagier  l'ait  forcé  à  donner  à  la 
charmante  et  mignonne  Mlle  Harris  le  rôle  de  dona  Elvire,  qui  ne  con- 
venait ni  à  son  physique,  ni  à  son  genre  de  talent  ;  elle  y  a  mis  toute  sa 
bonne  volonté,  mais  tout  en  lui  en  tenant  compte,  cela  ne  suffit  pas.  — 
Celui  de  Leporello  a  été  un  grand  succès  pour  Ciampi  ;  il  l'a  rendu  en 
excellent  comédien,  et  son  grand  air  de  Madamina,  mille  e  tre  a  été  dit 
et  joué  avec  autant  de  verve  bouffonne  que  de  fine  observation.  Mais  si 
quelqu'un  doit  réclamer  dans  la  distribution  sa  bonne  part  d'éloges,  c'est 
à  coup  sur  Vergerqui  a  su  donner,  par  la  manière  dont  il  l'a  conçu,  une 
véritable  importance  au  personnage  de  Mazetto  ;  on  applaudit  légitimement 
ce  jeune  artiste  comme  chanteur,  maisil  s'est  cette  fois  posé  en  véritable 
acteur,  et  on  doit  le  féliciter  de  ce  progrès.  —  Agnesi  a  prêté  au  rôle 
du  commandeur  l'autorité  de  sa  belle  voix  et  il  y  a  produit  beaucoup 
d'effet.  -  Pour  les  nécessités  de  la  représentation,  la  partition  a  été  cou- 
pée en  quatre  actes;  cette  division  est  regrettable  et  nuit  à  l'homogé- 
néité de  l'action.  Quoi  qu'il  en  soit,  la  soirée  a  été  belle,  et  il  est  à  dé- 
sirer que  l'indisposition  de  Mlle  Krauss,  qui  a  forcé  mardi  la  direction  à 
substituer  il  Barbiere  à  Don  Giovanni,  ne  se  prolonge  pas  et  permette  de 
donner  bientôt  la  deuxième  représentation  de  celte  reprise  du  chef- 
d'œuvre  de  Mozart. 

t%  Jeudi,  pour  la  dernière  fois,  on  a  donné  Rigoletio,  et  hier  soir 
Crispino,  avec  Adelina  Patti  dans  les  rôles  de  Gilda  et  d'Anetta. 

,j*,  A  la  fin  de  ce  mois,  Mathilda  di  Shabran  servira  de  début  aux 
époux  Tiberini,  qui   ont  dû   arriver   à   Paris  jeudi   ou  vendredi.  —  La 


deuxième  repré.sentalion  de  Don  Giovanni  est  annoncée  pour  demain  lundi 
gras. 

„<■%  Mlle  Patti  doit  aller  à  Lille  dans  une  quinzaine  de-  jours  pour  y 
chanter  en  français  le  rôle  de  Marguerite  de  Faust. 

*■*»  On  annonce  que  la  combinalon  Carvalho- Bagier  pour  le  théâtre 
Lyrique  commencera  à  fonctionner  quinze  jours  avant  l'époque 
primitivement  fixée.  Dès  le  lundi  2,  on  donnerait  aux  Italiens 
une  repro'Sf'ntation  de  Faust,  dont  les  décnrs  sont  rafraîchis  et  les  cos- 
tumes renouvelés  et  dans  lequel  Mme  Carvalho  et  le  ténor  Massy  chan- 
teront h's  princip.iux  rôles;  mercredi  i,  le  Freijschiilz  et  vendredi  C, 
Roméo  et  Juliette.  —  M.  Deloff're  dirigera  l'orchestre  à  la  .salle  Ventadour^ 
sans  que  cela  modifie  en  rien  .son  titre  et  ses  fonctions  de  premier  chef 
d'o.chestre  du  théâtre  Lyrique;  il  sera  suppléé  au  pupitre  directorial  du 
chef-liui  de  son  administration  par  M.  Mangin,  second  chef  .f  orche.stre. 
M.  Adolphe  Blanc  se  retire.  —  Enfin,  comme  détail  complémentaire  de 
cette  organisation,  le  prix  des  places  pour  le  théâtre  Lyrique  sera  main- 
tenu pour  les  représentations  données  à  la  salle  de^  Italiens,  mais  sen- 
siblement diminué  pour  toutes  celles  qui  auront  lieu  place  du  Châtelet. 

,*,j  La  seule  pièce  en  répétition  en  ce  moment  au  théâtre  Lyrique  et 
dont  on  s'occupe  avec  activité  est  l'opéra  de  M.  Jules  Béer,  Elisabeth  de 
Hongrie,  qui  sera  donné  certainement  vers  la  fin  du  mois  de  mars,  et 
selon  toutes  apparences  au  théâtre  Ventadour.  On  sait  que  c'est 
Mlle  Schroeder  qui  y  créera  le  principal  rôle. 

,■*»  Il  paraît  certain  que  Mme  Galli-Marié,  à  l'expiration  de  son  enga- 
gement au  l""'  avril,  quitterait  définitivement  le  théâtre  de  l'Opéra-Co- 
mique pour  entrer  au  théâtre  Lyrique. 

*■**  C'est  jeudi  ou  samedi  prochain  que  le  t!iéâtre  des  Variétés  re- 
prendra la  Grande-Duchesse. 

***  Le  délai  des  concours  d'opéra  et  d'opéra-comique,  ouverts  par  dé- 
cision ministérielle,  touchant  à  son  terme,  nous  croyons  devoir  rappeler 
aux  intéressés  que  les  manuscrits  ne  seront  plus  reçus  passé  le  13  mars 
prochain.  Le  nombre  des  compo,iteurs  concurrents  est,  dit-on,  de  cent 
soixante-quinze  environ,  inscrits  pour  le  Florentin,  livret  de  M.  de  Saint- 
Georges,  conçu  et  disposé  habilement  comme  situations  musicales. 

■jf*ii.  Dans  une  de  ses  dernières  séances,  le  conseil  municipal  de  la 
ville  de  Lille  a  volé,  pour  les  sept  mois  de  la  campagne  théâtrale  de 
cette  année,  le  maintien  d'une  subvention  de  36,000  francs,  »  afin  d'as- 
surer la  représentation  du  grand  opéra  avec  ballet,  de  l'opéra-eomique, 
du  drame,  de  la  comédie  et  du  vaudeville.  » 

^*^  Nous  mentiotmions  dimanche  le  succès  de  Robinson  Crusoé  au 
théâtre  de  Lyon;  notre  correspondant  nous  mande  que  l'exécution  de 
l'opéra  d'Offenbach  n'a  rien  laissé  à  désirer.  L'orchestre,  dirigé  par 
M.  Luigini,  enlève  l'ouverture  et  détaille  finement  les  spirituelles  nuances 
de  la  partition.  M.  Peschard  (Robinson)  marque  son  rôle  au  coin  du  bon 
goût  et  de  l'intelligence  qui  caractérisent  ton  talent.  Barbot  (Tobyj  est 
un  type  réussi  d'indécision,  de  poltronnerie,  de  niaiserie  boulFonnes. 
M.  Féret  est  magnitique  de  drôlerie  et  de  naturel  dans  Jim-Cocks;  son 
rondeau  du  Pot-au-feu  a  produit  un  grand  effet  et  a  été  bissé.  Grâce  au 
personnage  sympathique  de  Vendredi,  Mme  Cortez  a  remporté  un  succès 
imprévu  qui  donne  la  mesure  des  précieuses  ressources  de  son  jeune  et 
souple  talent.  Au  point  de  vue  vocal,  il  n'y  a  rien  à  reprendre  chez 
Mlle  Mézeray  (Edwige)  :  ce  rôle  a  été  tenu  par  elle  avec  une  grâce  touchante 
et  un  sentiment  exquis.  Mlle  Douau  (Suzanne)  est  ravissante  d'entrain  et 
de  mutinerie.  Tous  les  artistes  ont  été  rappelés  à  la  chute  du  rideau,  et 
le  succès  de  ce  début  promet  à  l'œuvre  nouvelle  d'Off'enbach  une  série 
de  fructueuses  représentations  à  Lyon . 

^\  On  nous  écrit  de  Bruxelles,  le  18  février  :  «  Le  théâtre  de  la  Mon- 
naie a  donné  hier  la  première  représentation  de  Robinson  Crusoé.  —  La 
salle  était  comble  et  le  public  a  fait  le  meilleur  accueil  à  l'œuvre  nou- 
velle d'Off'enbach.  La  gigue  si  bien  rhythmée  et  si  originale  du  premier 
acte  a  été  bissée  ;  on  a  beaucoup  applaudi  également  la  symphonie  du 
premier  entr'acte.  très-bien  exécutée  par  l'orchestre;  le  duo  du  deuxième 
a  te  mire  Robinson  et  Vendredi,  la  chanson  du  Pot-au-feu;  au  troisième, 
le  chœur  énei'gique  des  matelots  révoltés,  la  berceuse  et  les  couplets  de 
Suzanne  :  C'est  un  brun.  Jourdan  chantait  le  rôle  de  Robinson;  Barbot 
celui  de  Toby;  Etienne,  Jim-Cocks;  Mlle  Nau,  Edwige;  Mlle  Daniele,  Ven- 
dredi; Mme  Dumestre,  Suzanne;  et  ils  y  ont  été  chaleureusement  applau- 
dis. M.  Letellier  n'a  rien  épargné  pour  monter  luxueu-sement  l'ouvrage, 
et  la  deuxième  représentation,  donnée  au  bénéfice  de  M.  Edouard  Letel- 
lier, a  pleinement  confirmé  l'heureuse  issue  de  la  première. 

j*,^  Il  se  confirme  que  les  conditions  d'existence  de  l'Opéra  italien,  à 
Londres,  vont  être  singulièrement  modifiées.  Un  journal  financier  anglais 
annonce  la  formation  d'une  société  anonyme  au  capital  de  300,000  livres 
sterling,  pour  acheter  le  théâtre  de  Covent  Garden;  on  renoncerait  à  re- 
construire Her  Majesty's  Théâtre,  et  M.  Mapleson  serait  à  la  tête  de  la 
nouvelle  exploitation,  qui  n'aurait  plus  de  rivalité  à  redouter,  M.  Gye 
se  retirant  définitivement,  ainsi  que  son  chef  d'orchestre,  M.  Costa. 
M.  Mapleson  devrait  s'engager  à  produire  les  mêmes  artistes  qui 
figuraient  au  programme  de  son  théâtre  pendant  la  dernière  saison.  Il 
recevrait,  à  titre  de  prime,  10,000  livres  sterling.  Nous  saurons  sans  doute 
avant  peu  ce  qui  résultera  de  tous  ces  préliminaires. 


62 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


^*t  Ix'  thùAtre  fraiirais  de  Constiinliiiop'e  s'apprêlc  à  joiior  i)mdiainc- 
nietit  la  Crmide-Durhesse. 

^**  Le  bal  masqué  d'hier  soir  à  l'Opéra,  —  dernier  samedi  du  car- 
naval, —  a  eu  sa  foule  et  son  entrain  habituels.  —  Mardi  prochain, 
dernier  bal  de  la  saison. 


NOUVELLES  DIVERSES. 

**t  Dimanche  dernier,  à  1  issue  de  la  messe  des  Tuileries,  l'Emper'.'ur 
et  l'Impératrice  ont  daigné  féliciter  .\I.  Auber  sur  le  succès  de  son  rlcr- 
nier  opéra. 

,^%  Par  arrêté  ministériel  en  date  du  19  février,  S.  Kxc.  le  mini-Ire 
de  la  maison  de  ThnipiTour  et  ries  beaux  arts  a  nommé  M.  Cliarles  Co- 
lin professeur  de  hautbois  au  Conservatoire  impérial  de  musique,  eu 
remplacement  de  M.  Barthélémy  décédé.  Prix  de  Home,  hautbois  solo 
depuis  longtemps  au  théâtre  Lyrique  ,  personne  n'était  plus  digne  que 
M.  Colin  d'occuper  le  poste  qui  vient  de  lui  Cire  confié. 

,it*i  M.  de  Sartiges,  ambassadeur  de  France  à  Rome,  vient  d'acheter 
et  de  faire  restaurer  un  clavecin  orné  de  peintures  et  de  sculptures  des 
plus  remarquables,  et  qui  a  appartenu  à  la  nièce  du  pape  Innocent  X. 
On  prête  à  M.  de  Sartiges  la  bonne  intention  d'en  faire  don  au  Musée 
des  instruments  du  Conservatoire  de  Paris. 

^*4.  M.  Bagier  vient  de  recevoir  de  S.  M.  Victor-Kmmanuel  le  brevet 
de  chevalier  de  l'Ordre  des  SS.  Maurice  et  Lazare. 

n,*^  Un  nouveau  volume  de  lettres  de  Beethoven  vient  d'être  publié 
par  M.  Ludwig  NohI,  à  Stuttgard.  On  siî  souvient  qu'il  y  a  deux  ans  nous 
avons  donné  quelques  extraits  du  premier  volume,  dû  également  aux 
travaux  consciencieux  de  M.  Nohl.  11  contenait  399  lettres;  le  second  en 
renferme  3'22,  dont  un  certain  nombre  ont  un  grand  intérêt  biograplii- 
que  et  artistique. 

^,*^  Nous  avons  déjà  parlé  sommairement,  —  en  attendant  que  nous 
le  fassions  avec  plus  de  détails,  —  des  belles  études  pour  piano  publiées 
l'an  dernier  par  le  professeur  W.  Kruger.  11  vient  de  recevoir,  au  sujet  de 
ce  travail,  de  M.  Aug.  Dupont,  professeur  au  Conservatoire  de  Bruxelles 
et  l'un  des  pianistes  les  plus  distingués  de  la  Belgique,  une  lettre  qui  le 
félicite  cha)eureusement  du  mérite  exceptionnel  de  ces  études,  dans  les- 
quelles il  voit  «  l'œuvre  d'un  grand  pianiste  et  surtout  l'œuvre  d'un 
poète,  •  et  auxquelles  il  prédit  le  plus  grand  succès. 

/t  Nous  avons  eu  plusieurs  fois  déjà  l'occasion  de  faire  l'éloge  des  com- 
positions d'Ernest  Stœger.  Trois  de  ces  charmants  poèmes.  Impromptu- 
scherzo,  Prélude  et  Novellette,  qui  ont  toujours  obtenu  le  plus  flatteur 
succès  aux  concerts  et  aux  soirées  où  l'auteur  les  a  fait  entendre,  vien- 
nent d'être  publiés.  Nous  reviendrons  sur  ces  morceaux,  qui  accusent  un 
talent  des  plus  sérieux  et  des  plus  sympathiques. 

,*.  La  jeune  pianiste  Mlle  Elisa  Bertucat  vient  de  faire  paraître  deux 
charmants  morceaux  d  insants  :  la  Gracieuse,  polka-mazurka,  et  les  Echos 
du  Rhin,  valse.  Nous  croyons  ne  pas  nous  tromper  en  prédisant  un  grand 
succès  à  ces  deux  nouvelles  compositions  dignes  de  figurer  à  côté  de 
celles  de  Strauss  et  de  Lanner.  La  valse  les  Echos  du  Rhin  obtiendra  cer- 
tainement, par  son  originalité  et  sa  distinction,  ses  entrées  dans  les  plus 
élégants  salons  de  Paris. 

^*^,  Parmi  les  dernières  nouvautés  pour  le  piano,  nous  remarquons  deux 
ravissantes  productions  nouvelles  de  Félix  Godefroid  :  les  Muletiers  de  Cas- 
tille,  boléro,  et  les  Plus  beaux  yeux,  méditation  sur  la  célèbre  romance  : 
«  Un  rayon  de  tes  yeux  »,  de  Stigelli.  Nous  devons,  sans  hésiter,  classer 
ces  deux  morceaux  parmi  les  mieux  réussis  du  célèbre  auteur. 

^*^  M  Jacques  Verreyt,  administrateur  et  président  du  Conseil  d'ad- 
ministration de  la  Société  anonyme  des  grandes  orgues  (élablissemenls 
Merklin  et  SchiJtze),  vient  d'être  promu  au  grade  d'officier  de  l'ordre  de 
Léopold  de  Belgique. 

:f**  M.  José  Amat,  compositeur  distingué ,  est  en  ce  moment  à  Paris, 
chargé  par  le  gouvernement  brésilien  de  former  une  troupe  italienne 
destinée  à  desservir  les  théâtres  de  ce  p.iys. 

,t**  Un  journal  de  Leipzig,  la  Chronique  des  Théâtres,  met  en  vente,  au 
prix  de  150  thalers,  une  lettre  authentique  de  Mozart,  datée  du  2  avril 
1789. 

^,*,p  Les  armateurs  du  magnifique  steamer  Ericson,  de  New-York, 
viennent  de  le  débaptiser  pour  lui  donner  le  nom,  illustre  aujourd'hui 
dans  les  deux  mondes,  de  la  Grande-Duchesse. 

^*»  La  ville  de  Catane  se  propose  d'ériger  un  monument  à  la  mémoire 
de  Bellini,  l'un  de  ses  plus  glorieux  enfants. 

***  Le  comité  de  l'Association  des  artistes  musiciens  vient  deprocéder 
à  l'élection  de  deux  de  ses  vice-présidenls.  Ont  été  élus:  M.  Deloffre,  pre- 
mier chef  d'orchestre  du  théâtre  Lyiique-Impérial,  et  M.  Couder  chef 
d'orchestre  du  théâtre  du  Gymnase,  en  i emplacement  de  MM.  G.  Kastner 
et  Ch.  Triebert,  décédés. 

^*^:  Un  éditeur  qui  occupait  un  place  distinguée  dans  la  librairie,  M. 


Casimir  Gide,  vient  do  mourir.  11  s'était  beaucoup  occupé  de  musique. 
Kniré  au  Conservatoire  en  1817  dans  la  classe  d'harmonie  de  Dourlen, 
élève  de  Chcrubini  et  condisciple  de  F.  Tla'cvy,  il  a  composé  la  musique 
de  plusieurs  œuvres  lyriques  et  chorégraphiques,  au  nombre  desquelles 
on  doit  citer  les  Trois  Marie,  drame  de  Duport;  la  Tentation,  grand  bal- 
let en  collaboration  avec  Halévy;  VAngelus ,  opéra -comi([ue;  Uza'i,  b:illet 
en  trois  actes,  etc.  Depuis  longtemps  M.  Gide  ne  s'occupait  plus  que  du 
commerce  de  librairie. 

^*,  M.  David,  artisie  de  l'Opéra,  vient  de  perdre  son  père. 

^*:^,  Adoifo  Zabalza,  professeur  de  piano  au  Conservatoire  de  Madrid, 
vient  de  mourir  dans  cette  ville,  à  un  âge  peu  avancé. 


DÉPARTEMENTS 


i**  ycrsaillcs.  —  Le  Prophète  en  est  à  sa  5"  représentation  et  la  direc- 
tion n'a  pas  à  regretter  de  l'avoir  monté  avec  tant  de  soin.  Le  public 
y  vient  nombreux  applaudir  M.  Taillofer  (Jean  de  Leyd',),  Mlle  Pradal, 
(Berllia),  Mme  Brus-Mahy,  très  dramalique  dans  Fidèi. 

■J,y.^,  Rouen.  —  La  direction  du  Théâtre- des-Arts  vient  d'avoir,  une 
fois  de  plus,  la  preuve,  par  le  succès  de  l'Africaine,  que  l'on  gagne  tou- 
jours à  monter  des  ouvrages  d'un  mérite  réel,  universellement  sanction- 
né, et  à  le  faire  avec  soin  et  inlelligence.  Ce  succè.s,  de  tous  points  com- 
parable à  <'ehii  que  Ipberl,  les  Huyiienotà  et  le  Prophète  remportèrent 
dans  le  temps  à  Rouen ,  est  dû  autant  aux  beautés  saisissantes  de  la 
partition  du  maître  qu'à  son  exécution.  Nous  ajouterons  seulement 
queliiues  détails  à  la  dépêche  succinle  de  M.  Méreaux,  publiée  dans  le 
lirnier  numéro  de  celte  Revue.  M.  Lrdérac  accentue,  avec  une  chaleur 
communicative  de  chant  et  de  jeu,  la  sauvage  et  farouche  énergie  de 
Nelu.sko.  M.  Casabon  a  rie  beaux  moments;  dans  le  rôle  de  Vasco.  Im- 
posante sous  les  traits  et  le  costume  de  la  reine  indienne,  digne  et 
passionnée  tout  à  la  fois,  Mlle  Olivier  chante  fort  bien  la  berceuse  du 
second  acte,  l'air  du  quatrième  et  sa  poignante  terminaison.  MM.  Bon- 
nesseur  (Don  Diego),  Berlon,  Larose,  Pousset,  Mme  de  Messemaker 
contribuent  à  tbrmer  un  excellent  en.semble;  ces  artistes  ont  parfaitement 
saisi  le  caiactère  de  leurs  fonctions  scéniques  respectives.  Les  choeurs  en- 
lèvent avec  une  sûreté  d'attaque  et  un  enchaînement  de  nuances  dignes 
d'une  mention  toute  spéciale  l'anathème  des  évêques,  le  chant  des  ma- 
telots et  celui  des  sauvages.  L'orchestre,  conduit  par  M.  Placet,  ne  mé- 
rite que  de  légitimes  louanges.  Les  décors  ont  été  artistiquement  brossés 
par  MM.  Simon  et  Jusseaume.  Entln,  ce  sera  .selon  toutes  apparences, 
à  ret'e  complète  réussite  du  chef-d'œuvre  do  Meyerbeer  que  notre  théâtre 
d'opéra  devra  son  salut. 

^*^  Nîmes.  —  L'Étoile  du  .Word  vient  d'être  donnée  avec  un  grand 
succès.  Le  bel  opéra  de  Meyerbeer  a  été  en  général  bien  interprété. 
Mme  Bessin-Pouilley  y  montre  une  merveilleuse  facilité  dans  les  voca- 
lises périlleuses  de  son  rôle,  et  M.  Pouilley  a  très-bien  conçu  et  très-bien 
rendu  celui  de  Petors.—  La  semaine  dernière,  dans  une  représentation  de 
Guillaume  Tell,  notre  ténor  Cazeaux  s'est  surpassé.  Il  gagne  chaque  jour 
dans  l'e.sprit  de  notre  public,  et  sa  place  est  marquée  sur  des  scènes 
plus  élevées  que  la  nôlre. 

ÉTRANGER 


,^*^  Bruxelles.  —  Comme  les  concerts  précédenls  du  Conservatoire, 
celui  qui  a  été  donné  dimanche  dernier,  16  février,  a  excité  des  transports 
d'admiration  dans  l'auditoire,  par  le  choix  des  ouvrages  ainsi  que  par  la 
perfection  de  l'exécution .  Le  programme  était  composé  de  la  symphonie 
militaire  de  Haydn,  d'un  madrigal  à  cinq  voix,  sans  accompagnement, 
d'Orlando  Lasso,  du  septième  concerto  de  Mozart  pour  piano  et  orchestre, 
de  l'adagio  et  du  scherzo  de  la  9=  symphonie  de  Beethoven,  d'une  fan- 
taisie de  Mme  Farrenc  pour  piano  et  orchestre,  et  du  magnifique  finale 
de  l'oratorio  de  Frédéric  Schneider,  le  Jugement  dernier.  Dans  la  sym- 
phonie de  Haydn,  l'orchestre  a  fait  admirer  tour  à  tour  la  puissante  so- 
norité dans  laquelle  il  n'a  point  de  rival,  la  délicatesse  et  l'élégance  que 
réclament  les  œuvres  du  créateur  de  ce  genre  de  musique.  Dans  l'adagio 
de  la  9"  symphonie,  il  a  atteint  le  plus  haut  degré  d'expression  poétique, 
et  dans  le  scherzo  il  a  été  d'une  verve  entraînante.  Le  talent  de  Mlle 
Mongin,  justement  apprécié  à  Paris,  ce  talent  pur,  correct  et  toujours 
approprié  au  caractère  de  la  musique,  était  celui  qui  convenait  pour  la 
belle  inspiration  du  7"  concerto  de  Mozart.  Elle  en  a  dit  toutes  les  par- 
ties avec  une  délicatesse  exquise.  La  fantaisie  de  Mme  Farrenc  lui  a 
fourni  ensuite  l'occasion  de  faire  valoir  le  brillant  de  son  exécution. 
Rappelée  après  le  concerto  de  Mozart,  Mlle  Mongin  a  reçu,  dans  des 
chaleureux  applaudissements,  les  témoignages  de  satisfaction  de  l'assem- 
blée. Le  Jugement  dernier,  de  Schneider,  jouit  d'une  grande  célébrité  en 
Allemagne;  les  chœurs  et  l'orchestre  ont  rendu  avec  énergie  et  précision 
les  larges  proportions  de  son  finale. 

»*i  Londres.  —  Une  pétition  couverte  d'un  grand  nombre  de  signa- 
tures, et  demandant   l'établissement    d'une  école    de  musique  nationale. 


DE  PARIS 


patronnée  p^T  le  gouvernement,  en  connexion  avec  un  Opéra  nalional,  a 
été  remise  à  une  commission  royale  qui  doit  la  présenter  dans  le  cou- 
rant de  la  saison  à  la  Chambre  des  communes.  Joacliim  a  repris  posses- 
sion de  son  pupitre-chef  aux  Mondaij  Poimlar  concerts.  Mme  Shumann 
a  remporté,  au  concert  du  3  février,  un  grand  succès  avec  Piatti. 

t*^  Berlin.  —  Le  directeur  des  musiiiues  militaires,  M.  Wieprecht,  a 
organii-é  dans  la  belle  et  vaste  salie  de  la  nouvelle  Bourse,  un  grand 
concert  au  profit  des  habitiints  nécessiteux  de  la  Prusse  oi'ientale.  Toute 
la  cour  y  assistait.  Wachtel  et  Mme  Blumc-Santer  ont  dit  avec  élan  la 
Barussia  de  Spontini;  la  basse  Kricke  a  été  couverte  d'applaudissements 
après  l'air  :  0  /sis  und  Osiris  ,  de  la  Flûte  enchantée.  Les  Fatiius  (Die 
Fabier),  opéra  en  cinq  actes  de  Langert,  vient  d'être  donné  avec  un 
très-grand  succès  à  l'Opéra  i-oyal.  Nous  reviendrons  sur  cette  représen- 
tation et  sur  l'ouvrage,  auquel  la  critique  est  unanime  à  attribuer  une 
grande  valeur. 

-*,p  Leipzitj.  —  Après  la  soirée  de  gala  pai-  laquelle  on  a  fêlé  l'ouver- 
ture du  nouvel  Opéra,  la  première  représentation  a  eu  lieu  avec  Fidelio, 
dont  rinterprétîitinn,  confiée  à  MM.  Gross  et  Redling,  et  à  Mlle  Lœwe, 
a  été  de  tous  points  digne  du  maître. —  Mlle  Orgéni  a  débuté  dans  Lucie  et 
la  Somnambule.  Tout  en  lui  reconnaissant  un  grand  talent  de  vocalisa- 
tion et  une  voix  agréable,  on  a  trouvé  qu'elle  manquait  de  sentiment 
dramatique.  —  MJI  Rontgen  et  Ferd.  David,  deux  violonistes  de  la 
grande  école,  se  sont  fait  applaudir  au  seizième  concert  du  Gewand- 
haus,  dans  une  symphonie  concertante  de  Mozart,  pour  violon  et 
alto.  Au  dix-septième  ,  Franz  Lachner  a  eu  un  immense  succès  en 
dirigeant  lui  même  l'exécution  de  sa  quatrième  suite  d'orchestre  (en 
mi  bémol).  —  Au  dernier  concert  de  la  salle  d'Euterpe,  on  vient 
d'exécuter,  avec  le  concours  des  célèbres  chœurs  de  Saint-Thomas,  un 
Te  Deum  laudamus,  composé  par  M.  d'Adelburg,  à  l'occasion  de  la  fête 
du  couronnement  de  l'infortuné  empereur  Maximilien,  et  qui  a  valu  à 
son  auteur  l'ordre  de  Guadaloupe  ;  c'est  un  véritable  chef-d'œuvre  de 
mu.>-ique  religieuse,  et  qui  a  produit  une  vive  impression  sur  le  public 
si  diflicile  de  Leipzig.  Les  autres  compositions  du  même  auteur,  qui  ont 
obtenu  également  un  grand  succès,  s-ont  intitulées  Symphonie-Ouverture 
de  Wallenstein  (d'api es  le  sujet  de  Schiller)  et  l'ouverture  de  l'Opéra  hon- 
grois i<  Zringè  »  (d'après  le  sujet  de  Kœrner). 

,5,*^  Barcelone.  —  Il  Pellegrinaggio  di  Plocrmel  a  ijlé  représenté  le  11  fé- 
vrier au  théâtre  du  Liceo  avec  un  succès  splendide.  Des  applaudissements 
frénétiques  ont  salué  tous  les  morceaux  de  la  partition;  Mlle  Vitali,  qui 
s'est  élevée  aune  grande  hauteur  dans  le  rôle  de  Dinorah,  en  a  prissa 
bonne  part.  Elle  a  du  répéter  l'air  de  l'Ombre,  qu'elle  dit  avec  un 
charme  infini.  On  a  bissé  également  au  ténor  Nègre  son  air  du  Mois- 
sonneur. Stagne  a  droit  à  tous  les  éloges,  et  Petit  est  un  excellent  Hoël. 
L'ensemble  ne  laisse  rien  à  délirer;  l'orchestre  et  les  chœurs,  sous  la 
direction  de  Muzio,  ont  été  irréprochables,  et  la  mise  en  scène  est 
vraiment  superbe. 

^*i^  Home.  —  Don  Carlos,  après  de  nombreuses  vicissitudes,  a  enfin 
vu  le  feu  de  la  rampe.  Un  public  nombreux  remplissait  le  théâtre 
Apollo  ;  il  n'a  pas  trouvé  le  Verdi  du  Trovatore  et  de  Rigoletlo  et  il  est 
resté  fro'd.  La  plupart  des  morceaux  ont  été  accueillis  par  un  silence 
glacial.  L'exécution,  confiée  à  Sterbini,  Brémond,  Mmes  Stolz  et  Yaneri, 
a  cependant  été  aussi  bonne  que  possible. 

t*,j.  F/orence. —  Aune  soirée  donnée  par  le  président  du  conseil,  le  géné- 
ral Menabrea,  on  a  beaucoup  fêté  une  jeune  cantatrice,  Linda  Caracciolo, 
qui  doit  aux  conseils  de  H.  Panofka  un  talent  destiné  certainement  à 
faire  sensation  dans  le  monde  musical.  —  La  Societa  del  Quartetto  ouvre 
une  seconde  série  de  six  concerts-conférences.  Le  premier  aura  lieu  le 
l''  mars.  Il  sera  consacré  aux  illustres  compositeurs  de  quatuors  Haydn 
et  Boccherini.  M.  le  chevalier  J.-L.  Casamorata,  président  de  notre  Ins- 
titut, y  prendra  la  parole.  —  Les  professeurs  Gamucci  et  Biaggi,  le  mar- 
quis d'Arcaïs,  le  docteur  Filippi,  de  Milan,  se  .••ont  chargés  des  confé- 
rences du  2",  3%  i"  et  5',  qui  traiteront  de  Beethoven,  Mcndel  sohn  et 
Schumann. 

^*^  Varsovie. — Après  une  magnifique  représentation  d'adieu  à  Berlin,  où 
la  reine  a  tenu  à  la  féliciter  publiquement,  Mlle  Artot  vient  de  faire  ici  une 
brillante  rentrée  dans  Otello.  Malheureusement  Moscou  la  réclame  et  elle 
ne  nous  restera  que  quelques  semaines  ;  le  public  .semble  avoir  hâte  de 
mettre  à  profit  ce  trop  court  séjour,  et  son  empressement  se  traduit  par 
des  ovations  plus  nombreuses  et  plus  chaleureuses  que  jamais  adressées 
à  l'éminente  artiste. — 11  se  pourrait  qu'avant  de  partir  pour  Moscou, 
Mlle  Artot  allât  encore  donner  quelques  représentations  à  Berlin. 


,1,*^  Saint-Pélersbourg.  —  Au  théâtre  Marie,  la  Vie  pour  le  Tsar,  de 
Glinka  (29.3»  représentation),  t^t  la  Muelle  (Fenella),  pour  les  débuts  du 
ténor  Andréef,  ont  attiré  ces  jours  derniers  une  foule  immense.  Aiidréef 
a  eu  un  très-grand  succès.  —  Mmes  Lucca  et  Grantzolï  ont  été 
l'objet  des  ovations,  des  démonstrations  enthousiastes  que  nous  ai- 
mons à  prodiguer  aux  grands  artistes  :  on  leur  a  jeté  le  premier 
soir  des  couronnes  et  des  bouquets  sans  nombre;  on  leur  a  fait  de 
riches  cadeaux,  où  de  flatteuses  inscriptions  rappellent  leurs  succès.  — 
En  outre,  leurs  admirateurs  les  ont  suivies  en  masse  jusqu'à  leur  de- 
meure à  l'issue  du  spectacle,  et  au  moment  où  elles  montaient  sur  le 
perron,  leurs  paisibles  voisins  ont  été  réveillés  par  une  brillante  fanfare 
de  la  musique  de  la  garde  à  cheval  ;  des  transparents  à  leurs  initiales 
étaient  placés  partout,  et  une  superbe  illumination  avait  été  improvisée 
sur  l'escalier.—  C'i-st  le  rôle  du  page  des  Noces  de  Figaro  que  Mme  Lucca 
a  choisi  pour  son  bénéfice  :  la  rentrée  de  Mlle  Grantzofï  a  eu  lieu  dans 
le  Corsaire.  —  Dans  Un  Concert  à  la  cuur,  Mme  Volpini  a  été  chaleureu- 
sement complimentée  par  S.  M.  l'Impératrice,  qui  lui  a  exprimé  l'espoir 
que  Saint-Pétersbourg  la  conserverait  longtemps  encore.  —  Berlioz  a 
dirigé  le  neuvième  concert  de  l'.^^ssociation  musicale  rus.se,  dans  lequel 
on  a  applaudi  le  violoniste  Wilhelmj  et  le  pianiste  Dœrfeldt.  Le  dixième 
et  dernier  concert  sera  sans  doute  composé  en  grande  partie  d'œuvres 
de  l'illustre  compositeur.  —  Les  derniers  succès  de  Mario  ont  décidé  la 
direction  à  l'engager  pour  la  saison  prochaine. 


CONCERTS  ET  AUDITIONS  MUSICALES  ANNONCES. 

Salle  Herz,  aujourd'hui  dimanche  23  février:  matinée  musicale  de  Mlle 
Rachel  Van  Lier. 

Salons  Erard,  lundi  2i  février:  concert  de  Mlle  Constance  Skiwa,  avec 
le  concours  de  MM.  Birkioger,  Ries  et  E.  Norblin. 

Salle  Herz,  jeudi  27  février  à  8  heures  1/2:  concert  à  grand  orebestre, 
sous  la  direction  de  M.  A.  de  Groot,  donné  par  Frédéric  Guzman, 
pianiste  et  compositeur  chilien,  avec  le  concours  de  Mme  .Monbelli, 
Mme  Guzman  et  M.  Lutz.  On  y  entendra  :  première  partie,  musique 
classique  :  1°  ouverture  de  la  Flûte  enchantée  de  Mozart;—  2°  air  de 
Fernand  Corlès  de  Spontini  (pour  baryton) ,  chanté  par  M.  Frédéric 
Lutz;  —  3°  grand  concerto,  pour  le  piano,  avec  accompagnement 
d'orchestre  (op.  37),  de  Beethoven,  exécuté  par  M.  F.  Guznnn  ;  — 
i°  air  des  .Voccs  de  Figaro  (pour  soprano),  de  Mozart,  chanté  par 
Mme  Monbelli  ;  —  5°  duo  concertant,  pour  deux  pianos,  sur  la  mar- 
che de  Préciosa,  de  Weber,  avec  orchestre,  de  Mendelssohn  et  Mos- 
chelès,  exécuté  par  M.  et  Mme  Guzman.  —  Deuxième  partie,  mu- 
sique moderne  :  1°  Souvenir  nocturne,  Mazurke  pour  piano,  de  F. 
Guzman,  exécuté  par  l'auteur;  —  2'  air  du  Valet  de  chambre 
(pour  baryton),  de  Carafa,  chanté  par  M.  F.  Lutz;  —  3°  Dites  oui; 
les  Veux  cré.  les,  danses  de  Cuba,  pour  piano  à  quatre  mains,  de 
Gottschalk, exécutées  par  M.  et  Mme  Guzman;  —  4"  air  du  Barbier 
de  Séville  (pour  soprano),  de  Rossini,  chanté  par  Mme  Monbelli;  — 
5°  Victoire,  marche  triomphale,  pour  deux  pianos  concertants,  de  F. 
Guzman,  exécutée   par   l'auteur  et  Mme  Guzman. 


le  Directeur:   S.  DL'FOUB. 


Nouvelles  publications  de  JULES  HEINZ,  rue  de  Rivoli,  ^46. 

PIANO 
Félix  Crodefroid.  Op.  443.    Les  Muletiers    de   Castille, 

boléro 6    » 

—    Op.  146,  Les  plus  beaux  yeux ,  méditation   sur  Un 

Rayon  de  tes  yeux 6    » 

Koennemann.  Trois  polkas  nouvelles  :  1.  Souvenir  de  la 
Malraaison.  —  2.  Le  pont  de  Bouglval.  —  3.  Bo- 
hême-Polka, chaque 4  50 


Chez  G.  HARTMANN,  19,  boulevard  de  la  Madeleine. 


PIANO 

Delioiix  (Ch.).  —  Valse  expressive 6 

Defouruaux   (  A.  ).   —   Fleurs    et    Diamants,    valse   de 

salon 6 


CHANT 

Pinsuti.  —  Il  ciel  siellato,  duettino 6 

Lied  populaire  de  la  Thuringe  (la  Reine  du  Berger),  poésie 

d'Adolphe  Larmande 3 


64 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE  DE  l'Alilh. 


Maison  COLOMBIER,  6, 

NOUVELLES     P 
Pour  le  piano 

J.-L.  Battmann.  Op.  27S.  Les  Porcherons,  petite  fantaisie  5    » 
A.   Croisez.    Op.    146.  Notre-Dame-des- Anges,  prière  de 

jeunes  filles S     » 

—  Op.  147.  Les  Faux  Mûnnayeurs,  caprice S    » 

J.  Leybach.  Op.  107.  La  Cenerentola,  fantaisie  brillante.  8     » 

—  Op.  108.  Tristesse,  élégie 7  50 

A.  Le  Carpentier.  Airs  et  Rondes  populaires ,  arrangés 

à  quatre  mains,  en  3  livres,  chaque 6     » 

L.  Schiffmacher.  Op.  1"2.  Mon  pays,  iranscription  variée  7  50 

Danse 

Gaston  de  Lille.  En  avant  I  polka 5    » 

-     —    5z«rr /te,  polka-mazurka , 5    » 

—  Sons  la  Feuillée,  valse 6    » 

Ad.  Lacout.  Le  Petit  Mignon,  quadrille  très-facile 4  30 

—  Baby,  polka  très-facile 2  50 

Strauss.  Le  Dernier  des  Romains,  quadrille 4  50 


rue  Vi vienne,  à  Paris. 

UBLIGATIONS 
Chant 

LE    DERNIER    ROMAIN, 

Tragédie  lyrique  et  comique,  paroles  et  musique  de 

Eugène  MONIOT. 

l'ariitiou  piano  et  chant,  et  libretto,  prix  net  :  5  francs. 

D.  Balleyguier.  Ucuce  chansmi 3  » 

G.  Douay.  C'est  plus  fort  que  moi,  chansonnette 3  » 

—  Un  Bourgeois  pour  tout  faire,  chansonnette 3  » 

J.  Javelot.  Mon  Oscar,  chansonnette 3  » 

P.  Blaquières  et  J.  Moinaux.  Gratteloup  au  camp  de 

Châlons.  eiplicalion  du  fusil  C/tas?epo/,  chansonnette.     3     » 

Duos  pour  ténor  et  baryton 

Léo  Dalibes.  Le  Marchand  d'Oublis 6    » 

Ch.  Lecocq.  Les  Tonneliers 4     » 

—  Le  même  à  une  voix 2  50 


CHEZ  G.   BRANDUS   ET    S.   DUFOUR,  ÉDITEURS,    103.   RUE   DE  RICHELIEU. 


ROBINSON     en 


Opéra-comique  en  trois  actes 
(cinq  tableaux) 


Musique  de 


Paroles  de  MM. 
E.  CORMON  et  H.  CRËMIEUX. 


Arrangée  pour  le  Piano  seul 

in-8°,  net:  10  fr. 


La   Partition 


Pour  Chant  et  Piano, 

in-8°,  net  :  15  fr, 


L'Ouverture,  6  fr.  —  Entr'acte  symphonique,  6  fr.  —  Marche  des  Sauvages,  6  fr.  —  Chœur  dansé,  6  fr. 

TRANSCRITS  POUR  LE  PIANO  SEUL. 


ARR 
MORCEAUX     DIVERS  : 
CBÀMER.  —  Deux  bouquets  de  mélodies  pour  le  pianu,  ch. 

E.  KETTEBER.  —  Fantaisie  brillante  pour  le  piano 

LECARPENTIIR   —  Deux  bagatelles  pour  le  piano,  chaque 

ROSELLEN.  Fantaisie  de  salo:)  pour  le  piano 

RDOISEL.  —  Fantaisie  élégante  pour  le  piano 

Id.       Duo  facile  à  quatre  mains 

À.  HERMÀN    —  Divertissement  pour  piano  et  violon 

SELIGBUlVN.  — Bluette  de  salon  pour  violoncelle  et  piano. . 

Les  Airs  arrangés  pour  un  et  pour 
Parties  d'orchestre  de  l'ouverture  et  entr'acte. 


9 
9 
5 
7 
6 
7 

9    .) 
7  50 


50 


DANSE 


ANGEMEÎ^TS  : 

MUSIQUE    DE 

ARBÂN.  —  Quadrille  pour  le  piano 

Le  même,  à  quatre  mains 

STRAUSS.  —  Grande  valse  pour  le  piano  et  à  quatre  mains 

Id.       Grand  quadrille  des  bals  dé  l'Opéra 

HÂBX.  —  Deuxième  quadrille  pour  le  piano 

LEON  roques.— Polka  brillante  pour  piano  et  à  4  mains  . 
STRAUSS.  —  Polka-Mazurka  pour  le  piano  et  à  4  mains.. 
El  VALIQUET.    vendredi,  quadrille  enfantin  pour  le  piano. 

deux  Violons,  pour  une  et  pour  deux  Flûtes. 


4  50 
4  50 
6  » 
4  50 
4  50 


50 


Les  Parties  d'orchestre  complètes. 


Pmï  ACCORDÉ  A    l'unanimité  A    l'EXPOSITlON 
DNIVEnSELLE  DE    LONDRES  1851. 


ilssear  des  Ministères  de  la 
i  et  de   la  Blarine  de  Vrance. 


Seul   agent   à    Londres 

S.  ARTHUR    CHAPELL, 

ÙD  ,   New  Bond  Street. 


MAISON  FONDÉE  EN  1803. 

INSTRUMENTS    DE    MUSIQUE    EN    CUIVRE 

Exposition  Universelle  de  Londres  1862 

MM.  les  Membres  du  Jury  International  décernent  la  Médaille  à 

ANTOINE  COURTOIS 


UEDAILLE  D  ARGENT   DEl"  CLASSE 
A    l'exposition    universelle    de  PARIS  1855. 


Facteur  dn    ConBervatoIre  et  de 
l' Académie  Impériale  de  Paris 


Agent  i,  Saint-Pétersbourg  : 

A.  BUTTNER, 

Perspect.Newsky,maisonderégliseSt-Pierre 


POUR  l'EXCELlENCE  DE  SES  CORNETS  A  PISTOSS,  CORS,  ALTOS,  BASSES, 

et  podr  todte  sa  collection  d'instruments  en  général. 

—  AS.    rue    des    Harats- Saint -Slarlln,    S8.  — 

Ci-devant  rue  du  Caire,  21. 
taison  iMTO/iyL  COURTOIS  ayant  agrandi  ses  ateliers  ,  est  en  mesure  de  satisfaire  a  toutes  i^ss  demandes  qui  pourront  lui  être 
adressées;  el/t  gm  ai,:ii  rÉF.LLKJiENT  o  sa  clientèle  des  instruments  i'réprochables  sous  tous  les  rapports 


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ÎBEBGEBE.  30,   A   PABK. 


BUREAUX    A    PARIS  ••    BOULEVARD   DES   ITALIENS,  1. 


5S'  Année. 


ON  S'ABONNE  : 

Dans  les  Déportements  Rt  â  l'Étronger, 

chez  tous  les  ilorchonds  de  Musique,  Us  lAbraiH 

et  aux  I^ureaux  des  Messageries  et  des  Postes. 


W  9. 


REVUE 


l«^  Mars  1868. 


PRIX    DE    L'ABONNEMENT: 

Paris. -1   r.  par  an 

Dipartcmcnls,  B(;Igiquo  et  Suisse...      .'«j  t        it 

l'itriiDger 3i  ■)       id. 

te  Journal  parait  le  Dimaoche. 


GAZETTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


SOMMAIRE.  —  Histoire  de  la  musique  instrumentale  (7'  article),  par  Haa- 
rlce  Cristal.  —  Les  droits  des  auteurs  (deuxième  partie,  7«  article),  par 
Thomas  Sauvage.  —  Un  inconnu,  par  Arthur  Poug^in.  —  Ministère 
de  la  maison  de  l'Empereur  et  des  beaux-arts,  direction  générale  des  théâtres. 
—  Entre-filets. —  Concerts  et  auditions  musicales  de  la  semaine.  —  Nouvelles 
des  théâtres  lyriques.  — Nouvelles  diverses.  — Concerts  et  auditions  musicales 
annoncés.  —  Annonces. 


mSTOIBE  DE  U  nnSIQUE  INSTRUMENTALE 

(7«  article)  (1). 

Depuis  plus  de  soixante  ans  que  la  musique  de  chambre  de  l'é- 
cole allemande  s'est  emparée  de  l'admiration  de  la  France  et  de  l'Eu- 
rope, on  semble  avoir  oublié  que  l'Italie  n'a  point  été  seulement  le 
berceau  de  l'art  de  chanter  et  de  la  musique  vocale,  mais  encore 
celui  de  compositeurs  d'un  mérite  incontestable.  Les  compositions 
instrumentales  d'Haydn,  de  Mozart,  de  Beethoven  et  d'autres 
maîtres  moins  connus  sont  devenues  familières  aux  artistes  que 
sollicite  plus  particulièrement  l'étude  austère  d'une  musique  vi- 
goureuse et  non  frivole.  On  ne  va  point  demander  des  composi- 
tions sérieuses  et  fortes  à  l'Italie,  qui  pourtant  a  donné  le  jour  aux 
plus  grands  violonistes  du  monde  et  aux  plus  éminentes  concep- 
tions qui  aient  été  écrites  pour   le    quatuor. 

Boccherini  est  sans  contredit,  dans  la  musique  de  chambre, 
l'un  des  compositeurs  les  plus  éminents  qu'ait  produits  l'Italie. 
Mais  les  seuls  amateurs,  les  seuls  dilettantes  connaissent  les 
chefs-d'œuvre  de  ce  maître ,  ses  quatuors  majestueux,  ses  quin- 
tettes exquis,  tout  cet  œuvre  irréprochable  qui  est  à  la  musique 
instrumentale  ce  que  les  partitions  de  Cimarosa  sont  à  la  musique 
vocale.  Boccherini  n'est  point  populaire  ;  il  a  subi  le  sort  de  tant 
d'hommes  supérieurs;  ses  compositions  si  pures,  si  délicates,  qui 
se  distinguent  par  la  simplicité  des  moyens,  par  l'abondance  et  la 
grâce  des  idées  mélodiques,  ont  été  délaissées  pour  des  concep- 
tions plus  intriguées,  plus  énergiques,  plus  scientifiques,  si  l'on 
veut,  et  qui  appartiennent  à  une  époque  pUis  récente  de  l'art. 
Luigi  Boccherini   naquit   à   Lucques  le  14  janvier   1740.  Son 

(1)  Voir  les  n™  38,  iO,  i2,  44,  46  de  l'année  1867,  et  n»  3. 


père,  habile  contre-bassiste,  lui  donna  les  premières  leçons  de 
musique  et  de  violoncelle;  mais  il  ne  tarda  pas  à  être  remplacé 
dans  ce  soin  parle  maître  de  chapelle  de  l'archevêché,  qui  voulut 
cultiver  lui-même  les  heureuses  dispositions  du  jeune  Boccherini 
et  qui  le  fit  admettre  au  nombre  des  élèves  du  séminaire  de  Luc- 
ques. Un  goût  invinci'ole  poussait  le  jeune  artiste  à  l'étude  du 
violoncelle.  Il  s'y  livra  sans  réserve  et  ses  progrès  furent  très- 
rapides.  C'est  au  penchant  que  Boccherini  garda  toujours  pour 
cet  instrument  et  à  l'habileté  qu'il  y  avait  acquise  qu'il  faut  attri- 
buer le  rôle  qu'il  lui  donne  dans  ses  quhitettes  et  les  difficultés. 
qu'il  a  introduites  dans  sa  partie,  malgré  le  désavantage  qui  en 
devait  résulter  pour  la  popularité  de  ses  compositions. 

Musicien  perspicace,  le  père  de  Boccherini  entrevit  bientôt  tout  le 
parti  que  des  professeurs  éclairés  tireraient  des  dispositions  heu- 
reuses de  son  fils,  et  il  décida  qu'il  l'enverrait  à  Rome  pour  qu'il 
pût  s'y  perfectionner  dans  le  mécanisme  de  son  instrument,  et 
aussi  pour  apprendre  la  composition.  Le  jeune  élève,  chez  qui  la 
nature  s'était  montrée  infiniment  libérale  et  qui  était  doué  de 
l'instinct  mélodique  le  plus  exquis,  devança  les  leçons  de  ses  nou- 
veaux professeurs,  et  la  pédagogie  ne  put  gâter  les  dons  précieux 
de  son  génie. 

Rome  le  fascina,  et  c'est  sans  doute  à  son  séjour  dans  celte 
ville  qu'il  fut  redevable  de  la  fraîcheur  délicieuse  et  de  l'adorable 
sincérité  de  ses  inspirations.  On  faisait  à  cette  époque  beaucoup  de 
musique  dans  les  églises  de  Rome.  Dans  quelques-unes  on  mê- 
lait les  instruments  aux  voix,  et  les  œuvres  qu'on  exécutait  étaient 
dans  le  style  concerté;  mais  dans  plusieurs  autres,  et  particulière- 
ment à  la  chapelle  Sixtine,  on  entendait  plus  habituellement  la 
musique  de  l'ancien  style,  appelé  osservalo,  dans  lequel  Palestrina 
a  mis  un  charme,  une  douceur  dont  l'effet,  à  celte  époque,  était 
encore  augmenté  par  la  réunion  des  plus  belles  voix  et  par  une 
exécution  parfaite.  Boccherini  a  souvent  exprimé,  en  termes 
pleins  d'enthousiasme,  le  plaisir  qu'il  avait  éprouvé  à  l'audition 
de  cette  musique.  Vers  la  fin  de  sa  vie,  il  en  parlait  encore  avec 
une  chaleur  qui  prouvait  que  l'impression  de  ses  jeunes  années 
ne  s'était  aucunement  affaiblie,  et  l'on  peut  remarquer  que  l'exta- 
tique langueur  qui  a  tant  de  charme  dans  la  musique  de  Pales- 
trina n'est  pas  sans  analogie  avec  la  poétique  morbidesse  qui 
rend  si  suaves  les  compositions  de  Boccherini. 


66 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


A  peine  âgé  de  vin^  ans,  Boccherini  manifesta  son  génie  par 
des  compositions  qui  excitèrent  un  enthousiasme  général.  Ces 
œuvres  sont  encore  aujourd'hui,  après  un  siècle,  un  sujet  d'admi- 
ration pour  les  véritables  amateurs.  Ses  études  terminées,  le  jeune 
maître,  riche  d'avenir  et  comblé  des  témoignages  les  plus  flat- 
teurs, revint  dans  sa  patrie,  souriant  à  la  gloire,  unique  objet 
d'une  ambition  fiévreuse  et  désintéressée. 

A  Lucques,  Boccherini  savoura  pendant  quelque^temps ,  au  mi- 
lieu de  SCS  compatriotes,  l'ivresse  du  premier  succès.  Mais  la  soif 
de  la  célébrité  le  tourmentait,  et  sa  ville  natale  n'était  point  un 
théâtre  où  pussent  s'accomplir  les  destinées  qu'il  rêvait  incessam- 
ment. Il  avait  retrouvé,  parmi  ses  compatriotes,  Manfredi ,  élève 
de  NaiHlini  et  yioloniste  de  l'école  de  Tartini.  Ils  se  lièrent  de 
l'amitié  la  plus  étroite  et  se  communiquèrent  un  mutuel  désir  de 
voir  ks  principales  villes  de  l'Europe,  Confiants  dans  la  fortune, 
les  deux  artistes  dirent  adieu  à  leur  pays  et  partirent  pour  l'Es- 
pagne, qui  de  toutes  les  contrées  de  l'Europe  était  celle  où 
était  réuni  en  ce  moment  le  plus  grand  nombre  de  virtuoses 
célèbres.  Ils  firent  une  première  station  à  Turin,  où  leur  talent 
comme  compositeurs  et  leur  habileté  comme  instrumentistes  exci- 
tèrent la  plus  vive  admiration. 

Boccherini  n'avait  encore  produit  que  ses  premiers  trios  pour 
violon  et  basse.  Ces  compositions  étaient  encore  en  manuscrit,  et 
les  dilettantes  considéraient  comme  une  faveur  précieuse  la  per- 
mission d'en  obtenir  des  copies.  De  Turin  nos  deux  musiciens  se 
rendirent  dans  la  Lombardie,  puis  dans  le  Piémont.,  et  en'lin  dans 
le  midi  de  la  France.  Partout  leur  talent  excita  la  sympathie  et 
l'enthousiasme. 

Après  cette  excursion,  qui  paraît  s'être  prolongée  pendant  plu- 
sieurs années,  les  deux  amis  arrivèrent  ;\  Paris  vers  1768.  L'édi- 
teur de  musique  La  Clievardièrc,  qu'ils  eurent  occasion  de  con- 
naître dès  leur  arrivée,  les  présenta  au  baron  de  Bagge,  aussi 
célèbre  par  ses  prétentions  comme  violoniste  que  par  la  protection 
qu'il  accordait  aux  artistes.  —  Chez  Bagge  se  réunissait  tout  ce  que 
Paris  comptait  de  musiciens  distingués  :  Gossec,  Gavinies,  Capron 
et  Duport  l'aîné.  Ce  fut  devant  cet  aréopage  que  parurent  les  deux 
virtuoses  lucquois. 

Sortis  avec  honneur  de  cette  première  épreuve,  ils  ne  tardèrent 
pas  à  en  aflronterune  seconde  plus  périlleuse  en  débutant  au  Concert 
spirituel.  Ils  avaient  à  combattre  de  puissants  rivaux  dont  la  ré- 
putation dès  longtemps  affermie  ne  redoutait  aucune  concurrence. 
Cherchant  dans  d'autres  moyens  leurs  succès,  ils  s'attachèrent  moins 
à  surprendre  qu'à  toucher  leurs  auditeurs  et  aies  charmer.  L'exquise 
pureté  des  compositions  de  Boccherini,  qu'ils  avaient  fait  entendre 
chez  le  baron  de  Bagge,  leur  avait  procuré  un  succès  qu'ils 
n'auraient  pas  obtenu  pai-  leur  seule  virtuosité.  Ils  jouèrent  dans 
ce  second  concert  les  mêmes  compositions,  et  l'assemblée  ne  se 
montra  pas  moins  prodigue  d'enthousiasme  et  d'applaudissements. 
Chacun  se  plut  à  reconnaître  la  fraîcheur  de  génie  du  nouveau 
maître. 

Cette  manœuvre  habile  ne  fut  pas  défavorable  aux  exécutants. 

Leur  triomphe  fut  complet  et  de  tous  côtés,  à  la  cour  comme 
à  la  ville,  à  Paris,  en  province  et  à  l'étranger,  on  sollicita 
d'eux  de  nombreuses  auditions.  Les  éditeurs  se  présentèrent 
bientôt.  Dès  le  lendemain  du  concert,  Vernier,  qui  était  leur  com- 
patriote, était  venu  les  prier  de  regarder  sa  maison  comme  la  leur 
et  s'était  offert  pour  graver  leurs  ouvrages.  Boccherini  saisit  avec 
empressement  l'occasion  qui  se  présentait  de  révéler  au  monde 
musical  les  trésors  de  son  génie.  Il  dédia  son  premier  œuvre  de 
quatuors  à  Vernier,  qui  le  publia  et  il  acquitta  la  dette  de  sa  recon- 
naissance envers  La  Chevardière,  en  lui  dédiant  aussi  set»  premiers 
trios  ,  qui  parurent  chez  cet  éditeur. 

Bientôt  recherché  par  les    amateurs  d'élite  que  charmaient  s  g 


inspirations  originales,  Boccherini  satisfit  à  leur  empressement  par 
l'abondance  de  sa  verve.  Au  nombre  des  productions  de  ce  maître 
appartenant  à  la  même  époque,  il  faut  signaler  les  six  sonates 
pour  clavecin  et  violon  dédiées  à  Mme  Brillon  do  Jouy,  qui  était 
alors  au  premier  rang  des  amateurs  français. 

Cette  virtuose,  que  tant  de  qualités  distinguaient,  outre  son  goût 
pour  la  musique,  les  lettres  et  les  arts  plastiques,  vivait  à  Passy, 
près  de  Paris,  dans  la  seconde  moitié  du  xviii"  siècle.  Burney, 
qui  l'entendit  en  1770,  en  parle  en  ces  termes  dans  son  voyage 
musical  en  France  et  en  Italie  :  «  Elle  est,  dit-il,  une  des  meilleures 
clavecinistes  de  l'Europe.  Cette  dame,  non-seulement  joue  les 
morceaux  les  plus  difficiles  avec  beaucup  de  sentiment,  de  goût 
et  de  précision,  mais  elle  exécute  à  vue  avec  la  plus  grande  faci- 
lité. »  Burney  put  s'en  convaincre  lui-même  lorsqu'il  l'entendit 
déchiffrer  plusieurs  morceaux  de  sa  musique  qu'il  lui  avait  pré- 
sentés en  manuscrit. 

Mme  Brillon  composait  aussi  et  Boccherini  prisait  beaucoup  ses 
ouvrages.  Il  exécuta  souvent  avec  elle  ses  sonates  sur  le  clavecin 
ou  le  forte-piano  et  il  faisait  la  partie  de  violon.  C'est  chez  cette 
dame  qu'il  rencontra  pour  la  première  fois  André-Noël  Pagin,  vio- 
loniste de  l'époque  dont  l'école  française  s'honore  tout  particu- 
lièrement. Cet  artiste  célèbre,  né  à  Paris  en  1721,  si  l'on  en 
croit  Beffara  qui  déclare  avoir  vérifié  l'année  de  sa  naissance  d'a- 
près des  actes  authentiques,  fit  dans  sa  jeunesse  un  voyage  en 
Italie  dans  le  dessein  d'étudier  le  genre  de  Tartini,  dont  il  reçut 
des  leçons.  De  retour  à  Paris,  il  se  fît  entendre  aux  Concerts  spi- 
rituels et  y  obtint  de  brillants  succès;  mais  sa  persistance  à  ne 
jouir  que  la  musique  de  son  professeur  parut  aux  musiciens  fran- 
çais une  insulte  pour  leurs  compatriotes;  ils  se  liguèrent  contre 
lui,  et,  dans  un  conceit,  le  firent  accabler  d'applaudissements 
ironiques  avec  accompagnement  de  bouquets  poitant  de  petits 
papiers  où  le  nom  du  violoniste  était  accolé  aux  éloges  les  plus 
outrés  et  aux  adjectifs  les  plus  moqueurs.  Pagin,  justement  of- 
fensé, prit  la  résolution  de  ne  plus  reparaître  devant  le  public. 
Il  avait  tort,  car  l'auditoire  n'était  pas  responsable  de  ce  chari- 
vari peu  honorable  pour  ceux  qui  l'avaient  imaginé;  mais  on  le 
supplia  vainement  de  ne  point  considérer  comme  une  disgrâce  du 
public  ce  qui  n'était  qu'une  preuve  de  la  déraisonnable  envie  d'ar- 
tistes peu  généreux. 

Le  duc  de  Clermont,  son  protecteur ,  lui  confia  alors  dans  sa 
maison  un  emploi  honorable  et  largement  rétribué.  Pagin  cessa 
de  faire  de  la  musique  sa  profession,  et  ne  se  fit  plus  entendre 
que  daiis  les  salons,  chez  les  dilettantes  et  chez  ses  amis.  Burney 
et  Boccherini  sont  d'accord  pour  admirer  la  belle  sonorité  qu'il 
tirait  de  l'instrument,  son  expression  dans  l'adagio  et  la  légèreté 
de  son  archet  dans  les  traits  brillants.  Ainsi  que  plusieurs  compo- 
siteurs célèbres,  Shobert  et  Boccherini  et  bien  d'autres,  Pagin  a 
dédié  quelques-uns  de  ses  ouvrages  à  Mme  Brillon  de  Jouy. 

Madbice  cristal. 
[La  suite  prochainement.) 


LES  DROITS  DES  AUTEURS. 

{Deuxième  partie.) 
SOCIÉTÉS  DES  AUTEURS,   COMPOSITEURS  ET  ÉDITEURS  DE   MUSIQUE. 

(?<=  article)  (d). 

Un  connaît  ce  vieux  conte  d'un  paysan,  venu  à  l'Opéra,  qui  se 
cramponnait  à  sa  banquette  au  moment  de  ['ouverture,  parce  qu'on 

(1)  Voir  les  n"  33,  iO,  41,  43  et  49  de  l'année  1867,  et  n»  7. 


DE  PARIS. 


67 


lui  avait  dit  que  le  premier  coup  d'archet  Venléverait  !  Ici  ce  ne 
sont  pas  les  spectateurs  qui  turent  enlevés,  non;  mais  aussitôt  que 
le  chef  d'orchestre  eut  donné  l'impulsion  à  tous  ses  subordonnés, 
en  même  temps  que  la  symphonie  éclatait  avec  toute  sa  puissance 
dans  un  premier  accord,  ô  prodige  !  au  milieu  d'un  immense 
nuage  de  poudre,  on  vit  s'élancer  vers  le  lustre,  avec  la  rapidité 
et  presque  le  bruit  d'une  compagnie  de  perdrix...  un  essaim  de 
PEnnuQUEs ! 

Ce  dut  être  un  spectacle  curieux  et  imposant  que  celui  de  cette 
volée  de  coiffures  de  toutes  formes,  de  tout  rang,  de  tout  âge  : 
c'était  le  modeste  Bonnet,  la  pimpante  Brigadière,  le  léger  Ca- 
briolet, le  menaçant  Rhinocéros  et  le  fier  Oiseau  royal;  puis,  le 
Fer-à-cheval,  la  Grecque  et  le  Cadorjan,  récente  importation  britan- 
nique. Toutes,  selon  leur  volume  et  leur  poids,  se  balançaient  ou 
légèrement  ou  majestueusement  autour  du  lustre,  qui,  versant  sur 
elles  des  torrents  de  lumière  et  d'huile,  augmentait  encore  l'effet 
pittoresque  et  saisissant  du  tableau  ! 

Un  cri  énorme,  discordant,  un  cri  à  la  fois  dans  tous  les  tons, 
composé  du  cri  particulier  de  chaque  victime  et  de  chaque  spec- 
tateur, s'éleva  en  même  temps  que  les  infortunées  vers  la  voûte 
de  l'édifice  ;  tous  les  regards  aussi  les  suivirent  dans  ce  voyage 
aérien,  mais  bientôt  les  yeux  des  témoins  désintéressés  s'abaissè- 
rent pour  chercher  les  têtes  veuves  de  leur  plus  bel  ornement,  et 
l'on  découvrit  alors  que  l'orchestre  seul,  mais  tout  entier,  jusqu'à 
M.  Exaudet  lui-même,  se  trouvait  mis  à  nu.  Alors,  au  cri  de  sur- 
prise succédèrent  des  éclats  de  rire  effrayants,  inextinguibles,  inhu- 
mains, —  oui,  inhumains  !  Ne  voyez-vous  pas  ces  pauvres  musiciens 
éperdus,  haletants,  la  bouche  béante,  le  cou  tendu,  les  bras  en 
l'airV  Tous  ont  le  chef  chauve  ou  à  peu  près;  celui-ci  avec  une  ca- 
lotte de  flanelle,  celui-là  avec  un  serre-tête  de  nankin;  les  yeux 
levés  avec  amour,  avec  regret,  ils  semblent  rappeler  ce  cher  objet 
qui,  insoucieux  de  leur  peine,  les  nargue  en  dansant  devant  eux  à 
trente  pieds  du  sol  ! 

Cependant,  après  cette  première  explosion  d'hilarité,  il  fallut  s'oc- 
cuper de  réparer  le  désordre,  d'en  rechercher  et  d'en  punir  l'au- 
teur. M.  Berger  surtout  insistait  sur  ce  point,  pour  venger  sa 
dignité  outragée. 

•On  commença  par  descendre  le  lustre  chargé  de  ses  glorieux 
trophées,  et  l'on  vit  accourir  autour  de  lui,  avec  un  empressement 
tendre  et  sentimental,  les  malheureux  spoliés,  avançant  la  main 
vers  l'ornement  nouveau  qui  pendait  en  couronne,  comme  les 
prix  autour  du  mât  de  Cocagne;  chacun  veut  saisir  sa  fugitive; 
M.  Exaudet,  le  premier,  plus  ardent,  plus  ému,  peut-être  plus 
sensible...  au  froid,  s'empare  de  sa  Brigadière,  —  c'était  xme,  Bri- 
gadière que  portait  M.  Exaudet; — mais  en  voulant  la  réinstaller  en 
son  lieu  et  place,  il  éprouva  une  résistance  inaccoutumée,  tout  à 
fait  étrangère  aux  habitudes  de  sa  docile  compagne.  On  examina 
les  choses  de  plus  près  et  l'on  reconnut  que  des  hameçons  avaient 
été  habilement  jetés  sur  les  perruques;  que  les  pen-uques  avaient 
mordu  aux  hameçons  ou  les  hameçons  aux  perruques,  de  telle 
façon  qu'au  moyen  de  crins  imperceptibles  qui  attachaient  lesdits 
hameçons,  d'un  fil  d'appel  auquel  se  réunissaient  les  crins  et  qui 
passait  dans  la  poulie  du  lustre,  on  avait  opéré  l'enlèvement  des 
susdites  perruques. 

Pendant  cette  enquête  tous  les  assistants  s'étaient  réunis  dans  le 
parterre,  autour  du  lustre,  ce  soleil  du  soir,  alors  entouré  d'in- 
nombrables comètes,  à  plus  ou  moins  longues  queues.  Là  chacun 
exprimait  son  indignation  ;  car  il  fallait  être  indigné  :  M.  le 
directeur  de  l'Opéra  l'était  !  Parmi  ceux  qui,  par  gestes  ou  par 
exclamations,  témoignaient  le  plus  vivement  leur  désapprobation, 
on  remarquait  surtout  Ma  Mie  Babichon  :  elle  haussait  les  épaules, 
levait  les  yeux,  joignait  les  mains  :  —  «  Quelle  infamie!  manquer 
»  ainsi  à  M.  le  directeur,  insulter  M.  Exaudet!  Une  personne  étran- 


»  gère  au  théâtre  seule  a  pu  donner  un    pareil  scandale  :  je  ne 
»  voudrais  en  accuser  aucun  de  mes  camarades!..,  » 

Cette  vertueuse  colère  frappa  Favart  :  il  regarda  la  bonne  pièce 
en  souriant,  et  elle, souriant  aussi  sons  cape,  baissa  les  yeux  :  hélas  ! 
ce  sourire  la  perdit  !  il  fut  intercepté  au  passage  par  l'œil  scruta- 
teur de  M.  Berger,  et  soudain  tout  le  mystère  lui  fut  dévoilé. 

«  —  Vous  ne  pourriez  en  effet  accuser  aucun  de  vos  camarades. 
Mademoiselle,  sans  injustice  et  sans  ajouter  une  nouvelle  faute  à 
celle  que  vous  avez  commise!  »-— dit  l'administrateur  avec  autant 
de  sévérité  qu'en  auraient  pu  fournir  ensemble  les  trois  juges  de 
l'enfer  :  Minos,  Eaque  et  Rhadamanthe,  dont  il  avait  dû  étudier  la 
tenue  dans  ses  opéras  mythologiques. 
A  cette  apostrophe  Ma  Mie  Babichon  resta  muette. 
Puis  la  lumière  inondant  M.  Berger,  il  continua  : 
«  —Oui,  vous!  car  le  fil  conducteur  de  cette  indécente  machina- 
tion répond  à  la  troisième  loge  o\x  vous  étiez!  » 
Effectivement  le  fil  était  encore  dans  la  loge. 
L'accusation  d'un  fait  aussi  grave,  aussi  clairement  prouvé, 
n'admettait  pas  de  réplique;  il  ne  restait  à  la  coupable  qu'à  cour- 
ber la  tête,  à  implorer  la  clémence  de  son  juge;  —  il  y  comptait 
lui-même,  M.  Berger,  et  peut-être  se  fût-il  laissé  fléchir...  Mais, 
au  lieu  des  pleurs  et  des  marques  de  repentir  couvenables  en 
pareille  situation,  Ma  Mie  Babichon  poussa  un  éclat  de  rire, 
comme  Nicole  à  la  vue  de  M.  Jourdain  dans  son  grand  costume; 
un  de  ces  éclats  de  rire  qui  dégénèrent  en  attaque  de  nerfs,  qui 
font  qu'on  se  roule,  ou  qui  arrachent  à  Arnal  ce  cri  :  —  «  Qui  est-ce 
qui  donc  rit  comme  ça  là-haut  ?»  —  Bref,  on  la  crut  folle,  et  M.  Exau- 
det, qui  avait  rajusté  sa  Brigadière,  en  eut  pitié.  Mais  ce  n'était 
pas  démence  :  c'était  tout  simplement  le  naturel  qui  trop  longtemps 
comprimé  rompait  la  digue  de  l'hypocrisie  et  débordait  en  flots  de 
gaieté.  On  le  reconnut  bitintôt,  lorsque  l'effrontée,  un  peu  calmée, 
adressa  au  directeur  de  l'Opéra  ce  singulier  discours,  souvent  in- 
terrompu par  les  bouffées  d'une  envie  de  rire  qui  l'étoutt'ait  : 

»  —  Monsieur,  hélas  !  ah!  ah!  ah!  pardonnez-moi,  je  vous  en 
prie...  Hi!  hi!  hi;..Ce  n'est  pas  ma  faute,  en  vérité...  Eh! eh!  eh! 
je  n'ai  pas  été  maîtresse  de  ma  volonté...  c'est  un  effet  de  l'anti- 
pathie que  j'ai  contre  les  perruques!...  Elle  est  si  forte,  monsieur 
le  directeur,  qu'au  moment  où  je  vous  parle,  et  malgré  le  respect 
que  je  vous  dois,  je  ne  puis  m'empêcher  de  me  jeter  sur  la 
vôtre!...  » 

Et  joignant  l'action  à  la  parole,  Babichon  porta  une  main  sacri- 
lège sur  l'édifice  chevelu  qui  couronnait  M.  Berger,  saisit  ce  chef- 
d'œuvre,  le  lança  sur  le  théâtre  et  s'enfuit!.. 
Cette  fois,  on  ne  rit  pas  :  on  pâlit! 

Qu'allait-il  en  effet  résulter  d'un  pareil  attentat?  Chacun  atten- 
dait, en  silence,  l'explosion  de  la  colère  du  Jupiter  de  coulisses... 
Rien  n'éclata! 

Il  était  là,  immobile  et  blême  ;  une  sueur  froide  inondait  son 
front  dénudé,  tout  à  l'heure  orné  d'un  crêpé  artistement  élevé,  oïl 
maintenant  apparaissaient  quelques  cheveux  rares  et  rouges  et  deux 
loupes  !  végétation  occipitale  dont  l'exhibition  publique  plongeait 
en  ce  moment  dans  la  stupeur  M.  Berger,  homme  à  bonnes  for- 
tunes et  à  prétentions.  Il  fut  tiré  de  cet  état  d'atonie  par  Damour, 
le  concierge,  qui  se  présenta  respectueusement  devant  lui,  portant 
sur  son  poing  la  perruque  si  maltraitée,  et  dont  il  essayait  de  ra- 
mener les  boucles  égarées. 

M.  Berger  la  saisit  avec  un  mouvement  convulsif,  la  posa  rapi- 
dement sur  la  tête  et,  sans  dire  un  mot,  courut  s'enfoncer  dans  sa 
voiture . 

Il  ne  remit  plus  depuis  le  pied  à  l'Opéra-Comique,  dont  il  aban- 
donna la  direction,  et  qu'il  fit  supprimer  quelques  mois  après. 
M.  Exaudet,  qui  avait  partagé  l'infortune  de  son  supérieur,  entra 
à  l'Opéra  comme  premier  violon.  Mme  Favart,  Clairval  et  Laruette 


68 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


furent  engagés  dans  la  troupe  que  Favart  conduisit  au  camp  du 
maréchal  de  Saxe,  et  Ma  Mie  Babichon,  qui,  par  lettre  de  cachet, 
avait  reçu  défense  de  paraître  sur  aucun  théâtre,  se  réfugia  dans 
les  petits  appartements  du  magnifique  hôtel  que  M.  d'Augny  (1), 
le  fermier  général,  venait  de  faire  bâtir  à  la  Grange-Batelière. 

Thomas  SAUVAGE. 
[La  suite  prochainement.) 


m  mconNu. 

Le  Journal  d'Indre-et-Loire  a  pubUé  récemment  la  lettre  sui- 
vante, adressée  par  M.  le  conservateur  de  la  Bibliothèque  de 
Tours  au  maire  de  la  ville: 

«  Monsieur  le  Maire, 

»  J'ai  l'honneur  de  vous  offrir,  pour  la  Bibliothèque  publique, 
un  manuscrit  que  j'ai  eu  la  bonne  fortune  de  sauver  de  la  des- 
truction. Ce  livre,  précieux  pour  les  musiciens,  gisait  exposé  à 
l'humidité,  depuis  la  Révolution,  dans  le  grenier  d'une  maison 
voisine  de  l'ancienne  église  de  Saint-Martin.  Je  l'ai  réparé  de  mon 
mieux;  il  est  complet  et  sera  très-bien  placé  dans  notre  précieux 
dépôt.  Voici  le  titre  de  ce  manuscrit  : 

«  Apollon  et  Cyrène,  divertissement  héroïque  en  deux  actes,  mis 
»  en  musique  par  J.-B.  Dupré  ,  organiste  de  Saint-Martin ,  de 
»  Tours,  paroles  de  M.  Bruley,  trésorier  de  France.  (Vol.  in-8°, 
»  contenant  196  pages.)  » 

»  Cette  opérette  fut  écrite  par  Dupré,  à  Tours,  le  24  juillet  1771, 
comme  l'indique  une  note,  signée  de  sa  main,  à  la  page  168  du 
manuscrit. 

»  L'antique  église  de  Saint-Martin  possédait  un  orgue  excellent: 
c'était  un  grand  trente-deux  pieds,  à  cinq  claviers,  ayant  une 
soixantaine  de  jeux.  Dupré,  qui  le  touchait,  rivalisait  avec  le  ta- 
lent des  premiers  organistes  de  Paris;  il  possédait  une  science 
profonde  de  l'harmonie.  Le  Chapitre  de  Saint-Martin,  qui  avait 
des  revenus  considérables,  faisait  un  digne  emploi  de  ses  riches- 
ses en  attachant  à  son  église  les  sujets  les  plus  distingués,  pour 
composer  une  excellente  musique.  Le  célèbre  Lesueur,  à  cette 
époque,  était  maître  de  chapelle  à  Saint-Martin  (2):  plus  tard,  il 
dirigea  le  Conservatoire  de  Paris  (3).  Pendant  son  séjour  à  Tours, 
•il  rendit  justice  à  l'auteur  de  notre  manuscrit;  et,  pour  donner 
une  preuve  qu'il  savait  apprécier  son  grand  talent,  il  nous  suffira 
de  dire  qu'il  lui  donnait  ses  compositions,  à  retoucher;  il  les  lui 
faisait  jouer  ensuite  sur  le  bel  orgue  de  Saint-Martin,  et  répétait 
souvent  :  «  Mes  fugues,  remaniées  par  Dupré,  me  font  venir  la 
»  chair  de  poule.  » 

»  Si  je  ne  craignais  de  vous  fatiguer,  monsieur  le  Maire,  j'en- 
trerais dans  de  plus  grands  détails  sur  le  célèbre  auteur  de  notre 
manuscrit.  Dupré  résume  en  lui  une  des  plus  belles  époques  mu- 
sicales de  notre  ville;  et,  au  double  point  de  vue  de  l'histoire  lo- 
cale et  de  l'art  musical,  c'est  une  bonne  fortune,  pour  notre  Bi- 
bliothèque, de  posséder  une  œuvre  de  Dupré.  Quant  à  M.  Bruley, 
il  était  le  chef  de  l'honorable  famille  qui  habite  la  Touraine. 

»  J'ai  l'honneur  d'être,  avec  respect,  monsieur  le  Maire,  votre 
très-obéissant  serviteur. 

»  DoRANGE,  bibliothécaire.  » 


(1)  Hôtel  où  nous  avons  vu  l'administration  des  jeux  jusqu'à  leur 
suppre.ssion  ;  la  Banque  Ganneron;  qui  fut  la  résidence  de  M.  Aguado,  et 
qui  est  aujourd'hui  la  mairie  du  IX«  arroBdissement. 

(2)  De  1783  à  1784. 

(.S)  Ceci  est  une  erreur.  On  sait  que  jamais  Lesueur  n'a  dirigé  le 
Conservatoire. 


L'ouvrage  dont  il  est  ici  question  fut-il  jamais  représenté,  même 
à  Tours  ?  C'est  ce  qu'il  serait  sans  doute  bien  difficile  de  savoir 
aujourd'hui.  Quant  à  son  auteur,  il  n'est  guère  plus  facile  de  se 
renseigner  à  son  sujet.  M.  Fétis  ne  cite  aucun  Dupré  vivant  à 
cette  époque.  Quant  au  Dictionnaire  des  Musiciens  de  Choron  et 
Fayolle,  voici  la  seule  note  qu'on  y  trouve  :  «  Dupré,  fit  graver 
à  Paris,  en  1763,  deux  œuvres  de  dix  trios  pour  le  clavecin  avec 
violon.  11  était,  dès  17S4,  pensionnaire  à  l'Opéra,  et  mourut  en 
1784.  .) 

Il  paraît  bien  évident  que  ce  Dupré  n'est  point  celui  de  la  lettre 
ci-dessus  reproduite.  Comme  le  dit  le  Dictionnaire  des  Musiciens, 
cet  artiste  était  pensionné  de  l'Opéra  dès  17S4,  même  17S3;  1'^^- 
manach  des  Spectacles  le  constate.  Donc  il  avait  fait  à  ce  théâtre 
son  temps  de  service,  n'était  sans  doute  plus  de  la  première  jeu- 
nesse, et  eût  été  bien  vieux  en  1783,  à  l'époque  ou  Lesueur  fai- 
sait un  si  grand  éloge  de  l'organiste  de  Saint-Martin,  de  Tours.  Il 
s'agit  donc  probablement  d'un  musicien  tourangeau ,  né  et  élevé 
dans  le  pays,  qui  y  avait  fait  tout  doucement  sa  position,  et  qui 
peut-être  y  fit  représenter  le  petit  opéra  en  question. 

Combien,  à  cette  époque  où  Paris  s'occupait  de  la  province  en- 
core moins  qu'aujourd'hui,  au  point  de  vue  intellectuel,  combien 
d'artistes  obscurs  ont  pu  faire  preuve  d'un  talent  très-réel  et  ab- 
solument méconnu  ! 

A  ce  titre,  la  petite  découverte  que  nous  venons  de  mentionner 
n'est  pas  sans  intérêt. 

Arthur  POUGIN. 


ffllNISTÉRE  D£  LA  SAISON  DE  L'EMPEREUB 

ET    DES    BEAUX-ARTS. 

DIRECTlOiN    GÉNÉRALE    DES    THÉÂTRES. 

Une  médaille  en  or,  de  la  valeur  de  500  francs,  est  offerte  à  l'auteur 
des  paroles  de  la  cantate  qui  sera  choisie  pour  être  donnée,  cette  année, 
comme  texte  du  concours  du  grand  prix  de  Rome,  pour  la  composition 
musicale. 

Cette  cantate  doit  être  à  trois  personnages;  elle  est  destinée  à  être 
chantée  par  un  soprano,  un  ténor  et  un  baryton  ou  basse-taille;  elle 
devra  renfermer  un  ou  au  plus  deux  airs;  un  seul  duo  et  un  trio  final, 
chacun  de  ces  morceaux  étant  séparé  du  morceau  suivant  par  un  réci- 
tatif. 

Les  eaniates  devront  être  adressées,  par  paquet  cacheté,  au  secrétariat 
du  Conservatoire  impérial  de  musique  et  de  déclamation ,  rue  du  Fau- 
boui'g- Poissonnière,  n°  15,  avant  le  l"  mai,  terme  de  rigueur.  Chacune 
des  pièces  de  vers  contiendra,  dans  un  billet  cacheté,  le  nom  de  l'auteur 
et  l'épigraphe  placés  en  tête  du  manuscrit. 

11  ne  sera  reçu  à  ce  concours  que  des  pièces  inédites.  Les  manuscrits 
ne  seront  pas  rendus. 


Pour  la  seconde  fois  depuis  peu  de  temps,  la  Revue  et 
Gazette  musicale  vient  d'être  douloureusement  éprouvée. 

Naguère,  c'était  un  de  ses  collaborateurs  les  plus  savants 
et  les  plus  assidus  qu'elle  perdait,  —  nous  avqns  nommé 
Georges  Kastner  ;  —  aujourd'hui,  c'est  Edouard  Monnais,  son 
rédacteur  en  chef  depuis  l'année  183S,  que  l'impitoyable  mort 
nous  enlève!  Mardi  matin,  l'écrivain  de  tant  de  distinction, 
de  tact  et  d'esprit,  auquel  notre  recueil  doit  de  si  nombreux 
et  de  si  excellents  travaux,  l'ami  constant  et  dévoué  succom- 
bait à  une  longue  et  douloureuse  maladie,  emportant  avec  lui 
les  regrets  de  tous  ceux  qui  l'ont  connu.  —  Dans  quelques 
jours  nous  consacrerons,  à  cette  honorable  et  laborieuse 
existence,  une  notice  chronologique  qu'une  douleur  profonde 
nous  rend  incapables  de  rédiger  en  ce  moment. 


BH 


DE  PARIS. 


69 


Jeudi,  à  trois  heures,  ont  eu  lieu  en  l'église  Notre-Dame  de 
Lorette  les  obsèques  de  M.  Edouard  Monnais,  dont  nous  venons 
d'annoncer  plus  haut  la  fin  regrettable. 

Nous  ne  pouvons  mieux  faire  que  de  reproduire  les  détails 
donnés  sur  cette  cérémonie  par  le  Moniteur  de  vendredi  : 

«  Aujourd'hui,  à  trois  heures,  ont  eu  lieu  en  l'église  Notre-Dame 
de  Lorette  les  obsèques  de  M.  Edouard  Monnais,  commissaire  im- 
périal près  les  théâtres  lyriques  et  le  Conservatoire,  et  qui,  depuis 
un  mois,  par  suite  de  l'état  de  sa  santé,  avait,  sur  sa  demande, 
été  admis  à  faive  valoir  ses  droits  à  la  retraite. 

»  La  foule  qui  se  pressait  dans  l'église  n'était  composée  que 
d'amis,  ressentant  tous  vivement  la  perte  qu'ils  venaient  de  faire. 
En  effet,  à  côté  des  rares  qualités  de  l'esprit  qui  ont  fait  apprécier 
ses  travaux  si  variés,  M.  Edouard  Monnais  avait  ce  don  précieux 
de  la  bienveillance,  de  l'aménité,  de  l'obligeance  délicate  qui  attire 
et  retient  les  cœurs.  Ami  des  plus  grands  compositeurs,  de  Rossini, 
de  Meyerbeer^  d'Halévy,  d'Auber,  il  laisse  dans  le  monde  des  arts 
des  regrets  unanimes.  Ces  regrets  ont  trouvé  en  M.  de  Saint- 
Georges  un  éloquent  interprète .  Avant  de  rapporter  ici  les  paroles 
émues  retraçant  si  bien  le  caractère  affectueusement  dévoué  et  in- 
telligemment conciliant  du  défunt,  nous  indiquerons  rapidement 
les  principaux  travaux  de  l'écrivain,  qui,  par  l'impartialité  et  la  jus- 
tesse de  ses  savantes  appréciations  et  le  tour  aimable  de  son  style 
plein  de  distinction  et  de  finesse,  avait  conquis  dans  la  critique 
musicale  une  place  qui  sera  difficilement  remplie. 

»  On  a  d'Ed.  Monnais  les  treize  volumes  des  Ephémérides  uni- 
verselles ;  Sultana,  opéra-comique;  Esquisses  de  la  vie  d'artiste,  les 
Sept  ISotes  de  la  gamme  ;  le  Portefeuille  d'une  cantatrice,  un  certain 
nombre  de  comédies-vaudevilles,  tels  que  :  la  Demande  en  mariage, 
la  Cour  des  messageries,  le  Secret  d'Etat,  l'Anneau,  Vn  Ménage  pa- 
risien, le  Petit  Suisse,  la.  plupart  en  collaboration;  une  foule  d'ar- 
dcles  dans  le  Courrier  français,  le  Moniteur  des  Arts,  la  Gazette 
musicale,  où  il  prit  le  nom  de  Paul  Smith. 

«C'est  un  souvenir  honorable  pour  le  Moniteur  universel  de  l'avoir 
compté  parmi  ses  collaborateurs. 

»  Nous  avons  remarqué  parmi  les  assistants  :  M.  de  la  Charme, 
chef  du  cabinet  du  ministre  de  la  maison  de  l'Empereur;  M.  Ca- 
mille Doucet,  membre  de  l'Académie  française,  directeur  général  de 
l'administration  des  théâtres  et  le  personnel  de  la  direction  générale; 
M.  Auber,  directeur  du  Conservatoire  de  musique,  et  le  personnel 
du  Conservatoire  ;  M.  Ambroise  Thomas  ;  M.  Edouard  Thierry,  ad- 
ministrateur général  de  la  Comédie-Française;  M.  Emile  Perrin, 
directeur  de  l'Opéra;  le  baron  Taylor,  MM.  Carvalho,  Bagier, 
Chaix-d'Est-Ange,  de  Vatry,  A.  de  Lavergne,  de  Lassabathie,  Lau- 
rencin,  Hipp.  Provost,  F.  Bazin,  Oscar  Comettant,  Paul  Dalloz, 
Th.  Gauthier,  A.  Gouzien ,  Cristal,  D.-A.-D.  Saint- Yves,  M.  de 
Monter,  Rey,  Laurent  de  Rillé;  Jules  Simon,  Deforges,  Moker, 
Couderc,  Montaubry,  Duprez,  Sainte-Foy,Ponchard,  Vauthrot,  J. 
Pasdeloup,  Heugel,  Louis  et  G.  Brandus,  S.  Dut'our,  Hipp.  Rodri- 
gues,  Marmontel,  Révial,  Laget,  Massart,  H.  Herz,  Lecouppey, 
Mathias,  Arban,  Dauvernié,  Cookers,  Dancla,  professeurs  au  Con- 
servatoire, Alkan,  Batiste,  Battu,  etc. 

))  Un  Pie  Jesu,  de  la  composition  de  M.  Faure,  a  été  chanté  par 
l'auteur  avec  un  sentiment  profond  qui  a  vivement  impressionné 
l'assemblée. 

»  Sur  la  tombe,  au  cimetière  du  Père-Lachaise,  où  le  corps  a 
été  déposé,  M.  de  Saint-Georges,  président  de  la  Société  des  au- 
teurs dramatiques,  a  prononcé  au  nom  de  cette  Société  les  paroles 
qui  suivent  : 

«  Un  homme  excellent,  un  esprit  d'élite,  un  critique  d'art  distingué, 
un  administrateur   habile,    un   ami  parfait  et  dévoué:  voilà  celui  que 


nous  pleurons  aujourd'hui,  celui  que  do  vifs  regrets  accompagnent,  et 
dont  h  douce  et  syn)palhique  figure  restera  dans  le  souvenir  de  tous 
ceux  qui  l'ont  connu,  c'est-à-dire  aimé. 

»  Edouard  Monnais  fut  longtemps  rédacteur  d'un  de  nos  plus  impor- 
tants journaux  politiques;  il  y  était  chargé  de  la  critique  musicale,  et  se 
fit  remarquer  pir  d'excellentes  et  judicieuses  appréciations  ,  où  la  sévé- 
rité fut  toujours  mitigée  par  une  bienveillance  extrême  pour  les  auteurs 
dont  il  blûmait  et  improuvait  les  œuvres.  Encourageant  les  faibles  et  ren- 
dant l'énergie  aux  forts  en  évoquant  leur  passé  au  profit  de  leur  avenir. 

»  Remarqué,  apprécié  par  tous  les  vrais  amis  de  l'art,  Edouard  Mon- 
nais fut  appelé  à  la  direction  de  l'Opéra;  il  voulut  appliquer  à  ce  beau 
théâtre  les  théories  artistiques  dont  il  était  depuis  longtemps  l'apôtre ,  il 
le  fit  avec  bonheur,  et  plusieurs  grandes  œiivrps  reprc?eniées  sous  son 
adminislration  furent  consacrées  par  le  succès.  Nommé  bientôt  après  aux 
fonctions  de  Commissaire  du  gouvernement  près  de  nos  grands  théâtres 
et  du  Conservatoire,  il  apporta  dans  ses  nouveaux  devoirs  cet  esprit  à  la 
fois  ferme  et  obligeant  qui  augmenta  le  nombre  de  ses  amis  et  lui  ac- 
quit tant  de  reconnaissances  et  de  dévouements. 

»  Auteur  lyrique,  il  écrivit  pendant  dix  ans  toutes  les  cantates  qui 
servirent  de  début  à  nos  prix  de  Rome,  et  plus  d'un  dût  à  ses  inspira- 
tions de  belles  œuvres  couronnées,  qui  furent  le  premier  pas  d'une  car- 
rière de  gloire  et  de  fortune! 

»  Edouard  Monnais  composa  quelque?  pièces  pour  nos  théâtres  de 
chant;  chacune  d'elles  renfermait  ce  sentiment  musical  sans  lequel  il 
n'existe  pour  le  musicien  ni  verve  ni  mélodie. 

»  Ses  éludes,  ses  travaux  donnaient  à  ses  critiques  une  autorité  qui  le 
fît  apprécier  de  tous  les  vrais  amateurs  de  l'art  et  rendra  sa  perte  en- 
core plus  sensible  à  tous  les  lecteurs  des  journaux  qui  lui  durent  long- 
temps leur  vogue  et  leur  succès. 

»  Quelques  mots  sur  l'homme  privé,  Messieurs,  dernier  hommage  de 
l'un  de  ses  meilleurs  amis.  Bon,  serviable,  doué  d'une  de  ces  natures 
heureuses  qui  attirent  la  confiance  et  entraînent  l'amitié,  Edouard  Mon- 
nais va  nous  manquer  à  tous;  nous  le  chercherons  longtemps  dans  nos 
comités  artistiques,  dans  nos  jurys,  dans  ces  concours  publics  où  son 
esprit  conciliant,  où  sa  bienveillance  connue  rassuraient  les  élèves  et  se 
communiquaient  aux  juges! 

»  Mais  c'est  au  sein  de  sa  famille,  parmi  ses  affections  intimes,  que 
sa  perte  sera  cruellement  sentie  ! 

»  Si  nos  regrets  parviennent  jusqu'à  toi,  mon  cher  Monnais,  qu'ils 
adouci.'-sent  la  séparation  de  ceux  qui  te  furent  chers,  et  qu'il  te  reste 
la  pensée  de  toutes  les  douleurs  qui  te  survivent  comme  de  ton  souvenir 
éternel  dans  nos  cœurs  !  s 

Dans  quelques  paroles  empreintes  d'une  sincère  émotion,  M.  le 
baron  Taylor,  au  nom  de  l'Association  des  artistes  musiciens,  dont 
M.  Edouard  Monnais  était  depuis  longtemps  vice-président,  a  dit 
ensuite  un  dernier  adieu  à  celui  qui  laisse  parmi  ses  collègues  de 
si  vifs  sentiments  d'estime  et  d'affection. 


CONCERTS  ET  AUDITIONS  OUSICÂLES  DE  LA  SEUIAINE. 

^*j.  Les  artistes  désignés  pour  se  faire  entendre  au  premier  concert 
des  Tuileries  qui  a  lieu  demain,  sont  :  Mmes  Nilsson,  Cabel,  Marie 
Roze;—  MM.  Capoul  et  Crosti. —  La  partie  instrumentale  y  sera  repré- 
sentée par  Mme  Norman-Neruda. 

***  Le  concert  donné  vendredi  de  la  semaine  dernière  au  ministère 
de  la  Marine  aura  été  l'un  des  plus  remarquables  et  des  plus  intéres- 
sants de  la  saison,  non-seulement  par  la  notoriété  des  artistes  engatfés, 
et  qui  s'appelaient  Gardoni,  Hermann-Léon,  Franchomine,  Alard,  Du- 
vernoy  et  Mmes  Carvalho  et  Bloch,  mais  aussi  par  le  choix  des  mor- 
ceaux exécutés.  Il  suffira  de  citer  au  nombre  de  ceux-ci  :  la  Corbeille 
d'oranges,  d'Auber,  le  magnifique  trio  du  Pardon  de  Ploërmel,  l'Ave 
Maria  de  Gounod,  la  romance  de  Martha  et  toute  la  partie  instru- 
mentale. C'est  par  les  bravos  les  plus  enthousiastes  que  le  noble  audi- 
toire a  témoigné  à  ces  brillants  interprètes  toute  sa  satisfaction. 

:j%  M.  le  comte  de  Nieuvserkerke,  surintendant  des  Beaux-Arts,  a 
repris  le  28  ses  réceptions  hebdomadaires  du  vendredi.  On  sait  qu'elles 
sont  particulièrement  consacrées  à  la  musique. 

**^  Au  huitième  concert  du  Conservatoire,  dont  le  programme  répé- 
tait exactement  celui  du  dimanche  précédent,  nous  n'avons  à  signaler 
que  le  bis  adressé,  pour  la  seconde  fois,  au  chœur  des  Pèlerins  du 
Tannhœuser.  Les  anciens  abonnés  deviendraient-ils  tout  à  coup  wagné- 
riens? 

^,*^,  Une  seconde  audition  a  confirmé  l'énorme  succès  obtenu  par 
Mme  Norman-Neruda  aux  Concerts  populaires.  Elle  a  joué  Vandante  et  le 
finale  du  concerto  en  mi  de  Vieuxtemps  avec  une  légèreté,  un  brio,  une 


70 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


sûreté,  une  pureté  de  son  que  l'illustre  ;violoniste-compcisiteur  eût  cer- 
tainement admirées.  Il  n'y  a  d'autre  reproche  à  lui  adresser,  et  c'est 
chose  grave  pour  une  aussi  gracieuse  personne,  que  le  luxe  de  mouve- 
ments auquel  elle  se  livre  dans  la  chaleur  ,ie  l'exécution.  Elle  .se  fait 
entendre  une  troisième  fois  aujourd'hui  dans  le  huitième  concerto  de 
Spohr,  connu  en  Allemagne  sous  le  nom  de  Gssamjscene  (scène  de 
chant) . 

^*^  Un  concert  brillant  entre  tous  est  celui  qu'a  donné  jeudi  dernier 
le  pianiste  chilien  Frédéric  Guzman,  connu  seulement  à  Paris  de  quel- 
ques artistes  et  amateurs.  Un  public  d'élite  remplissait  la  salle  llerz,  cu- 
rieux de  savoir  comment  on  comprend  les  concertos  de  Beethoven  au 
Chili.  C'est  celui  en  ut  mineur,  au  finale  si  piquant  et  si  plein  de  verve, 
qu'avait  choisi  M.  Guzman;  il  l'a  exécuté  de  façon  à  démontrer  que  son 
talent  prendrait  promptement  une  belle  place  dans  la  hiérarchie  des  vir- 
tuoses que  nous  possédons;  mais  c'e-it  surtout  dans  deux  morceaux  de 
style  moderne  dont  il  est  l'auteur,  et  dans  deux  brillantes  compositions  à 
quatre  mains  de  Gottschalk,  Dites  oui  et  Ojos  criollos  (les  Yeux  créoles), 
qu'on  a  pu  apprécier  sa  véritable  originalité.  Sa  femme,  ([ui  a  joué 
avec  lui,  paraît  ne  lui  céder  en  rien  sous  le  rapport  du  mécanisme  et  de 
la  facilité.  On  a  hissé  avec  acclamation  les  Yeux  créoles.  Nous  signale- 
rons encore  une  Marche  triomphale  très-réussie  de  F.  Guzman,  pour  deux 
pianos.  Lutz,  le  sympathique  baryton,  a  récolté  de  nombreux  bravos 
après  deux  airs  de  Fernand  Cortez  et  du  Valnl  de  chambre;  Mme  Mon- 
bclli  qui  a  dit  de  sa  voix  fraîche  et  souple  l'air  du  Barbier  de  Scoille, 
comme  nous  l'avons  rarement  entendu  détailler,  a  eu  un  succès  d'en- 
thousiasme. Une  bonne  note  à  l'orchestre  qui  était  dirigé  par  M.  de  Groot. 

*%  Une  pianiste  viennoise  que  Paris  a  déjà  applaudie  l'hiver  dernier, 
Mlle  Constance  Skiwa,  a  donné  lundi  un  concert  à  la  salle  Erard. 
Dans  un  trio  de  Jadassohn,  un  beau  concerto  de  Hœndel  et  divers 
morceaux  de  Chopin,  Liszt  et  J.  de  Boliczay,  elle  a  fait  preuve  d'un  sé- 
rieux et  classique  talent.  Le  jeune  violoniste  Franz  Ries,  qui  nous 
semble  marcher  à  grands  pas  vers  la  célébrité,  a  exécuté  deux  char- 
mants morceaux  de  sa  composition,  liiirlcske  et  Berceuse,  qui  décèlent  la 
main  d'un  maître,  et,  avec  Mlle  Skiwa,  la  brillante  fantaisie  de  Vieux- 
temps  et  Wollï  sur  Oberon;  elle  a  produit  beaucoup  d'effet.  M.  Norblin 
et  le  ténor  belge  Straetman  ont  recueilli  leur  bonne  part  d'applaudisse- 
ments. 

if*,  Mlle  Aîiiélie  Staps,  une  gracieuse  pianiste  que  la  Belgique  nous 
envoya  l'année  dernière,  gagne  chaque  jour  eu  talent  et  .en  réputation. 
A  son  concert,  elle  a  exécuté  le  Rondo  capricioso  de  Mendel.ssohn,  une 
transcription  de  Liszt  sur  le  Vaisseau  Fantôme,  hérissée  de  difficultés  dont 
elle  s'est  supérieurement  tirée,  la  partie  de  piano  du  quintette  de  Schu- 
mann  et  un  duo  de  Mendelssohn  pour  piano  et  violoncelle,  avec  M.  De- 
munck.  C'est  certainement  une  excellente  acquisition  pour  la  phalange 
militante  qui  dispense  au  public  parisien  ses  plaisirs  artistiques. 

^*^  On  n'a  pas  perdu  le  souvenir  d'une  jeune  et  tn?s-précoce  artiste, 
élève  du  Conservatoire,  Mlle  Rachel  Van  Lier,  âgée  de  onze  ans,  qui  se  fit 
entendre  la  saison  dernière  dans  plusieurs  salons  ei  concerts  où  elle 
étonna  particulièrement  le  public  par  sa  merveilleuse  facilité  à  lire  à 
première  vue. —  Dimanche  dernier  elle  a  donné  à  la  salle  Herz,  avec  le 
concours  de  Mlle  Heilbron,  de  l'Opéra-Comique,  du  violoniste  Jacobi, 
d'Aurèle,  chanteur  comique,  de  Bacquié,  et  de  Mlle  Agar  qui  a  dit  le. Vopo- 
léon  II  de  Victor  Hugo  avec  une  remarquable  inspiration;  elle  a  donné, 
disons-nous,  devant  un  auditoire  d'éhte,  un  beau  concert  dans  lequel  la 
bénéficiaire  a  fait  preuve  de  grands  progrès  accomplis,  et  où  elle  s'est 
fait  applaudir  avec  entliousiasme  pour  son  talent  d'exécution  réellement 
extraordinaire. 

*%  Le  peu  d'espace  dont  nous  disposons,  en  présence  de  l'augmenta- 
tion progressive  des  réunions  musicales  de  tout  genre  qui  se  produisent 
à  Paris  ne  nous  permet  pas  de  consacrer  plus  de  quelques  lignes  à 
beaucoup  d'entre  elles  qui  n'en  sont  pas  moins  intéressantes  pour  cela, 
surtout  celles  qui  ont  l'enseignement  pour  objet.  De  ce  nombre  sont  les 
matinées  de  Mme  Pierson-Bodin,  remplies  en  grande  partie  par  des  élèves 
dont  les  succès  témoignent  suffisamment  du  talent  de  leur  professeur, 
et  où  ne  dédaignent  pas  de  se  faire  entendre  des  artistes  de  premier  mé- 
rite tels  que  Mme  Farrenc,  Sighicelli,  Gaveaux-Sabatier,  Pagans,  Her- 
mann-Léon,  etc.  11  suffit  du  reste  de  mentionner  ces  matinées  pour  qu'on 
en  apprécie  l'importance  et  l'utiUté. 

***  Au  dernier  concert  de  Mme  Martin-Robinet,  on  a  beaucoup 
applaudi  M.  et  Mme  Blot-Dermilly  dans  une  jolie  opérette,  l'Embarras 
d'un  gouverneur.  Mme  Blot  s'y  est  montrée  on  ne  peut  plus  gracieuse 
sous  le  costume  d'un  jeune  seigneur,  et  elle  a  chanté  son  rôle  avec  un 
goût  exquis. 

**»  Après  une  année  d'absence,  M.  Gennaro  Perelli,  pianiste  compo- 
siteur d'un  grand  talent,  est  de  retour  à  Paris.  11  donnera  le  4  mars, 
dans  les  salons  d'Erard,  une  audition  de  ses  principales  et  nouvelles  com- 
positions avec  quatuor  d'accompagnement  sous  la  direction  de  Portehaut. 
—  Tous  les  artistes  et  amateurs  s'y  sont  d'avance  donné  rendez- vous. 

»■*«  Nous  signalons  à  l'attention  du  public   musicale  le  jeune  pianiste 


napolitain  Rendano,  qui  s'est  fait  entendre  avec  un  très-grand  succès 
au  concert  donné  à  la  .salle  Herz  le  22  février  par  la  Société  protectrice 
de  l'enfance,  et  qui  a  été  particulièrement  apprécié  comme  compositeur, 
dans  un  morceau  intitulé:  Chani  du  Paysan  dans  la  forêt,  plein  de 
charme  et  de  poésie. 

^*^Les  concerts  classiques  de  la  Société  du  Cons  ervatoire  de  Strasbourg 
continuent  à  otï'rir  un  puissant  intérêt,  grâce  au  zèle  et  au  talent  de 
l'éminent  chef  d'orchestre  M.  Hasselmans.  Au  quatrième  concert,  un 
concerto  de  cor  de  Mozart  a  été  exécuté  par  M.  Stennebruggen,  professeur 
au  Conservatoire  et  soliste  à  Bade,  artiste  de  talent  qui  a  parfaitement 
fait  valoir  les  nombreuses  beautés  de  l'œuvre  trèa-reniarquabic,  et  pour- 
tant peu  connue,  qu'il  interprétait. 

-^*jp  Le  concert  donné  à  Nice,  au  théâtre  Italien,  par  la  compagnie 
Ulmann-Patti,  a  été  magnifique.  La  recette  a  atteint  le  chiffre  significa- 
tif de  8,000  francs.  Wolff  et  Vieuxtemps  ont  été  applaudis  à  outrance  dans 
leur  duo  sur  Ùun  Juan;  on  a  fait  répéter  à  chacun  d'eux  sa  variation. 
L'engagement  de  Woltf  se  terminait  le  2.3  février;  mais  M.  Ulmann, 
désireux  d'exploiter  le  plus  longtemps  possible  cette  riche  mine  de  succès 
dont  il  tire  si  bien  parti,  l'a  retenu  encore  jusqu'au  11  mars,  après  quoi 
Théodore  Ritter  prendra  sa  place,  mais  seulement  pour  quinze  jours. 
Grenoble,  Lyon,  etc.,  sont  maintenant  en  première  ligne  sur  l'itinéraire 
de  la  vaillante  petite  armée,  dans  laquelle  Seligmann  tient  son  rang  avec 
lionneur  et  provoque  partout  les  applaudi;.scments  du  public. 

,(,*,  Nous  empruntons  au  Temps  l'entro-filels  suivant  qui  concerne  une 
œuvre  nouvelle  de  notre  excellent  pianiste  Louis  Lacombe  :  «  On  a 
chanté  à  Nantes,  le  31  janvier  dernier,  au  concert  des  Beaux-Aris,  une 
composition  de  M.  Lacombe,  dont  les  journaux  de  la  localité  font  le  plus 
bel  éloge.  L'Orphéon  nantais,  écrit-on  dans  l'Espérance  du  peuple,  a  fait 
ressortir  hier  toute  la  beauté  d'un  chœur  inédit,  sérénaJe  du  plus  déli- 
cieux effet,  vrai  chef-d'œuvre  de  Louis  Lacombe,  le  grand  pianiste  com- 
positeur.» — Cette  fraîche  production,  exécutée  de  nouveau  il  y  a  quel- 
ques jours  au  second  concert  de  Sivori,  y  a  obtenu  un  éclatant  succès. 

„,%  Mlle    Laura    Harris,    la    gracieuse   cantatrice  du    théâtre  Italien, 
vient  de  faire  applaudir  son  charmant  talent  à  la  Société  de  la  Grande- 
Harmonie  de  Roubaix,  où  elle  a  chanté  le  10  février,  avec  le  succès  qui» 
la   suit  partout,  la  romance  do  Marin,   l'air  de  Linda,  et  la  valse  de 
Roméo . 

^*»  D.  Magnus,  noire  excellent  pianiste  compositeur,  s'est  fait  entendre 
avec  un  très-grand  succès  au  splendide  concert  donné  par  le  Casino  de 
Gand,  le  22  février;  il  a  exécuté  le  concerto  en  ré  mineur  de  Men- 
delssohn, et  plusieurs  de  .■■es  propres  compositions  :  Slecple-chase-galop 
et  caprice  sur  les  Ilujuenots,  qui  ont  été  très-applaudis  —  Nous  avons 
déjà  dit  et  nous  rappelons  aux  amateurs  de  bonne  mu.sique  que  le  con- 
cert annuel  de  D.  Magnus  est  fixé  au  14  mars,  à  la  salle  Pleyel. 

^•^  Voici  le  programme  du  dix-huitième  concert  populaire  de  musique 
classique  qui  sera  donné  aujourd'hui  à  2  heures,  au  cirque  Napoléon, 
sous  la  direction  de  J.  Pasdeloup  :  1-  Jupiter,  symphonie  de  Mozart  (alle- 
gro, andante,  menuet,  finale)  ;  —  2°  hymne  de  Haydn,  par  tous  les  ins- 
truments à  cordes;  —  3°  ouverture  de  la  Grotte  de  Fingal  de  Mendelssohn; 
—  1°  huitième  concerto  pour  violon  de  Spohr,  exécuté  par  Mme  Norman- 
Neruda;  —  5'  deuxième  partie  de  Romeo  et  Juliette  de  Berlioz. 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 


■>**  A  l'occasion  des  jours  gras,  le  théâtre  impérial  de  l'Opéra  a  donné 
quatre  représentations  consécutives.  Dimanche,  Robert  le  Diable;  Mlle  Mau- 
duit  y  a  chanté  admirablement  le  rôle  d'Alice  et  elle  y  a  reçu  les  com- 
pliments du  premier  chambellan  de  l'Empereur.  —  Lundi  et  mercredi, 
Guillaume  Tell,  et  le  mardi  gras,  la  Favorite  et  le  Marché  des  Innocents, 
spectacle  qu'on  a  répété  vendredi.  —  Pour  demain  lundi,  on  annonce 
l'Africaine. 

^"^^  Aujourd'hui  et  mardi,  répétitions  générales  à^Hamlet,  dont  la  pre- 
mière représentation  est  annoncée  définitivement  pour  vendredi  6  mars. 

5^*^  Mlle  Mauduit,  de  l'Opéra,  a  été  dimanche  l'objet  d'augustes  félici- 
tations après  la  messe  de  la  chapelle  des  Tuileries,  où  la  jeune  artiste  a 
chanté  admirablement  un  Benedictus  d'Auber. 

»*;^  La  Part  du  Diable,  dont  la  reprise  est  prochaine  à  l'Opéra-Comique, 
sera  ainsi  distribuée  :  Léon  Achard  (Raphaël),  Mlle  Brunet-Lafleur 
(Carlo),  Mlle  Bélia  (Casilda),  Mlle  Révilly  (la  reine),  M.  Gaillard  (le  roi), 
M.  PriUeux  (Gil  Vargas),  etc. 

^*j^  Quoique  l'engagement  de  Capoul  eût  encore  deux  ans  à  courir, 
le  théâtre  de  l'Opéra-Comique  vient,  à  la  suite  du  grand  succès  qu'il  a 
obtenu  dans  Vn  Premier  Jour  de  bonheur,  de  le  renouveler  pour  cinq  ans 
p.  des  conditions  très- avantageuses  pour  le  jeune  ténor. 


Uh-  PARIS 


71 


*♦*  L'engagement  qui  liait  encore  jusqu'au  I"  janvier  1870  Monlau- 
bry  au  tliéâtrc  de  l'Opéra-Comiquo  vient  d'être  résilié  d'un  commun  ac- 
cord, moyennant  le  paiement  du  dédit  de  30,000  francs  stipulé  au  contrat 
et  qui  ont  été  comptés  au  célèbre  ténor.  C'est  le  16  décembre  1838  que 
M.  Montaubry,  qui  quittait  le  théâtre  delà  Monnaie,  à  Bruxelles,  fit  son 
débutau  théilre  de  l'Opéra-Comiqiie  dans  l'opéra  les  Trois  Nicolas.ll  en 
était  donc  depuis  dix  ans  le  pensionnaire. 

^*:j(.  Adelina  Patti  a  chanté  deux  fois  de  suite  cette  semaine  :  lundi 
dans  la  deuxième  représentation  de  Don  Giovanni,  et  mardi  dans  il 
Barbiere.  —  Une  lulte  de  bravos  et  de  bouquets  s'est  établie  entre 
les  fanatiques  de  Mlle  Patti  et  de  Mlle  Krauss  dans  l'opéra  de  Mozart. 
Les  bouquets  pleuvaient  comme  grêle;  une  couronne  au  feuillage  d'or 
est  même  tombée  aux  pieds  de  cette  dernière  et  a  été  gracieusement  pla- 
cée sur  sa  tête  par  la  charmante  Mlle  Harris.  ---  A  la  leçon  de  musique 
du  Barbiere,  Adelina  Pat.i  a  chanté  un  boléro  très-brillant  tiré  de  l'opéra 
/  Batavi,  de  Mme  Tarbé  des  Sablons,  représenté  il  y  a  quatre  ans  à  Flo- 
rence, et  dont  les  principaux  rôles  furent  créés  par  les  époux  Tiberini. 
La  jeune  diva  en  a  dit  les  vocalises,  et  surtout  le  trait  final  d'une  diffi- 
culté inouïe,  avec  une  aisance  et  un  éclat  merveilleux.  A  la  demande 
générale  du  public,  elle  a  du  en  répéter  le  deuxième  couplet  L'auteur, 
Mme  Tarbé,  lui  en  a  témoigné  toute  sa  satisfaction  par  le  don  d'un  bra- 
celet de  grand  prix. 

»**  Jeudi,  mie  Harris  a  chanté  le  rôle  de  la  Lucia,  un  de  ceux  dans 
lesquels  elle  fait  le  mieux  apprécier  son  talent.  —  Samedi,  c'était  le  tour 
de  Mlle  Krauss  qui  s'est  rriontrée  très-dramatique  dans  le  rôle  de 
Lucrezia  Borgia  ;  celui  d'Alfonso  est  un  des  meilleurs  de  Steller. 

^*^  On  annonce  pour  dimanche  prochain,  8  mars,  au  théâtre 
Italien,  une  représentation  extraordinaire,  organisée  par  la  comtesse 
douairière  de  Tascher  au  profit  de  l'œuvre  de  Saint-Joseph.  On  y 
jouera,  pour  la  première  et  la  dernière  fois  de  la  saison.  Il  Trovaiore, 
avec  Mlle  Patti  dans  le  rôle  de  Léonora,  Mlle  Grossi,  MM.  Nicolini, 
Verger  et  Agnesi.  —  Le  prix  des  places  sera  doublé  pour  cette  soirée, 
qui  sera  véritablement  extraordinaire. 

»%  Si  l'on  en  croit  les  bruits  de  coulisses,  la  saison  des  Italiens  se  ter- 
minerait par  Piceolino,  sujet  emprunté  à  la  pièce  donnée  par  V.  Sardou 
au  Gymnase,  dont  Mme  de  Grandval  a  composé  la  musique;  Piceolino 
viendrait  après  Giovanna  d'.irco. —  Il  est  au'Si  question  de  Stella  d'Amalfi, 
opéra  en  trois  actes  du  prince  Poniatowski,  dont  le  principal  rôle  chanté 
serait  interprété  par  Mme  Tiberini,  celui  de  l'héroïne,  comme  la  Fenella, 
de  la  Muette,  étant  un  rôle  mimé. 

^%  Mardi  prochain,  selon  toute  apparence,  Mathilda  di  Shabran  nous 
fera  connaître  les  époux  Tiberini. 

t*.jg  Agnesi  n'a  pas  renouvelé  son  engagement  pour  la  prochaine  sai- 
son au  théâtre  Italien.  On  regrettera  certainement  la  belle  voix  et  le 
talent  consciencieux  de  cet  artiste. 

,f*,j  Adelina  Patti  est  partie  hier  pour  Lille  où  elle  donnera  deux  re- 
présentations. La  première,  demain  lundi,  se  composera  de  la  Lucia;  la 
deuxième  sera  consacrée  à  Faust,  dans  lequel  elle  chantera  en  français 
le  rôle  de  Marguerite. 

^*,f  Le  célèbre  ténor  Fraschini  est  en  ce  moment  à  Paris. 

,*;(:  On  parle  de  la  création  prochaine  d'un  théâtre  qui  porterait  le  nom 
de  Grélry  et  dont  le  répertoire  se  composerait  des  ouvrages  de  l'ancien 
Opéra-Comique,  aujourd'hui  tombés  dans  le  domaine  public. 

**^  Noire  collaborateur,  M.  Arthur  Pougin,  vient  de  découvrir  un 
opéra  en  quatre  actes  inédit,  la  Princesse  de  Babijlone,  de  Salieri,  Pélève 
et  l'émule  de  Gluck. 

;^%  M.  Duprat  vient  de  traiter  avec  les  théâtres  de  Marseille  et  de 
Toulon  pour  la  représentation  de  son  opéra  Pétrarque,  qu'il  avait  d'a- 
bord espéré  faire  jouer  à  Paris. 

^*^  La  Grande-Duchesse  vient  d'être  jouée  à  Caen  et  elle  y  a  rencontré 
le  succès  qui  l'accueille  partout.  C'est  l'excellente  Géraldine  et  Carrier 
qui  interprétaient  les  principaux  rôles,  dans  lesquels  ils  avaient  si  bien 
réussi  sur  plusieurs  autres  théâtres. 

***  Notre  célèbre  ténor  Roger  rtous  paraît  bien  décidément  perdu  pour 
la  France.  Les  triomphes  qu'il  rencontre  à  chaque  pas  en  Allemagne  lui 
ont  fait  prendre  ce  pays  en  afl'eciion  ;  et  il  exprime,  dans  une  lettre 
adressée  à  un  journaliste  parisien  de  ses  amis,  l'intention  de  s'y  fixer.  Il 
est  en  ce  moment  à  Pesth  ;  il  devait  y  donner  quatre  représentations,  il  en 
a  déjà  donné  dix.  Dans  les  Huguenots,  Lucie,  la  Dame  Blanche,  Fra- 
Diavolo  et  la  Juiue,  on  l'a  fêté  avec  un  enthousiasme  sans  bornes;  des 
bravos  chaleureux,  des  rappels,  des  couronnes  lui  ont  été  prodigués.  Nous 
comprenons  que  la  terre  germanique  lui  semble  hospitalière. 

**^  Nous  avons  annoncé  que  M.  Adolphe  Blanc,  second  chef  d'orchestre 
au  théâtre  Lyrique,  a  cru  devoir  donner  sa  démission.  Il  a  reçu  à  cette 
occasion  de  AI.  Carvalho  une  lettre  qui  le  remercie  en  termes  flatteurs 
I»  du  concours  artistique  et  dévoué  »  prêté  par  lui  à  son  théâtre.  Par  son 


double  talent  de  violoniste  et  de  compositeur  et  en  raison  de  l'expérience 
spéciale  qu'il  a  acquise,  M.  Blanc  est  appelé  à  occuper  un  poste  impor- 
tant et  il  se  recommande  tout  naturellement  aux  directeurs  do  théâtre 
et  aux  présidents  de  sociétés  philharmoniques. 

^*;t  La  recelte  du  dernier   bal  de  samedi  de  l'Opéra   s'est  élevée  au 
chifl're  de  20,000  francs. —  Celle  do  mardi  a  encore  dépassé  ce  chiffre. 


NOUVELLES  DIVERSES. 

n,*^  Rossini  a  atteint,  hier  29,  sa  soixante-seizième  année.  L'état  d'indis- 
position du  maestro  ne  lui  permet  pas  de  célébrer  cet  anniversaire  comme 
il  le  faisait  habituellement.  Une  quinzaine  d'amis  intimes  ont  seuls  passé 
celte  soirée  chez  lui. 

***  M.  Eug.  Tarbé,  le  critique  musical  du  journal  le  Figaro,  vient 
d'adresser  sa  démission  à  M.  de  Villemessant. 

,j',t  L'éditeur  E.  Bock,  de  la  maison  Bote  et  Bock,  de  Berlin,  est  à 
Paris  depuis  quelques  jours,  et  il  s'est  rendu  acquéreur  pour  l'Allemagne 
de  divers  ouvrages  du  maestro  Offcnbach. 

■j^*^  En  raison  de  l'importance  exceptionnelle  du  grand  orgue  construit 
pour  la  cathédrale  de  Paris  par  la  maison  CavaiUé-CoU,  dont  nous  avons 
annoncé  la  prochaine  inauguration,  M.  le  ministre  des  .cultes  vient  de 
nommer,  pour  en  vérifier  et  recevoir  les  travaux,  une  commission  dans 
laquelle  l'élément  musical  est  représenté  pur  Rossini,  Auher  et  Ambroise 
Thomas.  Se  feront  entendre  dans  cette  solennité  fixée  au  vendredi  6  mars, 
à  8  heures  du  soir  :  MM.  Saint-Saëns,  organiste  de  la  Madeleine,  Franck 
aîné,  organiste  de  Sainte-Clotilde  ;  Durand  (Saint-Vincent  de  Paul)  ;  Chau- 
vet  (Saint-Merry)  ;  Loret  (Saint-Louis  d'Antin)  ;  Sergent  (Notre-Dame)  ; 
Guilmant,  de  Boulogne-sur-Mer,  et  Widor  de  Lyon.— Parmi  les  étrangers 
de  distinclion  invités  à  prendre  part  à  la  réception  de  ce  magnifique 
instrument,  nous  remarquons  les  noms  de  Lemmens,  professeur  d'orgue 
aux  Conservatoires  de  Bruxelles  et  de  Londres;  de  MM.  de  Vroye  et  Van 
Ellewick,  président  et  secrétaire  du  Congrès  international  de  musique 
sacrée  de  Louvain. 

^*^  Les  journaux  américains  assurent  que  le  ténor  italien  Scoffino 
vient  de  gagner  aux  Etats-Unis,  et  avec  un  seul  billet  de  la  loterie  des 
Minières  du  Massachussets,  la  somme  de  200,000  dollars,  soit  un  peu  plus 
d'un  million  de  francs. 

^*jf  Une  grande  édition,  une  édition-modèle  des  chefs-d'œuvre  lyriques 
de  Gluck,  se  prépare  en  France,  d'après  les  partitions  autographes,  les 
notes  et  préfaces  historiques  laissées  par  l'immortel  compositeur  dans  les 
archives  de  l'Académie  impériale  de  musique.  On  sait  que  le  grand  Opéra 
de  Paris  a  vu  naître  les  partitions  d'Iphigénie  en  Aulide  et  en  Tauride, 
celles  à'Armide,  et  d'Echo  et  Warcisse. 

^*«  M.  G.  Henry  Brochon,  ancien  maire  de  Bordeaux,  président  de 
la  Société  Sainte-Cécile  et  du  Cercle  philharmonique,  vient  d'accepter  la 
dédicace  de  la  Symphonie-fantasia  de  M.  Poil  da  Silva,  lauréat  de  la 
Société  Sainte-Cécile.  Le  larghetto  de  cette  symphonie,  qu'on  dit  être 
des  plus  remarquables,  doit  être  exécuté  au  prochain  festival  de  la  So- 
ciété. 

^*^  M.  A.  Ehvart  continuera  le  9  mars,  au  lieu  du  2  du  même  mois, 
à  la  maiiie  du  Prince-Eugène  (onzième  arrondissement),  à  1  heure  et 
demie,  son  cours  d'enseignement  musical  pour  les  jeunes  filles.  On 
s'inscrit  au  secrétariat  de  la  mairie. 

***  Les  arts  libéraux  seront  représentés  à  l'Exposition  maritime  inter- 
nationale du  Havre.  Les  éditions  musicales  et  les  instruments  de  musique, 
notamment,  sont  appelés  à  figurer  dans  la  septième  section.  S'adresser 
pour  les  renseignements  à  M.  Tharel,  délégué  de  la  direction  à  Paris, 
3,  rue  Vintimille. 

„*f,  La  deuxième  des  six  livraisons  formant  la  publication  des  œuvres 
choisies  d'A.  Ehvart  a  paru  hier  chez  les  éditeurs  Brandus  et  Dufour. 
—  Cette  intéressante  publication  contient  trois  quatuors  pour  violon, 
alto  et  violoncelle,  et  un  quatuor  avec  piano  principal.—  On  s'inscrit,  .sans 
rien  payer  d'avance,  chez  les  éditeurs,  103,  rue  de  Richelieu.  —  Prix 
de  chaque  petite  partition  des  quatuors  :  6  francs. 

,j:*^  M.  Paul  Mousskoff,  pianiste  bien  connu  de  toute  la  Russie,  et 
qui  dirige  à  Paris  l'instruction  musicale  de  son  fils,  Nicolas  MousskofT, 
violoncelliste  et  élève  du  Conservatoire,  vient  d'être  cruellement  frappé 
dans  ses  plus  chères  affections.  11  a  perdu  sa  femme,  Mme  Agrippine, 
née  Arioli,  décédée  le  19  février,  après  une  longue  et  douloureuse 
maladie  de  onze  mois.  Celte  mort  imprévue  arrête  les  débuts  de 
M.  P.  Mousskoff,  dont  les  concerts  étaient  prochains. 

:^%  S.  A.  la  Tsarevna  de  Géorgie,  Anna  Pwlovna,  vient  de  mourir  à 
Moscou  a  l'âge  de  70  ans.  Elle  avait  cultivé  avec  un  égal  succès  la  litté- 
rature et  les  arts;  Meyerbeer  tenait  ses  compositions  musicales  en 
flatteuse  estime. 


72 


KEVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE  DE  PAKIS. 


ÉTRANGER 


»*,  Londres.—  Le  grand  festival  triennal  en  l'honneur  de  Hoendel  est 
fixé  au  15  juin  prochain,  et  durera  jusqu'au  19.  11  aura  lieu  au  Crystal 
Palare,  sous  la  direction  de  M.  Costa. 

^*^  Mons.  —  On  vient  de  jouer  l'Etoile  du  Nord,  à  la  grande  satis- 
faction de  notre  public,  qui  a  fait  au  chef-d'œuvre  de  Meyerbeer  le  plus 
enthousiaste  accueil.  MmeMassy,  la  cantatrice  aimée  des  Montois,  a  supé- 
rieurement rendu  le  rôle  de  Catherine.  De  sincères  éloges  sont  dus  éga- 
lement à  la  basse  AIzien,  et  au  baryton  Fronty,  très-remarquable  comme 
comédien  dans  le  l'ôlo  de  Gritzonko. 

«*,  Amsterdam.  —  Rubinstein  a  joué,  le  1-i  février,  à  un  concert  de 
la  société  Félix  Meritis;  il  y  a  rencontré  un  de  ces  triomphes  auxquel.»  il 
est  depuis  longtemps  habitué. 

.*^  Berlin.  —  Die  Fabier  (les  Fabius),  l'opéra  en  cinq  actes  de  Lan- 
gert,  qui  vient  d'être  représenté  avec  tant  de  succès  à  l'Opéra  royal,  n'est 
point  un  ouvrage  nouveau.  Nos  lecteurs  se  souviennent  sans  doute 
qu'il  a  été  représenté  l'année  dernière  à  Cobourg,  puis,  sur  l'invitation 
de  l'intendant  général  des  théâtres  prussiens,  M.  de  Hiilsen,  remanié  par 
l'auteur  en  vue  de  la  représentation  sur  une  scène  plus  vaste  et  d'un 
public  plus  sévère.  Le  sujet  en  a  été  emprunté  par  M.  G.  de  Meyern 
à  un  drame  classique  de  Gustave  Freytag,  tiré  lui-même  de  l'histoire 
romaine.  Làngert  a  fait,  depuis  son  opéra  la  Malédiction  du  Barde,  de 
grands  progrès  du  côté  du  sentiment  dramatique;  on  sent,  dans  les  Fabius, 
une  largeur  de  conception,  une  sûreté  de  main  qui  révèlent  un  maître. 
La  partie  sentimentale  (les  amours  de  la  jeune  patricienne  Fabia  et  du 
plébéien  Iciliu.s)  est  aussi  très-heureusement  traitée,  avec  une  simplicité 
tout  antique.  — On  a  particulièrement  applaudi,  à  la  l"  représentation, 
le  finale  du  premier  acte,  le  duo  d'amour  du  second,  les  saturnales  et  la 
marche  au  troisième,  le  quatrième  acte  tout  entier,  enfin  un  autre  duo 
d'amour  au  cinquième,  ainsi  que  le  dernier  finale.  Mlle  Griin  (Fabia), 
Woworsky  (Icilius),  Betz  (i\Iarcus),  se  sont  partagé  les  applaudissements. 
A  la  seconde  représentation,  le  succès  est  allé  encore  en  croissant.  Après 
le  quatrième  acte,  Langert  a  dû  se  rendre  aux  appels  réit('rés  d'une 
foule  enthousiaste  et  paraître  sur  la  scène.  Betz,  l'excellent  baryton,  a 
été  également  l'objet  d'une  ovation  très-méritée. —  M.  de  Hiilsen,  en  pré- 
sence d'un  triomphe  aussi  décisif,  a  demandé  à  Langert  un  nouvel 
opéra,  mais  un  sujet  plus  moderne. 

^*^  Hambourg.  ~~  La  troupe  italienne  Lorini,  du  théâtre  Victoria  de 
Berlin,  donne  en  ce  moment  des  représentations  ici.  Elle  les  a  inaugu- 
rées avec  la  Traviata,  Rigolelto  et  Norma,  et  de  la  manière  la  plus  heu- 
reuse. Grand  succès  pour  la  Sarolta  et  pour  le  baryton  Padilla,  le  meil- 
leur chanteur  de  la  troupe. 

^•^  Barcelone  —  Grâce  à  Dinorah,  le  Liceo  fait  de  brillantes  et  fruc- 
tueuses soirées.  Mlle  Vitali  est  toujours  aussi  charmante  et  aussi  fêtée. 
Son  jeu  n'est  pas  moins  remarquable  que  son  chant  ;  dans  la  scène  finale 
surtout,  elle  déploie  un  talent  dramatique  qui  ne  s'était  pas  encore  révélé 
en  elle  à  un  si  haut  degré. 

,♦»  Milan.  —  Pietro  da  Padova,  opéra  nouveau  dû  au  maestro  Eitore 
Fiori,  a  été  donné  avec  succès  au  Carcano.  On  compte  sur  un  bon  nom- 
bre de  représentations.  —  A  la  Scala,  on  fonde  de  grandes  espérances 
sur  Mefistofek,  poëme  et  musique  d'Arrigo  Boito,  qui  sera  représenté  au 
commencement  de  mars.  —  Mlle  Ostawa  Tornquist,  la  gracieuse  canta- 
trice qui  a  fait  récemment  un  si  heureux  début  dans  Rigoktto,  change, 
pour  suivre  la  carrière  italienne,  son  nom  en  celui  de  Torriani. 

^*^Varsovie. —  Mlle  Artôt,  qui  va  nous  quitter,  avait  choisi  pour  son  bé- 
néfice la  Favorite.  Malgré  l'absence  du  vice-roi  et  de  plusieurs  notabili- 
tés de  l'aristocratie,  la  salle  était  comble.  La  célèbre  cantatrice  s'est  sur- 
passée dans  le  chef-d'œuvre  deDonizetti  et  l'enthousiasme  a  éclaté  par  des 
bravos  prolongés  et  des  rappels  sans  fin.  Outre  la  somme  de  sept  mille 
francs  qu'a  produite  le  bénéfice,  Mlle  Artôt  a  reçu  en  don  un  magnifique 
bracelet  de  turquoises  et  de  brillants  de  plus  de  3,000  francs;  il  était  accom- 
pagné d'un  bouquet  des  fleurs  les  plus  rares  qui  avait  coûté  100  rou- 
bles argent  (3S0  fr.) 

^*^  Saint-Pétersbourg.  —  Les  Huguenots,  donnés  pour  la  dernière  re- 
présentation de  Pauline  Lucca,  et  au  bénéfice  de  Mario,  ont  été  pour  les 
deux  éminents  artistes  l'occasion  d'un  éclatant  succès.  Mario  était  ce 
soir-là  en  pleine  possession  de  ses  moyens  ;  quant  à  Pauline  Lucca,  elle 
ne  s'était  jamais  montrée  plus  passionnée  et  plus  dramatique.  —  Elle  est 
partie  pour  Berlin,  emportant  de  l'admiration  des  dilettantes  russes, 
pour  un  mois  à  peu  près  de  séjour,  une  preuve  sonnante,  c'est-à-dire 
25,000  roubles  représentant  80,000  francs,  outre  de  riches  cadeaux. 
—  Mme  Volpini  est  rengagée  pour  trois  mois,  à  de  belles  conditions 
aussi  :  60,000  francs  et  un  bénéfice.  Leurs  Majestés  lui  ont  fait 
remettre  une  étoile  d'or  garnie  de  quarante  magnifiques  brillants.  L'im- 
présario Merelli  est  venu  aussi  l'engager  pour  quelques  représentations  à 


Varsovie.  —  Crispino  e  la  Cmnare  vient  d'être  donné  au  théâtre  Italien. 
L'un  des  auteurs,  F.  Ricci,  qui  était  présent,  a  été  rappelé  trois  fois.  On 
a  fait  également  de  chaleureuses  ovations  à  Mme  Volpini,  à  Zucchini  et  à 
Calzolari. 


CONCERTS  ET  AUDITIONS  MUSICALES  ANNONCÉS. 

Salons  Pleyel-Wolif,  lundi  2  mars:  concert  de  Mlle  Dona  de  Potier, 
élève  de  Liszt,  avec  le  concours  de  Mlle  Castri  et  de  MM.  Telesinsky, 
Teysson  et  Audran. 

Salons  Pleyel-Wolff,  mardi  3  mars  :  quatrième  séance  populaire  de  mu- 
sique de  chambre  de  MM.  Ch.  Lamoureux,  Colblain,  Adam  et 
Poëncet . 

Salle  Herz,  vendredi  G  mars  :  grand  concert  donné  par  Ch.  de  Bcriot, 
avec  le  concours  de  Mme  Monbelli  et  de  M\I.  Géraldy,  Pagans ,  Si- 
ghicelli,  Loys  et  Maton. 

Salons  Pleyel-Wolff,  mardi  10  mars:  concert  de  G.  Jacobi,  premier  vio- 
lon de  l'Opéra,  avec  le  concours  de  Mlle  Bloch  et  de  MM.  Colin  et 
Caron,  de  l'Opéra,  et  de  Mlle  Duval,  de  l'Opéra-Comique. 

Salle  Herz,  mercredi  \\  avril  :  deuxième  soirée  de  musique  de  chambre 
de  MM.  Maurin  ,  Colblain,  Mas  et  Dcmunck,  avec  le  concours  de 
M.  C.  Saint-Saëns.  —  Pour  la  première  fois,  quatuor  de  Schumann. 


s.  DDFOUR. 


Chez  G.  BRANDVS  et  S.  DUFOVR,  éditeurs,  103,  rue  de  RicJielieu. 


SOUVEiMR  DU    CASINO  DE  NICE 

Polka-mazurka  pour  le  piano,  composée  par 

Charles  Muller 

Chef  d'orchestre  à  Nice. 
Prix:  3  fr.        Ornée  du  dessin  du  Casino  de  Nice.        Prii:  5  fr. 

TROIS     BAGATELLES 


Prix  :  7  fr.  50. 


Pour  le  pi  ano  ,  par 

M.  Espargul 


Prix  :  7  fr.  50. 


Fantaisie  de  concert  sur  Robert  le  Diable 

Composée  pour  le  violon  par  D.  Alard, 

Arrangée  pour  la  flûte  avec  accompagnement  de  piano, 

Op.  54.  Par  J.  DENEUX  10  fr. 


CARTES-PORTRAITS,  AVEC  MUSIQUE,  PHOTOGRAPHIÉES 

Cette  nouvelle  collection  se  recommande  particulièrement  par  ses  por- 
traits tout  artistiques  et  d'une  grande  ressemblance;  par  la  perfection  de 
la  musique  photographiée,  dont  les  types,  quoique  aussi  réduits  que  pos- 
sible, sont  cependant  très-lisibles;  enfin  par  un  format  exceptionnel  qui 
la  rend  vraiment  portative.  Rien  de  plus  commode,  en  effet,  que  de 
pouvoir  placer  dans  sa  poche  un  étui  renfermant  vingt  à  trente  cartes- 
musique;  rien  de  plus  gracieux  à  offrir  comme  cadeau. 

N.  B.  —  La  collection  s'augmentera  successivement  et  de  façon  à  offrir 
le  choix  le  plus  varié. 


IHPBIMEKIE  CEKTBftLE   DES  CHEHINS  DE  FEB*  —  A.  CHAIX   ET  C,  BUE  BEBGÊBE,  30,  A  PABI5. 


BUREAUX    A    PARIS  :    BOULEVARD   DES   ITALIENS,  1. 


35°  Année. 


N'  10. 


8  Mars  1868. 


ON  S'ABONNE  : 

Danft  les  DépartomenU  et  à  l'Étranger, 

chez  tous  les  Uarchonds  de  Uusique,  Us  Libraires» 

«t  aux  Durcîaux  dei  Messageries  et  des  Postes. 


REVUE 


PRIX    DE, L'ABONNEMENT: 

Paris. 54   r.  par  a 

Dûpartcmcnts,  Belgique  et  Suisse....     liO  i       id. 


te  Journal  parait  te  Dimanche» 


GAZETTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


SOMMAIRE.  —  Histoire  de  la  musique   instrumentale  {&'  article),   par  Han- 
rice  Cristal.  —   Une  séance   de  musique  intime,   par  Ii.  Kreutzer.  — 

Ministère  de  la  maison  de  l'Empereur  et  des  beaux-arts,  direction  générale  des 
théâtres.  —  Nécrologie  :  Edouard  Monnais,  par  Fétis  père.  —  Revue  des 
théâtres,  par  l>.  A.  D.  Sniiit.Yies.  —  Concerts  et  auditions  musicales 
de  la  semaine.  —  Nouvelles  des  théâtres  lyriques.  —  Nouvelles  diverses.  — 
Concerts  et  auditions  musicales  annoncés.  —  Annonces. 


mSTOUlE  DE  U  MUSIQUE  INSTRUMENTALE 

(8«  article)  (1). 

Cependant  la  réputation  de  Bocchenni,  comme  compositeur  et 
comme  virtuose.,  grandissait.  Sur  les  éloges  qu'on  lui  en  fit,  l'am- 
bassadeur d'Espagne  à  Paris  voulut  l'entendre,  ainsi  que  son  com- 
pagnon de  voyage,  et,  charmé  k  son  tour,  les  pressa  tous  les 
deux  de  se  rendre  à  Madrid,  les  assurant  de  l'accueil  le  plus  gra- 
cieux de  la  part  du  prince  des  Asturies,  grand  amateur  de  musi- 
que, qui  régna  plus  tard  sous  le  nom  de  Charles  IV. 

Séduit  par  les  espérances  de  faveur  et  de  fortune  que  lui  don- 
nait son  nouveau  protecteur,  charmé  d'une  proposition  qui  sem- 
blait lui  ouvrir  un  splehdide  avenir,  Boccherini  partit  avec  son 
ami  pour  la  capitale  de  l'Espagne.  Manfredi  n'était  venu  à  Ma- 
drid que  dans  le  dessein  d'amasser  des  richesses.  Il  ne  négligea 
rien  de  ce  qui  lui  en  pouvait  faire  acquérir.  Boccherini ,  plus  ar- 
tiste, se  préoccupa  plus  de  sa  gloire  que  du  soin  de  thésauriser. 

Son  début  en  Espagne  ne  fut  point  aussi  heureux  qu'il  l'avait 
espéré.  Il  avait  apporté  avec  lui  son  troisième  livre  de  trios,  Per 
la  corte  de  Madrid,  qu'il  s'empressa  de  dédier  au  prince  des  As- 
turies. Immédiatement  après  il  composa  un  concerto ,  A  piu  stro- 
menti  obligati.  Quel  effet  produisirent  ces  œuvres  sur  l'esprit  du 
roi  et  de  son  fils  aîné  en  faveur  de  Boccherini,  on  ne  saurait  le 
dire  exactement;  mais  il  est  hors  de  doute  que  le  grand  compo- 
siteur n'obtint  pas  les  distinctions  promises  à  son  mérite  par 
l'ambassadeur  d'Espagne. 

L'intérêt  dont  le  roi   et  l'héritier  présomptif  l'honorèrent   est 

(I)  Voir  les  li"'  38,  40,  42,  4i,  -JC  de  l'année  1867,  cl  les  n""  3  et  9. 


fort  problématique.  Ce  fut  l'infant  don  Louis,  frère  de  Charles  III, 
qui  répara  cette  injustice  et  lui  seul,  naturellement,  qui  récolta  la 
reconnaissance.  On  remarque  en  effet,  dès  son  arrivée  à  Madrid, 
que  Boccherini  écrivit  pour  son  protecteur  six  quartetti  qu'il  lui 
dédia  en  prenant  le  titre  de  «  compositore  e  virtuoso  di  caméra  di 
S.  A.  R.  don  Luigi  infante  d'Espagnia.  »  Tous  les  manuscrits  de 
l'auteur  reproduisent  invariablement,  sur  leur  feuille  de  tête,  cette 
qualification  unique ,  sans  qu'il  y  soit  fait  mention  d'autres  per- 
sonnages jusqu'à  la  mort  de  l'infant,  arrivée  le  7  août  1785.  A 
partir  de  cette  époque,  au  contraire,  on  voit  Boccherini  étaler 
avec  une  sorte  de  complaisance  les  différents  titres  dont  il  était 
revêtu,  et  les  noms  de  ses  protecteurs  nouveaux. 

Dès  1787,  Boccherini  travailla  à  peu  près  exclusivement  pour 
Frédéric-Guillaume  II,  roi  de  Prusse,  et  ensuite  pour  Lucien  Bo- 
naparte ;  mais  il  avait  trop  la  conscience  de  sa  valeur,  il  aimait 
trop  la  gloire  pour  permettre  qu'on  enfouît  dans  la  poudre  d'une 
bibliothèque  même  royale  les  plus  belles  inspirations  de  sa  muse. 
Il  voulait  que  ses  ouvrages  fussent  publiés,  répandus,  et  ce  qui  le 
prouve  c'est  qu'en  composant  pour  l'usage  particulier,  soit  de 
l'infant  don  Louis,  soit  de  Frédéric-Guillaume  II,  soit  de  Lucien 
Bonaparte,  il  envoyait  indistinctement  copie  de  toutes  ses  œuvres 
aux  éditeurs  étrangers  qui  possédaient  sa  confiance. 

Le  peu  de  bonheur  que  l'illustre  maître  devait  goûter  en  Espa- 
gne fut  brisé  par  la  mort  de  l'infant  don  Louis.  Tant  que  vécut 
son  protecteur,  Boccherini  fut  à  l'abri  du  besoin.  Il  connut  les 
soucis  d'une  existence  précaire  dès  que  le  prince  artiste  et  géné- 
reux fut  mort.  La  jalousie  de  Brunetti  lui  avait  nui  d'ailleurs  au- 
près du  roi  et  de  l'héritier  présomptif,  dès  les  premiers  temps  de 
son  arrivée  à  Madrid. 

Ce  Brunetti  était  un  violoniste  non  sans  mérite,  et  chef  de  la 
musique  du  prince  des  Asturies.  Il  était  compositeur  agréable  de 
musique  frivole,  et  il  n'avait  publié  que  des  ouvrages  médiocres, 
lorsqu'à  Madrid  son  talent  se  mûrit  et  plus  tard  même  se  trans- 
forma, en  sorte  que  ses  dernières  œuvres  méritent  de  réels  éloges. 
Tout  porte  à  croire  que  l'effet  produit  sur  lui  par  les  compositions 
de  Boccherini  et  les  conseils  de  ce  grand  musicien  exercèrent  la 
plus  heureuse  influence  sur  ses  inspirations.  Néanmoins  la  jalousie, 
la  crainte  de  se  voir  supplanter  par  un  homme  dont  la  supériorité 
n'était  pas  contestable,  le  désir  de  ne  se  voir  partager  avec  personne 


74 


UEVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


la  faveur  royale,  lui  firent  payer  de  la  plus  noire  ingratitude  les 
services  qu'il  avait  reçus  de  Boccherini. 

Le  compositeur  lucquois  avait  sur  Brunelti  l'avantage  du  génie  : 
mais  ce  dernier,  doué  de  l'esprit  le  plus  raffiné  et  le  plus  adroit, 
prenait  sa  revanche  dans  l'intrigue  ;  souple  et  artificieux,  il  ne 
négligea  rien  pour  lui  aliéner  l'esprit  du  prince.  Le  digne  artiste 
voyait  bien  que  son  élève  employait  toute  son  adresse  à  lui  nuire, 
mais  il  n'avait  pas  l'habileté  nécessaire  pour  déjouer  ses  manœu- 
vres, et  il  crut  qu'il  suffisait  de  mépriser  une  conduite  perverse, 
tandis  qu'il  eût  dû  la  signaler  à  ses  protecteurs  et  la  flétrir  sans 
pitié  dès  les  premiers  instants. 

Le  prince  des  Asturies  ne  marqua  d'abord  qu'une  grande  froi- 
deur pour  Boccherini  et  de  l'indifférence  pour  sa  musique;  mais 
une  circonstance  fortuite  vint  donner  un  éclat  subit  aux  sentiments 
de  mésestime  et  aux  préventions  que  Brunetti  avait  fait  naître 
dans  soi!  esprit.  Don  Louis,  oncle  de  "Charles  IV,  alors  prince  des 
Asturies,  conduisit  un  jour  Boccherini  chez  son  neveu  pour  lui 
faire  entendre  de  nouveaux  quintettes  de  son  maître  favori.  La 
musique  est  placée  sur  les  pupitres.  Charles  prend  dans  la  boîte, 
qui  était  ouverte,  son  archet  et  entame  la  partie  des  premiers  vio- 
lons qu'il  se  réservait  toujours.  Dans  cette  partie  figurait  un  pas- 
sage qui,  pris  isolément,  semblait  d'une  certaine  longueur  et  d'une 
complète  monotonie  :  ut,  si,  ut,  si.  Ces  deux  notes,  rapidement 
coulées,. se  répétaient  constamment.  Le  roi  les  attaque  bravement, 
continue,  poursuit  l'invariable  dessin,  et,  absorbé  par  son  jeu, 
n'écoute  pas  les  accords  ingénieux  introduits  au-dessus  comme 
au-dessous  de  cette  pédale  intérieure.  Bientôt  il  s'impatiente,  puis 
il  ricane,  toujours  en  jouant.  A  la  fin  sa  mauvaise  humeur  prend 
le  dessus  et,  abandonnant  son  violon,  il  se  lève  et  s'écrie  : 

—  Quelle  musique  détestable  !  le  pire  des  élèves  la  ferait  moins 
mauvaise  ! 

Boccherini  était  un  homme  doux,  poli  et  patient;  le  peu  de 
courtoisie  que  le  prince  lui  témoignait  ne  l'avait  jamais  découragé; 
il  savait  d'ailleurs  quel  compte  il  faut  tenir  de  la  faveur  des 
grands,  et  il  n'aurait  jamais  hasardé  une  de  ces  réponses  dont  l'in- 
convenance prend  un  caractère  d'autant  plus  grand  que  le  rang 
de  ceux  à  qui  elle  s'adresse  est  plus  élevé.  Il  se  défendit  donc 
avec  prudence  et  modestie,   mais  non  sans  fermeté  : 

« — Sire,  dit-il,  que  Votre  Majesté  veuille  bien  accorder  quelque 
attention  aux  jeux  qu'exécutent  le  second  violon  et  la  viole,  ainsi 
qu'au  pizzicato  que  le  violoncelle  fait  entendre  en  même  temps. 
Le  trait  dont  l'apparente  monotonie  lui  déplaît  varie  de  carac- 
tère dès  que  les  autres  instruments  se  mêlent  au  discours. 

—  Plaisante  conversation,  répliqua  aigrement  le  roi.  Ut,  si;  ut, 
si,  pendant  une  demi-heure.  C'est  de  la  musique  pour  rire,  ou 
bien  une  ânerie  d'écolier. 

—  Pour  porter  un  semblable  jugement.  Sire,  il  faudrait  être 
musicien.  » 

La  réplique  était  méritée,  mais  elle  était  périlleuse,  et  l'événe- 
ment le  prouva.  La  brutalité  n'était  pas  chose  rare  chez  ce  prince 
qui,  doué  d'une  force  herculéenne,  prenait  plaisir  à  se  mesurer 
avec  des  palefreniers  et  des  portefaix,  et  qui  prétendait  imposer 
sa  loi  aux  ministres  de  son  père,  poursuivant  l'un  l'épée  à  la  main, 
accablant  l'autre  de  soufflets,  et  bâlonnant  lui-même  un  troi- 
sième. On  comprend  quelle  furie  dut  déchaîner  chez  cet  homme 
irascible  et  prévenu  la  réponse  fière  de  Boccherini. 

«  —  Insolent!  s'écria  Charles  IV,  et,  bondissant  de  colère,  il 
saisit  le  maître  par  ses  vêtements,  l'enleva  à  bras  tendu,  le  fit 
passer  en  dehors  d'une  fenêtre  et  le  suspendit  au-dessus  de  l'abîme, 
où  il  l'eût  précipité  sans  l'intervention  de  la  reine. 

—  Sire,  lui  dit-elle,  tout  éplorée  et  pleine  d'effroi,  au  nom  de 
la  religion  et  par  respect  de  vous-même,  n3  tuez  pas  cet  homme  !  » 

Rappelé    à  lui,   le  roi  fit  un  demi-tour  et    rejeta  violemment 


l'artiste  à  l'extrémité  de  l'appartement.  Boccherini,  tout  contu- 
sionné, se  réfugia  dans  une  pièce  voisine,  et  échappa  ainsi 
à  un  retour  de  colère  dont  sans  doute  aucune  intervention  ne 
l'aurait  pu  sauver.  —  Boccherini,  ainsi  méconnu  et  dédaigné,  s'oc- 
cupa de  trouver  hors  de  l'Espagne  un  appréciateur  plus  juste  et 
plus  éclairé.  Parmi  les  souverains  dont  la  musique  faisait  les  dé- 
lices, le  roi  Frédéric-Guillaume  II  se  distinguait  alors  autant  par  sa 
munificence  envers  les  artistes  que  par  son  goût  pasiionné  pour 
le  violoncelle  dont  il  jouait  admirablement.  Boccherini  songea  à 
lui  dédier  un  de  ses  ouvrages,  ce  qu'il  fit  par  l'intermédiaire  de 
l'ambassadeur  de  Prusse  près  la  cour  de  Madrid.  Il  ne  tarda  pas 
à  recevoir  du  roi-virtuose  une  lettre  des  plus  gracieuses, accompa- 
gnée d'une  superbe  tabatière  remplie  de  frédérics  d'or  et  du  di- 
plôme de  compositeur  de  la  chambre  de  Sa  Majesté. 

A  partir  de  ce  jour,  Boccherini  écrivit  exclusivement  pour  le  roi  Fré- 
déric-Guillaume II,  comme  le  témoignent  tous  ses  manuscrits  de- 
puis 1787,  ainsi  que  cette  note  de  son  catalogue  thématique  auto- 
graphe de  la  même  année  :  «  Tutti  le  sequenti  opère  sono  state 
scritte  espressainente  per  S.  M.  il  re  di  Prussia.  » 

MAuniCE  CRISTAL. 
(La  suite  p)iOchai7iement.) 


UNE  SËÂNCE  DE  MUSIQUE  INTIME. 

Peut-être  les  lecteurs  de  la  Gazette  se  souviendront-ils  encore 
d'un  vieux  collaborateur,  alors  que  les  uns  meurent,  et  que  d'au- 
tres, délicats  esprits,  parlent  trop  rarement. 

Ce  bon,  ce  cher,  cet  excellent  Monnais,  ce  charmant  homme, 
si  rapidement  enlevé!...  Mais  il  faut  essuyer  ses  larmes,  et  courir 
aux  vivants  :  c'est  la  vie  ! 

Je  prends  goût  de  plus  en  plus  aux  séances  de  musique  intime. 
On  écoute  tranquillement;  on  peut  échanger  ses  impressions  avec 
celles  de  voisins  intelligents.  Celte  boîte  à  torture  qu'on  appelle 
une  stalle  de  concert  est  une  vraie  souffrance.  Après  trois  heures 
de  supplice,  on  sort  l'esprit  et  les  jambes  tout  endoloris. 

Dernièrement,  nous  étions  à  souhait  chez  M.  Damcke.  J'espérais 
y  voir  Berlioz,  la  tête  ceinte  de  sa  couronne  de  triomphateur... 
Il  était  parti  pour  Monaco,  afin  de  dégeler  un  peu  ses  glaces  de 
Russie,  sous  ce  magnifique  ciel. 

Pour  nous  dédommager,  nous  avions  une  excellente  musique  : 
d'abord  un  duo  de  M.  Damcke  pour  piano  et  violoncelle.  Mme 
Damcke  tenait  le  piano.  Ce  duo  est  charmant;  il  a  été  joué  en  per- 
fection comme  style,  comme  netteté  de  doigts  et  comme  exacti- 
tude. Le  premier  morceau  a  les  nobles  allures  de  toute  oeuvre 
classique  qui  se  présente  devant  un  aréopage  sévère.  L'adagio  of- 
fre un  chant  ininterrompu,  mais  divisé  dans  les  deux  instruments; 
un  chant  plein  de  grâce  scientifique,  ou  plutôt  de  science  gracieuse. 
Comment  concilier  cette  antithèse  ?  Ceux  qui  connaissent  les 
grands  maîtres  me  comprendront.  Puis,  vient  le  finale  où  le  pro- 
fesseur s'en  donne  à  cœur  joie  avec  le  contre -point  renversé  :  pur 
caprice  de  maître.  Mais  cela  est  très-fin,  très-délicat,  très-spirituel, 
et  point  du  tout  savant,  excepté  pour  les  doctes  qui  savent  re- 
trouver la  haute  science  sous  l'apparence  du  simple  badinage. 

Mme  Massart,  Massart  et  Jacquard  ont  dit  ensuite  le  trio  en  »-é 
de  Beethoven.  C'est  une  merveille  d'originalité  et  de  concision  ; 
de  l'air  tissu,  comme  dit  le  poëte.  Je  dirais  presque  (n'était  cet 
adagio  sublime)  du  Beethoven  heureux.  Le  finale  est  un  diamant. 
Heller  me  le  disait  avec  bien  de  la  raison  :  c'est  une  ode  d'Horace, 
une  épigramme  de  Martial.  El  cela  est  bien  vrai  :  ce  finale  semble 
taillé  à  l'emporte-pièce  dans  la  forme  d'acier  du  vers  latin.  Com- 
paraison n'est  pas  raison,  mais  presque  toujours  l'analogie  a  rai- 
son. Il  faut  se  servir  de  beaucoup  d'images  pour  exprimer  les  sen- 


DE  PARIS. 


75 


salions  que  nous  lait  éprouver  la  musique,  le  plus  indescriptible 
des  arts. 

Admirable  exécution,  je  n'ai  pas  besoin  de  le  dire.  Mme  Mas- 
sart  reine  du  piano!  Massart  jouait  sur  son  stradivarius.  «  Bien 
rugi,  vieux  lion  !  »  (En  ce  moment  je  suis  plein  de  Shakspeare.) 
Jacquard  jouait  sur  un  Bergonzi;  —  Bergonzi  est  un  vieux  facteur 
italien,  moins  connu  que  son  maître  Stradivarius.  Eh  bien!  cette 
basse  est  parfaite  de  tout  point  :  force  et  velouté.  Vous  me  direz 
que  le  talent  de  l'artiste  y  était  sans  doute  pour  beaucoup,  et  j'en 
conviens. 

Et  ensuite,  Jacquard  nous  a  joué  de  vraies,  mais  de  vraies  études 
de  concert,  remplies  de  mélodies  et  de  rhythmes  charmants.  Mais 
où  donc  seront-elles  gravées?  Ici  peut-être,  et  ce  serait  bien  mon 
vœu  1 

L.  KREUTZER. 


MINISTÈRE  D£  U  HÀISON  DE  L'EmPEREUR 

ET    DES    BEAUX-ARTS- 

DIRECTION    GÉNÉRALE    DES   THÉÂTRES. 

Le  concours,  institué  au  théâtre  impérial  de  l'Opéra,  pour  la 
composition  d'un  poëme  destiné  à  être  mis  en  musique,  sera  clos 
délinitivement  le  15  mars  présent  mois. 

Les  auteurs  qui  y  auront  pris  part  sont  invités  à  se  réunir  le 
mardi  17  mars,  à  une  heure,  au  ministère  de  la  Maison  de  l'Em- 
pereur et  des  Beaux-Arts,  dans  le  cabinet  du  directeur  général  des 
théâtres,  pour  élire  eux-mêmes  le  jury  chargé  de  juger  les  poëmes 
envoyés  au  concours. 

Ils  seront  admis  sur  la  présentation  du  titre  de  leur  poëme  et 
de  l'épigraphe  annexée  à  leur  manuscrit. 


NECROLOGIE. 

EDOUARD  HONIVAIIS. 


La  mort  d'Edouard  Monnais  a  frappé  douloureusement  à  plus 
d'un  titre  la  rédaction  de  la  Revue  et  Gazette  musicale  de  Paris. 
Non-seulement  il  y  avait  été  attaché  pendant  trente  trois  ans  et  en 
avait  été  un  des  collaborateurs  les  plus  actifs  et  les  plus  féconds, 
mais  les  précieuses  qualités  de  son  cœur  et  de  son  esprit  lui 
avaient  conquis  l'amitié  dévouée  des  fondateurs  et  propriétaires  de 
cette  tribune  de  l'art,  ainsi  que  l'estime  de  ses  confrères  en  criti- 
que. Doué  de  bienveillance  naturelle,  distingué  dans  ses  manières, 
et  toujours  retenu  dans  les  limites  d'uns  exquise  politesse  lorsque 
ses  convictions  ne  lui  permettaient  pas  d'être  élogieux,  il  ne  comp- 
tait que  des  amis.  Les  regrets  de  tous  l'ont  suivi  dans  la  tombe. 

Guillaume-Edouard-Désiré  Monnais  était  né  à  Paris  le  27  mai 
1798,  et  touchait  à  sa  soixante-dixième  année.  Ses  études  avaient 
été  plus  littéraires  que  musicales;  il  est  même  douteux  qu'il  ait 
jamais  effleuré  celles-ci,  car  il  était  destiné  au  barreau,  et  fut  reçu 
avocat  en  1828.  Préférant  la  carrière  des  lettres  à  toute  autre,  dès 
l'âge  de  vingt  ans  il  essaya  sa  plume  dans  plusieurs  journaux, 
sans  être  attaché  spécialement  à  aucun.  Plus  tard,  séduit  par  les 
succès  de  la  scène,  il  s'y  hasarda  et  donna  en  collaboration  à  divers 
théâtres  :  Midi  ou  l'Abdication  d'une  femme,  —  le  Futur  de  la 
Grand' Maman,  —  la  Première  Cause,  —  la  Contre- Lettre,  —  les 
Trois  Catherine,  —  la  Dédaigneuse,  —  le  Chevalier  servant,  —  Un 
Ménage  parisien,  —  le  Cent-Suisse  (à  l'Opéra-Comique) , —  Sullana 
(idem).  Cependant  des  travaux  plus  sérieux  préoccupèrent  Edouard 
Monnais  à  la  même  époque,  car  il  prit  part  aux  ouvrages  de  Mar- 
changy  et  de  Tissot,  pour  lesquels  il  lit  de  grandes  recherches,  et 


il  dirigea  les  Ephémérides  universelles,  dont  il  publia  13  volumes 
in-S». 

Entré  dans  la  rédaction  du  Courrier  français,  au  mois  de 
juillet  1832,  pour  y  rédiger  le  feuilleton  des  théâtres,  il  se  fit  dès 
lors  remarquer  par  la  solidité  de  sa  critique  ainsi  que  par  l'élé- 
gance de  son  style.  Sollicité  en  1835  de  prendre  part  à  la  rédac- 
tion de  la  Gazette  musicale,  il  accepta  cette  proposition;  cependant 
sa  position  au  Courrier  français  l'obligea  de  n'y  paraître  que  sous 
le  pseudonyme  de  Paul  Smith.  Les  articles  qu'il  y  a  fait  insérer 
dans  l'espace  de  plus  de  trente  ans  sont  en  nombre  très-considé- 
rable. Ainsi  qu'il  a  été  dit  tout  à  l'heure,  Monnais  n'était  pas  mu- 
sicien, ce  qui  l'obligea,  dans  les  premiers  temps,  de  faire  de  la  critique 
un  peu  à  côté  de  l'objet  principal  d'un  journal  spécial  de  musique. 
Il  y  publiait  en  feuilletons  des  nouvelles  ou  romans  dont  les  sujets 
se  rattachaient  d'une  manière  plus  ou  moins  directe  à  cet  art.  Les 
titres  de  ces  nouvelles,  qui  parurent  ensuite  en  volumes,  sont  : 
1°  Esquisses  de  la  vie  d'artiste;  2°  Portefeuille  de  deux  cantatrices; 
3"  les  Sept  notes  de  la  gamme.  Ainsi  qu'il  arrive  toujours  d'un 
homme  bien  organisé,  l'habitude  d'entendre,  de  comparer,  d'ana- 
lyser, fit  acquérir  par  degrés  à  Monnais  la  rectitude  de  jugement 
nécessaire  pour  bien  parler  de  la  musique,  au  moins  dans  les 
impressions  générales  qu'elle  produit.  Les  circonstances,  d'ailleurs, 
le  secondèrent.  Ayant  été  nommé,  en  1840,  commissaire  du  gou- 
vernement près  les  théâtres  lyriques  et  du  Conservatoire  de  mu- 
sique ;  prenant  part  aux  travaux  du  comité  d'enseignement  de  cette 
école,  et  incessamment  en  relation  avec  les  grands  artistes  qui  en 
ont  fait  partie,  il  acquit  par  là  une  connaissance  suffisante  des  choses 
dont  il  avait  à  traiter  dans  sa  critique,  et  son  intelligence,  son  bon 
sens,  lui  venant  en  aide,  il  fit  remarquer  dans  ses  comptes  rendus 
des  productions  de  l'art  une  justesse  d'aperçus  que  relèvent  la 
politesse  du  langage  et  l'urbanité  de  la  forme. 

Monnais  a  fourni  quelques  articles  de  critique  musicale  à  la  Re- 
vue contemporaine  sous  le  pseudonyme  de  Wilhelm.  Dans  les 
années  1851,  1853,  1859  et  1862,.  il  a  été  chargé  d'écrire  les 
poëmes  des  cantates  destinées  aux  grands  concours  de  composition 
musicale,  qui  étaient  alors  jugés  par  l'Académie  des  beaux-arts  de 
l'Institut  de  France  ;  ces  ouvrages  ont  pour  titre  :  le  Prisonnier, 
le  Rocher  d'Appenzell;  Bajazet  et  le  joueur  de  flûte,  Louise  de 
Mazières. 

Le  dernier  travail  de  Monnais  a  été  une  monographie  de  Charles- 
Marie  de  Weber,  d'après  le  livre  allemand  publié  par  M.  Max- 
Marie  de  Weber,  fils  du  célèbre  artiste.  Insérée  en  variétés  dans 
la  Revue  et  Gazette  musicale,  cette  monographie  n'est  malheureu- 
sement pas  achevée. 

Dans  ce  dernier  hommage  rendu  à  la  mémoire  d'un  homme 
excellent  et  d'un  écrivain  distingué,  je  n'ai  pas  eu  le  dessein  de 
faire  un  panégyrique  :  j'ai  dit  simplement  ce  que  fut  Monnais 
comme  homme  et  comme  critique.  Ceux  qui  le  connurent,  c'est-à- 
dire  ses  amis,  me  rendront  cette  justice  que  je  n'ai  exagéré  ni  son 
mérite,  ni  les  regrets  inspirés  par  sa  mort. 

FÉTIS  père. 


REVUE  DES  THÉÂTRES.     , 

Odéok  :  Reprise  de  Kean.  —  Porte-Saint-Martin  :  La  Jeunesse  des 
Mousquetaires.  —  Gaité  :  La  Reine  Margot.  —  Gymnase  :  Un 
mari  comme  on  en  voit  peu,  comédie  en  un  acte  par  M.  Léon 
Desrosiers;  Comme  elles  sont  toutes,  comédie  en  un  acte  par 
M.  Charles  Narrey.  —  Vaudeville  :  Les  Rivales,  comédie  en 
quatre  actes,  par  M.  Amédée  Rolland.  —  Variétés  :  Reprise  de 
la  Grande-Duchesse  de  Gérolstein.  —  Palais-Royal  :  Paul  Faut- 


76 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


rester,  parodie  par  MM.  Siraudin  et  Marc-Leprévôt.  —  Théatre- 
Déjazet  :  Le  Genièvre  de  Bréhant,  vaudeville-revue  en  trois  ta- 
bleaux, par  M.  Flor  O'Squarr. 

Quand  les  théâtres  oîi  le  drame  domine  se  trouvent  dans  un  mo- 
ment d'embarras,  ils  ont  recours  aux  vieilles  œuvres  d'Alexandre 
Dumas,  et  presque  toujours  ils  n'ont  qu'à  se  louer  de  l'expédient. 
Il  y  a  une  telle  puissance,  une  telle  vitalité  dans  la  plupart  des 
productions  de  ce  maître  des  dramaturges,  que  le  public  ne  se 
lasse  pas,  dans  une  certaine  mesure,  de  leur  prodiguer  ses  écus  et 
ses  applaudissements.  Hier,  le  petit  théâtre  de  Cluny  affirmait  son 
existence  par  la  reprise  à'Antomj,  aujourd'hui  trois  théâtres  à  la 
fois  étalent  le  nom  magique  d'Alexandre  Dumas  sur  leurs  affiches, 
et  tous  trois  font  d'excellentes  recettes. 

A  rudéon,  c'est  Kean  que  la  direction  a  choisi  et  monté  avec 
le  plus  grand  soin.  Le  souvenir  de  Frederick- Lemaître,  dans  ce 
rôle  multiple,  dont  les  phases  se  résument  dans  ces  deux  mots  : 
Désordre  et  génie,  serait  écrasant  pour  tout  autre  comédien  que 
Berton.  Mais,  sans  avoir  l'ampleur,  l'autorité  souveraine  de  son 
prédécesseur,  Berton  possède  d'éminentes  qualités  qui  lui  permet- 
tent d'alfronter  les  périls  de  la  comparaison.  Si  ses  effets  ne  sont 
pas  les  mêmes  que  ceux  de  Frédérick-Lemaître,  il  en  trouve  l'équi- 
valent dans  toutes  les  parties  du  drame  qui  demandent  de  la  dis- 
tinction, de  la  jeunesse  et  de  la  passion.  A  côté  de  lui,  Reynald 
se  fait  remarquer  dans  le  personnage  du  prince  de  Galles,  et 
Mlle  Sarali  Bernhardt  dans  le  rôle  d'Anna  Daniby. 

—  Pour  réunir  en  un  seul  faisceau  les  lauriers  d'Alexandre  Du- 
mas, disons  tout  de  suite  que  la  Jeunesse  des  Mousquetaires  a  re- 
paru triomphalement  à  la  Porte-Saint-Marlin,  avec  Mélingue  dans 
le  rôle  de  d'Artagnan,  Tisserant  dans  celui  d'Athos,  et  Mme  Vigne 
dans  celui  de  Milady. 

—  Le  succès  de  la  Reine  Margot  n'a  pas  été  moins  éclatant  à  la 
Gaîté,  oi!i  Coconas  est  joué  par  Dumaine,  Charles  IX  par  Lacres- 
sonnière,  et  où  les  principaux  rôles  de  femmes  sont  parfaitement 
remplis  par  Mlles  Jane  Essler,  Céline  Montaland  et  Mme  Lacroix. 

—  Le  Gymnase,  sans  renoncer  au  Comte  Jacques  ni  à  Miss  Su- 
zanne qui  n'ont  pas  dit  leur  dernier  mot,  a  complété  l'attrait  de 
ce  spectacle  par  deux  petites  pièces  nouvelles,  dont  la  réussite  n'a 
pas  été  douteuse.  Il  faut  cependant  constater  une  légère  différence 
dans  l'accueil  fait  à  chacune  d'elles.  La  première.  Un  Mari  comme 
on  en  voit  peu,  est  une  comédie  à  poudre,  dont  l'allure  est  passa- 
blement surannée.  On  y  voit  un  financier,  épais  et  lourd  en  appa- 
rence, qui  a  une  jeune  femme  placée  entre  l'amour  ardent  d'un 
petit-cousin  et  les  redoutables  poursuites  d'un  grand  seigneur.  En 
dépit  de  son  enveloppe  ridicule  et  vulgaire,  le  mari  trouve  moyen 
d'éconduire  ses  deux  rivaux  et  de  rester  seul  et  unique  possesseur 
de  sa  gentille  moitié.  C'est  Pradeau  qui  joue  le  rôle  du  financier, 
et  qui  soutient  cette  comédie. 

La  seconde,  d'un  mérite  plus  réel,  n'a  pas  besoin  d'autre  appui 
qu'elle-même.  Néanmoins,  quelques  portraits  de  femmes,  agréable- 
ment tracés,  donnent-ils  le  droit  à  l'auteur  de  s'écrier  :  Voilà 
Comme  elles  S07it  toutes?  C'est  là  une  prétention  qui  frise  le  para- 
dose,  et,  en  fin  de  compte,  la  comédie  de  M.  Charles  Narrey  a 
soin  de  se  donner  à  elle-même  un  démenti  formel.  Deux  jeunes 
dames,  dont  les  caractères  forment  le  plus  piquant  contraste,  se 
disputent  le  cœur  d'un  homme  du  meilleur  monde,  et,  par  rémi- 
niscence d'une  aventure  du  siècle  dernier,  elles  en  appelleraient 
volontiers  au  sort  des  armes  si  elles  n'avaient  peur  de  se  défigurer, 
lorsque  soudain  le  tendre  objet  de  cette  guerre  à  mort  paraît  et 
fait  un  faux  pas  qui  prête  à  rire  aux  deux  antagonistes.  Du  même 
coup,  le  voile  est  déchiré,  mais  il  y  a  là  une  troisième  femme  qui 
n'a  pas  ri  de  cette  chute  malséante  et  qui,  comme  le  troisième 
larron   de    la    fable,  s'accommode  du  butin  en  litige.  Toutes  les 


femmes  ne  se  ressemblent  donc  pas  I  A  cette  réserve  près,  la  pièce 
de  M.  Narrey  est  charmante  et  a  été  très-vivement  applaudie. 
Elle  est  d'ailleurs  fort  bien  interprétée  par  Porel,  ainsi  que  par 
Mlles  Pierson  et  Angelo. 

—  Le  Vaudeville  a  été  moins  heureux  avec  les  Rivales,  de 
M.  Amédée  Rolland.  Elles  sont  moins  gaies  en  effet  que  celles  du 
Gymnase,  et  l'homme  qui  les  divise  est  bien  plus  ridicule  que 
celui  de  Comme  elles  sont  toutes,  quoiqu'il  ne  se  laisse  pas  choir 
à  temps.  C'est  un  M.  de  Fresnes  qui  vient  retrouver  en  Bretagne 
deux  jeunes  cousines,  Adrienne  et  Berthe,  dont  la  première  semble 
destinée  à  devenir  sa  femme.  Mais  la  vue  de  Berthe  change  les 
dispositions  de  M.  de  Fresnes;  il  ne  veut  plus  entendre  parler 
d'Adriennc,  et  la  situation  se  complique  d'une  troisième  femme 
qui  vient  à  son  tour  jeter  ses  droits  dans  la  balance.  Berthe  est 
bien  près  de  succomber  dans  cette  lutte  inégale,  mais  un  dénoû- 
ment  anodin  arrange  tout  à  la  satisfaction  de  chacune  et  M.  de 
Fresnes  se  marie  selon  son  goût  et  sa  convenance. 

Cette  pièce  malencontreuse  n'a  pas  moins  de  quatre  actes,  dont 
les  deux  premiers  ont  été  écoutés  dans  un  morne  silence,  et  dont 
les  deux  autres  ont  provoqué  plus  d'un  rire  ironique.  Les  princi- 
paux rôles  sont  pourtant  bien  joués  par  Mme  Doche,par  Mlle  Cel- 
lier et  par  Desrieux.  Mais  que  faire  d'une  série  de  situations  im- 
possibles et  présentées  parfois  d'une  façon  puérile?  Seul,  Saint- 
Germain  est  parvenu  à  tirer  un  bon  parti  du  personnage  d'un 
maître  clerc  de  notaire  qui  veut  à  tout  prix  conquérir  une  étude. 
Ce  tj'pe  aurait  peut-être  pu  sauver  la  pièce  s'il  avait  eu  plus 
d'importance. 

—  Citons,  pour  mémoire,  une  parodie  de  Paul  Forestier  qui  se 
joue  au  Palais-Royal  sous  le  titre  de  Paul  Faut-Rester,  et  qui,  à 
la  faveur  des  cocasseries  de  Brasseur,  de  Luguet  et  de  Lassoucbe, 
se  maintient  sans  trop  de  désavantage  à  côté  des  Jocrisses  de  l'a- 
mour. 

—  Une  parodie,  inspirée  par  la  Geneviève  de  Brabant  de  l'uni- 
versel Offenbach,  attire  du  monde  au  Théâtre-Déjazet.  Le  Genièvre 
de  Bréhant  n'est  du  reste  qu'un  prétexte  pour  défrayer  les  trois 
tableaux  d'une  l'evue  qui  embrasse  toutes  les  actualités  du  jour. 

D.  A.  D.  SAINT-YVES. 


CONCERTS  ET  AUDITIONS  DUSICÂLES  DE  LÀ  SEUIÂINE. 

»*4  Des  quatre  concerts  annoncés  pour  cet  hiver  aui  Tuileries,  le 
premier  a  eu  lieu  lundi  dernier  2  mars.  Mme  Neruda-Norman,  dans  la 
fantaisie  -  caprice  de  Vieuxtemps,  a  été  accueillie  par  des  suffrages  una- 
nimes; nous  signalerons  encore,  parmi  les  morceaux  exécutés,  un 
chœur  de  Mdise,  l'air  de  l'Ombre  du  Pardon  de  Floërmel,  dit  d'une  façon 
ravissante  par  Mme  Marie  Cabel  et  le  quatuor  de  Martlia,  qui,  chanté  par 
Mlles  Nilsson  et  Roze,  MM.  Capoul  et  Crosti,  a  produit  le  meilleur  effet, 
enfin  plusieurs  morceaux  de  la  nouvelle  partition  d'Auber ,  le  Premier 
lourde  bonheur. —  Demain  lundi  second  concert,  avec  Mme  Carvalho  et 
Capoul  ;  mardi  17,  troisième  concert  avec  les  principaux  artistes  de  l'O- 
péra ;  enfin  lundi  23,  quatrième  concert  avec  Mlle  Patti,  Grossi  et  plu- 
sieurs artistes  des  Italiens. 

^*i;  Parmi  les  concerts  aristocratiques,  nous  mentionnerons  encore  celui 
de  M.  de  Nieuwerkerke,  où  nous  retrouvons  Mme  Norman-Neruda  et  son 
magique  archet,  et  où  Mlle  Angèle  Cordier  a  supérieurement  dit  l'air 
de  i<  l'Ombre  »  du  Pardon  de  Ploërmet,  puis  celui  du  duc  de  Galliera,  dont 
Vivier  et  Adelioa  Patti  se  sont  partagé  les  honneurs  ;  on  a  y  particulière- 
ment applaudi  la  suave  élégie  du  célèbre  corniste,  intitulée  la  Plainte,  oùle 
cor  et  la  voix  se  fondent  en  un  harmonieux  ensemble,  et  où  le  mélan- 
colique instrument  fait  entendre  des  accords  de  trois  et  quatre  sons. 
Vivier  y  a  obtenu  un  véritable  triomphe.  On  a  acclamé  également  Gar- 
doni  et  Steller  dans  le  duo  de  Dinorah.  —Vivier  n'a  pas  été  moins  fêté 
dans  le  beau  concert  donné  mercredi  chez  la  duchesse  Pozzo  di  Borgo, 
et  où  il  a  exécuté  la  Sérénade  de  Schubert  accompagnée  par  la  harpe  et 
la  romance  de  Joseph.  —  Dans  cette  même  réunion,  Gardoni  a  délicie,u- 
sement  chanté  la  romance  de  Martha  et  Mlle  Harris  l'air  de  la  Flûte 
enchantée. 


DE  PARIS. 


77 


:»*,  Le  concert  populaire  de  dimanche  a  consacré  pour  la  troisième 
fois  l'immense  talent  de  Mme  Norman-Neruda.  La  célèbre  violoniste  y  a 
joué,  sur  l'invitation  de  J.  Pasdeloup,  la  Gcsamjs-scene  (scène  de  chant, 
huitième  concerto)  de  Spohr.  Très-probablement,  Mme  Neruda  n'aurait 
pas  donné  la  préférence  à  ce  morceau  qui,  malgré  les  beautés  qu'il  ren  ■ 
ferme,  offre  une  assez  grande  sécheresse;  mais  tel  quel,  il  a  été  exécuté 
de  façon  à  soulever  en  faveur  de  la  virtuose  les  bravos  les  plus  enthou- 
siastes. —  Nous  constatons  aussi  avec  grand  plaisir  l'accueil  très-favo- 
rable fait  aux  fragments  de  Faust,  de  Berlioz.  L'auditoire  a  été  unanime 
pour  les  applaudir. 

^*^  Les  artistes  qui  prêtent  avec  tant  de. bonne  grâce  un  concours  tout 
à  fait  désintéressé  aux  soirées  organisées  par  les  sociétés  de  bienfaisance 
méritent  plus  que  tous  les  autres  nos  éloges,  surtout  quand  ils  joignent  à 
la  charité  le  charme  d'un  réel  talent.  Citons  aujourd'hui  deux  noms  fé- 
minins à  la  suilo  du  concert  donné  pour  l'Orphelinat  de  Sainte-Marie. 
Mlle  Angèle  Godefroid,  de  l'Upéra,  dont  les  fréquentes  auditions  parmi 
les  Sociétés  pliilharmoniques  de  province  développent  chaque  jour  de  plus 
en  plus  la  voix  bien  timbrée  et  l'heureuse  méthode,  s'est  fait  applaudir 
dans  l'air  de  Robert,  la  Polonaise  de  Jéruiatem,  et,  avec  M.  Shattman, 
un  jeune  ténor,  dans  le  duo  des  Dragons  de  Villars.  Mlle  Célestine  Meyer 
a  été  l'éclat  de  rire  sonore  et  le  gracieux  mot  de  la  fin  en  disant  avec  une 
verve  toujours  distinguée  de  ravissantes  chansonnettes  et  en  jouant  avec 
M.  Lamotte  En  wagun,  de  Verconsin,  de  façon  à  marquer  sa  place  sur 
une  de  nos  premières  scènes  de  genre  parisiennes. 

*■*»  La  troisième  matinée  de  Mme  Clara  Pfeifïer  ne  le  cédait  point  en 
intérêt  aux  deux  précédentes.  L'éminente  artiste  y  était  représentée 
comme  compositeur  par  un  nocturne  en  ut  dièse  mineur,  charmant 
petit  poëme  élégiaque  que  nous  ne  connaissions  pas  encore,  et  qu'a  fort 
bien  exécuté  une  de  ses  élèves,  Mlle  Marguerite  R...  Mme  Clara  Pfeiffer 
a  joué  elle-même  deux  jolis  morceaux  de  B.  Damcke,  Complainte  et  les 
Cloches,  et  une  mazurka  de  Chopin  ;  c'est  toujours  le  talent  fin  et  délicat, 
la  savante  attaque  de  la  touche  que  tout  le  monde  admire.  Georges 
Pfeiffer  (qui,  il  est  bon  de  le  dire,  donne  aujourd'hui  même  à  la  salle 
Pleyel  une  audition  de  ses  œuvres)  a  exécuté,  avec  sa  maestria  habi- 
tuelle, sa  brillante  fantaisie  sur  Faust,  et  une  sonate  de  Mozart  avec 
M.  de  Cuvillon.  Le  chant  (duo  de  Mignon,  duetto  de  Saint-Saëns, sonnet- 
élégie  de  G.  Pfeiffer)  était  dignement  repré.senté  par  le  baryton  Archaini- 
baud  et  Ml!e  Pauline  Doré. 

^%  Mercredi  dernier,  nous  avons  renouvelé  connaissance  à  la  salle 
Erard  avec  un  sérieux  et  sympathique  talent.  M.  Gennaro  Perelli,  un 
habile  pianiste,  doublé  d'un  compositeur  de  très-grand  mérite,  a  fait 
entendre  plusieurs  de  ses  œuvres  :  c'est  d'abord  un  concerto  en  sol  mi- 
neur, plein  d'idées  intéressantes,  d'effets  neufs  et  variés,  où  l'instrument 
est  traité  brillamment  et  savamment;  c'est  ensuite  une  Pensée  mélodique 
et  un  Rondo  fantasiico,  deux  ravissants  morceaux  que  nous  croyons 
appelés  au  succès;  c'est  enfin  un  Capriccio  alla  mazurka,  plein  de  verve, 
brillant  sans  vulgarité  et  qui  a  terminé  le  concert  en  laissant  une  excel- 
lente impression.  M.  Perelli  vient  certainement  de  se  placer  très  haut 
dans  l'estime  des  artistes  et  des  gens  de  goût. 

:f*:t  Le  concert  de  M.  Edouard  Colonne  a  eu  lieu  vendredi.  Nous  regret- 
tons que  le  défaut  d'espace  ne  nous  permette  pas  d'en  donner  les  détails, 
mais  nous  enregistrons  toujours  avec  plaisir  les  succès  remportés  par  cet 
excellent  artiste,  qui  a  pris  rang  depuis  longtemps  parmi  nos  meilleurs 
violonistes,  et  qui  interprète  la  musique  de  chambre  d'une  façon  si 
remarquable.  Un  mécanisme  sûr,  une  grande  pureté  de  son,  beaucoup 
de  délicatesse,  telles  sont  les  principales  qualités  qu'on  retrouve  chez 
lui,  à  chaque  nouvelle  audition  plus  accusées  et  plus  complètes. 

„,■**  Tout  concourait  pour  faire  du  dernier  vendredi  de  Mme  Oscar 
Comettant,  notre  éminente  cantatrice-professeur  à  Versailles,  une  fête 
exceptionnelle  :  les  talents  réunis  de  la  maîtresse  de  la  maison,  de  la 
jeune  violoniste  Marie  Tayau,  de  Mlle  Holmes,  une  jeune  pianiste-com- 
positeur qui  fera  parler  d'elle,  etc.  Le  choix  des  morceaux  exécutés  a 
laissé  aux  nombreux  invités  de  Mme  Comettant  la  plus  heureuse  et  la 
plus  durable  impression.  Elle  s'est  fait  entendre  dans  un  air  de  Don 
Carlos  et  la  chanson  des  Djinns  d'Auber,  qu'elle  a  dfl  répéter  ;  jamais 
sa  magnifique  voix  n'avait  produit  plus  d'eftet. 

^*t  Ajoutons  à  cette  longue  nomenclature  de  concerts  ceux  de  deux 
pianistes  d'un  réel  mérite,  Mlles  de  Latapie  et  Dona  de  Potier,  —  cette 
dernière,  élève  de  Liszt  ei  quoique  jeune,  déjà  célèbre  en  Allemagne,  — 
qui  toutes  deux  paraissent  devoir  prendre  un  rang  honorable  dans  l'ar- 
mée si  nombreuse  des  virtuoses  du  clavier. 

^*,^  Une  famille  artistique  digne  du  plus  grand  intérêt,  M.  Frémeaux 
et  ses  trois  enfants,  excitent  en  ce  moment  l'attention  du  public  musical. 
Les  trois  jeunes  prodiges  (trois  à  la  fois,  cela  ne  s'est  pas  encore  vu) 
sont  âgés  de  neuf,  onze,  treize  ans,  et  jouent:  Paul,  du  violoncelle,  Al- 
bert, du  violon,  et  Jeanne,  du  piano,  avec  un  talent  tout  à  fait  précoce, 
on  pourrait  dire  déjà  formé.  Paul,  notamment,  se  distingue  par  une  or- 
ganisation musicale,  une  facilité  et  une  mémoire  prodigieuses.  C'est  à 
leur  père  et  au  conservatoire  de  Marseille,  oii  il  était  professeur,  que  ces 
charmants  enfants  doivent  ce  qu'ils  savent.  Ils  ont  donné  le  2i  février 
à  Saint-Gcrmain-cn-Laye,  dans  la  salie  des  Arts,  un  très-beau  concert, 
dont  le  chef  de  la  musique  de  la  ville,  M.  AUard,  avait  l'initiative  et  la 


direction.  Ils  ont  récolté  une  ample  moisson  de  bravos,  qui  ne  sont  sans 
doute  que  le  prélude  des  succès  qui  h  s  attendent  sur  les  scènes  plus 
importanics  où  ils  pourront  se  produire. 

^*»,  De  la  province  nous  arrive  l'écho  d(!S  appbiudisscmenLs  qui  saluent, 
partout  où  elle  se  fait  entendre,  la  Compagnie  musicale  Ulmann-Patti.  Les 
éminents  artistes  qui  la  composent  ont  tout  particulièrement  excité  l'en- 
thousiasme des  Lyonnais.  A  l'issue  du  concert  où  Seligmann  avait  joué 
avec  toule  son  âme  l'Éloge  des  larmes,  de  nombreux  jeunes  gens,  réunis 
devant  son  hôtel  l'ont  acclamé,  et  se  sont  faits  près  de  lui  les  interprètes 
de  la  satisfaction  de  toute  l'assistance.  Malheureusement,  la  nouvelle  im- 
prévue d'un  triste  événement  est  venue  interrompre  pendant  deux  ou 
trois  jours  à  Marseille  le  cours  de  ces  beaux  concerts.  Le  beau-frère  de 
Carlotta  Patti,  M.  Scola,  venait  en  effet  de  se  trouver  subitement 
atteint  d'accès  nerveux  qui  ont  nécessité  son  transfert  immédiat  dans 
une  maison   de  santé  spéciale  de  Milan. 

:t*.^;  A  l'exemple  des  principales  villes  de  France,  Rennes  a  organisé 
des  concerts  populaires  de  musique  classique.  Chaque  dimanche,  Haydn, 
Mozart,  Beethoven,  Mendelssohn,  interprétés  par  des  artistes  de  talent, 
viennent  en  aide  aux  misères  de  la  vieille  capitale  de  la  duché  de  Bre- 
tagne. 

a,**  Voici  le  programme  du  concert  que  donne  aujourd'hui  dimanche 
la  Société  des  concerts  du  Conservatoire  :  1°  .symphonie  en  sol  mineur 
de  Mozart;  —2°  42"^  psaume  (1'"  audition)  de  Mendelssohn.  Traduction 
de  M.  Nuitter;  chœur,  air,  choral,  récitatif  et  quintette,  chœur  final; 
le  solo  sera  chanté  par  Mlle  Mauduit;  •—  3°  1"  concerto  en  ut  majeur, 
pour  piano,  de  Beethoven,  exécuté  par  Mme  Montigny  -  Remaury; 
—  4°  ouverture,  avec  chœurs,  du  Pardon  de  Ploërmel  de  Meyerbeer.— Le 
concert  sera  dirigé  par  M.  George  Hainl. 

s** 'Aujourd'hui  dimanche,  à  2  heures,  au  cirque  Napoléon,  dix-neu- 
vième concert  populaire  de  musique  classique,  sous  la  direction  de 
J.  Pasdeloup.  En  voici  le  programme  :  1*  symphonie  en  si  bémol 
(op.  20),  de  Niels  W.  Gade  (allegro,  andante,  scherzo,  finale);  —  2»  ada- 
gio du  quintette  en  sol  mineur  de  Mozart,  exécuté  par  tous  les  instru- 
ments à  cordes;  —  3°  symphonie  pastorale  de  Beethoven;  — i"  gavotte 
de  J.-S.  Bach;  —3°  marche  religieuse  de  Loliengrin  de  R.  Wagner. 

»**  Dimanche  prochain  13  mars,  à  2  heures  précises,  une  solennité 
musicale  très-intéressante  aura  lieu  dans  la  salle  He-t-z  au  bénéfice  de  la 
Crèche  du  Quartier  des  Journaux  (2»  arrondissement).  On  y  exécutera, 
entre  autres  morceaux  de  choix  :  le  Parnasse,  de  Raphaël,  ravissant 
solo  de  violon  joué  par  une  jeune  fille,  Mlle  Nelly  Guibert,  avec  accom- 
pagnement d'un  chœur  d'hommes  et  de  femmes;  les  Chérubins,  be\le 
inspiration  de  Borniantski ,  le  cygne  de  la  chapelle  des  Czars.—  Crosti, 
Potel,  Sainte-Foy,  Mlle  Marie  Heilbron,  de  l'Opéra-Comique,  la  déli- 
cieuse cantatrice  Lavini,  de  Barcelone,  Mlle  Marie  Secretan,  la  brillante 
élève  de  Herz,  Louis  Magner,  Robins  et  Hollebecke,  les  colonnes  de  la 
fanfare  Sax,  tel  est  le  personnel  qui  se  fera  entendre  au  profit  de  la 
crèche  ouverte  depuis  deux  ans  en  faveur  des  femmes  d'employés  et  des 
plieuses  de  journaux.  —  On  trouvera  des  billets  au  prix  de  10,  6,  A  et 
2  fr.  à  la  mairie  du  2»  arrondissement,  salle  Herz,  et  chez  M.  A.  Ehvart, 
organisateur  de  cette  bonne  œuvre. 

^*^  Entre  tous  les  concerts  delà  saison  de  1868,  signalons  d'une  façon 
toute  particulière  celui  qui  est  annoncé,  dans  les  salons  Erard,  mercredi 
prochain  11  mars,  par  la  jeune  et  belle  virtuose  TeresaCarreno,  la  digne 
émule  de  Liszt  et  Thalberg.  Elle  fera  entendre  à  son  concert  non -seule- 
ment la  musique  des  maîtres  du  piano,  mais  aussi  ses  remarquables 
compositions.  Au  nombre  des  artistes  qui  prêteront  le  concours  de  leur 
talent  à  Teresa  Carreno,  on  cite  :  Mlle  Marimon,  M.M.  Delle-Sedie, 
Lefébure-Wély,  Sarasate  et  Servantes.  De  plus,  on  entendra  des  contes  de 
Nadaud  récités  par  Coquelin,  de  la  Comédie  Française. 

^*^  Les  sœurs  Pellini,  dont  nous  avons  souvent  parlé  et  que  leur  ta- 
lent sympathique  fitit  rechercher  dans  toutes  les  réunions  musicales  arisr 
tocraliques  ou  publiques,  vont  donner,  avec  le  pianiste  Kowalskî,  un  grand 
concert  à  la  salle  Herz. 

^*^  Ce  soir  à  8  heures  i/2,  Mme  Ernst,  la  veuve  du  célèbre  violoniste, 
dont  on  se  rappelle  les  lectures  intéressantes  à  l'Athénée,  donne  ,  dans 
la  salle  du  boulevard  des  Capucines,  n°  8,  une  conférence  dont  les  œu- 
vres de  Victor  Hugo,  Alf.  de  Musset,  Th.  Gautier,  etc.,  .feront  les  frais. 
Un  nombreux  auditoire  est  assuré  d'avance  à  Mme  Ernst. 

:^*if,  Mme  Norman-Neruda,  après  ses  succès  au  concert  Pasdeloup,  à  la 
cour  et  au  Louvre,  vient  de  quitter  Paris  pour  remplir  divers  engage- 
ments qu'elle  a  acceptés  en  Hollande.  La  grande  artiste  sera  de  retour 
à  Paris  dans  une  dizaine  de  jours,  et  elle  y  donnera  le  26  mars  un  con- 
cert dans  la  s-alle  Herz. 

^*^,  Rubinstein  récolte  en  ce  moment  les  plus  brillantes  ovations  en 
Hollande  et  en  Belgique  ;  il  doit  jouer  au  huitième  et  dernier  concert 
populaire  de  musique  classique,  qui  a  lieu  aujourd'hui  à  Bruxelles. 

^*4  Les  frères  Guidon,  sollicités  par  les  soirées  musicales  du  Carême, 
nous  reviennent  de  Monaco  et  de  Nice  où  ils  ont  passé  une  partie  de 
l'hiver,  interprétant  leur  répertoire  si  varié,  de  duos,  chansons,  comédies 
et  opérettes  qui,  sur  le  littoral  méditerranéen  comme  dans  les  salons  de 
Paris,  leur  ont  valu  les  plus  légitimes  .succès. 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


,*4  Joseph  Rubinstein,  jeune  pianiste  russe,  qui,  pendant  plusieurs 
années,  a  séjourné  à  Vienne,  où  il  a  obtenu  de  très-grands  succès,  vient 
d'arriver  :\  Paris,  où  il  se  propose  de  se  faire  entendre. 

^*,  L'cminent  pianiste  A.  Billet  nous  informe  que  M.  et  Mme  Guz- 
man,  dont  on  a  pu  apprécier  le  beau  talent  au  concert  donné  par  eux, 
jeudi  de  la  semaine  dernière,  sont  ses  élèves  et  n'ont  jamais  eu  d'autre 
maître  que  lui.  Nous  n'en  sommes  nullement  étonnés  et  chacun  sait  que 
les  élèves  formés  par  M.  Billet  deviennent  promptement  des  maîtres. 


NOUVEllES  DES  THÉÂTRES  lYRIQUES. 

,**  Le  théâtre  impérial  de  l'Opéra  a  donné  lundi  et  vendredi  de  cette 
semaine  :  deux  fois  la  Muette  de  Portici,  —  mercredi  le  Trouvère  et  le 
Marché  des  Innocents.— h.  Vd  représentation  précédente  du  Trouvère,  la  di- 
rection, informée  que  Caron,  subitement  indisposé,  ne  pouvait  jouer,  avait 
prié  M.  Maurel,  premier  prix  do  chant  aux  derniers  concours  du  Con- 
servatoire, engagé  à  l'Opéra  et  qui  y  attendait  ses  débuts,  de  remplacer 
Caron  dans  le  rôle  du  comte  de  Luna.  Quoique  pris  au  dépourvu  et 
forcé  de  jouer  au  pied  levé  «t  sans  répétition,  le  jeune  artiste  n'a  pas 
hésité  à  répondre  à  l'invitation  de  M.  Perrin,  et,  malgré  une  émotion 
bien  naturelle,  il  a  dit  avec  beaucoup  de  talent  sa  cavatine  et  sa  partie 
dans  le  duo  du  quatrième  acte.  11  a  donc  été  fort  bien  accueilli  et 
tràs-encouragé.  L'éprouve  répétée  mercredi  lui  a  été  encore  plus  favorable 
et  on  Pa  fort  applaudi.  M.  Maurel  est  d'ailleurs  doué  d'un  physique 
agréable;  il  a  de  la  distinction  et  il  fera  certainement  son  chemin. 

***  Au  moment  où  nous  mettons  sous  presse  a  lieu,  avec  costumes  et 
décors,  la  répétition  générale  d'Hamlcl,  dont  la  première  représentation  est 
fixée  à  demain  lundi. 

^*^  Lundi  dernier,  POpéra-Comique  a  présenté  dans  le  rôle  de  Zampa 
un  ténor  que  l'on  avait  connu  à  l'Opéra,  et  que,  depuis,  les  théâtres  de 
province  ont  apprécié.  M.  Hayct,  dont  la  voix  n'est  plus  jeune,  possède 
de  sérieuses  qualités  de  chanteur  et  une  grande  expérience  de  la  scène. 
Ce  début,  peu  éclatant,  servira  néanmoins  la  carrière  de  cet  artiste.  — 
On  répèle,  en  outre,  à  ce  théâtre  Popéra  de  M.  Samuel  David,  la  Part 
du  niable,  de  M.  Auber,  le  Docteur  Mirobolan,  de  M.  Eugène  Gautier 
et  le  Café  du.  Roi,  opéra  de  M.  Dcffès,  joué  primitivement  au  théâtre 
Lyrique. 

^**  La  direction  a  reçu  de  Mme  Sand  le  poëme  d'un  opéra-comique 
en  trois  actes,  la  Petite  Fadctte,  tiré  d'un  roman  de  l'auteur  dont  M.  T. 
Semet  compose  la  musique. 

»■**  Le  succès  du  Premier  Jour  de  bonheur  a  .déterminé  MM.  d'En- 
nery  et  Cormon  à  se  mettre  de  suite  à  l'œuvre  pour  écrire  le  livret  d'un 
nouvel  opéra-comique,  dont  ils  espèrent  que  M.  Auber  consentira  à  com- 
poser la  musique.  L'illustre  auteur  de  la  Muette  se  rendra-t-il  aux  instan- 
ces de  ses  deux  heureux  collaborateurs?  Voilà  la  question. 

^*;KMontaubry  est  attendu  à  Toulouse,  où  il  doit  chanter,  entre  autres 
ouvrages  de  son  répertoire,  Faust  et  Roméo. 

^*^  Adelina  Patti,  de  retour  de  Lille,  dont  elle  a  enthousiasmé  les 
habitants  et  où  elle  a  fait  à  la  représentation  de  Fau.^t  •15,0IK)  fr.  de  re- 
cette, était  de  retour  à  Paris  mercredi  et  elle  a  chanté  jeudi  la  Traviata. 
^Mardi  on  avait  donné  la  Sonnambula  avec  Mlle  Harris,  qui  s'y  est  mon- 
trée charmante  ,  et  hier  les  époux  Tiberini  ont  fait  leurs  débuts  dans 
Matilda  di  Shabran.  Nous  en  rendrons  compte  dans  notre  prochain  nu- 
méro . 

a;*^  Aujourd'hui  a  lieu,  à  prix  doublés,  la  représentation  extraordinaire 
organisée  au  bénéfice  de  l'œuvre  des  écoles  de  Saint-Joseph,  et  dans  la- 
quelle la  diva  chantera  pour  la  première  fois  à  Paris  le  rôle  de  Leonora  du 
Trovatore. 

^*^  L'engagement  de  Gardoni  est  expiré  et  n'a  pas  été  jusqu'à  présent 
renouvelé. 

^*^  Les  préparatifs  de  l'installation  de  M.  Carvalho  au  théâtre  Venta- 
dour  se  poursuivent  avec  activité,  et  il  se  pourrait  que  l'inauguration 
de  son  répertoire  s'y  fit,  dès  mercredi  11,  par  Faust,  interprété  par 
Mme  Carvalho,  MM.  Massy,  Troy,  Lutz  et  Mlle  Daram.  A  cet  effet, 
Mme  Carvalho  a  clos  ses  représentations  hier  par  la  Fanchonnette  sur 
la  scène  du  théâtre  Lyrique.— Cette  installation  sera  d'ailleurs  complète- 
ment distincte  comme  administration,  répétitions,  matériel  et  personnel 
de  celle  du  théâtre  Italien,  et  de  son  côté  le  théâtre  Lyrique  n'aura  nulle- 
ment à  souffrir  de  la  double  exploitation.  Au  contraire,  si  Mme  Carvalho 
semble  devoir  consacrer  plus  spécialement  son  talent  à  la  scène  nouvelle, 
la  direction  augmente  considérablement  le  nombre  de  ses  artistes.  Ainsi, 
entre  autres  engagements  nouveaux  qu'elle  vient  de  faire,  il  faut  men- 
tionner ceux  de  Mlle  Marimon,  qui  prendra  le  rôle  de  la  Reine  de  la 
Nuit  dans  la  Flûte  enchantée,  et  qui  chantera  sur  les  deux  scènes;  de 
Rosa  Formés,  dont  la  voix  de  soprano  est,  dit-on,  fort  remarquable,  et 
qui  débutera  dans  Rigoletto;  de  l'excellent  Meillet,  qui  compta  de  nom- 
breux succès  à  l'ancien  théâtre  Lyrique;  du  ténor  Duchène,  élève  de  M. 
Nicole  Lablache,  et  enfin  probablement  aussi,  de  Mme  Galli-Marié  dont  il 


e.«t  fort  question.— La  scène  du  Châtelet  s'occupe,  en  attendant,  sans  re- 
lâche, d'une  brillante  reprise  des  Noces  de  Figaro  et  de  VElisabeth  de  Hon- 
grie de  M.  Jules  Béer,  pour  Mlle  Schroeder. —  M.  Carvalho  a  adopté  le 
titre  de  Théâtre  de  la  Renaissance  pour  les  jours  où  il  jouera.  —  Les 
prix  du  théâtre  de  la  Renaissance  seront  les  mêmes  que  ceux  du  théâtre 
Lyrique  actuel,  et  ceux  de  ce  dernier  seront  prochainement  réduits. 

if*^  Martha,  très-bien  interprétée  par  Mlle  Daram,  Mlle  Rouvray, 
Bosquin,  Troy  et  Wartel,  est  toujours  une  des  pièces  les  plus  suivies  du 
répertoire  au  théâtre  Lyrique;  aussi  y  est-elle  fréquemment  représentée. 
Vendredi  la  salle  était  pleine  et  la  charmante  musique  de  Flotow  a  reçu 
les  plus  chaleureux  applaudissements. 

if*if  Lundi  dernier,  la  Grande-Duchesse  a  fait  une  rentrée  triomphale 
en  son  féal  théâtre  des  Variétés.  La  seconde,  représentation  de  la  reprise 
s'accentuait  déjà  par  i,199  francs  de  recette,  et  la  salle  est  louée 
jusqu'à  la  douzième.  Ainsi  qu'aux  beaux  soirs  du  début  de  la  pièce  et 
comme  si  elle  n'avait  pas  été  jouée  deux  cents  fois  et  plus,  le  public  on 
applaudit  tous  les  morceaux  et  bisse,  notamment,  un  air  nouveau,  com- 
posé pour  cette  reprise,  au  troisième  acte.  Rêvant  sous  les  lambris  qui  pour- 
raient redire  tant  de...  choses,  la  souveraine  de  Gérolstein  déplore  que 
sa  destinée  la  pousse  à  faire  mourir  le  beau  soldat  qu'elle  aime  et  à  se 
plonger  dans  le  crime,  alors  qu'elle  a  reçu  du  ciel  un  si  citarmant  petit 
naturel.  Cette  Méditation,  empreinte  d'un  caractère  mélodramatique  du 
plus  comique  effet,  rattrapera  bien  vite  sur  le  chemin  de  la  popularité 
la  fameuse  Déclaration. — Grenier,  Kopp,  Christian  ont  repris  leurs  rôles 
avec  un  brio  à  faire  croire  que  c'est  d'hier  que  date  la  première. 
Mlle  Schneider  et  Dupuis  chantent  et  jouent...  Mais  tout  a  été  dit  sur 
cette  verve  étourdissante,  sur  cette  finesse  d'intentions  et  de  souligne- 
ments toujours  nouvelles.  Entrain  général,  gaieté  communicative  ;  pour 
ceux  qui  jouent,  pour  ceux  qui  écoutent,  la  fête  est  complète! 

,*»  Le  jeune  Alfred  Audran,dont  nous  mentionnions  tout  récemment 
les  heureux  débuts  dans  les  salons  de  Paris,  vient  de  se  produire  au 
théâtre  de  l'Athénée  dans  le  Train  des  maris .  Le  jeune  artiste,  pour  la 
première  fois  qu'il  paraissait  on  public,  s'est  très-bien  tiré  de  cette 
épreuve  et,  dans  un  rôle  qui  exige  en  même  temps  du  comique  et  de  la 
tenue,  il  a  fait  preuve  de  tact  et  d'intelligence. 

^.*,ii  Le  succès  de  Rohinson  Crusoé  s'accentue  de  plus  en  plus  à  Lyon  : 
les  airs  en  sont  chantés  dans  les  rues  et  y  deviennent  populaires.  La 
direction  et  les  artistes,  Mlles  Corlez,  Mézeray,  Douau,  MM.  Peschard, 
Barbot,  Feret,  ont  rencontré  dans  l'œuvre  d'Offenbach  un  succès  du 
meilleur  aloi. 

J'tj,  On  annonce,  à  Troyes,  les  représentations  très-prochaines  de  la 
Grande-Duchesse  avec  M.  Carrier,  le  désopilant  ténor  comique  qui,  l'année 
dernière,  a  obtenu  un  si  grand  succès  sur  cette  scène.  Caen  Papplau- 
dissait  avec  enthoisiasme,  il  y  a  huit  jours,  avec  Mlle  Géraldine  dans 
l'œuvre  populaire  d'Offenbach. 

i,*^  On  parle  de  M.  Halanzier  pour  la  direction  du  Grand-Théâtre  de 
Bordeaux  pour  la  prochaine  campagne. 

*'*4,.  La  Grande -Duchesse  est  en  ce  moment  représentée  à  Rome  par 
une  compagnie  française;  la  censure  pontificale,  si  sévère  pour  les  pièces 
italiennes  et  de  provenance  étrangère,  a  bénévolement  fermé  les  yeux  sur 
les  spirituelles  excentricités  du  duché  de  Gérolstein.  Chaque  soir,  l'aristo- 
cratie et  le  peuple  emplissent  la  vaste  salle  élevée,  place  Navone,  pour 
CCS  représentations  qui,  au  témoignage  des  correspondances,  t  font  fu- 
reur dans  la  ville  éternelle.  »  On  ajoute  même  ([ue  le  Pape  se  serait 
écrié,  avec  sa  bonne  humeur  narquoise  et  bien  italienne  :  «  Che  disgrazia! 
Dire  que  je  suis  peut-être  le  seul  souverain  qui  ne  puisse  voir  cette 
grande-duchesse-là!  «  Qui  sait?  n'est-il  pas  avec  le  ciel  plus  d'un  accom- 
modement?... 

S;-*,  La  combinaison  qui  réunirait  dans  les  mains  de  M.  Mapleson  les 
deux  théâtres  de  Covent  Garden  et  de  Majesty's  Theater  est  bien  arrêtée 
en  principe;  la  Société  est  formée,  mais  elle  n'a  pas  encore  trouvé  les 
fonds  nécessaires,  et  il  s'en  faut  de  beaucoup,  car  M.  Gye  ne  demande 
pas  moins  de  270  mille  livres  sterling  (8  millions  de  francs)  pour  la 
cession  de  tous  ses  droits  et  de  son  matériel,  et  il  en  faudrait  compter 
13,000  (375,000  francs)  à  M.  Mapleson  pour  l'abandon  des  siens. 

^*^  Mme  Viardot  a  composé  un  nouvel  opéra  fantastique,  le  Dernier 
Sorcier,  qui  sera  vraisemblablement  représenté  à  Bade,  et  qui,  paraît-il, 
est  aussi  riche  en  charmantes  mélodie  que  Trop  de  femmes,  si  bien  ac- 
cueilli naguère. 

,t*.  Par  un  arrêté  du  ministre  de  la  maison  de  PEmpereur  et  des 
beaux-arts,  M.  Arthur  de  Beauplan,  commissaire  impérial  près  le  théâtre 
de  POdéon,  vient  d'être  nommé  commissaire  impérial  près  les  théâtres 
lyriques  et  le  Conservatoire,  en  remplacement  de  M.  Edouard  Monnais, 
décédé. —  Aux  termes  du  même  arrêté,  M.  Albéric  Second,  homme  de 
lettres,  a  été  nommé  commissaire  impérial  près  le  théâtre  de  l'Odéon,  en 
remplacement  de  M.  Arthur  de  Beauplan. 


NOUVELLES  DIVERSES. 

,^*t  Mendelssohn  a  composé  ,  il  y  trente  ans,  une  très-belle  étude  en 


Dli  PARIS 


fd  mineur,  une  véritable  romance  sang  paroles,  digne  à  tous  égards  de 
figurer  parmi  les  petits  chefs-d'œuvre  écrits  par  le  maître  pour  son 
instrument.  Sur  une  basse  à  dessin  continu  d'arpèges,  se  détache  une 
mélodie  dont  le  charme  fait  oublier  le  but  technique  de  cette  étude, 
puisque  étude  il  y  a.  La  publication  de  ce  ravissant  morceau ,  qui  exci- 
tera certainement  un  vif  intérêt,  est  due  à  la  maison  Brandus  etDufour. 
11  fut  jadis  destiné  à  la  Méthode  des  méthodes  de  Piano,  de  Fétis,  dont 
il  n'avait  jamais  été  détaché,  et  beaucoup  de  personnes  aujourd'hui  en 
ignorent  l'existence;  il  offre  donc  tout  l'attrait  d'une  œuvre  véritablement 
inédite.  C'est  le  complément  de  la  musique  de  piano  de  Mendelssohn, 
que  tant  d'artistes  et  d'amateurs  croient  posséder  tout  entière. 

«**  L'inauguration  solennelle  du  grand  orgue  de  Notre-Dame,  re- 
construit par  M.  Aristide  Cavaillé-Coll,  a  eu  lieu  vendredi  soir  avec  une 
grande  pompe.  Nous  rendrons  compte,  dans  notre  prochain  numéro,  de 
cette  intéressante  cérémonie,  qui  avait  attiré  une  foule  immense. 

^^*^,  On  lit  dans  le  Journal  de  Mulhouse  :  «  Dans  l'église  de  Sumiswald 
(canton  de  Berne),  a  eu  lieu,  il  y  a  quelques  jours,  l'essai  public  d'un 
orgue  électrique  construit  par  MM.  Leuenberger  et  C",  de  cette  com- 
mune. Cet  orgue  joue  d'après  les  notes  indiquées,  toute  espèce  de  musi- 
que, avec  autant  de  facilité  que  d'exactitude.  —  Les  notes  de  musique, 
pour  êlre  soumises  à  l'influence  électrique,  sont  transportées,  par  une 
machine  spécialement  construite  à  cet  eifet,  sur  de  larges  bandes  de 
papier  de  40  à  50  pieds  de  long,  de  telle  manière  que  les  différentes 
valeurs  des  notes  sont  représentées  par  de  légères  coupures  au  moyen 
desquelles  elles  sont  lues  par  le  mécanisme  électrique.  Le  générateur 
électrique  de  l'instrument  est  un  appareil  indépendant,  organisé  de 
telle  manière  qu'il  peut  être  appliqué,  en  très-peu  de  temps,  à  tout  or- 
gue d'église,  qui  par  là  devient  lui-même  électrique,  o 

^*^  L'excellent  chef  d'orchestre  Desgranges,  après  un  hiver  très-occupé 
dans  les  salons  de  l'aristocratie,  \a  reprendre  à  Deauville  le  bâton  de 
commandement  de  l'orchestre  du  Casino,  l'un  des  attraits  de  la  belle 
rivale  de  Trouville.  M.  Desgranges  est  aussi  en  pourparlers  avec  les  pro- 
priétaires pour  prendre  la  direction  complète  du  Casino.  L'établissement 
et  le  public  ne  pourraient  que  gagner  à  ce  choix. 

»%  MM.  Bote  et  Bock,  de  Berlin,  ont  acquis  la  propriété  pour  l'Alle- 
magne du  nouvel  opéra  d'Auber,  le  Premier  Jour  de  bonheur. 

,it**  La  Société  impériale  des  Orphéonistes  de  Lille,  pendant  tout  le 
couis  de  notre  rigoureux  hiver,  a  fait  distribuer  gratuitement,  par  les 
soins  d'un  comité  spécial,  des  aliments  aux  indigents  de  cette  grande 
cité  manufacturière.  Ce  fait  est  une  éclatante  consécration  du  principe  de 
charité  bien  entendue  qui  préside  à  l'institution  nationale  du  chant  choral 
populaire. 

»*5^  Il  est  question  d'un  concours  orphéonique,  dont  la  direction  artis- 
tique serait  confiée  à  M.  A.  Méreaux,  et  qui  aurait  lieu  le  24  mai  pro- 
chain, à  Rouen,  à  l'occasion  du  concours  régional  que  l'Empereur  doit 
honorer  de  sa  présence. 

**,j  L'inauguration  prochaine  de  la  statue  équestre  de  Napoléon  l",  à 
Grenoble,  sera  célébrée  par  un  festival  choral,  sous  la  présidence  de 
MM.  Berlioz,  un  glorieux  enfant  du  Dauphiné,  Besozzi  et  Delsarte;  on  y 
exécutera  une  cantate  militaire  de  circonstance  et  la  Gaule,  grand  chœur 
d'ensemble,  populaire  parmi  les  Sociétés  orphéoniques,  de  MM.  Mathieu 
de  Monter  et  Jules  Monestier. 

,**  Fort  peu  de  billets  restent  à  prendre  pour  le  bal  des  Artistes,  qui 
aura  lieu  à  l'Opéra-Comique  le  14  de  ce  mois.  Outre  la  réputation  de 
bon  goût  justement  acquise  à  cette  fête,  elle  emprunte  cette  année  un 
attrait  inusité  à  la  tombola,  dont  l'unique  lot  est  uu  bijou  d'une  valeur 
de  3,000  francs. 

^"^  Mme  Isabella  Behr,  femme  du  D'  Behr,  —  littérateur  distingué  et 
correspondant  de  plusieurs  journaux  étrangers,  —  cultive  avec  succès  la 
mu.sique,  et  sa  réputation  comme  professeur  de  chant  est  parfaitement 
établie.  — Elle  vient  de  mettre  en  musique  la  Chanson  de  Mai  de  Goethe, 
l'Attente  et  le  Chant  du  soir  du  Voyageur  de  Riickert,  avec  paroles  fran- 
çaises et  allemandes,  et  ces  trois  mélodies,  publiées  par  la  maison  Schott, 
de  Bruxelles,  où  réside  Mme  Behr,  y  obtiennent  un  grand  succès,  très- 
mérité  d'ailleurs  par  le  charme  et  l'expression  dont  elles  sont  empreintes. 
Nous  les  recommandons  à  tous  les  amateurs. 

if*^  Le  grand  succès  qu'obtient  le  nouveau  roman  d'A.  de  Lavergne  : 
le  Lieutenant  Robert  faisait  vivement  désirer  le  second  volume.  Nous  nous 
empresjons  d'annoncer  qu'il  vient  de  paraître  sous  le  litre  de  :  Epouse 
et  Mère,  l'éditeur  Cadot  aj'ant  jugé  à  propos  de  diviser  l'ouvrage  en  deux 
parties  chacune  sous  un  titre  différent. 

^**  Louis  I",  roi  de  Bavière,  qui  avait  depuis  longtemps  abdiqué  la 
couronne,  vient  de  mourir  à  Nice.  Dilettante  passionné,  ami  du  beau 
sous  toutes  ses  formes,  il  avait  puissamment  contribué  à  faire  de  Munich, 
sa  capitale,  un  centre  artistique  et  littéraire,  la  véritable  Athènes  de  l'Alle- 
magne du  Sud. 

ÉTRANGER 

**t  Berlin. —  Pauline  Lucca,  ajirès  ses  triomphes  de  Saint-Pétersbourg, 
a  fait  sa  rentrée  à  l'Opéra  royal  dans  les  Joyeuses  Commères,  de  Nicolaï; 


on  l'a  reçue  comme  l'enfant  prodigue,  tant  avait  paru  longue  son  absence 
d'un  mois!  Et  cependant  il  paraît  certain,  au  grand  désespoir  de  ses 
nombreux  admirateurs,  que  son  engagement  pour  lacajjitale  delà  Rus- 
sie a  été  renouvelé  avant  son  départ.  —  Après  plusieurs  heureux  débuts, 
Mme  de  Voggenhuber  a  été  engagée  comme  première  chanteuse  à  l'O- 
péra. 

*■".«  Magdebourg.  —  Un  accueil  très-sympathique  a  été  fuit  à  Iléro  et 
Léandre,  opéra-comique  nouveau  dont  l'auteur  est  le  chef  d'orchestre  du 
roi  de  Wurtemberg,   \V.  Steinhart. 

^*^  Leipzig.—  Pour  la  première  fois,  une  œuvre  de  Berlioz  a  été  in- 
troduite dans  le  répertoire  des  concerts  du  Gewandhaus.  Le  27  février, 
on  a  joué  avec  succès  sa  symphonie  Harold  en  Italie,  à  un  concert  de 
bienfaisance  donné  au  profit  de  la  Caisse  des  pensions  de  l'orchestre. 
L'ouverture  du  fioî  jl/on/'red,  de  Reinecke,  a  été  aussi  très-bien  accueillie. 

***  Trêves.  —  Encore  une  première  représentation  de  l'Africaine  à 
signaler,  et,  comme  d'habitude,  un  brillant  succès.  La  pre.s.se  locale  ac- 
corde de  grands  éloges  aux  interprètes,  Becker  (Vasco),  Riech  (Nélusko) 
et  Mlle  Da  Ponta  (Sélika),  ainsi  qu'au  directeur  Sclionfeldt. 

^\  Vienne.  —  VOEU  creoé  (Der  Pfeil  im  Auge),  de  Hervé,  a  été  donné 
sans  grand  succès  au  théâtre  An  der  Wien. 

***  Cadix. —  Le  baryton  Everardi  vient  de  terminer  une  brillante  série 
de  représentations  qui  compterànt  dans  sa  vie  d'artiste.  11  est  reparti  pour 
Dînant,  sa  ville  natale,  chargé  de  lauriers  et  tout  disposé  à  en  cueillir 
d'autres. 

***  Milan.  —  A  la  Scala,  le  chorégraphe  Monplaisir  vient  de  donner 
uii  nouveau  ballet,  Brahma,  qui,  aidé  de  toutes  les  .splendeurs  d'une 
mise  en  scène  orientale,  a  beaucoup  plu.  La  Ferraris  a  créé  le  principal 
rôle  avec  son  talent  ordinaire.  La  musique,  considérée  généralement  en 
Ralie  comme  une  chose  toute  secondaire  dans  un  ballet,  à  ce  point  que 
souvent  on  ne  s'inquiète  pas  du  nom  du  compositeur,  est  du  fécond 
Dair  Argine  ;  on  en  dit  beaucoup  de  bien . 

»*,  Gênes.  —  Il  Sogno  d'Ines,  ballet  nouveau  de  Pinzuti,  a  été  très- 
applaudi  au  Carlo  Felice.  Grand  succès  aussi  pour  la  première  danseuse, 
Enrichetta  Lamarre.  —  Une  dépêche  télégraphique  parh;  de  l'effet  gran- 
diose produit  par  l'Africaine,  à  la  Fenîce,  avec  la  Lotti,  Carrion  et 
Merly. 

,it*,  Saint-Pétersbourg.  —Mario  a  brillamment  terminé  sa  saison  panni 
nous.  Il  s'est  fait  vivement  applaudir  dans  une  soirée  donnée  par  le  pianiste 
Braga  dans  les  salons  du  comte  Koucheletf-Besborodko,  où  on  a  également 
fêté  Mmes  Trebelli  et  Volpini,  deux  étoiles  qui  brillent  du  plus  vif  éclat 
sur  le  ciel  un  peu  gris  de  la-Moscovie.  ■    -  ,    , 


CONCERTS  ET  ADDITIONS  MUSICALES  ANNONCÉS. 

Salons  Erard,  aujourd'hui  dimanche  à  2  heures:  matinée  musica'c 
donnée  par  M.  Titus  d'Ernesti,  avec  le  concours  de  Mme  LoIIa  délia 
Rosa,  de  Mlle  Rives,  de  MM.  Marochetti  et  Reuchsel.  —  Le  Style, 
c'est  la  femme,  comédie  inédite,  jouée  par  Mme  Solange  et  M.  Ric- 
canti. 

Salon  Pleyel-Wolff,  mardi  10  mars  :  concert  de  E.  Jacobi ,  avec  le  coa- 
cours  de  Mlle  Bloch  et  de  MM.  Colin  et  Caron,  de  l'Opéra,  et  de 
Mlle  Duval,  de  l'Opéra-Comique. 

Salle  Herz,  mercredi  11  mars  :  deuxième  soirée  de  musique  de  chambre 
de  MM.  Maurin,  Colblain ,  Mas  et  Demunck,  avec  le  concours  de 
M.  C.  Saint-Saëns.  —  Pour  la  première  fois,  quatuor  de  Schumann. 

Salle   Erard,   mercredi  11  mars  :  concert  donné  par    Mlle  T.j  Carreno. 
Salons  Pleyel,  samedi    14   mars:  concert   donné  par  M.  D.  Magnus  et 
Mme  Gaglîano. 

Salle  Herz,  samedi  14  mars  :  deuxième  grand  concert  de  M.  C.  de  Bé- 
riot,  avec  le  concours  de  Mme  Monbelli. 

Salle  Herz,  dimanche  15  mars  :  concert  donné  par  M.  Kow  aUki  et  Mlle 
Pellini,  avec  le  concours  de  MM.  Hermann-Léon,  Sarrasate,  Las- 
serre,  Mlle  E.  Dubois  et  Coquelin,  de  la  Comédie-Française. 

Salle  Herz,  lundi  16  mars  :  concert  de  M.  W.  Kriiger,  avec  le  concours 
de  Mlle  Dolmeisch,  MM.  Ponsard,  Hammer,  Godard  et  Charles  Pot- 
tier. 

Salle  Herz,  jeudi  26  mars  :  concert  donné  par  Mme  Norman-.\eruda,  la 
célèbre  violoniste. 


80 


KEVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE  DE  PAKIS. 


CHEZ    G.     BRANDUS    ET    S.     DUFOUR,    ÉDITEURS,    103,    RUE    DE    RICHELIEU 

Publications  nouvelles  : 

ÉTUDE    EN    FA    MINEUR 


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Composée  pour  le  Piano  par 


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Tzygane-Marche.     D.  MAGNUS.  Souvenirs  de  Hongrie 

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Trois    Morceaux     de    Concert    poLir    le    Piano 

NM.  PAR  N"  2.  N"  3. 

IMPROMPTU  SCHERZO  l       -p         G,  TCi  T*  C  "P   Ti       I        PRÉLUDE      -     NOVELETTE 

Prix  :  7  fr.  SO.  ■"■  O    X   V/  Jj  VX  £j    X\        |  pr,^  .  3  fr_  p^i^:  7  fp.  50. 


Nocturne- Etude  pour  le  Piano. 
Op.  12.  Par  Ch.  PALMER.  6  fr. 


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Poésie  de  Victor  Hugo,  musique  de 
CHARLES  PALMER 


Mélodies  nationales,  paraphrasées  pour  Piano. 

Op.  1^5.  Par  F.  DE  CROZE.  7  50 


ADAGIOS     DE    L.    VAN     BEETHOVEN 


Extraits  des  SONATES  pour  piano  seul, 


TMMMB^MMWTl'ù'MB  WÙ'ÏÏU  WIMM©^  Wl^E^ÙM  MT  ®^^WÊ 


LARGO  DE  LA  GRANDE  SONATE 

Op.  7.  —  Prix  :  7  fr.  50. 


F.    BRISSON 


N°  2 

ADAGIO-CANTABILE 

Op.  13. —  de  la  sonate  pathétique. —  7  50 


liA     PAUTITIOM 

ARRANGÉE  POUR  PIOO  SEUL,  in- 8%  net,  8  fr.  I         POUR  CHANT  ET  PIANO,  in-8°,  net  .   .   .  12  fr. 

DE    LA 

GRANDE-DUCHESSE  DE  GEROLSTEIN 

MUSIQUE    DE 

J.     OFFENBAGH 


Opéra-bouffe  m  trois  actes 
et  quatre  tableaux, 


L'OUVERTURE,     ARRANGÉE     POUR     LE     PIANO  ;     6     FRANCS. 


Paroles  de  S]M.  H.  MEILHAC 
et  L.  HALÉVY, 


LES  AIRS  DETACHES  DE  CHANT 

Avec  accompagnement  de  Piano,  par  L.  Roques. 


LES  AIRS  DETACHES  DE  CHANT 

Sans  ace.  de  Piano,  in-S",  chaque  n°  net,  50  c. 


MEDITATION     DE    LA    GRANDE-DUCHESSE 

MORCEAD  NODVEAD  :  «  Quand  je  regarde  en  moi-même,  ce  que  j'y  vois  est  effrayant,  »   CHANTÉ  PAR  M"''  SCHSEIDER. 

ARRANGEMENTS  : 


FANTAISIE  DE  SAION  pour  le  piano,  par  E.  Ketterer.   ...  7  50 

DEDX  BODQDETS  DE  MÉLODIES,  mosaïques,  par  Cramer,  chaque  7  50 

FANTAISIE  ÉLÉGANTE  pour  le  piano,  par  Ruï>mel 6    » 

BAGATELLE  pour  le  piano,  par  Lecarpentier 5    » 

DDO  FACILE  à  quatre  mains,  par  Ed.  Muller 6    » 

FANTAISIE  GRACIEUSE  pour  le  violon,  par  Ad.  Herman  ...  7  50 

CAPRICE  FACILE  pour  la  tlùte,  par  Gariboldi.   .......  S    » 

GRANDE  VALSE,  pour  le  piano  et  à  quatre  mains,  par  Strauss  6     » 


QUADRILLE  pour  le  piano  et  à  quatre  mains,  par  H.  Marx  .  4  50 

QUADRILLE  pour  le  piano  et  à  quatre  mains,  par  Arban.  .    .  4  30 

QUADRILLE  pour  le  piano,  par  A.  Mev 4  50 

POLKA-MAZURKA  pour  le  piano,  par  Lindheim 4    » 

SCHNEIDER-POLKA.  par  Roques,  pour  piano  et  à  quatre  mains  6     • 

GRANDE  POLKA,  pour  le  piano,  par  Arban 4    » 

GALOP  DE  L4  GRANDE -DUCHESSE  composé  par  Offenbach,  réduit 
pour   le  piano  et  à  quatre  mains ,    par   Roques  . 


50 


îa^S      ^©WA'UM.     "BM      îa^ 


Transcriptious  faciles  dea  principaux  airs  pour  le  piano,  par  ivolfart. 


Rondo  de  la  Duchesse 3  75 

Chanson  du  Régiment 3  75 

Couplets  du  Sabre 3    » 

Couplets  des  Lettres 3  75 


5.  Ballade  bouffe 3  75 

6.  Rondo  de  la  Bataille 3  75 

7 .  La  Déclaration  et  Gazelle  de  HollanJe  3  75 

8.  Entr'acte  (du  3"  tableau) 3  » 


Composé 
Pour  les  Bals  Ce  TOpéra, 


9.     Nocturne  :  Bonne  nuit 3    » 

10.  A  cheval,  général  ! 3  75 

11 .  Légende  du  Verre 3    » 

12.  Complainte  et  Chant  nuptial.  3    » 

Illustré  de 


OCADRILLE  NOCVTÎAU  PAR  STRAUSS  ,_^.,  .......  „,.„,, 

Pour  le  Piano  i  i  fr.  SO.  —  A  quatre  mains  :  i  fr.  SO. 
Quadrille.  —  Polka  et  Polka-Uazurka.  —  Crande  Valse,  arrangée  pour  Violon,  pour  Flûte  et  ponr  Cornet,  chaque  :  1  franc. 

Les  Airs   arrangés  pour  Violon,    pour   Flûte   et  pour  Cornet. 
lies  Parties  d'orclieslre  complètes.    —    Valses,  Quadrilles,  Polkas,  Polka-Uaznrka,  pour  orcltestre. 


IIEUIKS  DE  FER    —  . 


,  30,  A  P&:l3. 


BUREAUX    A    PARIS  :    BOULEVARD   DES   ITALIENS,  1. 


5S'  Année. 


N"  \i. 


1S  mars  1868. 


ON  S'ABONNE  : 

Dans  les  Départements  et  ù^l'Étrongcr, 

chez  tous  les  Iforchonds  de  Musique,  1rs  Libraires, 

et  aux  Bureaux  df;  Mi'ssageries  et  des  Posles. 


REVUE 


PRIX    DE    L'ABONNEMENT: 

Paria. ?*   r.  par  ;■ 

Départements,  Ililgiquc  et  Suisse...      :îti  -.       iiL 

Étranger 34  n       id. 

Le  Journal  paraît  le  Dimanche. 


GAZETTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


SOMMAIRE.  —  Théâire  impéi'ial  de  l'Opéra:  Mamlet  ,  grand  opéra  en  cinq 
actes,  paroles  de  MM.  Michel  Carré  et  Jules  Barbier,  musique  de  M.  Ambroise 
Thomas,  par  Paul  Bernard.  —  Théâtre  impérial  Italien  :  reprise  de 
Matilda  di  Shabran,  de  Rossini;  débuts  de  M.  et  Mme  Tiberini,  par  Uanrive 
tiray.  —  Entrefilets.  —  Concerts  et  auditions  musicales  de  la  semaine.  — 
Nouvelles  des  théâtres  lyriques.  —  Nouvelles  diverses.  —  Concerts  et  audi- 
tions musicales  annoncés.  —  annonces. 


THÉÂTRE  IMPÉRIAL  DE  L'OPÉRA. 

HAMLET, 

Grand  opéra  en  cinq  actes,  paroles  de  MM.  Michel  Carré  et 
Jules  Barbier,  tmtsiqve  de  M.  Ambroise  Thomas. 

(Première   représentation  le  9  mars  1868.) 

Etant  admis  en  principe  qu'il  est  possible  de  toucher  aux  grandes 
œuvres  du  temps  passé  pour  les  plier  aux  exigences  d'aujourd'hui, 
pour  les  amputer  de  ce  qui  nous  blesse,  tout  en  les  dotant  de  ce 
qui  nous  flatte,  en  un  mot  ^our  les  approprier  au  goût  du  théâ- 
tre moderne,  on  ne  saurait  nier  que  le  nouvel  ouvrage  de 
MM.  Michel  Carré  et  Jules  Barbier  se  trouve  bien  compris  dans 
son  ensemble,  et  que  le  colosse  shakspearien ,  en  passant  dans  le 
moule  capitonné  de  notre  civilisation  tant  soit  peu  efféminée,  n'a 
pas  trop  perdu  de  ses  arêtes  viriles  et  s'est  prêté  avec  assez  de 
complaisance  aux  développements  difficiles  d'une  grande  tragé- 
die lyrique. 

Sauf  quelques  petites  querelles  de  détails,  on  peut  dire  que 
leur  pièce  est  bien  coupée  au  point  de  vue  du  drame,  intéressante 
autant  que  l'œuvre  philosophique  de  Shakspeare  peut  l'être  pour 
des  auditeurs  simplement  désireux  de  se  distraire,  qu'elle  off're 
quelques  beaux  vers,  parfois  incisifs,  qu'enfin  elle  semble  digne  à 
plusieurs  titres  de  la  grande  source  à  laquelle  elle  n'a  pas  craint 
d'emprunter  ses  eaux  vives  et  ses  torrents  impétueux.' 

Ne  pouvait-on  redouter,  en  effet,  que  la  musique  ne  se  prêtât 
pas  complètement  aux  conflits  d'une  vengeance  inspirée  par  les 
légendes  du  Nord,  tortueuse  dans  ses  moyens,  philosophique  plu- 
tôt que  passionnée,  fatale  plutôt  que  raisonnée?  La  vcndelta  corse, 


avec  ses  fougueuses  colères,  semblerait  plus  apte  à  inspirer  un 
art  tout  de  sentiment  et  d'élan;  cependant  la  musique  off're 
aussi  son  côté  contemplatif,  immatériel,  et  les  tendances  de 
la  nouvelle  école  que  l'Allemagne  nous  envoie  l'y  poussent  d'une 
façon  toute  particulière.  C'était  plus  qu'il  n'en  fallait  pour  donner 
au  terrible  sujet  d'Hamlet  toutes  les  tentations  qui  captivent  les 
esprits  chercheurs  et  courageux.  M.  Ambroise  Thomas,  par  ses 
travaux  antériîurs,  par  ses  tendances  plutôt  sérieuses  que  légères, 
par  la  souplesse  même  de  sa  faculté  créatrice,  acceptant  tous  les 
genres  qu'un  tel  cadi'e  comporte ,  se  trouvait  bien  être  l'homme 
d'une  semblable  tentative.  S'il  y  avait  danger,  il  était  le  lutteur 
désigné  d'avance.  S'il  devait  y  avoir  réussite,  son  étoile  valeureuse 
devait  l'y  conduire  sûrement. 

C'était  donc  avec  confiance  que  je  voyais  s'approcher  l'épreuve 
décisive.  Je  me  disais  bien  que  les  aspérités  de  Shakspeare  sont 
dures  à  côtoyer,  et  que,  si  nous  aimons  à  frémir  avec  lui,  le  soir, 
au  coin  de  notre  feu.  nous  consentons  moins  à  le  suivre  au 
théâtre,  où  nous  cherchons  avant  tout  l'image  de  la  vie  réelle  e* 
de  nos  sentiments  particuliers.  Mais  je  me  disais  par  contre  que 
les  tableaux  chevaleresques  qu'on  pouvait  tirer  d'un  pareil  sujet 
prêtaient  beaucoup  au  développement  musical,  que  la  blonde 
Opliélie  et  sa  poétique  fin  pouvaient  motiver  une  opposition  pleine 
de  charme,  que  le  drame  intime  dans  ses  terribles  péripéties 
devait  présenter  de  superbes  situations,  et  qu'enfin  la  scène  de 
l'esplanade,  entre  des  mains  habiles  et  sur  une  aussi  vaste  scène 
que  celle  de  l'Opéra,  prendrait  certainement  de  magiques  et  gran- 
dioses proportions. 

Mes  prévisions  aujourd'hui  se  trouvent  réalisées.  Je  désire  sin- 
cèrement d'ailleurs  que  les  sérieux  efforts  de  M.  Ambroise  Thomas 
soient  couronnés  d'un  succès  éclatant  et  durable;  je  fais  plus,  je 
le  crois. 

Son  œuvre  est  de  celles  qu'il  faut  écouter  avec  soin,  entendre 
et  réentendre.  Telle  grande  toile  en  peinture  peut  captiver  par 
son  ensemble  et  charmer  ensuite  par  ses  détails.  Le  nouvel  Hamlet 
est  de  cette  catégorie.  Les  connaisseurs,  en  y  fouillant,  rencontreront 
des  trésors  rares  et  de  la  plus  suprême  élégance.  Le  simple  pu- 
blic s'habituera  à  la  teinte  un  peu  sombre  de  l'ouvi'age  pour  n'y 
plus  voir  ensuite  que  la  sûreté  de  touche  et  le  vigoureux  coloris 
qui  savent  intéresser  les  masses.  Le   premier  soir,    l'irrésistible 


KEVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


tableau  de  la  mort  d'Ophélie  a  électrisé  la  salle  entière;  je  suis 
persuadé  que  peu  à  peu  les  autres  parties  de  l'œuvre  se  placeront 
avantageusement  à  côté  de  ce  succès  écrasant. 

Il  n'est  pas  besoin,  je  pense,  de  raconter  textuellement  un  sujet 
que  chacun  sait  par  cœur.  Je  me  bornerai  à  constater  que  les 
auteurs  ont  à  peu  près  suivi  le  plan  de  leur  colossal  modèle,  tout 
en  s'en  éloignant  plus  ou  moins  heureusement  dans  certains  dé- 
tails et  même  dans  certains  faits  d'une  assez  grande  importance. 
Par  exemple  le  meurtre  de  Polonius  qui,  supprimé,  ne  sert  plus 
de  mobile  à  la  vengeance  de  Laërte.  Au  premier  acte  l'exposition 
est  formée  par  le  couronnement  de  la  reine  et  par  un  duo  entre 
Ophélie  et  Hamlet.  Cet  acte  se  termine  sur  l'esplanade  d'Elseneur 
par  la  saisissante  apparition.  Le  second  a  pour  clef  de  voûte  la 
grande  scène  des  comédiens.  Le  troisième  est  tout  entier  rempli 
par  le  drame  intime  et  terrifla^it.  Un  monologue  du  roi,  un  trio 
entre  la  reine,  Hamlet  et  Ophélie,  la  grande  scène  entre  Hamlet 
et  sa  mère,  avec  la  seconde  apparition  de  l'ombre,  établissent 
son  contingent.  La  mort  d'Ophélie  forme  le  quatrième.  Ce  der- 
nier appartient  complètement,  comme  création,  aux  auteurs  fran- 
çais ;  et,  si  l'on  en  croit  le  succès,  c'est  là  une  de  leurs  meilleures 
idées.  Rien  de  poétique  comme  ce  ravissant  tableau  commençant 
par  un  ballet  villagecàs  emprunté  aux  mœurs  danoises  et  qui  s'ap- 
pelle la  Fête  du  Printemps.  Le  1"  mai  de  chaque  année,  quand 
la  neige  de  six  mois  est  rentrée  en  terre,  quand  la  verdure  et  les 
fleurs,  comme  un  pardon  du  ciel,  s'élancent  des  bourgeons  et 
des  boutons,  le  village  se  réunit  dans  la  campagne,  on  élit  un 
roi  et  une  reine,  le  roi  du  printemps,  la  reine  des  fleurs,  et  l'on 
danse,  et  l'on  chante,  et  l'on  se  réjouit  avec  usure  pour  oublier 
leSj.longs  mois  d'hiver  que  les  frimas  rendaient  si  tristes.  Vous 
voyez  d'ici  le  délicieux  tableau  que  cela  peut  faire.  Pour  cadre 
le  paysage  gracieux  que  les  voyageurs  rencontrent  à  Elseneur  ; 
pour  horizon  le  lac  Bleu,  ce  poétique  lac  où  la  blonde  Ophélia 
s'endort  comme  dans  une  couche  nuptiale.  Je  ne  connais  que  le 
second  acte  de  Giselle  qui  puisse  être  un  équivalent  ^  ce  rêve  en- 
chanteur ! 

Le  cinquième  acte  nous  ramène  vers  le  sombre.  C'est  la  scène 
du  cimetière,  et  le  dénoûment  plutôt  imité  du  drame  de  MM.  Paul 
Meurice  et  Alexandre  Dumas  que  du  grand  Shakspeare.  En  effet, 
Hamlet  vivra  pour  régner  et  se  souvenir;  la  reine  aussi  vivra 
pour  conserver  ses  remords  et  les  enterrer  dans  un  cloître.  L'in- 
nocent Laërte  n'est  pas  tué;  Polonius  vit  encore.  Tout  cela  est 
moins  logique,  mais  la  boucherie  finale  n'existe  plus,  et,  ma  foi, 
surja  scène  de  l'Opéra  je  n'ai  pas  le  courage  de  la  regretter  beau- 
coup. 

Puisque  nous  en  sommes  aux  différences  qui  séparent  le  mo- 
dèle de  la  copie,  nous  allons  de  suite  régler  leur  compte.  Une  des 
principales  consiste  dans  la  complicité  du  vieux  Polonius  avec  le 
roi.  Il  en  résulte  qu'Hamlet,  englobant  dans  la  même  réprobation 
le  père  et  la  fille,  repousse  énergiquement  l'amour  de  la  pauvre 
Ophélie  et  la  réduit  au  désespoir.  Cela  a  pour  effet  de  rendre 
moins  brutal,  en  le  motivant,  le  cruel  abandon  d'FIamlet,  mais 
cela  a  le  grand  tort  de  jeter  sur  Laërte  et  sur  Ophélie  une  tache 
originelle  tout  à  fait  fâcheuse.  Et  puis  encore,  si  Polonius  est  cou- 
pable, pourquoi  ne  pas  le  punir? 

Tel  qu'il  est,  le  livret  du  nouvel  opéra  reste  parfaitement  dans 
la  couleur  de  Shakspeare.  On  y  retrouve  la  même  fièvre  pas- 
sionnée, la  fatalité  implacable  s'acharnant  sur  ses  victimes,  le  glas 
de  la  [mort  vibrant  au  milieu  des  fêtes,  et  par-dessus  tout  cela 
une  conviction  qui  marche  vers  son  but  sans  faiblesse.  La  partie 
philosophique  seule  y  est  moins  développée;  cela  devait  être.  On 
ne  discute  pas  avec  des  mélodies,  et  l'esthétique  musicale  doit 
s'arrêter  là  où  les  nuages  de  la  pensée  commencent.  Il  faut  même 
savoir  gré  à  M.  Ambroise  Thomas  de  ne  pas  s'être  laissé  entraî- 


ner sur  ce  terrain  dangereux  plus  loin  (^ue  son  tempérament  ne 
le  comportait.  Il  eût  pu  se  noyer  dans  un  flot  de  dissonances  et 
de  septièmes  diminuées.  L'absence  de  tonalité  eût  été  pour  lui  un 
grand  moyen.  Au  contraire,  si  le  musicien,  comme  il  le  fallait  du 
reste,  s'est  servi  parfois  de  la  mélopée  rêveuse,  il  a  su  y  déve- 
lopper une  clarté  qui  ne  blesse  pas  l'oreille  et  qu'on  peut  suivre 
sans  fatigue.  La  tonalité  toujours  fixée  n'échappe  pas  à  l'analyse. 
Le  sens  final  ne  vous  fuit  pas  comme  un  mirage  trompeur.  C'est 
la  déclamation  lyrique  rehaussée  de  merveilleux  dessins  d'accom- 
pagnement. 

Et  puisqu'il  s'agit  des  dessins  d'accompagnement,  j'ajouterai 
que  jamais  encore  M.  Ambroise  Thomas  n'était  allé  si  loin  sous 
ce  rapport.  Son  ingéniosité  est  inépuisable.  Les  rhythmes  mêlés, 
l'accouplement  des  timbres,  l'emploi  des  nouveaux  instruments,  la 
poésie  de  l'orchestre,  cela  devient  un  monde  entre  ses  mains  ha- 
biles. Il  joue  de  l'orchestre  comme  un  virtuose  et  sans  qu'on 
puisse  remarquer  le  moindre  effort.  Selon  le  cas,  c'est  fin  comme  le 
brin  d'herbe,  grand  comme  la  mer,  gris  comme  le  brouillard, 
brillant  comme  le  soleil. 

Le  premier  exemple  de  cette  richesse  symphonique  se  présente 
tout  d'abord  dans  le  prélude  d'entrée.  Un  trémolo  mouvementé 
des  instruments  à  cordes,  coupé  par  des  récitatifs  de  cor,  est  tout 
à  coup  interrompu  par  une  fanfare  sur  la  scène;  puis  un  rapide 
trait  de  violon  amène  une  marche  chevaleresque  qui  ouvre  d'une 
grande  manière  ce  premier  tableau.  Un  chœur  sonore  et  très- 
mélodieux  précède  un  beau  récit  du  roi,  et  cette  introduction  se 
termine  dans  une  chaleureuse  péroraison  chorale  doublée  d'effet 
de  cloches  et  de  canon.  Il  y  a  là  une  phrase  mélodique  large- 
ment tracée  et  de  la  plus  belle  venue.  La  scène  reste  vide  alors, 
et  Hamlet  vient  soupirer  l'un  de  ces  délicieux  monologues-récitatifs 
dont  tout  le  rôle  sera  plein.  Sur  cette  phrase,  adorablement  dite 
par  Faurc. 

0  femme  ! . . .  tu  t'appelles 
Inconstance  et  fragilité. 

la  salle  a  fait  entendre  un  de  ces  murmures  qui  présagent  le  suc- 
cès, comme  ces  brises  matinales  qui  annoncent  un  beau  jour. 

Le  duo  qui  suit  entre  Ophélie  et  Hamlet  est  fort  habilement 
traité,  mais  il  présente  surtout  une  de  ces  phrases  de  premier 
ordre  destinée  à  planer  sur  toute  la  partition,  effluve  d'amour  qui 
remontera  au  cœur  du  désespéré  Hamlet  et  qui  séchera  les  pleurs 
de  la  pauvre  insensée.  Ce  duo,  dans  le  genre  contemplatif,  se  ter- 
mine par  un  fort  joli  ensemble  avec  vocalises  d'Ophélie.  Il  faut 
citer  aussi  une  cavatine  de  Laërte  dont  la  couleur  chevaleresque 
est  très-accusée.  On  y  remarque  un  élan  de  la  plus  grande  suavité 
sur  ces  mots  : 

Elle  est  mon  orgueil  et  ma  vie. 

Ce  premier  tableau  est  assez  brillamment  achevé  par  un  chœur 
qui  porte  sa  marque  de  fabrique.  On  y  sent  la  main  qui  a  écrit  le 
chœur  des  chasseurs  du  Songe  d'une  nuit  d'été,  et  quantité  d'autres 
très-choyés  par  les  orphéons.  Ce  dernier  sera  certainement  du 
nombre.  A  l'Opéra,  on  fait  doubler  la  partie  de  ténor  par  les  con- 
traltos. Cela  est  d'un  effet  neuf. 

Nous  voici  arrivés  à  l'une  des  plus  grandes  pages  de  la  partition, 
la  scène  de  l'esplanade.  Ici,  depuis  la  première  note  jusqu'à  la 
dernière,  tout  est  beau.  L'orchestre  à  lui  seul  forme  un  saisissant 
tableau.  La  bise  souffle,  la  neige  tombe,  les  spectres  passent.  La 
tourmente  est  dans  l'air  et  dans  les  cœurs  ;  on  a  froid.  Un  prélude 
avec  solo  de  trombone  à  six  pistons  précède  la  scène  entre  Ham- 
let et  ses  amis.  Une  phrase  délicieuse  est  celle-ci  : 

Mais  que  redoutons-nous  de  ceux  que  nous  perdons. 
S'ils  nous  ont  aimé  sur  la  terre? 

Minuit   sonne,  et  sur  le  fa   dièse  de  la  cloche  passent  d'ingé- 


bE  PARIS. 


83 


nieuses  et  teiTÏliantes  harmonies.  Le  spectre  paraît  alors  et  un 
fatal  et  superbe  dessin  d'orchestre  accompagne  cette  allocution 
d'Hamlet  : 

Spectre  infernal,  image  vénérée! 

0  mon  père,  0  mon  roi  ! 
Réponds  à  ma  voix  éplorée, 

Parle-moi,  parle-moi  ! 
L'ombre  se  décide  enfin  à  parler,  psalmodiant  sur  une  seule 
note,  et,  sur  cette  note  persistante,  les  effets  d'orchestre  se  succè- 
dent magnifiques  et  saisissants.  Voici  le  cor  anglais  et  la  clari- 
nette qui  nous  font  penser  aux  profondeurs  du  sépulcre  ;  voici  les 
violons  en  sourdine  dont  les  tierces  vacillantes  nous  annoncent 
l'aube  qui  va  naître;  voici  les  fanfares  lointaines  et  le  canon  qui 
accompagnent  la  fête  au  palais.  Tout  cela  se  combine  avec  un 
rare  bonheur,  et  quand  le  rideau  tombe  on  est  tout  étonné  de  la 
sensation  immense  que  l'on  vient  d'éprouver.  Je  le  répète,  c'est 
une  grande  page;  l'ombre  de  Gliick  pourrait  bien  y  avoir  apparu. 
Le  second  acte  sera  moins  riche.  Il  commence  par  un  joli  fa- 
bliau d'Ophélie  où  l'auteur  s'est  évidemment  inspiré  des  formules 
musicales  du  Nord.  L'air  de  la  reine,  qui  suit  immédiatement  après, 
est  moins  heureux.  Il  faut  mentionner  une  phrase  incidente 
d'Hamlet  où  les  premiers  vestiges  de  folie  se  font  sentir  : 

Je  voudrais  avec  eux  voyager  dans  les  airs. 
Au  milieu  des  étoiles. 
Au  milieu  des  éclairs  ! 

Le  chœur  des  comédiens  est  pittoresque  et  rentre  dans  les  cor- 
des de  la  musique  rétrospective.  La  chanson  bachique  d'Hamlet, 
quoique  à  efl'et  pour  la  voix,  m'a  paru  plus  ordinaire;  mais  voici 
une  superbe  marche  dont  le  trio  surtout  est  d'un  beau  caractère. 
Elle  précède  la  scène  de  la  pantomime  dans  laquelle  le  genre  sym- 
phonique  va  reprendre  son  importance.  Un  délicieux  solo  de  saxo- 
phone lui  forme  ouverture,  puis  une  espèce  de  pastorale  d'une 
touche  délicate  et  discrète  sert  de  fond  aux  récitatifs  d'Hamlet  ex- 
pliquant la  comédie.  Cette  scène  est  l'occasion  d'un  grand  succès 
pour  Faure  qui  la  joue  en  artiste  de  premier  ordre.  Le  finale  dra- 
matique qui  termine  ce  second  acte  manque  peut-être  de  précision 
dans  la  forme  ;  cependant  les  masses  y  sont  magistralement  grou- 
pées. 

Un  prélude  fort  beau  ouvre  le  troisième  acte  qui  de  suite  nous 
offre  le  fameux  monologue  d'Hamlet  :  Être  ou  ne  pas  être.  Ceci 
était-il  réellement  possible  à  mettre  en  musique?  Il  est  permis 
d'en  douter,  et  cependant  le  compositeur  s'en  est  tiré  avec  hon- 
neur en  appelant  encore  à  son  aide  les  ressources  de  son  orches- 
tration savante;  malgré  tous  ses  efforts,  malgré  le  magnifique  ta- 
lent de  l'interprète,  la  chose  est  restée  froide  :  c'était  écrit  d'avance. 
Une  chose  plus  froide  encore,  mais  alors  parce  qu'elle  a  vieilli  de 
forme,  c'est  l'air  de  basse  chanté  par  le  roi.  Dieu  merci!  nous 
allons  maintenant  rencontrer  un  très-beau  trio,  relevé  surtout  par 
la  magnifique  phrase  d'Hamlet  : 

Allez  dans  un  cloître,  allez,  Ophélie. 

Voilà  de  la  franche  mélodie,  attrayante  sans  vulgarité,  pure  de 
forme  sans  vétusté,  pleine  de  sentiment  et  de  charme.  L'ensemble" 
qui  vient  après,  un  peu  à  la  manière  italienne,  dénote  chez  le 
compositeur  une  merveilleuse  entente  dans  l'art  de  grouper  les 
voix.  Il  n'y  aura  qu'à  louer  dans  le  duo  d'Hamlet  et  de  la  reine, 
mais  je  citerai  surtout  la  belle  phrase  adressée  au  portrait  de  son 
père  par  le  fils  vengeur.  La  seconde  apparition  de  l'ombre  vient 
clore  dignement  cette  série  de  beautés. 

Aux  yeux  de  tous,  il  faut  bien  l'avouer,  nous  voici  arrivés  à  la 
pierre  de  touche  de  la  partition.  Pour  ce  quatrième  acte,  il 
semble  que  tous  ceux  qui  y  ont  coopéré  aient  bu  d'un  philtre  ma- 
gique et  inspirateur  :  les  auteurs  pour  l'avoir  conçu,  les   décora- 


teurs pour  avoir  créé  le  cadre,  le  directeur  pour  y  avoir  placé 
Mlle  Nilsson,  Mlle  Nilsson  pour  son  interprétation  hors  ligne,  et 
enfin  le  compositeur  pour  avoir  donné  la  vie  à  tout  ceci  dans  un 
baptême  harmonieux  et  mélodique  dont  chaque  phrase  est  un 
trésor.  De  délicieux  airs  de  ballet  dans  lesquels  j'ai  remarqué  une 
mazurke  des  plus  distinguées  et  un  duo  fort  original  de  clari- 
nette et  hautbois,  précèdent  la  grande  scène  de  Mlle  Nilsson.  La 
folie  a  été  bien  souvent  employée  au  théâtre.  Je  ne  crois  pas  qu'on 
l'ait  encore  envisagée  sous  ce  rapport.  Cette  folie  douce  qui  prend 
part  aux  plaisirs  et  que  la  danse  entoure,  qui  jette  ses  sanglots  et 
ses  rires  à  la  fois,  qui  effeuille  en  môme  temps  les  fleurs  de  son 
tablier  et  celles  de  ses  vocalises,  et  qui,  finalement,  se  couche  sur 
l'eau  avec  la  sainte  confiance  de  l'enfant  qui  s'endort,  tout  cela 
est  d'une  poésie  telle  que  le  succès  s'y  est  attaché  immense,  volon- 
taire, interminable.  Il  faut  tout  citer  dans  ce  long  morceau  de  la 
folie.  On  y  trouve  des  récits  d'une  admirable  suavité.  La  valse 
chantée  est  un  bijou,  la  mélodie  suédoise  étonne  et  captive;  enfin 
les  chants  séraphiques  qui  semblent  sortir  du  lac  sont  tellement 
vaporeux,  tellement  diaphanes,  qu'on  croirait  volontiers,  comme 
la  blonde  Ophélie,  n'appartenir  plus  à  la  terre. 

Le  cinquième  acte  n'est  pas  long.  Désireux  d'arriver  plus  vite  à 
l'interprétation  générale  de  l'ouvrage,  je  ferai  comme  lui.  La  chanson 
des  fossoyeurs  est  très-caractérisée.  Une  romance  d'Hamlet  m'a 
semblé  devoir  son  succès  à  la  manière  adorable  dont  elle  est  dite. 
Quant  à  la  marche  funèbre,  elle  procède  d'un  grand  style  et  le 
chœur  des  jeunes  filles  qui  la  coupe  s'y  joint  admirablement.  On 
le  voit,  la  fin  de  l'œuvre  reste  très-honorable,  mais  elle  rentre 
plus  que  jamais  dans  la  couleur  sombre  qui,  sauf  le  quatrième 
acte,  n'a  cessé  de  planer  sur  tout  l'ouvrage.  Les  gens  qui  aiment 
le  noir  seront  satisfaits;  cependant,  il  faut  bien  en  convenir,  à  la 
longue,  c'est  un  peu  deuil  ! 

Par  droit  d'ancienneté  et  pour  l'importance  de  son  rôle,  je 
parlerai  de  Faure  en  premier.  La  création  d'Hamlet  lui  sera  comp- 
tée et  fera  époque  dans  sa  vie  d'artiste.  Il  joue  magnifiquement, 
il  chante  irréprochablement.  Sa  voix,  d'une  pureté  sans  égale,  se 
fait  entendre  dans  les  effets  de  la  plus  grande  douceur,  et  sa  dic- 
tion est  si  soignée  qu'il  est  impossible  d'en  perdre  la  plus  légère 
syllabe.  Quel  chanteur  et  quel  comédien!  D'un  bout  à  l'autre  de 
celte  longue  partition  il  obtient  des  succès  partiels  pour  une 
phrase,  pour  un  mot,  pour  un  geste.  Mais  que  ce  rôle  est  écra- 
sant! Toujours  en  scène  pendant  quatre  actes,  quel'  est  l'athlète, 
excepté  lui,  capable  de  supporter  une  aussi  lourde  tâche? 

Mlle  Nilsson,  à  l'heure  qu'il  est,  n'est  plus  une  simple  canta- 
trice, c'est  une  idole.  On  craignait  à  l'avance  la  grandeur  du 
vaisseau  de  l'Opéra  pour  sa  fraîche  voix.  Ce  charmant  ruisseau  est 
devenu  un  fleuve  immense.  J'ai  rarement  entendu  de  voix  qui 
remplisse  aussi  merveilleusement  cette  vaste  salle  :  c'est  un  jet  de 
cristal  d'une  éblouissante  limpidité.  Elle  a  des  audaces  de  nuances 
indescriptibles,  des  phrases  d'une  poésie  bleue,  des  ténuités  mi- 
croscopiques, des  ampleurs  de  son  qui  semblent  sortir  d'une  flûte 
ossianique.  Elle  a  joué  la  scène  de  folie  avec  un  charme  fasci- 
nateur  et  y  a  déployé  une  passion  pudique  dont  elle  semble  la 
personnification.  Riant  et  sanglotant  presque  simultanément,  elle 
a  tenu  son  public  suspendu  à  ses  lèvres  avec  l'autorité  des  artistes 
les  plus  consommés.  Et  cela  avec  un  naturel  exquis,  sans  le 
moindre  souci,  sans  la  moindre  fatigue. 

Aussi  quel  triomphe  !  Le  marché  aux  fleurs  tout  entier  renversé 
sur  la  scène  de  l'Opéra,  et  des  applaudissements  à  faire  crouler 
la  vieille  salle  avant  que  celle  de  M.  Garnier  ne  soit  achevée. 

Mme  Gueymard  a  joué  le  rôle  dramatique  de  la  reine  avec  in- 
finiment de  grandeur  et  d'élan.  Elle  a  supporté  vaillamment  une 
forte  part  du  fardeau  de  cet  important  ouvrage.  Belval  a  fait  de 
son  mieux  dans  le   personnage   du  roi,    mais  il  n'a  pas  l'organe 


84 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


assez  timbré  pour  éviter  le  cotonneux  des  voix  de  basse.  Il  en  est 
de  même  de  David  qui  joue  le  spectre.  On  ne  voit  pas  bien  clair 
dans  les  profondeurs  de  son  gosier ,  et  l'on  craint  quelquefois  de 
n'entendre  pas  très-juste.  Décidément  les  basses  s'en  vont.  M.  Col- 
lin  s'est  fait  applaudir  sous  le  nom  de  Laërte  pour  sa  jolie  voix 
de  ténor.  MM.  Castelmary  et  Grisy  remplissent  honorablement 
leurs  petits  rôles. 

J'aurais  bien  envie  de  chanter  :  la  danse  n'est  pas  ce  que  j'aime, 
mais  ce  sont  Mlles  Fioretti  et  Fiocre.  Dans  la  Fêle  du  printemps, 
elles  ont  obtenu  un  grand  et  légitime  succès. 

Les  décorations  sont  splendides.  Le  château  d'Elseneur  couvert 
de  neige,  la  nuit,  par  le  clair  de  lune,  a  fait  sensation.  Le  ci- 
metière est  excessivement  pittoresque;  le  lac  Bleu,  une  mer- 
veille. 

Les  costumes  sont  fort  beaux,  mais  l'armure  du  spectre  m'a 
semblé  bien  neuve.  La  mise  en  scène  a  été  des  plus  soignées. 

On  sait  ce  que  vaut  l'orchestre  de  l'Opéra  les  jours  de  grande 
épreuve;  M.  Georges  Hainl  en  est  le  Masséna. 

Qui  doit-on  féliciter  de  M.  Perrin  qui  a  engagé  Mlle  Nilsson,  ou 
de  Mlle  Nilsson  qui  a  accepté  le  rôle  d'Ophélie?  Quant  à  M.  Am- 
broise  Thomas,  il  me  fait  l'effet  d'un  homme  arrivé  au  sommet 
de  l'échelle  —  même  de  la  double  échelle.  Les  honneurs  le  pour- 
suivent et  les  succès  le  caressent.  Il  les  mérite  à  tous  égards 
d'ailleurs,  et  nous  devons  nous  estimer  heureux  de  compter  un 
musicien  de  cette  valcvu-  parmi  nous.  Ilamlet  est  une  de  ces  œu- 
vres viriles,  quel  qu'en  soit  le  sort,  qui  honore  le  pays  où  elle  a 
pris  naissance  et  l'auteui'  qui  l'a  longuement  prcconfue. 

Paul  BERNARD. 


THÉÂTRE  IMPÉRIAL  ITAUEN. 

Beprise  de  SIATIE.DA  DI  SDABBAW  de  Bosslni. 

Débuts  de  M.  et  Mme  TiberIiNI. 

Il  y  a  bien  des  années  qu'on  n'avait  donné  au.x  Italiens  Matilda 
di  Shabran,  et  que  cette  partition  dormait  paisiblement  sur  les 
rayons  poudreux  de  la  bibliothèque.  Je  crois  que  la  dernière  re- 
prise de  cet  ouvrage  date  de  18o6,  époque  à  laquelle  les  deux 
importants  rôles  féminins  en  étaient  remplis  par  Mme  Penco  et 
Mme  Borghi-Mamo,  deux  grandes  artistes  qui  ont  laissé  parmi 
nous  des  souvenirs  que  le  temps  n'a  pas  effacés. 

Ecrite  à  Rome,  pour  le  théâtre  Apollo,  où  elle  fut  représentée 
pendant  le  carnaval  de  1821,  ayant  pour  interprètes  Ambroggi, 
Parlamagni,  Moncada,  Fusconi,  G.  Fioravanti,  ilmes  Lipparini  et 
Parlamagni,  Matilda  di  Shabran,  dont  le  poëme,  écrit  par  Ferretti, 
était  imité  d'un  de  nos  opéras  les  plus  célèbres  [Euphrosine  et 
Coradin,  d'Hoifmann  et  Méhul),  offre  cette  particularité  intéressante 
que  l'orchestre,  aux  premières  représentations,  fut  conduit  par 
l'artiste  incomparable  et  inouï  qui  s'appelait  Nicolo  Paganini. 

Dans  son  Histoire  de  t'Opéra  italien,  Castil-Blaze  s'insurge  ainsi 
contre  l'orthographe  adoptée  pour  le  titre  de  l'ouvrage  :  —  «  Pour- 
quoi, dit-il,  s'obstine-t-on  à  mettre  di  Shabran  sur  le  livret,  la 
partition  et  les  affiches?  Sabran  n'est  point  un  mot  anglais.  La 
tour  de  Sabran,  lieu  de  la  scène  de  l'opéra  d'Hoffmann  et 
Méhul,  de  Ferretti  et  Rossini,  la  tour  de  Sabran  est  sise  depuis  une 
dizaine  de  siècles  dans  le  département  de  Vaucluse,  entre  l'Isle, 
Apt  et  Cavaillon;  une  de  mes  filles  en  est  châtelaine.  Vous 
voyez  que  je  dois  connaître  ce  nom;  il  est  français  comme  les 
noms  de  Saintes,  Senlis,  Salins,  Salon,  etc.,  .que  l'on  se  garde 
bin  d'écrire  avec  une  oi-thographe  anglaise  Shaintes,  She7ilis, 
Shalins,  Shalon.  Si  les  Italiens  font  une  grossière  faute,  nous  de- 


vons la  corriger  au  moins  sur  nos  affiches,  en  y  montrant  Matilde 
di  Sabran.  »  Cette  boutade  n'a  pas  encore  gagné  sa  cause. 

Etait-il  grand  besoin  de  reprendre  cette  œuvre,  qui  n'occupe 
qu'un  rang  très-secondaire  dans  le  riche  écrin  du  maître,  et  qui 
est  venu  au  monde  cinq  ans  après  le  Barbier,  dont  elle  n'offre 
qu'une  sorte  de  pâle  reflet?  Je  ne  sais  trop,  et  il  me  semble  que, 
parmi  les  ouvrages  de  Rossini  qui  depuis  longtemps  n'ont  pas 
paru  sur  la  scène,  on  en  eiit  pu  choisir  de  plus  intéressants,  par 
exemple  Tancredi,  la  Donna  del  Lago  ou  Zelmira. 

En  effet,  la  partition  de  Matilda  di  Shabran  n'offre  presque  au- 
cune partie  saillante  ou  originale.  La  cavatine  du  bouffe  est  exacte- 
ment calquée  sur  le  moule  de  celle  de  Figaro:  celle  du  ténor 
est  un  air  de  bravoure  comme  les  compositeurs  d'il  y  a  cin- 
quante ans  en  écrivaient  à  la  douzaine;  les  deux  morceaux  les 
meilleurs  de  l'ouvrage  sont,  à  mon  sens,  le  finale  du  premier  acte 
et  le  duo  des  deux  femmes;  mais  là,  comme  dans  tout  le  reste  de 
la  partition,  la  formule  et  le  procédé  l'emportent  sur  le  reste  et 
ne  laissent  guère  à  l'idée  musicale  la  place  nécessaire  pour  se 
produire. 

Le  côté  vraiment  intéressant  de  la  soii'ée,  c'était  l'apparition 
de  deux  artistes  inconnus  jusqu'ici  du  public  italien,  mais  dont  la 
réputation  est  grande  en  Italie.  M.  et  Mme  Tiberini,  i  coniuiji  Ti- 
berini,  comme  les  appellent  les  journaux  ultramontains,  étaient 
naguère  à  la  Scala  de  Milan,  où  ils  faisaient  furore,  et  où  le  mari 
créa  il  y  a  deux  ou  trois  ans,  avec  un  grand  succès,  le  rôle  prin- 
cipal d'un  ouvrage  important,  un  Amleto  dû  à  la  plume  d'un  tout 
jeune  compositeur,  M.  Franco  Faccio. 

Dans  Matilda  di  Shabraii,  M.  Tiberini  a  déployé  toutes  les  qua- 
lités d'un  ténor  di  bravura  accompli  :  de  la  légèreté,  du  brio,  une 
vocalisation  facile  et  nette,  une  grande  agilité  de  gosier,  et  des 
sons  de  tète  irréprochables.  Mais,  le  dirai-je?  toutes  les  perfections 
de  ce  genre  nous  laissent  bien  froid,  et  ces  rôles  de  ténor  efféminé 
nous  sont  presque  aussi  antipathiques  aujourd'hui  que  l'arrivée, 
sur  la  scène  de  l'Opéra,  d'un  danseur  en  justaucorps  et  en  mail- 
lot collant.  Il  serait  injuste,  cependant,  de  ne  pas  tenir  compte  à 
M.  Tiberini  d'un  talent  acquis  et  très-réel.  Maintenant  qu'il  a 
donné  la  mesure  de  sa  valeur  sous  ce  rapport,  il  nous  reste  à  sa- 
voir quelles  sont  ses  qualités  de  style,  ses  facultés  scéniques,  et 
comment  il  se  tirera  d'un  rôle  dramatique.  Il  s'en  tirera  très- 
bien,  si  nous  en  devons  croire  les  échos  de  la  réputation  qui  l'a 
précédé.  —  Attendons. 

Quant  à  sa  femme,  Mme  Tiberini,  elle  paraît  être,  non-seule- 
ment une  chanteuse  accomplie,  mais  encore  une  comédienne  intel- 
ligente et  fine.  Une  voix  juste,  bien  timbrée,  bien  posée,  une  vo- 
calisation souple  et  légère,  une  diction  très-juste  et  spirituelle,  de 
la  grâce,  de  l'enjouement,  en  voilà  plus  qu'il  n'en  fallait  pour  as- 
surer son  succès  à  la  première  audition.  Aussi  le  jeune  couple 
n'a-t-il  pas  à  se  plaindre  de  l'accueil  chaleureux  qui  lui  a  été  fait. 

L'ensemble  de  l'interprétation  de  Matilda  di  Shabran  a  d'ail- 
leurs été  excellent.  Du  côté  masculin,  MM.  Steller,  Scalcse  et  Agnesi 
ont  mérité  de  grands  éloges  et  une  mention  honorable  ex  œquo. 
Du  côté  féminin,  Mlle  Grossi  a  fait  briller  sa  belle  voix,  ronde, 
souple  et  colorée,  et  Mlle  Rosello,  une  beauté  élégante  et  pleine  de 
charmes. 

Maurice  GRAY. 


A  M.  le  Directeur  de  la  Revue  et  Gazette  musicale. 

Bruxelles,  H  mars  1S68. 

Mon  cher  collaborateur, 
J'ai  exprimé  le  doute,  dans  l'article  nécrologique  sur  notre  ami  Edouard 
Monnais,  qu'il  eût  fait  une  étude  spéciale  de  la  musique  ;  j'ai  appris  de- 


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DE  PARIS. 


85 


puis  qu'il  était  violoniste  et  bon  lecteur.    Je   viens  donc  vous  prier  de 
vouloir  bien  donner  place  à  ces  lignes  dans  le  plus  prochain  numéro  de 
la  Gazette  musicale,  afin  qu'elles  rectifient  le  fait  inexact  de  ma  notice. 
Votre  tout  dévoué, 

FËTIS  père. 


Nous  croyons  être  agréable  à  notre  savant  collaborateur  en 
ajoutant  à  la  rectification  qu'il  nous  envoie  la  mention  de  «  di- 
recteur du  théâtre  de  l'Opéra  »  dont  Edouard  Monnais  remplit 
temporairement  les  fonctions.  Ce  fut  le  17  novembre  1839  qu'il  fut 
appelé  à  les  partager  avec  Duponchel,  et  ce  fut  sous  leur  direction 
commune  que  furent  montés  les  Martyrs,  de  Donizetli ,  le  Diable 
amoureux,  etc.  Le  l"'  juin  suivant,  M.  Léon  Pillet,  commissaire 
royal,  prenait,  à  ses  risciues  et  périls,  la  direction  de  l'Opéra,  et 
Edouard  Monnais  était  nommé  commissaire  royal  à  sa  place. 

Nous  laisserions  incomplets  les  détails  biographiques  donnés  par 
la  Gazette  musicale  sur  la  personne  regrettée  de  son  rédacteur  en 
chef,  si  nous  ne  reproduisions  pas,  en  partie  du  moins,  l'article 
aussi  admirablement  écrit  que  profondément  senti,  consacré  à  sa 
mémoire  dans  un  des  derniers  numéros  du  Journal  des  Débats  par 
J.  Janin,  qui  fut,  dans  leur  vie  littéraire,  son  camarade  et  son 
ami,  et  qui  a  collaboré  lui-même  à  la  Revue  et  Gazette  musicale. 

Qu'il  me  soit  permis  de  rendre  ici  les  derniers  devoirs  à  l'un  des 
mieux  disant  et  des  meilleurs  de  la  légion  lettrée,  Edouard  Monnais,  un 
rare  et  charmant  écrivain,  mort,  il  y  a  huit  jours.  Pas  un  peut-être 
autant  que  lui  n'était  digne  de  représenter  ce  qu'on  appelait  autrefois, 
dans  les  grands  jours  éclairés  du  génie  et  de  l'esprit  des  maîtres,  la 
politesse  de  la  langue  française.  Il  était  l'urbanité  même  et  l'atlicisme 
en  personne.  Il  écrivait  depuis  tantôt  un  demi-siècle,  et  dans  ce  terrible 
espace  il  n'avait  pas  blessé,  qui  le  croirait?  un  seul  amour-propre. 
A  peine  s'il  avait  touché  quelque  intrépide  vanité;  sa  belle  plume  était 
habile  également  à  faire,  à  guérir  tout  ensemble  une  blessure  légère,  et 
pas  un  des  hommes  dont  il  ait  parlé  qui  ne  soit  resté  son  ami. 

Cet  homme  excellent  avait  reçu  de  très-bonne  heure  l'éducation  litté- 
raire; il  n'avait  eu  sous  les  yeux  que  de  bons  exemples.  Aux  premiers 
temps  de  sa  jeunesse  il  y  avait  au  rang  des  journaux  les  plus  respectés 
le  Courrier  français,  rédigé  par  deux  hommes  qui  ont  laissé  de  grands 
souvenirs  :  M.  Châtelain  et  M.  de  Kératry,  l'un  et  l'autre  égaux  en  cons- 
tance, en  bravoure,  en  fermeté.  Ceux-ci  entouraient  le  jeune  écrivain  de 
leur  meilleure  sollicitude;  ils  aimaient  cette  aimable  et  riante  jeunesse; 
ils  approuvaient  fort  cette  façon  d'écrire  honnêtement,  simplement,  sans 
emphase,  et  plus  d'une  fois  Déranger,  le  chansonnier,  jeune  aussi  et 
très-convaincu  que  le  beau  stylo  était  rare,  arrivait  au  Courrier  français 
pour  complimenter  l'écrivain  du  nouveau  feuilleton.  C'étaient  là  des 
louanges  bien  méritées.  D'autant  mieux  que  le  jeune  Kdouard  Monnais 
racontait  à  ces  braves  gens  des  passions  toutes  nouvelles  pour  eux,  des 
chefs-dœuvre  inconnus,  ces  artistes  incomparables  :  Garcia,  le  premier 
comédien  du  monde;  Mme  Catalani,  la  voix  sans  égale,  et  Mme  Main- 
vielle-Fodor,  sa  digne  émule,  et  bientôt  la  grande  Malibran  qui  rem- 
plissait le  monde  et  le  feuilleton  de  son  charme  ineffable.  Edouard  Mon- 
nais a  commencé  au  théâtre  Italien  avec  Rossini,  à  l'Opéra  avec  M.  Auber. 
Toute  sa  vie  il  a  parlé  de  M.  Auber  avec  une  admiration  sans  bornes. 
Il  eût  été  bien  malheureux  s'il  eût  fallu  se  prononcer  entre  la  Muette 
et  Guillaume  Tell.  Même  à  l'apparition  de  Meyerbeer,  Edouard  Monnais 
eiit  résisté,  s'il  eût  fallu  rien  céder  de  son  admiration  pour  le  Domino 
noir. 

Un  écrivain  d'un  si  rare  mérite,  honnête  et  droit,  juste  et  passionné, 
ne  traverse  pas  impunément  une  si  belle  époque;  au  contraire,  il  y 
gagne  une  grande  autorité,  beaucoup  d'honneur  pour  lui-même,  et  des 
lecteurs  qui  le  suivront  jusqu'à  la  fin  de  son  œuvre.  11_  faut  lui  rendre 
aussi  cette  justice  :  il  n'a  jamais  été  qu'un  écrivain,  un  sincère  et  loyal 
écrivain.  Ce  fut  là  toute  sa  tâche  et  toute  sa  profession.  Il  trouvait  dans 
cet  art  charmant  le  bonheur  de  toute  sa  vie,  et  c'est  bien  de  lui  qu'on 
pouvait  dire,  en  parodiant  un  mot  célèbre  et  charmant  du  grand  ora- 
teur M"  Paillet  :  «  Laissez  passer  le  bonheur  d'écrire!  »  Il  ne  savait  pas 
de  plus  grande  fête.  11  écrivait  sans  souci  du  lucre  et  sans  souci  de  la 
renommée.  A  peine  il  avait  composé  quelque  beau  livre  ingénieux,  bien 
fait,  tout  rempli  de  ses  honnêtes  passions,  son  premier  soin  était  de  se 
cacher  sous  un  pseudonyme,  et  ses  meilleurs  amis  ne  se  doutaient  pas 
de  cette  innocente  supercherie.  Il  écrivait  pour  le  théâtre  avec  le  même 
soin  de  se  cacher  que  d'autres  en  mettent  à  montrer  leur  personnalité 
bruyante  ;  il  n'y  aurait  que  ses  collaborateurs  qui  pourraient  dire  à  quel 
point  il  était  un  inventeur  plein  de  réserve  et  de  naturel;  mais  ses  col- 
laborateurs ont  emporté  leur  secret  dans  la  tombe,  et  puis  ces  œuvres 
légères  sont  mortes  à  leur  tour.    «    Nous  et  nos  œuvres,  nous  sommes 


destinés  à  péi'ir,  »  c'est  Horace  qui  l'a  dit.  Qu'importe,  après  tout,  que 
nous  mourions  aujourd'hui,  demain,  dans  huit  jours?  C'est  la  loi  des 
œuvres  de  la  matinée,  elles  n'ont  pas  de  lendemain.  Edouard  Monnais, 
ami  de  son  repos,  n'eût  pas  donné  tous  les  bruits  qui  se  font  en  un 
jour  en  échange  de  sa  gloire  anonyme.  Et  de  cette  ambition  si  modeste 
et  si  rare  lui  venaient,  j'en  suis  sûr,  sa  bonne  humeur,  son  intime 
contentement,  ses  amitiés  si  vraies,  son  indulgence  exquise  et  tout  ce 
naturel  répandu  dans  ses  livres,  dans  sa  vie  et  dans  ses  discours. 

i.    JANIN. 


CONCERTS  ET  AUDITIONS  lUSICÂlES  DE  LÀ  SEIRÂINE. 


^.*.j;  Les  artistes  du  théâtre  Italien,  Mlles  Patti  et  Grossi,  MM.  Gardoni, 
Verger,  Ciampi  et  les  chœurs,  ont  défrayé  l'attrayant  programme  du 
concert  de  lundi  dernier  aux  Tuileries. 

^%  Au  9»  concert  du  Conservatoire,  après  la  splendide  symphonie  en 
sol  mineur  de  Mozart,  dont  on  a  bissé  le  menuet,  a  été  exécuté  pour  la 
première  fois  le  42"  psaume  de  Mendelssohn,  pour  orchestre,  chœur  et 
soprano  solo  (Mlle  Mauduit).  Le  public  a  accueilli  ce  morceau  avec  une 
réserve  à  laquelle  nous  nous  associons;  c'est  assurément  un  des  plus 
faibles  qu'ait  écritsl'auleurdu  Songe  d'une  nuit  d'été.  Le  style  en  est  tou- 
jours pur  et  élevé,  mais  l'intérêt  et  la  chaleur  font  presque  constamment 
défaut. —  Mme  Montigny  (Caroline  Rémaury)  a  joué  en  grande  artiste 
le  !■='  concerto  en  ut  majeur  de  Beethoven.  Elle  tire  du  piano  un  très- 
beau  son;  son  jeu  est  délicat, sans  recherche,  et  elle  atteint  toujours  à  la 
véritable  expression.  Son  succès  a  été  très  vif.—  La  magnifique  ouver- 
ture du  Pardon  de  Ploënnel,  supérieurement  rendue,  a  été,  comme  d'ordi- 
naire, accueillie  par  d'enthousiastes  bravos. 

^*^  Mmes  Carvalho  et  Bloch,  MM.  Faure,  Gardoni  et  Sivori  avaient 
été  invités  à  interpréter  le  riche  programme  du  second  concert  donné  le 
10  chez  la  duchesse  do  Galiera.  Au  nombre  des  morceaux  de  ce  pro- 
gramme brillaient  l'arioso  du  Prophète,  dit  par  Mlle  Bloch,  la  romance 
de  Marta,  chantée  par  Gardoni,  et  le  quatuor  de  cet  opéra,  par  Mmes 
Carvalho,  Bloch,  Faure  et  Gardoni.  Sivori  a  été  éblouissant  de  perfection 
dans  son  Mouvement  perpétuel  et  sa  fantaisie  sur  le  Trovatore.  Une  mé- 
lodie de  Faure,  chantée  par  l'auteur  et  accompagnée  par  Sivori  et  l'or- 
ganisle  Durand,  a  clos  ce  beau  concert,  constamment  applaudi  par  le 
plus  aristocratique  auditoire. 

i):*^  S.  A.  I.  la  princesse  Mathilde  a  voulu  juger  par  elle-même  le 
talent  du  jeune  pianiste  napolitain  Rendano,  et  elle  l'avait  invité  à  sa 
soirée  de  dimanche  dernier.  S.  A.  1.  a  été  émerveillée  des  qualités  pré* 
coces  du  jeune  virtuose,  et  elle  le  lui  a  témoigné  par  les  plus  chaleu- 
reuses félicitations. 

^*,t  Vendredi  6  mars,  à  8  heures  du  soir,  a  eu  lieu  l'inauguration 
solennelle  du  nouvel  orgue  de  Notre-Dame,  construit  par  M.  Aristide 
Cavaillé-Coll.  En  attendant  que  nous  parlions  en  détail  de  la  structure 
de  ce  magnifique  instrument,  nous  dirons  quelques  mots  de  la  cérémonie 
et  des  exécutants.  La  cathédrale  regorgeait  de  monde;  on  pense  bien  que 
cette  foule,  plus  curieuse  que  recueillie,  a  quelque  peu  nui  par  son 
attitude  bruyante  à  l'effet  imposant  de  la  solennité,  et  que  la  sonorité 
de  l'instrument  n'avait  pas  à  y  gagner.  Et  puis,  neuf  morceaux  d'orgue 
l'un  après  l'autre,  /compris  l'introduction  et  la  sortie  jouées  par  l'orga- 
niste titulaire,  M.  Sergent!  C'était  trop  de  moitié.  MVI.  Loret,  de  Saint- 
Louis  dAntin  ;  Aug.  Durand,  de  Saint-Vincent  de  Paul  ;  Chauvet,  de 
Saint-Merri;  Saint-Saëns,  de  la  Madeleine;  César  Franck,  de  Sainte-Clo- 
tilde  ;  Guilmant,  de  Boulogne-su r-Mer;  Widor,  de  Lyon,  se  sont  fait  en- 
tendre successivement;  tous  ont  joué  de  leur  propre  musique,  à  l'excep- 
tion de  M.  Loret,  qui  a  exécuté  un  prélude  et  une  fugue  de  Bach.  Parmi 
cette  avalanche  de  morceaux  modernes,  il  en  faut  citer  deux  d'un  mé- 
rite réel  et  q;ii  ont  obtenu  tous  les  suffrages:  le  Noël,  de  M.  Chauvet,  et 
la  Marche  de  la  cantate  de  l'Exposition,  de  M.  Saint-Saens.  Quelques 
psaumes  en  faux-bourdon,  un  Aue  Maria,  un  Pater,  un  Agnus  iJei,  exé- 
cutés sous  la  direction  de  M.  Félix  Renaud,  alternaient  avec  l'orgue. 
Mgr  Darboy,  archevêque  de  Paris,  a  béni  l'instrument. 

»**  Mlle  Rives  est  la  cantatrice  en  vogue  cet  hiver,  et  cette  vogue, 
elle  la  justilie  par  le  charme  et  la  supériorité  de  son  talent.  Tout  ré- 
cemment, chez  la  duchesse  de  Mouchy,  elle  faisait  eniendre  des  mor- 
ceaux de  Mozart  et  de  Scarlatti,  pièces  très-curieuses  qui  appartiennent 
à  la  bibliothèque  de  M.  Baillot.  Le  15,  elle  chantera  avec  Mlle  Nilsson 
chez  Mme  la  marquise  d'Aoust;  le  17,  chez  Mme  de  Talhouët.  Enfin, 
elle  a  été  invitée  à  prendre  part  au  quatrième  grand  concert  des  Tuile- 
ries,  le  23  mars.  Mlle  Rives  a  chanté,  en  outre,  lundi  dernier  chez  S. 
A.  I.  la  princesse  Mathilde,  qui  a  bien  voulu  lui  témoigner  toute  sa  sa- 
tisfaction. Elle  est  redemandée  chez  la  princesse  et  sera  désormais  des 
réunions  intimes. 

***  Nous  sommes  en  retard  avec  MM.  Louis  Lapret ,  le  pianiste  élé- 
gant et  sympathique,  et  M.  Ramirez  Valdès,  l'éminent  flûtiste  mexicain 
que  nous  verrons  avec  plaisir  se  fixer  parmi  nous.  Leur  concert  a  eu 
lieu  il  y  a  quinze  jours  déjà;  ce  n'est  pas  une  raison  pour  que  nous 
omettions  d'en  constater  le  succès:  Ces  deux   artistes    sont  certainement 


86 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


appelés  à  tenir  une  place  distinguée  à  côté  de  nos  virtuoses  les  plus  ai- 
més; nous  les  retrouverons  toujours  avec  plaisir. 

***  La  Société  des  concerts  donne  aujourd'hui  à  2  heures  son  10°  con- 
cert. En  voici  le  programme  :  1°  Symphonie  en  sol  mineur  de  Mozart; 

—  2"  i2»  psaume  (l'"  audition)  de  Mendelssohn,  traduction  de  M.  Nuit- 
ter:  chœur,  air,  choral,  récitatif  et  quintette,  chœur  final;  le  solo  sera 
chanté  par  Mlle  Mauduit;  —  3"    fragment»;  du    septuor,  de    Beethoven; 

—  4°  ouverture  avec  chœur  du  Pardon  de  Ploërmel,  de  Meyerbeer. —  Le 
concert  sera  dirigé  par  M.  George -Hainl. 

,\-  Aujourd'hui  à  2  heures,  au  cirque  Napoléon,  20»  concert  popu- 
laire de  musique  classique  sous  la  direction  de  J.  Pasdeloup.  On  y  en- 
tendra :  1"  Symphonie  en  mi  bémol  fn»  SO),  d'Haydn  (allegro,  andante, 
menuet,  finale)  le  solo  de  violon  par  Lancien;  —  2°  Fragment  sympho- 
nique  de  F.  Schubert  {2«  audition);  —  3°  Struensée,  tragédie  de  Michel 
Bear,  musique  de  Meyerbeer:  (l'auberge  du  village,  troisième  entr'acte, 
le  rêve  de  Struensée,  marche  funèbre,  la  bénédiction,  dernier  moment); 

—  i"  Andante  cantabile  du  S"  ;  Fugue  du  9°  quatuor  de  Beethoven 
(1«  audition),  exécutés  par  tous  les  instruments  à  cordes;  —  5»  ouver- 
ture de  Ihiy-JBlas,  de  Mendelssohn. 

^*^,  Le  Jugement  dernier,  de  Michel-Ange,  a  inspiré  à  notre  grand 
ténor  Duprez  les  paroles  et  la  musique  d'un  oratorio  en  trois  parties  :  la 
Terre,  l'Abîme,  le  Ciel.  Cet  ouvrage  sera  exécuté  plusieurs  fois  par  cent 
soixante  artistes,  Duprez  lui-même  chantant  les  récits,  au  cirque  de 
l'Impératrice,  du  1'^^  au  13  a\ril  prochain.  Le  profit  de  ces  séances  sera 
affecté  à  des  institutions  de  bienfaisance. 

.f*sf.  Demain  lundi,  W.  Kriiger  donne  à  la  salle  Herz  son  beau  concert 
annuel  avec  le  concours  de  Teresa  Careno,  de  Mlle  Cécile  Dolmestch,  de 
MM,  Hammer,  Amrelle,  Ponsard,  etc.  On  y  entendra  plusieurs  morceaux 
nouveaux  de  Krûger  et,  entre  autres,  une  transcription  de  la  ballade  des 
Djinns,  du  Premier  Jour  de  bonheur,  etc.  11  ne  reste  plus  que  peu  de 
billets  à  prendre. 

**,  Edouard  Wolff  vient  de  rentrer  à  Paris,  de  retour  de  l'excursion 
qu'il  a  faite  avec  la  Compagnie  Ulmann-Palti,  excursion  pendant  le  cours 
de  laquelle  il  a  recueilli  les  ovations  dues  à  son  beau  talent  et  que  nous 
avons  signalées  dans  nos  derniers  numéros. 

»*«  Ant.  Rubinstein  vient  d'arriver  à  Paris;  il  annonce  pour  jeudi 
prochain  19  mars,  à  la  salle  Herz,  un  concert  dans  lequel  il  exécutera 
les  œuvres  suivantes  de  sa  composition  :  i'  concerto  en  ré  mineur  ;  pré- 
lude et  fugue  ;  sarabande,  passepied,  courante  et  gavotte  (extraits  d'une 
Suite  pour  piano);  Nocturne,  caprice,  Barcarolle,  étude.  La  parlie  vocale 
est  confiée  à  Mlle  Rives.  M.  Camille  Saint-Saëns  dirigera  l'orchestre. 

if,*^  Le  nouvel  orgue  de  Notre-Dame  sera  joué  les  dimanches  13,  22, 
29  mars  et  3  avril,  à  midi  et  demi,  et  chacun  de  ces  dimanches  à  tour 
de  rôle  par  MM.  Camille  Saint-Saëns,  Franck  aîné,  Durand,  Chauvet, 
Loret,  Sergent,  etc.,  organistes  de  différentes  églises  de  Paris. 

,%  On  nous  écrit  de  Rouen  :  «  Le  concert  annuel  de  bienfaisance  de 
la  Société  lyrique  qui  a  eu  lieu  dimanche  1"  mars  avait  attiré  une  af- 
fluence  si  considérable,  que  la  grande  salle  des  Consuls  (à  la  Bourse) 
n'a  pu  suffire  à  la  contenir  toute.  Près  de  4,000  billets  avaient  été  placés. 

—  M.  Gamelin  dans  la  prière  de  Joseph,  M.  Victor  dans  la  mélodie  S» 
vous  saviez  I,  d'Alfred  Dassier,  M.  Vauquelin  dans  le  Ménétrier  de 
Meudon,  du  même  auteur,  MM.  Leroy  et  Godefroy  dans  un  duo 
comique  de  Sylvain  Mangeant,  Ténor  et  Directeur,  ont  eu  les  honneurs 
de  la  soirée  ;  mais  il  y  a  eu  des  applaudissements  pour  tous  les  chan- 
teurs et  les  organisateurs  de  la  fête.  Ils  n'ont  eu  qu'à  se  féliciter  du  ré- 
sultat artistique  aussi  bien  que  du  résultat  financier  de  ce  concert  qui 
laissera  d'agréables  souvenirs  au  public  et  une  magnifique  recette  pour 
les  pauvres.  » 


Le  défaut  d'espace  nous  oblige   à   ajourner  au  prochain  numéro  le 
compte  rendu  d'un  certain  nombre  de  concerts. 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 

sf*.  Lundi  a  eu  lieu  au  théâtre  de  l'Opéra  la  première  représentation 
i'Hamlet.  —  Nous  en  rendons  compte.  —  Le  nouvel  opéra  d'Ambroise 
Thomas  a  été  également  joué  mercredi  et  vendredi. 

**,  L'apparition  de  VHamlet  d'Amb.  Thomas,  au  théâtre  de  l'Opéra, 
donne  de  l'intérêt  à  cette  circonstance  qu'un  musicien  consciencieux, 
M.  Aristide  Hignard,  a  traité  le  même  sujet  sur  un  poëme  de  M.  Pierre 
Garai,  et  l'a  fait  récemment  graver  et  publier  à  ses  frais  en  attendant  qu'un 
directeur  de  bonne  volonté  se  hasarde  à  en  faire  apprécier  le  mérite  par 
le  public. 

^**  M.  George  Hainl,  premier  chef  d'orchestre  de  l'Opéra  et  de  la 
Société  des  concerts  du  Conservatoire,  vient  d'être  nommé  membre  du 
comité  des  études  musicales  de  cet  établissement. 

^**  Le  Premier  Jour  de  bonheur  se  joue  quatre  fois  par  semaine  au 
héâtre  de  l'Opéra-Comique . 


jf*^  La  première  représentation  de  la  reprise  de  la  Part  du  Diable  est 
annoncée  pour  le' 20  de  ce  mois.  * 

,*»  MM.  de  Leuven  et  Ritt  viennent  de  s'engager,  par  traité,  vis-à-vis 
d'A.  Maillard,  à  jouer  dans  l'année  les  Dragons  de  Villars,  donnés  jus- 
qu'à présent  au  théâtre  Lyrique,  qui  seront  montés  avec  tout  l'éclat  que 
comporte  le  succès  obtenu  partout  par  cet  opéra,  et  à  reprendre  aussi 
iMra. 

^*^  Mme  Galli-Marié  vient  de  renouveler,  pour  une  période  de  cinq 
ans,  l'engagement  qui  la  liait  à  ce  théâtre. 

^\  Mlle  Tuai  quitte  le  théâtre  Lyrique  pour  entrer  à  celui  de  l'Opéra- 
Comique,  où  elle  vient  d'être  engagée. 

j,.*4  Adelina  Patti  a  chanté  pour  la  première  fois  à  Paris  le 
rôle  de  Leonora  du  Trovatore  :  d'abord  à  la  soirée  donnée  dimanche 
au  théâtre  Italien  pour  VOEuvre  des  écoles  de  Saint-Joseph;  puis  jeudi. 
Le  succès  n'était  pas  douteux  :  il  a  suivi  la  célèbre  cantatrice  dans 
cette  création,  comme  dans  celles  de  Gilda,  de  la  Traviata,  de  Lucia. 
Brillante  dans  ses  diverses  cavatines,  c'est  surtout  dans  le  Miserere  et 
dans  le  duo  final  qu'Adelina  Patti  a  été  justement  applaudie,  rappelée, 
acclamée;  nous  ne  croyons  pas  qu'aucune  de  ses  devancières  s'y  soit 
montrée  plus  dramatique.  Nicohni  l'a  secondée  avec  éclat;  sa  romance 
d'entrée;  son  air  du  troisième  acte  avec  la  stretle  di  quella  pira  et  la  ro- 
mance du  quatrième  acte  ont  provoqué  d'enthousiastes  bravos.  —  On 
souhaiterait  peut-être  plus  de  force  et  de  mordant  dans  l'organe  de 
Verger;  mais  ce  jeune  artiste  est  en  grands  progrès  et  il  n'y  a  que  des 
éloges  à  donner  à  la  façon  dont  il  a  chanté  son  air  du  deuxième  acte 
et  le  duo  du  quatrième.  Agnesi  et  Mlle  Grossi  ont  complété  l'ensemble 
de  ces  représentations  en  partie  compromises  pourtant,  il  faut  bien  le  dire, 
par  une  déplorable  exécution  de  la  part  de  l'orchestre. —  Hier  on  a  donné 
la  3°  représentation  de  l'œuvre  de  Verdi. 

»*«  La  deuxième  représentation  de  Matilda  di  Shabran  a  eu  lieu  mardi 
et  a  pleinement  confirmé  le  succès  des  époux  Tiberini. —  Leur  seconde 
pièce  de  début  sera  /  Puritani.  —  Giovanna  d'Arco  sera  la  nouveauté  de 
cette  semaine. 

^*,^  Demain  a  lieu  l'ouverture  du  Théâtre  de  la  Renaissance  par  Faust. 

^,*,  La  dernière  représentation  de  la  Fanchonnette,  au'théâtre  Lyrique, 
a  valu  à  Mme  Carvalho  la  plus  brillante  des  ovations  :  bis,  rappels,  cou- 
ronnes, rien  n'a  manqué  au  triomphe  de  la  célèbre  cantatrice.  —  On  a 
joué  Marlha  trois  fois  cette  semaine. 

^*t  C'est  dans  le  rôle  de  Sganarelle  du  Médecin  malgré  lui,  créé  par  lui 
avec  tant  de  verve  et  d'entrain,  que  Meillet  reparaît  demain  au  théâtre 
Lyrique. 

***  Demain,  le  théâtre  des  Fantaisies-Parisiennes  donne  la  première 
représentation  de  Roger  Bontemps,  vaudeville  en  un  ai;te  de  MM.  Clair- 
ville  et  Bernard  Lopez,  refait  en  un  opéra-comique  en  deux  actes. 

**"*  Le  théâtre  de  l'Athénée  se  dispose  à  donner,  pour  la  fin  du  mois, 
un  nouvel  opéra-bouffe  en  trois  actes,  provisoirement  intitulé  :  Fleur  de 
Thé,  dont  le  poëme  est  de  MM.  Chivot  et  Duru,  et  la  musique  de  M. 
Charles  Lecocq,  auteur  de  l'Amour  et  son  carquois. 

»*#  Il  y  a  toujours  grande  foule  au  théâtre  des  Variétés  pour  enten- 
dre la  Grande-Duchesse. 

,*»  L'opérette-bouffe  de  J.  Moinaux  et  Offenbach  :  Dunanan  père  et 
fils,  remaniée  en  quatre  actes,'  va  être  jouée  au  théâtre  des  Menus-Plaisirs. 

iit*.  Les  recettes  brutes  des  théâtres  impériaux  subventionnés,  des 
théâtres  secondaires  et  autres  établissements  soumis  à  la  perception  du 
droit  des  pauvres  se  sont  élevées  pendant  le  mois  de  janvier  à  la  somme 
de  2,013,928  fr.  82  c. 

,*,  Le  conseil  municipal  de  Bordeaux  vient  de  nommer  M.  Halanzier, 
directeur  du  Grand-Théâtre,  et  de  lui  assurer,  par  délibération  spéciale, 
le  maintien  de  la  subvention  de  200,000  fr.,  et,  de  plus,  une  allocation 
de  30,000  fr.  pour  achat  de  décors  et  de  costumes,  dont  une  somme  de 
20,000  francs  spécialement  affectée  à  la  mise  en  scène  de  l'Africaine.  Le 
public  a  ratifié  de  son  approbation  unanime  ce  choix  heureux  et  ce  vote 
intelligent.  —  En  attendant,  les  représentations  données  par  les  artistes 
réunis  en  société  marchent  fort  bien.  Les  Dragons  de  Villars  font  de  jolies 
recettes  ;  Mme  Montaut  -  Lambert  s'y  montre  comédienne  habile  autant 
que  chanteuse  exercée. 

,i.*^  La  direction  du  théâtre  des  Arts,  de  Rouen,  va  passer  aux  mains 
de  M.  Bonnesseur,  naguère  basse  à  l'Opéra.  L'Africaine  aura  été  le  plus 
beau  succès  de  la  direction  actuelle  ;  la  foule  se  presse  encore,  comme 
aux  premiers  jours,  pour  admirer  le  dernier  chef-d'œuvre  de  Meyerbeer 
et  applaudir  ses  excellents  interprètes . 

»*„,  Mardi,  Marie  Sass  donnait  au  Havre  une  représentation  composée 
mi-partie  de  l'Africaine  et  mi-partie  de  la  Juive.  La  grande  cantatrice  y 
a  reçu  un  accueil  enthousiaste. 

^\  En  présence  des  succès  obtenus  par  Mme  Rose  Bell,  au  théâtre 
de  Liège,  la  direction  s'est  décidée  à  monter  les  Bavards  d'Offenbach; 
Mme  Rose  Bell  y  remplira  le  rôle  créé  par  Mme  Ugalde,  et  son  gracieux 
talent  lui  promet  un  nouveau  triomphe.  La  première  représentation  a 
dû  avoir  lieu  jeudi. 


DJi  PARIS 


87 


***  Jeudi  prochain,  19  mars,  mi-carôme,  aura  lieu  à  l'Opùra  le  der- 
nier bal  masqué  de  la  saison,  sous  la  direction  de  Strauss. 


NODVELLES  DIVERSES. 

*•*  Hector  Berlioz  se  repose  en  ce  moment,  à  Monaco,  des  glorieuses 
fatigues  de  soa  voyage  en  Russie. 

**»  Une  des  célébrités  musicales  de  la  Bourgogne,  on  pourrait  dire 
de  la  France,  Jules  Mercier,  vient  de  s'éteindre  à  Dijon  à  peine  ûgé  de 
quarante-neuf  ans.  Membre  de  l'Académie  de  cette  ville,  président-fon- 
dateur de  la  Société  philharmonique,  compositeur  de  mérite,  musicien 
consommé  autant  que  professeur  habile;  nature  bonne,  entraînante,  mo- 
deste, caractère  affeclueux  et  serviable,  J.  Mercier  était  de  ceux  qui  ho- 
norent leur  pays  natal  et  qui  ont  droit  à  l'amitié  et  à  l'estime  de  tous. 
Dans  ses  compositions  nombreuses,  —  fantaisies  sur  la  Favorite,  Robert, 
Chartes  T7,  les  Huguenots,  le  Pré  aux  Clercs,  le  Proiihète,  etc.,  —  J.  Mer- 
cier apportait  la  même  reciitude  de  goût,  hi  même  profondeur  de  senti- 
ment, la  même  pureté  sonore  que  dans  son  exécution.  La  cité  dijonnaise 
et  la  province  ont  vivement  ressenti  la  perte  de  l'homme  éminent  qui 
avait  popularisé  chez  elles  la  musique  des  maîtres  et  qui  s'était  cons- 
tamment efforcé  de  maintenir  la  réputation  artistique  dont  elles  jouissent 
à  plus  d'un  titre.  Le  théâtre  a  été  fermé  ;  trente-six  sociétés  musicales 
se  sont  fait  représenter  aux  funérailles  du  chef  regretté  qui  depuis  si 
longtemps  les  conduisait  au  triomphe  dans  les  divers  concours  et  festi- 
vals; les  cordons  du  poêle  ét.aient  tenus  par  M.  le  maire  de  Dijon  et 
plusieurs  artistes,  Vieuxtemps  et  Godefroid,  notamment,  anciens  cama- 
rades de  Conservatoire  de  Jules  Mercier.  Au  service,  entre  autres  mor- 
ceaux, l'orchestre  a  joué  l'andante  de  la  .symphonie  en  la  de  Beethoven, 
dans  lequel  Vieuxtemps  a  tenu 'la  partie  de  premier  violon.  —  La  com- 
pagnie lyrique  Ulmann-Patti,  de  passage  à  Dijon,  a  voulu  s'associer  au 
deuil  public  :  MM.  Vieuxtemps,  Seligmann  et  Wolff  ont  joué  l'Ave  Maria 
de  Gounod,  en  commémoration  de  la  mort  de  J.  Mercier;  des  applau- 
dissements émus  et  des  larmes  sincères  ont  remercié  ces  grands  artistes 
de  leur  délicate  attention. 

**jii  La  célèbre  tragédienne  allemande  Sophie  Schrœder,  mère  de  la 
grande  cantatrice  Wilhelmine  Schrœder-Devrient,  ravie  trop  tôt  à  Fart, 
vient  de  mourir.  Sophie  Schrœder  était  plus  qu'octogénaire. 

**:j  M.  Marc  Micliel,  auteur  d'un  grand  nombre  de  jolies  comjdies- 
vaudevilles,  et  qui  fut  longtemps  le  collaborateur  d'Eug.  Labiche,  vient 
de  mourir. 

ET  RANGER 

^*j,  Bruxelles.  —  La  première  représentation  de  Don  Carlos  a  eu 
lieu  mardi.  Le  public  a  très-froidement  accueilli  cet  opéra,  qui  n'a  pas, 
il  faut  le  dire,  les  qualités  qui  font  le  succès  des  grandes  productions  de 
la  scène  lyrique.  Ce  n'est  pas  qu'on  n'ait  reconnu  çà  et  là  la  main  d'un 
compositeur  expérimenté.  11  y  a  incontestablement  de  belles  pages  dans 
la  partition  de  Dun  Carlos  ;  le  fmaie  du  troisième  acte  est  largement 
conçu  et  d'un  grand  effet;  mais,  pour  quelques  parties  réussies,  combien 
de  scènes  languissantes!  Pourquoi  M.  Verdi  a-t-il  changé  sa  manière? 
pourquoi  a-t-il  adopté  le  malencontreux  système  de  la  récitation  à  jet 
continu,  mis  à  la  mode  par  li's  musiciens  sans  idées!  Cette  transforma- 
tion de  l'auteur  du  Trouvère  et  de  Rigoktto  a  fort  désappointé  les  dilet- 
tantes de  Bruxelles.  L'exécution  n'étiit  pas  faite  pour  pallier  les  défauts 
de  la  musique;  elle  les  a  exagérés  au  contraire,  ajoutant  à  l'indécision 
des  formes  mélodiques  les  incertitudes  d'une  interprétation  Ilottante 
et  molle.  Rarement  opéra  a  été  plus  mal  chanté;  c'est  une  particularité 
dont  il  faut  tenir  compte  en  constatant  le  fait  de  l'insuccès.  On  prépare 
la  Jolie  Fille  de  Perth;  le  Premier  Jour  de  Bonheur  et  Ilamlet  seront  pour 
l'hiver  prochain.  La  présence  de  Rubinstein  à  Bruxelles  est  l'événe- 
ment musical  du  moment.  Le  célèbre  virtuose  s'est  fait  entendre  di- 
manche passé  au  concert  populaire  et^iercredi  dans  une  soirée  dont  son 
admirable  talent  a  fait  seul  les  frais.  11  a  produit  tjne  profonde  impres- 
sion. Depuis  Liszt  il  n'y  avait  pas  eu  d'exemple  d'un  pareil  succès  de 
pianiste.  Après  avoir  joué  samedi  dans  un  concert  de  charité,  Rubins- 
tein partira  pour  Paris;  de  là  il  se  rendra  en  Angleterre,  puis  en  Amé- 
rique, où  il  est  certain  qu'une  grande  fortune  l'attend. 

»*^  Berlin .  —  Niemann  a  fait  sa  rentrée  à  l'Opéra  dans  le  rôle  de 
Jean  de  Leyde  du  Prophète;  il  y  a  été  supei-bo.  .\vec  ce  vaillant  ténor, 
avec  son  émule,  Wachlel,  rétabli  d'une  longue  indisposition,  avec  Mmes 
Lucca  et  Artôt,  revenues  à  leur  poste,  l'Opéra-Royal  peut  compter  sur 
de  splendides  et  fructueuses  soirées.  —  La  troupe  italienne,  après  sa 
courte  excursion  à  Hombourg,  a  repris  possession  du  théâtre  Victoria, 
et  paraît  con.server  la  faveur  du  public. 

^^*Jf  Gotha.  —  Un  opéra-comique  et  romantique  nouveau,  la  Nuit  de 
Saint-Jean  d'Eilers,  a  été  très-goiUé  du  public.  Le  sujet  est  emprunté  à 
la  nouvelle  de  Zschocke,  VHôte  mort. 

„,*,  Leipzig.  —  Dans  son  19°  concert,  l'avant-dernier  de  la  série,  l'or- 


chestre du  Gewandhaus  a  célébré,  le  .'J  mars,  le  12;)'  anniversaire  de  sa 
fondation.  Le  programme  se  composait  exclusivement  de  compositions 
des  six  chefs  d'orchestre  qui  .se  .sont  succédé  pendant  les  vingt-cinq  der- 
nières années  :  Mendelssohn,  David,  Gade,  Ililler,  Rietz  et  Roinecke,  le 
chef  actuel.  —  Le  Copservaloire  de  mu.sique  a  fêté  sa  23'  année  d'exis- 
tence. Depuis  son  établissement,  1,300  élèves  environ  y  ont  reçu  l'édu- 
cation musicale  sous  toutes  .ses  formes. 

^'jt  Lioerpool. —  La  direction  des  concerts  philharmoniques  sera  désor- 
mais contiée  à  Jules  Benedict. 

^%  Florence.  —  Un  nouvel  opéra,  Rosmunda,  du  maestro  Gialdini,  a 
rencontré  à  la  Pergola  un  succès  honnête,  qui  ne  lui  présage  pas  encore 
une  vie  bien  longue. 

,1,*^  Venise.  —  Succès  immense  à  la  Fenice  avec  V Africaine.  Grâce 
à  une  exécution  bien  voi.sine  delà  perfection,  le  chef-d'œuvre  a  pu  res- 
plendir de  toute  sa  beauté,  et  gagner  ainsi  dès  le  premier  soir  un  ter- 
rain précieux.  Mme  Lotti  Délia  Santa,  Carrion  et  Merly  ont  été  admira- 
bles, tous  les  autres  artistes  les  ont  vaillamment  .secondés,  et  il  n'y  a 
que  des  éloges  à  donner  aux  chœurs,  à  l'orchestre,  ainsi  qu'à  la  direc- 
tion pour  sa  splendide  et  intelligente  mise  en  scène. 

^*^  Varsovie.  —  Une  regrettable  mesure  vient  d'être  prise  :  le  Con- 
servatoire est  fermé,  après  six  ans  seulement  d'existence,  les  fonds  dus 
à  la  souscription  qui  le  faisait  vivre  d'une  vie  précaire  étant  complète- 
ment épuisés. 

^*,t  Saint-Pélersbourg .  —  Mme  Lucca  est  réengagée  pour  les  mois  de 
novembre  et  décembre.  Adelina  Patti  chantera  en  janvier  et  février.  La 
troupe  italienne  engagée  pour  toute  la  saison  se  compose  de  Mmes  Fricci, 
Trebelli,  Volpini,  des  ténors  Mario,  Fraschini,  Calzolari ,  des  barytons 
Neri-Baraldi,  Graziani,  des  basses  Zucchini,  Angelini,  Gassier. 


CONCERTS  ET  AUDITIONS  MUSICALES  ANNONCÉS. 

Salon  Krîegolstein,  aujourd'hui  dimanche  à  8  heures  1/2  du  soir  :  cin- 
quième et  dernière  séance  de  MM.  H.  Bonewilz  et  Norblin,  avec  le 
concours  de  MM.  Telesinski  et  Bernard. 

Salle  Herz,  dimanche  13  mars  :  concert  donné  par  M.  Kowalski  et  Mlle 
Pellini,  avec  le  concours  de  MM.  Hermann-Léon,  Sarrasate,  Las- 
serre,  Mlle  E.  Dubois  et  Coquelin,  de  la  Comédie-Françai.se. 

Salle  Herz,  lundi  16  mars  :  concert  de  M.  VV.  Krûger,  avec  le  concours 
de  Mlle  Dolmetsch,  MM.  Ponsard,  Hammer,  Godard  et  Charles  Pot- 
tier. 

Salle  Herz,  mardi  17  mars  à  8  heures  1/2  :  concert  de  Mme  Rouxel- 
Tailhardat,  avec  le  concours  de  Mlle  Laure  Tailhardat,  de  MM. 
Brégy,  Pauvre- Taffanel,  Sighicelli,  Soumis  et  Rouxel.  —  Poésie 
par  M.  Sanison.  —  Comédie  en  un  acte  de  MM.  Meilhac  et  Halévy, 
par  M***  et  Mme  Armand  et  Delille. 

Salons  Pleyel-Wolff,  mardi  17  mars  :  cinquième  séance  populaire  de  mu- 
sique de  chambre,  donnée  par  MM.  Ch.  Lamoureux,  Colblain,  Adam 
et  Poëncet,  avec  le  concours  de  M.  Henri  Fissot. 

Salons  Erard,  mercredi  18  mars  à  8  heures  1/2  du  soir  :  concert  des 
frères  Sauret,  élèves  de  MM.  Ch.  de  Bériot,  avec  le  concours  de 
Mlle  Alph.  Marer,  de  M.  Aubary,  Mlle  C.  Meyer  et  M.  Lamotte, 
chanteur  comique. 

Salle  Herz,  mercredi  18  mars  :  concert  par  le  violoniste  mexicain  Euse- 
bio  Delgado,  premier  violon  solo  du  théâtre  de  Mexico,  avec  le 
concours  de  Mlle  Marie  Roudier,  Louise  Murer,  MM.  Waldeck,  Bru- 
neau  et  Mattiozzi. 

Salons  Pleyel-WoIff,  mercredi  18  mars:  séance  publique  donnée  par  A. 
Gouffé,  pour  l'audition  de  ses  œuvres. 

Salle  Erard,  jeudi  26  mars  à  8  heures  1/2  du  soir  :  concert  de  l'excel- 
lent pianiste  compositeur  Ernest  Stœger,  avec  le  concours  de  Mlle 
Rives,  du  violonisie  Hermann,  qui  vient  d'arriver  à  Paris,  Poëncet, 
Baur  et  JI.  Van  Waefeighem. 

Salle  Herz,  jeudi  26  mars  :  concert  donné  par  Mme  Norman-Neruda,  la 
célèbre  violoniste. 

Salle  Erard,  samedi  28  mars  à  8  heures  1/2  du  soir  :  concert  de  M.  Eu- 
gène Ketterer,  pour  l'audition  de  ses  œuvres  nouvelles,  avec  le  con- 
cours de  Mme  Anna  Fabre,  Mlle  Louise  Cantin,  de  MM.  Pagans,  A. 
Herman,  A.  Durand,  F.  Thomé. 


«  TT  T  o  On  demande  un  organiste  pour  l'église  de  Coulommiers  ; 
il  V  lu.  s'adresser  à  M.  Bleuze,  maître  de  chapelle  à  Saint-Sulpice, 
rue  de  la  Grande-Chaumière,  8. 


KEVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE  UE  PAKIS. 


Nouvelles  publications  de  J.  MAHO,  25,  rue  du  Faubourg-Saint-Honoré,  à  Paris. 


Op.  12. 

—  13. 

—  iS. 

—  18. 

—  19, 

—  20. 

—  28. 

—  29. 


—  39. 

—  -il . 


Première  sonate  pour  piano  {mi  majeur) . .   .   

Première  sonate  pour  piano  et  violon  (sol  majeur) 

Deux  trios  pour  piano,  violon  et  violoncelle  :  1.  en  fa  m. 

2.  En  sol  mineur 

Première  sonate  pour  piano  et  violoncelle  (ré  majeur). . . 

Deuxième  sonate  pour  piano  et  violon  (la  mineur) 

Deuxième  sonate  pour  piano  [ut  mineur) 

1 .  Nocturne 

2.  Caprire 

Deux  Marches  funèbres  pour  piano  : 

1 .  Pour  le  convoi  d'un  artiste 

2.  Pour  le  convoi  d'un   héros 

1 .  Barcarolle  pour  piano  (fa  mineur) 

2.  Allegro  appassionato  pour  piano 

Deuxième  sonate  pour  piano  et  violoncelle  {sol  majeur). . 
Troisième  sonate  pour  piano  {fa  majeur) 


Op.  a.  Soirées  à  Saint-Péterslourg.  Six  morceaux  pour  piano. 
Livre  1 .  Romance.  Scherzo 

—  2.  Preghiera.  Impromptu 

—  3 .  Nocturne.  Appassionato 

—  -49.  Sonate  pour  piano  et  alto  ou  violon  {fa  mineur) 

(La  partie  de  violon  arrangée  par  Ferd   David.) 

—  52.  Troisième  trio  pour  piano,  violon  et  violoncelle  {si  bém.) 

—  53    Six  fugues  dans  le  stylo  libre  précédées  de  préludes  : 

1 .  En-/o  bémol  majeur 

2 .  En  fa  mineur 

3.  En  mi  majeur 

i.   En  Si  mineur 

5 .  En  sol  majeur 

6.  En  ut  mineur 

—  GC.  Quatuor  pour  pianu,  violon,  alto  et  violoncelle net. 

Etude  en  m(  majeur  pour  piano 


5    » 
7  50 

10       !- 


20     » 

7  no 

5  » 
7  50 
7  50 
7  50 

6  . 
12     . 

7  50 


BTmWMWM    H^îiîi^ll 


Op.  119.  Préludes  composés  pour  Mile  Lili,  2  livres,  chaque 10 

—  120.  Mélodies  pour  piano 10 

—  121 .  1 .  Ballade  pour  piano 5 

2 .  Conte,  pour  piano 6 


Op.  121 .  3.  Rêverie  du  Gondolier,  pour  piano-. 5 

—  122.  Valses  Rêveries,  pour  piano 10 

—  82.  Nuits  blanches,  pour  piano,  1  vol.  in-8° net.     6 

—  78,  80,  89.  Promenades  d'un  solitaire,  pour  piano,  1  v.  8°,  net    8 


Divers  pour  Piano 


Henselt  (A.).  Op.  28.  1.  Valse  sentimentale 4  50 

—  2.  Valse  noble 4  50 

—  Op.  39.  Aubade 4  50 

Hlllcr  (P.).  Guitare,  impromptu 4  50 

E.e  Conppey  (P.).  Transcriptions  classiques: 

11 .  Schubert,  sérénade 5    » 

12.  Beethoven,  fragmeut  du  premier  quatuor  6    » 

Hendelsaohn  (P.).  Op.  101 .  Ouverture  posthume 7  50 

Sari  (L.) .  Rondes  des  Elfes 5     „ 

—  Canto  del  Monte  d'Oro 5     „ 

Scliirrniaclier.  Op.  73.  Deux  romances  de  Liebé  (transcrip- 
tions: Autrcfuis.  Au  revoir I) 6    » 

Sctauinunn  (Robert).  Op.  82.  Dans  la  forêt,  morceaux  caracté- 
ristiques :  Entrée.  —  A  l'affût.  —  Pleurs  solitaires.  — 
La  vallée  maudite.  —  Paysage.  —  L'Auberge.  —  L'Oi- 
seau-prophète.  —  Air  de  chasse.  —  L'Adieu. 

SIenold  (Ch.).  Op.  1.  Deux  polkas 6    » 

—  Op.  S.  Mazurka  de  salon 5    » 

—  Op.  6.  Grande  valse  brillante 7  50 


SlenoId  (Ch.).  Op.  8.  Nocturne 6 

—  Op.  23.  Barcarolle S 

Splndlcr  (Pr.).  Op.  5.  Retour  du  printemps,  idylle 6 

—  Op.  75.  Souvenirs  de  Pierrefonds,  deux  idylles  : 

1 .  L'Oi-scau  chante  ! 5 

2.  La  Source 5 

—  Op.  84.  Les  Naïades,  morceau  de  genre 5 

—  Op .  111.   Polka,  mi  bémol 6 

—  Op.  127.  Les  Trois  Grâces,  trois  morceaux  de  salon  : 

1 .  Le  Galop 6 

2.  La  Valse 6 

3 .  La  Mazurka 6 

—  Op.  133.  Contes  d'autrefois,  2  morceaux  caractéristiques,  ch.  5 

—  Op.  163.  Les  Sirènes,  2  valses,  ut  majeur,  fa  majeur,  ch.  5 

—  Op.  164.  Le  Chant  de  la  Pileuse 6 

—  Op.  177.  Les  Premières  feuilles,  deux  morceaux,  chacun  .  6 
Welile  (Ch.).  Op.  73.   Impromptu 5 

—  Op.  2i.   Laendler ; 5 

—  Op.  75.  Chanson  bohème 6 


Pour  Piano  à  quatre  mains 


BeethOTcn.  Fidelio,  complet net.  15     » 

—  Fidelio,  ouverture 7  50 

EnckiiauKen  (H.).  Op    84,  Ecole  de  piano,  4  cahiers,  chaque    7  50 

Cianz  (W.) .  Op.  12  bis.  Qui  vive  !   arr 9     » 

Hende;ssolin  (P.).  Op.  101  bis.   Ouverture  posthume 9    » 

Hozart.  Don  Juan,  complet.  » net.  15    » 

—  Don  Juan,  ouverture 7  50 

—  La  Flûte  enchantée,  complet net.  15     » 

—  La  Flûte  enchantée,  ouverture 7  50 


Mozart.   Les  Noces  de  Figaro,  complet net.  15     » 

—  Les  Noces  de  Figaro,  ouverture 7  50 

Roaslni.   Le  Barbier  de  Séville,  complet net.  15     » 

—  Le  Barbier  de  Séville ,  ouverture 7  50 

Spindier  (P.).  Op.  1-40  bis.  Le  Trot  du  cavalier,  arr 7  50 

Weber.   Le  Freyschiifs,  complet net.  15    » 

—  Le  Freyschiitz,  ouverture 7  50 

—  Oberon,  complet net.  15    » 

—  Oberon.  ouverture T  50 


Musique  d'ensemble 


Esctimann  (Ch.).  Op.  58.  Trois  sonatines  pour  piano  et  violon: 

1 ,  Ré;  2,  Sol  ;  3,  Ut ,  chacune 

Ciaéronlt.  Rondino  de  Beethoven,  transcrit  pour  piano  et  orgue 
HauptmaBii  (M  ) .  Trois  sonatines  très-faciles,  ut,  sol,  fa,  po>ir 

piano  et  violon 

Langlians  (W.) .  Aria  di  Lotti,  transcrit  pour  violon  ou  violon- 
celle avec  accompagnement  de  piano 

—  ~  Op.  4.  Quatuor  pour  deux  violons,  alto  et   violoncelle,  fa 
majeur.  (Couronné  du  1"^"'  prix  par  la  Société  de  quatuors 

de  Plorence) 

E.alo  (E.).  Op.  14.  1.  Chanson  villageoise  pour   violon  ou  vio- 
loncelle et  piano 

Sérénade  pour  violon  ou  violoncelle  et  piano 

19.  Quatuor  pour  deux  violons,  alto  et  violoncelle,  mi 

bémol  majeur 

liacombe  (Paul).  Op.  8.  Sonate  pour  piano  et  violon 

HendeisNObn-Barttaoïdy  (Pélix).   Op.  17.  Variations  con- 
certantes pour  piano  et  violoncelle  ou  violon 


-    Op. 


7  50 
5     » 


Meyer  (Louis).  Les  concerts  à  la  pension,  trios  non  difficiles: 

1 .  Sol  majeur 12 

2.  Sol  majeur 9 

3.  Ut  majeur. 12 

Salnt-Saens  (C).  Op.  16.  Suite  pour  piano  et  violoncelle,  net.    7 


Séparément  ; 


Prélude,  ré  mineur 6 

Sérénade,  soi  mineur 6 

3 .  Scherzo,  mi  bémol  majeur 6 

4 .  Romance,  mi  majeur 6 

5.  Finale,  ré  majeur 6 

—  Op.  18.  Trio  en   fa  majeur  pour  piano,  violon  et  violon- 

celle. (Dédié  à  M.  Alfred  Lamarche) 20 

—  Concerto  en  la  majeur  pour  violon  avec  accompagnement 

d'orchestre.  Partition  (sous  presse) net.  8 

—  Concerto  en  la  majeur  avec  accomp.  de  piano  (sous  presse). 
UendelDsobn    (F.).  Op.  ICI.  Ouverture  posthume,  pour  or- 
chestre, en  partition net .  5 

—  La  même,  en  parties  séparées 20 


Ueiidelssobn  (P.).  Op.  60.  La  Première  nuit  de  sabbat,  parti- 
tion in-8°,  chant  et  piano net .     7 

liuc  (V.).  Une  Nuit  de  Noël,  petit  drame  lyrique  en  un  acte  et 
deux  tableaux,  avec  accompagnement  de  piano  et  har- 


monium (violon  et  harpe  ad  libitum),  pour  pensionnats  et 

communautés  religieuses net.     7 

(SalBt-Saens.    Les   Noces   de  Prométhée,    cantate  pour    solos, 

chœurs  et  orchestre,  partition  chant  et  piano net.    5 


IHPSIHEBIE  CENTBALE  BES  CHEUins  DE  FEB     —  A.  <  n«IX 


3BEBCÈBE,  30,   A  PABIS 


BUREAUX    A    PARIS  ••    BOULEVARD    DES    ITALIENS,  1. 


35'  Année. 


K"  \t 


22  Mars  1868. 


ON   S'ABONNE  : 

Dans  les  DtSporlpmcnls  et  à  l'Élrnngpr, 

chez  tous  les  Marchands  de  Musique,  Us  Libraire 

et  aux  Sureaux  def.  Messageries  et  des  ToEtes. 


REVUE 


PRIX    DE    L'ABONNEMENT: 

Paris -4  r.  par  f 

DÉparlements,  Belgique  et  Suisse,...    30»      iiL 

Élraçjer 31  »       i'i- 

Le  Journal  parait  le  Dimanche. 


GAZETTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


Avec  le  procbaln  naméro,  nos  abonnés  recevront 
VEtwéle  en  ta,  mineur  de  JUEIVDEIiiItlSOHlV.  dont  la 
publication  récente  a  excité  à  an  si  liant  degré  l'inté- 
rêt des  pianistes. 


SOMMAIRE.  —  Concert  d'Antoine  Rubinstein,  par  Charles   Bannelier.  — 
Une  matinée  musicale  au  Grand-Orient  de  France,  Em.  llatbien  de  Hon- 

1er.  —  Tliéâtre  des  Fantaisies -Parisiennes:  Roger  Bonlemps,  opéra-comique 
en  deux  actes,  paroles  de  MM.  Clairville  et  Bernard  Lopez,  musique  de  M.  De- 
billemont.  —  Revue  des  tliéâtres,  par  D.  A.  D.  tSaint-lfies.  —  Galerie 
des  musiciens  célèbres  anciens  et  modernes.  —  Concerts  et  auditions  musicales 
de  la  semaine.  —  Nouvel^es  des  théâtres  lyriques.  —  Nouvelles  diverses.  — 
Concerts  et  auditions  musicales  annoncés.  —  Annonces. 


CONCERT  D'ANTOINE  RUBINSTEIN 

A  LA  SALLE   HERZ, 

Le  jeudi  19  mais  1868, 

Ce  prodigieux  virtuose,  cet  athlète  du  piano,  qui  ne  connaît 
d'autre  rival  que  Franz  Liszt,  ce  grand  artiste  à  l'extérieur  presque 
rude,  qui  n'a  rien  à  voir  avec  les  élégances  de  pose  et  les  airs  penchés 
des  pianistes  à  la  mode,  Antoine  Rubinstein  est  né  dans  un  village  de 
la  Moldavie,  à  Wechwotynez,  sur  les  frontières  russes,  le  30  novem- 
bre 1829;  il  a  donc  aujourd'hui  un  peu  plus  de  trente-huit  ans. 
Il  est  Russe  par  son  éducation,  ayant  habité  Moscou  dès  son  en- 
fance; c'est  dans  cette  ville  qu'il  donna  son  premier  concert  à 
l'âge  de  neuf  ans.  Depuis,  il  a  perfectionné  sans  relâche  son  ad- 
mirable talent  d'exécution,  qui,  servi  par  une  organisation  physi- 
que exceptionnelle,  est  arrivé  à  un  degré  de  puissance  dont  ceux 
qui  n'ont  point  entendu  Liszt  ou  lui  ne  peuvent  se  faire  une  idée. 
Il  n'a  commencé  â  composer  d'une  manière  sérieuse  que  vers  sa 
vingtième  année;  il  a  produit  depuis  lors  une  quantité  immense 
d'œuvres  de  toutes  sortes,  opéras,  oratorios,  symphonies,  concer- 
tos, sonates,    morceaux   de   piano,  de  chant,  chœurs,  etc.;  dans 


toutes  on  trouve  les  pensées  élevées,  le  style  large,  la  distinction, 
le  savoir-faire  du  grand  musicien.  En  général  cependant,  elles 
sont  produites  trop  hâtivement,  et  portent  la  trace  d'un  travail 
fiévreux  et  sans  règle.  Il  n'aime  pas  revoir  à  loisir  sss  composi- 
tions ;  elles  sont  aussitôt  publiées  que  terminées,  et  il  s'en  est  re- 
penti plus  d'une  fois.  De  plus,  beaucoup  ne  sont  accessibles  qu'à 
un  très  petit  nombre  de  pianistes,  en  raison  des  effets  de  haute 
virtuosité  qui  y  sont  prodigués,  et  qui  réclament  non-seulement 
des  doigts  habiles,  mais  encore  une  certaine  force  physique. 

Rubinstein  a  beaucoup  voyage.  11  est  venu  à  plusieurs  reprises 
à  Paris,  oiî  ses  concerts  ont  toujour-s  produit  la  plus  vive  sensa- 
tion. Il  y  était  l'année  dernière  encore,  mais  il  ne  s'est  fait  enten- 
dre que  dans  quelques  cercles  intimes.  —  Il  est  le  fondateur  du 
Conservatoire  et  de  la  Société  des  concerts  de  Saint-Pétersbourg; 
des  dissentiments  regrettables  l'ont-  fait  renoncer  depuis  peu  à  la 
direction  de  ces  deux  belles  institutions.  Son  frère  Nicolas,  pianiste 
comme  lui,  est  établi  à  Moscou  où  il  jouit  d'une  réputation  mé- 
ritée. 

Le  concert  de  jeudi  dernier  réunissait  dans  la  salle  Herz  le  pu- 
blic d'élite,  le  grand  public  des  artistes  illustres;  les  maîtres  du 
piano  au  grand  complet  étaient  venus  applaudir  et  étudier.  Après 
l'ouverture  des  A^oces  de  Figaro,  dite  dans  la  perfection  par  l'or- 
chestre sous  la  direction  de  Camille  Saint-Saëns,  Rubinstein  a 
attaqué  son  4«  concerto  en  ré  mineur,  qu'il  affectionne  particu- 
culièrement  et  qu'il  joue  plus  volontiers  en  public.  C'est  une  lutte 
perpétuelle  entre  le  piano  et  l'orchestre  que  ce  concerto  ;  et  l'avan- 
tage de  la  sonorité  ne  reste  pas  toujours  au  dernier.  Fortement 
conçu,  savamment  conduit,  il  manque  peut-être  un  peu  de  cette 
chose  indéfinissable  qu'on  appelle  le  charme,  excepté  dans  Van- 
danle,  qui  se  rapproche  de  la  manière  de  Mendelssohn.  Les  oc- 
taves, les  arpèges,  les  croisements  rapides  des  mains  s'y  succèdent, 
drus  et  serrés  comme  la  grêle;  le  poignet  d'acier  de  Rubinstein 
en  a  facilement  raison.  A  ceux  qui  seraient  tentés  de  croire  que 
cette  gymnastique  fait  sortir  le  piano  de  ses  voies  et  moyens,  il  a 
répondu  victorieusement  l'autre  soir.  Toutefois,  il  fera  bien  de 
plaider  toujours  sa  cause  lui-même. 

Mais  voici  le  torrent  débordé  devenu  un  ruisseau  tranquille  et 
limpide  :  Rubinstein  joue  le  ravissant  rondo  en  la  mineur  de 
Mozart  avec  une    finesse,    une    suavité,    une   sobriété  que  nous 


90 


KEVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


retrouverons  tout  à  l'heure  dans  son  nocturne  et  dans  celui  de 
Chopin.  Après  la  fantaisie  étourdissante,  la  grâce  enfantine;  après 
le  tour  de  force,  après  les  foudroyants  prodiges  de  mécanisme,  le 

jeu  lié,  les    nuances  les  plus  délicates,   le  pianissimo  fondant 

On  regarde  au  piano...  Oui,  c'est  bien  encore  lui...  A  présent,  le 
Rubinstein  du  concerto  nous  revient  :  c'est  le  scherzo  a  capricio 
de  Mendelssohn,  c'est  la  titanesque  transcription  du  Roi  des  Aulnes 
de  Liszt,  puis  encore  quelques-unes  de  ses  compositions  à  lui,  Ca- 
pricio, un  charmant  poëme,  Barcarolle,  Etude,  la  fameuse  et 
redoutable  Etude  en  ut  à  laquelle  il  a  donné  le  titre  redondant 
d'Etude  inferncde  du  Diable,  appelée  encore  «  Etudes  aux  fausses 
notes,  »  lesquelles  fausses  notes  ne  sont  que  des  appogiaturcs 
très-mélodiques  que  la  main  gauche  vient  piquer  rapidement  dans 
le  haut  du  clavier,  pendant  que  la  droite  se  livre  à  des  arpèges 
effrénés...  C'est  stupéfiant,  on  a  le  frisson...  Le  beau  piano  de 
Herz,  un  des  meilleurs  instruments  sortis  des  ateliers  du  facteur- 
artiste,  a  vaillamment  supporté  l'épreuve. 

Après  chaque  morceau,  des  applaudissements  à  faire  crouler  la 
salle,  des  rappels  sans  fin,  ù  rendre  jaloux  un  ténor  ou  une  pri- 
ma donna  en  vogue  ! 

Total  :  une  heure  et  demie  bien  complète  de  piano,  de  quoi 
épuiser  tout  autre  que  Rubinstein;  mais  lui  a  gardé  jusqu'à  la  lin 
son  calme  olympien,  et  pour  un  peu  il  eût  recommencé. 

Certes,  ils  se  fourvoieraient  étrangement  ceux  qui  croiraient 
qu'iV  faut  chercher  à  imiter  cet  artiste  extraordinaire;  comme 
Liszt,  c'est  une  individualité  puissante,  exceptionnellement  douée, 
et  qui  s'impose  par  des  qualités  propres,  non  transmissibles.  Grâce 
à  Dieu,  il  y  a  encore,  en  deçà  de  cette  virtuosité  de  haute  école, 
de  pures  et  vives  jouissances  pour  l'homme  de  goût. 

Un  mot  d'éloge  en  terminant  à  l'adresse  de  Mlle  Rives,  qui  a 
jeté  un  peu  de  variété  dans  ce  programme  assez  chargé,  en  chan- 
tant avec  goût  deux  morceaux  des  Noces  de  Figaro,  la  Prière  de 
la  Vestale  et  un  air  de  Rameau. 

Charles  BANNELIER. 


DNE  MATINÉE  MUSICALE  AD  GRAND-ORIEKT  DE  FRANCE. 

Concert  donné  par  la  loge  maçonniqne  les  FBÈRES-UKIS- 
HKSÉPABABliES,  au  profit  |de  son  Œuvre  d'adoption  d'or- 
phelins. 

Parler  ici  de  cette  fête  d'art  et  de  bienfaisance,  —  mais  toute 
de  famille,  —  dont  l'éclat  empruntait  à  ce  caractère  essentiellement 
intime  je  ne  sais  quoi  de  digne  et  de  touchant  ;  dire  avec  quelle 
solennité  et  quelle  simplicité  tout  à  la  fois  la  musique  s'unit  à  la 
charité  dans  une  loge  maçonnique,  cela  est  peut-être,  cela  est 
sans  doute  une  indiscrétion.  Mais,  en  m'inspirant  de  l'esprit  fra- 
ternel de  ceux  qui  seraient  en  droit  de  me  la  reprocher  :  C'est 
pour  les  autres  et  pour  soi,  leur  répondrais-je,  qu'il  faut  entendre, 
sentir,  méditer  les  belles  choses;  votre  réunion  exceptionnelle  de 
dimanche  dernier,  par  son  essence  même  et  sa  nature,  a  profon- 
dément charmé,  impressionné  jusqu'à  l'émotion,  ceux  qui  y  ont 
assisté;  à  ce  titre,  laissez  ces  harmonies  délicieuses  franchir  les  mu- 
railles du  Temple  et  permettez  à  leur^écho  de  se  répercuter  dans 
la  chronique  musicale  de  la   semaine. 

Sous  les  voûtes  symboliques  du  «  sanctuaire  de  l'hospitalité  sainte  et 
del'inviolableamitié,»  dans  ce  milieu  où  tout  parleà  l'âme  et  l'élève 
vers  la  claire  intelligence  du  beau  et  du  vrai  absolus,  l'art  mu- 
sical a  certainement  été  représenté,  le  lo  mars,  dans  sa  mani- 
festation la  plus  pure  et  par  ses  interprètes  les  plus  habiles. 
Mme  Norman-Neruda  —  son  éloge  n'est  plus  à  faire,  —  livrait 
à  l'admiration  d'un  auditoire   enthousiaste  son    jeu  puissamment 


individuel,  fécond  en  rencontres  imprévues  et  en  expressions 
trouvées;  son  style  large  et  fin  qui  avance  comme  un  Ilot,  ne 
laissant  aucun  point  sans  l'embrasser  et  le  revêtir,  dévoilant  une 
imagination  continue  dans  le  détail  et  accusant  lo  souci  et  la  cu- 
riosité des  contrastes.  A  côté  d'elle  brillait  sa  blonde  compatriote, 
Ophélia-Nilsson,  —  décorée  du  bijou  de  la  Loge, 

« Blanche  comme  ung  lys 

Et  qui  chante  à  voix  de  Syrène.  » 

N'a-t-elle  pas  reçu,  dès  le  berceau,  le  don  de  l'harmonie,  delà 
perfection,  de  la  sensibilité,  cette  âme  du  chant?  Rosine  liloch, 
beauté  et  voix  opulentes;  Mme  Barthe-Banderali,  dont  le  talent 
empreint  de  la  plus  élégante  distinction  observe  surtoutla  maxime: 
Rien  de  trop.  Le  charmant  quatuor  de  femmes,  n'est-ce  pas  ,  que 
celui-là  où  se  rencontraient,  à  mérite  égal,  la  passion,  la  grâce 
poétique,  le  sentiment  dramatique  et  l'esprit  avec  la  beauté?  Dans 
le  rayonnement  de  ces  «  étoiles  »  gravitaient  Delle-Sedie  qui  joint 
à  un  si  grand  art  tant  de  simplicité:  Ph.  Lamoury,  dont  le  vio- 
loncelle chante,  —  et  voilà  l'idéal  !  —  comme  la  plus  belle  des  voix 
humaines  ;  Morini,  à  la  voix  chaude,  colorée  et  convaincue  : 
Rosenhain,  le  maître  aimé,  dont  le  talent  souple  sait  toujours 
intéresser. 

Quant  au  programme,  on  devinait,  dans  sa  composition  savam- 
ment combinée,  la  sollicitude  et  l'expérience  d'un  des  membres 
de  la  Loge,  un  expert  en  l'art  difficile  de  placer  sous  leur  vrai 
jour  et  de  faire  valoir  les  uns  par  les  autres  les  plus  rares  talents 
et  les  plus  belles  œuvres.  On  pouvait  même  supposer  que  le  choix 
des  morceaux  du  concert  avait  été  fait  aussi  bien  pour  le  meil- 
leur profit  de  l'OEuvre  d'adoption  des  orphelins  de  la  Loge,  qu'en 
vue  de  leur  propre  agrément  et  édification.  Le  duo  du  Stabat  de 
Rossini,  par  exemple,  admirablement  interprété  par  Mlles  Nilsson 
et  RIoch,  —  le  merveilleux  contraste  de  voix  et  de  beauté!  —  ne 
semblait-il  pas  devoir  initier  ces  intéressants  pupilles  au  sentiment 
religieux  que  la  musique  seule  peut,  du  reste,  complètement  ex- 
primer? A  ces  imaginations  jeunes  et  impressionnables,  l'air  de 
Joseph  ne  devait-il  pas  dire  l'amour  de  la  patrie;  Farioso  du  Pro- 
phète, l'amour  maternel;  l'air  de  Don  Sébastien,  l'amour  de  la 
gloire?  Ce  sont  là,  après  tout,  des  leçons  qui  en  valent  bien  d'au- 
tres !  La  valse  des  Bleuets,  accompagnée  par  l'auteur  lui-même  et 
s'envolant  en  perles  cristallines  des  lèvres  de  Mlle  Nilsson,  ne 
pouvait-elle  rappeler  à  l'esprit  l'image  séduisante  des  plaisirs  cham- 
pêtres ?  Dans  le  duo  des  Noces  de  Figaro,  dans  le  quatuor  de 
Martha,  et  dans  celui  de  Rigoletto,  le  génie,  lo  talent,  parlent 
assez  haut  pour  séduire,  transporter  dans  le  domaine  de  la  poésie 
les  intelligences  les  plus  naïves  ou  les  plus  indifférentes.  Et  ce 
Conte  d'enfant,  si  fraîchement  récité  par  Rosenhain,  où  la  voix 
grave  de  l'aïeule  évoque  tour  à  tour  les^  vaillants  chevaliers  et  les 
fières  châtelaines,  les  gnomes  et  les  fées,  chevauchant  sous  les 
grands  bois,  n'était-ce  point  là,  dites,  comme  le  sourire  et  la  dé- 
tente de  cet  heureux  programme? 

Tout  en  donnant  l'éloge  qu'ils  méritent  à  la  Fantaisie  tnilitaire, 
de  Servais,  jouée  par  Ph.  Lamoury,  et  au  charmant  petit  duo  à 
l'espagnole  pour  orgue  et  piano,  de  Ch.  Loret,  spirituellement  en- 
levé par  l'auteur  et  M.  Gallois,  je  me  reprends  à  l'accueil  enthou- 
siaste fait  à  Mme  Norman-Neruda  (fantaisie  de  ^Mœser  sur  le 
Freyschuts,  de  la  plus  étonnante  originalité;  Air  varié  de  Vieux- 
temps)  et  à  Mlle  Nilsson.  De  même  que  l'odeur  d'une  violette  rend 
à  l'âme  les  jouissances  de  plusieurs  printemps,  —  la  comparaison 
est  de  saison,  —  le  gosier  et  l'archet  de  ces  deux  enchanteresses 
suédoises  réveillent  tout  ce  qui  dort  de  mélodies  suaves  dans  les 
cellules  de  la  mémoire. 

C'est  ainsi  qu'en  cette  magnifique  salle  constellée  de  lumières  et 
de  bijoux,  envahie  dès   le  matin  par  un  auditoire  d'élite,  —  de- 


DE  PARIS. 


91 


vaut  une  bonne  œuvre  à  faire,  les  honnêtes  gens  qui  vont  ail- 
leurs, s'arrêtent  toujours,  —  c'est  ainsi  qu'au  bruit  des  bravos  e^ 
à  l'audition  d'oeuvres  exquises,  ont  passé,  rapides  et  légères,  les 
heures  de  la  matinée  musicale  des  Frères -Unis.  A  vrai  dire,  il  y 
avait  là,  moins  un  public  qu'une  réunion  d'amis;  moins  une  salle 
de  concert  que  le  salon  d'une  grande  et  généreuse  famille,  dont 
MM.  le  général  Mellinet,  grand-maître;  Alfred  Blanche,  grand- 
maître  adjoint  de  l'ordre,  etAronssohn,  président  de  la  Loge,  fai- 
saient les  honneurs.  Ai-je  besoin  d'insister  sur  la  sympathie  com- 
municative,  sur  le  charme  irrésistible  qui  se  dégeagaient  de  ce  fais- 
ceau formé  de  tant  d'hommes  distingués  et  de  tant  d'artistes 
éminents?  Aussi,  avec  quel  empressement,  avec  quelle  joie  a-t-on 
donné,  et  les  artistes  tout  les  premiers,  à  la  collecte  gracieuse- 
ment faite  dans  les  rangs  du  viril  Atelier  par  la  blonde  Marta  et 
la  brune  Fidès.  «Tout  ti  l'heure,  je  demandais  pour  les  pauvres, — 
disait  Mlle  Nilsson  au  propriétaire,  pour  la  seconde  fois  sollicité, 
d'un  porte-monnaie  aurifère,  —  mais  maintenant  je  quête  pour 
moi.  »  Il  y  a  eu  bien  des  traits  comme  cela,  et  telle  était  la  phy- 
sionomie de  cette  aimable  journée.  Argent  béni,  noble  capital, 
vous  avez  déjà  permis  à  ces  honnêtes  gens  d'adopter,  d'élever, 
comme  cela,  simplement,  noblement,  par  eux-mêmes  et  en  eux- 
mêmes,  quaranle-cinq  orphelins  :  un  demi-cent  d'hommes  arrachés, 
grâce  à  l'attrait  de  la  musique,  à  la  misère,  au  crime,  peut-être! 

La  réunion  s'est  terminée  sous  cette , impression.  Faire  le  bien, 
cette  vraie  destinée  de  l'homme,  n'est-  ce  point  le  secret  d'être 
heureux?  Heureux,  chacun  l'était  en  pensant  qu'il  avait  contribué, 
pour  sa  part,  à  permettre  aux  Frères -Uni:-  de  l'endre  une  famille 
à  d'autres  orphelins  ;  à  donner  du  pain  et  un  abri  à  ces  pauvi'es 
petits  grelottants  ;  à  armer  ces  faibles  pour  les  luttes  de  la  vie  ;  à 
doter  ces  deshérités  d'une  éducation  tendre  et  robuste  qui  les 
consolera  plus  tard  à  leur  insu,  qui  les  écartera  du  mal  sans 
qu'ils  aient  la  peine  de  tenter  un  effort  et  qui  les  portera  vers  le 
bien  comme  une  secrète  analogie  de  nature. 

Voilà  pourquoi  et  voilà  comment  on  a  fait,  dimanche  dernier, 
un  peu  de  musique  au  Grand-Orient  de  France. 

Em.-Mathieu  de  monter. 


THEATRE  DES  FÂNTÂÎSIES-PARISIENHES. 

ISOSEB    3îO.^"ï'BSÏ8''S, 

Opéra- comiqve  en  deux  actes,  paroles  de  MM.  Clairville  et 
Bernard  Lopez,  musique  de  M.  Debillemont. 

(Première    représentation  le  18  mars  18G8.) 

Cette  pièce  n'est  pas  tout  à  fait  nouvelle;  on  l'a  jouée  au  Vau- 
deville, en  1848,  sous  le  même  titre;  mais  elle  n'avait  alors  qu'un 
seul  acte  et  elle  était  ornée  de  couplets  faits  sur  des  airs  con- 
nus. Elle  est  aujourd'hui  divisée  en  deux  actes,  et  ses  couplets 
ont  été  rais  sur  des  airs  nouveaux.  Nous  voudrions  pouvoir  re- 
connaître qu'elle  a  beaucoup  bénéficié  de  ces  iiK.difications;  mais 
la  vérité  est  que,  pour  se  rajeunir,  elle  aurait  eu  besoin  d'un  re- 
maniement encore  plus  radical. 

Le  type  de  Rocjer  Bontemps,  tel  que  l'a  conçu  Béranger,  est  gai 
sans  doute;  mais  ses  auteurs  l'ont  encadré  dans  une  action  qui  ne 
l'est  guère  et  qui  se  compose,  en  outre,  d'éléments  tant  soit  peu 
surannés.  Roger  Bontemps  aime  sa  filleule  Marguerite,  et  il  vou- 
drait bien  en  faire  sa  femme.  Mais  il  a  commis  la  faute  de  chan- 
sonner  la  maîtresse  du  château,  qui  est  une  ancienne  danseuse  de 
l'Opéra,  et  comme  il  est  fort  mal  dans  ses  aifaires,  un  huissier, 
amoureux  de  Marguerite  et'  représentant  du  protecteur  de  l'ex- 
danseuse,  le  poursuit  à  outrance,  saisit  ses  meubles  et  menace  de 
l'envoyer  à  la  Bastille.  Par  bonheur,  la  châtelaine,  en  butte  aux 


satires  de  Roger  Bontemps,  est  une  ancienne  ;:iuie  qui  se  rappelle 
avoir  tenu  avec  lui  Marguerite  sur  les  fonts  baptismaux.  Elle  oublie 
sa  chanson ,  paie  ses  dettes,  lui  fait  cadeau  d'un  mobilier  tout 
neuf,  et,  pour  inetlrc  le  comble  à  sa  générosité,  elle  assure  son 
union  avec  Marguerite. 

M.  Debillemont  a  écrit  sur  ce  vieux  vaudeville  une  musique 
nouvelle  qui  est  vive,  facile  et  parfois  élégante.  Il  y  en  a  beau- 
coup, peut-être  même  un  peu  trop,  car  tous  les  couplets  de  la 
pièce  primitive  ont  été  conservés,  et  l'on  y  en  a  ajouté"  quel- 
ques autres.  Notre  mémoire  n'y  saurait  suffire  ;  cependant  nous 
avons  remarqué,  au  hasard  d'une  première  audition,  plusieurs 
morceaux,  parmi  lesquels  nous  mentionnerons  l'ouverture,  très- 
jolie  symphonie  villageoise,  le  choeur  de  lever  du  rideau,  la  chan- 
son de  Roger  Bontemps,  la  romance  du  portrait,  le  morceau  d'en- 
semble de  la  saisie,  un  air  bachique  et  un  charmant  duo  entre 
Roger  et  la  danseuse. 

Le  rôle  de  Roger  Bontemps  était  joué  au  Vaudeville  par  Félix; 
il  n'est  pas  aussi  heureusement  placé  entre  les  mains  de  Gabriel 
Bonnet,  qui  y  fait  certes  preuve  d'intelligence,  mais  qui,  sous  le 
rapport  physique,  ne  répond  pas  à  l'idée  qu'on  s'en  fait.  Comme 
chanteur  du  moins,  cet  artiste  accomplit  bien  mieux  les  conditions 
voulues.  Sa  voix  est  sympathique  et  il  chante  avec  goût.  Mlle  Alice 
Vois  n'a  pas  non  plus  toutes  les  qualités  requises  pour  le  rôle  de 
Jeanne  la  Danseuse,  mais  elle  s'en  tire  avec  assez  d'adresse. 
Mlle  Labarre  est  une  fort  gentille  Marguerite.  Dcrval  et  Masson 
s'acquittent  fort  convenablement  du  personnage  de  l'huissier  et  de 
celui  du  chef  de  l'escouade  chargée  d'arrêter  Roger  Bontemps. 
Comme  toujours,  la  mise  en  scène  est  très-soignée,  et  le  vaillant 
orchestre  de  M.  Constantin  manoeuvre  avec  un  louable  ensemble. 

Le  soir  môme  où  l'on  jouait  Roger  Bontemps  aux  Fantaisies-Pa- 
i-isiennes,  le  théâtre  de  l'Athénée  reprenait  avec  succès  une  autre 
opérette  de  M.  Debillemont,  la  Vipérine,  qui  a  été  représentée,  il 
y  a  deux  ans,  aux  Folies-Marigny,  par  le  couple  Montrouge,  et  qui 
est  interprétée  maintenant  par  André  Munie,  un  débutant,  et  par 
Mlles  Lucie  Cabel  et  Bonelli. 

D. 


REVUE  DES  THÉÂTRES. 

Théâtre-Français  :  un  Baiser  anonyme,  comédie  en  un  acte,  par 
MM.  Albéric  Second  et  Jules  Blerzy.  —  Gymnase  :  les  Grandes 
Demoiselles,  comédie  en  un  acte,  par  M.  Edmond  Gondinet.  — 
Théâtre  Impérial  du  Chatelet"  :  le  Vengeur,  drame  en  huit  ta- 
bleaux, par  MM.  Brisebarre  et  Blum.  —  Palais-royal  :  reprise 
de  11  Vie  Parisienne  d'Offenbach.  —  Porte-Saint-Martin  :  re- 
prise de  Glenarvon,  drame  de  M.  Félicien  MallefiUe. 

Il  y  a  toujours  foule  au  Théâtre-Français  pour  applaudir  Paul 
Forestier;  mais  on  ne  va  jouer  la  pièce  de  M.  Emile  Augierque  tous 
les  deux  jours,  et  il  est  bon  de  donner  quelques  soins  aux  autres 
spectacles  de  la  semaine.  C'est  dans  ce  but  qu'a  eu  lieu  la  repré- 
sentation récente  d'une  comédie  en  un  acte  de  MM.  Albéric  Second 
et  Jules  Blerzy,  intitulée  un  Baiser  anonyme.  Le  sujet  en  est  fort 
léger,  mais  la  faiblesse  de  l'intrigue  est  rachetée  par  l'esprit  et  la 
distinction  des  détails.  Il  s'agit  d'un  jeune  mari  qui  va  au  bal  masqué 
sans  sa  femme,  et  qui  y  fait  la  rencontre  d'un  charmant  domino  avec 
lequel  il  entre  en  conversation  intime.  Gustave  devient  tendre  et 
pressanf  ;  le  domino  l'écoute  avec  complaisance,  mais  il  faut  se 
séparer,  et,  au  moment  de  partir,  le  domino  jette  au  front  de 
Gustave  un  baiser  rapide.  A  certains  indices,  le  mari  coupable  a 
cru  reconnaître  une  amie  de  sa  femme,  et  lorque  le  prétendu  de 
cette  dame  vient  justement  lui  demander  d'être  son  témoin,  on 
comprend  qu'il  s'imagine  avoir  de  bonnes  raisons  pour  le  détour- 


92 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


ner  de  ce  mariage.  Il  en  résulte  un  imbroglio  assez  piquant  entre 
ces  divers  personnages  qui  finissent  cependant  par  s'expliquer. 
On  apprend  alors  que  le  domino  du  bal  masqué  n'était  autre  que 
la  femme  de  Gaston,  et  que,  pour  punir  son  infidèle,  elle  a  prié 
son  amie  de  l'aider  à  le  mystifier. 

Le  plus  grand  mérite  de  ce  gentil  marivaudage  est  d'être  mer- 
veilleusement débité  par  Brassant,  Febvre,  Mme  Madeleine  Brolian 
et  Mlle  Edile  Ricquier.  Comment  une  pièce,  si  insuffisante  qu'elle 
soit,  ne  serait- elle  pas  favorablement  accueillie  avec  de  pareils 
interprètes? 

—  La  nouvelle  comédie  de  M.  Gondinct,  jouée  au  Gymnase, 
sous  le  titre  des  Grandes  Demoiselles,  n'a  pas  non  plus  une 
grande  valeur,  mais,  comme  celles  des  Français,  elles  se  sauve 
par  d'agréables  détails,  et  surtout  par  la  réunion  d'une  douzaine 
de  jeunes  et  gracieuses  femmes.  Elles  sont  rassemblées  dans  une 
maison  de  campagne  poui'  le  mariage  d'une  petite  cousine  qui,  au 
dernier  moment,  croit  devoir  se  raviser.  On  se  désole  d'abord, 
mais  la  coquetterie  reprend  bientôt  ses  droits,  quand  on  est  informé 
qu'un  séduisant  vicomte  va  venir  faire  un  choix  parmi  cet  essaim 
de  grandes  demoiselles  qui  sont  foutes  dévorées  du  désir  de  se 
marier.  Un  étranger  se  présente,  c'est  à  qui  cherchera  à  fixer  son 
attention  par  des  manières  engageantes,  non  moins  que  par  des 
toilettes  irréprochables.  Mais,  dans  leur  empressement  de  plaire  aux 
dépens  les  unes  des  autres,  toutes  ces  demoiselles  ont  fait  fausse 
route,  et  c'est  pour  un  vulgaire  accordeur  de  pianos  qu'elles  ont 
déployé  un  si  grand  luxe  de  roueries  féminines. 

Ce  petit  acte  a  fait  plaisir;  il  est  gai  et  spirituel;  il  est  bien 
joué  par  Pradeau,  Porel  et  Viclorin;  dans  le  nombre  des  treize 
femmes  qu'il  emploie,  on  distingue  Mmcs  Fromentin,  Chaumont, 
Pierson,  Massin,  Angelo  ;  mais  nous  avons  tout  lieu  de  supposer 
qu'on  ira  le  voir  principalement  pour  la  curieuse  exhibition  de 
toilettes  qui  fait  en  ce  moment,  du  Gymnase,  une  succursale 
de  nos  meilleurs  journaux  de  modes. 

—  L'immense  pièce  du  Vengeur  qui  a  fait  tant  de  bruit,  avant 
son  apparition,  a  été  bien  loin  de  tenir  tout  ce  qu'elle  promettait. 
La  première  représentation  de  ce  drame  a  pro\oqué  le  plus  violent 
orage,  et  c'est  au  bruit  des  sifflets  qu'a  fini  par  sombrer  le  fameux 
vaisseau  républicain.  Cependant  il  est  encore  sur  l'aflkhe,  et  l'on 
parle  même  de  le  galvaniser  en  y  appelant  Mlle  Thérésa  qui  y 
lancerait  aux  échos  du  Châtelet  le  refrain  d'une  chanson  patrioti- 
que. Si  cet  expédient  réussit,  tant  mieux;  car  on  ne  peut  rester 
indifférent  à  la  pensée  de  tous  les  frais  que  comporte  la  mise  en 
scène  d'un  ouvrage  de  ce  genre,  et  au  calcul  des  pertes  que  sa 
chute  entraîne. 

—  Constatons,  pour  mémoire,  que  le  Palais-Royal  vient  de  re- 
prendre, avec  éclat,  la  Vie  Parisienne,  d'Offenbach,  où  l'on  re- 
trouve les  principaux  artistes  de  la  création  :  Brasseur,  Hyacinthe, 
Gil-Pérès,  Priston,  Lassouche  et  Mlle  Zulma-Boutfard.  Mlle  Aline 
Duval  y  remplace  Mme  Thierret,  et  l'on  a  engagé,  pour  compléter 
la  distribution  féminine,  Mlles  Baron,  Lovato  et  Paurelle. 

—  A  la  Porte-St-Martin,  on  a  repris  également  un  ancien  drame 
de  l'Ambigu,  Glenarvon  ou  les  Puritains  de  Londres,  dont  les  pre- 
miers rôles  sont  joués  par  Laray,  Brésil,  Delaistre,  Mnjes  Suzanne 
Lagier  et  D.  Petit;  mais  il  faut  en  convenir,  cette  pièce  a  bien 
vieilli. 

D.  A.  D.  SAINT-YVES. 


GALERIE  DES  SUSICIENS  CËLEBRES  ANCIENS  ET  lODERNES. 

Un  des  ateliers  photographiques  de  Paris  les  plus  curieux  à  vi- 
siter est  sans  contredit  celui   de  Pierre   Petit.  D'une   prodigieuse 


activité  et  d'une  expérience  consommée,  Pierre  Petit  s'est  attaché, 
dès  le  principe,  à  reproduire  toutes  les  notabilités  existantes,  et 
plus  de  2,500  individualités,  prises  dans  toutes  les  classes  de  la 
société,  ont  successivement  posé  devant  son  objectif.  Maisons  sou- 
veraines, Episgopat,  Armées  de  terre  et  de  mer;  Célébrités 
politiques,  diplomatiques,  judiciaires,  scientifiques,  littéraires, 
artistiques,  etc  ,  ETC.  ;  telle  est  la  mine  inépuisable  dans  laquelle 
s'est  recrutée,  et  se  recrute  chaque  jour,  sa  vaste  collection  qui 
n'a  pas  sa  pareille  comme  variété  et  comme  mérite  d'exécution. 

Les  musiciens  contemporains  et  les  musiciens  du  siècle  passé  y 
occupent  une  place  aussi  importante  qu'intéressante,  et  cette  série 
compte  environ  200  portraits  des  compositeurs  et  des  virtuoses  les 
plus  célèbres,  parmi  lesquels  on  remarque  surtout  les  belles 
épreuves  de  Meyerdeer  ,  Rossini  ,  Auber  ,  Berlioz  ,  Halévy  ,  Gou- 
NOD ,  Amb.  Thomas,  Verdi,  Vieuxtemps,  Prudent,  H.  IIerz,  et  — 
tout  dernièiement  fait  —  le  superbe  portrait  de  Stephen  IIeller. 
Non-seulement  leur  ressemblance  est  parfaite,  mais  ils  offrent  de 
plus,  au  point  de  vue  artistique,  une  supériorité  incontestable. 
Tirés  dans  le  format  in-4''  (format  de  la  musique),  sur  papier  de 
Chine  et  carton  de  Bristol,  ils  sont  on  ne  peut  mieux  appropriés 
à  oiner  le  cabinet  d'un  artiste,  à  former  des  albums,  à  illustrer 
des  recueils,  etc.,  et  la  modicité  de  leur  prix  les  rend  accessibles 
à  tous.  Désireuse  de  propager  cette  belle  iconographie,  qui  s'aug- 
mentera successivement  de  tous  les  artistes  en  réputation,  français 
ou  étrangers,  la  maison  Brandus  et  Dufour,  éditeurs  de  musique, 
a  traité  avec  Pierre  Petit  pour  en  avoir  l'exploitation.  Elle  en  in- 
forme donc  ses  correspondants  de  la  province  et  de  l'étranger, 
auxque's  elle  recommande  très-chaudement  cette  publication.  Ils 
trouveront  aux  annonces  de  la  Gazelle  musicale  la  liste  des  prin- 
cipaux portraits  parus,  et,  sur  leur  invitation,  elle  leur  en  adres- 
sera un  spécimen.  En  outre,  elle  exécutera  leurs  commandes  à 
une  remise  tout  exceptionnelle  qui  les  encouragera  à  prêter  un 
concours  zélé  à  celte  utile  entreprise. 


CONCERTS  ET  AUDITIONS  MUSICALES  DE  LÀ  SEBIÂINE. 


,ii%  Les  programmes  des  conceris  de  la  cour  et  du  high-life  donnés 
cette  semaine  ont  été  fort  brillants  et  défrayés  par  ce  que  Paris  compte 
de  plus  éminents  en  artistes.  Aux  Tuileries,  Mme  Sasse,  Mlle  Battu, 
Mlle  Nilsson,  Faure,  ont  chanté  les  plus  beaux  morceaux  du  répertoire  de 
l'opéra  français  et  italien.  Le  magnifique  duo  du  4"  acte  de  l'Africaine 
par  Marie  Sasse  et  Villaret ,  le  duo  à'Hamkt  par  Mlle  Nilsson  et  Faure, 
la  cavatine  à'Ernani  par  Marie  Battu,  ont  été  de  véritables  triomphes  pour 
ces  chanteurs  d'élite.  On  a  particulièrement  goûté  une  barcarolle  nou- 
velle, Sancta  Lucia,  composée  par  Braga  pour  Mfie  Battu,  qu'elle  dit  avec 
un  art  et  un  brio  incoraparabli-s,  et  qui  lui  a  valu  les  félicitations  de 
Leurs  Majestés.  Les  chansons  suédoises  de  Mlle  Nilsson  ont  produit  aussi 
un  grand  effet.— Au  concert  de  l'hôtel  de  ville  nous  retrouvons  Faure  et 
Mlle  Nilsson  avec  le  duo  et  la  ballade  d'Hamlet. — Chez  la  marquise 
d'Aoust ,  le  quatuor  de  Maria  chanté  par  la  marquise  elle-même, 
Mlle  Rives,  Gardoni  et  Verger,  les  mélodies  suédoises  par  Mlle  Nilsson. 
^Chez  le  président  du  Conseil  d'État,  M.  de  Vuilry,  le  chœur  de  V Afri- 
caine exécuté  d'une  façon  supérieure  et  bissé  à  la  demande  générale.— 
— Chez  la  duchesse  de  Frias,  Mlle  Battu  redisait  avec  le  même  succès 
qu'aux  Tuileries  sa  Barcarolle  napolitaine,  et  avec  Gardoni  et  Verger  le 
trio  bouffe  de  Martini,  Vadasri  via  diqua.  Nous  supprimons  nécessaire- 
ment le  détail  des  morceaux  exécutés;  mais  on  peut  juger,  par  ceux 
que  nous  venons  de  citer,  du  soin  apporté  à  l'orgaiiisalion  de  ces  con- 
certs et  de  la  place  importante  qu'ils  occupent  aujourd'hui  dans  les  plai- 
sirs de  la  vie  parisienne. 

^*t  Au  deuxième  concert  du  Conservatoire  devait  jouer  ou  Mme  Ne- 
ruda-Norman  ou  M.  Edmond  Duvernoy;  Mme  Neruda-Norman  ayant 
promis  son  concours  au  concert  du  Grand  Orient,  dont  nous  rendons 
compte,  on  a  dû  remplacer  le  solo  instrumental  par  les  fragments  ordi- 
naires du  septuor  de  Beethoven,  ressource  précieuse  en  cas  d'embarras, 
mais  dont  on  a  un  peu  abusé.  Le  reste  du  programme  comme  l'avant- 
dernier  dimanche. 

^*^  La  jeune  et  charmante  pianiste  américaine  Teresa  Carreno  s'est 
décidément  posée  comme  une  des  individualités  les  plus  remarquables  du 


DE  PARIS. 


93 


monde  artistique  parisien,  qui  a  accueilli  à  bras  ouverts  ce  talent  déjà 
mûr  et  formé  à  la  meilleure  école.-  Mlle  Carreno,  que  la  nature  a  roya- 
lement traitée,  possède  une  incroyable  puissance  d'exécution,  une  sûreté 
de  mécanisme  à  toute  épreuve.  Dans  plusieurs  de  ses  compositions,  Une 
revue  à  Prague,  fantaisie  sur  l'Africaine,  Un  rêve  en  mer,  dans  le  beau 
duo  symphonique  pour  deux  pianos  de  Lefébure-Wély  (avec  son  compa- 
triote Cervantes),  elle  a  soulevé,  mercredi  dernier,  à  la  salle  Erard,  des 
applaudissements  frénétiques.  Mlle  Pauline  Castri,  MM.  Delle-Sedie,  Le- 
fébure-Wély, Sarasate  et  Coquelin  en  ont  pris  leur  boune  part. 

^;*i  Le  concert  au  profit  de  la  crèche  du  quarlier  des  journaux,  dont 
rurganisalion  avait  été  confiée  à  iM.  Ehvait,  a  été  brillant.  Crosti,  Sainte- 
Foy  et  Mlle  Marie  Heilbron,  de  l'Opéra-Coniique,  ont  eu  les  honneurs  du 
bis.  Mlle  Lavini  a  été  très- applaudie  avec  l'air  du  Barbier  et  un  boléro 
espagnol  d'iradier.  La  jeune  violoniste  Nelly  Guibert,  élève  distinguée 
de  Charles  Lamouroux,  a  exécuté  avec  une  véritable  maestria  une  fan- 
taisie d'Artôt  et  le  solo  du  Parnasse  de  liaphaël,  scène  allégorique,  avec 
accompagnement  d'un  chœur  à  six  voix  de  femmes,  composée  par  M.  A. 
Elwart.  La  charmante  pianiste  Marie  Secrétain,  le  saxophoniste  L. 
Mayeur,  ont  récollé  leur  bonne  part  de  bravos,  et  la  société  chorale  di- 
rigée par  Amand  Chevé  a  fait  sensation  avec  les  Filles  de  Noé,  chœur  à 
six  voix  d'EIwart,  et  un  beau  chœur  du  compositeur  russe  Bortniansky, 
les  Chérubins. 

^*i.  Georges  Pfeiffer  a  donné  le  1"  mars  une  audition  de  ses  œuvres. 
Ce  jeune  maître  n'est  pas  seulement  un  pianiste  éminent,  c'est  encore,— 
les  lecteurs  de  la  Revue  et  Gazette  musicale  le  savent,  —  un  compositeur  de 
grand  talent  qui  a  su  se  placer  très-haut  dans  l'estime  des  musiciens. 
Pour  tout  citer  et  tout  analyser,  il  nous  faudrait  un  espace  qui  nous 
manque;  nous  nous  bornerons  à  dire  en  quelques  mots  que  le  trio  en 
sol  mineur,  joué  par  l'auteur,  M.  Léonard  et  Lasserre,  est  une  œuvre 
très-remarquable,  frappée  au  coin  de  la  distinction  et  du  savoir  ;  que  la 
transcription  de  l'ouverture  d'Egmont  est  d'un  puissant  effet;  que  la 
Valse  des  Sirènes  et  la  3°  mazurka  sont  deux  ravissants  petits  poëmes. 
Le  joli  chœur  VAbeille,  parfaitement  chanté  par  la  société  chorale  d'ama- 
teurs que  dirige  M.  Guillot  de  Saint-Bris,  un  Sonnel-Éléyie  sur  des  pa- 
roles de  Buileau,  et  une  romance  de  l'cpéra-oomique  le  Capitaine  Roch, 
fort  bien  dits  par  Archaimbaud  et  Mlle  Roulle,  ont  été  accueillis, 
comme  tout  le  reste,  par  les  chaleureux  applaudissements  d'un  nom- 
breux public. 

a,*j,  Dimanche  dernier,  a  eu  lieu  le  concert  de  Henri  Kowalski  et  des 
sœurs  Pellini.  Nous  avons  maintes  fois  applaudi  aux  succès  du  jeune 
artiste,  qui  a  su  conquérir  une  honorable  place  dans  l'armée  si  nom- 
breuse des  pianistes,  par  la  réunion  des  qualités  qui  font  le  virtuose 
sympathique  et  le  musicien  sérieux.  11  nous  a  semblé  avoir  gagné  celte 
fois  encore  en  sûreté,  en  puissance  et  en  charme.  Il  a  joué  trois  jolis 
morceaux  de  sa  composition,  parmi  lesquels  nous  citerons  la  Danse  des 
Dryades.  'Avec  le  violoniste  Hammer,  il  a  été  couvert  d'applaudisse- 
ments après  la  fantaisie  de  Thalberg  et  de  Bériot  sur  te  Huguenots.  — 
Les  sœurs  Pellini,  gracieuses  cantatrices  dont  le  talent  est  aujourd'hui 
apprécié  partout,  paraissaient  pour  la  première  fuis  sur  une  scène  plus 
vaste  et  devant  un  public  qui  a\ait  acheté  le  droit  de  les  entendre;  il  ne 
leur  a  pas  fait  un  moins  bon  accueil  que  les  salons  aristocratiques.  Elles  ont 
chanté  quelques-uns  de  leurs  ravissants  duos,  iXoclurne  de  Mendelssohn, 
Créole  et  Captive  de  Duclos,  écrit  expressément  pour  elles  et,  en  russe, 
une  charmante  mélodie  de  la  princesse  Kotschouhey.  Des  bravos 
chaleureux,  des  rappels  nombreux  leur  ont  prouvé  qu'elles  avaient  con- 
quis à  Paris  leurs  lettres  de  grande  naturalisation. 

,,;**  Le  concert  annuel  de  M.  Delaliaye  a  eu  lieu  mardi  10  mars,  dans 
les  salons  Erard,  devant  un  auditoire  magnifique  où  Ton  remarquait  bon 
nombre  de  notabilités  du  monde  des  arts,  de  la  littérature  et  de  la  haute 
soiété  parisienne.  'M.  Dolahaye  est  un  pianiste  au  jeu  vigoureux,  puis- 
sant, résolument  exempt  d'afféterie,  ce  qui  ne  veut  pas  dire  qu'il  manque 
de  délicatesse  ni  de  charme.  Il  a  exécuté  avec  une  fougue  superbe,  un 
style  d'une  pureté  admirable,  la  belle  fantaisie  de  Prudent  sur  le  Domino 
noir,  morceau  splendide,  mais  redoutable,  qui  exige  des  quaUtés  si  mul- 
tiples et  si  diverses  :  l'ampleur,  l'agilité,  l'éclat,  la  grâce,  la  force! 
M.  Delahaye  s'est  montré  à  la  hauteur  de  l'œuvre  et  a  obtenu  une  vé- 
ritable ovation.  Comme  compositeur,  M.  Delahaye  n'a  pas  eu  moins  de 
succès  :  la  Mouche,  romance  sans  paroles  et  sa  deuxième  Polonaise  sont 
deux  pièces  charmantes.  Le  concert  s'est  terminé  de  la  façon  la  plus 
brillante  par  l'ouverture  du  Freijschutz,  habilement  arrangée  pour  quatre 
pianos  par  le  bénéficiaire  et  enlevé  avec  un  ensemble  parfait  par  lui, 
par  MM.  Lavignac,  Lack,  Corbaz.  MM.  Sarrasate,  Lasserre,  Hermann- 
Léon  et  Mme  Barthe  Banderali  qui  prêtaient  leur  concours  à  M.  Delahaye, 
ont  eu,    eux  aussi,  leur  très-large  part  du  succès  de   cette    belle  soirée. 

,1,*^  Comme  nous  l'avions  annoncé  en  rendant  compte  de  la  dernière 
audition  de  ses  œuvres,  D.  Magnus  a  donné  son  concert  annuel  à  la 
salle  Pleyel,  le  li  mars,  avec  Mme  Gagliano.  C'est  toujours  le  pianiste  au 
jeu  nerveux  et  brillant  que  nous  connaissons,  le  virtuose  irréprochable 
qui  sait  si  bien  faire  valoir  ses  originales  et  intéressantes  compositions, 
comme  la  Tzigane-Marche,  par  exemple,  charmant  morceau  qui  a  con- 
quis tous  les  suffrages  et  qui  n'aura  pas  moins  de  vogue  que  la  Tara- 
boukha.  Citons  encore  quelques  titres,  le  caprice  sur  te  Huguenots, 
Berceuse  orientale,  Dimanche,  Caprice-Mazurka,  etc.,  autant  de  petits  chefs- 


d'œuvre.— Mme  Gagliano  est  une  cantatrice  de  la  bonne  école;  elle  a  dit 
avec  goût  la  romance  de  Mignon  de  Monpou,  la  chanson  des  Djinns 
d'Auber  et  la  sérénade  de  Gil-Blas  de  Semet. 

***  Le  concert  de  W.  Kriiger,  le  17  mars,  a  été  du  petit  nombre  de 
ceux  qui  offrent  au  musicien  un  réel  intérêt.  Nous  signalerons  surtout 
le  concerto  en  la  pour  piano,  œuvre  capitale  dans  laquelle  Kriiger  se  ré- 
vèle comme  un  compositeur  sérieux  et  attachant,  et  qu'il  a  exécutée  avec 
sa  maestria  habituelle.  Sa  Krakoiviak,  danse  polonaise,  est  brillante  et 
originale.  MM.  Hammer,  B.  Godard,  Stratmann,  Audran,  Mlles  T.  Car- 
reno et  Cécile  Dolmetsch  prêtaient  au  bénéficiaire  un  précieux 
concours. 

**i  Notre  excellent  contreba'isiste  A.  Gouffé,  dont  les  matinées  hebdo- 
madaires sont  toujours  si  intéres-santes  et  si  suivies,  a  donné  mercredi 
dernier  .sa  séance  publique  annuelle  dans  les  salons  Pleyel,  avec  le  con- 
cours de  Mme  Béguin-Salomon,  de  MM.  Guerreau,  RignauU,  Baur,  Heiss 
et  Lebouc.  Du  trop  riche  programme  de  ce  concert,  nous  ne  retiendrons 
qu'un  quinquette  en  ré,  de  M.  Ad.  Blanc  qui  a  été  justement  applaudi, 
et  une  sicilienne  variée  pour  la  contrebasse,  composée  et  exécutée  avec 
beaucoup  de  succès  par  M.  Gouffé.  Mme  Béguin-Salomon  est  restée  à  la 
hauteur  de  sa  belle  réputation  dans  le  quatuor  de  piano  de  Beethoven, 
dans  deux  charmants  morceaux  extraits  des  Nuits  blanches  de  Stéphen 
Heller  et  dans  une  brillante  étude  pour  la  main  gauche,  dont  elle  est 
l'auteur. 

»%  Le  terrain  nous  fait  défaut,  comme  chaque  année  à  pareille  épo- 
que, pour  rendre  un  compte  suffisant  des  nombreux  concerts  qui  se 
donnent  de  tous  côtés.  Nous  nous  bornerons  donc  à  en  signaler  rapi- 
dement quelque.s-uns  parmi  les  plus  intére,«sants  : 

—  Celui  de  M.  Ch.  de  Bériot  fils  et  de  Mme  Monbelli,  deux  artistes 
de  race,  le  premier  célèbre  déjà  et  à  juste  titre  comme  pianiste;  la  se- 
conde, cantatrice  d'un  remarquable  et  aristocratique  talent,  digne  élève 
d'Eugénie  Garcia;  signalons  trois  compositions  charmantes  de  Ch.  de 
Bériot,  Ballade,  Rondo  martial  et  Etude  caprice,  qu'il  a  exécutés  en  maî- 
tre. 

—  Celui  de  M.  Georges  Jacobi,  violoniste  et  compositeur  de  méiite, 
qui  a  joué  avec  succès  plusieurs  de  ses  nouvelles  œuvres  :  Nocturne, 
Berceuse,  Chanson  de  matelots;  M.  Ernest  Stœger,  le  pianiste  distingué 
que  nos  lecteurs  connaissent,  s'est  fait  applaudir  avec  ses  trois  jolis  mor- 
ceau de  genre:  Novetlett'',  Prélude  et  Etude  caprice,  si  généralement 
goûtés;  M.  Caron,  dans  la  ballade  d'Adaniastor ,  de  l'Africaine,  et  Mlle 
Rosine  Bloch,  dans  l'air  du  Prophète  :  «  0  mon  fils!  »  ont  recueilli  de 
nombreux  et  légitimes  bravos. 

—  Celui  de  Mlle  Pauline  Régnier,  qui  interprète  d'une  façon  supé- 
rieure les  maîtres  du  piano,  et  qui  s'est  spécialement  distinguée  dans 
une  polonaise  de  Chopin,  après  laquelle  on  lui  a  fait  une  brillante  ova- 
tion. 

—  Celui  des  jeunes  frères  Sauret,  violoniste  et  pianiste,  si  intéressants 
et  d'un  talent  si  précoce  ;  le  pianiste  surtout  qui  semble  promettre  un 
véritable  artiste,  à  la  façon  dont  il  a  joué  un  brillant  Caprice-Etude  de 
son  maître  Ch.  de  Bériot. 

—  Celui  de  Mme  Rouxel  (Angèle  Tailhardat),  la  vaillante  pianiste  que 
l'on  sait,  à  côté  de  laquelle  se  sont  fait  applaudir  le  violoniste  Sighicelli 
et  le  flûtiste  Taffanel. 

■-  Celui  du  violoniste  mexicain  De'gado,  ancien  chef  d'orchestre  au 
théâtre  National  de  Mexico,  qui  vient  faire  apprécier  à  Paris  un  talent 
réel  et  de  bon  aloi . 

—  Enfin,  celui  du  pianiste  et  compositeur  polonais  Titus  d'Ernesti, 
dont  l'éloge  n'est  plus  à  faire,  et  qui  joue  si  admirablement  la  musique 
de  son  illustre  compatriote  Chopin.  Nous  avons  applaudi  trois  œuvres 
de  cet  excellent  artiste:  Au  bord  du  lac,  Paris,  galop  brillant,  et  une 
Fo(i(awie  sur  des  thèmes  polonais,  qui  feront  certainemoot  leur  chemin 
dans  la  carrière  du  succès.  Nous  devons  également  une  mention  très- 
honorable  à  une  cantatrice  nouvelle  pour  Paris,  Mme  Délia  Rosa,  qui 
nous  arrive  précédée  d'une  réputation  commencée  et  dignement  soute- 
nue en  Italie ,  et  qu'on  a  acclamée  unanimement  après  une  cavatine 
do  Pierre  de  Màdicis  et  le  grand  air  de  Semiramide. 

^*^  Le  défaut  d'espace  nous  empêche  aussi  de  parler  d'une  manière 
assez  détaillée  du  concert  donné  dimanche  dernier  par  le  célèbre  pianiste 
compositeur  Jacques  Rosenhain  ;  nous  y  reviendrons  dans  notre  pro 
chain  numéro. 

^%  Il  y  a  quelques  jours,  M.  Bessems  a  obtenu  un  grand  succès  en 
jouant  dans  le  concert  donné  par  la  Société  des  Lettres  et  des  Arts,  à 
Fontainebleau  ;  M.  Bessems  y  a  fait  entendre  plusieurs  de  ses  composi- 
tions pour  violon  et  alto,  et  a  fait  chanter  sa  ballade  de  Mignon  avec 
accompagnement  d'alto  par  M.  Sapin,  qui  a  produit  uu  grand  effet  sur 
le  public  de  Fontainebleau.  M.  Bessems  a  terminé  sa  séance  par  deux 
mélodies  de  sa  composition  ;  elles  ont  électrisé  les  dilettantes  de  cette 
aristocratique  réunion. 

.:!(*,  La  Société  philharmonique  d'Amiens,  si  bien  dirigée  par  M.  Deneux, 
vient  de  donner,  au  profit  des  pauvres,  un  très-brillant  concert  dans  le- 
quel le  Désert,de  Félicien  David,  a  été  exécuté  avec  un  immense  succès; 
l'auteur  conduisait  lui-même.  —  Sax  et  sa  fanfare  d'élite  n'ont  pas  été 
moins  fêlés;  on  a  surtout  applaudi  le  grand  duo  sur  Robert,  pour  Iroin- 


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REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


bonc-sax  et  soxhorn-ba£se  à  six  pistons,  fort  bien  exécuté  par  MM.  Holle- 
beke  et  Robyns. 

:j*„  Nous  revenons  aujourd'hui  sur  le  concert  de  Mme  Clotilde  de  Lala- 
pie,  dont  nous  avons  déjà  mentionné  le  succès  dans  notre  dernier  nu- 
méro, et  d'autant  plus  volontiers  qu'un  talent  varié  et  solide  comme  le 
sien  mérite  plus  que  beaucoup  d'autres  d'être  mis  en  pleine  lumière.  En 
effet,  des  morceaux  de  toutes  les  écoles  classiques  et  modernes,  de  Bee- 
tlioven,  Chopin,  Liszt,  Schulhoff,  ont  pris  sous  ses  doigts  leur  véritable 
caractère  ;  elle  donne  à  son  exécution,  irréprochable  quant  au  méca- 
nisme, un  charme  tout  particulier  qu'elle  saura,  nous  n'en  doutons  pas, 
communiquer  aux  disciples  qu'elle  est  appelée  à  former. 

**^,  La  dernière  séance  de  musique  de  chambre  de  H.  Bonewitz  a  eu 
lieu  dimanche  dernier  dans  les  salons  Kriegelslein.  Ces  matinées  seront, 
lors  de  la  reprise  des  séances  au  mois  de  septembre  prochain ,  transfor- 
mées en  soirées,  dont  l'intérêt  se  soutiendra,  nous  n'en  doutons  pas. 

,if**  Les  sociétés  philharmoniques  de  province  se  disputent  Mlle  Angèle 
Cordier,  dont  le  talent  de  cantatrice  s'établit  de  plus  en  plus.  Tout  ré- 
cemment, dans  les  beaux  concerts  donnés  à  Cambrai  et  à  Arras,  elle  a 
obtenu  le  plus  brillant  succès  en  y  chantant  l'air  de  «  l'Ombre  »  du 
Pardon  de  Plocrmel  qu'elle  détaille  admirablement. 

**j,  La  direction  du  Casino  de  Monaco  a  organisé,  le  7  mars  dernier, 
un  magnifique  concert  auquel  ont  pris  part  Alfred  Jaell  et  sa  femme, 
toujours  admirables  et  toujours  fêtés;  l'éminent  clarinelliste  Wuille,  pro- 
fesseur au  Conservatoire  do  Strasbourg,  qui  a  exécuté  avec  son  talent 
habituel  un  cnnccrlino  de  Weber,  et  une  cantairico  du  théâtre  Italien 
de  Nice,  Mile  Scalchi,  qui  a  recueilli  de  légitimes  applaudissements  après 
la  cavatine  do  Sémiramis.  L'orchestre,  sous  la  direction  de  M.  Eusèbe 
Lucas,  a  été  de  tous  points  digne  d'éloges. 

***  Aujourd'liui,  au  cirque  de  l'Impératrice,  a  lieu  la  grande  séance 
annuelle  de  l'Orphéon  municipal  de  la  ville  de  Paris  (rive  gauche),  sous 
la  direction  de  M.  François  Bazin.  Voici  le  programme  des  chœurs  qui 
y  seront  chantés  :  la  Création,  de  Haydn  ;  Don  Carlos,  de  Verdi  ;  les 
Chants  du  Bosphore,  de  François  Bazin  ;  CEdipe  à  Colone,  de  Sacchini  ; 
Paris!  d'Aml)roise  Thomas;  C'est  Dieu  !  de  Léo  Dclibes;  V Entrée  des  Croi- 
sés à  Conslantinople,  de  Helts:  un  ancien  Noël;  le  Nabab,  de  F.  Halévy, 
et  Vive  V Empereur  !  de  Gounod. 

^*K.  Voici  le  programme  du  21°  concert  populaire  de  musique  classique 
qui  sera  donné  aujourd'hui  au  cirque  Napoléon,  sous  la  direction  de 
J.  Pasdeloup  :  1°  Ouverture  de  Prcciosa,  de  Weber;  —  2°  Réformations- 
Sinfonie,  (n"5),dcMendelssohn,  l'"  audition  (introduction,  allegro,  scherzo, 
andante,  choral  de  Luther,  finale);  —  3°  Sicilienne,  menuet  de  J.-B. 
Bach;  —  4°  Andante  pour  violon-solo  et  orchestre  de  Garcin  (le  solo  par 
M    Garcin);  —  3°  Symphonie  en  /a  de  Beethoven. 

***  Mme  Norman-Neruda  est  h.  Paris,  de  retour  de  son  excursion  en 
Hollande.  Son  concert  —  et  c'est  le  seul  qu'elle  donnera  à  Paris  —  reste 
fixé  à  jeudi  prochain,  26  mars.  La  grande  artiste  y  exécutera  les 
morceaux  suivants  :  Ballade  et  Polonaise,  de  Vieuxtemps;  Prélude,  Ga- 
votte et  Menuet  de  J.-S.  Bach  ;  une  sonate  de  Rust,  œuvre  fort  curieuse, 
qui  date  de  1793;  la  Sonate  de  Beethoven,  op.  il,  dédiée  à  Kreutzer, 
pour  piaao  et  violon  avec  M.  Camille  Saint -Saëns;  et  un  duo  de 
Maurer  et  l'adagio  de  Bériot  pour  deux  violons  avec  sa  sœur,  Mlle  Marie 
Neruda  ;  la  partie  vocale  du  concert  sera  représentée  par  Delle-Sedie. 

^,*j,  Chaque  année  à  cette  époque  il  y  a  fête  au  Casino  de  la  rue  Cadet; 
Arban  convie  au  beau  concert  qu'il  donne  à  son  bénéfice  tous  ceux,  — 
et  ils  sont  nombreux  —  qui  apprécient  son  triple  talent  de  virtuose,  de 
compositeur  et  de  chef  d'orchestre,  en  même  temps  que  les  soins  tout 
particuliers  et  l'babileté  avec  lesquels  il  dirige  les  soirées  musicales  du 
Casino.  C'est  le  samedi  28  qu'aura  lieu  cette  solennité  dont  les  éléments 
sont  des  plus  attrayants;  on  en  jugera  par  le  programme  que  nous  don- 
nons in-extenso  et  dans  lequel  on  remarquera  une  véritable  nouveauté  : 
un  fragment  de  la  Saint-Julien  des  Ménétriers,  symphonie  dramatique 
avec  paroles  qui  termine  la  Parémiologie  musicale  de  Georges  Kastner  et 
qui  sera  exécuté  pour  la  première  fois.— P.\rtie  vocale:  Société  des  En- 
fants de  Lutëce,  sous  la  direction  de  M.  Gaubert.^PARiiE  instoibientale  : 
M.  Pujol,  pianiste;  M.  Dunkler,  violoncelliste;  M.  Lalliet,  hautboïste; 
M,  Arban,  cornettiste.  — Première  partie  :  1°  Ouverture  de  Charles  VI, 
d'IIalévy  ;  2°  Fragment  de  la  Saint-Julien  des  Ménétriers,  de  Georges 
Kastner  (!''<' audition)  ;  3°  Premier  grand  solo  de  cornet  à  pistons,  com- 
posé et  exécuté  par  Arban  ;  4»  Ouverture  des  Girondins,  de  H.  Litolff  ; 
S°  Fantaisie  concertante  sur  les  Vêpres  Siciliemies,  de  Verdi,  composée 
par  Arban,  avec  soli  par  MM.  Gobert,  Dunkler,  Cantié,  Soler,  Damare, 
Gobin  et  Divoire  (1"  audition).  —  Deuxième  partie  :  i°  Grande  Fantai- 
sie sur  les  Iluguenats,  pour  orchestre  et  chœurs,  de  Meyerbeer  ;  2°  Fan- 
taisie pour  piano,  sur  Faust,  composée  et  exécutée  par  M.  Pujol; 
3°  Ouverture  du  Premier  Jour  de  bonheur,  d'Auber  {i^"  audition)  ; 
4°  Solo  (le  hautbois  sur  la  Traviala,  de  Verdi,  composé  et  exécuté  par 
M.  Lalliet;  3»  Finale  de  Roland  à  Roncevaux,  de  M.  Mermet,  orchestre 
et  chœurs. 

»%  Aujourd'hui  dimanche  à  quatre  heures,  M.  Ch.  Widor  donne,  avec 
le  concours  de  M.  Franck  aîné,  dans  le  nouvel  établissement  de 
M.  A.  Cavaillé-Coll,  avenue  du  Maine,  13  et  13,  une  séance  de  musique 
d'orgue  et  de  piano. 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 

„,**  Lundi,  à  l'occasion  de  l'anniversaire  du  jour  de  naissance  de 
S.  A.  I.  le  Prince  Impérial,  tous  les  théâtres  étaient  pavoises  et  illuminés. 

„,**  Le  théâtre  impérial  de  l'Opéra  a  donné  trois  fois  Hamlet  cette  se- 
maine. —  Aujourd'hui  représentation  extraordinaire  de  la  Juive. 

^*if  A  la  représentation  donnée  mercredi  au  théâtre  de  l'Opéra-Comi- 
que,  au  bénéfice  de  la  Caisse  de  secours  de  la  Société  des  auteurs  dra- 
matiques, on  a  beaucoup  applaudi  Marie  Sasse  et  Villaret  dans  le  qua- 
trième acte  de  l'Africaine,  et  particulièrement  après  le  magnifique  duo 
qu'ils  ont  admirablement  chanté.  — Le  Premier  Jour  de  bonheur  continue  à 
faire  le  maximum  de  la  recelte. 

^*^  Mardi,  la  Sonnanhula,  jeudi,  il  Barbiere,  et  samedi,  Rigoletlo,  ont 
été  donnés  pour  la  dernière  fois  avant  le  départ  d'A.  Patti.  —  La  semaine 
prochaine  les  époux  Tiberini  paraîtront  dans  i  Puritani,  et  l'on  donnera 
sans  doute  la  première  représentation  de  Giovanna  d'Arco. 

s*ij:  Lundi,  comme  il  l'avait  annoncé,  M.  Carvallio  a  inauguré  par 
Faust  sa  nouvelle  exploitation  au  théâtre  Ventadour.  La  salle  était  con> 
plétement  remplie  et,  sans  égaler  l'éclat  qu'elles  ont  aux  représentations 
italiennes,  les  loges  offraient  un  brillant  aspect.  Quoique  annoncé  par  l'af- 
fiche pour  8  heures,  le  spectacle  n'a  commencé  qu'à  8  heures  et  demie. 
C'est  une  inexactitude  dont  le  théâtre  Lyrique  est  coutumier  et  dont  le 
public  a  toute  rai.son  de  se  plaindre;  il  n'en  est  pas  ainsi  à  l'Opéra  et  au 
théâtre  Français  ;  en  outre,  on  avait  oublié  de  chauffer  la  salle  et  on  y 
a  souffert  du  froid.  En  lin,  le  changement  de  local  et  l'inconscience  de 
la  portée  de  leur  voix  dans  ce  nouveau  milieu,  ont  tout  d'abord  déroulé 
les  chanteurs,  et  ce  n'est  pas  précisément  par  la  justesse  de  l'inlonalion 
qu'ils  ont  brillé.  Ces  réserves  faites,  et  toute  indulgence  accordée  aux 
embarras  inséparables  d'une  pareille  translation,  M.  Carvalho  n'a  qu'à 
se  féliciter  de  la  bienveillance  qu'il  a  rencontrée  dans  l'auditoire 
pour  sa  hardie  tentative.  Le  chef-d'œuvre  de  Gounod  a  retrouvé  à  Ven- 
tadour son  succès  du  boulevard  du  Temple  et  du  Châtelet.  Mme  Car- 
valho a  chanté  avec  un  art  admirable  le  rôle  de  Marguerite;  la  chan- 
son du  roi  de  Thulé,  l'air  des  Bijoux,  la  grande  scène  du  jardin,  celle 
du  H"  acte,  ont  été  pour  elle  l'occasion  de  bravos  et  de  rappels  enthou- 
siastes. —  Massy  est  doiié  d'un  organe  très-agréable,  principalement  lors- 
qu'il ne  le  force  pas,  et  il  a  eu  de  très-beaux  moments  dans  le  rôle  de 
Faust.  —  Troy  donne  bien  à  celui  do  Méphistophélôs  le  cachet  diabolique 
qu'il  comporte;  sa  voixmorJanle  y  fait  merveille.—  Le  rôle  de  Valentin 
est  très-bien  tenu  par  Barré.  Tous  les  décoi's  ont  été  repeints  et  appro- 
priés à  la  nouvelle  scène,  les  costumes  renouvelés;  enfin,  M.  Carvalho 
n'a  rien  épargné  pour  donner  tout  l'intérêt  possible  à  celle  inaugura- 
tion.— Il  ne  néglige  rien  d'ailleurs  de  ce  qui  peut  établir  l'égalité  dans 
ses  deux  exploilalions  ;  ainsi,  celte  semaine,  l'excellent  Meillct  et  Mlle 
Marimon  ont  fait  leur  rentrée  à  la  salle  du  Châtelet,  l'un  dans  le  Méie- 
cin  malgré  lui,  qui  fut  une  de  ses  meilleures  créations,  et  l'autre  dans 
la  Flûte  enchantée,  oîi  elle  a  lutté  sans  trop  de  désavantage  contre  le 
souvenir  laissé  par  Mlle  Nilsson  dans  la  Reine  de  la  Nuit.  —  La  semaine 
précédente  on  avait  pu  apprécier  de  nouveau,  dans  Violetta  et  dans  Gilda, 
de  Rigoletlo,  le  talent  dont  Mlle  Dcvriî^s  avait  déjà  fait  preuve  dans  la 
Somnambule  et  dans  la  Julie  Fille  de  Perth.  A  maintes  reprises,  de  chaleu- 
reux applaudissements  ont  rendu  justice  aux  qualités  dramatiques, 
jointes  au  mérite  de  chanteuse,  qu'elle  a  déployées  dans  ces  deux  rôles 
difficiles. 

^^\  MM.  Henri  Meilhac,  Ludovic  Halévy  et  Jacques  Offenbach  ont  lu 
jeudi,  aux  artistes  du  théâtre  du  Palais-Royal,  les  deux  premiers  actes 
de  leur  pièce  nouvelle  :  le  Château  à  Tvto. 

^*^.  On  annonce  pour  le  28  de  ce  mois,  dans  la  salle  de  concerts  du 
Conservatoire,  l'audition  d'un  opéra  nouveau  de  M.  le  duc  de  Massa.  Cette 
audition  a  lieu  par  invitation,  comme  l'a  déjà  fait  une  première  fois  le 
noble  dilettante. 

„;*,),  La  nouvelle  du  changement  de  direction  des  Bouffes-Parisiens  et 
du  retour  de  ce  théâtre  à  son  premier  genre,  l'opérette,  s'est  confirmée 
cette  semaine.  A  partir  du  )-'"  juin  prochain,  l'administration  de  cette 
scène  aura  à  sa  tête  MM.  Jules  Noriac  et  Ch.  Lecomte,  le  propriétaire  de 
la  salle,  mais  la  réouverture  ne  se  fera  qu'en  septembre.  Offenbach  s'est 
engagé  à  laisser  aux  Bouffes  tout  son  ancien  répertoire,  et,  en  outre,  a 
donner  chaque  année  trois  actes  inédite. — Il  n'est  pas  exact  que  la  direc- 
tion future  de  ce  théâtre  se  soit  attaché,  en  payant  un  dédit  de 
30,000  francs,  l'excellent  Dupuis,  qui  n'abandonne  pas  encore  la  fortune 
des  Variétés . 

^*^  Le  public  de  l'Eldorado  applaudit  chaleureusement,  chaque  soir,  le 
Diable  Rouge,  opérette  de  M.M.  Baumaine  et  Blondelet,  spirituellement 
chantée  par  Pacra  et  Mlle  Claudia.  La  musique,  due  à  la  plume  élégante 
et  facile  de  M.  Léon  Roques,  renferme  de  frais  et  charmants  motifs. 

:f^^  Robinson  Crusoé  continue  à  être  accueilli  avec  la  faveur  la  plus 
marquée  par  l'intelligent  et  difficile  public  de  Lyon.  Depuis  trois  semai- 
nes, cet  ouvrage  tient  l'affiche  et  fait  salle  comble  au  Grand-Théâtre.  On 
ne  se  lasse  pas  de  revoir  et  d'applaudir,  dans  des  rôles  qui  semblent  écrits 
pour  eux,  M.  Peschard,  Mlles  Mezeray  et  Douau.  Robinson  en  est  à  sa 
douzième  représentation . 


Dh  l'AlUS 


93 


*•*  La  représentation  annoncée  des  Bavards,  à  Liège,  a  eu  lieu  avec 
un  plein  succès.  On  a  de  nouveau  rendu  pleine  et  entière  justice,  dans 
celte  ville,  au  Jeu  distingué,  vif  et  (in,  au  talent  sympathique  et  délicat 
de  Mme  Rose  Bell,  qui  a,  du  reste,  interprété  le  principal  rôle  avec  un 
remarquable  entrain. 

«**  Encore  deux  nouvelles  apparitions  de  l'yifrlcaino,  et  naturellement 
deux  triomphes,  à  Wurzbourg  et  à  StetUn. 

»**  M.  Gyo,  directeur  du  théâtre  Italien  de  Covent  Garden,  est  en  ce 
moment  à  Paris. 

t*t  Le  projet  de  fusion  des  deux  théâtres  d'opéra  à  Londres,  n'a  pas 
abouti.  i\I.  Gye  reste  à  Covent-Gardcn,  et  M.  I\Inpleson  provisoirement  à 
Drury  Lane,  jusqu'à  ce  que  la  reconslruction  du  Théâtre  de  Sa  Majesté 
soit  achevée.— La  saison  commencera  le  .31  mars  à  Covent  Garden  ;  Drury 
Lane  s'ouvrira  le  28,  avec  une  troupe  ainsi  composée  :  Mmes  Tietjens, 
Glara-Louise  Kellog,  Sinico,  Corsi,  Rose  Herseo,  TrebcUi-Bettini,  Bauer- 
meister,  Deméric-Lablache  et  Christine  Nilsson. —  MM.  Frascbinr  (début), 
Bettini,  Conti  (début),  Hohler,  Agretti,  Lyal,  Santley,  Gra?si,  Scalese, 
Zoboli,  Bossi,  Casaboni,  Foli,  Rokitansky  et  Mongini.  —  Arditi  reste  chef 
d'orchestre,  et  M.  Harris,  qui  est  en  ce  moment  à  Paris,  conserve  son 
poste  de  régisseur  général,  en  même  temps  que  celui  qu'il  occupe  pen- 
dant la  saison  d'hiver  à  Saint-Pétersbourg.  —  Les  principaux  opéras 
promis  par  M.  Mapleson  à  ses  abornés  sont  :  la  Gazzii  ladra,  Gustavo  III, 
Lohcngrin,  la  Figlia  del  Rcgimento,  Don  Giovanni,  la  Nozze  di  Figaro,  GU 
Vgonotti,  sans  compter  les  emprunts  qu'il  pourra  faire  à  son  répertoire 
courant , 


NOUVELLES  DIVERSES. 

■i,.**  C'est  M.  Georges  Hainl,  chef  d'orchesire  de  l'Opéra,  qui  dirigeait 
mardi  soir,  pour  la  première  fois,  le  concert  des  Tuileries. 

j*-f,  Mardi,  les  auteurs  qui  avaient  concouru  pour  le  prix  d'un  poème 
d'opéra  ont  été  convoqués  au  ministère  d'Etat,  afin  de  procéder  à  l'élec- 
tion d'un  jury.  Voici  le  résultat  du  vote.  Jurés  :  MM.  Perrin,  Gounod, 
F.  David,  A;  Thomas,  E.  Augier,  Th.  Gautier,  Paul  de  Saint-Victor,  F. 
Sarcey,  V.  Massé.  Jurés  supplémentaires:  MM.  J.  Janin,  Auber,  Gaspe- 
rini,  H.  Berlioz,  E.  Arago,  Rayer,  Jouvin,  Roqueplan,  de  Saint-Georges. 

,s*^,  Mercredi  prochain,  25  mars,  à  onze  heures,  la  Société  des  artistes 
musiciens  fera  célébrer  la  fête  de  l'Annonciation,  dans  l'église  Notre-Dame, 
par  trois  cents  artistes.  On  entendra  la  seconde  messe  de  C.-M.  de  Weber 
avec  soli,  orchestre  et  chœurs  dirigés  par  M.  Tilmant.  Cette  messe  sera 
précédée  d'une  marche  religieuse,  composée  par  M.  Ambroise  Thomas. 
A  rOfiertoire,  M.  Leroy  exécutera  un  adagio  extrait  d'un  concerto  de 
C.-M.  de  Weber.  MM  Steenman  et  Hottin  conduiront  les  choeurs.  Le 
grand  orgue  sera  tenu  par  M.  Sergent,  organiste  de  la  cathédrale. 

»**  Aujourd'hui  a  lieu  à  Saint-Eusiache  une  audition  solennelle  de  la 
messe  du  prince  Poniatowsky,  qui  fut  dite  pour  la  première  fois  le  19 
mars  de  l'année  dernière.  L'exécution  en  sera  dirigée  par  M.  Hurand  et 
les  soli  chantés  par  Villaret  et  David,  de  l'Opéra,  et  M.  BoUacrt. 

^*^  Un  concours  est  ouvert,  sous  l'initiative  de  M.  Papin ,  maître  de 
chapelle  au  lycée  Saint-Louis,  pour  la  composition  d'une  messe  à  quatre 
voix  d'homme,  destinée  aux  sociétés  orphéoniques.  L'œuvre  désignée 
pour  le  premier  prix,  par  un  jury  dont  M.  Gounod  a  accepté  la  prési- 
dence, sera  exécutée  dans  une  des  églises  de  Paris. 

j^*=jt  On  lit  dans  le  Journal  des  Villi-.s  et  Campagnes  :  «  Dimanche  der- 
nier, à  la  messe  qui  précède  la  conférence  du  R.  P.  Félix,  M.  Camille 
Saint-Saëns  touchait  les  nouvelles  orgues  de  Notre-Dame.  Le  nombreux 
auditoire  assemblé  dans  la  cathédrale  ne  savait  qu'admirer  le  plus  du 
talent  de  l'artiste  ou  du  magnifique  instrument  de  M.  Cavaillé-Coll .  M. 
Camille  Saint-Saëns  a  su,  dans  cette  courte  demi-heure,  intéresser  et 
charmer  à  la  fois  les  musiciens  sérieux  et  la  masse  du  public  qui  ap- 
précie encore  plus  les  effets  que  l'idée.  C'est  ce  qu'il  fallait  pour  la  cir- 
constance. »  ■ —  Aujourd'hui  dimanche  à  midi  1/2,  ce  sera  le  tour  de 
M.  Franck  aîné,  et  dimanche  prochain  ce  sera  celui  de  M.  Guilmat 
organiste  à  Saint-Nicolas  de  Boulogne-sur-Mer. 

.j,*ji  L'auteur  de  la  Source  et  d'une  foule  de  compositions  charmantes, 
Blumenthal,  l'éminent  pianiste  compositeur  qui  jouit  à  Londres,  où  il 
réside  habituellement,  de  la  faveur  du  plus  grand  monde,  est  en  ce  mo- 
ment de  passage  à  Paris.  M.  Blumenthal  se  rend  à  Bayonne  où  il  va 
épouser  Mlle  Léonie  Gore. 

,K**  Les  frères  Lamoury  sont  de  retour  de  Lisbonne,  où  ils  ont  eu  un 
grand  succès.  S.  M.  le  roi  de  Portugal  vient  de  les  nommer  violoniste 
et  violoncelliste  de  sa  chapelle  royale  et  les  a  décorés  l'un  et  l'autre  de 
l'ordre  du  Christ. 

»*,j  Un  nouveau  journal  de  musique  hebdomadaire  paraîtra  le  i" 
avril  à  Leipzig,  sous  la  direction  de  M.  A.  H.  Payne,  avec  le  titre  de 
Die  Tonhalle.  Cette  publication,  qui  promet  d'être  très-intéressante ,  con- 
tiendra, outre  un  texte  abondant,  des  illustrations  dont  l'exécution  sera 
confiée  à  d'excellents  artistes.  On  ne  peut  donc  que  lui  souhaiter  bon 
succès. 


:,*»  La  Gazette  dos  étrangers  signalait  tout  réccranient  à  l'attention  des 
amateurs  deux  suites  de  valses,  Chants  des  Alpes  et  Grazidla,  dues  à  un 
compositeur  déjii  connu  avantageusement  en  Angleterre  et  en  Allema- 
gne, M.  Kremer,  et  qui  ont  été  pubhées  chez  les  éditeurs  Brandus  et  Du- 
four  :  a  Les  mélodies  de  ces  deux  valses,  dit  la  Gazette,  sont,  en  effet, 
si  simples  et  si  claires  que  l'on  placerait  aisément  des  paroles  soas  les 
notes.  Le  rhythme  est  très-agréable,  très-bien  coupé,  d'un  dessin  symé- 
trique, ce  qui  les  empreint  d'un  grand  charme  et  donne  à  les  suivre 
une  grande  facilité.  » 

^*^  M.  Albert  de  Lasalle  vient  de  publier  à  la  librairie  internationale 
un  volume  intéressant  ayant  pour  titre  :  Dictionnaire  de  la  musique 
appliquée  à  l'amour,  1  vol.  in-18  très-bien  imprimé.  Nous  ne  tarderons 
pas  à  en  rendre  compte. 

*%  Les  éditeurs  Magnus  et  C°  viennent  de  faire  paraître  sous  le  titre 
de  Gliazcl  une  valse  chantée  sur  une  poésie  de  M.  Th.  Gautier,  dont 
M   Ten.  Brink  a  composé  la  musique  et  qu'il  a  dédiée  à  Adelina  Patti. 

—  Cette  œuvre,  qui  est  ornée  d'un  portrait  de  la  célèbre  cantatrice,  est 
mélodieuse,  bien  traitée  et  ne  passera  pas  inaperçue. 

,■**  Un  de. nos  confrères  en  critique  théâtrale,  M.  Charles  Deulin,  vient 
de  publier  un  charmant  volume  intitulé  Contes  d'un  buveur  de  bière. 
L'auteur  y  narre,  dans  un  style  pittoresque  et  original,  les  merveilleu.ses 
légendes  qui  ont  cours  dans  les  Flandres,  parmi  les  joyeux  sujets  du  roi 
Cambrinus. —  Nous  signalons  ces  amusants  récits  aux  librettistes  comme 
une  mine  de  livrets  d'opéra-comique.  Le  Compère  de  la  Mort,  qui  a  paru 
dans  le  Monde  illustré  bien  avant  que  le  théâtre  Italien  jouât  Crispino 
e  la  Comare,  a  le  même  point  de  départ  que  l'opéra  de  Ricci,  et  la  ver- 
sion flamande  est  bien  supérieure  à  la  version  italienne.  Un  autre  conte, 
Culotte  verte,  a  fourni  à  MM.  DeuHn  et  de  Najac  les  éléments  d'une  féerie 
dont  Grisar  vient  d'écrire  la  musique. —  Les  Contes  d'un  buveur  de  bière, 

—  un  joli  volume  in-18,  imprimé  en  caractères  elzéviriens,  avec  titre 
en  couleur  et  un  dessin  d'Edmond  Morin,  —  sont  en  vente  chez  Lacroix, 
à  la  librairie  internationale. 

,!f*^  On  écrit  de  Saint-Pétersbourg  que  l'Académie  de  chant  célébrera, 
cette  année,  son  jubilé  cinquantenaire;  elle  exécutera,  à  cette  occasion, 
le  Samson,  de  Haendel,  et  Paradis  et  Péri,  de  Schumann. 

if.*^,  Arban  vient  d'avoir  la  douleur  de  perdre  son  pèi  e . 

.jt**  Nous  avons  le  regret  d'annoncer  la  mort  de  M.  Edouard  Lenioine, 
administrateur-général  du  Gymnase  et  frère  de  M.  Lemoine-Montigny.  11 
avait  travaillé  pour  le  théâtre  et  rédigea  longtemps  le  courrier  parisien 
de  l'Indépendance  belge,  sous  le  pseudonyme  de  Thecel. 

ÉTRANGER 


^**  Saint-Etienne. — Le  9  mars,  un  auditoire  d'élite  assistait,  dans  la 
jolie  salle  du  cercle  musical  de  notre  ville,  au  concert  de  Mlle  Cécile 
Boissier-Duran.  Le  succès  de  cette  jeune  pianiste,  élève  de  Marmontel, 
a  été  complet;  les  applaudissements  et  les  rappels  sont  venus  le  témoi- 
gner, et  c'était  justice.  Méthode  parfaite,  doigts  agiles,  .style  brillant, 
élevé,  plein  de  sentiment;  tout  chez  elle  constate  l'excellence  de  l'ensei- 
gnement qui  l'a  formée.  Une  transcription  bien  réussie  de  M.  Boissier- 
Duran,  sur  le  trio  de  Robert  le  Diable,  pour  piano,  violon  et  orgue,  et 
exécutée  par  l'auteur,  sa  tille  et  M.  Ginet,  a  fait  sensation.  Après  plusieurs 
morceaux  de  piano,  iVIUe  Boissier-Duran  a  dit,  avec  son  père,  deux  duoj 
concertants  pour  de  ix  pianos,  et  ces  morceaux  ont  été  exécutés  avec  une 
précision  qui  faisait  un  seul  instrument  des  deux.  Les  doigts  et  le  cœur 
étaient  à  l'unisson  ;  on  le  voyait  aisément,  et  les  bravos  n'ont  manqué 
ni  au  père  ni  à  la  fille. 

,j*^.  Londres. — L'éminent  pianiste  James  Wehli,  l'un  des  virtuoses  dont  la 
réputation  est  le  plusjustementétablie  dans  la  Grande-Bretagne,  a  tenu,  cet 
hiver  particulièrement,  une  large  et  honorable  place  dans  le  monde  mu- 
sical de  Londres.  Il  a  accompli  de  plus  une  tournée  provinciale  qui  n'a 
été  qu'un  long  triomphe. 

^*^  Soleure.  —  Un  grand  festival  fédéral  de  musique  chorale  est  an- 
noncé pour  le  12  et  le  13  juillet. 

j*^  Berlin.  —  Pour  la  première  fois  depuis  leur  rentrée  à  l'Opéra, 
Niemann  et  Mme  Lucca  ont  chanté  l'Africaine.  Le  7  mars,  Niemann, 
surtout,  qui  n'avait  jamais  abordé  qu'une  seule  fois  le  rôle  de  Vasco, 
excitait  un  vif  intérêt  qui  n'a  point  été  déçu.  Pauline  Lucca  a  été  à  sa 
hauteur  ordinaire. 

,j*^  Triesle.  —  La  nouvelle  direction  du  théâtre  communal  a  brillam- 
ment achevé  ce  qu'avait  commencé  sa  devancière;  elle  vient  de  nous 
faire  assister  à  la  première  représentation  du  ballet  de  Fiametta,  œuvre 
de  Saint-Léon,  maître  de  ballets  des  théâtres  impériaux  de  Russie,  qu'elle 
avait  fait  venir  pour  le  monter.  Quoique  le  sujet  de  ce  ballet,  représenté 
aussi  à  Paris  sous  le  titre  do  Nemea,  soit  fort  différent  de  ceux  produits 
jusqu'à  ce  jour  par  la  chorégraphie  italienne,  il  n'en  a  pas  été  moins 
bien  accueilli,  et  nous  pouvons  ajouter  que  le  succès  a  été  triomphal 
pour  l'auteur,  rappelé  un  nombre  infini  de  fois,  et  pour  la  Salvioni  qui 
remplissait  le  rôle  principal  et  qui  s'y  est  montrée  à  la  fois  mime  on 
ne  peut  plus  dramatique  et  danseuse  d'une  grande   force.    Au    nombre 


0(5 


KEVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE  DE  PAKIS. 


des  pas  qui  ont  fait,  le  plus  de  plaisir,  on  a  bissé  avec  acclamation  [le 
grand  pas  hongrois.  La  musique  de  Minkus  a  été  trouvée  soigneuse- 
ment faite  et  elle  a  obtenu  sa  part  des  applaudissements.  En  somme, 
M.  Saint-Léon  doit  s'enorgueillir  de  la  triple  réussite  de  son  ouvrage  en 
Russie,  en  France  et  en  Italie. 

jk,*^  fJvourne.  —  DUwah  a  été  représenti;e  pour  la  première  fois  le  9 
de  ce  mois  au  théâtre  Avvalorati.  Grand  et  légitime  succès  pour  l'œuvre 
et  ses  interprètes;  le  ténor  Minetti,  le  baryton  D'Antonij,  la  prima  donna 
Enrichetta  de  Baillou,  qui  a  été  couverte  d'applaudissements,  après  l'air 
de  «  l'Ombre.  » 

^*jf  Florence. —  Deux  dos  conférences  musicales  annoncées  par  la  So- 
cieta  dii  Quarlello  ont  déjà  eu  lieu  ;  M.  le  chevalier  Casamorata  a  entre- 
tenu son  auditoire  de  Boccherini  et  d'Haydn,  et  le  professeur  Gamucci  de 
Mozart.  La  partie  instrumentale  était  confiée  aux  excellents  artistes  de 
la  Société  du  Quatuor  et  à  des  solistes  distingués.  Dans  la  troisième  con- 
férence, l'éminent  critique  et  professeur  Biaggi  parlera  de  Beethoven  ;  on 
y  exécutera  le  trio  op.  97,  avec  le  pianiste  Ducci. 

^*^  Milan.  —  Le  Mefislofcle,  d'Arrigo  Boito,  devenu  le  sujet  de  toutes 
les  conversations  depuis  plusieurs  mois,  a  enfin  fait  son  apparition  sur  la 
scène  de  la  Scala.  Le  reproche  capital  encouru  par  le  jeune  compositeur 
est  de  manquer  de  mélodie,  et  c'est  grave  dans  la  Péninsule  comme 
partout.  Il  n'a  donc  pas  réussi,  cela  ne  signifie  pas  qu'il  n'ait  aucun  ta- 
lent; car  on  peut  signaler  de  nombreuses  beautés  dans  son  œuvre;  mais 
il  s'est  trompé  de  climat.  La  seconde  représentation,  paraît-il,  a  été  tout 
à  fait  orageuse,  et  le  pauvre  Mefistofele  ne  s'en  relèvera  pas,  à  Milan  du 
moins . 

^*^  Lisbonne.  —  La  Grande -Duchesse  de  Gérolslein,  au  dire  des  jour- 
naux portugais,  a  fait  fanatismo.  Mise  en  scène  magnifique,  salle  comble, 
applaudissements  frénétiques,  tel  est  en  quelque  sorte  le  bilan  de  la  pre- 
mière représentation.  Le  violoncelliste  Féri  Kletzer  cueille  ici  de  nom- 
breux lauriers.  11  a  joué  récemment  à  la  cour  avec  un  très-grand  suc- 
cès, devant  le  roi  Louis,  qui  a  accepté  la  dédicace  de  trois  mélodies 
composées  pour  lui  ;  un  concert  donné  au  théâtre  San-Carlo  par  l'éminent 
artiste  n'a  pas  été  moins  brillant.  Il  est  attendu  à  Madrid,  où  l'infant 
Don  Sébastien,  dilettante  éclairé,  doit  organiser  une  soirée  en  son  hon- 
neur. 


CONCERTS  ET  AUDITIONS  MSICÂLES  ANNONCES. 


Salon  Kriegelstein,  aujourd'hui  à  2  heures  :  matinée  musicale  de  Mlle 
Biunca  Cortesi,  cantatrice,  avec  le  concours  de  MM.  LoUio,  Bonewiiz 
et  Telesinski. 

Salons  Erard,  aujourd'hui  22  mars  à  I  heure  1/2  :  grande  matinée  mu- 
sicale donnée  par  le  jeune  Napoléon  Firmin,  piani.ste  âgé  de  neuf 
ans  et  demi,  élève  de  M.  Cliol,  avec  le  concours  de  plusieurs  ar- 
tistes distingués. 

Salons  Pleyel,  demain  lundi  23  mars  :  concert  d'Ernest  Nathan. 

Salons  Erard,  mardi  21  mars:  concert  de  M.  et  Mme  W.  Langhans, 
avec  le  concours  de  Mme  Godin  et  de  MM.  Saint-Saëns,  Heiss,  Ries 
et  Lee. 

Salons  Pleyel,  mercredi  2S  mars  :  concert  de  Léon  Lafont,  avec  le  con- 
cours de  Mme  Barthe-Banderali ,  Mlle  Loui.se  Cantin  et  de  MM.  Si- 
ghicelli,  Jules  Lasserre,  Ketterer,  Maycur  et  Fauvre. 

Salons  Erard,  mercredi  23  mars  :  concert  de  MM.  Boscovitz  et  Reuchsel, 
avec  le  concours  de  Mlle  Castri  et  de  MM.  Beraud,  Delédique  et 
Bose, 

Salle  Herz,  mercredi  2S  mars  à  S  fieures  1  2  :  second  concert  à  grand 
orchestre  donné  par  Ant.  Rubinstein. 

Salons  Erard,  jeudi  26  mars  à  8  heures  1/2  du  soir  :  concert  de  l'excel- 
lent pianiste  compositeur  Ernest  Stœger,  avec  le  concours  de  Mlle 
Rives,  du  violoniste  Jacobi,  Poëncet,  Baur  et  M.  Van  Waefelghem. 

Salle  Herz,  jeudi  26  mars  :  concert  donné  par  Mme  Norman-Neruda,  la 
célèbre  violoniste,  avec  le  concours  de  sa  sœur  Mlle  Marie  Neruda, 
de  MM.  C.  Saint-Saëns  et  Delle-Sedie. 

Salons  Erard,  vendredi  27  mars  à  8  heures  1/2  :  concert  de  Mme  Be- 
guin-Salomon,  avec  le  concours  de  Mme  Cinti-Damoreau,  de  MM. 
Poëncet,  Brunot,  Bose,  Baneux  et  Espeignet. 

Salons  Erard,  samedi  28  mars  à  8  heures  1/2  du  soir  :  concert  de  M.  Eu- 
gène Ketterer,  pour  l'audition  de  ses  œuvres  nouvelles,  avec  le  con- 
cours de  Mme  Anna  Fabre,  Mlle  Louise  Cantin,  de  MM.  Pagans,  A. 
Herman,  A.  Durand,  F.  Thomé. 

Salle  du  Grand-Orient,  dimanche  29  mars  à  8  heures  :  concert  audition 
de  M.  Penavaire,  violoniste,  avec  le  concours  de  MUes  de  Beaunay 
et  Victorine  Champier,  de  MM.  Léon  Lafont,  Sixte  Delorme^  Castei- 
gnet,  Graire  et  José  Barrière. 


Salons  Pleyel,  mardi  31  mars  :  cinquième  séance  populaire  de  musique 

de  chambre,  par  MM.  Ch.  Lamoureux,  Colblain,  Adam  et  Poëncet, 

avec  le  concours  de  M.  H.  Fissot. 
Mercredi  l'"'  avril  :  troisième  soirée  de  musique  de  chambre,  par  MM. 

Maurin,  Colblain,  Mas  et   Domunck ,  avec  le  concours  de  M.  Saint- 

Saens . 


AVIS  A  TOUS  LES  lARCHANDS  DE  MUSIQUE. 

M.  Cartereau,  éditeur,  10,  quai  de  l'Ecole,  \  Paris,  prie  ses 
confrères,  marchands  de  musique  à  Paris  et  en  province,  de  vou- 
loir bien  rechercher  dans  leurs  paquets  un  numéro  1  bis,  Service 
de  l'organiste,  de  G.  Sch.mitt  (petit  format  orgue). 

Prévenir  M.  Cartereau,  propriétaire  de  cet  ouvrage,  si  on  pos- 
sède ce  numéro.  {Les  planches  étant  perdues.) 


■  :    s.    DCFOL'H. 


Citez  G.  BJiANDUS  cl  S.  DUFOUR,  éditeurs,  103,  rue  de  nichelieu. 

GALERIE  DES  MUSICIENS  CÉLÈBRES 

ANCIENS   ET    MODERNES. 
Pliolograpblés  pttr  Pierre  Petit, 

Format  in-4'',  sur  carton  de  Bristol,  papier  de  Chine, 
Au  prix  exceptionnel  de  2  francs  chaque  portrait. 


Ad.  Adam, 

Auber, 

Beethoven, 

Bérigt  (de)  père, 

Bériot  (de)  lils, 

Bernard  (Paul), 

Berlioz, 

Boïeldicu  père. 

Boulanger, 

Cherubini, 

Clapisson-, 

Czerny. 

David'  (Félicien), 

Devos  (Camille), 

Donizetti, 

Duprato, 

Escudier-Kastner  (M""), 

Gevsert, 


Gluck, 

Goria, 

Gounod, 

Halévy  (Fromental), 

Haydn, 

Haèndol, 

Heller  (Stcçhcn), 

Herz  (Henri), 

Kalkbrenner. 

k'asinor  (Georges), 

Lecouppey, 

Leféhure-Wély, 

Lilolft; 

Méhul, 

Mendelssohn, 

Membrée, 

Mozart, 

Meyer  (Léopold  de). 


Meyerbeer, 

Osiiorne, 

Poniatowski  (le  prince), 

Prudent, 

Ouidant  (Alfred), 

Ravina, 

Rosenhain, 

Rossini, 

Rubinstein  (A.), 

Schubert, 

Séligniann, 

Servais, 

Sivori, 

Thalberg, 

Thomas  (Ambroise), 

Verdi, 

Vieuxtemps, 

Weber  (Ch. -Marie  de). 


Chœurs  suédois  et  norvégiens 

exécutés  au  tliéâtre  de  l'Opéra  pendant  l'Exposition  universelle 
par  les  étudiants  de  l'Université  d'Upsal,  de  Copenhague  et  de  Lund. 

1 .  Chant  du  Printemps,  par  A.  Kappelmann net.     »  75 

2.  Le  Cortège  de  No'él,  par  Kjernefs net.     1     » 

3 .  Le  Roi  des  Mers  (air  populaire) »  7S 

i.  Le  Chant  du  Rossignol,  par  Pacins net.     »  SO 

Chœurs  divers 

1 .  Weber.  Prcciosa,  chœur  des  Bohémiens net.  1    » 

2.  Anber.  La  Muette  de  Portici,  prière net.  >  SO 

3 .  Meyerbeer,  L'Africaine,  prière net .  »  SO 

i.  IWeber.  Avant  la  bataille,  marziale  et  andante net.  1     » 

S.  Arcadet.  Ave  Maria net.  n  30 

arrangés  à  l'usage  de  l'orphéon  de  la  ville  de  Paris,  par 
PASDELOUP 

CHŒUR   DES   ÉTUDIANTS   DU   LAC  DES  FÉES, 

arrangés  pour  l'orphéon  de  la  ville  de  Paris,  par 

Prix  :  1  fr.  FRANÇOIS  BAZIN  Prix  :  1  fr. 


MEYERBEER.    —    L'Africaine,  chœur  des  Matelots 
(chœur  de  concours  à  l'Exposition  universelle  de  1867),  net 

ROSSINI.  — Buvons,  buvons!  composé  et  approprié 
à  l'usage  de  l'Orpliéon  pour  le  Festival  international  1867,  net. 

MENDELSSOHN.  Mélodie  à  trois  voix  égales,  par  A. 
Valenti,  net 


1  SO 


SO 


;   FEE     —   A.   CBÂIS 


BUREAUX    A    PARIS  :    BOULEVARD   DES   ITALIENS.  1. 


55'  AnDée. 


N'  13. 


ON   S'ABONNE  : 

Dans  les  Départements  et  A  l'Étranger, 

chez  tous  les  Marchands  de  Musique,  Us  Libraire», 

et  aux  Hursaux  de?.  Messageries  et  des  Postes. 


REVUE 


Ï9  Mars  181)8. 


PRIX    DE    L'ABONNEMENT: 

Paris, 24  r.  pur  an 

Déparlcmenl»,  Belgique  et  Suisse....    30  u       ii- 

ÉlruDgor •■•    3*  "       '*!- 

Le  Joumal  paraît  le  Dimanche. 


ET 


GAZETTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


Nos  abonnés  reçoi-rent,  avec  le  numéro  d'anjoard'linl, 
VJEtuae  en  fa  mi*%e*»ir  de  UElVDEEiiSSOlIIV,  dont  la 
publication  récente  a  excité  h  un  si  baut  deg^ré  l'inté- 
rdt  des  planistes. 


SOMMAIRE.  — Théâtre  impérial  de  l'Opéra  -  Comique  :  reprise  de  la  Part  du 
Diable,  par  Haurtce  Oray.  —  Mme  Norman-Neruda,  par  Em.  Uatbieu 
de  Monter. — Concerts  populaires  de  musique  classique  au  cirque  Napoléon, 
par  Apmamd  fiionzien.  —  Séance  solennelle  de  l'Orphéon  de  Paris,  par 
Em.  Hathien  de  IHonter.  —  Ministère  de  la  maison  de  l'Empereur  et 
des  beaux-arts.  —  Concerts  et  auditions  musicales  de  la  semaine.  —  Nouvelles 
des  théâtres  lyriques.  —  Nouvelles  diverses.  —  Concerts  et  auditions  musi- 
cales annoncés.  —  Annonces. 


THÉÂTRE  inPÉRIÂL  DE  L'OPERi-COMIOUE. 

Beprise  de  9a  IPntrt  <fM  IHahMe. 

C'est  en  janvier  1843,  c'est-à-dire  il  y  a  vingt-cinq  ans,  que  la 
Part  du  Diable  faisait  son  apparition  sur  la  scène  de  l'Opéra- 
Comique,  où  nous  revoyons  aujourd'hui  cet  élégant  ouvrage. 

L'administration  de  l'Opéra-Comique  a  certainement  été  bien  ins- 
pirée en  mettant  en  regard  du  dernier  triomphe  de  M.  Auber  ce 
succès  de  l'an  1843,  et  les  amateurs  de  recherches  et  de  compa- 
raisons curieuses  trouveront  là  matière  à  plus  d'un  rapproche- 
ment. La  dernière  reprise  de  l'ouvrage  avait  eu  lieu  il  y  a  sept 
ans,  un  peu  avant  la  rentrée  de  M.  Perrin  à  la  salle  Favart,  et 
l'on  nous  sera  gré  peut-être  de  placer  côte  à  côte  les  trois  distri- 
butions de  l'ouvrage: 
Raphaël,  MM.  Roger, 
Le  roi,  Grard, 

Gil-Vargas,  Ricquier, 

Carlo,  MmesRossi-Caccia, 

Casilda,  Anna  Thillon, 

La  reine,  Révilly, 

On  voit  que,  de  la  distribution  primitive,  un  seul  rôle  est  resté 


Warot, 

Léon  Achard, 

Barielle, 

Gailhard. 

Prilleux, 

Prilleux. 

Monrose, 

Brunet-Lafleur 

Bousquet, 

Bélia. 

Révilly, 

Révilly. 

en  possession  de  son  créateur  :  c'est  celui  de  la  reine  ,  que  Mlle 
Révilly  n'a  pas  abandonné  depuis  vingt-cinq  ans;  Mlle  Révilly  est 
aussi  la  seule  artiste  qui  soit  restée  fidèle  à  l'Opéra-Comique  de- 
puis cette  époque.  Le  fait  est  assez  rare  pour  qu'on  le  constate. 

C'est  pour  la  continuation  des  débuts  de  Mlle  Brunet-Lafleur  et 
de  M.  Gailhard  qu'est  venue  l'idée  de  la  reprise  de  la  Part  du 
Diable.  Mlle  Brunet-Lafleur  semblait,  en  effet,  douée  de  toutes  les 
qualités  nécessaires  pour  jouer  le  rôle  de  Carlo  Broschi:  physique- 
ment, elle  a  la  grâce  et  la  distinction  ;  au  point  de  vue  musical, 
une  voix  colorée,  souple  et  vibrante  comme  du  métal,  avec  cela 
du  goût  et  du  sentiment.  Malheureusement,  la  jeune  artiste  n'a 
pu  vaincre  encore  la  frayeur  que  lui  cause  une  nombreuse  assem- 
blée, et  cette  frayeur,  qui  nuit  à  ses  facultés,  l'empêche  de  se  livrer 
comme  il  le  faudrait.  Elle  a  cependant  fait  preuve  d'une  véritable 
intelligence,  et  nous  pensons  que  lorsqu'elle  triomphera  de  sa  peur 
du  public,  elle  obtiendra  d'excellents  résultats. 

M.  Gailhard,  lui  aussi,  a  une  très-bonne  voix  ;  il  la  dirige  avec 
aisance  et  assurance,  et  il  s'est  fait  particulièrement  remarquer 
dans  le  charmant  quatuor  du  second  acte.  Mais  il  fera  bien  d'ob- 
server, au  point  de  vue  du  comédien,  que  l'Opéra-Comique  n'est 
point  l'Ambigu,  et  qu'il  y  faut  adoucir  les  angles  d'un  rôle  auquel 
il  a  donné  une  teinte  par  trop  sombre. 

M.  Léon  Achard  est  parfait  dans  le  personnage  un  peu  trop 
fantaisiste  de  Raphaël.  Il  l'a  joué  en  bon  comédien  et  l'a  chanté 
en  véritable  artiste.  Aussi  le  succès  ne  lui  a  pas  fait  défaut  plus 
qu'à  l'ordinaire. 

Peut-être  eût-on  pu  trouver  dans  le  personnel  du  théâtre  Favart 
une  dugazon  à  qui  le  rôle  de  Casilda  eût  mieux  convenu  qu'à 
Mlle  Bélia,  ce  qui  ne  retire  en  rien  les  qualités  et  le  talent  de  l'ai- 
mable cantatrice.  Ce  rôle  est-il  antipathique  à  la  nature  de  l'ar- 
tiste ?  Je  ne  sais,  mais  elle  y  paraissait  gênée  et  mal  à  son  aise. 

Mlle  Révilly  est  toujours  très-bien  dans  la  reine,  mais  M.  Prilleux 
fera  peut-être  bien  de  jouer  Gil-Vargas  avec  un  peu  plus  de  reté- 
nue ,  et  de  chercher  à  moins  forcer  le  comiques  de  ses  effets. 

En  somme,  nous  n'avons  pas  besoin  de  le  dire,  cette  reprise  a 
été  fort  bien  accueillie  du  public. 

Maurice  GRAY. 


98 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


lOÀDAME  NORMÂK-NERUDÀ, 

Concert  donné  par  elle   et  sa  sœur,  Mlle  Marie  Neruda, 
le  26  mars,  à  la  salle  Herz. 

Du  groupe,  plus  nombreux  et  compact  que  brillant,  des  vir- 
tuoses qui  viennent  demander  tous  les  hivers,  à  Paris,  un  peu  de 
son  attention  distraite,  de  son  enthousiasme  aussi  vite  éteint  qu'al- 
lumé, de  ses  louanges  courtoises,  —  éléments  avec  lesquels  on  se 
fait  la  plupart  du  temps  une  réputation  facile  sur  d'autres  ri- 
vages, —  se  détachent,  presque  chaque  année,  deux  ou  trois 
personnalités  véritablement  artistiques  qui  donnent  à  la  foule  non 
pas  une  déception  ou  un  ennui  comme  certains,  encore  moins 
une  leçon  gourmée  comme  d'autres,  mais  bien  un  régal  et  une 
fôte.  C'est  ainsi  que  la  saison  musicale  actuelle  conservera  les 
noms  de  Rubinsteln  et  de  Norman-Neruda.  Glorieux  parrains, 
entre  tous,  et  de  ceux  qui  mettent  un  peu  de  leur  auréole  au  front  des 
filleuls  !  La  haute  virtuosité  de  Rubinstein  a  été  étudiée  dans  ces 
colonnes.  Quant  à  Mme  Norman-Neruda,  je  crois  devoir  m'arrêter 
un  instant  devant  cette  figure  aujourd'hui  célèbre,  autant  qu'ori- 
ginale et  sympathique,  non  pas  pour  analyser  la  nature  musicale 
môme  de  son  talent  (tout  a  élé  dit  à  ce  sujet  et  fort  bien  à  celte 
place),  mais  pour  essayer  d'en  fixer  par  quelques  traits  rapides, 
l'essence,  l'esprit  et  d'isoler  l'impression  qui  s'en  dégage. 

En  composant  le  programme  de  la  magnifique  soirée  musicale 
qu'elle  donnait  jeudi  dernier  à  la  salle  Herz,  Mme  Norman-Neruda 
avait  surtout  pour  but  de  se  faire  complètement  apprécier  et  juger 
en  dernier  ressort.  Avant  de  quitter  Paris,  et  encore  tout  émue 
de  la  sincère  admiration  du  grand  monde  et  des  chaleureuses 
acclamations  de  la  foule,  la  grande  artiste  tenait  essentiellement  à 
produire  sous  tous  ses  aspects,  devant  un  auditoire  de  connais- 
seurs et  de  délicats,  son  talent  expansif,  éloquent,  ardent  jusqu'à 
la  fougue,  mais  qui  sait  se  contenir  néanmoins  et  assembler  les 
contraires  sous  la  loi  de  l'œuvre  qu'elle  interprète,  à  laquelle  bien 
plutôt  elle  se  livre. 

Beethoven,  Bach,  Vieuxtemps,  de  Bériot,  les  vieux  et  les  jeunes 
maîtres,  voilà  ce  qu'elle  aime  et  finit,  sans  fausse  couleur  et  sans 
faux  lyrisme.  Elle  semble  ne  vouloir  rendre  que  ce  qui  élève 
l'âme  ou  la  réjouit  noblement;  son  sentiment  ne  porte  que  là- 
dessus  :  tout  le  reste  est  faux,  et,  tant  elle  y  met  de  malice  ou  de 
simplicité,  on  jm'erait  qu'elle  l'ignore  ! 

Dans  son  exécution,  dont  une  inaltérable  netteté  constitue  la 
qualité  saillante,  Mme  Norman-Neruda  a  plus  de  la  verve  qui 
remue  que  de  l'inspiration  qui  émeut.  Sa  propre  émotion  étincelle 
sans  rayonner.  Elle  n'enivre  pas,  mais  elle  enchante,  et  avec 
quelle  souplesse,  cette  Loreley  de  l'archet!  Elle  ira  jusqu'à  porter 
du  charme,  oui,  le  sien  propre,  un  charme  irrésistible,  en  cette 
sonate  de  Rust,  par  exemple,  récemment  retrouvée  au  Conserva- 
toire de  Leipzig,  inspiration  fiévreuse,  tourmentée,  que  traverse 
le  souffle  d'orage  de  son  temps  :  179S .  S'agit-il  de  jouer  la  Sonate, 
op.  47,  si  puissamment  humaine,  si  profondément  vécue,  de 
Beethoven,  Mme  Norman-Neruda,  sans  raffiner  ou  trop  quintessen- 
cier,  mais  avec  un  goût  qui  est  sien,  augmentera  le  trésor  de 
toute  sa  valeur  individuelle,  l'enrichira  d'expressions  nouvelles, 
découvrira  des  nuances,  ressaisira  des  accents  dans  ces  pages 
éternelles  qui  semblaient  cependant  connues  et  explorées  en  entier. 
Lui  faut-il  ciseler  une  gavotte,  un  menuet  du  vieux  Bach  ?  menuet 
et  gavotte  sont  restés  pour  elle  gracieux  et  pimpants  sous  leurs 
atours  de  l'autre  siècle,  et  voilà  que  son  style  s'enlève,  léger  et 
transparent  comme  ces  étoffes  de  gaze  que  les  anciens  appelaient 
de  l'air  tissé.  Prompt,  piquant,  pétillant,  un  air  populaire  varié 
par  Maurer  fera,    sous    l'archet  de  Mme  Norman-Neruda,  l'effet 


d'un  sorbet  mousseux  qu'on  prendrait  l'été  sous  la  treille.  Mais 
que  le  cadre  s'élargisse,  que  la  passion  parle  et  pleure  comme 
dans  cet  Adagio  de  Bériot  qu'elle  a  merveilleusement  soupiré  et 
gazouillé  avec  sa  sœur,  Mlle  Marie  Neruda,  —  habile,  sinon  autant 
qu'elle,  —  mais  dont  le  sentiment  est  très-pénétrant,  le  goût 
irréprochable  et  qui  possède  la  force  dans  la  douceur,  au  point 
de  vue  de  la  sonorité,  —  et  de  son  jeu  concentré  jaillira  l'expres- 
sion profonde  qui  rassemble  toute  une  situation  musicale  et  la 
livre,  domptée,  aux  applaudissements  de  la  foule.  Veut-elle,  enfin, 
transporter  ceux  qu'elle  a  séduits?  Elle  choisit  une  œuvre  popu- 
laire, aimée,  la  Ballade  et  la  Polonaise  de  Vieuxtemps,  par 
exemple,  parce  qu'elle  joue  devant  un  auditoire  français,  et  tout 
à  coup  l'œuvre  tant  connue  semble  transfigurée  :  la  Ballade,  s'im- 
prègne de  la  clarté  pure,  mais  étrange  du  ciel  Scandinave;  et 
tandis  que  la  grande  artiste  enlève  la  Polonaise  avec  une  verve, 
une  aisance,  une  agilité  vraiment  surpi'enantes,  je  ne  sais  pour- 
quoi l'imagination  rêve  encore  de  hautes  sapinières  et  de  grands 
lacs. 

Mme  Norman-Neruda,  c'est  Teresa  Milanollo,  avec  la  rectitude 
de  goût  et  l'émotion  communicative  en  moins  peut-être,  mais  avec 
le  tempérament,  l'éclat,  la  virtuosité  transcendante  en  plus. 
En  entendant  jouer  du  violon  ainsi,  avec  un  tel  relief  d'individua- 
lité, en  écoutant  cette  femme  qui,  à  travers  un  labeur  incessant, 
a  su  garder  cette  adorable  légèreté  de  main, cette  vigueur  de  poi- 
gnet, cette  prodigieuse  agilité  de  doigté,  on  en  arrive  à  croire 
que  le  violon  est  le  véritable  instrument  des  femmes,  impression- 
nable, nerveux,  ardent,  frêle,  mélancolique,  prompt  aux  contrastes 
subits  et  parfois...  inquiétant  comme  elles. 

Mme  Norman-Neruda  doit  un  second  concert  au  dilettantisme 
parisien  :  je  lui  prédis,  sans  grand  effort,  Un  triomphe  plus  écla- 
tant encore  que  celui  de  jeudi  dernier.  Ah  !  le  magnifique  talent, 
et  quelle  séduction  il  exerce  !  Ce  charme  me  domine  encore,  dans 
le  calme  et  le  silence  de  l'heure  où  j'achève  celte  esquisse  incom- 
plète. Les  cantilènes  italiennes  poétiquement  dites  par  Delle-Sedie, 
le  ravissant  caprice  sur  les  airs  de  h&Wetd' Alceste,  de  Saint-Saëns, 
tout  cela  s'éteint  et  disparaît.  Ce  que  j'entends  encore,  c'est  l'écho 
des  harmonies  délicieuses  s'échappant  du  violon  des  deux  enchan- 
teresses suédoises  ;  c'est  le  bruit  des  applaudissements  qui  saluent  ces 
phrases  adorablement  chantées,  ces  traits,  ces  trilles,  ces  points 
d'orgue  d'une  hardiesse  inouïe,  ces  enharmoniques,  ces  pizzicati; 
ces  doubles  cordes  agencées,  combinées  de  manière  à  donner  à 
l'oreille  l'illusion  (comme  dans  la  sonate  de  Rust,  par  exemple), 
d'un  trio  d'instruments  à  cordes  exécuté  par  des  artistes  émérites. 
Mme  Norman-Neruda  laissera  dans  la  critique  et  la  société  musi- 
cale de  Paris  une  de  ces  empreintes  lumineuses  qui  deviennent 
bientôt  des  termes  infaillibles  de  comparaison  en  même  temps  que 
le  témoignage  du  goût,  de  l'élévation  et  de  l'honneur  artistiques 
d'une  époque. 

Em.-Mathieu  UE  MONTER. 


C'est  pour  nous  une  vraie  bonne  fortune  chaque  fois  qu'il  nous 
est  donné  d'entendre  ce  pianiste  élégant,  ce  musicien  consciencieux, 
ce  compositeur  plein  de  charme  qui  s'appelle  Ernest  Stœger.  Sa 
musique  renferme  d'adorables  détails,  des  chatteries  exquises  qu'on 
n'est  pas  tenté  un  seul  instant  de  prendre  pour  de  l'afféterie;  son 
jeu  délicat,  sobre  malgré  les  avances  d'une  muse  coquette,  les  fait 
admirablement  ressortir  sans  jamais  s'écarter  des  lois  du  goût  le 
plus  pur.  Nous  voulons  parler  surtout  des  trois  morceaux  intitulés  : 
Impromptu-scherzo  (n"  2),  Prélude  et  Novellelle,  héritiers  directs 
de  la  poétique  et  rêveuse  fantaisie  de  Robert  Schumann.  Ils  sont 
du  reste  assez  connus  aujourd'hui  pour  que  nous  nous  dispensions 
d'en  faire  l'éloge  en  détail. 


DE  PARIS. 


99 


Il  y  a  encore  une  Historiette,  naïve  idylle  qui  a  fait  et  qui  fera 
épanouir  plus  d'un  frais  sourire ,  et  une  grande  Valse-Caprice, 
moins  remarquable  peut-être  comme  invention,  mais  brillante  et 
d'un  effet  sûr,  deux  succès  en  germe  qui  ont  tout  l'air  de  vouloir 
violenter  les  lois  ordinaires  de  la  croissance.  Nous  avons  eu  grand 
plaisir  à  renouveler  connaissance  avec  les  quatre  morceaux  de  chant 
au.\quels  Ernest  Staegeradonné  pour  titre  collectif/es  Roseaux, et  qui 
décrivent  avec  un  charme  soutenu  des  scènes  champêtres  :  le  Soir, 
le  Crépuscule,  l'Orage,  le  Calme.  M.  Mouren  ,  un  sympathique 
baryton,  les  a  fort  bien  détaillés. 

Enfin,  il  nous  reste  à  dire  un  mot,  pour  clore  la  liste  des  com- 
positions de  Slœger,  de  son  nouveau  quatuor  pour  instruments  à 
cordes,  qui  avait  pour  interprètes  MM.  Jacobi,  Wasfelgheni,  Baur 
et  Poëncet.  Le  scherzo  et  l'andante  en  sont  les  deux  meilleures 
parties  ;  mais  des  preuves  d'un  incontestable  talent  se  rencontrent 
partout.  Néanmoins,  il  nous  a  semblé  que  ce  cadre  un  peu  sévère 
gênait,  dans  ses  gracieuses  et  libres  allures,  le  talent  fin,  plus 
sentimental  que  vigoureux,  de  l'excellent  artiste,  qui  a  encore  de 
nombreux  lauriers  à  cueillir  dans  le  domaine  si  riche  de  la  musi- 
que de  piano.  —  M.  Jacobi,  avec  sa  Berceuse  et  sa  Chanson  de 
matelots,  M.  Poëncet,  avec  deux  morceaux  de  Schumann,  Mlle  Ri- 
ves et  M.  Marochetti,  avec  les  duos  de  Don  Sébastien  et  de  Don 
Juan,  ont  été  couverts  d'applaudissements  bien  mérités. 

C.  B. 


CONCERTS  POPULAIRES  DE  ODSIOUE    CLASSIQUE 

AU    CIRQUE    NAPOLÉON 

SYUPHOMIE  POSTHIIITIE  de  IHIendelssoltii  (f^"  au- 
dition). —  ADAGrlO  de  HE.  CSarcin,  exécuté  par 
l'auteur. 

On  a  bâti  un  petit  roman  sentimental  sur  la  Reformations-sinfo- 
nie,  jouée  pour  la  première  fois  dimanche  dernier  aux  concerts  po- 
pulaires ;  il  en  est  de  celui-ci  comme  de  ces  romans  dits  histo- 
riques oîi  l'auteur  jongle  avec  l'anachronisme  pour  divertir  ses 
lecteurs  et  emprunte  à  l'histoire  sans  jamais  lui  rendre.  Cette  fable 
a  fait,  avec  le  succès  habituel  de  ces  ingénieux  récits,  le  tour  de 
plusieurs  journaux  ;  il  en  résultait  que  Mendeissohn  avait  ordonné 
de  ne  livrer  à  la  publicité  les  œuvres  qu'il  laissait  que  vingt  ans 
révolus  api'ès  sa  mort;  le  jour  précis  où  la  date  anxieusement 
attendue  avait  été  atteinte,  un  éditeur  se  serait  emparé^  entz'e  autres, 
de  ce  trésor.  Malheureusement  on  sait  qu'une  grande  quantité 
d'œuvres  posthumes  ont  paru  peu  de  temps  après  la  mort  du  maî- 
tre, et  les  habitués  des  concerts  populaires  applaudissent  chaque 
année  la  symphonie  en  la  mineur  qui  est  dans  ce  cas. 

A  la  mort  de  Mendeissohn  quelques  amis  firent  un  choix  des 
œuvres  à  publier.  Lbl  Re/ormations-sinfonie  fut-elle  rejetée  ?  fut-elle 
plutôt  oubliée,  égarée?  nous  l'ignorons;  toujours  est-il  que  le  fils  de 
l'illustre  compositeur,  la  trouvant  aujourd'hui  digne  de  son  père,  l'a 
publiée  chez  Simrock,  de  Bonn,  et  que  le  public  des  concerts 
populaires  l'applaudissait  dimanche  et  l'applaudira  encore  aujour- 
d'hui . 

L'introduction  est  d'un  grand  caractère,  solennel  et  grave  comme 
l'exorde  d'un  sermon  luthérien;  Vallegro  qu'elle  annonce  ne  répond 
pas  absolument  à  cette  majesté,  et  l'andante,  qui  est  un  peu  dog- 
matique de  forme,  n'a  ni  les  contours  mélodiques  accusés  sur  une 
harmonie  ingénieuse  de  certains  andante  du  même  compositeur, 
ni  l'indécise  et  charmante  mélancolie  de  quelques  autres;  il  passe, 
sans  avoir  ému,  presque  sans  avoir  intéressé.  Le  scherzo  est  vif, 
brillant,  pittoresque;  les  instruments  à  vent,  les  flûtes  et  les  haut. 


bois  surtout  y  jouent  le  rôle  piquant  et  gracieux  que  Mendeissohn  sait 
leur  donner  dans  les  morceaux  de  ce  genre,  dans  le  scherzo  célèbre 
du  Songe  d'une  nuit  d'été,  par  exemple;  ce  qui  saisit  le  plus  dans  le 
finale,  c'est  la  péroraison,  où  l'orchestre  déchaîne  l'harmonie  de 
ses  cordes,  tantôt  couvrant  le  choral  de  Luther,  indiqué  par  les 
cuivres,  tantôt  l'interrompant  ou  se  laissant  dominer  par  lui;  l'effet 
est  des  plus  dramatiques,  la  scène  est  émouvante.  L'œuvre  a  été 
accueillie  avec  une  faveur  telle  que  M.  Pasdeloup  l'e.xécute  à  deux 
concerts  successifs;  le  scherzo  a  dû  être  bissé. 

Il  faut  savoir  gré  au  fondateur  des  concerts  populaires  de  l'em- 
pressement avec  lequel  il  nous  a  fait  connaître  une  œuvre  de  cette 
valeur . 

L'adagio  de  M.  Garcin  devait  sembler  pâle  à  côté  de  cette  lumi- 
neuse symphonie;  l'auteur  paraissait  lui-même  troublé  par  ce 
rapprochement  fâcheux,  et  l'assurance  de  son  jeu  s'en  est  parfois  un 
peu  ressentie.  Cet  adagio  renferme  des  qualités  incontestables  de 
facture;  il  est  écrit  avec  soin  et  fait  partie  d'un  concerto  que  la 
longueur  du  dernier  concert  n'a  pas  permis  de  faire  entendre 
en  entier,  mais  qui,  de  l'avis  de  plusieurs  instrumentistes,  est  une 
œuvre  des  plus  estimables  et  des  plus  consciencieuses. 

Armand  GOUZIEN. 


SÉANCE  SOLENNELLE  DE  L'ORPHÉON  DE  PARIS. 

{Division  de  la  rive  gauche.) 

L'enseignement  du  chant  dans  les  écoles  de  la  ville  de  Paris 
accuse,  depuis  quelques  années  notamment ,  des  améliorations  de 
détails  et  des  progrès  d'ensemble,  lents  sans  doute  et  peu  appré- 
ciables, mais  de  nature,  cependant,  à  exercer  la  plus  heureuse 
influence  sur  cette  branche  intéressante  de  l'instruction,  je  devrais 
dire  de  l'éducation  primaire.  L'enfant  de  Paris  n'est  plus,  en 
musique  c(>mme  en  toute  autre  chose,  cet  être  indéfinissable  du 
passé,  qui  comprenait  tout,  mais  qui  ne  savait  rien.  Aujourd'hui, 
s'il  chante,  il  connaît  assez  de  musique  pour  solfier  son  morceau, 
l'analyser  sommairement  et  l'apprendre  sans  trop  de  routine. 
Des  maîtres  dévoués  développent  son  sentiment  naturel  de  la 
justesse,  de  la  mesure,  du  rhythme  ;  cultivent  son  goût  inné,  lui 
enseignent  à  conduire  sa  voix  et  à  la  colorer  par  l'expression. 
Lorsque  l'articulation  sera  plus  précise  et  la  prononciation  plus 
correcte,  il  n'y  aura  rien  à  reprendre  aux  études  et  aux  manifes- 
tations officielles  de  l'Orphéon  de  Paris;  mais  la  critique  ne  sau- 
rait se  montrer  exigeante  à  l'égard  d'hommes  et  d'entants  qui  ne 
peuvent  consacrer  à  la  musique  que  trois  ou  quatre  heures  par 
semaine  et  auxquels  on  n'accorde  pas  plus  d'un  mois  pour  répé- 
ter les  chœurs  toujours  nombreux  et  souvent  difficiles  du  pro- 
gramme de  leur  concert  annuel. 

La  séance  solennelle  de  dimanche  dernier ,  présidée  par  M.  Al- 
fred Blanche,  a  donc  répondu  à  l'attente  de  l'énoi'me  afQuence  de 
monde  qu'elle  avait  attirée  comme  toujours^  et  satisfait  sans  au- 
cun doute  les  membres  de  la  «  Commission  de  surveillance  de 
l'enseignement  du  chant  »  qui  y  assistaient  presque  au  complet. 
Comme  toujours  aussi  M.  François  Bazin,  armé  de  son  autorité  et 
de  son  expérience  spéciales,  a  su  entraîner  la  rive  gauche  et  met- 
tre bien  en  relief  ses  qualités...  dans  une  salle  dont  l'acoustique 
déplorable  était  encore  aggravée  par  l'ouverture  de  toutes  les  fe- 
nêtres. Les  différentes  compagnies  de  ce  hardi  mais  turbulent  ba- 
taillon de  jeunes  garçons  et  de  petites  filles,  appuyées  par  le 
groupe  respectable  des  classes  d'adultes,  a  vaillamment  marché 
au  feu  sous  l'impulsion  de  leurs  chefs  respectifs.  En  général,  les 
enfants  ont  «donné»  avec  plus  d'élan,  d'assurance,  de  vigueur  que 
les  hommes. 

Habilement  combiné,  varié,  intéressant,  le  programme,  au  point 


100 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


de  vue  pui-ement  clioral  et  en  tenant  compte  du  nombre  d'exécu- 
tants auxquels  son  interprétation  était  confiée,  ne  peut  être  loué 
sans  de  légères  réserves.  Ainsi,  le  chœur  de  Don  Carlos,  assez 
insignifiant,  du  reste,  de  motif  et  de  coupe,  et  le  refrain  syllabique 
du  chœur  du  Nabab,  d'Halévy,  ne  sont  pas  des  chœurs  choraux  et 
encore  moins  de  masse  :  ils  n'en  ont  ni  le  dessin  large,  ni  la  ligne 
ouverte,  ni  la  sonorité  [voulue.  J'en  dirais  autant  de  cette  Entrée 
des  Croisés  dans  Constantinople,  dont  le  début  chevaleresque  et 
religieux  est  brusquement  compromis  par  un  refrain  d'une  vulga- 
rité, d'une  pauvreté  de  fond  et  de  forme  à  se  demander  comment 
une  telle...  erreur  a  pu  franchir  l'entrée,  si  vigilamment  gardée, 
et  non  sans  raison,  du  répertoire  de  l'Orphéon  parisien.  L'ancien 
Koël,  empreint  d'un  caractère  saisissant  de  grandeur  et  de  sim- 
plicité, mais  un  peu  long  avec  ses  quatre  reprises,  a  laissé 
froid  unj  public  qui  n'avait  entendu  depuis  le  commencement 
de  la  séance  que  des  chœurs  à  couplets.  Les  morceaux  qui  ont 
fait  le  plus  de  plaisir,  —  en  dehors  du  Domine  sahum  et  du  Vive 
l'Empereur!  de  tradition,  sus  depuis  longtemps  et  toujoui's  enlevés 
à  la  pointe  d'un  juvénile  entrain, —  sont  le  beau  chœur  d' Œdipe 
(Sacchini);  celui  de  la  Création,  dont  la  péroraison  magnifique 
a  été  rendue  avec  ensemble,  le  mouvement,  trop  lent,  toute- 
fois ;  Paris  !  chaleureuse  inspiration  d'Amb.  Thomas  ;  C'est 
Dieu!  de  Léo  Delibes,  chœur  très-mélodique,  parfaitement  écrit 
pour  les  voix ,  et  qui  a  remporté  la  première  médaille  d'or  du  der- 
nier concours  ouvert  par  la  Vihe;  les  Chants  dit  Bosphore,  enfin, 
de  François  Bazin,  acclamés,  applaudis,  bissés  :  — délicieux  petit 
cadre  mélodique,  traversé  comme  par  un  courant  de  jeunessse  et 
de  fraîcheur  exquises  et  oîi  l'on  retrouve  l'inspiration  facile,  la 
science  sans  pédantisme  et  la  vivacité  d'imagination  qui  caractéri- 
sent la  manière  de  ce  compositeur,  populaire  à  juste  titre  parmi 
les  sociétés  chorales  et  particulièrement  aimé  de  ses  élèves.  L'ova- 
tion que  le  public  et  les  écoles  ont  faite  au  directeur  de  la  division 
de  la  rive  gauche  était  des  plus  méritées  ;  je  suis  heureux  d'avoir 
à  la  mentionner,  en  y  comprenant  les  principaux  collaborateurs 
de  M.  Bazin  :  MM.  Foulon,  Collet,  Danault,  Delafontaine,  Dives, 
Hottin,  Pillevestre,  Léon  et  Proust. 

Prochainement,  au  cirque  de  l'Impératrice,  la  division  orphéo- 
nique  de  la  rive  droite  chantera  sous  la  direction  de  Pasdeloup. 
Nous  en  reparlerons.  Pour  qui  s'intéresse  aux  développements  de 
l'œuvre  éminemment  nationale  du  chant  choral  populaire,  il  est 
du  plus  vif  intérêt  d'en  saluer,  chaque  année,  en  ses  séances, 
comme  l'aurore  toujours  nouvelle;  de  voir  quelle  sève  circule, 
ardente  etjeune,  dans  la  féconde  pépinière  de  l'Orphéon  de  Paris; 
de  venir  encourager  les  eiforts  et  applaudir  aux  travaux  des  artistes 
modestes,  autant  que  distingués,  qui  sèment  avec  persévérance 
dans  les  écoles  de  la  grande  ville  ces  germes  précieux  d'art  et  de 
moralisation. 

Em.  Mathieu  DE  MONTER. 


BISISTËRE  DE  LÀ  SAISON  DE  L'EnPEREUB 

ET    DES    BEAUX'ARTS. 

DIRECTION    GÉNÉRALE  DES  THÉÂTRES. 

Le  concours  institué  au  théâtre  impérial  de  l'Opéra,  pour  la 
composition  d'un  poëme  destiné  à  être  mis  en  musique,  a  été  clos 
définitivement  le  IS  de  ce  mois. 

168  ouvrages  y  ont  été  envoyés,  tant  de  Paris  que  des  départe- 
ments. 

Les  auteurs  qui  ont  pris  part  à  ce  concours  ayant  été  invités  à 
se  réunir  le  17  mars,  dans  le  cabinet  du  directeur  général   des 


théâtres  pour  procéder  à  l'élection  d'un  jury  spécial  :  cinquante- 
six  concurrents  se  sont  présentés  et  ont  nommé,  au  scrutin  se- 
cret, neuf  juges  titulaires  et  neuf  juges  suppléants.  Ils  ont  en  ou- 
tre chargé  une  commission  de  cinq  membres,  désignés  par  le  sort, 
de  les  représenter  pour  obtenir  les  adhésions  nécessaires  à  la  for- 
mation définitive  du  jury. 

Tous  les  juges  titulaires  ont  consenti  à  faire  partie  de  ce  jury, 
qui  se  trouve  dès  lors  composé  de  MM.  Perrin ,  directeur  de  l'O- 
péra; Gounod;  Félicien  David;  Ambroise  Thomas  ;  E.  Augier; 
Théophile  Gautier;  Paul  de  Saint-Victor;  F.  Sarcey  ;  Victor  Massé. 

Les  travaux  du  jury  vont  immédiatement  commencer,  et,  quand 
un  poëme  aura  été  choisi  pour  le  concours  de  musique,  les  com- 
positeurs en  seront  officiellement  informés. 

Avant  de  se  séparer,  les  concurrents,  présents  à  la  réunion  du 
n  mars,  ont  exprimé  le  vœu  qu'en  dehors  du  poëme  couronné, 
cinq  des  mLilleurs  ouvrages  choisis  par  rang  de  mérite  fussent 
mentionnés  par  les  titres  et  les  épigraphes  des  manuscrits,  et  que, 
pour  l'avenir,  des  concours  analogues  fussent  renouvelés  à  des 
époques  périodiques. 


CONCERTS  ET  AUDITIONS  ISDSICÂLES  DE  LÀ  SEIOÂINE. 


»%  Cette  semaine  a  été  encore  fort  riche  en  concerts  de  la  Cour  et 
du  grand  monde  Celui  de  lundi,  aux  Tuileries,  qui  était  le  dernier,  of- 
frait en  artistes  Mmes  Carvalho,  BIocli  et  Rives,  MM.  Troy,  Capoul  et  les 
chœurs  de  la  Chapelle.  On  a  beaucoup  remarqué  Mlle  Rives,  qui  a  chanté 
admirablement  avec  Mme  Carvalho  le  duo  des  Diamants  de  la  Couronne. 
Elle  a  été  félicitée  par  Leurs  Majestés.  La  valse  de  Mireille,  la  Corvette 
A'Haydéc  pur  Mme  Carvalho  et  les  stances  du  même  opéra,  dites  par  Ca- 
poul et  les  chœurs,  n'ont  pas  eu  moins  de  succès. —  Dimanche,  chez 
S.  A.  1  Mme  la  princesse  Mathilde,  MM.  Sauzay  et  Fanchomme  pour  la 
partie  instrumentale,  MM.  Gardoni  ei  Hermann-Léon  pour  la  partie  vo- 
cale et  surtout  Mme  Conneau  qui  a  chanté  trois  fuis  ont  ravi  la  brillante 
société  qui  se  pressait  dans  les  salons  de  la  princesse.  -  La  veille,  Gardoni 
et  Mme  Carvalho,  avec  l'orchestre  de  Pasdeloup  défrayaient  le  programme 
de  M.  le  Préfet  de  la  Seine  et  se  faisaient  applaudir  dans  plusieurs 
morceaux  de  Weber,  de  Gounod,  de  Massé  et  de  Floto\Y.  La  romance  de 
Marta,  que  Gardoni  dit  délicieusement,  obtenait  surtout  un  véritable 
succès.  Au  ministère  de  la  marine,  le  même  jour,  Mmes  Marie  Battu,  Nils- 
son,  Nornian-Neruda,Faure,  Vivier  et  le  pianiste  Kowalski,  donnaient  à 
cette  magnifique  soirée  le  plus  grand  éclat.  —  Perfection  sur  toute  la 
ligne,  cela  va  sans  dire  ;  mais  mention  particulière  aux  deux  morceaux 
la  Barcarolle  napolitaine  elSancta  Maria,  que  Marie  Battu  amis  à  la  mode 
et  qu'elle  chante  dii'inement;  à  Vivier  pour  son  duo,  cor  et  voix,  avec 
Faure  et  ta  romance  de  Joseph,  chef-d'œuvre  d'exécution;  enfin  à  Niltson 
qui  a  charmé  trois  fois  l'assemblée  et  à  Mme  Neruda  dont  on  ne  se 
lassait  pas  d'admirer  l'incomparable  talent. — Capoul  et  Sarasate  avaient 
été  conviés  par  M.  le  comte  de  Nieuwerkerke  pour  son  dernier  vendredi. 
— En  même  temps  que  ces  concerts  officiels,  M.  Garfounkel  et  Mme  Abel 
Laurent  réunissaient  des  éléments  an.nlogues  dans  deux  belles  soirées 
musicales  auxquelles  assistait  l'élite  de  la  société  parisienne.  La  première 
de  ces  soirées  se  distinguait  par  un  programme  choisi  avec  un  goût  exquis 
et  dont  l'exécution  était  confiée  à  Mmes  Marie  Sasse,  Bloch,  Nilsson,  à 
MM.  Faure,  CoUn,  Lefébure-Wely  et  Mme  Norman-Neruda.  Citons  entre 
autres  attractions  la  chanson  des  Djinns  du  Premier  Jour  de  bonheur, 
dite  en  l'honneur  d'Auber  qui  était  présent;  le  duo  du  Slabat  chanté 
par  Mmes  Marie  Sasse  et  Bloch;  l'air  de  Joconde,  par  Faure,  etc.— Chez 
Mme  A.  Laurent  c'était  encore  Christine  Nilsson,  Bloch,  MM.  Gardoni, 
Aubery,  Leroy,  Garcin,  Rigault,  Viguier,  Hignault,  et  on  entendait  le 
duo  du  Stabat  par  A'ilsson  et  Bloch  ;  le  quatuor  de  Martha,  l'arioso  du 
Prophète,  un  quintette  de  Mozart,  etc.,  etc. —  Enfin  mentionnons,  pour 
clore  cette  remarquable  nomenclature,  l'intéressante  matinée  organisée 
à  l'occasion  de  la  Saint-Joseph  par  Mme  la  supérieure  de  Notre-Dame 
des  Ans,  dans  laquelle  les  élèves  de  l'institution  ont  fait,  chacune  dans 
leur  genre,  preuve  d'un  véritable  talent,  et  où  s'est  fait  particulièrement 
remarquer  sur  la  harpe  une  jeune  personne,  Mlle  Mathilde  Galitzin,  qui 
deviendra  une  grande  artiste. 

=jt*^  Les  splendides  salons  de  la  Muette  s'ouvraient  dimanche  dernier  à 
plus  de  cinq  cents  invités,  choisis  dans  les  sommités  du  monde  aristo- 
cratique, littéraire  et  artistique,  et  conviés  par  les  propriétaires  hospita- 
liers de  cette  demeure  à  entendre  les  artistes  les  plus  renommés  de  Paris. 
Le  lion  du  jour  Rubinstein,  le  ténor  à  la  mode  Capoul,  la  blonde 
Ophéhe,   l'enchanteur  Vivier  et  l'auteur  de  Faust  lui-même,  —  qui  ne 


DE  PARIS. 


101 


dédaignait  pas  de  tenir  le  piano,  —  formaient  les  élémenls  de  ce  magni- 
fique concert,  dont  l'excellente  et  digne  Mme  Erard ,  Mcnc  Spontini ,  M. 
et  Mme  Schœffer,  M.  et  Mme  de  Franqueville  ont  fait  les  honneurs  avec 
la  grâce  et  l'affabilité  héréditaires  dans  la  famille. 

#**  Rubinslein  a  donné  mercredi  dernier  son  deuxième  concert.  Des 
ovations  aussi  enthousiastes  que  la  semaine  précudenle  ont  été  prodi- 
guées au  grand  artiste  après  son  concerto  en  ré  mineur,  dont  il  donnait 
une  seconde  audition,  et  à  la  suite  de  ses  autres  compositions  de  moindres 
proportions.  Prélude  et  fugue,  fragments  d'une  Suite  pour  piano,  etc.,  où 
il  s'est  montré  tour  à  tour  puissant  et  délicat,  vigoureux  et  tendre.  — 
Mme  Whist,  une  cantatrice  américaine  qui,  dit -on,  appartient  au  meil- 
leur monde  de  New-York,  et  admirablement  douée  sous  le  rapport  artis- 
tique, a  recueilli  de  légitimes  applaudissements  après  la  valse  de  l'Ombre 
du  Pardon  de  Ploërmel,  qu'elle  a  Irès-bien  dite. 

**^  Nous  nous  sommes  proposé  de  revenir  sur  le  brillant  concert 
donné,  le  dimanche  IS  mars,  par  Jacques  Rosenhain,  dans  les  salons 
Erard.  C'est,  en  effet,  l'un  de  ceux  qui  auront  marqué  dans  la  saison 
par  l'intérêt  qui  s'attache  à  si  juste  titre  au  nom  du  célèbre  pianiste, 
comme  par  la  composition  tout  artistique  du  public.  Dans  le  nombre 
assez  considérable  de  ses  œuvres  qui  formaient  exclusivement  le  pro- 
gramme, nous  signalerons  une  sonate  pour  piano  et  violoncelle  (œuvre  S3), 
un  trio  pour  piano,  violon  et  violoncelle  (œuvre  8i),  une  Méditation,  un 
Conte  d'enfant,  une  Barcarole,  et  les  Cloches,  pour  piano  seul  ;  enfin, 
trois  charmantes  idylles  pour  piano  et  violoncelle,  exécutées  par  l'auteur 
et  M.  Jacquard.  La  vraie  originalité,  le  charme  pénétrant  qui  résident 
dans  tous  ces  morceaux  ont  eu  vite  gagné  l'auditoire  d'élite  qu'avait 
assemblé  l'arliste,  et  la  séance  entière  n'a  été  pour  ce  dernier  qu'une 
longue  série  d'ovations. 

,■**  Il  y  avait  beaucoup  de  monde  dimanche  à  la  matinée  musicale 
de  Mme  la  marquise  de  Safifray.  Une  jeune  artiste  hollandaise,  Mlle  Van 
der  Beck,  qui  possède  un  très-beau  talent  de  harpiste,  a  joué  plu.sieurs 
morceaux  charmants  de  façon  à  faire  regretter  l'abandon  qu'on  fait  de- 
puis longtemps  déj<  de  ce  bel  instrument.  On  a  aussi  entendu  un  flûtiste 
belge  dont  nous  avons  eu  déjà  l'occasion  de  signaler  la  supériorité, 
M.  Auguste  Charles,  qui  joint  au  mérite  de  virtuo.se  celui  de  compositeur 
et  qui  s'est  fait  beaucoup  applaudir  en  exécutant  avec  une  grande  per- 
fection plusieurs  de  ses  compositions  nouvelles  Enfin  Mme  Loyd,  de  la 
Comédie  française,  a  varié  on  ne  peut  plus  agréablement  cette  réunion, 
à  laquelle  les  goûts  artistiques  de  Mme  de  Saffray  prêtaient  un  intérêt 
tout  particulier. 

^*t  L'année  dernière  déjà,  nous  avons  vu  poindre  l'aurore  d'un  talent 
sérieux:  le  jeune  pianiste  Napoléon  Firmin,  enfant  de  neuf  ans,  élève 
de  M.  Chol,  faisait  ses  premières  armes  avec  un  entier  succès.  Plus  que 
jamais  il  promet  un  artiste,  si  on  en  juge  par  le  concert  qu'il  a  donné 
dimanche  dernier  à  la  salle  Erard,  et  où  il  a  exécuté,  entre  autres,  deux 
brillantes  fantaisies  de  Herz  et  une  valse  de  Chopin,  avec  une  sûreté 
parfaite  ei  une  grâce  toute  charmante.  Quand  cette  heureuse  nature  aura 
reçu  son  entier  développement,  tout  fait  présager  que  nous  aurons  un 
habile  virtuose  et  un  excellent  musicien  de  plus. 

,1,*,  L'espace  nous  fait  défaut  pour  dire  tout  le  bien  que  nous  pen- 
sons de  Mlle  Caroline  Levy,  qui  a  donné  la  semaine  dernière  avec 
Mlle  Lavini  un  beau  concert  dans  lequel  l'excellente  professeur  a  joué 
avec  autant  de  style  que  de  goût  un  concerto  de  Mendelssohn,  la  Danse 
des  Fées  de  Prudent,  et  ou  Mlle  Lavini  a  très-bien  chanté,  entre  autres 
morceaux,  avec  M.  Bregy  le  duo  des  Dragons  de  Villars. 

—  Il  en  est  de  même  de  Mme  Marie  Simonet,  jeune  pianiste  d'avenir 
qui  a  fait  preuve,  dans  son  concert  de  lundi,  d'un  mécanisme  irrépro- 
chable et  de  beaucoup  de  sentiment. 

—  Nous  voudrions  aussi  pouvoir  parler  avec  plus  de  détail  de  Mme 
Béguin  Salomon  qui  se  consacre  tout  entière  à  l'art  et  qui  s'est  surpas- 
sée dans  son  concert  de  vendredi .  Impossible  de  traduire  avec  plus  de 
perfection  la  musique  des  maîtres  que  ne  le  fait  Mme  Béguin  Salomon  ; 
elle  apporte  dans  son  jeu  une  poésie  qui  se  répand  sur  tout  ce  qu'elle 
interprète  et  on  a  pu  en  juger  dans  le  trio  de  Beethoven,  le  quintette 
de  Spohr  et  un  joli  trio  d'Ad.  Blanc. 

^*^  La  ville  de  Rennes  vient  de  donner,  au  profit  des  pauvres,  un  ma- 
gnifique' concert  pour  lequel  on  avait  spécialement  engagé  Mlle  Mauduit, 
de  l'Opéra;  entre  autres  morceaux,  elle  a  chanté  le  grand  duo  du  qua- 
trième acte  de  l'Africaine  de  façon  à  électriser  l'auditoire .  Les  bravos,  les 
rappels,  les  bouquets  ont  été  prodigués  à  la  jeune  et  charmante  canta- 
trice que  la  ville  de  Rennes  compte  parmi  ses  enfants  et  dont  elle  peut 
à  bon  droit  s'enorgueillir. 

^*^  La  Société  des  concerts  du  Conservatoire  donne,  aujourd'hui  di- 
manche 29  mars  1868,  à  2  heures  précises,  son  H«  concert,  sous  la  direc- 
tion de  Georges  Hainl.  En  voici  le  programme  :  1°  symphonie  en  la 
majeur  de  Mendelssohn;  —  2°  chœur  d'Armide,  de  LuUi  (1686).  Le 
solo  chanté  par  M.  Caron; —  3°  7"  concerto  en  la  mineur,  pour  violon, 
de  Rode,  exécuté  par  Mme  Norman-Neruda  ;  —  i"  chœur  des  Chasseurs 
d'Euryanthe  de  Weber;  —  S°  ouverture  de  Léonore  de  Beethoven. 

»*f  Aujourd'hui  dimanche,  à  2  heures,  au  cirque  Napoléon,  vingt- 


deuxième  concert  populaire  de  musique  classique,  sous  la  direction  de 
J.  Pasdeloup.  En  voici  le  programme  :  1»  symphonie  en  ré  majeur  de 
Mozart;  —  2»  air  de  ballet  de  Prométhée  de  Beethoven.  Le  solo  de  violon- 
celle par  Poënêet;  —  3°  Reformations-sinfonie  (2°  audition),  de  Men- 
delssoiin  (introduction,  allegro,  scherzo,  andante,  choral  de  Luther, 
finale);  —  i"  sonate  pour  piano  et  violon  de  Weber  (andante,  rondo), 
par  Allard  et  Diémer;  —  S»  polonaise  de  Struensée  (le  Bal  et  l'Arresta- 
tion), de  Meyerbeer. 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 


»*«  Mercredi,  LL.  MM.  l'Empereur  et  l'Impératrice  ont  honoré  de 
leur  présence  la  représentation  d'Hamlet  à  l'Opéra. 

*"'»  Le  théâtre  impérial  de  l'Opéra  a  donné  cette  semaine  trois  fois 
Hamlet.  Les  démarches  faites  pour  retenir  Mlle  Nilsson  à  Paris  au  delà 
du  30  avril  n'ayant  pas  abouti,  l'opéra  d'Ambroise  Thomas  ne  pourra 
plus  être  joué  qu'une  douzaine  de  fois  avant  son  départ  pour  Londres. 
Les  huit  premières  représentations  ont  pleinement  confirmé  le  succès  de 
la  première,  et  Hamlet  prend,  —  de  l'avis  des  musiciens  qui  en  jugent 
aujourd'hui  la  partition  en  main,  —  une  place  brillante  au  répertoire  : 
les  recettes  dépassent  11,000  francs.  Chaque  soir,  de  nombreux  rappels 
accueillent  les  artistes  qui  se  montrent  les  dignes  interprètes  de  l'œuvre. 

—  Mercredi,  la  salle  était  éblouissante  de  toilettes,  et  LL.  MM.  l'Empe- 
reur et  l'Impératrice,  arrivées  au  premier  acte,  n'ont  quitté  leur  loge 
qu'après  le  cinquième  acte  et  après  avoir  félicité  le  directeur,  l'auteur  et 
les  chanteurs.—  Dès  le  quatrième,  S.  M.  l'Impératrice  avait  fait  remettre 
à  Mlle  Nil.sjon,  en  témoignage  de  sa  haute  satisfaction,  le  bouquet  de  vio- 
lettes qu'elle  tenait  à  la  main,  et  le  lendemain  le  vicomte  de  Laferrière 
portait  à  Ophélie,  de  la  part  de  l'Empereur,  une  riche  parure  de  perles, 
émeraudes  et  brillants.  —  C'est  à  tous  les  titres  un  vrai  succès  pour 
l'école  française. 

**,^  Aujourd'hui,  représentation  extraordinaire  de  l'Africaine. 

*''',(4  Au  théâtre  impérial  Italien,  monsieur  et  madame  Tiberini 
ont  chanté  mardi  /  Puritani  avec  Steller  et  Agnesi,  et  ils  ont  vu 
se  confirmer  dans  l'œuvre  de  Bellini  le  succès  qui  les  avait  ac- 
cueillis dans  Matilda  di  Shabran,  quelques  jours  auparavant.  C'est 
principalement  dans  le  troisième  acte  d'/  Puritani  qu'ils  ont  recueilli 
les  plus  enthousiastes  bravos.  La  romance  du  quatrième  acte  par 
M.  Tiberini,  la  scène  de  la  folie  du  deuxième  acte  et  la  célèbre  polo- 
naise par  Mme  Tiberini,  ont  été  merveilleusement  rendues;  toutefois 
nous  conseillons  à  cette  cantatrice  de  chanter  la  Polonaise  comme  on  l'a 
toujours  entendue  dire  par  la  Grisi,  la  Bosio,  la  Patti,  et  de  supprimer 
les  ornements  qu'elle  a  cru  pouvoir  ajouter  au  texte  de  Bellini.  Sans 
avoir  les  belles  notes  de  Tamburini,  Steller  s'est  montré  chanteur 
de  grand  style  dans  le  rôle  de  Riccardo  et  il  y  a  retrouvé  son  beau 
succès  d'Alphonso  dans  Lîtcrezia;  les  applaudissements  ont  été  d'ailleurs 
amplement  partagés  par  Agnesi  dans  celui  de  Giorgio.  Depuis  Lablache 
on  ne  l'avait  pas  mieux  interprété  et  le  fameux  duo  :  Suoni  la  Iromha 
a  valu  aux  deux  artistes  une  ovation  méritée;  ils  ont  dû  en  répéter 
l'allégro.  —  Hier  samedi,  c'était  le  tour  d'Adelina  Patti,  qui  se  mon- 
trait dans  une  nouvelle  et  importante  création  :  Giovanna  d'Arco  de 
Verdi.  Nous  rendrons  compte  dimanche  de  cette  intéressante  représen- 
tation. 

^%  La  rentrée  de  Mlle  Marimon  au  théâtre  Lyrique  ne  s'est  pas  effec- 
tuée avec  moins  de  succès  que  celle  de  Meillet.  On  y  a  revu  avec  plaisir 
cette  cantatrice  qui  y  a  fait  ses  premiers  pas  dans  une  carrière  parcourue 
depuis  par  elle  avec  un  grand  éclat.  Quoiqu'elle  eût  à  lutter  dans  le  rôle 
de  la  reine  de  la  nuit  de  la  Flûte  encimntée  contre  le  souvenir  si  récent  en- 
core de  la  supériorité  avec  laquelle  il  était  dit  par  Mlle  Nilsson,  Mlle  Ma- 
rimon, qui  excelle  surtout  dans  les  vocalises,  a  franchi  victorieusement 
les  difficultés  dont  ce  terrible  air  du  quatrième  acte  est  hérissé.  Saluée 
par  des  applaudissements  aussi  enthousiastes  que  légitimes,  elle  a 
dû  le  bisser  aux  acclamations  de  la  salle  entière.  —  Bosquin 
(Pamino),  Troy  (Papageno),  et  Mlle  Daram  (Pamina)  ont  vail- 
lamment contribué  au  succès  de  cette  représentation.  —  C'est  la  Fanchon- 
nette,  avec  Mme  Carvalho  et  Monjauze,  qui  a  occupé  le  répertoire  de  la 
semaine  au  théâtre  de  la  Renaissance;  Roméo  et  Juliette  va  lui  succéder. 

—  M.  Carvalho  se  propose  de  monter,  avec  Meillet  dans  le  rôle  principal, 
le  Brasseur  de  Prcston.  —  On  a  mis  aussi  à  l'étude  la  Bohémienne  de 
Balfe,  sans  préjudice  de  l'Elisabeth  de  Hongrie,  dont  les  répétions  suivent 

leur  cours  et  qui  sera  donnée  dans  la  première  quinzaine    d'avril.  

Deux  engagements  nouveaux  viennent  aussi  d'être  faits  :  celui  d'une 
jeune  élève  de  Wartel,  Mlle  A.  Monnier,  et  celui  d'un  ténor  qui  était  au 
service,  et  dont  l'éducation  musicale  aurait  été  faite  aux  frais  d'une 
dame  de  la  société  parisienne. 

„:**  Au  théâtre  des  Fantaisies-Parisiennes  on  vient  de  reprendre  le 
Muletier,  l'un  des  premiers  ouvrages  d'Hérold,  qui  remonte  à  l'année 


102 


CiEVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


1823,  et  qui  est  resté,  Jusque  dans  ces  derniers  temps,  au  répertoire  de 
rOpéra-Comique.  Dans  l'espace  de  liuit  ans,  l'illustre  compositeur  avait 
enriclii  la  scène  Ij'riquo  de  Maria,  de  Zampa,  du  Pré  aux  Clercs,  lorsque 
la  mort  est  venue  le  surprendre.  Plus  heureux  que  lui,  Paul  de  Kock, 
son  collaborateur  pour  les  paroles  du  Muletier,  assistait,  après  un  laps 
de  quaranle-cinq  ans  (presque  un  demi-siècle),  à  la  dernière  reprise  de 
cette  pièce,  On  sait  que  le  sujet  en  est  emprunté  à  un  conte  assez  gra- 
veleux de  la  Fontaine.  Mais,  sous  la  Restauration,  on  ne  plaisantait 
guère  avec  la  morale,  et,  de  nos  jours,  la  donnée,  expurgée  forcément 
par  Paul  de  Kock,  s'est  trouvée  fort  anodine.  Quant  à  la  musique,  elle  se 
ressent  des  truonnements  d'Hérold,  qui  n'avait  pas  -encore  rencontré  sa 
voie;  on  y  peut  constater,  principalement  dans  un  certain  crescendo  de 
l'ouverture,  des  préoccupations  rossiniennes,  et  il  n'y  a  qu'un  air,  celui 
du  sommeil  des  muletiers,  dont  la  facture  originale  décèle  le  génie  du 
maître.  Cependant,  il  passe  à  peu  près  inaperçu,  tandis  que  le  public 
riserve  ses  applaudissements  pour  un  chœur  de  paysans,  deux  boléros  et 
des  couplets  comiques  qui,  du  reste,  ne  sont  pas  sans  valeur.  Le  succès 
du  Muletier  fut  dû,  dans  la  nouveauté,  à  la  manière  brillante  dont  il 
était  monté;  ses  deux  rôles  féminins  étaient  tenus  par  deux  cantatrices 
charmantes,  Mme  Boulanger  et  Mlle  Prahder;  le  personnage  principal 
avait  pour  interprète  un  comédien  agréable  du  nom  de  Lemonnier;  le 
vieil  aubergiste  et  son  neveu  étaient  joués  par  Vizentini  et  Féréol,  qui 
ont  laissé  une  réputation  très-méritée.  Aux  Fantaisies-Parisiennes,  Lau- 
rent, Derval  et  BarnoU,  Mme  Géraizer  et  Mlle  Deneux  font  de  louables 
efforts  pour  rappeler  leurs  devanciers,  et  il  faut  leur  en  tenir  compte.  En 
somme,  la  reprise  de  l'opéra  d'Hérold  a  été  accueillie  avec  sympathie,  et 
nous  croyons  que  M.  Martinet  n'aura  qu'à  s'en  féliciter. 

^*ii  Le  même  théâtre  jouera  incessamment,  sous  le  titre  de  l'Amour 
mouillé,  un  acte  de  M.  Théodore  de  Banville,  dont  M.  J.  Cressonnois  a 
écrit  la  musique. 

!((**  La  reprise  de  l'Africaine,  impatiemment  attendue  à  Bordeaux,  a  eu 
lieu  la  semaine  dernière,  avec  l'éclat  et  le  retentissement  d'une  véritable 
solennité  artistique.  Comme  aux  premières  représentations  de  l'ouvrage, 
la  salle  était  littéralement  remplie  d'une  foule  avide  d'entendre  encore  le 
chef-d'œuvre  de  Meyerbeer  et  d'applaudir  la  nouvelle  Selika,  Mme  Wil- 
hem-Massé,  qui  succédait  à  l'éclatant  succès  remporté  l'année  dernière 
par  Mlle  Audibert,  dans  ce  rûle  et  sur  cette  scène.  Dès  le  second  acte, 
par  ses  grandes  qualités  de  comédienne  et  de  chanteuse,  la  vaillante  ar- 
tiste avait  conquis  les  sympathies  générales;  son  rappel  après  la  chute 
du  rideau  en  a  été  le  témoignage  incontestable. 

<^*^  Le  succès  de  la  reprise  du  Prophète  a  été  aussi  très-décidé  à  Tou- 
louse, tous  les  artistes  ayant  concouru  par  leurs  études  et  leur  zèle  à 
rendre  parfaite  cette  représentation.  M.  Mazurini  (Jean  de  Leyde),  no- 
tamment, a  eu  dans  le  cours  de  la  soirée  des  moments  magnifiques; 
Mme  Ebrard-Gravière  a  partagé  avec  lui  l'enthousiasme  et  les  applau- 
dissements du  public. 

5^.%  La  Grande-Duchesse  vient  d'être  représentée  à  Rennes  avec  une 
distribution  excellente,  de  beaux  costumes  et  une  mise  en  scène  com- 
plète. Sous  ce  triple  rapport,  les  journaux  de  la  ville  accordent  sans  res- 
triction leurs  éloges  à  M.  Gilbert-David  (Fritz),  comme  directeur  et  comme 
artiste.  La  salle  était  comble,  cela  va  sans  dire,  à  la  première,  et  le  suc- 
cès n'a  fait  que  grandir  aux  représentations  suivantes. 

ii^jf,  Le  théâtre  des  Variétés  de  Lille  a  eu  l'heureuse  idée  de  reprendre 
la  Grande-Duchesse  avec  Mme  Ugalde.  Quand  une  artiste  de  la  valeur  de 
Mme  Ugalde  applique  ses  facultés  à  créer  un  rôle  d'opérette,  on  peut 
être  sûr  d'avance  de  la  perfection  avec  laquelle  il  sera  exécuté.  Personne 
n'a  oublié  sa  création  de  Roland  dans  les  Bavards  ;  celle  de  la  Grande- 
Duchesse  de  Gérolstein  ne  laissera  pas  moins  bon  souvenir.  Mme  Ugalde 
s'y  est  montrée  comédienne  remplie  d'esprit,  de  crânerie  et  d'entrain  ; 
quant  à  son  talent  de  chanteuse,  elle  l'y  a  mis  tout  entier,  c'est  tout  dire. 
Aussi  a-t-elle  été  applaudie  à  tout  rompre,  et,  grâce  à  son  concours,  voilà 
une  nouvelle  série  de  fructueuses  représentations  assurée  à  l'œuvre  po- 
pulaire d'Offenbach. 

,*«  La  direction  du  Grand-Théâtre  de  Marseille  a  renouvelé,  à  de  très- 
belles  conditions,  l'engagement  de  Michot,  et  elle  monte  activement 
Bornéo  et  Julietle  pour  les  plus  prochaines  représentations  de  l'excellent 
artiste.  En  attendant,  le  Prophète  continue  d'attirer  la  foule. 

**;s  M.  Gye  vient  de  publier  son  programme  pour  la  saison  d'opéra 
qui  va  s'ouvrii-  le  31  mars  à  Covent-Garden.  Voici  les  noms  des  artistes 
engagés  :  Mmes  Adelina  Patti,  Pauline  Lucca,  Fricci,  Lemmens-Sher- 
rington,  Vanzinifdébut),  Morensi,  Tagliafico,  Dall'Anese,  Locatelli  (début), 
Lavrofska  (début),  Fioretti  (début),  Mayer.  —  MM.  Mario,  Naudin,  Fan- 
celle,  Neri-Baraldi,  Rossi,  Marine,  Graziani,  Cotogni,  Tagliafico,  Petit, 
Colini  (début),  Ciampi,  Fellar,  Polonini,  Capponi  et  Bagagiolo.  — 
Premières  danseuses,  ailles  Marina  Mora  et  Rosalia  (début) .  —  M.  Costa 
reste  à  la  tête  de  l'orchestre,  et  M.  Harris,  qu'une  erreur  de  notre  der- 
nier numéro  associait  à  la  fortune  de  M.  Mapleson,  conserve  son 
poste  de  régisseur.  —  Parmi  les  opéras  qui  seront  représentés,  les  prin- 
cipaux sont  l'Africaine,  le  Siège  de  Corinthe,  les  Huguenots,  Don  Carlos, 
l'Etoile  du  Nord,  Robert,  Roméo  et  Juliette,  Fra  Diavolo,  Giovanna  d'Arco, 
le  Domino  nrAr.  —  Ce  dernier  opéra  figure  pour  la  première  fois  sur 
un  programme  de  scène  italienne  à  Londres  ;  Auber  y  a  ajouté  dans  ce 


but  des  récitatifs.  Fra  Diavolo  était  jusqu'à  présentie  seul  de  ses  ouvrages 
donné  à  Londres  dans  ces  conditions.  Le  Siège  de  Corinthe  est  également 
nouveau  pour  l'Angleterre. 

^,*^  Le  Brésil  est  conquis  au  répertoire  vainqueur  d'Offenbach.  A  Rio- 
de-Janeiro,  le  théâtre  de  la  rue  d'Uruguayana  joue  chaque  soir  la 
Grande-Duchesse  et  les  Dames  de  la  Halle. 


NOUVELLES  DIVERSES. 

*■**  Hier  à  8  heures,  avait  lieu  dans  la  salle  du  Conservatoire  l'audi- 
tion des  fragments  de  l'opéra  en  cinq  actes,  le  Dante,  composé  par  M.  le 
duc  de  Massa,  et  à  laquelle  il  avait  invité  l'élite  des  gens  du  monde,  des 
artistes  et  de  la  presse.  Nous  en  rendrons  compte  dimanche  prochain. 

„,"'*  L'Association  des  artistes  musiciens  a  fêté  l'Annonciation,  le  23  mars, 
en  faisant  exécuter  à  Notre-Dame  la  seconde  messe  de  Weber,  dans  la- 
quelle on  retrouve  à  un  si  haut  degré  l'élévation  d'idées,  la  noblesse  de 
forme  et  la  belle  et  puissante  sonorité  de  l'auteur  du  Freyschulz.  Le 
Credo  de  cette  messe  a  été  remplacé  par  celui  de  Dumont.  M.  Battaille 
et  des  enfants  de  chœur  étaient  chargés  des  aoli  ;  ils  s'en  sont  fort  bien 
acquittés.  Les  chœurs  étaient  conduits  par  MM.  Steenman  et  Foulon,  et 
l'orchestre  par  M.  Tilmant.  La  marche  religieuse  de  M.  Ambroise  Tho- 
mas,   avec   accompagnement  de  harpes,  a  produit  un  très-bel  effet. 

,^'",1  Une  seconde  audition  de  la  Messe  solennelle  du  prince  Poniatowski 
a  eu  lieu,  jeudi  dernier,  à  Saint-Eusiache,  sous  la  direction  de  MM.  Hu- 
rand  et  Pickaert,  en  faveur  de  la  Caisse  des  écoles  du  2°  arrondissement. 
Les  soli  étaient  confiés  à  Villaret,  Agnesi  et  Bollaert.  L'exécution  géné- 
rale a  laissé  beaucoup  à  désirer,  et  cette  nouvelle  audition  n'a  modifié 
en  rien  les  jugements  portés  sur  l'œuvre,  du  reste  estimable  à  plus  d'un 
titre,  du  sénateur-dilettante.  Parmi  les  dames  patronne.sses  de  l'œuvre, 
nous  avons  remarqué  les  noms  de  Mme  Accursi  et  de  Mlle  A.  Patti. 

,^*,  Hier,  à  2  heures,  au  Cirque  de  l'Impératrice,  a  eu  lieu,  au  profit 
de  l'Asile  des  vieillards,  la  première  audition  du  Jugement  dernier,  grand 
oratorio  en  quatre  parties,  composé  par  Duprez.  Nous  en  rendrons  compte 
dans  notre  prochain  numéro. 

,**  La  Société  académique  de  musique  sacrée  a  fait  célébrer,  samedi 
dernier,  un  service  solennel  pour  le  repos  de  l'âme  de  ses  membres  dé- 
cédés. La  Messe  des  morts  en  plain -chant-harmonisé  à  quatre  voix  par 
M.  Charles  Yervoitle,  a  été  exécutée  par  les  sociétaires  avec  un  ensemble 
parfait. 

#%  Carlotla  Patti,  Vieustemps,  Seligmann,  Berthelier,  qui  formaient 
la  Compagnie  Ulmann,  sont  de  retour  à  Paris.  Parmi  les  artistes  qui  ont 
reçu  dans  cette  brillante  tournée  l'accueil  le  plus  chaleureux,  le  joyeux 
chanteur  de  chansonnettes  Berthelier,  partout  où  il  s'est  fait  entendre,  a 
recueilli  les  plus  vifs  applaudissements.  Un  des  morceaux  qui  ne  man- 
quait jamais  son  effet  sur  le  public  est  l'Air  bouffe  anglais  d'Offenbach, 
que  le  chanteur  était  toujours  obligé  de  bis.ser,  et  qu'il  a  dit  au  moins 
soixante  fois. 

3(*«  La  partition  pour  piano  et  chant  de  l'Elixir  de  Cornélius,  de  Meil- 
hac  et  Delavigne,  musique  d'Emile  Durand,  dont  nous  avons  dit  le  suc- 
cès au  théâtre  des  Fantaisies- Parisiennes,  vient  de  paraître  chez  les 
éditeurs  Gérard  et  C".  Cette  partition,  oii  abondent  de  charmantes  mélo- 
dies, ne  rencontre  pas  moins  de  succès  à  la  lecture  qu'à  la  scène. 

«*,s  C'est  l'éditeur  J.  Maho  qui  vient  d'acheter  la  propriété  de  la  sym- 
phonie de  Mendelssohn  dite  la  Réformation,  et  qui  a  été  jouée  dernière- 
ment au  Concert  populaire . 

,,*,,  La  grande  cantatrice  tragique  Emmy  La  Grua  est  à  Paris,  venant 
d'Espagne  ofi  elle  a  obtenu  de  si  éclatants  succès. 

,j*t  Le  violoncelliste  Féri  Kletzer  est  en  ce  moment  à  Paris,  de  retour 
de  sa  tournée  triomphale  en  Portugal  et  en  Espagne. 

^*^^  Alfred  Jaëll  est  également  arrivé  à  Paris;  Monaco,  Nice  et  Lyon 
ont  marqué  sur  sa  route  comme  de  glorieuses  étapes. 

***  Aujourd'hui  dimanche  à  8  heures  1/2 ,  salle  des  Conférences , 
boulevard  des  Capucines,  Mme  Ernst  donne  une  nouvelle  séance  de  réci- 
tation oii  elle  dira  plusieurs  poésies  de  Victor  Hugo,  Alfred  de  Vigny, 
de  Musset,  Hégésippe  Moreau,  etc. 

^'^t  On  doit  inaugurer,  mercredi  prochain  \"  avril,  le  grand  orgue 
de  la  nouvelle  église  de  Bergerac  (Dordogne).  On  se  rappelle  que  cet 
instrument,  un  de  ceux  exposés  l'année  dernière  par  la  maison  Merklin, 
Schutze  et  C°,  a  valu  à  ces  éminents  facteurs  la  médaille  d'or  et  la  dé- 
coration de  la  Légion  d'honneur.  M.  Auguste  Durand,  organiste  de  Saint- 
Vincent  de  Paul,  est  désigné  pour  se  rendre  à  Bergerac  afin  de  procéder 
à  la  réception  de  cet  orgue,  et  d'en  faire  valoir  les  ressources  le  jour  fixé 
pour  l'audition. 

***  Nous  apprenons  que  par  suite  de  nouvelles  appropriations,  la  jolie 
salie  de  concert  de  la  rue  Saint-Georges,  50  (salle  Sax),  peut  de  nouveau 
se  louer  pour  concerts,  conférences,  cours,  réunions  d'actionnaires,  etc. 
»**  M.  Léon  Pillât,  l'ancien  directeur   de  l'Opéra,  devenu  consul  gé- 
néral à  Venise,  vient  de  mourir. 


DL  l'AKlS 


103 


**,  M.  Edmond  Franck,  excellent  accompagnateur,  très-répandu  dans 
le  monde  artiste  de  Paris,  est  mort  cette  semaine,  à  Castelnaudary,  où 
il  se  trouvait  en  représentations  avec  Levassor;  il  avait  trente-cinq  ans 
à  peine. 

^\  Le  2  mars  est  mort  à  Weimar,  à  quatre-vingt-un  ans,  un  com- 
positeur de  talent,  Cari  Ebervvein,  direcleur  de  la  musique  grand-ducale. 
Il  est  surtout  connu  en  Allemagne  par  la  Léonorc  de  Holten,  dont  il  a 
fait  la  musique,  et  qui  a  obtenu  un  succès  populaire. 


ÉTRANGER 


^*^  Bruxelles.  —  La  saison  musicale  tire  à  sa  fin.  Le  Conservatoire 
vient  de  donner  son  dernier  concert  de  l'année.  Outre  la  symphonie  en 
ré  (l'^)  de  Mozart  et  l'ouverture  de  Léonore  de  Beethoven,  on  y  a  entendu 
l'adagio  et  le  finale  du  3»  quintette  de  M.  Fétis,  exécutés  par  tous  les  ins- 
truments à  archet.  Pour  cette  exécution  Fauteur  avait  écrit  une  partie 
de  contrebasse  distincte  de  celle  du  violoncelle.  Les  deux  fragments  ont 
produit  sous  cette  forme  un  très-grand  effet  :  l'un  par  la  fraîcheur  et  par 
le  charme  des  idées,  en  même  temps  que  par  la  science  et  par  l'ampleur 
des  développements;  l'autre  par  la  verve,  la  chaleur,  l'énergie  soutenues. 
L'auditoire  a  éclaté  en  applaudissements  et  l'on  peut  dire  qu'une  véri- 
table ovation  a  été  faite  à  M.  Félis,  qui  dirigeait  l'exécution  de  son 
œuvre,  exécution  parfaite,  ajoutons-le.  On  a  entendu  avec  intérêt,  dans 
la  même  séance,  deux  fragments  d'une  Suite  d'orchestre,  par  M.  Huberti, 
lauréat  des  grands  concours  de  composition  musicale,  jeune  artiste  qui 
cherche  plutôt  à  exprimer  des  idées  qu'à  produire  des  eflets,  contraire- 
ment à  ce  qu'on  fait  habituellement  de  notre  temps.— Quelques  jours  après 
le  dernier  concert  du  Conservatoire,  les  professeurs  de  cette  école  se  sont 
rendus  auprès  de  leur  illustre  et  vénérable  direcleur  pour  fêter  avec  force 
bouquets,  discours  et  manifestations  sympathiques,  son  quatre-vingt- 
quatrième  anniversaire.  —  Le  public  amateur  et  artiste  a  assisté,  il  y  a 
quelques  jours,  à  la  première  représentation  d'un  petit  opéra  qui  a  eu 
lieu,  non  dans  un  théâtre,  mais  dans  la  salle  des  réunions  du  Cercle  ar- 
tistique et  littéraire,  transformée  pour  la  circonstance  en  salle  de  spec- 
tacle. Le  Tricorne  enchanté,  de  M.  Théophile  Gautier,  a  été  arrangé  de 
bastonnade  (comme  il  était  qualifié)  en  opéra-comique,  et  sur  ce  libretto 
pétillant,  M.  Léon  Jouret  a  composé  une  musique  très-spirituelle,  très- 
élégante,  une  musique  où  il  y  a  beaucoup  de  cette  chose  charmante  et 
rare  qu'on  appelle  de  la  mélodie.  L'auteur  de  cette  jolie  partition  était 
déjà  connu  chez  nous  par  des  chœurs  qui  sont  dans  le  répertoire  de 
toutes  les  sociétés  chantantes,  par  des  romances  très-distinguées  et  par 
un  opéra  de  Quentin  Metzys,  composé  pour  un  théâtre  d'amateurs.  Le 
Tricorne  enchanté  a  eu  pour  interprètes  les  premiers  sujets  du  Théâtre- 
Royal  :  Mmes  Daniele  et  Dumestre,  MM.  Jourdan,  Ricquier-Delaunay  et 
Jamet.  Il  y  a  eu  de  vifs  applaudissements  pour  le  compositeur  et  pour 
les  chanteurs;  il  y  a  eu  rappel  de  l'un  et  des  autres  comme  au  théâtre 
les  jours  de  grand  succès.  On  assure  qu'après  avoir  subi  si  victorieuse- 
ment cette  première  épreuve,  le  Tricorne  enchanté  pourrait  bien  tenter 
la  fortune  sur  la  scène  du  Théâtre-Royal,  où  M.  Jourdan  aurait  obtenu 
de  l'auteur  l'autorisation  de  le  monter  pour  son  bénéfice.  —  M.  Rubins- 
tein  avait  presque  promis  de  revenir  à  Bruxelles  diriger  l'exécution  de  sa 
symphonie  l'Océan,  à  l'un  des  concerts  populaires.  11  paraît  que  les  en- 
gagements qu'il  a  contractés  en  France  et  en  Angleterre  ne  lui  permettent 
pas  de  réaliser  ce  projet.  Nous  aurons  à  sa  place  M.  Joachim,  le  célèbre 
violoniste,  qui  jouera  le  3  avril  dans  une  dernière  séance  organisée  à 
son  intention  par  l'administration  des  concerts  populaires. —  M.  Letellier, 
directeur  du  théâtre  de  la  Monnaie,  est  parti  pour  Paris.  Les  espérances 
qu'il  avait  fondées  sur  le  succès  de  Don  Carlos  s'étant  définitivement  et 
trop  vite  évanouies,  il  a  l'intention  de  traiter  avec  Marie  Sasse  pour  un 
certain  nombre  de  représentations. 

i^*^  Londres.  —  Le  concert  populaire  du  lundi  2  mars  a  été  donné 
au  bénéfice  de  Mme  Arabella  Goddard-Dawison.  La  célèbre  pianiste  a 
admirablement  exécuté  plusieurs  œuvres  de  Mendelssohn  encore  incon- 
nues en  Angleterre,  entre  autres,  un  sextuor  en  ré  mineur  et  une  grande 
sonate  pour  piano  seul. 

*"*»  Berlin.  —  Pour  éviter  les  inconvénients  que  pouvait  avoir  l'emploi 
simultané  des  deux  célèbres  ténors  Niemann  et  Wachtel,  la  direction  de 
l'Opéra  a  décidé  que  Wachtel,  en  ce  moment  en  congé,  ne  rentrerait 
en  activité  que  du  1"'  décembre  au  IS  mars  prochain,  tandis  que  Nie- 
mann commencerait  et  terminerait  la  saison. 

^*^  Leipzig.  —  A  l'occasion  du  123»  anniversaire  de  sa  fondation,  la 
direction  des  concerts  du  Gewandhaus  a  remis  au  comité  institué  pour 
l'érection  d'un  monument  à  la  mémoire  de  Mendelssohn  la  somme  de 
mille  thalers,  avec  les  intérêts  à  partir  du  11  mars,  en  reconnaissance 
des  précieux  services  rendus  dans  cette  ville  par  le  grand  compositeur 
à  l'art  masical.  Un  brilland  concert  au  profit  des  pauvres  a  étét  donné 
dans  la  salle  du  Gewandhaus.  Le  violoniste  russe  Besekirsky  y  a  exécuté 
avec  un  grand  succès  un  concerto  de  sa  composition. 


*%  Pesth.  —  Don  Carlos  de  Verdi  a  été  donné  pour  la  première  fois 
le  14  mars,  avec  un  succès  complet. 

m*,^  Madrid.  —  Tamberlick  dans  la  Muette,  et  Naudin  dans  la  Favo- 
rite, ont  obtenu  de  brillants  succès.  — Le  violoncelliste  Féri  Kh^tzor  a  don- 
né ici  un  fort  beau  concert,  auquel  beaucoup  d'amateurs  n'ont  pu  assis- 
ter faute  de  places,  et  qui  a  rapporté  à  l'excellent  artiste  honneur  et 
profit;  on  y  a  bissé  la.  Sérénade  de  Gounod,  arrangée  en.  trio  pour  vio- 
loncelle, piano  et  orgue.  Sur  les  instances  de  l'infant  Don  Sébastien,  la 
reine  a  accordé  à  Kletzer  la  décoration  de  Charles  111. 

„.%  Venise.  —  Le  li  mars,  le  théâtre  de  la  Fenice  a  fêté  l'anniversaire 
de  la  naissance  du  roi  par  une  représentation  de  gala,  où  la  marche 
royale  a  été  exécutée  et  redemandée,  après  le  second  acte  de  l'Africaine, 
aux  cris  de  Viva  il  Re  galantuomo  ! 

Florence. — Mme  Lotti  délia  Santa,  qui  chante  en  ce  moment  l'.ifricaine 
avec  tant  de  succès  à  Venise,  a  été  engagée  à  la  Pergola  pour  les  fêtes 
du  mariage  du  prince  Humbert.  Elle  chantera  Marta. 

^%  Varsovie.  —  Pour  sa  représentation  d'adieux,  Mlle  Artôt  avait 
choisi  un  acte  de  la  Sonnanbula  et  un  de  l'Élisir  d'Amore.  L'enthou- 
siasme du  public  est  arrivé  au  délire  :  des  fleurs,  des  couronnes,  des  rap- 
pels sans  fin  ont  éié  prodigués  à  l'éminente  cantatrice.  On  lui  a  offert 
comme  souvenir  un  magnifique  bracelet  enrichi  de  diamants. 

=(s*»  Saint-Pétersbourg. — L'administration  des  théâtres  impériaux  vient 
de  publier  l'avis  suivant,  relatif  à  la  sai.son  de  1868-69  de  l'Opéra  italien. 
—  Personnel.  —  Prime  donne  :  Mmes  Adehna  Patti,  du  i°'  janvier  1869 
jusqu'à  la  fin  de  la  saison  (c'est-à-dire  jusqu'au  3  mars  1869),  Fricci, 
Volpini,  Trebelli  {contralto),  Lucca  (du  i  novembre  au  16  décembre  1868), 
une  comprimaria  (à  engager).  Seconde  donne  :  Mmes  Dall'Anesse,  Be- 
rini.  Primi  tenori  :  MM.  Mario,  Calzolari,  Neri-Baraldi,  Fraschini.  Se- 
conde tenore  :  M.  Ro  si.  Primi  bari  toni  :  MM.  Graziani,  Meo,  Gassier. 
Primi  bassi  :  MM.  Angelini,  Bagagiolo.  Secondo  basso  :  M.  Fortuna. 
Primo  basso  buffo  :  M.  Zucchini.  Chef  d'orchestre  :  M.  Vianezi.  Régis- 
seur en  chef  :  M.  Harris. 


CONCERTS  ET  AUDITIONS  fflUSICÂLES  ANNONCES. 


Salle  du  Grand-Orient,  aujourd'hui  29  mars  à  8  heures  :  concert  audition 
de  M.  Penavaire,  violoniste,  avec  le  concours  de  Mlles  de  Beaunay 
et  Victprine  Champier,  de  MM.  Léon  Lafont,  Sixte  Delorme,  Castei- 
gnet,  Graire  et  José  Barrière. 

Salons  Lebouc,  mardi  31  mars  :  audition  des  compositions  de  M.  L.  Sal- 
vator . 

Salons  Pleyel,  mardi  31  mars  :  cinquième  séance  populaire  de  musique 
de  chambre,  par  MM.  Ch.  Lamoureux,  Colblain,  Adam  et  Poëncet, 
avec  le  concours  de  M.  H.  Fissot. 

Mercredi  1'="'  avril  :  troisième  soirée  de  musique  de  chambre,  par  MM. 
Maurin,  Colblain,  Mas  et  Demunck,  avec  le  concours  de  M.  Saint- 
Saëns . 

Salons  Pleyel,  mercredi  l''  avril  :  troisième  séance  du  quatuor  Maurin. 

Salle  Herz,  jeudi  2  avril  :  concert  avec  orchestre  donné  par  M.  Garcin, 
avec  le  concours  de  Mlle  Marimon,  M.  Caron  et  Mlle  Caroline  Lévy. 
L'orchestre  sera  dirigé  par  M.  Georges  Hainl. 

Salle  Herz,  vendredi  3  avril  :  troisième  concert  donné  par  Ant.  Rubins- 
tein,  avec  orchestre.  11  y  exécutera  les  œuvres  suivantes  :  i°  con- 
certo en  sol  majeur  (n"  3)  de  sa  composition;  —  2"  fantaisie  chro- 
matique (Bach),  Gigue  (Haendel),  Rondo  (P.-S.  Bach),  Marche  tur- 
que des  Ruines  d'Athènes  (Beethoven)  ;  —  3°  Etudes  symphoniques  en 
forme  de  variations  (Schumann); —  i"  Nocturne  et  Ballade  (Chopin), 
Mélancolie,  étude  (Rubinstein).  —  Partie  vocale,  Mlle  Rives.  — 
L'orchestre  sera  dirigé  par  M.  Camille  Saint-Saëns. 

Salle  Erard,  samedi  4  avril;  audition  et  soirée  musicale  par  M.  W. 
Goldner. 

Salons  Pleyel,  mercredi  6  avril  à  8  heures  1/2  du  soir  :  concert  donné 
par  Mme  Anna  Fabre,  avec  le  concours  de  MM.  Hermann-Léon, 
Pagans,  Ketterer,  Lebrun,  Durand,  Maton,  Thomé  et  Tayau . 


104 


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POUR  LE  PIANO 

cil.  Délions.  Op.  81.  N°  1.  Chanson  aragonaise 6    » 

—  N°  2 .  Chanson  toscane 6    » 

liéo  Dcllbes.  Grande  valse  extraite  du  Pas  des  Fleurs  intercalé 

dans  le  Corsaire 7  50 

J.  Dayiln.  Menuet  en  nt,  transcrit  par  Mortier  de  Fontaine...  i    » 

©.  liamotlio.  Op.  61.  Chant  du  soir,  nocturne S     » 

liCfébure-Wéiy.  Op.  175.   Boléro 7  50 

—  Op.   176.  Le  Rêve  de  Chérubin 6     » 

—  Op.   177.  Esméralda,  caprice 6     » 

—  Op.   180.   Le  Défilé,  pas  redoublé  à  deux  pianos 10     » 

—  Op.  180  6iS.  Le  même  à  quatre  mains 9     i 

—  Op.  181.   Deuxième  duo  symphonique  à  deux  pianos 25     » 

H.  Bavlna.  Op.  60.  Confidence,  nocturne 6     t 

DANSES 

B.  Ettling.  Polka- mazurka  sur  la  Vie  parisienne 5    » 

Uarx.  Polka  des  Oiseaux  sur  les  motifs  de  Gulliver 4  50 

O.  Métpa.  Valse,  Fleurs  et  Papillons,      id 6    » 

Sipanss.  Quadrille,  id 4  50 

—  Quadrille,  valse  et  polka  sur  la  Vie  parisienne,  chaque....  4  50 
A.  Mey.  Valse  sur  les  motifs  de  la  Vie  parisienne 6     » 

—  Les  mêmes,  à  quatre  mains. 


de  la  Chaussée-d'Antin,  à  Paris. 

UBLIGATIONS 

CHANT 

A.  Hlenard.  Hamlet,  tragédie  lyrique  en  cinq  actes,  partition 

piano  et  chant,  net 18 

jr.  orrcnliach.  La  Vie  parisienne,  opéra-bouffe  en  quatre  actes, 

partition  piano  et  chant,  net 12 

—  La  même,  pour  piano  seul,  net 8 

E.<5o  Oclibos.  Il  n'  faut  pas  vous  gêner 4 

—  De  quoi  vous  plaignez-vous  ? 3 

(Couplets  chantés  dans  l'opéra-bouffe  Malborouyh.) 
Brousse  (Marie).  0  Salutaris,  d'après  l'adagio  de  la  sonate  pa- 
thétique de  Beethoven,  1,2,  chaque 4 

Victor  CUérl.  Chant  de  guerre  du  Vengeur,  1,  2,  chaque 3 

LiUnllller.  En  visite,  chansonnette 3 

—  Ouistiti,  chansonnette 3 

G.  PfellTer.  Sonnet-Elégie  de  Boileau 3 

Xh.  Radons .  Vous  m'oubliez,  mélodie 5 

—  Le  Rosier,                                    id 4 

—  Le  Réveil,                                    id 6 

—  A  quoi  rêves  tu  ?                        id 4 

O'Kellj-.  Les  Adieux  de  Valentin ,  chaftson 3 

liebonr.  Les  Récréations  de  l'enfance ,  recueil  de  rondes  avec 

jeux  et  petites  chansons  avec  accompag.  de  piano,  net. .  3 


PRIX  ACCORDÉ  A   l'ONANIMITÉ  A   l'EXPOSITlON 
UNIVERSELLE  DE   LONDRES  1851. 


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REVUE 


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KtruDger 34  ■       i(L 

Le  Journal  parait  le  Dimanche. 


GAZETTE  MUS 


DE     PARIS 


SOMMAIRE.— Théâtre  impérial  Italien  :  (xiooanna  d'Arco,  opéra  en  quatre  actes, 
poème  imité  de  Schiller,  par  M.  Temistocle  Sciera,  musique  de  Verdi,  par 
Haurice  Oray.  —  Auditions  musicales  :  Dante,  de  M.  le  duc  de  Massa  ; 
Jugement  dernier,  de  G.  Duprez,  par  Armand  fionzien.  —  Bibliographie 
musicale,  par  Artbnr  Pongin.  —  Concerts  et  auditions  musicales  de  la 
semaine.  —  Nouvelles  des  théâtres  lyriques.  —  Nouvfillps  diverses.  —  Con- 
certs et  auditions    musicales    annoncés.  —  Annonces. 


THÉÂTRE  iniPËRIÀL  ITÀUEN. 

GIOVANNA  DA'RCO, 

Opéra  en  quatre  actes,  poëme  imité  de  Schiller,  par  M.  Temistocle 
SoLERA,  musique  de  Verdi. 

(Première   représentation  le  28  mars  1868.) 

L'ouvrage  que  le  théâtre  Italien  vient  de  nous  offrir  pour  la 
première  fois  date  de  vingt  -  trois  ans  ;  il  a  été  représenté  à  la 
Scala,  de  Milan,  au  mois  de  février  184S,  et  il  n'est  pas  inutile 
de  se  rappeler  cette  date  pour  juger  un  opéra  dont  la  va- 
leur n'est  que  secondaire  dans  l'œuvre  entier  du  maître,  et  qui 
n'est  pas  à  la  hauteur  de  ce  qu'on  peut  appeler  ses  grandes  pro- 
ductions, Rigolelto,  la  Traviata,  il  Trovatore.  .. 

Nature  fougueuse  et  quelque  peu  désordonnée,  Verdi  a  fourni 
une  carrière  presque  aussi  inégale  que  son  génie  lui-même,  mar- 
chant la  plupart  du  temps  de  succès  en  chute  et  de  chute  en 
succès,  faisant  succéder  à  une  œuvre  de  génie  et  débordante  de 
passion  une  œuvre  vulgaire,  sinon  triviale,  pour  se  relever  ensuite 
fièrement  et  arracher  de  nouveau  des  applaudissements  à  une 
foule  qui  ne  demandait  qu'à  l'acclamer.  C'est  ainsi  qu'après  un 
Giorno  di  regno  venaient  Nabucco  et  Ernani  ;  et  après  ceux-ci 
Giovanna  d'Arco,  qui  n'obtint  jamais,  même  en  Italie,  qu'un  mé- 
diocre succès,  puis  l'infortunée  Alzira,  qui  en  eut  moins  encore,  et 
Attila,  qui  n'en  eut  pas  du  tout;  Luisa  Miller,  suivie  de 
Sliffelio;  Rigoletto,  il  Trovatore  et  la  Traviata  précédant  Simone 
Boccanegral  La  carrière  du  maître,  ou  le  voit,  ressemble  assez 
à  la  course  d'un  cheval  emporté,  que  la  frénésie  de  son  al- 
lure fait  plus  d'une  fois  trébucher  et  qui  choppe  à   plus  d'un  ob- 


stacle, mais  qui  sait  aussi  se  redresser  avec  hardiesse   et  poursui- 
vre   son   chemin  avec  vigueur,  vaillance  et  courage. 

Il  faut,  d'ailleurs,  rendre  cette  justice  à  l'auteur  à'Ernani  et  d'» 
Due  Poscari,  c'est  que  le  génie  —  un  génie  abrupt,  il  est  vrai,  et 
qui  demanderait  la  plupart  du  temps  à  être  assoupli  —  ne  lui  fait 
jamais  complètement  défaut,  et  que,  même  dans  ses  œuvres  les 
moins  réussies,  on  retrouve  toujours,  à  de  certains  endroits,  la 
griffe  puissante  du  lion,  qui  se  plante  vigoureusement  dans  les 
chairs  de  l'auditeur  et  lui  arrache  un  cri  d'émotion  ou  d'admira- 
tion. Il  en  est  ainsi,  comme  nous  allons  le  voir  tout  à  l'heure, 
pour  quelques  parties  malheui'eusement  trop  rares  de  Giovanna 
d'Arco. 

Mais  avant  de  parler  de  la  musique,  il  me  faut,  hélas!  parler  du 
poëme.  Ce  n'est  pas  là  le  plus  réjouissant,  et  il  est  certain  qu'en 
présence  d'une  telle  divagation  rimée.  Verdi  peut  hardiment  invo- 
quer les  circonstances  les  plus  atténuantes  pour  les  défaillances  et 
la  faiblesse  d'une  partition  que  quelques  pages  heureuses  ne  sau- 
raient, dans  l'avenir,  sauver  d'un  juste  oubli. 

M.  Temistocle  Solera — qui  est  musicien  cependant  et  qui  a  fait 
représenter  plusieurs  opéras  dont  il  avait  écrit  livret  et  partition — 
a  bien  mal  servi  son  collaborateur,  il  faut  l'avouer.  Il  a  voulu, 
dit-il,  imiter  Schiller,  mais  il  l'a  imité  un  peu  dans  le  ^enje  de 
ce  singe  qui  se  coupait  la  gorge  en  voulant  se  raser  comme  son 
maître.  Il  a  pris  au  grand  poète  allemand  l'idée  d'un  dénoûment 
extrahistorique,  qui  fait  mourir  Jeanne  d'Arc  d'une  blessure  au 
lieu  de  la  faire  brûler  par  les  Anglais. 

Les  personnages  du  drame  sont  au  nombre  de  trois,  et,  sans 
rien  exagérer,  on  peut  trouver  que  c'est  bien  peu  pour  établir, 
nouer  et  dénouer  une  action  aussi  émouvante  en  elle-même  que 
celle  fournie  par  l'épopée  de  la  vierge  de  Vaucouleurs,  surtout 
quand  ces  trois  personnages  se  composent  d'une  femme  qui 
n'a  plus  rien  de  cette  grandeur  noble  en  sa  simplicité  de  la  figure 
historique  de  la  bergère  qui  sauva  la  France  sous  Charles  VIII; 
d'un  roi  à  moitié  idiot,  qui  passe  son  temps  à  faire  des  décla- 
rations à  celle  qui  doit  lui  rendre  son  royaume  et  sa  couronne ,  et 
à  chanter  avec  elle  d'interminables  duos  d'amour;  enfin,  d'un 
père  dénaturé  (celui  de  Jeanne),  dont  l'occupation  principale  est 
d'accuser  sa  fille  de  sorcellerie,  et  d'aller  la  dénoncer  comme  ma- 
gicienne aux  Anglais,  ses  ennemis  intimes. 


106 


UEVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


Il  n'y  avait  vraiment  rien  à  tii'er  d'un  canevas  aussi  puéril, 
aussi  vulgaire,  aussi  ridicule,  et,  si  l'on  peut  s'étonner  d'une  chose, 
c'est  qu'un  artiste  de  l'intelligence,  de  la  pratique  et  de  la  trempe 
vigoureuse  de  Verdi,  ait  consenti  à  «  réchauffer  des  sons  de  sa 
musique  »  de  telles  platitudes  ! 

L'analyse  complète  et  détaillée  de  la  partition  de  Giovanna 
d'Arco  me  conduirait  beaucoup  trop  loin,  et  je  vais  me  borner  à 
signaler  les  parties  qui  saillissent  de  l'ensemble  un  peu  terne  de 
l'ouvrage.  Je  ferai  remarquer  tout  d'abord  que,  selon  la  coutume 
adoptée  au  théâtre  Italien,  on  a  fait  quatre  actes  des  deux  seuls 
qui  çonnposent  la  partition  originale. 

On  distingue  dans  l'ouverture  un  joli  andante  pastoral,  en  style 
concerté,  dans  lequel  brillent  tour  à  tour  les  flûtes,  les  clarinettes 
et  les  hautbois.  La  cavatine  du  roi  ne  doit  être  mentionnée  que 
pour  un  agréable  andantino  à  six-huit,  très-joliment  accompagpé. 
Quant  à  celle  de  Jeanne,  qui  est  en  la  majeur,  elle  est  beaucoup 
plus  remarquable,  et  la  phrase  initiale  surtout  forme  un  cantabile 
pénétrant,  qu'on  dirait  échappé  de  la  plume  enchanteresse  de  Bel- 
lini. 

Un  trio  sans  accompagnement  entre  le  roi ,  Jeanne  et  son  père, 
m'a  paru  bien  incolore  ;  mais  je  citerai  le  joli  fragment  sympho- 
nique  qui  ouvre  le  deuxième  tableau,  fragment  dialogué  par  les 
instruments  à  vent  et  d'un  tour  extrêmement  original,  puis  une 
sorte  d'invocation  de  Jeanne  à  son  père  absent ,  chant  vraiment 
inspiré,  d'un  caractère  tendre,  touchant  et  mélancolique. 

Un  duo  qu'on  pourrait  appeler  le  «  duo  de  la  déclaration,  » 
entre  Jeanne  et  le  roi,' est  totalement  manqué,  mais  on  trouve 
dans  le  finale  une  belle  phrase  dite  par  Jeanne ,  accompagnée 
avec  la  clarinette  dans  le  chalumeau,  et  servant  de  dessin  prin- 
cipal à  l'ensemble  qui  suit,  lequel  est  grandiose  et  saisissant.  Le 
public  a  pu  être  surpris  de  voir  le  rideau  tomber  sur  cet  ensem- 
ble majestueux,  qui  semblait  n'être  que  la  première  partie  d'un 
morceau  très-considérable.  C'est  qu'en  efTet,  et  je  ne  sais  pourquoi, 
on  avait  jugé  à  propos  de  supprimer  complètement  toute  la  se- 
conde partie  de  ce  finale. 

Mes  souvenirs  ne  me  rappellent,  dans  le  dernier  acte,  qu'un 
duo  vulgaire,  mais  énergique  et  tout  à  fait  dans  la  manière  habi- 
tuelle de  Verdi,  entre  Jeanne  et  son  père,  puis  la  phrase  princi- 
pale et  presque  unique  du  finale,  qui  est  très-court. 

Telles  sont,  dans  cette  œuvre  nouvelle  pour  nous,  mais  déjà 
vieille  pour  le  public  italien,  les  quelques  pages  qui  se  recomman- 
dent à  l'attention  de  la  critique,  et  qui  émergent  d'un  ensemble 
généralement  peu  satisfaisant.  Je  le  répète,  il  était  impossible 
d'écrire  une  bonne  partition  sur  un  poëme  aussi  carrément  détes- 
table. C'est  là  ce  que  le  musicien  aurait  dû  comprendre,  et  ce  qui 
fait  qu'il  porte  le  poids  des  fautes  de  son  collaborateur. 

L'interprétation  de  Giovanna  d'Arco  est  confiée  à  Mlle  Patti,  à 
MM.  Nicolini  et  Steller.  Dire  que  Mlle  Patti  ne  réunit  pas  toutes 
les  qualités  physiques  propres  à  la  représentation  satisfaisante  de 
la  vierge  de  Domremy,  ce  n'est  évidemment  qu'énoncer  une  vérité 
élémentaire  :  Jeanne  d'Arc,  cette  sublime  hallucinée,  n'était  point 
une  virago  sans  doute,  mais  cependant  nous  avons  peine  à  nous 
la  figurer  si  mignonne. 

Il  manque  donc  à  Mlle  Patti  l'ampleur  physique,  cela  est  incontes- 
table. A  cette  remarque  près,  nous  devons  constater  qu'elle  a  non- 
seulement  bien  chanté,  mais  bien  joué  ce  rôle  de  Jeanne  d'Arc,  et 
qu'elle  y  a  surtout  fait  preuve  d'une  sensibilité  touchante  et  digne 
d'éloges  sincères.  Oserons-nous  ajouter  après  cela  que  nous  la  pré- 
férons non-seulement  dans  le  Barbier,  dans  Don  Pas-quale  et  dans 
la  Somnambule,  mais  même  dans  Lucie  et  dans  les  Puritains?  Il  est 
des  rôles  auxquels  la  nature  d'un  artiste  se  refuse,  quels  que 
soient  d'ailleurs  son  talent  et  ses  facultés;  il  me  semble  qu'il  en 


est  ainsi  en   ce  qui  concerne  Jeanne  d'Arc  et  l'enclianteresse  du 
théâtre  Italien. 

M.  Nicolini,  qui  joue  le  roi,  est  toujours  un  artiste  consciencieux, 
bien  doué  et  désireux  de  bien  faire.  Nous  croyons  cependant  qu'il 
se  trompe  sous  de  certains  rapports.  Nous  regrettons,  pour  notre 
part,  de  le  voir  dévoré  par  l'ambition  de  jouer  les  grands  rôles 
dramatiques,  tels  que  Lucie,  il  Trovatore,  Ernani,  Giovanna  d'Arco, 
qui  ne  sont  faits  ni  pour  la  nature  de  sa  voix,  ni  pour  celle  de 
son  talent.  Les  ténors  de  grâce  constituent-ils  donc  un  emploi  si 
dépourvu  d'agrément  et  de  charme  qu'on  ne  s'en  puisse  contenter, 
et  M.  Mario  a-t-il  eu  à  se  repentir  de  ne  faire  que  de  très-rares 
incursions  dans  le  répertoire  purement  dramatique?  La  tendance 
blâmable  de  M.  Nicolini  le  pousse  malheureusement  à  dénaturer 
le  caractère  de  sa  voix  si  chaude,  si  caressante  et  si  sympathique  ; 
elle  l'oblige  à  remplacer  le  charme  par  la  force,  à  pousser  le  son 
outre  mesure,  et  à  adopter,  en  négligeant  les  qualités  qu'il 
possédait  à  un  si  haut  degré,  les  défauts  principaux  du  chant  ita- 
hen,  c'est-à-dire  les  hoquets,  les  portamenti  exagérés  et  les  coups 
de  gosier.  Ces  réserves  faites,  nous  devons  constater  que  lorsqu'il 
reste  lui-même,  comme  dans  le  dernier  cantabile  de  Giovanna 
d'Arco,  M.  Nicolini  est  un  charmant  ténor  dont  la  «  voix  fait  mer- 
veille. » 

M.  Steller,  qui  est  un  des  bassi  cantanti  les  plus  remarquables  que 
nous  ayons  possédés  depuis  longtemps  au  théâtre  Italien,  a  fait  tous 
les  efforts  possibles  pour  sauver  le  personnage  absurde  et  odieux 
du  père  de  Jeanne  d'Arc.  Il  faut  lui  tenir  compte  d'une  bonne 
volonté  qui  ne  pouvait  sauver  le  caractère  vraiment  ridicule  du 
rôle,  et  lui  adresser  tous  les  éloges  que  méritent  son  beau  talent  de 
chanteur  et  son  expérience  de  la  scène. 

En  résumé,  nous  ne  croyons  pas  que  la  représentation  de  Giovanna 
d'Arco  constitue  un  véritable  événement  musical.  L'attrait  de  la 
curiosité  pourra  exciter  quelque  peu  l'attention  du  public,  mais 
nous  pensons  que  l'administration  du  théâtre  Italien  aurait  pu, 
même  dans  l'œuvre  du  maître  lombard,  choisir  un  opéra  plus 
digne  d'exciter  les  sympathies  générales. 

Maurice  GRAY. 


AUDITIONS  MUSICALES. 

Audition  de  fragments  du  Dante,  opéra  en  cinq  actes  de  M.  le  duc 
de  Massa  (salle  du  Conservatoire  impérial  de  musique,  le  28 
mars).  —  Audition  du  Jugement  dernier,  oratorio  en  trois 
parties,  paroles  et  musique  de  G.  Dupres  (  salle  du  cirque  de 
l'Impératrice,  le  28  mars). 

Deux  auditions  intéressantes  ont  eu  lieu  samedi  dernier,  l'une 
au  cirque  de  l'Impératrice,  dans  la  journée;  l'autre,  au  Conserva- 
toire, dans  la  soirée  :  toutes  deux  également  dignes  de  fixer  l'at- 
tention de  la  critique.  L'un  des  compositeurs,  grand  artiste,  l'autre 
grand  seigneur  ;  celui-là  ayant  un  nom  glorieux  au  théâtre,  celui-ci 
un  nom  illustre  dans  la  jeune  noblesse;  tous  deux  encore  portant 
le  poids  du  passé  qui  a  fait  dire  de  l'un  qu'il  fut  trop  grand  chan- 
teur pour  être  grand  compositeur,  et,  de  l'autre,  qu'il  a  assez  de 
noblesse  pour  se  passer  de  talent:  ce  sont  là  de  ces  opinions  sur 
les  hommes  et  les  choses  qui  font  trop  souvent  leur  chemin,  et 
le  devoir  de  la  critique  est  de  les  contrôler  et  de  se  prononcer 
sans  parti-pris  injuste. 

Déjà,  elle  a  eu  l'occasion  de  signaler,  il  y  a  deux  ans,  les  heu- 
reuses intentions  d'une  autre  œuvre  inédite  de  M.  le  duc  de  Massa, 
qui  fut  exécutée  dans  les  mêmes  conditions;  dans  les  deux  œu- 
vres,^rapprochement  qui  semblerait  indiquer  chez  le  compositeur 
une   aptitude  spéciale  pour  la  musique  de  ballet ,  —  ce  sont  deux 


DE  PARIS. 


107 


divertissements  de  danse  qui  ont  eu  le  plus  franc  et  le  plus  légi- 
time succès. 

Quoiqu'il  manquât  à  la  critique  l'épreuve  décisive  du  théâtre 
pour  se  prononcer  définitivement  sur  un  opéra  en  cinq  actes,  exé- 
cuté par  fragments  décousus,  sans  décors,  sans  costumes,  sans 
mise  en  scène,  sans  action ,  il  ne  nous  a  pas  semblé  que  la  musi- 
que du  Dante  fut  de  la  musique  d'opéra,  à  proprement  parler. 
Mettant  de  côté  les  morceaux  d'un  caractère  mixte,  et  pouvant 
s'approprier  au  concert  sans  être  déplacés  au  théâtre,  l'ensemble 
de  l'œuvre  nous  a  plutôt  fait  l'effet  d'un  oratorio  très-développé, 
auquel  il  ne  manque  que  quelques  récitatifs,  comme  traits  d'union 
entre  les  diverses  parties,  pour  être  complet. 

L'introduction  a  un  certain  caractère  de  grandeur  qui  prépare 
à  la  gravité  du  sujet  et  l'annonce  assez  pompeusement  ;  il  y  a 
dans  le  chœur  qui  le  suit  et  encadre  une  mélodie  un  peu  terne, 
une  habileté  heureuse  dans  le  dialogue  des  voix.  Comme  les  autres 
duos  qui  suivent,  le  premier  duo  (baryton  et  basse)  n'a  point  le 
caractère  scénique  indiqué  par  la  situation  ébauchée  dans  les  pa- 
roles; il  manque  d'action:  les  récitatifs  dialogues  manquent  du  ca- 
chet de  déclamation  lyrique  des  récitatifs  d'opéra  et  languissent 
dans  des  formules  vieillies  qu'une  harmonie  ingénieuse  ou  des 
modulations  inattendues  ne  tentent  même  point  de  rajeunir.  Il  faut 
rendre  justice  à  la  distinction  du  Sonnet  chanté  avec  une  grâce 
exquise  par  Mlle  Nilsson;  le  rhythme  en  est  gracieux,  l'accom- 
pagnement sobre  et  poétique;  le  public,  en  bissant  ce  morceau,  a 
partagé  ses  applaudissements  en  deux  parts  égales,  entre  le  com- 
positeur et  l'interprète,  ce  n'était  que  juste.  Des  deux  autres 
duos,  celui  du  troisième  acte,  entre  Dante  et  Béatrix,  renferme  le 
plus  d'intentions  scéniques;  il  y  a  même  dans  la  manière  dont  le 
compositeur  a  rendu  cette  scène  digne  du  théâtre,  oîi  Dante, 
pauvre  et  proscrit,  couvert  de  haillons,  épuisé  de  fatigue,  brisé 
d'amertume  et  de  douleur,  exhale  sa  plainte  désespérée  sous  la 
fenêtre  de  Béatrix,  et  reçoit  l'aumône  de  celle  qui  fut  sa  muse 
inspiratrice,  il  y  a,  dis-je,  dans  la  traduction  musicale  de  cette 
situation  essentiellement  dramatique  d'heureuses  tentatives  qui  in- 
diquent chez  M.  de  Massa  une  intuition,  encore  hésitante  pour- 
tant, des  effets  scéniques.  Si  ces  tentatives  étaient  plus  soutenues, 
plus  fréquentes  dans  l'œuvre  dont  nous  parlons,  nous  n'eussions 
pas  prononcé  le  mot  d'oratorio  en  parlant  dos  fragments  du 
Dante. 

Nous  avons  dit  que  les  airs  de  ballet  avaient  été  fort  goûtés  par 
le  public  très-brillant  qu'avait  attiré  cette  audition.  Il  faut  bien 
dire  que  les  rhythmes  excitants  produisent  plus  aisément  cette 
épanouissement  du  public ,  fatigué  d'andante  et  d'adagio.  On  ne 
doit  pas,  —  et  M.  le  duc  de  Massa  est  certainement  de  cet  avis, — 
attacher  une  grande  importance  au  succès  obtenu  par  de  trop  fa- 
ciles moyens;  la  tarentelle  que  l'on  a  bissée  est  cependant  piquante 
d'orchestration  et  de  couleur  ;  la  petite  flûte  découpe  le  motif  dan- 
sant, plein  de  gaieté  et  de  désinvolture,  sur  un  accompagnement 
des  cordes,  marquant  le  rhythme  avec  le  dos  de  l'archet: 

La  flûte  au  rire  aigu  raillait  le  violoncelle 
Qui  pleurait  sous  l'archet  ses  notes  de  cristal. 

Il  y  a,  dans  tout  le  fragment  symphonique  mêlé  de  chœurs  et 
de  récits  que  l'auteur  intitule  l'Enfer  et  le  Purgatoire,  des  beautés 
réelles,  l'unisson  des  basses,  par  exemple,  dont  l'effet  est  des  plus 
sinistres;  certainement  le  compositeur  se  sent  plus  d'une  fois  flé- 
chir sous  le  poids  de  son  sujet;  mais  il  y  a  dans  cette  page  les 
qualités  incontestables,  malgré  leur  inégalité,  d'un  compositeur 
symphonique. 

Si  nous  doutons  que  l'épreuve  du  théâtre  puisse  être  favorable 
à  l'œuvre  de  M.  le  duc  de  Massa,  nous  devons  avouer,  en  résumé, 
qu'elle  est  conçue  sévèrement  et  que  l'on  y  sent  surtout  une  con- 


viction laborieuse,  et,  en  quelque  sorte,  honnête,  qu'il  est  bon  de 
signaler  chez  un  compositeur  encore  jeune,  enveloppé  du  prestige 
du  rang  et  de  la  fortune,    et  qui  consacre  sa  jeunesse  h  des  ten- 
tatives artisli(jues,  honorables  et  sérieuses. 
* 

La  brochure  do  l'Oratorio  du  Jugement  dernier  de  M.  Duprez  est 
précédée  de  ces  quelques  lignes  plus  que  modestes  qui  préparent 
k  l'indulgence  pour  le  poëte  et  à  la  bienveillance  pour  le  musi- 
cien : 

«  Puisqu'il  m'est  ;i  peine  permis  de  faire  de  la  musique,  art  que 
cependant  j'ai  étudié  à  fond  dès  mon  enfance,  que  va-t-on  penser 
de  moi,  pour  m'être  permis  de  rimer  ce  canevas  musical,  inspiré 
par  le  tableau  de  Michel-Ange?  Je  dois  donc,  tout  d'al.^H'd,  dé- 
clarer ici  que  je  n'ai  aucune  prétention  à  la  poésie;  ce  n'est  qu'en 
paraphrasant  quelques  strophes  du  Dies  irœ  que  l'idée  m'est  venue 
de  faire  mon  Oratorio.  De  la  conception  à  l'exécution,  il  n'y  a  eu 
pour  moi  aucune  distance,  et  enfin  je  suis  arrivé  à  cet  innocent 
opuscule,  m'écriant  avec  Figaro  :  «  Aujourd'hui,  ce  qui  ne  vaut 
pas  la  peine  d'être  dit,  on  le  chante.  » 

Ce  qui  frappe  dans  cet  oratorio  de  dimension  très-considér.i  '■ . 
c'est  l'importance  des  récitatifs  dits  par  «  le  narrateur,  »  sorte 
d'explication  préliminaire  des  épisodes  de  l'œuvre  et  leur  grand 
style  ;  le  souffle  de  Gluck  anime  ces  récits,  véritables  modèles  de 
déclamation  lyrique,  que  faisait  ressortir  encore,  malgré  les  défail- 
lances de  sa  voix,  le  grand  chanteur-compositeur. 

La  plus  belle  page  chorale  de  l'Oratorio  est  sans  contredit  le 
chœur  général  : 

Jour  d'angoisse  et  de  misère... 

la  belle  phrase  syncopée  qui  en  forme  le  dénoûment,  et  la  détona- 
tion imposante  des  cuivres  lui  donnent  un  caractère  très-grandiose. 
A  côté  de  ce  chœur,  ceux  des  «  hommes  pieux  et  des  «  saintes 
femmes  »  n'ont  aucune  importance;  s'ils  sont  habilement  traités 
au  point  de  vue  spécial  des  voix,  les  développements  en  sont  assez 
insignifiants. 

Un  duo  et  un  trio  bouffes,  qui  avaient  été  répétés,  ont  été  sup- 
primés le  jour  de  l'exécution;  nous  n'en  connaissons  point  la  mu- 
sique, mais  les  paroles  passent  un  peu  les  bornes  de  la  puérilité 
et  le  librettiste  y  manque  un  peu  trop  de  respect  à  la  prosodie;  le 
compositeur  nous  semble  avoir  eu  raison  de  couper  ces  deux  hors- 
d'œuvre  comiques,  d'un  goût  contestable  dans  le  plan  solennel 
d'un  tel  oratorio. 

Le  chœur  des  «  Vierges  folles  »  est  d'une  originalité  foi-t  piquante, 
et  le  motif  majeur  principal  est  amené  d'une  manière  très-inatten- 
due par  les  éclats  de  rire  en  staccati  du  début  :  il  a  été  fort  bien 
chanté,  il  faut  le  dire,  par  les  élèves  de  l'Ecole  spéciale  de  chant. 

Je  n'insiste  pas  sur  la  troisième  partie,  qui  n'est  pas  à  la  hau- 
teur du  sujet  traité  ni  sur  le  chœur  final  qui  emprunte  aux  Italiens 
le  rhythme  brutal  et  démodé  de  leurs  marches  accompagnées  en 
batteries;  cela  gâte  beaucoup  l'impression  produite  par  le  fragment 
symphonique  avec  chœur  que  le  compositeur  intitule  Cataclysme.Nous 
avouons  avoir  été  frappé  par  la  hardiesse  de  cette  page,  oii,  k  côté 
de  naïvetés  et  de  violences  d'orchestre,  brillent,  comme  des  lueurs 
apocalyptiques,  des  harmonies  vraiment  inspirées  ;  les  cris  des 
damnés,  les  lamentations  des  femmes,  se  mêlent  au  déchirement 
des  mondes  éperdus  et  l'implacable  trompette  jette  dans  l'espace 
son  appel  funèbre,  irrévocable.  L'exécution  a  été  fort  satisfai- 
sante ;  Mlle  Fidès  est  belle  et  deviendra  une  chanteuse  de  race. 
M.  Maton  a  conduit  l'orchesti;^  en  maître. 

En  résumé,  cette  œuvre  bizarre,  inégale,  où  se  mêlent  sans 
ordre  le  puéril  et  le  grandiose,  le  terne  et  l'éclatant,  est,  à  coup 
sûr,  fort  intéressante;  la  troisième  audition  annoncée  mérite 
d'attirer  plus  de  monde  que  la  deuxième,  qui  n'a  pas  rempli  à 


108 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


moitié  la  salle.  L'oratorio  de  M.  G.  Duprez  commande,  en  outre, 
la  sympathie  de  tous  :  la  sincérité  du  grand  artiste  qui  l'a  conçue, 
et  qui  a  essayé  d'ajouter  à  la  gloire  du  créateur  celle  de  l'in- 
terprète, est  digne  de  tous  les  respects. 

Armand  GOUZIEN. 


BIBLIOGRAPHIE  fflUSIGÂLE. 

Sous  ce  titre:  Un  nouveau  système  d'acoustique  musicale,  notre 
excellent  confrère  M.  Gustave  Bertrand  a  publié  récemment,  dans 
la  Revue  moderne,  un  article  très-intéressant,  très-solide  et  très- 
raisonné  sur  les  doctrines  en  matière  d'acoustique  d'un  savant 
professeur  d'Heidelberg,  M.  Helmholtz.  Un  tiré  à  part  a  été  fait  de 
ce  travail  substantiel,  et  nous  demandons  la  permission  d'en  dire 
quelques  mots. 
.  M.  Helmholtz  est  l'inventeur  d'un  instrument  de  précision,  par 
le  moyen  duquel  il  a  obtenu  des  résultats  surprenants,  et  qu'il 
a  appelé  rèsonnateur.  «  Ces  résonnateurs,  dit  M.  Bertrand ,  sont 
des  sortes  d'entonnoirs  ou  de  pavillons  pyriformes,  de  grandeurs 
diverses,  qui  ont  la  propriété  de  ne  recevoir  et  de  ne  faire  vibrer 
chacun  que  l'unique  note  qui  correspond  à  leur  construction.  Si, 
par  exemple,  vous  vous  bouchez  hermétiquement  une  oreille  et 
que  vous  appliquiez  à  l'autre  le  bout  d'un  rèsonnateur,  tout  le 
fracas  d'un  orchestre  complet  serait  nul  et  non  avenu  pour  vous, 
dans  le  cas  oià  la  note  qui  lui  est  propre  serait  absente  de  l'ac- 
cord actuellement  exécuté:  mais  toutes  les  fois  que  cette  note  re- 
vient à  travers  l'harmonie,  elle  éclate  avec  force  dans  le  rèsonna- 
teur. . .  Bien  plus,  le  rèsonnateur,  qui  reste  sourd  à  tel  son  forte- 
ment entonné,  pourra  faire  entendre  une  des  harmoniques  de  ce 
son,  si  l'harmonique  est  précisément  la  note  du  rèsonnateur.  » 

Chacun  sait  ce  qu'on  appelle  en  acoustique  les  harmoniques  du 
son  :  faites  vibrer  fortement  une  corde  de  violon  ou  de  violon- 
celle, frappez  une  touche  de  piano,  et,  en  prêtant  attentivement 
l'oreille,  vous  entendrez  se  dégager  de  la  note  principale,  de  la 
note  produite,  plusieurs  autres  notes  plus  aiguës  et  beaucoup  plus 
faibles,  qui  escortent  en  quelque  sorte  la  première  et  qui  s'éche- 
lonnent, du  grave  à  l'aigu,  dans  un  ordre  toujours  semblable  ; 
les  quatre  premières  donnent  l'octave  supérieure,  puis  la  quinte 
au-dessus,  puis  la  seconde  octave,  puis  la  tierce  majeure  au-des- 
sus, et  sont,  par  conséquent,  en  consounance  parfaite  avec  le  son 
fondamental,  tandis  que  celles  qui  viennent  ensuite,  s'il  était 
donné  de  les  entendre  distinctement,  feraient  au  contraire  disso- 
nance avec  lui.  «  Ce  phénomène ,  dit  M.  Bertrand,  est  observé 
depuis  longtemps,  »  —  et,  en  effet,  on  sait  que  c'est  de  la  théorie 
des  harmoniques  du  son  que  Rameau  avait  déduit  son  système 
d'harmonie,  —  «  mais,  ajoute-t-il,  M.  Helmholtz  aura  eu  l'hon- 
neur d'en  donner  la  théorie  définitive,  et  d'abord  de  découvrir  le 
rôle  véritable  des  harmoniques  dont  on  ne  se  doutait  pas  :  les 
harmoniques  servent  à  colorer  le  son,  à  faire  le  timbre.  » 

Malheureusement,  M.  Helmholtz  ne  s'en  est  pas  tenu  à  cette  dé- 
couverte très-importante  du  rôle  des  harmoniques.  Après  avoir 
fait  de  l'acoustique,  il  a  voulu  faire  de  l'harmonie,  et  a  cherché 
à  tirer  celle-ci  des  lois  naturelles  du  son,  tout  comme  Rameau, 
qui  dans  cet  ordre  d'idées  s'était  complètement  trompé,  malgré 
son  génie,  l'harmonie  n'étant  pas,  en  effet,  une  science  puisée 
dans  la  nature,  mais  une  science  puisée  dans  les  sensations. 

M.  Bertrand  combat  —  et,  ce  me  semble,  victorieusement  —  le 
système  de  M.  Helmholtz  sous  ce  rîpport  ;  mais  une  analyse  de 
sa  discussion  me  mènerait  beaucoup  trop  loin ,  et  je  renvoie  à  sa 
brochure  ceux  que  cette  question  peut  intéresser.  Je  ne  veux  ce- 
pendant pas  l'abandonner  sans  m'associer  complètement  à  la  pro- 
testation formulée  par  notre  confrère  au  sujet  des  prétentions  or- 


dinaires de  messieurs  les  physiciens,  qui  prétendent  en  savoir  plus 
en  musique  que  nous-mêmes,  et  qui  ne  manquent  jamais  de  nous 
faire  la  leçon. 

«  C'est,  dit-il,  une  chose  unique,  en  vérité,  que  cette  prétention 
des  savants  de  dénier  la  compétence  des  musiciens  en  musique. 
On  ne  voit  rien  de  pareil  dans  les  autres  domaines,  et  jamais 
Euclide,  Descartes  ou  Leibnitz  n'ont  prétendu  imposer  aux  archi- 
tectes les  figures  simples  de  la  géométrie,  la  ligne  droite  inflexible, 
le  plein  cintre  toujours  régulier  ou  le  triangle  isocèle.  L'architec- 
ture a  gardé  le  droit  de  tirer  ses  lois  d'elle-même.  Je  ne  sache 
pas  non  plus  que  Newton  ait  signifié  à  Rembrandt  et  à  Murillo  sa 
découverte  du  spectre  solaire,  en  leur  intimant  l'ordre  de  ne  se 
servir  que  des  couleurs  simples.  La  peinture  continua  de  relever 
seulement  d'elle-même.  Supposons  qu'un  musicien,  fût-ce  Mozart 
ou  Beethoven  en  personne,  allât  trouver  un  physicien  et  lui  dît, 
par  exemple,  que  le  système  décimal  est  absurde,  qu'il  vaut  mieux 
compter  par  septaines,  puisque  la  gamme  a  sept  notes,  ni  plus  ni 
moins ...  Le  savant  sans  doute  hausserait  les  épaules  ;  à  peine 
daignerait-il  répondre  que  les  mathématiques  ont  leurs  lois,  leurs 
conditions  à  elles,  et  n'ont  que  faire  d'en  demander  à  la  musique. 
A  la  bonne  heure  !  C'est  un  axiome  assez  naturel,  assez  évident, 
ce  nous  semble,  que  chaque  ordre  de  choses  doit  chercher  en  lui- 
même  ses  lois  propres.  Pourquoi  la  musique  serait-elle  seule  à  ne 
pas  bénéficier  de  ce  principe?  Et  quand  un  savant,  fût-ce  Leib- 
nitz, Euler  ou  M.  Helmholtz,  vient  affirmer  que  les  lois  de  la 
musique  relèvent  de  tels  ou  tels  calculs  mathématiques,  de  telle 
ou  telle  expérience  physique,  et  qu'en  vertu  de  ces  constatations 
à  priori  la  quarte  sera  plus  belle  que  la  tierce,  et  l'accord  parfait 
mineur  moins  beau  que  l'accord  parfait  majeur,  pourquoi  les  mu- 
siciens, à  qui  leur  instinct  et  le  génie  unanime  des  maîtres  affir- 
ment le  contraire,  ne  se  moqueraient-ils  pas  de  cette  injonction? 
Ainsi  font-ils,  et  ils  font  bien.  » 
C'est  très-bien  dit,  cher  confrère. 

Arthur  POUGIN. 


CONCERTS  ET  AUDITIONS  lUSICÂIES  DE  LA  SEMAINE. 

**t  L'attrait  principal  du  onzième  concert  du  Conservatoire,  dimanche 
dernier,  était  l'exécution  du  septième  concerto  de  Rode,  par  Mme  Nor- 
man-Neruda.  Donner  de  la  vie  à  cette  pâle  et  froide  musique  par  un  jeu 
expressif,  charmer  par  la  seule  magie  du  son,  tel  est  le  tour  de  force 
accompli  par  l'éminente  artiste  ;  ne  pas  s'écarter  un  instant  du  style 
classique  et  sévère  qui  seul  convient  à  ces  sortes  de  compositions,  après 
avoir  vogué  en  pleine  fantaisie  avec  Mendelssohn  et  Yieuxfemps,  tel  est 
le  privilège  d'une  organisation  d'élite  où  la  précieuse  faculté  d'assimila- 
tion est  portée  au  plus  haut  degré.  Mme  Norman-Neruda  a  été  saluée  en 
terminant  par  une  tempête  d'applaudissements  et  rappelée .  —  Le  char- 
mant chœur  de  VArmide  de  Lulli,  Les  plaisirs  ont  choisi  pour  asile,  dont 
M.  Caron  a  très-bien  dit  le  solo,  la  magnifique  symphonie  en  la  majeur 
de  Mendelssohn,  le  chœur  des  chasseurs  d'Euryanthe,  de  Castil-Blaze  beau- 
coup plus  que  de  Weber,  puisque  trente  mesures  à  peine  appartiennent 
au  grand  maître  allemand,  et  la  splendide  ouverture  de  Léonore  (a"  1), 
complétaient  le  programme.  L'orchestre  a  été  vraiment  superbe  dans  la 
symphonie  de  Mendelssohn  ;  on  imaginerait  difficilement  une  exécution 
plus  parfaite,  plus  vitale,  plus  colorée . 

,*,  Le  troisième  concert  de  Rubinstein,  vendredi  dernier,  offrait  un 
intérêt  aussi  puissant  que  les  deux  premiers.  Cette  fois,  il  a  exécuté  son 
concerto  en  sol,  que  nous  préférons  à  celui  en  ré  mineur,  et  dont  l'an- 
dante  est  plein  de  poésie.  Le  grand  succès  de  la  soirée  a  été  pour  sa 
transcription  de  la  marche  turque  des  Ruines  d'Athènes,  où  il  arrive  par 
une  gradation  longue  et  insensible  à  un  si  surprenant  eifet  de  piano. 
On  a  bissé  ce  morceau,  qui  cependant  terminait  le  programme,  et  le 
grand  pianiste  l'a  remplacé  par  un  des  Waldsliicke  de  Schumann.  La 
salle  Herz  regorgeait  d'auditeurs,  dont  une  grande  partie  avait  dû 
rester  debout.  Rubinstein  a  été,  comme  d'ordinaire,  longuement  et  chaleu- 
reusement acclamé. 

^%  M.  Garcin  a  donné  jeudi  dernier,  à  la  salle  Herz,  un  concert  dont 
le  but  principal  était  de  faire  apprécier  une  fois  de  plus  son  concerto  de 
violon,  exécuté  par  lui  il  y  a  quelques  semaines  à  la  Société  des  Con- 


DE  PARIS. 


109 


certs  du  Conservatoire,  dont  il  est  membre.  Une  œuvre  de  cette  impor- 
tance mériterait  assurément  une  analyse  que  nous  ne  pouvons  lui  con- 
sacrer; nous  nous  boruerons  à  renvoyer  à  ce  qui  en  a  été  dit  dans  ces 
colonnes.  M.  Garcin,  un  des  bons  élèves  d'Ambroisc  Thomas,  a  puisé  à 
cette  excellente  école  un  faire  délicat  sans  être  maniéré,  un  goût  pur  qui 
le  préserve  des  écarts  où  les  jeunes  compositeurs  ne  sont  que  trop  ex- 
posés à  tomber  aujourd'hui.  Les  deux  premiers  morceaux  de  son  con- 
certo, Vandante  surtout,  sont  d'un  très-bon  effet;  le  finale  est  tourmenté 
et  pêche  par  le  plan.  Deux  autres  compositions  de  moindre  étendue, 
Mignon,  élégie,  et  Séguidille,  ont  valu  au  bénéficiaire  de  légitimes  applau- 
dissements. Mlle  Marimon,  MM.  Caron  et  Fissot,  qui  lui  prêtaient  leur 
concours,  n'ont  pas  été  moins  bien  accueillis. 

***  L'excellent  pianiste  du  roi  de  Portugal,  Frédéric  Boscowitz,  dont 
les  visiteurs  ds  la  Galerie  animée  des  Arts  libéraux  à  l'Exposition  uni- 
verselle, ont  certainement  gardé  le  souvenir,  donnait  mercredi  dernier, 
à  la  salle  Erard,  une  audition  de  ses  meilleures  et  plus  récentes  compo- 
sitions. Nous  y  avons  distingué  le  Chant  du  Matin  et  le  Chant  du  Soir, 
rêveries  contrastées,  empreintes  d'une  poésie  pénétrante;  une  brillante 
paraphrase  du  Trova'oro;  une  originale  Chanson  créole;  le  Trot  de  V Ama- 
zone, fantaisie  pittoresque  ;  enfin,  un  arrangement  de  la  Marche  turque 
de  Mozart,  d'un  effet  grandiose.  La  vogue  attend  sans  aucun  doute  ces 
charmants  morceaux  aux  harmonies  distinguées,  au  rhythme  toujours 
séduisant.  Fréd.  Boscowitz  est  un  maître  dans  l'art  difficile  de  faire 
chanter  le  piano  et  de  varier  la  gamme  de  sonorité  de  cet  instrument. 
Aussi,  le  succès  du  virtuose  a-t-il  égalé  relui  du  compositeur,  et  ce  n'est 
pas  peu  dire.  Par  son  style,  son  sentiment,  son  exécut'on  mécanique 
toute  personnelle,  cet  artiste  distingué  se  recommande  d'une  manière 
particulière  à  l'attention  du  public  musical  de  Londres,  où  il  va  donner 
une  série  de  concerts. 

t*i  M.  et  Mme  W.  Langhans  ont  donné,  mardi  dernier,  leur  concert 
annuel.  Ces  deux  excellents  artistes,  qui  ont  bien  mérité  de  l'art  en  fai- 
sant connaître  à  Paris  un  certain  nombre  d'oeuvres  applaudies  à  juste 
titre  en  Allemagne,  nous  ont  donné,  cette  fois  encore,  la  primeur  de 
plusieurs  auditions  :  un  quintette,  très-remarquable  sous  tous  les  rapports, 
de  Johannes  Brahms,  un  concerto  pathétique  de  Liszt,  pour  deux  pianos 
(Mme  Langhans  et  M.  Saint-Saëns),  qui,  croyons-nous,  ne  fanatisera 
personne,  et  une  Polonaise  solennelle  d'un  jeune  compositeur  russe  de 
grand  talent,  M.  d'Asantchewski  (également  pour  deux  pianos).  Nous 
applaudissons  sans  réserve  aux  deux  morceaux  de  piano  composés  et 
exécutés  par  Mme  Langhans,  Nocturne  et  Danse  guerrière,  qui  sortent  de 
l'ornière  banale  où  se  traînent  tant  de  compositions  analogues,  ainsi 
qu'à  la  sonate  pour  piano  et  violon  de  M.  Langhans,  à  laquelle,  cette  fois, 
les  vieux  maîtres  ont  servi  de  modèle,  et  qui  intéresse  à  un  haut  degré, 
sans  trop  affecter  d'archaïsme.  Mme  Godin  a  su  se  faire  applaudir  dans 
l'air  :  la  Prise  de  Jéricho,  et  dans  trois  mélodies  de  Schumann  qu'elle 
dit  à  ravir. 

i*^  Un  jeune  violoniste  compositeur,  M.  Pénavaire,  à  qui  nous  nous 
plaisons  à  reconnaître  un  talent  sérieux  et  de  bon  aloi,  a  donné  di- 
manche dernier  une  audition  de  ses  œuvres  à  la  salle  du  Grand-Orient. 
La  Pastorale- Ballet  pour  violon,  et  la  mélodie  Plus  ne  suis  ce  que  j'ai  été, 
fort  bien  dite  par  Mlle  de  Beaunay,  sont,  entre  autres,  deux  morceaux 
de  la  meilleure  venue  et  qui  ont  obtenu  un  succès  flatteur.  M.  Péna- 
vaire, qui  est  aussi  un  exécutant  de  premier  ordre,  nous  paraît  appelé 
à  un  brillant  avenir. 

:t*^:  Le  grand  festival  donné  samedi  de  l'autre  semaine,  par  Arban, 
dans  les  salons  du  Casino,  avait  attiré  une  foule  compacte;  comme  virtuose 
et  comme  compositeur,  Arban  a  obtenu  un  succès  éclatant.  Sa  nouvelle 
fantaisie  concertante  sur^/es  Vêpres  Siciliennes  a  produit  beaucoup  d'effet, 
et  dans  un  grand  solo  qu'il  jouait  pour  la  première  fois  l'excellent  ar- 
tiste a  provoqué  d'unanimes  applaudissements.  Un  accueil  non  moins 
chaleureux  a  été  fait  à  la  fantaisie  sur  les  Huguenots,  dont  la  Société 
des  Enfants  de  Lutèce  a  parfaitement  interprété  la  partie  chorale.  Enfin, 
un  des  principaux  altrails  de  cette  belle  soirée  a  été  l'exécution  d'un 
fragment  de  la  Saint-Julien  des  Ménétriers  (l'Entrée  de  la  noce),  de  Georges 
Kastner.  On  a  vivement  goûté  cette  œuvre  fraîche  et  mélodique,  inté- 
ressante au  plus  haut  degré  et  qui,  par  sa  nature  même,  semble  appe- 
lée à  entrer  dans  le  répertoire  courant  des  Sociétés  philharmoniques.  En 
résumé,  le  festival  de  samedi  dernier  a  été  de  tous  points  digne  de  son 
organisateur  et  des  solennités  pareilles  des  aimées  précédentes. 

»%  Les  soirées  musicales  de  notre  collaborateur  M.  Paul  Bernard,  qui 
n'étaient  d'abord  que  des  exercices  d'élèves,  sont  devenues  peu  à  peu 
de  véritables  concerts  où  se  donne  rendez-vous  une  assistance  brillante 
et  distinguée.  C'est  au  talent  de  plus  en  plus  accentué  des  jeunes  et  gra- 
cieuses élèves  qui  se  réunissent  dans  ce  salon,  c'est  au  mérite  et  à 
l'exqui-se  urbanité  de  leur  professeur,  qu'il  faut  demander  le  secret  de 
cet  empressement.  La  récente  et  dernière  soirée  dans  laquelle  Mme  Da- 
moreau,  Meillet,  Nadaud  se  sont  fait  entendre,  c'est-à-dire  chaleureuse- 
ment applaudir,  a  été  fort  remarquable  au  point  de  vue  de  l'exécution 
même  des  élèves.  Deux  ou  trois,  notamment,  sont  de  première  force,  et 
nous  leur  avons  entendu  jouer,  avec  une  réelle  maestria,  des  morceaux 
qui  présentent  de  sérieuses  difficultés,  la  Danse  des  Fées,  de  Prudent,  le 
Concert-Stuck,  de  Weber,  etc.  Dans  le  Rondo-Ca-pricioso  de  Mendelssohn, 
M.  Paul   Bernard  a  affirmé  une  fois  de  plus  cette  sûreté  de  goût,  cette 


netteté  de  jeu,  cette  élégance  de  phrasé  qui  ont  fait  sa  réputation,  comme 
artiste  et  comme  professeur  et  que  l'on  est  charmé  de  retrouver  chez 
ses  élèves. 

**»  La  nouvelle  mairie  du  3°  arrondissement  a  été  inaugurée  mer- 
credi dernier  par  une  soirée  musicale  de  bienfaisance,  dans  laquelle 
Mlles  Marie  Battu  et  Joséphine  Martin,  MM.  Délie  Sedie,  Ernest  Nathan, 
etc.,  ont  recueilli  d'unanimes  applaudissements.  La  musique  de  la  garde 
de  Paris  a  brillamment  complété  le  programme  de  cette  solennité. 

***.  Au  concert  qui  a  suivi,  cette  semaine,  à  la  Sorbonne,  la  séance 
annuelle  de  la  crèche  Sainte-Geneviève,  Mlle  Marie  Roze  a  interprété 
avec  son  gracieux  talent  une  cantate  de  circonstance  de  Mme  Mélanie 
Waldor  et  .Adrien  Boïeldieu.  Les  chœurs  étaient  chantés  par  des  or- 
phéonistes de  la  ville  de  Paris,  sous  l'intelligente  direction  de  M,  Alex. 
François.  Saënger  conduisait  l'orchestre.  Paroles,  musique  et  exécution 
ont  été  fort  goûtées. 

***  A  la  dernière  matinée  de  M.  Lebouc,  on  a  admiré  le  beau  et 
large  talent  du  célèbre  violoniste  Léonard,  qui  a  magistralement  inter- 
prété le  10=  quatuor  de  Beethoven  et  le  12°  quintette  d'OnsIow;  une 
sonate  de  Corelli,  orchestrée  par  Léonard,  a  produit  un  grand  effet. 

*%  Au  concert  donné  le  30  mars  dans  la  salle  Herz,  par  Fanfan  Be- 
noiton,  l'enfant  terrible  du  Vaudeville,  on  a  particulièrement  remarqué 
et  applaudi  la  grande  artiste  qui  s'est  si  promptement  imposée  à  l'ad- 
miration du  public  parisien,  Mme  Norman-Neruda,  dans  la  Fantaisie- 
Caprice  de  Vieuxtemps,  Mlle  Louise  Murer,  pianiste  d'un  très  grand  talent, 
élève  de  Prudent,  qui  a  joué  avec  beaucoup  de  charme  deux  morceaux 
de  son  maître,  et  un  autre  jeune  virtuose  qui  nous  paraît  appelé  à  un 
bel  avenir,  M.  Rendano;  il  a  exécuté  en  maître  le  Mouvement  perpétuel 
de  Weber. 

,**  L'éminenl  professeur  W.  Kruger  a  donné  dimanche  dernier  sa 
seconde  séance  d'élèves,  où  nous  avons  remarqué  de  jeunes  talents  qui 
donnent  plus  que  des  espérances.  Citons  en  première  ligne  les  enfants 
de  l'excellent  artiste,  et  la  jeune  Emma  Fumagalli,  qui  a  exécuté  l'allé- 
gro de  la  sonate  en  mi  bémol  de  Hummel  et  la  sonate  en  la  mineur  de 
P.-E.  Bach. 

***  Mme  Pierson-Bodin  vient  de  clore  la  saison  musicale  par  une  ma- 
tinée expressément  consacrée  à  ses  élèves.  Le  jeune  flûtiste  Corlien, 
Mme  Blouet-Bastin,  la  brillante  violoniste,  et  le  jeune  Fock,  élève  très- 
remarquable  de  CheviUard,  ont  contribué  à  l'éclat  de  cette  séance,  dans 
laquelle  on  a  particulièrement  applaudi  :  un  trio  de  Haydn,  les  variations 
de  Beethoven  sur  la  Flûte  enchantée,  un  morceau  pour  deux  pianos,  un 
concerto  d'Alard  et  les  variations  du  Toréador. 

*■**  Une  bonne  nouvelle  pour  le  diletlantisme  parisien  :  Vivier  donne 
son  concert,  le  mardi  21  de  ce  mois,  dans  les  salons  d'Erard.  Cela  dit 
tout  et  n'a  nul  besoin  de  commentaires. 

4*^.  Nous  devons  également  une  mention  spéciale  au  quatrième  concert 
de  musique  de  chambre  que  donnera  Ant.  Rubinstein,  après-demain, 
mardi,  chez  Herz. 

,**  La  Société  des  concerts  du  Conservatoire  donne  aujourd'hui  son 
douzième  concert,  dont  voici  le  programme  :  symphonie  en  la  de  Men- 
delssohn ;  chœur  d'Armide  de  Lulli  (solo  chanté  par  M.  Caron)  ;  concerto 
pour  piano  en  mi  bémol  de  Beethoven,  exécuté  par  M.  Alphonse  Du- 
vernoy;  chœur  des  chasseurs  d'Euryanthe,  de  Weber;  ouverture  de 
Léonore  de  Beethoven. 

**,Aujouid'hui  dimanche,  à  2  h.,  au  Cirque  Napoléon,  23°  concert  de 
musique  classique,  sous  la  direction  de  J.Pasdeloup.  En  voici  le  programme: 
1°  9°  symphonie  (première  partie),  allegro  maestoso,  adagio  canlabile, 
scherzo,  de  Beethoven  ;  —  2°  Andante  et  menuet  de  la  symphonie  en  mi 
bémol  de  Mozart;  — 3°  Fragment  de  Roméo  et  Juliette  (première  audition), 
le  jardin  de  Capulet,  scène  d'amour,  de  H.  Berlioz;— 4°  Romance  en  fa, 
Prélude  et  Gavotte,  pour  violon,  de  Beethoven  et  J.-S.  Bach,  exécutés 
par  Mme  Norman-Neruda; —  5°  Invitation  à  la  valse,  orchestrée  par  Ber- 
lioz, de  Weber.—  Le  vingt-quatrième  et  dernier  concert  populaire  aura 
lieu  dimanche  19  avril  1868.  —  Vendredi-Saint,  concert  spirituel  à  8 
heures  i/%  du  soir,  avec  le  concours  de  Mlle  Nilsson  et  de  Faure. 

*%  Notre  correspondant  de  Dieppe  nous  envoie  le  compte-rendu  d'un 
fort  beau  concert  dans  lequel  Mme  Peudefer  et  MM.  Hayet  et  Florenza 
ont  obtenu  un  brillant  succès.  —  Parmi  les  morceaux  les  plus  applaudis 
on  nous  cite  un    duo  de  Rossini,  et  un  Ave  maris  Stella  de  Vervoitte. 

***  Une  jeune  cantatrice  de  beaucoup  d'avenir,  Mlle  Cécile  Dolmetsch, 
s'est  fait  entendre  à  Nantes  et  à  Angers,  dans  deux  concerts,  où  sa  voix 
et  sa  méthode  ont  été  très-appréciées.  Elle  était  secondée  par  son  père, 
excellent  pianiste-compositeur,  auteur  de  remarquables  transcriptions 
du  Prophète,  du  Pardon  de  Ploérmel  et  de  l'Africaine,  et  qui  a  eu  sa 
part  d'applaudissements  dans  l'interprétation  de  ses  diverses  œuvres. 

jf*if  Le  23  de  ce  mois,  l'excellent  pianiste  Jacques  Baur  donnera  son 
concert  annuel  dans  les  salons  d'Erard.  Dans  cette  soirée,  qui  s'annonce 
comme  devant  être  une  des  plus  brillantes  de  la  saison,  le  bénéficiaire, 
élève  de  prédilection  de  Listz,  fera  entendre  pour  la  première  fois  sa 
grande  transcription  du  chœur  des  évoques  de  l' Africaine . 


ifO 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 


,**  Le  théâtre  impérial  de  l'Opéra  a  donné,  cette  semaine,  trois  re- 
présentations d'Hamlet. 

^*^  Dimanche  dernier,  l'Africaine  a  été  représentée.  Mme  Marie 
Sass  y  a  rencontré  son  triomphe  habituel ,  et  les  bravos  enthousiastes 
n'ont  pas  manqué  à  Mlle  Levielly,  Morère,  Belval,  David,  Gaspard , 
Castelmary  et  aux  autres  interprètes  du  chef-d'œuvre.  —  Lorsque  le 
congé  de  Faure  et  le  départ  de  Mlle  Nilsson  pour  Londres  interrompront 
les  représentations  A'Hamlet ,  l'Opéra  reprendra  Herculanum,  avec  le 
nouveau   ténor  Colin,  MM.   Obin  et  Belval,  Mlles  Battu  et  Bloch. 

4»»A  ce  théâtre,  il  est  question,  pour  l'automne,  de  la  reprise  de  l'^^r- 
mide,  de  Gluck,  avec  Mme  Sass  ainsi  que  de  celle  de  la  Reine  de  Chy- 
pre, pour  Mme  Gueymard. 

if:*^  Notre  excellent  baryton  Faure  vient  de  recevoir  de  S.  M.  l'Empe- 
reur deux  magnifiques  fusils  de  chasse. 

^*^,  Les  Dragons  de  Villars  viennent  d'être  mis  à  l'étude  à  l'Opéra-Co- 
mique  :  le  plus  grand  soin  sera  apporté  à  la  reprise  de  cet  opéra  popu- 
laire. 

,*«  Le  théâtre  Italien  a  donné,  cette  semaine,  deux  représentations  de 
Giovanna  d'.irco.  Mlle  Adelina  l'atti  y  a  retrouvé  le  succès  et  les  bravos  de 
la  première.  A  l'une  de  ces  représentations,  Mlle  Carlolta  Patli,  accom- 
pagnée de  M.  Scola,  dont  la  santé  est  rétablie,  applaudissait  sa  sœur. 
Les  débuts  des  Tiberini  se  poursuivent  de  la  manière  la  plus  heureuse 
dans  /  Purilani. 

,j*t  Au  théâtre  Italien,  le  Stabat  Mater  de  Rossini  sera  chanté  jeudi  et 
vendredi  prochain.  La  représentation  de  ce  soir.  Il  Barbiere,  est  donnée 
au  bénéfice  du  maestro  Alary. 

^*^  Roméo  et  Juliette  a  retrouvé  à  la  salle  Ventadour  l'éclatant  succès 
de  la  place  du  Châtelet.  Devant  un  brillant  auditoire,  Mme  Carvalho  a 
chanté  comme  le  jour  où  la  tendre  et  poétique  Juhette  se  présentait  pour 
la  première  fois  aux  sympathies  du  public.  Elle  a  donné  comme  une 
consécration  nouvelle  à  ce  rôle  qu'elle  a  fait  sien;  aussi  la  soirée  de 
vendredi  dernier  comptera-t-elle  parmi  les  plus  glorieuses  qui  aient  .si- 
gnalé la  carrière  de  la  grande  artiste.  Mlle  Daram,  Massy,  Troy,  Barré 
ont  parfaitement  traduit  l'œuvre  de  Gounod,  dont  l'exécution  générale  a 
été  irréprochable. 

if*^  Mlle  Schneider  devant  prendre  son  congé  prochainement,  le  public 
se  presse  aux  dernières  représentations  que  la  Grande  Duclrsse,  toujours 
victorieuse,  toujours  aussi  applaudie,  doit  donner  avant  sa  disparition 
momentanée  du  boulevard  Montmartre.  Puis  viendra  le  Pont  des  Sou- 
pirs, dont  plusieurs  tableaux,  paroles  et  musique,  ont  été  en  grande 
partie  refaits.  —  11  est  également  question  à  ce  théâtre  d'un  ouvrage 
inédit  de  Grisar. 

,*»  Mme  Ugalde  a  repris,  dans  Geneviève  de  Brabanl  aux  Menus-Plai- 
sirs (100"  représentation),  son  rôle  de  Drogan. 

^*^  Mme  Marie  Sass  a  donné,  ces  jours-ri,  trois  représentations  de 
l'Africaine,  à  Nîmes.  Depuis  son  entrée  jusqu'à  la  fin  du  cinquième  acte, 
l'ovation  n'a  pas  cessé.  Le  l"  avril,  elle  a  clianté  avec  un  égal  succès 
son  beau  rôle  de  Selika  à  Montpellier.  C'est  le  13  de  ce  mois  que  les 
représentations  de  Mme  Sass  commenceront  à  Biuxelles. 

»*,>  Le  théâtre  du  Kursaal  d'Ems  jouera,  cette  année,  l'opérette,  et 
donnera  notamment  la  Princesse  de  Trébizonde,  deux  actes  de  MM.  Tréfeu 
et  Nuitter,  musique  d'Oifenbach.  Au  nombre  des  artistes  engagés,  nous 
nommerons  :  Bonnet,  Gourdon,  Jean-Paul,  Derval  (des  Fantaisies'-Pari- 
siennes);  Mmes  Lovato,  Decroix,  Labarre  et  Anna  Vangel. 

,**  Les  Dragons  de  Villars,  fort  bien  chantés  par  Mlle  Bleau,  font,  en 
ce  moment,  les  beaux  soirs  du  théâtre  d'Avignon.  Le  public  accueille  par 
de  sympathiques  bravos  la  pièce  et  sa  principale  interprète.  Mme  Van- 
denheuven  donne,  sur  cette  scène,  des  représentations  qui  sont  très- 
suivies. 

^*^  Les  Dragons  de  Villars  sont  également  représentés  à  la  Haye,  avec 
un  succès  très-franc. 

^*^  Le  théâtre  de  Boulogne-sur-Mer  a  représenté  récemment  une  opé- 
rette en  un  acte,  paroles  de  M.  Eugène  Leroux,  musique  d'Alfred  Ser- 
gent, intitulée  Sous  un  balcon. 

***  Comme  cette  dernière  ville,  Bordeaux  s'est  offert  cette  semaine  un 
opéra  de  son  cru  :  Quand  les  chats  n'y  sont  pas,  de  MM.  Brunet  et  Lo- 
doïs  Lataste. 

**,s  Mlle  Angèle  Cordier,  dont  le  talent  et  les  succès  sont  bien  connus 
de  nos  lecteurs,  vient  d'être  engagée  au  théâtre  de  Barcelone. 

»**  Le  public  du  Grand-Théâtre  de  Lille  a  fait  hommage  à  Mme  de 


Taisy,    l'ex-artiste   de   l'Opéra,  d'un  bracelet    en   or,  enrichi    de  perles 
fines  et  de  diamants. 

:f*»  Mlle  Léa  Karl,  que  l'on  a  entendue  et  applaudie  à  Marseille  au 
Grand-Théâtre,  et  dont  noti'e  confrère  Benedict  a  fait  un  pompeux  éloge 
dans  le  Sémaphore,  vient  de  donner  à  Amiens  une  représentation  de  la 
Juive.  Elle  a  joué  et  chanté  le  rôle  de  Rachel  de  manière  à  satisfaire  les 
plus  difficiles;  aussi  les  applaudissements  ne  lui  ont  pa-s  faitfau!e,  et 
une  seconde  représentation  du  même  opéra  lui  a  été  demandée. 

/„,  Grâce  au  talent  et  à  la  beauté  de  Mme  Goby-Fontanel,  Offenbach 
s'est  emparé  du  théâtre  de  Brest  et  y  règne  sans  partage,  avec  la  Belle 
Hélène,  la  Vie  parisienne  et  la  Grande- Duchesse.  Salles  combles,  ovations, 
faveur  populaire,  etc. 

^*4:  M.  Ricci,  qui  n'avait  pu  s'entendre  avec  M.  Bagier,  au  sujet  de 
son  nouvel  opéra  inédit,  vient,  dit -on,  de  traiter  avec  M.  le  comte  de 
Guédéonoff,  intendant  drs  théâtres  impériaux  de  Saint-Pétersbourg,  pour 
la  représentation  de  son  œuvre  dans  cette  ville.  Il  reçoit  une  prime  de 
20,000  francs,  sans  préjudice  de  ses  droits  d'auteur. 

»*„;  M.  Ernest  Martin,  autrefois  ténor  au  théâtre  Lyrique,  a  pris  la 
direction  des  Petits-Bouffes-Saint-Antoine,  et  il  se  propose,  à  partir  du 
1"''  .septembre  prochain,  d'implanter  l'opérette  dans  le  quartier  de  la 
Bastille. 


NOUVELLES  DIVERSES. 

^*j^  Mme  Georges  Kastner  vient  de  faire  don  d'une  .somme  de  S,000 
francs  à  l'Association  des  artistes  musiciens,  et  MM.  Kastner  fils  ont  rerais 
300  francs  pour  assurer  leurs  droits  d'associés  perpétuels  de  l'œuvre  fon- 
dée par  le  baron  Taylor  et  dont  leur  père  était  le  vice-président. 

^,*jf  La  messe  au  profit  de  l'Association  des  artistes  musiciens  a  pro- 
duit plus  de  6,000  francs. 

^*^  Les  examens  des  classes  de  chant  d'opéra  et  d'opéra-comique  ont 
commencé  au  Conscrvaioirj  la  semaine  dernière  et  se  sont  terminés  cette 
semaine. 

.f,*,f  On  annonce  l'arrivée  à  Paris  : 

—  De  Mme  Volpini,  l'éminente  cantatrice  qui  vient  de  remporter  d'é- 
clatants triomphes  à  Saint-Pétersbourg; 

—  Du  pianiste-compositeur  Mortier  de  Fontaine,  précédé  d'une  grande 
réputation  solidement  établie  à  l'étranger; 

—  Du  célèbre  chorégraphe  Saint-Léon,  de  retour  d'Italie. 

jt*,^  M.  de  Lassabathie,  administrateur  du  Conservatoire,  a  été  frappé 
d'un  coup  de  sang,  samedi  soir  de  l'autre  semaine,  pendant  l'audition  du 
Dante  de  M.  le  duc  de  Massa,  à  laquelle  il  assitait  dans  la  loge  de  S.A. 
la  princesse  Mathilde.  Nous  sommes  heureux  d'annoncer  que  l'état  du 
malade  s'est  sensiblement  amélioré,  il  est  maintenant  hors  de  danger,  et 
l'on  est  en  droit  de  compter  sur  son  prompt  et  complet  rétablissement. 

,j*,^  On  annonce,  pour  le  .'amedi  saint  M  avril  courant,  une  solennité 
musicale  qui  nous  semble  pré.senter  un  intérêt  tout  particulier.  Diverses 
sociétés  chorales  auxquelles  s'adjoignent  les  enfants  des  maîtrises  des 
principales  paroisses  de  Paris,  doivent  exécuter,  dans  l'église  de  Saint- 
Roch,  à  8  heures  du  soir,  le  Stabat  Mater  de  Palestrina,  qui  n'a  jamais  été 
entendu  à  Paris.  C'est  une  excellente  idée  d'appliquer  les  masses  chora- 
les à  l'exécution  de  semblables  chefs-d'œuvre.  C'est  la  preuve  de  l'édu- 
cation musicale  des  orphéonistes,  c'est  la  preuve  surtout  qu'ils  sont  aptes 
à  comprendre  autre  chose  que  des  chœurs  composés  en  quelque  sorte 
spécialement  pour  eux.  C'est  également  une  indication  du  parti  sérieux 
qu'on  peut  tirer  de  ces  forces  intelligentes,  chaque  fois  qu'il  s'agira  d'in- 
terpréter les  pages  des  grands  maîtres.  Nous  applaudissons  de  grand 
cœur  à  cette  tentative  organisée  par  le  Comité  des  intérêts  orphéoniques, 
présidé  par  51.  E.  Delaporte. 

^*jf  Le  dimanche  de  Pâques,  sera  exécutée,  à  Saint-Eustache,  sous  la 
direction  de  M.  Hurand,  maître  de  chapelle,  une  messe  en  mu^ique, 
choeur  et  solos,  de  M.  François  Schwab,  de  Strasbourg,  compositeur  et 
critique  musical  du  Courrier  du  Bas-Rhin,  bien  connu  de  nos  lecteurs. 
On  parle  avec  grand  éloge  de  cette  œuvre. 

S:**  Aujourd'hui  dimanche,  3  avril  (dimanche  des  Rameaux),  sera 
exécuté  à  Saint-Eustache,  à  4  heures  de  l'après-midi  (après  vêpres),  un 
Stabat  Mater  de  M.  Bourgault-Ducoudray,  grand  prix  de  Rome.  Un  per- 
sonnel choral  composé  de  quatre-vingts  exécutants  interprétera  cet  ou- 
vrage, sous  la  direction  de  M.  Hurand,  maître  de  chapelle.  La  partie  de 
grand  orgue  sera  jouée  par  M.  Ed.  Batiste. 

^*,^  Le  vendredi-saint  à  une  heure,  on  entendra,  à  l'église  Sainte- 
Clotilde,  les  Sept  paroles  du  Christ  mises  en  musique  avec  orchestre  par 
Th.  Dubois  qui  en  dirigera  l'exécution.  Les  soli  seront  chantés  par 
MM.  Villaret,  Caron  et  Mosbrugger. 

j^*^  Vendredi  prochain,  à  midi,  dans  l'église  Saint-Roch,  l'oratorio 
d'Haydn  :  Les  sept  paroles  de  Noire-Seigneur,  sera  exécuté  sous  la  direc- 
tion de  M.  Ch.  Yervoitte. 


m  PARIS 


m 


***  Jeudi  dernier  a  eu  lieu  à  Maubciige  l'iiiaugiiration  du  grand  or- 
gue construit  dans  les  ateliers  de  la  SocicHci  anonyme  des  grandes  or- 
gues Merklin-Schijtze.  Cet  instrument  à  trois  claviers,  dolé  do  tous  les 
perfectionnements  modernes,  produit  ries  effets  de  sonorité  qui  ont  cap- 
tivé l'auditoire  nombreux  et  choisi.  Les  artistes  appelés  à  faire  apprécier 
les  ressources  de  cet  orgue  magnifique  étaient  :  IMM.  Bencteux,  l'organiste 
titulaire;  Dubois,  l'éminent  organiste  de  Bruxelles,  et  Grison,  l'organiste 
de  la  métropole  de  Reims,  qui  ont  tous  fait  preuve  d'un  talent  remar- 
quable, aussi  bien  comme  compositeurs  que  comme  exécutants.  Une 
toute  jeune  demoiselle,  Maria  Saunier,  fille  de  l'organiste  do  Sainte-Ca- 
therine de  Lille,  a  pris  part  à  cette  fête  musicale  et  a  joué  d'une  ma- 
nière très-correcte,  une  méditation  de  Lefébure-Wély  et  un  offertoire 
d'Ed.  Batiste.  Le  public,  aussi  bien  que  les  artistes  présents,  ont  fait  à 
cette  jeune  organiste  une  ovation  qui  doit  l'encourager  à  persévérer  dans 
cette  carrière. 

»**  M  A.  Chaùvet,  l'organiste  actuel  de  Saint-Merri,  vient  d'être 
appelé  aux  mêmes  fonctions  à  la  nouvelle  église  de  la  Trinité,  dont 
l'orgue  ne  sera  terminé  qu'au  commencement  de  juin.  —  Puisqu'il  est 
question  de  cet  excellent  artiste,  nous  recommandons  à  nos  lecteurs  ses 
deux  dernières  publications  pour  piano  :  tS  Etudes  préparatoires  aux 
œuvres  de  Bach  et  5  feuillets  d'album,  qui  ont  paru  chez  F.  Mackar,  et 
oii  on  retrouve  l'imagination  vive  et  le  .savoir  profond  qui  distinguent 
ses  autres  compositions. 

^*jf,  MM.  E.  Gérard  et  C"  (ancienne  maison  Meissonnier)  vont  faire 
paraître  successivement  les  œuvres  d'Antoine  Rubinstein,  dont  ils  se  sont 
rendus  acquéreurs  pour  la  France,  la  Belgique,  rEspa,gne  et  l'Italie.  La 
musique  d'orchestre,  la  musique  de  chant  et  la  presque  totalité  des 
pièces  spéciales  pour  le  piano,  qui  composent  l'œuvre  déjà  si  considé- 
rable de  ce  maître,  deviennent  ainsi  la  propriété  de  la  maison  Gérard. 

^*^  M.  Âloys  Kunc  vient  de  publier  chez  l'éditeur  Jules  Heinz,  VEcrin, 
de  l'organiste,  bO  morceaux  non  difficiles,  extraits  des  œuvres  de 
Mozart,  Beethoven,  Haydn,  Haendel,  etc.,  pour  orgue  ou  harmonium, 
pouvant  servir  aux  différentes  parties  de  l'office  du  malin,  élévations, 
offertoires,  communions,  etc.,  i  suites.  Ces  recueils  nous  semblent  être 
destinés  à  rendre  de  grands  services  aux  jeunes  artistes,  qui,  encore 
trop  novices  dans  l'art  d'improviser,  auraient  le  bon  esprit  d'y  faire  un 
choix  de  morceaux  à  la  portée  de  leur  degré  de  force  comme  organistes. 

^*,  Au  concert  donné  la  semaine  dernière  par  le  pianiste  composi- 
teur Esnest  Stœger,  on  a  particulièrement  applaudi  ses  trois  nouvelles 
compositions  :  Iinpromptu-schirzo,  Prélude  et  Nucellette.  Le  succès  de  ces 
charmants  morceaiix,  dont  la  couleur  poétique  et  la  distinction  frappent 
tout  d'abord,  n'est  du  reste  plus  à  faire.  Dès  leur  apparition  la  vogue 
s'y  est  attachée  et  ils  sont  joués  partout. 

:t:'%  La  liste  des  concours  et  festivals  orphéoniques  est  ainsi  fixée, 
quant  à  présent,  pour  la  campagne  courante  :  Melun  et  Houilles,  10  mai; 
Rouen,  2i  mai;  Versailles,  2-i  mai  ;  Metz  et  Rodez,  31  mai.  —  Chartres, 
7  juin;  Choisy-le-Roi,  21  juin;  Château-Thierry,  28  juin.  —  Senlis,  12 
juillet;  Hazebrouck,  12  et  19  juillet,  Grenoble,  15  août.— 11  n'y  a  encore 
rien  de  fixé  définitivement  au  sujet  des  fêtes  musicales  qui  auront  lien 
au  Havre  pendant  son  Exposition  maritime. 

»*,  Le  cours  professe  à  la  mairie  du  onzième  arrondissement  par  M.  A. 
Elwart,  pour  les  jeunes  filles,  n'aura  lieu  que  le  lundi  de  Qua.simodo, 
à  cause  des  solennités  de  la  semaine  sainte.  On  s'inscrit  au  secrétariat 
de  la  mairie  du  Prince-Eugène. 

**.:it  A  l'occasion  de  l'inauguration  de  la  statue  qui  doit  être  élevée  à 
Antoine  Watteau,  dans  sa  ville  natale,  la  Société  impériale  d'agricul- 
ture de  Valenciennes  met  au  concours  les  paroles  d'une  cantate,  qui 
comportera  trois  strophes  au  moins  et  quatre  au  plus.  Une  médaille  d'or 
sera  décernée  à  l'auteur  de  la  composition  qui  sera  Jugée  la  meilleure. 
Les  pièces  porteront  une  épigraphe,  laquelle  sera  reproduite  dans  un 
bulletin  cacheté  contenant  les  nom,  prénoms  et  domicile  de  l'auteur. 
Elles  devront  être  adressées  franco  au  secrétaire-général  de  la  Société, 
au  plus  tard  le  IS  mai  prochain,  terme  de  rigueur. 

^*^  Le  Pré  Catelan,  au  bois  de  Boulogne,  inaugurera  ses  fêles  et  con- 
certs le  12  avril,  dimanche  de  Pâqut'.s.  Le  programme  de  la  saison  d'été 
de  ce  jardin  devenu  le  salon  de  la  bonne  société  parisienne,  est  des  plus 
remarquables  :  concerts  d'harmonie  par  la  musique  des  zouaves  de  la 
garde;  représentations  dramatiques  au  théâtre  des  Fleurs;  bal  d'enfants 
sur  le  plateau  des  chênes;  expériences  scientifiques  d'aérostation  et  de 
télégraphie  aérienne  sur  la  grande  pelouse;  courses  et  jeux  divers. 

»*■«  M.  Barsotti,  organiste  et  pianiste  remarquable,  auteur  de  composi- 
tions estimées  et  d'une  Méthode  de  rtiusique  vocale,  ancien  directeur-fon- 
dateur du  Conservatoire  de  musique  de  Marseille,  vient  de  mourir  dans 
cette  ville  à  l'âge  de  quatre-vingts  ans.  François  Bazin  et  Reyer  ont  été 
ses  élèves. 


ÉTRANGER 


if:"-^  Londres.  —  Her  Majesty's  Opéra  (tel  est  le  nom  légèrement  modi- 
fié de  l'entreprise  de  M.  Mapleson),  a  fait  son  ouverture  au  théâtre   de 


Drury-Lane  le  Samedi  28  mars  dernier,  avec  Lucrezia  Borgia.  Mmes 
Tietjens,  Trebelli-Bottini,  MM.  Fraschini,  Santley  et  Foli  rempli.ssaient 
les  principaux  rôles.  C'est  dire  que  la  représentation  a  été  très-brillante. 
Fraschini  particulièrement,  qui  débutait,  ou  plus  exactcmentqui  rentrait 
après  vingt  et  un  ans  d'absence,  a  été  admirable  dans  le  rôle  do  Gennaro. 
Mardi,  on  a  donné  Semiramide  avec  Mme  Tietjens,  et  jeudi  Lucrezia 
Borgia.  -■  Le  31,  Covent-Garden  a  ouvert  ses  portes.  Norma  avec  Mmes 
Fricci  et  Shcrrington,  MM.  Naudin  et  Capponi  a  inauguré  brillamment 
la  saison;  le  succès  de  la  soirée  a  été  pour  l'admirable  Mme  Fricci.  Don 
Carlos,  avec  les  mêmes  artistes,  a  été  joué  jeudi.  —  Le  23,  la  Philhar- 
monie Society  a-donné  le  premier  de  ses  huit  concerts.  .Mme  Schumann 
y  a  obtenu  un  très-grand  succès  avec  le  concerto  en  sol  de  son  mari. 

***-  Bruxelles.  —  Cent  partitions  sont  parvenues  à  la  commission  pro- 
visoire instituée  pour  le  grand  concours  de  musique  sacrée  organi.sé  par 
la  maison  Schott,  sous  la  protection  du  gouvernement  belge.  Sur  ce 
nombre,  dix-huit  seulement  proviennent  de  compositeure  nationaux.  Un 
travail  préparatoire,  consistant  dans  l'examen  de  celles  de  ces  œuvres  qui 
pourront  convenir  au  culte  catholique,  sera  fait  incessamment  par  cette 
commission,  après  quoi  le  jury  définitif  statuera   sur   les  récompenses. 

*%  Berlin.  —  Une  grande  activité  règne  toujours  à  l'Opéra;  on  a 
joué  la  semaine  dernière  Fra  Diavolo,  Violetta,  les  huguenots,  Joseph  et 
les  Diamants  de  la  Couronne.  Nieniann,  Mmes  Lucca  et  Artôt  se  sont 
partagé  le  poids  assez  lourd  de  ce  répertoire.  —  Un  concert  organisé  sous 
le  patronage  de  Leurs  Majestés,  et  auquel  ont  pris  part  exclusivement  des 
membres  de  l'aristocratie  prussienne,  a  été  donné  le  24  mars  au  béné- 
fice des  pauvres.  La  baronne  de  Schleinitz,  la  comtesse  Pourtalès, 
MM.  de  Keudell,  de  Saldern,  etc.,  ont  exécuté  en  vrais  artistes  diverses 
œuvres  classiques.  Un  concert  analogue  est  annoncé  pour  le  3  avril.  — 
Le  maître  de  chapelle  Henri  Dorn.a  célébré,  le  21  mars,  son  40°' anni- 
versaire de  chef  d'orchestre  de  l'Opéra.  Les  artistes  de  ce  théâtre  lui 
ont  offert  à  cette  occasion  un  magnifique  buste  de  Beethoven,  et  le 
comte  de  Rœdern,  intendant  de  la  musique  de  la  Cour,  lui  a  remis,  au 
nom  du  roi,  les  insignes  de  l'ordre  de  la  Couronne. 

:^*^  Cologne.  —  Le  festival  bas-rhénan  est  annoncé  dans  cette  ville 
pour  les  31   mai,  1"  et  2  juin.  Le  programme  n'est  pas  encore  publié. 

***  Dessau.  —  L'Africaine  vient  d'être  donnée  pour  la  première  fois 
avec  un  succès  splendide. 

^**  Leipzig.  —  Le  vingtième  et  dernier  concert  du  Gewandhaus  coïn- 
cidant avec  la  date  de  la  mort  de  Beethoven  (26  mars),  le  programme  se 
composait  exclusivement  d'œuvres  de  l'illustre- maître  :  fragments  de  la 
messe  en  ré,  fantaisie  pour  piano,  orchestre  et  chœurs,  exécutée  par  le 
chef  d'orchestre  Cari  Reinecke,  et  symphonie  avec  chœurs. 

^*^  Munich.—  La  première  nouveauté  donnée  au  théâtre  populaire  sera 
la  Grande- Duchesse'  de  Gérolslein,  avec  l'excellente  Mlle  Emilie  Schrœder 
dans  le  rôle  principal. 

^*^  Milan.  —  Don  Carlos,  avec  Fancelli,  Junca,  Mmes  Stoltz  et  Destin, 
a  obtenu  à  la  Scala  un  grand  succès. 

***  Barcilone.  —  Fra-Diavolo,  avec  Mme  Rey-Balla  et  Stagno,  dont  le 
zèle  à  tous  deux  semble  depuis  longtemps  défier  la  fatigue,  a  été  très- 
applaudi.— La  junta  municipale  a  fait  choix,  pour  la  direction  du  Liceo, 
de  M.  Rovira,  connu  déjà  avantageusement  dans  le  monde  théâtral. 
M.  Rovira  a  rengagé  pour  l'année  prochaine  le  ténor  Steger,  qui  malheu- 
reusemeut  a  été  fort  souvent  malade  cette  saison,  et  dont  l'emploi  a  été 
tenu  en  grande  partie  par  Stagno. 

**,t  Lisbonne.  —  Un  compositeur  portugais,  le  violoniste  Noronha, 
vient  de  faire  représenter,  avec  un  brillant  succès,  un  opéra  dont  il  est 
l'auteur,  intitulé  l'^rco  di  Santa  Anna,  et  qui  a  été  chanté  par  la  Mas- 
sini,  Bulterihi  et  Mendierez. 


CONCERTS  ET  AUDITIONS  fflUSICÂLES  ANNONCES. 

Salons  Pleyel,  mercredi  6  avril  à  8  heures  1/2  du  soir  :  concert  donné 
par  Mme  Anna  Fabre,  avec  le  concours  de  MM.  Hermann- Léon, 
Pagans,  Ketterer,  Lebrun,  Durand,  Maton,  Thomé  etTayau. 

Salle  Herz,  mardi  1  avril  :  quatrième  concert  de  musique  de  chambre 
d'Antoine  Rubin.stein. 

Salle  Herz,  samedi  18  avril  :  concert  du  jeune  Rendano,  avec  le  con- 
cours de  Mlle  Nilsson,  de  Gardoni  et  Delle-Sedie. 

Salons  Erard,  mardi  21  avril  :  concert  de  Vivier. 

Salons  Erard,  jeudi  23  avril  :  concert  du  pianiste  Jacques  Baur. 

Salons  Erard,  lundi  27  avril  :  concert  de  Mlle  Octavie  Caussemille. 


H2 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE  DE  PAKIS. 


En  vente  chez  E.  GÉRARD  et  C°  (ancienne  maison  Meissonnier),  12,  boulevard  des  Capucines, 

Et  «.  rue  Scribe  (Grand-nôtel). 

ANTOINE  RUBINSTEIN 

MARCHE     DES    RUINES    D'ATHÈNES,     DE    BEETHOVEN 

Transcrite  pour  le  Piano, 
Prix  marqué  :  S  fr.  Seule  édition  conforme  à  l'exécution  par  l'auteur  dans  ses  concerts.  Prix  marqué:  S  fr. 

DEUX  IKEÉLODIES  pour  piano,  op.  3.  . 5     »  \  TARENTELLE  pour  piano,  op.  6 9     » 

POUR  PARAITRE  INCESSAMMENT  : 
Toutes  les  OEuvres  spéciales  pour  le  piano;  suivront  la  musique  de  Chant  et  la  musique  d'Orchestre. 


Maison  E.  HEU,  éditeur,  10,  rue  de  la  Chaussée-d'Autin,  à  Paris. 

NOUVELLES      PUBLICATIONS 


POUR  LE  PIANO 

cil.  Dellonx.  Op.  81 .  N°  1 .  Chanson  aragonaise .6    » 

—  N"  2 .  Chanson  toscane 6    » 

■iéo  Dellbes.  Grande  valse  extraite  du  Pas  des  Fleurs  intercalé 

dans  le  Corsaire 7  SO 

J.  Daydn.  Menuet  en  «t,  transcrit  par  Mortier  de  Fontaine...  i    » 

C  Eiamotlie.  Op.  61     Chant  du  soir,  nocturne 5     » 

Iieféb«ire-%Vély.  Op.  d7S.  Boléro 7  SO 

—  Op.  176.  Le  Rêve  de  Chérubin 6     • 

—  Op.  177.  Esméralda,  caprice 6     • 

—  Op.  180.  Le  Défilé,  pas  redoublé  à  deux  pianos 10    » 

—  Op .  180  bis.  Le  même  à  quatre  mains 9     • 

—  Op.  181.  Deuxième  duo  symplionique  à  deux  pianos 25    » 

H.  Ravina.  Op.  66.  Confidence,  nocturne 6     » 

DANSES 

B.  Ettllng.  Polka  mazurka  sur  la  Vie  parisienne 5    » 

Harx.  Polka  des  Oiseaux  sur  les  motifs  de  Gulliver 4  50 


©.  Hdtra.  Valse,  Fleurs  et  Papillons,      id 

Strauss.  Quadrille,  id 

—  Quadrille,  valse  et  polka  sur  la  Vie  parisienne,  chaque. . . 
A,  Mey.  Valse  sur  les  motifs  de  la  Vie  parisienne 

—  Les  mêmes,  à  quatre  mains. 


6  » 
i  50 
4  50 
6     • 


CHANT 

A.  HIgnard.  Hamlet,  tragédie  lyrique  en  cinq  actes ,  partition 

piano  et  chant,  net 18 

Jl.  orrenbach.  La  Vie  parisienne,  opéra-bouffe  en  quatre  actes, 

partition  piano  et  chant,  net 12 

—    La  môme,  pour  piano  seul,  net 8 


liéo  Dcllbcs.  11  n'  faut  pas  vous  gêner 4 

—  De  quoi  vous  plaignez-vous? 3 

(Couplets  chantés  dans  l'opéra-bouffe  Malborough.) 
Brontise  (Marie)  .  0  Sahuaris,  d'après  l'adagio  de  la  sonate  pa- 
thétique do  Beethoven,  1,2,  chaque i 

Victor  Cliiîrl.  Chant  de  gurrre  du  Vengeur,  1,  2,  chaque 3 

Eiballllor.  En  visite,  chansonnette 3 

—  Ouistiti,  chansonnette 3 

«.  PfcItTer.  Sonnet-Elégie  de  Boileau 3 

Tb.  Radons .  Vous  m'oubliez,  mélodie 3 

—  Le  Rosier,  id 4 

—  Le  Réveil,  id 6 

—  A  quoi  rêves  tu?  id 4 

O'Kelly.  Les  Adieux  de  Valentin ,  chanson 3 

E<ebonc.  Les  Récréations  de  l'enfance ,  recueil  de   rondes   avec 

jeux  et  petites  chansons  avec  accompag.  de  piano,  net. .  3 


Cbez  e.  BRAJWDIJS  et  S.  DUFOVB,  éditeurs,  103,  rue  de  Rlcbclleu 


CHŒURS  SUÉDOIS  ET  NORVÉGIENS 

Exécutés  au  théâtre  de  l'Opéra  pendant  l'Exposition  universelle  par  les 
Etudiants  de  l'Université  d'Upsal,  de  Copenhague  et  de  Lund. 


1 .  Chant  du  Printemps,  par  A.  Kappelmann net. 

2.  Le  Cortège  de  Noël,  par  Kjerulfs net. 

3 .  Le  Roi  des  ilers  (air  populaire) 

4.  Le  Chant  du  Rossignol,  par  Pacius net. 


Chœurs  divers 


1 .  Weber.  Preciosa,  chœur  des  Bohémiens net. 

2.  Auber .  La  Muette  de  Portici,  prière net. 

3.  Mejerbeer.  L'Africaine,  prière net. 

4.  Weber.  Avant  la  bataille,  marziale  et  andante net. 

5.  Arcadet.  Ave  Maria net. 

arrangés  à  l'usage  de  l'orphéon  de  la  ville  de  Paris ,  par 

P ASD  E  LOUP 


»  75 
1  » 
»  75 
•  50 


1  » 
.  30 
»  50 
1  » 
..  50 


CHŒUR  DES   ETUDIANTS  DU   LAC  DES  FEES, 

arrangé  pour  l'orphéon  de  la  ville  de  Paris,  par 

Net:lfr.  FRANÇOIS   BAZIN  Netrlfr. 


MEYERBEER.    —   L'Africaine,  chœur  des  Matelots 
(chœur  de  concours  à  l'Exposition  universelle  de  1867),  net    1     » 

ROSSINI.  — Buvons,  buvons  !  composé  et  approprié 

à  l'usage  de  l'Orphéon  pour  le  Festival  international  1867,  net.     i  50 

MENDELSSOHN.  Mélodie  à  trois  voix  égales  arrangée, 

par  A.  Valent! ,  net *  SO 


GALERIE  DES  MUSICIENS  CÉLÈBRES 

ANCIENS    ET    MODERNES. 
Pbolograpblés  par  Pierre  Petit, 

Format  in-4'',  sur  carton  de  Bristol,  papier  de  Chine, 
Au  prix  exceptionnel  de  2  francs  chaque  portrait. 


Ad.  Adam, 

Auber, 

Beethoven, 

Bériot  (de)  père, 

Bériot  (de)  fils, 

Bernard  (Paul), 

Berlioz, 

Boïeldieu  père. 

Boulanger, 

Cherubini, 

Clapisson, 

Czerny, 

David  (Félicien), 

Devos  (Camille), 

Donizetti, 

Duprato, 

Escudirr-Kastner  (M" 

Gevaert, 


Gluck, 
Goria, 
Gounod, 

Halévy  (Fromental), 
Haydn, 
Haendel, 

Heller  (Stephen), 
Herz  (Henri), 
Kalkbrenner, 
Kastner  (Georges), 
Lecouppey, 
Lefébure-Wély, 
Lilolff, 
Méhul, 
Mendelssohn, 
Membrée, 
'),  Mozart, 

Meyer  (Léopold  de). 


Meyerbeer, 

Os!  orne, 

Poniatowski  (le  prince). 

Prudent, 

Ouidant  (Alfred), 

Ravina, 

Rosenhain, 

Rossini, 

Rubinstein  (A.), 

Schubert, 

Séligmann, 

Servais, 

Sivori, 

Thalberg, 

Thomas  (Ambroise), 

Verdi, 

Vieuxtemps, 

Weber  (Ch. -Marie  de). 


Pour  paraiire  cette  semaine  : 

IiP8  porti-alts  de  Hme  tVorman-Neruda,  Mlle  Slarie  Keroda, 
Aimé  Msillart,  liéenard,  Slœg^er. 


lUPBlHEBIE 


BBS  CHEHINS  DE  PEfi. 


BF.BGUBF,  la,    A  PABIS. 


BUREAUX    A    PARIS  :    BOULEVARD   DES   ITALIENS.  1. 


5S'  Année. 


N*  iS. 


ON  S'ABONNE: 

bans  les  Déportements  et  â  l'iUronger, 

chez  tous  les  Marchands  de  Musique,  l' s  Libraire 

«t  QUI  Cureoux  dcr.  Messageries  et  des  Postes. 


REVUE 


12  Avril  1868. 


PRIX    DE    L'ABONNEMENT: 

Paris 24   r.  par  BE 

Département»,  Belgique  et  Suisse....    30  i      il. 

Étroog" 34  ..       14. 

Le  Jouroal  parait  le  Dimanche. 


GAZETTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


SOMMAIRE.  —  Histoire  de  la  musique    instrumeatale  (9*  article),  par  Mau- 
rice Cristal.  —    Revue  des    thûâtres ,  par    D.  A.  D.  Saint-Yies.  — 

Entrefilets.  —  Concerts  et  auditions  musicales  de  la  semaine.  —  Nouvelles 
des  théâtres  lyriques.  —  Nouvelles  diverses.  —  Concerts  et  auditions  musi- 
cales  annoncés.  —  Annonces. 


mSTOIBE  DE  LÀ  SUSIQUE  INSTRUfflENTÀLE 

(9«  article)  (1). 

Les  dix  années  qui  suivirent  s'écoulèrent  sans  apporter  de  chan- 
gement notable  dans  la  fortune  de  Boccherini;  mais  Frédéric- 
Guillaume  II  mourut  et  de  nouveaux  embarras  assaillirent  ce  com- 
positeur. Jusque-là  sa  vie  avait  été  bien  modeste,  presque  humble. 
La  perte  de  son  premier  protecteur,  l'infant  don  Louis,  rendue 
plus  sensible  encore  par  l'ingratitude  de  la  cour,  l'avait  conduit  à 
une  existence  retirée,  partagée  entre  les  soins  d'une  famille  nom- 
breuse, ses  travaux  et  l'exercice  d'une  piété  sereine  et  douce. 
Profondément  religieux,  il  consacrait  tous  les  jours  les  prières 
d'une  messe  à  chacun  de  ses  cinq  enfants.  La  cloche  de  sa  pa- 
roisse se  faisait-elle  entendre,  il  laissait  la  plume  pour  le  livre  du 
chrétien.  Etranger  au  monde  qui  l'ignorait,  vivant  saintement  en 
famille,  au  milieu  de  quelques  amis,  les  déboires  et  les  déceptions 
qui  l'assaillaient  ne  purent  altérer  sa  douceur,  et  jamais  il  ne 
montra  le  moindre  mouvement  d'impatience  contre  les  rigueurs  et 
les  injustices  de  sa  destinée.  Heureux  par  l'art  qu'il  aimait  avec 
passion ,  travaillant  pour  lui-même  sans  autre  but  que  celui  de  se 
plaire  à  ce  qu'il  faisait,  et  de  fournir  à  l'humble  entretien  de  sa 
famille,  il  conserva  toujours  l'imagination  active  et  l'inspiration 
jeune,  et  tous  ses  maux  étaient  oubliés  dès  que  la  plume  en  main 
il  pouvait  écouter  et  transcrire  la  voix  de  son  génie. 

Doué  d'une  verve,  d'une  fécondité  également  merveilleuses, 
puisant  ses  idées  comme  dans  une  source  intarissable,  il  prenait, 
quittait  et  reprenait  son  travail  avec  la  même  facilité,  sans  que  sa 
pensée  en   souffrît  le  moindre  dommage,  et  que  son  imagination 


(1)  Voir  les  n"  38,  40,  42,  44,  46  de  l'année  1867,  et  les  n"  3,  9  et 
10  de  l'année  1868. 


perdît  son  souffle.  Ayant  été  obligé  de  renoncer  au  violoncelle  à  la 
suite  d'un  crachement  de  sang,  il  envoyait  ses  compositions  au 
monarque  prussien  sans  qu'il  se  fût  procuré  la  satisfaction  de  les 
entendre  exécuter,  et  il  arriva  ainsi  que  l'art  qu'il  honorait  si  bien 
ne  lui  donnait  pas  même  les  jouissances  de  l'artiste,  c'est-à-dire 
celles  de  l'amour-propre  le  plus  légitime  lorsqu'on  l'on  voit  ses 
idées  revivre  par  une  interprétation  intelligente.  Aussi  quel  bon- 
heur pour  lui  lorsque,  ayant  fait  la  connaissance  du  marquis  de 
Benavente,  il  put  goûter  deux  fois  par  semaine  le  plaisir  d'enten- 
dre enfin  les  délicieuses  inspirations  de  sa  muse. 

Ce  bonheur  bien  modeste  fut  traversé  d'une  de  ces  douleurs  que 
la  vie  ne  nous  épargne  pas.  Marié  deux  fois,  Boccherini  eut  la 
douleur  de  perdre  coup  sur  coup  deux  filles  déjà  grandes,  et  de 
voir  expirer  sa  seconde  femme  frappée  d'apoplexie  foudroyante. 
Cette  triple  et  cruelle  séparation  qui  empoisonna  le  reste  de  ses 
jours  n'avait  point  épuisé  les  sévérités  du  sort.  La  mort  de  Fré- 
déric-Guillaume II  lui  porta  un  nouveau  coup  en  lui  enlevant  la 
meilleure  part  de  son  modique  revenu.  Ainsi  poursuivi,  accablé 
par  un  sort  funeste ,  le  grand  homme  supporta  ses  maux  avec 
une  inaltérable  vertu. 

Lorsque  la  République  française  désigna,  pour  la  représenter  à 
Madrid,  Lucien  Bonaparte,  homme  d'une  haute  intelligence,  ama- 
teur éclairé  des  arts,  dilettante  généreux  et  courtois,  noble  pro- 
tecteur qui  savait  accueillir  et  honorer  le  talent ,  Boccherini  plaça 
sous  son  patronage  six  quintettes  pour  le  piano  qu'il  dédia  à  la 
France,  «  la  grande  nation,  »  comme  porte  la  dédicace,  et  il  dé- 
dia directement  à  son  nouveau  protecteur  douze  autres  quintettes 
pour  violons,  altos  et  violoncelle,  superbes  compositions,  les  seules 
qu'il  ait  écrites  en  ce  genre. 

Lucien  Bonaparte  récompensa  magnifiquement  ce  double  hom- 
mage. Dès  ce  moment  les  salons,  la  table  et  la  bourse  de  l'ambas- 
sadeur furent  ouverts  au  célèbre  artiste. 

La  vieillesse  de  Boccherini  semblait  à  l'abri  de  nouvelles  vicis- 
situdes. C'était  une  illusion.  Le  rappel  de  Lucien,  la  gravité  des 
événements,  tout  se  réunit  pour  le  rejeter  dans  de  nouvelles  an- 
goisses. Avec  le  protecteur  disparut  la  pension  momentanée  dont 
Boccherini  avait  joui  trop  peu  de  temps,  et  il  connut  de  nouveau 
la  misère  qui  avait  été  la  compagne  trop  fidèle,  hélas!  de  la  plus 
grande  partie  de  sa  vie. 


114 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


Une  seule  ressource  luiirestait,  c'était  la  protection  du  marquis 
de  Benavente,  qui  lui  avait  continué  son  amitié  et  dont  les  salons 
lui  étaient  restés  toujours  ouverts.  Le  dilettante  avait  un  goût  pas- 
sionné pour  la  guitare  et  il  excellait  sur  cet  instrument  cher  à 
tout  bon  Espagnol.  Il  pria  Bocclierini  de  disposer  une  partie  obli- 
gée de  guitare,  à  son  usage,  dans  ses  compositions  qu'il  désignerait, 
moyennant  une  gratification  de  cent  francs  par  quatuor.  Satisfaisant 
à  cette  demande,  qui  pour  un  homme  habile  eût  été  un  moyen  de 
salut,  notre  compositeur  arrangea  avec  une  partie  de  guitare  un 
assez  grand  nombre  de  morceaux  choisis  parmi  ses  ouvrages. 
Quelques  autres  riches  amateurs  imitèi'ent  le  marquis  de  Benavente. 
Ce  fut  pour  satisfaire  à  de  serablabïes  demandes  que  Boccherini 
arrangea  ses  douze  quinleltes  de  piano'  pour  deux  violons,  deux 
violes  e*  violoncelle.  Ces  travaux  entrepris  tardivement  commen- 
cèrent à  répandre  la  renommée  de  Boccherini  dans  la  haute  so- 
ciété espagnole.  C'est  ainsi  qu'il  put  enfin  recueillir  quelque  célé- 
brité parmi  ses  compatriotres  d'adoption,  au  milieu  desquels  il 
avait  vécu  trente  années  sans  qu'ils  soupçonnassent  en  lui  un 
grand  homme. 

Ses  ressources  furent  donc  un  moment  [moins  modiques;  mais 
les  commandes  des  dilettantes  espagnols  eurent  bientôt  un  terme 
et  les  besoins  d'une  famille  se  renouvellent  sans  cesse!  Parvenu 
à  la  vieillesse  et  envisageant  avec  effroi  le  sort  qui  était  réservé  à 
ses  dernières  années,  Boccherini  projeta  de  quitter  l'Espagne  et  de 
venir  s'établir  en  France.  Il  espérait  trouver  à  Paris  de  la  sympa- 
thie et  des  avantages  moins  incertains.  Mais  pour  entreprendre  une 
longue  route  avec  une  famille  il  fallait  de  l'argent  et  il  n'en  avait 
pas. 

Telle  était  sa  détresse  que  lorsque  Mme  Gail  le  visita  à  Madrid, 
en  1803,  il  n'avait  qu'une  seule  chambre  pour  sa  famille  et  pour 
lui.  Quand  il  voulait  travailler  en  repos,  sans  être  troublé  par  la 
turbulence  des  enfants  et  les  bruits  du  ménage  et  de  la  cuisine,  il 
se  retirait  à  l'aide  d'une  échelle  dans  une  sorte  d'appentis  en  bois 
pratiqué  contre  la  muraille  et  meublé  d'une  table,  d'une  chaise  et 
d'un  vieil  alto  troué  où  pendait  une  seule  corde  éraillée.  C'est  dans 
cette  situation  misérable  qu'il  refusa,  n'écoutant  que  sa  probité, 
cent  louis  d'un  Siabat  à  trois  voix  promis  antérieurement  à  fédi- 
teiir  Siébcr  pour  60  ducats,  environ  280  francs. 

Mme  Gail,  qui  s'était  entremise  dans  cette  affaire,  apprit  en 
cette  occasion  qu'il  avait  cent  fois  donné  des  exemples  de  cette 
probité  délicate  que  l'on  exploitait  autour  de  lui.  Les  dernières 
années  de  sa  vie  furent  remplies  par  un  travail  sans  relâche,  de- 
venu pénible  pour  un  vieillard  et  si  mal  payé  que  lorsqu'il  mourut 
on  ne  trouva  chez  lui  ni  mobilier,  ni  linge,  ni  aliments.  On  assure 
qu'il  avait  gardé  sa  douceur  et  sa  gaieté  jusqu'à  sa  dernière  heure. 
Il  expira  le  28  mai  1805,  à  l'âge  de  soixante-cinq  ans. 

On  a  dit  que  la  cour  et  les  grands  honorèrent  ses  funérailles. 
D'après  les  renseignements  que  s'est  procurés  M.  Picquet,  son  con- 
voi se  fit  au  contraire  sans  pompe  et  ne  fut  escorté  que  d'un  petit 
nombre  d'amis  dévoués. 

Boccherini  est  un  compositeur  délicieux;  il  a  eu  surtout  le  mé- 
rite de  l'originalité.  Ses  idées  sont  toutes  individuelles  et  ses  ou- 
vrages sont  à  ce  point  de  vue  si  exceptionnels  qu'on  en  est  venu 
à  croire  qu'il  n'a  jamais  connu  d'autre  musique  que  la  sienne.  Il 
est  le  Sébastien  Bach  de  la  musique  de  chambre.  La  conduite,  le 
plan  de  ses  pièces  musicales,  le  système  de  modulation,  ainsi  que 
les  idées  mélodiques  ont  le  cachet  de  sa  personnalité  et  ne  res- 
semblent au  système  d'aucun  autre  musicien. 

Les  œuvres  de  ce  maître  célèbre  sont  réellement  filles  du  génie; 
elles  demeureront  des  modèles  de  grâce,  de  sensibilité  et  de  goût. 
La  manière  dont  il  sait  suspendre  l'intérêt  par  des  épisodes  inatten- 
dus surprend  toujours,  même  les  musiciens  les  plus  familiers  avec 
ses  compositions,  et  c'est  toujours  par  des  phrases  du  caractère  le 


plus  simple  qu'il  arrive  à  produire  l'effet  le  plus  vif.  Ses  pensées 
toujours  gracieuses,  souvent  mélancoliques,  ont  un  charme  inex- 
primable de  naïveté. 

Maurice  CRISTAL. 
(La  fin  prochainement.) 


REVDE  DES  THEATRES. 

Théâtre-Français  :  la  Revanche  d'Iris,  comédie  en  un  acte  et  en 
vers,  par  M.  Paul  Ferrier.  —  Odéon  :  [te  Roi  Lear,  drame  en 
vers,  en  cinq  actes  et  sept  tableaux,  imité  de  Shakspeare,  par 
M.  Jules  Lacroix .  —  Palais-Royal  :  reprise  des  Diables  7-oses  ; 
Une  noce  sur  le  carré,  \&udey\\le  en  un  acte,  par  M.  J.  Renard — 
Porte-Saint-Martin  :  Nos  Ancêtres,  drame  en  vers,  en  cinq  actes 
et  six  tableaux,  par  M.  Amédée  Rolland, 

La  dernière  quinzaine  a  été  bonne,  en  ce  sens  qu'elle  a  donné 
les  gages  réitérés  d'un  retour  aux  traditions  de  la  vraie  et  saine 
littérature  que  le  théâtre  contemporain  met  trop  souvent  en  oubli. 
Nous  ne  nous  abusons  pas  néanmoins  sur  la  portée  de  ces  tenta- 
tives, et  nous  croyons  qu'il  faudi'a  encore  plus  d'un  effort  persévé- 
rant pour  amener  la  réforme  du  goût  déplorable  qui  est  à  l'ordre 
du  jour  ;  mais  nous  saluons  avec  plaisir  ces  premières  lueurs  d'une 
aurore  nouvelle  qui  finira  par  percer  les  nuages  dont  elle  est 
obscurcie. 

Le  Théâtre-Français,  qui,  du  reste,  est  en  dehors  de  la  question, 
apporte  à  ce  mouvement  réactionnaire  leçon  tingent  d'une  petite  comé- 
die en  un  acte,  intitulée  laRevanched' Iris.  Ce  n'est  pas  tout  à  fait  une 
nouveauté,  car  elle  a  été  jouée  à  Lille,  dans  la  représentation- 
gala  offerte  à  l'Empereur  et  à  l'Impératrice,  à  l'époque  du  voyage 
de  Leurs  Majestés  dans  nos  provinces  du  Nord;  puis,  son  succès 
s'est  propagé  dans  quelques  salons  parisiens  avant  d'arriver  à  la 
.scène. 

Elle  n'entrainc  pas  effectivement  de  bien  grands  embarras  :  un 
décor  de  fantaisie  et  deux  interprètes,  voilà  tout.  Iris,  la  messagère 
des  dieux,  est  envoyée  par  Jupiter  sur  notre  globe  pour  en  rame- 
ner au  céleste  séjour  trois  jeunes  filles  innocentes  et  pures,  si  elle 
peut  se  les  procurer.  Cette  réserve  n'est  pas  de  nous,  mais  de  Dio- 
gène,  qui  se  rencontre  sur  les  pas  d'Iris  et'  qui  se  moque  de  sa 
mission  : 

—  Je  cherche  un  lionime,  un  seul,  et  ne  puis  le  trouver! 
lui  dit-il  en  raillant.  Si  bien  qu'Iris,  piquée  au  vif,  jure  de  tirer 
vengeance  du  terrible  cynique,  et  pour  cela,  elle  arbore  toutes  les 
séductions  que  le  ciel  du  paganisme  lui  a  généreusement  dépar- 
ties. Ce  malheureux  Diogène  a  beau  s'en  défendre,  il  est  forcé  de 
se  plier  aux  caprices  d'Iris,  il  s'adonise,  il  se  parfume,  il  tombe 
aux  pieds  de  l'inhumaine.  C'est  là  qu'Iris  l'attendait;  ce  triomphe 
lui  suffit,  et  après  avoir  accueilli  la  brûlante  déclaration  de  Dio- 
gène par  un  irrévérencieux  éclat  de  rire,  elle  reprend  à  tire  d'ailes 
la  route  de  l'Olympe. 

Ce  proverbe,  -^  car  c'en  est  un,  —  est  l'œuvre  d'un  débutant, 
dont  la  versification  élégante  et  facile  est  d'un  heureux  augure 
pour  l'avenir.  Il  est  vrai  que  Coquelin  et  Mlle  Ponsin  lui  prêtent 
un  appui  qui  n'est  pas  à  dédaigner. 

—  Nous  n'avons  pas  à  raconter  le  Roi  Lear;  tout  le  monde  a 
lu,  dans  Shakspeare,  cette  magnifique  flétrissure  de  l'ingratitude 
filiale.  On  sait  que  r)ucis  a  essayé,  non  sans  peine,  de  la  réduire 
aux  proportions  mesquines  de  notre  ancien  théâtre,  et  que  Balzac 
s'est  efforcé  de  l'adapter  à  nos  mœurs  bourgeoises,  dans  le  roman 
du  Père  Goriot.  L'imitation  de  M.  Jules  Lacroix  est  plus  ample  et 
plus  fidèle,  sans  être  cependant  complète.  L'auteur  du  nouveau 
drame  de  l'Odéon  s'est  attaché  surtout  à  reproduire,  sous  toutes 
ses  faces,  la  belle  physionomie  de  ce  vieux  roi  aveugle,  répudié 


DE  PARIS. 


118 


par  ses  filles  et  refusant  de  les  maudlr".  Il  n'a  pas  néf^ligé  le  dé- 
vouement, la  mort  louchante  de  Cordélia,  mais  il  a  écarté  la 
contre-partie  de  ce  fils  cliassé  par  son  père,  dont  le  désespoir  se 
marie  si  bien  à  la  douleur  du  roi  Lear.  Cet  épisode  constitue  à  la 
vérité  une  double  action  qui  est  un  défaut  au  point  de  vue  de 
notre  économie  théâtrale.  Gardons-nous  donc  de  faire  un  reproche 
à  M.  Jules  Lacroix  de  cet  excès  de  prudence.  Son  œuvre  contient 
encore  d'assez  remarquables  scènes  pour  satisfaire  les  esprits  les 
plus  exigeants.  Quand  il  n'y  aurait  que  le  sublime  tableau  du 
pauvre  monarque  mourant  sur  le  bord  de  la  mer,  aux  éclats  de  la 
tempête,  en  la  compagnie  d'un  fou  et  d'un  mendiant,  ou  celui  du 
père  infortuné  berçant  dans  ses  bras  débiles  le  gracieux  cadavre  de 
Cordélia,  cela  seul  suffirait  à  justifier  l'enthousiasme  avec  lequel 
l'impressionnable  parterre  de  l'Odéon  a  applaudi  l'ensemble  du 
drame.  Ajoutons  que  les  vers  du  poëte,  qui  traduisent  la  plupart 
du  temps  avec  bonheur  les  pensées  grandioses  de  l'auteur  anglais, 
n'ont  pas  été  sans  influence  sur  les  dispositions  des  spectateurs. 

Le  rôle  écrasant  du  roi  Lear  est  rempli  d'une  manière  irrépro- 
chable par  Beauvaliet,  l'ancien  sociétaire  du  Théâtre-Français,  qui, 
dans  sa  longue  carrière,  n'a  peut-être  jamais  rencontré  une  occa- 
sion plus  favorable  à  son  talent.  Son  entourage  est  digne  de  lui; 
Taillade  n'a  qu'une  scène,  mais  il  y  est  parfait.  Nous  devons  aussi 
de  sincères  éloges  à  Paul  Deshayes,  à  Laute  et  à  iUlle  Sarah  Bern- 
hard,  qui  est  d'une  simplicité  attendrissante  dans  le  rôle  de  Cor- 
délia. 

—  Le  Palais-Royal  a  interrompu  encore  une  fois  les  représen- 
tations inépuisables  de  la  Vie  Parisienne,  pour  reprendre  une 
vieille  pièce  de  son  répertoire,  les  Diables  Roses,  qui  a  fait  florès 
en  son  temps,  et  qui  a  obtenu  un  très-joli  i-egain  de  succès,  grâce 
à  l'entrain  de  ses  joyeux  interprètes  :  Gil- Pérès,  Lhéritier,  Hya- 
cinthe, Lassouche  et  Mlle  Baron,  héritière  du  rôle  de  Mlle  Schnei- 
der. 

On  joue  avant  cette  pièce  un  lever  de  rideau  intitulé  :  Une 
noce  sur  le  carré,  qui  est  très-bien  enlevé  par  Luguet  et  par  Mlle 
Howey.  L'effet  principal  de  ce  vaudeville  réside  dans  une  exhibi- 
tion d'ombres  chinoises  qu'on  aperçoit  à  travers  les  rideaux  d'un 
appartement  voisin.  C'est  une  noce  qui  sert  de  prétexte  à  un  rap- 
prochement et  à  un  essai  d'imitation  entre  les  deux  personnages 
en  scène.  L'idée  est  plaisante  et  dispose  parfaitement  le  public. 

—  La  Porte-Saint-Martin  a  tellement  abusé  des  grandes  féeries, 
que  lorsqu'il  lui  prend  fantaisie  de  retourner  au  drame  sérieux, 
elle  semble  ne  plus  être  sur  son  terrain  naturel.  De  là  une  cer- 
taine hésitation  parmi  les  spectateurs  qui  se  sentent  tout  dépaysés 
et  qui  n'applaudissent  pas  comme  ils  le  feraient  ailleurs,  à  l'Odéon 
par  exemple.  Le  drame  en  vers  de  M.  Amédée  Rolland,  Nos  An- 
cêtres, qui  se  recommande  par  des  qualités  fort  estimables,  a  mal- 
heureusement fourni  la  preuve  de  ce  malentendu.  Comment 
vouliez-vous  qu'un  parterre  qui  se  gaudissait  hier  aux  facéties 
burlesques  du  Pied  de  mouton  ou  de  h  Biche  aux  bois,  prenne  en 
bonne  part  la  leçon  de  patriotisme  que  vous  lui  donnez  aujour- 
d'hui? Il  ne  suffit  pas  d'un  prologue,  plein  de  pensées  généreuses, 
pour  modifier  de  prime  abord  une  pareille  situation.  Faisons 
pourtant  un  effort  pour  oublier  la  féerie  de  la  semaine  dernière, 
et  pénétrons  avec  l'auteur  dans  les  bas-fonds  de  ce  mystérieux 
moyen  âge  ou  se  livre  la  lutte  des  communes  contre  la  féodalité. 
Le  tyran  Hélisand,  c'est  le  principe  féodal  qui  prétend  conserver 
envers  et  contre  tous  ses  immunités  abusives  ;  Marcus  Faber,  c'est 
le  peuple  qui  élève  la  voix  pour  avoir  enfin  sa  place  au  soleil.  Le 
château  reste  sourd  aux  réclamations  de  la  commune;  mais  aidée 
parla  rancune  vindicative  d'une  vieille  femme  qu'Hélisand  a  cruel- 
lement frappée,  la  commune  s'introduit  dans  le  château  et  s'en 
empare  Par  un  revirement  soudain,  la  féodalité  triomphe,  les  ma- 
nants sont    vaincus,  et  c'en  serait  tait  de  l'avenir  populaire  si  le 


roi  Philippe-Auguste  n'intervenait  dans^jla'îmêlée  par  de  légitimes 
concessions.  Hélisand,  fidèle  â  son  principe,  est  jnort  assez  ù  temps 
pour  ne  pas  le  voir  amoindri.  Quant  à  Marcus,  il  sera  jusqu'au  bout 
le  martyr  de  sa  cause,  et,  au  jour  de  l'émancipation,  il  portera  la 
peine  de  sa  révolte  prématurée  en  s' acheminant  avec  résignation 
vers  la  route  de  l'exil. 

A  l'Odéon,  nous  avons  rencontré  Shakspeare;  à  la  Porte-Saint- 
Martin,  nous  nous  trouvons  face  [à  face  avec  Victor  Hugo  dont 
l'exemple  et  le  souvenir  ont  constamment  inspiré  M.  Amédée  Rol- 
land. Il  y  a,  du  reste,  dans  son  drame,  de  beaux  vers  qui  sont 
bien  à  lui  et  qui  ne  pèchent  parfois  que  par  uu  peu  trop  d'em- 
phase déclamatoire.  Ses  interprètes  font  tout  ce  qu'ils  peuvent,  et 
nous  citons  parmi  eux  Laray,  Montai,  Lauruul,  Mme  Vign<'  ut  Mlle 
Suzanne  Lagier  ;  après  tout,  il  ne  faut  pas  trop  demander  à  des 
artistes  qui  débitaient,  la  veille,  la  prose  de  M.  Cogniard  ou  qui 
chantaient  dans  les  catés-concerts. 

D.  A.  D.  SAINT-YVES. 


Nous  faisions  connaître,  dans  notre  dernier  numéro,  la  libéralité 
de  Mme  Georges  Kastner  envers  l'Association  des  artistes  musi- 
ciens. C'est  au  mari  de  Mme  Kastner  que  revient  la  pensée  de  ce 
don  posthume,  pensée  maintefois  manifestée  par  lui  de  son  vivant, 
et  que  sa  veuve  vient  de  traduire  et  d'accomplir  si  généreusement. 
—  En  même  temps  que  nous  apprenions  ce  détail,  nous  recevions 
de  M.  Noetinger,  le  digne  président  du  Comité  central  de  l'Asso- 
ciation des  sociétés  chorales  d'Alsace,  dont  Georges  Kastner  était 
président  honoraire,  une  lettre  qu'il  vient  d'adresser  à  tous  les 
membres  de  l'Association.  Nous  nous  faisons  un  devoir  et  un  plai- 
sir de  reproduire  cette  lettre,  car  on  y  verra  à  quel  point  les 
compatriotes  de  notre  regretté  collaborateur  et  ami  ont  ressenti  le 
chagrin  de  sa  mort  prématurée,  et  que  ce  n'est  pas  seulement  à 
Paj-is  qu'il  cherchait  à  faire  le  bien,  à  venir  en  aide  aux  artistes, 
et  à  encourager  les  tentatives  favorables  au  progrès  de  la  musi- 
que. 

Strasbourg,  le  16  mars  48S8. 
Mes  chers  collègues, 

C'est  le  propre  des  natures  d'élite,  des  hommes  d'esprit  et  de  cœur 
que  leur  mort  provoque  un  concert  unanime  de  regrets. 

Tour  à  tour,  tous  les  journaux  de  musique,  toutes  les  revues  orphéo- 
niques  et  les  feuilles  de  sa  ville  natale  nous  ont  retracé  ce  qu'était 
comme  époux,  comme  père  et  comme  artiste  M.  Georges  Kastner,  com- 
positeur, membre  de  l'Institut,  officier  delà  Légion  d'honneur,  enlevé 
prématurément  à  sa  famille  et  à  ses  amis,  le  19  décembre  dernier. 

Dans  cette  imposante  manifestation  de  la  douleur  publique,  c'est  le 
devoir  du  Comité  central  de  l'Association  des  sociétés  chorales  d'Alsace 
d'élever  la  voix  et  d'adresser,  lui  aussi,  un  dernier  adieu  à  celui  qui 
fut  son  président  honoraire  et  son  protecteur  bienveillant. 

Oui,  M.  Kastner  a  toujours  aimé  notre  belle  institution  qu'il  savait  de- 
voir rendre  d'utiles  et  de  grands  services  à  la  cause  de  la  civilisation. 

Dès  l'année  1856,  date  glorieuse  pour  notre  Association,  nous  avons 
été  heureux  de  recourir  à  ses  lumières  et  à  ses  bons  conseils.  Ayant  fait, 
dans  sa  jeunesse,  une  partie  de  ses  études  en  Allemagne,  il  avait  pu 
suivre  de  près  l'organisalion  des  sociétés  chorales  si  renommées  de  ce 
pays.  Nous  le  voyons  abandonner  ses  nombreux  travaux  de  bénédictin 
pour  accourir  à  notre  appel  et  assister  à  la  première  manifestation  de 
notre  Association.  Nous  ie  voyons  prendre  part  à  toutes  les  réunions,  à 
toutes  les  discussions,  oubliant  la  fatigue  pour  participer  à  notre  joie. 
Aussi,  en  cette  circonstance,  lui  avons-nous  décerné  par  acclamation  le 
titre  de  président  honoraire  de  notre  Association. 

Et  ce  n'était  pas  une  sinécure  que  nous  lui  créions.  Jamais  une  de- 
mande que  nous  lui  avons  adressée  n'a  été  repoussée. 

Quoique  habitant  Paris,  oij  le  retenaient  forcément  ses  relations,  quoique 
continuellement  occupé  par  les  nombreuses  séances  de  l'Institut,  de  la 
Société  des  artistes  musiciens,  dont  il  était  vice-président,  par  les  con- 
cours dont  il  a  présidé  un  grand  nombre,  il  a  pour  chacune  de  nos 
réunions  fait  violence  à  son  amour  de  la  retraite. 

Il  n'a  jamais  craint  de  sb  mettre  en  roule,  malgré  son  aversion  pour 
la  locomotion,  pour  venir  présider  nos  concours.  Et  lui,  cependant,  qui 
venait  de  loin,  qui  avait  voyagé  souvent  toute  la  nuit,  restait  courageu- 
sement sur  la  brèche,  sans  se  lasser,  sans  témoigner  la  moindre  fatigue, 
à   soutenir  ses  collègues  moins  vaillants  que  lui,  par  son  exemple,  à 


116 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


écouler  ces  joutes  musicales,  qui,  rappelez-vous-le,  comme  à  Guebwiller, 
duraient  plusieurs  heures  sans  interruption. 

Ne  se  contentant  pas  de  sacrifier  sa  personne  h.  nos  concours,  il  vous 
apportait  chaque  fois  une  médaille  d'or  obtenue  de  la  munificence  de  l'Em- 
pereur, à  laquelle  il  joignait  modestement  une  autre  d'une  égale  valeur, 
qu'il  mettait  généreusement  à  la  disposition  de  ses  collègues  du  jury. 

Plusieurs  de  vos  sociétés  sont  fières  de  porter  à  leurs  bannières  les 
témoignages  de  sa  libéralité,  qu'elles  ont  obtenus  à  Barr,  Schlestadt,  à 
Guebwiller  et  à  Strasbourg. 

Compositeur  distingué,  votre  président  honoraire  a  spécialement  écrit 
pour  l'orphéon,  en  général,  les  Chants  de  la  Vie  et  les  Chants  de  r Armée, 
ainsi  qu'un  grand  nombre  de  chœurs  qui  ont  été  chantés  dans  plusieurs 
concours. 

Mais  il  aimait  aussi  écrire  des  chœurs  généraux  pour  notre  Asso- 
ciation . 

A  la  réunion  de  Schlestadt,  nous  avons  été  heureux  d'exécuter  sa  can- 
tate alsacienne  composée  pour  la  circonstance,  avec  accompagnement 
d'orchestre,  œuvre  d'un  caractère  grandiose,  remarquable  par  son  am- 
pleur, sa  richesse  de  sonorité  et  sa  belle  et  savante  orchestration,  dont 
les  comptes  rendus  de  cette  solennité  ont  fait  le  plus  grand  éloge. 

Au  festival  de  Colmar,  le  Chant  des  Bateliers  a  conquis  les  brillants 
suffrages  qu'il  méritait.  Il  a  été  accueilli,  vous  vous  en  souvenez  tous, 
par  des  bravos  frénétiques  auxquels  la  présence  de  l'auteur  ajoutait  un 
charme  nouveau.  Malgré  sa  modestie,  notre  président  honoraire  a  été 
contraint  de  vive  force  de  quitter  son  siège  et  de  recueillir  en  personne 
les  couronnes  de  son  triomphe.  Nous  sommes  heureux  de  vous  rappeler 
ce  fait,  témoignage  de  votre  affectueuse  sympathie  pour  lui. 

Nous  pourrions  citer  d'autres  partitions  encore  qu'il  était  heureux 
d'entendre  interpréter  par  les  sociétés  de  Strasbourg  pendant  les  quelques 
semaines  qu'il  venait  passer  au  milieu  de  nous,  non  pour  se  reposer  de 
ses  travaux,  car  il  y  apportait  le  même  zèle,  à  Strasbourg  comme  à 
Paris,  mais  pour  se  retremper  dans  sa  ville  natale,  où  nous  étions  heu- 
reux de  lui  donner,  au  nom  de  l'Association  entière,  des  témoignages 
de  notre  afléctucuse  sympathie. 

Que  de  bienfaits  il  a  répandus  autour  de  lui!  Sa  porte  était  toujours 
ouverte  à  un  compatriote,  son  accueil  toujours  cordial.  11  n'existe  pas  un 
artiste,  et  surtout  pas  un  Alsacien,  établi  à  Paris,  qu'il  ne  fût  heureux 
d'aider,  à  leur  début,  de  son  crédit  et  de  son  appui. 

«  Il  avait  compris  que  la  Providence,  en  lui  accordant  une  grande 
fortune,  lui  avait  imposé  une  mission  toute  de  charité;  il  l'a  remplie, 
cette  divine  mission,  avec  une  continuité  digne  de  la  reconnaissance  de 
tous  les  artistes .  » 

De  nous  tous,  devons-nous  ajouter  à  ces  paroles  venues  du  cœur  et 
prononcées  sur  sa  tombe  par  M.  Elwart,  l'un  de  ses  amis  de  trente  ans. 

Agréez,  mes  chers  collègues,  l'assurance  de  mes  sentiments  les  plus 
affectueux. 

Le  Président  de  l'Association,  N.  Noetinger. 


CONCERTS  ET  AUDITIONS  MUSICALES  DE  LÀ  SEUIÂINE. 

,\  Les  concerts  officiels  ont  dit  cette  semaine  leur  dernier  mot  de  la 
saison.  —  Dimanche,  la  soirée  de  S.  A.  I.  Madame  la  princesse  Ma- 
éthilde  réunissait  Mmes  Carvalho,  Norman-Neruda,  MM.  Delle-Sedie  et 
Saint-Saëns.  —  A  l'hôtel  de  ville,  le  samedi  précédent,  Auber  régnait  en 
maître  et  le  programme  était  uniquement  composé  de  morceaux  de 
la  Muette  de  Portici,  de  VAmbassadrice,  du  Postillon  et  du  Premier 
Jour  de    bonheur,    chantés    par    Capoul  et  Mmes  Cabel  et  Marie  Roze. 

—  Au  Louvre,  le  vendredi,  M.  le  comte  de  Nieuwerkerke  clôturait  ses 
réunions  hebdomadaires  avec  le  pianiste  Ritter  et  Délie  Sedie.  —  Jeudi 
dans  son  hôtel,  le  comte  d'Osmont  faisait  entendre  à  un  cercle  intime 
de  dilettantes,  la  musique  d'un  ballet  en  quatre  actes  qu'il  vient  de 
composer.  —  Dimanche,  Mlle  Castellan,  le  ténor  Pagans,  Berthelier,  Na- 
daud,  Mlle  Roze  charmaient  les  nolabiliés  de  la  Presse  et  du  Feuilleton 
réunis   aussi    une    dernière    fois    chez  jM.  Ed.  Fournier  de  la  Patrie. 

—  Enfin,  chez  Mme  la  baronne  de  Maistre,  devant  une  nombreuse  as- 
semblée de  littérateurs,  de  compositeurs  et  de  dames  du  monde,  après 
l'audition  de  morceaux  de  chants  intéressants  et  un  duo  pour  violon  et 
piano  joué  par  les  frères  Sauret,  M.  Franceschi  disait  admirablement  un 
grand  air  de  l'opéra  Sardanapale,  composé  par  la  maîtresse  de  la  maison 
et  qui  a  produit  le  plus  grand  effet.  —  Quoiqu'il  soit  difficile  en  men- 
tionnant ces  nombreuses  réunions  de  ne  pas  tomber  dans  des  redites, 
il  nous  a  paru  néanmoins  intéressant  de  signaler  les  progrès  marqués 
de  l'art  musical  dans  les  hautes  classes  de  la  société  et  la  place  qu'il 
occupe  de  plus  en  plus  dans  leurs  plaisirs. 

^*^,  Au  douzième  concert  du  Conservatoire,  dimanche  dernier,  M.  Al- 
phonse Duvernoy  a  exécuté  le  concerto  en  mi  bémol  de  Beethoven.  Ce 
jeune  artiste,  qui  se  produisait  pour  la  première  fois  devant  un  public 
aussi  nombreux  et  aussi  imposant  que  celui  du  Conservatoire,  a  enlevé 


du  premier  coup  la  position.  11  possède  un  très-bon  mécanisme,  tire  de 
l'instrument  un  son  excellent  et  réussit  parfaitement  les  nuances.  Son 
succès  a  été  très-vif.  Le  reste  du  programme  comme  le  dimanche  pré- 
cédent. —  Le  Vendredi-Saint,  au  concert  spirituel,  on  a  exécuté  la  sym- 
phonie héroïque  et  le  chœur  final  du  Christ  au  mont  des  Oliviers  de 
Beethoven  ;  trois  beaux  fragments  du  Requiem  en  ut  mineur  de  Cheru- 
bini,  un  Ave  verum  d'Halévy,  très-coloré  et  d'un  beau  caractère,  dont 
Mlles  Mauduit  et  Wertheimber  ont  dit  les  soli,  et  l'ouverture  à'Euryan- 
the.  M.  Delaborde  a  joué  sur  le  piano  à  clavier  de  pédales  d'Erârd,  un 
Choral  et  Toccata  en  fa  de  Sébastien  Bach.  On  a  surtout  admiré  l'éton- 
nante habileté  de  cet  artiste  à  se  servir  du  pédallier  dans  des  passages 
très-rapides,  de  dessins  très-compliqués  et  d'un  doigté  ('puisqu'il  n'existe 
pas  d'autre  terme)  fort  difficile.  Ce  tour  de  force  a  été  beaucoup  ap- 
plaudi. —  Aujourd'hui,  jour  de  Pâques,  Rubinsiein  joue  son  troisième 
concerto  (en  sol).  Les  amateurs  de  piano  ne  se  plaindront  pas;  ils  auront 
eu  trois  pianistes  en  huit  jours. 

5^**  La  scène  du  jardin,  de  Roméo  et  Juliette,  de  Berlioz,  a  été  exécu- 
tée, pour  la  première  fois,  dimanche  dernier,  aux  concerts  populaires. 
Cette  page  a  été  moins  bien  comprise  et  plus  froidement  accueillie  que 
celles  qui  avaient  été  jouées  précédemment  :  «  Roméo  seul,  «  et  le  «  Bal 
chez  les  Capulets  ».  Ce  n'est  pas  que  ce  ne  soit  une  inspiration  sympho- 
nique  du  caractère  le  plus  poétique  et  le  plus  élevé;  mais  l'idée  ne  se 
dégage  pas  nettement  à  une  première  audition,  et  l'on  sait  que  ce  que 
demande  d'abord  le  public,  c'est  la  clarté  ;  seule,  la  belle  et  large  phrase 
des  violoncelles  a  paru  percer  l'ombre  de  l'ensemble  et  s'en  dégager  lu- 
mineusement. A  ce  même  concert,  Mme  Norman-Neruda  s'est  fait  enten- 
dre pour  la  troisième  et  dernière  fois.  Même  accueil  enthousiaste  ;  mêmes 
applaudissements;  mêmes  rappels.  La  grande  artiste  a  supérieurement 
joué  le  grand  concerto  de  Mendelssohn  à  la  place  d'un  prélude  et  d'une 
fugue  de  Bach  qu'indiquait  le  programme,  et  elle  a  admirablement  chanté 
la  romance  en  [a  de  Beethoven,  suave  inspiration,  i  transparente  comme 
un  lac  réfiéchissant  les  mélancoliques  étoiles,  »  a  dit  un  grand  écrivain. 
Aujourd'hui,  dimanche  de  Pâques,  relâche.  Dimanche  prochain,  dernier 
concert  de  la  saison. 

f*^  La  séance  de  musique  de  chambre,  donnée  mardi  dernier  par 
Antoine  Rubinstein,  nous  a  fait  connaître  ce  grand  artiste  sous  une  autre 
face  de  son  talent  ;  il  s'est  élevé  dans  la  musique  d'ensemble  à  la  même 
hauteur  que  dans  les  concerts  où  il  a  fait  admirer  sa  prestigieuse  vir- 
tuosité. 11  a  joué,  entre  autres,  un  très-beau  trio  de  sa  composition,  avec 
Léonard  et  Jacquard,  la  sonate,  op.  111,  de  Beethoven,  l'épouvantait  des 
artistes  médiocres,  et  avec  Jacquard  trois  morceaux  de  sa  composition 
qui  ont  produit  le  plus  grand  effet.  —  Nous  devons  quelques  mots  à  son 
excursion  à  Bordeaux,  où  il  a  donné'  deux  concerts,  le  28  et  le  30  mars. 
Tel  nous  l'avons  trouvé  à  Paris,  tel  il  a  été  à  Bordeaux:  tour  à  tour  fou- 
gueux et  tendre,  puissant  et  gracieux.  Mlle  Harris,  du  théâtre  Italien, 
lui  a  prêté  le  premier  soir  un  précieux  concours. 

»*,f  On  lit  dans  le  Moniteur:  u  M.  Vivier  ne  prodigue  pas,  on  le  sait, 
ses  concerts.  11  ne  gâte  pas  ses  admirateurs.  Celui  de  cette  année  aura 
lieu  le  21  avril,  à  la  salle  Erard.  L'Empereur,  qui  protège  si  gracieuse- 
ment les  talents  originaux,  a  daigné  prendre  la  première  stalle.  » 

»*,  Les  journaux  s'occupent  beaucoup  du  concert  donné  à  la  Sorbonne 
au  profit  de  la  crèche  de  Sainte-Geneviève,  et  citent  avec  éloge  parmi  les 
artistes  qui  s'y  sont  fait  entendre  Mlle  Wilden,  dont  le  beau  talent  de 
pianiste  a  brillé  à  celte  occasion  d'un  éclat  particulier.  Quoique  arrivant 
tard  au  programme,  Aille  Wilden  a  su  se  faire  écouter  et  applaudir  par 
un  public  que  la  fatigue  commençait  à  gagner.  Elle  a  joué  avec  infini- 
ment de  brio  et  de  goût  Titania  de  Lefébure-Wély,  et  le  Caprice  de  Ch. 
de  Bériot.  A  une  rare  correction  de  style,  Mlle  Wilden  joint  un  senti- 
ment très-fin  et  très-original.  Applaudie  à  chacun  de  ses  morceaux,  l'émi- 
nente  pianiste  a  remporté  dans  ce  concert  un  succès  qui  lui  a.ssure  une 
belle  place  parmi  les  meilleurs  virtuoses  de  l'école  française. 

»*:);  Une  cantatrice  de  talent,  Mme  Anna  Fabre,  a  récolté,  à  son  con- 
cert du  6  avril,  des  bravos  nombreux  et  mérités  pour  la  manière  pleine 
de  charme  dont  elle  a  interprété  plusieurs  morceaux  de  styles  divers, 
notamment  le  duo  des  Dragons  de  Villars,  celui  de  Mireille,  avec  MM. 
Pagans  et  Herman-Léon,  et  divers  airs  d' Auber,  Amb.  Thomas,  etc. 
Eug.  Ketterer,  l'éminent  pianiste,  a  pris  sa  bonne  part  de  ces  applaudis- 
sements. 

^*,^  A  l'une  des  brillantes  soirées  de  la  baronne  de  Romans-Kaïssaroff, 
deux  virtuose  d'élite  se  sont  fait  entendre  et  admirer  :  le  flûtiste  belge 
Auguste  Charles  qui,  dans  deux  fantaisies  russe  et  Hongroise,  a  su  tirer 
de  son  instrument  un  parti  vraiment  merveilleux,  sans  cesser  de  char- 
mer un  instant  ;  et  l'éminent  pianiste  compositeur  Ernest  Stœger,  bien 
connu  de  nos  lecteurs,  et  qui  a  joué,  avec  le  même  succès  que  partout, 
les  ravissants  morceaux  :  Novellette,  Impromptu,  etc. 

,*,,  Depuis  que  Berthelier  est  de  retour  de  sa  brillante  tournée  avec 
Ulmann,  il  n'a  pas  chômé,  et  il  n'est  guère  c!e  réunion  mu.sicale  publi- 
que ou  privée  dans  laquelle  il  ne  soit  appelé  à  fournir  son  joyeux  con- 
tingent. Il  est  vrai  que  peu  d'artistes  l'ont  surpassé  dans  le  genre  qu'il 
a  adopté  et  qui  réunit  à  la  fois  le  talent  du  chanteur  et  du  comédien. 
Cette  supériorité  explique  la  vogue  soutenue  dont  il  jouit. 

^\  A  la  dernière  matinée  de  M.  Lebouc,  Mlle  Marie  Mongin,  la  char- 


DE  PARIS. 


m 


mante  pianiste,  a  été  acclamée  avec  enthousiasme.  On  a  admiré  tour  à 
tour  le  charme,  l'élégance  et  la  vigueur  de  son  jeu  dans  un  trio  de  Mo- 
zart, avec  MM.  While  et  Lebouc,  dans  un  prélude  de  J.-S.  Bach,  le  Ca- 
rillon de  Cythère,  de  Couperin,  et  une  gavotte  variée  de  Haendel,  qu'on 
lui  a  fait  bisser  (pièces  extraites  du  Trésor  des  pianistes)  ;  enfin  dans  les 
belles  variations  de  Mme  Farrenc  sur  un  thème  du  comte  de  Gallenberg, 
qu'elle  a  exécutées  récemment  à  grand  orchestre  au  concert  du  Conserva- 
toire de  Bruxelles,  et  qui  lui  ont  valu  un  éclatant  succès. 

»%  Samedi,  dans  une  soirée  donnée  salle  Sax,  une  pochade  musicale 
de  M.  Schwarlz  :  Un  cas  imprévu,  nous  a  fait  de  nouveau  apprécier  le 
talent  de  Mme  Blot-Dermilly,  comme  chanteuse  et  celui  de  son  mari 
comme  comédien;  aussi  ont-ils  été  applaudis  et  rappelés  par  tout  l'audi- 
toire. 

^*t  La  jeune  Thérèse  Liébe  a  eu  cet  hiver  de  grands  succès  dans  les 
salon.s  du  faubourg  Saint-Germain,  et  l'on  y  a  fort  apprécié  son  beau 
talent  qui  n'est  déjà  plus  celui  d'un  enfant  prodige,  mais  d'une  violo- 
niste avec  laquelle  il  faudra  bientôt  compter.  Le  public  bientôt  en  pourra 
d'ailleurs  juger,  car  elle  donnera  le  28  de  ce  mois,  dans  les  salons  d'E- 
rard  un  concert  pour  lequel  plusieurs  artistes  distingués  lui  prêteront 
leur  concours  et  où  elle  exécutera  le  concerto  de  Mendelssohn. 

*%  L'excellent  pianiste  W.  Goldner  a  donné  le  4  avril  un  concert 
dans  les  salons  Erard.  Il  a  été  doublement  fêté  ,  comme  compositeur  et 
comme  exécutant;  on  a  fait  le  meilleur  accueil  à  ses  œuvres  :  Valse 
brillante,  Princesse-Valse,  la  Chevaleresque,  qui  se  distinguent  par  une 
véritable  élégance  et  un  savoir-faire  peu  commun.  MM.  Danbé  (violon), 
Alf.  Le  Beau  (harmonium),  Mlle  Darcier  et  M.  Lafont  (chant),  qui  l'ai- 
daient à  défrayer  son  programme,  n'ont  pas  été  moins  applaudis 

i**  La  Société  des  concerts  du  Conservatoire  donne  aujourd'hui  di- 
manche de  Pâques,  12  avril,  à  8  heures  1/2  du  soir,  un  concert 
spirituel  dont  voici  le  programme  :  1°  symphonie  héroïque  de  Beethoven; 
—  2°  0  filii  (double  chœur)  de  Leisring;  — 3°  concerto  pour  piano  de 
Rubinstein,  exécuté  par  l'auteur;  —  i"  Ave  veruin,  à  deux  voix  et  chœur, 
d'Halévy,  soli  chantés  par  MOes  Mauduit  et  Wertheimber;  —  5°  ouver- 
ture (TEuryanthc;  —  8°  chœur  final  du  Christ  au  mont  des  Oliviers  de 
Beethoven.  —  Le  concert  sera  dirigé  par  M.  George  Hainl. 

^*^  L'excellente  Société  chorale  allemande  Liederkranz,  dirigée  par 
M.  Ehniant,  annonce  pour  demain  lundi,  dans  les  salons  du  Grand- 
Orient,  16,  rue  Cadet,  son  troisième  concert ,  dans  lequel  on  exécutera 
la  Création  de  Haydn . 

4*<,  On  n'a  pas  oublié  l'excellent  artiste  Bouché,  qui  tint  longtemps 
l'emploi  de  première  basse  à  l'Opéra.  Son  talent  revit  aujourd'hui  dans 
sa  fille  et  son  élève,  Mlle  Louise  Bouché,  qui  est  déjà  une  cantatrice  dis- 
tinguée. Elle  s'est  fait  entendre  dernièrement  dans  une  soirée  particu- 
lière, préludant  ainsi  aux  succès  qui  l'attendent  sur  une  plus  vaste 
scène. 

,**  M.  Mortier  de  Fontaine  donnera  le  23  de  ce  mois  un  concert  his- 
torique avec  le  concours  de  Rubinstein.  La  première  partie  du  pro- 
gramme, fort  intéressant,  se  composera  de  musique  d'autrefois  pour  la 
virginale,  Vépinette  et  le  clavecin,  inconnue  en  grande  partie  ici;  la  se- 
conde, de  musique  d'aujourd'hui;  tous  les  morceaux  y  seront  placés  par 
ordre  chronologique. 

;t*:f  En  constatant  le  grand  succès  obtenu  par  les  compositions  de 
Salvator,  à  sa  séance  du  31  mars,  nous  annonçons  deux  autres  audi- 
tions, les  21  et  27  avril. 

,**  La  Société  philharmonique  de  Boulogne-sur- Mer  a  donné,  le  30 
mars,  au  profit  dès  pauvres,  un  brillant  concert  dans  lequel  se  sont  fait 
applaudir  Eugène  Ketterer,  le  pianiste  élégant;  Demunck ,  l'habile  vio- 
loncelliste, et  Mlle  Godefroid,  une  cantatrice  qui  paraît  devoir  faire  par- 
ler d'elle. 

,*^,  M.  et  Mme  Jaëll,  Mlle  Battu  et  M.  Devoyod  ont  défrayé  le  pro- 
gramme du  magnifique  concert  donné  le  28  mars  par  l'Institut  musical 
d'Orléans,  pour  la  clôture  de  la  saison.  Ces  éminents  artistes,  dont  l'é- 
loge n'est  plus  à  faire,  se  sont  surpassés  et  ont  excité  de  vrais  transports 
d'enthousiasme. 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 

f*^  Les  théâtres  impériaux  ont  fait  jeudi  leur  clôture  annuelle  à  l'oc- 
casion de  la  Semaine-Sainte.  L'Opéra-Comique  et  le  théâtre  Lyrique  rou- 
vrent ce  soir,  et  l'Opéra  demain  lundi,  avec  Hanilet. 

,*i  Hamlet  a  été  donné  lundi  et  mercredi  au  théâtre  impérial  de 
l'Opéra. 

^%  La  charmante  danseuse  russe,  Mlle  Granzow ,  qu'on  applaudissait 
il  y  a  quelques  mois  à  l'Opéra,  vient  d'arriver  à  Paris. 

j*,£a  Part  du  Diable  apporte  d'excellents  lendemains  au  nouvel  opéra 
d'Auber.  Plus  sûre  de  son  rôle  maintenant,  Mlle  Brunet-Lafleur  obtient 
un  très-grand  succès  dans  le  personnage  de  Carlo.  —  On  annonce  pour 
vendredi  prochain  n,  la  première  représentation  de  l'opéra  de  M.  Sa- 


muel David,  Sylvia.  —  On  donnera  le  même  jour  la  repri.se  des  Voitures 
versées.  —  Outre  les  Dragons  de  Villars ,  il  serait  question  de  reprendre 
le  Brasseur  de  Preston  d'Ad .  Adam . 

***  Dimanche  dernier  //  Barbiere  a  été  représenté  au  bénéfice  de  l'excel- 
lent chef  de  chant  Alary.  Le  chef-d'œuvre  de  Ros,sini  était  interprété 
par  A.  Patli,  Nicolini,  Verger,  Scalese  et  Agnesi.  Cette  représentation 
a  été  fort  belle.  A.  Patti  a  chanté  à  la  leçon  de  musique  l'Éclat  de  rire 
d'Auber  et  la  Calesera.  -  Mardi  on  a  donné  Don  Giovanni  avec  Mme  Krauss 
Ad.  Patti  et  Tiberini,  MM.  Steller,  Tiberini,  Scalese  et  Verger.  Les 
époux  Tiberini  étaient  nouveaux  dans  cette  distribution.  Le  rôle  de 
donna  Elvira  a  été  très  favorable  à  Mme  Tiberini  et,  si  l'on  tient  compte 
des  difficultés  dont  il  est  hérissé,  elle  mérite  les  plus  grands  éloges  pour 
le  talent  de  comédienne  et  de  cantatrice  qu'elle  y  a  déployé.  Son  mari  a 
chanté  avec  beaucoup  d'art  et  de  sentiment  le  fameux  air:  )l  mio  tesoro 
il  est  seulement  à  regretter  qu'il  l'ait  forcé  en  certains  endroits.  Le 
trio  des  masques  a  été  bissé  ainsi  que  l'air  d'A.  Patti  :  Batti,  batti,  Ma- 
Z'^tto.  —  Les  rôles  de  don  Giovanni,  de  Leporello,  de  Mazetto  et  du 
commandeur  ont  été  très-bien  tenus  par  Steller,  Scalese,  Verger  et 
Agnesi.— Dimanche  prochain  19,  aura  lieu  la  représentation  au  bénéfice 
d'Adelina  Patti. 

***  Le  concert  spirituel  qui  a  eu  lieu  jeudi  au  théâtre  Italien,  avait 
attiré  un  très-nombreux  auditoire  et  bien  peu  de  places  sont  restées 
inoccupées.  Le  noir  dominait  dans  les  toilettes  et  la  salle  offrait  un  as- 
pect sévère.  Mmes  Patti,  Krauss  et  Grossi  étaient  également  en  noir  et 
tranchaient  sur  les  choristes  habillées  toutes  de  blanc.  —  Le  Stabat  de 
Rossini  a  été  interprété  par  les  trois  cantatrices  que  nous  venons  de 
nommer  et  par  MM.  Nicolini  et  Agnesi,  —  Le  Cujus  animam  dit  par 
Nicolini,  le  Pro  peccatis  par  Agnesi,  le  Fac  ut  portem  par  Mlle  Grossi, 
ont  été  particulièrement  applaudis;  mais  les  honneurs  ont  été  pour 
Mlle  Krauss,  qui  a  chanté  l'Inflammatus  avec  une  admirable  expression 
dramatique;  elle  a  été  appelée  avec  racclamation. —  La  troisième  partie 
se  composait  de  divers  morceaux,  parmi  lesquels  Adelina  Patti  a 
chanté  l'Ave  Maria  de  Gounod,  de  façon  à  enthousiasmer  l'auditoire  ;  elle 
a  dû  le  répéter  aux  applaudissements  de  la  salle  entière  qui  l'a  rap- 
pelée deux  fois.  Le  même  programme  a  été  exécuté  pour  la  seconde 
fois  hier  soir. 

**;(.  Le  théâtre  de  la  Renaissance  donnera  aujourd'hui  par  extraordi- 
naire, une  représentation  de  Faust  avec  Mlle  Schrœder  dans  le  rôle  de 
Marguerite,  M.  Massy  dans  celui  de  Faust  ;  M.  Troy  remplira  le  rôle  de 
Méphistophélès.  —  Demain  lundi,  Roméo  et  Juliette,  Mme  Carvalho  rem- 
plira le  rôle  de  Juliette. 

***  Au  théâtre  Lyrique,  aujourd'hui  la  Flûte  enchantée  de  Mozart,  in- 
terprétée par  Mlles  Marimon,  Daram,  MM.  Barré  et  Bosquin.  —  Demain, 
la  Fanchonnette  :  Mlle  Marimon  remplira  le  rôle  de  Fanchonnette,  M. 
Monjauze  celui  de  Listenay.  —  A  partir  d'aujourd'hui  dimanche,  le  prix 
des  places  est  diminué  au  théâtre  Lyrique,  ainsi  qu'on  l'avait  annoncé. 

t*t  Hier  a  été  donné,  au  théâtre  de  l'Athénée  la  première  représenta- 
tion de  Fleur  de  Thé,  opéra-bouffe  en  trois  actes  de  MM.  Chivot  et  Duru 
musique  de  Ch.  Lecoq,  joué  par  Désiré,  Léonce,  Sytter,  Mmes  Irma 
Marié  et  Lucile  Cabel.  Nous  en  rendrons  compte  dimanche  prochain. 

t*t  La  direction  des  Variétés  vient  de  s'attacher  Lecomte,  le  Couder 
lyonnais,  qui  a  fait  une  véritable  spécialité  du  rôle  du  général  Boum 
ainsi  que  Gobin,  excellent  comédien  dont  on  n'a  pas  oublié  l'entrain 
désopilant  dans  les  Douze  Innocentes,  de  Grisar,  aux  anciens  Bouffes. 

t*^  Bien  montée ,  suffisamment  interprétée ,  la  Grande-Duchesse  fait 
passer  des  soirées  agréables  au  public  du  théâtre  de  Nîmes.  Mlle  Durand 
et  M.  Puget  ont  parfaitement  compris  leurs  rôles. 

»%  Les  Dragons  de  Villars  viennent  d'être  représentés  à  Alger.  Salle 
comble,  magnifique  recette.  Le  piquant  et  l'attrait  de  cette  soirée,  c'est 
que  le  rôle  de  Rose  Friquet  était  rempli  par  Mlle  Henriette  S.,  une 
jeune  Algérienne  dont  le  talent  ne  demande  qu'à  être  cultivé  pour  don- 
ner des  résultats  excellents. 

^*^  La  remarquable  étude  de  Bulwer,  les  Derniers  Jours  de  Pompeï,  a 
inspiré  à  M .  Victorin  Joncières  un  grand  opéra  intitulé  Nydia,  qu'il  ter- 
mine en  ce  moment. 

**t  M.  Peragallo,  l'un  des  agents  généraux  de  la  So'îiété  des  auteurs 
et  compositeurs  dramatiques,  est  de  retour  d'Italie.  Il  s'y  était  rendu 
pour  assurer  à  Turin,  Gênes,  Milan,  Florence,  etc.,  le  mode  de  percep- 
tion du  droit  des  auteurs  garanti  par  le  traité  international.  Sa  mission 
ne  paraît  pas  avoir  beaucoup  réussi. 

s^i*^  La  Grande- Duchesse  continue  sa  marche  triomphale  en  Allema- 
gne; Munich  et  Presbourg  viennent  de  l'applaudir. 

^*,  Le  théâtre  royal  de  Berlin  vient  de  représenter  une  tragédie  en 
cinq  actes,  en  vers,  du  prince  Georges,  neveu  du  roi  Guillaume;  elle 
porte  le  titre  racinien  de  Phoedra.  La  musique  de  cette  œuvre,  entr'acte, 
chœurs,  mélodrame,  etc.,  est  de  M.  Taubert. 

**^  On  écrit  de  Saint-Pétersbourg  qu'en  outre  de  l'engagement  d'Ade- 
lina Patti,  l'administration  impériale  du  théâtre  Italien  s'est  également 
attaché  Fraschini,  à  raison  de  93,000  francs  pour  trois  mois.  L'ensemble 
des  appointements  de  cette  compagnie  lyrique  représente  une  somme 
énorme,  mais  elle  se  trouvera  certainement  couverte  par  les  belles  re- 


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REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


cctles  que  la  direction,  confiée  aux  mains  habiles  et  expérimentées  de 
M.  de  Guédéonnff,  ne  peut  manquer  de  faire.  Ainsi,  les  trente-six 
représentations  de  la  saison  dernière  ont  pi'odiiit  un  totnl  de  180,000  rou- 
bles, soit  une  moyenne  de  5,000  roubles,qui  représentent  environ  d6,500 
francs  par  soirée.  Di^à,  pour  la  prochaine  campagne,  la  presque  totalité 
des  feuilles  d'abonnements  des  trois  séries  est  remplie,  et  l'on  se  dis- 
pute les  quelques  loges  dont  la  direction  peut  encore  disposer. 

if*^  Nous  apprenons  avec  plaisir  que  M.  Louis  Liebé,  compositeur, 
père  de  la  charmante  violoniste  Thérè.«e  Liebé,  a  présenté  un  opéra- 
comique  en  trois  actes,  au  théâtre  grand-ducal  de  Carlsruhe.  Il  a  été 
choisi  pour  être  représenté  pour  la  première  fois  le  9  septembre  prochain, 
à  l'anniversaire  du  jour  de  naissance  de  Son  Altesse  Royale  le  grand-duc 
de  Bade.  Les  paroles  de  cet  opéra,  qui  est  intitulé  la  Fiancée  d'Avri- 
court,  sont  de  MM.  Adrien  Linden  et  Adolphe  Katsch. 

*%  Une  nouvelle  opérette  de  M.  Ed.  Audran,  fils  de  l'ancien  ténor, 
vient  d'être  représentée  à  Marseille,  sur  la  scène  du  Gymnase.  Elle  a 
pour  titre  :  Le  Petit  Poucet.  Plusieurs  morceaux  ont  été  fort  remarqués 
et  vigoureusement  applaudis. 


NOUVELLES  DIVERSES. 


,t*»  De  tous  les  arts,  la  musique  est  celui  qui  s'associe  le  plus  intime- 
ment aux  cérémonies  et  aux  solennités  de  la  Semaine-Sainte.  L'adoration 
est  un  état  de  l'âme  que  l'harmonie  peut  seule  exprimer,  .\ussi,  suivant 
en  cela  d'anciennes  traditions,  les  nombreuses  églises  de  Paris  ont-elles 
demandé  à  la  musique,  en  ce  temps  de  prière  et  de  recueillement,  la 
traduction  et  comme  le  commentaire  élevé  du  drame  de  la  Passion.  Celte 
année  a  été  sans  contredit  plus  riche  que  ses  devancières  en  manifesta- 
lions  de  nuisique  religieuse.  Mercredi  derni(;r,  dans  la  chapelle  de  l'École- 
Militaire,  des  dames  du  grand  monde  parisien,  Faure,  Mme  Sass,  Mlle 
Bloch,  les  choristes- hommes  de  l'Opéra,  chantaient  au  complet  \c  Stabat 
de  Rossini.  —  Jeudi  soir,  le  Stabat  mater  a  été  exécuté  par  Faure, 
Mlles  INilsson  et  Bloch,  à  la  chapelle  des  Tuileries.  —  Vendredi, 
Stabat  de  Rossini  à  Sainl-Eustache;  l'oratorio  d'Haydn,  les  Sept  Paroles 
de  \otre-Scigneur,  à  Saint-Roch  ;  tes  Sept  Paroles,  de  la  comiiosition  de 
M.  Th.  Dubois,  grand  prix  de  Rome,  maître  de  chapelle  de  Sainte-Clo- 
lilde,  à  cette  église  ;  nous  reparlerons  de  cette  dernière  œuvre.— Hier  soir, 
à  Saint-Roch,  comme  nous  l'avons  annoncé,  exécution  pour  la  première 
fois  à  Paris  du  Stabat  de  Palestrina,  par  diverses  sociétés  chorales  et  les 
enfants  des  maîtrises  de  plusieurs  paroi.sses,  sous  la  direction  do  M.  De- 
laporte  ;  nous  reviendrons  également,  dans  notre  piochain  numéro,  sur 
le  compte  de  cette  intéressante  .solennité.— .aujourd'hui,  à  Saint-Euslache, 
Messe  solennelle  de  notre  collaborateur  et  ami  François  Schwab,  qui  est 
venu  à  Paris  pour  en  diriger  l'exécution.  A  dimanche  notre  apprécia- 
tion.— A  l'église  des  BatignoUes,  mes,<!e  de  M.  Desplanques,  prix  de  Rome, 
etc.,  etc.  Nous  ne  pouvons  tout  mentionner,  mais  nous  sommes  heureux 
d'avoir  à  signaler  ce  réveil  du  grand  ait  religieux,  un  moment  compro- 
mis et  dédaigné,  et  auquel  reviennent  avec  succès  presqus  tous  les  com- 
positeurs de  l'école  moderne. 

^*^  Le  Stabat  jttatcr  de  M.  Bourgault-Ducoudray,  grand  prix  de  Rome, 
exécuté  dimanche  dernier  à  l'église  Saint-iùislai-hc,  est  une  œuvre  de 
haute  portée,  dans  laquelle  l'expression  n'est  point  sacrifiée  à  l'effet  so- 
nore, et  oij  l'auteur  a  mis,  au  service  d'une  inspiration  souvent  très- 
élevée,  une  science  véritable,  ma's  sans  ostenlation.  Ce  Stabat,  qui  a  été 
écouté  avec  un  vif  intérêt,  a  été  parfaitement  chaulé  par  MM.  Ponsard, 
Perrier,  Bollaert  et  Mosbrugger.  M.  Hurand  dirigeait  l'exécution; 
M.  Batiste  tenait  le  grand  orgue,  et  M.  Blondel  l'orgue  d'accompagne- 
ment . 

^*»  Une  touchante  cérémonie  a  été  célébrée  le  6  avril  à  Stuttgart  ;  le 
père  de  deux  éminents  artistes,  M.  Kriiger,  fêlait  le  cinquantième  an- 
niversaire de  son  mariage.  A  celte  occasion,  W.  Kriiger,  le  pianiste  que 
Paris  s'honore  de  posséder,  et  son  frère  l'habile  harpiste  qui  jouit  en 
Allemagne  d'une  si  grande  et  si  légitime  renommée,  ont  fait  appel  à 
toutes  les  ressources  de  leur  talent  ;  une  cantate  de  la  composition  du 
premier  de  ces  deux  virtuoses,  œuvre  d'un  très-grand  mérite,  a  été  exé- 
cutée à  la  solennité  religieuse.  De  plus ,  plusieurs  aubades  ont  élé  don- 
nées à  M.  Kriiger  père  par  des  musiques  militaires;  l'une  d'entre  elles 
a  exécuté  une  marche  triomphale  composée  pour  la  circonstance  par 
M.  Wieprecht,  directeur  des  musiques  de  la  garde  du  roi  de  Prusse. 

**,(,  A  son  retour  de  Saint-Pétersbourg,  H.  Berlioz  s'était  rendu  à  Nice 
pour  y  prendre  quelques  semaines  de  repos.  Dans  une  excursion  à  Mo- 
naco, un  grave  accident  lui  est  arrivé.  11  parcourait  un  site  escarpé 
d'où  l'on  avait  une  belle  vue  de  la  mer,  inais  que  des  rochers  et  des 
travaux  du  chemin  de  fer,  oîi  le  passage  était  interdit,  rendaient  fort  dan- 
gereux, lorsque  le  pied  lui  manquant,  il  tomba  de  toute  sa  hauteur  sur  la 
tête.  Etourdi  par  cette  chiite,  le  célèbre  compositeur  resta  quelque  temps 
évanoui  et  perdant  son  sang  par  une  large  plaie  qu'il  s'était  faite  au 
front  en  tombant.  Enfin  des  ouvriers  du  chemin  de  fer  l'ayant  aperçu. 


le  i-elevèrenl,  et  sur  .ses  indications,  lorsqu'il  fui  revenu  à  lui,  on  le 
transporta  à  Nice,  où  il  reçut  dans  son  hôtel  tous  les  soins  qu'exigeait 
son  étal.  H.  Berlioz  est  de  retour  à  Paris  depuis  huit  jours,  mais  encore 
fort  souffrant  des  suites  de  cet  accident. 

,^*,f  On  annonce  pour  après-demain  mardi,  au  cirque  des  Champs- 
Elysées,  la  troisième  et  dernière  audition  de  l'oralorio  de  Duprez,  le  Juge- 
ment dernier,  dont  nous  avons  rendu  compte  en  détail. 

^:*^  Une  décision  récente  de  M.  le  ministre  de  l'instruction  publique 
confère  le  titre  et  les  insignes  d'officier  d'académie  à  M.  Hurand,  maître 
de  chapelle  de  l'église  Saint-Eustachc. 

^*^  Nous  apprenons  que  l'un  des  beaux  instruir.ents  exposés  en  1867 
par  la  Société  anonyme  des  grandes-orgues,  Merklin-Schiitze,  et  qui  ont 
obtenu  la  grande  médaille  d'or,  a  été  inau.ùuré  mercredi  l"  avril  dans 
l'église  Notre-Dame  de  Bergerac.  M.  Auguste  Durand,  notre  éminent  or- 
ganiste de  Saint-Vincenl  de  Paul,  a  été  appelé  expressément  de  Paris 
pour  faire  entendre  et  valoir  les  qualités  de  l'instrument.  Cet  excellent 
artiste  a  enchanté  les  nombreux  auditeurs.  M.  d'Etcheverry,  organiste  de 
Saint-Paul  à  Bordeaux,  M.  Paschali,  organiste  de  la  caihédrale  de  Péri- 
gueux,  et  M.  Massis,  de  Saint-Sernin,  à  Toulouse,  ont  été  les  dignes 
partenaires  de  M.  Durand  dans  cette  belle  séance  musicale. 

^*jf  L'auteur  des  Légendes  campagnardes,  déjà  connues  (la  Légende  de 
Saint-Nicolas,  la  Légende  de  la  Pie,  la  Légende  des  Trois  Bretons,  la  Lé- 
ijcnde  du.  Péelicur,  etc.),  éditées  par  h  Ménestrel,  vient  de  publier  chez 
l'éditeur  E.  Gérard  deux  œuvres  nouvelles  :  la  Légende  de  Jean  Renaud 
et  la  Chanson  Scandinave;  et  chez  l'éditeur  Ch.  Grou,  un  recueil  de  huit 
mélodies  :  la  Départ,  poésie  de  Victor  Hugo;  l'Aveu,  d'IIippolyte  Phili- 
bert; Son  Rêve,  de  François  Coppée;  Mademoiselle  Ron:-on,  d'Honoré 
Maurard;  Journée  d'avril,  d'Honoré  Maurard  ;  ^'oici  l'Aube,  de  Victor 
Hugo;  l'Aubade  du  Fiance,  d'Olivier  de  Lafaye,  et  Loin  d'elle,  d'Hippolyte 
Philibert.  Nous  recommandons  à  nos  lecteurs  ces  œuvres  nouvelles  qui 
portent  le  cachet  artistique  et  original  de  celles  qu'à  déjà  publiées  notre 
collaborateur  Armand  Gouzien . 

,^*j,  M.  Dcldevcz,  second  chef  d'orchestre  à  la  Société  des  concerts  du 
Conservatoire,  connu  déjà  par  de  remarquables  pubhcations,  vient  de 
faire  paraître  chez  Richault  un  nouvel  ouvrage  qui  se  recommande  de 
lui-même  aux  artistes:  •■  La  Nolalion  de  la  musique  classique  comparée 
à  la  notation  de  la  musique  moderne,  et  de  l'exécution  des  potiles  notes 
en  général.  »  L'exécutant  est  bien  souvent  embarrassé  lorsqu'il  a  à  tra- 
duire les  innombrables  ornements  inusités  aujourd'hui,  et  qui  abondent 
dans  l'ancienne  mu.sique  ;  le  livre  de  M.  Deldevez  vient  donc  fort  à  pro- 
pos faire  la  lumière  dans  ce  chaos. 

„*^  Nous  signalerons  à  MM.  les  chefs  des  sociétés  chorales  une  collec- 
tion de  chœurs  très  remarquables  de  M.  Poil  da  Silva,  que  l'éditeur  Ri- 
chault fait  paraître  successivement.  Ces  choeurs,  très-variés  comme  forme 
et  comme  sujet,  dénotent  chez  leur  auteur  une  grande  science  dans  la 
manière  de  disposer  les  voix;  ils  devront,  bien  interprétés,  obtenir  de 
grands  succès.  Nous  avons  aujourd'hui  sous  les  yeux  les  trois  premiers 
qui  viennent  de  paraître  :  Dieu  le  veuU  Nous  te  chantons,  ô  nuit,  la  Citasse 
aux  lions. 

»*,t  On  assure  que  les  frais  de  l'exécution  des  fragments  du  Dante  de 
M.  le  duc  de  Massa,  au  Conservatoire,  atteignent  le  chiffre  respectable 
de  30,000  francs. 

,i,*ji.  Le  tribunal  correctionnel  d'Arras  a  rendu  son  jugement  dans  l'action 
en  dommages-intérêts  intentée  par  la  Société  des  auteurs  dramatiques 
contre  la  c  Musique  des  amateurs  »,  à  l'occasion  d'un  concert  dans  lequel 
plusieurs  morceaux  avaient  élé  exécutés  sans  autorisation.  Sur  les  con- 
clusions conformes  de  la  Société  des  auteurs  et  du  ministère  public,  le 
président  du  cercle  philharmonique  dont  il  s'agit  a  été  condamné  en 
SO  francs  d'amende,  plus  en  o  francs  de  dommages-intérêts  par  chaque 
morceau  chanté  sans  autorisation.  Voilà  un  point  de  jurisprudence  spé- 
ciale rigoureusemenl,  mais  très-nettement  établi. 

,t*»  L'illustre  violoniste  Joachim,  qui,  comme  on  sait,  résidait  à  Ha- 
novre avant  la  chute  du  roi  Georges,  son  protecteur,  s'est  décidé  à  se 
fixer  définitivement  à  Berlin. 

^^  Nous  avons  le  regret  d'annoncer  la  mort  de  M.  Duponchel,  une 
des  notabilités  parisiennes  les  plus  connues.  M.  Duponchel  avait  dirigé 
l'Opéra  de  1838  à  18i3,  en  second  lieu  de  1847  à  1849  et  le  Vaudeville 
en  1860. 

^*j  Mlle  Vitali,  la  cantatrice  aimée  des  scènes  italiennes,  vient  de 
perdre  sa  mère,  elle-même  artiste  remarquable,  fort  applaudie  autrefois 
en  Espagne,  en  Russie,  dans  la  Péninsule,  alliée  aux  Fraschini,  aux 
Ronzi,  aux  Scalese,  et  qui  avait  parachevé  l'éducation  musicale  de  sa 
fille. 

,t*,^  On  annonce  la  mort  du  pasteur  Johannes  Cotta ,  de  WiUerstedt 
près  Weimar,  auteur  de  la  mélodie  du  chant  national  d'Arndt  :  Was  ist 
das  Deutschen  Vaterland  (  Quelle  est  la  patrie  de  l'Allemand?),  si  popu-^ 
laire  dans  les  pays  d'outre-Rhin. 


ut;  PARIS 


H9 


ÉTRANGER 

^*^  Bruxelles.  —  En  fait  de  nouveauté  nous  n'avons  eu,  depuis  peu, 
au  Théâtre-Royal,  qu'une  représentation  de  Dm  Carlos  avec  réduction  du 
prix  des  places  à  la  moitié  du  taux  ordinaire.  C'est  un  essai  que  tentait 
la  direction  et  qu'elle  renouvellera,  car  il  a  pleinement  réussi.  Il  y  a 
des  pièces  où  qui  n'ont  jamais  fait  ou  qui  ne  font  plus  d'argent,  on  est 
cependant  obligé  de  les  donner  de  temps  à  autre,  lorsqu'il  y  a  quelque 
obstacle  à  ce  que  l'on  puisse  offrir  au  public  un  spectacle  attrayant.  Ces 
jours-là,  on  ouvre  les  portes  du  tliéâli-e  parce  qu'on  ne  peut  pas  se  dis- 
penser de  le  faire;  mais  on  est  certain  d'avance  que  la  salle  présentera 
l'aspect  d'une  triste  solitude.  On  s'est  demandé  si,  en  diminuant  de 
moitié  le  prix  des  places,  on  n'attirerait  pas  les  personnes  auxquelles  un 
médiocre  état  de  fortune  ne  permet  pas  de  s'accorder  le  nue  de  l'opéra. 
Un  public  nombreux  vient  do  répondre  affirmativement  à  cette  question. 
On  aurait  fait  500  francs  de  recette  au  prix  fort,  on  en  a  fait  3,000  à 
prix  réduit.  Voilà  donc  une  ressource  dont  il  faudra  user  avec  discrétion 
seulement,  afin  de  ne  pas  trop  mettre  le  public  en  goût  des  représenta- 
tions à  bon  marché.  —  Lundi,  il  y  aura  foule  au  Théâtre-Royal,  et 
cette  fois  il  ne  sera  plus  question  de  rabais,  on  élèverait  plutôt  le  prix  des 
places.  Mme  Sass,  qui  vient  nous  donner  une  série  de  représentations, 
commencera  par  C Africaine.  11  y  aura  une  grande  curiosité  pour  voir  la 
Selika  désignée  par  Meyerbeer.  Deux  jours  après  aura  lieu  la  première 
représentation  de  La  Jolie  Fille  de  Perth.—  Le  mois  prochain,  les  repré- 
sentations du  grand  opéra,  qui  se  prolongent  habituellement  jusqu'au  !<"■ 
juin,  cesseront  au  Théâtre-Royal.  Le  directeur  a  traité  avec  une  troupe 
italienne  dont  les  représentations  alterneront,  pendant  le  mois  de  rciai, 
avec  celles  de  l'opéra-comique.  C'est  encore  un  essai  auquel  s'est  décidé 
l'entrepreneur  en  voyant  que  dans  l'état  actuel  du  répertoire  et  attendu 
le  peu  de  sympathie  qu'aie  public  poul  le  personnel  chantant  en  fonction, 
le  drame  lyrique  était  complètement  déserté.  Les  amateurs  de  bonne  musique 
viennent  d'avoir  l'heureuse  chance  d'entendre  Mme  Schumann  et  M.  Joa- 
chim  dans  une  même  séance.  Les  deux  célèbres  virtuoses  ont  été  dignes 
d'eux-mêmes,  dignes  de  leur  réputation,  ce  qui  est  tout  dire.  Deux 
jours  après,  M.  Joachim  jouait  au  Concert  populaire  et  faisait  merveille, 
comme  toujours.  Son  apparition  et  celle  de  M.  Rubinstein  auront  été, 
cet  hiver,  les  deux  événements  de  la  virtuosité  à  Bruxelles. 

***  Londres.  —  Mario  a  fait  sa  rentrée  à  Covent  Garden  samedi  der- 
nierdans  Rigoletto;  on  lui  a  fait  un  chaleureux  accueil.  — -  A  Drury-Lane, 
la  cantatrice  américaine  Mlle  Kellog,  s'est  fait  applaudir  dans  la  Traviata, 
et  Mlle  Sinicodans/i  Trovalore.  —  Joachim  a  quitté  Londres  le  3  avril; 
il  retourne  en  Allemagne,  et  profitera  de  son  passage  à  Bruxelles  pour 
y  donner  un  concert.  —  Mme  Lucca  est  attendue  le  1"="'  mai;  elle  n'est 
engagée  que  jusqu'au  15  juin.  —  Louis  Engel  a  donné  un  concert  à  pro- 
pos duquel  le  Morning  Post  s'exprime  en  ces  termes:  «  On  ne  se  rend 
compte  des  effets  qu'on  peut  tirer  de  l'harmonium  qu'en  l'entendant 
joué  par  un  maître  comme  Engel,  qui  sait  y  produire  des  sons,  d'une 
variété  et  d'une  richesse  inouïes.  Un  public  d'élite  est  venu  samedi  der- 
nier rendre  hommage  à  ce  brillant  talent;  des  compositions  de  Mozart, 
Rossini,  Chopin,  Mendelssohn,  d'Engel  lui-même,  ont  été  exécutées  d'une 
manière  admirable  par  cet  artiste  éminent,  et  ce  ne  sont  pas  les  der- 
nières qu'on  a  le  moins  applaudies.  »  Le  piano-harmonium,  combinaison 
d'un  orgue  d'Alexandre  et  d'un  piano  d'Erard,  a  fait  un  excellent  effet. 
—  Le  jeune  violoniste  belge  Hermann  Sternbei-g  a  obtenu  un  très-grand 
succès  dans  un  concert  du  Crystal-Palace  en  exécutant  une  fantaisie 
de  Vieuxtemps. 

.jf*-ii  Bade.  — On  commence  déjà  à  s'occuper  de  la  saison  musicale; 
après  les  représentations  de  la  troupe  de  Carlsruhe,  au  mois  de  mai,  le 
théâtre  appartiendra  à  celle  de  Strasbourg,  sous  la  direction  de  M.  Mutée. 
Pour  le  mois  de  septembre,  il  es.t  question  de  l'engagement  des  ténors 
Niemann  et  Wachtel,  du  baryton  Belz  de  Berlin,  de  la  basse  Schmidt 
de  Vienne,  de  Mlles  Nilsson,  de  Murska,  et  Thellheim.  Don  Juan  et  le 
Postillon  de  Lonjumeau  seront  donnés  pour  cette  dernière  et  Wachtel. 
Maria,  la  Sonnàmbula,  la  Favorita,  Norina,  Il  Matrimonio  segreto,  compo- 
seront le  répertoire  italien  interprété  par  Steller  et  Mmes  Fricci  et  Vol- 
pini.  Le  mois  d'août  est  réservé  à  la  Comédie  Française. 

,^%  Darmitadt. —  Le  29  mars  a  eu  lieu  la  première  représentation  de 
Don  Carlos  ;  l'œuvre  de  Verdi  n'a  réussi  que  médiocrement. 

„*^,  Sahbourg.—  Le  compositeur  Henri  Schnaubelt  vient  de  remporter 
un  brillant  succès  avec  son  opéra  Die  Hose  von  Hallwyl  ;  il  a  été  rappelé 
après  chaque  acte  et  couronné  à  la  fin  de  la  représentation. 

a,**  Cologne.  —  Au  prochain  festival  de  la  Pentecôte,  qui  sera  dirigé 
par  Ferd.  Hiller,  on  exécutera  le  Messie  de  Haendel,  la  cantate  de  la  Pen- 
tecôte de  Bach,  le  huitièiue  psaume  de  Mendelssohn,  la  neuvième  sym- 
phonie de  Beethoven,  une  ouverture  de  Gade,  une  de  Hiller,  une  sym- 
phonie de  Schuman  et  un  concerto  de  violon  de  Joachim.  Les  solistes 
sont  Mmes  Ilarriers-Wippern  et  Joachim,  MM.  Gunz,  Sthmidt  et  Joa- 
chim 

^,*^  Berlin.  —  La  troupe  italienne,  dirigée  par  Lorini,  a  terminé  par 
Norma  ses  représentations  au  théâtre  Victoria. 


*%  Leipzig.  —  Le  2  avril  a  été  célébré  le  vingt-cinquième  anniver- 
saire de  la  fondation  du  Conservatoire. 

^*^  Kœnigsberg.  —  Le  grand  festival  qui  devait  avoir  lieu  dans  cette 
ville  à  la  Pentecôte  est  contremandé,  à  cause  de  la  triste  situation  oii  la 
disette  a  plongé  les  districts  orientaux  de  la  Prusse. 

.i*if,  Vienne.  —  Mlle  Ehnn,  dans  rAfricaine,  obtient  un  succès  qui  fait 
presque  oublier  sa  célèbre  devancière  Mme  Gompertz-Beltellieim;  Adams 
(Vasco)  et  Mlle  Rabatinski  (Inès)  continuent  à  s'y  distinguer  à  côté  d'elle. 
-  L'un  des  vétérans  de  l'Opéra,  le  ténor  Erl,  vient  de  quitter  la  scène 
après  une  honorable  carrière  de  trente  années.  Il  a  fait  ses  adieux  au 
public  dans  lioberl  le  Diable,  son  opéra  de  début;  les  témoignages  les 
plus  flatteurs  de  sympathie  et  d'estime  lui  ont  été  prodigués  du  com- 
mencement jusqu'à  la  fin. 

**^  Pragu'!.  —  Das  Kcelhchen  von  Heilbronn,  opéra  nouveau  de  Moritz 
Jaftë,  a  été  donné  pour  la  première  fois  le  25  mais.  L'accueil  qu'il  a  reçu 
du  public  a  été  en  général  favorable,  bien  que  quelque  opposition  se 
soit  manifestée  à  diverses  reprises. 

***  Venise.  —  La  saison  est  terminée  à  la  Fenice.  La  dernière  repré- 
sentation, composée  de  trois  actes  de  l'Africaine  et  de  fragments  des 
Vêpres  sioitiimnes,  n'a  été  qu'un  long  triomphe  pour  la  prima  donna 
Lotti. 

jis*^  Florence.  —  Roméo  et  Juliette,  de  Gounod,  a  été  donné  à  la  Per- 
gola avec  succès,  malgré  l'insuffisance  de  l'exécution. 


CONCERTS  ET  AUDITIONS  MSICÂLES  ANNONCÉS. 

Salle  Herz,  demain  lundi  à  8  heures  V2  :  cinquième  concert  d'A.  Ru- 
binstein, avec  orchestre. 

Salons  Pleyel-Wolff,  demain  lundi  :  sixième  séance  populaire  de  musi- 
que de  chambre,  donnée  par  MM.  Lamoureux,  Colblain,  Adam  et 
Poencet,  avec  le  concours  de  M.  Fissot. 

Salle  Herz,  mardi  ii  avril:  concert  du  violoniste  Fr.  Console,  avec  le 
concours  de  Mlle  de  Vriès.  —  Une  tempête  dans  un  verre  d'eau,  in- 
termède. 

Salons  Pleyel-Wolfl,  mercredi  -15  avril  :  quatrièrne  et  dernière  soirée  de 
musique  de  chambre,  par  MM.  Maurin,  Colblain,  Mas  et  Demunck, 
avec  M.  Camille  Saint-Saëns. 

Salle  Herz,  samedi  18  avril  :  concert  du  jeune  Rendano,  avec  le  con- 
cours de  Mlle  Nilsson,  de  Gardoni  et  Delle-Sedie. 

Salons  Erard,  lundi  20  avril  :  grand  concert  de  M.  Delaborde,  pour 
l'audition  du  piano  à  clavier  de  pédales  d'Erard. 

Salons  Erard,  mardi  21  avril  :  concert  de  Vivier. 
Salons  Erard,  jeudi  23  avril  :  concert  du  pianiste  Jacques  Baur. 
Salons  Pleyel-Wolff,  samedi  25  avril  :  concert  de  Mlle  Leybacque. 
Salons  Erard,  lundi  27  avril  :  concert  de  Mlle  Octavie  Caussemille. 


s.  DBFOUR. 


VIENT  DE  PARAITRE 
Chez  G.  BRANDUS  et  S.  DUFOUR,  éditeurs,  405,  rue  de  Richelieu. 

IDA 

Rêverie  sur  la  romance  :  0  laisse-moi  pleurer  !  de  Luc  Leroy, 
Composée  pour  le  piano, 

Par  mortier  DE  FONTAINE 

Prix  :   5  francs. 


Pour  le  piano  sur 


SOUS  PRESSE  : 
Fantaisie   lirillante 

L' AFRICAI]\E    de  Meyerbeer, 


TERESA    GARRENO 

Op.  24. 


120 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE  DE  PARIS. 


CHEZ    G.     BRANDUS    ET    S.     DUFOUR,    EDITEURS,     103,    RUE     DE     RICHELIEU 


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POUR  DEUX  SOPRANI,  TENOR,  BASSE  ET  CHŒUR  A  4  OU  5  VOIX. 

COMPOSÉ   PAR 

G.   Rossini 

La  Partition  pour  Chant  et  Piano,  format  in-S",  prix  net  :  8  francs. 

La  même,  format  in-i",  prix  :  25  francs. 
Arrangements  pour  Piano  et  ponr  narmoninm  i 


ADAM.  —  Souvenirs  du  Stabat  Mater,  2  suites,  chaque.  6    > 
BBISIIiEir  RICHARDS.  —  Transcription  pour  le  piano 

du  Cujus  aiilmam,  air  du  Stabat  Mater 6    » 

Id.    —    Quis  es*  Iionio ,  transcription.       6    » 

Id.    —    Pro  peeeatiB,  transcription 6    » 

COIHBOUIi.  —  Fantaisie  de  salon 6    » 

CRAMER.  —  Bouquet  de  mélodies 7  50 

FESSY.  —  Réminiscences  pour  harmonium 6    » 

MERCADANTE.  —  Grande  ouverture  sur  quelques  motifs  du  STABAT  MATER,  pour  piano,  prix  :  9  fr 


FUMAG Alilil .  —  Morceau  de  salon 6    » 

CrAUBERT.  —  Impromptu  sur  le  Cujus  animam.  ...  7  50 

liABARRE  et  BÉRIOT.  —  Duo.   . 9     » 

liECARPElVTIER.  —  Bagatelle  sur  le  Stabat  Mater.     .  5    » 

IiISTZ.  —  Cajas  aiilmam,  transcription 6     » 

RI'MMEIi.  —  Fantaisie 7  50 

VAI.IQUET.  —  Petit  morceau  très-facile 2  50 

VOSS.  —  Scène  chantante 9     » 


PAIJIi   BEKJlVARD  ET  HEIVRI   HERZ.  —  Transcriptions  pour  le  piano  des  chœurs  :  la  Fol,  la  Charitë,  l'Espérance. 


La  partition  du  STABAT  MATER  de  Rossini,  arrangée  pour  le  piano  seul,  par  HENRI  HERZ,  prix  25  fr. 

La  même,  arrangée  pour  le  piano  à  quatre  mains,  par  CZERNY,  prix,  25  francs. 


MESSE  DE  REQUIEM  A  QUATRE  VOIX 

AVEC  ACCOiPAGlIElENT  DE  PIASO  ET  D'ORCHESTBE 

CONTENANT 

Le  Requiem,  le  Kyrie,  la  Prose  complète,   le  Sanctus,  le  Benedictus  et  l'Agnns  Dei, 

Musique  tirée  des  différents  ouvrages  de 


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Cantique  tiré  de  l'Imitation  de  Jésus  Christ,  à  six 

Toiï  avec  récits 9  " 

Pater  noster,  offertoire,  chœur  à  4  TOiï,  sans  ace.  4  50 

Salve  Regina,  chœur  à  4  voix 4  » 

Sept  chants  religieux  à  4  voix net.  15  » 

Sainte  Marie,  chœur  du  Pardon  de  Ploërmel.  .  5  » 

Pater  noster,  à  4  voix,  du  même  opéra      ....  4  » 

Prière  du  matin,  pour  2  chœurs  à  8  voix  ...  6  » 

Prière  pour  3  voix  de  femme,  sans  accomp  .   .   .  3  • 

ADOIiPBE  ADAM 

mois  de  Marie  de  Saint -Philippe, 

HUIT  HOTETS   A  CNE  ET  DEDX  VOIX  AVEC  ACCDUF.   d'oRGCE. 

1 .  Ave  Maria,  hymne  à  la  Vierge,  pour  soprano, 

avecaccomp.de  hautbois,  ad  lib 3    » 

2 .  Ave  Maria,  solo  pour  contralto 3    » 

3.  Ave  Maria,  duo  pour   soprano  et  contralto, 

avec  accomp.  de  hautbois,  ad  lib 4  50 

4.  Ave  vei'um,  solo  pour  soprano 2  50 

5.  Ave  regina  cœlorum,   duo  pour  soprano   et 

mezzo  soprano 3  75 

6.  Inviolata,  duo  pour  soprano  et  mezzo  soprano.  3  75 

7.  0  salutaris,  pour  soprano 3    » 

8.  Ave  maris  Stella,  duo  pour  soprano  et  mezio 

soprano 5    » 

Les  8  numéros  réunis  :  10  fr.  net. 


LES  HOnCEASX  DÉTACHÉS  AVEC  ACCOHP.  DE  PUNO 


BOSSIJVI 

STABAT  MATER 


1.  Introduction . 

,  Air  pour  té- 
nor .... 

,  Duo  pour  2 
soprani  .  . 

.  Air  pour  basse'i 
ou  ténor.   .( 

,.    Chanir  et  ré-\ 

"•      citatif.   .   A 

6.  Quatuor  ■  ■   ■ 

„  Cavatine  pour\ 
soprano  .  .i 

„  Air  et  chœur\ 
'    pour  sopranoi 

g  Quatuor  sans^ 
accompag..! 

10.  Chœur  final} 


Stabat  Mater  .... 
La  Vierge  en  pleurs  . 

Cujus  animam 

La  douleur  avec  son  glaive 

Quis  est  homo 

Où  peut  être  la  mesure.   . 

Pro  peccatis 

Fruits  amers 

Elia   mater 

Source  d'amour 

Sancta  mater 

Vierge,  accorde-moi  lagrâce 

,Fac  ut  portem 

G  cœur  noyé! 

Inflamniatus 

Par  la  flamme 

iQuando  corpus 

!Que  la  croix  me  justifie.   . 

Amen 

^Seigneur!  Seigneur!  .  .   . 


5  » 
3  75 
3  75 
3  75 
3  75 
5  » 
3  i> 
5    » 


A.  PAnrSEROIiT 

Prière  à  Marie,  cantique  pour  basse-taille,  bary- 
ton ou  contralto 3  d 

Le  nom  de  Marie,  cantique  à  2  voix  de  femmes.  4  50 

Invocation  à  Marie,  cantique  à  2  voix 2  » 

0  salutaris,  pour  soprano  ou  ténor 2  50 

Aqnus  Dei,  pour  ba.'sse-taille,  baryton  ou  contralto  3  » 

Benedictus,  pour  basse-taille,  baryton  ou  contralto  6  u 
Mon  unique  espérance,  pour  soprano  ou  ténor, 

avec  accomp.  de  piano  ou  mélodium  ....  5  > 

Jésus  vient  de  naître,  cantique  pour  2  voix.   .  .  4  50 

B.  PAMOCKA 

Ave  Maria,  pour  ténor  ou  mezzo  soprano,  avec 

accomp.  de  piano  ou  orgue 3    » 

0  salutaris,  pour  ténor  ou  mezzo  soprano,  avec 

accomp.  de  piano  ou  orgue 3    » 

Ti  prego  o  Madré  mia,  prière  pour  mezzo  soprano, 

avec  accomp.  de  piano 3    » 

STADLER.  —  Deux  motels  et  les  quatre  an- 
tiennes à   la   sainte  Vierge ,  à  4  voix, 

avec  accomp.  d'orgue 7  bO 

LABARRE. — Cantiqueà  Alarie, chœur  k3  voix  S    » 

A.  BINÉ. —  0  salutaris,  p.  soprano  et  chœurs  2  30 

E.  JONAS. — Osa/utarîs,  pour  ténor  ou  soprano  3     » 

SÂLESSES. —  0  salutaris,  3  v.,  solo  et  choeur  3    » 


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REVUE 


19  Avril  18<;8. 


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Paris. 24   r.  par  an 

Départemeots,  Belgique  et  Suisse —    30  v      id. 
Étranger 34  n      td, 

Le  Journal  parait  le  Dimanche. 


GAZETTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


SOMMAIRE.  — Théâtre  impérial  de  l'Opéra  -  Comique  ;  Mademoiselle  Sylvia, 
opéra-comique  en  un  acte,  paroles  de  M.  Narcisse  Fournier,  musique  de  M.  Samuel 
David,  par  Paal  Bernard.  —  Théâtre  de  l'Athénée  :  Fleur  de  Thé,  opéra- 
bouffe  en  trois  actes,  paroles  de  MM.  Chivot  et  Duru,  musique  de  M.  C.  Lecocq. 
—  Le  concours  d'opéra.  —  La  musique  religieuse  à  Paris  pendant  la  semaine 
sainte,  par  Em.  Hatliiea  de  Monter.  —  Entrefilets  —  Concerts  et 
auditions  musicales  de  la  semaine.  —  Nouvelles  des  théâtres  lyriques.  — 
Nouvelles  diverses.  —  Concerts  et  auditions  musicales  annoncés.  —  An- 
nonces . 


THEATRE  IBIPÉRIÂl  DE  L'OPÉRA-COIIOUE. 

MADEnOISEIiliE  STIitlA, 

Opéra-comique  en  un  acte,  paroles  de  M.  Narcisse  Foubnier, 
musique  de  M.  Samuel  David. 

(Première   représentation  le  17  avril  1868.) 

M.  Samuel  David  fait  partie  de  la  série  des  pri.K  de  Rome  pour 
lesquels  MM.  Ritt  et  de  Leuven  ont  prononcé  le  fiât  lux  de  la 
rampe. 

C'est  un  droit,  répondra  t-on,  pour  MM.  les  lauréats  de  l'Insti- 
tut de  faire  représenter  un  acte  sur  la  scène  subventionnée  de 
rOpéra-Coinique.  Le  cahier  des  charges  en  fait  foi. 

Mais  il  est  si  facile,  dans  la  comédie  qui  se  passe  derrière  le  ri- 
deau, si  facile  à  MM.  les  directeurs  d'éluder  ce  droit  par  mille 
petits  moyens,  qu'il  faut  savoir  gré  à  MM.  Ritt  et  de  Leuven  de 
leur  paternelle  initiative  à  l'égard  des  jeunes  compositeurs  chargés 
des  palmes  de  l'école. 

L'année  dernière  M.  Massenet  s'était  déjà  montré  digne  de  cette 
faveur  directoriale;  cette  fois  encore,  M.  Samuel  David  a  donné 
raison  à  i;ette  bienveillante  hospitalité  en  tenant  fort  honorable- 
ment le  drapeau  de  la  jeune  garde. 

Le  nom  de  David  a  toujours  été  très-bien  porté  en  musique, 
témoin  le  roi  de  ce  nom  dont  la  puissante  harpe,  si  l'on  en  croit 
les  traditions,  savait  se  faire  entendre  du  Ciel  même,  témoin,  pour 
en  chercher  un    exemple   plus  terrestre   et   surtout   plus  récent. 


Félicien  David  et  ses  riches  œuvres  consacrées.  Le  nou- 
veau David,  élève  d'Halévy ,  croyons -nous,  ne  semble  pas 
vouloir  s'inspirer  de  ses  homonymes.  Moins  poëte  que  le  roi-pro- 
phète, moins  coloriste  que  Félicien,  il  paraît  se  complaire  dans 
ces  sentiers  battus  qui  appartiennent  à  tout  le  monde,  mais  qui 
cependant  ne  manquent  pas  d'un  certain  charme,  parce  qu'on 
y  rencontre  toujours  le  frais  bluet  et  le  brillant  coquelicot.  Nourri 
d'une  assez  forte  dose  d'études  sérieuses,  M.  Samuel  David  montre 
dès  les  premières  mesures  de  son  ouverture  qu'il  sait  manier  l'or- 
chestre et  tailler  un  morceau  de  musique.  Plus  tard,  quand  les 
vois  chantent,  il  prouve  aussi  qu'il  sait  écrire  pour  elles,  et  même 
les  faire  briller  à  l'occasion.  Cependant  ces  diverses  qualités  laissent 
l'auditeur  un  peu  froid.  Cela  tient  peut-être  à  ce  que  la  personna- 
lité du  jeune  compositeur  n'est  point  encore  accusée.  Les  for- 
mules de  l'école  surnagent  encore  sur  le  courant  de  son  imagi- 
nation et  entravent  des  idées  qui  ne  demanderaient  pas  mieux 
que  de  s'élancer.  Apprenez,  sachez,  mais  oubliez  ensuite.  La  science 
porte  forcément  ses  fruits,  et  le  travail  accompli  est  une  richesse 
acquise. 

L'ouverture  est  une  des  parties  réussies  de  l'œuvre.  Conduite 
avec  une  certaine  autorité  elle  fait  défiler  plusieurs  motifs,  tous 
charmants  et  pleins  de  finesse.  Pendant  qu'elle  se  déroulait  je  cher- 
chais une  analogie,  car  l'imagination  humaine  se  nourrit  de  com 
paraisons,  et  j'ai  pensé  à  Auber. 

Dans  une  romance  de  ténor,  chantée  dans  la  coulisse,  dans  une 
ariette  de  Mlle  Séveste,  j'ai  remarqué  de  jolis  accompagnements 
d'orchestre.  Un  duelto  des  deux  femmes  nous  offre  une  valse 
syllabique  qui  plaira  certainement  beaucoup.  Il  faut  citer  le  grand 
air  de  Mlle  Girard,  très-bien  fait  d'un  bout  à  l'autre,  et  dans  lequel 
un  fort  joli  motif  se  présente  sur  ces  deux  vers  : 

Oui,  je  sais  plus  d'un  visage 
Qui  rajeunit  tous  les  ans. 

Cet  air  renferme  aussi  un  fort  long  et  très-intéressant  point 
d'orgue,  que  Mlle  Girard  a  parfaitement  enlevé,  et  qui  lui  a  valu 
des  applaudissements  bien  mérités.  Citons  un  petit  quatuor  sylla- 
bique, très-court,  mais  très-fin.  Peut-être  l'a-t-on  rencontré  quel- 
que part?  N'importe,  c'est  pimpant,  frais  et  gracieux.  Citons  en- 
core un  mélodrame  renfermant  une  jolie  phrase  par  les  altos  et 
le  quatuor  final  présentant  un  bel  ensemble. 


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rnEVUË  ET  GAZETTE  MUSICAL li' 


Maintenant  je  i^^'apérçois,  un  peu  tard,  que  j'ai  manqué  à  totjs' 
mes  devoirs  envers  M.'  Narcisse  Fournier,  en  ne  racontant  pas  Te' 
poëme  dont  il  est  l'auteur. 

En  deiix  mots,  voici  ce  dont  il  s'agit  : 

Mlle  Sylvia  est  la  première  chanteuse  de  la  Comédie  italienne. — 
JlUe  Camille  est  sa  rivale  en  amour,  mais  non  pas  en  talent;  toutes 
deux  jettent  leur  dévolu  sur  le  neveu  d'un  riche  marchand,,  et 
ce  dernier  vient, jusque  chez  elles  résolue  à  le  leur  disputer. 
Toutefois,  pour  l'arracher  à  l'une,  il  le  jette  dans  les  bras  de  l'au- 
tre, qui  se  fait  épouser.  Tout  ceci  n'est  ni  bien  logique,  ni  bien 
neiAf,_  mais  en(in  MHq.  ^ylvia.-tciomplie  sur  toute  Ja  ligne,  et,  si 
voas  le  trouvez,  bon,  la  cause  est  entendue. 

L'interprétation  de  ce  petit  ouvrage,  assez  innocent  comme 
poëme,  très-honorable  comme  musique,  est  très-brillante  do  la  part 
defMlle  Girartk,  trèa-suflisaute  de  la  part  de  Mlle  Sevcste,  très-^ 
méritante  de  la  part  de  M.  Natlian,  contestable  de  la  part  de 
M.  Leroy,  qui  veut  parfois  se  donner  des  airs  de  premier  ténor 
en  faisant  des  demi-teintes  exagérées  ou  des  éclats  de  voix  allant 
jusqu'au  chevrotement.  Je  ne  sais  pourquoi  cela  m'a  rappelé.. la. 
Grenouille  et  le  Bœuf.  Pardonnez-moi  d'avoir  de  telles  distractions 
et  de  penser  à  une  fable  de  la  Fontaine  en  assistant  à  un  opéra- 
comique  de  M.  Narcisse  Fournier. 

Paul  BERNARD. 


THEATRE  DE  L'ATHÉNÉE. 

FEiEUB   DE   TUÉ, 

Opéra-bouffe  en  trois  actes,  de  MM.  Chivot  et  Dunu,  musique  de 
M.  Charles  Lecogq. 

(Première   repriisentation  le  11  avril  1808.) 

Nous  venons  d'assister  à  la  représentation  d'une  œuvre  de  la- 
quelle datera  certainement  une  ère  nouvelle  pour  l'Athénée. 
Fleur  de  Thé  va  faire  prendre  délînitivement  au  public  le  chemin 
de  ce  théâtre.  Nous  en  avons  pour  garant  l'accueil  qu'on  lui  a 
fait  les  premiers  soirs,  non-seulement  pour  la  musique  qui 
est  charmante,  mais  aussi  pour  les  paroles  qui  sont  aussi  gaies 
que  spirituelles. 

Fleur  de  Thé  est  une  jeune  Chinoise  qui,  pour  échapper  à  une 
poursuite  indiscrète,  se  réfugie  dans  un  débit  de  consolation  tenu 
par  le  couple  Pinsonnet,  dans  n'importe  quelle  ville  de  l'empire 
du  milieu.  Elle  est  reçue  par  Pinsonnet  qui  la  cache  au  tond 
de  sa  cantine,  en  l'absence  de  sa  femme.  Mais  elle  a  été  vue  et 
dénoncée  ;  aussi  voyous-nous  bientôt  survenir  le  papa  Tien-Tien, 
un  mandarin  de  première  classe,  s'il  vous  plaît,  suivi  de  son  futur 
gendre,  le  capitaine  des  tigres  Ka-o-Lin;  Désiré  et  Léonce,  c'est 
tout  dire.  Or,  il  existe  en  Chine  une  satanée  loi  du  Tsinn,  d'après 
laquelle  tout  homme  qui  a  vu  une  jeune  iille  sans  voile  est  con- 
damné à  l'épouser  ou  à  subir  le  supplice  du  pal.  Tien-Tien  pro- 
cède donc  à  l'enlèvement  sommaire  de  Pinsonnet,  l'emmène  chez 
lui,  et  lîi  il  lui  pose  le  dilemme  ci-dessus.  De  ces  deux  maux,  le 
mariage  ou  le  pal,  Pinsonnet,  au  mépris  de  ses  liens  antérieurs 
n'hésite  pas  à  choisir  le  moindre,  d'autant  plus  que  la  loi  chinoise 
l'autorise  à  prendre  des  femmes  de  luxe  et  il  destine  cet  emploi  à 
la  sienne. 

Sur  ces  entrefaites,  celle-ci  apporte  au  mandarin  Tien-Tien  un 
panier  de  Champagne,  et  retrouve  Pinsonnet  sous  ses  brillarrts  ha- 
bits de  noce.  Explication  orageuse  s'il  en  fut;  Pinsonnet  affirme 
qu'il  n'a  cédé  qu'à  la  nécessité,  et,  pour  preuve  de  ses  bonnes 
intentions,  il  apprend  à  sa  Césarine  qu'il  a  juré  au  capitaine 
Ka-o-Lin  de  respecter  son  ex-fiancée.  Au  fond,  Césarine  ne  tient 
pas  à  ce  qu'on   empale   son   mari,  mais  elle  a  peu  de  confiance 


dans  ses  promesses,  et  elle  s'arrange  de  façon  à  li-eraplacer  Fleur 
de'Thé  pendant  la  nuit,  où  tous  les  chats"  sont  gris.  Nous  ne  di- 
rons rien  de  l'explication  qui  en  résulte,  le  lendemain,  entre  les 
deux  époux;  elle  est  trop  délicate  et,  pour  la  classifier, ' il  faudrait 
transcrire  toute  une  scène  qui  est,  sans  contredit,  la  plus  piquante 
de  la  pièce.  Toujours  est-il  que  là  situation  de  Pinsonnet  n'en  èsf 
pas  moins  perplexe.  Car,  en  apprenant  la  substitution  qiiî'à' eu 
lieu,  le  mandarin  Tien-Tien  assemble  le  conseil -des- cinq,  et  il  in- 
■  forme  son  gendre  d'occasion  que  ce  conseil,  à  l'unanimité  moins 
quatre  voix,  l'a  condamné  à  périr  sur  le  pal.  «Il  est  juste,  ajoute-t-il, 
que,  puisque  tu  as  apporté  le  ti-ouble  dans  mon  intérieur,  tu  subisses 
une  peine  analogue.»  Heureusement  que  Césarine  le  tire  de  ce 
mauvais  pas  en  grisant  le  mandarin  et  tous  ses  gens  avec  son 
panier  de  Champagne,  et  en  appelant  à  son  aide  les  marins  fran- 
çais qai  son];  dans  le  port,  et  qui  emportent  Pitisonnet  îi  la  bpVbe 
de  Tien-Tien,  son  beau-père. 

Comme  on  voit,  ce  sujet  n'est  pas  tout  ù  fait  du  domaine  de  la 
pure  fantai,sie;  i)  a  presque  sa  raison  d'être,  il  touche  par  cer- 
tains points  à  Ja  bonne  comédie,  et  il  n'a  d'excentrique  que  l'al- 
lure prêtée  aux  deux  personnages  du  mandarin  et  de  son  gendre, 
le  capitaine  des  tigres.  Mais  aussi,  quelles  excellentes  caricatures! 
■quels  délicieux  magots  de  paravent!  quelles  heureuses  trouvailles 
de  mots  qui  portent!  Ce  mélange  du  réel  et  de  l'impossible,  adroi- 
tement ménagé,  ouvre  un  nouvel  horizon  au  genre  bouffe,  dont  les 
exagérations  commençaient  à  passer  de  mode.  ; 

La  musi(|ue  de  Fleur  de  Thé  est  de  M.  Charles  Lecocq,  un  jeune 
compositeur  de  beaucoup  d'avenir.  Il  y  a  quelques  années  que  le 
directeur  des  Bouires-Parisiens  ayant  mis  au  concours  une  opé- 
rette, le  Docteur  Miracle,  M.  Lecocq  remporta  le  prix  ex  œquo  avec 
M.  Georges  Bizet,  el  les  partitions  de  ces  deux  messieurs  furent 
exécutées  alternativement.  Celle  de  M.  Lecocq  se  distinguait  par 
d'heureuses  et  fraîches  mélodies,  présentées  finement  et  rehaussées 
par  une  habileté  harmonique  peu  commune  chez  les  débutants. 
Depuis  ce  temps,  M.  Lecocq,  travailleur  consciencieux,  a  fait  en- 
core de  notables  progrès,  et  nous  pouvons  affirmer  que  son  tler- 
nier  ouvrage  a  réalisé  toutes  les  espérances  que  le  premier  avait 
fait  concevoir.  En  prenant  soin  de  se  conformer  à  l'exemple  de 
ses  collaborateurs,  il  y  a  mêlé,  à  doses  égales,  la  grâce  et  l'ingé- 
niosité comique,  sans  cesser  d'apporter  une  importance  extrême  à 
son  orchestration,  dont  les  moindres  détails  sont  caressés  avec  un 
charme  plein  de  tact  et  de  délicatesse.  Dans  le  nombre  des  mor- 
ceaux qui  ont  été  le  plus  applaudis,  nous  citerons  la  Chanson  de 
la  Cantinière,  très-fraîche  et  très-vive,  la  Chinoiserie  du  mandarin  : 
Je  suis  clairvoyant  comme  ^m  sphinx,  où  l'effet  bouffe  est  accentué 
par  l'immixtion  originale  du  capitaine  des  tigres;  ces  couplets,  très- 
bien  réussis,  ont  été  redemandés  par  toute  la  salle.  Au  deuxième 
acte,  les  couplets  de  Ra-o-lin  :  Je  suis  né  dans  le  Japon,  chantés 
par  Léonce  sur  le  ton  d'une  confidence  à  mi-voix,  ont  eu  le  même 
honneur.  On  a  fait  fête  également  au  joli  air  de  Césarine  :  En  tous 
pays.  Le  troisième  acte,  qui  est  le  plus  complet  au  point  de  vue 
musical,  renferme  surtout  deux  morceaux  qui  ont  exercé  la  plus 
décisive  influence  sur  les  excellentes  dispositions  du  public  :  d'abord 
un  duo,  dans  lequel  sont  intercalés  des  couplets  fort  agréablement 
tournés  et  redemandés  avec  acclamation  ;  puis  la  Ronde  du  Cli- 
quât, brillant  feu  d'artifice  qui  termine  dignement  cette  partition 
vraiment  remarquable. 

De  même  qu'au  compositeur,  nous  n'avons  que  des  éloges  à 
donner  à  ses  interprètes.  11  serait  superflu  d'insister  sur  la  phy- 
sionomie éminemment  drolatique  que  les  deux  compères.  Désiré 
et  Léonce,  ont  su  prêter  à  leurs  personnages  du  Mandarin  Tien-Tien 
et  du  capitaine  des  tigres,  Ka-o-Lin,  ils  sont  coutumiers  du  fait, 
mais  jamais  peut-être  ils  n'ont  rencontré  de  rôles  mieux  adaptés  à 
leurs  moyens.  Le  débutant  Sytter,  qui    joue    Pinsonnet,  possède 


;  DE  PARIS. 


123 


une  voix  des  plus  sympalhifiues,  et  s'en  sert  en  bon  musicien  : 
dès  les  premières  notes,  il  a  été  traité  comme  un  enfant  de  la 
maison,  et  son  succès  a  été  en  grandissant  jusqu'aux  couplets  : 
Ensuite,  dans  la  nuit  obscure,  qu'on  lui  a  fait  bisser,  et  à  la  chan- 
son ù  boire  qu'on  a  aussi  redemandée.  Mlle  Irma  Marié  porte  fort 
liien  riiabit  de  vivandière,  et  le  rôle  de  Césarine  ne  lui  convient 
pas  moins  comme  cantatrice  que  comme  comédienne.  Enfin, 
Mlle  Lucie  Cabel  est  une  séduisante  Heur  de  thé,  dont  les  attraits 
justifient  à  merveille  la  jalousie  de  Ka-o-Lin  et  la  perfide  duplicité 
de  ce  scélérat  de  Pinsonnet. 

Rien  de  plus  étincelant  que  la  mise  en  scène  de  cette  pièce  ; 
tous  les  décors  sont  neufs,  tous  les  costumes,  dessinés  par  Draner, 
sont  taillés  dans  la  soie  et  le  satin.  Quant  à  l'orchestre,  il  est 
mené  par  M.  Bernardin  avec  infiniment  d'entrain  et  de  goût. 

D. 


LE  CONCOURS  D'OPÉRA. 

La  Commission  instituée  par  le  ministère  de  la  maison  de  l'Em- 
pereur (1)  pour  juger  les  ouvrages  envoyés  au  concours  vient 
d'adresser  son  rapport  au  maréchal  Vaillant,  ministre  de  la  mai- 
son de  l'Empereur  et  des  beaux-arts.  En  voici  la  reproduction 
d'après  le  Moniteur  : 

Monsieur  le  ministre, 

Cent-soixante-huit  concurrents  avaient  répondu  à  l'appel  fait  par  Votre 
Excellence  dans  son  arrêté  en  date  du  l'"'  noùt  1867  ;  le  jury  d'examen, 
nommé  par  les  concurrents  eux-mêmes ,  s'est  donc  trouvé  en  présence 
de  cent-soixante-huit  manuscrits. 

Il  a  tout  d'abord  procédé  à  une  élimination  première,  écartant,  parmi 
les  œuvres  qui  lui  étaient  proposées,  celles  qui,  par  la  nature  du  sujet 
choisi,  ou  par  la  façon  dont  ce  sujet  avait  été  traité,  marquaient  cer- 
tainement qu'elles  ne  pouvaient  entrer  en  ligne  et  disputer  le  prix. 

Ce  travail,  qui  a  été  extrêmement  long,  s'est  fait  tout  enfier  en  com- 
mission, et  aucun  poëme  n'a  été  rejeté  sans  qu'il  ait  été  lu  en  séance, 
sans  que  tous  les  membres  préseuls  aient  été  appelés  à  statuer  sur  son 
exclusion . 

Cette  épuration  sommaire  a  laissé  aux  mains  du  jury  dix-sept  poèmes 
d'opéra,  qui  lui  ont  semblé  mériter,  à  divers  titres,  une  attention  par- 
ticulière. 

11  s'est  ensuite  livré  à  un  second  travail  d'élimination  et  n'a  gardé, 
après  un  minutieux  examen,  que  cinq  ouvrages  dont  la  supériorité  lui  a 
paru  tout  à  fait  évidente. 

C'est  donc  autour  de  ces  cinq  manuscrits,  que  s'est  engagée  la  lutte 
définitive. 

Les  concurrents  ont  exprimé  le  désir  que  la  Commission,  en  même 
temps  qu'elle  désignerait  l'œuvre  du  vainqueur,  nommât  celles  qui 
avaient  le  plus  approché  du  prix,  et  leur  assignât  des  rangs.  La  Com- 
mission n'a  cru  devoir  déférer  qu'à  la  première  partie  de  ce  vœu.  11  lui 
a  semblé  difficile,  pour  ne  pas  dire  impossible,  de  marquer  un  rang  à 
des  œuvres  qui  s'étaient  également  recommandées  à  son  attention  par 
des  mérites  fort  divers;  elle  s'est  donc  arrêtée  à  l'ordre  d'inscripfion, 
pour  présenter  à  Votre  Excellence  les  quatre  poëmes  qui  ont  partagé 
l'honneur  de  cette  dernière  lutte.  Ce  sont  : 

Le  n"  61 ,  avec  cette  épigraphe  : 

«  Pour  faire  un  opéra  cherche:  d'abord  un  drame.  » 
Le  n°  H8,  avec  cette  épigraphe  : 

/i(  cédant  vêlera  ; 

Nova  sint  oinnia  : 

Corda,  voces  et  opéra. 
Le  n"  142,  avec  cette  épigraphe  : 

Ausa  et  jacentem  viserc  regiam. 

Vultii  sereno,  fortis  et  asperas 

Tractare  serpentes. 
Le  n"  164,  avec  cette  épigraphe  : 

«  Sut)  judico  lis  est.  » 


(1)  Cette  Commission,  nommée  au  scrutin  secret  par  les  concurrents, 
était  composée  de  MM.  E.  Perrin,  directeur  de  l'Opéra,  Gounod,  Félicien 
IJavid,  Ambroisc  Thomas,  Emile  Augier,  Théophile  Gautier,  Paul  de 
Saint-Victor,  F.  Sarcey  et  Victor  Massé. 


Le  n»  Gl  a,  semblé  à  la  Commission  une  pièce  très-intéressante  d'un 
bout  à  l'autre  et  fort  bien  coupée  pour  la  musique,  mais  elle  satisfait 
plutôt  aux  conditions  dont  se  contente  l'opéra-comique  qu'à  celles  qui 
sont  exigées  pour  le  grand  opéra.  La  complication  de  l'intrigue  nécessite 
des  développements  qui  ne  pourraient  guère  être  compris  sans  l'inter- 
vention du  dialogue.  Le  caractère  de  l'œuvre  n'a  point  as.sez  d'ampleur 
pour  une  scène  de  proportions  aussi  vastes  que  celle  de  l'Opéra,  et  le 
jury,  en  repoussant  ce  poème,  pense  qu'il  aurait  des  chances  ail- 
leurs. 

_  Le  n"  142  est  au  contraire  une  œuvre  d'un  caractère  élevé.  Les  situa- 
tions en  sont  grandioses,  et  les  vers,  qui  sont  d'un  vrai  poète,  ont  sin- 
gulièrement frappé  le  jury  par  l'éclat  do  la  forme  et  Ja  pui,s.sance  de 
l'harmonie  :  c'est  un  opéra  du  genre  de  ceux  qui  ont  reçu  autrefois  le 
nom  de  tragédie  lyrique,  et  il  pourrait  soutenir  la  comparaison  avec  les 
modèles  que  nous  possédons  en  ce  genre. 

Diverses  considérations  ont  déterminé  le  jury  à  ne  point  le  couronner. 
Le  sujet,  qui  est  héroïque,  n'est  point  susceptible  d'un  intérêt  bien  vif; 
l'un  des  deux  principaux  personnages  disparaît  au  .second  acte,  et  la 
pièce  s'achève  sans  lui.  Le  troisième  acte  est  insuffisant,  et  sur  tout 
l'ouvrage  est  répandue  une  teinte  uniforme  de  majestueuse  douleur  qui 
pourrait,  à  la  longue,  fatiguer  le  public. 

Le  n°  J18  et  le  n°  164  sont  d'un  caractère  tout  différent.  Ce  n'est  plus 
la  tragédie  lyrique,  avec  sa  dignité  sévère;  c'est  le  drame,  avec  ses 
grands  mouvements  de  scène  et  ses  péripéties  terribles. 

Le  n"  118  toucherait  même  au  mélodrame,  et  c'est  une  des  raisons 
qui  l'ont  fait  écarter.  Le  sujet,  tiré  de  l'histoire  de  Norwége,  est  très- 
dramatique,  exposé  avec  une  rare  vigueur  et  une  clarté  parfaite.  11  avait 
tout  d'abord  plu  au  jury  par  une  idée  de  finale  qui  termine  le  premier 
acte  d'une  façon  magnifique  et  à  la  fois  pittoresque,  par  une  situation 
ingénieusement  amenée  et  fort  touchante  au  second  ;  mais  le  troisième 
acte  n'a  point  paru  à  la  hauteur  des  deux  autres,  et  la  couleur  mélo- 
dramatique, répandue  sur  l'œuvre  tout  entière,  en  a  décidé  le  rejet. 

Le  n°  164  est,  au  jugement  de  la  Commission,  une  œuvre  remarquable. 
La  grandeur  du  sujet,  qui  est  tiré  de  l'histoire  de  Russie,  la  simplicité 
et  la  rapidité  avec  lesquefies  l'action  est  conduite,  la  vérité  des  coups  de 
théâtre,  l'habileté  singulière  de  l'auteur  à  préparer  au  musicien  et  des 
caractères  bien  dessinés  et  des  situations  oii  s'opposent  les  passions  les 
plus  violentes,  tout  dans  ce  livret  a  frappé  le  jury,  qui  n'a  fait  que  de 
rares  objections. 

Peut-être  eùt-il  remporté  le  prix  proposé  par  Votre  Excellence,  si  nous 
n'avions  rencontré  un  poëme   qui,  du  premier  coup,  a  réuni  tous  les 
suffrages  et  nous  a  paru  hors  ligne. 
«C'est  celui  qui  a  pour  titre  :  la  Coupe  du  roi  de  Thulé. 

Le  mérite  de  ce  poëme,  que  nous  proposons  à  Votre  Excellence  de 
couronner,  est  tout  à  fait  supérieur.  La  légende,  qui  est  par  elle-même 
très-poétique,  eît  mise  en  œuvre  avec  une  grâce  originale.  C'est  une 
succession  de  tableaux  faciles  à  comprendre,  charmants  à  mettre  en 
scène  et  qui  naissent  tout  naturellement  d'une  action  simple  et  attachante- 
la  fantaisie  du  compositeur  aura  à  s'exercer,  soit  qu'il  préfère  ce  que 
l'amour  a  de  plus  tendre,  ou  la  rêverie  de  plus  mélancolique;  une  cou- 
leur blonde  et  lumineuse  est  répandue  sur  toute  l'ceuvre,  et  les'  vers  sont 
d'une  facture  très-pittoresque  et  d'une  rare  élégance. 

La  Commission  propose,  tout  d'une  voix,  à  Votre  Excellence  d'attribuer 
à  l'auteur  de  ce  livret  le  prix  du  concours. 

Elle  a  présenté  quelques  critiques  qui  ne  portent,  il  est  vrai,  que  sur 
des  points  secondaires,  mais  qui  n'en  ont  pas  moins  leur  importance. 
Ces  observations  seront  communiquées  à  l'auteur  par  le  directeur  de  l'Opéra 
au  nom  de  la  Commission. 

La  Commission,  avant  de  terminer  ce  rapport,  éprouve  le  be.soin  de 
témoigner  à  Votre  Excellence  le  plaisir  qu'elle  a  ressenti  d'un  résultat 
qui  passe  son  espoir. 

Elle  n'a  point  encore,  au  moment  où  elle  vous  adresse  ce  rapport, 
connaissance  des  noms  de  ceux  qu'elle  a  distingués;  elle  se  féliciterait 
que  ce  fussent  des  jeunes  gens  encore  inconnus,  que  ce  premier  succès 
encourageât  à  composer  d'autres  œuvres. 

Elle  ne  croirait  pas,  si  elle  avait  le  bonheur  de  susciter  ainsi  quelque 
vocation  qui  s'ignore  peut-être,  avoir  perdu  les  longues  heures  que  lui 
a  coûté  cet  examen,  et  elle  s'applaudirait  d'avoir  rempli  les  généreuses 
intentions  de  Votre  Excellence. 

Nous  sommes  avec  respect,  Monsieur  le  ministre,  de  Votre  Excellence 
les  très-obéissants  serviteurs. 

Pour  les  membres  de  la  Commission  : 

Le  membre  rapporteur,  Francisque  Saucey. 

La  Coupe  du  roi  de  Thulé  a  pour  auteurs  MM.  Louis  Gallet  et 
Edouard  Blau,  deux  jeunes  gens,  dont  l'un,  M.  Louis  Gallet,  a 
publié  de  jolies  poésies  dans  l'Artiste. 

M.  Edouard  Blau  est  connu  au  théâtre  par  une  charmante  say- 
nète,   le  Chanteur  florenlin,  composée  en   société    avec  M.  Alfred 


124 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


Blau,  son  cousin,  mise  en  musique  par  M.  Duprato,  et  jouée,  le 
20  novembre  1866,  non  sans  succès,  aux  Fantaisies-Parisiennes, 
pour  les  débuts  de  Mlle  Pcyret. 

L'auteur  du  poëme  qui  a  obtenu  la  première  mention  honorable 
est  M.  Chantepic.  Le  poëme  choisi  va  être  immédiatement  im- 
primé, et  dès  qu'il  le  sera,  les  musiciens  concurrents  seront  avisés. 


U  inSIQDE  RELIGIEUSE  Â  PARIS 

Pendant  la  semaine  sainte. 

Les  Sept  rarolcs  du  Christ,  oratorio  de  M.  Th.  Dubois.  —  Stabat,  de 
Palestrina,  exécuté  par  plusieurs  sociétés  chorales.  —  Messe  solennelle, 
de  François  Schwab,  à  Saint-Eustache.  —  La  Création,  d'Haydn,  exé- 
cutée  par  le  Lieder-Kranz  de  Paris. 

Nous  signalions,  dimanche  dernier,  l'importance  du  concours  em- 
prunté, cette  année  surtout,  à  la  musique  par  les  cérémonies  hthurgi- 
aues  de  la  semaine  sainte,  dans  les  églises  de  Paris,  ainsi  que  la  ten- 
dance de  plus  en  plus  accentuée  dos  jeunes  compositeurs  a  s  inspirer 
des  traditions  du  grand  art  religieux  et  à  écrire  ou  diriger  des  œuvres 
de  musique  sacrée.  Parmi  tant  d'exécutions  présentant  toutes,  a  des  de- 
grés différents,  un  véritable  intérêt  artistique,  je  dois  choisir  et  ne  parler 
nue  de  celles  qui  ont  vivement  sollicité  l'attention  publique.  L  impres- 
sionnable population  parisienne,  en  effet,  recueillie  à  ses  heures,  a 
toujours  montré  une  prédilection  particulière  pour  ces  solennités  qui  re- 
disent avec  l'éloquence  et  l'autorité  du  génie  lyrique,  les  funèbres  pcn- 
péties'du  drame  de  la  Passion,  que  racontaient  à  nos  ancêtres  la  langue 
naïve  des  Mystères  et  le  jeu  convaincu  de  leurs  interprètes. 
* 

C'est  ainsi  qu'une  affluence  énorme  de  personnes  appartenant  à  toutes 
les  classes  emplissait  le  samedi  saint  léglise  de  Saint-Roch,  pour  assister 
à  l'exécution  du  Stabat  de  Palestrina.  Oui,  en  vente,  deux  cents  orphéo- 
nistes environ  et  un  certain  nombre  d'enfants  de  chœur,  recrutes,  les 
uns  parmi  les  sociétés  chorales  parisiennes  de  fondation  récente,  les  au- 
tres dans  les  maîtrises  de  paroisses,  ont  tenté,  sous  la  direction  mtrepule 
—  ic  ne  veux  pas  dire  téméraire  -  de  mon-^ieur  Bleuse,  l'exécution  de 
cette  œuvre  immense  en  sa  simplicité,  qui  pleure  les  désolations  mysti- 
aues  d'un  peuple  agenouillé  sous  la  main  de  Dieu.  L  effet  produit  a 
Saint-Roch  n'a  pas  été  précisément  aussi  grandiose  qu on  1  espérait.  On 
n'entendait  là  qu'un  écho  bien  amoindri  et  presque  défigure  de  la  Sixtine 
ou  de  Saint-Jean-de-Latran.  Dans  ces  voix  où  l'accent  parisien  perçait, 
sous  les  paroles  latines,  avec  par  trop  de  sans-gène,  on  ne  retrou\ait  m 
l'élévation  ni  la  mélancolie  de  l'Oraison  extatique.  Dans  les  hésitations, 
les  ignorances,  les  lacunes  de  l'exécution,  je  dois  à  la  vente,  nen  qua 
la  vérité  d'avouer  que  l'on  avait  quoique  peine  à  reconnaître  cette  mu- 
siaue  grande  et  touchanta,  féminine  ot  religieuse  k  la  fois,  qualifiée  de 
sublime  par  les  maîtres  de  tous  les  temps,  et  que  l'on  croirait  notée  au 
fond  d'un  couvent  soUtaire,  après  de  longues  rêveries  et  d  austères  pé- 
nitences. 

A.  part  même  l'habitude  de  la  musique  religieuse,  l'exécution  de  celle 
de' Palestrina  exige  des  qualités  peu  familières,  en  général,  aux  sociétés 
chorales  Les  forte  doivent  être  chantés  ptenâ  voce,  mais  sans  efforts;  les 
piano,  doux,  mais  clairs;  les  crescendo  et  decrescendo  agences  sans 
secousses  ni  saccades;  les  notes  franchement  attaquées  et  bien  soutenues; 
les  sons  enchaînés,  de  telle  sorte  que  l'on  puisse  croire  que  le  Slabat 
presque  tout  entier  est  chanté  d'une  seule  émission  et  d'une  seule  respi- 
ration. Certainement,  tout  cela  a  été  expliqué  aux  exécutants  par  leurs 
directeurs  Alors,  pourquoi  l'interprétation  dont  je  rends  compte,  accom- 
pagnée contre  toutes  les  traditions,  de  l'orgue  du  chœur  jouant  au  grand 
jeu  n'a-t-elle  pas  eu  ce  mouvement  égal  et  modéré'?  Pourquoi  a-t- 
elle  manqué  de  cette  expression  de  simplicité,  de  noblesse  et  d'onction 
qui  communique  à  l'iivmne  de  Palestrina  quelque  chose  de  réellement 
surnaturel?  Pourquoi? "C'est  qu'il  y  a  de  certains  chefs-d'œuvre  consa- 
crés par  l'étude  et  par  l'admiration  respectueuse  des  siècles  auxquels  il 
ne  faut  pas  toucher  impunément  et  sans  préparation  spéciale;  sans  aucun 
doute  il  est  bon  d'initier  les  Orphéonistes  à  la  majesté  de  la  musique 
sacrée,  mais,  des  sentiers  faciles  et  battus  de  leur  répertoire  habituel, 
vouloir  leur  faire  atteindre  aux  sublimes  hauteurs  de  Palestrina,  l'entre- 
prise était  trop  hardie  pour  réussir,  même  avec  la  collaboration  d'un 
hasard  heureux.  En  choisissant  une  œuvre  d'interprétation  moins  pé- 
rilleuse, on  aurait  donné  une  plus  «  précieuse  indication  »  du  savoir  et 
du  talent  de  •  ces  forces  artistiques  inteUigentes,  »  et  la  caisse  de  bien- 
fa'sance  des  sociétés  chorales  n'y  aurait  rien  perdu,  à  la  condition,  toute- 
fois, de  ne  pas  confier  à  l'Harmonie  de  Montmartre  le  massacre,  à  coups 
de  cornet  à  pistons,  de  la  Marche  religieuse  de  Wagner ,  qui  ne  méritait 
pas  ce  supplice,  même  en  temps  de  semaine  sainte! 
N'importe!  C'est  là  une  tentative  digne  d'encouragement  et  dont  l'idée 


première  fait  honneur  à  l'infatigable  et  féconde  énergie  d'Eugène  Dela- 
porte,  le  seul  homme  qui,  à  ses  risques  et  périls,  ait,  depuis  quinze  ans, 
constamment  entraîné  les  .sociétés  chorales  sur  la  route  du  nouveau,  à 
la  recherche  de  l'inconnu,  à  la  découverte  du  progrès.  Pour  arriver  à 
l'interprétation  raisonnée,  régulière,  convenable  de  la  grande  musique  sa- 
crée, nos  orphéons  français  ont  tout,  l'expérience  exceptée.  Il  ne  faut  dés- 
espérer de  rien,  toutefois,  dans  le  domaine  du  chant  choral  populaire, 
lorsque  l'on  entend,  comme  lundi  dernier  par  exemple  au  Grand-Orient, 
les  membres  du  Lieder-Kranz  parisien  exécuter  la  Création  d'Haydn  avec 
une  largeur,  une  intelligence,  un  fini  de  détails  qui  ont  profondément 
impressionné  l'auditoire.  A  la  bonne  heure!  Comprendre  ainsi  les  maî- 
tres, c'est  se  montrer  dignes  de  les  traduire  et  de  s'éclairer  d'un  rayon 
de  leur  gloire  ! 

* 
*  * 

La  Messe  solennelle  avec  chœur,  accompagnement  d'orgue  et  quadruple 
quatuor  à  cordes,  que  M.  François  Schwab  a  fait  exécuter,  pour  son  début 
à  Paris,  le  jour  de  Pâques,  sous  l'habile  direction  de  M.  Hurand,  à  Saint- 
Eustache,  est  tracée  sur  le  plan  régulier  et  traitée  dans  la  forme  clas- 
sique des  œuvres  anciennes.  On  n'y  trouve  rien  qui  révèle  un  esprit  avide 
d'effets  nouveaux.  Le  h'yrie  est  un  véritable  et  excellent  andante  religioso. 
Dans  le  Gloria,  qui  débute  en  fa,  et  avec  grand  chœur,  suivant  les  tra- 
ditions, sans  précipitation  de  mouvements,  toutefois,  on  remarque  l'heu- 
reuse conduite  des  phrases,  la  bonne  prosodie  du  latin  :  le  Oui  tollis  et 
le  Suscipe  sont  peut-être  un  peu  courts,  mais  la  messe  étant  «  brève  »  n'ad- 
met pas  de  répétitions  de  texte;  le  Quoniam  termine  le  morceau  par 
la  reprise  en  ré  majeur  du  premier  motif  fugué  à  l'Amen,  mais  seu- 
lement par  imitation,  sans  sirette  ni  croisement  de  contre-sujet.  Le 
Sanctus  commence  très-bien  :  les  voix  d'hommes  y  répondent  aux  so- 
prani  avec  une  symétrie  habituellement  agencée  sur  le  Pteni  sunt,  qui  se 
termine  ainsi  en  tutti  par  une  belle  cadence  plagale.  Un  0  Salutaris,  de 
l'auteur  de  la  messe,  d'un  excellent  style,  a  été  parfaitement  chanté  par 
Agnesi.  La  voix  de  soprano  ou  celle  de  ténor  conviendrait  mieux,  ce  me 
semble,  au  caractère  de  ce  morceau.  VAgnus  Dci  est  en  ré  mineur, 
comme  le  Kyrie,  duquel  il  participe  beaucoup.  En  résumé,  cette  œuvre, 
un  peu  concise  pour  une  mes.se  aussi  solennelle  que  celle  de  Pâques, 
pre-sque  dépourvue  de  soli,  est  recommandable  par  sa  conduite  expéri- 
menlée,  sa  simplicité,  sa  sobriété  de  modulations,  son  sentiment  religieux 
très-élevé.  Je  félicite  notre  ami  et  collaborateur  Fr.  Schwab  de  ce  début 
d'heureux  augure  :  il  a  fait  preuve  de  qualités  qui  ne  larderont  pas  à 
se  produire  sur  une  scène  et  dans  un  genre  moins  austères.  Les  livrets 
ont  tout  à  gagner  à  être  confiés  aux  mains  des  compositeurs  de  ce 
métal. 


Pour  l'exécution  à  Sainle-CIotilde  des  Sept  Paroles,  mises  en  musique 
par  M.  Th.  Dubois,  ancien  prix  de  Rome,  maître  de  chapelle  de  cette 
église  aristocratique,  le  chœur,  plus  que  triplé,  avait  pour  solistes 
MM.  Villarct  et  Caron.  Œuvre  excessivement  travaillée,  irréprochable, 
uni.ssant,  comme  le  Slabat  de  M.  Bourgault-Ducoudray,  toutes  les  res- 
sources de  la  science  de  l'orchestration  et  des  voix,  toute  la  magie  du 
coloris  harmonique  moderne,  à  une  connaissance,  à  une  possession  trop 
complète  peut-être  de  l'antique.  C'est  admirablement  vieux  comme  con- 
ception, c'est  ravi.ssamment  jeune  comme  exécution,  mais  j'y  cherche 
en  vain  Vindicidualité.  Je  ne  saurais  mieux  comparer  cette  musique 
pseudo-archaïque,  éclectique,  de  transition,  et  par  cela  même  exerçant 
une  séduction  véritable,  qu'à  un  vénérable  motif  d'Haydn  habillé  à  la 
mode  de  1835  sur  la  coupe  d'un  bon  Reicha,  d'un  Lesueur  solennel  et  tout 
brodé,  .soulaché,  enguirlandé,  constellé  des  ornements,  des  bijoux,  des 
fanfreluches  de  tous  styles  de  noire  époque  féconde  en  passementeries  et 
en  galons.  Combien  mieux  je  préfère  ces  pensées  achevées,  qui  n'ont  pas 
même  besoin  d'être  élégamment  vêtues,  puisqu'il  leur  suffit  pour  plaire 
d'être  finies,  c'est-à-dire  belles  !  La  situation  de  l'âme  qui  les  a  eues  se 
communique  aux  autres  âmes,  y  transpoile  sa  grandeur,  son  recueille- 
ment et  i-oa  repos. 

Ce  mouvement  de  rénovation  de  la  musique  sacrée  est  un  événement 
artistique  de  la  plus  haute  importance  pour  l'avenir,  mais  il  menace 
d'être  infécond  si  les  jeunes  maîtres  imitent  trop  ceux  qui  leur  agréent 
le  plus  parmi  ceux  d'il  y  a  un  siècle  ou  parmi  ceux  d'aujourd'hui. 
Qu'ils  se  contentent  de  les  sentir,  de  les  pénétrer,  de  les  admirer.  L'im- 
portant, l'es-sentiel,  en  musique  religieu'-e  surtout,  est  d'être  soi-même, 
de  faire  son  choix  dans  ses  propres  instincts,  d'avoir  le  naturel  et  la 
sincérilé  de  ses  sentiments;  d'y  joindre,  ce  qui  est  plus  difficile,  l'éléva- 
tion, la  direction,  s'il  se  peut,  vers  quelque  but  haut  placé,  car  l'idée 
divine  ne  nous  donne  que  ce  qu'elle  reçoit  de  nous  ;  et,  tout  en  parlant 
sa  langue,  tout  en  écrivant  sa  musique  à  soi  et  non  plus  celle  des  au- 
tres à  la  sienne  mêlée,  tout  en  subissant  les  conditions  de  l'époque  où 
l'on  est  jeté  et  où  l'on  puise  sa  force  comme  ses  défauts,  le  profitable 
serait  de  se  demander,  de  temps  en  temps,  le  front  levé  vers  les  collines 
et  les  yeux  attachés  au  groupe  des  maîtres  vénérés  des  âges  de  foi,  vé- 
nérés jusqu'à  l'admiration,  mais  non  pas  jusqu'au  pastiche  :  Que  diraient- 
ils  de  moi?  Que  penseraient-ils  de  nous? 

Em.-Mathieu  de  monter. 


DE  PARIS. 


123 


Parmi  les  récréations  à  la  mode  dans  les  salons  du  grand  monde,  il  en 
est  une  des  plus  amusantes  qui,  après  avoir  conquis  sa  réputation  d'ori- 
ginalité et  d'esprit  dans  les  cercles  d'artistes,  s'est  peu  à  peu  propagée 
dans  la  haute  société  où  elle  est  fort  goûtée  :  nous  voulons  parler  des 
pupazzi  de  Lemercier  de  Neuville.  A  la  fois  auteur  dramatique,  poëte, 
dessinateur,  sculpteur,  architecte,  Lemercier  de  Neuville  a  appliqué  toutes 
ces  heureuses  facultés  à  l'édification  de  son  œuvre.  Seul,  il  a  construit 
son  théâtre,  il  l'a  décoré,  il  l'a  machiné,  il  a  frabriqué  ses  acteurs,  il  a 
composé  leur  répertoire  et  il  en  joue  les  rôles  multiples  avec  un  naturel 
et  une  finesse  d'observation  surprenants.  Nous  assistions  cette  semaine  à 
une  des  dernières  soirées  qu'il  donnait  dans  le  salon  d'un  de  nos  princi- 
paux éditeurs  de  musique,  avant  son  prochain  départ  pour  les  villes 
d'eaux,  et  nous  doutons  qu'aucune  représentation  théâtrale  bouffe  eût 
amusé  plus  que  celle-ci  un  auditoire  qui  se  composait  en  majeure  partie 
de  notabilités  artistiques  et  littéraires.  Madame  Benoîion  chez  elle.  Mon 
Village,  fine  actualité  en  vers.  Madame  Benoîton  indisposée,  et  surtout  la 
galerie  des  Masques  et  Visages,  où  parlent  et  agissent  avec  une  ressem- 
blance frappante  de  visage,  d'organe  et  de  gestes  les  célébrités  politiques, 
du  barreau  ou  du  théâtre  :  Emile  Olivier,  Thiers,  Girardin,  Lachaud, 
Jules  Favre,  Arnal,  Méiingue,  etc.,  etc.,  n'ont  pas  cessé  un  instant  de 
captiver  l'attenlion  ou  de  provoquer  le  rire.  11  était  1  heure  1/4  qu'on 
applaudissait  encore  avec  autant  de  chaleur  et  d'ensemble  qu'au  début 
de  la  soirée. 

M.  Lemercier  de  Neuville  a  eu  l'heureuse  idée  de  s'attacher  un  excel- 
lent musicien,  M.  Roques,  qui  exécute  entre  les  scènes  des  pupazzi  des 
morceaux  de  danse  composés  exprès  et  qui  ont  fait  grand  plaisir. — Nous 
disions  que  plusieurs  de  nos  éminents  artistes  assistaient  à  cette  réunion  ; 
ils  ont  voulu  aussi  y  apporter  le  contingent  de  leur  talenr,  et  l'on  a  pu 
entendre  Marie  Battu  chanter  son  originale  chanson  napolitaine,  Santa 
Lucia,  arrangée  par  Braga,  et  qui  a  valu  à  la  grande  cantatrice  un 
véritable  triomphe  à  la  cour  et  dans  les  plus  brillantes  soirées  de  l'hiver. 
—On  a  pu  admirer,  dans  une  romance  d'Elwart  et  dans  l'air  de  Falstaff 
du  Songe  d'une  nuit  d'été,  la  belle  voix  et  la  belle  méthode  d'Aajnesi,  qui 
ne  chante  pas  que  l'italien  et  qui  occuperait  une  belle  place  sur  nos  pre- 
mières scènes  lyriques. — Seligmann  est  venu  ensuite  qui  a  dit  avec 
une  incomparable  expression  l'Eloge  des  larmes,  de  Schubert,  puis  son 
originale  Kouitra,  qu'il  a  dû  répéter. —  Le  piano  n'a  pas  été  oublié,  et 
Stoeger,  qui  avait  accompagné  Seligmann,  s'est  affirmé  encore  une  fois 
dans  cette  occasion,  comme  un  de  nos  meilleurs  virtuoses  et  comme  un 
charmant  compositeur,  dans  une  grande  valse  de  salon,  suivie  de  son 
morceau  iVoueWeHe,  qui  fait  fureur.  —  Enfin, lanoledésopilanteétaitfournie 
par  l'inimitable  Berthelier,  qui  a  porté  le  rire  à  son  comble  avec  deux  chan- 
sonnettes, dites  comme  lui  seul  sait  les  dire  :  le  Bonheur  îles  Champs  et 
le  Cotillon.  —  Vivier,  Edouard  Wolft,  Paul  Bernard,  Soumis,  Alexandre 
de  Lavergne,  Deforge,  etc.,  avaient  voulu  aussi  faire  connaissance  avec 
les  pupazzi,  et  ils  n'ont  pas  été  des  dernie'rs  à  en  féliciter  l'inventeur, 
en  même  temps  qu'à  lui  souhaiter  tout  le  succès  qu'il  mérite. 


CONCERTS  ET  ADDITIONS  MUSICALES  DE  LÀ  SEnÂINE. 

»**  Le  Stabat  chanté  le  jeudi  saint  à  la  chapelle  des  Tuileries  appar- 
tenait un  peu  à  toutes  les  écoles  et  à  toutes  les  époques  :  les  quatre  der- 
niers morceaux  étaient  de  Rossini;  on  avait  mis  à  contribution  pour 
chacun  des  autres  Mozart,  Sacchini,  Cherubini,  Haydn,  Pergolèse  et 
Auber.  Le  Virgo  virginum  (inédit),  de  l'auteur  de  la  Muette,  a  produit  le 
plus  grand  effet.  Mlles  Nilsson  et  Bloch,  MM.  Faure  et  Nicot  chantaient 
les  soli. 

**,  La  société  des  concert -i  du  Conservatoire  a  terminé  dimanche  der- 
nier, jour  de  Pâques,  la  série  de  ses  concerts  d'abonnement.  Le  pro- 
gramme répétait  celui  du  vendrdi  saint,  sauf  les  fragments  du  Requiem 
de  Cherubini,  qui  ont  été  remplacés  par  l'O  filU  de  Leisring  (bissé  comme 
d'habitude),  et  le  solo  instrumental,  dont  cette  fois  Ant.  Rubinstein  a 
fait  les  frais  avec  son  concerto  en  ré  mineur.  Le  grand  artiste  a  été  à  sa 
hauteur  ordinaire,  et,  comme  partout  où  il  s'est  fait  entendre,  la  plus 
chaleureuse  ovation  lui  a  été  décernée. 

**tUnefouleimmenseassiégeaitIecirqueN.ipoléonlcsoirduvendredisaint 
et  3,600  personnes  y  sont  entrées.  La  grande  attraction  du  concert  spi- 
rituel était  cette  fois'  Faure  et  Mlle  Nilsson,  qui  ont  chanté,  comme  ils 
.savent  le  faire  et  au  milieu  d'un  tonnerre  d'applaudissements,  des  frag- 
ments du  Tannhœuser  et  du  Stabat  de  Rossini  (avec  Mlle  Fourche  et 
M.  Nicot)  ;  Faure  a  superbement  ditlc  solo  d'un  0  Fons  pietatis  de  Haydn. 
Un  chœur  de  Silcher,  Gloire  au  Seigneur,  assez  peu  religieux,  un  autre 
de  Gounod,  le  Vendredi  saint,  qui  ne  comptera  pas  parmi  les  plus  purs 
titres  de  gloire  de  l'auteur  de  Faust,  l'Andanle  rcligioso  de  Mendelssohn, 
l'allégretto  de  la  symphonie  en  la  de  Beethoven  et  la  marche  funèbre  de 
Chopin,  orchestrée  par  M.  Prosper  Pacal,  complétaient  le  programme. 


if^jf  Rubinstein  a  donné  cette  semaine  deux  concerts,  l'un  avec  or- 
chestre et  l'autre  consacré  à  la  musique  de  chambre,  lundi  et  jeudi 
derniers.  On  ne  sait  ce  qu'on  doit  le  plus  admirer  de  sa  puissante  exé- 
cution, de  l'immense  variété  de  son  jeu,  de  sa  vaste  mémoire  ou  de  son 
infatigable  ardeur.  Nous  avons  fait  connaissance  lundi  avec  son  deuxième 
concerto  (en  fa),  certainement  supérieur  aux  deux  que  Rubinstein  a  fait 
entendre  jusqu'ici,  et  dont  l'adagio,  en  particulier,  peut  rivaliser  avec  ce 
qui  a  été  écrit  de  plus  beau  en  musique  concertante  et  symphonique.  — 
Une  autre  séance  de  musique  de  chambre  aura  lieu  chez  Erard,  le 
24  avril,  puis,  huit  jours  après,  un  concert  avec  orchestre  qui  sera  pro- 
bablement le  dernier,  à  la  salle  Herz;  Rubinstein  partira  ensuite  pour 
Londres. 

,**  Nous  devons  ajouter  à  notre  appréciation  générale  de  la  musique 
religieuse  exécutée  pendant  la  semaine  sainte  dans  les  diverses  églises  de 
Paris  que  les  Sept  Paroles  du  Christ  de  M.  Th.  Dubois  constituent  une 
œuvre  forte  et  saine,  un  véritable  oratorio,  où  l'élévation  de  la  pensée 
n'a  d'égal  que  l'art  profond  avec  lequel  l'auteur  a  su  faire  naître  et  gra- 
duer l'intérêt.  Sous  le  rapport  du  rhythme  particulièrement,  on  pourrait 
signaler  de  vraies  trouvailles.  L'expression  est  parfois  très-dramatique, 
surtout  dans  la  cinquième  parole,  Sitio.  M.  Dubois,  dont  nous  avons  pu 
déjà  apprécier  le  sérieux  talent  dans  une  Ouverture  exécutée  il  y  a  deux 
ans  au  Conservatoire,  nous  paraît  de  taille  à  aborder  avec  succès  la 
scène  lyrique,  et  nous  désirons  pouvoir  l'y  juger  bientôt. 

**»  Au  Salut  solennel  du  samedi  saint,  à  l'église  Saint-Roch,  on  a 
exécuté  un  0  salutaris  et  un  Ave  verum  de  la  composition  de  M.  Charles 
Vervoitte,  maître  de  chapalle  de  la  paroisse,  deux  œuvres  du  plus  grand 
mérite,  un  très-bel  Ave  Maria  d'Amédée  Méreaux  et  le  Stabat  de  Pa- 
lestrina  dont  nous  rendons  compte  aujourd'hui. 

*"',  La  matinée  d'élèves  de  Mme  Clara  Pfeiffer  a  eu  lieu,  comme 
chaque  année,  le  lundi  de  Pâques.  Les  résultats  obtenus  par  cet  excellent 
professeur,  sous  le  rapport  de  l'ensemble  et  de  la  sûreté  d'exécution,  sont 
vraiment  surprenants  :  seize  mains  ont  joué  l'ouverture  de  Preciosa,  une 
symphonie  de  Haydn  et  la  sérénade  de  Beethoven,  de  manière  à  pro- 
duire l'illusion  d'une  seule  partie  avec  plus  d'intensité  sonore.  Parmi 
les  jeunes  artistes  qui  se  sont  fait  entendre  seules,  nous  en  citerons  trois 
qui  donnent  plus  que  des  espérances  :  Mlle  Marguerite  Rousseau, 
Mme  Millier  et  Mlle  Louise  Paloc,  qui  ont  dit  avec  beaucoup  de  charme 
le  rondo  en  mi  bémol  de  Weber,  la  Ruche,  et  la  cinquième  mazurka  de 
Georges  Pfeiffer. 

,*^  Un  violoniste  qui  nous  semble  mériter  toute  l'attention  du  monde 
artistique,  M.  Federigo  Consolo,  a  donné  mardi  dernier  un  concert  à 
la  salle  Herz.  Virtuose  né,  possédant  une  habileté  rare  et  un  beau 
son,  il  s'est  fait  applaudir  à  bon  droit  dans  des  fragments  de  concertos 
de  Viotti  et  de  Léonard,  dans  deux  morceaux  de  Mendelssohn  et  de 
Scliubert,  et  dans  la  fantaisie  de  Vieuxleiiips  sur  Norma,  sur  la  qua- 
trième corde.  Une  part  du  succès  revient  à  Mlle  Fidès  de  Vriès,  du  théâ- 
tre Lyrique,  qui  a  dit  en  artiste  consommée  un  air  de  la  Flilte  enclian- 
tée  et  un  morceau  de  Rigoletto. 

^*^  Le  pianiste-compositeur  Bonewitz  a  donné  dimanche  dernier,  dans 
les  salons  Kriegelstein,  une  séance  musicale,  avec  le  concours  de  ses 
meilleures  élèves,  dont  quelques-unes  ont  un  talent  déjà  mûr,  et 
parmi  lesquelles  nous  avons  particulièrement  distingué  Mlles  Marie  de 
Poggenpohl,  Lévy  et  Jeanne  Kalkbrenner. 

*%  Mlle  Joséphine  Martin  a  donné  son  concert  jeudi  dernier.  Au 
nombre  des  artistes  qui  lui  ont  prêté  leur  concours  nous  devons  une 
mention  particulière  à  M.  de  Cuvillon,  dont  nous  ne  parlons  pas  assez 
souvent  à  notre  gré,  et  qui  n'en  est  pas  moins,  quoi  qu'il  ne  se  prodigue 
pas,  un  de  nos  meilleurs  violonistes.  M.  de  Cuvillon  a  joué  avec  .Mlle 
Martin  et  Lebouc  le  trio  en  ut  mineur  de  Beethoven,  dans  lequel  on 
a  pu  apprécier  son  beau  style  et  la  façon  dont  il  comprend  et  interprète 
la  musique  des  grands  maîtres.  De  plus,  après  l'exécution  de  son  grand 
morceau  de  concert  :  les  Adieux  de  Marie  Stuart,  l'éminent  artiste  a  reçu 
les  applaudissements  les  plus  enthousiastes,  qui  ne  s'adressaient  pas 
moins  au  compositeur  qu'au  virtuose. 

^'^^  Aujourd'hui  dimanche,  à  2  heures,  au  cirque  Napoléon,  vingt- 
quatrième  et  dernier  concert  populaire  de  musique  classique,  sous  la 
direction  de  J.  Pasdeloup.  En  voici  le  programme  :  1°  Schiller-Marche, 
de  Meyerbeer.  —  2"  Fragments  du  Songe  d'une  JVuit  d'été,  de  Mendelssohn; 
allegro  agitato,  scherzo,  nocturne.  —  3°  Marche  turque,  orchestrée  par 
M.  Prosper  Pascal,  de  Mozart.  —  i"  Ouverture  de  Manfred,  de  R.  Schu- 
mann.  —  5°  Concerto  en  ut  mineur  pour  piano,  de  Beethoven,  exécuté 
par  M.  Théodore  Ritter.  —  6°  Prélude  de  Lohengrin,  de  R.  Wagner.  — 
7"  Fragments  du  septuor  de  Beethoven,  exécutés  par  MM.  Grisez  (clari- 
nette), Espeignet  (basson),  Mohr  (cor),  et  tous  les  instruments  à  cordes. 

^*,  M.  Fritz  Gernsheim,  pianiste  compositeur  tenu  en  très-haute  estime 
de  l'autre  côté  du  Rhin  et  professeur  au  Conservatoire  de  Cologne,  don- 
nera le  dimanche  26  avril,  dans  les  salons  Erard,  une  .soirée  musicale 
qui  offrira,  le  talent  de  l'artiste  nous  en  est  garant,  un  puissant  intérêt. 
Rubinstein  doit  lui  prêter  son  concours. 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


,'*^.  Nous  ajouterons  à  l'indication  que  nous  avons  donnée  du  coneert 
de  Moriier  de  Fontaine,  pour  le  2?)  à  la  salle  Hcrz,  que  iVlUe  Mâuduit 
chantera  des  morceaux  de  Vinci,  Scarlati,  Lotti;  que  Rubinstein  jouÉra, 
avec  le  bénéficiaire,  un  andantc  et  variations  de  Schumann,  et  que  le 
concert  sera  varié  par  Mlle  Anna  Vogt,  cliarmante  mattauphoniste,  et 
par  les  chansonnettes  de  lîerthelier. 

^*^  A  propos  d'un  concert  donné  à  Lyon  par  un  violoniste  de  cette 
ville,  M.  Aimé  Gros,  le.  Saint  public  donne  de  grands  éloges  à  re\cellent 
pianiste  Albert  Lavignac,  qui  s'y  est  fait  entendre. 

*.%  Ed.  Wolff,  qui  vient  de  remporter  un  si  beau  succès  avec  la  com- 
pagnie Uhnann-Patti,  et  dont  on  est  toujours  heureux  d'applaudir  le 
talent  élevé,  se  fora  eriten  Ire  après-demain  mardi  au  concert  de  Vivier. 
11  y  jouera  pour  la  première  fois  sa  grande  Tarentelle. 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 

»"'*  LL.  MM.  l'Empereur  et  l'Impératrice  assi.slaient  vendredi  à  la  re- 
prise du  Corsaire  et  sont  restées  jusqu'à  la  fin  du  spe^'laclo. 

^'''^.Le  théâtre  impérial  de  l'Opéra  a  donné  lundi,  mercredi  —et  samedi, 
par  extraordinaire,— i/amïet. —  Vendredi  a  eu  lieu  avec  un  grand  éclat 
la  rentrée  de  Mlle  Granzoff  dans  le  Cor.mire  ;  la  cliarmante  ballerine,  que 
les  théâtres  impériaux  de  Russie  nous  renvoient  chargée  de  couronnes,  n'a 
fait  que  «  changer  d'élément  sans  changer  de  destin  »,  car  le  public 
parisien  ne  lui  a  pas  fait  un  accueil  moins  enthousiaste  que  celui  de 
Saint-Pétersbourg  et  de  Moscou.  Elle  a  été  couverte  d'applaudissements 
et  plusieurs  fois  rappelée;  Mlles  Fioretti  et  Merante  ont  d'ailleurs  partagé 
ce  succès. — Le  ballot  était  précédé  de  la  Fiancée  de  Corinthc,  parfaitement 
interprétée  par  Mmes  Mauduit,  Bloch  et  par  David. 

^*^  Les  d(>buts  du  ténor  Mazzoleni  aiu-ont  lieu  dans  le  Trouvère,  après 
le  départ  de  Mlle  Nilsson. 

»*,  Le  Premier  Jour  de  bonheur  poursuit  au  tiiéfttre  de  l'Opéra-Comique 
sa  brillante  carrière.  —  Le  lendemain  la  Part  du  Diable  remplit  la  salle. 
—  Vendredi  a  eu  lieu  la  premii're  représentation  de  Mademoiselle  Sijlvia, 
de  M.  Samuel  David.  Nous  en  rendons  compte. 

a,*^  On  annonce  que  le  baryton  Crosti,  dé.sirant  se  consacrer  au  chant 
italien,  va  quitter  l'Opéra-Comique,  dont  il  était  un  bon  pensionnaire. 

^*^  Le  théâtre  Italien  a  donné,  pour  les  dernières  représentations  de 
ces  œuvres  :  Mardi,  la  Lucia;  jeudi,  Don  Giovanni;  et,  samedi,  MathiUe 
di  Shabran.  —  On  annonce  pour  le  23  l'opéra  inédit  du  prince  Ponia- 
towski,  dont  il  a  beaucoup  été  question,  et  dans  lequel  Mlle  Urban  doit 
remplir  im  rôle  de  danseuse. 

,,,*,(.  La  représentation  que  le  théâtre  Italien  donne  aujourd'hui  au  bé- 
néiico  d'.\delina  Patti  se  compose  définitivement  du  premier  acte  de  la 
Travinla,  de  la  leçon  de  musique  du  Barbier,  du  deuxième  tableau  du 
premier  acte  de  Crispino  et  du  quatuor  de  Rigoletto. 

^*,^  M.  Bagier  a  signé  le  rengagement,  pour  la  saison  prochaine,  de 
Mlle  Grossi,  qui  se  rend  le  l"^  mai  <à  Séville,  où  elle  est  engagée  pour 
la  saison  d'été. 

^.'^j  Le  27,  aura  lieu  une  représentation  au  bénéfice  de  Mlle  Krauss  ; 
Mlle  Patti  y  chantera. 

^*i,  A  moins  d'obstacles  imprévus,  l'opéra  nouveau  de  M.  Jules  Béer, 
Elisabeth  de  Hongrie,  inlerprété  par  Mlle  Schrœder,  MM.  Massy  et  Barré, 
sera  donné,  à  la  fin  de  ce  mois,  au  théâtre  de  la  Renaissance. 

^*j,  Le  succès  du  nouvel  ouvrage  de  MM.  Chivot,  Duru  et  C.  Lecocq, 
Fleur  de  thé,  va  tous  les  jours  grossissant.  Vendredi  et  samedi  la  recette 
a  dépassé  3,000  fr. 

,(.*,,  Mlle  Lasseny  est  engagée  au  théâtre  de  l'Athénée  pour  y  créer, 
après  Fleur  de  Thé,  un  rôle  important  dans  le  Petit  Poucet  de  Laurent  de 
Rillé. 

s**  Le  succès  de  Fleur  de  Thé  à  l'.Athénée  a  décidé  l'administration  de 
ce  théâtre  à  demander  à  MM  Chivot  et  Duru  un  nouvel  opéra-bouflé  en 
trois  actes,  dont  M.  Charles  Lecocq  écrira  la  musique  et  qui  sera  joué 
l'hiver  prochain. 

,t*,t  Hier  soir,  le  théâtre  des  Variétés  a  donné,  au  bénéfice  de  Mlle 
Schneider,  l'avant-dernière  représentation  de  la  Grande- Duchesse.  Mlle 
Schneider  devant  se  rendre  immédiatement  à  Toulouse,  où  elle  est  en- 
gagée pour  un  mois,  la  dernière  représentation  de  cette  troisième  série 
a  lieu  ce  soir. 

„,*,),  Nous  recevons  une  lettre  de  notre  correspondant  du  Havre  de  la- 
quelle nous  extrayons  les  détails  suivants  :  «  Si  notre  ville  a  été  une  des 


dernières  à  monter  l'Africaine,  elle  n'a  dunsoins  pas  perdu  pour  atten- 
dre. Déjà,  depuis  quelques  jours,  l'impatience  de  nos  dilettantes  était  sur- 
excitée,; et  1-prsqu'tinfin  l'alfiche  a  .annoncé  la -première.. repf.ésepta'ipn, 
Je  bureau  do  location,  envahi  dès  le  matin,  ,n'a  pu  contenter  tous  les 
postulants.  Le  soir,  au  bureau,  l'empressement  était  le  même  et  il  a 
fallu  refuser  un  nombre  considérable  de  personnes.  Je  dois  dire  de  suite 
que  cette  curiosité  a  été  de  tout  point  justifiée  et  que  le  dernier  chcfT 
d'oeuvre  de  Meyerbeer,  consciencieusement  étudié,  monté  avec  le  plus 
grand  soin,  a  été  interprété  de  manière  à  satisfaire  les  plus  difficiles. 
— Tous  ces  magnifiques  morceaux  qui  ont  déjà  fait  le  tour  du  mondç 
et  enthousiasmé  le  public  de  toutes  les  grandes  scènes  connues,  ont  pro- 
duit le  même  effet  sur  la  nôtre.  Le  Chœur  des  évéques,  le  .septuor 
du  deuxième  acte,  la  Prière  des  matelots,  la  Ballade  de  Nelusko,  mais 
particulièrement  tout  le  quatrième  acte  et,  enfin,  le  prélude  du  sixième 
acte,  avec  la  scène  du  Mancenillier,  n'ont  pas  cessé  de  captiver  l'audi- 
toire et  ont  provoqué  d'incessants  bravos.  Les  artistes  .se  sont  montrés 
d'ailleurs  à  la  hauteur  de  cette  œuvre  gigantesque.  M.  Raynal,  excellent 
chanteur,  bon  comédien, a  créé  fièrement  le  personnage  de  Nélusko.  Mlle 
Bédora  donne  à  Selika  la  noblesse  et  la  poésie  qu.î  comporte  ce  ca- 
ractère. M.  Faivret  est  un  Vasco  de  Gama,  jeune,  enthousiaste,  im- 
pi;tiieux.  Mlle  Goury  et  M.  Larivé  concourent  à  cet  excellent  en- 
semble. L'orchestre  rend  brillamment  le  célèbre  unisson  que  le  public, 
transporté,  a  fait  répéter.  Les  décors,  les  costumes  et  la  mise.cn  scène 
font  le  plus  grand  honneur  à  la  direction.  » 

*%  On  nous  écrit  de  Bruxelles  que  les  représentations  données  en  ce 
moment  par  Marie  Sa.s.se,  au  théâtre  de  la  Monnaie,  y  attirent  une  foule 
considérable.  La  célèbre  cantatrice  s'est  fait  entendre  successivement 
dans  l'Africaine,  les  Huguenots  et  la  Juive;  elle  a  produit,  particulière- 
ment dans  le  rôle  de  Sélika,  un  enthousiasme  indescriptible.  —  La  Jolie 
fille  de  Perth  a  été  froidemement  accueillie.  —  Ferdinand  Miller  vient  do 
pa.sscr  une  semaine  à  Bruxelles  au  milieu  des  fêtes  les  plus  cordiales 
offertes  à  l'éminent  compositeur. 

.);',  Les  recettes  brutes  des  théâtres  subventionnés,  théâtres  secondaires, 
cafés-concerts,  etc.,  se  sont  élevées  pendant  le  mois  de  mars  1808,  au 
chiftre  de  1,887,080  fr.  30  c. 


NOUVELLES  DIVERSES. 


»**  A  l'occasion  de  la  fête  patronale  de  l'église  Notre-Dame  de  Bonne- 
Nouvelle,  M.  Alexandre  Leprévost,  compo.siieur  do  mu.sique  sacrée,  fera 
exécuter  sous  sa  direction,  dimanche  prochain  20  avril,  avec  le  concours 
d'artistes  d'élite,  sa  sixième  messe  solennelle  avec  soli,  chœurs  et  or- 
chestre. —  M.  Henri  Martin. tiendra  l'orgue. 

,1*:^  Parmi  les  œuvres  musicales  qui  ont  eu  le  plus  de  vogue  cet  hiver 
dans  les  salons  et  dans  les  concerts,  il  con\ient  ae  citer  celles  de  M.  Ju- 
les Klein.  En  rappeler  les  titres  c'est  constater  autant  do  succès.  Nom- 
mons en  première  ligne  six  mélodies  (paroles  de  Victor  Hugo):  Encore  à 
toi,  Ji.rceuse,  Ah!  quand  je  dors,  Hegret,  la  Captive,  S'il  est  un  charmant 
gazon.  Ensuite,  trois  mélodies  :  Seul  au  monde!  les  Trois  Saisons  et  l'A- 
mour au  village,  valse  chantée,  qui  deviendra  populaire;  la  Valse  des  Fou- 
gères et  la  Mazurka  des  Etoiles,  pour  piano,  publiées  chez  l'éditeur  Ri- 
chault,  qui  a  sous  presse,  en  ce  moment,  la  deuxième  série  des  poésies 
de  V.  Hugo,  mises  en  musique  par  le  même  auteur. 

^*,^.\ux  détails  que  nous  avons  déjà  donnés  sur  les  fêtes  musicales  que 
l'administration  nouvelle  des  jeux  de  Bade  se  propose  d'offrir  cet  été 
au  public  élégant  de  cette  ville  de  plaisir,  nous  ajouterons  qu'au  nombre 
des  artistes  engagés  pour  les  concerts  et  représentations  théâtrales,  on 
remarque  les  noms  de  Mmes  Carlotta  Patti,  Carvalho,  Norman-Neiuda, 
Vandenheuvel,  Schroeder,  Harris,  Brunetti,  Marie  Rose,  Escudier  Kast- 
ner,  de  MM.  Agnesi,  Sighicelli,  Kelterer,  Batta,  Stockausen,  Troy, 
Wilhelmi,  Rubinstein,  etc.  Du  20  septembre  au  lo  octobre,  huit  repré- 
sentations d'opérettes  du  répertoire  d'Offenbach  seront  données  avec  le 
concours  des  meilleurs  interprètes  de  re  genre  spécial.  Le  programme 
du  théâtre  allemand  et  italien  comprenant  l'exécution  de  la  Favorite, 
Norma,  le  Postillon,  Martha,  Don  Juan,  Lohengrin,  reste  tel  que  nous 
l'avons  dit  :  mais  ce  programme  déjà  si  riche  sera  complété  par  les  Pu- 
pazzi  de  Lemercicr  de  Neuville,  que  M.  Dupressoir  a  engagé  pour  la  fin 
d'août.  * 

3-*,^  L'opérette  régnera  cette  saison  comme  les  années  précédentes  au 
Kursaal  d  Ems,  et  l'on  cite  comme  y  étant  déjà  engagés  :  MM.  Bonnet, 
Gourdon,  Jean-Paul  et  Derval,  des  Fantaisies-Parisiennes;  Mmes  Lovato, 
Decroix,  Labarre  et  Anna  Vaugel. 

^*^,  M.  Auguste  Morel,  l'excellent  directeur  du  Conservatoire  de  Mar- 
seille, a  organisé  tout  récemment,  dans  cette  ville,  au  profit  des  Algé- 
riens, une  brillante  fêle  musicale  qui  a  été  un  triomphe  pour  Sivori  et 
Boltesini,  et  dont  la  recelte  s'est  élevée  à  plus  de  13,000  francs. 


Uti  PARIS 


in 


,**  Notre  collaborateur  Artluir  Pougiii  vient  de  publier,  à  la  librairie 
Hachette,  une  étude  sur  BoUini,  sa  vie  et  ses  œuvres,  dédiée  pal-  l'au- 
teur à  Rossini.  Ce  travail,  sur  lequel  nous- reviendrons ,  fruit  de  recher- 
ches exactes  et  consiùencieuses,  est  des  plus  intéressants.  Il  est  édile  avec 
luxe  et  orné  d'un  fort  joli  portrait,  et  de  deux  fac  simile  de  l'écriture 
de  BeHini.'        '  y  ■ 

*V  Le- célèbre  violoncelliste  Feri  Kleizer,  vient  de- recevoir  de. S.  M.  le 
roi  de  Portugal  la  croix  de  chevalier  de  l'ordre  du  Christ. 

^*,i^,V Annuaire  de  la  Noblesse,  par  M.  Borel  d'Hauterive,  1868,  vingt- 
cinquième  année,  est  un  livre  que  l'on  a  besoin  de  consulter  à  chaque- 
instant.  Outre  la  partie  historique  et  rétrospective,  il  donne  l'étal  acluel 
des  grandes  familles,  les  alliances,  les  naissances  et  les  décès  de  la  no- 
blesse en  1867,  la  jurisprudence  du  conseil  du  sceau  ut  des  cours  impé- 
riales en  matière  de  titre  et  d'armoiries,  la  liste  des  chevaliers  de  Saint- 
Louis  actuellement  vivants,  etc. 

„,**  Un  Mois  de  Marie  doit  être  chanté  tous  les  mercredis  et  samedis 
du  mois  de  mai,  en  t'églisé  de  Saint-RGch ,  au  profit  de  TOEuvre  du 
rapatriement  des  Orphelins  de  Paris.  Une  société  d'amateurs  du  monde 
parisien  chantera  les  chœurs. 

***  Nous  avons  le.regret  d'annoncer  la  mort  de  Paul  Blaquières^  jeune 
compositeur  dont  quelques  chansons  avaient  été  popularisées  par  Thé- 
résa.  M.  Paul  Blaquières  a'  écrit  un  nombre  considérable  de  romances, 
chansonnettes,  rondes,  chœurs,  etc.,  parmi  lesquelles  il  faut  citer  :  la 
Femme  à. Barbe,  la  Vénus  aux  Carottes,  le  Chapeau  de  la  Marguerite. 

ÉTRANGER 

^%  Londres.  —  Mme  'Vanzini  (Van  Zandt)  a  débuté  avec  beaucoup  de 
succès  à  Covent-Garden,  dans  Un  ballo  in  maschera.  A  Drury-Lane,  Mlle 
Kellogg  fist  toujours  très-applaudie  ;  elle  a  joué  d'une  façon  charmante  le 
rôle  de  Zerline,  de  Don  Giovanni. 

'■■■  ,j*t  Birmingham.  —  Tm  Grande-Duchesse,  avec  Mme  Howard  Paul  dans 
le  rôle  principal,  vient  de  trouver  ici  comme  partout  un  accueil  très-sym- 
pathique. 

*%  Amsterdam, —  Dansun  grand  concert  debi£nfai.';ance,  donné  le  30  mars 
sous  le  paironage  de  S.  M.  la  reine  des  Pays-Bas,  et  dans  un  autrequi  a.eu 
lieu  le  5  avril,  le  chef  d'orchestre  et  compositeur  A.  Berlyn  a  fait  exé- 
cuter plusieurs  de  ses  compositions,  notamment  sa  deuxième  symphonie 
i;l  son  ouverture  en  «t,  dédiée  à  Mendèlssohn,  qui  ont  reçu  l'accueil  le 
plus  flatteur  et  le  mieux  mérité. 

^*^  Stiittgard-  —  Pendant  le  court  séjour  de  M.  W.  Krûger  dans  sa 
ville  natale,  où  il  a  été  appelé  par  la  fête  de  ses  parents,  il  a  fait  enten- 
dre son  second  concerto,  dédié  au  roi,  au  dernier  concert  d'abonnement 
donné  par  la  Chapelle  royale,  le  dimanche  de  Pâques.  L'exécution  de  ce 
morceau,  accompagné  admirablement  par  tout  l'orchestre  sous  la  direc- 
tion du  maître  de  chapelle,  M.  Doppler,  a  valu  à  son  auteur  un  grand 
et  légitime  succès.  Toute  la  cour  et  plus  de  2,000  personnes  assistaient  à 
ce  concert.  M.-  Kriiger  doit  être  fier  du  brillant  accueil  que  lui  ont  fait 
ses  compatriotes.  —  A  cette  occasion,  nous  mentionnons  avec  plaisir  la 
nomination  du  père  de  M.  Kriiger  comme  chevalier  de  l'ordre  de  Frédé- 
ric, que  le  roi  lui  a  envoyé  le  jour  de  sa  fête  de  la  cinquantaine.  —  Le 
théâtre,  fermé  pendant  toute  la  semaine-sainte,  a  rouvert  ses  portes  mardi 
dernier  par  une  belle  représentation  de  l'Africaine.  Cet  opéra  jouit  tou- 
jours d'une  vogue  exceptionnelle,  malgré  l'élévation  du  prix  des  places 
à  chacune  de  ses  représentations. 

^*^  Weimar. —  Le  13  avril,  a  été  donnée,  avec  un  très-grand  succès,  la 
première  représentation  de  la  Mignon  d'Ambroise  Thomas,  pour  la  fête 
de  S.  A.  la  grande-duchesse. 

^%  Berlin.  ■ — Dans  la  soirée  dramatique  et  musicale  qui  a  eu  lieu  à  la 
cour  à  l'occasion  de  l'anniversaire  de  la  naissance  du  roi,  outre  une 
comédie  allemande  et  les  Brebis  de  Panarge  (en  français),  on  a  joué  l'opé- 
rette d'Offenbach,  le  Mariage  aux  lanternes,  qui,  interprétée  par  Woworski, 
Salomon,  Mmes  Lucca,  Artût  et  Harriers-Wippern,  —  le  dessus  du  panier 
de  l'Opéra  royal,  —  a  obtenu  un  succès  des  plus  vifs. 

^*^jf  Vienne.  —  Les  artistes  dramatiques,  sur  l'initiative  de  l'un  d'eux, 
M.  Preising,  ont  décidé  de  former  une  association  analogue  à  celle  qui 
existe  ;i  Paris.  Les  statuts  doivent  être  soumis  au  gouvernement  dans  le 
cas  oii  les  directeurs  refuseraient  de  prendre  en  considération  les  récla- 
mations qui  leur  seront  soumises. 

***  Prague.  —  Un  opéra  nouveau,  Am  Runenstein,  de  F.  de  Flotow  et 
Richard  Gênée,  a  été  donné  pour  la  premiëhe  fois  le  13  avril  avec  un 
succès  complet.  La  facilité  et  la  grâce  mélodique  de  l'auteur  de  Martha 
se  retrouvent  dans  ce  nouvel  ouvrage,  qui  nous  semble  devoir  conserver 
la  faveur  du  public.  Les  auteurs  et  les  artistes  ont  été  rappelés  après  cha- 
que acte. 

,^*^  Milan.  —  La  Scala  a  clôturé  la  saison  par  Don  Carlos,  non  sans 


avoir  gratifié  ses  abonnés,  deux  jours  auparavant,  d'une  repré.sentation  du 
Guglielmo  Tell  »  mutilalo  per  la  compléta  asscnza  di  Matilde,  »  (nous  ci- 
tons ,fe  Trauaierç).  On.ne.s'étaii  pas  encore  avisé  de  trouver  que  le  rôle  de 
la  0  (ille  des  rois  »  fut  inutile  à  ce  point! 

j*»  Rome.  —  La  municipalité  romaine  a  di'«idé  de  laisser  le  théâtre 
ArgenlinaJ'ermé  pendant  la  saison  de  printemps,  l'imprésario  Jacovacci 
ayant  déclaré  qu'il  ne  voulait  pas -se  soumettre  ii  un  déficit  inévitable. 

»'*«  Barcelone.  —  La  campagne  est  terminée  au  Liceo  ;  le  ténor 
Stagne  et  Mme  Rey-Balla  sont  partis  pour  Sévillc  où  ils  sont  engagés  pour 
quelque  temps. 

„*,j  New-York. ^Ceal  soixante  représentations  n'ont  pas  encore  épuisé  la 
vogue  de  la  Grande- Duchesse  de  Gérolslcin. 


CONCERTS  ET  AUDITIONS  MUSICALES  ANNONCES. 

Salons  Enird,   lundi  20  avril  :    grand   concert  de  M.  Delaborde,    pour 

l'audition  du  piano  à  cjavier  de  pédales  d'Erard. 
Salons  Herz,  mardi  21  avril  :  concert  du  pianiste-compositeur  Alphonse 

Rendano. . 
Salons  Erard,  mardi  21  avril:  concert  de  Vivier. 
Salons  Pleyel-Wolf,  jeudi  23  avril  :  concert  de  bienfaisance    donné  par 

Mlle  Laure  Bedel,  lauréate  du  Conservatoire,  avec  le  concours  de 

Mme  BarthCrBanderali,   Jules    Lefort,   Mlle    Muller,   MM.    Garcin, 

Gouffé,  Poencet  et  Fandou. 
Salons  Erard,  jeudi  23  avril  :  concert  du  pianiste  Jacques  Baur. 
Salons  Pleyel-Wolf,  vendredi  2i   avril    :    séance   musicale   donnée   par 

M.  À.  Bessems. 
Salons  Erard,  samedi  23  avril  :  concert  de  Mlle  F.  Carreno. 
Salons  Pieyel-Wolff,  samedi  23  avril  :  concert  de  Mlle  Leybacque. 
Salons  Erard,  dimanche  26    :    concert    du    pianiste-compositeur   Fritz 

Gernsheim.- 
Salons  Pleyel,  lundi  27  avril,  à  8  heures  et  demie  :  concert  de  M.  Hip- 

polyte  Grignon,  avec  le  concours   de   MM.   Lefébure-Wély,  Léopold 

Dancla,  Fréd.  Leniz,  de  Mmes  L.  Dancla  et  Collin. 
Salons  Erard,  lun.li  27  avril  :  concert  de  Mlle  Octavie  Caussemille. 


Chez  G.  BRANDUS  et  S.  ÛUFOUR,  éditeurs,  103,  rue  de  Richelieu. 


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Auber,  Goria,  Ostiorno, 

Beethoven,      •  Gounod,  Poniatowski  (le  prince), 

Bériot  (de)  père,  Halévy  (Fromental),  Prudent, 

Bériot  (de)  fils,  Haydn,  Guidant  (Alfred), 

Bernard  (Paul),  Haendel,  Ravina, 

Berlioz,  Heller  (Slephen),  Rosenhain, 

Boïeldieu  père,  Herz  (Henri),  Rossini, 

Boulanger,  Kalkbrenner,  Rubinstein  (A.), 

Cberubini,  Kastner  (Georges),  Schubert, 

Clapisson,  Lecouppey,  Séligmann, 

Czerny,  Lefébure-'Wély,  Servais, 

David  (Félicien),  Lilolff,  Sivori, 

Devos  (Camille),  Méhul,  Thalberg, 

Donizetti,  Mendèlssohn,  Thomas  (Ambroise), 

Duprato,  Membrée,  Verdi, 

Escudicr-Kastner  (M"""),  Mozart,  Vieuxtemps, 

Gevaert,  Meyer  (Léopold  de),  'Weber  (Ch.-Marie  de). 

Pour  paraître  cette  semaine  : 

lies  portraits  de  lime  IVorinan-KeraiIa,  Illlc  llarie  Nernda, 
Aimé  MalUart,  Iiéonard,  IStœ^er, 


128 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE  DE  PAKIS. 


SOUS  PRESSE  : 
Ches  Ci.  BRANDVS  et  S.  DUFOUR,  éditears,  103,  rae  de  RIcUclleu. 

FLEUBliE  TBË 

Opéra  bouffe  en  trois  actes, 

PAROLES     DE     MM.     ALFRED     DURU     ET     HENRI     CHIVOT,     MUSIQUE     DE 


CHARLES  LECOCQ 


Les    Airs    des 

rODTERTnRE, 

I"  ACTE. 

1.  Chanson  de  la  Cantinière,  chantée  par  Mlle  Irma 

Marié  :   Vivandière,  cantinière,  parlez,  que  dcsires- 
vous ?  

2.  Couplets,  chantés  par  M.  Sytter  :  J'ai  couru  grossir 

la  foule 

3.  Duo,  chanté   par   Mlle    Lucile  Cabel    et  M.  Sytter  :  A 

l'éviter  j'ai  réussi 

4.  Chinoiserie,  chantée  par  MM.  Désiré  et  Léonce  :   Je 

suis  clairvoyant  comme  un  sphinx 

4  bis.  La  même,  arrangée  à  une  voix 

n'  ACTE. 

5.  Trio,  chante  par  MM.  Désiré,  Léonce  et  Sytter  :  La  loi 

du  Tsinn  est  fort  claire 


Morceaux    détachés 

ARRANGÉE    PODR    LE    PIANO. 

6.  Confidence,  chantée  par  M.  Léonce  :  Je  suis  né  dans 
le  Japon 

7.  Couplets,  chantés  par  Mlle  Irma  Marié  :  En  tous  pays 
l'homme  est  un  être  qui  traite  fort  mal 

m*    ACTE. 

8.  Romance,  chantée  par  M.  Sytter  :  Césarine  à  mes 
vœux  docile 

8  bis.  La  même,  transposée  pour  baryton 

9.  Duo,  chanté  par  Mlle  Irma  Marié  et  M.  Sytter:  Rappelle- 
toi,  ma  chère  amie 

9  bis.  Couplets  de  l'Alcôve,  extraits  du  Duo,  chantés 
par  M.  Sytter  :  Ensuite  dans  la  nuit  obscure 

10.  Ronde  du  Clicquot ,  chantée  par  Mlle  Irma  Marié, 
MM.  Désiré,  Léonce  et  Sytter:  Ce  n'est  pas  un  vin 
de  carême 


IaA    PARTITIOM    pour    CHAMT    et     PIAJVO 

QUADRILLES.  -  VALSE.  -  POLKA.  -  GALOP.  -  ARRANGEMENT  DIVERS 


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12  Chœurs  de  Poil  da  Silva 

DIEU    LE    VEUT 

NODS  TE  CHANTONS,  0  NUIT.       I  l  CHÂSSE  AUX  LIONS. 

Ode  à  la  Vierge,  pour  trois  voix  de  femme  avec  orgue. 
0  Salutaris,  pour  ténor  ou  soprano  avec  chœurs  et  orgue. 
Ave  Maria,  pour  soprano  et  contralto  avec  orgue. 

sous  PRESSE  : 

La  Chevauché,  Phœbé, 

Le  Chant  du  Tournoi,  Voguons  sans  bruit, 

Veni  Creator,  Le  Chant  de  l'Aurore, 

Te  Deum  laudamus  aux  cata-      Maître  Corbeau. 

combes    { double    et  triple      Matelots,  garde  à  vous  ! 

chœur),  Notre  Père,  invocation. 

Les  Fils  de  Mahomet,  — 


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piano  et  harmonium 12    » 

C.  Saint-Saëns.  Trois  lapsodies  (cantique  breton)  pour 

orgue,  chacune 6    » 

Arrangées  pour  le  piano  à  quatre  mains,  les  deux  pre- 
mières ,  cliacune 7  50 

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N'  17. 


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REVUE 


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Le  Journal  paraît  le  Dimanche . 


GAZETTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


Kos  abonnés  reçoivent,  avec  le  numéro  d'aitjourd'lial, 
IDA,  rêverie  sur  la  romance  :  AH,'  iaiageai-tnoi  gttew- 
rer,  de  linc  lieroy,  composée  pour  le  piano  par  mor- 
tier de  Fontaine. 


SOMMAIRE.  — Histoire  de  la  musique  instrumentale  (10'  et  dernier  article), 
par  Haurice  Cristal.  —  Concert  de  Vivier  à  la  salle  Erard,  par  Charles 
Bannelier.  —  Grand  orgue  de  Notre-Dame.  —  Revue  des  théâtres,  par 
D.  A.  D.  Salnf-Vves.  —  Concerts  et  auditions  musicales  delà  semaine. 
—  Nouvelles  des  théâtres  lyriques.  —  Nouvelles  diverses.  ^-  Concerta  et 
auditions  musicales  annoncés,  —    4aaonces. 


HISTOIRE  DE  LÀ  MUSIQUE  IRSTRUIERTÂLE 

(10°  et  dernier  article)  (1). 

On  a  souvent  reproché  à  Boccheriui  de  manquer  d'énergie ,  et 
le  violoniste  Poppo,  faisant  allusion  à  l'exquise  douceur  de  cer- 
tains passages,  disait  de  lui  qu'il  était  la  femme  d'Haydn.  Cepen- 
dant plusieurs  quintettes  sont  comme  enflammés  de  passion,  d'en- 
train et  de  véhémence.  Son  harmonie,  quelquefois  incorrecte, 
abonde  en  détails  piquants.  Il  emploie  souvent  l'unisson  et  réduit 
parfois  son  quintette  à  un  simple  duo;  mais  chez  lui  ceci  est  un 
effet  voulu  et  il  met  une  adresse  merveilleuse  à  tirer  parti  de  la 
différence  des  timbres.  C'est  ainsi  que  ce  qui  chez  d'autres  serait 
un  défaut  devient  dans  sa  musique  une  source  de  beautés  qui  lui 
sont  personnelles. 

Ses  finales  ont  vieilli ,  mais  ses  adagios  et  ses  menuets  sont  tou- 
jours exquis.  Doué  de  fécondité  autant  que  d'originalité,  Bocche- 
rini  a  produit  trois  cent  soixante-six  compositions  instrumentales. 
On  voit  que  ce  maître  a  de  nombreux  titres  à  l'admiration  des 
connaisseurs  ;  mais,  chose  singulière ,  avec  un  mérite  si  remar- 
quable, Boccherini  est  resté  inconnu.  L'Allemagne  a  dédaigné 
longtemps  sa  simplicité  naïve,  et  l'opinion  qu'en  avaient  les  artistes 


(1)  Voir  les  n"»  38,  -40,  42,  ii,  46  de  l'année  1867,  et  les  n°»  3,  9,  10 
et  13  de  l'année  1868. 


de  ce  pays  se  peut  résumer  dans  un  mot  prononcé  par  Spohr  à 
Paris,  dans  une  réunion  musicale  où  l'on  venait  d'exécuter  quel- 
ques-uns des  quintettes  du  maître  italien.  On  demandait  au  célè- 
bre violoniste  et  compositeur  allemand  ce  qu'il  en  pensait  : 

—  Je  pense,  répondit-il,  que  cela  ne  mérite  pas  le  nom  de  mu- 
sique . 

Il  est  fâcheux  que  la  manière  de  sentir  se  formule  svstj^.';:ii,i- 
quement  chez  les  artistes,  qui  devraient  cependant  avoir  l'intelli- 
gence ouverte  à  toutes  les  beautés  produites  en  dehors  de  leur 
œuvre.  Il  est-' à  regretter  surtout  qu'un  homme  de  mérite,  pas- 
siormé  pour  les  enharmonies,  pour  les  transitions  fréquentes,  soit 
arrivé  à  ne  plus  trouver  de  charme  aux  choses  simples  et  natu- 
relles et  à  nier  le  mérite  des  créations  que  distingue  une  complète 
individualité.  Heureux  l'artiste  qui  sait  certaines  choses  qu'on  igno- 
rait un  siècle  avant  lui  ;  mais  il  est  à  plaindre  celui  dont  le  savoir 
se  transforme  en  formules  et  qui  ne  comprend  que  ce  qu'on  fait 
de  son  temps  et  l'art  dont  il  a  l'habitude  !  Le  domaine  de  la  mu- 
sique, comme  celui  des  autres  arts,  est  immense;  il  faut  se  garder 
de  le  circonscrire  dans  une  formule  ou  dans  une  époque.  Baillot, 
interprète  incomparable  des  œuvres  de  tous  les  grands  maîtres,  avait 
su  conserver  à  celles  de  Boccherini  tout  le  charme  de  la  jeunesse, 
toute  la  vie  d'un  immortel  printemps.  Après  lui  cette  musique  a  été 
négligée  par  les  jeunes  artistes,  mais  elle  reprend  vogue  maintenant, 
et  le  nombre  d'amateurs  qui  la  connaissent  et  en  aiment  les  beau- 
tés augmente  chaque  jour. 

Au  Conservatoire  de  Bruxelles,  grâce  à  l'initiative  de  M.  Fétis, 
les  jeunes  artistes  en  ont  relevé  le  goût  et  la  tradition.  En  France, 
Boccherini  a  toujours  été  très-grandement  apprécié.  Sa  musique 
a  toujours  excité  un  tel  enthousiasme  que  le  commerce,  pour 
exploiter  ce  succès,  faisait  composer  par  des  auteurs  apocryphes 
des  compositions  imitées  de  Boccherini  et  qu'on  vendait  en  les  lui 
attribuant. 

Cambini  a  écrit  pour  Pleyel,  éditeur,  un  grand  nombre  d'imi- 
tations des  compositions  de  Boccherini,  qu'on  a  publiées  parmi  les 
œuvres  originales  de  ce  grand  artiste.  Un  jour  que  M.  Fétis  dînait 
avec  Cambini  chez  l'éditeur  Auguste  Leduc  et  avec  Choron,  son 
associé,  il  arriva  que  Choron  dit  tout  à  coup  : 

—  Père  Cambini,  est-il  vrai  que  vous  avez  fabriqué  du  Bocche- 
rini pour  les  marchands,  notamment  pour  Pleyel? 


130 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSlCÂLIi 


—  Ti-ès-vrai,  répondit  Cambini,  et  j'ai  eu  tort,  car  on  me  payait 
bien  peu  pour  cela. 

—  Si  l'on  avait  voulu  payer  plus  cher,  dit  Leduc,  on  se  serait 
adressé  à  Boc);lierini. 

—  Sans  doute,  mais  il  n'aurait  pas  si  bien  réussi!  répartit  le 
bonhomme  avec  sa  suffisance  habituelle. 

Ces  supercheries,  que  le  commerce  de  la  musique  contempo- 
raine n'accepterait  pas,  ont  toutes  été  dévoilées,  et  l'on  peut  au- 
jourd'hui, grâce  à  M.  Picquit,  connaître  le  catalogue  complet  et 
raisonné  de  l'œuvre  de  Boccherini,  sans  avoir  à  redouter  d'être 
induit  en  erreur  et  de  prendre  pour  l'œuvi-c  du  maître  les  élucu- 
bratioijs  médiocres  d'un  arrangeur  de  mauvais  aloi. 

Lai  musique  instrumentale  de  chambre,  restreinte  dans  ses  moyens 
d'exécijtlon  au  violon  et  ù  ses  congénères,  ne  date,  comme  nous 
l'afons  vu,  qu6  de  la  fin  du  xvn"  siècle,  et  jusqu'à  CorcUi ,  rien 
n'indiquait  la  savante  direction  que  le  grand  artiste  eut  la  gloire 
d'imprimer  à  la  musique.  Après  cet  illustre  réformateur,  vint 
Tartini,  aussi  grand  compositeur  que  grand  violoniste.  Nous  avons 
raconté  quels  services  il  a  rendus  à  la  musique  de  chambre.  Les 
élèves  de  ces  deux  grands  artistes,  Gerainiani,  Locatcllo,  Simis, 
Leclair,  Nardini,  Pugnani,  Domcnico  Ferrari  et  plusieurs  autres 
ajoutèrent  encore  à  la  gloire  de  cette  pléiade  et  préparèrent  l'école 
mémorable  dont  Viotti  devint  plus  lard  la  personnification.  Mais, 
il  faut  le  reconnaître,  quelqu'influence  qu'aient  exercée  les  travaux 
de  ces  virtuoses  sur  le  grand  mouvement  opéré  dans  la  musique 
instrumentale  vers  la  seconde  moitié  du  xvin"  siècle,  ils  entrevirent 
à  peine  les  hautes  destinées  auxquelles  leur  art  devait  s'élever. 
Préoccupés  uniquement  des  progrès  du  violon,  des  moyens  de  les 
hâter  et  de  les  étendre,  ils  conçurect  leurs  compositions  dans  ce 
but  exclusif;  ils  n'imaginèrent  aucune  des  combinaisons  ingé- 
nieuses d'ir.Gtiuments  où  chaque  partie  devenue  concertante  ajoute 
à  l'intérêt  du  discours  musical,  lui  donne  de  la  vie  et  du  corps  et 
permettousiesacccnls,  tous  les  tons.  L'honneur  de  s'élancer  au  delà 
de  ces  premiers  essais  était  rései-vé  à  Boccherini  ;  par  son  admi- 
rable génie,  il  a  éclairé  les  rives  inconnues  où  marchèrent  ensuite 
d'un  pas  si  glorieux  Haydn,  Mozart  et  Beethoven.  Boccherini  est 
le  créateur  du  trio,  du  quatuor,  du  quintette;  il  a  donc  légitime- 
ment acquis  la  place  qui  désormais  lui  est  irréfragablement  assi- 
gnée dans  l'histoire  de  la  musique  instrumentale. 

Pendant  que  la  musique  de  chambre  grandissait  ainsi,  un  pro- 
grès simultané  développait  les  proportions  de  la  musique  orches- 
trale, qui  s'accroissait  du  hautbois  et  des  cors,  utilisés  pour  la  pre- 
mière fois  par  Wanhal,  et  des  clarinettes  et  des  bassons  que 
Gossec  y  adjoignit  bientôt.  Jean-Baptiste  Summartiui,  de  Milan, 
donna  un  nouvel  essor  aux  pensées,  jusque-là  timides,  que  devait 
reproduire  désormais  un  orchcsti'e  enrichi  de  tant  de  timbres  nou- 
veaux et  d'un  si  grand  nombre  d'effets  inconnus,  grâce  à  l'ad- 
jonction des  instruments  à  vent.  Enfin,  Haydn  s'empara  du  pro- 
gramme orchestral  que  les  maîtres  avaient  peu  à  peu  perfectionné. 
n  y  imprima  le  sceau  de  son  génie,  et,  après  avoir  fait  de  ce  genre 
de  musique  une  des  plus  vastes  conceptions  de  l'art,  il  conquit  la 
gloire  d'avoir  créé  la  symphonie,  comme  Boccherini  avait  créé  la 
musique  de  chambi'e. 

Des  mains  d'Haydn,  le  flambeau  magique  passa  dans  les  mains 
fécondes  de  Mozart  et  de  Beethoven,  et  l'Allemagne  épuisée  sem- 
bla vouloir  se  reposer  après  ce  grand  effort. 

Résumons-nous.  Désireux  de  faire  apprécier  la  valeur  de  l'œu- 
vre de  Boccherini,  d'Haydn,  de  Mozart,  de  Beethoven,  des  maîtres 
qui  les  ont  suivis  dans  leur  carrière  glorieuse,  nous  avons  étudié 
les  origines  et  les  transformations  successives  de  la  musique  ins- 
trumentale. On  connaît  et  on  comprend  maintenant  les  développe- 
ments particuliers  que  chacun  de  ces  maîtres  a  introduits  dans 
l'art. 


Aussi  n'est- il  pas  surprenant,  en  raison  même  d'une  extension 
si  féconde  et  de  progrès  si  rapides,  de  voir,  un  siècle  à  peine 
après  les  premiers  bégaiements  de  là  musique  orchestrale,  vers 
1760,  la  musique  de  chambre  et  la  symphonie  briller  d'un  éclat 
qui  devait  être  impérissable  et  trouver  des  formes  et  des  formules 
que  l'on  cherche  encore  à  reproduire.  Que  de  compositeurs  ont 
déployé  des  aptitudes  remarquables  dans  ce  que  l'on  est  convenu 
d'appeler  aujourd'hui  la  «  musique  classique  !  »  Mais  il  n'est,  à  vrai 
dire  que  quatre  maîtres  qui  aient  résumé  les  forces  éparses  de  ces 
esprits  d'élite  et  qui  aient  réalisé,  dans  des  créations  immortelles,  ce 
que  l'art  musical  ott're  de  plus  élevé,  de  plus  parfait.  En  creusant 
la  mine  intarissable  pendant  une  période  de  plus  de  soixante  ans, 
Boccherini,  Haydn,  Mozart,  Beethoven  ont  amené  la  musique  à 
son  âge  d'or,  à  son  heure  bénie,  à  un  moment  de  rayonnement 
et  de  gloire  qui  rappelle  la  grandeur  de  la  littérature  îiu  siècle  de 
Louis  XIV  et  les  triomphes  de  la  peinture  sous  le  pontificat  de 
Léon  X. 

Les  sculpteurs  grecs  prenaient  pour  sujet  de  leurs  études  et  de 
leurs  œuvres  l'homme  extérieur,  le  jeu  de  ses  muscles  dans  le 
mouvement,  les  attitudes  :  la  forme,  en  un  mot  ;  les  peintres  de 
la  Renaissance  observaient  et  reproduisaient  l'homme  complet, 
avec  ses  passions  sous  ses  muscles,  ses  sentiments  dans  son  atti- 
tude, avec  son  âme  sous  son  enveloppe.  Plus  tard,  l'homme  ne 
suffit  plus  à  la  peinture,  et  la  nature  entière,  avec  ses  mille  as- 
pects, dans  ses  détails  infinis,  dans  ses  transformations  innom- 
brables, vint  embellir  la  palette  des  artistes.  Ne  retrouvons-nous 
pas  les  mêmes  phases  dans  l'histoire  de  la  musique?  D'abord  l'or- 
nement, mais  aussi  l'esclave  des  temples  et  des  sanctuaires ,  elle 
brise  peu  à  peu  ses  entraves,  se  mêle  à  la  famille,  à  la  foule,  à 
la  cité,  et  finit  par  arriver  au  théâtre,  où  elle  se  modifie  com- 
plètement. La  voix,  qui  suffisait  dans  le  principe  à  satisfaire  les 
oreilles  avides  d'harmonie ,  demande  l'appui  des  instruments  ; 
ceux-ci  se  greffent  à  la  voix,  pour  l'aider  timidement,  pour  vivre 
d'elle,  à  côté  d'elle  ;  cependant,  ils  s'améliorent,  ils  se  perfection- 
nent, à  travers  les  âges,  et  le  moment  arrive  où  ils  veulent,  eux 
aussi,  vivre  de  leur  vie  propre  et  se  suffire  comme  la  voix,  qui  a 
pu  longtemps  se  passer  de  leur  concours.  Musique  instrumentale 
d'un  côté;  musique  vocale  de  l'autre.  L'opéra  réunit  ces  deux  élé- 
ments. Mais  la  musique  intrumentale,  de  plus  eu  plus  jalouse  de 
s'affranchir  de  la  nécessité  primitive  de  la  voix  humaine,  déploie 
ses  ailes,  s'ouvre,  enivrée,  une  carrière  libre,  idéale,  infinie, 
entrevoit  des  horizons  vierges  de  toute  investigation  ;  et  tandis  que 
la  peinture  accueille  avec  honneur  toutes  les  manifestations  de  la 
vie  panthéistique,  fleurs  de  Van  Huysum,  troupeaux  de  Paul  Pot- 
ter,  marines  de  Van  de  Velde,  paysages  de  Ruysdaël,  —  Bach, 
Haydn,  Haendel,  Boccherini,  Scarlatti,  Mozart,  Beethoven,  plantent 
le  nouvel  étendard  de  la  musique  instrumentale  et  créent,  eux, 
dans  la  toute-puissance  de  leur  génie,  la  fugue,  la  sonate,  le  qua- 
tuor et  la  Symphonie! 

Maurice  CRISTAL. 


CONCERT  VIVIER  À  LÀ  SALLE  ÉRÂRD. 

Le  21  avril  1868. 

En  entrant  dans  les  salons  d'Erard,  en  y  voyant  réunies  toutes 
les  notabilités  qui  s'y  pressaient,  on  eût  pu  se  croire  dans  une 
des  grandes  et  belles  soirées  de  la  Cour  ou  du  grand  monde  que 
nous  signalions  encore  tout  récemment  dans  cette  feuille.  Si  l'on 
doit  juger  de  la  considération  qu'inspire  un  artiste  par  le  rang 
des  personnages  qui  se  rendent  à  son  invitation,  Vivier  doit  se  trou- 
ver bien  fier,  car  s'il  n'y  était  pas  présent,  S.  M.  l'Empereur  lui- 
même  avait  voulu  donner  à  son  artiste  favori  une  preuve  de  l'in- 


DE  PARIS. 


131 


térêt  qu'il  lui  porte  en  y  faisant  retenir  sa  place  contre  l'envoi 
direct  d'un  très-beau  présent.  Il  suit  de  là  que  Vivier  n'avait  pour 
ainsi  dire  qu'à  se  montrer  pour  que  la  salle  entière  éclatât  en 
applaudissements,  et  c'est  ce  qui  a  eu  lieu  dès  qu'on  l'a  vu  pa- 
raître avec  Mme  Léonard  et  qu'on  l'a  entendu  dire,  comme  lui  seul 
sait  le  dire,  cet  andante  pour  voix  et  cor.  délicieuse  composition 
dans  laquelle  l'auteur  semble  avoir  concentré  toutes  les  douleurs, 
exprimé  toutes  les  plaintes  d'une  âme  ulcérée  ! 

Bien  des  cornistes  ont  eu  la  prétention  ou  tout  au  moins  l'am- 
bition de  faire  tout  ce  que  fait  Vivier;  mais  quand  ils  seront  par- 
venus à  produire  comme  lui  sur  leur  instrument,  à  l'aide  de  la 
résonnance  naturelle  et  d'un  petit  artifice,  trois  et  quatre  sons 
simultanés,  qu'ils  se  mettent  alors  à  son  Menuet  fantastique ,  et 
s'ils  peuvent  aller  jusqu'au  bout  sans  encombre,  s'ils  abordent 
avec  cette  netteté,  cette  sûreté,  cette  rondeur,  les  successions  de 
sons  rapides;  s'ils  arrivent  à  dissimuler  avec  autant  de  bonheur 
les  notes  bouchées,  au  point  de  rendre  agréables  et  pleins  des  fa 
du  registre  moyen  et  des  la  bémols,  il  ne  leur  restera  plus 
guère  qu'à  lui  prendre  le  secret  de  ces  sons  veloutés  et  charmants 
dont  il  sait  si  bien  faire  ressortir  l'effet  par  le  voisinage  d'une  fan- 
fare éclatante,  par  des  crescendo  et  diminuendo  habilement  mé- 
nagés. 

Des  trois  compositions  de  Vivier  exécutées  par  lui  à  son  con- 
cert :  Andante,  pour  voix  et  cor;  — Adagio  et  Menuet  fantastique, 
pour  cor  solo;  —  Appel  du  Chasseur  et  Description  d'une  Chasse, 
autre  duo  pour  voix  et  cor,  la  première  et  la  dernière  ont  été  ap- 
préciées depuis  longtemps  déjà  dans  ces  colonnes;  la  seconde  seule 
est  nouvelle.  On  y  retrouve  le  caractère  élevé,  le  tour  mélodique 
noble  et  simple  de  ses  aînées.  Ce  n'est  pas  un  des  moindres  mé- 
rites de  Vivier  que  d'avoir  su  intéresser  dans  le  cadre  restreint,  je 
dirai  presque  pauvre  de  ressources,  dans  lequel  le  renfermait  la. 
nature  de  son  instrument,  manquant  essentiellement  d'homogé- 
néité et  antipathique  en  général  aux  modulations.  Ses  duos  pour 
voix  et  cor,  avec  accompagnement  de  piano,  sont  des  modèles  de 
savoir-faire  en  même  temps  que  de  charmants  poèmes. 

Vivier  s'était  adjoint, — voyez  un  peu  quel  luxe  de  précautions!  — 
M.  et  Mme  Léonard,  Ed.  "Wolffet  un  ténor  doué  d'une  fort  jolie  voix, 
M.  F.  L. ,  deux  initiales  qu'on  aurait  voulues  plus  transparentes. 
Il  aurait  pu  s'entourer  d'étoiles  de  moyenne  grandeur,  pour  bril- 
ler plus  à  son  aise,  ou  ne  pas  s'entourer  du  tout  ;  que  ceux-là  se 
plaignent,  qui  croient  y  avoir  perdu.  Mme  Léonard  a  dit  avec  le 
grand  style  et  l'exquise  méthode  de  vocalisation  qu'elle  a  recueillis 
dans  l'héritage  des  Garcia  la  partie  vocale  du  premier  duo  de 
Vivier  et  les  variations  brillantes  et  difficiles,  mais  sans  grand 
intérêt,  d'Adolphe  Adam  sur  :.4/i/  vous  dirai-je,  maman.  M. F.  L..., 
dans  la  Description  d'une  Chasse,  a  fort  bien  donné  la  réplique  à 
l'auteur,  et  a  fait  en  outre  le  plus  grand  plaisir  dans  la  sérénade 
de  l'Amant  Jaloux  de  Grétry,  et  dans  la  Donna  è  mobile,  de  Rigo- 
letto.  L'hymne  national  autrichien  a  fourni  à  Léonard  d'intéres- 
santes variations  en  style  moderne  (il  a  su  éviter,  avec  son  tact 
ordinaire,  l'écueil  d'une  continuation  de  Haydn),  avec  lesquelles, 
sa  belle  exécution  aidant,  il  a  produit  un  très- grand  effet.  Il  a  joué, 
avec  Edouard  Wolff,  le  beau  duo  de  ce  dernier  et  de  Vieuxtemps, 
pour  piano  et  violon,  sur  des  motifs  de  Don  Juan-,  l'œuvre  et  ses 
interprètes  ont  été  chaleureusement  applaudis  et  ces  derniers  rap- 
pelés. Enfin,  Edouard  "Wolff  a  obtenu  un  succès  très-complet  et 
très-légitime  avec  son  étude  intitulée  Triomphale,  et  surtout  avec 
sa  Tarentelle,  morceau  très-bien  tait,  qu'il  joue  avec  une  mer- 
veilleuse agilité. 

Nous  voudrions  dire  maintenant  au  grand  corniste  :  à  bientôt! 
Malheureusement,  son  habitude  invétérée  de  ne  pas  se  prodiguer 


nous  fait  craindre  de  ne  pouvoir  prendre  rendez-vous,  comme 
d'habitude,  que  pour  l'année  prochaine;  bornons-nous  donc,  en 
attendant,  à  constater  les  bravos  enthousiastes  et  les  rappels  réi- 
térés dont   il  a  été  l'objet. 

Charles  BANNELIER. 


GRAND  ORGUE 

ne  régltae  métropolitaine  de  nrotre-Dame  de  Paris, 

RECONSTRUIT 

Par  m.  a.  CAVAILLÉ-COLL. 

Nous  avons  sous  les  yeux  un  extrait  du  très-remarquable  rap- 
port adressé  à  S.  E.xc.  le  ministre  des  cultes  par  la  commission 
chargée  de  la  vérification  et  de  la  réception  des  travaux  du  grand 
orgue  de  Notre-Dame,  construit  par  l'éminent  facteur  M.  Aristide 
Cavaillé-Coll.  Cette  commission  était,  en  grande  partie,  composée 
de  notabilités  de  la  science  et  de  l'art  musical  :  M.  Auber  y  sié- 
geait à  côté  de  M.  le  sénateur  Dumas,  l'un  des  secrétaires  perpé- 
tuels de  l'Académie  des  sciences;  MM.  Lissajous  et  Félix  Clément, 
à  côté  de  MM.  le  Baron  Séguier  et  du  général  Favé,  commandant 
de  l'Ecole  polytechnique.  La  commission  comptait,  en  outre,  dans 
son  sein  un  certain  nombre  de  personnes  désignées  par  leurs  con- 
naissances spéciales  en  physique  et  en  mécanique,  ou  par  la  siî- 
reté  de  leur  goût  et  de  leur  oreille  en  matière  musicale. 

Parmi  tous  ces  hommes  de  choix  figurait  naturellement  M.  l'abbé 
Lamazou,  vicaire  de  la  Madeleine.  Dans  une  notice  sur  la  facture 
d'orgue,  ce  digne  ecclésiastique  s'était  déjà  signalé  comme  possé- 
dant à  fond  les  questions  techniques  et  scientifiques  qui  se  rat- 
tachent à  la  pratique  progressive  de  cette  branche  professionnelle; 
il  avait,  de  plus,  fait,  en  même  temps,  preuve  de  savoir  sur  tout 
ce  qui  intéresse  l'art  chrétien  et  le  culte  catholique.  L'Académie 
des  sciences  et  la  Société  d'encouragement  pour  l'industrie  na- 
tionale, frappées  du  mérite  de  ces  études,  leur  avaient  accordé  les 
éloges  les  plus  explicites. 

La  commission  n'avait  que  l'embarras  du  choix  de  son  rappor- 
teur. Dix  de  ses  membres  laïques  étaient  merveilleusement  com- 
pétents et  préparés  à  cette  mission.  Elle  la  confia  à  M.  l'abbé  La- 
mazou. Celui-ci  s'en  est  acquitté  de  manière  à  obtenir  l'unanime 
approbation  de  ses  collègues,  de  ses  collaborateurs.  C'est  un  tra- 
vail complet;  grâce  à  ses  nombreux  voyages,  M.  l'abbé  Lamazou 
a  pu  en  acci-oître  l'intérêt  par  une  comparaison  impartiale  et  ap- 
profondie de  l'orgue  de  la  métropole  parisienne  avec  les  instru- 
ments renommés  qu'il  avait  pu  étudier  de  visu  et  de  auditu,  en 
Suisse,  en  Allemagne,  en  Hollande  et  dans  le  Royaume-Uni.  La 
facture  française,  représentée  par  les  orgues  de  la  Madeleine,  de 
Saint-Sulpice,  de  Notre-Dame,  œuvres  de  M.  A.  Cavaillé-Coll,  a 
été  relevée  de  l'état  d'infériorité  dans  lequel  la  maintenaient  d'an- 
ciennes opinions  accréditées,  qui  ne  seraient  plus  aujourd'hui  que 
des  préjugés;  elle  peut  donc,  en  toute  conscience  et  en  toute  jus- 
tice, revendiquer  la  prééminence. 

Nous  regrettons  de  ne  pouvoir  citer  que  quelques  paragraphes 
de  cet  intéressant  rapport  qui  oft're  le  rare  mérite  de  traiter  des 
matières  scientifiques  avec  la  plus  grande  lucidité  tt  dans  un  lan- 
gage à  la  fois  littéraire  et  artistique. 

Des  travaux  de  cette  importance,  de  cette  autorité,  quand  ils 
émanent  de  membres  du  clergé ,  n'honorent  pas  moins  l'Eglise 
que  leurs  propres  auteurs. 

Extrait  du  rapport. 

«  §  VI.  —  Il  nous  reste  à  signaler  un  dernier  progrès  réalisé  pour  la 
première  fois  dans  l'orgue  de  Notre-Dame. 


132 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


»  L'importance  des  orgues  ne  doit  pas  se  mesurer  seulement  par  le 
nombre  des  tuyaux  et  la  dimension  des  jeux,  mais  encore  par  la  richesse 
de  leur  composition  harmonique. 

»  Dans  les  plus  grandes  orgues  on  trouve  des  jeux  de  32,  16,  8,  Â, 
2  et  mfime  i  pied.  Tous  ces  jeux  sont  à  l'octave  les  uns  des  autres. 
Mais,  indépendamment  de  ces  jeux  à  l'octave,  on  a  introduit  de  tout 
temps  dans  la  construction  des  orgues  des  jeux  intermédiaires,  pris  dans 
la  série  harmonique  des  sons,  donnant  la  quinte,  la  tierce  et  leurs  oc- 
taves. M.  Cavaillé-Coll  a  ajouté  la  septième  et  ses  différentes  octaves, 
c'est-à-dire  qu'il  a  complété  la  série  harmonique  des  sons  de  3  à  6  de- 
grés de  plus  qu'on  ne  l'avait  fait  jusqu'ici. 

»  Il  en  résulte  que  la  base  des  divers  jeux  de  l'orgue,  qui  ne  s'éten- 
dait jusqu'à  ce  jour  que  de  9  à  i\  degrés  différents,  s'est  accrue  par  le 
fait  de  l'addilion  de  la  septième  jusqu'à  16  degrés  de  la  série  harmo- 
nique. 

»  Ainsi,  l'orgue  de  Notre-Dame,  qu'il  faut  ckisser  en  première  ligne, 
possède  une  base  de  16  degrés  pris  dans  la  série  harmonique  de  1  à  32, 
tandis  que  l'orgue  de  Saint-Sulpice,  quoique  ayant  un  plus  grand  nombre 
de  jeux,  ne  possède  que  H  degrés  de  cette  même  série;  celui  de  la  ca- 
thédrale d'Ulm,  un  des  plus  considérables  d'Europe,  également  11  degrés; 
celui  de  Harlem,  9;  celui  de  Fribourg,  7;  ceux  de  Saint-Eustache,  de 
Birmingham  et  de  la  Madeleine ,  6. 

»  Ce  complément  de  jeux  ajoute  à  l'instrument  non-seulement  une 
augmentation  de  puissance  en  proportion  réelle  avec  le  nombre  des  jeux, 
mais  il  permet,  en  outre,  de  donner  au  timbre  de  certaines  combinai- 
sons des  caractères  de  sonorité  tout  à  fait  nouveaux  et  d'une  grande  va- 
riété et  richesse  d'effets. 

))  Pour  résumer  ces  explications  générales  sur  la  série  harmonique, 
\oici  l'application  qui  en  a  été  faite  au  grand  orgue  de  Notre-Dame.  Le 
clavier  de  pédale  contient  une  série  harmonique  complète  de  32  pieds, 
du  1"  au  8°  degré;  le  clavier  de  bombarde  contient  une  série  harmonique 
au  ton  de  16  pieds,  du  2°  au  16"  degré,  et  le  clavier  du  grand  chœur 
contient  une    série  harmonique  au  ton  de  8  pieds,  du  i^  au  32°  degré. 

»  §  VIL  —  11  ne  sera  pas  inutile  de  constater  que  les  progrès  réalisés 
dans  l'orgue  de  Notre-Dame  sont  un  honneur  pour  l'industrie  et  l'art 
français.  Depuis  quarante  années,  la  facture  française  a  laissé  bien  loin 
derrière  elle  la  facture  étrangère,  qui  avait  cependant  produit  des  orgues 
justement  populaires,  telles  que  les  orgues  de  Harlem,  de  Fribourg  et  de 
Dresde.  L'étude  que  nous  avons  faite  sur  place  de  ces  trois  instruments 
et  des  instruments  les  meilleurs  de  l'Europe  nous  a  démontré  leur 
état  d'infériorité,  même  par  rapport  à  l'orgue  de  la  basilique  de  Saint- 
Denis,  qui  est  considéré  comme  le  premier  ouvrage  marquant  de  la  facture 
moderne.  Depuis  cette  époque,  l'art  étranger  s'est  lancé  à  notre  suite  dans 
la  voie  des  améliorations  et  des  perfectionnements,  surtout  en  Angleterre, 
en  Hollande,  en  Allemagne  et  en  Suisse;  mais  comme  M.  Cavaillé-Coll 
s'est  constamment  appliqué  à  faire  progresser  l'art  français,  les  nations 
voisines  restent  toujours,  vis-à-vis  de  nous,  dans  une  infériorité  mani- 
feste . 

»  Trois  simples  dates  sont  une  preuve  irrécusable  de  notre  assertion. 

1)  Dans  l'Exposition  universelle  de  Paris,  en  1853,  la  seule  grande 
médaille  d'honneur  réservée  à  la  facture  d'orgue  fut  décernée  à  l'orgue 
de  Saint-Vincent-de-Paul. 

»  Dans  l'Exposition  universelle  de  Londres,  en  1862,  on  ne  put  faire 
figurer  que  les  plans  de  l'orgue  de  Saint-Sulpice.  Mais  les  amateurs  qui 
ont  comparé  cet  instrument  à  ceux  qu'on  avait  exposés  à  Londres,  n'ont 
pas  eu  un  moment  de  crainte  ou  d'hésitation  sur  la  supériorité  de  la 
facture  française. 

»  Enfin,  dans  l'Exposition  universelle  de  1867,  ceux  qui  ont  étudié 
l'orgue  de  Notre-Dame  ne  sont  point  surpris  que  le  Jury  international 
ait  associé  son  constructeur  à  ses  travaux  et  classé  ses  orgues  hors  con- 
cours. 

»  M.  Cavaillé-Coll  avait  pourtant  un  grave  écueil  à  redouter  pour  son 
orgue  de  notre-Dame,  c'était  son  orgue  de  Saint-Sulpice.  11  suffit  de  rap- 
peler les  conclusions  du  rapport  de  M.  de  la  Morinière  (1)  et  de  repro- 
duire celles  du  rapport  de  M.  Lissajous,  à  la  Société  d'encouragement 
pour  l'industrie  nationale  (2),  sur  le  travail  de  M.  Cavaillé-Coll  ;  «  La 
»  reconstruction  de  l'orgue  de  Saint-Sulpice  a  été  pour  cet  habile  artiste 
»  l'occasion  de  réunir,  dans  un  ensemble  monumental,  tous  les  perfec- 
»  tionnements  dont  il  a  doté  la  facture  moderne.  Malgré  le  nombre 
»  considérable  de  jeux,  la  multiplicité  des  organes,  le  développement 
j>  considérable  de  la  soufflerie ,  cet  orgue  présente  dans  l'ensemble  une 
»  simplicité  majestueuse  et  une  élégante  clarté.  La  partie  acoustique  de 
»  l'instrument  se  fait  remarquer  par  la  variété  et  la  distinction  des  tim- 
»  bres;  l'ingénieuse  disposition  des  registres,  jointe  à  la  multiplicité  des 
»  pédales  de  combinaison ,  crée  à  l'organiste  des  ressources  d'exécution 
»  inconnues  jusqu'à  présent.  Le  Conseil,   convaincu  de  la  haute  valeur 


(1)  Repos,  1864. 

(2)  Séance  du  13  juillet  1863. 


»  des  travaux  de  M.  Cavaillé-Coll ,  et  reconnaissant  les  efforts  qu'il  n'a 
»  cessé  de  faire  pour  maintenir  la  facture  française  au  premier  rang  en 
»  Europe,  lui  décerne  une  médaille  d'or.  » 

»  Malgré  sa  tendresse  bien  justifiée  pour  une  œuvre  qui,  en  échange 
de  pénibles  labeurs,  lui  a  conquis  les  plus  honorables  suffrages,  M.  Ca- 
vaillé-Coll s'est  demandé  s'il  convenait  que  la  première  cathédrale  de 
France  par  ses  souvenirs  religieux  et  nationaux  possédât  ua  orgue 
inférieur  à  celui  d'une  église  voisine.  Inspiré  par  son  amour  de  l'art, 
fasciné  par  la  majesté  architecturale  de  Notre-Dame,  enhardi  par  la  mer- 
veilleuse restauration  qui  vient  de  la  rajeunir,  il  a  voulu  en  compléter 
l'harmonie  par  une  œuvre  monumentale. 

»  La  Commission ,  après  un  examen  approfondi,  a  unanimement  re- 
connu que  l'orgue  de  l'église  métropolitaine  de  Paris  est  un  instrument 
de  premier  ordre,  qu'il  honore  au  plus  haut  degré  la  facture  française, 
qu'il  dépasse  par  la  fécondité  et  la  richesse  de  ses  ressources  les  résul- 
tats artistiques  que  les  clauses  du  devis  faisaient  pressentir. 

»  La  Commission  déclare  donc  que  l'instrument  de  M.  Cavaillé-Coll 
est  recevable  de  tout  point  et  avec  les  plus  grands  éloges.  Elle  rend  en 
même  temps  un  juste  hommage  à  la  science  de  l'habile  facteur,  ainsi 
qu'à  la  belle  ordonnance  et  à  la  parfaite  exécution  de  ses  travaux. 

fl  Ont  signé  :  Dumas,  président;  —  Auber,  —  Ambroise  Thomas, 

—  RossiNi,  —  Baron  Séguier,  —  Général  Favé,  —  Surat, 

—  De  Place,  —  Félix  Clément,  —  Lecrand,  —  Benoist, 

—  Lissajous,  —  Lefèvre,  —  Hamille,  —  De  la  Motte, 

—  Viollet-Leduc,  —  Chanoine  Devroye,  —  Chevalier  Van 
Elewick,  —  Lemmens,  —  L'abbé  Lamazou,  secrétaire  rap- 
porteur. 

»  Le  directeur  de  l'administration   des  cultes,    après   avoir  pris  les 
ordres  de  Son  Excellence  M.  le  garde  des  sceaux,  autorise  la  publica- 
tion de  l'Extrait  ci-dessus  relaté. 
»  Paris,  le  21  mars  1868. 

»  Signe  :  Victor  Hamille. 


REVUE  DES  THÉÂTRES. 


Variétés  :  Un  régiment  qui  passe,  comédie  en  un  acte,  par 
MM.  Paul  Sipière  et  Paul  Paquot;  la  Comédie  bourgeoise,  à- 
propos  mêlé  de  chant  et  de  danse  ;  les  Pifferari,  ballet  dansé 
par  Mme  Zina  Mérante  et  M.  Bertoto;  les  Abrutis  du  feuilleton, 
vaudeville  en  un  acte,  par  MM.  J.  Moineaux  et  H.  Bocage.  — 
Théâtre  Déjazet  :  Cent  mille  francs  et  ma  fille,  vaudeville  en 
quatre  actes,  par  MM.  de  Jallais  et  Philippe  Gille,  musique  nou- 
velle de  M.  Eugène  Déjazet. 

La  Grande-Duchesse  de  Gérolstein  a  encore  une  fois  disparu  de 
l'affiche  des  Variétés,  mais  qui  peut  affirmer  que  ce  soit  la'der- 
nière?  En  attendant  qu'elle  reparaisse,  voici  un  spectacle  de  tran- 
sition destiné  à  servir  d'étape  au  Pont  des  soupirs  dont  la  reprise 
est  annoncée.  Du  reste,  la  réussite  complète  de  ce  spectacle  nous 
donnera  le  temps  de  patienter. 

Deux  noms  nouveaux  se  sont  produits  à  la  faveur  du  Régiment 
qui  passe,  un  très-joli  proverbe  dû  à  la  collaboration  de  MM.  Si- 
pière et  Paquot.  Il  s'agit  d'un  billet  de  logement  qui  amène  par 
mégarde,  un  officier  de  lanciers  dans  l'intérieur  d'une  demoiselle 
du  demi-monde  patronée  par  un  homme  marié.  La  jalousie  de  ce 
dernier  s'éveille  à  la  vue  du  chapska  de  l'intrus.  Une  belle  dame, 
en  quête  de  secours  de  charité,  et  qui  n'est  autre  que  la  femme 
légitime  du  Lovelace  bourgeois,  vient  compliquer  la  situation. 
L'officier  de  lanciers  pourrait  bien  donner  une  double  leçon  à  ce 
mari  courant  la  prétentaine,  et  son  brosseur,  tout  bête  qu'il  est, 
ne  serait  pas  éloigné  d'accaparer,  à  son  exemple,  la  soubrette  du 
logis  ;  mais  la  trompette  se  fait  entendre,  c'est  le  régiment  qui 
s'en  va  et...  la  marche  est  sonnée.  Cette  petite  intrigue,  rapide 
et  spirituelle,  est  menée  avec  beaucoup  d'entrain  par  Alexandre, 
Guyon,  un  comique  nouveau  du  nom  de  Gobin,  très-plaisant 
dans  un  rôle  de  lancier  limousin,  par  Mlle  Saëns,  une  charmante 
blonde  que  nous  avons  déjà  vue  au  Palais-Royal,  par  Mlles  Carlin 
et  Cécile  Renault. 

—  La  Comédie  bourgeoise,  par  M.  Trois  Etoiles,  a  servi,  dit-on, 


DE  PARIS. 


133 


dans  plus  d'une  représentation  à  bénéfice.  C'est  bien  peu  de  chose, 
en  effet;  quelques  scènes  d'un  proverbe  répété  par  des  acteurs 
de  société  qui  ne  peuvent  s'entendre  et  qui  cèdent  la  place  à  un 
intermède  quelconque.  Dans  la  circonstance  présente,  c'est  une 
romance  chantée  par  Mlle  Stanni,  et  accompagnée  au  piano  par 
Mlle  Vernet,  puis  un  pas  de  Pifferari  exécuté  par  Mme  Zina  Mé- 
rante,  avec  la  brillante  perfection  qui  la  caractérise,  et  où  elle  est 
fort  bien  secondée  par  son  camarade  Bertoto. 

—  Un  titre  piquant,  les  Abruiis  du  feuilleton,  donne  une  cer- 
taine importance  à  la  dernière  nouveauté  dont  nous  avons  à  nous 
occuper.  C'est  une  actualité  basée  sur  la  lecture  des  romans  à 
surprises  qui  défraient  le  rez-de-chaussée  de  tous  nos  journaux. 
Deux  amateurs  de  cette  littérature  frénétique  apprennent  qu'un 
forçat  s'est  échappé  du  bagne.  L'esprit  frappé  par  les  gentillesses 
de  Rocambole,  ils  ne  sont  que  trop  disposés  à  voir  partout  des 
émules  de  ce  célèbre  aventurier.  Un  monsieur,  poursuivi  pour 
délit  de  chasse  fait  son  entrée  par  la  fenêtre,  à  la  lueur  des  éclairs  ; 
il  cherche  une  clé,  pour  s'échapper,  dans  le  tiroir  à  l'argenterie; 
il  s'aifuble  d'un  déguisement  emprunté  au  maître  de  la  maison. 
Plus  de  doute,  c'est  le  forçat  qui  a  pris  la  clé  des  champs.  Cepen- 
dant tout  finit  par  s'expliquer,  notre  homme,  sur  le  point  d'être 
pincé,  décline  ses  noms  et  qualités,  et  comme,  en  outre,  il  est 
amoureux  de  la  fille  d'un  de  ses  hôtes,  le  quiproquo  se  termine 
gaiement  par  un  mariage.  Les  situations  de  cette  pièce  ne  sont 
pas  neuves,  mais  elles  sont  amusantes  et  elles  sont  lestement  con- 
duites par  Blondelet,  Baron,  Boulanger,  Mlle  Kid  et  Mlle  Caroline. 

—  Au  théâtre  Déjazet,  on  joue  en  ce  moment  une  pièce  en 
quatre  actes,  qui,  sous  le  titre  de  Cent  mille  francs  et  ma  fille,  ob- 
tient un  succès  des  plus  mérités.  Un  oncle  de  province  vient  à 
Paris  pour  adjuger  sa  fille  ornée  d'une  dot  de  cent  mille  francs, 
à  celui  de  ses  trois  neveux  qui  se  sera  fait  le  plus  remarquer  dans 
la  carrière  embrassée  par  lui.  Mais  les  neveux  en  question  sont 
trois  bohèmes  criblés  de  dettes  et  n'ayant  de  notoriété  que  dans 
les  brasseries  du  quartier.  Néanmoins,  les  créanciers  qui  ont  flairé 
la  dot  s'arrangent  pour  faire  accroire  au  bonhomme  d'oncle  que 
ses  neveux  sont  des  prodiges.  L'un  est  peintre,  l'autre  est  mécani- 
cien et  le  troisième  est  homme  de  lettres.  On  promène  l'oncle 
Vancerfenil  dans  un  atelier  de  fantaisie,  dans  un  comice  agricole 
de  rencontre,  et  dans  les  coulisses  d'un  Théâtre-Français  d'inven- 
tion. Mais  la  mèche  est  éventée,  et  un  quatrième  larron  s'empare 
en  fin  de  compte  de  la  fille  et  des  cent  mille  francs. 

Cette  dernière  fantaisie  fournit  la  matière  de  quelques  tableaux 
divertissants,  joyeusement  interprétés  par  Legrenay,  Dailly,  Dau- 
bray  et  une  demi-douzaine  de  jolies  femmes.  On  y  applaudit  quel- 
ques airs  nouveaux  d'Eugène  Déjazet  et  un  agréable  ballet  d'An- 

dalouses. 

D.  A.  D.  SAINT-YVES. 


CONCERTS  ET  AUDITIONS  nUSICAIES  DE  LÀ  SEMAINE. 

»*,  Dimanche  dernier,  une  nombreuse  et  brillante  assistance  remplis- 
sait la  grande  salle  de  la  Sorbonne,  oîi  l'Institut  de  la  Providence  don- 
nait une  matinée  musicale  et  litléraire  au  profit  de  son  œuvre.  Cette 
matinée  a  tenu  de  tout  point  ce  qu'elle  promettait;  on  y  a  applaudi  les 
beaux  vers  de  Mme  Hermance  Lesguillon,  composés  pour  la  circonstance, 
et  récités  par  Mlle  Ozaline  Crosnier,  ainsi  que  la  panie  musicale,  repré- 
sentée par  Mme  Martin-Robinet,  par  Mlle  Labeuvrie,  par  Mlle  Fanny  de 
Lamarque,  par  MM.  Pénavaire,  Archainbaud  et  Graire,  violoncelle  du 
théâtre  Italien.  Nous  devons  une  mention  toute  spéciale  à  Mme  Martin- 
Robinet,  l'habile  pianiste,  qui  a  électrisé  l'auditoire  avec  la  Valse  de 
Schulhotf,  la  Gavotte  de  Mignon,  et  le  grand  duo  de  Guillaume  Tell, 
où  son  succès  a  été  partagé  par  le  violon  de  M.  Pénavaire. 

^**  Le  concert  de  l'excellent  pianiste  Jacques  Baur  avait  attiré  jeudi 
dernier,  chez  Érard,  un  public  nombreux.  Bien  avan'.  l'heure  toutes  les 
places  étaient  occupées.  Le  talent  du  jeune  maître  est,  en  elTet,  de  ceux 


qui  séduisent  et  impressionnent  vivement,  en  raison  même  de  leurs 
contrastes  ;  aussi  les  sympathies  et  les  encouragements  ne  sauraient-ils 
manquer  aux  développements  de  cette  riche  et  complète  organisation 
musicale.  Les  morceaux  du  programme  étaient  de  nature  à  bien  mettre 
en  relief  et  en  lumière  les  qualités  qui  caractérisent  la  haute  virtuosité 
de  J.  Baur.  Dans  le  scherzo,  dans  le  délicieux  adagio  de  la  Sonate  en  te 
de  Beethoven,  il  a  montré  avec  quelle  pureté  de  style  et  quelle  fidélité 
il  interprétait  les  maîtres.  Une  Romance  sans  paroles  de  Mendelssohn  et 
la  romance  de  l'Etoile,  du  Tannluiuser,  lui  ont  permis  d'affirmer  son 
goût  et  son  sentiment.  Par  le  quatuor  de  liigoletto,  transcription  de 
Liszt,  J.  Baur  a  voulu  rendre  hommage  au  maître  dont  il  fut  l'élève 
favori.  11  a  apporté  à  l'exécution  d'un  Nocturne  de  Chopin  un  soin,  un 
fini  de  détails  surprenants,  ainsi  que  la  poésie  pénétrante  propre  aux 
œuvres  de  ce  maître.  II  a  donné  la  mesure  de  la  puissance  et  de  l'éclat 
de  son  jeu  dans  sa  magnifique  transcription  du  chœur  des  Evêques,  de 
VAfricaine,  qui  arrive  graduellement  à  des  effets  de  sonorité  d'une  am- 
pleur magistrale  et  que  le  public  a  voulu  entendre  jusqu'à  3  fois.  Dans 
le  célèbre  Pondo  de  Weber,  enfin,  l'agilité,  la  précision  de  son  méca- 
nisme ont  émerveillé  l'auditoire.  L'individualité  artistique  de  J.  Baur 
s'accentue  de  jour  en  jour  davantage  et  le  classe  parmi  les  maîtres  du 
piano.  Son  dernier  concert  n'a  été  pour  lui  qu'une  suite  d'ovations. 
Triomphe  vaillamment  conquis  et  bien  mérité  par  des  études  sérieuses, 
par  une  persévérance  et  une  volonté  peu  communes.  L'éminent  artiste 
pouvait  y  voir  le  prélude  des  applaudissements  qui  l'accueillent,  chaque 
année,  dans  les  casinos  des  bains  de  mer  et  qui  l'attendent  bientôt  au 
Havre.  MM.  Franco-Mendès,  violoncelliste,  et  Lowenthal,  Mlle  Fortuna, 
du  Théâtre  italien  de  Saint-Pétersbourg,  méritent  leur  part  d'éloges  dans 
cette  soirée  que  l'on  peut  classer,  en  toute  justice,  au  rang  des  plus 
brillantes  delà  saison,  et  qu'a  spirituellement  terminée  une  jolie  petite 
comédie  d'Ernest  Dubreuil. 

***  M.  Charles  Jeltsch,  un  pianiste  de  talent  dont  la  réputation  n'est 
plus  à  faire,  a  donné  samedi  dernier,  dans  les  salons  Erard,  un  concert 
dans  lequel  il  a  fait  applaudir  son  jeu  brillant  tout  en  restant  classique, 
avec  un  charmant  Impromptu  de  Stéphen  Heller,  le  duo  de  Mendelssohn 
et  Moschelès  sur  Preciosa,  et  deux  morceaux  de  Liszt.  M.  Hammer,  le 
violoniste  élégant,  et  le  pianiste  Rie  ont  concouru  pour  une  bonne  part  au 
succès  de  cette  soirée. 

t*^  M.  E  Delaborde,  qui  s'était  fait  entendre  au  concert  spirituel  du 
Vendredi-Saint  au  Conservatoire,  a  donné  samedi  dernier,  dans  la  salle 
Erard,  un  concert  dans  lequel  il  a  fait  apprécier  de  nouveau  son  habi- 
leté toute  spéciale  dans  le  maniement  du  piano  à  clavier  de  pédales.  Des 
œuvres  de  Bach,  de  C.  V.  Alkan  et  de  Schumann  ont  été  exécutées  par 
cet  artiste  avec  une  sûreté  et  un  brio  que  nous  n'avons  encore  rencon- 
trés à  ce  point  chez  aucun  virtuose.  Comme  compositeur,  M.  Delaborde 
s'est  fait  applaudir  avec  un  lied  et  une  fantaisie-prélude  pour  quatuor  à 
cordes  d'un  beau  caractère.  Mlle  M^ertheimber  et  M.  Poëncet  ont  récolté 
à  côté  de  lui  de  nombreux  bravos. 

,f*^  Mlle  Laure  Bedel,  premier  prix  du  Conservatoire,  a  donné  jeudi 
à  la  salle  Pleyel  un  concert  au  profit  de  l'œuvre  des  Orphelines  de  la 
paroisse  Saint-Eustache.  Cette  jeune  artiste  se  recommande  par  de  pré- 
cieuses qualités;  la  musique  classique  a  toutes  ses  préférences,  et  nous 
l'en  félicitons.  Dans  le  quintette  de  Hummel ,  la  Frescobalda  de  Fresco- 
baldi,  une  Bourrée  de  S.  Bach,  et  la  Polonaise  de  Chopin  pour  piano  et 
violoncelle  (avec  M.  Poëncet) ,  elle  a  fait  preuve  d'une  souplesse  de  ta- 
lent qui  manque  à  bien  des  artistes  en  vogue.  MM.  Poëncet,  Garcin  et 
Mme  Anna  Fabre  lui  ont  prêté  le  concours  le  plus  efficace. 

^*^  Très-briliant  et  très-fructueux  a  été  le  concert  du  jeune  pianiste 
Alphonse  Rendano,  à  la  salle  Herz,  le  riiardi  21  avril.  C'est  que,  chez 
lui,  le  talent  n'a  pas  attendu  l'âge;  c'est  qu'il  joue  déjà  en  maître,  et 
qu'il  compose  en  véritable  artiste  :  sa  Rimembranza,  sa  Valse-fantaisie, 
son  nocturne  Sur  le  lac  sont  là  pour  le  prouver;  c'est  enfin  que 
Mlle  Nilsson,  Gardoni  et  Delle-Sedie  étaient  de  la  fête,  et  que  leur 
succès  a  pour  le  moins  égalé  celui  du  bénéficiaire.  Gardoni  a  été  sur- 
tout applaudi  avec  la  romance  de  Marta.  La  recette  de  ce  concert  a, 
dit-on,  dépassé  3,000  francs. 

^*,  Nous  avons  à  signaler,  à  cette  fin  de  la  saison,  un  concert  des 
plus  intéressants  au  point  de  vue  des  bénéficiaires  d'une  part,  les  en- 
fants Fremeaux,  dont  les  grandes  et  si  précoces  quahtés  artistiques  sont 
des  plus  remarquables  qui  se  soient  produites,  —  et  de  l'autre,  l'attrait 
du  programme  auquel  prendront  part  Rubinsteiu,  Mme  Anna  Constanzia 
et  des  artistes  de  deux  de  nos  théâtres  subventionnés,  dans  un  acte 
d'Octave  Feuillet.  —  Nous  avons  déjà  signalé  à  l'attention  des  lecteurs 
de  la  Gazette  cette  jeune  famille  d'artistes;  elle  mérite  au  plus  haut  de- 
gré les  encouragements  de  tous  ceux  qui  ont  le  culte  de  l'art  musical. 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 

***  Le  théâtre  impérial  de  l'Opéra  a  de  nouveau  donné  cette  semaine 
trois  fois  Hamlet.  —  Cet  opéra  sera  joué  mardi   par  extraordinaire  et 


134 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


pour  la  dernière  représentation  de  Mlle  Nilsson  au  bénéfice  de  la  caisse 
des  pensions  des  artistes  et  employés  de  l'Opéra.  —  Immédiatement 
après  le  départ  de  Mlle  Nilsson,  le  ténor  Mazzoleni  débutera  dans  le  Trou- 
vère. 

***  MM.  Sardou  et  du  Locle  viennent  d'écrire  sur  le  sujet  du  Cid 
Campeador  un  livret  dont  M.  Gevaërt  compose  en  ce  moment  la  musi- 
que. —  D'un  autre  côté,  on  annonce  qu'on  va  mettre  à  l'étude  un 
opéra  en  deux  actes  de  M.  Diaz  de  la  Pena,  dont  le  théâtre  Lyrique 
joua  en  186-4  le  Boi  Candaule.  Les  paroles  sont  de  M.  Michel  Carré;  la 
distribution  des  rôles  en  a  été  faite  à  Mmes  Mauduit  et  Levielli  et  à 
MM.  Caron,  Devoyod  et  Colin. 

*.**  Mardi  aura  lieu  la  dernière  représenlalion  de  Mlle  Nilsson  avant 
son  départ.  —  La  reprise  à'Herculanum,  qui  est  en  pleines  répétitions, 
et  que  M.  Perrin  remonte  avec  beaucoup  de  soin,  suivra  peu  de  temps 
après. 

***  Une  indisposition  de  Mlle  Cico  a  relardé  au  théâtre  de  l'Opéra- 
Comique  la  reprise  des  Voitures  ivrsées.  On  donne  aujourd'hui  cette  re- 
prise avec  le  Pré  aux  clercs  et  les  Rendez-vous  bourgeois,  au  bénéfice  d'un 
artiste. — On  ne  tardera  pas  à  représenter  le  petit  opéra-comique  de  Mme 
de  Grandval,  le  Zapateyo  ,  paroles  de  MM.  H.  Meilhac  et  W.  Busnach. 
—  Mademoiselle  Sylvia,  de  Samuel  David,  est  venue  ajouter  un  nou- 
vel attrait  au  répertoire. 

*.*:j  L'événement  de  la  semaine  au  théâtre  Italien  a  élé  la  représenta- 
tion au  bénéfice  d'Ad.  Patti.  Nous  en  avons  donné  la  composition  qui, 
dans  des  styles  complètement  différents  mettait  en  relief  le  talent  de  la 
diva;  cette  représentation  a  donc  été  pour  elle  une  longue  fête,  h  laquelle 
Nicolini,  Verger,  Agnesi  et  Ciampi  ont  fourni  un  brillant  contingent;  la 
recette  s'est  élevée  à  17,000  francs. 

^**  On  a  joué  cette  semaine  pour  les  dernières  représentations  :  mardi 
Don  Pasquale  et  liier  Don  Gioimnni  ;  jeudi,  Lucrezia  Borgia  avec  Mlle 
Krauss  et  Steller. 

^"■j  Demain  a  lieu  le  bénéfice  do  Mlle  Krauss,  dans  lequel  Ad.  Patti 
chante  pour  la  dernière  fois  avant  son  départ;  la  représentation  se 
composera  du  premier  acte  de  Lucrezia  Borgia,  du  deuxième  de  Don 
Giovanni,  du  premier  de  la  Traviata  et  du  quatrième  acte  d'il  Trovatorc. 
„s*;,;  Jeudi,  dernière  représentation  de  l'abonnement. 
^*if,  On  annonce  pour  mardi  la  première  représentation  de  l'opéra  du 
prince  Ponialowski,  dont  le  titre  définitif  est  VUragano,  et  dans  lequel 
Mlle  Urban  est  chargée  d'un  rôle  de  mime  important. 

***  Après  une  indisposition  momentanée,  Mme  Carvalho  a  repris  son 
rôle  dans  Roméo  et  Juliette.  La  célèbre  cantatrice  étant  sur  le  point  de 
prendre  son  congé,  l'œuvre  de  Gounod  ne  sera  plus  donnée  que  deux 
fois.  —  Un  jeune  ténor,  élève  de  Nicole  Lablache,  et  connu  par  des 
succès  de  salons,  M.  Duchesne,  a  débuté  mardi  avec  succès  dans  le 
Freyschutz . 

if:*^  Le  célèbre  compositeur  Ball'e  est  à  Paris,  où  il  est  venu  pour  sur- 
^■eiller  les  répétitions  de  son  opéra  la  Bohémienne,  dont  les  répétitions  au 
théâtre  Lyrique  sont  très-avancées. 

^*^  Le  succès  de  Fleur  de  Thé  grandit  tous  les  jours;  les  sept  pre- 
mières représentations  avaient  produit  14,0i3  fr.  5^.  Les  sept  dernières 
ont  atteint  le  chiffre  de  20,239  fr.  50  c.  C'est  une  moyenne  de  2,900  fr., 
et  ce  chiffre  sera  dépassé  dès  que  les  baignoires  qui  doivent  remplacer  le 
pourtour  seront  construites. 

,■**  Mlle  Irma  Marié,  qui  doit  reprendre  son  service  au  théâtre  Lyri- 
que, va  être  remplacée  par  Mlle  Lovato  dans  le  rôle  de  Césarine,  de 
Fleur  de  Thé.— D'un  autre  côté,  le  frère  de  MlleBaretti  qui  était  au  Théâ- 
tre-Lyrique, répète  en  double  le  rôle  de  Sytier  dans  l'opéra  de  Lecocq. 

^*t  D'après  une  note  émanée  de  M.  W.  Busnach  lui-même,  le  théâtre 
de  l'Athénée  aurait  reçu  les  pièces  suivantes  :  le  Petit-Poucet,  trois  actes 
de  MM.  Albert  Vanloo,  Eug.  Leterrier  et  Georges  Fontaine;  Bocchoris, 
un  acte  de  MM.  Octave  Gastineau  et  Debillemont;  le  Commandore,  un 
acte  de  Cham  et  Vogel;  le  Vengeur,  un  acte  de  MM.  Nuitter  et  Legouix; 
Joli  grec  à  l'œil  noir,  un  acte  de  MM.  de  Launay  et  Adolphe  Nibelle; 
trois  actes  de  MM.  Octave  Gastineau  et  Léo  Delibes,  et  enfin  les  trois 
actes  de  MM.  Chivot  et  Duru,  musique  de  M.  Charles  Lecocq,  dont  nous 
avons  déjà  parlé.  On  voit  que  ce  n'est  pas  l'activité  qui  manque  à  la 
direction. 

***  M.  Busnach  vient  d'engager,  pour  trois  ans,  Mlle  Pradal  qui  jouait 
tout  dernièrement  dans  Nos  Ancêtres  à  la  Porte  Saint-Martin. 

^*,  M.  Bock,  l'éditeur  de  Berlin,  vient  d'acheter  la  propriété  de  l'o- 
péra bouffe  Fleur  de  thé.  —  Cet  ouvrage  va  être  monté  au  théâtre  An 
der  Wien,  à  Vienne. 

^''^  Le  théâtre  de  Cluny  joue  en  ce  moment  une  opérette  intitulée  : 
Un  Cousin  retour  de  l'Inde,  dont  la  musique  vive,  spirituelle  et  légère 
fait  le  plus  grand  honneur  à  M.  Bovery,  chef  d'orchestre  habile  et  com- 
positeur déjà  connu  par  un  certain  nombre  de  petites  productions  du 
même  genre.  Cette  dernière  venue,  qui  n'est  pas  la  moins  réussie,  sert 
d'agréable  prélude  à  la  représentation  du  fameux  drame  de  Lavaubalière, 
emprunté  à  l'ancien  répertoire  de  la  Porte-Saint-Martin. 
**;s  Le  préfet  de  la  Seine  et   sa  famille  assistaient  jeudi  à  la  repré- 


sentation de  Cent  mille  francs  et  ma  fille,  le  succès  actuel  du  théâtre  Dé- 
jazet. 

,^'*^  La  représentation  à  Rouen  du  Cardillac  de  M.  Dautresme,  a  valu 
au  jeune  compositeur,  enfant  de  cette  ville,  un  triomphe  légitime  et  a 
été  pour  lui  l'occasion  d'ovations  bien  méritées. 

^"^,1,  La  représentation  de  l'Africaine,  sur  le  théâtre  de  Nice,  donnée 
au  bénéfice  de  Mlle  Nina  de  Rionnelle,  n'a  été  qu'une  incessante  ovation 
pour  la  jeune  et  dramatique  Sélika.  Applaudissements,  rappels,  bouquets 
et  couronnes,  rien  n'a  manqué  au  succès  de  celte  artiste  qui  s'achemine 
vers  la  réputation. 

,^*:j  Robitison  Crusoé,  représenté  à  Genève  pour  le  bénéfice  de  l'excel- 
lent ténor  de  Quercy,  a  reçu  du  public  de  cette  ville  un  accueil  des  plus 
sympathiques.  La  pièce  a  été  fort  bien  chantée  et  jouée  par  Mme  Geoffroy 
et  le  bénéficiaire. 

„,'**  Ce  même  Robinson  vient  de  faire  son  apparition  sur  la  première 
scène  bordelaise.  Cet  ouvrage  semble  devoir  s'y  acclimater  et  y  plaire. 
A  la  première  représentation  on  a  beaucoup  applaudi  le  quatuor  du  pre- 
mier acte,  la  romance  :  S'il  fallait  qu'aujourd'hui,  la  Chanson  du  pot  au 
feu,  les  couplets  :  C'est  un  brun  1  le  duo.  Il  vient  un  jour,  etc.,  et  sur- 
tout la  Berceuse  du  troisième  acte,  chantée  d'une  manière  remarquable 
par  Mme  Montaul-Lamberl,  qui  a  su  faire  de  Vendredi  une  création  des 
plus  originales.  Dans  le  rôle  d'Edwige,  Mme  Singelée  a  mis  toute  sa 
grâce  et  tout  son  talent.  Mlle  Bordet  (Suzanne)  ne  manque  ni  de  verve, 
ni  d'esprit,  ni  d'agilité.  Anthelme  et  Emmanuel  ont  provoqué  à  diffé- 
rentes reprises  les  applaudissements  de-  la  salle  entière.  Tournade  est  un 
Jim-Cocks  excessivement  drôle.  L'orchestre,  parfaitement  dirigé  par 
M.  Granier,  a  bien  marché.  —  Au  Théâtre-Français,  la  première  repré- 
sentation de  la  Grande-Duchesse  a  fait  salle  comble.  L'entrain,  la  gaieté 
communicative,  la  spirituelle  crânerie,  la  voix  sympathique  de  Mme  Rose 
Bell,  ont  retrouvé  là  les  admirateurs  et  les  applaudissements  qui  ne  ces- 
sent pas  de  les  escorter.  Aussi  a-t-on  rappelé  et  acclamé  Mme  Rose  Bell, 
remarquablement  secondée,  du  reste,  par  Carrier,  son  partenaire  fidèle,  le 
compagnon  habituel  de  ses  succès,  ainsi  que  par  Mme  Ferrare  et  MM.  Ro- 
que, Briel,  Thaïs,  du  théâtre  de  Bordeaux. 

**4f  A  l'exemple  d'autres  théâtres  allemands,  celui  de  Brunswick  va 
adopter  le  diapason  normal  français. 


NOUVELLES  DIVERSES. 

4*^  Le  concours  de  composition  musicale  pour  le  grand  prix  de  Rome 
s'ouvrira  le  i  mai^prochain.  Les  concurrents  admis  resteront  en  loges  du 
19  mai  au  12  juin,  et  le  jugement  sera  rendu  le  13. 

«**  Vendredi  dernier,  MM.  les  délégués  des  sociétés  savantes  de  France, 
accompagnés  de  leur  président,  M.  Milne- Edwards,  et  de  M.  le  direc- 
teur de  l'administration  des  cultes,  se  sont  rendus  à  Noire-Dame  pour 
examiner  et  entendre  le  grand  orgue  dont  le  gouvernement  impérial 
vient  de  doter  la  métropole  de  Paris.  M.  A.  Cavaillé-Coll,  constructeur  de 
l'instrument,  a  donné  des  explications  sur  les  nouveaux  perfectionnements 
introduits  dans  ce  grand  orgue,  et  qui  intéressent  à  la  fois  la  science  de 
l'acoustique  et  de  la  pneumatique.  M.  Auguste  Durand ,  l'habile  orga- 
niste de  Saint-Vincent  de  Paul,  et  M.  Franck  aîné,  organiste  de  Sainte- 
Clotilde,  ont  fait  entendre  l'instrument,  avec  le  talent  qu'on  leur  con- 
naît, à  la  satisfaction  de  la  docte  assemblée.  M.  Milne  -  Edwards  et 
M.  Hamille,  directeur  de  l'administration  des  cultes,  ont  beaucoup  re- 
mercié M.  A.  Cavaillé-Coll  et  MM.  Franck  et  Durand  de  toute  la  satis- 
faction que  leur  avait  procurée  celte  séance  intéressante  au  point  de 
vue  musical  et  scientifique. 

:s*^  Agne.«i  vient  de  signer  un  engagement  de  deux  mois,  du  15  juil- 
let au  15  septembre,  pour  Hombourg.  L'excellent  baryton  se  fera  égale- 
ment applaudir  aux  concerts  de  Bade,  oîi  il  doit  chanter. 

-j,*,,  Mlle  Corani,  cantatrice  qui  s'est  acquis  une  belle  réputation  en 
Italie,  qui  vient  de  Saint-Pétersbourg,  Moscou,  Odessa  et  autres  villes 
principales  de  la  Russie,  oîi  elle  a  obtenu  de  grands  succès,  est  en  ce 
moment  à  Paris. 

^*,i.  L'administration  de  l'Eldorado  a  eu  l'heureuse  idée  d'engager  les 
frèi'es  Guidon.  Ce  ne  sera  pas  une  des  moindres  attractions  de  cet  éta- 
blissement pour  la  saison  d'été. 

^*»  Alf.  Jaell  a  quitté  Paris  mardi  avec  sa  femme  pour  se  rendre  à 
Londres,  oii  l'appellent  de  brillants  engagements  avec  les  sociétés  phil- 
harmoniques de  Musical-Union,  d'Ella  et  du  Crystal-Palace. 

^*^  M.  et  Mme  Fr.  Guzman,  les  pianistes  chiliens  qui  ont  été  si  re- 
marqués cet  hiver,  viennent  aussi  de  partir  pour  Londres,  où  les  appel- 
lent de  brillants  engagements  pour  les  concerts  de  la  saison. 

^*,i:  Nous  sommes  en  retard  pour  mentionner  la  publication  du  boléro 
à'I  Batavi,  chanté  aux  Italiens,  par  Adelina  Patti,  dans  la  leçon  de  mu- 
sique d'il  Barbiere ,  et  qui  a  paru  chez  l'éditeur  Choudens.  Le  public  a 
pu,  en  entendant  ce  charmant  morceau ,  qu'il  a  chaque  fois  chaleureu- 
sement applaudi,  se  faire  une  idée  de  la  valeur  de  l'opéra  de  M""'  Tarbé 


DE  PARIS 


13S 


des  Sablons,  dont  il  fait  partie,  et  qui  ne  peut  manquer,  dans  un  temps 
donné,  de  faire  son  apparition  sur  une  de  nos  grandes  scènes  lyriques. 

***  Nous  avons  sous  les  veux  un  opuscule  du  à  l'expérience  d'un  de 
nos  plus  excellents  chanteurs,  Jules  Lefort.  Il  a  pour  titre  :  De  l'Emission 
de  la  Vùix.  Fruit  d'une  longue  observation  de  l'auteur  dans  la  profes- 
sion de  son  art,  basé  sur  l'étude  des  grands  chanteurs,  soit  français,  soit 
italiens,  qui  ont  illustré  la  scène,  ce  travail  a  pour  objet  de  fixer  d'une 
manière  positive  un  des  points  les  plus  importants  de  l'art  du  chant, 
lequel,  sans  être  précisément  livré  au  liasard,  n'a  pourtant  pas  de  règle 
fixe.  11  sera  donc  d'une  grande  utilité  pour  les  élèves,  en  mettant  sous 
leurs  yeux  des  moyens  simples  et  naturels  pour  émettre  le  son.  —  Nous 
en  reparlerons  plus  au  long. 

***  Mercredi  6  mai,  à  3  heures,  aura  lieu  à  l'église  Saint-Merry  un 
concours  pour  la  place  d'organiste  du  grand  orgue,  devenue  vacante  par 
suite  de  la  nomination  de  M.  Chauvet  à  l'église  de  la  Trinité.  Se  faire 
inscrire  à  la  sacristie. 

***  La  Revista  y  Gaceta  musical  de  Madrid  du  13  avril  contient  une 
description  détaillée  des  perfectionnements  apportés  à  la  fabrication  de 
la  clarinette  par  Antonio  Romero,  perfectionnements  dont  le  résultat  est 
une  justesse  plus  grande  pour  certaines  notes,  ainsi  que  la  facilité  d'exé- 
cuter certains  trilles  peu  abordables,  et  qui  ont  valu  à  leur  auteur  une 
médaille  d'argent  à  l'Exposition  universelle  de  1867.  Nous  en  avons  parlé 
à  cette  époque. 

^*^  Au  nombre  des  améliorations  introduites  par  M.  Dupressoir  dans 
l'exploitation  du  magnifique  établissement  de  Bade,  il  faut  mentionner 
celles  que  reçoit  l'orchestre  qui  joue  quotidiennement  deux  fois,  sur  la 
terrasse  de  la. Conversation,  sous  la  direction  de  Kœnemann.  Le  nombre 
des  musiciens  en  a  été  fortement  augmenté,  et  le  répertoire  va  s'enri- 
chir, entre  autres,  des  grandes  fantaisies  sur  les  opéras  de  Meyerbeer,  de 
Rossini,  Auber  et  de  nos  autres  grands  maîtres,  composées  par  Arban 
pour  ses  concerts.  M.  Dupressoir  a  de  plus  engagé  l'excellent  chef  d'or- 
chestre du  Casino  pour  conduire,  cette  saison,  plusieurs  solennités  musi- 
cales, et  entre  autres  le  grand  bal  qui  sera  donné  au  profit  des  pauvres. 

***  Hier  a  eu  lieu  l'ouverture  du  jardin  Mabille.  11  y  avait  beaucoup 
de  monde,  et  l'orchestre,  sous  la  direction  d'Aug.  Mey,  a  fait  merveille. 

^*^.  M.  de  Gasperirii,  écrivain  d'un  talent  élevé,  qui  avait  fait  de  la 
critique  musicale  dans  plu.sieurs  journaux,  avec  des  opinions  personnel- 
les très-accentuées  et  très-franches,  vient  de  succomber,  jeune  encore, 
aux  suites  d'une  maladie  de  poitrine.  Comme  homme,  il  sera  vivement 
regretté  de  tous  ceux  qui  l'ont  connu.  La  critique,  la  littérature  artisti- 
ques perdent  en  lui  un  de  leurs  représentants  les  plus  ardents  et  les 
plus  loyaux. 

,*^  Une  grande  douleur  vient  de  frapper  Mme  Ugalde  :  elle  a  perdu 
sa  fille,  âgée  de  quatorze  ans. 

^*^  La  fille  aînée  de  Mme  Emilio  Naudin  est  morte  cette  semaine  à 
Varsovie.  Elle  était  mariée  depuis  peu.  Grâce,  bonté,  charme,  affection, 
la  mort  a  pris  tout  cela. ..  à  vingt-trois  ans! 

^*f,  On  annonce  également  la  mort  de  la  veuve  du  compositeur  Mon- 
pou,  qui  avait  pu  applaudir  encore  la  reprise  récente  d'un  ouvrage  de 
son  mari. 

ÉTRANGER 

.j^*^  Londres.  —  La  basse  Colini  a  débuté  lundi  à  Covent-Garden  dans 
le  rôle  de  Bertram  de  Robert  le  Diable.  Il  possède  une  belle  voix  et  beau- 
coup d'intelligence  dramatique;  le  public  l'a  très-sympathiquement 
reçu.  —  Adelina  Patti  est  attendue  le  28. 

^*t^  Schwerin.  —  La  Légende  de  sainte  Cécile,  cantate  de  Jules  Benedict, 
accueillie  avec  tant  de  faveur  à  Londres,  a  fait  sa  première  apparition 
sur  le  continent  à  notre  théâtre  Grand-Ducal,  sous  la  direction  du  chef 
d'orchestre  Aloys  Schmitt,  et  avec  Mlle  Aglaïa  Orgéni  pour  principale 
interprète.  Cette  œuvre  a  rencontré  les  mêmes  dispositions  bienveillantes 
d  ans  notre  public  que  dans  celui  qui  l'a  applaudie  l'année  dernière  aux 
grands  festivals  londoniens. 

j*j,  Berlin.  —  La  place  de  Concertmeister  ou  soliste,  laissée  vacante  à 
l'orchestre  royal  par  la  mort  de  l'éminent  violoncelliste  Moritz  Ganz,  a 
été  conquise,  après  une  brillante  épreuve  et  sur  de  redoutables  concur- 
rents, par  Jules  de  Swert,  concertmeister  à  Weimar. 

^*^  Munich. —Les  Meistersinrjer,  de  R.  Wagner,  qui  devaient  être 
donnés  le  mois  prochain,  ne  seront  pas  représentés  avant  l'automne. 

,j*»  Vienne.  —  L'Oie  du  Caire,  traduite  de  l'arrangement  français  de 
V.  Wilder,  n'a  obtenu  qu'un  médiocre  succès  au  Carltheater. 

^*,i,  Prague.  —  L'opéra  en  deux  actes  Am.  Runenstein,  de  Flotow  et 
R.  Gênée,  dont  nous  avons  dit  le  succès  dans  notre  dernier  numéro, 
abonde  en  situations  heureuses  dont  le  compositeur  a  sii  tirer  un  excel- 
lent parti.  Le  Runenstein  est  un  écueil,  une  sorte  de  rocher  maudit  cou- 
vert de  caractères  runiques  très-anciens,  devenus  indéchiffrables  et 
presque  cabalistiques  pour  les  pêcheurs  de  l'île  suédoise  d'Elverœn,  où  la 
scène  .se  pa.s.se;  il  ne  joue,  du  reste,  qu'un  rôle  secondaire  dans  l'action. 
Un  antique  usage  veut  que  le  vainqueur  au  tournoi  d'adresse  de  la  fête 


des  pêcheurs  choisisse  parmi  les  jeunes  filles  la  reine  de  l'île  ;  le  comte 
Arenskiold,  à  qui  le  prix  est  décerné,  ravit  ainsi  Swcna  à  son  fiancé 
Bruno.  Swena,  qui  s'est  déjà  laissée  prendre  aux  doux  propos  du  comte, 
va  trahir  sa  foi;  un  rêve  qu'elle  fait  près  du  Runenstein,  et  où  sa  faute, 
lui  est  présentée  avec  de  terribles  conséquences,  la  retient  à  temps,  et 
il  ne  reste  plus  au  comte  qu'à  aller  porter  ses  hommages  ailleurs.  — 
Le  premier  acte  est  sans  contredit  le  mieux' fait,  celui  qui  se  prête  le 
plus  aux  effets  scéniques,  et  celui  aussi  qui  a  été  le  plus  goûté.  Le  long 
rêve  de  Swena  tient  beaucoup  trop  de  place  dans  le  .second  acte;  c'est  le 
Deus  ex  machina  qui  la  sauve  du  déshonneur.  —  A  la  seconde  repré- 
sentation, des  coupures  très-heureuses  ont  été  pratiquées.  Grâce  aux 
premier  acte  et  au  mérite  de  la  musique,  Am.  Runenstein  fournira  cer- 
tainement une  honorable  carrière.  Ce  sujet  a  quelque  chose  de  légen- 
daire et  de  poétique  qui  aurait  parfaitement  convenu,  ce  nous  semble, 
au  cadre  d'un  ballet. 

i^*^Florence. —  Le  cinquième  et  dernier  concert-conférence  de  la  Societce 
del  Quartctto  a  eu  lieu  le  6  avril;  Schumann  en  faisait  le  sujet.  Le  doc- 
teur Filippo  Filippi,  un  des  critiques  les  plus  autorisés  et  les  plus  avan- 
cés d'Italie,  a  apprécié  avec  un  véritable  talent  le  caractère  et  l'influence 
de  ce  maître. 

^''t  Milan.  —  La  Società  del  Quartctto  a  inauguré,  le  12  avril,  sa  cin- 
quième année  d'existence  par  une  séance  pleine  d'intérêt,  a  laquelle  ont 
pris  part,  entre  autres,  le  célèbre  violoniste  Bazzini  et  le  pianiste-compo- 
siteur Fasanotti.  .    . 

f:*^  Varsovie.  —  La  troupe  italienne  a  clos  ses  représentations  par 
Il  Barbiere,  et  les  artistes  qui  la  composaient  nous  ont  quittés  pour  di- 
verses destinations. 

:j^*^  Moscou.  —  La  direction  de  l'Opéra  a  promis  pour  le  printemps 
prochain  une  série  de  douze  représentations  italiennes,  et  a  engagé  dans 
ce  but  Mmes  Artôt  et  Ferlesi,  les  ténors  Perding,  Ambonetti,  Fillehorn, 
et  les  basses  Padilla  et  Bossi.  Le  chef  d'orchestre  est  M.  Dupont,  frère 
du  professeur  de  piano  au  Conservatoire  de  Bruxelles. 

:):%  Constantinople,  —  Une  représentation  de  gala  a  eu  lieu  le  5  avril 
au  théâtre  Naoum  (l'Opéra  italien  de  Péra).  Le  sultan,  plusieurs  de  ses 
ministres,  Fuad-Pacha,  Ali-Pacha,  Midhat-Pacha,  etc.,  et  tous  les  ambas- 
sadeurs y  ont  assisté.  Après  un  hymne  composé  sur  des  paroles  turques 
par  le  maestro  Pisano,  on  a  joué  le  Barbier  en  entier,  un  acte  de  Robert, 
un  de  Linda,  un  de  Marta  et  un  de  Norma.  Après  la  représentation, 
Sa  Majesté  a  fait  remettre  à  l'imprésario  1,000  piastres  turques  (2,300  fr.), 
pour  les  distribuer  à  la  troupe.  —  Dans  un  concert  auquel  ont  pris  part 
le  ténor  Corsi,  la  basse  Vacchi  et  Mme  Fridericci,  cette  dernière  a  obtenu 
un  succès  d'enthousiasme  avecl'air  d'Inès  de  r^/ricame  et  l'air  de  «l'Ombre» 
du  Pardon  de  Ploërmel, 


CONCERTS  ET  AUDITIONS  HUSICALES  ANNONCES. 


Salons  Erard,  aujourd'hui  dimanche  26  avril 
compositeur   Fritz  Gernsheim. 


concert    du    pianiste- 


Salons  Pleyel,  demain  lundi,  à  8  heures  et  demie  :  concert  de  M.  Hip- 
polyte  Grignon,  avec  le  concours  de  MM.  Lefébure-Wély,  Léopold 
Dancla,  Fréd.  Lentz,  de  MmesL.  Dancla  et  Colhn. 

Salons  Erard,  demain  lundi    :  concert  de  Mlle  Octavie  Caussemille. 

Salle  Herz,  mardi  28  avril:  concert  des  enfants  Fremeaux,  pianiste,  vio- 
loniste et  violoncelliste,  avec  le  concours  d'Ant.  Rubinstein. 

Salons  Erard,  mercredi  29  avril  :  concert  de  Mme  Rossi-Gallieno ,  avec 
le  concours  de  MM.  Norblin,  Telezinski,  pour  la  partie  instrumen- 
tale, et  pour  la  partie  vocale,  de  Mlle  Brunet-Lafleur,  M.  Fortuné  Plu- 
beit,  doué  d'une  magnifique  voix  de  baryton,  et  M.  Paris,  chanteur 
comique.  Le  progamme,  des  plus  attrayants,  se  compose  de  morceaux 
de  Mendelssohn  et  de  Rubinstein.  Mme  Rossi  fera  entendre  plusieurs 
de  ses  compositions  nouvelles  :  tes  Regrets,  Etude  caractéristique,  les 
Chants  du  soir.  Mélodie  et  une  Tarentelle. 

Salle  du  Grand-Orient,  jeudi  30  avril  :  concert  de  M.  Hurteaux,  avec  le 
concours  de  MM.  Bollaërt,  Maton,  Mayeur,  Lionnet  frères,  Mlles  Ma- 
rie Magner,  D.  Champon  et  Tayau. 


•  :   s.  DDFOUa. 


H  ir  T  C  ^'^  ''°"  musicien,  connaissant  l'harmonie  et  jouant  de  plu- 
il  V  1  U.  sieurs  instruments,  le  violon  et  la  clarinette  entre  autres, 
désirerait  trouver  un  emploi  de  chef  de  musique  ou  de  directeur  de 
société  musicale.  11  se  montrerait  facile  sur  les  conditions.  S'adresser  à 
M .  Prell,  à  Saint-Sorlin  (Drôme) .      '      ' 


136 


UEVUË  ET  GAZETTE  MUSICALE  DE  PAKIS. 


EN  VENTE  : 
Chez  Ci    BRAWDUS  et  Sw  DUrODB,  éditeurs,  103,  me  de  RlcUelIen. 

FLEUR  DE  THÉ 

Opéra  bouffe  en  trois  actes, 

PAROLES     DE     MM.     ALFRED     DURU     ET     HENRI     CHIVOT,     MUSIQUE     DE 

CHARLES  LECOCQ 

Les     Airs     de     Gliaiit     détacliés 


1.  Chanson  de  la  Cantinière,  chantée  par  Mlle  Irma 

Marié  :   Vivandière,  cantinière,  parlez,  que  désirez- 
vous  ? 3  ^^ 

2.  Couplets,  chantés  par  M.  Sytter  :  J'ai  couru  grossir 

la  foule 3    » 

3.  Duo,  chanté   par   Mlle   Lucile  Cabel    et  M.  Sytter  :  A 

l'éviter  j'ai  réussi "ï  50 

4.  Chinoiserie,  chantée  par  MM.  Désiré  et  Léonce  :    Je 

suis  clairvoyant  comme  un  sphinx 4  50 

4  bis.  La  même,  arrangée  à  une  voix 3    » 

5.  Trio,  chanté  par  MM.  Désiré,  Léonce  et  Sytter  :  La  loi 

du  Tsinn  est  fort  claire 9    » 


6.  Confidence,  chantée  par  M.  Léonce  :  Je  suis  né  dans 

le  Japon 3     » 

7.  Ariette,    clianté    par  Mlle  Irma  Marié  :  En  tous  pays 

l'homme  est  wn  être  qui  traite  fort  mal 3  75 

8.  Romance,  chantée  par  M.  Sytter  :   Césarine    à  mes 

vœux  docile 3     » 

8  bis.  La  même,  transposée  pour  baryton 3    » 

9.  Duo,  chanté  par  Mlle  Marié  et  M.  Sytter:  RappeHe-toJ. . .     9    » 

9  bis.  Couplets  de  l'Alcôve,  extraits  du  Duo,  chantés 

par  M.  Sytter  :  Ensuite  dans  la  nuit  obscure 3    » 

10.  Ronde  du  Clicquot,  chantée  par  Mlle  Irma  Marié, 

MM.  Désiré  et  Léonce:  Ce  n'est  pas  un  vin  de  carême    2  50 


Quadrille  pour  le  piano,  par  ARBAN,  4  50 — Cliquot-Polka  pour  piano,  par  ROQDES  et  STRAUSS,  k  f . 

SOUS  PRESSE 


SOUS  PRESSE 


L'OUVERTURE,    ARRANGÉE    FODR   LE    PIANO. 


liA    PARTIXIOl     POUR    CHAMT    ET    PIAMO 

KETTERER.  Caprice  humoristique  pour  le  piano.     |    CRAMER.  Bouquets  de  Mélodies  pour  le  piano. 
Cirande  Valse  par  Strauss.  —  Quadrille  par  TÊÊe-y.  —  Polka-TTazurka,  Galop. 


CHEZ  LES  MÊMES  ÉDITEURS 


MEOI 


DS      ^^.^^IlS 


DE     SAINT  -  PHILIPPE 


Huit    Motets    à    une    et    deux    voix,    avec    accompagnement    d'Orgue,    par 

ADOLPHE    ADAM 


1.  Ave  Maria,  hymne  à  la  Vierge,  pour  soprano,  avec  accomp. 

de  hautbois,  a()  K6 3    » 

2 .  Ave  Maria,  solo  pour  contralto 3     » 

3.  Ave  Maria,  duo  pour  soprano  et   contralto,  avec  accomp.  de 

hautbois,  ad  Ub 4  SO 


i.  Ave  verum,  solo  pour  soprano 2  bO 

3.  Ave  regina  cœlorum,  duo  pour  soprano  et  mezzo  soprano 3  75 

6.  Inviolata,  duo  pour  soprano  et  mezzo  soprano 3  73 

7 .  0  salularis,  pour  soprano 3     » 

8.  Ave  maris  Stella,  duo  pour  soprano  et  mezzo  soprano 3    » 


Les  8  numéros  réunis  :  10  francs  net. 


mEYERBEER 

Cantique  tiré  de  l'Imitation  de  Jésus  Christ,  à  six 

voix  avec  récits 9  » 

Pater  noster,  offertoire,  chœur  à  4  voix,  sans  ace.  4  50 

Salve  Regina,  chœur  à  4  voix 4  » 

Sept  chants  religieux  à  4  voix net.  15  » 

Sainte  Marie,  chœur  du  Pardon  de  Ploërmel.  .  5  » 

Pater  noster,  à  4  voix,  du  même  opéra     ....  4  » 

Prière  du  matin,  pour  2  chœurs  à  8  voix  ...  6  » 

Prière  pour  3  voix  de  femme,  sans  accomp  ...  3  » 

B.  VAJtOrtkA. 

Ave  Maria,  pour  ténor  ou  mezzo  soprano,  avec 

accomp.  de  piano  ou  orgue 3    » 

0  salutaris,  pour  ténor  ou  mezzo  soprano,  avec 

accomp.  de  piano  ou  orgue 3    » 

Ti  prego  o  Madré  mia,  prière  pour  mezzo  soprano, 

avec  accomp.  de  piano 3    » 


STABAT    MATER 

DE    HOSSIIVl 

1 .  Introduction.  Slabat   Mater S    » 

2.  Air  pour  ténor.  Cujus  animam 3  75 

3.  Duo  pour  2  soprani.  Quis  est  homo  .  3  75 

4.  Air  pour  basse  ou  ténor.  Pro  peccatis  3  75 

5.  Chœur  et  récitatif.  Eia  mater 3  75 

6.  Quatuor.  Sancta  mater 5    » 

7.  Cavatine  pour  soprano.  Fac  ut  portera  3     » 

8.  Air  et  chœur  p.  soprano.  Inflammalus  5     > 

9.  Quatuor  sans  accomp.  Quando  corpus  3     » 
dO.  Chœur  final.  Amen 6    » 


A.  PAKSEROar 

Prière  à  Marie,  cantique  pour  basse-taille,  bary- 
ton ou  contralto.  .' 3    » 

Le  nom  de  Marie,  cantique  à  2  voix  de  femmes.  4  50 

Invocation  à  Marie,  cantique  à  2  voix 2    » 

0  salutaris,  pour  soprano  ou  ténor 2  50 

Aqnus  Dei,  pour  basse-taille,  baryton  ou  contralto  3    » 

Benedictus,  pour  basse-taille,  baryton  ou  contralts  6    » 
Mon  unique  espérance,  pour  soprano  ou  ténor, 

avec  accomp.  de  piano  ou  mélodium  ....  5    » 

Jésus  vient  de  naître,  cantique  pour  2  voix.    .   .  4  50 

STADLER.  —  Deux  motets  et  les  quatre  an- 
tiennes à   la   sainte  Vierge ,  à  i  voix, 

avec  accomp.  d'orgue 7  50 

LABARRE. — Cantique  à  Marie,  chœur  à  3  voix  5    » 

A.  MINÉ. —  0  salutaris,  p.  soprano  et  chœurs  2  30 

E.  JONAS. — 0  sa/utans,  pour  ténor  ou  soprano  3    » 

SALESSES.—  0  salutaris,  3  v.,  solo  et  chœur  3    » 


ilHEBIE   CENTBAL 


DE  FES     —  . 


BUREAUX    A    PARIS  :    BOULEVARD   DES    ITALIENS,  1. 


3S°  Année. 


W  18. 


5  Mai  1868. 


ON   S'ABONNE  : 

Dans  les  Départements  et  à  rivtronger, 

chez  tous  les  Marchands  de  Musique,  1*  s  Libraire 

et  aux  Bureaux  der.  Messageries  et  des  Postes. 


REVUE 


PRIX    DE    L'ABONNEMENT: 

Paris. 24  r.  par  i 

Déparlement»,  BelBiqucel  Suisse....    30"      ii. 

l^tranger 3i  »       Id. 

Le  Journal  parait  le  Dimanclie. 


GAZETTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


SOMMAIRE.  —  Théâtre  impérial  Italien  :  (o  Contessina,  opéra  semi-seria  en 
trois  actes,  paroles  italiennes  de  M.  de  Lauzières,  musique  de  M.  le  prince  Po- 
niatowski,  par  Slaarice  Cîray,  —  Études  sur  Charles-Marie  de  Weber  (troi- 
sième partie,  l"'  article),  par  Edmond  JVenkonuii.  —  La  Musique  et 
l'Amour,  de  M.  Albert  de  Lasalle  (t"  article),  par  Em.  HatMea  de  mon- 
ter. —  Ministère  de  la  maison  de  l'Empereur  et  des  beaux-arts,  avis.  —  Con- 
certs et  auditions  musicales  delà  semaine.  —  Nouvelles  des  théâtres  lyriques. 
—  Nouvelles  diverses.  —  Annonces. 


THÉÂTRE  IMPERIAL  ITÀUEN. 

Il  A  CONTESSIIiTA, 

Opéra  semi-seria  en  trois  actes,  paroles  italiennes  de  M.  de  Lauzières 
{d'après  un  livret  de  MM.  de  Saint-Georges  et  Jules  Adenis) ,  mu- 
sique de  M.  le  prince  Joseph  Poniatowski. 

(Première  représentation  le  28  avril  1868.) 

Voilà  un  opéra  dont  on  peut  dire  qu'il  a  eu  des  malheurs! 
Discussions  d'auteurs  au  sujet  du  livret,  hésitations  sans  nombre 
sur  le  titre  à  lui  donner,  enfin  disparition ,  après  s'être  montré  à 
peine,  d'un  ouvrage  aimable,  facile,  élégant  et  fait  pour  plaire  au 
public  ! 

Certes,  tout  le  monde  en  souffre:  le  compositeur,  qui  peut  à 
peine  s'entendre  dans  l'entre-bâillement  d'une  porte  prête  à  se 
fermer;  le  public,  sevré  d'un  ouvrage  dont  il  n'a  pu  qu'au  vol 
constater  les  rares  qualités  ;  la  direction,  enfin,  obligée  de  rester 
sur  les  prémisses  d'un  franc  et  vrai  succès.  La  critique,  elle,  ne 
peut  qu'enregistrer  ce  succès,  en  exprimant  l'espoir  qu'on  lui 
donne  l'occasion  de  se  renouveler  à  la  saison  prochaine  (1). 

Quelques  mots  d'analyse  du  poëme. 

Un  financier  parvenu,  Ser  Abbondio,  cherche  à  la  fois  un  mari 
et  un  titre  pour  sa  fille.  De  son  côté,  la  comtesse  d'Altariva  vou- 
drait placer  son  fils,  dont  le  titre  est  la  seule  fortune.  La  chose 
pourrait  aller  de  soi  et  le  mariage  se  conclure  aussitôt,  mais  alors 


(1)  Nous  apprenons  qu'à  la  demande  générale  de  ses  abonnés,  M.  Ba- 
gier  a  donné,  hier  soir,  une  deuxième  représentation  de  la  Contessina. 


la  pièce  serait  trop  rapide  et  se  terminerait  au  premier  tableau. 
C'est  pourquoi  les  auteurs  ont  jugé  utile  de  corser  l'action.  Pour 
cela,  ils  ont  imaginé  de  rendre  odieuse  au  jeune  comte  la  jeune 
héritière  (qui  a  un  cousin,  ce  qui  explique  tout). 

La  villa  du  financier  est  située  au  bord  de  la  mer.  On  entend 
gronder  la  tempête,  et  un  vaisseau  vient  échouer  sur  la  plage .  Le 
jeune  homme  s'élance  au  secours  di3s  naufragés,  et  ramène  une 
jeune  fille  que  la  frayeur  a  rendue  muette,  ce  qui  ne  s'accorde 
peut-être  pas  très-bien  avec  les  lois  physiologiques,  mais  ce  qui 
forme  une  excellente  contre-partie  au  fait  si  célèbre  de  l'antiquité. 

Naturellement,  le  fils  de  la  comtesse  d'Altariva  et  la  jolie  nau- 
fragée s'éprennent  l'un  de  l'autre.  Mais  c'est  ici  surtout  que  l'in- 
trigue s'enchevêtre  et  tourne  quelque  peu  au  mélodrame,  tout  en 
conservant  un  côté  comique,  par  le  fait  d'un  chassé  croisé  de 
prétentions  contraires.  Le  cousin  veut  épouser  sa  cousine,  qui 
veut  épouser  le  jeune  comte,  qui  veut  épouser  la  jeune  muette. 
Comme  il  était  difficile  de  laisser  épouser  le  même  homme  par 
deux  femmes,  ce  qui  n'est  que  bien  rarement  admis  dans  les 
pays  civilisés,  il  a  fallu  inventer  une  histoire  d'héritage,  avec  ac- 
compagnement d'oncle  d'Amérique  —  procédé  nouveau,  d'ailleurs 
—  pour  amener  la  comtesse  à  seconder  les  projets  de  son  fils  et 
à  abandonner  les  siens,  en  lui  permettant  d'octroyer  son  titre  à 
celle  qu'il  aime  et  qui  est  devenue  millionnaire.  Et,  pour  laisser  le 
public  sur  la  bonne  bouche,  on  lui  sert,  comme  finale,  trois  ma- 
riages au  lieu  d'un  :  1°  celui  de  Corrado  d'Altariva  avec  Stella, 
qui  met  le  comble  au  bonheur  de  son  époux  en  recouvrant  la 
parole  à  point  nommé  ;  52°  celui  du  cousin  Alberto  avec  la  cousine 
Erminia  —  une  cousine  à  laquelle  je  ne  me  fierais  pas,  par  pa- 
renthèse, et  qui  a  trop  la  rage  d'être  contessina;—  3"  enfin,  celui 
de  Ser  Abbondio  lui-même  avec  la  comtesse  d'Altariva,  mariage 
inattendu  et  qui  fait  qu'on  aurait  pu  trouver  à  la  pièce  un  sixième 
titre  qui  n'eût  pas  été  plus  mauvais  que  les  autres  :  Le  Tre  Nozze. 
Ce  livret,  en  somme,  s'il  pêche  quelque  peu  par  la  nouveauté 
du  fond,  se  rattrape  par  certains  détails  et  n'est  pas  dénué  d'in- 
térêt. Il  est  d'ailleurs  bien  coupé  pour  la  musique,  et  il  a  fourni  au 
compositeur  de  bonnes  situations  qui  ont  été  très-bien  traitées  par 
lui. 
Nous  ne  serions  même  pas  éloigné  de  regarder  la  partition  de 


138 


KEVUE  Eï  GAZETTE  MUSICALE 


la  Contcssina  comme  la  meilleure  de  toutes  celles  que  M.  le  prince 
Poniatowski  a  fait  entendre  à  Paris.  La  musique  de  la  Cordessina 
est  en  effet  franche,  mélodique,  bien  faite,  coulante,  colorée,  ins- 
trumentée avec  un  soin  tout  particulier,  et  elle  renferme  quelques 
morceaux  tout  à  fait  remarquables.  On  pourrait  seulement  lui 
désirer  plus  d'originalité. 

Ce  n'est  pas,  du  reste,  après  une  seule  audition  qu'il  est  possi- 
ble d'analyser  d'une  façon  détaillée  une  partition  aussi  touffue. 
Nous  nous  bornerons  poin'  cette  fois  à  une  nomenclature  rapide 
et  riche  des  morceaux  qui  ont  produit  le  plus  d'effet.  Dans  ce 
noiabre,  il  nous  faut  mentionner  tout  d'abord  la  belle  page  sym- 
phonique  qui  sert  d'introduction,  le  premier  chœur  de  servi- 
teurs, l'air  de  Gorrado,  un  quatuor  charmant,  le  duo  de  Corrado 
et  d'Ernainia,  celui  d'Erminia  et  d'Alberto,  un  adorable  menuet 
chanté  et  dansé,  le  larghetto  du  finale  du  second  acte,  et  la 
chanson  de  Benedetto,  enfin  les  mélodrames  ti'ès-remarquables 
qui  accompagnent  la  pantomime  de  Stella.  Pendant  l'exécution  de 
tous  CCS  airs  de  facture  si  variée,  le  public  n'a  pas  cessé  d'ap- 
plaiidir. 

Quant  à  l'interprétation,  je  ne  pourrais  dire  qu'elle  a  été  par- 
faite dans  son  ensemble.  Bonne  d'un  côté,  médiocre  de  l'autre, 
son  caractère  principal  a  été  une  inégalité  qui  ne  donne  de  la 
perfection  absolue  qu'une  idée  très-relative. 

La  partie  féminine  a  été  la  plus  remarquable;  encore  n'est-ce 
pas  dans  le  chant  qu'elle  a  brillé  de  son  plus  vif  éclat.  Mlle  Urban 
s'est  fort  distinguée  par  la  façon  charmante,  gracieuse,  inlclli- 
gente  et  sobre  tout  à  la  fois  avec  laquelle  elle  a  mimé  le  rôle  de 
Stella.  Élégante  et  jolie,  pathétique  sans  exagération,  la  physio- 
nomie intéressante  et  mobile,  le  geste  sobre  et  expressif,  Mlle  Ur- 
ban avait  toutes  les  qualités  requises  pour  représenter  cette  nou- 
velle Fenella,  plus  heureuse  que  sa  devancière.  Son  succès  a  été 
complet  et  mérité. 

Mlle  Grossi  a  bien  joué  Benedetto,  et  particulièrement  sa  scène 
de  la  Morra  ;  elle  a  dû  répéter  sa  chanson  du  matelot.  Mme  Ti- 
berini ,  dont  les  intonations  n'ont  pas  toujours  été  justes  dans  le 
personnage  d'Erminia,  mérite  cependant  des  éloges.  Les  rôles 
d'hommes  sont  remplis  par  MIVI.  Tiberini,  qui  a  mis  dans  le  sien 
toutes  les  qualités  d'un  chanteur  consomme,  par  Verger  dont  la 
voix  n'a  jamais  été  plus  charmante  et  par  Scalese. 

En  résumé,  la  soirée  a  été  bonne,  et  donne  à  espérer  que 
l'année  prochaine  nous  serons  à  même  d'entendre  de  nouveau 
cette  aimable  et  attrayante  Contessina. 

Maurice  GRAY. 


ETUDES  SUR  CHARLES -lÂRIE  DE  WEBER, 

D'après   la   biographie    écrite    par   son   fils. 

TROISIÈME  PARTIE, 
I. 

Dans  les  deux  premières  parties  de  ces  études,  si  prématuré- 
ment interrompues,  l'écrivain  regretté,  dont  nous  avons  l'honneur 
de  continuer  à  cette  place  le  travail  commencé,  a  présenté  un  ta- 
bleau fidèle  de  la  jeunesse  de  Charles-Marie  de  Weber,  jeunesse 
ardente,  souvent  même  orageuse,  mais  gaz'dée  contre  toute  souil- 
lure, contre  toute  impureté.  Nous  l'avons  vu,  cet  enfant  insouciant 
que  le  génie  avait  marqué  au  front,  traverser,  le  rire  et  la  chan- 
son aux  lèvres,  les  premières  années  de  sa  vie  d'artiste,  frôlant 
de  bien  près  les  épines  tendues  à  son  adorable  crédulité,  sans  y 
laisser  jamais  un  lambeau  de  ce  bien  précieux  qu'on  appelle  l'es- 
time de  soi-même.  Aussi,  quand  vint  l'heure  de  l'amour  vrai,  de 


l'amour  réfléchi,  ce  fut  la  tête  haute  et  le  front  radieux  qu'il  put 
mettre  sa  main  dans  la  main  de  sa  fiancée. 

Lié  désormais  pour  la  vie,  —  hélas  !  pour  une  vie  bien  courte, 
—  il  dépose  le  bâton  de  l'artiste  errant  et  reporte  désormais  tout 
son  zèle  sur  la  lâche  à  remplir,  sur  le  devoir  confié  à  ses  soins; 
toutes  ses  espérances,  toutes  ses  affections,  toutes  ses  joies  comme 
toutes  ses  douleurs,  sur  le  foyer  que  va  embellir  la  présence  de 
la  compagne  aimée.  Pour  Weber  commence,  avec  son  engage- 
ment à  Dresde,  une  vie  nouvelle,  une  vie  tissée  de  jours  heureux, 
de  jours  de  gloire,  et  aussi  de  jours  néfastes  et  d'angoisses.  Nous 
le  suivrons,  le  grand  artiste,  dans  cette  ère  complexe  qui  aboutit 
au  couronnement  de  son  génie,  nous  le  suivrons  avec  amour,  fort 
de  la  conscience  de  son  fils,  ([ui  a  rendu  un  pieux  hommage  à  sa 
mémoire  en  ne  transigeant  avec  aucun  scrupule  de  biographe  et 
d'historien. 

Fidèle  au  programme  adopté  dans  ses  derniers  articles  par 
M.  Paul  Smith ,  nous  nous  efforcerons  de  précipiter  autant  que 
possible  la  marche  des  événements,  ne  prenant  que  l'essence  même 
de  notre  guide  volumineux,  si  intéressant  et  si  complet,  résumant 
les  chapitres  et  les  époques,  et  laissant  de  côté  toutes  les  descrip- 
tions, tous  les  portraits,  tous  les  faits  étrangers  au  sujet. 

Cependant  nous  devons  faire,  des  aujourd'hui,  une  exception  à 
cette  règle  de  conduite  ;  car  la  ville  de  Dresde  joua  un  si  grand 
rôle  dans  la  vie  de  Weber,  qu'il  nous  est  impossible  de  passer 
sous  silence  son  histoire  musicale,  sans  laquelle  les  luttes  qu'eut  à 
soutenir  le  nouveau  maître  de  chapelle  contre  les  gens  et  contre 
l'ordre  de  choses  établi  seraient  mal  comprises  ;  aussi  bien  cette 
histoire  est  celle  qui  peint  le  mieux  le  combat  que  la  musique 
italienne  livra  durant  des  siècles  à  l'art  national  allemand. 

Eu  effet,  Dresde,  la  ville  le  plus  richement  douée  de  l'Allemagne 
du  Nord,  fut,  durant  des  siècles,  le  foyer  de  cette  invasion  artis- 
tique ;  car  à  Dresde  était  venue  s'établir,  au  siècle  dernier,  sur 
l'invilaliou  du  père  Guarini,  confesseur  d'Auguste  II,  une  colonie 
nombreuse  de  gentilshommes  et  d'artistes  italiens  qui  ne  tardèrent 
pas  ii  s'emparer  de  toutes  les  hautes  positions  à  la  cour  et,  ce 
qui  est  bien  autrement  important  pour  nous,  à  exercer  une  domination 
absolue  sur  le  goût  du  public.  Leur  Machiavel  en  poche,  ils  menèrent 
leur  établissement  au  cœur  de  l'Allemagne  avec  un  grand  tact,  et 
surent  cultiver  habilement  ce  nouveau  terrain  si  bien  préparé 
pour  recevoir  leurs  soins.  Tout  en  taxant  de  barbarie  pleine  d'es- 
férances  tout  autre  art  que  l'art  italien,  ils  en  arrivèrent  bientôt, 
par  leurs  manières  polies  et  distinguées  et  par  leurs  mœurs  élé- 
gantes, à  ce  que  le  mot  italien,  devint  synonyme  de  savoir-vivre  et 
de  comme-il-faut.  Le  mouvement  musical  avait  tout  à  gagner  à 
cette  révolution  ;  car  ce  furent  les  apôtres  de  la  grande  époque  à 
laquelle  commanda  le  sublime  Palestrina,  qui  vinrent  remplacer, 
dans  la  direction  de  la  musique  à  Dresde,  les  élèves  d'Huckbald 
et  d'Orlando  de  Lassus,  que  l'électeur  de  Saxe  Maurice  avait 
appelés  à  sa  cour,  dans  le  but  d'y  établir  «  une  honnête  et  grande 
chanterie  »  et  d'y  faire  entendre  des  messes  et  des  chorals  «  luthé- 
riennement»  exécutés.  Les  Italiens  Scandelli  et  Pinelli,  le  Français 
Roger  Michel,  se  succédèrent  au  poste  de  dirigeants  de  la  chapelle, 
en  môme  temps  que  l'opéra,  réservé  aux  plaisirs  de  la  cour,  deve- 
nait la  plus  belle  institution  de  ce  genre  en  Allemagne.  Dès  175S, 
on  inaugurait  en  effet  une  salle  d'une  magnificence  inouïe,  cons- 
truite sur  les  ordres  du  prodigue  Auguste  II,  par  un  ouvrage  de 
Lotti,  exécuté  sous  la  direction  de  l'auteur,  et  Hasse,  le  plus  cé- 
lèbre compositeur  de  son  temps,  avait  été  appelé  à  Dresde,  avec 
sa  femme,  l'admirable  Faustine.  La  splendeur  dont  brillait  alors 
l'opéra  dans  la  capitale  de  la  Saxe,  et  les  frais  qu'il  occasionnait 
n'ont  jamais  été  atteints  depuis  ;  il  nous  suffira  de  dire  que  Lotti 
et  sa  femme  recevaient  10,S00  thalers,  somme  énorme  pour  l'é- 
poque;   Hasse  et  Faustine,   12,000   thalers  ;  le  castrat  Senescino, 


I»E  l'AKIS. 


139 


7,000  thalers;  et  il  ne  faut  pas  oublier  que  le  théâtre  était  un  lieu 
de  plaisir  pour  la  cour,  qu'aucune  recette  ne  venait  couvrir  les 
dépenses,  et  que  chaque  opéra  de  Masse  coûtait  à  la  cassette  du 
prince  de  20  à  30,000  thalers.  La  souveraineté  de  l'art  italien 
était  donc  bien  dûment  affermie,  souveraineté  d'autant  plus  accep- 
tée par  le  public,  qu'il  n'était  pas  admis  à  en  goûter  les  splen- 
deurs. 

Cependant,  ù  côté  de  cet  art  royal,  de  cet  art  distingué,  s'éle- 
vait peu  à  peu  une  institution,  qui  devait  un  jour  aboutir  au 
triomphe  de  l'art  national.  Cette  institution,  la  seule  accessible  aux 
gens  qui  n'appartenaient  pas  à  la  cour,  avait  son  origine  dans  des 
vaudevilles  allemands,  qu'on  représentait  tantôt  dans  un  lieu, 
tantôt  dans  un  autre.  Plus  tard,  un  petit  théâtre  fut  construit 
sur  lequel  on  joua  la  comédie  allemande  et  française;  dans  des 
salons  contigus,  les  directeurs  avaient  établi  un  jeu  public.  Ce 
petit  théâtre  brûla,  on  en  éleva  sur  son  emplacement  un  plus 
grand,  dont  la  direction  fut  confiée  aux  entrepreneurs  Locatelli  et 
Moretti.  Les  acteurs  composant  leur  troupe  prirent  le  nom  de  co- 
médiens de  la  cour. 

Mais  ce  spectacle  ne  constituait  encore  qu'un  amusement  de 
second  ordre  ;  auquel  ne  se  mêlait  pas  la  classe  élevée,  à  celle-ci 
demeuraient  réservées  les  représentations  gratuites  de  l'Opéra  italien. 
Cependant  le  règne  parcimonieux  de  Frédéric- Auguste,  qui  fut  si 
salutaire  au  pays  après  les  guerres  et  les  dilapidations  de  toutes 
sortes  de  la  cour,  devait  bientôt  porter  un  coup  terrible  à  cette 
institution  privilégiée.  En  effet,  ce  prince  commença  par  donner 
à  l'entreprise  privée  l'autorisation  de  jouer  des  opéras  bouffes 
italiens  ;  puis  il  ôta  au  grand  opéra  italien,  qu'avait  porté  si  haut 
le  dilettantisme  de  ses  prédécesseurs,  son  privilège  et  ordonna 
qu'on  représentât  des  opéras-séria  sur  le  petit  théâtre,  qui  était 
alors  aux  mains  de  l'imprésario  Bustelli.  Par  suite  de  cette  me- 
sure radicale,  l'opéra  italien  entra  dans  une  voie  toute  nouvelle  : 
il  n'appartenait  plus  à  la  cour,  mais  bien  au  public,  qui  pouvait 
en  jouir  moyennant  son  argent;  il  relevait  de  la  critique  ;  en  un 
mot,  il  prenait  place  parmi  les  institutions  artistiques  populaires  ; 
néanmoins,  en  dépit  de  ces  réformes,  l'opéra  italien  conserva  son 
cachet  d'élégance,  et  le  beau  monde  n'allait  au  théâtre  que  les 
soirs  qui  lui  étaient  réservés. 

Cet  état  de  choses  dura  jusque  vers  la  fin  de  1814,  époque  à 
laquelle  il  fut  brusquement  renversé  pendant  l'occupation  russe 
et  prussienne  de  la  Saxe  ;  le  contrat  passé  avec  les  entrepreneurs 
fut  rompu,  le  théâtre  déclaré  institution  nationale,  et  le  maréchal 
de  la  cour  Racknitz  chargé  de  son  administration.  A  son  retour  à 
Dresde,  en  181S,  le  roi  laissa  subsister  cette  organisation,  se  bor- 
nant à  substituer  au  comte  de  Racknitz  le  comte  Henri  Vitzthum. 
Donc,  jusqu'au  temps  de  l'occupation  russe  et  prussienne,  il  y 
avait  eu  un  Opéra  italien  à  Dresde,  mais  il  n'y  avait  pas  eu  d'Opéra 
allemand.  Ce  fut  le  comte  Henri  Vitzthum  qui,  poursuivant  avec 
ardeur  cette  idée,  née  des  sentiments  de  nationalité  éclos  dans  les 
dernières  années,  sut  en  convaincre  le  roi  et  provoqua  la  nomina- 
tion de  Weber  au  poste  de  directeur  de  l'Opéra  allemand,  en  dépit 
de  l'opposition  du  ministre  comte  Einsiedel,  en  dépit  surtout  de  la 
noblesse  italo-saxonne,  qui  détestait  instinctivement  cette  institu- 
tion rivale  de  l'art  comme-il-faut. 

Quoi  qu'il  en  soit,  Weber  avait  reçu  mission  de  créer  l'Opéra 
allemand  à  Dresde*,  mais  l'on  avait  stipulé  dans  son  engagement 
qu'il  agirait  avec  une  grande  économie  pour  le  recrutement  de 
forces  nouvelles,  la  chapelle  et  les  chanteurs  qui  en  faisaient  partie 
étant  à  sa  disposition  autant  que  besoin  serait.  Weber  vit  bientôt 
les  difficultés  qui  allaieni,  surgir  de  toutes  parts  :  en  première 
ligne  se  plaçaient  une  cour  indifférente  et  une  noblesse  antipa- 
thique  à    la    nouvelle    institution;    d'autre   part,  le  personnel  de 


l'Opéra  italien,  fort  de  ses  anciens  privilèges.  lui  serait  hostile  et 
ne  le  seconderait  en  rien.  11  n'avait  donc  pour  lui  que  l'appui 
modeste  du  public  et  l'amitié  de  son  chef,  l'excellent  comte 
Vitzthum,  et  c'est  dans  son  action  commuue  avec  celle  de  l'admi- 
nistrateur royal  qu'il  mit  ses  plus  grandes  espérances.  Par 
malheur,  leur  union  déplaisait  au  ministre  Einsiedel,  qui  ne  se 
faisait  pas  faute  de  le  leur  prouver  à  tout  moment,  et  protégeait 
visiblement  le  collègue  de  Weber,  Francesco  Morlacchi,  maître  de 
chapelle  de  l'Opéra  italien,  et  le  maître  de  concerts  Polledro. 

Ce  Francesco  Morlacchi,  dont  il  sdra  beaucoup  parlé  dans  la 
suite,  était  bien  homme  à  profiter  de  ces  avantages.  11  était 
élève  de  Carusso  et  Mazelti  pour  le  chant,  et  de  Zingarelli  pour 
le  contre-point;  en  outre,  le  père  Martini,  qui  s'intéressait  à  ses 
progrès,  lui  avait  conseillé  d'apprendre  à  jouer  de  plusieurs 
instruments.  Comme  compositeur  dramatique,  il  avait  débuté  par 
il  Poêla  in  campagna,  représenté  à  Florence,  et  par  il  Rilratto, 
que  Vérone  avait  applaudi.  La  Principessa  per  ripiego  et  le  Danaïde 
confirmèrent  sa  réputation  dans  la  Péninsule  ;  enfin  une  scène 
lyrique,  Saffo,  écrite  pour  la  Scala  de  Milan,  dans  laquelle  la 
belle  Marie  Marcolini  enthousiasma  le  public  des  grandes  villes 
d'Italie,  le  fit  tout  spécialement  remarquer.  Cette  scène  com- 
mença sa  fortune,  car  la  Marcolini,  dans  sa  gratitude  pour  le 
jeune  musicien  qui  savait  si  bien  éci'ire  pour  sa  voix,  manda 
tant  de  bien  de  lui  à  son  parent  le  comte  Marcolini,  premier 
ministre  du  roi  de  Saxe,  que  Morlacchi  fut  appelé  à  Dresde  et 
nommé  maître  de  chapelle  en  1811.  Il  débuta  l'année  suivante 
devant  le  public  de  cette  capitale  par  un  opéra  séria,  Raoul  de 
Créqui,  qui  tomba;  le  même  sort  était  réservé  à  sa  première 
messe,  exécutée  à  l'occasion  de  la  Toussaint,  qui  fut  trouvée  trop 
mondaine  et  trop  peu  travaillée,  ainsi  qu'à  deux  opéras  le  Danaïde 
(fin  1812)  et  Capricciosa  pentita  (janvier  1813).  Son  Barbier  de 
Séville,  représenté  en  juin  1816,  eut  plus  de  bonheur,  bien  qu'on 
y  remarquât  des  longueurs  et  des  réminiscences  de  l'œuvre  du 
même  nom  de  Paisiello.  Cependant,  en  dépit  de  ces  insuccès, 
Morlacchi  s'ancrait  chaque  jour  davantage  dans  les  bonnes  grâces 
de  la  cour.  Il  s'y  montrait  fin  cavalier,  élégant,  instruit  et  surtout 
il  y  intriguait  avec  une  rare  habileté.  Ancien  élève  des  jésuites, 
il  avait  conservé  de  sa  première  éducation  un  fonds  de  diplomatie, 
dont  il  ne  se  départit  jamais*  c'est  ainsi  que,  pour  invoquer  au 
besoin  un  malentendu,  il  fit  semblant  de  ne  jamais  posséder 
entièrement  la  langue  allemande  ;  aussi  Vitzthum,  qui  abhorrait 
sa  nature  féline  et  se  défiait  de  lui,  avait-il  pris  l'habitude  de  lui 
envoyer  ses  Instructions  en  italien.  Comme  chef  d'orchestre,  il 
n'était  pas  sans  mérite  :  il  avait  l'oreille  fine;  il  indiquait  bien  les 
mouvements,  mais  il  redoutait  d'interrompre  un  morceau,  dans  la 
crainte  de  vexer  ses  musiciens,  préférant  les  accabler  de  répétitions, 
jusqu'à  ce  qu'ils  eussent  corrigé  d'eux-mêmes  les  fautes. 

Morlacchi  dirigea  la  chapelle  avec  une  telle  omnipotence  pen- 
dant plus  de  quatre  années,  que,  lorsqu'en  1816  J.  Baptiste  Pol- 
ledro, l'un  des  meilleurs  élèves  de  Paganinr,  lui  fut  adjoint  en 
qualité  de  maître  de  concerts ,  il  le  considéra  comme  empiétant  sur 
ses  attributions  et  se  déclara  son  ennemi.  On  psnse  quelle]  dut 
être  sa  fureur,  quand  on  lui  annonça  l'arrivée  de  Weber.  Son 
premier  soin  fut  de  se  rapprocher  de  Polledro  et  de  tous  ceux 
qui  voulurent  bien  grossir  les  rangs  de  ses  tenants  et  lui  jurer 
fidélité  pour  la  guerre  qui  allait  s'engager,  implacable  et  terrible. 


Edmond  I^EUKOMM. 


(La  mite  prochainement.) 


140 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


LA  MUSIQUE  ET  L'ÀIDOUB. 

Dictionnaire  de  la  maslqne  appliquée  A  l'amour. 

Par  m.  ALBERT  DE  LASALLE  (1). 
(Premier  arlicle.) 

La  Musique,  l'Amour  mettant  en  jeu  les  mêmes  fibres  de  notre 
être...,  les  délicats,  les  raffinés  de  la  physiologie  le  savent,  mais 
rendre  sensible  aux  esprits  timides  ce  rapport  direct,  absolu,  pres- 
que constant,  et  montrer  les  nombreux  traités  d'alliance  frappés, 
au  courant  des  siècles  par  l'Amour  et  la  Musique,  n'était-ce  point 
là  une  originale  et  affriolante  entreprise? 

M.  Albert  de  Lasalle  l'a  tentée  sous  la  forme  d'un  Dictionnaire, 
qui,  à  la  vérité,  n'a  de  la  chose  que  le  nom.  Si  l'auteur  ne  craint 
pas  de  paraître  galant  aux  pédants,  combien  il  redoute,  en  eff'et, 
de  sembler  pédant  aux  galants  !  L'artifice  et  le  calcul  sont  visibles, 
sous  la  plume  de  cet  esprit  doux  et  poli,  pénétrant  et  fin,  rare- 
ment à  bout  de  lui-même,  pour  cacher  et  bien  cacher  ce  qu'il 
sait.  Comme  il  fait  le  modeste,  comme  il  se  défend  de  prétendre 
aux  honneurs  de  la  science  et  ne  veut  être  qu'un  homme  qui  a 
du  goût  pour  les  belles  choses,  avec  une  pointe  d'ironie  et  autre 
trait  bien  plus  piquant  encore  !  Oui  vraiment  :  sous  cette  en- 
veloppe rose  tendre,  parmi  ces  feuillets  aux  grâces  littéraires 
et  typographiques  de  parti-pris  vieillottes,  il  y  a,  le  dirai-je?  et 
l'on  retrouve  aisément  ce  petit  signe,  cet  «  un  je  ne  sais  quoi  » 
auquel  Aiiacréon  reconnaissait  ceux  qui  avaient  beaucoup  aimé 
et  beaucoup  médité  sur  ces  accidents  de  notre  ondoyante  nature. 

Il  ne  s'agit  pas  ici,  toutefois,  de  l'amour  idéal ,  du  maître  d'é- 
cole des  grandes  âmes,  de  celui  (jue  l'on  appelé  le  Bonheur  divin 
de  donner  du  bonheur.  L'amour  du  Dictionnaire  de  M.  de  Lasalle, 
quoiqu'il  s'en  défende  au  besoin  ,  est  un  amour  aimable,  enjoué, 
facile,  d'une  bonne  maison  française  dont  les  ancêtres  seraient 
gaulois.  Avec  un  tel  guide,  nous  sommes  bien  moins  conduits  sur 
ce  mont  Ilélicon  où  les  habitants  de  Thepsie,  confondant  Ëuterpe 
et  Cupidon  dans  une  aduiiration  commune ,  célébraient  solennel- 
lement les  Erotides,  que  doucement  ramenés  vers  les  frontières  du 
pays  de  Tendre,  à  la  belle  époque  où  les  hommes  étaient  volon- 
tiers amoureux  de  toutes  les  femmes  et  croyaient  surtout  qu'elles 
étaient  volontiers  amoureuses  d'eux,- alors  que  la  grande  affaire 
était  do  bien  «  parler  amour  »  et  d'emprunter  à  tout,  musique, 
poésie,  peinture,  physique,  cuisine,  botanique,  parfumerie,  alchi- 
mie, mécanique,  que  sais-je?  les  images  de  ce  phébus  à  talons 
rouges  et  à  vertu gadins. 

Il  est  bien  de  ceux  dont  Diderot  disait  que  si  les  tablettiers  en 
fabriquaient,  tout  le  monde  en  voudrait  avoir  à  la  campagne, 
ce  charmant  petit  volume,  plus  intéressant  que  bien  des  livres, 
compagnon  de  loisir  bon  à  prendre  et  à  reprendre,  aisément  fa- 
milier, judicieusement  dédié,  du  reste,  a  aux  femmes  jeunes,  jo- 
lies et  sensibles  à  la  musique.  »  —  A  la  musique  du  sentiment, 
n'est-ce  pas?  M.  Albert  de  Lasalle  est  trop  xvni«  siècle  pour  que 
la  concision  de  sa  dédicace  ne  sous-entende  pas  cela.  Et  de  fait, 
je  me  figure  bien  son  Dictionnaire  dans  les  mains  blanches  et  ner- 
veuses de  ces  belles  dames  des  portraits  du  dernier  siècle,  accou- 
dées sur  un  clavecin,  un  peu  pâmées  et  purpurines,  vous  regar- 
dant du  haut  de  leurs  cadres  et  souriant  étrangement  d'une  bou- 
che voluptueuse  et  spirituelle  qui  lance  l'épigramme  et  provoque 
le  baiser. 

M.  de  Lasalle  a  beaucoup  emprunté  —  son  plan  l'y  autorisait — 
aux  buissons  artistiques  et...  aux  autres,  et  ces  buissons-là  lui  ont 
beaucoup  rendu.  Il  les  bat,  parfois  avec  un  peu  d'affectation  et  de 
manière,  au  pied  de  chaque  lettre;  mais  parmi  ces  broderies,  ces 


(1)  l  vol.  in-S" ,  Paris ,   Lacroix  et  Verboekhoven.  Librairie  interna- 
tionale . 


fantaisies  et  ces  fantasias,  le  bon  sens  vit ,  le  bon  goiît  règne,  un 
certain  air  de  franchise  et  de  liberté  déconcerte  la  critique  et  bien 
des  traits,  en  dépit  de  leur  allure  dégagée,  s'appuient  non  pas  sur 
les  illusions  de  l'esprit,  mais  sur  les  principes  d'une  expérience 
spéciale  réelle.  En  suivant  les  chemins  grands  et  petits  de  l'alpha- 
bet, ce  Ruggieri  du  style  galant,  obligé  de  combler  des  vides, 
des  lacunes,  a  écrit  çà  et  là  des  choses  rapides,  nuancées,  tou- 
jours ingénieuses.  J'en  veux  découper  quelques-unes  et  les  isoler 
ici  de  ce  qui  les  entoure. 

J'aime  assez,  par  exemple,  la  division  de  la  substance  vibrante 
en  «  instruments  de  matière  animale,  de  matière  végétale  et  de 
matière  minérale.  »  On  peut  ainsi  analyser  l'essence  du  son, 
étudier  la  façon  dont  il  retentit  au  fond  de  nous-mêmes  et 
découvrir  sa  inérarchie.  Le  premier  groupe  est  celui  des  instru- 
ments supérieurs,  qui  parlent  à  l'âme;  le  violon,  l'alto,  le  vio- 
loncelle. Constitués  par  leurs  cordes  (  matière  animale  ) ,  le  bois 
n'étant  ici  qu'un  appareil  auxiliaire,  ils  deviennent  partie  inté- 
grante de  l'instrumentiste,  et  obéissent  aux  plus  secrets  mouve- 
ments de  sa  pensée.  Le  groupe  des  instruments  de  matière  végé- 
tale, hautbois,  flûte,  basson,  «  a  gardé  de  son  origine  une  invin- 
cible propension  à  l'églogue.  Ce  sont  des  outils  de  paysagistes.  Ils 
évoquent  l'idée  de  vert  par  analogie  sympathique;  mais  ils  ne 
sont  pas  avantagés,  au  même  degré,  de  la  voix  amoureuse  et  do- 
cile, aux  accents  quasi-humains,  des  instruments  du  premier 
groupe.  »  Quant  aux  engins  sonores  de  matière  inanimée,  leur 
énergie  tourne  trop  facilement  à  la  colère,  et  «  rien  d'humain  ne 
vibre  en  eux.  »  Et  M.  de  Lasalle  en  conclut  '<  que  le  pouvoir  ex- 
pressif d'un  instrument  est  en  raison  directe  du  règne  de  la  na- 
ture au(|uel  sa  substance  a  été  empruntée.  »  J'ai  entendu  formu- 
ler doctoralement  des  théories  moins  rationnelles. 

Un  peu  plus  loin,  le  Dictionnaire  établit  et  discute  le  caractère 
mâle  et  femelle  de  la  Musique ,  «  deux  sexes  sans  cesse  en 
présence,  et  qui,  malgré  tant  de  manières  de  se  comporter,  n'en 
courent  pas  moins  fatalement  aux  voluptés  de  l'accord  parfait  fi- 
nal... Qui  sait?  le  charme  indéfini  sous  lequel  nous  tiennent  les 
combinaisons  harmonieuses  des  sons  réside  peut-être  dans  cette 
conjonclion  intime  de  deux  éléments  distincts,  bien  que  de  même 
essence?  » 

Pour  ceux  qui  savent  lire  entre  les  lignes,  la  thèse  est  catégori- 
que. Aussi  le  paragraphe  s'empresse-t-il  d'ajouter  :  «  Car  (ce  car 
est  délicieux)  ce  que  l'homme  cherche  toujours  dans  l'art,  c'est 
une  représentation  de  lui-même ,  non  tel  qu'il  est ,  mais  tel  qu'il 
voudrait  être;  c'est  son  image  aperçue  au  milieu  des  rayons  d'un 
miroir  enchanté,  c'est  lui  transporté  au  paradis  de  tous  ses  rêves 
accomplis.  »  Est-ce  assez  clair?  Et  plus  loin,  dans  le  même  ordre 
d'idées,  je  lis  :  «  Il  se  trouve  que  justement  les  notes  vocales 
données  par  la  temme  sont  à  l'octave  aiguë  de  celles  de  l'homme. 
Rencontre  tout  au  moins  singulière  :  par  un  signe  extérieur ,  ces 
deux  êtres  semblent  révéler  le  rapport  géométrique  qu'une  loi 
mystérieuse  aurait  établi  eptre  eux.  » 

De  ses  hauteurs  brûlantes,  M.  de  Lassalle  sait  redescendre  à  des 
questions  plus  pratiques,  sMrtout  lorsqu'il  revendique  pour  la 
femme  le  rôle  d'accompagnateur.  J'indique  aux  lecteui's  du  Dic- 
tionnaire le  tableau  en  partie  double  des  vertus  obligatoires  chez 
l'épouse  irréprochable  et  des  qualités  exigées  de  l'accompagnateur 
modèle  :  fidélité,  belle  humeur,  abnégation,  courage,  dévouement, 
et  sur  ce  dernier  chapitre,  «  ne  jan'ais  abandonner  son  virtuose, 
quels  que  soient  les  écarts  de  rhythme  ou  de  diapason  auxquels  il 
lui  plaît  de  se  livrer;  en  qualité  de  teigneur  et  maître,  il  jouit 
d'un  droit  absolu  d'initiative.  Donc,  le  suivre  quand  même  et  le 
serrer  de  près  en  toute  occasion.  » 

Em.  M/.thieu  de  monter. 
(La  suite  prochainement.) 


DE  PARIS. 


141 


nimSTÉBE  DE  L&  ISÂISON  DE  L'EIPEREDB 

ET    DES    BEAUX-ARTS- 

DIRECTION    GÉNÉRALE    DES    THÉÂTRES. 


Le  poëme  choisi  par  le  jury  pour  le  concours  d'opéra  et  destiné  à  être 
mis  en  musique  par  des  compositeurs  français,  la  Coupe  du  roi  de  Thulé, 
sera  délivré,  à  partir  du  i^'  mai  prochain,  au  minisière  de  la  maison 
de  l'Empereur  et  des  beaux-arts  (direction  générale  de  l'administration 
des  théâtres). 

D'après  le  vœu  exprimé  par  un  grand  nombre  de  compositeurs,  la 
clôture  du  concours,  qui  devoit  avoir  lieu  le  30  décembre  -1868,  est  pro- 
rogée au  30  avril. 


CONCERTS  ET  AUDITIONS  MSICÂLES  DE  LÀ  SEMAINE. 

5i;**  Les  deux  derniers  concerts  de  Rubinstein  (l'un  chez  Érard,  le 
24  avril;  l'autre  avec  orchestre  chez  Herz,  mercredi  dernier)  ont  eu  le 
même  éclat  et  le  même  intérêt  que  les  autres.  Pour  la  première  fois  ce 
grand  artiste  a  joué  un  autre  concerto  que  les  siens,  celui  en  sol  de 
Beethoven  ;  il  y  a  été  admirable  d'un  bout  k  l'autre.  L'énorme  travail 
auquel  il  s'est  condamné  depuis  son  arrivée  à  Paris,  jouant  chaque  soir 
dans  un  concert  ou  un  salon,  avec  cette  énergie  qu'on  lui  connaît, 
semble  néanmoins  l'avoir  fatigué. 

***  Le  pianiste-compositeur  Mortier  de  Fontaine  est  venu,  ces  jours 
derniers,  chercher  à  Paris  la  consécration  de  ses  longs  succès  d'Allemagne 
et  de  Russie.  Son  concert  historique  de  samedi  dernier  a  été  un  véri- 
table cours  d'histoire  du  piano  :  vingt  auteurs  diflérents,  depuis  le  clave- 
ciniste William  Bird  jusqu'à  Scliumann ,  ont  fourni  le  programme  de 
cette  séance;  le  clioix  des  morceaux  a  été  en  général  très-heureux.  Nous 
citerons  particulièrement  les  BallabiU  de  Frescobaldi,  la  Gigxie  de  Hsen- 
del,  un  charmant  Menuet  de  HayiJn,  récemment  publié  et  qu'on  a 
bissé  ;  et  /da,  rêverie  de  JUortier  de  Fontaine,  qui  vient  ég.'ilenient  de 
paraître,  composition  pleine  de  poésie,  dans  la  manière  de  Scliumann,  et 
à  laquelle  on  a  fait  le  meilleur  accueil.  Mlle  Anna  Vogt  a  exécuté  deux 
fantaisies,  dont  une  sur  Roherl-le-Diahle,  sur  le  mattaup/wne,  instrument 
d'une  sonorité  Irès-sympalhique,  basé  comme  l'harmonica  sur  la  réson- 
nance  du  verre,  et  mis  en  vibration  par  le  frottement  du  doigt  mouillé; 
elle  a  obtenu  un  très-grand  succès.  Remercinns  en  terminant  M.  Mortier 
de  Fontaine  de  l'excellente  idée  qu'il  a  eue  de  faire  distribuer  dans 
la  salle  une  notice  historique  et  critique  complète,  qui  a  été  d'un 
grand  secours  pour  rintelligence  des  morceaux  dont  son  programme  était 
composé. 

^*:^  Mlle  Thérèse  Liebe,  la  jeune  violoniste  que  nos  lecteurs  n'ont 
certainement  pas  oubliée,  et  qu'on  applaudissait  jeudi  chez  la  marquise 
de  Beaumont,  a  donné  mardi  dernier,  à'  la  salle  Erard,  un  très- 
brillant  concert.  Thérèse  Liebe  a  acquis  aujourd'hui  le  droit  de  n'être 
plus  traitée  en  petit  prodige;  il  y  a  dans  ce  jeu  calme  et  pur  plus  que 
l'imperturbable  avsurance  de  l'écolier  qui  a  bien  appris  sa  leçon,  il  y  a 
la  preuve  d'un  sentiment  musical  très-développé,  d'un  tempérament 
artistique  déjà  bien  accusé.  Aborder  le  concerto  de  Mende^sohn  à  treize 
ans,  cela  peut  paraître  téméraire;  mais  quand  le  maître  qui  a  dirigé  les 
travaux  d'une  pareille  élève,  qui  lui  a  désigné  l'œuvre  qu'il  croyait  le 
plus  propre  à  mettre  ses  qualités  en  lumière,  s'appelle  Léonard,  on  n'a 
à  craindre  ni  échec,  ni  charlatanisme.  En  effet,  Thérèse  Liebe  tire  de 
son  intrument  un  son  plein,  rond,  sympathique,  énergique  même  quand 
il  le  faut;  elle  fait  très-bien  le  staccato  et  les  passages  d'agiiité  ;  elle  a 
un  parlait  sentiment  du  rhytlime,  et  s'il  lui  manque  encore  certain  feu 
et  certaine  maestria,  c'est  que  rien  ne  remplace  l'âge  et  l'expérience,  et 
qu'il  y  aurait  folio  à  vouloir  en  faire  ex  abrupto  une  Milanollo  ou 
une  Norman-Neruda.  Elle  a  fort  bien  dit  aussi  la  Romance  et  le  Rondo 
élégant  de  Vieniawski,  et  les  applaudissements  ne  lui  ont  pas  été  mar- 
chandés. Stœgcr  a  produit  son  effet  habituel  avec  sa  grande  Valse-caprice  et 
son  Arrii  ée  du  printemps  ;  Mlle  de  Eusch,  charmante  cantatrice  alle- 
mande qui  chante  en  cinq  ou  six  langues,  a  dit  avec  beaucoup  de 
goût  des  airs  populaires  du  Nord  et  un  morceau  du  Roméo  de  Bellini. 
MM.  Pagaud  et  Pottier  ont  également  concouru  gracieusement  à  l'éclat 
de  ce  beau  concert. 

^*^  Les  trois  enfants  Frémaux  promettent  autant  d'artistes;  nous 
l'avons  déjà  dit,  et  leur  concert  de  mardi  dernier  nous  offre  une  occa- 
sion de  le  répeter.  La  jeune  fille  est  déjà  une  habile  pianiste,  et  l'un  des 
garçons  joue  très-joliment  du  violon  ;  quant  au  plus  jeune,  sa  gentillesse 
n'c.-,t  égalée  que  par  son  étonnante  facilité  et  son  assurance  à  se  servir 
d'un  instrument  aussi  peu  maniable  pour  lui  que  le  violoncelle.  Ils  ont 
exécuté  un  trio  de  Mozart  et  diver.'es  fantaisies  pour  leurs  instruments 
avec  un  très-grand   succès.  Ruijinstcin   avait  bien    voulu   contribuer    à 


j  l'attrait  de  ce  concert;  il  a  merveilleusement  exécuté  le  Roi  des  Aulnes, 
transcription  de  Liszt,  la  Berceuse  de  Chopin  et  la  marche  du  Songe  de 
Mendelssohn.  Mme  Anna  Constanzia  a  été  irès-applaudie  après  l'air  de 
l'Ombre  du  Pardon  de  Ploërmel  et  la  cavatine  du  Sorbier.  Sivori  assis- 
tait à  cet  intéressant  concert;  il  est  resté  jusqu'à  la  fin,  a  ensuite  vive- 
ment félicité  le  jeune  violoniste  et  lui  a  dit  qu'il  voulait  se  charger  de 
perfectionner  son  talent. 

**«  Samedi  25  avril,  à  la  salle  Lebouc,  deux  élèves  de  M.  Guillot  de 
Sainbris,  MM.  Biron  et  Roche,  se  faisaient  pour  la  première  fois  entendre 
au  public.  Si  l'on  tient  compte  de  l'émotion  qui  les  a  plus  d'une  fois 
paralysés,  on  reconnaîtra  qu'il  y  a  dans  ces  jeunes  gens  l'étoffe  de  deux 
l3ons  chanteurs,  qui  ne  peuvent  manquer  de  faire  honneur  à  leur  maî- 
tre. Mme  Pauline  Roger,  dont  le  nom  s'est  déjà  rencontré  sous  notre 
plume  l'année  dernière,  pianiste  d'un  sérieux  talent  et  organisation  mu- 
sicale d'élite,  a  dit  en  perfection,  avec  le  violoniste  White,  une  sonate 
de  Mozart,  et  seule  une  Romance  sans  paroles  de  Mendelssohn ,  et 
l'Invitation  à  la  valse.  Elle  ne  lardera  pas,  nous  en  sommes  persuadés, 
à  occuper  la  place  distinguée  qui  lui  est  réservée  dans  le  monde  mu- 
sical . 

t*^  Une  pianiste  de  talent,  Mlle  Octavie  Caussemille,  a  recollé,  à  son 
concert  du  27  avril,  des  bravos  nombreux  et  mérités,  pour  la  manière 
pleine  de  charme  dont  elle  a  interprété  plusieurs  morceaux  de  styles 
divers.  Virtuose  habile,  profes.seur  des  plus  distingués,  Mlle  Caussemille 
conserve  son  rang  parmi  les  meilleurs  exécutants  au  piano  de  l'école 
française. 

)(*^  La  séance  annuelle  de  la  «  Société  chorale  d'amateurs  »  qui  a 
eu  lieu,  mercredi  dernier,  chez  Pleyel,  a  été  une  complète  et  brillante 
constatation  des  traditions  élevées,  des  excellents  principes  d'enseigne- 
ment et  de  la  recherche  constante  du  mieux  qui  caractérisent  cette  re- 
marquable institution  musicale,  créée  par  M.  A.  Guillot  de  Sainbris. 
Dans  l'exécution  de  cinq  œuvres  chorales  d'une  importance  considérable, 
et  toutes  de  caractères  différents,  fragments  du  Messie,  Stahat  de  Gou- 
nod,  Conjuration  et  Bénédiction  des  poignards,  des  Huguenots,  notamment, 
la  belle  et  vaillante  phalange,  accompagnée  par  MM.  Franck  et  Maton, 
a  déployé,  sous  la  direction  de  son  président-fondateur,  une  ardeur,  un 
goiàt,  un  sentiment,  et  avec  cela  une  netteté  d'articulation  et  une  préci- 
sion irréprochables,  qui  ont  transporté  l'auditoire  et  provoqué  de  nom- 
breuses salves  d'applaudissements. 

.j,*^,  La  musique  d'ensemble,  on  pourrait  même  dire  la  musique  reli- 
gieuse, puisque  les  exécutants  appartenaient  presque  tous  aux  maîtrises 
parisiennes,  a  rempli  une  bonne  partie  du  concert  donné  lundi  dernier, 
chez  Pleyel,  par  M,  H.  Grignon,  ex-pensionnaire  du  théâtre  Lyrique  et 
fds  de  l'ancien  artiste  de  l'Opéra-Comique.  M.  Grignon  a  chanté  avec  une 
belle  voix,  un  goût  sur  et  beaucoup  de  sentiment  plusieurs  morceaux. 
M.  et  Mme  Dancla,  M.  Lefébure-Wély,  prêtaient  leur  concours  au  béné- 
ficiaire. Un  chœur  assez  insignifiant.  C'est  Dieu!  empruntait,  dans  cette 
soirée,  à  la  manière  de  dire  de  ses  interprètes,  tous  chantres  d'église,  je 
ne  sais  quoi  d'ultra-religieux  et  de  funèbre  qui  n'a  pas  précisément  en- 
thousiasme l'assistance,  mise,  au  surplus,  en  belle  humeur  par  la  Chasse 
du  Burgrave,  de  M.  Lenlz. 

^*4,  Nous  avons  assisté  le  dimanche  26  avril,  en  l'église  Notre-Dame- 
de- lionne-Nouvelle,  à  l'occasion  de  la  fête  patronale  de  cette  paroisse,  à 
l'exécution  de  la  sixième  messe  solennelle  avec  orchestre,  composée  par 
M.  Alexandre  Li-prévost,  organiste  à  Saint-Roch,  qui  dirigeait  lui-même 
son  œuvre.  Cette  messe,  empreinte  d'un  véritable  caractère  religieux,  se 
fait  surtout  remarquer  par  d'heureuses  et  sympathiques  mélodies. 

jf*ig  Mlle  Hélène  Leybaque  a  donné  le  2.H  avril  un  concert  à  la  salle 
Pleyel.  C'est  une  jeune  pianiste  d'un  talent  consciencieux  et  classique, 
qui  a  fait  pressentir  ce  qu'on  est  en  droit  d'attendre  d'elle  en  jouant  le 
concerto  en  fa  dièse  mineur  de  G.  Mathias ,  une  sonate  de  Beethoven 
et  la  Truite  de  Stéphen  Heller.  Tous  les  styles  lui  sont  familiers,  et  elle 
excelle  à  en  faire  sentir  les  différences. 

»*,t  On  sait  avec  quelle  autorité  M.  Camille  Saint- Saëns  a  dirigé,  à  la 
salle  Herz,  l'exécution  des  concertos  de  Rubinstein.  A  son  tour,  le  cé- 
lèbre artiste  russe  s'est  mis  à  la  disposition  de  son  confrère  et  ami ,  et 
il  conduira  l'orchestre  au  concert  qui  sera  donné  par  M.  Saint-Saëns, 
mercredi  prochain,  6  mai,  dans  les  salons  Pleyel,  Wolf  et  C'°.  Le  pro- 
gramme de  ce/te  soirée,  qui  va  dignement  clôturer  la  saison,  annonce 
deux  concertos  de  la  composition  du  bénéficiaire,  et  des  œuvres,  pour  le 
piano,  de  G.  Bizet,  Laussel,  Sieg,  Vidor  et  Chauvet.  La  partie  vocale 
sera  représentée  par  Id  gi-acieuse  Mlle  Brunelti. 

^*j^  La  Chorale  forézienne  de  Saint-Etienne,  dirigée  avec  autant  de 
talent  que  de  dévouement  par  M.  Dard,  a  donné  dernièrement  un 
concert  spirituel  dans  la  cathédrale.  Cette  excellente  Société  a  exécuté 
d'une  manière  remarquable  le  Stabat  de  Rossini,  dont  les  soli  étaient 
confiés  à  des  amateurs  que  bien  des  artistes  pourraient  prendre  pour 
modèles.  Deux  compositions  de  M.  Dard,  Tantum  ergo  et  0  Salutaris, 
ont  été  très-appréciées. 

^'^^  Aujourd'hui,  à  2  heures,  dans  les  salons  Erard,  a  lieu  une  mati- 
née littéraire  et  musicale  au  profit  de  l'Association  des  institutrices  libres 
du  département  de  la  Seine.  On  y  entendra  la  sonate   de  Rubinstein, 


142 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


par    Mnies   Rossi  -  Gallieno    et    Jacquart,  Mmes  Maiuluit    et    Damain, 
MM.  Consolo,  Marochetli,  Saint-Germain  et  Costel. 

;^**  Le  concert  annuel  de  Mme  Lissarrague  aura  Heu  au  grand  théâ- 
tre de  Versailles,  le  U  mai,  avec  le  concours  de  Mlle  Mauduit,  de  l'Opéra, 
de  MM.  Warot,  Alard,  Bottesini  et  E.  Renard.  Le  piano  sera  tenu  par 
M.  Coharé,  maître  de  chant  à  l'Opéra. 

^:*^  Aujourd'hui,  à  2  heures,  aura  lieu,  au  Cirque-Napoléon,  sous 
la  direction  de  M.  Pasdeloup,  la  séance  solennelle  de  l'Orphéon  (rive 
droite).  1,300  élèves  des  écoles  communales  de  la  ville  de  Paris  pren- 
dront part  à  cette  solennité.  On  y  chantera  des  œuvres  de  Mendelssohn, 
Gounod,  Léo  Delibes,  prince  de  Polignac  et  les  chœurs  suédois  dont  nous 
avon  déjà  eu  occasion  de  dire  quelques  mots. 

*%  Lcopold  de  Meyer  est  de  retour  à  Paris,  après  avoir  utilisé  un  séjour 
de  six  mois  aux  Etats-Unis  en  donnant  soixante-quinze  concerts, 
qui  lui  ont  produit  la  bagatelle  do  quarante  mille  dollars.  New-York, 
Boston,  Philadelphie,  Baltimore,  Washington,  Richmond,  Springfleld, 
New-Haven,  Providence,  Worcester,  Newark,  Trenton,  Hartford,  telles 
sont  les  étapes  de  son  itinéraire  artistique.  On  peut  se  faire  une  idée  de 
la  manière  dont  les  choses  se  passent  chez  les  Américains,  quand  on 
saura  que  dans  ces  diverses  villes  les  billets  s'enlevaient  aux  enchères  et 
se  payaient  jusqu'à  dS  et  20  dollars  pièce,  et  plus  l'amateur  se  trou- 
vait près  de  l'artiste,  plus  il  surenchérissait.  Comme  dans  certaines  localités, 
Léopold  de  Mejer  avait  affaire  à  un  public  puritain  que  ses  principes  em- 
pêchaient d'aller  au  théâtre  ou  dans  les  salles  de  concert,  il  lui  fallait 
donner  ses  concerts  dans  les  églises et  quatre  ou  cinq  mille  audi- 
teurs y  applaudissaient  et  bissaient  à  grands  cris  l'étonnante  exécution 
du  célèbre  pianiste.  L'immense  succès  de  la  Grande-Duchesse  de  GéroU- 
tein,  à  New- York,  lui  avait  inspiré  une  brillante  fantaisie  qu'il  y  jouait 
avec  le  plus  grand  succès,  mais  dont,  à  cause  de  la  sainteté  du  lieu, 
il  avait  grand  soin  de  ne  pas  dire  le  titre.  Au  nombre  des  témoignages 
d'admiration  qu'on  lui  prodiguait,  des  dames  lui  jetaient  des  bouquets  où 
elles  avaient  attaché  leur  photographie.  Heureux  Léopold  de  Meycr  !  Mais 
singulier  pays! 


NOUVELLES  DES  TH£ATRES  LYRIQUES. 

,*„  Le  théâtre  impérial  de  l'Opéra  a  donné  lundi  et  mercredi  la  Fian- 
cée de  Corinthe  et  le  Corsaire,  où  Mlle  Granzow  continue  à  se  faire  ap- 
plaudir avec  enthousiasme.  —  Vendredi,  le  Trouvère  et  le  premier  acte 
de  Giselle. 

i^*^  Mardi,  à  la  représentation  d'Hamlet,  donnée  au  bénéfice  de  la 
caisse  des  pensions  de  retraite,  Mlle  Nilsson,  qui  faisait  au  public  ses 
adieux  avant  son  congé,  a  été  l'objet  d'une  ovation  qui  n'avait  peut-être 
pas  encore  eu  de  précédent  à  l'Opéra.  Pendant  toute  la  durée  de  celte  re- 
présentation, mais  surtout  au  quatrième  acte,  des  bouquets  de  toutes  les 
dimensions  et  composés  des  fleurs  les  plus  rares,  n'oni  cessé  d'être  jetés  à 
la  cantatrice  qui  a  si  bien  personnifié  le  rôle  d'Ophélie.  Faure  a  légiti- 
mement partagé  ce  triomphe:  deux  couronnes  de  laurier  sont  tombées  à 
ses  pieds;  Castelmary  les  a  relevées  et  les  a  présentées  à  son  camarade 
au  milieu  d'applaudissements  frénétiques.  —  La  salle  était  éblouissante 
de  toilettes  et  de  diamants.  —  La  recette  a  dépassé  l-i,000  francs. 

«*,,  On  s'occupe  maintenant  avec  activité  de  la  reprise  d'Herculanum, 
qui  aura  pour  interprètes  Mmes  Gueymard  et  Marie  Battu,  MM.  Colin, 
Obin,  David  et  Gaspard;  Mlle  Granzow  y  doit  i-emplacer  la  regrettée 
Emma  Livry,  qui  dansait  le  pas  des  Muses.  —  On  pense  que  la  repré- 
sentation en  aura  lieu  vers  le  20  de  ce  mois. 

j^*»  Mlle  Nilsson  est  partie  le  lendemain  mercredi  pour  Londres,  où  elle 
a  dû  débuter  le  jeudi  à  Drury-Lane  dans  la  Traviata. 

***  Lundi  soir,  on  a  placé  au  foyer  de  l'Opéra  son  buste,  dans  le 
rôle  d'Ophélie.  Cette  œuvre,  qu'on  dit  très-remarquable,  est  due  au 
ciseau  de  MM.  Deloye  et  Francia. 

ii,*if:  L'Opéra -Comique  a  repris,  dimanche  dernier,  les  Voitures  versées 
de  Boïeldieu,  qu'on  n'avait  pas  entendues  depuis  dix  ans  à  Paris.  Cette 
partition  n'a  rien  perdu  de  son  charme,  et,  comme  au  premier  jour,  le 
public  a  accueilli  avec  un  vif  plaisir  l'ouverture,  le  quintette  d'introduc- 
tion, l'air  de  Mme  de  Melval,  les  couplets  de  la  duègne,  les  variations 
adorables  sur  Au  clair  de  la  lune,  en  un  mot  tous  les  morceaux  de  cet 
opéra  vraiment  écrit  de  main  de  maître.  L'interprétation  est  excellente. 
Mlle  Cico  joue  et  chante  à  ravir  le  rôle  de  Mme  de  Melval.  Crosti  obtient 
le  plus  franc  succès  dans  le  personnage  de  Dormeuil,  quoi  qu'il  ne 
convienne  pas  de  tous  points  à  la  nature  de  sa  voix  et  de  son  talent. 
M._  Ponchard  et  Mlle  Derasse  tiennent  très-bien  les  rôles  de  Florville  et 
d'Élise,  et  l'ensemble  est  parfaitement  complété  par  les  autres  artistes,  au 
nombre  desquels  nous  citerons  la  toujours  excellente  Mme  Casimir.  Les 
Voitures  versées  accompagneront  d'une  façon  heureuse  les  pièces  du  ré- 
pertoire qui  alternent  avec  l'opéra  d'Auber. 

^*^  Mme  Galli-Marié,  dont  le  congé  est  expiré,  a  pris  part  dès  hier  aux 
répétitions  de  la  reprise  des  Dragons  de  Villars ,  dans  lesquels  elle  doit 
remplir  le  rôle  de  Rose  Friquet.  Ces  répétitions  vont  se  suivre  sans  in- 


terruption ;  les  décorateurs  et  les  costumiers  sont  à  l'œuvre,  et  la  direc- 
tion de  rOpéra-Comique  ne  néglige  rien  pour  donner  à  cette  reprioe  tout 
l'éclat  que  mérite  l'œuvre  d'Aimé  Maillart. 

***  La  représentation  donnée-lundi  dernier  au  bénéfice  de  Mlle  Krauss 
a  été  fort  orageuse.  Par  suite  du  laconisme  de  l'affiche,  le  public  s'était 
persuadé  à  tort  qu'il  entendrait  Ad.  Patti  dans  les  deux  rôles  de  Zerlina 
et  de  la  Trauiala,  lorsqu'elle  s'était  seulement  engagée  à  chanter  le  der- 
nier. Le  consentement  de  la  célèbre  cantatrice  à  se  rendre  aux  désirs 
du  public  a  mis  tin  à  des  manifestations  qui  s'adressaient  beaucoup  plus 
à  la  direction  qu'aux  artistes;  seulement  la  représentation  n'a  fini  qu'à 
i  heure  du  matin  et  beaucoup  plus  paisiblement  qu'elle  n'avait  débuté. 
,p*^  Vendredi  matin  ,  Mlle  Adelina  Patti  est  partie  pour  Amiens,  où 
elle  devait  chanter  dans  un  grand  concert  avec  Delle-Sedie.  —  Hier  sa- 
medi elle  a  quitté  Paris  pour  se  rendre  à  Londres,  où  elle  est  attendue  à 
Cuvent-Garden;  elle  y  fera  sa  rentrée  par  il  Barbicre.  —  La  veille,  dans 
sa  dernicie  représentation  de  Lucia,  une  brillante  ovation  avait  été  faite 
à  la  célèbre  cantatrice.  Des  bravos  sans  fin,  des  rappels  incessants,  une 
pluie  de  bouquets  magnifiques,  et  enfin  une  belle  couronne  en  bronze 
d'aluminium  avec  cette  inscription  :  «  Adieux  du  public  à  la  grande 
artiste  Adelina  Patti,  »  tels  ont  été  les  éclatants  témoignages  d'afifection 
et  de  regrets  prodigués  par  le  public  parisien  à  la  grande  cantatrice  qui 
l'a  charmé  tout  l'hiver. 

**i  Malgré  la  clôture  officielle  des  représentations'  italiennes,  qui  a  eu 
lieu  jeudi  par  Lucia,  M.  Bagier  a  fait  annoncer  qu'il  en  serait  donné 
quelques-unes  de  supplémentaires.  Ainsi,  pour  commencer,  a  eu  lieu  hier 
une  deuxième  représentation  de  la  Contessina,  et  si  l'appel  fait  aux  pre- 
miers rôles  et  aux  artistes  des  chœurs  est  entendu,  cette  soirée  ne  sera 
pas  la  dernière. 

,1,'*^  Le  directeur  du  théâtre  italien  de  Covent-Garden  ayant  offert  à 
Mlle  Grossi  un  très-bel  engagement,  elle  a  renoncé  pour  l'accepter  à 
celui  qu'elle  avait  contracté  avec  le  théâtre  de  Séville. 

»'*H,  Mme  Carvalho,  après  les  deux  représentations  de  Roméo  et  Juliette, 
données  cette  semaine,  a  pris  son  congé  et  se  rend  à  Bruxelles,  où 
M.  Letellier  l'a  engagée  pour  le  mois  de  mai  ;  elle  va  succéder 
au  théâtre  de  la  Monnaie  à  Mlle  Sasse,  qui  vient  d'y  terminer  par  une 
représentation  triomphale  de  i'.l/'rîcame,  la  brillante  série  de  celles  qu'elle 
a  données. 

*■**  Les  répétitions  générales  d'Elisabeth  de  Hongrie,  nouvel  opéra  de 
M.  Béer,  ont  commencé  au  théâtre  de  la  Renaissance,  et  la  première 
représentation  en  est  très-prochaine. 

***  Mlle  Sarolta  Acs,  jeune  Hongroise,  élève  de  Duprez,  et  dont  on 
a  pu  apprécier  la  belle  voix  de  contralto  dans  l'oratorio  de  son  maître, 
le  Jugement  dernier,  vient  d'être  engagée  pour  trois  ans  au  théâtre  Ly- 
rique, 

^*,  Le  théâtre  du  Palais-Royal  annonce  pour  ■  maM  la  première  re- 
présentation du  Château  à  Tuto,  d'OÔenbach,  Meilhac  et  Halévy  ;  de  son 
côté,  le  théâtre  des  Variétés  doit  donner  jeudi  la  première  de  la  reprise 
du  Pont  des  Soupirs  complètement  remanié  par  les  auteurs,  et  augmenté 
d'un  acte  et  de  deux  tableaux. 

^*^  Une  représentation  extraordinaire  s'organise  au  bénéfice  des 
artistes  du  théâtre  de  la  Porte-Saint-Martin.  Les  théâtres  de  l'Opéra,  de 
l'Opéra-Comique,  le  théâtre  Français  y  apporteront  chacun  un  brillant 
contingent. 

=(**  Depuis  quelques  jours,  Mlle  Lovato  a  remplacé  Mlle  Irma 
Marié  dans  le  rôle  de  Césarine  de  Fleur  de  Thé,  et  elle  s'y  fait  vivement 
applaudir.  La  vogue  est,  d'ailleurs,  de  plus  en  plus  à  l'amusant 
opéra  de  MM.  Duru,  Chivot  et  Lecocq,  et  la  recette  n'a  pas  cessé 
d'atteindre  le  maximum. 

^"^  Nathan  quitte  le  théâtre  de  l'Opéra-Comique;  il  vient  d'être  en- 
gagé par  M.  Noriac,  le  nouveau  directeur  des  Bouffes-Parisiens,  qui  a 
engagé  également  Berthelier;  l'excellent  artiste  revient  ainsi  au  théâtre 
de  ses  premiers  succès. 

^*jj.  On  se  rappelle  une  jeune  cantatrice  qui  chanta  deux  ans  d'une 
façon  très-agréable,  au  théâtre  Italien,  en  qualité  de  comprimaria,  Mlle 
Marcus;  le  théâtre  des  Menus-Plaisirs  a  eu  l'heureuse  idée  de  se  l'atta- 
cher, et  elle  a  repris  depuis  quelques  jours  avec  succès,  après  Mme 
Ugalde,  le  rôle  de  Drogan  dans  Geneviève  de  Brabant. 

^\  Dans  une  représentation  donnée  jeudi  au  théâtre  des  Jeunes-Artistes 
on  a  joué  un  opéra-comique  inédit  en  un  acte  avec  chœurs  et  orchestre 
dont  M.  F.  Tourte  a  écrit  le  livret,  et  dont  M.  Martyns  a  composé  la 
musique.  C'était  lui  qui  dirigeait  l'orchestre.  L'œuvre  a  été  écoutée  avec 
faveur,  et  l'on  doit  des  encouragements  à  l'auteur  qui  dans  ce  début  a 
fait  preuve  de  savoir  et  d'inspiration.  Une  Loge  d'Opéra  et  l'amusante 
opérette  de  Léo  Delibes,  les  Deux  Vieilles  gardes,  complétaient  le  spec- 
tacle. 

,j*^  La  campagne  théâtrale  de  M.  d'Herblay  vient  de  se  clôturer  à  Lyon 
par  Robinson  Crusoé  et  l'Africaine,  les  deux  œuvres  accueillies  avec  la 
faveur  la  plus  marquée  par  le  public  exigeant  de  cette  grande  cité. 

^%  Ce  n'est  pas  seulement  en  Europe  que  Martha  est  aimée,  applau- 
die, acclamée;   nos  colonies  ont  voulu  entendre   et   apprécier  l'œuvre 


DE  PAIUS 


143 


charmante  de  M.  de  Flolow,  et  on  la  chante  en  ce  moment  à  la  Réu- 
nion (île  Bourbon),  à  la  grande  satisfaction  du  public. 

.**»  Mlle  Schneider  vient  de  partir  pour  Toulouse,  où  elle  jouo'a  spé- 
cialement Barbe-Bleue,  la  lidte-Iiclénc  et  la  Grande- Duchesse . 

***  On  nous  écrit  de  Moscou  :  «  Mlle  Désirée  Artût  vient  do  faire  dans  le 
rôle  de  Marguerite,  de  Faust,  le  plus  brillant  début.  Elle  a  trouvé  chez  les 
Moscovites  le  même  enthousiasme  qu'à  Varsovie  et  il  est  déjà  ques- 
tion d'une  saison  d'automne  qui  commencerait  à  la  fin  de  septembre, 
afin  que  la  célèbre  cantatrice  pi\t  chanter  deux  mois  ici  celte  année 
avant  d'aller  remplir  l'engagement  de  cinq  mois  qu'elle  a  contracté 
pour  Varsovie.  La  salle  était  comble  aux  deux  représentations  de  Faust 
qui  viennent  d'être  données,  et  Mlle  Artôt  y  a  été,  d'ailleurs,  fort  bien 
secondée  par  la  basse  et  le  baryton  ;  nous  l'attendons  maintenant  dans 
la  Figlia  dcl  Regimento  qui  est  annoncée.  » 

**»  Une  grande  solennité  s'organise  en  ce  moment  au  théâtre  de 
l'Opéra  pour  le  9  mai.  C'est  un  bal  qui  sera  donné  au  profit  de  l'œuvre 
internationale  de  secours  pour  les  blessés  des  armées  de  terre  et  de  mer. 


NOUVELLES  DIVERSES. 

»%  M.  Pasdeloup  prend  une  initiative  qui  ne  lui  fera  pas  moins 
d'honneur  que  celles  auxquelles  il  doit  sa  réputation.  Après  s'être  fait, 
avec  la  collaboration  d'un  orchestre  supérieur,  le  vulgarisateur  des  chefs- 
d'œuvre  de  la  musique  classique,  et  après  avoir  puissamment  contribué 
à  répandre  dans  les  masses  ce  goût  et  ce  culte  du  beau  qui  était  avant 
lui  le  privilège  du  petit  nombre,  il  veut  initier  mainlenant  le  public 
aux  sévères  beautés  de  l'art  religieux  et  acclimater  dans  nos  églises 
l'oratorio  entré  depuis  longtemps  dans  les  coutumes  lithurgiques  et  les 
mœurs  artistiques  de  l'Angleterre  et  de  l'Allemagne.  M.  Pasdeloup  a  été 
compris  et  secondé  dans  la  réalisation  de  son  dessein  par  le  chapitre 
des  Génovéfains,  haute  école  ecclésiastique  et  par  son  doyen,  l'abbé 
Freppel,  que  l'on  trouve  toujours  sympathique  aux  manifestations 
élevées  de  l'art.  C'est  ainsi  que  jeudi  prochain,  7  mai,  à  8  heures  du 
soir,  la  Passion  de  Seb.  Bach  (1"=  partie  et  chœur  final),  paroles  fran- 
çaises de  notre  collaborateur  Maurice  Bourges  et  YOde  à  Sainte-Cécile  de 
Haendel  seront  interprétées  au  Panthéon-Sainte- Geneviève,  par  400  exé- 
cutants sous  la  direction  de  Pasdeloup.  On  trouve  des  billets,  au  prix 
de  5,  3  et  1  francs,  chez  tous  les  marchands  de  musique.  Une  quête 
sera  faite  par  Mmes  la  princesse  de  Metternich,  Jules  Simon  et  Mlle  Ma- 
rie Marie.  Le  produit  des  places  et  de  la  collecte,  prélèvement  fait  des 
frais,  sera  affecté  à  la  Souscription  algérienne.  Nous  consacrerons  un 
compte  rendu  spécial  à  cette  solennité,  première  manifestation  d'un 
projet  digne  des  encouragements  de  tous  ceux  qui  s'intéressent  aux  pro- 
grès réels  de  l'art  musical  en  France. 

»%  Vendredi  de  la  semaine  dernière,  le  chevalier  Nigra,  accompagné 
du  comte  Boyl,  s'est  rendu  chez  Rossini  et  lui  a  remis,  de  la  part  du 
roi  d'Italie,  les  insignes  du  grand  cordon  de  son  nouvel  ordre  de  la 
Couronne  d'Italie. 

^*^  M.  le  duc  de  Massa,  qui  le  mois  dernier  a  fait  entendre  au  Con- 
servatoire son  nouvel  opéra  et  qui  avait  confié  à  Faure  l'exécution  du 
rôle  principal,  vient  de  faire  cadeau  à  cet  éminent  artiste  d'une  montre 
à  son  chiffre  en  brillants,  et  d'une  chaîne  d'un  travail  exquis  et  d'une 
richesse  inouïe.  Les  dessins  de  la  montre,  de  la  chaîne  et  du  médaillon, 
où  alternent  les  diamants,  le  jaspe  et  le  lapis,  ont  été  fiuts  par  M.  le 
duc  de  Massa  lui-même  avec  un  goût  et  un  art  merveilleux  Le  boîtier 
porte  à  l'intérieur  cette  mention  :  Souvenir  affectueux  et  reconnaissant 
de  la  soirée  du  28  mars  18G8. 

^*^  Une  lettre  de  M.  Achille  Denis,  placée  en  tête  du  nimiéro  de  la 
Reuue  et  Gazelle  des  Théâires  qui  a  paru  jeudi ,  annonce  qu'il  quitte, 
pour  des  motifs  purement  personnels  et  malgré  les  instances  du  nou- 
veau propriétaire,  M.  Jules  Mugnier,  la  rédaction  en  chef  de  ce  journal, 
auquel  sa  collaboration  n'a  pas  fait  défaut  une  minute  depuis  vingt-cinq 
ans.  Cette  retraite  de  M.  Achille  Denis  sera  une  grande  perte  XiOurXa.  Gazette 
des  Théâtres,  dont  il  était  l'âme  et  dans  laquelle  il  avait  maintes  fois 
traité,  avec  une  grande  autorité,  des  questions  de  la  plus  haute  portée 
artistique. 

^*^  L'établissement  thermal  de  Spa  ne  veut  pas  rester  en  arrière  de 
ses  concurrents ,  et  il  vient  de  faire  connaître  le  programme  des  bril- 
lants engagements  conclus  par  lui  pour  la  saison.  On  y  remarque  : 
pour  le  chant  :  Mlle  Brunetti ,  Mme  Léonard,  Mlle  Schœder;  Géraldi, 
Jourdan,  Everardi,  Varnols.  —  Pour  le  piano  :  M.  de  Bériot;  Mme  Es- 
cudier-Kastner,  Mlles  Palloc,  Brandt.  —  Pour  divers  instruments: 
MM.  De  Vroye,  flûte;  Arban,  cornet  à  pistons;  Léonard,  violon;  Jehin- 
Prume,  violon;  Dunckler,  violoncelle;  Rcuschell,  violoncelle. 

»*^  On  écrit  de  Saint-Pétersbourg  :  «  La  symplionie  héroïque  Jeanne 
d'Arc,  pour  orchestre,  chœurs  et  soli,  d'Alfred  Holmes,  vient  d'être  exé- 
cutée deux  fois  au  Grand-Opéra  de  Saint-Pétersbourg  avec  un  succès 
inouï.  Rappelé  cinq  fois  par  le  public  et  l'orchestre ,  M.  Alfred  Holmes 
s'est  vu  bientôt  entouré  de  plusieurs  membres  de  la  famille  impériale, 


entre  autres  de  S.  A.  L  le  prince  d'Oldenbourg,  qui  est  lui-même  com- 
positeur. M.  Holmes  a  dirigé  lui-même  les  WO  musiciens  (chœurs  et 
orchestre)  que  l'Opéra  avait  mis  à  sa  disposition.  Jeanne  d'Arc  a  été 
chantée  en  français.  La  direction  dos  tliéâtres  impériaux  de  Saint-Péters- 
bourg est  en  pourparlers  pour  l'achat  de  la  partition  de  Jeanne  d'Arc. 
On  parle  de  4,000  roubles  (i 5,000  francs)  pour  la  Russie  seulement. 
M.  Holmes  garderait  la  propriété  de  son  œuvre  pour  le  reste  de  l'Eu- 
rope. » 

,*»  Le  directeur  du  théâtre  du  Parc,  à  Bruxelles,  après  avoir  acheté 
la  partition  d'orchestre  de  Geneviève  de  ttrabant,  croyait  avoir  seul  le  droit 
de  représenter  cet  ouvrage;  mais  une  direction  rivale,  forte  du  traité 
franco-belge,  monte  le  même  opéra  sans  l'autorisation  des  auteurs.  Ce 
fait,  qui  soulève  une  question  très-intéressante,  vient  d'être  porté  devant 
les  tribunaux. 

***  L'éditeur  Gérard  vient  de  publier  deux  nouveaux  morceaux  de 
violoncelle  par  Seligmann  ;  ÏAppassionalo  et  A  travers  champs  continuent 
la  série  de  ces  compositions  pleines  d'originalité  et  de  sentiment,  comme 
la  Kouitra,  le  Secrel,  Flocons  de  neige,  la  Guzla,  Dans  les  nuages.  Sépa- 
ration, etc.,  etc.,  que  les  amateurs  tiennent  en  haute  estime,  et  qui  ont 
valu  de  si  nombreux  succès  à  Seligmann  en  France  et  à  l'étranger. 

,,\  Arban  vient  de  partir  pour  Madrid,  où  il  est  engagé  pour  diriger 
les  concerts  d'été  donnés  au  Théâtre  de  la  Zarzuela. 

***  On  parle  de  l'arrivée  à  Londres  d'une  jeune  femme  de  Batavia 
qui  joue  simultanément  sur  le  piano  deux  airs  de  la  main  droite  et 
deux  autres  de  la  main  gauche,  tout  en  chantant  un  cinquième  air. 
Voilà  Toni  Blind,  le  fameux  pianiste  nègre,  singulièrement  distancé  par 
ce  nouveau  phénomène  indou  ! 

_***  Le  mauvais  temps  n'a  pas  permis  à  la  direction  du  Jardin  Ma- 
bille  de  faire  samedi  sa  réouverture;  elle  a  dû  être  ajournée  à  mercredi 
dernier. 

t*t  M.  Pierre  Gaudonnet,  l'un  de  nos  bons  facteurs  de  pianos,  vient 
d'avoir  la  douleur  de  perdre  son  fils  aîné,  dont  les  études  spéciales  pro- 
mettaient un  brillant  coopérateur  à  la  facture  instrumentale  parisienne. 

ÉTRANGER 

,;;*»  Bruxelles.  —  Mme  Sasse  partie,  le  grand-opéra  disparaît  de  l'affiche. 
L'opéra-comique  et  l'opéra  italien  défraieront  le  répertoire  pendant  le 
dernier  mois  de  la  saison.  La  troupe  italienne  commence  ses  représen- 
tations le  1"  mai.  En  voici  la  composition  :  Mmes  Carlotta  Carrozzi- 
Zucchi,  Paolina  Castri  et  E.  Muzio;  Mlles  Lucia  CambrcM  et  Arnoldi.  — 
Ténors  :  MM.  Tombesi,  Melchiore  Vidal  et  Arnoldi.  —  Barytons  :  MM.  Ver- 
ger et  Capurro  Tophany.  —  Première  basse  :  M.  Fiorizelli.  —  Chef  d'or- 
chestre. M.  Emmanuel  Muzio. 

„;**  londres.— D'après  le  bruit  qui  court,  Her  Majesty's  Théâtre  seradéci" 
dément  reconstruit;  le  prince  de  Galles  en  posera  la  première  pierre  à 
son  retour  à  Londres.  L'architecte  choisi  est  M.  Charles  Lee.  Le  devis 
des  frais  s'élève  à  65,000  livres  sterling.  —  A  Drury-Lane  Mlle  Tiet- 
jens  continue  à  enthousiasmer  le  public  dans  Fidelio  et  Norma.  —  Hier 
soir  samedi  a  dû  avoir  lieu  le  début  de  Mlle  Nilsson  dans  la  Traviata.  — 
A  Covent-Garden,  le  ténor  Lefranc  a  fait  sa  première  apparition,  mardi 
dans  Guillaume  Tell;  trop  ému  pour  disposer  de  tous  ses  moyens,  il  n'a 
produit  que  peu  d'effet.  — -  Pauline  Lucca  fera  sans  doute  sa  rentrée  la 
semaine  prochaine. 

.:jf*,^  Liverpool.  —  La  Grœnde-Duchfsse  de  Gérolstcin,  donnée  pour  la 
première  fois  le  27  avril,  avec  l'excellente  Mme  Howard  Paul  dans  le 
rôle  principal ,  est  en  passe  de  devenir  une  des  grandes  attractions  du 
moment. 

,;;**  Hambourg.  -  Un  comité  de  dilettantes  a  acheté  dernièrement  à 
Londres  d2C  volumes  de  partitions  manuscrites,  qui  contiennent  tous  les 
opéras  et  les  oratorios  de  Haendel,  écrits  de  sa  propre  main  et  chargés 
par  lui  de  remarques  et  d'interpolations.  Ces  précieuses  reliques  ont  été 
acquises  au  prix  relativement  minime  de  800  livres  sterling.  En  An- 
gleterre, on  regrette  vivement  que  le  Brilish  Muséum  les  ait  laissé  échap- 
per. Les  manuscrits  de  Haendel  seront  déposés  à  la  bibliothèque  de  la 
ville  de  Hambourg. 

*■**  Vienne.  —  Les  représentations  du  célèbre  ténor  Sontheim,  de 
Stuttgard,  attirent  la  foule  à  l'Opéra.  Ce  chanteur,  jeune  encore,  et  au- 
jourd'hui l'une  des  gloires  de  l'art  lyrique  en  Allemagne,  a  joué  Lucie, 
Robert  le  Diable  et  la  Juive,  de  manière  à  prendre  place  auprès  des 
Nourrit,  des  Duprez  et  des  Roger. 

**„  Turin.  —  Pour  fêler  les  fiançailles  du  prince  Humbert  et  de  la 
princesse  Marguerite,  le  théâtre  Royal  à  rouvert  ses  portes,  par  extraor- 
dinaire, et  a  donné  quelques  représentations  de  Dinorah  avec  un  succès 
énorme.  C'est  encore  Dinorah  qui  a  été  choisie  pour  la  soirée  de  gala 
à  l'occasion  du  mariage.  Mlle  Camille  de  Maesen  est  ravissante  dans  le 
principal  rôle. 


■  :  s.  DUFOUB. 


144  REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE  DE  PAKIS. 


POUR  PARAITRE  CETTE  SEMAINE 
CifEK  G.  BRAlVnUS  ET  S.  nUFOlJR,  Ë»1T£URS,  103,  RUE  DIS  RICHEIilKU. 

Édition  Populaire 


DE 


PARTITIONS  D'OPÉRAS,  D'OPÉRAS-liOMIQUES  ET  D'OPÉRETTES 

Paroles  et  Sloslque  sanis  accompai^nciueiit 

FORMAT  DE  POCHE.  Avec  analyse  de  la  pièce.  FORMAT  DE  POCHE. 


N»  1 .   Adber.     FRA    MA^^OIiO;     Opéra -comique,  net  :  3  fr. 

NO  2.  Adam.     LE   POSTILLOM    DE    LOI^JUMEAU,     op.-com.,net:  3  fr. 

POUR  PARAITRE  LE  MOIS  PROCHAIN  : 

N"  3.  ROBERT  LE  DIABLE. net  :  4  fr.  |    N»  4.  MARTHA  (quatre  actes) net  :  4  fr. 

N°  5.   LES  DRAGONS  DE  VILLARS net  :  3  fr. 

(Sera  continué.) 

N.  B. — Ces  éditions,  d'un  format  très-commode  et  d'un  bon  marché  exceptionnel,  se  recommandent  spécialement  aux  artistes  dramatiques 

pour  remplacer  les  rôles  copiés,  aux  spectateurs  pour  suivre  la  musique  et  la  pièce  à  la  représentation,  aux  sociétés  chorales,  etc. 

EN    VENTE 

FLEUR  DE  TBÉ 

Opéra  bouffe  en  trois  actes, 

PAROLES     DE     MM.     ALFRED     DURU     ET     HENRI     CHIVOT,     MUSIQUE     DE 


CHARLES  LECOCQ 


Les    Airs    de     Gliant    détachés 

1.  Chanson  de  la  Cantinière,  chantée  par  Mlle  Irma  6.  Confidence,  chantée  par  M.  Léonce:  Je  suis  né  dans 

le  Japon 3    » 


Marié  :   Vivandière,  cantinière,  parlez,  que  désirez- 
vous?  3  7S 

2.  Couplets,  chantés  par  M.  Sytter  :  J'ai  couru  grossir 

la  foule 3    » 

3.  Duo,  chanté  par   Mlle   Lucile  Cabel    et  M.  Sytter  :  A 

l'éviter  j'ai  réussi 7  SO 

4.  Chinoiserie,  chantée  par  MJVI.  Désiré  et  Léonce  :   Je 

suis  clairvoyant  comme  un  sphinx 4  SO 

4  bis.  La  même,  arrangée  à  une  voix 3    » 

5.  Trio,  chanté  par  MM.  Désiré,  Léonce  et  Sytter  :  La  loi. 

du  Tsinn  est  fort  claire 9     » 


7.  Ariette,    chantée   par  Mlle  Irma  Marié  :  En  tous  pays 

l'homme  est  un  être  qui  traite  fort  mal 3  75 

8.  Romance,  chantée  par  M.  Sytter  :   Césarine    à   mes 

vœux  docile 3     » 

8  bis.  La  même,  transposée  pour  baryton 3    » 

9.  Duo,  chanté  par  Mlle  Marié  et  M.  Sytter:  Rappelle-toi. ..     9    » 

9  bis.  Couplets  de  l'Alcôve,  extraits  du  Duo,  chantés 

par  M.  Sytter  :  Ensuite  dans  la  nuit  obscure 3    » 

10.  Ronde  du  Clicquot,  chantée  par  Mlle  Irma  Marié, 

MM.  Désiré  et  Léonce:  Ce  n'est  pas  un  vin  de  carême    2  50 


E.  KETTERER.  Fleur  de  Thé,  galop  de  salon,  pour  le  piano  :  7  fr.  50. 
ARBAN.  Quadrille  pour  le  piano,  4  50.     —  ROQUES  et  STRAUSS.  Clicquot-Polka  pour  le  piano,  4  f. 

STRAUSS.  Grande  Valse  pour  le  piano,  5  fr. 

POUR  PARAITRE  INCESSAMMENT 

IiA    PARTITIOM    POUR    CBLAMT    ET    PIAMO 


CRAMER.  Bouquets  de  Mélodies  pour  le  piano.     |       A.  MEY.  Deuxième   Quadrille  pour  le  piano. 


UPBIHEBIE  CEKTBALE   bES  CHEHINS  DE   FEB     —   A.   CHAIX   ET  C,  BUE  BEBGÈBE,  30,   A  PABIS. 


BUREAUX    A    PARIS  :    BOULEVARD   DES   ITALIENS.  1. 


5S'  Année. 


N«  19. 


10  Mai  1868. 


ON  S'ABONNE  : 

Dans  les  Dépnrlcments  et  ft  l'Étranger, 

chez  tous  les  Marchands  de  Musique,  Ifs  Librafrï 

et  QUI  DurcQux  der  Messageries  et  des  Postes. 


REVUE 


PRIX    DE    L'ABONNEMENT: 


Diipurlcments,  Belgique  et  SuîBse....    30  i 

Étranger 3*  ' 

Le  Journal  paraît  le  Dimanche. 


TTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


SOMMAIRE .  —  Société  des  Oratorios,  première  année,  par  Em.  Hatbiea  de 
Monter.  —  Séance  solennelle  des  Orphéons  de  Paris,  par  le  même.  —  Tliéâ- 
tre  du  Palais-Royal  :  le  Château  à  Toto,  opéra  bouffe  en  trois  actes,  paroles  de 
MM.  Henri  Meilhac  et  Ludovic  Halévy,  musique  de  J.  Offenbach.  —  Théâtre 
des  Variétés  :  reprise  du  Pont  des  Soupirs,  —  Chapelle  des  Tuileries,  première 
communion  du  Prince-Impérial.  —  Concert  de  M.  Gerusheim,  par  Charles 
Bannelier.  —  Revue  des  théâtres,  par  D,  A.  D.  Salnt-Vves. —  Con- 
certs et  auditions  musicales  de  la  semaine.  —  Nouvelles  des  théâtres  lyriques. 
—  Nouvelles  diverses.  —  Annonces. 


SOCIÉTÉ  DES  ORATORIOS. 

FOEMIÈRE     ANNÉE. 

Première  exécution  le  7  mai,  au  Panthéon,  sous  la  direction  de  J .  Pasdeloup. 

IM  Passion,  de  J.-S.  Bacli.  —  Odo  à  sainte  Cécile, 
de  Hacndel, 

Il  pourrait  bien  se  faire  que  le  7  mai  dernier  devînt  une  des  dates 
saillantes  de  notre  histoire  artistique  contemporaine.  Depuis  jeudi 
soir,  —  le  fait  a  été  constaté  par  plus  de  six  mille  témoins,  — 
Paris  possède,  en  effet,  une  Société  française  d'Oratorios  régulière- 
ment constituée,  composée  de  400  membres  d'un  mérite  réel,  ex- 
cellemment dirigée  par  le  propagateur  le  plus  convaincu  et  le  plus 
heureux  des  chefs-d'œuvre  du  passé,  animée  d'un  zèle  que  l'étude 
et  le  respect  des  maîtres  retremperont  sans  cesse,  armée  de  bonne 
volonté  et  de  persévérance.  En  raison  même  de  tels  éléments  de 
succès  et  grâce  à  cette  organisation  permanente  succédant  à  des 
manifestations  isolées  ou  à  des  tentatives  défectueuses,  on  peut 
croire  que  le  jour  est  proche  oii  point  ne  sera  besoin,  pour  enten- 
dre de  grande  musique  religieuse,  de  traverser  la  Manche  ou  le 
Rhin.  Le  temps  aidant,  et  l'éducation  musicale  se  faisant  insensi- 
blement, car,  même  dans  le  cercle  régulier  et  gradué  des  admira- 
tions légitimes,  une  certaine  latitude  est  à  laisser  à  la  diversité  des 
goûts,  des  esprits  et  des  âges,  il  est  permis  d'espérer  la  formation 
d'un  public  qui  n'écoutera  plus  les  chants  sacrés  du  dernier  siècle 
comme  on  écoute,  aux  distributions  de  prix,  le  discours  latin  du 
professeur  de  rhétorique,  alors  qu'il  y  a  toujours  dans  l'auditoire 
une  majorité  qui  n'y  apprend  rien  et  une  minorité  qui  n'y  com- 
prend pas  grand'chose. 


En  choisissant,  pour  sa  première  exécution,  la  Passion  de  Bach 
et  VOde  à  sainte  Cécile  de  Haendel,  la  Société  des  Oratorios  a  dé- 
terminé nettement  son  caractère  et  son  but.  Quel  portique  plus 
grandiose  donner  à  son  initiative?  Pouvait-elle,  dès  le  début,  s'ou- 
vrir à  elle-même  un  horizon  plus  large,  plus  imposant,  plus  lumi- 
neux? En  se  plaçant  sous  l'égide  de  la  gloire  des  deux  géants  de 
la  musique  du  xvin°  siècle,  en  proclamant  cette  gloire,  en  lui 
trouvant  de  nouvelles  raisons  d'être  et  de  s'accroître,  en  y  appor- 
tant un  nouveau  et  solennel  tribut,  l'association  nouvelle,  présidée 
par  M.  Pasdeloup,  s'est  honorée  elle-même,  et  par  ce  coup  d'éclat 
elle  a  assuré  son  avenir. 

La  Société  des  Oratorios  n'avait-elle  pas  tout  d'abord  à  prouver 
que  c'est  le  privilège  de  la  vraie  grandeur  de  se  dessiner  davan- 
tage à  mesure  qu'on  s'éloigne,  et  de  commander  à  distance?  La 
démonstration  a  été  victorieuse.  De  cette  interprétation  souveraine 
se  dégageait  le  sentiment  du  beau  qui  éclaire  d'un  si  vif  reflet  les 
conceptions  colossales  de  Haendel  et  de  Séb.  Bach.  Ces  voix  disci- 
plinées, cet  orchestre  familiarisé  avec  la  traduction  des  pages  nobles 
entre  toutes,  cet  ensemble  magistral,  donnaient  un  relief  saisissant  au 
sentiment  mélodique  qui  domine  dans  toutes  les  parties  sévèrement 
travaillées  de  VOde  à  sainte  Cécile.  La  foule  a  dû  également  re- 
connaître que  Bach,  c'était  le  génie  étendu  par  la  réflexion  concen- 
trée, fécondé  par  la  profondeur  de  l'expression,  par  la  hardiesse 
et  l'originalité  de  l'instrumentation.  Dans  cette  Passion,  écrite  à 
deux  chœurs  et  deux  orchestres,  le  vaste  cerveau,  la  grande  âme 
du  vieux  maître  ont  des  mouvements  d'un  pathétique  ardent  et 
sublime.  Il  est  la  voix  biblique  éloquente  par  excellence,  simple, 
poétique,  souJuinement  tonnante.  Là  même  où  il  a  son  cours  rigide 
et  son  flot  impérieux,  il  y  roule  des  trésors  de  douceur  et  de  mé- 
lancolie. C'est  par  tous  ces  caractères  que  Bach  est  unique,  et  que, 
quelle  que  soit  la  nature  de  ses  œuvres,  il  reste  le  modèle  du 
sentiment  religieux  le  plus  haut,  le  plus  austère,  et  de  la  musique 
sacrée  la  plus  variée  de  formes,  de  combinaisons,  et  la  plus  inté- 
ressante. 

L'orchestre  et  les  chœurs  et  le  grand  orgue  de  Cavaillé-Coll 
étaient  placés  sur  une  vaste  estrade  construite  en  avant  du  grand 
portail  ;  disposition  favorable  aux  conditions  de  sonorité  du  Pan- 
théon . 

Au  nombre  des  morceaux  de  la  première   partie   de  l'Oratorio 


U6 


lŒVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


de  Bach  qui  ont  le  plus  vivement  impressionné  l'auditoire,  je  ci- 
terai le  premier  récit  de  Jésus  :  La  Pâqve  approche;  —  le  large 
et  sombre  choral  qui  suit:  Qu'avais-tu  fait ,  Jésus,  sauveur  ai- 
mable ; — tout  le  fragment  compris  dans  les  n°s  S,  6  et  7  de  la  par- 
tition, dialogue  mouvementé  qui  exprime  d'une  manière  dramati- 
que la  colère  des  compagnons  de  Jésus  contre  la  femme  de  Be- 
thanie;  —  la  réponse  de  Jésus  empreinte  d'une  douceur  péné- 
trante ;  —  l'air  de  soprano,  0  douleur  I  saigne,  pauvre  cœur  ;  — 
l'air  de  basse,  le  duo  et  chœur  des  fidèles,  n"  33,  que  l'on  aurait 
certainement  redemandé,  si  la  sainteté  du  lieu  n'avait  pas  inter- 
dit toute  manifestation  de  ce  genre;  l'air  de  ténor.  Je  veux  veiller 
pottr  (ci  sans  cesse,  une  inspiration  réellement  sublime;  — la 
phrase  persistante  do  hautbois  pleurant  avec  le  Christ  prosterné 
sur  le  mont  des  Oliviers;  les  n™  28  et  30  qui  inspirèrent  à  Alfred 
de  Vigny  les  plus  beaux  peut-être  de  ses  derniers  vers: 

«  Alors  il  était  nuit  et  Jésus  marchait  seul, 

Vêtu  de  blanc  ainsi  qu'un  mort  de  son  linceul  ; 

Les  disciples  dormaient  au  pied  de  la  colline. 

Parmi  les  oliviers  qu'un  vent  sinistre  incline, 

Jésus  marche  à  grands  pas  en  frissonnant  comme  eux... 

Comme  un  marbre  de  deuil  tout  le  ciel  était  noir. 

Dans  le  bois  il  entendit  des  pas, 

Et  puis  il  vit  rôder  la  torche  de  Judas.  » 

Enfin  le  chœur  final:  N'entends-tu  pas  nos  voix  fidèles  a  magnifi- 
quement couronné  la  première  partie  de  l'Oratorio.  L'exécution 
générale,  je  le  répète,  a  approché  aussi  près  que  possible  de  la 
perfection.  Toutefois,  les  mouvements,  ceux  des  chorals  surtout, 
étaient  un  peu  précipités.  Les  chœurs,  dont  le  rôle  important  est 
semblable  à  l'action  des  chœurs  dans  la  tragédie  antique,  ont 
merveilleusement  marché,  sauf  quelques  hésitations  d'attaque  au 
début.  Tout  était  travaillé,  su  et  fini  jusque  dans  les  moindres  dé- 
tails. Ai-je  besoiiw  d'ajouter  que  les  soli  ont  été  chantés  par  JMM. 
Bollaert,  Solon,  etc.,  avec  un  soin,  un  goût  et  une  assurance  qui 
témoignaient  de  sérieuses  études.  Quant  à  la  partie  de  Jésus,  son 
interprétation  avait  été  confiée  à  la  haute  intelligence  artistique,  à 
la  voix  splendide  et  au  grand  art  de  Faure,  le  seul  chanteur  sans 
contredit  qui  pouvait  remplir  dignemect  celte  lourde,  mais  glo- 
rieuse tâche. 

On  sait  que  les  paroles  françaises  de  la  Passion  sont  dues  à 
notre  collaborateur  Maurice  Bourges,  qui  a  écrit  également  les  re- 
marquables paraphrases  du  Paulus  et  de  YElie  de  Mendelssohn. 

Le  mouvement,  l'ampleur  et  l'éclat  de  VOde  de  Haendel  ont  pu 
se  développer  en  toute  liberté  dans  le  vaisseau  sonore  du  Pan- 
théon. Les  airs  de  soprano,  chantés  par  Mme  Vandenheuvel  avec 
une  exacte  compréhension  de  cette  musique,  un  style  irréprochable 
et  le  plus  grand  respect  delà  partition;  les  soli  de  trompette;  la  mar- 
che d'un  caractère  si  noble;  le  pompeux  récit  :  Quand  la  brillante 
Cécile,  enfin  les  splendeurs  harmoniques  de  la  péroraison,  laisse- 
ront de  durables  souvenirs  chez  tous  ceux,  et  le  nombre  en  est 
grand,  heureusement,  qui  ont  assisté  à  cette  soirée  mémorable.  11 
est  des  choses  qui  impressionnent  trop  vivement  pour  que  l'on  es- 
saie même  de  traduire  l'émotion  que  l'on  a  éprouvée.  Au  surplus, 
il  serait  pour  le  moins  inutile  de  refaire  en  un  compte  rendu  ra- 
pide l'analyse  d'œuvres  dont  les  beautés  sont  depuis  longtemps 
scrutées,  dévoilées  et  fixées  par  la  critique  philosophique.  Que 
M.  Pasdeloup,  ses  collaborateurs  et  la  Société  des  Oratorios  tout 
entière  reçoivent  donc  l'expression  publique  de  notre  admiration  ; 
qu'ils  nous  permettent  d'espérer  l'audition  prochaine  de  VElie  et 
du  Paulus  de  Mendelssohn  ;  du  Christ  aux  Oliviers,  de  Beethoven; 
de  la  Création,  d'Haydn;  de  la  Mort  du  Christ,  de  Gratin;  du 
Samson  et  du  Judas  Macchabée,  de  Haendel,  et  de  tant  d'autres 
de  ces  poëmes  lyriques  religieux,  populaires  en  Allemagne  et  en 


Angleterre,  dont  l'harmonie  —  pour  emprunter  leur  peinture  à 
l'éloquente  et  patriotique  allocution  du  doyen  des  Génovéfains  — 
«  peut  seule  s'élever,  avec  une  autorité  égale  à  celle  de  la  parole 
du  prêtre,  dans  le  recueillement  du  sanctuaire,  et  qui  traduisent 
en  un  langage  presque  divin  la  croyance  chrétienne  tout  entière, 
depuis  le  tonnerre  du  Sinaï  jusqu'à  la  plainte  funèbre  du  Gol- 
gotha.  » 

J'ai  dit  en  commençant  quelle  foule  —  considérable  au  point 
de  renverser  les  barrières  de  séparation  du  transept  —  remplissait 
l'église  Sainte-Geneviève,  du  portail  au  chevet,  (j'était  une  foule 
de  choix,  parmi  laquelle  on  remarquait  un  grand  nombre  de  nota- 
bilités politiques,  artistiques  et  littéraires,  plusieurs  députés,  des 
chambellans  de  l'Empereur,  le  préfet  de  la  Seine,  qui  est  resté 
jusqu'à  la  fin ,  les  critiques  d'art  de  presque  tous  les  journaux  de 
Paris,  etc.  Aux  portes  ((uêtaient  Mmes  la  princesse  de  Mettemich, 
de  Grandval,  Jules  Simon,  Mlle  Marie  Marie,  et  le  produit  de 
leur  collecte  a  été  très-fructueux. 

Au  point  de  vue  artistique,  la  création  de  la  Société  des  Orato- 
rios exercera  certainement  mie  influence  salutaire.  Le  côté  par  le- 
quel le  grand  art  religieux  peut  intéresser  notre  société  musicale, 
à  une  époque  oîi  la  pensée  est  absente,  quand  elle  n'est  pas  sacri- 
fiée à  la  forme,  ce  côté  se  dessine  nettement  et  va  se  rajeunir.  La 
musique  sacrée  du  xviu'^  siècle  replace  des  barrières ,  édicté  des 
lois,  s'appuie  sur  des  principes  dont  l'étude,  dont  le  simple  exa- 
men même,  quand  cela  n'est  pas  poussé  trop  loin,  a  bien  ses  avan- 
tages. Il  n'est  pas  mauvais  de  se  gêner  un  peu  et  de  se  contenir 
volontairement  quand  le  stimulant  est  partout  alentour  :  une  cein- 
ture un  peu  serrée  aide  à  la  marche.  De  tout  temps,  la  musique 
sacrée  a  été  une  forte  nourrice  des  intelligences,  qu'elle  a  aguer- 
ries et  comme  exercées  par  sa  calme  et  sévère  contrainte.  Elle  peut 
l'être  encore. 

L'œuvre  si  magnifiquement  inaugurée,  il  y  a  trois  jours,  par 
Pasdeloup,  vivra  et  grandira.  Cette  prospérité,  cette  extension  popu- 
laire importe  beaucoup,  c'est  du  moins  mon  humble  avis,  à  l'élé- 
vation ,  à  la  substance ,  je  dirais  presque  à  l'hygiène  des  hautes 
études  musicales  dans  notre  pays.  Ces  harmonies  sublimes,  qui  ont 
réveillé  les  échos  endormis  du  temple  national  et  retenti  jusque 
dans  la  nuit  des  tombeaux  illustres,  ne  sauraient,  en  s'éteignant 
subitement,  laisser  après  elles  le  vide,  le  doute,  l'oubli.  11  faut 
qu'elles  s'élèvent  bientôt,  plus  éclatantes  encore,  qu'elles  réson- 
nent souvent,  que,  de  ces  hauteurs  classiques,  elles  se  répandent 
sur  Paris,  sur  la  France,  empruntant  —  et  pourquoi  non?  —  de 
par  la  fraternité  du  génie,  à  Jean-Jacques  sa  fierté,  à  Voltaire  son 
bon  sens  et  sa  raison.  Le  public  sera  reconnaissant,  aux  artistes 
de  talent  et  d'initiative  qui  composent  la  Société  des  Oratorios,  de 
ce  plaisir  d'un  ordre  élevé  et  de  cet  enseignement  véritablement 
supérieur. 

Em.  Mathieu  DE  MONTER. 


SËÂNCE  SOLENNELLE  DE  L'ORPHEON  DE  PARIS. 

{Division  de  la  rive  droite.) 

Cette  réunion  artistique  et  populaire  qui  s'est  tenue  dimanche 
dernier  au  cirque  Napoléon,  sous  la  présidence  de  M.  Alfred  Blan- 
che, secrétaire  général  de  la  préfecture  de  la  Seine,  et  des  mem- 
bres de  la  Commission  de  surveillance  de  l'enseignement  du 
chant,  a  été,  le  programme  naturellement  excepté,  l'exacte  repro- 
duction de  la  réunion  précédente  de  la  rive  gauche.  Même  af- 
fluence  de  monde  et  même  monde,  couronnement  traditionnel  de 
l'honnête  Wilhem,  dont  le  buste  semble  n'en  pouvoir  mais,  même 
enthousiasme  bruyant,  mêmes  ovations  faciles. 

Le  programme  de  la  séance  comprenait  une   seconde  audition 


DE  PARIS. 


147 


du  chœur  C'est  Dieu,  de  M.  Léo  Dclibes,  dont  j'ai  parlé  à  propos 
du  festival  de  la  rive  gauche.  Les  voix  pures  et  bien  posées  des 
enfants  —  le  temps  était  superbe  —  l'ont  parfaitement  rendu. 
L'auteur  s'attendait  à  la  petite  ovation  habituelle;  elle  ne  lui  a  été 
décernée  toutefois  par  les  enfants  qui  rappellent  indiU'éremmcnt 
Haydn,  Gounod,  Mozart  ou  Delibes,  qu'après  son  second  chœur 
En  avanil  dont  l'exécution  lourde  m'a  empêché  d'apprécier  la 
couleur  pittoresque  et  l'allure  en  dehors. 

Je  ne  sais  trop  pourquoi  V Entrée  des  Croisés  à  Constantinople 
a  eu  les  honneurs  d'une  exécution  nouvelle.  Je  persiste  dans 
mon  opinion  à  l'égard  de  ce  pastiche  choral,  indigne  de  l'Orphéon 
parisien,  et  dont  le  refrain  pitoyable  semble  destiné  à  accompa- 
gner les  exei'cices  des  écuyers  forains.  Il  est  vrai  que  dans  un  Cir- 
que ! . . .  Mais  pourquoi  tant  appuyer  sur  cette  coïncidence  de 
rhythme  et  d'appropriation'? /Irf/eM,  montagnes!  de  M.  le  prince  de 
Polignac,  écrit  un  peu  haut,  est  d'une  jolie  couleur,  d'une  coupe 
élégante,   d'une   vive    inspiration. 

Il  est  assez  singulier  d'entendre  dans  ce  morceau  douze  cents  fil- 
lettes des  écoles  du  quartier  du  Palais-Royal,  des  Halles,  St-Georges, 
du  Temple,  de  la  Bastille,  chanter  àpleines  voix  :  Chassons  !  En  chasse! 
Vive  la  chasse!  La  commission  de  surveillance  du  chant  est  si 
sévère,  et  à  tant  de  titres  légitimes,  sur  le  choix  des  paroles  des 
chœurs,  que  je  ne  m'explique  pas  trop  le  développement  musical 
de  cette  ardeur  cynégétique  dans  les  rangs  féminins  de  la  bour- 
geoisie parisienne.  Quant  au  nouvel  ensemble  vocal  de  Gounod, 
le  Vendredi-Saint,  je  m'associe  complètement  au  jugement  de  mon 
collaborateur  Charles  Bannelier  :  ce  chœur  de  facture  instrumen- 
tale, aux  modulations  difficiles,  aux  combinaisons  de  timbres  heur- 
tées, à  la  contexture  pénible,  et  dont  le  milieu  seul  est  bien  traité, 
n'ajoutera  rien  à  la  réputation  d'un  maître  habile  entre  tous,  dans 
le  grand  art  d'écrire  pour  les  masses.  Je  louerai  sans  réserve  Gloire  au 
Seigneur  de  Silcher  :  cela  est  large,  solennel,  et  gagnerait  à  être 
chanté  par  les  sopranes  surtout  avec  plus  de  modération  ;  —  ainsi 
que  le  Chant  de  l'Alouette  (Mendelssohn),  adorable  de  jeunesse,  de 
fraîcheur,  et  où  l'on  entend  comme  des  battements  d'ailes,  pour 
arriver  aux  chœurs  suédois  et  norvégiens  que  le  public  a  voulu 
acclamer  deux  fois,  qui  étaient  le  principal  attrait  du  programme 
et  qui  sont  devenus  le  succès  du  festival  orpliéonique  de  diman- 
che dernier J'aurais  bien  quelques    raisons  de    parler  de 

ces  ravissantes  mélodies  populaires  du  pays  des  lacs,  pour  avoir 
cousu  à  leur  manteau  constellé  d'humbles  rimes  françaises,  mais 
M.  Maurice  Bourges  a  fait  de  la  musique  et  de  la  poésie  lyrique 
de  l'extrême  Nord  l'objet  de  longues  et  sérieuses  études  dont  nos 
lecteurs  pourront  apprécier,  dans  un  article  qui  paraîtra  prochai- 
nement, l'intérêt,  le  charme  et  le  mérite. 

Em.  Mathieu  UE  MONTER. 


THEATRE  DU  PALAIS-ROYAL. 

liE  CUATEAU  A  TOTO, 

Opéra-bou^e  en  trois  actes,  paroles  de  MM.  Henri  Meilhac  et 
Ludovic  Halévy,  musique  de  M.  Jacques  OrrENBACH. 

(Première  représentalion  le  6  mai  1868.) 

Voilà  encore  une  fois  deux  de  nos  théâtres  de  genre  livrés  ex- 
clusivement aux  joyeux  refrains  d'Offenbach .  Si  c'est  un  mal  pour 
les  membres  de  la  Société  des  auteurs  qui  étaient  naguère  les  four- 
nisseurs brevetés  de  ces  scènes,  à  qui  s'en  prendre'?  Au  public 
qui  traite  en  enfant  gâté  le  père  â.'Orphée  aux  Enfers  et  qu| 
donne  ses  préférences  aux  œuvres  marquées  de  son  cachet.  Ce 
n'est  pas  assurément  une  tâche  médiocre  pour  cet  heureux 
compositeur  de  justifier    la  foi  qu'on  a  en  lui  et  de  se  maintenir 


sans  broncher  au  niveau  de  l'immense  notoriété  que  ses  opéras- 
bouffes  lui  ont  conquise. 

Le  Château  à  Toto  continuera-t-il  cette  série  de  succès  à  la- 
quelle nous  assistons  depuis  quelques  années?  Nous  n'en  serions 
pas  surpris,  tant  est  grande  l'attraction  exercée  par  le  nom  d'Of- 
fenbach. Et  cependant,  il  faut  bien  en  convenir,  ses  collaborateurs 
ordinaires  l'ont  souvent  mieux  servi  que  dans  cette  circonstance. 
C'est  peut-être  un  peu  la  faute  de  leur  donnée,  qui  n'est  pas 
franchement  comique  et  qui  laisse  après  elle  une  arrière-pensée 
quelque  peu  empreinte  de  mélancolie.  Ce  petit  crevé  qui,  à  peine 
âgé  de  vingt  ans,  a  dépensé  des  sommes  fabuleuses  avec  des  filles 
de  portier,  comme  il  le  dit  lui-même,  et  qui  se  voit  forcé  de  vendre 
le  château  de  ses  pères;  sa  dernière  maîtresse  qui  essaie  de  séduire 
un  notaire  pour  se  faire  adjuger  au  plus  bas  prix  le  susdit  château; 
puis  l'amour  d'une  petite  fille  qui  le  rachète  en  sous-main  pour  le 
rendre  à  Toto  dont  elle  veut  devenir  la  femme  ;  tout  cela  est-il 
donc  d'une  gaieté  bien  folle?  Nous  supposons  que  MM.  Meilhac  et 
Halévy  auront  été  séduits  par  l'idée  de  parodier  à  la  fois  les  haines 
de  famille  des  Capulet  et  des  Montaigu,  ainsi  que  la  vente  romanes- 
que du  château  de  la  Uame  blanche.  A  ce  point  de  vue,  leur  but  a 
été  en  partie  rempli. 

Ils  ont  inventé  un  baron  de  Crécy-Crécy  qui  est  bien  la  plus 
amusante  ganache  qu'on  puisse  imaginer.  Le  récit  du  premier  acte, 
dans  lequel  il  raconte  les  démêlés  des  ses  ancêtres  avec  les  La 
Roche-Trompette,  les  nobles  aïeux  de  Toto,  est  un  chef-d'œuvre 
de  facétie  fantaisiste.  Du  reste,  ce  rôle  est  joué  par  Gil-Pérez 
avec  un  vrai  talent,  non  de  farceur,  mais  de  bon  comédien.  Il  sera 
pour  une  grosse  part  dans  la  fortune  de  la  pièce. 

Après  lui,  que  dire  des  autres  personnages,  qui  concourent  à 
l'action  d'une  manière  plus  ou  moins  directe?  Nous  craindrions 
de  nous  égarer  dans  ce  mèli-mêlo  grotesque,  oîi  chacun  change  de 
physionomie  à  chaque  acte,  où  le  paysan  Pitou,  amoureux  de  la 
fermière  Catherine,  se  transforme  en  général  Bourgachard,  où  le 
notaire  Massepain  endosse  la  défroque  d'un  garde-champêtre,  où 
le  marquis  de  la  Pépinière  troque  son  costume  de  gandin  contre 
la  blouse  de  Pitou.  Le  troisième  acte  est  tout  entier  dans  ces 
ti'avestissements,  et  encore  allions-nous  oublier  le  plus  drôle, 
celui  du  baron  de  Crécy-Crécy  en  facteur  rural,  sonnant  de  la 
trompette  pour  annoncer  son  passage. 

Ces  cocasseries  ont  fourni  à  Offenbach  le  prétexte  d'une  foule 
de  jolis  motifs,  comme  toujours,  gais  et  faciles  et  qui  n'ont  d'au- 
tre tort  que  de  rappeler  quelques-unes  de  ses  meilleui'es  inspira- 
tions, parce  qu'ils  sont  forcément  coulés  dans  le  même  moule. 
On  a  particulièrement  applaudi,  au  premier  acte,  une  charmante 
ronde  à  deux  voix,  des  couplets  chantés  par  Toto  et  un  trio  final;  — 
au  second  acte,  l'air  d'entrée  du  général  Bourgachard  (Brasseur), 
très-bien  en  scène,  d'un  rhythme  franc  et  qu'on  a  bissé  ;  la  bour- 
rée qui  termine  cet  acte  n'a  pas  eu  moins  de  succès.  —  Au 
troisième  acte,  les  couplets  de  i-egrets  et  de  retour  sur  son  passé, 
dits  avec  un  sentiment  exquis  par  Zulma  Bouffar  sur  le  motif  du 
solo  de  flûte  de  l'ouverture,  ont  été  fort  appréciés  ;  la  chanson  à 
moitié  parlée  du  facteur  rural,  très-bien  détaillée  par  Gil-Pérez,  a 
été  redemandée  à  grands  cris. 

Nous  avons  dit  que  Gil-Pérez  était  parfait.  Brasseur,  Hyacinthe, 
Lassouche  ont,  eux  aussi,  de  bons  moments,  mais  ils  ne  le  valent 
pas  et  c'est  en  grande  partie  la  faute  de  leur  rôle.  Mlle  Zulma 
Bouffar,  qui  joue  Toto,  y  est  fort  agréable  et  met  au  service  de  ce 
rôle  une  voix  sympathique  et  une  diction  intelligente.  Toutefois 
nous  sommes  d'avis  que  le  personnage  eût  été  miiiux  le  fait  d'un 
homme  que  le  sien.  Mile  Paurelle  n'ajoutera  pas  au  succès; 
Mlle  Worms  est  une  très-gentille  demoiselle  de  Crécy-Crécy.  Quant 
à  Mlle  Alphonsine,    transfuge  des  Variétés,  nous  l'attendons  à  une 


148 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


autre  création    que  celle   de  la    fermière  pour  la  juger  dans  son 
nouvel  emploi. 

D. 


THÊATBE  DIS  VÂBIËTfS. 

Reprise  du  POIVT  DES  SOCPIBIS, 

Opéj-a  bouffe  en  quatre  actes  et  cinq  tableaux,  paroles  de  MM.  Hec- 
tor Crémieux  et  Ludovic  Halévy,  musique  d'OFFENBACii. 

(Première  représentation  le  8  mai  1868.) 

II  y  a  sept  ans  que  le  Pont  des  soupirs  a  été  donné  pour  la 
première  l'ois  au  théâtre  des  BoulTcs-Parisiens,  c'était  le  28  mars 
1861;  les  principaux  rôles  étaient  joués  par  Désiré,  Potel ,  Bâche, 
Mlles  Tautin,  Testée,  Plbtzer,  etc.  Nous  nous  rappelons  encore 
Tefiet  produit  par  un  comique  du  nom  de  Tacova,  sous  les  traits 
du  président  du  Conseil  des  Dix.  Tout  cela  est  pourtant  dt^à  loin 
de  nous,  et  l'on  comprend  que  la  reprise  de  celte  bouH'onnoric 
vénitienne,  remaniée  d'ailleurs,  et  considérablement  augmentée, 
puisse  aujourd'hui  passer  pour  une  nouveauté,  L'accueil  qu'on  lui 
a  fait  aux  Variétés  en  est  la  preuve. 

Les  infortunes  conjugales  du  doge  Cornarino-Cornarini,  tou- 
jours suivi  de  son  écuyer  Baptiste,  les  scélérates  menées  du  gon- 
falonier  Malatroniba,  les  amours  de  la  hellc  Catarina  et  du  page 
Amoroso,  toutes  ces  folles  aventures,  assaisonnées  de  poignards, 
de  masques,  de  gondoles  et  de  tout  ce  qui  constitue  la  couleur 
locale  dans  la  cité  de  Saint-Marc,  semblaient  n'avoir  jamais 
servi.  Nous  constaterons  à  la  vérité  que  tous  les  interprètes 
de  la  pièce,  cxceplé  Mile  Tautin,  étaient  neufs  dans  leurs  rôles,  et 
que,  par  conséquent,  c'était  un  tout  autre  horizon. 

Mais  si  l'action  a  été  légèrement  modiliéc  par  les  auteurs,  la 
musique  d'Offcnbach  l'a  été  dans  des  proportions  bien  plus  impor- 
tantes .  Néanmoins,  tous  les  morceaux  à  effet  de  l'ancienne  parti- 
tion ont  été  conservés,  et,  dans^le  nombre,  nous  avons  retrouvé 
avec  plaisir  la  sérénade  et  la  complainte  du  premier  acte,  l'excel- 
lent quatuor  des  poignards  et  le  rêve  du  second,  enfin  le  chœur 
du  carnaval. 

Parmi  les  morceaux  ajoutés,  nous  avons  remarqué  une  jolie  bal- 
lade, la  Colombe  et  le  Vautour,  chantée  au  commencement  du 
deuxième  acte  par  Malatromba,  puis  un  boléro  entraînant;  à  l'acte 
suivant,  des  couplets  sur  ces  mots  :  Les  affaires  sont  les  affaires, 
et,  un  peu  plus  loin,  un  délicieux  duetto  pour  voix  de  femmes, 
fort  bien  dit  par  Mlles  Tautin  et  Carrait,  qui  a  été  bissé  et  qui 
méritait  cet  honneur;  enfin,  au  dernier  acte,  un  gai  tourbillon 
dans  lequel  est  intercalé  un  grand  air  pour  Catarina.  Ces  additions 
suffiraient  au  succès  de  l'ouvrage,  s'il  n'avait  pas  déjà  pour  lui  les 
éléments  qui  l'ont  fait  réussir  autrefois. 

Le  rôle  de  Malatromba,  qui  a  pris  le  premier  rang,  est  tout  à 
fait  dans  les  moyens  de  Dupuis  ;  comme  comédien,  et  surtout 
comme  chanteur,  il  y  a  obtenu  plusieurs  salves  de  bravos.  Thiron 
et  Kopp  sont  amusants  dans  les  rôles  du  doge  et  de  son  fidèle 
écuyer  Baptiste.  L'acte  du  Conseil  des  Dix  a  besoin  de  coupures, 
et  ses  longueurs  ont  un  peu  nui  à  Grenier,  qui  a  pris  la  succession 
de  Tacova.  Hamburger  fait  valoir  par  ses  cascades  originales  un 
petit  rôle  de  patricien  ambitieux .  Mlle  Tautin  a  retrouvé  son  suc- 
cès de  la  création  dans  le  rôle  de  Catarina.  Mlle  Carrait,  toujours 
correcte  et  gracieuse,  a  été  souvent  applaudie  dans  celui  du 
page  Amoroso. 

Nous  ne  quitterons  pas  le  Pont  des  Soupirs  sans  faire  nos  com- 
pliments à  la  direction,  qui  n'a  rien  négligé  pour  donner  les  plus 
brillantes  attractions  à  la  représentation  de  cette  pièce.  Les  dé- 
cors et  les  costumes  sont  très-soignés,  les   chœurs    très  -  convena- 


blement composés,  les  petits  rôles  de  femmes  très-bien  remplis, 
et  l'orchestre  fonctionne  avec  beaucoup  d'ensemble  sous  la  con- 
duite   de  son  habile  chef,  M.  Lindheim. 

D. 


CHAPELLE  DES  TUILERIES. 

Première  communion  <ln  Prlncc-Impërlal. 

Jeudi,  à  9  heures  du  matin,  S.  A.  le  Prince-Impérial  a  fait 
sa  première  conmiunion  dans  la  chapelle  du  palais  des  Tuileries, 
en  présence  de  LL.  MM.  l'Empereur  et  l'impératrice,  des  mem- 
bres de  la  famille  impériale  et  des  grands  dignitaires  du  palais.  La 
messe  basse  a  été  dite  par  Sa  Grandeur  .Mgr  Darboy,  archevêque 
de  Paris.  —  Les  artistes  de  la  chapelle  ont  exécuté  à  l'orgue, 
sous  la  direction  de  M.  Auber,  plusieurs  morceaux.  MJle  Mauduit 
et  M.  Grisy  ont  chanté  les  strophes  du  Magnificat  liturgique  ;  un 
Bencdlctus  de  M.  Auber  a  été  dit  ensuite  avec  beaucoup  d'onction 
par  Mlles  Bloch  et  Mauduit,  et  Faure  a  chanté  un  cantique  à 
l'Eucliailslie,  dont  la  poésie,  attribuée  à  un  haut  dignitaire  de 
l'Eglise  présent  à  cette  touchante  cérémonie,  avait  été  adaptée  à 
un  air  de  KossinI,  assez  peu  orthodoxe. 

Le  recueillement  du  petit-neveu  de  Napoléon  I"  édifiait  tous 
les  assistants.  L'émotion  de  S.  M.  l'Impératrice  était  partagée  par 
toutes  les  mères  qui  l'entouraient,  et  l'Empereur  était  lui-même 
très-iinpressionné. 

Le  soir,  à  4  heures,  S.  A.  le  Priuce-Impérial  a  été  confirmé  par 
Mgr  Darboy.  Les  artistes  ont  chanté  le  Veni  Creator  et  le  célèbre 
Vivat  in  aiiernum  composé  en  1802  par  l'abbé  Rose  pour  le  sacre 
de  Napoléon  l",  morceau  ([ui  a  gagné  beaucoup  en  passant  par 
les  mains  de  M.  Auber. 

Cette  solennité  religieuse  et  tout  intime  laissera  de  profonds 
souveniis  à  tous  ceux  qui  ont  eu  le  bonheur  d'en  être  les  té- 
moins. En  sortant  de  la  chapelle  impériale,  un  des  nobles  com- 
pagnons d'armes  du  héros  d'Au.sterlitz  se  plaisait  à  répéter  cette 
belle  parole  de  Napoléon  :  «  Le  jour  de  ma  première  communion 
))  a  été  le  plus  beau  jour  de  ma  vie!  » 

A.  E. 


CONCERTS 

De  m.  Friederlcb  Cernsiielm. 

La  jeune  .\ll6magno  a  en  ce  moment  trois  individualités  très-rcmar- 
quabli/s  à  la  ti'te  de  son  mouvement  musical  :  Joliannes  Brahms,  Max 
Bruch  et  Friederich  Gernsheim,  trois  noms  que  la  postérité  retien- 
dra el  qui  se  partageront  également  son  attention.  Bruch  et  Brahms 
vont  franchement  de  l'avant,  cherchant  avant  tout  à  être  eux-mêmes,  et 
offrant  néanmoins,  par  suite  de  l'analogie  de  leurs  tempéraments  et  de 
leurs  études,  de  nombreux  points  de  contact  cnire  eux;  Gernsheim,  na- 
ture aussi  riche,  mais  plus  réfléchie  et  moins  primesautière,  se  tient  en 
général  plus  près  de  l'élément  classique,  dont  il  s'est  si  profondément 
et  si  heureusement  imprégné,  qu'on  assignerait  volontiers  à  telle  de  ses 
œuvres  une  paternité  beelhovénienne.  Ce  qui  ne  veni  pas  dire  que  l'o- 
riginalilé  lui  manque  :  car  il  nous  semble  qu'on  est  trop  porté  à  ne 
voir  cette  précieuse  qualité  que  dans  la  forme,  dans  la  manifestation 
extérieure  de  l'idée  et  non  dans  l'idée  elle-même;  et  nous  ne  vo^'ons  pas 
pourquoi  chaque  nouveau  venu  se  croirait  absolument  obligé  de  s'affran- 
chir du  cadre  ou  du  style  créés  par  un  homme  de  génie,  au  lieu  de 
chercher  si  la  nature  de  son  talent  ne  s'accommode  pas  précisément  de 
ces  formes  qui  se  prêteront  longtemps  encore  après  lui  à  revêtir  le  beau. 

Des  trois  maîtres  que  nous  venons  de  nommer,  jeunes  encore,  déjà 
célèbres,  et  unis  par  une  vive  amitié,  ce  qui  ne  laisse  pas  que  d'être  rare 
entre  émules,  Frédéric  Gernsheim  est  le  seul  qui  se  soit  produit  jusqu'à 
présent  en  public  à  Paris.  Il  occupe  au  Conservatoire  de  Cologne  une 
brillante  position  qu'il  a  conquise  haut  la  main  :  il  y  est  professeur  de 
piano,  de  contrepoint  et  fugue  et  de  réduction  de  la  partition.  A  son 
concert  du  26  avril,  donné  par  invitation,  les  salons  Erard,  les  couloirs 
et  le  foyer  regorgeaient  de  monde;  les  illustrations  musicales  de  Paris 


DE  PARIS. 


s'y    trouvaient    au    complet.  Rarement  une  salle  de  concert  a  offert  un 
aussi  imposant  spectacle. 

Trois  des  compositions  de  Fr.  Gernsheim  figuraient  au  programme  : 
un  quatuor  pour  piano  et  instruments  à  cor.les,  doux  fragments  d'une 
Suite  pour  piano,  et  une  sonate  pour  piano  et  violoncelle.  Des  œuvres 
de  cette  portée  voudraient  une  analyse  détaillée,  que  nous  regrettons  de 
ne  pouvoir  leur  consacrer.  Il  faut  nous  borner  à  en  signaler  les  quali- 
tés essentielles:  la  noblesse  et  la  distinction  des  idées,  la  science  admi- 
rable du  développement,  fruit  d'une  intime  compréhension  de  ce  qui 
fait  la  force  et  la  vitalité  des  chefs-d'œuvre  classiques;  la  clarté  dans 
l'expression,  l'intuition  de  l'effet,  l'éloignement  de  tout  ce  fatras  préten- 
tieux que  les  contrefacteurs  d'un  novateur  puissamment  organisé,  mais 
fourvoyé,  voudraient  mettre  à  la  mode;  enfin  le  soin  apporté  à  éviter 
l'abus  de  ce  que  les  Allemands  nomment  polyphonie,  abus  qui  consiste 
dans  la  préoccupation  de  donner  à  chaque  partie  une  importance  égale 
par  un  travail  contrapuntique  pénible,  constant,  et  qui  n'est  plus  à  sa 
place  hors  de  la  fugue. 

Nous  ne  ferons  une  réserve  que  pour  le  finale  de  la  sonate  pour  piano 
et  violoncelle,  qui  nous  a  paru  long  et  trop  travaillé  pour  avoir  coulé 
de  source.  Tout  le  reste,  et  surtout  le  scherzo  de  la  Suite  pour  piano, 
qui  restera  comme  un  modèle  de  verve  et  de  franchise,  respire  la  séré- 
nité de  la  force  qui  a  conscience  d'elle-même,  connaît  son  but  et  l'at- 
teint sans  le  dépasser.  On  se  retrempe  en  écoutant  cette  musique,  et  la 
foi  artistique,  ébranlée  journellement  par  tant  et  de  si  rudes  chocs, 
reprend  une  nouvelle  vigueur. 

Fr.  Gernsheim ,  qui  compte  parmi  les  meilleurs  pianistes  de  l'Alle- 
magne ,  a  exécuté  lui-même  ses  compositions  avec  le  concours  de 
MM.  Maurin ,  Mas  et  Demunck.  Les  applaudissements  éclataient ,  longs 
et  bruyants,  après  chaque  morceau.  Et,  pour  couronner  dignement  une 
séance  déjà  si  pleine  d'intérêt,  Antoine  Rubinstein  est  venu  jouer  avec 
le  bénéficiaire  (qui  n'a  bénéficié  que  de  succès)  le  concerto  de  Séb.  Rach 
en  ut  mineur  pour  deux  pianos.  Inutile  de  dire  combien  ces  deux  vir- 
tuoses éminents  ont  été  fêtés.  M.  Gernsheim  aura  emporté  de  l'hospita- 
lité parisienne  un  souvenir  qui ,  nous  l'espérons ,  tiendra  quelque  place 
dans  sa  vie  d'artiste. 

Charles  BANiNELIER. 


REVUE  DES  THEATRES. 


Gyîinase  :  le  Chemin  retrouvé,  comédie  en  quatre  actes,  par 
MM.  Louis  Leroy  et  Régnier.  —  Vaudeville  :  les  Loups  et 
les  Agneaux,  comédie  en  cinq  actes,  par  MM.  Crisafulli  et  Sta- 
pleaux.  —  Théâtre  L^périal  du  Chatelet  :  le  Comte  d'Esscx, 
drame  en  cinq    actes  et  six  tableaux,  par  M.  Couturier. 

Nous  nous  faisons  un  véritable  plaisir  de  constater  le  succès 
très-mérité  que  vient  d'obtenir  le  Gymnase  avec  une  comédie  en 
quatre  actes,  intitulée  le  Chemin  retrouvé,  qui,  sans  emprunter  son 
sujet  à  un  ordre  d'idées  bien  neuves,  a  su  cependant  conquérir 
les  suffrages  du  public  par  la  sagesse  de  son  plan,  la  logique  de 
ses  déductions,  et  l'hcurèuse  variété  de  ses  formes  littéraires.  Les 
auteurs  de  cette  pièce  sont  deux  hommes  de  talent  et  d'expérience, 
M.  Louis  Leroy,  journaliste  distingué,  et  Régnier,  l'artiste  aimé 
du  Théâtre-Français.  Leur  œuvre  se  ressent  de  la  mise  en  com- 
mun des  aptitudes  apportées  par  chacun  d'eux  et  soudées  ensemble 
par  l'habile  intervention  de  M.  Montigny. 

M.  d'Augerolles,  est  un  de  ces  maris  comme  on  en  voit  tant,  qui 
ont  sous  la  main  des  trésors  de  bonté,  de  vertu,  et  qui  n'en  vont 
pas  moins  courir  les  aventures  avec  des  demoiselles  de  hasard, 
qui  sont  loin  de  valoir  leurs  femmes.  Mme  d'Augerolles,  de  son 
côté,  et  toujours  selon  la  loi  commune,  ne  manque  pas  de  cour- 
tisans, parmi  lesquels  il  en  est  un,  M.  de  Laverdac,  qui  pourrait 
bien  distancer  les  autres,  si  la  lice  était  ouverte.  Mais  Mme  d'Au- 
gerolles marche  fièrement  dans  la  ligne  du  devoir  et  rien  ne  sau- 
rait l'en  faire  dévier,  si  elle  n'apprenait  toul-à-coup  que  son  mari 
a  une  maîtresse.  Ce  jour-là  même,  M.  de  Laverdac,  dans  un  accès 
de  folie  amoureuse,  a  voulu  monter,  aux  courses,  un  cheval  in- 
dompté et  il  a  été  jeté  mourant  sur  le  turf.  Une  inspiration  vindi- 
cative décide  Mme  d'Augerolles  à  aller  voir  le  blessé,  sans  souci  de 
sa  réputation  jusque-là  irréprochable.  Le  mari,  prévenu  traîtreu- 
sement, survient  à  l'improviste;    Laverdac  essaie  de   faire  évader 


l'imprudente  jeune  femme,  mais  en  vain,  et  Mme  d'Augerolles 
serait  à  jamais  perdue  s'il  ne  se  trouvait  là,  à  point,  une  autre 
femme  qui  se  dévoue  pour  la  sauver,  parce  qu'elle  a  beaucoup 
moins  à  perdre.  Néanmoins,  cette  Mme  de  Barsanne  est,  à  son  tour, 
compromise  d'une  manière  si  grave  qu'un  aveu  franc  et  sincère 
de  Mme  d'Augerolles  devient  indispensable  dans  l'intérêt  de  cette 
mère  de  famille.  Il  est  vrai  que  la  leçon  a  profité  et  que  Mme 
d'Augerolles  a  véritablement  retrouvé  son  chemin,  sans  avoir  pris 
par  la  traverse. 

Non-seulement  la  pièce  de  M.  Louis  Leroy  et  Régnier  est  bien 
faite,  mais  elle  est  aussi  parfaitement  interprétée  par  Berton  et 
Villeray,  par  Mlle  Piurson  et  par  Mme  Pasca.  L'action  est  en  outre 
égayée  d'une  façon  charmanle  par  plusieurs  rôles  épisodiques, 
tels  que  ceux  d'une  vieille  puritaine,  joué  merveilleusement  par 
Mme  Mélanie,  d'un  petit  collégien,  confié  à  Mlle  Massin,  d'un 
vieux  garçon  que  Landrol  détaille  avec  sa  hnesse  accoutumée,  et 
de  deux  valets  comiques  dont  Francés  et  Lefort  tirent  un  excel- 
lent parti.  L'Empereur  et  l'Impératrice,  que  l'on  a  peu  vus  dans 
nos  théâtres  secondaires  pendant  la  saison  qui  vient  de  s'écou- 
ler, assistaient  à  la  première  représentation  du  Chemin  retrouvé  et 
en  ont  daigné  témoigner  leur  satisfaction  au  dii-ecteur  ainsi 
qu'aux  acteurs. 

—  Le  Vaudeville  comptait  beaucoup,  dit- on,  sur  les  Loups  et  les 
Agneaux,  qui  n'ont  pas  tenu  toutes  leurs  promesses.  D'abord,  cette 
comédie  de  mœurs  contemporaines  a  le  grand  tort  de  venir  après 
beaucoup  d'autres  du  môme  genre  qui  n'ont  laissé  que  bien  peu 
d'épis  à  glaner.  De  plus,  elle  a  l'inconvénient  de  mentir  à  son 
titre,  en  ne  nous  montrant  à  peu  près  que  des  loups,  sans  égarer 
au  milieu  d'eux  quelques  agneaux.  L'intrigue,  passablement  vul- 
gaire, est  basée  sur  la  vengeance  d'un  honnête  banquier  qui,  se 
croyant  ti'oinpé  par  sa  femme,  passe  avec  armes  et  bagages  dans 
le  (;amp  des  Faiseurs,  afin  d'y  entraîner  son  rival  et  de  le  com- 
promettre dans  une  affaire  horriblement  véreuse.  La  victime  ne 
se  laisse  pas  immoler,  et  le  mari,  furieux,  veut  lui  mettre  le  cou- 
teau sur  la  gorge.  Mais  tout  s'arrange  par  un  mariage  qui  rend 
l'honneur  à  la  femme  calomniée  et  le  repos  à  l'époux  criminel  par 
jalousie. 

Nous  avons  négligé,  dans  ce  résumé  succinct,  deux  personnages 
importants  qui  méritent  une  mention  spéciale.  L'un  s'appelle  Cal- 
lot  et  est  un  vil  coquin,  sans  conscience  ni  vergogne,  qui  fait 
l'olfice  du  mauvais  génie  auprès  du  banquier  Tourbonne.  L'autre 
répond  au  nom  de  Cotonnier  ;  c'est  un  ancien  gandin  tombé  dans 
la  misère  et  le  cynisme,  hier  cocher,  aujourd'hui  domestique  et 
secrétaire  de  ce  même  banquier,  tantôt  bon,  tantôt  méchant,  selon 
les  intérêts  du  moment,  mais  en  somme  la  seule  physionomie  un 
peu  originale  de  la  pièce.  Aussi  est-on  allé  chercher  Lesueur  au 
théâtre  du  Châlelet  pour  jouer  ce  rôle,  qui  tranche  sur  tout  son 
entourage. 

Citons  pourtant  Dcsrieux,  Parade,  Munie,  puis  Mlles  Bianca  et 
Léonide  Leblanc  qui  ont  fait  de  louables  efforts  pour  lutter  contre 
le  mécontentement  du  public,  que  commençaient  à  indisposer  l'inex- 
périence des  auteurs  et  surtout  l'invraisemblance  d'une  scène 
d'actionnaires  <|ui  ne  ressemble  à  rien  de  ce  qu'on  a  vu  jusqu'ici 
et  qu'on  ne  peut  admettre  que  comme  des  caricatures. 

— Faisant  trêve  à  ses  éternelles  féeries,  le  théâtre  du  Châlelet  vient 
de  tenter  une  excursion  dans  le  domaine  du  drame  historique,  et 
il  n'a  pas  eu  à  se  repentir  de  cet  essai;  c'est,  du  reste,  la  seconde 
fois,  depuis  un  an,  que  la  reine  Elisabeth  nous  apparaît  sur  les 
scènes  où  fleurit  le  drame.  A  la  Gaîté,  on  la  représentait  en 
lutte  avec  la  mort;  ici,  elle  est  aux  prises  avec  l'amour,  et  le 
comte  d'Essex,  qui  oselui  préférer  une  autre  femme,  paie  une  telle 
audace  de  sa  tête.  Cette  catastrophe  donne  lieu  à  une  péripétie 
très-émouvante.    Pendant  que  le  condamné  r.ttend  dans  sa  prison 


150 


«EVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


l'exécution  de  la  sentence  qui  l'a  frappé,  la  reine,  prise  de  remords, 
lui  fait  dire  par  une  de  fes  dames  d'honneur  qu'elle  est  prête  à 
pardonner  si  le  comte  invoque  sa  grâce  au  moyen  d'un  anneau 
dont  elle  lui  a  fait  présent  autrefois  comme  sauvegarde  contre  sa 
colère.  Le  comte  remet  l'anneau  lutélaire  à  sa  dame  d'honneur; 
mais  le  mari  de  celle-ci,  sir  Howard,  qui  a  une  vengeance  à  exer- 
cer contre  le  malheureux  comte  d'Essex,  retient  l'anneau  et  l'œuvre 
de  sang  s'arccomplit 

Ce  drame  est  le  second  ouvrage  de  M.  Couturier,  dont  la 
femme  interprète  le  rôle  d'Elisabeth  avec  un  talent  plein  d'inéga- 
lités, qui  l'a  fait  comparer  à  Rouvière.  Mme  Cornélie,  — c'est 
le  nom  qu'elle  a  pris  sur  l'afficbe,  —  est  dignement  secondée 
par   Laray,   Deschamps,  Colombier  et  Mme  Paul   Deshayes. 

D.  A.  D.  SAINT-YVES. 


CONCERTS  ET  AUDITIONS  IDSICÀIES  DE  LA  SEMAINE. 

,*»  La  Société  des  concerts  de  chant  classique,  fondée  par  feu  M.  Beau- 
lieu,  a  donné,  le  Eamedi  2o  avril,  à  la  salle  Herz,  son  concert  annuel 
au  profit  de  la  cais-;e  de  secours  des  artistes  musiciens.  Mlles  Marimon,  de 
Beaunay  et  Printemps,  MM.  Achard  et  Archaimbaud,  chargés  d«s  soli, 
ont  recueilli  les  suffrages  les  plus  vifs  et  les  mieux  mérités.  Quatre  mé- 
lodies peu  connues  de  la  reine  Hortense,  qui  vont  être  publiées  prochai- 
nement avec  un  bon  nombre  d'autres,  par  M.  Eugène  Gautier,  ont  été 
particulièrement  applaudies.  Des  fragments  du  Guillaume  Tell  de  Grétry 
et  du  Komco  et  Juliette  de  Steibelt,  ont  également  produit  beaucoup 
d'effet.  De  vieilles  chansons  avec  chœur,  un  air  du  Persce  do  Lulli,  un 
fragment  de  la  Passion  de  S.  Bacli,  forniaieut  l'appoint  de  ce  programme, 
qui,  comme  on  le  voit,  n'offrait  pas  moins  d'intérêt  que  les  années  pré- 
cédentes. 

,*s.  Une  matinée  musicale  donnée  dimanche  dernier  à  la  salle  Erard, 
au  profit  de  l'as.sociation  des  instilulrices  libres  de  la  Seine,  nous  a 
fourni  l'occasion  d'applaudir  le  brillant  et  sympathique  talent  de  pianiste 
de  Mme  Ro.ssi-Gallieno ,  qui  a  exécuté  avec  notre  éminent  violoncelliste 
Jacquard  une  remarquable  sonate  de  Rubinstein. 

^**  Vendredi  dernier,  dans  un  concert  donné  à  la  salle  Herz  pour  la 
fondation  d'une  crèche,  et  où  chantaient  Mme  .Monbelli,  Mlle  Mcyer  et 
MM.  Ketten  et  Lamotte,  Mlle  Louise  Murer  s'est  fait  entendre  plu- 
sieurs fois  et  chaleureusement  applaudir,  particulièrement  après  un 
caprice  sur  la  Somnambule  et  la  Danse  des  Fées,  de  son  regretté  maître 
Prudent,  qu'elle  joue  avec  une  rare  perfection. 

^*j,  Vendredi  15  mai  aura  lieu,  au  Conservatoire,  la  représentation 
lyrique  et  dramatique  organisée  par  Mme  la  princesse  de  Beauvau ,  au 
profit  de  l'Ecole  professionnelle  de  jeunes  filles,  qu'elle  a  fondée  et  dont 
elle  est  la  directrice.  Le  programme  de  cette  soirée  sera  des  plus  at- 
trayants 

i^*^.  Le  début  des  frères  Guidon,  engagés  à  l'Eldorado,  a  eu  lieu  samedi 
de  l'autre  semaine,  avec  un  succès  très-décidé.  Les  deux  chansons  poé- 
tiques qu'ils  ont  dites  avec  leur  finesse  et  leur  goût  habituels  ont  provo- 
qué les  sympathiques  applaudissements  auxquels  sont  habitués  ces  deux 
excellents  artistes. 

j*^  Mercredi  13  mai,  à  la  chapelle  du  Calvaire,  séance  de  musique 
classique  donnée  par  la  Société  académique  de  musique  sacrée  sous  la 
direction  de  Ch.  Vervoitte  :  exécution  de  morceaux  de  tous  les  pays 
des  xvi«,  xvn'=,  xvm^  et  xix«  siècles. 

^*»  Mme  Oscar  Comettant  a  brillamment  terminé  le  24  avril,  la  série 
de  ses  intéressantes  soirées  musicales.  Les  nombreux  invités  qui  se 
pressaient  dans  ses  salons  de  Versailles  ont  pu  applaudir  la  maîtresse  de 
la  maison  dans  l'air  du  pâtre  de  Sapho  et  la  valse  A'Hamkt,  et  les 
excellentes  élèves  qu'elle  a  formées,  dans  le  choeur  de  Rossini  la  Charité, 
et  dans  une  chanson  du  xvm"  siècle,  arrangée  à  cinq  voix  par 
M.  Oscar  Comettant.  MM.  Nathan,  Wliite  et  Mlle  Joséphine  Martin  dé- 
frayaient la  partie  instrumentale,  qui  ne  pouvait  être  en  de  meilleures 
mains. 

^*^  Rubinstein,  Mlle  Harris  et  le  baryton  Devoyod  ont  donné  un  éclat 
tout  particulier  au  dernier  concert  du  Cercle,  à  Nantes.  Ces  éminents 
artistes  ont  été  accueillis  avec  un  enthousiasme  auquel  leur  beau  talen  t 
est  depuis  longtemps  habitué. 

^*^Edouard  Wolff,  reparti  avec  la  compagnie  Patti-Ulmann  à  la 
conquête  de  nouveaux  lauriers,  s'est  déjà  vu  applaudir  à  Orléans, 
Bourges,  Nevers,  Moulins,  Riom,  Roanne,  Clermont,  Saint-Etienne  et 
Tarascon.  Sa  Tarentelle  lui  a  valu  chaque  fois  le  succès  le  plus  franc 
et  le  plus  flatteur.  Carpentras,  Valence,  Grenoble,  Chambéry,  etc.,  atten- 
dent la  vaillante    petite    phalange  artistique,  qui  est  pariout    accueillie 


de    la   manière    la  plus   enthousia.ste.  Berthelier  y  fait  merveille   avec 
ses  chansonnettes. 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 


^*s^  Lundi  dernier,  à  peine  de  retour  de  .son  voyage  de  Belgique  où 
le  succès  ne  lui  a  pas  ménagé  les  ovations,  Mme  Marie  Sasse  a  fait  sa 
rentrée  à  l'Opéra,  dans  le  rôle  de  Doua  Anna,  de  Don  Juan.  Sa  voix  et 
son  jeu  se  ressentaient  un  peu  des  fatigues  de  son  excursion  ;  le  public, 
néanmoins,  lui  a  fait  un  excellent  accueil.  Faure,  comme  toujours,  a 
admirablement  chanté  et  joué  Don  Juan;  il  a  été  magnifique  dans  les 
deux  derniers  tableaux;  on  lui  a  redemandé  la  sérénade.  Les  applaudis- 
sements n'ont  pas  manqué  à  Mlle  Battu  (Zerline),  qui  a  été  charmante 
dans  son  duo  avec  Mazelto.  Mlle  Mauduit,  qui  remplaçait  Mme  Gueymard, 
indisposée,  dans  le  rôle  d'Elvire,  a  chanté  sobrement  et  avec  beaucoup 
de  style  ce  rôle  auquel  elle  a  donné  un  touchant  caractère  de  résignation 
et  de  simplicité.  Obin,  quoique  la  nature  de  son  talent  ne  l'appelle  guère 
à  remplir  des  rôles  comiques,  prête  cependant  au  personnage  de 
Leporello  une  grande  franchise  d'allures  et  un  entrain  de  bon  aloi. 
David  a  été  l'imposant  Commandeur  que  l'on  sait.  "Warot  etCaron  com- 
plètent un  excellent  ensemble.  Le  ballet,  dont  tous  les  airs  ont  été 
empruntés  avec  un  goût  exquis  à  Mozart  lui-même,  est  ravissant.  La 
salle  était  Irès-belle;  les  soixantes  loges  du  premier  et  du  second  rang 
étaient  toutes  occupées.  —  Vendredi,  on  a  donné  avec  le  même  succès 
le  chef-d'œuvre  de  Mozart.  —  Mercreili,  la  Juive  a  valu  à  Marie  Sasse  un 
nouveau  triomphe  ;  Villaret,  chantait  Eléazar,  l'un  de  ses  meilleurs 
rôles,  et  quoique  relevant  à  peine  d'une  grave  maladie,  il  y  a  recueilli 
de  chaleureux  applaudissements,  surtout  à  l'air  du  quatrième  acte  après 
lequel  il  a  été  rappelé  par  la  salle  eniiôre. 

,f%  La  représentation  extraordinaire  de  jeudi,  au  profit  de  la  caisse  de 
secours  des  auteurs  et  compositeurs  dramatiques,  n'a  pas  eu  de  chance; 
la  recette  n'a  été  que  de  3,223  francs,  somme  de  beaucoup  inférieure  aux 
frais.  Cependant,  Mlle  Battu,  Rubinstein,  Mlle  Graiizowy  luttaient  de  ta- 
lent chacun  dans  leur  genre,  et  ces  artistes  d'élite  ne  s'y  sont  pas  épar- 
gnés pour  obtenir  un   meilleur  résultat. 

,'\(tOn  lit  dans  la  Gazette  des  Étrangers.  «  A  Bruxelles,  Mme  Sasse  a 
donné,  pendant  son  congé,  cinq  fois  Selika,  deux  fois  Valentine,  une 
fois  Rachel.  Pas  plus  que  l'approbation  du  public,  la  sanction  royale  n'a 
manqué  aux  triomphes  de  notre  cantatrice  sur  la  scène  de  la  Monnaie; 
deux  fois  la  reine  a  voulu  venir  l'entendre  et,  le  .soir  de  la  représenta- 
tion d'adieu,  un  dîner  d'apparat  au  chDteau  n'a  pu  empêcher  S.  M.  de 
venir.  Elle  a  fait  remettre  à  Mme  Sasse  un  cadeau  digne  de  celle  qui 
donnait  et  de  celle  qui  recevait.  » 

,f*.  On  annonce  pour  mercredi  la  première  représentation,  au  théâtre 
de  rOpéra-Coniique,  de  l'opéra  en  un  acte  de  Mme  de  Grand  val,  paroles 
de  Henri  Meilhac  et  W.  Busnach;  il  a  pour  titre  définitif:  la  Pénitente. 

s*t  Toujours  grande  activité  de  la  direction  pour  la  reprise  des  Dra- 
gons de  Vitlars  ;  Mme  Galli-Marié  dans  le  rôle  de  Rose  Friquet,  et  Mlle 
Girard  dans  celui  de  Georgette  suflTiraient  seules,  dit-on,  par  le  talent 
qu'elles  y  déploient  pour  donner  à  cette  reprise  tout  l'attrait  d'une 
pièce   nouvelle. 

:i;*:^  Le  Petit  Chaperon  rouge  va  être  également  repris  avec  Mmes  Marie 
Roze,  Heilbron  et  Ca>imir,  MM.  Achard  et  Leroy. 

^*^  La  clôture  du  théâtre  Lyrique  et  du  théâtre  de  la  Renaissance 
s'e^t  effectuée  la  semaine  dernière.  M.  Carvalho  abandonne  décidément 
la  direction  du  premier,  qui  se  trouve  ainsi  vacante.  —  La  réouverture 
de  la  salle  Ventadour  est  annoncée  pour  le  1"  septembre. 

,,;*,  Le  théâtre  de  l'.^thénée  vient  de  mettre  en  répétition  une  comédie 
en  un  acte  de  M.  Octave  Gaslineau,  intitulée  :  Première  fraîcheur,  qui 
sera  jouée  par  MaM.  Bilhaut,  Tourtois,  Mlles  Clémentine,  Pradal  et  Da- 
venay. 

,,.**  Fleur  de  Thé  en  est  à  sa  trentième  représentation  et  le  public 
continue  de  s'y  porter  en  foule.  Tout  le  monde  veut  entendre  les  char- 
mantes mélodies  de  Ch.  Lecocq  et  voir  Désiré  et  Léonce,  de  plus  en 
plus  ébouriffants,  dans  leurs  rôles  de  Tien-Tien  et  de  Kaolin.  —  D'.-puis 
quelques  jours,  le  chef  d'orchestre,  M.  Bernardin,  est  atteint  d'une  indis- 
position qui  ne  lui  permet  pas  de  conduire  l'orchestre;  la  direction  a  dû 
le  faire  provisoirement  remplacer  et  c'est  M.  Debillemont  qui  remplit 
ses  fonctions.  Le  choix  ne  pouvait  être  meilleur.— Sytter,  également  in- 
disposé, est  remplacé  dans  le  rôle  de  Pinsonnet,  par  une  nouvelle 
recrue,  M.  Baretti,  frère  de  la  cantatrice  de  ce  nom  ;  il  s'y  montre 
agréable  chanteur. 

,*4  Fleur  de  Thé,  —  dont  la  traduction  en  allemand  est  sous  presse, 
chez  l'éditeur  Bock,  à  Berlin,  —  ne  lardera  pas  à  être  publiée  également 
en  anglais  par  la  maison  Chappell ,  à  Londres,  qui  a  acquis  la  pro- 
priété de  cet  ouvrage  pour  r.\ngleterre. 

,t*^  C'est  le  théâtre  français  de  Bordeaux  qui  montera  le  premier  en 
province  Fleur  de  Thé.  Deux  de  ses  rôles  principaux   viennent  d'y  être 


DE  PAKIS 


loi 


distribués  à  Mme  Rose  Bell  et  à  Carrier.  —  Le  grand  Théâtre  de  Nantes 
vient  également  de  mettre  l'optra  de  Ch.  Lecoeq  à  l'étude. 

:^*:i,  Dans  quelques  jours  aura  lieu  au  théâtre  des  Fantaisies-Parisiennes, 
la  première  représentation  du  Barbier  de  Séville,  de  Paësiello,  représenté 
à  Paris  le  12  juillet  1789,  par  la  troupe  italienne  de  Viotti. 

^*jf  Le  théâtre  Déjazet  vient  d'ajouter  à  son  grand  succès  de  Cent 
mille  francs  et  ma  fille,  une  charmante  comédie  de  M.  O'Squarr  :  Re- 
cette contre  les  belles-mères . 

**«  D'après  une  statistique  publiée  par  une  feuille  italienne,  les  dé- 
penses du  théâtre  de  la  Scala,  à  Milan,  pour  les  trois  mois  d'exploita- 
tion de  l'hiver  dernier,  auraient  atteint  la  somme  énorme  de  trois 
cent  soixante-dix-sept  mille  cinq  cents  francs  !  Et  l'on  s'étonne  des  frais 
occasionnés  par  la  gestion  de  nos  scènes  lyriques  et  autres  parisiennes, 
et  des  désastres  financiers  qui  frappent  trop  souvent,  hélas!  de  vaillantes 
et  loyales  intelligences  ! 


NOUVELLES  DIVERSES. 

1^*^,  Le  jury  appelé  à  se  prononcer,  cette  année,  sur  le  mérite  des 
concurrents  au  prix  de  Rome,  entrés  en  loge  le  -i  mai  (épreuve  prépa- 
ratoire), se  compose,  comme  d'habitude,  de  MM.  Auber,  le  général 
Mellinet,  Fr.  Bazin,  Gevaert,  Barbereau,  Ermel,  Gautier  et  Wekei-lin. 

;if**  Par  suite  de  la  retraite  de  M.  Forestier,  premier  cornet  à  pistons 
de  l'Académie  impériale  de  musique,  M.  Maury  devient  chef  de  pupitre, 
M.  Guilbaut,  second  premier  cornet.  A  la  suite  d'un  brillant  concours, 
M.  Teste  a  été  reçu  second  cornet  à  pistons. 

***  La  place  d'organiste  vacante  à  Saint-Merri  a  été  obtenue  au  con- 
cours, mercredi  dernier,  par  M.  Henri  Fissot,  le  brillant  pianiste  que 
l'on  connaît,  et  qui  a  jusqu'ici  tenu  le  grand  orgue  à  l'église  de  Cli- 
gnancourt. 

^**  Au  mariage  de  M.  Fouquet,  député,  avec  Mlle  Louise  Barrot, 
fille  du  grand  référendaire  du  Sénat,  à  la  chapelle  du  Sénat,  trois 
morceaux  de  chant  ont  été  dits  pendant  la  messe  :  l'Ace  Maria  de 
Cherubini,  par  Mlle  Lehuédé,  un  0  Salutaris  de  la  composition  de 
M.  Vois,  par  son  auteur,  et  un  Ave  veruni  de  Lugghini,  par  ces  deux 
artistes  réunis.  Ils  ont  fait  le  plus  grand  plaisir.  M.  Langlois,  organiste 
en  .second  du  Sénat,  tenait  l'orgue  d'accompagnement. 

^;*:s  L'église  N.-D.  de  Boulogne-sur-Mer,  a  été  ouverte  au  culte,  diman- 
che dernier,  en  présence  de  Mgr  Lequette,  évèque  d'Arras,  et  de  plu- 
sieurs notabilités  civiles  et  ecclésiastiques.  Une  messe  à  quatre  voix  de 
M.  Ch.  Vervoilte  et  un  Salut  solennel  du  même  auteur  ont  été  exécutés 
sous  la  direction  de  M.  Fournier,  maître  de  chapelle  de  la  cathédrale. 

:(,**  S.  M.  l'Empereur  ayant  daigné  agréer  avec  sa  bonté  accoutumée 
l'hommage  de  trois  cantiques  composés  pour  la  première  communion  du 
Prince-Impérial,  M  A .  Elwart,  leur  auteur,  se  propose  de  publier  ces 
trois  morceaux  au  bénéfice  des  pauvres  habitants  de  l'Algérie.  On  dit 
que  l'auteur  du  Salut  Impérial  n'a  jamais  été  mieux  inspiré. 

***  Pancani,  le  célèbre  ténor,  vient  d'arriver  à  Paris. 

jf,*^  M.  Mortier  de  Fontaine  vient  de  partir  pour  Londres. 

»%  L'excellent  flûtiste  Auguste  Charles  a  quitté  Paris  après  une 
saison  bien  remplie  et  qui  lui  a  valu  de  brillants  succès.  M.  Auguste 
Charles  nous  reviendral'hiver  prochain. 

,15*^  La  partition  de  Mademoiselle  Sylcia,  de  Samuel  David,  que 
POpéra-Comique  joue  en  ce  moment  avec  succès,  a  été  acquite  par 
MM.  Leduc  tils  et  C'«. 

***  Ln  nouveau  journal  —  l'Art  —  vient  de  naître.  Il  se  consacrera 
principalement  à  la  critique  des  œuvres  de  peinture  et  sculpture  qui 
figureront  dans  les  expositions  publiques. 

»*:f  La  jolie  et  utile  collection  de  la  Musique  en  miniature,  publiée  par 
la  maison  Brandus-Dufour,  vient  de  s'augmenter  de  trois  nouveaux  mor- 
ceaux :  la  Chanson  de  mai,  de  Slephen  Heller,  avec  le  portrait  photo- 
graphié de  l'auteur,  la  Légende  du  Vcre,  de  la  Grande  ûuchesse,  avpc 
le  portrait  de  Mlle  Schneider,  et  la  Fable  des  Deux  Rats,  de  Lischen  et 
Fritzchen,  avec  le  portrait  de  J.  Oflenbach. 

»*»  Trois  gracieuses  mélodies  :  Sérénade  du  Mariage  de  Ninon,  Mes 
Prétendants,  Si  pour  te  dire  que  je  t'aime,  de  la  composition  du  jeune 
Henri  Perry-Biagioli  et  de  sa  sœur  Antonine,  viennent  d'être  publiées 
par  Gambogi.  Nous  y  retrouvons  les  traces  du  talent  précoce  dont  ces 
jeunes  artistes  font  preuve  depuis  deux  ans  déjà,  et  que  nous  avons 
signalé  à  maintes  reprises. 

,„**  La  campagne  orphéonique  ne  se  dessine  pas  comme  devant  être 
très-brillante.  Ainsi  le  concours  du  Havre,  prématurément  annoncé, 
n'aura  pas  lieu.  Jusqu'à  présent  les  meilleures  sociétés  musicales  du 
Midi  et  du  Centre  paraissent  se  décider  pour  le  beau  concours  choral  et 
instrumental  que  la  ville  de  Grenoble  ouvrira  le  16  août,  avec  une 
solennité  exceptionnelle  et  dont  les  juges  du  camp,  entre  autres  noms 


sympathiques  à  l'art  populaire,  seiont  .MM.  Amb.  Thomas,  Berlioz  . 
L.  de   Rillé,   Mathieu  de  Monter,  Elwart,  .Monesticr,  S;iin-d'Arod,    etc. 

,"",,  L'assemblée  générale  de  l'as-sociation  des  artistes  musiciens  aura 
lieu  jeudi  prochain,  14  mai,  à  i  heure,  dans  la  salle  du  Conservatoire 
impérial  de  musique,  Faubourg-Pois.sonnière. 

^*,i:  Après  le  concert  qu'ils  ont  donné  la  semaine  dernière,  le  jeune 
trio  des  enfants  Fremaux  a  reçu  de  M.  Duprcssoir,  le  nouveau  directeur 
de  l'établissement  thermal  de  Bade,  une  lettre  charmante  par  laquelle  il 
les  engage,  à  de  très-brillantes  conditions,  pour  le  concert  qui  sera 
donné  le  31  de  ce  mois  dans  les  salons  de  la  Conversation . 

**«  Le  jeune  ténor  Léopold  Kelten,  qui  a  débuté  l'année  dernière,  et 
non  sans  succès,  au  théâtre  Italien,  vient  d'êti-e  engagé  pour  une  série 
de  représentations  à  donner  en  septembre  au  Th  âtre  Royal  de  Berlin. 
Cet  engagement  s'est  conclu  après  une  audition  qui  a  eu  lieu  en  pré- 
sence de  M.  de  Hiilsen,  intendant  général  des  théâtres  royaux  de  Prusse. 

^**  Les  entrepreneurs  du  Casino-Cadet  étant  dans  l'intention  de  sup- 
primer leurs  concerts  pour  ne  donner  que  des  bals,  Arban  vient  de  con- 
tracter avec  le  propriétaire  de  la  salle  Valentino  un  traité,  aux  ternies 
duquel  il  y  t.'-ansporte  tout  son  orchestre  et  son  répertoire.  A  cet  effet, 
l'établissement  va  recevoir  de  noiables  embellissements  qui  le  transfor- 
meront complètement ,  et  rien  ne  sera  épargné  pour  que  ces  concerts, 
qui  prendront  la  qualification  de  Concerts-Audan  et  qui  ouvriront  le 
!•'  septembre,  offrent  aux  amateurs  de  musique,  dans  une  .-aile  en 
même  temps  spleiidide ,  confortable  et  bien  située,  les  plus  agréables 
soirées.  11  est  question  d'Aug.  Mey  pour  remplacer  Arban  au  Casino. 

**«  Le  Pré  Catelan  a  ouvert  dimanche  avec  le  corp.-,  de  musique  des 
zouaves  de  la  garde,  sous  la  conduite  de  son  habile  chef  M.  Hemmerlé. 
Aujourd'hui,  de  midi  à  six  heures,  grande  fête  de  bienfaisance,  avec  le 
concours  des  musiques  et  fanfares  de  l'infanterie  de  l'armée  de  Paris. 
Plus  de  cinq  cents  musiciens  participeront  à  cette  fête  de  l'art  et  de  la 
charité,  qui  marquera  comme  l'une  des  plus  belles  de  l'été  1868. 

a,"^^  L'Aftonbladet  annonce  que  Frantz  Berwald,  composiieur  de  mérite, 
qui  a  été  le  premier  maître  de  Christina  Nilsson,  vient  de  mourir,  à 
Stockholm,  à  l'âge  de  72  ans. 


ÉTRANGER 


^*^  Bruxelles.  —  L'opéra  français  a  terminé  ses  représentations. 
C'est  Mme  Sass  qui  les  a  brillamment  clôturées.  11  eut  été  dilBcile, 
après  le  départ  de  la  célèbre  cantatrice,  de  représenter,  avec  chance 
d'attirer  le  public  et  de  lui  être  agréable,  les  ouvrages  dans  lesquels 
elle  s'était  fait  entendre.  La  fermeture  est  donc  arrivée  fort  à  propos. 
11  nous  reste  l'opéra-comique  et  un  opéra  italien,  nouveau  venu,  pour 
achever  l'année  tliéâtrale,  qui  expire  le  31  mai.  Encore  la  troupe  d'opéra- 
comique  ne  demeure-t-elle  pas  entière.  La  prima  donna  en  titre, 
Mlle  Danieli,  a  cessé  ses  représentations  à  la  fin  d'avril.  Elle  a  eu  un 
très-brillant  bénéfice,  beaucoup  d'applaudissements  et  de  fleurs  ;  le  rôle 
qu'elle  avait  choisi  était  celui  de  Mignon,  un  de  ses  triomphes.  D'ici  à  la 
fin  du  mois  elle  sera  remplacée  par  Mme  Ferdinand  Sallard,  qui  vient  de 
chanter  la  Traviata  elqai  se  montrera  successivement  dans  plusieurs  des 
principaux  rôles  du  répertoire.  —  La  compagnie  italienne  n'a  obtenu 
qu'un  succès  négatif  à  la  première  et  unique  représentation  qu'elle  a 
donnée  en  huit  jours;  c'est  dans  le  Trovatore  qu'elle  a  débuté.  On  a 
applaudi  la  jolie  voix  de  ténor  de  M.  Tombesi,  et  l'on  a  rendu  justice 
à  l'expérience  de  M.  Capurro,  baryton  dont  la  voix  a  conservé  quelques 
notes  assez  puissantes  ;  mais  la  prima  donna  et  le  contralto  ne  se  sont 
pas  concilié  les  suffrages  du  public.  Les  chœurs  chantaient  en  français, 
ce  qui  produisait  un  singulier  eftet.  On  aurait  évité  la  mauvaise  im- 
pression de  celte  confusion  de  langues,  de  cette  Babel  en  miniature,  si 
on  les  avait  fait  simplement  vocaliser  leur  partie  sur  les  voyelles  a,  o,  i. 
On  donne  ce  soir  la  Sonnambula  pour  les  débuts  d'une  nouvelle  canta- 
trice, et  l'on  annonce  Don  Juan  avec  M.  Verger,  le  baryton  sortant  du 
théâtre  Ventadour.  —  Lundi  aura  lieu  la  première  apparition  de 
Mme  Carvalho,  engagée  pour  quelques  soirées  et  qu'on  s'efforcera  sans 
doute  de  retenir  jusqu'à  la  fin  du  mois.  Il  y  aura  foule,  on  n'en  sau- 
rait douter,  aux  représentations  de  la  grande  cantatrice  parisienne. 
Le  public  de  Bruxelles  est  toujours  prêt  à  porter  son  argent  au  théâtre; 
seulement  il  faut  des  talents  pour  l'attirer.  C'est  ce  que  n'ont  pas  tou- 
jours compris  nos  entrepreneurs  de  spectacles.  Si  le  théâtre  de  la 
Monnaie  ne  fait  pas  de  brillantes  affaires  depuis  quelques  années,  c'est 
qu'on  y  chante  fort  mal  l'opéra.  On  allègue  l'impossibilité  de  former 
une  meilleure  troupe  par  la  di.sette  de  chanteurs  qui  court.  Peut-être 
cela  est-il  vrai  ;  mais  les  amateurs  n'en  sont  pas  moins  parfaitement 
fondés  à  s'abstenir,  quand  ce  qu'on  leur  offre  n'est  de  nature  à  leur 
procurer  aucune  satisfaction.  Mme  Cirvalho  va  prouver,  comme  l'a  fait 
Mme  Marie  Sasse,  que  les  dilettantes  ne  résistent  pas  plus  chez  nous 
qu'ailleurs  à  l'appât  d'une  vraie  virtuosité.  —  11  avait  été  question 
d'organiser  cette  année  à  Bruxelles  une  fête  musicale  dans  le  genre  de 
celles  qui  se  donnent  en  Allemagne;  mais  on  a  reconnu  qu'une  telle 
entreprise  devait,  pour  réussir,  être  préparée  avec  une  maturité  suffi- 
sante et  la  réalisation  en  a  été  ajournée  à  l'an  prochain. 


1S2 


KIÎVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE  DE  PAKIS. 


^*^  Londres.  — •  Trois  brillantes  soirées  sont  à  signaler  cette  semaine  : 
les  rentrées  de  Mlle  Patti  et  de  Mme  Pauline  Liicca  h  Covent  Garden,  et 
celle  de  Mlle  Nilsson  à  Her  Majesty's  Opéra.  Mlle  Patti  jouait  la  Ros-ine 
du  Barbier,  ce  rôle  qui  semble  avoir  été  fait  exprès  pour  elle ,  et  qui 
met  admirablement  en  lumière  son  talent  si  délicat  et  si  souple.  La  prin- 
cesse de  Galles  assistait  à  la  représentation.  Mme  Lucca  dans  Fra  Dia- 
volo,  Mlle  Nilsson  dans  la  Traviata,  réalisent  l'idéal  de  Zerline  et  de  Vio- 
letta  ;  on  chercherait  en  vain  plus  de  poésie  et  de  naturel.  Les  bravos, 
les  rappels,  les  fleurs  ont  été  prodigués  pendant  toute  la  durée  de  ces 
trois  splendides  représentations.  —  Alfred  Jaell  a  remporté  ses  succès  habi- 
tuels à  la  Nouvelle  Philharmonique  et  à  l'Union  musicale,  où  il  a  exécuté 
le  beau  concerto  do  Hiller  et  le  quintette  de  Schumann.  A  la  prochaine 
séance  de  l'Union,  le  pianisie  sera  Rubinstein  ;  à  la  suivante,  on  enten- 
dra de  nouveau  Jaell. 

^%  Scheewrin.  —  Le  C°  festival  mecklembourgeois  aura  lieu  ici  les 
li,  '13  et  de  juin,  sous  la  direction  du  kapellmeister  de  la  cour, 
A.  Schraitt.  —  Joachim  et  sa  femme,  le  ténor  Schild  {■^6  Dresde),  la 
basse  Cari  Hill  y  prêteront  leur  concours. 

i^*J,  Berlin.  —  Mlle  Brandt  a  chan'é,  le  28  avril,  le  rôle  de  Fidès  du 
Prophète,  de  manière  à  se  concilier  tous  les  suffrages.  Elle  semble  ap- 
pelée à  fournir  une  belle  carrière.  —  C'est  avec  l'Africaine  que  Pauline 
Lucca,  Niemann  et  Betz  ont  pris,  le  30,  congé  du  public.  Mme  Lucca 
disparaissait  presque  sous  les  fleurs  qu'un  public  enthousiaste  lui  a  lan- 
cées de  toutes  parts. 

:^*5^  Hambourg.  —  On  a  repris,  le  23  avril ,  la  Rose  d'Erin,  opéra  de 
Bénédict,  avec  un  succès  très-honorable. 


;c*^,  Vienne.  —  Les  musiques  de  l'artillerie  et  des  régiments  de  chas- 
seurs ont  été  supprimées,  ce  qui  prive  de  leur  emploi  98  chefs,  rétri- 
bués non  par  l'Etat,  mais  pai-  le  corps  auquel  ils  appartenaient. 

^*jf,  Varsovie,  —  On  vient  d'inaugurer  des  concerts  populaires,  sous  la 
direction  de  Muncheimer.  Le  succès  ne  s'est  pas  tout  d'abord  nettement 
dessiné.  —  Bilse  est  attendu  avec  son  orchestre  au  mois  de  juin,  et  doit 
donner  des  concerts  tout  l'été. 

^*4  Saint-Pétersbourg.  —  Les  premiers  sujets  du  corps  de  ballet  se 
sont  réunis  pour  donner  pendant  l'été  des  représentations  en  Alle- 
magne. La  troupe,  composée  do  sept  premières  danseuses  et  de  cinq 
danseurs,  a  déjà  conclu  deux  engagements  avec  le  directeur  Strampfer, 
de  Vienne,  pour  le  mois  de  juin,  et  avec  le  directeur  Wirsing,  de 
Prague,  pour  le  mois  de  juillet. 


AVIS  A  m.  lES  DIRECTEURS  DE  THÉÂTRE. 

Les  parties  d'orchestre  de  FLEUR  DE  THÉ,  qu'on  grave  en  ce  moment, 
seront  à  leur  disposition  dans  un  bref  délai,  et  avec  elles  la  partition  de 
piano,  arrangée  pour  la  conduite  de  l'orchestre. 


s.  DUFOUR. 


CJIIEZ  G.  DRAlVntrS  ET  s.  nUFOUIt,  £inTEUR8,  103,  RtJK  DK  RICHEIilKU. 


Il^ 


I®lf 


Oratorio  en  deux  parties,  musi(iue  de 

J.  -  S.     BACH 

DONT    LA   PREMIÈRE    PARTIE    ET    LE    CHOEUR    FINAL    ONT   ÉTÉ    EXÉCUTÉS     LE    7    MAI    EN    l'ÉGLISE   DE   SAINTE  -  GENEVIÈVE , 
SOUS     LA    DIRECTION      DE     M.      PASDELOUP. 

La  Partition  complète,  pour  Chant  et  Piano,  in-8%  net  :  10  francs. 


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IM  ^OUTÛ^M  "BM 


Net:  i  fr. 


Net  :  75  c. 


Par  A.  Kappelmann.  Net  :  1  fr.    '   Net  :  75  c.  Par  KJIraefs. 

CHOEURS  SUÉDOIS,  exécutés  à  la  séance  de  l'Orphéon  de  la  ville  de  Paris. 

Édition  Populaire 

DE 

PARTITIONS  D'OPÉRAS,  D'OPÉRAS-COMIQUES  ET  D'OPÉRETTES 


FORMAT  DE  POCHE. 


Paroles  et  Mntiiqae  sans  accompagnement 

Avec  analyse  de  la  pièce. 


FORMAT  DE  POCHE. 


N°  i .   Adber.     fra.    DIA.V0I^0,     Opéra -comique,  net  :  3  fr. 
N°2.   Adam.     LE   POSTILLON   DE    LON JUMEAU,     op.-com.,net:  s  fr. 


POUR  PARAITRE  LE  MOIS  PROCHAIN  : 

N"  3.   ROBERT  LE  DIABLE net  :  4  fr .  [    N"  4.  MARTHA  (quatre  actes) :  net  :  3  fr.   50 

N°  5.   LES  DRAGONS  DE  VILLARS net  :  3  fr. 

(Sera  continué.) 

N.B. — Ces  éditions, d'un  format  très-cominode  et  d'un  bon  marché  exceptionnel,  se  recommandent  spécialement  aux  artistes  dramatiques 

pour  remplacer  les  rôles  copiés,  aux  spectateurs  pour  suivre  la  musique  et  la  pièce  à  la  représentation,  aux  sociétés  chorales,  etc. 


BUREAUX    A    PARIS  "•    BOULEVARD   DES   ITALIENS,  1. 


o§'  Année. 


M  Mai  18G8. 


ON  S'ABONNE  : 

Dans  les  Dépnrtunients  et  tV  rûlranifer, 

chtaz  tous  les  tfarchands  àe  Musique,  lis  Librnircs, 

et  aux  l^'Jreaux  <lcr  Messageries  et  des  l'oi^ic^. 


REVUE 


PRIX    DE    L'ABONNEMENT: 

Paris '2i   r.  (jar  an 

Dtiparlements.  Bflgiquo  et  Suisse....    30  •>       14. 

Étrungor 34  "       id. 

Le  Journal  parait  le  Dimancho. 


GAZETTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


SOMMAIRE,  —  Tliéâtre  impérial  de  l'Opéra  -  Comique  :  la  Pénitente,  opées.- 
comique  en  un  acte,  paroles  de  MM.  Henri  Meilhac  et  W.  Busnacli,  musique 
de  Mme  de  Grandval,  par  Panl  Bernard. —  Chœurs  suédois  et  norvégiens, 
par  Maurice  Bourges.  —  Mortier  de  Fontaine.  —  Revue  bibliographique, 
par  Artbnr  Pong^in.  —  Concours  choral  et  instrumental  de  la  ville  de 
Melun,  par  A.  Elwart.  — Concerts  et  auditions  musicales  delà  semaine.  — 
Nouvelles  des  théâtres  lyriques.  —  Nouvelles  diverses.  —  Annonces. 


THEATRE  IlfiFEBIÂL  DE  L'OPÉRi-COSIQUE. 

liA  PÉIVITEKTXE, 

Opéra-comique  en  un  acte ,  paroles  de  MM.  Henri  Meilhac  et 

W.  BusNACH,  musique  de  Mme  de  Grandval. 

(Première  représentation  le  13  mai  1868.) 

Commençons  par  revêtir  notre  armure  de  chevalier  français,  et 
par  orner  d'une  faveur  rose  notre  plume.  Il  ne  s'agit  pas  aujour- 
d'hui de  juger  simplement  l'un  de  nos  pairs  ou  émules,  mais  bien 
une  dame  du  plus  grand  monde  qui,  loin  de  dédaigner  l'arène 
artistique,  s'y  est  fait  connaître,  depuis  longtemps  déjà,  par  bon 
nombre  de  charmantes  mélodies  et  par  quelques  œuvres  plus  sé- 
rieuses. 

Mme  la  vicomtesse  de  Grandval,  très-appréciée  dans  nos  salons 
parisiens,  chante  elle-même  avec  beaucoup  de  goût  des  composi- 
tions essentiellement  mélodiques  et  parfaitement  rehaussées,  du 
reste,  par  un  mérite  réel  de  science,  de  distinction  et  de  bon 
goût. 

Aussi  le  public  aristocratique  lui  est-il  essentiellement  favorable 
et  dévoué  ;  il  semble  fier  de  compter  dans  son  sein  une  person- 
nalité aussi  remarquablement  artistique  que  Mme  de  Grandval. 

En  1863,  Mme  de  Grandval  essayait  ses  forces  de  compositeur 
dramatique  sur  le  théâtre  Lyrique  dans  un  opéra-comique  en  un 
acte,  les  Fiancés  de  Rosa,  assez  bien  accueilli.  En  1864  elle  don- 
nait à  Bade  un  nouvel  ouvrage  appelé,  je  crois,  la  Comtesse  Eva. 
Là,  elle  remportait  un  succès  qui  devait  lui  faire  bien  augurer  de 
l'avenir. 

Plus  récemment,  cet  hiver  même,  Mme  de  Grandval  nous  fai- 


sait entendre  une  Messe  en  musique  renfermant  de  fort  belles  qua- 
lités, et  marquée  parfois  de  ces  touches  lumineuses  qui  annon- 
cent la  griffe  du  maître. 

Le  théâtre  de  l'Opéra-Comique,  qui  bien  décidément  a  rallumé 
la  lanterne  de  Diogène  et  qui  cherche  un  homme,  je  veux  dire  un 
compositeur,  a  cru  devoir  appeler  Mme  de  Grandval  au  tribunal 
de  sa  lumière.  C'est  donc  ainsi  que  nous  avons  été  convié  à  voir 
et  à  juger  la  nouvelle  «  partitionnette  »  de  la  Pénitente. 

Je  dis  «  partitionnette,  »  parce  que  la  pièce  est  excessivement 
courte,  —  cela  peut  passer  pour  une  qualité ,  et  aussi  parce  que 
la  musique  en  est  peu  développée,  —  ce  qui  annonce  au  moins 
le  tact  de  savoir  se  maintenir  dans  son  cadre. 

Cependant,  si  vous  tenez  à  savoir  ce  qu'est  cette  pénitente,  il 
faut  d'abord  que  je  vous  annonce  le  mariage  du  seigneur  Torri- 
bio,  gourmet  émérite,  avec  la  fille  d'un  marchand  de  comestibles, 
chez  lequel  il  faisait  souvent  de  longues  séances  gastronomiques 
entremêlées  d'œillades  à  la  beauté.  Le  mariage  est  consommé  de- 
puis quinze  jours  au  grand  désappointement  de  la  jeune  femme, 
qui  comptait  trouver  dans  le  matrimonium  autre  chose  qu'un  long 
et  interminable  repas.  Mais  depuis  la  veille  un  événement  nouveau 
est  survenu.  En  mangeant  outre  mesure  d'un  certain  pâté,  le  sei- 
gneur Torribio  est  tombé  à  la  renverse,  une  indigestion  monstre 
s'est  déclarée,  et,  finalement,  ses  jours  sont  en  danger.  Il  lui  faut 
donc  faire  pénitence  de  ses  péchés  de  jeunesse,  fort  nombreux,  pa- 
raît-il, et  comme  il  ne  peut  payer  de  sa  personne,  c'est  sa  femme 
qui  entrera  ('  ns  un  cloître  à  cette  intention.  Naturellement  la 
pauvretL.  ;<  : ,  mais  on  lui  envoie  pour  l'endoctriner  un  jeune 
neveu  d.:  iur  Torribio,   destiné  lui-même  à  entrer  dans  les 

ordres  '  i  onfit  d'une  sainte  vocation.  La  scène  se  voit  d'ici; 

ce  n'est  (•  oinl  la  jeune  femme  qui  est  endoctrinée,  mais  bien  le 
pauvre  novice  qui  devient  affolé,  énamouré,  subjugué.  Les  deux 
amoureux  vont  fuir  quand  on  leur  annonce  que  le  pâté  vient  enfin 
de  passer  et  que  le  seigneur  époux  et  oncle,  n'ayant  plus  besoin 
de  faire  pénitence,  rend  la  liberté  à  sa  chère  moitié.  Celle-ci  en 
profile  pour  dire  au  beau  neveu  qu'un  uniforme  lui  siéra  mieux 
qu'une  soutane  et  pour  lui  promettre  de  veiller  désormais  sur  son 
avenir.  La  morale  n'est  pas  sauvée,  je  l'avoue,  mais  la  gourman- 
dise et  l'amour  y  trouvent  leur  compte;  ce  sont  deux  si  charmants 
péchés  I 


^M 


KEVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


Ce  canevas  n'abonde  pas  précisément  en  situations  de  nature  à 
enflammer  le  musicien.  L'ouverture,  courte  comme  la  pièce,  s'an- 
nonce assez  bien.  Un  premier  mouvement  religieux  et  un  boléro 
final  semblent  préluder  à  un  succès;  mais  le  reste  de  la  partition 
se  couvre  alors  d'une  teinte  neutre,  qui  n'est  ni  assez  bouffe,  ni 
assez  sentimentale,  ni  assez  rêveuse,  ni  assez  brillante,  et  qui  laisse 
l'auditeur  dans  un  milieu  froid,  dont  il  se  contente  peut-être  parce 
qu'il  se  sent  toujours  en  bonne  compagnie,  mais  qui  ne  peut  le 
faire  s'élever  beaucoup  dans  le  thermomètre  de  l'enthousiasme. 

Il  faut  pourtant  citer  les  couplets  du  pâté  chanté  par  Potel,  sur 
ces  paroles  :        • 

Lorsque  tout  passe  sur  la  terre, 
'_  Lui  seul  ne  passe  pas. 

Jjr  ai  remarqué  un  effet  comique  du  meilleur  aloi.  Suit  un  trio 
des- plus -distingués  dans  un  sentiment  Religieux  conventionnel,  au 
milieu  duquel  se  présente  une  rentrée  charmante  sur  ces  mots  : 
Le  ciel  soit  avec  vous.  Voici  dans  un  duo  une  jolie  phrase  musi- 
cale sur  cette  jolie  phrase  poétique  : 

Puisqu'il  créa  la  jeunesse  et  l'amour, 

C'est  qu'il  lui  plaît  qu'on  foit  jeune  et  qu'on  aime. 

Le  public  a  beaucoup  applaudi  un  petit  trio  bouffe  que,  moi,  j'ai 
trouvé  un  peu  trop  Boulfes-Parisicns.  Parlcrai-je  d'un  boléro  et 
d'un  fandango  chantés  par  Mlle  Cico?  J'y  rencontre  bien  les  inter- 
valles mineurs  et  les  rhythmes  traditionnels  ;  mais  voilà  tout. 

Telle  quelle,  cependant,  l'œuvre  de  Mme  de  Grandval  est  des 
plus  honorables.  Elle  renferme  toutes  les  qualités  que  je  lui  con- 
naissais, la  distinction,  les  jolies  harmonies,  les  mélodies  faciles, 
le  tour  élégant,  mais  elle  ne  m'annonce  rien  de  plus,  et  je  crains 
surtout  d'y  remarquer  l'absence  du  sentiment  scéiiiquc.  L'orchestre 
est  habilement  traité,  il  reste  seulement  un  peu  terne;  une  autre 
fois,  et  ce  sera,  dit-on,  l'année  prochaine  aux  Italiens,  IVLne  de 
Grandval  saura  bien  arracher  le  voile  qui  le  couvre. 

Mlle  Cico  se  tire  fort  bien  de  son  rôle  assez  difficile  et  le 
chante  on  ne  peut  mieux.  Mais  ce  n'est  pas  elle  qui  donnera  ja- 
mais de  la  chaleur  à  ce  qui  en  manque.  Le  jeune  Leroy  est  beau- 
coup meilleur  que  dans  Mlle  Sylvia;  je  suis  heureux  de  le  dire. 
Potel  est  assez  amusant  dans  le  personnage  d'un  vieil  intendant  ; 
mais  pourquoi  tremblote-il  comme  un  vieux  de  quatre-vingt-dix 
ans,  tout  en  chantant  à  pleins  poumons  ? 

J'ai  oublié  de  dire  que  nous  étions  en  Espagne.  En  France, 
Dieu  merci  !  les  pâtés  sont  moins  lourds  et  les  femmes  moins 
légères.  Du  moins,  nous  l'espérons. 

Paul  BERNARD. 


CHŒUfiS  SDËDOIS  ET  NORVEGIENS. 

A    QUATRE  PARTIES,   POUR  VOIX  d'hOMMES, 

lie  Bol  des  llers,  —  le  Cbant  de  Printemps,  —  le  Ctaant 
du  Bossignol,  —  le  Cortège  de  IVoce. 

La  publication  de  ces  quatre  chants  en  chœur,  et  de  ceux  qui 
les  suivront  sans  doute,  s'explique  par  le  succès  extraordinaire 
qu'ils  ont  si  justement  obtenu  à  l'Opéra,  lorsque  la  Société  lyrique 
des  étudiants  d'Upsal ,  de  Copenhague  et  de  Lund,  venue  à  Paris 
pour  l'Exposition,  les  a  fait  entendre  dans  un  concert  qui  a  laissé 
d'intéressants  souvenirs.  Le  timbre  frais  et  sonore  des  voix  Scan- 
dinaves, l'ensemble  remarquable  d'une  exécution  nette  et  très-étu- 
diée,  ont  certainement  contribué  à  l'effet  ;  mais  la  meilleure  part 
de  cette  brillante  réussite  revient  de  droit  au  caractère  original  de 
ces  mélodies  chorales,  dont  le  coloris  exotique  a  quelque  chose 
de  neuf  pour  l'oreille  française,  un  peu  blasée  par  la  formule.  Le 


public  devait  trouver  un  attrait  inattendu  à  ses  compositions,  où 
passe  le  souffle  d'une  poésie  tantôt  sauvage,  tantôt  gracieuse  et 
tendre,  où  respirent  avec  une  grande  vérité  d'expression  ici  une 
douce  langueur  mélancolique,  là  une  gaieté  ingénue  et  candide. 

Evidemment  nos  sociétés  orphéon  iques  ne  peuvent  que  gagner 
à  enrichir  leur  répertoire  de  cet  élément  nouveau  d'étude  et  de 
succès.  En  musique  comme  dans  toutes  les  choses  de  la  pensée, 
il  est  utile  de  se  retremper  aux  sources  étrangères,  surtout  aux 
sources  mal  connues  ou  encore  inexplorées  :  et  cela ,  non-seule- 
ment pour  les  exécutants  qui  apprennent  ainsi  à  varier  les  moyens 
et  les  effets,  pour  les  auditeurs  dont  l'intelligence  étend  de  plus  en 
plus  son  horizon,  mais  aussi  pour  la  jeune  école  de  composition, 
trop  portée  aujourd'hui  à  sacrifier  le  simple  au  compliqué,  à  faire 
laborieusement  dans  ses  partitions  de  la  philosophie  spéculative, 
de  la  poésie, abstraite,  au  lieu  d'obtenir  du  sentiment  même  le  jet 
d'une  inspiration  spontanée,  appelée  du  cœur  et  non  de  la  tête. 
Le  plus  sûr  remède  serait  (d'autres  l'ont  dit  avant  nous)  de  se 
raviver  au  contact  des  mélodies  nationales,  filles  anonymes  du 
génie  populaire.  C'est  dans  ce  vaste  trésor  que  l'imagination  mu- 
sicale moderne  trouverait  à  recueillir  des  germes  régénérateurs, 
capables  de  la  féconder  à  nouveau  et  de  dompter  les  influences 
énervantes  qui  menacent  de  la  stériliser. 

Sous  ce  rapport  on  ne  saurait  trop  encourager  les  publications 
du  genre  de  celle  que  nous  avons  sous  les  yeux.  Déjà  la  maison 
Braudus  et  Dufour,  dont  l'initiative  a  rendu  si  souvent  à  l'art  de 
précieux  services,  avait  édité  un  curieux  recueil  de  Mélodies  sué- 
doises, mises  en  vogue  par  la  célèbre  Jenny  Lind.  Le  sentiment 
musical  de  la  Scandinavie  se  révélait  avec  une  autorité  singulière 
dans  ces  cantilènes  d'un  tour  naturel,  d'une  touchante  suavité, 
auxquelles  l'extrême  fidélité  de  la  traduction  française  a  su  con- 
server toute  la  pureté  de  leur  couleur  originale.  Ilda,  la  Petite 
Chanteuse,  le  Retour  du  Lapon,  l' Hymne  au  roi  de  Suède,  les  Adieux 
de  l'Épousée,  sont  bien  de  véritables  chauts  du  Nord,  abs(>lument 
distincts  de  la  musique  du  reste  de  l'Europe,  et  dont  la  tournure 
impressionne  vivement  l'auditeur.  Quoi  de  plus  simple  cependant 
que  cette  musique  populaire,  toute  en  dehors  de  la  science  médi- 
tative et  calculée?  Elle  a  sa  source  dans  un  ordre  d'inspirations 
naïves,  de  pur  élan,  qui  ne  savent  rien  ou  que  peu  de  chose  des 
lois  ingénieuses  de  l'art  officiel  et  convenu.  Le  rustique  chanteur, 
le  rhapsode  montagnard  qui  en  est  l'auteur,  sans  nulle  conscience 
du  sens  musical  que  Dieu  lui  a  donné,  obéit,  en  improvisant,  à  je 
ne  sais  quelle  impulsion  irrésistible,  qui  lui  fait  trouver  du  charme 
à  traduire  dans  sa  manière  rude  et  fruste  les  émotions  de  joie  ou 
de  tristesse,  de  paix  ou  de  trouble  dont  il  est  pénétré.  Son  cœur 
passe  tout  entier  et  se  moule  avec  force  dans  des  cantilènes 
instinctives,  souvent  incorrectes,  même  bizarres,  mais  dont  la  sa- 
veur énergique  saisit  par  sa  franchise.  La  véritable  couleur  locale 
est  bien  là  dans  son  éclat  le  plus  vif.  La  chanson  porte  profondé- 
ment empreint  le  cachet  de  nationalité  de  son  auteur,  presque 
toujours  inconnu. 

Vainement  tout  l'art  du  monde,  l'art  civilisé  s'efforcerait-il  d'i- 
miter ces  chants  primesautiers.  Il  n'arrive  jamais  qu'à  des  calques 
pâles,  effacés,  languissants.  Aussi  ne  sait-il  rien  de  mieux,  lors- 
qu'il veut  arborer  dans  une  œuvre  une  couleur  nationale  quel- 
conque, que  d'emprunter  ces  mélodies  mêmes,  enfants  vivaces  de 
la  nature.  L'effet  en  est  sûr,  infaillible.  Qui  ne  se  souvient,  par 
exemple,  de  l'impression  produite  dans  la  Dame  blanche  par 
l'air  écossais  du  troisième  acte,  dans  lUartha  par  la  romance  de 
la  rose,  dans  le  Désert  par  la  chanson  arabe,  dans  le  Faust  de 
Berlioz  par  le  thème  de  la  marche  hongroise?. . .  George  Sand  a 
dit  quelque  part  :  «  Pour  qui  saurait  exprimer  puissamment  et 
naïvement  la  musique  des  peuples  divers  et  pour  qui  saurait  l'é- 
couter comme  il  convient,  il  ne  serait  pas  nécessaire  de  faire   le 


DE  PARIS, 


155 


tour  du  monde,  de  voir  les  différciiles  nations,  d'entrer  dans  leurs 
monuments,  de  lire  leurs  livres  et  de  parcourir  leurs  steppes, 
leurs  montagnes,  leurs  jardins  ou  leurs  désorts.  Un  chant  juif 
bien  rendu  nous  fait  pénétrer  dans  la  synagogue,  toute  l'Ecosse 
est  dans  un  véritable  air  écossais,  comme  toute  l'Espagne  est  dans 
un  véritable  air  espagnol.  » 

Rien  n'est  plus  exact;  et  toute  la  Norvège  est  bien  aussi  dans 
l'air  populaire  de  la  ballade  norvégienne,  dont  M.  Anibroise  Tho- 
mas a  eu  le  bon  esprit  d'enrichir  le  quatrième  acte  de  son  Ham- 
let.  Crtte  ballade,  c'est  le  Roi  des  Mers  (Necken's  Polska),  mélodie 
étrange  et  délicieuse  qui  exhale  le  parfum  de  naïveté  plaintive  des 
antiques  sagas  Scandinaves.  On  sait  avec  quelle  poésie  animée 
Mlle  Nilsson  la  chante  et  l'idéalise  à  l'Opéra. 

La  version  du  Roi  des  Mers,  écrite  pour  voix  d'hommes  à  qua- 
tre parties  dans  la  collection  dont  il  s'agit  ici,  a  plus  d'authenti- 
cité. Elle  est  de  tous  points  semblable  au  type  consacré  par  l'exé- 
cution des  étudiants  d'Upsal.  L'indication  des  nuances,  si  adroite- 
ment contrastées,  y  est  exactement  la  même.  Le  scrupule  de  par- 
faite conformité  a  été  poussé  jusqu'à  laisser  subsister  l'harmonie 
excentrique  de  quarte  juste,  entendue  à  découvert,  au  commence- 
ment de  la  neuvième  mesure  et  de  la  onzième.  Nous  signalons  à 
l'attention  de  nos  sociétés  chorales  le  piquant  délîut  des  deux 
strophes  du  Roi  des  Mers,  qui  embrasse,  en  s'élevant  par  tierces 
successives,  les  intervalles  mélodiques  de  septième  majeure  et  de 
neuvième  majeure.  Il  y  a  aussi  dans  la  manière  dont  le  chant 
même  est  écrit  une  irrégularité  qui  ajoute  à  l'originalité  de  la 
couleur.  La  note  finale  de  chaque  période,  qui  devrait  naturelle- 
ment reposer  sur  le  premier  temps  de  la  mesure,  tombe  obstiné- 
ment sur  le  deuxième  ou  sur  le  troisième.  Il  eût  été  bien  facile  de 
rétablir  l'équilibre  rhythmique  en  écrivant  la  mélodie  de  sorte 
qu'elle  commençât  sur  le  troisième  temps  :  la  cadence  finale  de 
chaque  phrase  se  serait  faite  par  conséquent  sur  le  premier.  Evi- 
demment le  morceau  aurait  gagné  en  correction;  mais  peut-être 
perdrait-il  quelque  chose  à  ne  se  plus  présente)'  avec  cette  appa- 
rence de  naïve  gaucherie,  qui  ne  messied  point  dans  un  air  tout 
populaire,  du  genre  de  ceux  qu'a  recueillis  le  poëte  Geyer,  le  pa- 
tient éditeur  des  Folk-Visor  (Chants  du  Peuple).  L'instinct  y  prime 
l'art. 

Ce  caractère  est  moins  exclusif  dans  le  Chant  de  Printemps 
(Varsang)  et  dans  le  Chant  du  Rossignol  (Suomis'  Sang).  Cela  vient 
de  ce  que  ces  deux  gracieuses  compositions  chorales  sont  l'œuvre 
de  véritables  artistes,  Kapfelmann  et  Pacius.  Le  style  en  est  régu- 
lier, l'harmonie  élégante  et  choisie,  la  distribution  vocale  habile- 
ment entendue.  Le  Chant  de  Printemps,  qui  a  l'allure  posée  d'une 
marche  à  demi  solennelle,  respire  une  majesté  sereine ,  une  ten- 
dresse pure  et  douce.  L'effet  en  est  grand.  Il  résulte  moins  de  la 
beauté  de  la  mélodie  que  d'un  entrelacement  heureux  des  cordes 
vocales,  employées  avec  beaucoup  d'adresse  dans  ce  que  leur  tim- 
bre a  de  plus  vibrant  ou  de  plus  mystérieux.  Aux  mêmes  qualités, 
le  Chant  du  Rossignol,  de  Pacius,  joint  le  mérite  d'une  rhythmopée 
harmonique  particulièrement  noble.  Quelques  répliques  en  style 
d'imitation  ne  nuisent  nullement  à  la  clarté  de  la  strophe ,  qui  se 
termine  par  une  péroraison  brève,  mais  pleine  de  charme  :  «  Ré- 
pétez, échos.  » 

Remarquons,  à  ce  sujet,  que  le  génie  musical  du  Nord  se  plaît 
à  conclure  par  une  phrase  plus  saillante  que  tout  le  reste  de  la 
cantilène.  Le  rhythme  s'y  montre  plus  accentué  ;  l'harmonie,  plus 
riche  et  plus  incisive;  les  notes  vocales,  plus  éclatantes  et  mieux 
associées  pour  enchanter  l'ouïe.  Le  dernier  trait  veut  être  le  plus 
acéré  ou  le  plus  délicat. 

Notre  remarque  se  trouve  parfaitement  justifiée  par  le  Cortège 
de  noce  du  lac  d'Hardanger,  chœur  norvégien.  Quoique  le 
chant  tout  entier  ait  beaucoup  d'agrément  et  de  grâce,  la  palme 


reste  acquise  au  refrain  imitatif,  qui  unit  le  ravissant  efl'et  d'une 
mélodie  pittoresque,  dite  par  les  ténors,  au  balancement  cadencé 
d'une  double  pédale  murmurée  par  les  voix  graves. 

Dans  cotte  composition  d'une  couleur  locale  vive  et  attrayante, 
le  musicien  n'est  pas  demeuré  au-dessous  de  son  sujet.  Les  vers 
du  texte  décrivent  l'azur  vaporeux  des  montagnes,  la  fraîcheur 
des  vallées  parées  de  verdure,  le  lac  bleu  de  Hardanger  oii  le 
soleil  baigne  ses  rayons,  l'ivresse  de  la  nature  au  réveil  du  prin- 
temps, puis  le  pimpant  cortège  et  les  joyeuses  chansons  de  la 
noce  qui  passe  en  bateau.  Eh  bien,  tout  cela  est  dans  la  musique. 
Ce  tableau  de  demi-genre,  que  le  pinceau  germanique  moderne 
s'est  plu  souvent  à  retracer,  vit  et  respire  dans  cette  jolie  pièce 
chorale,  à  la  fois  populaire  et  distinguée,  écrite  à  merveille  pour 
faire  valoir  les  voix,  pour  captiver  l'oreille  et  l'imagination.  C'est 
vraiment  une  bonne  fortune  pour  nos  sociétés  orphéoniques.  Nous 
serions  fort  surpris  si  elles  ne  faisaient  pas  aux  quatre  chœurs  de 
cette  publication  l'accueil  empressé  qu'ils  méritent. 

Maurice  BOURGES. 


nORTIER  DE  FONTAINE. 

Henri-Louis-Stanislas  Mortier  de  Fontaine,  naquit  à  Wisniowiec, 
en  Wolhynie,  le  13  mai  1816.  Ses  parent  s'étaient  fixés  à  Milan, 
où  Mme  Mortier  suivait  les  enseignements  d'un  nommé  Donaenico 
Scappa  ;  une  indisposition  l'ayant  empêchée  un  jour  de  recevoir 
son  professeur,  celui-ci  donna  à  l'enfant,  alors  âgé  de  sept  ans,  les 
leçons  qu'il  consacrait  à  la  mère.  Les  agitations  d'un  voyage  s'ac- 
commodaient mal  avec  les  nécessités  du  travail;  ce  n'estqu'à  Vienne 
que  l'enfant  put  continuer  ses  études  auprès  d'Antoine  Hladislas, 
aussi  modeste  que  son  maître  d'aventure  de  Milan.  Ce  ne  fut  qu'à 
son  retour  en  Pologne  qu'il  put,  sous  Ernemann,  en  entendant 
Chopin,  s'adonner  à  son  penchant  pour  le  piano. 

Sur  ces  entrefaites,  des  revers  vinrent  accabler  la  famille 
Mortier  de  Fontaine.  La  mère  se  fit  institutrice,  le  fils  donna 
des  leçons  de  piano.  En  octobre  1830,  le  petit  pianiste  abandonna 
le  pays  natal.  Après  des  déceptions  cruelles,  il  voulut  revoir 
sa  mère  en  Pologne,  mais  pour  passer  la  frontière  il  fit  des 
tentatives  qui  furent  vaines.  C'est  à  Dantzig  que  le  jeune  Mortier 
donna  son  premier  concert  ;  de  là  il  se  rendit  à  Copenhague  et 
fut  comblé  de  faveurs  par  le  duc  de  Montebello,  ambassadeur  de 
France.  Mortier  aborda  ensuite  à  Kiel  les  plus  récentes  composi- 
tions de  Mendelssohn  et  les  dernières  de  Beethoven;  dans  ce  con- 
cert, l'orchestre  fut  dirigé  par  un  jeune  étudiant  de  l'université, 
Otto  Jahn,  devenu  par  la  suite  l'une  des  gloires  de  la  philologie 
allemande.  L'année  suivante  amena  Mortier  à  Paris,  où  sa  première 
visite  fut  pour  Chopin,  qui  l'accueillit  à  bras  ouverts  :  «  11  suffit, 
lui  dit-il,  que  tu  aies  respiré  l'air  de  Varsovie  pour  trouver  en 
moi  un  ami  et  un  conseiller.  »  Et  il  tint  parole.  Un  établissement 
de  concerts  classiques  venait  d'être  créé  sous  le  titre  de  Gymnase 
musical  et  la  direction  de  Tilmant.  Mortier  y  joua  four  la  première 
fois  en  France  des  œuvres  de  Mendelssohn,  entre  autres  le  concerto  en 
sol,  devenu  depuis  le  pont  aux  ânes  de  tous  les  pianistes.  En  1836, 
Mortier  épousa  une  cantatrice  de  talent,  avec  laquelle  nous  le  re- 
trouvons à  Milan,  où  Listz  et  lui  exécutèrent  un  duo  à  deux  pianos. 
A  partir  de  ce  jour-là  la  presse  s'occupa  de  lui,  étudia  son  talent, 
reconnut  l'originalité  de  son  exécution,  suivit  attentivement  son 
travail  d'exploration.  Cependant,  bien  qu'il  contribuât  à  vulgariser 
J.-S.  Bach,  il  n'avait  exliumé  de  l'oubli  que  le  quatrième  concerto 
de  Haendel. — En  avril  1842,  un  grand  concert  au  Conservatoire 
posa  d'une  manière  décisive  Mortier  de  Fontaine  à  Paris.  Il  y  pro- 
duisit la  fantaisie  op.  80  de  Beethoven,  avec  un  orchestre  de  cent- 


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REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


vingt  musiciens  et  quatre-vingts  choristes  dirigés  par  Hector  Berlioz. 
Les  journaux  parisiens  le  mirent  si  bien  à  la  mode  que  ses  appari- 
tions subséquentes  à  Berlin,  à  Leipzig,  à  Dresde  furent  autant  de 
triomphes  (1843-44).  Cependant  l'intérieur  de  l'artiste  était  moins 
heureux  que  sa  vie  publique;  trop  jeune  pour  comprendre  l'im- 
portance du  mariage,  il  alla  en  Suisse  où  il  obtint  le  divorce. 
En  1830,  ayantr épousé  Mlle  Marguerite  Limbach,  il  résida,  tantôt 
à  Saint-Pétersbourg,  tantôt  à  Moscou.  Au  commencement  de 
l'hiver  1860,  la  mort  do  la  veuve  de  Nicolas  I""'  ayant  suspendu  la 
série  de  ses  concerts,  Mortier  de  Fontaine  vint  à  Munich,  où  l'appe- 
lait la  perspective  d'obtenir  là  direction  du  Conservatoire.  Il  y  fut 
fêté  par  les  artistes,  choyé  par  la  noblesse.  Les  choses  pourtant 
ne  tournèrent  pas  aussi  bien  que  tout  semblait  le  présager,  malgré 
les  services  rendus  à  l'art,  services  aussi  évidents  que  gratuits. 
Déçu  dans  ses  espérances  et  frappé  d'un  coup  terrible,  la  mort  de 
sa  femme,  il  s'exila  de  Munich,  allant  promener  au  hasard  de  sa 
fantaisie  sa  douleur  et  ses  regrets. 

Le  fait  capital  de  la  vie  artistique  de  Mortier  de  Fontaine  est 
d'avoir  été  le  premier  vulgarisateur  des  dernières  sonates  de  piano  de 
Beethoven  et  d'avoir  tiré  de  la  poussière,  où  ils  reposaient  depuis 
des  siècles,  maints  chefs-d'œuvre  de  tant  de  grands  maîtres. 

Après  l'exposé  d'une  vie  aussi  remplie,  il  devient  puéril  de  par- 
ler des  distinctions  dont  un  tel  ai'tiste  a  pu  être  comblé.  Nous  nous 
bornerons  à  faire  connaître  la  lettre  par  laquelle  notre  illustre  col- 
laborateur, M.  Fétis,  prit  congé,  à  Spa,  de  Mortier  de  Fontaine. 

«  A  Monsieur  Mortier  de  Fontaine,  célèbre  pianiste. 

»  J'éprouve  le  besoin  de  vous  exprimer  mes  sentiments  de  haute 
estime  et  d'admiration  pour  votre  beau  talent  et  pour  les  beautés 
de  premier  ordre  répandues  dans  les  œuvres  des  maîtres  illustres 
que  vous  interprétez  si  bien.  Je  n'oublierai  jamais  les  deux  heures 
que  j'ai  passées  près  de  vous,  ni  le  vif  plaisir  que  j'ai  goûté  en 
vous  entendant  rendre  des  œuvres  sublimes,  —  presque  incon- 
nues, —  avec  une  perfection  qui  ne  laisse  rien  à  désirer. 

«  Recevez,  Monsieur,  l'expression  de  mes  sentiments  les  plus 
sympathiques. 

»  Spa,  28  août  1867.  Fétis.  » 


REVUE  BlfiLIOGRÂFmQUE. 

VX    lilVBE    I!KCO]IIPL.ET     (1). 

Décidément  —  et  c'est  une  remarque  triste  à  faire  —  les  efforts  des 
artistes  et  des  écrivains  spéciaux  sont  en  pure  perte  lorsqu'il  s'agit  de 
faire  connaître  les  mystères  d'un  art  quelconque,  d'en  éclairer  les  obs- 
curités, en  un  mot  de  le  vulgariser.  La  musique  surtout  semble  jouir 
sous  ce  rapport  d'un  privilège  dont  certes  elle  se  passerait  bien.  On  ne 
nous  lit  pas  ou  on  nous  lit  mal ,  et  à  coup  sur  on  ne  nous  comprend 
point.  Aussi,  qu'arrive-t-il ?  c'est  que  lorsqu'un  homme,  un  écrivain 
étranger  à  nos  études,  se  trouve  amené,  par  une  pente  toute  naturelle 
quand  il  s'agit  de  synthèse,  à  englober  la  musique  dans  un  ouvrage 
d'ensemble  relatif  aux  arts  libéraux,  il  le  fait  à  la  légère,  sans  scrupules, 
sans  études  préalables,  et  parle  de  l'art  que  nous  chérissons  avec  une 
autorité  à  peu  près  égale  à  celle  d'un  aveugle  qui  voudrait  discuter  des 
couleurs. 

Ce  fait  vient  de  se  présenter  encore,  et  c'est  un  écrivain  intelligent, 
un  travailleur  consciencieux  d'ordinaire,  M.  Alfred  Souvîran,  qui  s'en 
est  rendu  coupable  avec  son  bictionnaire  des  termes  techniques. 

Et  d'abord,  je  prierai  le  lecteur  de  bien  remarquer  l'importance  et  la 
généralité  de  ce  titre  :  «  Dictionnaire  des  termes  techniques  de  la  science, 
de  l'industrie,  des  lettres  et  des  arts,  »  et  les  obligations  qu'il  imposait 
à  l'auteur.  La  musique  est  fort  maltraitée  dans  ce  petit  in-octavo  de  près 
de  600  pages  :  la  moitié  des  «  termes  techniques  »  qui  se  rapportent  à 


(1)  Dictionnaire  des  termes  techniques  de  la  science,  de  l'industrie,  des 
lettres  et  des  arts,  par  Alfred  Souvîran.  —  Paris,  Hetzel,  petit  in-S". 


elle  brillent  par  leur  absence,  et  la  définition  des  autres  laisse  considé- 
rablement à  désirer.  Je  ne  veux  pour  le  moment  m'occuper  que  d'elle, 
cependant  je  ne  puis  m'empêcher  de  faire  quelques  observations  dont  la 
justesse  évidente  tendrait  à  faire  croire  qu'elle  n'a  pas  été  seule  lésée. 
Ainsi,  dans  ce  dictionnaire  scientifique,  industriel  et  artistique,  il  n'est 
nullement  question  du  théâtre;  le  théâtre  n'est  donc  pas  un  «  art?  » 
Qu'est-ce  donc,  alors!  D'autre  part  —  en  ce  qui  concerne  les  arts  du 
dessin,  par  exemple  —  je  découvre  quelques  lacunes  au  moins  singu- 
lières, ne  fût-ce  que  celles  concernant  les  mots  :  académie,  ombre,  pein- 
ture, plan,  statvaire,  etc. 

Mais  je  m'en  tiens  à  mon  sujet,  qui  me  fournira  assez  de  griefs  contre 
l'auteur.  Je  n'en  finirais  pas  s'il  me  fallait  signaler  les  innombrables 
omissions  de  termes  relatifs  à  la  musique.  Je  vais  passer  en  revue  seu- 
lement les  plus  importants  ;  encore  ne  les  citerai-je  pas  tous.  Je  me  de- 
mande d'abord  comment  il  se  fait  que  dans  un  livre  de  ce  genre,  ces 
deux  mots  fondamentaux:  harmonie,  musique,  n'ont  pu  trouver  place. 
11  en  est  de  même  de  ceux-ci,  qui  assurément  ont  quelque  importance 
au  point  de  vue  de  la  théorie  :  accord,  consonance,  dissonance,  imita- 
tion, intervalle,  notes  de  passage,  retard,  sonorité,  suspension,  etc.  En  ce 
qui  concerne  certains  ternies  caractéristiques  relatifs  aux  principes  cons- 
titutifs de  l'art,  je  cherche  encore  vainement  les  suivants  :  blanche,  con- 
tre-temps, faux,  intonation,  juste,  justesse,  liaison,  mouvement,  note  (les 
noms  des  sept  notes  de  la  gamme,  ut,  ré,  mi,  fa,  sol,  la,  si,  seront 
chose  inconnue  pour  les  lecteurs  du  Dictionnaire,  car  aucun  ne  s'y 
trouve),  reprise,  tenue. . . 

Chose  singulière!  certaines  séries  de  mots,  représentant  un  ordre  d'i- 
dées unique,  sont  incomplètes.  Ainsi,  en  ce  qui  se  rapporte  aux  inter- 
valles, on  trouve  seconde,  tierce,  quinte,  sixte,  octave,  —  on  ne  trouve  ni 
quarte,  ni  septième;  on  remarque  la  présence  de  trio,  sextuor,  septuor, — 
et  l'absence  d'air,  duo,  quatuor.  On  rencontre  les  noms  d'un  grand 
nombre  d'instruments,  on  ne  voit  pas  ceux-ci  :  guitare,  lyre.  Cela  n'est- 
il  pas  la  preuve  d'une  négligence  impardonnable,  certains  mots  devant 
infailliblement  appeler  leurs  similaires  sous  la  plume? 

Beaucoup  d'autres  termes,  dont  je  n'ai  pas  besoin  de  faire  ressortir 
l'importance,  manquent  également;  je  citerai  particulièrement:  accom- 
pagnateur, accompagnement,  accompagner,  cantatrice,  chant ,  concert,  con- 
servatoire, écho,  instrument,  instrumentation,  madrigal,  maxime,  morceau, 
motif,  musicien,  noêt,  opéra,  opéra  comique,  opérette ,  orchestre ,  ouverture, 
parodie,  pont-neuf,  port  de  voix ,  prélude,  ritournelle,  romance,  rondeau, 
roulade,  variation,  vibration,  voix,  etc.,  etc.,  etc. 

Ce  n'est  pas  tout.  J'ai  dit  que  certaines  définitions  laissaient  considé- 
rablement à  désirer,  et  je  vais  le  prouver. 

M.  Souviran  affirme  que  cantabile  k  se  dit  des  morceaux  que  la  voix 
humaine  doit  interpréter  seule,  en  réunissant  tous  les  moyens,  tous  les 
ornements  du  chant.  »  La  première  proposition  est  exacte,  mais  que  dire 
de  la  seconde?  —  Le  mot  chromatique  est  ainsi  caractérisé  :  «  Se  dit  de 
tout  morceau  qui  procède  par  demi-tons.  »  Passe  encore  s'il  s'agissait 
de  la  musique  grecque;  mais  je  prierai  l'auteur,  pour  son  châtiment, 
de  me  présenter  un  morceau  moderne  écrit  dans  ces  conditions.— Au  mot 
basse-taille,  M.  Souviran  renvoie  à  baryton;  c'est  court,  net  et  facile, 
mais  peu  satisfaisant.  —  La  seconde  partie  de  la  définition  de  la  pause 
est  plus  fantaisiste  encore  :  Pause,  dit  l'auteur,  intervalle  de  temps  pen- 
dant lequel  un  ou  plusieurs  musiciens  demeurent  sans  chanter  ou  sans 
jouer;  il  équivaut  à  une  mesure  à  quatre  temps.  »  Alors,  avec  quoi,  s'il 
vous  plaît,  marquerons-nous  les  silences  d'une  mesure  à  deux  ou  à  trois 
temps?  —  Prenant  le  Pirée  pour  un  homme  et  un  système  de  division 
pour  un  instrument,  M.  Souviran  caractérise  le  tétracorde  en  ces  termes 
aussi  brefs  que  surprenants  :  «  lyre  à  quatre  cordes.  »  —  Quant  à  la 
viole,  qui  n'est  autre  chose  que  l'alto,  il  la  confond  avec  la  viole 
d'amour,  puisqu'il  affirme  que  c'est  un  «  instrument  à  sept  cordes.  » 

Je  ne  veux  pas  m'étendre  davantage  sur  les  incroyables  imperfections 
d'un  livre  que  de  tels  défauts  rendent,  à  mon  sens,  absolument  inutile, 
pour  ne  pas  dire  nuisible  :  inutile,  puisqu'on  n'y  trouve  pas  ce  qu'on 
cherche;  nuisible,  puisqu'on  y  rencontre  précisément  le  contraire  de  ce 
qu'il  y  faudrait  trouver.  Mais,  en  terminant,  j'exprimerai  le  regret, 
assurément  fort  légitime,  de  voir  des  travailleurs  sérieux,  intelligents  et 
honnêtes  perdre  ainsi  leur  temps  à  bâcler,  tant  bien  que  mal,  des  ou- 
vrages qui,  bien  faits,  seraient  pour  le  public  d'une  immense  utilité,  et 
qui,  faits  au  contraire  avec  si  peu  de  soin,  de  goût  et  d'attention,  ne 
peuvent  qu'égarer  et  dévoyer  le  lecteur  qui  demande  à  s'instruire. 

Arthur  POUGIN. 


CONCOUBS  CHORAL  ET  mSTRUMESTÂL 

Ouvert  par  la  Tille  de  Melnn  le  lO  mai  1868. 

Les  amis  de  la  vulgarisation  de  l'art  musical  populaire  n'ont  pas  oublié 
que  c'est  à  Melun  qu'eut  lieu,  en  1831,  le  premier  Concours  d'Orphéons 
et  Sociétés  chorales.  Depuis  cette  époque,  l'institution  fondée  et  propagée 
en  France  par  M.  Eugène  Delaporte  et  ses  coopérateurs  a  bien  grandi. 


DE  PARIS. 


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Nous  en  avons  eu  la  preuve  irrécusable  dimanche  dernier;  —  la  confiance 
de  M.  Poyez,  maire  de  la  délicieuse  Melodunum  (la  ville  de  miel),  nous 
ayant  appelé  à  présider  l'un  des  jurys  de  ses  multiples  Concours. 

Autrefois,  les  orphéonistes  se  contentaient  d'apprendre,  chaque  année, 
deux  ou  trois  chœurs  proportionnés  à  leur  force  et  au  degré  de  leur  édu- 
cation musicale.  Les  choses  sont  bien  changées  aujourd'hui.  Les  mem- 
bres des  Sociétés  musicales  lisent  à  première  vue,  soit  en  chantant,  soit 
en  exécutant;  et,  par  suite  du  progrès  incessant,  les  voilà  qui  concou- 
rent, les  uns  pour  l'exécution  de  la  musique  religieuse,  les  autres  pour 
celle  plus  difficile  peut-être  de  la  symphonie.  —  Une  seule  Société,  sur 
deux  inscrites,  s  est  présentée  à  ce  nouveau  Concours,  et  (disons-le  avec 
plaisir)  elle  a  bien  mérité,  sous  la  direction  de  M.  F.  Meinardi,  le  prix 
qui  lui  a  été  décerné.  —  Elle  a  exécuté  avec  assez  de  goùl  et  d'ensem- 
ble les  ouvertures  des  Aveugles  de  Tolède^  de  Méhul,  et  du  Démophon,  de 
Vogel,  dont  l'arrière-petit-fils  faisait  précisément  partie  de  fun  de  nos 
jurys.  Le  concours  d'excellence  a  eu  lieu  au  Théâtre.  Le  vainqueur  a 
été  le  Choral  de  Belleville,  dirigé  par  M.  Jouvin.  M.  Laurent  de  Rillé, 
l'un  des  présidents  du  jury  a  offert  à  la  Commission  d'orgiinisation  du 
Concours,  pour  être  donné  comme  prix,  un  petit  instrument  de  son 
invention  qu'il  appelle  gamme  parlante,  espèce  d'harmonium  d'une  oc- 
tave, lequel,  au  moyen  d'une  portée  et  de  huit  lira-ises  mobiles,  fait 
connaître  et  entendre,  tout  à  la  fois,  la  position  et  l'intonation  des  sons 
de  la  gamme  d'ut  écrite  en  clef  de  sol. 

Un  banquet,  présidé  par  M  le  préfet  du  département,  a  suivi  la  bril- 
lante distribution  des  prix,  qui  a  eu  lieu  sur  la  place  Saint-Jean.  Plus  de 
cent  Sociétés  ont  pris  part  à  ces  luttes  pacifiques,  —  qui  ne  coûtent  ni 
une  larme  ni  une  goutte  de  sang,  —  ainsi  que  l'a  dit,  avec  tant  de  rai- 
son, l'honorable  M.  Poyez,   dans  son  discours  aux  lauréate. 

A.  ELWART. 


CONCERTS  ET  AUDITIONS  MUSICALES  DE  LÀ  SEISÂINE. 

t%  Le  succès  que  nous  avions  prévu  et  annoncé  n'a  pas  fait  défaut 
à  la  seconde  séance  de  la  Société  des  Oratorios;  l'empressement  du  public, 
le  talent  et  la  bonne  volonté  de  l'orchestre  et  des  chœurs,  le  soin  général 
de  l'exécution,  ne  laissent  aucun  doute  rnainlenantsur  la  vogue  qui  s'at- 
tachera à  l'initiative  courageuse  de  Pasdeloup  et  à  ses  développements 
successifs.  Jeudi  dernier,  la  Passion,  de  Jean-Sébastien  Bach  (d'après 
l'Evangile  de  saint  Matthieu),  a  déroulé  une  seconde  fois  ses  larges  et 
mystiques  harmonies  sous  les  voûtes  grandioses  et  sonores  du  Panthéon. 
L'interprétation  accusait  un  progrès  réel  :  il  y  avait  surtout  et  naturelle- 
ment plus  d'assurance  dans  les  attaques  ;  les  mouvements  des  chorals 
étaient  conformes  à  la  tradition  et  les  pauses  bien  indiquées  à  la  fin  de 
leurs  phrases.  L'agencement  des  nuances  laissait  encore  à  désirer,  les  forte 
étaient  trop  accentués  et  les  piano  trop  sombres.  L'oratorio  ne  doit  rien 
emprunter  aux  effets  de  la  musique  dramatique;  sa  puissance  est  en  rai- 
son directe  de  son  calme  majestueux  et  sa  beauté  se  dégage  de  sa  sobriété 
même.  C'est  en  cela  surtout  que  le  fameux  mot  :  Pas  de  zèle!  rencontre 
son  apphcation. — La  seconde  partiede  la  séancesecomposaitdel'^tie  Kerum, 
de  Mozart,  magnifiquement  exécuté  par  l'orchestre  et  les  chœurs;  d'un 
motet  de  Haydn,  0  Fons  Pietatis,  chanté  par  Faure  avec  une  largeur 
de  style,  une  élévation  de  sentiment  qui  semblent  grandir  chaque  jour 
et  atteindre  les  limites  de  la  perfection  absolue  ;  enfin  du  l'rélude,  de 
Bach,  arrangé  pour  chœur  et  orchestre  par  Gounod,  dont  l'ampleur  ma- 
gistrale a  positivement  électrisé  l'auditoire  et  donné  la  sensation  bien 
rare  d'un  immense  vaisseau  littéralement  rempli  d'une  harmonie  en 
rapport  avec  son  acoustique  propre  et  ses  proportions  colossales.  La  soi- 
rée d'Oratorio  de  jeudi  dernier  ne  s'effacera  pas  de  sitôt  de  la  mémoire 
des  milliers  de  personnes  qui  y  assistaient.  Ce  n'est  pas  en  vain  que 
l'on  se  trouve  en  contact  avec  le  génie  traduit  avec  une  si  indiscutable 
supériorité!  La  quête  faite  parMmesla  duchesse  de  Chevreuse,  la  marquise 
de  Caraman,  les  comtesses  de  Lévis,  de  Lambel,  de  Contades,  de  Ros- 
chaïd-Dahdah,  au  profit  des  fondations  charitables  de  Sainte-Geneviève, 
séchera  bien  des  larmes,  calmera  bien  des  douleurs  et  bien  des  misères. 
—  Le  28  de  ce  mois,  la  Société  des  Oratorios  exécutera,  dit-on,  l'Elie  de 
Mendelssohn  pour  la  troisième  et  dernière  séance  de  l'année. 

,*,  La  Société  académique  de  musique  sacrée  a  donné,  mercredi  der- 
nier, sous  la  direction  de  M.  Vervoitte,  l'intéressante  séance  historique 
que  nous  avions  annoncée.  Sur  la  demande  d'un  grand  nombre  d'audi- 
teurs, charmés  de  cette  revue  rétrospective  de  l'art  musical  depuis  sa 
naissance  jusqu'à  nos  jours,  la  Société  se  réunira  de  nouveau  mercredi 
20  mai,  et  exécutera  celles  des  œuvres  de  son  répertoire  qui  n'ont  pu 
être  comportées  dans  le  programme  de  mercredi  dernier. 

»\  Un  concert  de  Camille  Saint-Saëns  est  toujours  un  événement.  Celui 
de  mercredi  dernier,  à  la  salle  Pleyel,  aussi  important  que  les  précé- 
dents par  la  nature  et  le  mérite  des  œuvres  que  le  jeime  et  savant  orga- 
niste de  la  Madeleine  y  a  fait  entendre,  lui  a  prouvé  une  fois  de  plus 
toute  la  sympathie  que  son  talent  si  élevé  et  si  vigoureux  a  rencontrée 
dans  le  monde  musical.  Son  nouveau  Concerto  de  piano,  en  sol  mineur, 
sans  être,  non  plus  que  celui  en  ré  déjà  connu  et  exécuté  le  même 


soir,  à  la  hauteur  du  concerto  de  violon ,  est  cependant  une  œuvre  de 
maître,  qu'une  organisation  musicale  d'élite  a  seule  pu  faire  éclore,  mais 
que  nous  croirion.s  plus  juste  d'appeler  Fantaisie  pour  piano  et  orciiestre. 
Le  premier  morceau,  d'un  style  large,  est  un  peu  dans  la  manière  de 
Rubinslein  ;  le  deuxième,  le  mieux  réussi,  et  qu'on  a  voulu  entendre  deux 
fois,  doit  beaucoup  à  Mendelssohn  ;  le  troisième  n'est  pas  à  la  hauteur 
des  deux  autres.  Quant  aux  trois  Bayatelles  pour  piano ,  qui  sont  beau- 
coup trop  développées  et  tourmentées  pour  justifier  leur  titre,  M.  Saint- 
Saëns  a  de  meilleurs  titres  de  renom.  Remercions-le  de  nous  avoir  fait 
connaître  diverses  compositions  dues  à  de  jeunes  et  sérieux  talents  : 
Scherzello,  de  M.  Charles  Widor,  organiste  à  Lyon;  le  Retour,  de 
M.  Georges  Bizet,  qui  a  souvent  mieux  (ait;  Romance  sans  paroles  (en 
si  bémol  mineur) ,  de  M.  Chauvel ,  ravissant  morceau  qu'on  a  bissé  et 
qui  le  mérite  bien;  Tarentelle,  de  M.  Victor  Sieg,  une  des  plus  vraiment 
originales  et  des  mieux  conduites  que  nous  connaissions,  mais  qui  a 
perdu  une  grande  partie  de  son  effet  à  cause  du  mouvement  vertigineux 
et  désordonné  que  lui  a  donné  M.  Saint-Saëns;  et  une  maturka  de 
M.  Adam  Laussel. — 11  manque  quelque  chose  M.  Saint-Saëns  si  extraor- 
dinairenient  doué  en  tout  ce  qui  louche  au  côté  pratique  de  l'art  :  c'est 
le  charme,  dont  il  semble  d'ailleurs  faire  assez  bon  marché.  Son  jeu  est 
sec  et  sans  grâce,  et  même,  chose  assez  grave,  il  n'est  pas  toujours  maître 
de  lui ,  et  l'équilibre  de  l'exécution  s'en  ressent.  Ce  n'en  est  pas  moins 
un  grand,  très-grand  musicit-n,  qui,  de  quelque  façon  qu'il  se  manifeste, 
excite  toujours  l'intérêt  et  s'impose  à  l'attention.  Rubinstein,  qui  diri- 
geait l'orchestre  pour  rendre  à  Camille  Saint-Saëns  le  service  qu'il  en 
avait  reçu  à  tous  ses  concerts  de  la  salle  Herz,  a  été  l'objet  d'une  ova- 
tion en  arrivant  au  pupitre. 

»'*»  M.  W.  Kruger  a  donné  le  dimanche,  3  mai,  sa  troisième  et  dernière 
matinée  d'élèves.  Nous  y  avons,  comme  d'habitude,  constaté  la  grande 
supériorité  de  son  enseignement,  qui  date  de  seize  ans,  sur  tant  de 
méthodes  routinières  employées  même  par  les  maîtres  en  vogue.  Ses 
deux  enfants  et  Mlle  Emma  Fumagalli  ont  eu  les  honneurs  de  la 
séance. 

»*»  Les  concerts  militaires  du  jardin  des  Tuileries  ont  été  inaugurés, 
le  1'"'  mai,  par  l'excellente  musique  du  régiment  de  gendarmerie  de  la 
garde,  dont  M.  Riedel  est  le  chef.  Les  musiques  des  autres  régiments  de  la 
garde  joueront  tous  les  jours,  de  5  à  6  heures  du  soir,  le  dimanche 
excepté,  au  même  endroit,  et  les  musiques  des  régiments  de  ligne,  ainsi 
que  celle  de  la  garde  de  Paris,  se  feront  entendre  alternativement  sur  les 
places  Vendôme  et  Royale  et  dans  les  jardins  du  Palais-Royal  et  du 
Luxembourg. 

i""*  Le  concert  donné  le  1"'  mai  par  la  Société  philharmonique 
d'Amiens,  sous  la  direction  de  M.  Deneux  de  Varenne,  a  été  splendide, 
grâce  à  la  présence  d'Adelina  Patti,  de  Délie  Sedie  et  de  Sivori. 
La  gracieuse  fée  du  chant  a  dit,  avec  son  charme  et  sa  bravoure  or- 
dinaires, la  cavatine  du  Barbier,  le  duo  du  même  opéra  avec  DeUe- 
Sedie,  VAve  Maria  de  Gounod  et  le  rondo  de  la  Sonnambula.  Delle-Sedie 
s'est  surpassé  dans  la  romance  d'/  due  Foscari,  un  air  du  Barbier,  etc. 
Quant  à  Sivori,  son  Mouvement  perpétuel  et  sa  fantaisie  sur  le  Trouvère 
lui  ont  valu  de  frénétiques  applaudissements.  Ce  concert,  le  quatre- 
vingt-dixième  depuis  la  fondation,  a  clos  avec  éclat  la  vingt-et-unième 
session  de  la  Société  philharmonique.  Il  a  fait  comme  toujours  le  plus 
grand  honneur  au  président  de  la  Société. 

t*,f  Mlle  Anna  Meyer,  revenant  de  Nice,  où  elle  a  passé  l'hiver  pour 
sa  santé,  vient  de  donner,  à  son  passage  à  Marseille,  un  magnifique 
concert;  elle  y  a  obtenu  le  plus  grand  succès.  Malgré  la  saison  avan- 
cée, la  salle  était  comble,  et  le  public  n'a  pas  craint  de  braver  la  cha- 
leur pour  venir  entendre  cette  jeune  et  intéressante  pianiste  qui  a  con- 
quis les  suffrages  de  toute  l'assistance. 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 

*'*»  Le  théâtre  impérial  de  l'Opéra  a  donné  lundi  la  Juive  ;  —  mer- 
credi, Don  Juan  ;  —  vendredi,  la  Fiancée  de  Corinthe  et  le  Corsaire,  et 
hier  samedi.  Don /uan ,  comme  représentation  extraordinaire,  laissant 
au  public  la  disposition  des  loges  louées  à  l'année. 

^*^  On  annonce  pour  demain  lundi  le  début  de  Mazzoleni  dans  le 
Trouvère,  dont  les  autres  rôles  seront  remplis  par  Mraes  Sasse  et  Bloch, 
MM.  Devoyod  et  Castelmary.  Il  chantera  ensuite  Don  Carlos  et  le  rôle  de 
Vasco  dans  l'Africaine. 

^.*ji.  En  attendant  la  reprise  d'Herculanum  qui  est  très-prochaine  et 
dans  laquelle  le  rôle  d'Helios  sera  chanté  par  le  jeune  ténor  Colin  ,  Guil- 
laume Tell,  sera  donné  mercredi  avec  Faure  et  variera  le  répertoire . 

**^  Tamberlick,  M.  et  Mme  Tiberini  ont  traité  avec  l'administration 
des  Italiens.  Ils  chanteront  à  Paris  pendant  les  trois  mois  de  l'hiver 
prochain  que  Mlle  Patti  a  promis  à  la  Russie. 

**^  Au  théâtre  des  Fantaisies-Parisiennes  a  eu  lieu,  vendredi,  une  re- 
prise très-réussie  du  Barbier  de  Paesiello.  L'espace  nous  manque  pour  en 
donner  aujourd'hui  le  compte-rendu;  mais   nous  nous  empressons  d'en 


1S8 


UEVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


constater  le  succès  dû  autant  à  la  cliarmante  musique  du  maître  qu'au 
talent  des  interprètes,  et  aux  soins  tout  particuliers  apportés  par  M.  Mar- 
tinet à  l'exécution  d'une  œuvre  qui  fit  longtemps  les  délices  de  nos 
pères.  Mlle  Darcicr,  qui  débutait  à  ce  théâtre,  s'est  surtout  fait  remar- 
quer dans  le  rôle  de  Rosine. 

»**  Le  théâtre  de  l'Athénée  a  converti  en  baignoires  ses  stalles  de 
pourtour.  Cette  amélioration  facilite  la  communication  des  fauteuils  d'or- 
chestre avec  le  foyer  et  rend  libre  la  circulation  dans  tous  les  corridors. 
Le  nouveau  système  de  ventilation  adopté  donne  une  fraîcheur  qu'on  ne 
rencontre  dans  aucun  théâtre  ;  aussi  Fleur-de-Thé  continue  triomphale- 
ment son  .succès  et  bravera  les  chaleurs  de  l'été.  Tous  les  soirs  la  salle 
est  pleine. 

si,*.  Le  même  théâtre  vient  de  recevoir  deux  actes  et  un  prologue  de 
MM-  Meilhac,  L.  Halévy  et  Léo  Delibes,  intitulés  la  Princesse  de  Ravi- 
gotte,  et  un  acte  de  MM.  Alex.  Flan  et  Paul  Henrion ,  dont  le  titre  est 
Quarante  de  Dési. 

«**  La  direction  du  théâtre  du  Palais-Royal  n'ayant  pu  .s'entendre 
pour  le  renouvellement  de  son  bail  avec  les  propriétaires  de  la  salle, 
vient  de  traiter  avec  le  marquis  d'Herfordt,  les  uns  disent  de  la  loca- 
tion, les  autres  de  l'acquisition  du  local  occupé  main'.enant  par  le 
théâtre  des  Bouffes-Parisiens,  lequel  serait  approprié  aux  besoins  de  la 
nouvelle  exploitation. 

,*^  M.  Varney,  qui  a  pendant  plusieurs  années  dirigé  l'orchestre  des 
Bouffes-Parisiens,  vient  d'être  choisi  par  la  nouvelle  direction  pour  y  re- 
prendre ces  fonctions. 

^%  La  nouvelle  administration  des  Bouffes-Parisiens  vient  d'engager 
pour  trois  ans,  à  de  tros-avantageuses  conditions,  le  jeune  chanteur  comi- 
que Alfred  Audran,  dont  nous  avons  déjà  plusieurs  fois  mentionné  les 
succès  dans  les  réunions  musicales  de  l'hiver  dernier. 

,*,  Un  certain  nombre  des  artistes  du  théâtre  de  la  Porte-Saint-Mar- 
tin sont  en  arrangement  avec  M.  Bagier  pour  donner  des  représentations 
au  théâtre  Ventadour;  ils  lui  abandonneraient  20  o/O  sur  la  recette  pour 
la  location  de  la  salle. 

^%  Les  recettes  brutes  des  théâtres  impériaux  subventionnés,  des 
théâtres  de  second  ordre,  concerts,  cafés -concerts,  etc.,  se  sont  élevées, 
pendant  le  mois  d'avril  dernier,  à  la  somme  de  1,6i2,802  francs. 


NOUVELLES  DIVERSES. 

s^%  La  Commission  d'organisation  du  grand  Concours  musical  de  Gre- 
noble vient  d'en  adresser  le  Règlement  aux  principales  Sociétés  chorales 
et  instrumentales  de  France.  Celles  qui  désirent  le  recevoir  peuvent  en 
faire  la  demande  au  secrétariat  de  la  mairie  de  Grenoble.  Les  adhésions 
seront  reçues  jusqu'au  15  juin,  délai  de  rigueur.  Les  prix  de  ces  concours 
auront  une  importance  exceptionnelle.  En  effet,  outre  la  médaille  com- 
mémorative  et  celle  accordée  aux  Sociétés  couronnées,  une  médaille  en 
argent  sera  offerte  aux  directeurs  des  Sociétés  qui  auront  remporté  un 
premier  prix.  Depuis  le  célèbre  concours  de  Saint-Denis,  oîi  tous  les 
prix  furent  décernés  en  double,  aucune  ville  n'avait  donné  l'exemple 
de  cette  générosité,  logique  après  tout,  car  à  qui  un  Orphéon  doit-il 
le  succès,  si  ce  n'est  à  son  chet"?  Ce  système  d'encouragement,  s'il  était 
adopté  partout,  contribuerait  puissamment,  en  stimulant  le  zèle  des  di- 
recteurs de  Sociétés  musicales,  aux  progrès  artistiques  de  cette  institution 
populaire. 

it**  L'assemblée  générale  de  l'Association  des  artistes  musiciens  a  eu 
lieu  jeudi  dernier,  dans  la  grande  salle  du  Conservatoire  impérial,  sous 
la  présidence  de  son  fondateur,  M.  le  baron  Taylor.  —  Le  rapport  sur 
les  travaux  du  Comité,  pendant  l'exercice  de  1867,  a  été  fait  par  M.  Emile 
Réty.  Ce  document  important,  écrit  avec  une  rare  élégance  et  une  grande 
sobriété  de  métaphores,  a  été  applaudi  presque  à  chaque  alinéa  par  les 
trois  cents  sociétaires  présents. —  Après  une  allocution  aussi  brillante  que 
bien  sentie  de  son  vénérable  président,  l'assemblée  a  procédé  au  remplace- 
ment des  quatorze  membres  sortants  du  Comité.  Voici  les  noms  par 
ordre  nominatif  des  nouveaux  élus.  —  MM.  Conrad  Prumier,  243  voix; 
Delofire,  230;  Proust,  220;  Henri  Gautier,  219;  Richard  d'Amblécourt, 
212;  Martin,  208;  Wolff,  206;  Leroy,  182;  Tubeuf,  180;  Ch.  Colin,  179; 
Boulu,  154;  Arthur  Pougin,  142;  Baneux,  105;  A.  Elwart,  94.  —  Dans 
notre  prochain  numéro  nous  donnerons  des  extraits  du  rapport  de 
M.  Emile  Réty. 

^*^  Des  cinq  élèves  entrés  en  loge  pour  le  concours  préparatoire  du 
prix  de  Rome,  le  jury  n'a  admis  que  MM.  "Winzweiller  et  Rabuteau, 
sortant  tous  deux  de  la  classe  d'Amb.  Thomas. 

^*^,  A  la  cérémonie  du  mariage  du  prince  Murât  et  de  la  princesse  de 
Mingrélie,  aux  Tuileries,  VAve  Maria  de  Gounod  a  été  chanté  par  Mlle 
Mauduit,  accompagnée  sur  l'harmonium  par  Jules  Cohen,  et  par  le  vio- 
lon d'Herman  et  la  harpe  de  M.  Tariot,  premier  harpiste  solo  du  théâtre 


Italien.  Le  solo  do  Genimy,  dnns  le  chœur  de  Guillaume  Tell:  «  Célé- 
brons en  ce  jour  et  l'hymen  et  l'amour,  »  a  été  également  dit  par  la 
cliarmante  artiste  du  théâtre  impérial  do  l'Opéra. 

»*»  Les  examens  pour  l'obteniion  du  certificat  d'aptitude  à  l'enseigne- 
ment du  chant  dans  les  écoles  communales  de  Paris  auront  lieu  dans  la 
première  quinzaine  du  mois  de  juin  prochain,  à  l'Hôtel-de-Ville.  La  liste 
d'inscription  des  candidals  est  ouverte,  du  i'^  mai  au  5  juin  1868,  à  là 
préfecture  de  la  Seine,  direction  de  l'administralion  préfecloralo,  bureau 
de  l'inslruction  publique,  n»  17,  oîi  les  candidats  pourront  prendre  con- 
naissance de  ce  programme.  Les  canditats  doivent  produire  leur  acte  de 
naissance,  et  un  certificat  de  moralité  délivré  par  le  maire  de  l'arron- 
dissement dans  lequel  ils  résident. 

^*:^  Un  de  nos  meilleurs  professeurs,  composileur  distingué  dont  les 
œuvres  de  musique  religieuse,  notamment,  ont  acquis  une  légitime  ré- 
putation, M.  L.  A.  Dessane,  vient  d'être  nommé  organiste  du  chœur  à 
Saint-Sulpice.  Choix  excellent  et  qui  prouve  combien  l'art  musical  est  en 
honneur  dans  celte  église,  qui  compte  déjà  M.  Lefébure-Wély  comme 
organiste  du  grand  orgue. 

,f*.  Le  grand  orgue  de  Notre-Dame  sera  joué  le  jeudi  21  courant, 
jour  de  la  fête  de  l'Ascension,  par  M.  Sergent,  organiste  titulaire,  à  la 
granû'messe  de  10  heures  et  aux  vêpres  qui  ont  lien  à  2  heures. 

**»  Notre  excellent  confrère  Oscar  Comettant  vient  de  publier  chez 
Dentu  une  brochure  intéressante  qui  a  pour  but  de  bien  préciser  le 
caractère  et  le  but  de  la  noble,  utile  et  poétique  expédition  au  pôle  nord 
projetée  par  M.  Gustave  Lambert  et  appuyée  partoutavec  enthousiasme. 
Au  nombre  des  distractions  instructives  qui  occuperont  le  moral  de  l'é- 
quipage pendant  les  longs  mois  de  l'hivernage,  et  dont  M.  Comettant 
donne  le  programme,  nous  voyons  figurer  un  cours  de  mu4que  vocale. 
0  On  jouera  aussi  le  vaudeville  et  l'opérette,  ajoute  l'auteur,  afin  que 
M.  Offenbach  étende  .son  empire  au  delà  des  mondes  habités.» 

if*if  La  lettre  suivante  vient   d'être   adressée   à   notre   collaborateur, 
M.  A.  Pougin ,  au  sujet  de  son  intéressante  étude  sur  Bellini  : 
«  Cher  monsieur, 

»  J'ai  reçu  votre  joli  volume  sur  Bellini.  11  m'est  très-agréable  de 
connaître  par  vous  toute  la  biographie  de  ce  charmant  idyllisie  sicilien, 
successeur  de  Théocrite  et  de  Meli.  Vou<  y  avez  recueilli  et  assemblé 
tout  ce  qui  pouvait  rendre  de  la  vie  à  celte  physionomie  si  tendre ,  à 
cette  âme  mélodieuse  qui  ne  soupirait  qu'un  seul  air,  celui  de  l'amour 
et  de  la  jeuncs.se.  Le  portrait  de  lui  par  Henri  Heine,  que  vous  avez  mis 
en  tête,  est  un  peu  entaché  de  celte  veine  sarcastique  qui  venait  à  la 
traverse  dans  les  meilleures  inspirations  du  satirique  Hambourgeois.  Vous 
trouveriez  dans  les  Mémoires  du  comte  d'Alton  -  Shée  la  contre-partie  de 
ces  relations  de  Heine  et  de  Bellini. 

»  Veuillez  agréer,  cher  monsieur,  avec  mes  remercîments,  l'assurance 
de  mes  sentiments  très-distingués. 

»  Sainte-Beuve.  » 

»%  Les  éditeurs  Brandus  et  Dufour  viennent  de  mettre  en  vente  les 
deux  premiers  volumes  de  leur  édition  populaire  d'opéras,  d'opéras-comi- 
ques et  d'opérettes,  format  de  poche.  Ils  contiennent  Fra  Diavolo  et  le 
JPostillon  de  Lonjumcau.  Cette  publication  ne  se  distingue  pas  moins  par 
le  nKTite  des  œuvres  que  par  le  soin  apporté  à  sa  fabrication  et  par  son 
bon  marché. 

^*jf,  La  partition  de  Fleur-de-Thé,  pour  piano  et  chant,  paraît  cette 
semaine  chez  les  mêmes  éditeurs. 

^*f  Entre  autres  détails  curieux  donnés  sur  la  personne  de  Pie  IX 
par  un  correspondant  de  l'Evénement  illustré,  qui  a  eu  l'honneur  d'être 
reçu  par  Sa  Sainteté,  nous  trouvons  ce  qui  suit  :  «  Quoique  très-vieux, 
le  Pape  chante  encore  fort  bien,  et.  détail  parfaitement  inconnu  de  beau- 
coup de  Romains,  il  joue  du  violoncelle.  » 

,t*„:  Nicolini  a  reçu  de  M.  Bagier,  en  témoignage  de  satisfaction,  une 
couronne  d'argent  massif  qui  porte  cette  inscription  (  et  non  point  cette 
épitaphe,  comme  nos  confrères  l'ont  répété  à  l'envi)  :  30  avril  1868,  à 
Nicolini,  souvenir  de  la  clôture  de  la  saison  de  1868. 

i^*^  Aujourd'hui  dimanche  une  messe  en  musique  de  M.  Ch.  Ver- 
voitte  sera  chantée  à  Saint-Cloud  par  une  société  d'artistes  et  d'ama- 
teurs. 

»*,  Le  programme  du  grand  festival  musical  qui  sera  donné  au  Pré- 
Catelan  le  dimanche  17  mai,  avec  le  concours  de  toutes  les  musiques  de 
la  garde  impériale,  est  des  plus  remarquables.  C'est  une  splendide  mo- 
saïque oîi  brillent  les  noms  vénérés  des  plus  grands  génies.  Une  fois  par 
an  seulement,  le  public  de  la  capitale  a  le  rare  privilège  de  jouir  de  ce 
spectacle  unique  dû  à  la  bienveillance  de  S.  M.  l'Empereur,  dont  la 
sollicitude  pour  les  œuvres  de  moralisation  et  de  charité  n'a  pas  de  li- 
mites. 

^*,t  L'éminent  pianiste  compositeur  W.  Krûger  vient  d'avoir  la  dou- 
leur de  perdre  son  père.  Tout  récemment  il  célébrait  joyeusement  la 
cinquantaine  de  son  mariage  lorsque  la  mort  est  venue  le  frapper. 


DE  PAKIS 


469 


ÉTRANGER 

,%  Bruxelles.  —  L'événement  de  la  semaine,  car  c'en  est  un  vrai- 
ment ,  a  été  l'apparition  de  Mme  Carvalho  dans  Romeo  et  Juliette.  On 
connaissait  la  célèbre  prima  donna  du  Théâtre  Lyrique  qui  a  donné,  il  y 
a  quelques  années,  une  série  de  brillantes  représentations  dans  notre 
capitale;  mais  on  ne  l'avait  pas  entendue  dans  le  rôle  qui  a  été  proclamé, 
par  la  presse  parisienne,  le  plus  grand  et  le  plus  heureux  effort  de  son 
talent,  et  la  curiosité  était  vraiment  excitée.  Tout  ce  qu'on  pouvait  pré- 
voir et  espérer  a  été  dépassé.  Le  talent  supérieur,  déployé  par  Mme  Car- 
valho dans  le  rôle  de  Juliette,  est  un  fait  acquis  à  l'histoire  de  la  scène 
musicale  contemporaine,  et  il  y  aurait  de  la  puérilité  à  prétendre  en  faire 
ici  la  découverte;  mais  ce  qu'il  est  permis  de  dire,  c'est  que  les  hautes 
qualités  dramatiques  qu'a  fait  briller  Mme  Carvalho ,  ont  semblé  une 
révélation  aux  personnes  qui  n'avaient  vu  en  elle  que  la  cantatrice  ha- 
bile. Rarement  représentation  fut  plus  intéressante;  rarement  succès  fut 
plus  grand  et  plus  général.  La  vaillante  artiste  a  été  applaudie  autant 
qu'on  puisse  l'être  et  rappelée  après  chaque  acte,  presque  après  chaque 
scène.  Elle  a  été,  il  faut  le  dire,  supérieurement  secondée  par  M.  JoMr- 
dan,  qui  s'est  montré  un  Roméo  digne  d'une  telle  Juliette.  Trois  repré- 
sentations auront  été  données,  cette  semaine,  du  dernier  opéra  de  M.  Gou- 
nod.  C'est  dans  Faust  que  Mme  Carvalho  se  fera  entendre  ensuite.  — 
La  troupe  italienne  n'obtient  décidément  aucun  succès,  et  il  faut  avouer 
que  les  éléments  dont  elle  est  formée  justifient  l'accueil  qu'elle  reçoit. 
Après  avoir  paru  dans  le  Trovatore  et  dans  Norma,  la  prima  donna, 
Mme  Carozzi-Zucchi,  a  résilié  son  engagement  à  cause  d'une  indisposi- 
tion qui  la  privait,  paraît-il,  de  ses  moyens.  Elle  a  été  remplacée  par 
Mme  Montellio,  qui  n'est  point  parvenue  à  se  concilier  davantage  les 
suffrages  du  public  dans  Ernani  où  elle  a  débuté  mercredi.  On  a  témoi- 
gné beaucoup  plus  de  faveur  à  M.  Verger,  qui  s'est  fait  entendre  pour  la 
première  fois  dans  ce  même  opéra.  C'est  un  chanteur  qui  a  de  l'école  et 
du  goiit;  mais  son  entourage  est  trop  médiocre  pour  qu'il  puisse  rame- 
ner les  amateurs  mis  en  fuite  par  les  premières  et  malencontreuses  ten- 
tatives de  la  Compagnie  italienne.  Il  y  a  un  ténor  qui  a  une  belle  voix, 
M.  Tombesi  ;  mais  il  n'a  que  très  sommairement  appris  à  s'en  servir. 
C'est  un  préjugé  dont  il  faudra  revenir.  Les  chanteurs  seront  forcés  de 
finir  par  reconnaître  qu'il  n'est  pas  inutile  pour  eux  d'étudier  leur  art. 

^*^  Londres.  —  Samedi,  les  deux  théâtres  d'opéra  ont  donné  Maria. 
Adelina  Patti  à  Covent-Garden,  Christine  Nilsson  à  Drury-Lane,  ont 
interprété  d'une  manière  ravissante  ce  charmant  opéra,  et  plus  d'un 
dilettante,  ne  pouvant  les  comparer  dans  l'ensemble  du  rôle,  aura 
partagé  sa  soirée  entre  les  deux  scènes  rivales.  Mario  et  Fraschini 
jouaient  Lionel;  et  Mlle  Grossi  débutait  dans  le  rôle  de  Nancy,  c'est  en 
dire  assez.  —  Mlle  Patti  a  joué  ensuite  Lucia,  et  Mme  Lucca  Faust  et 
Fra  Diavolo.  —  Jeudi  on  a  donné  les  Huguenots  à  Drury-Lane,  avec 
Mlle  Tietjens,  et  pour  les  débuts  du  ténor  Ferensi  {Olim  Ferenczy,  de 
l'Opéra  de  Vienne).  —  Carlotta  Patti  est  attendue  le  28  mai.  Elle  don- 
nera des  concerts  jusqu'au  5  juin.  —  Alfred  Jaell  est  engagé  avec  sa 
femme  pour  le  concert  du  30  mai  au  Crystal-Palace.  Ils  défraieront,  avec 
Rubinstein,  Henri  Wieniawsky,  Auer  et  Jacquard,  les  programmes  des 
deux  prochaines  séances  de  l'Union  musicale  dirigée  par  John  Ella. 

^*j^  Exeter.  —  Une  troupe  d'opéra  anglais,  sous  la  direction  de  Mme 
Jenny  Baur  et  de  M.  Charles  Durand,  a  pris  possession  la  semaine  der- 
nière du  théâtre  Royal,  et  a  inauguré  de  la  manière  la  plus  heureuse 
ses  représentations  par  l'Africaine.  Jamais  notre  ville  n'avait  été  à  pareille 
fête!  Rigoktto,  Faust,  etc.,  doivent  suivre  le  chef-d'œuvre  de  Meyerbeer. 

,%  JBdle.  —  La  direction  de  la  nouvelle  école  de  musique,  qui  ne 
fonctionne  pas  encore,  a  été  confiée  à  M.  Selmar  Bagge,  jusqu'ici  ré- 
dacteur en  chef  de  la  Gazette  musicale  universelle  de  Leipzig. 

:)f*^  Francfort-sur-l'Oder .  —  L'Africaine  vient  d'être  donnée  ici,  pour 
la  première  fois,  avec  son  succès  obligé. 

^*^  Berlin .  —  La  Permission  de  dix  heures  d'Offenbach,  texte  allemand 
de  Cari  Treumann,  a  été  donnée  le  8  mai  au  théâtre  de  Frédérich  Wil- 
helmstadt  avec  un  très-grand  succès,  dont  il  faut  reporter  une  bonne 
part  sur  Mlle  Lina  Mayr  et  MM.  Leszinski  et  Adolf,  chargés  des  prin- 
cipaux rôles.  —  Mlle  Sessi,  de  Francfort,  a  été  engagée  à  POpéra  après 
de  brillants  débuts.  Elle  prendra  son  service  le  1"  octobre  prochain. 

^*^  Fjenne.— Mlle  lima  de  Murska  et  le  ténor  Sontheim  ont  brillam- 
ment terminé  leurs  représentations  par  Lucie  et  la  Juive.  -  Un  ténor 
doué  d'une  voix  superbe  et  orné  d'un  titre  universitaire,  le  docteur  Gunz, 
de  Hanovre  (on  dit  aussi  le  docteur  Franz  Liszt),  se  fait  applaudir  en  ce 
moment  à  l'Opéra.  Il  a  été  très-remarquable  dans  le  rôle  de  Raoul  des 
Huguenots.  —  L'excellent  professeur  Goldberg,  Viennois  de  naissance  et 
habitant  ordinairement  Londres,  bien  connu  par  ses  nombreuses  et  esti- 
mables compositions  vocales,  a  été  l'objet,  lors  d'une  récente  visite  à  sa 
ville  natale,  d'une  ovation  flatteuse  de  la  part  de  l'Orphéon  viennois, 
dirigé  par  M.  Dumba,  le  même  qui  se  fit  entendre  avec  tant  de  succès 
à  Salzbourg,  lors  de  la  visite  de  l'Empereur  des  Français. 


***  /'cs(/(.  —  On  a  représenté,  sans  grand  succès,  un  opéra  posthume 
de  Gustave  Fay,  intitulé  Fiesko.  —  Mlle  de  Murska  est  engagée  pour  un 
temps  assez  court  au  théâtre  allemand . 

if*^  Madrid.  —  Arban  et  son  orchestre  sont  hi  grande  attraction  du 
moment.  Le  premier  concert,  au  théâtre  de  Jovellanos,  a  été  magnifique; 
Arban,  dans  ses  variations  pour  cornet  à  pistons  sur  Bcatrix,  et  Emile 
Dunkler,  dans  sa  fantaisie  sur  Riyoletto,  ont  été  couverts  d'applaudisse- 
ments. La  fantaisie  sur  l'Africaine  a  produit  le  plus  grand  effet.  Arban 
a  amené  de  Paris  ses  meilleurs  solistes  et  quelques  chefs  de  pupitre  ; 
mais  Porchestre  qu'on  a  mis  à  sa  disposition  n'est  pas  assez  riche  en 
instruments  à  cordes.  —  Le  public  était  fort  nombreux,  malgré  la 
rédaction  françuise  des  affiches.  En  Espagne,  oîi  on  applique  volontiers  à 
tout  ce  qui  est  français  le  sobriquet  injurieux  de  gabacho,  la  langue  de 
Bossuet  et  de  Racine  est  loin  d'être  populaire ,  et  M.  Arban  ne  perdra 
rien  à  faire  traduire  ses  annonces  dans  le  plus  pur  castillan. 

,*„  Bologne.  —  Le  compositeur  Dall'Argine  a  été  chargé  par  l'im- 
présario du  théâtre  communal  de  faire  un  nouveau  Uarbiere  di  Siviglia. 
Ceux  de  Paesiello  et  de  Rossini  seraient-ils  trop  vieux  pour  la  patrie  de 
la  mortadelle"? 

*.**  Saint-Pétersbourg.  —  Orphée,  de  Gluck,  traduit  en  russe  et  monté 
l'année  dernière  par  Ant.  Rubinstein,  qui  Pa  fait  exécuter  sur  la  scène 
privée  du  palais  de  la  grande-duchesse  Hélène,  vient  d'être  représenté 
au  Grand-Théâtre.  Deux  jeunes  cantatrices,  élèves  de  Mme  Nissen-Salo- 
man,  Mlles  Lawrowsky  et  Iretzky,  s'y  sont  particulièrement  distinguées. 

g.*^  Moscou. —  La  Rose  des  Carpathes,  de  M.  Nissen-Saloman,  se  main- 
tient dans  la  faveur  du  publc.  Le  mérite  incontestable  de  cet  ouvrage  le 
destine  certainement  à  rester  au  répertoire.  —  Mlle  Artôt  continue  à 
faire  fanatisme.  Après  une  représentation  d'Otello,  elle  a  été  rappelée 
quatorze  fois.  Le  9  mai,  pour  son  départ,  a  dû  avoir  lieu  la  soirée  à  son 
bénéfice. 


«  TT  T  ri  Un  éditeur  de  musique  de  Paris  désire  engager  un  premier 
il  w  1  u .  commis,  homme  de  confiance  ,  en  état  de  gérer  la  maison 
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gers.  —  S'adresser  au  bureau  du  journal. 


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le  Violoneux,  Baydée,  Joconde.  Cendrlllon.  ■<■»  icoiidi'z-vonn  bourgeois,  etc. 

N.  B. — Ces  éditions,  d'un  format  très-commode  et  d'un  bon  marché  exceptionnel,  se  recommandent  spécialement  aux  artistes  dramatiques 
pour  remplacer  les  rôles  copiés — aux  spectateurs  pour  suivre  la  musique  et  la  pièce  à  la  représentation — aux  sociétés  chorales,  etc. 

THÉÂTRE  DE  L'ATHÉNÉE. 

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OPÉRA     BOUFFE     EN     TROIS     ACTES,     PAROLES     DE     MM-     ALFRED     DURU     ET     HENRI     CHIVOT,     MUSIQUE     DE 

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_                .  J     >    >.     .       .1     »                           MM.  les  Membres  du  Jury  International  décernent  la  Médaille  à  ,, .       ,.     .    .  .   .     ^ 

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REVUE 


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Étraçger 3*  "       'd- 

Le  Journal  parait  to  Dimanche. 


GAZETTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


Nos  abonnés  reçoivent,  avec  le  naméro  d'anjonrd'hal, 
ClilCQUOT-POIiKA  composée  sar  des  thèmes  de  Flettr- 
Ae-VHé,  de  Cb.  Lecocq,  par  L.  Boqaes. 


SOMMAIRE.  —  Études  sur  Charles-Marie  de  Weber  (troisième  partie,  2°  article), 
par  Edmond  Neakomin.  —  Association  des  artistes  musiciens,  assemblée 
générale.  —  Théâtre  des  Fantaisies-Parisiennes  :  le  Barbier  de  Séville,  comédie 
en  quatre  actes,  d'après  Beaumarchais,  musique  dePaësiello. — La  Musique  et 
l'Amour,  de  M.  Albert  de  LasaUe  (2'  et  dernier  article],  par  Em.  Mathieu 
de  Monter.  —  Concerts  et  auditions  musicales  de  la  semaine.  —  Nouvelles 
des  théâtres  lyriques.  —  Nouvelles  diverses.  —  Annonces. 


ÉTUDES  SUR  CHÂRLES-fflÂRIE  DE  WEBER, 

D'après    la    biographie    écrite    par    son    01s. 

TROISIÈME  PARTIE, 
II    (1). 

"Weber  arriva  le  13  janvier,  au  soir,  à  Dresde.  II  s'installa  aus- 
sitôt dans  une  maisonnette  située  au  cœur  du  village  italien,  ainsi 
nommé  parce  qu'il  fut  construit  pour  et  par  les  ouvriers  italiens 
venus  à  la  suite  de  l'architecte  Chiaveri,  auquel  on  doit  la  belle 
église  catholique  qui  s'élève  au  bout  du  vieux  pont  jeté  sur  l'Elbe  ; 
il  meubla  simplement  cette  maisonnette ,  qu'entourait  un  joli  jar- 
din, et  eut  soin  de  couvrir  tous  les  parquets  de  tapis,  car  le  bruit 
des  pas  sur  la  dalle  lui  était  insupportable  ;  puis  il  engagea  un 
domestique  pour  son  service,  et  un  maître  d'italien  pour  le  mettre 
à  même  de  faire  figure  dans  le  monde.  Cela  fait,  il  commença  ses 
visites.  La  première  fut,  comme  on  pense,  pour  le  comte  Vitz- 
thum,  auquel  il  ne  fut  pas  peu  étonné  de  trouver  l'air  embarrassé  ; 
l'ayant  pressé  de  s'expliquer,  il  apprit  de  lui  que  Morlacchi  avait 
obtenu  du  ministre  Einsiedel  que  le  contrat  de  Weber  portât 
la  qualitication  de  directeur  de  musique  au  Théâtre -Allemand,  ce 
qui  le  mettait  entièrement  dans   sa  dépendance,  lui  seul  ayant 

(1)  Voir  le  n°  18. 


droit  au  titre  de  maître  de  chapelle.  Weber  s'emporta,  jurant  qu'il 
allait  repartir  aussitôt,  qu'on  l'avait  indignement  trompé,  et  qu'il 
méprisait  fort  l'Italien  Morlacchi,  lequel  avait  eu  le  front  de  lui  faire 
mille  protestations  d'amitié  et  de  le  saluer  à  son  arrivée  comme 
son  cher  collègue.  Vitzthum  chercha  à  le  calmer,  et  en  effet  il  y 
parvint,  après  avoir  promis  de  voir  le  roi  au  sujet  de  cette  affaire; 
il  le  vit  le  jour  même ,  et  le  lendemain  Weber  recevait ,  grâce  à 
son  chaud  plaidoyer,  le  brevet  en  bonnes  formes  de  maître  de 
chapelle.  11  avait  gagné  la  première  partie. 

Peu  de  jours  après  eut  lieu  sa  présentation  aux  artistes,  auxquels 
il  tint  un  petit  discours  très-paternel,  mais  aussi  très-ferme,  en  ce 
qui  concernait  leurs  devoirs  envers  lui  et  qui  fit  murmurer  les 
assistants;  cependant  leur  mécontentement  tomba  devant  un  bal 
que  Weber  leur  offrit  à  l'hôtel  de  Pologne,  et  où  il  se  mon- 
tra charmant  pour  tout  le  monde;  mais  quand  vint  le  jour 
de  la  première  répétition,  il  reprit  son  air  sévère,  et  commença 
par  jeter  un  regard  si  perçant  sur  les  musiciens  et  les  chanteurs 
qui  arrivèrent  en  retard  que  le  lendemain  tout  le  monde  fut  à 
son  poste  à  l'heure  indiquée;  puis  il  dirigea  la  répétition  comme 
aucun  de  ses  prédécesseurs  ne  l'avait  fait,  interrompant  l'orchestre 
à  tout  moment,  montant  sur  la  scène,  faisant  office  de  régisseur 
et  de  metteur  en  scène,  discutant  avecle  décorateur,  le  machiniste 
et  le  costumier,  ayant  l'œil  et  l'oreille  partout  et  ne  se  reposant 
pas  un  seul  instant.  Son  personnel,  en  effet,  était  si  peu  nombreux 
et  si  peu  aguerri,  que  ce  n'était  qu'à  force  de  soins  et  de  zèle 
qu'on  pouvait  espérer  quelque  succès  de  l'entreprise  et  son 
existence  dépendait  des  premières  manifestations. 

Ce  personnel  mis  à  la  disposition  de  C.  M.  de  Weber  n'était  autre 
que  celui  de  la  Comédie  allemande,  auquel  pouvaient  se  joindre,- 
sur  un  ordre  spécial,  les  membres  de  l'Opéra  italien.  Le  premier 
se  composait,  en  général,  de  bons  comédiens,  qui,  suivant  l'habi- 
tude du  temps,  chantaient  le  vaudeville,  mais  qui  ne  pouvaient 
guère  convenir  pour  le  Grand-Opéra.  Sous  le  rapport  des  chan- 
teurs, Weber  se  trouvait  donc  à  peu  près  dans  la  situation  d'un 
général  placé  à  la  tête  d'une  armée  pleine  de  bon  vouloir  et  de 
confiance,  mais  tout  à  fait  dépourvue  de  munitions.  Il  monta, 
pour  ses  débuts,  Joseph,  de  Méhul,  profitant  de  la  présence  à 
Dresde  du  ténor  Wilhelmi,  et  surtout  parce  que  tous  les  rôles  de 
cet  ouvrage,  à  l'exception  d'un,  celui  de  Benjamin,  sont  des  rôles 


162 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


d'hommes.  Les  répétitions  de  Joseph  étaient  donc  poussées  avec 
activité.  Pour  l'orchestre,  il  était  excellent,  et  le  maître  pouvait 
compter  sur  lui. 

Sur  ces  entrefaites  eut  lieu  la  présentation  de  Weber  à  la  Cour. 
Le  roi  fît  un  signe  imperceptible  de  la  tête  et  dit  :  «  Je  compte 
sur  votre  talent;  »  la  reine  lui  parla  de  sa  fiancée,  qu'elle  avait 
remarquée  lors  de  ses  représentations  à  Dresde,  puis  le  couple  royal 
rentra  dans  ses  appartements,  laissant  Weber  assez  désappointé 
de  sa  réception  et  surtout  fort  embarrassé  dans  son  costume  de 
cour  à  grand  collet  brodé,  avec  son  claque  sous  le  bras  et  son  épée 
quj  gp  prenait  ^ans  ses  jambes.  Quoj  qu'il  en  soit,  il  avait  été  pré- 
senté à  la  couEj  le  roi  et  la  reine  lui  avaient  parlé  ;  c'était  le 
prii^pjp^l,  et  4^s  lors  les  porter  des  salons  les  plus  aristocratiques 
lui  étaient  ouyprles.  Weber  avait  acquis  droit  de  cité  dans  sa 
nouvcjfp  rési^pflpe. 

Un  vénérable  musicien  de  l'orchestre,  contemporain  de  ces  évé- 
nements, qui  vit  aujourd'hui  retiré  dans  un  faubourg  de  Dresde,  a 
tracé  de  souvenir  un  portrait  de  Weber  à  cette  époque:  «Il  était 
petit  et  avait  la  poitrine  rentrée,  dit-il;  ses  bras  étaient  un  peu 
longs,  maigres  et  ballants;  la  pâleur  qui  recouvrait  ses  traits  fai- 
sait mieux  ressortir  l'éclat  de  ses  yeux  abrités  derrière  d'épaisses 
lunettes;  un  sourire  charmant  animait,  quand  il  parlait,  sa  bouche 
d'ordinaire  sérieuse,  et  par  moments  il  penchait  sa  tète  sur  le 
côté,  ce  qui  donnait  une  expression  de  douceur  indéfinissable  à 
ses  traits.  Le  jour  que  nous  lui  fûmes  présentés,  il  portait  un  habit 
bleu  à  boutons  blancs,  un  pantalon  collant  et  des  bottes  à  la  Sou- 
vvaroff,  à  glands;  une  fine  cravate  en  batiste,  dont  les  bouts  bro- 
dés étaient  réunis  par  une  épingle  en  diamants,  entourait  son  cou. 
Un  gros  manteau  brun  à  plusieurs  collets  recouvrait  ce  costume; 
enfin  un  chapeau  rond  à  larges  bords  abritait  son  visage.  Rien,  au  pre- 
mier abord,  ne  révélait  l'artiste  en  lui.  On  pouvait  passer  à  ses 
côtés,  dans  la  rue  comme  dans  un  salon,  sans  le  remarquer  ;  mais 
une  fois  qu'il  vous  avait  parlé,  vous  étiez  sous  le  charme  de  sa 
présence  et  comme  soumis  à  une  influence  magnétique.  » 

Cependant,  le  jour  de  la  première  représentation  de  Joseph 
approchait;  le  public,  auquel  Weber  s'était  directement  recom- 
mandé par  une  proclamation  en  faveur  de  son  entreprise,  publiée 
dans  le  Journal  de  Dresde,  attendait  avec  confiance  ;  mais  la  cour, 
influencée  par  les  menées  des  Italiens,  et,  en  outre,  peu  favorable, 
comme  on  sait,  aux  efforts  tentés  par  le  parti  allemand,  augurait 
mal  de  la  réussite  et  comptait  sur  l'insuccès  des  premiers  efforts  de 
Weber,  pour  le  renvoyer  dans  une  ville  c  moins  comme-il-faut.» 
L'événement  donna  raison  au  public,  car  Joseph,  représenté  pour 
la  première  fois  le  30  janvier,  fut  une  révélation  et  ranima  les 
espérances  du  parti  allemand,  qui  désormais  se  sentit  appelé  à 
régénérer,  avec  Weber  comme  chef,  l'art  dramatique  à  Dresde. 

Weber  fut  satisfait  du  succès  qui  accueillit  son  début,  mais  il  ne 
s'y  fia  pas,  et  dès  le  lendemain  de  cette  soirée,  qui  avait  sur- 
passé l'attente  générale,  il  reprit  la  tâche  qu'il  s'était  imposée.  Sa 
sollicitude  se  porta  tout  d'abord  sur  les  chœurs  qui  avaient  be- 
soin d'une  organisation  complète;  en  effet,  jusque-là,  les  parties 
de  ténor  et  de  basse  avaient  été  tenues  par  des  stagiaires  inexpé- 
rimentés, auxquels  on  avait  adjoint  quelques  choristes  du  dernier 
ordre,  et  celles  de  soprano  et  de  contralto  par  de  jeunes  garçons, 
dont  l'accoutrement  féminin  produisait  le  plus  grotesque  effet. 
Weber  obtint  qu'on  engageât  de  bons  choristes,  hommes  et 
femmes,  à  la  tête  desquels  il  plaça  l'excellent  maître  de  chant 
Miksh,  le  même  qui  eut,  dans  la  suite,  l'honneur  d'attacher  son 
nom  à  la  renommée  de  Mmes  Haehnel  et  Schrœder-Devrient.  Dès 
le  second  ouvrage,  dont  la  représentation  suivit  de  près  celle  de 
Joseph,  on  put  constater  les  effets  de  ces  heureuses  améliorations  ; 
c'était  un  opéra  de  Fischer,  auquel  succédèrent   rapidement  d'au- 


tres   œuvres    de    maîtres    allemands,    entre    autres    Fanchon    la 
Vielleuse,  de  Himmel. 

Pour  aider  encore  au  succès  de  son  entreprise,  Weber  continua 
d'appeler  l'attention  du  public  sur  les  beautés  de  chaque  œuvre 
nouvelle,  au  moyen  d'une  analyse  critique,  dont  l'insertion  dans 
le  principal  journal  de  la  ville  précédait  la  représentation  ;  on  se 
rappelle  qu'il  avait  pris  cette  habitude  à  Prague,  et  qu'il  n'avait 
eu  qu'à  s'en  louer. 

Comme  on  le  voit,  l'organisation  du  Théâtre  allemand  de  Dresde 
n'était  pas  chose  aisée;  Weber  y  consacrait  tout  son  zèle,  tout  son 
temps.  On  le  croira  sans  peine,  quand  on  saura  qu'il  venait  de  rece- 
voir du  poëte  Franz  Kind  le  libretto  du  Freischiitz,  au  sujet  du- 
quel il  écrivait  à  sa  fiancée  :  «  Quand  je  le  parcours,  les  mélodies  me 
jaillissent  à  la  figure,  »  et  dont,  malgré  l'enthousiasme  que  ce 
poëme  tant  désiré  lui  causait,  il  ne  pouvait  arriver  à  commencer 
la  musique.  Le  comte  Brûhl,  surintendant  des  théâtres  royaux  de 
Berlin,  lui  ayant  commandé,  dans  le  même  temps,  la  musique  d'un 
drame  de  Mullner,  Yngurd,  qu'on  répétait  à  Berlin,  ce  fut  en 
travaillant  toute  une  nuit  qu'il  put  remplir  son  désir;  il  lui  en- 
voya une  chanson  et  plusieurs  mélodrames;  quant  à  l'ouverture, 
il  ne  put  y  arriver  et  il  pria  son  excellent  protecteur  de  vouloir 
bien  se  contenter  d'une  de  ses  anciennes,  celle  du  Dominateur  des 
esprits. 

Edmond  NEUROMM. 
{La  suite  prochainement.) 


ASSOCIATION  DES  ARTISTES  MUSICIENS. 

ASSEiVIBLÉE  GÉNÉRALE 

sous  LA   PRÉSmENCE  DE  M.    LE  BARON  TAYLOR. 

(Jeudi,  14  mai  186 S.) 

La  Gazette  musicale  a  fait  connaître,  dimanche  dernier,  l'inté- 
rêt qu'avait  excité  à  cette  solennité  le  rapport  de  M.  Emile  Réty 
et  le  résultat  des  élections  qui  avaient  pourvu  au  remplacement  des 
14  membres  sortant  du  comité. 

Comme  tous  les  ans,  nous  allons  mettre  sous  les  yeux  de  nos 
lecteurs  les  points  les  plus  saiflants  de  ce  remarquable  rapport, 
dont  M.  Réty  se  chargeait  pour  la  deuxième  fois. 

La  mort  a  fait  de  grands  vides  dans  les  rangs  de  la  Société  pen- 
dant le  cours  de  l'année  1867:  coup  sur  coup  Triébert,  JMeifred, 
Georges  Kastner,  Forestier  aîné,  Prumier  père,  Edouard  Monnais, 
lui  ont  été  enlevés.  Un  large  tribut  de  regrets  payé  à  d'aussi  dou- 
loureuses pertes  venait  donc  en  première  ligne  dans  le  rapport  de 
M.  Réty.  Le  défaut  d'espace  nous  ôte  la  possibilité  de  reproduire 
les  adieux  pleins  de  sentiment  et  d'émotion  adressés  par  le  rap- 
porteur à  chacun  de  ces  éminents  fondateurs  de  l'Association.  Nous 
en  détacherons  pourtant  les  paragraphes  consacrés  aux  amis  que 
nous  pleurons  également,  MM.  Georges  Kastner  et  Ed.  Monnais  : 

«  Dans  une  position  élevée,  Georges  Kastner  a  été  constamment 
pour  les  artistes  musiciens  un  appui  sur  lequel  ils  pouvaient  compter. 
—  L'un  des  premiers  signataires  de  notre  acte  de  Société,  fondateur  des 
comités  correspondants  de  Strasbourg  et  de  Versailles,  Kastner  est  resté 
jusqu'à  la  fin  de  sa  vie  l'un  des  plus  zélés  propagateurs  de  nos  principes, 
et  n'a  pas  cessé  de  vouloir  la  pleine  et  entière  exécution  des  promesses 
de  nos  statuts.  —  Théoricien,  compositeur  et  philologue  distingué,  il 
s'est  livré,  avec  trop  d'ardeur  peut-être,  à  de  longs  et  utiles  travaux 
pendant  lesquels  il  semble  n'avoir  connu  d'autre  distraction  que  le  plai- 
sir d'obliger  et  de  donner.  —  Assidu  à  nos  séances,  où  sa  présence  était 
un  indice  certain  de  nouvelles  générosités,  il  a  souvent  augmenté  de  ses 
deniers  les  secours  votés  par  le  comité.  Aussi,  tandis  que  l'Institut  et  les 
corps  savants  auxquels  il  appartenait  regrettent  en  lui  l'écrivain  érudit, 
chacun  de  nous  pleure  un  ami,  l'Association  un  bienfaiteur. 

Edouard  Monnais  a   laissé  dans  le   monde  des  arts  des  regrets  una- 


DE  PARIS. 


163 


nimes.  Il  possédait,  comme  on  l'a  dit,  ce  don  de  l'aménité  qui  attire  et 
retient  les  cœurs,  et  M.  de  Saint-Georges  à  t^acé  do  lui  ce  portrait  res- 
semblant :  «  C'était  un  homme  excellent,  un  esprit  d'élite,  un  critique 
distingué,  un  administrateur  habile ,  un  ami  parfait.  »  Lorsqu'il  fut 
question  d'établir  une  Association  entre  les  artistes  musiciens,  Edouard 
Monnais,  homme  de  cœur  autant  que  d'intelligence,  comprit  de  suite  la 
noblesse  et  la  sagesse  de  cette  idée,  et  il  contribua  avec  un  zèle  soutenu 
au  développement  de  l'œuvre  nouvelle.  Premier  vice-président  de  l'Asso- 
ciation depuis  sa  fondation ,  il  prit  pendant  plusieurs  années  une  part 
active  aux  délibérations  du  ccmiié  dont  il  était  l'un  des  membres  les 
plus  écoutés.  Président  de  la  commission  des  secours  et  pensions,  il 
apportait  dans  ces  délicates  fonctions  un  grand  esprit  de  justice,  et  la 
sincère  bienveillance  qui  constituait  comme  le  trait  distinctif  de  son  carac- 
tère. Edouard  Monnais  a  rendu  à  l'Association  des  artistes  musiciens  de 
précieux  service?,  que  le  comité  avait  à  cœur  de  reconnaître  en  ren- 
dant ici  ce  public  hommage  à  sa  mémoire.  » 

Cette  partie  pénible  de  sa  tâche  accomplie,  M.  Réty  présente  le 
•tableau  des  recettes  et  dépenses  de  l'Association  pendant  l'année 
écoulée.  Il  résulte  de  ce  tableau  que  les  recettes  de  toutes  natures 
se  sont  élevées  à  78,730  fr.  81  c,  et  que  les  dépenses  ont  atteint 
la  somme  de  77,263  fr.  49  c. 

«  En  comparant  ces  comptes  avec  ceux  de  l'année  dernière,  M.  Réty 
fait  remarquer  qu'avec  une  diminution  de  1,043  fr.  SO  c.  sur  le  pro- 
duit des  cotisations  et  de  10,839  fr.  88  c.  sur  la  recette  générale,  il  y  a 
eu  augmentation  de  1,516  fr.  10  c.  sur  la  somme  dépensée  en  secours 
et  pensions. 

C'est-à-dire  qu'en  recevant  moins,  nous  avons  donné  plus;  et  nous 
avons  pu  le  faire,  non-seulement  sans  compromettre  le  présent,  mais  en 
continuant  d'assurer  l'avenir  par  un  placement  de  30,980  francs  qui  a 
augmenté  de  1,330  francs  le  chiffre  de  notre  rente,  et  le  portait,  au  31 
décembre  1867,  à  33,003  francs. 

C'est  là,  reconnaissons-le ,  un  merveilleux  résultat.  Nous  le  devons  à 
l'exacte  et  scrupuleuse  exécution  de  l'article  10  de  nos  statuts,  qui  nous 
oblige  à  convertir  toutes  les  recettes  en  valeurs  immobilisables  et  garan- 
ties par  l'Etat,  et  ne  laisse  à  la  disposition  du  Comité  que  les  arrérages 
des  rentes.  Sage  et  prévoyante  mesure  dont  nous  apprécierons  surtout 
la  haute  utilité  si  les  mauvais  jours  ne  nous  étaient  pas  épargnés. 
Supposons,  en  effet,  une  année  difficile  amenât  pendant  quelques  mois 
une  interruption  presque  complète  des  recettes  :  pour  une  institution 
qui  ne  reposerait  pas  sur  des  bases  aussi  solides  que  les  nôtres ,  ce  se- 
rait la  ruine  ou  tout  au  moins  la  suppression  immédiate  des  secours  au 
moment  où  ils  seraient  devenus  le  plus  nécessaires.  Pour  notre  Associa- 
tion, celte  situation  fâcheuse  .n'amènerait  qu'un  simple  temps  d'arrêt 
dans  l'accroissement  de  la  fortune  sociale,  et  grâce  aux  revenus  de  notre 
capital  inaliénable,  nous  ne  suspendrions  pas  le  paiement  d'une  seule 
de  nos  pensions  et  la  part  des  malheureux  ne  serait  pas  diminuée  d'un 
centime. 

Les  idées  qui  ont  présidé  à  la  création  de  notre  Société  ne  sont  donc 
pas  le  fruit  de  l'improvisation  et  du  hasard ,  ce  ne  sont  pas  non  plus 
des  illusions  généreuses,  hors  d'état  d'entrer  en  lutte  avec  les  faits;  ce 
sont  des  principes  sérieux,  longuement  élaborés  par  notre  président, 
M.  le  baron  Taylor  à  qui  nous  les  devons  en  entier,  et  ces  principes  qui 
se  sont  dégagés  plus  vivants  et  plus  forts  en  passant  de  la  théorie  dans 
la  pratique,  recevront  tous  leurs  développements  par  le  cours  naturel  des 
choses . 

C'est  ainsi  qu'en  attendant  les  pensions  de  droit  nous  avons  pu  créer 
121  pensions  coûtant  annuellement  27,420  francs.  » 

Le  rapporteur  mentionne  les  nouvelles  pensions  accordées  et  les 
mutations  opérées  dans  les  chiffres  de  celles  existantes. 

Au  nombre  des  libéralités  importantes  faites  dans  l'année  à 
l'Association,  M.  Réty  signale  celle  de  5,000  francs  envoyés  au 
président  par  Mme  veuve  Kastner,  et  qu'accompagnait  une 
somme  de  300  francs  destinée  à  la  cotisation  d'elle  et  de  ses  deux 
fils  comme  sociétaires  perpétuels. 

0  Ainsi  que  la  reconnaissance  nous  en  faisait  un  devoir,  continue 
M.  Réty,  nous  avons  décidé  qu'une  de  nos  pensions  de  300  francs  por- 
terait à  perpétuité  le  nom  de  Kasmer ,  et  nous  avons  transmis  à  Mme 
Kastner  les  plus  vifs  témoignages  de  gratitude.  Nous  étions  sûrs  que 
l'assemblée  générale  tiendrait  à  s'associer  à  nos  remercîments,  et  qu'elle 
accueillerait  par  des  bravos  cette  dernière  preuve  de  l'intérêt  de  Kastner 
pour  l'Association  qu'il  a  si  puissamment  contribué  à  établir.  » 

Nous  ne  suivrons  pas  le  rapporteur  dans  la  longue  énuméra- 
tion  des  autres  dons  et  produits  divers  qui  sont  venus  grossir  les 
recettes  de  l'Association;  nous  citerons  cependant,  au  nombre  de 
ces  derniers:  l'envoi,  par  la  musique  de  la  garde  de  Paris,  d'une 


somme  de  SOO  francs  prélevée  sur  la  valeur  du  prix  obtenu  par 
elle  au  grand  concours  international  de  musiques  militaires  à 
l'Exposition  ;  —  557  fr.  25  c.  provenant  de  la  part  de  recettes 
attribuée  à  l'Association  sur  le  concert  donné  par  la  fondation 
Reaulieu;  —  6,000  francs  environ,  bénéfice  net  de  diverses  exé- 
cutions de  la  messe  de  sainte  Cécile,  etc. 

«  Ce  sont  là  de  beaux  et  bons  exemples.  Tous  les  sociétaires  ne  peu- 
vent sans  doute  les  imiter;  il  est  du  moins  au  pouvoir  de  chacun  d'ac- 
quiiter  exactement  sa  cotisation  ;  c'est  ce  que  nous  demandons  en  vain 
depuis  longtemps,  c'est  ce  que  désormais  nous  serons  forciJs  d'exiger. 
Une  plus  longue  indulgence  deviendrait  de  l'injustice,  puisqu'elle  consti- 
tuerait des  droits  à  de  mauvais  sociétaires  au  détriment  de  ceux  qui 
remphssent  fidèlement  leurs  obligations. 

11  est  d'ailleurs  indispensable  que  la  rentrée  de  nos  recettes  s' ipère  ré- 
gulièrement, et  que  nous  sachions  au  juste  sur  quoi  nous  pouvons 
compter. 

Nous  avons  dit  que  le  produit  des  cotisations  avait  été  de  2i,40i  fr., 
et  la  dépense  en  pensions  et  secours  de  toute  sorte,  de  33,482  fr.  Ainsi, 
les  Sociétaires  ont  reçu  9,078  francs  de  plus  qu'ils  n'ont  versé,  ce  qui 
prouve,  qu'en  priant  nos  confrères  de  ne  pas  se  laisser  rayer  de  nos 
contrôles,  c'est  surtout  leur  intérêt  qui  nous  guide.  L'expérience  l'a  dé- 
montré pour  des  sociétés  de  secours  mutuels  prélevant  mensuellement 
une  somme  supérieure  à  celle  qui  est  exigée  par  nos  statuts  :  la  cotisa- 
tién,  suffisante  peut-être  pour  les  secours,  est  impuissante  à  créer  des 
pensions  de  retraite.  Au  moment  de  commencer  le  service  des  pensions 
de  droit,  nous  avons  donc  plus  que  jamais  besoin  du  talent  et  du  dé- 
vouement de  tous.  Les  sociétaires  peuvent  compter  sur  le  zèle  et  la  per- 
sévérance du  comité  qu'ils  ont  chargé  de  la  direction  de  la  Société,  mais 
il  faut  que  le  comité  soit  assuré  que  les  sociétaires  répondront  à  son 
appel,  afin  que  chaque  année  nouvelle  ajoute  au  nombre  et  à  l'éclat  des 
solennités  organisées  au  profit  de  notre  caisse,  et  qui  sont  la  plus  bril- 
lante et  la  plus  féconde  source  de  notre  fortune. 

Nous  voudrions  compter  sans  cesse  dans  nos  rangs  de  nouveaux  et 
sérieux  adhérents;  nous  voudrions  que  pas  une  ville  de  province,  pas 
un  groupe  de  sociétaires  ne  manquât  de  nous  envoyer  annuellement  son 
offrande,  si  modique  fût-elle;  nous  voudrions  être  riches,  en  un  mot, 
três-riches,  car  notre  but  est  double  désormais:  il  nous  faut  satisfaire  à 
la  fois  aux  droits  du  passé  en  liquidant  des  pensions  à  nos  premiers  et 
fidèles  associés,  et  ne  rien  refuser  dans  le  présent  à  ceux  qui,  frappés 
avant  l'âge,  s'adressent  à  nous  au  nom  du  droit  sacré  que  donnent  la 
souffrance  et  le  malheur  immérité. 

Vous  nous  aiderez  dans  ce  labeur;  vous  travaillerez  courageusement  à 
enrichir  cette  caisse  commune  où  les  dons  du  riche  se  confondent  avec 
l'épargne  du  pauvre;  et  vous  partagerez  les  sentiments  qui  régnent  una- 
nimement dans  votre  comité  :  l'amour  ardent  de  cette  Association,  pour 
laquelle  les  meilleurs  d'entre  nous  sacrifient  journellement  leur  temps  et 
parfois  les  plus  sérieuses  obligations  de  leur  profession  ;  le  respect  et  la 
reconnaissance  pour  notre  président  M.  le  baron  Taylor;  enfin  la  ferme 
volonté  de  faire  exécuter  dans  toutes  leurs  prescriptions  les  statuts  qui 
nous  ont  donné  en  vingt-cinq  ans  36,000  francs  de  rentes,  tout  en  nous 
permettant  de  distribuer  en  bienfaits  430,000  francs. 

Ce  qui  a  été  dépensé  d'efforts,  ce  qu'il  a  fallu  vaincre  de  résistances 
et  de  mauvais  vouloirs  pour  réaliser  ce  capital  de  800,000  francs  et  créer 
une  à  une  nos  121  pensions,  vous  le  savez  comme  nous.  Messieurs. 
L'Association  des  artistes  musiciens,  aujourd'hui  presque  millionnaire, 
ne  sera  pas  ingrate  envers  ceux  qui  l'ont  fondée,  soutenue  et  enrichie. 
—  A  notre  tour,  nous  saurons  accomplir  notre  tâche,  et  nous  prouve- 
rons notre  gratitude  à  nos  devanciers  en  n'ayant  pas  moins  de  dévoue- 
ment qu'eux.  —  C'est  avec  la  conscience  d'avoir  fidèlement  rempli  leur 
mandat  que  les  membres  actuels  de  votre  comité  vous  soumettent  ce 
compte  rendu  des  travaux  de  l'année  1867,  et  vous  demandent  une  ap- 
probation qui  est  leur  unique  récompense.  » 

Nous  avons  dit  l'approbation  unanime  qu'avait  provoquée  ce 
rapport. 

{La  Rédaction.) 


THÉÂTRE  DES  FANTAISIES-PARISIENHES. 

liE  BABBIER  DE  SÉVILI^E, 

Comédie  en  quatre  actes,  d'après  Beaumarchais,  musique  de 

Paesiello. 

(Première  représentation  le  13  mai  1868.) 

C'est  vraiment  une  chose  curieuse,   pour  notre  génération  qui 


164 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


a  été  bercée  avec  la  musique  de  Rossini,  de  pouvoir  contrôler  le 
chef-d'œuvre  du  [maestro  par  la  comparaison  de  celui  de 
Paësiello,  son  aîné  de  trente-six  ans.  Nous  devons  savoir  gré  à 
M.  Martinet  de  nous  avoir  procuré  cette  satisfaction  délicate; 
mais  nous  n'en  sommes  plus  à  compter  avec  lui  pour  les  sur- 
prises de  ce  genre. 

Paësiello  était  en  Russie  depuis  quatre  ans  lorsqu'il  y 
fit  représenter  à  la  cour  de  Catherine  II  son  Barbiere  di 
Siviglia.  Le  succès  qu'il  obtint  fut  confirmé,  depuis,  par  les  prin- 
cipales villes  d'Italie,  dont  il  faut  pourtant  excepter  Rome,  ce  qui 
rend  plus  bizarre  l'accueil  hostile  que  la  capitale  du  monde  chré- 
tien infligea  d'abord  au  Barbiere  de  Rossini,  comme  pour  lui 
faire  expier  l'audace  de  sa  rivalité  avec  le  maestro  napolitain. 

Dès  l'année  1790,  les  Parisiens  avaient  été  conviés  à  juger 
l'œuvre  de  Paësiello,  dans  la  salle  des  Tuileries,  oîi  une  troupe 
de  chanteurs  italiens  donnait  des  représentations  sous  le  vocable 
de  Théâtre  de  Monsieur.  Les  principaux  rôles  étaient  chantés  par 
Viganoni,  Mandini,  Raffanelli  et  par  la  signera  Baletti.  Cette  pre- 
mière épreuve  eut  tout  le  succès  désirable  et  la  pièce  se  main- 
tint constamment  au  répertoire  du  théâtre  Italien  jusqu'à  l'arri- 
vée de  Rossini. 

C'est  cet  opéra,  si  longtemps  heureux,  qui  nous  a  été  rendu 
par  le  directeur  des  Fantaisies-Parisiennes,  et,  malgré  l'insuffisance 
forcée  de  ses  moyens  d'exécution,  nous  devons  constater  qu'il  a 
été  écouté  avec  le  plus  vif  intérêt.  L'arrangeur  nouveau, 
M.  Wilder,  n'a  pas  eu  grand'peine  à  prendre,  puisqu'il  s'est 
borné  à  encadrer  des  morceaux  ti'aduits  au  milieu  de  la  prose 
étincelante  de  Beaumarchais.  Néanmoins,  le  travail  qui  constitue 
sa  part  dans  l'adaptation  actuelle  n'est  pas  à  dédaigner;  sa  versi- 
fication est  toujours  facile  et  claire. 

Quant  à  la  musique  de  Paësiello,  nous  n'avons  pas  à  l'apprécier  ; 
nos  pères  ont  pris  ce  soin,  et  à  cela  près  de  quelques  formules 
archaïques  ou  passées  de  mode,  aucune  de  ces  charmantes  et  fines 
mélodies  d'autrefois  n'a  manqué  son  effet.  Nous  citerons,  au 
premier  acte,  l'air  d'Almaviva  sous  la  fenêtre,  le  duo  avec  Figaro, 
l'air  du  Barbier.  Au  deuxième  acte,  il  y  a  un  excellent  trio  bouffe, 
celui  des  serviteurs,  qu'il  a  fallu  répéter  tout  entier.  Au  troisième, 
un  très-bon  air  de  Bartholo,  et  au  quatrième  un  joli  duo  d'a- 
mour entre  Almaviva  et  Rosine,  ainsi  qu'un  finale  parfaitement 
distribué. 

Le  rôle  de  Rosine  est  chanté  par  Mlle  Darcier,  une  élève  de 
Mme  Ugalde,  dont  les  conseils  n'ont  pas  porté  sur  un  terrain 
ingrat.  Mlle  Darcier  avait  choisi,  pour  la  leçon  de  chant  du  deuxième 
acte,  le  fameux  air  de  la  Molinara  :  ISel  cor  più  non  mi  sento, 
qu'elle  a  détaillé  avec  beaucoup  de  goiit  et  de  méthode.  Arsan- 
daux,  doué  d'une  voix  franche  et  sympathique,  s'est  parfaitement 
acquitté  du  rôle  difficile  de  Figaro.  Laurent  a  eu  de  bons  moments 
dans  celui  d'Almaviva,  et  Géraizer  ne  s'est  pas  mal  tiré  de  Bar- 
tholo. Avec  Bonnet  et  Barnolt,  il  a  obtenu  le  grand  triomphe  de 
la  soirée  dans  le  trio  bouffe  du  second  acte. 

Ne  nous  lassons  pas  de  complimenter  M.  Constantin,  qui  obtient 
des  résultats  vraiment  extraordinaires  de  son  orchestre  réduit,  par 
les  exigences  de  la  localité,  à  des  proportions  si  restreintes,  et  qui 
a  revu  cette  partition  avec  le  soin  le  plus  attentif. 


D. 


U  nUSIQUE  ET  L'ÂIOUB. 

Dictionnaire  de  la  musique  appliquée  à  l'amour, 

Par  M.  ALBERT  DE  LASALLE. 

(2«  et  dernier  article)  (1). 

Je  signalerai  également  les  médaillons  féminins  au  pastel  que 
le  souple  talent  de  l'auteur  s'est  plu  à  rapprocher  de  quelques 
œuvres  de  musique  choisies  parmi  les  plus  célèbres.  Regardez 
plutôt.  «  La  Symphonie  pastorale,  de  Beethoven  :  bonne  et  robuste 
fille,  tout  en  chair  blanche  et  rose,  avec  des  yeux  qui  regardent 
honnêtement,  avec  des  cheveux  par  millions,  et  des  dents...  plus 
de  deux  cents  dents  peut-être  !  —  Symphonie  de  la  Reine,  d'Haydn: 
voyez  la  pauvrette  comme  elle  est  pâle  et  langoureuse!  Le  masque  , 
de  cire  blême  sous  lequel  elle  semble  se  cacher  et  pourtant  trans- 
percé par  deux  petites  prunelles  d'une  vivacité  toute  juvénile  et 
qui  disent  les  choses  les  plus  douces  du  monde.  —  Ouverture  du 
Fryschutz  :  admirez  cette  tête  énergique  et  âpre,  ce  front  rude- 
ment modelé,  cette  lèvre  avide.  On  peut  être  brave  et  pourtant 
ne  pas  retenir  un  mouvement  de  terreur  à  l'apparition  d'un  pareil 
fantôme,  la  nuit,  dans  un  bois...  —  La  Chasse  du  Jeune  Henry: 
l'amour  de  la  chasse,  et  non  celui  du  jeune  Henry,  nous  vaut  la 
présence  de  cette  amazone.  Aux  rhythmes  caracolants  de  Méhul, 
on  la  voit  se  raidir,  ouvrir  l'œil  et  retenir  sa  respiration ,  comme 
si  son  fauteuil  allait  prendre  le  galop.  Elle  n'est  pas  assise,  elle  est 
en  selle.  —  Hymne,  d'Haydn  :  un  ange  qui  cache  ses  ailes  pour 
ne  pas  effaroucher  la  couvée  Benoiton,  le  mythe  entrevu  par  M. 
de  Monthyon  en  ses  songes  des  nuits  d'été.  Ce  sourire  paisible,  ce 
regard  qui  guette  la  porte  des  paradis  promis,  ne  sont  guère  d'une 
femme,  mais  plutôt  de  ces  madones  de  Raphaël...  qui  donnent 
envie  de  se  marier.  »  El  encore,  «  la  Muse  de  Verdi:  une  sorte  de 
géante  qui  étonne  par  la  vigueur  de  son  biceps ,  et  marche  à  la 
conquête  du  monde  dilettante  en  bousculant  tout  sur  son  passage. 
Telle  est  la  chaleur  du  sang  qui  bouillonne  en  elle,  que  jusqu'au 
mot  :  «  Je  t'aime!  »  elle  dit  tout  avec  une  véhémence  et  une  im- 
pétuosité fiévreuses.  —  La  Muse  de  M.  Auber:  Après  cinq  ligues 
d'adjectifs,»  vous  plaît-il,  poursuit  notre  auteur,  que  nous  la  trai- 
tions de  Parisienne  tout  court,  dans  le  sens  le  plus  exquis  de  ce 
vocable?  » 

Avec  non  moins  d'esprit,  M.  de  Lasalle  fait  remarquer  aux  habi- 
tués de  l'Opéra  l'étrange  contradiction  à  laquelle  ils  se  laissent 
aller,  du  fond  de  leur  loge.  «  Vous  exigez  que  l'on  souffre  pour 
vous  plaire,  mais  vous  défendez  que  l'on  crie  pour  se  soulager. 

«  Voyez  ce  pauvre  Robert,  dit  le  Diable  :  que  de  traverses  avant 
d'épouser  Isabelle  !  Il  perd  sa  fortune  au  jeu,  se  bat  avec  le  prince 
de  Grenade,  se  fait  circonvenir  par  des  nonnes  entreprenantes, 
subit  les  incantations  de  Bertram,  qui  lui  donne  de  mauvais  con- 
seils par  amour  paternel...  Et  vous  ne  voulez  pas  qu'il  crie!... 

»  Croyez-vous  aussi  qu'Arnold  (de  Guillaume  Tell)  ait  lieu  de  se 
louer  du  sort?  Ah!  povero!  il  lui  faut  en  quatre  heures  de  temps 
venger  son  père  assassiné,  délivrer  l'Helvétie  «  d'un  joug  oppres- 
seur, »  et  encore  trouver  moyen  de  se  perdre  dans  les  abîmes 
d'un  amour  sans  espoir...  Et  vous  ne  voulez  pas  qu'il  crie  !... 
*  »  Raoul  (des  Huguenots)  n'est  pas  moins  misérable,  quand  son 
mauvais  génie  d'une  main  le  tient  aux  pieds  de  Valentine  et  de 
l'autre  l'entraîne  vers  la  rue  où  l'on  égorge  ses  amis...  Et  vous  ne 
voulez  pas  qu'il  crie!...  Ah!  messieurs  les  ergoteurs,  on  voudrait 
vous  y  voir  !  11  ferait  beau  vous  entendre  hurler,  si  un  de  ces 
soirs  la  fatalité  aux  tenailles  de  fer  vous  saisissait  par  la  peau  du 
cou  et  vous  jetait  vifs  dans  un  de  ces  labyrinthes  douloureux  que 
traversent  les  héros  d'opéra  !  » 

(1)  Voir  le  n"  18. 


DE  PARIS. 


165 


Je  ne  quitterai  pas  le  Dictionnaire  de  M.  de  Lasalle  sans  em- 
prunter, —  avec  discrétion,  toutefois, — ù  quelques-uns  de  ses  mots 
leurs  «  couplets  »  les  mieux  venus  ou  les  plus  étudiés.  Je  cite  au 
hasard  même  de  ma  lecture  : 

«  Sirènes.  — Il  y  a  quelque  chose  de  répugnant  dans  cette  fable 
antique.  Des  femmes-poisson  (les  vilaines  Lôœs  !)  ne  peuvent  plaire 
qu'à  moitié  et  leurs  torses  monstrueux,  réveillent  les  appétits  les 
plus  disparates  :  ceux  de  l'amour  et  de  la  friture!  »  Eh  bien! 
voilà  de  ces  aperçus  philosophi(|ues  que  l'on  chercherait  en  vain 
dans  le  Traité  sur  les  Sirènes  de  l'excellent  Kastner  !  » 

«  FoBTE.  Piano. — ...  Mesures  de  distance  sur  une  ligne  idéale  où 
un  secret  instinct  fait  voyager  notre  esprit.  Leurs  augmentatifs 
déterminent  bien,  en  effet,  les  différents  plans  de  la  perspective 
du  tableau  musical.  » 

«  Maître  de  musique.  —  Ici  tout  ce  que  la  mémoire  du  lecteur 
pourra  contenir  de  vieux  ana  sur  ce  don  Juan  au  cachet  abusant 
du  pouvoir  séducteur  de  la  mélodie  pour  fasciner  sa  jeune  élève 
et  fuir  avec  elle  vers  ce  21"  arrondissement  de  Paris  qui  est  la 
prison  pour  dettes  des  banqueroutiers  du  mariage.  » 

«  Ecoles.  — ...  Étude  piquante  que  la  comparaison  de  la  musi- 
que d'un  peuple  et  du  caractère  de  la  femme  chez  ce  peuple!  Il  y 
aurait  plus  d'une  analogie  curieuse  à  établir,  en  partant  de  ces 
principes  généralement  admis,  à  savoir  que  :  l'Italienne  est  pas- 
sionnée, loquace,  amie  de  ce  qui  est  bruyant  et  voyant;  l'Alle- 
mande, pensive,  réfléchie  et  tendre  avec  une  pointe  de  mélan- 
colie; la  Française...  comme  vous  savez.  » 

«  Duo.  —  La  musique  est  une  langue,  et  par  excellence  celle 
des  amoureux,  puisqu'elle  est  la  seule  qui  permette  à  deux  per- 
sonnes de  parler  à  la  fois  sans  confusion  et  sans  impolitesse.  » 

«  Barcarolle.  — Pourquoi  les  chansons  chantées  en  barque,  en 
gondole,  en  canot,  en  chaloupe,  en  esquif,  en  nacelle,  voire  en  paque- 
bot, roulent-elles  plus  volontiers  sur  l'amour  que  sur  la  naviga- 
tion?... En  y  réfléchissant  un  peu,  on  ne  tarde  point  à  saisir  la 
raison  de  ce  fait  remarquable.  Notez  tout  d'abord  que  la  barca- 
rolle est  vénitienne.  Veuillez  vous  souvenir  maintenant  que  les 
gondoles  de  Venise  portent  à  l'arrière  une  sorte  de  petite  maison- 
nette capitonnée  comme  un  nid  de  tourterelles.  Est-il  donc  si 
étonnant  qu'il  soit  question  d'amour  dans  les  cantilènes  mari- 
nières d'un  pays  oii  les  amoureux  peuvent  naviguer  en  cabinet 
particulier?  » 

«  Cantatrice.  —   ...   est  à  âme  comme  danseuse  est  à  corps. 

«  Castrats.  —  Voir  sopranisfe.  »  On  y  court  et  l'on  est  immé- 
diatement édifié  et  fixé.  Voici  l'alinéa  : 

«  Ing3Sr"sS12v7nn7n43S4948139  c7sQ237v4c7Ss26  82ntl8g4 
139487n76s7n  n474d4v87S  s7vl  2c4m7c  94mS3  lV92c 
c7mF7mSd7S74n    NinD7    473dc7DS    91,  etc.,  etc.   » 

C'est  ainsi  que,  donnant  libre  carrière  à  sa  verve  humoristique 
et  lui  mettant  la  bride  sur  le  cou,  M.  de  Lasalle  caracole  agréa- 
blement dans  les  plates-bandes  de  la  physiologie,  de  l'esthétique, 
de  la  philosophie  pure,  de  la  musique,  de  tout  ce  qu'on  peut  savoir 
et  de  quelques  autres  matières  encore.  Maintenant  que  l'on  con- 
naît le  faire  de  l'auteur,  on  devine  le  parti  qu'il  a  dû  tirer  des 
expressions  musicales  proprement  dites  :  Accolade,  Donner  le  la, 
Amabile,  Amoroso,  Animato,  Crescendo,  Agitato,  Perdendosi  poco  a 
poco,  A  piacere,  Unisson,  Consonnance  et  Dissonance,  et  quantité 
d'autres.  Voilà  bien  en  ces  feuillets  délurés  le  vrai  Dictionnaire 
de  la  musique  appliquée  à  l'amour,  la  justification  de  son  titre, 
la  partie  la  plus  originale  et  la  plus  réussie,  mais  je  m'arrête  sur 
la  pente  entraînante  de  la  citation.  Que  les  intéressés  s'adressent 
directement  à  M.  de  Lasalle  lui-même  :  sans  parler  du  côté  anec- 
dotique  de  sa  consultation,  il  leur  en  apprendra  long  sur  le  cha- 
pitre du  langage  de  l'harmonie,  biep  autrement  éloquent  que  le 
langage  des  fleurs.  Iris  :  bonnes  nouvelles  ;  jonc  fleuri  :  discrétion 


à  toute  épreuve;  colcliique  :  douleur;  orobc  :  besoin  d'aimer; 
lavande:  silence;  citronnelle:  peines  de  cœur...  Nous  avons  changé 
tout  cela,  nous  n'avons  plus  que  faire  de  ces  bouquets  bavards  et 
de  ces  messagers  antiques.  Notre  Salem  musical  se  prête  à  toutes 
les  situations  de  l'âme,  traduit  toutes  les  phases  de  la  passion  et 
permet  aux  Almavivas  de  courtiser  leurs  Rosines  à  la  barbe  des 
tuteurs  jaloux. 

Les  théories,  les  vues,  les  appréciations  du  Dictionnaire  sont 
discutables;  mais  j'insiste  sur  le  curieux  attrait  du  vocabulaire 
musical  appliqué  à  l'amour.  Voilà  pourquoi  il  est  bien  dédié,  je 
le  répète,  aux  femmes,  jeunes  ou  vieilles,  qui  aiment  à  s'enfon- 
cer sous  les  aubépines  du  sentiment  et  de  la  mélodie.  Les  filles 
d'Eve  se  ressentent  à  tout  âge  du  penchant  originel,  elles  gardent 
toujours  sur  leurs  lèvres  les  saveurs  du  fruit  défendu  ;  mais 
quelle  heureuse  chance  de  pouvoir  le  croquer,  le  faire  croquer 
aux  autres,  en  musique  et  sous  les  espèces  peu  compromettantes 
d'un  dictionnaire? 

«  On  a  besoin  de  plus  d'esprit  pour  parler  d'amour  comme  il 
faut,  que  pour  commander  les  armées.  Les  amants  doivent  donc 
cultiver  leur  esprit,  car  une  liaison  de  cœur  est  celle  de  toutes  les 
pièces  oîi  les  entr' actes  soit  les  plus  longs  et  les  actes  les  plus 
courts  :  de  quoi  remplir  ces  intermèdes,  sinon  par  les  talents?  » 

Il  y  a  plus  de  cent  ans  que  Ninon  de  Lenclos  —  cette  Ninon 
dont  l'âme  était  pétrie  de  la  volupté  d'Epicure  et  de  la  vertu  de 
Caton  —  écrivait  à  peu  près  cela  à  je  ne  sais  plus  lequel  de  ses 
bons  amis.  Ces  hgnes  ne  semblent- elles  pas  ê're  la  préface  pré- 
destinée de  la  spirituelle  improvisation  de  M.  de  Lasalle  et  la  fin 
naturelle  de  cette  promenade  autour  de  son  volume  rose?  Jeunes 
amants,  cultivez  la  musique  !  Musiciens ,  et  vous  aussi  musicien- 
nes, méditez  le  Dictionnaire  de  ta  musique  appliquée  à  l'amour,  et 
dans  ce  domaine  séduisant  vous  apprendrez  à  vous  connaître, 
vous  saurez  ce  que  vous  valez,  vous  entreverrez  les  destinées  sé- 
duisantes auquellcs  vous  pouvez  prétendre  en  vertu  de  Yamoroso 
cantabite  et  au  nom  de  l'accord  parfait  ! 

Em.  Mathieu  DE  MONTER. 


Cette  semaine  une  souscription,  en  tête  de  laquelle  figurent 
MM.  Auber,  Camille  Doucet,  (]haix-d'Est-Ange ,  Hipp.  Rodrigues, 
etc..  a  été  ouverte  au  Conservatoire,  chez  M.  Réty,  pour  élever  un 
monument  à  la  mémoire  d'Edouard  Monnais.  Nous  ne  pouvons 
que  nous  associer  à  cette  preuve  d'affection  donnée  à  notre  re- 
gretté collaborateur  et  ami,  et  former  les  vœux  les  plus  sincères 
pour  sa  réalisation. 


CONCERTS  ET  AUDITIONS  MDSICÀIES  DE  LÀ  SEMAINE. 


^%  Mardi,  au  Cirque  de  l'Impératrice  a  eu  lieu,  au  profit  de  Forplie- 
linat  des  jeunes  filles  d'Alger,  la  troisième  et  dernière  exécution  du 
Jugement  dernier,  oratorio  de  Duprez.  L'œuvre  du  grand  chanteur,  qui 
renferme  des  beautés  incontestables,  n'a  fait  que  gagner  à  cette  nouvelle 
audition,  parfaitement  rendue  par  l'auteur  d'abord  et  les  solistes 
Mlle  Sarolta-Acs,  Mlle  Fidès,  Mme  Pouschkinn  et  M.  Engel  ténor  d'avenir. 
—  La  seconde  partie  du  concert  se  composait  de  divers  morceaux 
chantés  admirablement  par  Mmes  Marie  Sass,  Vandenheuvel-Duprez, 
Marie  Roze,  MM.  Crosti  et  Léon  Duprez.  Le  violoniste  Federigo  Consolo 
a  joué  une  romance  de  Mendelssohn  et  l'Ave  Maria  de  Schubert. 

**jif  La  musique  moderne,  qu'on  exécute  dans  les  séances  de  M. 
Goufi'é,  est  représentée  par  les  œuvres  d'Onslow  et  d'Adolphe  Blanc;  à  la 
dernière  séance  de  clôture  on  y  a  entendu  le  8"  quintette  du  premier  de 
ces  deux  compositeurs,  ainsi  que  le  septuor  de  M.  Blanc,  pour  instru- 
ments à  cordes  et  à  vent  ;  l'exécution  a  été  excellente,  et  le  public  a 
prouvé  par  les  applaudissements  qu'il  a  prodigués  à  l'œuvre  du  jeune 
compositeur  de  musique  de  chambre  tout  le  plaisir  qu'il  éprouvait  à 
l'audilion  de  ce  beau  morceau,  d'ailleurs  parfaitement  exécuté  par  MM. 


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REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


Giierreau,  Rose,  Sclotmann,  Bauer,  Bourdeau,    Lebouc    et   Gouffé,   tous 
membres  de  la  Société  des  concerts. 

^*^,  Pendiint  soa  mois  de  congé,  les  24  et  25  Juin,  Léon  Achard  en  com- 
pagnie de  Mme  Carvalho,  de  M.  Agnesi  et  de  nos  plus  habiles  instrumen- 
tistes, se  rendra  à  Limoges  où  aura  lieu  le  grand  concert-festival  de 
l'union  philharmonique  des  villes  de  l'Ouest.  Cette  solennité  d'un  carac- 
tère très-artistique  a  lieu  tous  les  ans  et  ne  fut  omise  l'année  dernière 
qu'à  cause  de  l'Euposilion  universelle.  Les  amateurs  provinciaux,  .sous 
la  direction  de  M.  Farge,  composent  l'orchestre  et  s'adjoignent  seulement 
quelques  solistes  émérites.  Cette  adjonction  est  un  honneur  et  un  profit 
très-recherchés.  Les  musiciens  appelés,  défrayés  de  toutes  leurs  dépen- 
ses, reçoivent  de  plus,  en  moyenne,  un  cachet  de  SOO  francs  et  une 
large  liospitalité. 

**»  L'œuvre  de  Notre-Dame-des-.\rts,  instituée  pour  venir  en  aide 
aux  filles  des  artistes,  littérateurs,  employés,  etc.,  dont  la  position  de 
fortune  et  de  famille  est  digne  d'intérêt,  donnera  demain  son  concert 
annuel  au  siège  de  l'Institution,  S2,  boulevart  d'Argcr.son,  à  Neuilly. 
Indépendamment  des  chœurs  de  Boïeldieu,  de  Rossini  et  du  prince  Po- 
niatowski,  qui  seront  exécutés  par  les  élèves  de  l'institution,  on  enten- 
dra Mlle  Carlotta  Patli  et  M.  Félix  Godefroid, 

ji:*^  On  écrit  de  Bruxelles  :  Le  II  mai,  un  dernier  concert  et  des  plus 
intéressants,  a  clos  notre  saison  musicale:  l'audition  du  grand  orgue,  au 
Palais  ducal,  a  été  pour  M.  Alphonse  Mailly  un  succès  très  chaleureux  et 
bien  mérité.  Jamais  l'excellent  organiste  n'avait  mieux  montré  ses  rares  et 
précieuses  qualités  de  compositeur  et  d'exécutant;  jamais  le  bel  instrument 
n'avait  déployé  sous  des  mains  pl'js  habiles,  ses  sonorités  .•-i  puissantes 
et  si  souples,  en  leur  infinie  variété.  Lt  pour  que  rien  ne  manquût  à 
cette  séance  de  belle  et  bonne  musique,  M.  Warnots  a  dit,  avec  la  style 
et  le  sentiment  élevé  qu'on  lui  connaît,  de  charmantes  mélodies  de 
Schumann,  et  ce  petit  chef-d'œuvre  d'un  grand  maître,  \'Adelàide  de 
Beethoven.  L'instrument  touché  par  M.  Mailly  est  un  orgue  monu- 
mental se  composant  de  quatre  claviers  à  mains  et  pédales  sépai'ées  de 
32  pieds,  et  d'une  série  complète  de  pédales  de  combinaison  ;  il  a 
été  construit  par  ordre  du  gouvernement  belge  avec  le  concours  artis- 
tique de  MM.  Fétis  et  Lemmens,  dans  les  ateliers  de  la  Société  anonyme 
des  Grandes  orgues,  établissement  Merklin-Schiitze.  C'est  jusqu'à  pré- 
sent le  seul  grand  orgue  qui  se  trouve  placé  dans  une  salle  de  concert, 
sur  le  Continent. 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 

^*^  Le  théâtre  impérial  de  l'Opéra  a  donné  lundi  le  Trouvère  et  le 
premier  acte  de  Giscllc,  l'un  des  ballets  qui  met  le  mieux  en  relief  les 
admirables  qualjtés  de  Mlle  Granzov^'.  —  Mercredi  et  vendredi ,  deux 
magnifiques  représentations  de  Guillaume  Tell  ont  été  pour  Villaret, 
Marie  Battu  et  Faure  l'occasion  d'enthousiastes  applaudissements  et  de 
rappels  dus  à  la  supériorité  avec  laquelle  ils  interprètent  le  chef-d'œu- 
vre de  Rossini.  Mlle  Bloch,  Belval,  David  ont  partagé  avec  ces  artistes 
d'élite  la  faveur  du  public. 

^*^  Lundi  a  eu  lieu  à  l'Opéra,  dans  le  Trouvère,  le  début  depuis 
longtemps  attendu  d'un  nouveau  ténor  d'origine  italienne,  M.  Mazzoleni, 
qui  arrivait  précédé  d'une  grande  réputation  conquise  en  Amérique. 
Lorsqu'on  sut  que  notre  première  scène  lyrique  venait  de  s'attacher  cet 
artiste  en  confiant  à  l'un  de  ses  professeurs  attitrés  la  charge  de  lui 
apprendre  le  français,  les  journaux  se  montrèrent  fort  bien  disposés 
pour  lui;  malbeureusement  les  résultats  n'ont  pas  répondu  aux  espé- 
rances conçues.  Nous  pensons  qu'il  faut  surtout  en  chercher  la  raison 
dans  l'âge  auquel  est  déjà  parvenu  M.  Mazzoleni,  —  qui  paraît  avoir  aux 
environs  de  la  quarantaine  —  et  dans  la  difficulté,  sinon  dans  l'impossi- 
bilité que  l'on  rencontre  alors  à  perdre  son  accent  originel.  —  La 
conscience  qu'il  avait  de  son  insuccès  à  cet  égard  a  dû  l'embarrasser  et 
la  peur  a  pu  paralyser  une  partie  de  ses  moyens.  Quoi  qu'il  en  soit, 
et  malgré  la  bonne  volonté  du  public  à  l'encourager,  il  n'a  pas  ren- 
contré l'accueil  sur  lequel  on  comptait.  Il  possède  une  voix  dont  les 
cordes  graves  ne  manquent  pas  de  vigueur,  mais  qui  monte  difficile- 
ment, tout  en  atteignant  le  si  bémol  ;  elle  manque  de  souplesse,  particu- 
lièrement pour  le  rôle  qu'il  avait  choisi.  Il  faudrait  l'entendre  dans  un 
autre  grand  rôle  pour  le  juger  convenablement.  La  représentation  a 
d'ailleurs  été  bonne.  Marie  Sass,  Mlle  Bloch  et  Caron  ont  chanté  avec 
un  vrai  talent. 

**:^  Une  maladie  de  Mme  Gueymard,  plus  douloureuse  que  grave,  va 
retarder  vraisemblablement  la  première  représentation  de  la  reprise 
d'Herculanum,  en  empêchant  cette  artiste  d'assister  aux  répétitions. 

^*3,  M.  Th.  Lalliet,  hautbois  solo  des  concerts  Musard,  vient  d'être 
nommé  hautbois  de  l'Opéra,  à  la  place  de  M.  Berthelemy,  décédé. 

**i  C'est  le  1"  juin  qu' Achard  prend  son  congé.  Immédiatement  après 
ses  dernières  représentations,  la  direction  du  théâtre  de  l'Opéra-Comique 
donnera  la  reprise  des  Dragons  de  Villars,  l'opéra  d'Aimé  Maillart,  que 
le  succès  a  popularisé  partout.  Nous  a\ons  dit  le  soin  avec  lequel  il  est 


j  remonté,  et  comme  personnel  et  comme  décors,  costumes  et  mise  en 
scène.  La  direction  compte  avec  raison  sur  le  succès  de  cette  repri.se, 
dont  les  représentations  alterneront  avec  celles  du  Premier  Juur  de  bon- 
heur, toujours  très-suivies. 

,i;'*;^  Un  élève  distingué  du  Conservatoire,  M.  Raoult,  qui  à  la  suite  de 
son  brillant  succès  au  dernier  concours  avait  été  engagé  par  M.  Car- 
valho, vient  de  signer  un  engagement  avec  le  théâtre  de  l'Opéra- 
Comique.  —  La  direction  de  ce  théâtre  vient  d'entendre  la  lecture  d'un 
ouvrage  en  trois  actes  de  MM.  Labiche  et  Delacour,  dont  M  F.  Poise 
compose  la  musique,  et  qui  a  pour  titre  provisoire  :  le  Corricolo. 

,f*,u  Aux  engagements  déjà  faits  par  M.  Bagier  pour  la  saison  pro- 
chaine des  Italiens,  on  n'apprendra  pas  sans  plaisir  qu'il  faut  ajouter 
celui  de  l'excellent  baryton  Stellor. 

,**  A  la  sollicitation  de  M.  Camille  Doucet,  et  prenant  en  considéra- 
tion la  situation  critique  des  choristes  du  théâtre  Lyrique,  S.  Exe.  le 
ministre  de  la  maison  de  l'Empereur  et  des  beaux-arts  vient  de  leur 
accorder  un  secours  de  2,000  francs. 

^:*,!f^  M.  Martinet  ne  borne  pas  son  répertoire  à  la  résurrection  des  œu- 
vres anciennes,  il  a  accueilli  un  opéra-comique  en  un  acte  de  M.  de 
Hartog,  intitulé  :  l'Amour  mouillé,  et  dont  les  paroles  sont  dues  à  M.  Ju- 
les Barbier.  La  première  représentation  en  est  tiès-prochaine . 

,t%  Le  ténor  Sytter,  rétabli  de  son  indisposition,  a  repris  son  rôle  de 
Pinsonnet  dans  Fleur-dc-Thé,  dont  le  succès  ne  faiblit  pas. 

^.**  D'après  une  rectification  émanée  de  M.  W.  Busnach  lui-même, 
la  pièce  en  trois  actes  dont  M  Léo  Delibes  doit  composer  la  musique 
pour  le  théâtre  de  l'Athénée  n'est  pas  de  MM.  Meilhac  et  Halévy,  mais 
bien  de  M.  Octave  Gastineau,  et  doit  porter  le  titre  de  Princesse  Mar- 
7nollr,  au  lieu  de  Princesse  Ravigotte. 

**«  Le  31  de  ce  mois,  l'administration  actuelle  du  théâtre  des  Bouf- 
fes-Parisiens donnera  sa  dernière  représentation.  Dès  les  premiers  jours 
de  juin  commenceront  les  travaux  de  restauration  jugés  indispensables 
par  la  nouvelle  direction  Noriac. 

»*=,  Désiré  fera  partie  de  la  troupe  que  forme  M.  Noriac;  son  engage- 
ment est  signé. 

^*^  Mlle  Schneider  est  à  Toulouse  et  s'y  fait  applaudir  avec  enthou- 
siasme dans  /'/  Gninde-Duchcsse.  Elle  vient  d'être  engagée  à  Toulouse 
même  par  M.  Raphaël  Félix  (venu  exprès  d'Angleterre)  pour  jouer 
Jlarbc-Iikue,  la  Sellt-Ilélènc  et  la  Grande- Duchesse  au  théâtre  Saint-James 
à  Londres. 

»*:^  La  Grande- Dw:hcsse,  chantée  et  jouée  par  Mme  Lestrade  avec  une 
grâce  et  une  verve  spirituelle  des  plus  fines,  vient  de  terminer  la  saison 
théâtrale  à  Alger.  La  partition  d'Offenbach,  populaire  entre  toutes,  a 
trouvé  là  le  succès  qui  l'a  partout  accueillie,  et  le  public  a  fait  une  vé- 
ritable ovation  à  sa  principale  interprète. 

^*^  On  nous  écrit  de  Moscou  :  «  II  n'était  bruit  depuis  une  semaine 
que  du  bénéfice  après  lequ'l  Mlle  Désirée  Artôt  devait  nous  faire  ses 
adieux.  Aussi  notre  vaste  salle  était-elle  entièrement  louée  à  l'avance,  et 
l'empressement  du  public  avait  été  tel  que  des  places  avaient  été  payées 
jusqu'à  40  roubles!  C'est  //  Barbiere  i[\xe  Mlle  Artôt  avait  choisi  pour  celte 
soirée,  qui  fera  certainement  époque  dans  sa  vie  d'artiste  et  qui  témoignera 
une  fois  de  plus  du  fanatisme  auquel  peuvent  atteindre  les  dilettantes  de 
notre  pays  lorsqu'ils  prennent  un  artiste  en  affection.  En  cette  occasion, 
il  n'est  pas  de  formes  que  n'ait  revêtues  leur  prédilection.  A  son  entrée 
dans  sa  loge  une  première  surprise  était  ménagée  à  Mlle  Artôt;  cette 
loge  avait  été  splendidement  décorée  à  neuf  et  tapissée  des  fleurs  les 
plus  rares.  A  son  entrée  en  scène,  accueillie  par  des  acclamations  et  des 
hurras  frénétiques,  la  célèbre  cantatrice  ne  pouvait  suffire  à  la  récolte 
de  bouquets  qui  lui  étaient  adressés  de  tous  côtés,  et  parmi  lesquels  s'en 
détachait  un  d'admirables  roses,  de  dimension  colossale,  et  sur  lequel  se 
balançait  un  magnifique  papillon  en  rubis,  diamants  et  turquoises  d'une 
valeur  de  2,000  r.  (7,300  fr.).  A  partir  de  ce  moment  l'ovation  n'a  fait  que 
grandir,  corbeilles  et  guirlandes  de  fleurs,  coupe  en  vieux  Sèvres,  ser- 
vice à  déjeuner,  en  vermeil,  présenté  sur  un  immense  sachet  de  satin 
blanc,  bracelets,  couronnes  avec  écharpes  de  toutes  nuances;  en  un  mol, 
toutes  les  profusions  de  l'Orient.  L'enthousiasme  avait  été  d'ailleurs  au 
comble  par  la  perfection  avec  laquelle  Mlle  Artôt  interprétait  le  rôle  de 
Rosine ,  et  par  Pintercalation  dans  la  leçon  de  chant  de  mélodies  russes 
très-bien  dites.  A  la  sortie  du  théâtre,  attendue  par  200  jeunes  gens,  la 
diva  n'a  pu  qu'avec  peine  et  en  laissant  dans  la  foule  des  lambeaux  de 
sa  toilette  et  des  bouquets  qu'on  se  partageait,  gagner  sa  voiture  pour  se 
rendre  à  un  splendide  souper,  qui  lui  était  offert  et  où  elle  trônait  sous 
un  dais  de  fleurs  pendant  qu'un  excellent  orchestre  exécutait  les  plus 
beaux  airs  de  son  répertoire.  Au  milieu  de  cette  délicieuse  fête,  le  comte 
SoUohub  a  lu  des  vers,  composés  par  lui,  en  l'honneur  de  Mlle  Artôt  et 
qui  ont  été  suivis  d'applaudissements  et  de  fanfares.  —  La  recette  de 
la  représentation  dans  laquelle  Mlle  Artôt  a  été  d'ailleurs  fort  bien  se- 
condée par  ses  camarades  et  surtout  par  le  baryton  Padilla,  a  produit 
20,000  fr.  —  Une  bague  de  prix  a  été  offerte  par  les  "artistes  au  chef 
d'orchestre,  M.  Dupont,  frère  du  célèbre  pianiste  belge.  » 


DE  PABIS 


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NOUVELLES  DIVERSES. 

**,  La  partition  pour  piano  et  chant  de  Fkur-de-Thé  sera  mise  en 
vente  après-demain  mardi  chez    les  éditeurs  Brandus  et  Dufour. 

:^*^  La  Galerie  des  musiciens  célèbres  publiée  chez  les  mêmes  éditeurs 
vient  de  s'enrichir  de  deux  beaux  portraits  :  l'un  de  Kelterer,  l'éminent 
pianibte-compositeur ;  l'autre  de  Federigo  Cousolo,  le  violoniste,  dont 
on  a  pu  apprécier  au  concert  qu'il  a  donué  .dernièrement  le  talent  aussi 
vigoureux  qu'original. 

***  Avec  la  compagnie  Ulmann-Patti  est  revenu  à  Paris  Edouard 
Wollî,  après  une  tournée  de  trois  semaines  dans  le  midi  delà  France. — 
Applaudissements,  rappels,  ovations,  rien  n'a  manqué  à  l'éminent 
pianiste-compositeur  qui  a  joué  dans  chaque  concerto  se  fameuse  Taren- 
telle, et  avec  Vieuxtemps  leurs  beaux  duos  sur  Don  Juan  et  sur  Oberon. 

^*^  M.  Albéric  Second  va  très-prochainement  publier  chez  Dentu  un 
volume  qui  a  pour  titre  :  Misères  d'un  prix  de  Home.  Le  talent  humo- 
ristique de  notre  spirituel  confrère  permet  d'augurer  le  succès  complet 
de  ce  nouvel  ouvrage. 

»**  L'éditeur  Leduc  fils  vient  de  mettra  en  vente  les  morceaux  dé- 
tachés de  Mademoiselle  Sylvia,  le  joli  petit  opéra -comique  de  M.  Sa- 
muel David,  qu'il  a  acquis  récemment. 

^.**  Mlle  Nina  de  Rionnelle,  qui  progresse  chaque  jour  en  talent  et 
en  réputation,  vient  de  remporter  deux  nouveaux  triomphes  à  Toulon, 
dans  une  représentation  de  bienfaisance,  et  à  Nice,  où  elle  a  chanté  en 
italien  de  manière  à  exciter  un  véritable  enthousiasme,  deux  actes  de 
Nonna  et  un  àHl  Trovatore.  Sa  voix  étendue,  l'agilité  qu'elle  a  acquise, 
lui  garantissent  de  beaux  succès  dans  la  carrière  du  chant  italien,  si 
elle  est  tentée  de  l'aborder. 

^*^  Pasdeloup  vient  de  partir  pour  la  Suisse  et  l'Allemagne,  et  il  assis- 
tera au  grand  festival  de  Cologne.  Son  but  principal,  en  faisant  ce  voyage, 
est  de  recueillir  des  matériaux  destinés  à  varier  le  répertoire  de  ses  Concerts 
populaires. 

***  Nous  avons  parlé  récemment  d'un  projet  de  fondation  en  Italie, 
d'une  Société  basée  sur  les  formes  qui  régissent  notre  Société  des  au- 
teurs et  compositeurs  de  musique.  Le  ministre  de  l'Instruction  publique, 
M.  Broglio,  vient  d'en  offrira  Rossini  la  présidence  honoraire. 

^**  M.  Jules  Klein  vient  de  recevoir  de  Victor  Hugo,  à  l'occasion  des 
six  mélodies  publiées  par  lui  sur  les  poésies  de  l'auteur  de  Notre-Dame 
de  Paris,  la  lettre  suivante  : 

0  Hauteville-House,  5  mai. 
»  Monsieur  Jules  Klein,  Paris, 

»  Je  vous  envoie,  Monsieur,  tous  mes  vœux  de  succès,  et  mes  plus 
cordiales  sympathies.  Victor  Hugo.  » 

.i.*^  Nous  devons  mentionner,  au  nombre  des  dernières  œuvres  de 
Camille  Schubert,  la  Belle  Bavaroise  valse  comique,  qui  obtient  un  grand 
succès,  et  les  •  Confidences,  valse  chantée  de  Maxiniiiien  Graziani.  Elles 
viennent  de  paraître  chez  l'éditeur  Prilipp. 

***  L'orchestre  de  Strauss  a  fait  entendre,  pour  la  première  fois,  au 
grand  bal  international  de  l'Opéra,  la  grande  valse  et  le  brillant  qua- 
drille qu'il  a  composés  sur  les  motifs  d'Hamlet,  le  nouvel  opéra  d'Am- 
broise  Thomas.  Ces  deux  morceaux,  qu'il  a  dii  répéter  plusieurs  fois,  ont 
eu  les  honneurs  du  programme. 

»■**  Dernièrement,  dans  un  concert  à  Leipzig, on  a  entendu  un  andante 
de  Bériot  et  une  Romance  sans  paroles  de  Meyerbeer  exécutés  par  un 
tout  jeune  violoniste  phénomène,  né  sans  bras.  11  tient  l'archet  avec  les 
deux  premiers  doigts  du  pied  gauche  et  touche  avec  les  doigts  du  pied 
droit  les  cordes  de  son  instrument  placé  sur  un  petit  banc  devant  lui. 
Cet  artiste  extraordinaire  est  attendu  à  Berlin,  puis  il  viendra  à 
Paris. 

^*^  On  annonce  le  mariage  de  Mlle  Halév}',  fille  du  compositeur, 
avec  M.  Desoria,  négociant  en  vins  de  Bordeaux  et  grand  amateur  de 
chant. 

^*^  Vendredi  prochain,  Mgr  de  la  Tour-d'Auvergne-Lauraguais,  ar- 
chevêque de  Bourges,  présidera  la  solennité  d'inauguration  du  grand 
orgue  construit  par  MM.  Merklin-Schiitze  et  C'",  pour  la  belle  église  de 
Levroux  (Indre).  M.  Edouard  Batiste,  professeur  au  Conservatoire  impé- 
rial de  musique,  organiste  de  Saint-Eustache,  fera  entendre  l'instru- 
ment. 

^*.f.  Le  jeune  Lotto,  ce  brillant  lauréat  de  notre  Conservatoire,  dont  le 
talent  s'est  toujours  développé  et  qui  est  aujourd'hui  l'un  des  plus  célè- 
bres violonistes  de  l'Europe,  est  maintenant  en  pleine  voie  de  guérison, 
après  une  longue  maladie.  C'est  une  bonne  nouvelle  à  donner  aux 
amis  de  l'art.  Il  arrivera  prochainement  à  Paris. 

»%  L'inauguration  de  la  saison  à  Bade  vient  d'avoir  lieu  avec  un 
grand  éclat.  Le  nouvel  éclairage  des  salons  et  de  la  façade  extérieure 
était  éblouissant,  et  la  foule  qui  se  pressait  sur  la  terrasse  était  énorme. 
L'orchestre,  renforcé,  fonctionnait  pour  la  première  fois  au  kiosque,  et 
son  habile  chef,    Koennemann  a  pu   s'enorgueillir  des  applaudissements 


prodigués  à  ses  deux  solistes  :  Wuille,  le  clarinettiste  sans  pareil, 
Leloup,  l'excellent  corniste,  et  à  l'exécution  remarquable  Aes  Rendez-vous 
de  Chasse,  de  Rossini,  et  du  Fremersberrj.  En  somme  c'était  une  soirécsu- 
perbe  et  qui  fait  on  ne  peut  mieux  augurer  des  autres. 

;^*4,  Le  syndicat  de  la  Société  des  auteurs,  compositeurs  et  éditeurs  de 
musique  a  lixé  au  dimanche  li  juin  le  jour  de  son  assemblée  générale 
annuelle. 

:,,'*,,  M.  Mazilier,  chorégraphe  distingué,  vient  de  mourir  à  l'âge  de 
soixante-huit  ans.  11  avait  été  maître  de  ballets  à  l'Opéra  et  avait  colla- 
boré à  un  nombre  considérable  de  livrets  de  ce  genre,  le  Diable  amou- 
reux, Griselidis,  h  Corsaire,  le  Diable  à  quatre,  Lady  llenrietle,  etc.  De 
I85I  à  1858,  il  avait  également  composé  les  diverlisscments  des  grands 
opéras  donnés  pendant  cette  période.  M.  Mazilier,  par  son  talent  et  son 
caractère,  avait  mérité  l'estime  générale  et  l'affection  toute  particulière 
des  artistes  de  la  danse. 


ÉTRANGER 


»■*:,,  Londres.  —  Le  ténor  Mongini  a  fait  sa  rentrée  à  Her  Majesty's 
Opéra  dans  Maria;  voix,  méthode,  jeu,  tout  en  lui  est  trouvé  excellent,  et 
on  lui  a  fait  un  très-sympatliique  accueil.— A  Covent-'Gardcn,  Mlle  Patti  a 
chanté,  avec  son  charme  et  son  succès  habituels,  la  Sonnambula  et  Don 
Pasquale.  —  Mlle  Nilsson  est  de  plus  en  plus  en  faveur. 

^*^  Manchester.  —  La  Grande-Duchesse,  donnée  le  18  mai  pour  la 
première  fois,  a  remporté  un  nouveau  triomphe.  C'est  encore  Mme  Howard- 
Paul  qui  jouait  le  principal  rôle.  On  a  bissé  la  «  chanson  du  Sabre  »  et 
le  chœur;  il  a  fallu  redire  trois  fois  «  la  chanson  du  Verre.  >• 

***  Amsterdam.  —  La  Société  Félix  Meritis  a  donné  le  24  avril  son 
dixième  et  dernier  concert,  en  présence  de  la  famille  royale.— Mme  Nor- 
man-Neruda  s'y  est  fait  entendre  avec  un  très-grand-succès,  ainsi  que  la 
basse-taille  Cari  Hill,  de  Francfort. 

**«  La  Haye.  —  Aladin  no  la  Lampe  merveilleuse,  ballet  fantastique 
dont  A.  Berlyn  a  écrit  la  musique,  représenté  sur  notre  scène  depuis  le 
mois  de  janvier  dernier,  a  atteint,  avec  un  succès  toujours  soutenu,  sa 
trentième  représentation .  Le  roi  et  la  reine  des  Pays-Bas  ainsi  que  le 
prince  d'Orange  assistaient  à  cette  soirée. 

js*,j  Vienne.  —  Mlle  Benza  a  chanté  pour  la  première  fois,  le  8  mai,  le 
rôle  de  Sélika  de  l'AfHcaine.  On  fondait  sur  cette  jeune  artiste  des  espé- 
rances qui  ont  été  remplies  et  au  delà;  c'est  assurément  la  meilleure 
Sélika  qu'on  ait  entendue  à  Vienne  depuis  Mlle  Bettelheim.  On  l'a 
applaudie  et  rappelée  plusieurs  fois.  De  Bignio  est  toujours  très-remar- 
quable dans  le  rôle  de  Nélusko. 

*%  Milan.  — ha.  Société  del  quartelto  a  inauguré  le  li  mai  les  concerts 
symphoniques  qu'elle  promet  depuis  si  longtemps.  On  a  entendu  deux 
Sinfonie  (qui  doivent  être  des  fantaisies  pour  orchestre)  de  Bazzini  et 
et  G.  Rossi,  couronnées  au  concours  de  la  Société,  une  symphonie  de 
Beethoven .  et  une  ouverture  de  Foroni.  L'orchestre  était  dirigé  par 
CorbelUni . 

»%  Varsovie.  — -  M.  de  Moukhanow  vient  d'être  définitivement 
nommé  au  poste  d'intendant  des  théâtres, -occcupé  provisoirement  par 
M.  de  Zaborowsky.  —  Le  compositeur  Moniuzsko  va  présenter  de  nou- 
veau au  public  un  grand  ouvrage.  — -  On  a  exécuté  la  semaine  dernière 
le  Paria,  de  Casimir  Delavigne,  avec  ouverture  et  chœurs.—  Le  Conserva- 
toire, dont  nous  avions  annoncé  la  fermeture,  va  être  rouvert  sous  le  pa- 
tronage du  gouvernement  qui  prend  les  frais  à  sa  charge. 

^*^  Saint-Pétersbourg.  —  Le  succès  de  l'Orphée,  de  Gluck  s'est  pleine- 
nement  confirmé  à  la  deuxième  représentation,  et  il  continue  depuis 
lors  à  enthousiasmer  le  public.  Mlle  Lawrowsky  est  au-dessus  de  tout 
éloge  dans  le  rôle  d'Orphée  ;  celui  d'Eurydice  est  parfaitement  rempli 
par  Mlle  Solowieff,  qui,  malade  le  premier  soir,  avait  été  remplacée  par 
Mlle  Iretzky. 

**iji  iVoscou.  —  L'opéra  Rognéda,  d'Alexandre  Seroff,  sera  représenté 
l'automne  prochain  avec  une  mise  en  scène  splendide.  L'empereur  de 
Russie  a  accordé  au  compositeur  une  pension  viagère  de  1,S00  roubles. 

a,*^  Nouvelle-Orléans.  —  L'Africaine,  exécutée  cinq  fois  déjà  avec  un 
immense  succès,  paraît  devoir  terminer  la  campagne.  L'interprétation 
en  est  confiée  à  Mme  Audibert,  au  ténor  Picot  et  au  baryton  Lechevallier, 
trois  artistes  excellents  qui  s'acquittent  de  leur  tâiîhe  avec  un  rare 
bonheur  et  une  grande  distinction . 


■  :  s.  Duroun. 


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REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE  DE  PAKIS. 


CHEZ    G.     BRANDUS    ET    S.     DUFOUR,    ÉDITEURS,     103,    RUE    DE    RICHELIEU,    A    PARIS. 

Catalogue  des  œuvres  de 

JACQUES  ROSENHAIN 


nuMfquc  cl'ensembl*-. 

Op.    1.  Quatuor  pour  piano,  violon,  alto  et  violoncelle »     » 

—  2.  !"'■  Trio    pour  piano,  violon  et  violoncelle  {mi  mineur), 

dédié  à  Ferdinand  Ries IS    » 

—  3 .  Concertino  pour  piano  seul  ou  avec  orchestre 9     >' 

—  13.  Fantaisie appassionata  pour 2  pianos  (ou  piano  et  harpe).. .     ■»     » 

La  même,  arrangée  à  quatre  mains »     » 

Andanie  pour  violoncelle  avec  ace.  de  piano »    » 

—  32.  2"  Trio  pour  piano,    violon  et   violoncelle   (rc  mineur), 

dédié  à  Haheneck 20    » 

—  38.  l'"  So7iatc  pour  piano  et  violoncelle  (ou  violon),  mi  ma- 

jeur, dédiée  à  Mendebsohn 12    » 

—  47.  Deux  morceaux  de  salon  pour  piano  et  violon   (ou  violon- 

celle) :  1 .  Andante  espressivo 7  SO 

2.  Rondo-valse 9     » 

—  SO.  3»  Trio  pour  piano  et  violoncelle  (fa  mineur) 20    » 

—  53    2=  Sonafe  pour  piano  et  violoncelle  (ou  violon),  ut  min.  15     » 

—  55.  1"  Quatuor  pour  deux  violons,  alto  et  violoncelle  [sol  ma- 

jeur), dédié  à  Rossini 15  » 

—  37.  2°  Quatuor    id.     {ut  majeur),  dédié  à  Vieuxtemps 13  » 

—  65.  3' Quatuor    id.    (re  mineur),  dédié  à  Jean  Becker 13  » 

—  72.  Trois  Mélodies  pour  piano  et  violon  (1,2,3),  chaque 6  » 

—  73.  Concerto  pour  piano  avec  ace.  d'orchestre    (ou    d'un  se- 

cond piano  ) 15    » 

—  78.  Trois  Idylles  pour  piano  et  violoncelle:  (1.  Matinée  d'Eté. 

—  2.  Dans  la  Nuit.  —  3.  Fêle  villageoise) »     » 

Valses  pour  piano  et  violoncelle »     » 

—  80.  4°  Trio  pour  piano,  violon  et  violoncelle  {mi  majeur)...     »    » 

musique   &  orcbestre. 

l™  Ouverture  de  concert  [ré  mineur) a     » 

—  7.2°  Ouverture  de  concert  {ré  majeur) »     » 

42.  1"  Symphonie,  sol  mineur  (exécutée  pour  la  l'»  fois  aux 

concerts  du   Gewandhaus,  à  Leipzig,  sous  la  direction 

de  Mendelssohn  ) »    » 

—  43.  2°  Symphonie,  fa  mineur  (exécutée  pour  la  l'^  fois  aux  con- 

certs du  Conservaioire,  à  Bruxelles,  sous  la  direction  de 

M.  Fétis) .     » 

—  61.  3°  St/mp/ionie   {Au  Printemps),  fa  majeur  (exécutée  pour 

la  1"  fois  à  Paris  sous  la  direction  de  M.  Pasdeloup). . .     »     » 

musique  pour  Piano  solo. 

Romance  (Souvenir) 4  50 

—  3.  Mélancolie,  impromptu 7  30 

—  12 .  Andante  religioso 6  » 

—  14.  Mélodies  (quatre) 6  » 

—  15.  Morceau  de  salon 3  » 

17.  12   Etudes   caractéi'istiques,   adoptées   aux  Conservatoires 

de  Paris  et  de  Bruxelles,  dédiées  à  Cherubini 18  » 

Les  mêmes,  en  deux  livres 10  » 

Séparément  :  a.  Sérénade  du  Pêcheur S  » 

0,  La  Danse  des  Sylphes 3  » 

20.  24  Etudes  mélodiques  faciles,  pour  servir  d'introduction  à 

celles  de  Cramer 12  » 

—  23.  Caprice 7  30 

—  24    Poème 6  » 

25.  Mélodies  caracfe'risfigues  (1"  recueil)  (a.  Chanson  espagnole; 

—  fc, Inquiétude;  c,  —  ;  d.  Chant  Montagnard.) 6    » 

—  26 .  Rêveries,  en  deux  cahiers,  chaque 6     » 

—  28.  Nocturne  et  Rondo-Valse,  1,  2,  chaque 6     » 

Rondo-Valse,  arrangé  à  4  mains 7  50 

—  30.  Scène  dramatique 7  30 

31.  Mélodies  caractéristiques  (2=  recueil),  1,  2,  3,  (1.  Chanson 

polonaise.  —  2.  Les  Adieux,  à  l'Étranger.  —  3.  Lutte  in- 
térieure), chaque 4  30 

Agitato  (de  l'Album  des  Pianistes) 4  50 

—  33 .  Valse  de  concert "7  30 

La  même,  arrangée  à  quatre  mains 9    » 

—  34 .  Polka  de  concert 7  30 

35  o.  Etude  (Lied)   de  la  Méthode  des  Méthodes,  de  Fétis  et 

Moschelés 4  50 

—  35  6 .  Fantaisie  dramatique  à  quatre  mains 9     • 

—  37  Mélodies  caractéristiques  (3"  recueil),  1 ,  2,  3  (o.  Chants  orien- 

taux ;   b,  le  Passé  ;  c,  l'Ondine  ;  d,  Plainte),  chaque.    4  50 

—  39.  Deuxsolos  faciles  (morceaux  de  concours),  1,2  (mi  bémol 

et  la  mineur) ,  chaque 4  30 

—  41 .  1"  Sonate  {fa  mineur) 9    » 

V Andante  séparément 3    » 


Op.  43.  2°  Symphonie,  fa  mineur,  arrangée  à  quatre  mains  par 

M.  H.  Lévy....... •  » 

—  45.   Calabraise  et  Ballade,  mélodies  caractéristiques  (4"  rec).  7  50 

—  46.   Variations  humoristiques  sur  le   Carnaval  de  Venise 6  » 

—  48.  La  Tempête,  Étude  caractéristique  de  concsrt 3  » 

—  49.  Cantabile  et  Mauresque  (1,   2),  deux  mélodies,  chaque...  3  » 

—  31.  Idylles  :  1.  Le  Calme,  3  fr.  —  2.  Fête  villageoise 6  » 

— -  32 .   Trois  Mazurkas 6  » 

Impromptu  {mi  bémol),  solo  de  concours 7  30 

—  58.  Deux  Mazurkas  :  1,  mi  niaj.,  4  fr. — 2,  ré  mineur 3  » 

—  61 .  3'  Symphonie,  sol  majeur,  arrangée  à  quatre  mains  par 

M.  Diémer »  » 

—  67.  Ballade  et  Chanson  slave,  mélodies  caractéristiques  (5'=  rec.)  7  30 

Trois  petits  Duos  à  quatre  mains  (très-faciles)  1,  2, 3,  chaq.  3  • 

3'=  Solo  (facile),  rondo  élégant  {ré  majeuri 3  » 

—  68.  Mélodies  caractéristiques   (b"  recueil)  1,  2  (a,  Barcarolle  ; 

6,  les  Cloches;  c.  Courante;  d.  Chanson  du  Touriste,  ch.  3  • 

—  69.  Second  Caprice »  » 

—  70.  2°  Sonate,  fa  mineur »  » 

—  74 .  3"  Sonate,  sol  mineur »  » 

—  77 .  Méditation 6  » 

i"  Solo  (facile),  rondo,  mi  bémol. , »  » 

—  79 .  Deux  Nocturnes,  en  deux  suites »  > 

—  81 .   Conte  d'Enfant a  » 

—  82.  Mélodies  caractéristiques  (7« recueil),  1,  2,  3  {a.  Crépuscule; 

—  b.  Dans  les  Champs  ; —  c,  Regrets  ; —  d.  Berceuse.) . .  »  » 

musique  vocale. 

—  11.  Une  Visite  à  Bedlam  (Der  Besuch  im  Irrenhaus),  opéra- 

comique  en  un  acte,  poëme  d'après  Scribe,  représenté 
pour  la  première   fois  à  Francfort) »    » 

—  27.  Liswenna,  opéra  en  trois  actes »     » 

—  36.   Le  Démon  de  la  Nuit,  opéra  en  deux  actes,  poëme  de  Bayard 

et  M.  Ltienne  Arago,  représenté   pour  la  première  fois 
à  l'Académie  impériale  de  musique  à  Paris. 

Grande  partition 250  »    Partition    pour     piano     et 

Parties  d'orchestre. . .  230  »        chant net  12    » 

Ouverture  séparée...     18»    Morceaux  détachés »    » 

—  64.  Volage  et  Jaloux,  opérette  en  un  acte,  poëme  de  M.  T. 

Sauvage,  représenté  la  1"  fois  au  théâtre  de  Bade,  net    3    » 

—  4..  Mélodies  allemandes  pour  une  voix  avec  ace.  de  piano 

(en  deux  recueils  ) »    » 

—  10.  Six  Romances  pour  une  voix  avec  ace.  de  piano »     » 

Ballade  pour  voix  de  ténor  :  Dos  oede  Haus »     » 

Id.     pour  voix  de  basse-taille  :  Der  geistertanz s 

—  19.  Quatre  Mélodies  allemandes  pour  une  voix  (3'  recueil)  avec 

ace.  de  piano »    » 

Six  choeurs  pour  quatre  voix  d'hommes,  sans  accomg..     »     » 

—  21.  Six  Mélodies  allemandes  pour  une  voix  (4°  recueil)  avec 

ace.  de  piano »    » 

—  40.  Id.    (5"  recueil),     id »     » 

Barcarole  pour  deux  voix  (soprano,  alto)  ace.  de  piano. .     »     » 
Six  Mélodies  à  une  voix  avec  ace.  de  piano  :  1 .  Le  rendez-vous  .    2  30 

2.  L'aube  naît,  et  ta  4.  Elle  est  si  jolie 2  30 

porte  est  close. . .  2  30    5.  Es- tu  jalouse 2  30 

3.  Sais-tu  pourquoi  je  6.  Sérénade »    ■» 

t'aime 4    »  — 

—  44.  Adieu  à  la  mer,  de  Lamartine,  scène  de  concert  avec  or- 

chestre (ou  piano)  1,  pour  voix  de  ténor;  2,  pour  voix 

de  mezzo-soprano  ou  baryton 6  » 

—  54.  Six  Mélodies  allemandes  pour    une  voix  (6°  recueil) »  » 

—  59.  Deux  Mélodies  pour  une  voix  (a.  Bergeronnette 3  » 

b.  Un  Rêve)  avec  ace.  de  piano 2  50 

—  60.  Six  Mélodies  (Echo  des  campagnes)  à  deux  voix  (soprano 

et  alto)  avec  ace.  de  piano,  dans  le  style  populaire,  pa- 
roles françaises  de  M.  Emile  Deschamps  (7^  recueil)  : 

1.  Chanson 3    »    4.  Barcarole  napolitaine. . .    3    » 

2    Nocturne 2  30    5.  Mélodie 2  30 

3.  Vilanelle 2    »    6.  Sérénade 2    » 

62.  Six  Mélodies  pour  une  voix  avec  ace.  de  piano  (1.  Quelle 

est  gracieuse  et  belle.  —  2.  Je  veux  oublier  que  j'aime. 

—  3.  J'aime  un  œil  noir.  —  4.  Mon  cœur  est  froid.  — 

5.  J'ai  peur  des  jaloux.  —6.  Brillante  étincelle.) •     » 

—  63.  Cantate  hébraïque  (pour  l'inauguration  du  temple  à  Franc- 

fort), pour  voix  de  solo,  chœur  et  orchestre  (ou  orgue).  »  • 
(56.  Six  Mélodies  pour  une  voix  avec  ace.  obligé  de  violoncelle 

(ou  violon)  et  piano  (8'=  recueil),  en  deux  suites »  » 

77.  Six  Mélodies  allemandes  pour  une  voix  (9=  recueil)  avec 

ace.  de  piano »  » 

—  73.  Id.    (10°  recueil)  avec  ace.  de  piano »  » 

—  76.  Id.    (11"  recueil)  avec  ace.  de  piano »  » 


lUPBUBBIB  CBBTTBALE  DES  CDEHIIHS  DE  FEB  -  —  A.  CHAIX   ST  C,  BUE  BEBGKBE,  30,  A  PAEIS. 


BUREAUX    A    PARIS  :    BOULEVARD   DES   ITALIENS,  1. 


5S'  Année. 


N'  22. 


ON   S'ABONNE  : 

Dans  les  Dépnrlumcnts  et  A  l'Étranger, 

chez  tous  les  Marchands  de  Musique,  les  Libraires, 

et  aui  Bureaux  der.  Messageries  el  des  Postes. 


REVUE 


31  Mai  181)8. 


PRIX    OE    L'ABONNEMENT: 

Paris 24   r.  par  an 

Départemi'nti,  Belgique  et  Suiue....    30  n      U. 

lilrimger 34  <       UL 

Le  Journal  paraît  lo  Dimanche. 


GAZETTE  MUSICALE 


E     PARIS 


SOMMAIRE.  — Les  droits  des  auteurs  (deuxième  partie,  S*  article),  par  Xha- 
inaa  SanTage.  —  Bibliograpiiie  musicale:  Etudes  pratiques  de  style  vocal, 
de  Steplien  de  la  Madeleine,  par  Arthar  Pongrin.  —  Entrefilets.  —  Revue 
des  théâtres,  par  D.  A.  D.  (Saint-lf«es.  —  Concerts  et  auditions  musi- 
cales de  la  semaine.  —  Nouvelles  des  théâtres  lyriques.  —  Nouvelles  diverses. 
—  Annonces. 


LES  DROITS  DES  AUTEURS. 

{Deuxième  partie.] 
SOCIÉTÉ   DES  AUTEURS,    COMPOSITEURS  ET   ÉDITEURS  DE   MUSIQUE. 

(8«  article)  (d). 

Cette  aveftture  bizarre,  grotesque,  vint  tout  à  coup  arrêter 
dans  sa  prospérité  un  établissement  utile  à  l'art,  supprimer  un 
genre  dont  les  progrès  continuels  donnaient  aux  compositeurs,  aux 
exécutants,  déjà  nombreux,  l'espoir  d'utiliser  leur  talent  1  Mais 
devant  l'arbitraire,  l'omnipotence  et  le  privilège,  nulle  réclamation 
n'était  possible  :  I'Opéra-Comique  resta  supprimé  de  1745  à  17S2. 

Après  sa  campagne  de  Flandres,  Mme  Favart  était  entrée  à  la 
Comédie  italienne  (1749)  où,  pour  utiliser  son  charmant  talent  de 
cantatrice,  on  mettait  des  airs  dans  presque  tous  les  rôles  qu'on 
lui  donnait.  Le  chant  se  propageait  donc  en  dehors  de  l'Académie 
de  musique,  malgré  tous  les  efforts  faits  pour  l'y  concentrer  et  le 
goût  du  public,  chaque  jour  plus  prononcé  pour  la  mélodie,  fai- 
sait abandonner  les  lugubres  accents  du  grand  Opéra,  bien  qu'a- 
lors Rameau  fût  dans  toute  sa  gloire  :  il  fallait  prendre  une  réso- 
lution. Pour  jeter  de  la  variété  dans  les  spectacles,  l'Opéra  ht  venir 
des  chanteurs  italiens. 

On  ne  se  njit  pas  beaucoup  en  frais  :  c'était  une  pauvre  et  mé- 
diocre troupe,  qui  donnait  des  représentations  à  Strasbourg;  elle 
débuta  au  mois  d'août  17S2  par  la  Serva  Padrona,  et  cependant, 
malgré  sa  médiocrité  et  la  chaleur  de  la  saison,  la  Tonelli,  prima 
donna,  Manelli,  primo  houffo ,  et  surtout  l'œuvre  admirable  de 
Pergolèse,  obtinrent  le  plus  grand  succès.  Cette  musique  vive,  fran- 
che, naturelle,  fut  comme  une  révélation  pour  les  Parisiens. 

(1)  Voir  les  n»'  33,  40,  41,  45  et  49  de  l'année  1867,  et  les  n»'  7  et  9. 


Une  exécution,  un  style  si  différents  de  tout  ce  que  l'on  était 
habitué  à  entendre  jusque-là,  ne  pouvaient  être  acceptés  sans  sou- 
lever de  grandes  discussions  ;  on  ne  dérange  pas  impunément  les 
idées  et  les  goûts  reçus  :  grande  aussi  fut,  comme  on  sait,  la  que- 
relle entre  les  Lullistes,  les  Ramistes,  les  Bouffonistes  ! 

Pour  satisfaire  les  premiers,  on  renvoya  bien,  après  quelques 
mois,  les  chanteurs  italiens,  mais  le  coup  était  porté;  l'oreille  du 
public  avait  été  frappée  et  conservait  l'impression  de  cette  mélodie 
ravissante.  Tandis  que  le  génie  de  J.-J.  Rousseau,  éveillé  par  les 
accords  italiens,  qu'il  avait  si  éloquemment  défendus  (Lettre  sur 
la  musique  française),  enfantait  le  Devin  du  Village,  l'habile  di- 
recteur, que  nous  avons  déjà  rencontré  sur  notre  chemin,  Mo- 
net,  après  avait  fait  bâtir  une  nouvelle  salle  charmante  à  la  Foire, 
entreprenait,  au  prix  d'une  grosse  redevance  à  l'Opéra,  de  relever 
Y  Opéra-Comique,  auquel   il  donnait  pour  devise  :  Mulcet,  Foyet, 

MONET. 

Comprenant  le  parti  que  l'on  pourrait  tirer  du  nouveau  genre, 
il  fit  composer  par  Vadé  et  Dauverfijne  les  Troqueurs,  véritable 
opéra  bouffon,  qu'il  donna  d'abord  pour  une  œuvre  ultramontaine 
et  qui,  à  ce  titre,  attira  la  foule. 

Les  Troqueurs  et  le  Devin  sont  de  1733;  l'imitation  avait  suivi 
de  près  l'apparition  des  modèles  :  ce  sont  les  deux  premiers  opéras 
bouffons  composés  en  France. 

L'année  suivante,  la  Comédie  italienne,  qui  en  pareille  circons- 
tance ne  pouvait  pas  rester  en  arrière,  aborda  franchement  la 
question  :  elle  donna  ce  que  l'on  appela  alors  des  parodies,  et  ce 
que  nous  nommons  aujourd'hui  des  traductions. 

Ce  fut  d'abord  la  Servante  Maîtresse,  traduite  par  Baurans,  qui 
eut  cent  CINQUANTE  représentations  de  suite  et  qui,  restée  presque 
constamment  au  répertoire,  servit  aux  débuts  de  Mme  Boulanger, 
il  y  a  soixante  ans,  comme  à  ceux  de  Mme  Galli-Marié,  il  y  a  deux 
ans  ;  puis  Baiocco  d'Orlandini,  le  Maître  de  musique,  la  Bohémienne, 
le  Chinois,  etc.,  etc.,  tous  opéras  bouffons  des  meilleurs  maîtres 
de  l'Italie,  et  en  outre  des  comédies  mêlées  d'ariettes,  comme  Ni' 
nette  à  la  cour,  sortes  de  pasticci  dans  lesquels  on  faisait  entrer  des 
airs  choisis  dans  les  opéras  italiens  adaptés  à  l'ouvrage  ou  des 
morceaux  composés  exprès,  dans  le  même  goût,  par  des  artistes 
français. 

De  son  côté,  I'Opéba-Comique,  se  piquant  d'émulation,  faisait 


170 


KEVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


écrire  pottr  lui,  par  des  compositeurs  étrangers  ou  français  :  Phi- 
lidor,  Laborde,  Dauvergne,  Duni,  Monsigny,  Sodi,  Laruette,  etc., 
de  véritables  opéras  qui  attiraient  la  foule. 

11  y  eut  donc,  de  1732  à  1762,  trois  théâtres  lyriques  en  exer- 
cice, et  cet  espace  de  temps  suffit  pour  généraliser  le  goût  de  la 
musique  tellement  que  tous  les  airs,  toutes  les  partitions  se  gra- 
vaient (1). 

Alors  les  compositeurs,  les  artistes  lyriques,  les  instrumentistes, 
pouvaient  se  faire  connaître,  acquérir  de  la  réputation  ou  du  moins 
vivre  :  le  monde  s'occupait  de  musique;  il  l'écoutait  et  la  prati- 
quai chacun  vQiulait  la  savoU'  et  cherchait  à  l'apprendre  !  Faut-il 
ledh'e^eet  eng^uemeiRt  épo^vaftta  1»  littérature  ;  elle  devint  hos- 
tile I  )|t  musiqij^,  qi^  d^tournail  d'elle  l'attention,  au  moment  où 
elle  dé^yait  ^|i$  pltws  |ïraiviçs  |M-éte»\tioas  philosophiques.  Pour 
ne  ipwtw  (^  dv  0b&f>  voy^  )a  rc^ç  et  ks  sarcasmes  do  Vol- 
taire contre  l'opéra-comique  (2)  ! 

Mme  Favart  avait  pris  rang  parmi  les  sociétaires,  à  la  Comédie 
italienne  ;  son  mari,  devenu  sous  la  direction  de  Monet  régisseur 
de  rOpéra-Comique,  était  donc  parfaitement  informé  de  ce  qui  se 
passait  dans  les  deux  établissements.  Il  rend  ainsi  compte,  dans  sa 
correspondance  avec  le  comte  de  Durazzo,  des  luttes  et  des  péripé- 
ties qui  amenèrent  la  dernière  transformation  de  ces  théâtres  : 

«  —  1761,  —  8  novembre.  — L'Opéra-Comique  a  eu  un  succès 
si  brillant  à  la  foire  dernière,  qu'il  a  réveillé  les  jalousies  des  autres 
spectacles  :  il  est  maintenant  question  d'un  projet  de  réunion  de 
l'opéra-comique  avec  le  grand  opéra.  Si  elle  a  lieu,  on  verra 
Biaise  le  Savetier  ou  le  Maréchal  représentés  à  la  suite  d'Armide. 

»  —  H  novembre.  —  La  cour  et  la  ville  sont  dans  la  plus 
grande  fermentation;  depuis  les  princes  des  princes  jusqu'à  la 
plus  vile  populace,  tous  les  ordres  de  l'Etat  sont  dans  l'attente 
d'un  grand  événement;  l'intérêt  des  nations  semble  disparaître 
devant  un  intérêt  plus  grand. — De  quoi  s'agit-il? — C'est  notre  petit 
opéra-comique  qui  fixe  l'attention  générale.  — Trois  factions  s'élè- 
vent contre  lui  :  nos  gentilshommes  de  la  chambre  continuent  à 
demander  sa  réunion  à  la  Comédie  italienne,  qui  ne  s'en  soucie 
guère,  quoique  cela  puisse  lui  être  favorable  ;  les  directeurs  de 
l'Opéra,  excités  par  M.  Berlin,  qui  s'est   mis    à   leur  tête    depuis 


{l)VAlmanach  des  spectacles  de  Duchesne,  qui  jusque  là  n'avait  jamais 
mentionné  un  recueil  de  musique,  dans  les  années  1733-56-60  présente 
un  catalogue  musical  considérable  relatif  aux  pièces  de  théâtre,  sous  les 
titres  attrayants  de  : 

—  L'Amusement  des  dames  ou  recueil  de  menuets, contredanses,  vau- 
devilles, rondes  de  table,  airs  à  boire,  duos  avec  accompagnement. 

—  La  Toilette  de  Vénus,  dressée  par  l'Amour,  contenant  des  menuets, 
contredanses,  vaudevilles,  airs  nouveaux  et  choisis. 

—  Le  Passe-Temps  agréable  et  divertissant,  vaudevilles,  rondes  de 
table,  duos,  brunettes  et  autres. 

—  Les  Thémirêides,  recueil  d'air  de  Théroire. 

—  Les  Desserts  des  petits  soupers  de  Mme  ***. 

—  Amusements  champêtres  ou  les  Aventures  de  Cythère,  chansons 
nouvelles  à  danser. 

—  Menuets,  contredanses  et  vaudevilles,  chantés  aux  comédies  fran- 
çaise et  italienne. 

—  Airs,  menuets,  contredanses,  parodies,  chantés  sur  les  théâtres  de 
l'Académie  de  musique  et  de  FOpéra-Comique. 

—  Les  Lois  de  l'amour,  recueil  de  différents  airs. 

—  Menuets  nouveaux  en  concerto. 

—  Chois  de  différents  morceaux  de  musique. 

—  Le  Postillon  sans  chagrin. 

—  L'Année  musicale,  etc.,  etc.,  etc. 

Puis,  les  recueils  complets  et  séparés  des  airs  de  tous  les  opéras,  opéras- 
comiques  el  vaudevilles. 

(2)  Et  cependant  ambitieux  de  tous  les  genres  de  succès,  il  faisait 
pour  Grétry  les  mauvais  libretli  :  Grégoire  ou  les  Deux  Tonneaux  et  le 
Baron   d'Otrante,  que  Grétry  eut  le  bon  goût  et  le  courage  de  refuser! 


qu'il  s'est  arrangé  avec  Mlle  Arnould,  demandent  que  le  spectacle 
forain  soit  incorporé  avec  l'Académie  royale  de  musique,  toute  ri- 
dicule et  nuisible  que  serait  pour  elle  cette  innovation;  d'un  autre 
côté,  la  Comédie  française  prépare  des  mémoires  dans  la  vue 
d'anéantir  ce  genre  de  spectacle,  qui  fait  abandonner  Rodogune 
et  Cinna  pour  des  bagatelles.  Tant  de  conjurations,  tant  de  diffé- 
rents intérêts  à  concilier,  seront  peut-être  le  salut  de  l'opéra-co- 
mique; tous  ces  débats  lui  donnent  une  célébrité  et  des  protecteurs 
qu'il  ne  devait  pas  attendre  de  son  mérite. 

»  —  2S  décembre.  —  Deux  fois  le  Conseil  des  dépêches 
s'est  assemblé  pour  discuter  la  grande  affaire  de  l'opéra- 
comique.  A  la  dernière  audience  l'archevêque  de  Paris  s'est  pré- 
senté avec  toute  la  pompe  de  la  prélature  comme  partie  interve- 
nante en  faveur  du  spectacle  forain.  Sa  Majesté  a  été  fort  étoanée 
qu'un  prince  de  l'Eglise  devint  l'avocat  des  histrions,  qu'il  excom- 
muniait; elle  en  a  plaisanté.  S.  Exe.  M.  le  duc  de  Richelieu  est 
venu  à  la  charge.  —  «Ne  trouvez  pas  mauvais,  monsieur  l'arche- 
»  vôque,  lui  a-t-il  dit,  que  les  comédiens  italiens  et  l'Opéra-Comique 
»  vous  fassent  assigner  pour  déduire  vos  raisons.  »  Notre  saint 
prélat  a  paru  déconcerté;  mais  ses  raisons  étaient  qu'un  spectacle 
de  plus  produisait  un  avantage  pour  les  pauvres,  à  cause  du  quart 
de  la  recette  qu'on  prélève.  M.  le  procureur-général  et  les  admi- 
nistrateurs des  hôpitaux  ont  appuyé  fortement  l'instance  de  mon- 
seigneur l'archevêque.  Le  roi,  qui  n'est  pas  autrement  attaché  à 
ce  grand  projet  de  réunion,  en  a  marqué  son  indifférence  ;  autant 
en  a  fait  M.  de  Choiseul.  Cette  cause,  si  importante  pour  la  nation, 
sera  portée  au  grand  bureau  des  pauvres,  où  elle  doit  être  jugée 
en  dernier  ressort  demain  samedi  26  décembre.  Il  y  a  tout  lieu 
de  croire  que  les  choses  resteront  où  elles  étaient  ci-devant  et  que 
le  sublime  projet  est  échoué. 

»  —  29  décembre.  —  Grâce  à  notre  saint  archevêque,  dont  la 
main  apostolique  a  la  puissance  de  lier  et  de  délier,  l'Opéra-Co- 
mique, excommunié  et  béni  tout  à  la  fois,  restera  dans  le  même 
état  et,  qui  plus  est,  sous  la  protection  de  Son  Eminence;  c'est 
une  affaire  décidée. 

,)  —  1762,  —  12  janvier.  —  Enfin,  enfin,  enfin  voilà  le  sort  de 
l'opéra-comique  décidé  :  la  réunion  aura  son  plein  et  entier  effet 
au  1"  février  prochain.  —  Plus  d'opéra-comique  aux  foires,  mais 
sur  le  théâtre  Italien  pendant  toute  l'année,  à  l'exception  cepen- 
dant de  la  semaine  de  la  Passion,  dans  le  cours  de  laquelle  on 
représentera  comme  à  l'ordinaire,  sur  le  théâtre  de  l'Opéra-Co- 
mique à  la  foire  Saint-Germain,  nos  petits  opéras  bouffons  pour 
l'intérêt  des  pauvres  et  l'édification  des  badauds.  » 

Abisi  fut  arrêté  encore  une  fois  subitement,  brutalement,  pour 
de  mesquins  intérêts,  cet  élan,  effet  naturel  de  la  concurrence  et 
de  la  rivalité,  qui  entraînait  si  vite  et  si  haut  l'art  musical. 

Pour  ne  pas  faire  trop  crier  le  public,  justement  froissé  de  ces 
petites  intrigues  qui  troublaient  ses  plaisirs,  pour  ne  pas  le  priver 
d'artistes  qu'il  aimait,  on  incorpora  dans  la  troupe  italienne  Clair- 
val,  Laruette,  Audiiiot;  les  demoiselles  Nessel  et  Deschamps. 

Bouret  et  Mlle  Luzy  furent  admis  au  Théâtre-Français. 

Il  n'avait  donc  pas  été  inutile  ce  petit  théâtre,  qui  fournissait 
des  sujets  remarquables  aux  deux  grands,  et  des  compositeurs 
comme  Monsigny  et  Philidor  aux  deux  scènes  lyi-iques  qui 
restaient  ! 

Mais  ce  n'était  pas  assez  tourmenter  ces  artistes,  supprimés  au 
théâtre  Italien  par  l'adjonction  des  nouveaux,  ou  jetés  sur  le  pavé 
par  la  suppression  de  l'Opéra-Comique  ;  voici  les  tristes  mesures 
que  l'on  prenait  encore. 

«  —  1763,  —  13  octobre.  —  Le  roi  vient  de  défendre  expressé- 
ment et  sous  DES  peines  très-graves,  à  tous  comédiens,  chanteurs, 
danseurs,  symphonistes,  ses  sujets,  de  sortir  de  France,  sans  une 


DE  PARIS. 


171 


permission  signée  du  premier   gentilhomme   de    la    chambre    en 
exercice. 

»  On  a  de  plus  écrit  aux  directeurs  de  troupes  de  comédiens, 
qui  sont  dans  le  royaume,  pour  leur  signifier  les  ordres  de  Sa 
Majesté. 

»  On  a  donné  pour  raison  de  ce  nouveau  règlement  que  les 
personnes  attachées  au  théâtre  ayant  dans  les  pays  étrangers  des 
appointements  plus  forts  que  l'on  n'en  donne  en  France,  il  arri- 
verait qu'au  bout  de  quelques  années  on  manquerait  totalement 
de  sujets  aux  trois  théâtres  (1).  ». 

Voilà  comment  on  favorisait  l'art  lyrique  et  dramatique  sous 
Louis  XV,  le  Bien-Aimé,  qui  trouvait  admirables  les  fades  pasto- 
rales de  Laujon  et  Lagarde,  chantées  par  Mme  de  Pompadour,  et 
ravissantes  les  parades  épicées  de  Collé,  lorsqu'elles  faisaient  rire 
à  gorge  déployée  Mme  Dubarry. 

Thomas  SAUVAGE. 
(La  suite  prochainement.) 


BIBLIOGRAPHIE  HDSICÂLE. 

ETUDES  PRAOTIQUES  ȣ   STYIjI:   VOCA^Ii, 

Pat  STEPHEN  DE  LA  MADELALNE  (2). 

11  y  a  bientôt  huit  ans,  toute  la  presse  musicale  retentit  des  éloges 
adressés  à  un  savant  professeur,  praticien  non  moins  exercé,  qui  ve- 
nait, par  un  coup  hardi  et  inattendu,  de  révolutionner  l'enseignement 
vocal.  Ce  professeur  avait  trouvé  le  moyen,  bien  simple  en  apparence, 
et  cependant  inconnu  jusqu'à  lui,  de  perpétuer  les  bonnes  traditions  de 
l'an  du  chant. 

Pour  cela,  qu'avait-il  fait?  Une  chose  bien  simple,  je  viens  de  le  dire, 
et  qui  cependant  était  un  coup  de  maître,  une  innovation  complète.  Il 
avait  écrit  une  leçon;  c'est-à-dire  que,  prenant  pour  texte  de  ses  obser- 
vations un  air  célèbre,  il  avait  annoté  cet  air  période  par  période,  phrase 
par  phrass,  mesure  par  mesure,  indiquant  sous  chaque  fragment,  .sous 
chaque  note,  l'inflexion,  le  caractère,  le  degré  d'intensité  qu'il  fallait  lui 
donner.  C'étai(  une  interprétation  complète,  détaillée,  judicieuse,  de  l'air 
en  question,  tellement  complète  et  tellement  détaillée,  qu'un  élève  n'a- 
vait qu'à  étudier  le  morceau  d'api-ès  les  observations  écrites ,  à  le  tra- 
vailler dans  le  sens  indiqué,  pour  s'en  rendre  maître  et  le  chanter 
comme  il  convient,  et  cela  sans  le  secours  d'un  professeur.  En  un  mot, 
l'enseignement  écrit  était  substitué  à  l'enseignement  oral,  et  de  ce  jour 
les  vraies  traditions  de  l'art  du  chant  ne  devaient  plus  être  perdues, 
puisque  tout  grand  artiste  pouvait,  avec  l'aide  de  la  plume,  perpétuer 
.son  enseignement  et  faire  vivre  après  lui  .sa  doctrine. 

L'homme  distingué  auquel  nous  devons  ce  progrès  considérable,  est 
personne  ne  l'ignore ,  M.  Stéphen  de  la  Madelaine.  Chacun  sait,  en 
effet,  qu'en  -1860,  M.  de  la  Madelaine  adressa  à  l'Académie  des  beaux- 
arts  une  «  leçon  écrite  »  sur  l'air  d'Agathe,  du  Freischiilz  (qu'il  a  le  tort 
d'écrire  :  Freyschiitz) ,  et  que  la  section  de  musique  donna  à  ce  travail 
l'approbation  suivante,  confirmée  par  l'Académie  elle-même  en  séance 
générale  : 

<i  L'idée  fondamentale  de  l'ouvrage  de  M.  Stéphen  de  la  Madelaine 
nous  paraît  ingénieuse.  Cet  ouvrage  est  une  leçon  très-développée  sur 
l'air  célèbre  du  Freischiitz.  —  L'auteur  a  écrit  avec  le  plus  grand  soin 
toutes  les  observations  que  cet  air  pouvait  suggérer  à  un  professeur  ha- 
bile, et  il  substitue  ainsi  un  enseignement  écrit  et  durable  à  un  ensei- 
gnement oral  et  fugitif. 

»  Cette  idée,  appliquée  aux  morceaux  de  chant  des  grands  maîtres, 
aux  morceaux  qu'on  peut  nommer  classiques,  peut  fournir  le  point  de 
départ  d'un  enseignement  éminemment  utile. 

»  11  va  sans  dire  que  l'élève,  pour  profiter  de  ces  leçons  tout  à  fait 
spéciales,  doit  être  formé  à  l'exercice  du  chant  et  de  la  vocalisation. 

»  Quant  à  l'exécution  de  cette  idée,  appliquée  à  l'air  du  Freischiitz,  la 
section  a  trouvé  dans  le  travail  de  M.  de  la  Madelaine  d'excellens  avis 
et  une  connaissance  complète  du  morceau  qu'il  analyse  avec  un  très-bon 
sentiment.  » 


(\)  Correspondance  de  Favart  avec  le  comte  de  Diirazzo. 
(2)  Paris,  Albanel,  1868,  2  vol.  in-12. 


M.  .Stéphen  de  la  Madelaine,  on  le  sait,  n'est  pas  .seulement  un  pro- 
fesseur émérite.  Chanteur  et  virtuose  distingué,  ancien  membre  récitant 
de  la  musique  de  Charles  X,  il  a,  de  plus,  fait  ses  preuves  comme  cri- 
tique, et  a  dirigé  pendant  plusieurs  années,  avec  talent,  avec  goût  et 
autorité,  un  journal  spécial.  Nul  n'était  donc  plus  apte  que  lui,  sous 
tous  les  rapports,  à  marcher  dans  la  voie  que  lui-même  il  avait  tracée. 
Auteur  de  l'excellent  manuel  connu  .sous  le  titre  de  Théories  complètes  du 
chant,  tout  semblait  l'appeler  à  développer  jusqu'au  bout  .ses  idées,  et  à 
faire  suivre  le  travail  présenté  par  lui  à  l'Institut  de  plusieurs  autres  du 
même  genre. 

Il  n'a  pas  manqué  à  sa  lâche,  et  c'est  précisément  un  recueil  de  le- 
çons écrites  sur  plusieurs  airs  célèbres  qu'il  nous  présente  aujourd'hui 
sous  ce  titre  d'Etudes  pratiques  de  style  vocal. 

Avant  d'entamer  les  leçons  proprement  dites,  l'auteur  présente  de  très- 
bonnes  ob.servations  sur  les  divers  styles  de  la  musique  vocale,  lesquels, 
selon  lui,  sont  au  nombre  de  six  :  style  tragique,  style  dramatique, 
style  comique,  style  bouffe,  style  religieux,  style  pathétique.  Il  présente 
ensuite  six  leçons  très- étendues  sur  six  airs  célèbres  se  rapportiint  cha- 
cun à  l'un  des  styles  caractérises  par  lui  :  1°  air  d'Agathe,  du  Freischiitz 
(pathétique)  ;  —  2°  air  d'Eléazar ,  de  la  Juive  (  tragique  )  ;  —  3"  air  de 
Rosine,  du  Barbier  de  Sémite  (comique);  —  4°  stances  de  Rachel,  de  la 
Juive  (dramatique);  —  5»  air  de  Figaro,  des  Nozze  di  Figaro  (bouffe);  — 
6°  air  de  Stradella  (religieux).  A  la  suite  de  ces  leçons  viennent  deux 
chapitres  très -intéressants,  l'un  intitulé  :  Considérations  pratiques  sur 
l'enseignement  élémentaire  du  chant,  l'autre  traitant  de  l'esthétique  et  du 
mécanisnje  des  traits.  Enfin,  l'ouvrage  se  termine  par  un  travail  assez 
étendu  et  qui  en  est  en  quelque  sorte  indépendant,  bien  que  s'y  ratta- 
chant par  un  lien  très-étroit,  ainsi  que  l'indique  suffisamment  son  titre: 
la  Vocale  française  à  notre  époque.  C'est  comme  un  appendice,  fort  loin 
d'être  inutile  à  l'esprit  du  livre  lui-même. 

En  ce  qui  concerne  la  façon  dont  sont  conçues  les  leçons  ainsi  présen- 
tées par  M.  de  la  Madelaine,  il  me  semble  qu'elle  est  irréprochable.  Ses 
remarques,  ses  observations,  ses  conseils  sont  on  ne  peut  plus  justes,  et 
je  suis  convaincu,  pour  ma  part,  que  les  jeunes  chanteurs  qui  auront 
recours  à  son  livre  n'auront  qu'à  s'en  louer,  et  à  s'en  louer  considéra- 
blement. Mais  —  il  y  a  toujours  un  mois,  et  j'espère  que  l'excellent  pro- 
fesseur voudra  bien  me  le  pardonner  —  je  ne  suis  nullement,  mais  nul- 
lement de  son  avis  en  ce  qui  concerne  les  altérations  à  apporter  au  texte 
musical.  Mon  opinion  est  qu'il  faut  respecter  la  musique  des  maîtres , 
et,  quoi  que  puisse  en  penser  M.  de  la  Madelaine,  je  la  consprverai. 
D'abord,  je  crois  que  les  compositeurs,  et  les  plus  grands,  ont  toujours 
écrit  leur  musique  comme  ils  désiraient  qu'elle  fût  chantée,  et  je  ne 
crois  pas  que  les  virtuoses  leur  aient  jamais  procuré  un  plaisir  bien 
complet  en  modifiant  leurs  inspirations  et  en  les  arrangeant  à  leur  guise. 

Selon  M.  de  la  Madelaine,  les  changements  que  l'on  peut  apporter  au 
texte  musical  sont  affaire  de  goût.  D'accord ,  mais  précisément  le  goût 
est  chose  si  rare  que  je  suis  peu  tenté,  en  cette  question  délicate,  de  m'en 
rapporter  à  l'arbitraire  des  interprètes.  Le  goût,  o  qui  est  le  sentiment 
des  rapports  harmonieux,  »  comme  le  disait  si  justement  Halévy  dans 
une  de  ces  excellentes  définitions  qui  lui  étaient  famihères,  le  goût  de- 
mande à  être  formé,  épuré  par  une  bonne  éducation  et  des  études  cons- 
tantes. Or,  il  faut  bien  l'avouer,  ce  n'est  plus  malheureusement  là  le 
fait  des  chanteurs  de  nos  jours,  qui,  pour  la  plupart,  ne  se  donnent  plus 
la  peine  de  faire  des  études  générales,  se  bornent  à  dégrossir  leur  voix 
pour  pouvoir  débuter  au  plus  vite,  et  se  contentent  ensuite  d'apprendre 
leurs  rôles  avec  plus  ou  moins  de  conscience.  Que  jadis ,  des  chanteurs 
comme  Lays,  Laisné,  Nourrit,  EUeviou,  Martin,  Solié,  Gaveaux,  Ga- 
vaudan,  qui  étaient  des  musiciens  accomplis  et  quelques-uns  même  des 
compositeurs  di.stingués,  que  des  artistes  de  cette  trempe  .se  permissent 
de  temps  à  autre,  et  pour  faire  briller  les  meilleures  notes  de  leur  voix, 
d'altérer  accidentellement  la  pensée  du  compositeur,  d'y  ajouter  des  gru- 
petti,  des  ports  de  voix,  des  points  d'orgue,  cela  se  comprenait  encore 
parce  qu'ils  ne  le  faisaient  qu'à  bon  escient  et  avec  habileté,  non-seule- 
ment au  point  de  vue  vocal,  mais  au  point  de  vue  technique.  Aujour- 
d'hui, malheureusement,  nous  n'en  sommes  plus  là,  et  nous  voyons  des 
chanteurs  parfois  bien  doués,  mais  peu  soucieux  de  la  situation  drama- 
tique et  complètement  ignorants  des  lois  premières  de  l'art,  faire  des 
changements  à  tort  et  à  travers,  sans  intelligence  et  sans  goût,  faire  en- 
tendre des  notes  étrangères  à  l'harmonie,  placer,  par  exemple,  d'heu- 
reuses variations  de  l'accord  de  sixte  et  quarte  sur  une  septième  de  do- 
minante et  vice  versa,  écorcher  enfin  avec  un  sang-froid  imperturbable 
les  oreilles  des  vrais  artistes,  en  même  temps  qu'ils  pervertissent  le  goût, 
le  sens  musical  du  public  vulgaire.  Voilà  ce  qui  me  semble  fâcheux, 
dangereux,  malsain,  et  ce  qui  tait  que  sous  ce  rapport  je  ne  partage 
point  les  idées  de  M.  de  la  Madelaine. 

Cette  réserve  faite,  je  ne  puis  que  recommander  chaudement,  aux 
jeunes  artistes,  et  même  aux  chanteurs  exercés,  le  livre  utile  et  vrai- 
ment excellent  de  M.  de  la  Madelaine.  Les  uns  y  trouveront  d'excellents 
préceptes,  des  conseils  donnés  ex  professo,  dans  une  langue  claire,  nette 
et  élégante;  les  autres  y  trouveront  matière  à  d'utiles  réflexions,  à  des 
méditations  qui  ne  pourront  que  leur  faire  chérir  davantage  encore  l'art 
si  noble,  si  délicat  et  si  charmant  auquel  ils  se  sont  voués.  Si  les  Eludes 


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REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


pratiques  de  style  vocal  étaient  dans  les  mains  de  tous  les  chanteurs,  de 
tous  les  professeurs,  dans  dix  ans  nos  théâtres  lyriques  seraient  trans- 
formés. 

Arthur  POUGIN. 


Le  7  juillet  dernier,  dans  notre  compte  rendu  de  la  distribution 
solennelle  des  récompenses  aux  exposants,  nous  proclamions  au 
nombre  des  médaillés  de  la  classe  X  la  manufacture  de  pianos  de 
Philippe  Herz  neveu  et  G'»,  comme  ayant  obtenu,  seule  de  la  fac- 
ture française,  (MM.  Érard,  Pleyel-Wolff  et  H.  Herz  s'étant  mis 
hors  concours)  la  médaille  d'or. 

Quelques  jours  plus  tard  on  lisait  dans  V Indépendance  belge  : 

«  En  contradiction  avec  ce  qu'on  avait  dit  que  la  facture  française  des 
pianos  avait  été  vaincue  à  l'Eiiposition  universelle  par  la  facture  étran- 
gère, j'apprends  qu'une  médaille  d'or  a  été  décernée  à  MM.  P.-H.  Herz 
neveu  et  C'°.  »  » 

«  Nous  avions  été  des  premiers  à  annoncer  que  cette  unique  médaille 
d'or  accordée  à  la  facture  des  pianos  français  avait  été  obtenue  par  une 
jeune  maison  dont  nous  nous  sommes  plu  à  constater  les  progrès.  Notre 
opinion  sur  son  compte  avait  d'ailleurs  été  partagée  par  tous  les  écri- 
vains de  la  presse  musicale,  et  par  les  artistes  que  celte  maison  a  convoqués 
maintes  fois,  depuis  sa  création,  à  l'examen  de  ses  produits;  le  jury,  en 
lui  donnant  cette  récompense,  n'a  donc  fait  que  sanctionner  cette  opinion, 
et  la  nouvelle  en  a.  été  accueillie  par  l'expression  des  plus  vives  sym- 
pathies.  !> 

Cependant,  par  une  série  de  malentendus  aussi  regrettables 
qu'inexplicables,  non-seulement  celte  médaille  d'or,  décernée  par 
le  jury  international  à  la  majorité  de  quatorze  voix  sur  quinze,  et 
pour  la  réception  de  laquelle,  invitation  de  la  Commission  impériale 
avait  été  adressée  ;\  [M.  Philippe  Herz  pour  la  séance  solennelle 
du  1"  juillet,  ne  lui  avait  pas  été  jusqu'à  présent  délivrée,  mais 
encore  n'avait  pas  été  inscrite  au  catalogue  des  récompenses.  Nous 
apprenons  avec  plaisir  que  cette  erreur  vient  d'être  réparée  à  l'en- 
tière satisfaction  de  M.  Herz,  qu'il  a  reçu  la  médaille  et  le  diplôme 
conquis  par  le  mérite  de  sa  fabrication,  et  que  dans  ce  grand 
concours  international  la  facture  française  a  repris  victorieuse- 
ment le  rang  qu'elle  devait  occuper  auprès  de  la  facture  étrangère. 
—  La  maison  Ph.  Herz  neveu  n'a  donc  plus  qu'à  justifier,  en 
progressant  de  plus  en  plus,  la  haute  récompense  dont  elle  a  été 
l'objet  et  l'appréciation  si  favorable  du  critique  compétent, 
M.  A.  Méreaux,  qui  s'exprimait  ainsi  sur  son  compte  dans  le  Mo- 
niteur du    17    avril  dernier  : 

(t  M.  Philippe  Herz  neveu.  —  A  ce  point  de  vue,  un  jeune  facteur 
dont  la  fabrique  n'a  pas  plus  de  quatre  années  d'existence,  M.  Philippe 
Herz  neveu,  a  rendu  un  service  en  adaptant  à  la  mécanique  des  pianos 
obliques  le  .système  du  double  échappement,  et  en  leur  donnant  ainsi 
l'élasticité  favorable  à  la  rapidité  de  l'exécution,  qualité  qui  jusqu'à  pré- 
sent avait  été  uniquement  le  partage  du  piano  à  queue. 

»  Les  pianos  de  M.  Philippe  Herz  neveu  sont  habilement  construits  : 
le  son  est  plein  et  de  bonne  nature.  Les  claviers  'sont  bien  égalisés. 
Ces  éléments  constitutifs  des  instruments  recherchés  par  les  pianistes 
sont  tout  à  fait  développés  dans  le  piano  à  queue  qu'il  a  exposé  et 
et  qui  de  plus  est  d'une  forme  très-élégante. 

»  Le  jeune  facteur  savait  bien  qu'un  débutant  n'a  pas  à  se  préoccuper  des 
séductions  de  l'enveloppe  pour  présenter  ses  produits,  qui  doivent  s'a- 
dresser aux  oreilles  bien  plus  qu'à  la  vue.  Mais  il  a  tenu  compte  d'une 
vérité  poclamée  par  la  sagesse  des  nations,  et  qui  peut  s'appliquer  à  tout  : 
il  en  a  changé  la  lettre  et  suivi  l'esprit  ;  convaincu  que  si  le  luxe  exté- 
rieur ne  fait  pas  le  piano,  du  moins  il  le  pare,  M.  Philippe  Herz  a  placé 
un  mécanisme  très-soigné  dans  une  belle  caisse  d'ébène,  avec  incrusta- 
tions et  ornements  dorés  du  style  Louis  XIV.  Pour  la  valeur  artistique 
de  cet  instrument,  on  a  pu  en  juger  lorqu'une  de  nos  célèbres  pianistes, 
Mme  Escudier-Kastner,  l'a  fait  si  bien  valoir  dernièrement  en  exécutant 
une  fantaisie  de  Thalberg,  un  fragment  de  Mozart  et  le  Torrent  de  La- 
combe. 

»  Ce  début  remarquable  prouve  que  le  jeune  facteur  est  de  ceux  qui 

«  à  deux  fois  ne  se  font  pas  connaître, 

i>  Et  pour  leurs  coups  d'essai  veulent  des  coups  de  maître.» 

»En  faisant  l'éloge  de  cette  manufacture,  on  n3  doit  pas  oublier  l'habile 


coopérateur  dont  M.  Philippe  Herz  s'est  assuré  le  concours,  M.  Marcus 
Knust,  qui  a  travaillé  comme  conire-maître  six  ans  chez  Érard,  douze 
ans  chez  Pleyel  et  dix-huit  ans  chez  Henri  Herz,  et  qui  a  été  initié  ains» 
aux  procédés  des  meilleures  écoles  de  facture. 

»  Les  instruments  de  M.  Philippe  Herz  neveu  ont  été  fort]  remarqués  de 
tous  ceux  qui  s'intéressent  sérieusement  aux  progrès  de  notre  fabrica- 
tion nationale;  ils  le  méritaient,  et  nous  ne  mesurerons  pas  nos  éloges 
et  nos  encouragements  à  cette  jeune  maison  qui,  de  l'avis  des  connais- 
seurs les  plus  difficiles,  a  pris  du  coup  place  parmi  les  plus  justement 
renommées.  » 


REVUE  DES  THÉÂTRES. 

Théâtre  Français  :  Le  Coq  de  Micylle,  comédie  en  deux  actes  et 
en  vers,  par  MM.  Eugène  Nyon  et  Henry  Trianon.  —  Odéon  : 
La  Loterie  du  mariage,  comédie  en  deux  actes  et  en  vers,  par 
M.  Jules  Barbier. 

Nous  sommes  menacés  d'un  déluge  de  pièces  dans  les  théâtres 
de  drames  qui  sont  presque  tous  fermés  sous  prétexte  de  répéti- 
tions générales,  mais  qui,  en  réalité,  attendent  un  changement 
dans  la  température  torride  dont  nous  souffrons.  Les  grands 
théâtres  subventionnés  ne  se  permettent  pas  ces  loisirs,  et  c'est 
chez  eux  qu'il  faut  aller  chercher  notre  pâture  bi-mensuelle. 

Voici  d'abord,  aux  Français,  le  Coq  de  Micylle,  comédie  en  deux 
actes  et  en  vers,  par  MM.  Eugène  Nyon  et  Henry  Trianon.  Cette 
pièce,  d'une  contexture  exceptionnelle,  est  basée  sur  l'idée  mysti- 
que de  la  transmigration  des  âmes.  Micylle  est  un  jeune  savetier 
dont  les  appétits  ambitieux  sont  incessamment  aiguillonnés  par  le 
voisinage  de  l'archonte  Eucrale,  un  richard  inquiet  et  soucieux. 
Il  y  a  de  par  le  monde  une  jeune  esclave  nommée  Doris  qu'il  ne 
tiendrait  qu'à  Micylle  d'épouser,  mais  il  la  dédaigne  pour  porter 
ses  vues  jusque  sur  la  belle  maîtresse  d'Eucrate,  lequel ,  de  son 
côté,  voudrait  bien  toucher  le  cœur  de  Doris. 

Or,  un  beau  matin,  le  coq  de  Micylle  vient  troubler  dans  son 
sommeil  le  riche  archonte  qui,  pour  se  venger,  roue  de  coups  le 
pauvre  savetier.  Celui-ci  s'en  prend  à  son  coq  et  se  met  à  le 
poursuivre;  mais,  ô  surprise!  le  coq  revêt  tout  à  coup  une  forme 
humaine  et  se  présente  à  Micylle  sous  les  traits  de  Pythagore.  11 
écoute  les  plaintes  de  l'artisan ,  et,  cédant  à  ses  désirs ,  il  lui  fait 
don  d'une  de  ses  anciennes  plumes,  à  l'aide  de  laquelle  Micylle 
pourra,  lorsque  l'envie  lui  en  viendra,  transporter  son  âme  dans 
le  corps  d'Eucrate,  tandis  que  l'âme  de  l'archonte  entrera  dans 
son  enveloppe. 

L'échange  a  lieu  bientôt  au  gré  de  Micylle;  mais  son  âme  a 
pris  possession  d'un  corps  débile  et  goutteux,  et  il  se  morfond 
vainement  en  désirs  impossibles  à  assouvir.  11  en  est  de  même 
d'Eucrate  dont  l'intelligence  étroite  ne  sait  tirer  aucun  parti  de  sa 
métamorphose,  et  qui  essaie,  sans  pouvoir  y  réussir,  de  se  rendre 
Doris  favorable.  Bref,  archonte  et  savetier  reconnaissent  à  la  longue 
qu'ils  ont  eu  tort  de  troquer  leurs  âges,  et  ils  invoquent  la  géné- 
rosité de  Pythagore,  qui  remet  les  choses  à  leur  place,  à  la  grande 
satistàction  des  parties  intéressées. 

Le  succès  de  celte  comédie  originale  n'a  pas  été  un  seul  instant 
douteux,  on  y  a  applaudi  des  vers  spirituels  et  fort  bien  tournés. 
Constatons  d'ailleurs  que  les  principaux  rôlessont  tenusd'une  façon 
remarquable  par  Coquelin ,  Barré ,  Mlle  Edile  Riquier  et 
Mlle  Emilie  Dubois. 

— La  comédie  nouvelle  del'Odéon  n'est  pas  du  tout  dans  les  mêmes 
eaux;  loin  de  se  risquer  dans  les  quintessences  de  l'allégorie 
philosophique,  M.  Jules  Barbier  a  tout  simplement  emprunté  les 
situations  de  la  Loterie  du  mariage  aux  réalités  de  la  vie  courante. 
Etant  donné  cet  aphorisme  peu  consolant  que  le  mariage  est  une 
loterie,  deux  individus  tarés,  et  désireux  de  refaire  leur  fortune  à 
tout  prix,  fût-ce  aux  dépens  du  bonheur  de  leurs  enfants,  s'adres- 


DE  PARIS. 


173 


sent  chacun  de  son  côté,  à  un  industriel  du  nom  do  Saint-Amour, 
dont  le  métier  consiste  à  faire  des  mariages  plus  ou  moins  bien 
assortis.  Grâce  à  ce  triste  intermédiaire,  la  (ille  de  l'un  épouse  le 
neveu  de  l'autre,  non  sans  quelque  résistance  de  la  part  delà  jeu  ne 
personne  qui  se  sent  sacrifiée  à  l'ambition  de  son  père. 

Quelques  mois  s'écoulent,  au  bout  desquels  nos  deux  spéculateurs 
découvrent  qu'ils  se  sont  trompés  mutuellement,  et  alors,  il  n'est 
sorte  de  manœuvres  qu'ils  n'emploient  pour  mettre  la  zizanie 
dans  le  ménage  de  leurs  enfants.  Mais  ceux-ci  ont  appris  à  se 
connaître,  à  s'apprécier;  ils  ne  sont  ni  riches,  ni  titrés,  mais  ils 
s'aiment,  donc  ils  ont  eu  le  bon  numéro  dans  la  loterie  du  mariage. 

Cette  comédie  littéraire  n'est  pas  un  début  en  ce  genre  pour 
M.  Jules  Barbier,  qui  a  fait  déjà  ses  preuves,  non  seulement  à 
rOdéon,  mais  aussi  au  théâtre  Français.  La  Loterie  du  mariage  a 
été  parfaitement  accueillie,  d'autant  mieux  qu'elle  est  jouée  avec 
beaucoup  de  talent  et  d'ensemble  par  Romanville,  Martin,  Roger, 
Reynald,  Mlle  Damain  et  Mlle  Sarah  Bernhard. 

D.  A.  D.  SAINT-YVES. 


En  annonçant  dimanche  dernier  qu'une  souscription,  dont  le 
produit  serait  consacré  à  l'érection  d'un  monument  à  la  mémoire 
de  feu  Edouard  Monnais,  avait  été  ouverte  chez  M.  Emile  Réty, 
au  Conservatoire  de  musique,  nous  avons  omis  d'ajouter  qu'elle 
l'était  également  dans  les  bureaux  de  MM.  Brandus  et  Dufour. 


CONCERTS  ET  ÂDEITIOSS  MSICÂLES  DE  LÀ  SESIÂINE. 

,;*a,  La  messe  de  M.  Charles  Vervoitte,  dont  nous  avions  annoncé  la 
prochaine  exécution,  a  été  chantée  le  dimanche  il  mai  dans  l'église  de 
Saint-Cloud,  devant  une  assistance  nombreuse  et  choisie.  C'est  une  œu- 
vre sur  le  mérite  de  laquelle  la  critique  n'a  qu'une  voix ,  et  que  nous 
désirons  vivement  entendre  de  nouveau  pour  l'apprécier  convenable- 
ment. Le  ténor  M.  Hayet,  dans  les  solos  de  la  messe,  et  Sighicelli,  le 
sympathique  violoniste,  dans  un  charmant  offertoire  pour  violon,  ont 
beaucoup  ajouté  à  l'intérêt  de  l'œuvre  elle-même  ;  nous  ne  devons  pas 
oublier  non  plus  une  dame  du  monde  qui  nous  a  fait  grand  plaisir  en 
chantant  un  Inviolata  et  un  0  Salutaris  de  M.  Vervoitte. 

,t*»  Le  mercredi  suivant,  la  Société  académique  de  musique  sacrée, 
dirigée  par  le  même  artiste,  donnait  sa  troisième  et  dernière  séance,  en 
présence  d'un  auditoire  d'élite  au  milieu  duquel  nous  avons  remarqué 
S.  Em.  Mgr  Chigi,  nonce  du  Pape,  plusieurs  hauts  dignitaires  de  l'E- 
glise; MM^  Gounod,  Benoisf,  professeur  au  Conservatoire,  Camille  Doucet, 
Hamille,  Vitet,  etc.  L'excellente  phalange  chorale  composée  d'hommes 
et  de  dames  du  monde  et  si  habilement  disciplinée  par  M.  Vervoitte,  a 
exécuté  deux  morceaux  de  Palestrina,  dont  l'un  (fragment  des  Lamenta- 
tions) peut  assurément  être  mis  au  nombre  des  plus  belles  inspirations 
de  ce  maître  immortel,  et  a  été  admirablement  rendu  ;  puis  sont  venus 
de  très-beaux  fragments  de  la  messe  des  morts  de  Jomelli,  dont  Mlle 
Roubaud  de  Cournand  a  dit  le  solo  avec  beaucoup  d'ampleur,  et  un 
motet  de  Cherubini,  Inclina,  dans  lequel  se  trouve  un  solo  de  ténor  qui 
a  été  chaleureusement  interprété  par  M.  Hayet.  —  A  la  séance  précé- 
dente, un  Agnus  Dei  de  M.  Vervoitte  a  été  chanté  sur  la  demande  de 
M.  Camille  Doucet;  ce  morceau,  d'un  très -beau  style  et  oii  on  sent  la 
main  d'un  maître,  a  produit  un  très-grand  effet. 

,%  Dimanche  dernier  l'église  de  Sèvres  célébrait  sa  mes;e  annuelle 
au  profit  de  l'hôpital.  Cette  année,  la  solennité  empruntait  une  attraction 
toute  particulière  à  la  présence  de  deux  artistes  éminenis,  habitanis  de 
la  localité  pendant  l'été,  et  qui  n'avaient  pas  dédaigné  de  prêter  leur 
concours  à  cette  bonne  œuvre  :  Mme  Charton-Demeur  et  Délie -Sedie. 
—  On  se  ferait  difficilement  une  idée  de  l'effet  produit  par  la  magni- 
fique voix  de  Mme  Demeur,  chantant  VAve  Maria  de  Cherubini,  un 
0  Salutaris  de  Beethoven,  mais  surtout  l'Inflammalus  du  Stahat  de 
Rossini,  avec  un  sentiment,  une  puissance  qui  dans  tout  autre  lieu 
auraient  soulevé  des  tonnerres  d'applaudissements.  Les  chœurs  de  ce 
morceau  étaient  dits  par  l'Orphéon  de  Sèvres  et  VAve  Maria  était  accom- 
pagné par  un  jeune  artiste  d'un  très-grand  talent,  M.  Fernandez,  de  la 
Havane,  saxophone  dans  une  des  musiques  de  la  Garde.  —  Delle-Sedie 
avait  choisi  l'air  de  Stradella,  tout  à  fait  approprié  par  son  caractère 
à  la  sainteté  de  la  cérémonie  et  qui  rencontrait  dans  le  grand  chanteur 
un  interprète  digne  de  sa  beauté.  —  Mlle   Lagrua  devait  ajouter  encore 


I  à  l'éclat  du  programme;  une  indisposition  subite  l'a  forcée  de  s'abstenir. 
L'(''gliNe  était  pleine  à  ne  pas  y  mettre  une  personne  de  plus  et  la  quête 
a  produit  plus  de  3,000  francs. 

*%  Lundi  dernier,  une  foule  nombreuse  assistait  au  brillant  concert 
donné  à  Notre- D,ime-des-Arls,  celte  instiluti  on  artistique  et  bienfaisante 
fondée  et  dirigije  avec  tant  de  dévouement  par  Mme  la  vicomtesse  d'An- 
glars.  Les  échos  du  parc  de  Neuilly  ont  redit  les  mngiques  vocalises  de 
Carloîta  Patti,  qui  a  chanté  l'Eclat  de  rire,  l'air  de  la  Tnmiata  et  VAve 
Maria  de  Gounod,  et  qu'on  a  saluée  à  cliatiue  fois  d'un  tonnerre  d'applau- 
dissements. Mlles  Mathilde  Galitzine  et  Yvonne  Morel,  violoncelliste  et 
violoniste,  ont  ravi  l'auditoire  avec  des  fantaisies  de  Servais  et  d'Artot; 
Félix  Godofroid,  le  harpiste  sans  rival,  qu'un  petit  accident  a  empêché 
d'aLhever  son  morceau,  n'en  a  pas  moins  été  fêlé  comme  un  grand  ar- 
tiste qu'il  est.  Des  morceaux  d'ensemble  ont  été  dits  avec  beaucoup  de 
précision  et  de  goût  par  les  élèves. 

***  Jeudi  dernier,  pendant  la  cérémonie  de  l'inauguration  de  la  nou- 
velle église  de  Saint-Augustin  ,  une  nombreu.se  et  brillante  assistance  a 
pu  constater  la  sonorité  puissante  du  grand  orgue  construit  selon  le  sys- 
tème électrique  Peschard-Barker.  Nous  reparlerons  de  ce  magnifique  ins- 
trument après  avoir  étudié  sa  construction. 

***  Dimanche  dernier,  dans  une  matinée  musicale  donnée  chez  Sax 
par  Mlle  de  Largentière,  avec  le  concours  de  Mlle  Magner  et  des  excel- 
lents chanteurs  Marcsch  et  Béraud  .  on  a  entendu  avec  le  plus  vif  plaisir 
et  chalpureusement  applaudi  un  violoniste  hongrois,  depuis  peu  fixé  à 
Paris  et  qui  se  nomme  M.  Alexandre  de  Czéké.  Il  a  joué  avec  une  sono- 
rité et  une  ampleur  remarquables  le  Trille  du  Diable,  de  Tartini,  et  une 
nouvelle  et  charmante  transcription  de  l'Ave  Maria,  de  Schubert,  par 
M.  Scherek.  Ce  violoniste-compositeur  vient;  de  publier  :  Sérénade  et 
Boléro  de  violon,  guitare  et  castagnettes  pour  violon  seul.  Sivori  s'est  en- 
gagé à  jouer,  l'hiver  prochain,  ce  curieux  morceau,  d'un  charme  étrange 
et  qui  produit  un  effet  tout  à  fait  nouveau. 

^*^  Dimanche  prochain,  7  juin,  l'église  de  la  Trinité  célébrera  sa  fête 
patronale  en  faisant  exécuter  solennellement,  à  9  heures  très-précises,  la 
Messe  militaire  en  si  bémol,  composée  par  M.  Alexandre  Leprévost,  avec 
accompagnement  de  la  musique  de  la  Garde  de  Paris,  sous  la  direction 
de  MAL  Paulus  Grisy  (maître  de  chapelle  de  la  Trinité)  et  l'auteur.  Le 
grand  orgue  sera  tenu  par  M.  Chauvet,  organiste  de  la  paroisse. 

,*,j:  Rouen  a  inauguré,  dimanche  derniei,  son  exposition  régionale  par 
une  imposante  .solennité  artistique  et  populaire.  Le  Concours  d'Orphéons 
et  de  Musiques  organisé  à  merveille  par  M.  Amédée  Méreaux,  avec  la 
collaboration  pratique  de  M.  Delaporte,  avait  attiré  une  foule  considé- 
rable dans  l'ancienne  capitale  de  la  Normandie.  Le  défilé  des  deux  mille 
chanteurs  et  instrumentistes  de  la  région  a  présenté  le  coup  d'œil  le 
plus  pittoresque.  Les  concours  en  eux-mêmes  ont  eu  un  caractère  artis- 
tique très-élevé.  La  fête  s'est  terminée  par  un  banquet ,  à  la  fin  duquel 
M.  le  maire  de  Rouen  a  remis  un  souvenir  commémoratif  à  M.  Gustave 
Chouquet,  •  poète  normand  de  cette  fête  normande,  »  ainsi  qu'il  s'inti- 
tule lui-même  dans  le  compte  rendu  de  ce  «  tournoi  pacifique.  »  — 
M.  A.  Elwart,  auteur  du  Salut  Impérial  et  de  la  Marche  du  Prince  Impé- 
rial, a  été  appelé  à  Rouen  pour  y  diriger,  dimanche  prochain,  avec 
M.  Dassonville,  chef  de  musique  du  96=  de  ligne ,  ces  deux  morceaux , 
qui  seront  chantés  et  exécutés  devant  LL.  MM.  l'Empereur  et  l'Impéra- 
trice, pendant  la  distribution  des  récompenses  aux  lauréats  du  grand 
Concours  régional  d'Agriculture.  Les  Sociétés  chorales  de  la  Renaissance 
et  de  Boïeldieu  prêteront  leur  concours  aux  soldats  chanteurs  du  96"  de 
ligne. 

^*^  Le  concours  de  musiques  qui  a  eu  lieu  dimanche  24  mai  à  Bre- 
teuil,  a  été  très-remarquable.  Jamais  cette  charmante  petite  ville  n'avait 
assisté  à  pareille  fête.  La  présence  de  M.  le  duc  de  Mouchy,  de  M.  le 
vicomte  de  Plancy,  député  ;  de  M.  le  sous-préfet  de  l'arrondissement,  des 
notabilités  du  canton,  et  surtout  de  M.  le  baron  Taylor  qui,  toujours  in- 
fatigable, était  venu  présider  ces  luttes  fraternelles,  accompagné  par  les 
membres  du  comité  des  artistes  musiciens,  rehaussait  l'éclat  de  cette  so- 
lennité. L'animation  qui  régnait  dans  la  ville  n'avait  d'égale  que  l'en- 
thousiasme de  la  foule  qui  a  applaudi  avec  le  plus  chaleureux  élan  les 
discours  prononcés  par  le  vicomte  de  Plancy,  M.  de  Tartigny,  M.  le 
baron  Taylor,  M.  le  Maire  et  M.  le  duc  de  Mouchy.  Après  avoir  acclamé 
vivement  les  lauréats  des  concours,  que  les  membres  du  jury  ont  dé- 
claré avoir  été  ttès-satisfaisants,  un  banquet  de  80  couverts,  dans  lequel 
plusieurs  toasts  ont  été  portés,  a  couronné  cette  belle  fêle  de  l'harmonie 
qui  s'est  prolongée  fort  avant  dans  la  nuit,  et  dont  la  ville  de  Breteuil 
gardera  un  long  souvenir. 

**,  Ainsi  que  nous  l'avons  dit,  c'est  aujourd'hui  même  qu'a  lieu,  dans 
les  magnifiques  salons  de  Bade,  le  premier  concert  de  la  saison,  et  ils 
sont  inaugurés  par  le  charmant  trio  des  enfants  Fremaux.  M.  Dupres- 
soir  ne  pouvait  choisir  un  plus  agréable  prélude  aux  fêtes  dont  il  a 
donné  le  riche  programme. 

»**  Au  Pré-Catelan  :  Promenades-Concerts  dans  ce  beau  jardin,  Mu- 
siques militaires,  Concerts  d'harmonie,  Bals  d'Enfants,  Courses  et  Repré- 


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REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


senlations  dramatiques  au  Tliéâtre  des  Fleurs,  unique  en  Europe,  par 
une  troupe  d'élite,  sous  la  direction  habile  d'un  imprésario  de  mérite. 
—  Musée  Aérostatique  et  Palais  des  Colibris. 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 


^•*  Le  théâtre  impérial  de  l'Opéra  a  donné  lundi  et  mercredi  Guil- 
laume Tell,  et  vendredi  la  Muetle  de  Porlici  avec  Giselle. 

**»  Mme  Gueymard,  rétablie,  a  repris  part  aux  répétitions  d'Hcrcula- 
nuni,  dont  les  trois  premiers  actes  ont  été  répétés  en  scène.  —  C'est 
Mlle  Granzow  qui,  dans  le  grand  divertissement  du  troisième  acte,  dan- 
sera le  rôle  créé  par  Emma  Livry.  —  La  première  représentation  sera 
donnée  dans  la  première  quinzaine  de  juin. 

**,  Les  débuts  de  Mlle  Hisson  sont  prochains.  On  dit  beaucoup  de 
bien  de  celte  jeune  Suédoise,  élève,  — comme  Mlle  Nilsson,— de  l'excel- 
lent professeur  Wartcl,  qui  lui  a  donné  tous  ses  soins.  On  ne  peut  que 
lui  souhaiter  la  réussite  de  sa  compatriote. 

:^*^  Trois  danseuses  de  l'Opéra  :  Mlles  Marie  Sanlaville,  Ricois  et  Thé- 
résa  Nini  quittent  notre  première  scène  lyrique. 

5,.*^A  la  suite  d'une  imprudence  commise  par  le  baryton  Melchissédec, 
et  qui  momentanément  le  tient  éloigné  delà  scène,  la  direction  de  l'Opéra- 
Comique  a  engagé  Barré,  qui  s'était  l'ait  tort  remarquer  au  théâtre  Ly- 
rique par  sa  jolie  voix,  sa  distinction  et  son  talent  de  comudien,  et  elle 
lui  a  confié  le  rôle  do  Bellamy  dans  les  Dragons  de  Villars,  qui  devait 
être  joué  par  Melchissédec. 

**,,<.  La  première repré-sentation  des  Dragons  de  Villars  est  fixée  à  vendredi 
prochain.  Maillart  assiste  à  chacune  des  répétitions  et  se  montre  enchanté 
des  artistes.  —  Ce  n'est  pas  du  reste  d'une  simple  reprise  qu'il  s'agit 
ici;  c'est  de  l'apparition  sur  notre  seconde  scène  lyrique  et  dans  de  tou- 
tes nouvelles  conditions  d'une  œuvre  devenue  populaire  et  qui  occupera 
désormais  une  place  distinguée  au  répertoire.  Le. direction  en  a  jugé  ainsi 
en  la  montant  avec  tout  le  luxe  d'un  ouvrage  nouveau  et  en  en  confiant 
l'interprétation  à  Mme  Galli-Marié,  dont  les  succès  constants,  le  genre  de 
talent  et  le  physique  semblaient  offrir  le  type  accompli  de  Rose  Friquet; 
à  Mlle  Girard,  l'une  des  meilleures  artistes  de  la  création,  et  en  les  en- 
tourant des  sujets  les  plus  distingués  de  la  troupe.  —  C'est  donc  une  nou- 
velle existence  qui  s'ouvre  pour  l'œuvre  d'Aimé  Maillart,  et  elle  ne  paraît 
pas  devoir  être  moins  longue  et  moins  brillante  que  celle  qu'elle  a  déjà 
fournie  au  théâtre  Lyrique. 

»%  MM.deLeuven  et  Ritt  préparent  du  reste  les  éléments  d'un  riche  pro- 
gramme pour  la  saison  prochaine.  Aussitôt  après  l'apparition  des  Dragons  de 
FiWors,  la  pièce  en  trois  actes  de  MM.  de  Saint-Georges  et  de  Leuven,  musique 
de  Flotow,  /'Omftj'c  entrera  en  répétition  et  sera  jouée  une  des  premières. 
Viendront  ensuite,  selon  que  l'une  ou  l'autre  sera  la  première  prête,  le 
nouvel  opéra  d'Auber:  Rêoe  d'amour,  de  MM.  Dennery  et  Corraon  dont  le 
premier  acte  est  déjà  fait,  ou  l'opéra  d'Offenbach.  —  Enfin  ils  ont  reçu 
ces  jours-ci  un  ouvrage  en  trois  actes  de  MM.  .Iules  Sandeau  et  de  Saint- 
Georges,  dont  la  musique  a  été  confiée  à  M.  François  Bazin. 

^*,  Rien  n'est  encore  décidé  au  sujet  du  théâtre  Lyrique.  M.  Martinet 
est  jusqu'à  présent  le  candidat  qui  a  le  plus  de  chances;  toutefois,  bien 
des  ditÂcultés  sont  encore  à  aplanir;  on  s'occupe  en  attendant  avec  ac- 
tivité de  l'inventaire  et  de  l'estimation  du  matériel. 

^*;f  Hier  a  eu  lieu  au  théâtre  des  Fantaisies-Parisiennes  la  d™  repré- 
sentation de  l'Amour  mouillé  de  J.  Barbier  et  Hartog;  nous  en  rendrons 
compte  dimanche.  Ce  sera  vraisemblablement  la  dernière  nouveauté, 
jouée  à  ce  théâtre,  qui  doit  fermer  le  18  juin  pour  livrer  le  local  aux  di- 
recteurs du  théâtre  du  Palais-Royal  qui  —  comme  on  le  sait  —  vont 
y  installer  leurs  pénates. 

^'^  Fleur-de-Thé  vient  d'atteindre  sa  cinquantième  représentation  sans 
que  son  succès  se  soit  démenti. 

^*^  M.  Busnach  vient  de  traiter  avec  M.  Letellier,  directeur  du  Théâtre 
de  la  Monnaie,  à  Bruxelles,  et  M.  Desfossez,  directeur  du  théâtre  du 
Havre,  pour  y  aller  jouer  Fleur-de-Thé  avec  les  artistes  de  l'Athénée. 

i^*^  Xous  apprenons  que  la  nouvelle  direction  du  théâtre  des  Boulîes- 
Parisiens  a  choisi  pour  chef  d'orchestre  M.  Constantin,  qui  a  fait  si  bril- 
lamment SCS  preuves  au  théâtre  des  Fantaisies-Parisiennes.  Cette  nouvelle, 
que  nous  donnons  comme  certaine,  met  à  néant  celle  qui  avait  désigné 
M.  Varney  comme  appelé  à  ces  fonctions.  M.  Varney  reste  chef  d'or- 
chestre à  Bordeaux  où  il  dirige  l'école  de  musique  de  la  société  Sainte- Cé- 
cile et  l'orchestre  du  Cercle  philharmonique. 

5S.**  On  se  rappelle  que  la  Grande-Duchesse,  traduite  en  anglais ,  fut 
représentée  l'an  dernier  sur  la  grande  scène  de  Covent-Garden .  et  que 
les  Anglais  prirent  grandement  goût  à  ce  genre  fantaisiste.  Un  imprésa- 


rio bien  connu  par  ses  hardie.sses,  M.  Raphaël  Félix,  entreprend  aujour- 
d'hui de  faire  connaître  aux  Ang'ais  le  répertoire  d'Offenbach  en  fran- 
çais et  tel  qu'il  est  joué  à  Paris.  11  va  donc  donner  au  Théâtre-Saint- 
James  une  série  de  représentations,  pour  lesquelles  il  a  formé  une 
excellente  troupe  et  dont  il  n'a  pas  marchandé  les  frais.  On  en  jugera 
par  le  chiffre  de  l'engagement  contracté  par  lui  avec  Mlle  Schneider,  à 
laquelle  il  assure  la  bagatelle  de  56,000  francs  pour  28  représentations! 
Elle  jouera  spécialement  la  Grande  ■  Duchesse ,  Barbe-Bleue  et  la  Belle 
Hélène.  Bonne  chance- à  M.  Raphaël  Félix. 

**^  Après  l'ovation  faite  à  Varsovie  à  Mlle  Artôt,  la  célèbre  cantatrice 
n'avait  pu  refuser  à  ses  admirateurs  la  promesse  de  donner  une  repré- 
sentation de  plus.  Cette  représentation  a  eu  lieu,  en  effet,  et  a  vu  se 
renouveler  les  ovations  de  la  soirée  à  bénéfice.  Cette  fois,  Merelli  a  eu  sa 
part  de  succès;  on  l'a  redemandé  sur  la  scène  jusqu'à  deux  fois  et 
applaudi  à  outrance,  pour  le  remercier  d'avoir  fait  connaître,  à  Moscou, 
un  talent  aussi  remarquable  que  celui  de  Mlle  Artôt. 

***  M.  Montaubry  obtient  en  ce  moment  à  Genève  un  immense  suc- 
cès. Dans  le  Postillon  de  Lonjumeau,  il  a  été  acclamé  et  rappelé  plu- 
sieurs fois. 

^*.^  Mnrlha  vient  d'être  représentée  à  Poitiers  avec  son  succès  habi- 
tuel :  on  y  a  beaucoup  applaudi  Mme  de  Joly  et  ses  admirables  voca- 
lises. 

^*^  11  résulte  du  Rapport  adressé  aux  auteurs  dramatiques  par  leur 
comité,  que  le  total  des  recettes  brutes  des  Théâtres  pour  l'année  1867- 
1S6H  a  été  de  17,128,450  francs.  —  L'augmentation  des  recettes  a  été  pour 
l'Opéra  de  612,368  francs;  pour  l'Opéra-Comique  de  570,073  fr.;  pour  le 
Théâtre-Lyrique  de  264,693  francs. 


NOUVELLES  DIVERSES. 

***  Les  religieux  du  monastère  de  la  Grande-Chartreuse,  sur  la  de- 
mande qui  leur  a  été  adressée  par  M.  Jules  Moneslier,  de  Lyon,  — 
jeune  compositeur  dont  le  nom  et  les  œuvres  ont  acquis  parmi  les  or- 
phéons une  notoriété  légitime, — viennent  de  faire  farvenir  à  la  Commis- 
sion d'organisation  du  Concours  musical  de  Grenoble  une  médaille  d'or 
destinée  à  être  décernée  comme  premier  prix  à  l'une  des  Sociétés  cho- 
rales entrant  en  lice  le  IG  août  prochain.  Les  statuts  de  leur  ordre s'op- 
posant  à  des  dons  de  cette  nature,  les  RR.  PP.  Chartreux,  n'ont  pu  offrir 
qu'à  titre  exceptionnel  cette  médaille  aux  fêtes  artistiques  de  Grenoble, 
pour  témoigner  de  leurs  sympathies  envers  les  phalanges  nmsicales  qui 
se  réuniront  dans  cette  ville,  voisine  de  leur  Retraite,  ainsi  que  l'intérêt 
qu'a  su  leur  in.'ipirer  l'œuvre,  éminemment  moralisatrice,  du  chant  cho- 
ral populaire.  Ce  don  sans  précédent  et  qui  ne  se  répétera  plus,  par  des 
raison»  majeures,  sera  vivement  apprécié  des  Sociétés  orphéoniques  qui 
ont  adhéré  et  qui  participent  au  Concours  solennel  de  l'Isère,  dont  les 
récompenses,  au  surplus,  représenteront  une  valeur  considérable. 

V**  A  la  suite  d'une  séanccdes  plus  orageuses,  l'assemblée  générale  des 
auteurs  et  compositeurs  dramatiques  a  élu  cinq  nouveaux  commissaires: 
ce  sont  MM.  Victorien  Sardou,  Emile  Jonas,  Brisebarre,  GondinetetMaquet. 
MM.  E.  de  Girardin  et  Th.  Seniet  ont  été  nommés  membres  suppléant?. 
—  La  Commission  se  trouve  donc  aujourd'hui  composée  de  MM.  Edmond 
About,  JulesAdenis,  Emile  .Augier,  Edouard  Brisebarre,  Ferdinand  Dugué, 
Alexandre  Dumas  fds,  Paul  Féval,  Edmond  Gondinet,  Gounod,  Emile 
Jonas,  Labiche,  de  Najac,  Auguste  Maquet,  de  Saint-Georges  et  Victorien 
Sardou.  et  de  MM.  Emile  de  Girardin  et  Th.  Semet,  membres  supplé- 
ants, et  elle  a  composé  son  bureau  comme  suit  :  Président  : 
M.  de  Saint-Georges  ;  —  Vice-Présidents  :  MM.  Auguste  Maquet,  Edmond 
About  et  Ferdinand  Dugué;  —  Secrétaires  :  MM.  E.  de  Najac  et  Jules 
Adenis;  —  Trésorier  :  M.  Paul  Féval;  —  Archiviste  :  M.  Edmond 
Gondinet.  —  Ces  nominations  ont  été  faites  à  l'unanimité. 

^"^  Par  arrêt  récent  du  tribunal  civil  de  la  Seine,  les  billets  dits  de 
faveur,  sans  date  et  ne  portant  que  l'indication  d'une  diminution  sur  le 
tarif  du  prix  des  places,  n'engagent  pas  les  administrations  théâtrales 
qui  les  émettent  à  fournir  des  places  à  la  première  demande. 


S.  M.  la  reine 


***  Notre  confrère  M.  E.  Gérard  vient  de  recevoir 
d'Espagne  la  décoration  de  l'ordre  de  Charles  111. 

^**  Le  maestro  Rossini  a  quitté  Paris  pourprendre  sa  résidence  d'été  à 
Passy. 

,**  Une  belle  édition  à'Hamlet ,  la  remarquable  partition  d'Ambroise 
Thomas ,  vient  de  paraître  au  Ménestrel  pour  piano  seul,  transcrite  par 
G.  Bizet,  qui  avait  déjà  tenu  à  honneur  de  transcrire  l'opéra  de  Mignon, 
du  même  auteur.  La  partition  piano  solo  comme  celle  piano  et  chant 
d'Hamlet,  brillera  sur  tous  les  pianos  des  artistes  et  des  vrais  amateurs 
de  musique.  Hamlet  et  Mignon  sont  de  ces  œuvres  qui  marquent  au 
répertoire  lyrique,  et  dont  la  place  est  assurée  dans  toutes  nos  biblio- 
thèques musicales. 


DE  PARIS 


t7S 


**,0n  écrit  de  Toulouse  :  «  La  béncdiclion  et  l'inauguration  de  l'orgue 
de  chœur  dont  le  gouvernement  vient  de  doter  la  cathédrale  avaient 
attiré  jeudi  dernier  l'élite  de  la  société  toulousaine.  Mgr  l'archevêque, 
M.  le  préfet,  le  général  de  Goyon  et  autres  hauts  fonctionnaires  as- 
sistaient à  cette  céiémonie  pendant  laquelle  M.  Ch.  M.  Wiilor ,  de  Lvon, 
organiste  du  plus  grand  talent,  a  fait  entendre  ce  magnifique  insirunient 
sorti  des  ateliers  de  M.  A.  Cavaillé-Coll.  Le  public  parisien  avait  déjà 
pu  apprécier  dans  la  chapelle  du  Parc,  pendant  l'Exposition  universelle 
de  1867,  cet  orgue  classé  hors  coTicoiirs  par  le  jury  international.   » 

»**  Nous  sommes  heureux  d'annoncer  à  nos  lecteurs  et  aux  amateurs 
de  bonne  musique  que  M.  Hubert  Rolling,  compositeur  distingué  et  pro- 
fesseur de  piano  à  la  .Nouvelle-Orléans  va  incessamment  faire  paraître 
une  nouvelle  oeuvre,  qui  est  au  moins  égale  comme  mérite  à  son  der- 
nier morceau  l'Appel  à  Dieu. 

»*t  Dans  sa  dernière  traversée  de  New-York  au  Havre,  le  Saint-Lau- 
rent, steamer  de  la  Compagnie  transatlantique,  avait  à  son  bord  le  ténor 
Pancani.  Bientôt  reconnu  par  les  nombreux  passagers,  le  célèbre  artiste 
dut  donner  un  concert  improvisé,  dont  le  produit  assez  élevé  a  été  remis 
à  la  Société  générale  de  Sauveliige  des  naufragés. 

,**  Camille  Sivori  vient  de  partir  pour  Gênes,  sa  ville  natale,  pour  y 
prendre  un  peu  de  repos.  On  y  bâtit  en  ce  moment  une  salle  de  concert 
pouvant  contenir  3,000  personnes  et  qui  sera  appelée  Salle  Sivori.  Une 
dépuîation  rie  la  municipalité  s'est  rendue  chez  lui  pour  lui  de- 
mander l'autorisation  d'attacher  son  nom  à  ce  monument.  Cette  nou- 
velle salle,  ainsi  que  le  Grand-Théâtre  Sivori,  seront  inaugurés  le  20 
décembre  prochain;  il  va  sans  dire  que  le  célèbre  parrain  sera  de  la 
fête. 

,%  D'après  les  journaux  de  la  Plata,  le  choléra  aurait  épargné  les 
artistes  de  la  troupe  française  de  Buénos-Ayres.  Ils  annoncent  également 
que  MM.  Coedès,  Hoffmann,  etc.,  ont  résilié  leur  engagement  avec  le 
directeur,  M.  d'Hôte. 

**,  Nos  lecteurs  apprendront  avec  plaisir  que  la  santé  d'Hector  Ber- 
lioz, qui  a  donné  des  inquiétudes,  est  maintenant  presque  complètement 
rétablie. 

,**  On  annonce  le  mariage  de  M.  Ludovic  Halévy  avec  Mlle  Louise 
Bréguet,  fille  du  célèbre  ingénieur-mécanicien. 

*''*  On  annonce  la  mort,  à  Leipzig,  d'un  des  principaux  éditeurs  de 
musique  de  cette  ville,  Jules  Kistner,  qui  remplissait  en  même  temps 
les  fonctions  de  membre  du  Conseil  de  direction  des  Concerts  du  Gewand- 
haus.  Les  artistes  perdent  en  lui  un  ami  dévoué  et  éclairé.  Il  était  âgé 
de  63  ans,  et  gérait  seul  sa  maison  de  commerce  depuis  la  mort  de  son 
frère  Frédéric  arrivée  en  1844. 


ÉTRANGER 


,j*j  Londres.  —  Mme  Lucca,  rétablie  d'une  courte  indisposition,  a 
chanté  pour  la  première  fois  de  la  saison  la  Favorite  ;  depuis  Giulia 
Grisi  on  n'avait  point  entendu  une  aussi  admirable  Léonore.  Âlario,  trahi 
quelquefois  par  sa  voix,  mais  se  relevant  de  temps  à  autre  par  de  su- 
perbes élans,  chantait  Fernand.  —  A  Drury-Lane,  Mlle  Nilsson  a  abordé, 
mardi  pour  la  première  fois,  TMcie  de  Lammermoor;  elle  en  a  fait  une  toute 
charmante  impersonalion,  dont  les  traits  principaux  sont  la  simplicité  et 
la  distinction.  Mongini  chantait  Edgard.  —  Arditi,  le  célèbre  chef  d'or- 
chestre de  Her  Majesly's  Opéra,  a  donné  lundi  son  grand  concert  annuel. 
Tous  les  artistes  du  théâtre,  célèbres  ou  non,  auxquels  il  faut  ajouter 
MM.  Cowen,  pianiste,  Carrodus,  violoniste,  et  le  grand  violoncelliste 
Piatli,    avaient    été   appelés   à    défrayer    le    programme    et  quel  pro- 


gramme! Trente-cinq  morceaux  do  musique!  C'est  à  6  heures  du 
soir  seulement  qu'il  a  pu  être  épui.sé,  le  concert  ayant  commencé  àdrux. 
Le  courage  de  celle  légion  de  virtuoses  n'a  vraiment  d'égal  que  la 
longanimité  du  public  anglais.  —  Le  20  juin,  concert  deJules  lîoncdict, 
dans  les  mêmes  proportions  ;  on  y  entendra  Mlles  Patti,  Nilsson,  Tieljens 
et  Kellogg.  —  On  a  pu  compter  cette  semaine  jusqu'à  dix-sept  concerts 
en  moyenne  par  jour. 

»*4  Bade.  —  Mme  Pauline  Viardot  va  faire  représpnt(T  prochainement 
une  troisième  opérette  de  sa  coniposiiion,  l'Oyre,  dont  le  libretio,  em- 
prunté à  un  charmant  conte  de  fées,  est  de  Tourguénielf,  le  célèbre  ro- 
mancier russe.  Elle  s'est  ré.servé  un  des  principaux  rôles;  les  autres 
seront  remplis  par  ses  enfants  et  ses  élèves.  La  preujière  représentation, 
à  laquelle  doit  assister  la  reine  de  Prusse,  aura  lieu  à  la  villa  Tourgué- 
nieff;  mais  pour  satisfaire  à  l'avenir  aux  nombreuses  domaudes  d'admis- 
,sion  qu'on  lui  adresse  de  toutes  parts,  la  célèbre  cantatrice  se  propose 
d'ériger  un  théâtre  pour  son  usage  personnel,  auprès  de  sa  maison  de 
campagne . 

,*»  Mannheim  —  On  a  représenté  un  nouvel  opéra,  Ruy-ntas,  de  Zen- 
ger. 

**^  Berlin.  —  Une  jeune  cantatrice  berlinoise,  Mlle  Schrœtter,  encore 
novice  dans  la  carrière  théâtrale,  a  débuté  à  l'Opéra  par  le  rôle  d'Alice 
de  liobert  le  Diable.  Bien  douée  du  côté  de  la  voix,  elle  a  encore  à  ap- 
prendre pour  être  à  son  aise  dans  le  grand  répertoire.  On  l'a  d'ailleurs 
bien  accueillie.  —  L'Œil  crevé,  de  Hervé,  a  été  représenté  sous  le  titre 
de  Fleur  de  noblesse  au  théâtre  de  Friedrich-Wilhelmstadt,  et  sans  au- 
cun succès. 

»**  Prague.  —  Un  nouvel  opéra  en  trois  actes,  du  chef  d'orchestre 
Smetana,  Dalibor,  a  été  donné  avec  succès  au  Neustœdter  Theater. 

^*t  New-York.  —On  vient  de  représenter  pour  la  première  fois  les 
Dragons  de  Villars  (la  Clochette  de  l'Ermite);  c'est  une  victoire  de  plus 
à  mettre  à  l'actif  du  charmant  et  poétique  ouvrage  d'Aimé  Maillart. 
Mme  L'Arronge-Sury,  qui  avait  choisi  cette  soirée  pour  son  bénéfice, 
s'y  est  montrée  chanteuse  et  actrice  accomplie,  et  son  mari  a  partagé 
son  succès. 


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N"  23. 


REVUE 


7  Juin  i868. 


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Le  Journal  paraît  le  Dimanche. 


GAZETTE  MUSICAL 


DE     PARIS 


SOMMAIRE.  —  Tliéâtre  impérial  de  l'Opéra-Comique  :  les  Dragons  de  Villars, 
opéra-comique  en  trois  actes,  paroles  de  MM.  Lockroy  et  Cormoo ,  musique  de 
M.Aimé Maillart,  par  Paul  Bernard. —  Théâtre  des  Fantaisies-Parisiennes: 
l'Amour  mouillé,  opérette  en  un  acte,  paroles  de  MM.  J.  Barbier  et  A.  de  Beau- 
plan,  musique  de  M.  Edouard  de  Hartog. —  Études  sur  Charles-Marie  de  Weber 
(troisième  partie,  3'  article),  par  Edmond  IVenkomm.  —  Application  de 
l'électricité  aux  grandes  orgues,  par  Em.  lUatbiea  de  Uonter.  —  Festi- 
val de  Cologne.  —  Revue  bibliographique,  par  Arthur  I*oai;in.  —  Con- 
certs et  auditions  musicales  delà  semaine.  —  Nouvelles  des  théâtres  lyriques . 
—  Nouvelles  diverses.  —  Annonces. 


THÉÂTRE  mPÉRIÀL  DE  L'OPERÂ-COmOUE. 

IiGS  »RA«OIVS  DE  TIIiliABS, 

Opora-cojnique  en  trois  actes,  paroles  de  MM.  Lockroy  et 
CoRMON,   mvsiqve  de  M.  Aimé  Maillart. 

(Première  représentation,  à  ce  théâtre,  le  3  juin  1868.) 

Depuis  longtemps  déjà  les  Dragons  de  Villars  forment  un  régi- 
ment bien  connu  du  public  ;  les  cadres  du  succès  en  font  foi. 
Casernes  d'abord  au  théâtre  Lyrique,  ils  ont  ensuite  effectué  de 
nombreuses  campagnes,  tant  en  France  qu'à  l'étranger,  courant  de 
victoire  en  victoire,  toujours  choyés,  toujours  rappelés,  s'arrêtant 
partout  oïl  un  théâtre  pouvait  leur  donner  l'hospitalité  et  payant 
cette  hospitalité  par  les  bienfaits  de  leur  fructueuse  présence.  Au- 
jourd'hui c'est  la  salle  Favart  qui,  leur  ouvrant  ses  portes  à  deux 
battants,  préside  à  leur  nouvelle  carrière  parisienne  en  donnant  à 
cette  reprise  toute  la  solennité  d'une  première  représentation.  Les 
Dragons  de  Villars  n'ont  jamais  été  ingrats;  ils  ne  le  seront  pas 
davantage  pour  MM.  de  Leuven  et  Ritt  qu'on  peut  considérer  main- 
tenant comme  les  chefs  de  ce  régiment  fortuné,  car  désormais 
la  prise  de  possession  est  bien  et  dûment  établie  ;  c'est  d'ailleurs 
justice  que  cette  charmante  partition  qui  a  couru  le  monde  jus- 
qu'en Amérique,  qu'une  œuvre  d'un  mérite  aussi  réel  destinée  à 
alterner  brillamment  avec  les  pièces  consacrées  du  répertoire  de 
l'Opéra-Comique,  prenne  désormais  sur  la  seconde  scène  lyrique  le 
rang  honorable  qui  lui  était  assigné. 


Comme  pièce  et  comme  musique  c'est  une  œuvre  franche,  net- 
tement conçue,  heureusement  exécutée.  La  donnée  en  est  intéres- 
sante, le  personnage  de  Rose  Friquet  y  jette  une  couleur  fort  ori- 
ginale, les  scènes  s'y  développent  avec  habileté,  les  situations 
musicales  y  abondent  ;  voilà  plus  qu'il  n'en  faut,  certes  !  pour  pro- 
duire ce  type  d'opéra-comique  qui  va  se  perdant  tous  les  jours. 
Quant  à  la  musique,  elle  est  pleine  de  vie,  d'élan,  de  charme  et 
de  passion;  les  parties  bouffes  pétillent  de  gaieté;  l'orchestre  y 
est  traité  de  main  de  maître;  la  clarté,  ce  flambeau  de  la  forme, 
préside  à  toute  la  partition;  le  sentiment  scénique  ne  faillit  jamais; 
la  mélodie  y  règne  en  souveraine  et  avec  l'insouciance  d'une  jeu- 
nesse qui  déborde.  En  un  mot,  c'est  l'œuvre  d'un  musicien  con- 
sommé, l'œuvre  d'une  nature  virile  et  passionnée,  l'œuvre  d'un 
poëte,  mais  non  pas  d'un  rêveur.  Je  ne  crains  pas  d'ajouter  :  c'est 
le  chef-d'œuvre  de  M.  Maillart. 

Il  me  semble  fort  inutile  de  faire  l'analyse  d'un  livret  qui  se 
trouve  excessivement  connu.  A  ceux  qui  n'ont  jamais  vu  les  Dra- 
gons de  Villars  je  dirai  seulement  que  c'est  une  pièce*'militaire  et 
pastorale,  un  peu  dramatique,  parce  qu'il  s'agit  de  faire  passer  la 
frontière  à  de  pauvres  proscrits  de  la  guerre  des  Camisards.  Sur  ce 
terrain  généreux  se  rencontrent,  mus  par  le  mème'Çentiment,  un 
jeune  garçon  de  ferme  et  une  jeune  paysanne  qui  passe  pour  laide  ; 
il  faut  croire  cependant  que  la  beauté  de  l'âme  se  reflète  sur  le 
visage,  car  un  bon  mariage  couronne  le  dévouement  des  deux 
jeunes  gens,  au  grand  désappointement  des  autres  filles  du  village, 
qui  toutes  jetaient  leur  dévolu  sur  le  beau  Sylvain.  Joignez  à 
cela  de  brillants  uniformes  lutinant  les  fillettes  et  faisant  trembler 
les  maris,  la  cloche  d'un  ermite,  qui  soi-disant  ne  sonne  que  pour 
avertir  ces  derniers  d'un  mécompte  matrimonial,  et  vous  com- 
prendrez la  réussite  d'une  pièce  tout  à  la  fois  gaie,  intéressante, 
bien  charpentée  et  essentiellement  musicale. 

Comme  au  théâtre  Lyrique,  il  y  a  dix  ans,  et  comme  partout 
du  reste,  le  second  acte  a  paru  le  plus  riche  de  la  partition,  sans 
ôter  aux  deux  autres,  bien  entendu,  leur  large  part  de  belles  et 
bonnes  choses.  C'est  en  effet  dans  le  second  acte  que  se  trouvent 
le  délicieux  duo:  Moi,  jolie  ?  une  pastorale  adorable  de  couleur  et 
de  sentiment,  un  trio  scénique  très-développé  dont  la  cloche  de 
l'ermite  est  le  principal  mobile,  et  enfin  le  chœur  mystérieux 
des  proscrits,  qu'on  a  déjà  trouvé   dans   l'ouverture    et  qui  me 


178 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


paraît  une  belle  et  réelle  inspiration.  Dans  les  deux  autres 
actes  citons  avant  tout  l'air  d'entrée  de  Rose  Friquet  et  son  grand 
air  du  troisième  acte  :  Il  m'aime!  morceau  type  par  excellence 
que  pas  une  chanteuse  n'ignore,  que  les  concours  du  Conserva- 
toire ont  adopté,  et  qui,  dans  les  concerts,  rivalise  avec  les  plus 
connus.  N'oublions  pas,  au  premier  acte,  la  ravissante  romance 
de  Sylvain  :  Ne  parle  pas,  Rose,  je  t'en  supplie;  les  spirituels  cou- 
plets de  l'ermite,  avec  leur  refrain  iinitatif,  et  un  très-joli  chœur  : 
Heureux  enfants  de  la  Provence.  Les  chœurs,  du  reste,  tiennent 
une  large  place  dans  cette  riche  partition  et  sont  tous  fort  réussis. 
Je  tiens  à  citer  celui  du  troisième  acte  :  Vous  savez  la  nouvelle, 
daiis  lequel  le  dialogue  des  hommes  et  des  femmes  est  très-pitto- 
resquement  et  très-heureusement  agencé. 

En  suivant  pas  à  pas  la  partition  des  Dragons  de  Villars,  depuis 
la  pi'emière  note  de  l'ouverture  jusqu'aux  derniers  accords  du  final 
du  troisième  acte,  qui  renferme  le  magnifique  cantabile  :  U  m'ac- 
cuse ,  il  me  croit  coupable,  il  n'y  a  qu'à  louer  d'un  bout  à  l'autre, 
et  le  public  l'a  montré  l'autre  soir  par  ses  applaudissements  réi- 
térés. C'est  une  musique  essentiellement  vivante,  un  peu  bruyante 
parfois,  mais  agréable  quand  même.  Cela  pourrait  passer  pour 
de  l'exubérance  de  force  et  de  santé  ;  c'est  évidemment  une  ques- 
tion de  tempérament.  La  muse  de  M.  Maillart  est  une  belle  brune 
à  la  riche  carnation  et  aux  vives  couleurs.  Certains  préfèrent  les 
blondes,  mais  il  en  faut  pour  tous  les  goûts. 

Moi  qui  ne  déteste  pas  les  demi-teintes,  je  vais  vous  dire  mon 
passage  de  prédilection  dans  tout  l'ouvrage.  C'est  le  commence- 
ment du  duo  d'amour  au  second  acte.  Sylvain  demande  à  Rose  de 
s'attifer  un  peu  plus  parce  que,  mal  mise  comme  elle  est,  on  ne 
s'aperçoit  point  qu'elle  est  jolie.  «  Moi,  jolie'?  »  s'écrie-t-elle,  et  une 
phrase  délicieusement  accompagnée  par  les  violons  en  sourdine 
se  pose  sur  ces  paroles.  Il  y  a  dans  ce  simple  passage  une  poésie 
adorable  et  un  sentiment  exquis. 

L'interprétation  a  été  vraiment  remarquable.  L'orchestre  et  les 
chœurs  se  sont  distingués,  les  décors  sont  fort  beaux,  surtout 
celui  du  second  acte,  la  mise  en  scène  est  très-soignée.  L'effet 
général  a  été  que  la  pièce  se  trouve  à  l'Opéra-Comique  beaucoup 
mieux  dans  son  cadre  qu'au  théâtre  Lyrique  et  qu'elle  y  gagne  un 
résultat  d'ensemble  incontestable. 

Mme  Galli-Marié,  par  la  nature  même  de  son  talent,  était  pré- 
destinée au  rôle  original  de  Rose  Friquet.  Elle  en  a  fait  une 
création  qui  lui  sera  comptée  à  côté  de  ses  meilleures.  Impossible 
d'être  plus  espiègle,  plus  capricieuse,  plus  fantasque,  de  lancer  le 
trait  avec  plus  de  malice,  d'être  plus  dramatique  à  l'occasion, 
plus  touchante  quand  il  le  faut,  de  mieux  jouer,  en  un  mot,  ce 
personnage  multiple  et  coloré.  Elle  a  dit  le  duo  d'une  façon  déli- 
cieuse et  a  chanté  son  grand  air  en  artiste  de  bonne  école.  Comme 
dans  Mignon,  Mme  Galli-Marié  sera  la  pierre  de  touche,  le  centre 
attraclif  des  Dragons  de  Villars.  Son  costume,  d'ailleurs,  rappelle 
beaucoup  celui  de  Mignon.  Il  faut  cependant  encore  un  peu  de 
coquetterie  dans  ce  réalisme  ;  à  ce  point  de  vue,  nous  conseille- 
rions à  Mme  Galli-Marié  de  changer  sa  coiffure. 

Mlle  Girard  a  créé,  au  théâtre  Lyrique,  le  rôle  de  Mme  Thibaut. 
Elle  a  retrouvé  tous  ses  effets  et  tous  ses  succès  d'autrefois.  Les 
couplets  de  l'ermite  lui  ont  valu  un  bis.  Elle  a  joué  très-finement 
et  très-alertement  le  personnage  de  la  coquette  fermière. 

M.  Lhérie  s'est  distingué  dans  sa  création  de  Sylvain.  Savez- 
vous  que  ce  jeune  homme  pourrait  bien  devenir  un  fort  bon 
ténor?  Sa  voix  est  pure  et  agréable;  il  commence  à  bien  phraser, 
il  a  de  la  chaleur  et  un  grand  fonds  de  bonne  volonté.  Seule,  sa 
diction  laisse  à  désirer.  Qu'il  cherche  à  se  rectifier  sous  ce 
rapport,  et  nous  lui  prédisons  de  l'avenir.  II  a  dit  sa  première 
romance  avec  infiniment  de  goût  et  de  charme,  aussi  a-t-il  été 
chaleureusement  applaudi. 


M.  Barré,  qui  a  été  engagé  pour  remplacer  Melchissédec  tombé 
malade,  nie  semble  une  excellente  acquisition  pour  l'Opéra-Comi- 
que. Il  a  appris  le  rôle  du  dragon  Belamy  en  quinze  jours  et  s'en 
est  tiré  à  son  plus  grand  honneur.  Sa  voix  est  fraîche,  il  chante 
agréablement,  joue  avec  intelligence  et  possède  un  physique  très- 
avantageux,  ce  qui  ne  nuit  jamais.  On  a  redemandé  sa  chanson  à 
boire  du  troisième  acte,  qu'il  avait  fort  bien  dite. 

Quelle  habitude  de  la  scène  il  a,  ce  brave  M.  Ponchard!  On  ne 
peut  vraiment  pas  dire  le  contraire.  Il  remplit  le  rôle  du  fermier 
Thibaut  avec  un  excès  de  zèle  souvent  couronné  de  succès. 

On  le  voit,  l'ensemble  est  on  ne  peut  plus  satisfaisant  et  double 
l'effet  d'une  pièce  excessivement  amusante,  rehaussée  d'une  musi- 
que délicieuse.  C'est  plus  qu'il  n'en  faut  pour  attirer  la  foule,  et 
pour  que  les  Dragons  de  Villars  élisent  garnison  définitive  dans  la 

salle  hospitalière  de  l'Opéra-Comique. 

Paul  BERNARD. 


THËATRE  DES  FÂNTÂISIES-PÂRISIENNES. 

li'AHOUB   llIO(JIL.L<Ë, 

Opérette  en  un  acte,  paroles  de  MM.  ,T.  Barbier  et  A.  de 
Beauplan,  musique  de  M.  Edouard  de  Hartog. 

(Première  représentalion  le  30  mai  1868.) 

Le  directeur  des  Fantaisies-Parisiennes  va,  dans  quelques  jours, 
procéder  à  sa  fermeture  d'été,  qui  sera  définitive,  si  l'on  s'en 
rapporte  à  certains  bruits  d'après  lesquels  M.  Martinet,  prenant 
en  main  une  plus  vaste  entreprise,  céderait  la  place  au  théâtre  du 
Palais-Royal.  Donné  dans  les  conditions  qui  lui  sont  faites  par  ces 
éventualités  diverses,  l'Amour  mouillé  nous  paraît  donc  avoir  contre 
lui  toutes  les  chances  les  plus  défavorables. 

Nous  devons,  du  reste,  constater  que  celte  petite  pièce  n'a  pas 
l'importance  qui  s'attache  d'ordinaire  à  une  nouveauté.  Si  la  mu- 
sique de  M.  de  Hartog  n'a  jamais  servi,  en  revanche  la  prose  de 
MM.  Barbier  et  de  Beauplan  a  défrayé  déjà  un  vaudeville  joué,  sous 
le  même  titre,  au  Gymnase,  en  1850.  En  ce  temps-là,  c'est-â-dire 
il  y  a  dix-huit  ans,  ces  Messieurs  avaient  pour  collaborateur 
M.  Michel  Carré,  et  leur  pièce  était  interprétée  par  Lafontaine, 
Lesueur  et  Mlle  Mila. 

Quoique  cette  Muette  ait  un  peu  vieilli  dans  la  forme,  elle  con- 
serve néanmoins  un  arrière-parfum  de  grâce  qu'elle  doit  à  l'éter- 
nelle jeunesse  de  l'ode  charmante  d'Anacréon,  à  laquelle  elle  est 
empruntée,  et  qui  n'a  rien  perdu  de  ses  agréments  pour  avoir  été 
traduite  en  vers  naïfs  par  l'inimitable  auteur  de  Joconde. 

Nous  supposons  que  c'est  cette  traduction  qui  a  séduit  M.  de 
Hartog;  car  il  en  a  fait  le  principal  motif  de  sa  partition,  et  il  a 
placé  ce  motif,  non-seulement  dans  le  corps  de  la  pièce,  mais 
aussi  dans  l'ouverture.  Il  est  d'autant  plus  remarquable  que  le  com- 
positeur a  eu  la  singulière  idée  de  le  traiter  en  fugue.  Nous  n'a- 
vions pas  besoin  de  cette  preuve  pour  savoir  que  M.  de  Hartog, 
pianiste  distingué,  était  en  outre  un  excellent  harmoniste.  Nous 
lui  reprocherons  même  d'avoir  trop  sacrifié  à  cette  tendance,  et 
d'avoir  noyé  de  très-bonnes  intentions  mélodiques  dans  une  trop 
grande  recherche  d'orchestration.  Cependant  nous  louerons  sans 
réserve  un  fort  joli  trio  dont  la  phrase  principale  ne  manque  ni 
d'élan  ni  de  franchise. 

N'insistons  pas  davantage  sur  cette  opérette,  destinée  à  vivre  si 
peu,  et  qui  s'est  nécessairement  ressentie  des  circonstances  dans 
lesquelles  a  eu  lieu  son  interprétation  in  extremis.  Nous  voudrions 
pouvoir  féliciter  les  artistes  qui  en  sont  chargés,  mais  nous  ne 
trouvons  sous  notre  plume  que  le  nom  de  Barnolt,  qui  a  fait,  dans 
ces  derniers  temps,  de  réels  progrès. 

D. 


DE  PARIS. 


179 


ETUDES  SUR  CHÂRlES-lBÀRie  DE  WEBER, 

D'après    la    biographie    écrite    pur    son    flls. 

TROISIÈME   PARTIE, 

(3«  article)  (1). 

Certes  Weber  avait  des  loisirs,  mais  ces  loisirs,  qu'il  n'avouait 
pas,  il  ne  les  consacrait  pas  à  la  nausique.  Pour  être  grand  ar- 
tiste et  grand  maître,  on  n'en  est  pas  moins  homme ,  et  Weber 
était  amoureux  et  fiancé.  Le  moment  approchait  où  le  calme 
allait  succéder  aux  grandes  émotions  de  sa  jeunesse ,  et  ce  mo- 
ment, il  l'appelait  de  tous  ses  vœux  et  il  se  multipliait  pour  en 
hâter  la  venue  ;  il  sentait  que  de  son  établissement  à  Dresde  dé- 
pendait le  oui  ou  le  non  de  sod  bonheur;  aussi  travaillait-il  de 
toutes  ses  forces  à  s'imposer,  de  par  son  talent  et  son  activité, 
à  cette  cour  indifférente,  pour  ne  pas  dire  hostile,  de  qui  tout 
son  avenir  dépendait  ;  mais  aussi,  avec  quel  amour  il  préparait  ce 
bonheur  tant  souhaité,  avec  quelle  joie  il  s'occupait  des  moin- 
dres détails  de  son  installation  future,  pensant  à  tout,  veillant 
à  tout.  Un  jour  il  mande  à  sa  fiancée  :  «  Je  vois  un  écriteau, 
appartement  à  louer,  au  troisième,  hum!...  au  troisième  !...  j'entre 
cependant,  et,  tu  me  croiras  si  tu  veux...  l'escalier  était  si  propre 
que  je  me  prends  d'une  belle  aflection  pour  l'appartement  et  que 
je  cours,  pour  le  louer,  chez  le  propriétaire  qui  demeure  hors 
la  ville...  »  Puis,  dans  d'autres  lettres,  ce  sont  des  projets  de  bud- 
gets, des  indications  de  mesure  pour  les  rideaux,  pour  les  tapis, 
des  plans  de  l'appartement,  etc.,  puis  aussi  les  prix  des  denrées, 
le  tarif  de  la  blanchisseuse,  en  un  mot  un  budget  complet.  «  Ce 
que  tu  m'as  raconté  de  la  Flûte  enchantée  m'a  ravi,  écrit-il  dans 
une  de  ses  lettres  à  Caroline  Brandt;  et  dire  que  tu  vas  perdre 
toutes  tes  belles  plumes,  comme  Papagena,  que  tu  vas  troquer  le 
velours  et  le  satin  contre  le  tablier  de  cuisine  ;  que  dorénavant  les 
estomacs  alïamés  seuls  t'applaudiront,  la  cuisinière  seule  te  rappel- 
lera, ton  Charles  seul  te  redemandera  da  capo  pour  chaque  baiser 
que  tu  lui  donneras.  » 

Weber  était  heureux,  et  il  remerciait  le  sort  qui  lui  réservait  un 
si  doux  avenir  ;  on  s'imaginera  donc  sa  joie  lorsqu'il  reçut  du 
comte  Vitzthum  la  mission  de  se  rendre  à  Prague  pour  y  faire  des 
engagements;  comme  on  pense  bien,  ses  préparatifs  ne  furent 
pas  longs,  et  le  soir  môme  il  s'élançait  dans  la  voiture  de  voyage, 
le  cœur  débordant  de  glaisir  et  d'amour.  Le  postillon  n'attendait 
plus  que  le  signal  du  départ  pour  faire  claquer  son  fouet  et  don- 
ner de  l'éperon  à  son  cheval,  quand  on  remit  au  maître  une  let- 
tre...; cette  lettre  lui  annonçait  la  faillite  d'une  maison  de  ban- 
que oîi  étaient  placées  toutes  ses  économies,  ainsi  que  celles  de 
sa  fiancée.  Le  coup  était  rude;  cependant  il  se  rejeta  en  arrière 
et  donna  l'ordre  de  partir.  Il  fondit  alors  en  larmes  et  le  chagrin 
prit  la  place  du  bonheur,  son  compagnon  de  voyage  présumé.  Il 
était  ruiné,  mais  il  calcula  qu'en  ramassant  tout  ce  qu'il  possé- 
dait il  lui  restait  encore  assez  pour  remplacer,  sans  lui  en  rien 
dire,  la  somme  qui  appartenait  à  Caroline  Brandt;  de  sorte  qu'elle 
ignora  pendant  longtemps  le  malheur  qui  avait  frappé  à  leur 
porte;  ce  ne  fut  que  dix  ans  plus  tard  qu'elle  connut  la  vérité. 

Dès  son  arrivée  à  Prague,  Weber  courut  au  théâtre,  où  il  tomba 
comme  la  foudre  ;  on  donnait  la  Flûte  enchantée.  En  le  voyant,  la 
petite  Brandt  s'évanouit ,  et  l'on  dut  prolonger  l'entr'acte;  ce 
furent  des  pleines  de  joie  qui  ne  tarissaient  pas.  La  nouvelle  de  la 
présence  du  maître  se  répandit  bien  vite  dans  la  salle  et  des  hour- 
ras retentirent  de  toutes  parts  ;  il  dut  promettre  de  diriger,  le 
lendemain,  l'exécution  de  sa  Sylvana.  Cette  représentation  fut  une 
longue  ovation  à  laquelle  le  public  associa  Caroline  Brandt. 

(1)  Voir  les  n">»  18  et  21. 


De  ce  voyage  à  Prague  résulta  l'engagement,  pour  quelques 
représentations  à  Dresde,  de  rcxccllentc  Mme  Grûnbaum  et  de  la 
basse  Oued;  mais  une  lâcheuse  ressemblance  de  ce  dernier  avec 
le  fonctionnaire  qui  avait  été  chargé  par  les  souverains  coalisés 
de  demander  au  roi  de  Saxe  son  épée,  fit  échouer  son  engage- 
ment définitif  sur  lequel  avaient  compté  le  comte  Vitzthum  et  We- 
ber. En  quittant  Prague,  ce  dernier  se  rendit  à  Leipzig  pour  y 
diriger  sa  cantate  :  Combats  et  Victoire.  Il  comptait  beaucoup  sur 
cette  exécution  dans  la  ville  où  s'était  passé  le  principal  épisode 
de  l'action  qu'il  avait  retracée,  mais  son  espoir  fut  déçu;  le  pu- 
blic resta  froid  aux  accents  brûlants  de  ce  drame  guerrier,  et  le 
maître  quitta  Leipzig  dans  la  nuit  même  qui  suivit  le  concert. 

Cet  insuccès  l'impressionna  vivement  et  lui  parut  comme  un 
funeste  prélude  aux  événements  qui  allaient  suivre.  Il  ne  se  trom- 
pait pas,  car  la  guerre  allait  éclater,  sans  trêve  ni  merci,  entre  le 
parti  italien  et  lui.  Une  question  de  préséance  donna  lieu  aux 
premières  escarmouches. 

Il  existe,  à  l'extrémité  d'un  faubourg  de  Dresde,  un  endroit  de 
réunion,  connu  sous  le  nom  de  Bains  de  Linke,  où  se  donne  ren- 
dez-vous le  beau  monde,  pendant  les  chaudes  soirées  de  l'été.  A 
cet  établissement  était  joint  autrefois  une  salle  de  spectacle,  cons- 
truite en  1776,  qui  servait  aux  représentations  des  comédiens  du 
roi  pendant  la  belle  saison.  Comme  on  pense,  l'opéra  italien  n'avait 
jamais  été  donné  sur  cette  scène.  Or  il  advintq  u'au  printemps  de 
l'an  1817,  Weber  reçut  ordre  de  faire  représenter  l'opéra  en  pré- 
paration aux  Bains  de  Linkc,  et  en  outre  de  se  tenir  prêt  à  jouer 
sur  le  petit  théâtre  du  château  royal  de  Pillnitz.  Aussitôt ,  grand 
émoi  dans  le  public,  qui  voyait  dans  la  première  de  ces  mesures, 
la  manifestation  d'un  sentiment  de  mépris  à  l'égard  de  l'opéra 
allemand,  placé  de  la  sorte  en  seconde  ligne  par  rapport  à  l'opéra 
italien;  d'autre  part,  on  se  demandait  laquelle  des  deux  troupes 
serait  mandée  la  première  au  château.  Il  n'en  fallait  pas  tant  pour 
irriter  les  partis;  et,  en  effet,  on  déploya  dans  les  deux  camps  une 
activité  extraordinaire.  Chacun  des  deux  chefs  se  mit  en  devoir  de 
faire  jouer  tous  ses  moyens  d'action  :  Weber  ne  quittait  pas  de 
chez  le  comte  Vitzthum,  tandis  que  Morlacchi  harcelait  de  ses  ins- 
tances son  puissant  protecteur  le  ministre  comte  Einsiedel;  son 
insistance  aidant,  il  allait  l'emporter  sur  son  collègue  allemand, 
lorsque  le  ministre  fut  atteint  d'une  indisposition  qui,  bien  que 
légère,  le  força  à  garder  la  chambre,  Vitzthum  profita  de  cet  avan- 
tage; il  vit  le  roi,  l'entretint  longuement  de  la  situation,  et  gagna 
la  partie  :  il  fut  décidé  que  les  Italiens  joueraient  également  au 
théâtre  des  Bains  de  Linke.  C'est  ainsi  qu'un  rhume  décida  de  la 
première  victoire.  Par  surcroît  de  bonheur,  le  roi ,  qui  désirait 
entendre  Mme  Grûnbaum,  ordonna  que  la  troupe  allemande  inau- 
gurerait les  représentations  d'été  sur  la  scène  de  Pillnitz;  en  outre, 
il  fit  défendre  à  Morlacchi  de  s'intituler  premier  maître  de  cha- 
pelle de  Sa  Majesté,  comme  il  l'avait  fait  à  plusieurs  reprises, 
malgré  la  défense  de  Vitzthum. 

Le  parti  allemand  triomphait  donc  ;  par  contre,  les  Italiens  don- 
naient lin  libre  cours  à  leur  colère  et  se  répandaient  en  malédic- 
tions sur  les  «  barbares  »  qui  s'attaquaient  à  leur  omnipotence; 
bientôt  cependant ,  ils  reprirent  courage  en  vue  d'ua  événement 
qui  se  préparaît  :  on  parlait,  en  effet,  dans  le  public  d'un  grand 
concert,  qui  devait  être  donné  au  profit  des  pauvres,  dans  la 
belle  église  protestante  die  Frauenkirche;  Morlacchi  comptait  bien  y 
faire  exécuter  son  oratorio  Isacco;  mais  quel  ne  fut  pas  son  dépit 
quand  il  apprit  que  Vitzthum  avait  désigné  Weber  pour  diriger 
cette  solennité;  il  courut  aussitôt  chez  le  ministre,  lui  exposa  ses 
griefs  et  l'intéressa  à  sa  cause,  ce  qui  était  d'ailleurs  chose  facile. 
Einsiedel  reprocha  amèrement  à  Vitzthum  de  s'être  engagé  vis-à- 
vis  de  Weber  sans  l'avoir  consulté,  et  sur  son  refus  de  revenir  sur 
sa  décision,  il  fit  venir  Weber;  ce  dernier  détendit  avec  calme  ses 


180 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


droits  et  déclara  tout  net  que,  si  l'on  revenait  sur  la  promesse  qui 
lui  avait  été  faite  par  le  surintendant,  il  donnerait  sa  démission; 
le  ministre  [et  lui  se  quittèrent  plus  en  froid  que  jamais;  alors 
l'affaire  fut  portée  devant  le  roi,  qui  tança  vertement  Vitzthum, 
mais  décida,  dans  son  équité,  que  Weber  continuerait  à  être  chargé 
de  l'organisation  du  concert. 

Df^s  lors,  Weber  tenait  doublement  à  ce  que  l'exécution  répon- 
dît k  la  confiance  que  son  bien-aimé  chef  avait  mise  en  lui  ;  il 
mit  un  grand  soin  à  diriger  les  répétitions  du  Pater,  de  Nau- 
mann,  qui  (formait  le  pricinpal  morceau  du  programme,  et  s'ap- 
puya, pour  obtenir  la  meilleure  exécution  possible,  sur  les  con- 
seils du  compositeur  de  musique  religieuse  Schubert,  qui  avait 
connu  particulièrement  Naumann ,  et  souvent  entendu  son  oeuvre 
dirigée  par  lui.  Il  avait  à  sa  disposition  plus  de  deux  cents  chan- 
teurs et  instrumentistes,  recrutés  parmi  les  membres  du  théâtre, 
de  la  chapelle  et  de  l'académie  de  chant,  tous  rivalisant  de  zèle 
sous  la  fiévreuse  conduite  de  leur  chef.  L'exécution  fut  saisissante; 
on  ne  savait  si  l'on  devait  attribuer  la  plus  grande  part  de  l'effet 
produit  à  l'œuvre  vraiment  magistrale  ou  au  maître  qui  la  diri- 
geait, et  la  foule  s'écoula,  vivement  émue  et  louant  hautement  les 
qualités  du  réformateur  Weber. 

Edmond  NEUKOMM. 
{La  suite  prochainement.) 


ÂPFUCÂTION  DE  l'ËLECTBIGITÉ  ÂDX  GRANDES  ORGUES. 

Le  grand  orgue  de  la  nouvelle  église  Saint-Augustin,  à   Paris. 

{Système  Peschard-Barker.) 

L'audition  du  grand  orgue  électrique  de  Saint-Augustin  n'a  pas 
été  la  partie  la  moins  intéressante  et  la  moins  remarquée  de 
l'inauguration  du  nouveau  salon  à  prières  du  boulevard  Males- 
herbes.  Cet  instrument  est,  en  eifet,  parfaitement  à  sa  place  en 
un  édifice  qui  semble  réunir  toutes  les  innovations  et  hardiesses 
architecturales  modernes  et  dans  la  construction  duquel  le  fer,  la 
fonte,  le  cuivre  et  le  zinc  combinés  par  la  main  pratique  de 
M.  Baltard,  l'architecte  des  halles  centrales,  remplacent  la  pierre, 
—  la  pierre  des  vieilles  cathédrales  et  des  âges  de  foi! 

Depuis  longtemps  déjà  on  avait  tenté  d'appliquer  la  force  élec- 
trique aux  instruments  à  clavier.  Le  mécanisme  extrêmement  com- 
pliqué, coûteux,  encombrant,  du  levier  pneumatique  dans  les 
grandes  orgues;  les  dérangements  inévitables,  malgré  leur  perfec- 
tion, de  ces  balanciers,  de  ces  équerres,  de  ces  vergettes  et  abré- 
gés; leur  sensibilité  aux  variations  atmosphériques  avaient  natu- 
rellement donné  l'idée  de  construire  des  orgues  sans  mécanisme. 
On  essaya,  mais  sans  grand  succès,  du  système  tubulaire  avec 
transmission  pneumatique;  de  l'attraction  d'un  électro-aimant  au 
jeu  d'un  marteau  de  piano  ou  d'une  soupape  d'orgue,  etc.  L'élec- 
tricité dynamique  a  été  appliquée  à  la  construction  des  orgues, 
d'une  manière  Isûre  et  durable,  sans  qu'il  y  ait  besoin  d'avoir  re- 
cours à  une  force  considérable,  sans  entraîner  une  grande  dé- 
pense, sans  nécessiter  une  manipulation  difficile,  par  M.  Peschard, 
organiste  de  Saint-Etienne  de  Caen,  docteur  en  droit,  et  MM.  Bar- 
ker  et  Verschneider,  concessionnaires  de  son  brevet  d'invention. 
C'est  à  leurs  études  entreprises  et  poursuivies  en  commun ,  c'est  à 
leurs  travaux  persévérants,  que  la  facture  doit  un  système  dcfrit  il 
est  opportun,  je  crois,  d'indiquer  l'ensemble  et  les  points  princi- 
paux. 

Un  électro-aimant  attirant  une  armature  de  fer  doux  lorsqu'un 
courant  électrique  traverse  son  hélice,  on  peut  donc  faire  parler 
ainsi  des  tuyaux  sans  le  secours  d'intermédiaires  mécaniques.  Ces 


intermédiaires,  MM.  Peschard  et  Barker,  loin  de  les  repousser  tou- 
tefois, estiment  au  contraire  leur  emploi  avantageux,  et  ils  joignent 
au  principe  électrique  que  je  viens  de  formuler  le  système  du  le- 
vier pneumatique  et  celui  de  la  contre -pression.  Chaque  appareil 
constitutif  de  l'instrument  présente,  d'après  ces  données,  l'aspect 
suivant:  soupape  située  dans  la  laye  du  sommier;  soufflet  moteur 
lié  avec  la  soupape  ;  électro-aimant  (note) ,  dont  l'armature  met 
en  jeu  la  soupape  du  levier  pneumatique. 

Comme  il  était  impossible  d'affecter  une  pile  spéciale  à  chaque 
appareil,  les  constructeurs  ont  admis  la  division  du  courant  élec- 
trique. Sur  les  pôles  de  la  pile  sont  greffes  autant  de  circuits 
égaux  que  de  notes  ou  électro-aimants;  chaque  touche  est  disposée 
de  manière  à  fermer,  en  s'abaissant,  le  circuit  de  l'électro-aimant 
propre  à  sa  note,  et  la  surface  de  la  pile  est  calculée  pour  faire 
agir  simultanément  douze  notes.  Ainsi,  à  l'état  de  repos,  aucune 
des  touches  n'étant  abaissée,  le  courant  ne  traverse  aucun  électro- 
aimant; mais  si  l'on  vient  à  frapper  l'accord  do,  mi,  sol,  par 
exemple,  le  courant  se  divise  dans  les  trois  électro-aimants  do,  mi, 
sol,  exactement  et  régulièrement,  car  ils  sont  tous  d'égale  résis- 
tance, les  fils  des  bobines  ayant  la  même  longueur  et  la  même 
grosseur.  Ces  fils  se  réunissent  en  quittant  les  électro-aimants  pour 
aboutir  à  l'autre  pôle  de  la  pile. 

MM.  Peschard  et  Barker  ont  adopté  pour  les  conjoncteurs  le 
mercure  ou  un  amalgame,  à  la  place  des  métaux  solides.  Un 
pôle  de  la  pile  aboutit,  sous  le  clavier,  à  une  rigole  de  mer- 
cure qui  passe  sous  toutes  les  touches  du  clavier.  Sous  chaque 
tou3he  et  près  de  la  rigole  est  pratiqué  dans  une  tablette  de  bois, 
un  trou  qui  ne  traverse  pas  complètement  la  tablette.  Directement 
sous  le  trou  il  y  a  une  vis  en  cuivre  rouge,  dont  le  bout  occupe 
le  fond  de  la  capsule  et  est  en  contact  avec  le  mercure  que  l'on 
verse  à  une  hauteur  suffisante.  A  la  touche,  où  à  la  pièce  que  la 
touche  fait  mouvoir  est  fixé  un  fil  en  cuivre  rouge  recourbé 
en  forme  de  fourche,  qui,  lorsque  la  touche  est  abaissée,  met 
la  capsule  en  communication  avec  la  rigole.  De  celte  façon,  le 
circuit  se  trouve  fermé,  puisque  la  rigole  communique  avec  la 
pile  et  la  capsule  avec  l'électro-aimant. 

Pour  produire  les  accouplements,  par  exemple,  le  récit  s' ac- 
couplant au  grand  orgue,  au  positif  et  au  clavier  de  pédales,  le 
fil  conducteur  de  la  pile  destinée  au  récit  se  divise  en  quatre 
rigoles  de  mercure,  une  sous  le  clavier  du  récit  lui-môme,  une 
sous  le  clavier  du  grand  orgue,  une  sous  le  clavier  du  positif  et 
une  quatrième  sous  le  clavier  de  pédales.  Il  y  a  donc,  sous  le 
clavier  principal,  autant  de  rigoles  de  mercure  que  d'accouple- 
ment à  produire,  et,  de  plus,  la  rigole  propre  à  ce  clavier.  Lorsqu'on 
abaisse  une  touche,  ces  rigoles  sont  mises  en  communication  par 
les  capsules,  chacune  séparément,  avec  les  électro-aimants  que 
cette  touche  doit  faire  agir.  Si  l'on  veut  faire  cesser  un  accouple- 
ment, on  sépare  de  la  pile,  au  moyen  d'un  seul  disjoncteur,  la 
rigole  affectée  à  cet  accouplement. 

Les  sources  électriques  employées  par  MM.  Peschard  et  Barker 
sont  de  plusieurs  natures.  Celle  du  grand  orgue  de  Saint- 
Augustin  consiste  en  une  pile  à  vases  non  poreux,  à  un  seul 
liquide,  constante  et  suffisamment  énergique.  En  raison  même  de 
sa  force,  la  pile  ne  devant  agir  qu'au  moment  où  l'instrument  est 
touché,  il  a  fallu  que  la  manipulation  puisse  se  faire  instantané- 
ment :  les  vases  sont  disposés,  à  cet  effet,  sur  un  petit  soufflet  à 
part,  lequel,  en  se  gonflant,  les  porte  sur  les  électrodes. 

En  résumé,  dans  ce  système,  la  puissance  de  l'instrument  n'a 
pas  besoin  d'être  limitée  en  vue  d'un  toucher  facile  à  la  main  ; 
aucun  cliquetis  désagréable  ne  se  produit,  malgré  le  nombre  de 
contacts  que  chaque  touche  peut  effectuer  pour  les  accouple- 
ments ;  les  contacts  qui  servent  à  fermer  les  circuits  dérivés  de 
la  pile  s'opèrent  en  toute  sécurité;  la  résistance  des  soupapes  est 


DE  PARIS. 


481 


diminuée;  la    répétition  de  la  note  est  prompte,  l'attaque  franche  I 
et  vive.    J'ajouterai   que  la    sonorité  du   grand    orgue  de    Saint- 
Augustin  est  d'une  rare  puissance,    et  que  l'on  a  admiré,  le  jour 
de  l'inauguration,  la  distinction  de  timbre  de  ses  jeux  habilement 
employés  par  l'excellent  organiste  de  cette  église. 

Sans  prétendre  à  bouleverser  la  facture  moderne  si  perfectionnée, 
si  complète,  il  y  a,  dans  le  système  de  l'application  de  l'électricité 
aux  grandes  orgues,  des  innovations  intéressantes  et  des  élémenls 
de  progrès  en  rapport  avec  les  travaux  et  les  préoccupations  scien- 
tifiques de  notre  époque.  C'est  une  voie  nouvelle  ouverte  à  la 
construction  des  instruments  à  clavier,  digne,  dans  tous  les  cas, 
d'attirer  l'attention,  de  mériter  les  suffrages  et  les  encouragements 
des  amis  de  la  science,  des  arts  et  du  progrès. 

Maintenant,  l'entretien  de  cet  appareillage  compliqué  ne  sera-t-il 
pas  difficile  ou  onéreux?  La  nécessité  du  nettoyage  ou  de  la  répa- 
ration ne  se  reproduira-t-elle  pas  trop  fréquemment  ?  La  constance, 
la  régularité  de  transmission,  l'énergie  de  la  source  électrique,  l'âme 
même  de  l'instrument,  ne  seront-elles  pas  sensiblement  modifiées 
sous  l'influence  de  certaines  conditions  atmosphériques?  La  cons- 
truction jjénérale  résistera-t-clle,  sans  altérations  essentielles,  aux 
exigences  du  service  d'une  paroisse?  Ce  sont  là  des  questions 
auxquelles  peut  seul  répondre  le  temps,  ce  moniteur  et  correcteur 
sans  pareil.  Comme  toutes  choses,  l'invention,  la  découverte,  si 
l'on  veut,  de  iVIM.  Peschard  et  Barker  est  perfectible.  Ce  n'est  pas 
au  début  d'une  industrie  nouvelle  qu'il  est  permis  de  limiter  les 
systèmes  et  les  perfectionnements,  ni  de  restreindre  les  applications 
de  l'électricité  dynamique  dans  l'orgue.  Et  qui  sait  si  nous  ne 
verrons  pas  quelque  jour  cette  mystérieuse  puissance  appliquée  à 
des  moteurs  pour  remplacer  le  travail  de  la  soufflerie? 

Em.  Mathieu  UE  MONTER. 


FESTIVAL  DE  COLOGNE. 


Le  quarante -cinquième  festival  bas-rhénan,  Niederrheinisches 
Musikfest,  a  eu  lieu  cette  année  à  Cologne,  à  l'époque  ordinaire, 
c'est-à-dire  aux  fêtes  de  la  Pentecôte.  Trois  villes  seulertient  ont 
des  salles  de  concerts  assez  vastes  pour  contenir  la  foule  qu'attire 
de  partout  cette  imposante  solennité  :  Cologne,  Dûsseldorf  et  Aix- 
la-Chapelle  ,  et  le  festival  bas-rhénan  se  tient  alternativement  dans 
chacune  d'elles  ;  Elberfeld,  qui  jouissait  dans  l'origine  du  même 
privilège,  a  dû  y  renoncer  à  cause  de  l'exiguïté  relative  du  local 
dont  elle  disposait.  Ce  n'est  pas  un  mince  honneur  que  de  prési- 
der ces  grandes  assises  musicales,  et  Mendelssohn ,  Schumann, 
Listz,  F.  Ries,  Fr.  Lacliner,  Spontini,  etc.,  comptent  parmi  leurs 
titres  de  gloire  d'avoir  dirigé  le  festival  rhénan.  Cette  année,  cin- 
quantième anniversaire  de  la  fondation,  c'est  à  Ferdinand  Hiller 
qu'incombait,  pour  la  septième  fois,  cette  grande  tâche,  et  disons 
de  suite  qu'il  s'en  est  admirablement  acquitté.  Les  voix  et  les 
instruments  de  plus  de  sept  cent  cinquante  musiciens  remplis- 
saient cette  grande  et  belle  salle  du  Giirzenich,  le  chant  de  ba- 
taille habituel  de  ce  vaillant  chef. 

La  première  journée  (dimanche  de  la  Pentecôte)  a  été  remplie 
par  le  Messie ,  de  Hsendel ,  avec  Mmes  Dustmann  et  Joachim , 
MM.  Gunz  et  Hill  pour  solistes;  on  ne  peut  se  figurer  une  exécu- 
tion plus  vigoureuse,  plus  claire,  plus  parfaite,  plus  conforme  en 
un  mot  au  caractère  de  l'œuvre.  Le  lendemain ,  le  programme  se 
composait  d'une  cantate  de  Bach,  le  Feu  éternel,  d'une  très-belle 
ouverture  de  Hiller,  du  93"  psaume  de  Mendelssohn,  d'un  acte  de 
la  Vestale,  et  de  la  symphonie  avec  chœurs  de  Beethoven.  L'or- 
chestre a  été  irréprochable,  et  les  chœurs,  si  sûrs  d'eux-mêmes  et 
si  parfaitement  fondus,  ont  mérité  les  plus  grands  éloges. 


La  troisième  journée  (ajoutée  par  Mendelssohn,  en  1833,  aux 
deux  dont  s'étaient  jusqu'alors  composés  les  festivals) ,  est  plus  spé- 
cialement réservée  aux  solistes,  sans  cependant  exclure  la  musique 
d'ensemble  :  une  ouverture  de  Julius  Rictz ,  par  exemple,  un 
quatuor  de  Hiller  composé  pour  la  circonstance ,  la  symphonie 
en  ré  mineur  de  Schumann  et  l'Alleluia  du  Messie  y  ont  trouvé 
place.  Mais  la  grande  attraction  de  ce  jour  était  l'exécution,  par 
Joachim ,  du  concerto  de  violon  de  Max  Bruch ,  fort  belle  œuvre, 
qui  commence  à  être  très-appréciéo  on  Allemagne  et  d'un  andante 
et  allegro  de  Spohr.  Le  grand  violoniste  a  été  réellement  sublime. 
Mmes  Dustmann  et  Joachim,  MM.  Gunz  et  Hill  ont  chanté  un 
nombre  assez  respectable  de  Heder  pour  mettre  en  lumière  leurs 
voix  et  leurs  talents  respectifs.  —  Telle  a  été  cette  fête,  l'une  des 
plus  intéressantes  et  des  plus  significatives  manifestations  artis- 
tiques de  l'Allemagne,  et  l'une  de  celles  aussi  à  travers  lesquelles 
aime  à  se  faire  jour  le  sentiment  national  germanique ,  si  vivace 
et  si  volontiers  exclusif. 


REVUE  BIBLIOGRAPHIQUE. 

lia  notation  de  la  moslqne  classique  comparée  ù,  la 
notation  de  la  ninnSque  moderne,  et  de  l'exécation 
des  petites  notes  en  g^énéral. 

Par  E.-M.-E.    DELDEVEZ. 

(Paris,  Richault,  in-S".) 

«  En  considérant  les  effets  d'exécution  soumis  aux  ressources 
des  instruments  des  anciens,  on  comprend  que  l'on  ait  cherché 
les  moyens  d'accroître  la  puissance  de  certaines  fonctions  jugées 
insuffisantes,  telles  que,  pour  le  piano,  la  percussion  du  son 
maintenant  plus  intense,  et  sa  durée  plus  longue  sur  les  instru- 
ments des  modernes.  D'où  il  résulte  qu'autrefois,  pour  rendre  l'at- 
taque d'un  son  plus  sensible,  on  le  faisait  précéder  d'une  ou  de 
plusieurs  petites  notes  d'agrément  qui  ajoutaient  de  la  force  à  l'ac- 
cent de  la  note  réelle;  et  pour  augmenter  la  durée  du  son,  qui 
ne  pouvait  être  soutenu,  on  employait  le  gruppetto  comme  orne- 
ment de  passage  entre  deux  notes  liées.  Il  en  était  de  même  pour 
le  violoniste  sous  le  rapport  de  l'archet.  L'arc  primitif  ne  permet- 
tant point  d'attaque  accusée,  on  suppléait  à  ce  défaut  par  des  pe- 
tites notes  de  trait,  ou  pinces,  et  la  durée  du  son  ne  s'obtenant 
qu'à  l'aide  d'un  renouvellement  d'arcliet,  c'était  par  des  gruppeiti 
quelquefois  très-allongés  que  l'on  autorisait  le  va-et-vient  de  l'archet 
sur  un  même  son  tenu,  mais  orné.  Ces  modifications  sont  arrivées 
insensiblement  à  produire  une  transformation  complète  dans  l'exé- 
cution de  certaines  parties  du  texte  des  auteurs  anciens,  et  cette 
transformation  crée  des  difficultés  pour  les  modernes  qu'une  étude 
basée  sur  les  principes  de  l'art  de  la  composition  peut  seule 
aplanir.  » 

Ainsi  s'explique,  très-clairement  et  très -sensément,  l'auteur  de 
l'ouvrage  dont  nous  avons  transcrit  le  titre  ci-dessus.  Compositeur 
distingué,  chef  d'orchestre  exercé,  érudit  très-versé  dans  la  con- 
naissance de  notre  ancienne  musique  et  connu  déjà  par  des  tra- 
vaux aussi  estimables  qu'estimés,  M.  Deldevez  était  plus  apte  que 
qui  que  ce  soit  à  nous  donner  la  clef  des  mystères  graphiques  de 
cette  musique,  et  à  rendre  les  anciens  textes  intelligibles  pour  les 
virtuoses  modernes. 

On  sait  qu'en  effet,  et  pour  les  raisons  déduites  plus  haut,  la 
notation  de  nos  pères  était  surchargée  de  petites  notes,  d'orne- 
ments de  toutes  sortes,  dont  quelques-uns  peuvent  encore  être 
utiles,  mais  dont  les  autres  sont  plutôt  nuisibles  à  l'expression 
musicale,  étant  donnée  la  perfection   apportée  dans  la  construc- 


182 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


tion  des  instruments.  Mais  on  comprend  aussi  que  la  matière  est 
délicate,  et  que,  pour  indiquer  aux  artistes  modernes  de  quelle  façon 
ils  doivent  interpréter  la  musique  ancienne,  il  faut  à  la  fois  un 
profond  savoir,  une  grande  expérience  et  un  goût  très-sûr.  M.  Del- 
devez  a  prouvé  dans  son  opuscule  qu'il  possède  ces  trois  qualités, 
et,  sans  qu'il  soit  besoin  d'en  faire  ici  une  analyse  détaillée, 
une  critique  approfondie,  nous  pouvons,  après  une  lecture  atten- 
tive, recommander  l'étude  de  cet  opuscule  à  tous  ceux  de  nos 
virtuoses,  soit  chanteurs,  soit  instrumentistes,  qui  sont  assez  in- 
telligents pour  ne  pas  dédaigner  les  maîtres  du  passé  et  assez 
heureux  pour  les  faire  aimer.  Ils  y  trouveront  d'excellents  conseils 
relativement  à  ces  difficultés  nombreuses  «  qu'une  étude  basée 
sur  les  principes  de  l'art  de  la  composition  peut  seule  aplanir.  » 


Be  l'émission  tie  la  voiac,  par  Jules  lierort. 

(Paris.  Heu,  grand  in  S".) 

C'est  encore  à  l'aide  d'une  citation  que  je  vais  essayer  de  faire 
connaître  ce  second  écrit  : 

«  Bien  poser  la  voix  —  dit  M.  Jules  Lefort  —  est^  le  but  [pre- 
mier que  doit  se  proposer  d'abord  toute  personne  qui  aspire  à  bien 
chanter;  do  même  que,  dans  les  exercices  de  déclamation,  le  bon 
sens  conseille,  avant  même  le  professeur,  d'émettre  naturellement 
le  son,  sans  le  grossir  ou  le  rendre  guttural  sous  prétexte  de  le 
renforcer;  ainsi  dans  l'art  pratique  du  chant  doit-on,  avant  tout, 
chercher  une  voix  naturelle,  si  je  puis  m'exprimer  ainsi ,  et  cor- 
riger les  défauts  de  l'élève  dont  la  voix  serait  ou  gutturale  ou  na- 
sale. . .  Ceci  n'est  pas  une  méthode  de  chant.  Ce  sont  de  simples 
conseils  aux  personnes  qui  veulent  bien  chanter;  conseils  qui  leur 
fournissent  le  moyen  infaillible  de  bien  poser  leur  voix,  de  lui 
donner  par  conséquent  le  timbre  le  plus  naturel,  le  plus  agréa- 
ble, le  plus  sonore,  tout  comme  l'homogénéité  la  plus  grande  sur 
toute  l'échelle  parcourue.  » 

On  voit  de  quel  principe  part  M.  Jules  Lefort,  l'un  de  nos  chan- 
teurs de  salon  les  plus  estimés,  et  par  conséquent  fort  expert  en  la 
matièi'e. 

Ayant  remarqué  que  la  voyelle  u  place  l'organe  vocal,  au  point 
de  vue  anatomique,  dans  une  position  qui  rend  impossible  une 
émission  guLturale,  M.  Lefort  fait  de  cette  voyelle  la  base  de  son 
système  d'émission  du  son  et  de  pose  de  la  voix.  Attaquant  ainsi, 
comme  on  dit,  le  taureau  par  les  cornes,  et  s'en  prenant  de  prime 
abord  à  la  plus  grande  difficulté  (car  on  sait  que  les  chanteurs 
considèrent  le  son  de  Vu  comme  le  plus  difficile  à  bien  donner), 
M.  Lefort  passe  de  cette  voyelle,  la  plus  fermée  de  toutes,  à  celles 
qui  sont  de  plus  en  plus  ouvertes.  «  Lorsque  la  sonorité  de  I'm 
est  reconnue  bonne,  par  un  léger  agrandissement  de  l'ouverture 
de  la  bouche  \'i  se  produit  naturellement,  sans  rien  modifier  de  la 
position  de  la  langue,  puis,  en  l'abaissant  un  peu  ainsi  que  la 
mâchoire  inférieure,  on  obtient  l'e.  »  On  s'exerce  ensuite  sur  6, 
à,  è,  e  (qu'on  ne  doit  pas  prononcer  eu)  et  a. 

Tel  est,  en  résumé,  le  système  d'études  proposé  par  M.  Lefort. 
Ce  système  nous  paraît  rationnel,  bien  que  nous  ne  puissions  le 
juger  en  toute  connaissance  de  cause,  car  il  nous  semble  que  les 
chanteurs  seuls  en  peuvent  parler  sciemment  et  d'une  façon  rai- 
sonnée.  Cependant,  nous  le  répétons,  une  telle  doctrine,  basée  sur 
une  étude  particulière  de  la  structure  de  l'appareil  vocal,  sur  un 
phénomène  physiologique,  nous  semble  irréprochable  en  théorie. 
Sera-t-elle  sanctionnée  par  la  pratique?  L'auteur  nous  répond 
ainsi  :  —  «  Les  mains  pleines  de  faits  pour  constater  l'excellence 
de  ce  procédé,  je  ne  saurais  dire  les  résultats  obtenus  rapidement 
par  cette  méthode,  un  peu  partout,  en  France,  en  Russie,  en  An- 
gleterre, où  la  langue  souvent  gutturale  donne  de  grandes  diffi- 
cultés pour  l'émission  de  la  voix.  Non-seulement  des  élèves  ayant 


une  émission  de  la  gorge  essentiellement  vicieuse,  sont  arrivés  ra- 
pidement à  un  timbre  excellent,  mais  encore  des  chanteurs  à  la 
voix  faite,  mais  mal  faite,  et  ne  portant  pas,  ont  modifié  leurs 
procédés,  et,  en  dépit  de  l'habitude,  une  seconde  nature  bien  plus 
difficile  à  vaincre  que  la  première,  ont  pu,  dans  un  bref  délai, 
reconstituer  du  tout  au  tout  leur  émission,  en  un  mot  refaire  leur 
organe.  » 

S'il  en  est  ainsi,  —  et  nous  n'avons  pas  le  droit  d'en  douter 
après  une  telle  affirmation,  —  nous  félicitons  vivement  M.  Jules 
Lefort  des  résultats  qu'il  a  obtenus  et  du  service  rendu  par  lui  à 
l'art  du  chant. 

Arthur  POUGIN. 


CONCERTS  ET  AUDITIONS  fflUSICÂLES  DE  LÀ  SEDIÂINE. 

^*„  Au  concert  annuel  donné  par  les  élèves  de  l'Institution  de  Notre- 
Dame-d'Auteuil  pour  la  fête  de  leur  r.irecteur,  MM.  Capoul  et  Battaille, 
de  rOpéra-Comique,  MM.  A.  Durand  et  Croisilles,  deux  organistes  émi- 
nents,  se  .sont  fait  chaleureusement  applaudir.  Les  élèves,  qui  renoivenl 
une  éducation  musicale  irès-soignée,  d'après  les  principes  de  l'école 
Choron,  ont  fort  bien  interprété  des  chœurs  de  difîérents  caractères,  et 
notamment  un  iV/seccre  arrangé  par  M.  Nicou-Clioron,  pour  chœur,  vio- 
lon obligé,  or^ue,  piano  et  orcho.<tre,  sur  l'adagio  de  la  sonate  en  ut 
dièze  mineur  de  Beethoven,  et  dont  le  solo  a  été  dit  par  Battaille.  — 
L'exécution,  préparée  et  dirigée  avec  beaucoup  de  talent  par  M.  H.  Va- 
liquet,  a  été  parfaite  sous  tous  les  rapports. 

^*i^  Une  matinée  musicale  et  dramatique  a  eu  lieu  dimanche  dernier 
dans  la  saile  Herz,  au  bénéfice  de  deux  jeunes  orphelines,  dont  la  mère 
avait  été  une  cantatrice  des  plus  distinguées.  On  a  entendu  avec  infini- 
ment de  plaisir  les  cantatrices  Monbelli,  Marie-Roze  et  Regnauld,  les 
chanteurs  Aurcle  et  N'eviiu;  Mlle  Besse-Delarzes  sur  la  harpe;  Mme  La- 
gnier,  M.  Brisson  et  Meilhan  dans  nn  trio  d'orgue,  piano  et  violon, 
Mlle  .4gar,  de  l'Odéon,  a  dit  admirablement  la  grande  scène  du  qua- 
trième 3(^6  des  Horaces,  secondée  par  Firmin,  et  une  émouvants  poésie 
de  Coppée.  Un  délicieux  petit  opéra-comique  inédit  (paroles  de  Mme  Mé- 
lanie  Waldor,  musique  de  M.  Douay)  a  été  joué  avec  un  plein  succès  par 
Mlles  Regnaud  et  Ducasse,  et  par  M.  Ducellier,  bon  ténor  amateur, 
MM.  Aurèle  et  Neveu.  —  Le  titre  en  est  le  Double  Piège.  Une  fort  belle 
cantate,  le  Berceau  de  Vouvrière,  dont  les  paroles  sont  encore  de 
Mme  Waldor  ei  la  musique  de  M.  Adrien  Boïeldieu,  a  été  chantée  par 
Mlle  Marie-Roze  accompagnée  par  la  harpe,  l'orgue,  le  piano  et  le 
violon,  et  par  les  chœurs  de  l'Athénée. 

,*,  Nous  mentionnions  dernièrement  la  solennité  religieuse  qui  avait  eu 
lieu  à  l'Eglise  de  Sèvres,  au  profit  de  l'hôpital,  et  à  laquelle  le  talent  de 
Mme  Denieur-Charton  et  Delle-Sedie  avaient  prêté  un  si  grand  lustre; 
jeudi,  c'était  le  tour  de  Versaille.s,  q  li  avait  sollicité  le  concours  de  la 
célèbre  cantatrice  pour  une  cérémonie  religieuse  au  profit  de  VOEuvre 
des  crèches.  Cet  appel  ne  lui  a  pas  été  adressé  en  vain,  et  sa  belle  voix, 
qui  n'a  jamais  été  plus  fraîche,  plus  sonore,  plus  expressive,  s'est  fait 
entendre  dans  un  duo  pour  basse  et  soprano  de  Haydn  et  dans  un  Ave 
Maria  de  Cherubini  pour  soprano  et  violon  avec  Sarrasale,  l'éminent  ar- 
tiste qui,  lui  aussi,  payait  son  tribut  à  la  charité,  et  qui  a  adtnirable- 
ment  joué.  —  Plusieurs  fragments  du  Messie  de  Haendel,  ont  été,  en 
outre,  exécutés  par  des  amateurs  avec  un  talent  que  pourraient  envier 
beaucoup  d'ariistes.  Inutile  d'ajouter  qu'il  y  avait  énormément  de  monde 
et  que  la  quête  a  été  des  plus  fructueuses. 

»%  Au  concours  du  24  mai,  si  bien  organisé  par  notre  éminent  con- 
frère, Amédée  Méreaux,  dans  la  ville  de  Rouen,  les  honneurs  ont  été 
pour  l'Orphéon  de  Cherbourg,  la  Sainte-Cécile,  directeur  M.  Antonio 
Barrière.  Cette  Société  a  remporté  quatre  médailles  :  deux  pour  exé- 
cution parfaite  et  deux  pour  composition,  car  les  chœurs  imposés, 
le  Matin  aux  champs  et  Salut  au  printemps,  sont  de  MM.  Antonio  Barrière 
père  et  Gaston  Barrière  fils.  Parfaitement  appréciés  par  les  membres  du 
jury,  ils  se  recommandent  aux  sociétés  chorales. 

**,(  Dimanche  dernier,  l'exécution  du  Salut  impérial,  d'A.  Elwart,  a 
eu  lieu  à  Rouen,  sous  la  direction  de  l'auteur,  en  présence  de  Leurs 
Majestés  Impériales.  —  Les  Sociétés  chorales  rouennaises  la  Renaissance 
et  Boieldieu,  ainsi  que  la  musique  du  QG""»  de  ligne,  ont  parfaitement 
rendu  ce  chant  national. 

t*;^  Lundi  dernier,  pendant  la  cérémonie  d'ouverture  de  l'Exposition 
maritime  du  Havre,  qui  a  eu  lieu  dans  l'immense  hangar  des  Docks, 
on  a  exécuté  une  Marche  solennelle  d'un  beau  caractère  composée  pour 
la  circonstance  par  M.  OEschner,  et  une  Cantate  de  MM.  Fleury  et 
Frigola,  oîi  l'inspiration  ne  manque  pas,  et  qui  a  été  remarquablement 
interprétée  par  MM.  Faivrei,  Larrivé,  et  surtout  par  la  voix  magnifique 
de  Mme  Henry  personnifiant  l'Industrie. 

,i*jf  L'intéressant  trio  des  enfants  Frémaux,  engagé  à  Bade,  y  a  produit 


DE  PARIS 


183 


une  grande  sensation.  Bravos,  bouquets  et  rappels,  rien  ne  leur  a 
manqué.  Le  directeur,  M.  Dupressoii',  n'a  pas  voulu  ritster  en  arrière  du 
public,  et  a  spontanément  élevé  d'un  quart  le  chiffre  du  bel  engagement 
qu'ils  avaient  obtenu.  La  critique  musicale  à  Bade  leur  est  on  ne  peut 
plus  favorable.  Le  prince  Napoléon  et  le  grand-duc  de  Bade  assistaient  à 
leur  concert,  et  il-i  seront  probablement  admis  à  l'honneur  de  jouer  de- 
vant la  reine  de  Prusse. 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 

*■•*  Le  théâtre  impérial  de  l'Opéra  a  donné  lundi  Guillaume  Tell.  Par 
suite  du  congé  que  vient  de  prendre  Belval,  c'est  Obin  qui  a  repris  le 
rôle  de  Waller;  il  ne  l'avait  pas  chanté  depuis  trois  ans.  —  Mercredi  on 
jouait  l'Africaine,  où  Marie  Sass  tient  toujours  triomphalement  le  rôle 
de  Sélika;  Yillaret  a  très  bien  chanté  celui  de  Vasco  ;  David  avait  pris 
celui  de  Belval,  do:n  Pedro.  —  Vendredi  on  a  donné  Don  Juan. 

,^*j  On  annonce  l'Africaine  pour  demain  lundi. 

^*^  La  reprise  à'Herculanum  est  de  nouveau  reculée;  on  ne  doit  pas 
s'attendre  à  la  voir  représentée  avant  le  20  de  ce  mois. 

t%  Le  théâtre  de  l'Athénée  doit  faire  le  30  de  ce  mois  sa  clôture  par 
une  représentation  au  bénéfice  de  Désiré;  l'excellent  bouffe  a  choisi 
Malbroug-s'en-va-t-en-i/uerre,  qui  sera  repris  pour  cette  fois  seulement  et 
dans  lequel  il  remplira  le  rôle  du  duc  créé  par  Potier. 

j,*^  L'Africaine  a  été  donnée  pour  la  première  fois  le  27  mai  à  Bres- 
lau.  Bien  peu  nombreuses  sont  les  villes  d'Allemagne  qui  l'attendent 
encore  ! 

*'*  C'est  le  22  de  ce  mois  que  doit  être  représentée  au  théâtre  Saint- 
James,  sous  l'intelligente  direction  de  Raphaël  Félix,  la  Grande-Duchesse 
de  Gérolstein,  avec  Mlle  Schneider.  Rien  n'est  épargné  pour  que  l'œuvre 
d'Offenbach  ne  soit  pas  moins  bien  montée  à  Londres  qu'à  Paris.  Décors, 
costumes,  tout  est  neuf.  Scbey,  l'un  des  meilleurs  comiques  des  théâtres 
de  mélodrame,  et  Duplant,  qui  a  obtenu  les  plus  grands  succès  à 
Bruxelles,  seconderont  Mlle  Schneider.  L'orchestre  et  les  chœurs  seront 
au  grand  complet. 

***.  Mlle  Irma  Marié  partira  le  io  juin  pour  New- York,  où  elle  jouera 
le  répertoire. d'Offenbach  et  Fleur  de  Thé  aux  appointements  de  6,000  fr. 
par  mois. 

^*^  Berthelier  vient  d'être  engagé  par  M.  d'Herblay  pour  donner  une 
série  de  représentations,  durant  le  mois  de  juin,  au  théâtre  des  Célestins, 
à  Lyon;  il  y  chantera  spécialement  Lischen  et  Fritzchen,  avec  une  jeune 
artiste  de  talent,  Mlle  Jeanne. 

j,*^  M.Husson,  directeur  du  Grand-Théâtre  de  Marseille,  arrivera  à 
Paris,  dans  la  première  quinzaine  de  juin,  afin  de  compléter  sa  troupe  ; 
mais  en  attendant  il  a  chargé  M.  Rékel,  professeur  de  chant  du  plus 
grand  mérite,  de  le  représenter  à  Paris,  et  d'entendre  les  artistes  qui 
voudraient  traiter  pour  la  saison  prochaine. 


NOUVELLES  DIVERSES. 

:j**  Au  nombre  des  personnes  décorées  par  S.  M.  l'Empereur  lors  de 
sa  visite  au  concours  régional  de  Rouen,  on  a  remarqué  M.  Amédée 
Méreaux,  aussi  éminent  musicien  qu'excellent  écrivain.  Celte  faveur, 
méritée  à  tant  de  titres,  a  été  accueillie  avec  une  véritable  sympathie  par 
tous  ceux  qui  connaissent  M.  Méreaux. 

^*,  M.  Félix  Le  Couppey,  professeur  au  Conservatoire,  a  reçu  du 
schah  de  Perse  la  croix  de  commandeur  de  l'ordre  du  Lion. 

^,*^  En  apprenant  l'accident  qui  avait  mis  en  danger  la  santé  d'Hec- 
tor Berlioz,  S.  A.  I.  Mme  la  grande -duche^se  Hélène  de  Russie  s'est 
empressée  d'écrire  au  célèbre  compositeur  une  lettre  autographe  pour 
avoir  des  nouvelles  de  son  état. 

^**  A  la  dernière  séance  mensuelle  des  compositeurs  de  musique,  qui 
a  eu  lieu  le  samedi  30  mai,  nous  avons  entendu  deux  lectures  fort  in- 
téressantes: l'une  sur  l'harmonie  de  la  pédale  considérée  au  point  de 
vue  scientifique  par  M.  P.  Serrier;  l'autre,  sur  les  chants  de  la  race  ca- 
birique  et  gallique  de  M.  Salvador  Daniel.  Basant  sa  démonstration  sur 
les  deux  nouvelles  lois  harmoniques  découvertes  par  le  comte  Camille 
Durutte,  c'est-à-dire  sur  la  loi  génératrice  des  accords  et  celle  de  leur 
enchaînement,  M.  P.  Serrier  a  vivement  intéressé  ses  auditeurs  en  leur 
signalant  plusieurs  faits  que  la  science  harmonique  a  été  impuissante  à 
expliquer  jusqu'alors  et  dont  il  a  fait  l'analyse  avec  toute  la  rigueur 
de  principes  des  sciences  exactes.  Dans  la  même  séance,  on  a  entendu 
également  un  joli  trio  pour  piano,  violon  et  violoncelle  par  M.  Imbert, 
exécuté  par  MM.  Poisot,  Magnin  et  Nathan,  et  un  0  salutaris  d'un  beau 
caractère  religieux  de  M.  P.  Serrier,  chanté  par  M.  G.  Brégy. 

»■**  M.  Ambroise  Thomas  est  de  retour  de  son  inspection  annuelle  des 
succursales  du  Conservatoire,  dans  le  Midi  de  la  France.   Un  banquet 


lui  a  été  offert  à  Marseille,  et  partout  le  célèbre  compositeur  a  rencon- 
tré le  plus  chaleureux  accueil. 

»*«  Un  beau  portrait  d'Aimé  Maillant,  photographié  par  Pierre  Petit, 
vient  de  paraître  chez  Brandus  et  Dufour;  il  fait  partie  de  leur  belle 
galerie  des  musiciens  célèbres. 

***  Mlle  Julia  Hispon,  la  débutante,  que  par  assonnanco,  sans  doute, 
on  avait  faite  compatriote  de  Mlle  Nilsson,  réclame  contre  cette  assertion. 
D'une  lettre  écrite  par  elle,  il  résulte  qu'elle  est  Francomloise,  née  à 
Besançon,  et  élève  de  MM.  Battaille  ot  VVartel. 

»*j  Nous  annonçons  l'arrivée  à  Paris  de  M.  Ugo-Errcra,  pianiste  dis- 
tingué et  compositeur  de  musique  de  Milan;  il  se  propose  de  donner 
ici  quelques  concerts. 

**i  M.  Sainte-Beuve  vient  d'adresser  à  M.  Paul  Foucher  une  lettre  des 
plus  flatteuses  au  sujet  du  charmant  livre  qu'a  récemment  publié  ce  der- 
nier sous  le  titre  de  :  Entre  cour  et  jardin. 

^%  L'assemblée  générale  annuelle  de  la  Société  des  auteurs,  composi- 
teurs et  éditeurs  de  musique,  aura  lieu  le  dimanche  li  juin,  à  une 
heure  précise,  dans  la  salle  du  Grand-Orient  de  France,  rue  Cadet,  16. 
MM.  les  sociétaires  sont  instamment  priés  d'assister  à  cette  réunion. 

,^**  Ant.  Rubinstein,  qui  enthousiasme  en  ce  moment  le  public  de 
Londres,  partira  prochainement  pour  New- York. 

^*^  La  musique  des  zouaves  de  la  garde  impériale,  de  retour  à  Paris 
du  camp  de  Saint-Maur,  fera  au'oud'hui  sa  rentrée  au  Pré-Catelan.  Le 
programme  du  concert,  composé  par  M.  Hemmerlé,  est  des  plus  brillants. 

ÉTRANGER 

jf*^  Londres.  —  Médée,  de  Chérubin  i ,  donnée  pour  la  première  fois  à 
Londres  en  1863.  vient  d'être  reprise  à  Drury-Lane  avec  Mlles  Tietjens 
et  Harris,  MM.  Santley  et  Mongini.  Ce  dernier  succède  à  Fraschini,  dont 
l'engagement  est  terminé.  —  Les  Huguenots  et  Fra  Diavolo  avec 
Mme  Lucca,  Uarta  avec  Mlle  Patli,  ont  défrayé  le  répertoire  de  la  se- 
maine à  Covent-Garden.  —  On  répète  activement  à  ce  théâtre  le  Domino 
noir,  avec  les  récits  ajoutés  par  Auber.  Cet  ouvrage  sera  chanté  par 
Mmes  Lucca,  Locatelli,  Tagliafico,  MM.  Mario,  Neri-Baraldi,  Tagliafico, 
Ciampi.  —  Alf.  Jaëll  et  sa  femme  ont  eu,  le  2  juin,  les  honneurs  de  la 
séance  à  la  Musical  Union,  où  ils  ont  exécuté  des  duos  de  Rubinstein  et 
de  Mendelssohn,  et  un  quatuor  de  Brahms.  —  La  jeune  violoniste  Thérèse 
Liebé  a  remporté  un  vrai  triomphe  à  la  soirée  musicale  annuelle  de  la 
Schubert  Society,  où  elle  a  joué  un  trio  de  Beethoven  et  deux  solos  de 
violon.  —  Tout  est  prêt  pour  le  grand  festival  triennal  de  Haendel,  qui 
commencera  au  Palais  de  Cristal  le  16  juin,  et  auquel  prendront  part 
quatre  mille  exécutants  ;  les  solistes  sont  Mmes  Tietjens ,  Nilsson ,  Lem- 
mens-Sherringlon ,  Kellogg,  Sain  ton-Dolby,  Carola,  MM.  Sims  Reeves, 
Santley,  etc. 

^%Bade. —  L'Ogre,  de  Mme  ViarJot,  dont  nous  avons  parlé  dans  notre 
précédent  numéro,  a  été  représenté  à  la  Villa  Tourguenief,  en  présence 
de  la  reine  de  Prusse  et  d'un  aristocratique  auditoire,  avec  un  très- 
grand  succès. 

^*^  Cologne.  —  Le  Voyage  en  Chine,  de  F.  Bazin,  vient  d'être  repré- 
senté pour  la  première  fois  et  a  fait  le  plus  grand  plaisir. 

,^*jf  Berlin.  —  Une  opérette  nouvelle  de  Ad.  L'Arronge,  Die  Herren 
Tertianer  (Messieure  les  élèves  de  troisième),  texte  de  Salingré,  a  été 
représentée  avec  un  succès  très-franc  au  Wallner-Theater.  —  Le  théâtre 
de  KroU,  qui  semble  vouloir  faire  de  durables  incursions  sur  le  domaine 
de  l'opéra,  a  inauguré  d'une  manière  très-heureuss  la  saison,  à  la 
Pentecôte,  avec  Marlha  et  Czar  et  CJiarpentier,  de  Lortzing. 

^*^  Leipzig. — Le  Roi  Manfred,  de  Cari  Reinecke,  le  directeur  de  notre 
Conservatoire  et  le  chef  d'orchestre  du  Gewandhaus,  a  été  donné  le  24 
mai,  et  a  réuni  tous  les  suffrages.  Cet  opéra,  qui  a  été  représenté  déjà 
l'année  dernière  à  Wiesbaden,  mais  qui  n'y  a  fait  qu'une  courte  appa- 
rition, avait  pour  Leipzig  tout  l'attrnit  d'une  nouveauté. 

^%  Vienne.  —  Le  fils  du  célèbre  Wachtel.  ténor  comme  son  père, 
vient  d'être  engagé  à  l'Opéra.  Mlle  Geistinger  a  pris  congé  du  public  le 
30  mai,  au  théâtre  An  der  Wien,  dans  la  Grande-Duchesse  de  Gérolstein, 
un  de  ses  meilleurs  rôles.  Un  nouvel  engagement  l'attache  pour  trois 
ans  à  cette  scène,  à  la  grande  satisfaction  de  ses  nombreux  fidèles. 

5^**  Prague.  —  On  a  repris  au  Théâtre-Allemand  un  opéra  de  Kittl, 
donné  avec  succès  en  1848,  les  Français  devant  Nice.  Le  libretto  est  de 
Richard  Wagner,  qui  l'avait  d'abord  écrit  pour  lui-même,  et  qui,  s'étant 
épris  bientôt  après  du  sujet  du  Tannhœuser,  céda  son  premier  travail  à 
Kittl,  alors  directeur  du  Conservatoire  de  Prague.  On  a  fait  à  cet  ou- 
vrage un  chaleureux  accueil. 

if*f,  Florence.  —  La  saison  s'est  brillamment  terminée  à  la  Pergola 
avec  Marta.  Au  théâtre  Alfieri,  le  Educande  di  Sorrento  (les  Pensionnaires 
de  Sorrente)  du  maestro  Usiglio ,  ont  eu  déjà  un  certain  nombre  de 
représentations  et  se  maintiennent  dans  la  faveur  du  public. 


184 


KKVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE  DE  FAKIS. 


CHKZ    G.     BRANDUS     ET    S.     DUFOUR,    ÉDITEURS,     103,    RUE    DE    RICHELIEU 


LES 


DRAGONS  DE  VILLARS 

Opéra-comique  en  trois  actes,  paroles  de  MM.  Lockroy  et  Cormon,  musique  de 

A.     MAILLART 


La  Partition  pour  Chant  et  Piano,  format  in-S",  net  :  15  fr. 

Ka  Partition  arrangée  pour  le  Piano  Henl,  format  ln-S°,  net  :  lO  fr. 

L'Ouverture 

Pour  le  Piano,  1  fr.  50.  —  A  quatre  mains,  9  fr.  —  Partition  et  Parties  d'orchestre.  —  Pour  musique  militaire. 


LES  AIRS  DE  CHANT  DETACHES 

ACTE    1". 

1 .  Chœur  :  v  Heureux  enfants  de  la  Provence.  » 3 

2.  Chanson  provençale   chantée  par  Mlle   Girard  : 

«  Biaise  qui  partait,  en  mer  s'en  allait.  » 4 

3.  Ariette   militaire   chantée  par  M.  Barré  :  a  Quand 

le  dragon  a  bien  trotté.  » 5 

3  bis.  La  même,  transposée  pour  ténor 5 

4.  Air  chanté  par  Mme  Galii-Marié  :  «  Maître  Thibaut,  vos 

mules  sont  charmantes.  » 6 

5.  Romance   chantée  par   M.    Lhérie  :  «  Ne  parle  pas. 

Rose,  je  t'en  supplie.  » 3 

5  bis.  La  même,  transposée  pour  baryton 3 

6.  Duo  chanté  par  Mme  Galli-Marié    et  M.   Barré  :  «  Al- 

lons, ma  chère,  allons,  voici  mon  verre.  » 9 

7.  Couplets   de   l'ermite  chantés  par  Mlle  Girard  : 

«  Grâce  à  ce  vilain  ermite.  » S 

Pour 
3 

8  bis.  La  même,  transposée  pour  ténor 3 


8.  Chanson  de  soldats  chantée  par  M.  Barré: 
séduire  une  fillette.   » 


AVEC  ACCOMPAGNEMENT  DE  PIANO  : 

ACTE   II. 

9 .  Villanelle  chantée  par  M.  Lhérie  :  «  Ah  !  tra  la,  ah  ! 
Ira  la.  » 

9  bis.  La  même,  transposée  pour  baryton,, 

10 .  Duo  chanté  par  Mme  Galli-Marié  et  M.  Lhérie  :  «  Moi 
jolie ,  moi  jolie?  » 

H  .  Trio  chanté  par  Mraes  Galli-Marié,  Girard  et  M.  Barré: 
«  C'est  là,  c'est  là,  voilà.  » 

12.  Prière  :  «  Soutien  de  l'innocent.  » 

ACTE  ni. 

13.  Chœur  :  «  Vous  savez  la  nouvelle.  » 

14.  Chanson  à  boire  chantée  par  M.  Barré  :  «  Le  sage 
qui  s'éveille.  » 

1 1  bis.  La  même,  transposée  pour  ténor 

15.  Air  chanté  par   Mme   Galli-Marié:   «  Il  m'aime,    il 
m'aime,  espoir  charmant.  » 

16.  Cantabile  chanté   par  Mme  Galli-Marié:  «  Il  m'ac- 
cuse, il  me  croit  coupable.  » 

17.  Chœur  final  :   «  Sonne,  sonne  toujours.  » 


4  » 

4  B 

9  » 

9  » 

6  » 

3  » 

5  » 

5  » 

6  » 

3  » 

3  u 


ARRANGEMENTS  NOU"VEAUX  POUR  LE  PIANO  : 
CRAMER.  Bouquet  de  mélodies  i  DUVERNOY.  Fantaisie  de  salon 

Mosaïque  pour  le  Piano.  I  Pour  le  Piano. 

E.   KETTERER.  Fantaisie  brillante  pour  le  piano. 
STRAUSS.  Grand  quadrille  1  BURGMULLER.  Valse  de  salon 

Pour  le  Piano  et  à  quatre  mains,  prix  :  4  fr.  50.  '  Arrangée  pour  Piano  à  quatre  mains. 

MORCEAUX    DIVERS    POUR    LE    PIANO: 


F.  BDRGiniLER.  Valse  de  salon 5    » 

lARC  BDRTY.  Mémento 7  30 

A.  CROISEZ.  Fantaisie  élégante 6    » 

A.  GORIA.  Fantaisie  de  salon 9    » 

LE  CARPENTIER.  Bagatelle 5    » 

AL.  lONGDEVIllE.  Fantaisie  brillante.  6    » 


RDMIBEI.  Fantaisie 6    » 

—  Amusement  très-facile 4  50 

—  Duo  à  quatre  mains 6    » 

H.  VA1I(|DET.  Morceau  très-facile...  2  50 

—  Petite  fantaisie  militaire ....  5    » 

—  Duo  facile  à  quatre  mains . .  5    » 


ED.  SNYDERS.  Petite  fantaisie 6    » 

ED.  WOIFF.  Fantaisie  facile 4  50 

—     Duo  brillant 9    » 

ED  HERMAN.  Mosaïque   pour  violon 

et  piano 9    » 

COLTNS.  Fantaisie  p.  violon  et  piano  9    » 


MUSIQUE  DE  DANSE  : 

Ettling.  Suite  de  Valses,  5  fr.  —  Musard.  Quadrille  pour  Piano  et  à  quatre  mains,  4  fr.  50.  —  Talexy.  Polka-Mazurka,  5  fr. 

"Valiquet.  Quadrille  facile,  4  fr.  50.  —  Gaston  de  Lille.  Polka,  4  fr.  —  Marx.  Schottisch,  4  fr. 

Eies  Aira  arrangés  poar  Violon,  pour  Flâte,  pour  Cornet  et  ponr  deux  Flûtes. 

Deux  Mosaïques  et  un  Pas  redoublé  pour  Musique  militaire,  par  d'.\LLEE. 


Edition  Populaire.  Sous  Presse  :  Edition  Populaire. 

La  Partition,  paroles  et  musique,  sans  accompagnement,  et  avec  analyse  de  la  pièce,  format  de  poche,  prix  net  :  3  fr. 


IMPBIHEBIE  CEHTBALE  DE«  CBEHINS  DE  FBB.  —  A.  CHAIX  ET  I 


:  bEBGEHL,  'iO,  A  PABIS. 


BUREAUX    A    PARIS  :    BOULEVARD   DES    ITALIENS.  1. 


3S'  Année. 


N*  24. 


14  Juin  \m. 


ON  S'ABONNE  : 

Dans  les  Déportement»  et  û  l'Étront^rr, 

chez  tous  les  Uarchands  de  Musique,  Ui  Lilirairci, 

et  aux  Sureaux  def  Messageries  et  des  Postes. 


-^=  s-=î>'«3flÉ3S:'^S-Jx 


REVUE 


PRIX   DE    L'ABONNEMENT: 

Poris. 24  r.paran 

Départements,  Belgiqae  et  Suisse...,    30  •       id. 


Le  Journal  parait  le  Dimancho. 


DE     PARIS 


SOMMAIRE.  —  La  Musique,  le  Théâtre  et  la  Danse  à  l'Exposition  des  Beaux- 
Arts,  par  Em.  HatlilKa  de  Hanter.  —  Entrefilets.  —  Revue  dea  théâ- 
tre», par  D.  A.  D.  linint-Yies.  —  Entrefilets.  —  Concerts  et  auditions 
musicales  de  la  semaine.  —  Nouvelles  des  théâtres  lyriques.  —  Nouvelles  di- 
verses. —  Annonces. 


LA  nUSIQUE.  LE  THÉÂTRE  ET  LA  DARSE 

A    L'EXPOSITION     DES    BEAUX-ARTS. 
Salon    de    1868. 

Huit  jours  encore,  et  elle  aura  vécu,  cette  Exposition  que  chaque 
année  ramène  et  qui  ramène  chaque  année,  avec  une  touchante 
exactitude,  dans  le  discours  administratif  d'usage,  l'inévitable  qua- 
lification de  «  sanctuaire  oîi  le  goût  s'épure  au  contact  du  beau.  » 
Avant  que  la  direction  des  Beaux-Arts,  de  concert  en  cela  avec 
l'indifférence  publique ,  ne  ferme  les  portes  de  ce  «  sanctuaire  » 
où  plus  de  quatre  mille  statues,  toiles,  dessins,  émaux  et  médailles 
viennent  d'être  exposés  deux  mois  durant  à  une  température  séné- 
galienne  et  à  l'ardeur  de  la  critique,  je  dois  me  hâter,  sans  cher- 
cher le  moins  du  monde  querelle  à  la  couleur  ou  à  la  ligne,  sans 
vouloir  rattacher,  par  l'antithèse  et  le  parallèle,  la  peinture  à  la 
musique  et  démontrer,  avec  M.  de  Lamartine  «  que  la  peinture 
est  la  musique  des  yeux,  de  même  que  la  musique  est  la  peinture 
des  oreilles,  »  je  dois  me  hâter  de  faire  une  visite  rapide  aux  tra- 
vaux qui  sont  du  domaine  de  la  Musique,  qui  la  mettent  en  scène 
dans  ses  allégories,  dans  sa  légende,  dans  sa  philosophie,  dans  son 
histoire  et  son  action.  Ce  sera ,  s'il  vous  plaît ,  une  visite  amicale 
et  de  celles  où  la  causerie  allant  à  l'aventure  et  le  nez  au  vent, 
ainsi  qu'un  promeneur  dans  un  musée,  ne  s'arrête  qu'aux  choses 
qui  l'intéressent  et  revient  vite  par  un  coin  plus  ou  moins  vif  sur 
les  sujets  déjà  traités.  L'idée  première  de  ce  Salon  musical  appar- 
tient à  la  Revue  et  Gazette  musicale ,  et  ce  n'est  pas  sans  un  cer- 
tain plaisir  que  nous  le  continuons,  depuis  1863,  trouvant  la  rai- 
son de  son  opportunité ,  de  son  intérêt  dans  les  imitations  de  nos 
confrères  de  la  presse  musicale ,  et  dans  les  avances  que  fait  de- 
puis quelque  temps  à  l'art  musical  la  critique  spéciale  des  arts 


graphiques.  On  a  écrit  tout  récemment  que  le  paysage  était  ce  qu'il 
y  avait  de  plus  musical  en  peinture.  Cette  nouvelle  esthétique  a 
du  bon.  Le  paysage  et  la  mélodie  s'appellent,  s'animent  mutuelle- 
ment et  se  complètent.  Ne  sont-ils  pas,  l'un  et  l'autre,  un  langage 
que  chacun  de  nous  traduit  selon  ses  émotions?  Seulement,  en 
peinture  comme  en  musique,  on  ne  voit  et  on  n'entend  bien 
qu'après  une  longue  éducation  ;  on  ne  sent  vivement  les  Maîtres 
que  par  sympathie  de  tempérament,  par  parenté  intellectuelle. 


Un  bon  tableau  n'est  pas  une  invention  arbitraire  ou  folâtre; 
c'est  une  intensité  du  vrai  ou  tout  au  moins  du  vraisemblable,  et 
sans  la  moindre  affectation.  Les  tableaux  généralement  compris  et 
aimés  à  présent  sont  le  trompe-l'ceil  des  banalités  que  le  public  a 
chaque  jour  sous  les  yeux;  le  miroir  de  la  mode,  du  caprice,  des 
ridicules  du  temps;  l'incarnation  d'un  certain  joli  sentimental, 
maniéré,  un  peu  niais,  comme  qui  dirait  les  Amandas  des  cou- 
lisses et  les  Désirées  de  la  classe  de  Mme  Taglioni.  Ce  qu'il  faut  à 
la  vente,  aux  débouchés,  ce  sont  des  muses  de  l'Acropole  Bréda, 
des  petits  piiférares  accroupis  sous  les  portes  des  hôtels  ou  cou- 
rant après  les  voitures  des  Champs-Elysées,  des  zingarelles  d'opéra- 
comique  qui  rêvent  en  claquant  leurs  castagnettes  de  se  faire  enle- 
ver par  un  banquier.  Et  tandis  qu'en  musique  on  raffine  et  subtilise 
à  l'excès  le  travail  de  l'orchestration ,  la  peinture ,  elle ,  par  des 
effets  sans  mystère  et  sans  équivoque,  évite  au  spectateur  toute 
surprise ,  toute  fatigue ,  toute  inquiétude  ;  elle  lui  fait  voir  d'un 
coup  d'œil  sur  la  toile  tout  ce  qui  s'y  trouve  ou  peut  s'y  trouver. 
Elle  redoute  de  montrer  du  caractère,  de  peur  d'être  taxée  de  sau- 
vagei'ie;  elle  évite  la  grandeur  qu'on  pourrait  prendre  pour  de 
l'exagération;  elle  se  garde  bien  d'avoir  de  l'originalité,  afin  de  ne 
pas  prêter  au  soupçon  de  folie. 

Fils  du  cœur,  de  l'inspiration  naïve,  6  grand  Art!  inaccessible 
au  mensonge,  les  historiographes  du  Salon  de  cette  année  n'ont 
point  eu  besoin  de  placer  leurs  travaux  sous  ton  austère  invoca- 
tion! Vous  n'avez  pas  été  les  divinités  secourables  de  l'Exhibition 
artistique  de  1868,  ô  muses  de  l'Harmonie  et  de  la  Poésie l  nobles 
cariatides  créées  par  le  robuste  ciseau  de  Cordier,  pour  soutenir 
la  cheminée  monumentale  du  foyer  du  nouvel  Opéra!  La  Melpo- 
mène  du  camée  de  Heller,  la  muse  qui  personnifie  la  trinité  Art, 


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REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


Lutte  et  Douleur,  VEuterpe  de  Révillon,  les  Séraphins  et  les  Cons- 
tfllations  du  grand  orchestre  de  l'Empyrée,  n'ont  rien  à  voir  non 
plus  dans  ce  congrès  tumultueux  de  travaux  où  les  œuvres  sont  si 
rares.  C'est  encore  moins  à  la  Sainte  Cécile  dessinée,  d'après  Ra- 
phaël, par  M.  Bellay,  ou  à  la  Sainte  Cécile  et  Valérien  de  51.  De- 
vriendt,  refusant  l'union  d'un  patricien  jeune,  glorieux  et  riche, 
pour  se  consacrer  tout  entière,  cantantibus  organis,  au  culte  de 
Dieu  et  à  l'amour  des  harmonies  célestes ,  qu'il  serait  décent  de 
confier  la  présidence  de  galeries  où  s'étale  en  sa  luxuriante  nu- 
dité la  Femme  couchée  de  Lefebvre,  et  le  long  desquelles  une  foule 
de  petite^  drôle^ses,  adoyablement  jolies  et  galamment  attifées,  ne 
dissimulent  rien  de  leurs  agrénaents  aux  amateurs  ravis.  Non!  Les 
dieux  de  la  maison,  les  voici  bien  plutôt  :  c'est  cette  Terpsichore 
qui  s'enlève,  gmcieuse  et  diaphane,  dans  le  panneau  décoratif  de 
M.  rdUasson;  c'est  ce  Bacchus  inventant  la  Comédie,  dont  la  tête 
efféminée'  sourit  à  un  masque  comique;  ce  sont  ces  petits /Imows 
musiciens  fixés  par  Mlle  Hugard  sur  une  faïence  aux  tons  ruti- 
lants; c'est  aussi  celte  Muse  comique  de  M.  Chatrousse,  qui  ra- 
chète le  galbe  lourd  et  commun  de  ses  bras  par  une  tête  adorable 
d'esprit  et  de  finesse,  et  par  des  draperies  ajustées  avec  un  art 
exquis. 

Sous  les  yeux  de  ces  allégories,  dans  des  bosquets  délicieux, 
baignés  de  lueurs  insaisissables  et  bleuâtres,  sur  des  terrasses 
qu'empourprele soleil  couchant  (la  Sieste  d'Ahna-ïadéma),  de  belles 
nymphes,  en  costume  de  l'âge  d'or,  font  de  la  musique  avec  des 
demi-dieux  blonds  et  élancés,  avec  d'imposants  vieillards,  sans 
craindre  les  inclémences  du  ciel  et  du  code.  Le  beau  pays  que  ce 
pays  de  l'idéal  !  Et  comme  il  est  permis  d'envier  le  sort  de  ces 
joueurs  de  flûte  et  de  lyre  qui  se  promènent  gravement  dans  des 
paysages  impossibles.  A  leur  vue,  on  s'écrierait  volontiers,  comme 
Martial  :  «  Ah!  que  n'ai-je  un  petit  foyer,  un  toit  simple,  une 
source  vive  auprès  et  l'herbe  de  la  prairie:  et  avec  cela  un  do- 
mestique bien  nourri,  une  flûte  sans  défauts,  une  femme  qui  ne 
soit  pas  trop  savante;  la  nuit  du  sommeil  et  le  jour  point  de 
procès  I  »  C'est  ainsi  que  tous  ces  beaux  paysages  affirment  eux- 
mêmes  et  par  eux-mêmes  le  caractère  musical  qu'on  attribue  ingé- 
nieusement aux  matutinales  senteurs,  aux  buées  ensoleillées,  aux 
larges  horizons.  N'engagent-ils  pas  à  échapper  à  cette  vie  des 
grandes  villes  qui  dissipe,  qui  dessèche  le  cœur,  qui  inocule  de 
continuelles  irritations  d'amour-propre,  l'habitude  ou  la  crainte  de 
la  raillerie,  toutes  choses  contraires  au  véritable  enthousiasme,  au 
culte  fidèle  de  l'harmonie?  Cet  argument  paraîtra  victorieux  à 
tout  musicien  convaincu,  car  si  l'on  résiste  à  ce  qui  impose,  on 
cède  toujours  à  ce  qui  inspire. 


L'histoire  musicale  a  fourni  au  Salon  un  certain  nombre  de  toiles. 
Satomé  danse  devant  Hérode  avec  un  jeu  de  hanches  des  plus  en- 
gageants. En  regard  de  cette  chorégraphie  un  peu  bien  moderne 
pour  un  sujet  biblique,  Guy  d'Arezzo  enseigne  la  musique  à  ses 
élèves,  avec  cette  persévérance  que  l'on  peut  apprécier  au  Salon 
de  chaque  année  et  qui  aurait  dû,  ce  me  semble,  produire  chez 
M.  Claudius  Jacquand  des  résultats  moins  secs  et  moins  froids. 
M.  Leygue  nous  montre,  d'un  pinceau  savant  et  coloriste, 
Charles  VI  distrait  de  sa  folie  par  Odette,  dans  la  scène  qui  a 
inspiré  à  Halévy  une  de  ses  pages  les  plus  dramatiques.  Avec 
M.  Vallot  et  sa  petite  toile  chatoyante  où  la  lumière  s'accroche  en 
réveillons  joyeux,  nous  assistons,  en  plein  parvis  Notre-Dame,  à 
la  Répétition  d'un  mystère  au,  moyen  âge.  Lulli  enfant,  aide  de  cui- 
sine, joue  du  violon  devant  les  marmitons  et  les  femmes  de 
chambre  de  la  grande  Mademoiselle,  qui  voulut  l'applaudir  et  qui 
fit  sa  fortune.  Dix  pas  plus  loin  vous  entendrez  Vadé  à  la  Halle, 
humant  doctoralement  un  piot  de  jinglet,  chanter  le  «  beau  pin- 


ceau qui  enlumine  la  trogne,  »  et  débiter  les  versets  et  répons  du 
catéchisme  poissard. 

* 

*  * 
Parmi  les  sujets  empruntés  au  théâtre  et  à  la  littérature  dra- 
matique, je  citerai  plusieurs  Faust  et  Marguerite,  escortés  de  l'éter- 
nel Méphisto  et  de  son  «rictus  fatal;  »  —  deux  Mignon,  au  moins, 
exécutant  la  Danse  des  Œufs,  celle  surtout  cataloguée  à  la  sculp- 
ture sous  le  n°  3627  :  les  jambes,  un  peu  grêles,  sont  d'une  pureté 
de  ligues  irréprochable;  la  gorge  naissante  se  modèle  chastement  sous 
une  tunique  à  br.mdebourgs  ;  les  mains  sont  finement  traitées  ;  c'est 
grand  dommage  que  la  tête  soit  vulgaire  et  d'un  mouvement  forcé; 

—  plusieurs  Ophélia,  généralement  verdâtres,  naviguant  sur  le 
dos,  avec  un  peu  de  paille  et  quelques  bluets  dans  les  cheveux, 
tout   le   long,   le  long  d'Alphand's-River,  au  pays  de  Boulogne; 

—  une  improvisation  batoque  "à  propos  du  ballet  dé  ta  Source. 
Qu'a  donc  fait  Mlle  Fiocre  à  M.  de  Gas  pour  être  ainsi  traitée? 
Les  opéras  de  Gounod  et  d'Ambroise  Thomas  ont  donc  eu  comme 
leur  reflet  du  Salon,  et  ils  ont  exercé  une  influence  évidente  sur 
le  choix  des  sujets.  Je  mentionnerai  encore  de  fort  jolies  scènes 
de  la  Comédie  italienne  et  du  Mariage  de  Figaro  (M.  Caraud);  le 
Souper  des  comédiens  au  château  de  Sigognac,  qui  rend  spirituelle- 
ment une  des  pages  les  plus  pittoresques  du  Capitaine  Fracasse 
de  Th.   Gautier  :  la  peinture  lui  devait  bien  cet  hommage  !  — 

—  Un  Conseiller  Krespel  entouré  de  violons  aussi  insensés  que  lui  ; 

—  et  deux  grandes  machines  de  M.  Hipp.  Debon,  qui,  sous  pré- 
texte de  peindre  l'elfroi  causé  à  Londres,  dans  une  loge  de  théâtre, 
au  siècle  dernier,  par  un  drame  de  Shakspeare,  et  la  joie  provo- 
quée à  Paris  par  une  comédie  de  Molière,  se  livrent  à  une  débauche 
de  couleur,  à  un  fouillis  de  dentelles,  d'ors  et  de  soie,  à  une 
exubérance  de  chairs  tout  à  fait  comique.  Au  domaine  dramatique 
reviennent  encore  les  épures  représentant  le  Théâtre  en  construc- 
tion à  Reims  et  les  Projets  de  salles  de  spectacle  pour  Alençon  et 
Tours.  Ces  plans  accusent  le  pastiche,  une  imitation  confuse  et 
entre-croisée  des  différentes  époques,  des  différentes  manières 
antérieures,  jointe  à  l'emploi  des  innovations  anglo-américaines 
si  fort  de  mode.  Il  n'y  a  plus  là  que  la  forme,  l'utilitarisme;  la 
pensée  est  absente  ou  sacrifiée. 

* 
*  * 

L'Exposition  a  beaucoup  emprunté  au  chant  et  aux  instruments, 
et  les  instruments  et  le  chant  lui  ont  beaucoup  rendu.  Les 
Slrénades  ne  chôment  point;  les  Trouvères  piquent  çà  et  là  les 
murailles  de  leurs  pantalons  collants  jaunes  et  rouges  ;  il  y  a  des 
Lutrins  où  des  chantres  de  village  tournent  la...  bouche  d'une 
façon  réjouissante,  des  Sacristies  dont  le  vitrail  tremble  à  la  for- 
midable sonorité  d'un  serpent  tout  neuf;  des  Leçons  de  chant  des- 
quelles  s'échappent  les  voix  perçantes  de  ces  bons  gi'os  moutards, 
blonds  et  i-oses,  sérieux  comme  des  cardinaux,  dont  ils  ont  l'é- 
clatante soutanelle.  Il  y  a  aussi  des  Points  d'orgue  que  de  jeunes 
mariés  brodent  de  vocalises  sentimentales  ;  des  Duo,  ou  Amour 
n'a  pas  été  remplacé  par  Tambour,  chantés  par  de  jeunes  Agnès 
qui  joueront  bientôt  les  Célimène;  des  Parties  de  musique,  une 
Causerie  musicale  à  désirer  que  la  mélodie  soit  aussi  séduisante  que 
le  tableau;  un  chanteur  haut  cravaté,  en  habit  vert-pomme,  la 
main  sur  le  cœur,  qui  roucoule  la  romance  à  la  mode  au  milieu 
d'un  salon  d'incroyables  et  de  déités  de  l'an  IV  :  sujet  bien  com- 
posé, bien  peint,  de  tous  points  réussi.  —  Comme  chaque  année 
je  retrouve  la  femme  corse  entonnant  sur  le  cadavre  de  son  mari, 
tué  dans  les  maquis,  le  Vocero,  lugubre  et  monotone  mélopée, 
dont  les  strophes  entrecoupées  de  sanglots  sont  presque  chu- 
chottées  à  l'oreille  du  mort.  Tel  est  à  peu  près  le  bilan  du  chant. 
Je  m'étonne  qu'il  ne  soit  pas  encore  venu  à  l'idée  d'un  peintre  de 
genre  de  brosser  un  Orphéon  attaquant  un  chœur  de  Laurent  de 


[(K  PAIUS. 


187 


Rillé  ou  de  Monestier,  d'Avignon,  devant  un  jury  prfoidé  par 
mon  excellent  collaborateur  A.  Elwart.  Quel  plus  digne  sujet  à 
mettre  en  peinture  ! 

Si  de  la  partie  vocale  nous  passons  à  l'instrumentale,  que  de 
toiles,  de  statues,  de  dessins  ne  rencontrons-nous  pas  !  La  flûte, 
rien  (|ue  la  flûte,  est  plus  de  cent  fois  représentée.  Je  me  bor- 
nerai à  signaler  le  mérite  du  Faune  de  M.  Combarieu,  du  Pecoruro 
(Delaplanclic),  du  Zampognaro  de  Moreau-Vautliier.  Dans  ces 
œuvres,  d'un  sentiment  heureux  et  d'une  exécution  soignée,  la 
sculpture  se  montre  bien  supérieure  à  la  peinture.  Les  instru- 
ments, la  danse,  servent  heureusement  et  exclusivement  les  tail- 
leurs d'images  en  dotant  leurs  œuvres  de  l'animation  de  la  vie. 
Le  piano  a  rencontré  dans  M.  Artz  un  artiste  minutieux  et  léclJé 
comme  un  Hollandais.  M.  Honoré  Capoul,  le  frère  du  ténor,  me 
dit-on,  n'y  est  pas  allé  de  main  morte  dans  la  réalisation  de  son 
Musicien  au  violoncelle  :  sur  les  plats  de  cette  basse,  sur  le  gilet 
de  ce  virtuose,  semblent  se  concentrer  et  rejaillir  tous  les  rayons 
du  bel  soleou  toulousain  Quant  au  violon,  à  la  mandoline,  à  la  mu- 
sette auvergnate,  voire  même  à  l'accordéon  bourgeois,  ils  sont  l'or- 
nement de  toiles  plus  nombreuses,  il  est  vrai,  que  remarquables. 
Je  ne  sais  rien  d'aussi  tristement  boufi"on  que  cette  femme  maigre 
coiff"ée  à  la  chinoise,  vêtue  d'un  long  peignoir  jaune,  juchée  sur 
l'étroit  balcon  d'un  sixième  étage  et  pinçant  de  la  guitare,  et 
chantant  à  tue-tête,  en  plein  midi,  tandis  que  dans  la  rue  doit 
passer  l'omnibus  de  Charenton  à  Saint-Philippe-du-Roule. 
Mlle  d'Aure  fait  sa  partie  dans  le  charivari  avec  un  tambour  de 
basque  et  des  castagnettes;  mais  quelles  castagnettes,  aussi!  et  le 
beau  tambour,  mon  Dieu  !  Je  suis  encore  à  me  demander  pour- 
quoi le  premier  violon  du  Quatuor  dans  un  atelier  de  peintre,  — 
en  voilà  des  gaillards  qui  doivent  joliment  arranger  les  adagios 
classiques  et  les  oreilles  de  leurs  voisins  !  —  porte  l'uniforme  de 
dragon  bavarois?  A  côté  de  ces  aimables  plaisanteries,  le  Festival 
au  château  de  M.  Lepoitevin  mérite  une  mention  particulière  et 
de  justes  éloges. 

Alertes,  nombreux,  campés  fièrement  ou  courbés  sans  bassesse, 
Drapant  leur  gueuserie  avec  leur  arrogance, 

ils  sont  revenus  à  l'Exposition  des  Beaux-Arts,  ces  bohémiens,  ces 
nomades  au  pied  légei',  virtuoses  du  carrefour  et  du  grand  che- 
min, dont  les  Salons  précédents  nous  avaient  déjà  amplement  ré- 
vélé la  poésie  vagabonde.  Il  y  en  a  tant  que  je  renonce  même  à 
dénombrer  ces  sujets  faciles,  facilement  traités  par  MM.  Brunet- 
Houard,  Cordier,  Carloni,  Dubouloz,  Grigoresko,  Loir,  Maurin, 
Salles,  etc.,  etc.  On  retrouve  là  tous  ces  agaçants  lazzaroni  de  la 
Basilicate  ou  de  la  Sabine  qui  semblent  nés  pour  écorcher  Verdi 
sur  des  violons  étiques  et  user  les  uniformes  des  lycéens  français. 
Que  voulez-vous?  Au  dire  de  Rabelais,  un  bateleur,  un  mulet  avec 
ses  cymbales,  un  violeur  au  milieu  d'un  carrefour,  assemblera 
toujours  plus  de  gens  que  ne  ferait  un  bon  prêcheur  évangélique. 
Ce  goùt-là  a  progressé.  N'importe!  Sur  le  front  de  ces  pauvres  en- 
fants de  l'Italie,  de  la  terre  patricienne  entre  toutes,  et  sur  leur 
visage  hâlé  on  retrouve  le  signe  mystérieux  des  races  aristocrati- 
ques supérieures  au  malheur  et  à  la  misère.  Cette  noblesse  est 
d'autant  plus  frappante  que  l'éducation  n'a  rien  fait  pour  elle, 
qu'elle  n'est  pas  le  produit  lentement  distillé  de  la  civilisation, 
mais  le  fruit  spontané  d'un  sol  vigoureux.  Je  quitte  ces  brunes 
ragazza  que  le  n°  584  nous  montre  souriant  d'aise,  mangeant  des 
oranges  au  soleil  de  Naples,  et  le  n°  S85,  hâves,  déguenillées, 
naufragées  dans  les  boues  de  Paris  pour  courir  aux  Bohémiens 
hongrois  étudiant  des  airs  nationaux,  de  Jean  Grundt.  Têtes  hir- 
sutes et  bronzées,  yeux  ardents,  physionomies  d'oiseaux  de  proie, 
ce  sont  bien  là  les  étranges  virtuoses  qui,  l'année  dernière,  entraî- 


naient les  visilours  de  l'Exposition  dans  le  rliythme  de  leurs  fié- 
vreuses czadas. 


Au  libre  royaume  de  la  Danse,  nombreuse  et  brillante  compa- 
gnie. La  Poésie  de  la  Danse  toutefois,  statue  de  M.  Courtet, 
manque  essentiellement  de  charme  et  d'entrain  :  modelé  sec,  tête 
fi'oide,  draperies  lourdes.  Combien  je  préfère  à  ce  plâtre  le  Sal- 
timbanque demandant  son  salaire,  de  Délaye,  ou  le  gracieux  Tircis 
de  Bardry.  La  Gitana  dansant  ne  manque  pas  de  caractère.  Une 
Danse  chez  les  Cerdans  est  un  tableau  médiocre,  mais  habilement 
composé.  La  Leçon  de  danse  au  village  réunit  toutes  les  qualités  de 
sentiment  et  d'expression  de  l'école  de  Dusseldorff.  Dans  la  salle 
basse  d'un  chalet  de  la  forêt  Noire,  le  ménétrier  du  village,  violon 
en  main,  inculque  les  premiers  préceptes  de  la  contredanse  à  de 
belles  filles  en  jupes  courtes.  Elles  sont  là,  bien  campées,  les  pieds 
en  équerre,  robustes  et  rougissantes  sous  l'œil  de  quatre  ou  cinq 
vigoureux  montagnards  qui  fument  et  boivent  de  la  bière.  Les 
mamans  s'intéressent  vivement  aux  grâces  naïves  de  leur  progéni- 
ture; les  petites  sœurs  rient  entre  elles  de  la  gaucherie  de  leurs 
aînées;  dans  un  coin,  des  gamins  regardent,  s'étonnent  et  sem- 
blent rêver  déjà  à  l'inconnu.  Avec  M.  Viger  et  par  la  vertu  de  sa 
palette  magique,  nous  voici  de  cette  chorégraphie  champêtre  re- 
venu à  la  danse  savante  des  salons  d'autrefois,  et  des  montagnes 
de  la  Hardt  lejeté  au  cœur  de  la  Chaussée-d'Antin.  Vestris,  le  diou 
de  la  danse,  fait  répéter  à  Mme  Récamier  un  Pas  de  gavotte  qu'elle 
doit  danser  le  lendemain  avec  lady  Georgiana ,  dans  un  bal  chez 
la  duchesse  de  Gordon  :  la  leçon  est  donnée,  détail  curieux!  au 
son  de  la  harpe  et  du  cor.  Cette  toile,  dont  le  sujet  et  les  détails 
sont  empruntés  à  Mme  de  Staël,  est  d'un  fini  et  d'un  effet  éton- 
nants :  c'est  bien  certainement,  à  mon  avis,  le  morceau  capital  de 
la  peinture  de  genre  (car  je  n'y  veux  pas  voir  de  l'histoire)  du 
Salon  de  cette  année. 

Quant  aux  portraits  et  à  ceux  du  monde  du  théâtre  et  de  la 
musique,  en  particulier,  leurs  qualités  négatives  n'ont  droit  qu'à 
la  simple  mention  de  leurs  étiquettes,  sans  autres  commentaire: 
Cherubini,  Rossini;  puis  Adelina  Paiti,  Mme  Gueymard  en  faïence 
(étrange  idée!),  Chevillard,  Capoul,  Mme  la  baronne  de  Maistre, 
Mmes  Viardot,  Emilie  Dubois,  Jouassin,  Mlle  Favart,  etc.  Je  ne 
sais  trop  pourquoi  Mme  Âstoud-Trolley  a  donné  une  expressioii 
satanique  à  son  médaillon  en  bronze,  d'ailleurs  puissamment  mo- 
delé, de  Beethoven?  Le  buste  de  Berlioz  par  M.  Perraud  est  em- 
pâté; ce  n'est  pas  la  finesse  de  profil  de  cette  tête  médullaire; 
l'expression  est  trop  concentrée  ;  et  puis,  je  n'ai  jamais  connu  au 
maître  ces  cheveux  semblables  à  des  plumes  d'autruche.  M. 
Bernhardt  Sax  a  exposé  un  Liszt  ressemblant,  mais  d'une  exécu- 
tion beaucoup  trop  lâchée.  Au  numéro  3400  je  me  suis  heurté  à 
un  Ponsard  poncif  qui  fait  une  singulière  mine  à  côté  du  médail- 
lon plus  grand  que  nature  de  Georges  Hainl,  par  Auguste  Poi- 
tevin. La  crinière  au  vent,  la  narine  frémissante,  l'œil  domina- 
teur, le  front  chargé  de  pensées,  fulgurant,  héroïque,  avec  quel- 
que chose  de  léonin  et  de  rêveur,  tel  je  vous  présente  le  chef  d'or- 
chestre de  l'Académie  impériale  de  musique  et  des  concerts  du 
Conservatoire  ! 

*    * 

Cette  année-ci  encore ,  la  musique  aura  porté  bonheur  à  la 
peinture.  Dans  l'ensemble  général  du  Salon,  les  statues  et  les  toiles 
qui  ont  emprunté  leurs  sujets  à  notre  Art  ne  sont  ni  les  moin^ 
intéressantes,  ni  les  moins  réussies.  Au  surplus,  après  les  réserves 
que  j'ai  faites  en  commençant,  je  n'éprouve  aucun  embarras  à  re- 
connaître l'ingéniosité  de  conception ,  l'habileté  d'ébauchoir  et  de 
pinceau  des  artistes  contemporains.  Même  faire,  du  reste,  au  camp 


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REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


des  harmonistes  modernes.  Sachons  donc  attendre.  N'allons  pas, 
dans  l'excès  de  nos  impatiences,  nous  faire  plus  pauvres  que  nous 
ne  sommes  et  méconnaître  injustement  nos  richesses.  Notre  école 
de  jeunes  peintres  comme  notre  école  de  jeunes  compositeurs  pos- 
sède à  un  éminent  degré  le  génie  de  l'observation,  la  vérité  et  la 
puissance  de  la  couleur,  le  secret  des  lumineuses  transparences; 
elle  a  le  charme,  le  sourire,  l'émotion  aussi  :  ne  nous  plaignons 
pas  ;  sachons  attendre. 

Il  est  des  fruits, —  et  ce  sont  ceux  de  l'imagination  et  delà  fleur 
de  l'âme,  —  qui  ne  se  cueillent  bien  qu'à  l'heure  unique  et  dé- 
sirée. Laissez  passer  la  saison,  allez  vous  figurer  qu'ainsi,  selon  le 
vieux  précepte,  vous  leur  permettrez  de  mieux  mûrir  et  que  vous 
saurez  les  perfectionner  en  les  retardant  :  erreur  et  oubli  de  la 
fuite  rapide  des  Heures,  de  ces  Heures  qui  s'appellent  aussi  les 
Grâces!  Vous  aurez  peut-être  d'autres  fruits,  mais  vous  n'aurez 
plus  les  mêmes,  et  si  ce  sont  ceux  d'autrefois  que  vous  voulez 
après  coup  cueillir,  ils  n'auront  jamais  plus  pour  vous  ni  pour 
d'autres  leur  duvet,  leur  saveur  et  leur  parfum.  Il  y  a  beaucoup, 
il  n'y  a  presque  que  de  ces  fruits  hâtifs  au  Salon  de  cette  année  : 
c'est  la  raison,  l'excuse  et  peut-être  aussi  l'honneur  de  sa  fai- 
blesse. Il  faut  espérer  beaucoup  et  quand  même  d'une  activité  si 
grande,  d'une  telle  fécondité,  même  lorsqu'elles  vont  jusqu'à  la 
turbulence  et  à  la  prodigalité  maladroite, dans  un  pays  qui  sait  re- 
trouver des  ressources  parmi  ses  inconvénients,  et  qui  est  ramené 
toujours  par  ses  défauts  mêmes  à  ses  qualités  essentielles,  netteté, 
esprit  et  goût:  —  une  tête  qui  pense,  une  beauté  qui  rayonne I 
Em.  Mathieu  UE  MONTER. 


A  propos  des  griefs  formulés  contre  la  direction  du  théâtre  de 
rOpéra-Comique  dans  la  dernière  Assemblée  générale  de  la  Société 
des  autours  et  compositeurs  dramatiques,  on  lit  dans  le  feuilleton 
du  Conslilulionnel,  sous  la  signature  de  Nestor  Roqueplan  : 


»  Vers  le  milieu  de  la  séance,  plusieurs  compositeurs  ont  pris  la  pa- 
role et  ont  demandé  que  l'on  rappelât  au  directeur  de  l'Opéra-Comique 
l'obligation  à  lui  imposée  par  son  cahier  des  charges  de  jouer,  par  an 
vingt  actes  nouveaux. 

»  Certes,  nous  comprenons  que  les  compositeurs,  de  jour  en  jour  plus 
nombreux,  qui  s'entassent  devant  la  porte  étroite  qui  conduit  à  la  lu- 
mière et  au  succès,  réclament  la  possibilité  de  se  servir  de  leurs  études 
et  de  leur  talent.  Nous  apprécions  surtout  la  situation  désavantageuse 
que  leur  l'ait  un  traité  dont  une  clause  les  oblige  à  travailler  au  même 
prix  que  les  maîtres  les  plus  célèbres ,  et  leur  interdit  celte  faculté 
commune  à  toutes  les  industries,  de  compenser  les  risques  plus  grands 
de  l'acheteur  par  le  meilleur  marché  de  la  denrée. 

»  Mais  nous  voulons  examiner  ici,  au  point  de  vue  pratique,  s'il  est 
possible  de  faire  droit  à  leur  réclamation  dans  la  forme  absolue  qui  lui 
a  été  donnée. 

»  Nous  savons,  par  expérience,  combien  est  rembourré  d'épines  l'o- 
reiller d'un  directeur  de  théâtre  lyrique,  et  combien  la  tâche  de  satis- 
faire à  la  fois  des  intérêts  et  des  amours-propres,  est  plus  difficile  encore 
pour  ce  malheureux  que  pour  les  directeurs  des  théâtres  de  drame  et  de 
vaudeville. 

»  Mis  à  chaque  instant  en  danger  d'être  jeté  en  dehors  de  l'équilibre 
par  l'énormité  de  ses  frais,  il  est,  en  outre,  chargé  d'une  subvention 
dont  Vcndroil  présenle  une  somme  ronde  à  palper,  mais  dont  l'enucrs  est 
un  cahier  des  charges  hérissé,  comme  les  contrats  de  mariage,  de  pré- 
cautions minutieuses  et  d'obligations  poussées  jusqu'à  l'extrême  limite  du 
possible. 

»  Nous  ne  voulons  nous  mettre  à  aucun  point  de  vue  absolu,  ni  es- 
sayer non  plus  de  métamorphoser  les  directeurs  de  théâtres  lyriques  en 
de  blanches  et  innocentes  victimes.  Nous  voulons  seulement  établir  ici 
que  l'obligation  imposée  à  l'Opéra-Comique  de  jouer  vingt  actes  par  an 
ne  peut  être  prise  à  la  lettre,  et  qu'il  convient  d'établir  une  moyenne 
entre  les  années  heureuses  et  les  années  malhfureuses. 

»  En  certains  cas,  pour  un  théâtre,  une  nombreuse  exhibition  de 
pièces  est  un  signe  de  perte  ;  car  la  période  dans  laquelle  on  joue  beau- 
coup de  pièces  est  forcément  la  période  oii  chacune  de  ces  pièces  se 


trouve  jouée  peu  de  fois.  Or,  en  supposant  qu'on  laisse  de  côté  les  re- 
prises, et  par  conséquent  le  répertoire,  la  moyenne  des  études  nécessi- 
tées par  une  pièce  en  trois  actes,  étant  de  trois  mois  au  moins,  trois  ou- 
vrages nouveaux  prennent  déjà  neuf  mois  de  l'année.  Que  si,  —  chose 
impossible,  —  on  mentait  simultanément  deux  grands  opéras  en  trois 
actes,  en  divisant  les  forces  du  théâtre  et  en  négligeant  forcément  la 
distribution  d'une  des  deux  pièces,  on  serait  obligé,  vers  la  vingtième 
représentation  de  l'opéra  qui  aurait  passé  le  premier,  de  lancer  l'autre, 
divisant  ainsi  l'opinion  du  public  et  risquant  d'interrompre  un  succès. 

»  De  plus,  en  supposant  les  trois  ouvrages  suffisamment  heureux,  on 
ne  peut  leur  accorder  à  chacun  moins  de  cinquante  représentations,  — 
total,  pour  les  trois  pièces,  130  représentations.  Etant  reconnue,  d'ailleurs, 
à  cause  de  la  délicatesse  des  gosiers  destinés  au  chant,  l'obligation  de  ne 
jouer  une  pièce  lyrique  que  de  deux  jours  l'un,  voilà  deux  cent  cin- 
quante ou  trois  cents  jours,  à  peu  près,  employés  par  trois  opéras  nou- 
veaux. 

»  Admettons  encore  que,  pendant  les  études  de  ces  trois  ouvrages,  on 
trouve  moyen  de  monter  trois  petits  opéras  en  un  acte,  sans  chœur, 
sans  importance,  et,  par  conséquent,  sans  profit  pour  personne,  il  ne 
resterait  toujours  que  trois  mois  pour  jouer  huit  actes.  Un  rêve  ! 

»  Nous  ne  voulons  pas  dire  pourtant  que  l'on  ne  puisse  faire  plus 
que  ce  qui  a  été  fait.  De  grands  succès  mérités  ont  immobilisé,  sur  l'af- 
fiche, des  pièces  justement  heureuses.  Mais,  dans  l'existence  des  théâtres, 
comme  dans  celle  des  individus,  le  bonheur  n'est  qu'un  accident.  Toutes 
les  années  ne  seront  pas  des  années  d'Exposition  universelle.  Le  moment 
viendra  où,  pour  réussir,  il  faudra  plus  souvent  tenter  la  fortune,  et, 
par  suite,  recourir  à  un  plus  grand  nombre  de  compositeurs. 

»  Ainsi  se  trouvera  écartée,  par  la  force  des  choses,  cette  petite  pierre 
d'achoppement  qui  vient  de  faire  un  peu  c.ihoter  les  relations  paisibles 
qui  existaient  entre  le  directeur  de  l'Opéra -Comique  et  les  auteurs  dont 
le  traité  avec  ce  théâtre  a  été  fidèlement  exécuté  par  M.  de  Leuven. 
Quant  au  cahier  des  charges,  la  surveillance  en  est  confiée  à  une  admi- 
nistration qui  se  réserve,  selon  les  circonstances,  d'employer  l'indulgence 
ou  la  rigueur,  et  qui,  dans  l'intérêt  des  compositeurs,  vient  de  faire  ac- 
cepter, aux  directeurs  des  théâtres  lyriques,  deux  choses  qui  n'étaient 
pas  dans  le  cahier  des  charges  de  ces  théâtres:  la  liberté  de  l'industrie 
théâtrale  et  la  représentation  des  ouvrages  couronnés  dans  le  dernier 
concours  d'opéra  et  d'opéra-comique. 

»  Le  principal  grief  contre  M.  de  Leuven  ne  serait-il  pas  qu'il  a  di- 
rigé son  théâtre  de  manière  à  le  sauver  de  tout  désastre?  » 

M.  Roqueplan  aurait  pu  ajouter  que  la  subvention  annuelle  de 
240,000  francs  est  accordée  spécialement  au  théâtre  de  l'Opéra- 
Comique  pour  maintenir  ce  théâtre  au-dessus  du  niveau  des  scènes 
lyriques  de  second  ordre,  et  qu'elle  est  en  même  temps  affectée 
particulièrement  à  la  garantie  du  paiement  des  appointements  des 
artistes.  Cela  est  si  vrai  que  le  jour  où  la  subvention  serait  retirée, 
tous  les  engagements  se  trouveraient  résiliés  de  fait.  Mais  il  y  a 
encore,  dans  la  levée  de  boucliers  qui  s'est  produite  à  l'Assemblée, 
une  contradiction  bien  singulière  à  faire  ressortir,  c'est  celle-ci  : 
le  cahier  des  charges  octroyé  au  directeur  de  l'Opéra-Comique 
l'autorise  à  jouer  les  traductions  d'œuvres  étrangères;  seulement, 
lorsqu'il  s'est  agi  pour  lui  de  faire  un  traité  avec  la  commission 
des  auteurs  dramatiques,  celle-ci  lui  a  tout  d'abord  interdit  de  jouer 
ces  traductions  en  alléguant  pour  motif  qu'elle  n'avait  nullement 
à  se  préoccuper  du  cahier  des  charges  et  des  prérogatives  qu'il 
assurait  à  la  direction,  mais  bien  du  soin  de  sauvegarder  les  inté- 
rêts de  ses  sociétaires  auxquels  nuirait  l'introduction  d'un  élément 
étranger.  M.  de  Leuven  a  dû  céder  à  cette  exigence.  Et  voilà  qu'au- 
jourd'hui c'est  ce  cahier  des  charges,  que  la  Société  ne  voulait 
pas  connaître  quand  il  froissait  ses  intérêts,  qu'elle  prend  à  partie 
et  dont  elle  prétend  se  servir  pour  attaquer  la  Direction  !  En  vérité, 
est-ce  logique?  Est-ce  équitable? 

Espérons  que,  grâce  aux  bonnes  intentions  et  à  l'impartialité  de 
plusieurs  des  membres  de  la  Commission,  et  surtout  aux  senti- 
ments conciliants  de  son  honorable  président,  ce  conflit  se  termi- 
nera à  la  satisfaction  de  toutes  les  parties  intéressées.  Nous  croyons 
d'ailleurs  savoir  que  déjà  les  choses  sont  en  bonne  voie  d'arrange- 
ment. 


DE  PARIS. 


189 


REVOE  DES  THÉÂTRES. 


Vaudeville.  L'Abîme,  drame  en  cinq  actes  et  onze  tableaux,  de 
Charles  Dickens,  arrangé  par  M.  Didier.  —  Ambigu.  La  Czarine, 
drame  en  cinq  actes  et  huit  tableaux,  par  MM.  Jules  Adenis  et 
Gastineau.  —  Gaité.  Les  Orphelins  de  Venise,  drame  en  cinq 
actes  et  six  tableaux,  par  M.  Ch.  Garand.  —  Salle  Ventadour. 
Madame  de  Chamblay ,  drame  en  cinq  actes  par  M.  Alexandre 
Dumas. 

Si  MM.  les  Anglais  se  livrent  sans  relâche  à  V adaptation  de  nos 
œuvres  dramatiques,  sans  profit  pour  les  auteurs  français,  on  ne 
dira  pas  que  nous  abusons  du  droit  de  représailles.  L'Ahtme  a 
obtenu  un  grand  succès  à  Londres  ;  M.  Didier  l'a  traduit  et  arrangé 
pour  la  scène  du  Vaudeville,  mais  au  lieu  de  laisser  Charles  Dic- 
kens dans  l'ombre,  il  l'a  pris  par  la  main  pour  le  présenter  au 
public  et  pour  lui  faire  les  honneurs  de  l'affiche.  Puisse  cet  exemple 
profiter  à  nos  confrères  d 'outre-Manche  qui ,  jusqu'à  ce  jour,  n'ont 
eu  d'autre  préoccupation  que  celle  d'éluder,  par  tous  les  moyens 
possibles,  les  dispositions  de  notre  traité  international. 

Le  drame  de  Charles  Dickens  a  réussi  à  Paris  comme  à  Londres, 
et  certes,  la  difficulté  était  plus  grande.  Il  avait  d'abord  contre  lui 
le  genre  ordinaire  du  théâtre  de  la  Bourse,  qui  n'a  rien  de  com- 
mun avec  celui  des  anciens  théâtres  du  boulevard ,  où  il  eût  été 
plus  convenablement  placé.  Il  y  a,  en  outre,  dans  l'Ahime,  un  dé- 
faut de  composition  qui  est  peut-être  dans  les  habitudes  anglaises, 
mais  qui  n'est  guère  dans  les  nôtres.  Nous  voulons  parler  du 
double  sujet  dont  l'action  se  compose  :  un  intérêt  croissant,  des 
situations  fortes,  des  péripéties  nombreuses  ont  fait  passer  sur  cet 
inconvénient. 

Dans  la  première  partie,  il  s'agit  d'un  pauvre  enfant  trouvé 
qu'une  mère  croit  reconnaître,  sur  de  faux  indices,  et  à  qui  elle 
laisse  toute  sa  fortune;  plus  tard,  cet  enfant  devenu  homme,  ap- 
prend la  vérité,  et,  par  un  rare  excès  de  délicatesse,  il  forme  le 
projet  de  chercher  celui  dont  il  a  pris  la  place,  pour  lui  rendre 
les  biens  qu'il  possède  indûment.  La  mort  ne  lui  laisse  pas  le 
temps  d'accomplir  son  dessein ,  et  il  charge  son  associé ,  Georges 
Leslie,  de  continuer  ses  recherches.  Or,  il  se  trouve  que  c'est  ce 
Georges  Leslie  lui-même  qui  est  le  fils  dépossédé  par  la  méprise 
en  question. 

Mais  avant  d'arriver  à  la  révélation  de  ce  mystère,  nous  voyons, 
dans  la  seconde  partie,  Georges  Leslie  en  lutte  ouverte  avec  un 
coquin,  du  nom  de  Richenbach,  dont  il  aime  la  pupille  et  en  qui 
il  rencontre  un  rival  redoutable.  Richenbach  a  commis  un  vol  et 
un  faux;  Georges  en  possède  la  preuve;  dès  lors,  il  n'y  a  plus  de 
repos  pour  le  premier  de  ces  deux  hommes  tant  que  l'autre  vivra. 
Une  première  fois,  dans  une  auberge,  Richenbach  est  sur  le  point, 
grâce  à  l'effet  d'un  narcotique,  de  s'emparer  de  la  pièce  accusa- 
trice que  son  ennemi  porte  sur  lui.  Georges  échappe  à  ce  danger, 
mais  bientôt  les  deux  rivaux  se  rencontrent,  en  Suisse,  sur  les 
bords  d'un  abîme ,  au  fond  duquel  Richenbach  veut  précipiter 
€eorges,  lutte  effrayante  qui  se  termine  par  la  mort  du  coupable 
et  par  la  réunion  des  deux  amants. 

Ce  tableau  de  l'abîme,  encadre  dans  un  magnifique  décor  et 
venant  après  l'acte  de  l'auberge,  dont  l'admirable  mise  en  scène 
et  le  jeu  des  acteurs  avaient  produit  beaucoup  d'elfet,  a  été 
accueilli  avec  enthousiasme  et  a  décidé  du  sort  de  l'ouvrage  dont 
les  représentations  seront  aussi  nombreuses  que  fructueuses.  Du 
reste,  la  distribution  est  excellente  :  Berton  et  Desrieux  interprè- 
tent les  deux  principaux  rôles  avec  beaucoup  d'autorité  et  de  talent. 
A  côté  d'eux  citons  Munier,  Parade,  Saint-Germain,  Mme  Vigne, 
Mlle  Cellier,  et  une  débutante,  Mme  Larmet,  qui  a  fort  bien  joué 
la  mère  du  prologue. 


— Dans  le  drame  de  la  Czarine,  donné  à  l'Ambigu,  ce  n'est  pas  la 
grande  Catherine  II,  la  Sémiramis  du  Nord,  l'amie  de  Voltaire,  de 
Diderot  et  de  d'Alembert,  qui  occupe  lapremière  place.  C'est  un  cer- 
tain baron  de  Kempelen,  savant  mécanicien  prussien,  émule  de 
Vaucanson,  mandé  par  la  czarine  à  sa  cour,  et  qui  à  l'aide  de 
ses  connaissances  scientifiques  et  d'une  scène  de  fantasmagorie 
étouffe  la  conspiration  tramée  contre  elle  par  l'imposteur  Pugats- 
chew.  —  Il  ne  faut  pas  chercher  dans  l'œuvre  de  MM.  Adenis  et 
Gastineau  le  tableau  d'un  des  grands  faits  historiques  de  ce  règne 
éclatant;  ils  n'y  ont  découvert  qu'une  assez  mesquine  rivalité  entre  la 
puissante  souveraine  du  Nord  et  la  fille  du  baron  de  Kempelen, 
rivalité  dans  laquelle  l'impératrice  a  le  beau  rôle,  puisqu'elle 
comble  sa  rivale  d'honneurs  et  de  richesses  et  lui  fait  épouser  un 
comte  polonais  qu'elle  aime. —  Il  n'y  avait  guère  lieu  pour  cette 
intrigue,  malheureusement  trop  rebattue,  d'évoquer  les  souvenirs 
de  Catherine  II  et  d'y  faire  intervenir  Orloff  et  Pugatschew  ;  mais 
Mme  Marie  Laurent  y  a  trouvé  une  nouvelle  occasion  de  mettre 
en  relief  son  immense  talent  dramatique,  et  le  public  une  véritable 
surprise  dans  l'exhibition  d'un  truc  ingénieux  dû  à  l'habileté  du 
célèbre  Robert  Boudin.  Il  consiste  en  un  automate  joueur 
d'échecs  dont  la  boîte,  parfaitement  isolée  du  sol,  recèle  à  un 
moment  donné  l'amant  de  Marie  de  Kampelen,  qui  y  a  trouvé  un 
refuge  et  n'offre  pourtant,  lorsque,  sur  l'ordre  de  la  czarine,  le  ba- 
ron est  forcé  de  l'ouviir,  qtrun  intérieur  percé  à  jour  où  l'on  voit 
se  mouvoir  les  rouages  du  mécanisme. —  La  scène  est  saisissante 
et  elle  sera  l'attraction  de  la  pièce,  d'ailleurs  très-luxueusement 
montée  et  très-bien  jouée,  à  côté  de  Mme  Laurent,  par  Omer,  Ré- 
gnier et  Mme  Lacressonnière. 

— C'est  un  moyen  d'attraction  semblable,  en  dehors  des  éléments 
du  drame,  qui  manque  aux  Orphelins  de  Venise,  joués  à  la  Gaîté. 
L'action,  un  peu  terre  à  terre,  repose  sur  la  vengeance  d'un  doge 
quelconque,  à  qui  le  comte  Roger  a  confié  maladroitement  le  sort 
de  sa  femme  et  de  ses  enfants.  Ce  doge  est  l'ennemi  secret  de 
Roger;  aussi  laisse-t-il  mourir  la  mère,  et  prend-il  ses  mesures 
pour  que  le  fils  soit  un  jour  un  affreux  bravo  et  la  fille  une  cour- 
tisane vulgaire.  Mais  sus  odieuses  prévisions  sont  trompées  et  les 
enfants  du  comte  Roger  échappent  heureusement  à  ses  embûches. 

En  somme,  ce  drame  est  très-bien  conçu  et  a  de  louables  quali- 
tés d'exécution.  On  y  remarque  en  outre  un  très-beau  décor  de 
Venise  à  vol  d'oiseau,  et  enfin  on  y  applaudit  Ménier  dans  un  rôle 
de  sacripant  qui  n'est  pas  dénué  d'une  certaine  originalité.  Les 
autres  personnages  sont  interprétés  à  souhait  par  Dumaine, Lacres- 
sonnière, Angelo,  Mlle  Lia-Félix  et  Mme  Juliette  Clarence. 

— Quelques  artistes  du  théâtre  de  la  Porte-Saint-Martin,  frappés  par 
la  faillite  de  la  dernière  direction,  se  sont  réunis  pour  donner  des 
représentations  à  la  salle  Ventadour,  et  ils  ont  eu  la  bonne  fortune 
d'inspirer  à  M.  Alexandre  Dumas  assez  de  confiance  pour  obtenir 
de  lui  un  drame  inédit,  tiré  de  son  roman  Madame  de  Chamblay. 
Le  sujet  n'en  est  pas  très-neuf;  c'est  l'éternelle  histoire  d'une 
femme  mal  mariée  qui  trouve  le  dédommagement  de  ses  peines 
dans  l'amour  d'un  beau  jeune  homme  ;  mais  ce  qui  démontre  l'ha- 
bileté du  célèbre  dramaturge,  c'est  le  dénoûment  amené  par  un 
personnage  pour  ainsi  dire  épisodique.  L'amant  de  Mme  de  Cham- 
blay est  protégé  par  un  fonctionnaire  public,  un  préfet  d'Evreux, 
qui  lui  prête  sa  voiture  pour  échapper  à  la  poursuite  du  mari.  Le 
cheval  est  attelé;  le  départ  est  imminent,  mais,  dans  l'intervalle, 
le  préfet  se  prend  de  querelle  avec  M.  de  Chamblay;  il  sort  avec 
lui  pour  se  battre  à  l'épée,  et  bientôt  après  il  rentre  seul.  — 
«  Faites  dételer,  »  dit-il  au  domestique. 

Cette  manière  imprévue  de  dénouer  une  situation  difficile  a 
provoqué  d'enthousiastes  bravos.  Nous  en  sommes  heureux  pour 
de  courageux  comédiens  qui  méritent  tout  notre  intérêt.  La  pièce, 


m 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


un  peu  languissante  dans  les    premiers  actes,  est  d'ailleurs   bien 
jouée  par  Brindeau,  Charly,  Laroche  et  Mme  Hica-Petit. 

D.  A.  D.  SAINT-YVES. 


Monument  à  la  mémoire  d'Edouard  Monnais. 

Voici  la  liste  des  souscripteurs  inscrits  jusqu'à  ce  jour  : 
MM.  Auber,  Camille  Doucet,  Caumartin,  Chaix-d'Est-Ange,  le 
général  Mellinet,  Ambroise  Thomas,  Emile  Perrin,  de  Saint- 
Georges,  Hippolyte  Rodi'igues,  Mme  veuve  Kastner,  Mme  Meyer- 
beer,  Treitt,  Heugel,  Ritt,  Mme  la  princesse  H. de  H.,  baron  Tay- 
lor,  de  Lassabalhie,  l'Association  des  Artistes  musiciens,  de  Bez 
(membre  du  Comité  de  l'Association  des  Artistes  musiciens),  Ch. 
Thomas  (idem),  Delzant  (idem),  Emile  Réty  (id),  Klosé,  Mitouflet, 
Mme  L.  Farrenc,  François  Bazin,  Dauverné,  Bressant,  A.  de  Beau- 
chesne,  L.  Massart,  Cokken,  J.  Mohr,  Georges  Mathias,  Elwart, 
Tariot,  Elle,  Alkan  (Napoléon),  Laget,  Che\ illard,  Delle-Sedie, 
Croharé,  Le  Couppey,  Emile  Durand,  H.  Duvernoy,  H.  Herz,  Fo- 
restier, Dieppo,  Saint-Yves-Bax,  Vauthrol,  F.  Benoist,  Edouard 
Batiste,  Emile  Jonàs,  Franchomme,  E.  Mocker,  D.  Allart,  A.  Sa- 
vard,  Labro,  Marmontei,  Mme  Maucorps  Delsuc,  Eugène  Sauzay, 
Baillot,  Mlle  F.  Jousselin,  Victor  Massé,  A.  de  Beauplan,  Révial, 
Charles  Duvernoy,  Alphonse  Duvernoy,  Edmond  Duvernoy, 
Mme  Dufresne,  Léon  Kreutzer,  Brandus  Dufour,  Pasdcloup,  A. 
Sax,  Carafa,  Edouard  Thierry,  Montigny  (directeur  du  théâtre  du 
Gymnase),  Mme  veuve  Panseron,  Bagier,  Alexandre  de  Lavergne. 
On  souscrit  au  Conservatoire  impérial  de  musique  et  de  décla- 
mation (bureau  de  M.  Emile  Réty),  au  bureau  de  la  Gazette  musi- 
cale et  au  Ménestrel,  2  bis,  rue  Vivienne. 


CONCERTS  ET  AUDITIONS  IBDSICÀLES  DE  LÀ  SEOIÂINE. 

^*j,  M.  Ugo  Errera,  de  Milan,  dont  nous  avons  annoncé  l'arrivée  à 
Paris,  a  donné  son  concert  vendredi  dernier  à  la  salle  Erard.  M.  Errera 
appartient  par  sa  naissance  à  l'une  des  familles  les  plus  distinguées  de 
Venise.  En  se  vouant  à  l'art  musical  il  a  obéi  à  une  vocation  irrésistible 
et  il  s'est  livré  à  de  consciencieuses  études.  Aussi  avons-nous  pu  apprécier 
chez  ce  jeune  compositeur  (qui  est  aus-si  un  pianiste  brillant  et  puissani), 
un  sentiment  très-fin  de  l'harmonie  et  une  entente  peu  commune  de 
l'effet;  sa  Rêocrie,  son  originale  Sicilienne,  sa  Prière  du  soir,  son  scherzo 
sont  autant  de  charmantes  compositions  de  salon  qu'attendent  des  succès 
durables.  La  transcription  du  chœur  des  soldats  de  Faust  est  tout  à  fait 
artistique,  mais  fort  difficile  d'exécution,  —  M.  Consolo,  le  violoniste  na- 
politain et  une  cantatrice  d'un  grand  mérite,  Mlle  Enrichetta  Corradi, 
ont  partagé  avec  le  bénéficiaire  un  très-grand  et  très-légitime  succès. 

^*»  Un  compositeur  espagnol,  M.  Lopez,  qui  est  aussi  un  chan- 
teur très-habile  et  très-sympathique,  a  donné  dernièrement,  à  la 
salle  Herz,  un  concert  où  il  s'est  produit  avec  avantage  en  celte  double 
qualité.  Mme  Calderon,  du  théâtre  Italien,  y  a  obtenu  un  très-grand  suc- 
cès avec  l'air  de  la  Favorite  et  la  romance  d'Alary,  l'Etranger,  qu'elle  a 
dite  d'une  manière  ravissante. 

^*^.  La  Société  d'émulation  de  l'Allier,  à  Moulins,  a  décerné  dans  sa 
séance  du  S  juin,  après  un  rapport  de  M.  Rondeau  sur  le  mérite  des 
compositions  musicales  envoyées  pour  le  concours  d'un  chant  choral 
bourbonnais,  une  médaille  d'or  à  M.  Victor  Millet,  président  de  la  Lyre 
moulinoise,  et  trois  médailles  de  vermeil  à  MM.  Auradou,  professeur  de 
musique  à  Moulins,  Marins  BouUard,  directeur  de  la  Lyre  moulinoise  et 
G.  Curto,  maître  de  chapelle  à  la  Nouvelle-Orléans  (Etats-Unis). 

^*^  Au  concours  musical  de  Chartres,  qui  a  eu  lieu  dimanche  der- 
nier, le  premier  prix  de  la  division  supérieure  (médaille  d'or  donnée  par 
l'Empereur),  et  le  prix  d'excellence  (couronne  de  vermeil),  ont  été  rem- 
portés par  les  Enfants  de  Saint-Denis .  Celle  vaillante  Société,  si  intelli- 
gemment dirigée  par  MM.  Victor  Desmet,  père  et  fils,  avait  pour  con- 
currents dans  cette  circonstance,  YOdéon,  les  Enfants  de  Faris ,  les  En- 
fants de  la  Belgique,  le  Clioral  du  Mans  et  ÏOrphéon  de  Sèvres,  toutes 
Sociétés  excellentes  et  habituées  à  la  victoire. 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 

»*»  L'Africaine  a  été  représentée  deux  fois  cette  semaine,  lundi  et 
vendredi,  devant  une  salle  comble  applaudissant  les  sublimes  beautés  du 
chef-d'œuvre  et  les  artistes  qui  l'interprètent  si  magistralement.  —  Mer- 
credi on  donnait  Guillaume  Tell.  Un  empêchement  subit  de  Mlle  Marie 
Battu  ne  lui  ayant  pas  permis  de  jouer  le  rôle  de  Mathilde,  elle  y  a 
été  remplacée  à  l'improviste  par  Mlle  Hamackers. 

„,%  Quatre  représentations  successives  des  Dragons  de  Villars  ont  glo- 
rieusement confirmé  le  succès  de  l'opéra  de  Maillart.  Maintenant  sûrs 
de  leurs  rôles,  les  artistes  leur  donnent  toute  leur  valeur;  Mme  Galli- 
Marié  déploie  dans  celui  de  Rose  Friquet  les  qualités  qui  lui  sont  pro- 
pres et  qui  rendent  fort  difficile  une  comparaison  entre  elle  et  l'actrice 
qui  le  créa.  Ce  qu'il  y  a  de  certain,  c'est  qu'elle  fait  un'plaisir  énorme, 
c'est  que  Lhérie  étonne  par  le  charme  de  sa  voix  dans  la  romance  et  le 
duo,  que  Barré  s'est  fait  adopter  d'emblée  par  le  public  de  la  rue  Favart, 
que  Mlle  Girard  n'a  jamais  eu  plus  de  verve,  et  que  désormais,  solide- 
ment établie  sur  la  scène  de  l'Opéra-Comique,  cette  œuvre  si  vitale,  si 
complète,  sera  l'un  des  plus  beaux  joyaux  de  son  répertoire. 

^*^  Capoul  prenant  son  congé  à  la  fin  de  ce  mois,  la  direction  a 
résolu  de  ne  reprendre  le  Premier  Jour  de  Bonheur  qu'au  mois  de  sep- 
tembre ;  le  nouvel  opéra  d'Auber  n'aura  donc  plus  qu'une  demi- 
douzaine  de  représentations  d'ici  au  l"  juillet. 

*%  Nous  aurons  la  saison  prochaine  au  théâtre  Italien  les  deux 
célèbres  ténors  Fraschini  et  Tamberlick,  le  premier  en  même  temps  que 
la  Patti;  le  second,  pendant  l'absence  de  la  diva. —  Les  époux  Tiberini 
ont  refusé  l'engagement  qui  leur  était  offert  par  M.  Bagier. 

»*,K  On  sait  que  ce  n'est  pas  seulement  en  France  que  les  Dragons  de 
Villars  ont  conquis  la  popularité.  Sous  le  titre  de  la  Clochette  de  l'ermite 
ils  sont  joués  sur  les  principales  scènes  de  l'Allemagne.  Ils  pourraient 
bien  avant  peu  faire  aussi  leur  apparition  sur  les  scènes  italiennes.  Nous 
apprenons  en  effet  qu'une  des  rantatrices  les  plus  en  vogue  aujourd'hui, 
et  dont  les  succès  à  l'étranger  font  grand  bruit,  désire  vivement  jouer 
le  rôle  de  Rose  Friquet,  et  que  l'un  des  directeurs  qui  l'ont  engagée  pour 
la  saison  prochaine  est  en  pourparlers  avec  les  auteurs  pour  une  traduc- 
tion italienne  et  pour  les  récitatifs  nécessaires. 

^*^  Aussitôt  après  la  fermeture  annoncée  pour  le  30  juin,  la  troupe 
de  l'Athénée  se  rendra  à  Bruxelles,  où  elle  donnera,  pendant  le  mois  de 
juillet,  ses  représentations  de  Fleur  de  Thé  fit  de  Malbrough,  pièce  re- 
maniée entièrement  et  réduite  à  trois  actes.  —  Le  mois  d'août  sera 
donné  au  Havre,  et,  pour  augmenter  l'attraction  de  ces  représentations, 
M.  Busnach  a  engagé  Thérésa,  qui  chantera  chaque  soir  deux  de  ses 
chansons.  —  Grâce  à  ces  éléments,  le  succès  de  la  tournée  entreprise 
n'est  pas  douteux  et  le  théâtre  rouvrira  le  i"  septembre  dans  les  meil- 
leures conditions.— Du  reste,  M.  Busnach  se  prépare  à  celte  réouverture, 
et  comme  répertoire,  et  comme  personnel.  On  cite  les  engagements 
de  Mlle  Veslri  qui  a  eu  des  succès  au  théâtre  Italien,  de  Hamburger, 
qui  quitte  les  Variétés  et  qui  débutera  dans  le  Petit  Poucet.  En  outre, 
Luce,  ténor  qui  arrive  de  Bruxelles  vient  de  débuter  dans  le  rôle  de  Pin- 
sonnet,  et  Oscar  a  été  également  engagé  pour  donner  un  peu  de  répit 
à  Désiré.  —  Ce  n'est  pas,  comme  on  voit,  l'activité  qui  manque  à  la 
direction. 

^,*j.  On  donnera  pour  la  réouverture  du  théâtre  des  Menus-Plaisirs 
une  féerie  de  MM.  Clairville  et  Gastineau  :  la  Fée  aux  Grelots  dont 
M.  Debillemont  compose  la  musique. 

^*,  On  écrit  de  Bordeaux  que  M.  Halanzier  vient  de  publier  son  pro- 
gramme pour  la  saison  prochaine.  Il  y  annonce  qu'il  donnera  le  grand 
opéra,  l'opéra-comique  et  le  ballet,  du  !"■  septembre  au  31  mai,  quoi- 
que son  traité  ne  l'oblige  à  jouer  ce  genre  que  du  i"  septembre  au 
30  avril. — Le  Grand-Tuéâtre  ouvrira  le  l"'  juillet  pour  les  représentations 
de  Peau-d'Ane  par  les  artistes  de  laGaîté. — Les  explications  données  par 
M.  Halanzier,  dans  sa  circulaire,  satisfont  tout  le  monde,  et  l'on  est 
plein  de  confiance  en  ses  promesses.  On  compte  donc  sur  une  année 
théâtrale  exceptionnelle  :  les  connaissances  spéciales  et  le  talent  excep- 
tionnel de  l'habile  imprésario  justifient  d'ailleurs  cette  confiance. 

,*4  Crosti  vient  d'être  engagé  par  M.  Mapleson  pour  la  tournée  que 
l'imprésario  de  Her  Majesty's  théâtre  fait  à  l'automne  en  Angleterre;  il 
chantera  le  rôle  de  Saint-Bris  dans  /  Ugonotti. 

,p\  Les  receltes  des  théâtres  subventionnés,  des  théâtres  de  second  ordre, 
des  concerts,  cafés-concerts  et  autres  établissements  soumis  à  la  percep- 
tion du  droit  des  pauvres,  se  sont  élevés,  pendant  le  mois  de  mai,  à  la 
somme  de  1,080,712  fr.  61  c. 


NOUVELLES  DIVERSES. 


^**  Aujourd'hui,  à  une  heure  précise,  dans  la  salle  du  Grand-Orient, 
rue  Cadet,  a  lieu  l'assemblée  générale  annuelle  des  auteurs,  composi- 
teurs et  éditeurs  de  musique.  MM.  les  sociétaires  sont  instamment  priés 


DE  PAUIS 


191 


d'y  assister.  —  L'ordre  du  jour  est  la  lectirre  du  rapport  du  trésorier  el 
celle  du  rapport  du  président.  11  sera  ensuite  procédé  au  remplacement 
de  trois  membres  sortants  du  syndicat.  Les  candidats  qui  paraissent  avoir 
le  plus  de  chances  de  les  remplacer  soin:  M.  Th.  Sauvage,  auteur  dra- 
matique, président  honoraire';  M.  Jonas,  compositeur  distingué,  inspec- 
teur des  musiques  de  la  garde  nationale,  el  M.  Colombier,  éditeur  de 
musique,  l'un  des  fondateurs  delà  Société,  et  qui  fut  longtemps  membre 
du  syndicat. 

^*^  Les  examens  préparatoires  pour  l'admission  aux  concours  publics 
sont  commencés  depuis  le  5  juin  au  Conservaioire  impérial  de  musi- 
que et  de  déclamation,  et  se  continuent  dans  l'ordre  suivant  :  —  le  5, 
instruments  à  cordes:  violon,  violoncelle,  contreba.^se;  —  le  9,  comédie 
et  tragédie;  —  le  IJ,  piano  (hommes  et  femmes);  —  le  12,  orgue,  har- 
monium ;  —  le  13,  solfège;  —  les  lo  et  16,  les  huit  classes  de  chant; 
—  les  17  et  18,  les  quatre  classes  d'opéra-comique  et  d'opéra. 

»*j,  Le  sixième  concerto  de  Herz  (en  la  mineur),  est  désigné  cette 
année  pour  le  concours  de  piano  de  s  hommes  au  Confervaloire,  et  le 
premier  de  Chopin  (en  mi  mineur)  pour  celui  des  femmes.  Le 
deuxième  concerto  (en  mi  majeur)  de  Habeneck  a  été  choisi  pour  les 
classes  de  violon,  et  le  deuxième  concerto  de  Romberg  (en  ré  majeur), 
pour  les  classes  de  violoncelle. 

jf%  Les  concurrents  poui*  le  grand  prix  de  Rome  (composition  musi- 
cale) sortent  de  loge  aujourd'hui.  Le  jugement  sera  rendu  le  lundi  29 
juin . 

.*,  Mlle  Désirée  Artôt  est  arrivée  la  semaine  dernière  à  Paris.  La 
célèbre  cantatrice,  après  ses  triomphes  de  Moscou,  va  se  reposer  quelques 
jours  à  Ville-  d'Avray,  dans  la  belle  villa  qu'elle  s'y  est  fait  construire  à 
côté  de  celles  de  Delle-Sedie  et  de  Mme  Demeur-Charton.  Après  avoir 
assisté  la  semaine  prochaine  au  mariage  de  sa  sœur,  elle  partira  pour  les 
eaux  du  mont  Dor.  Mlle  Artôt  est  engagée  pour  Hombourg,  et  dès  l'au- 
tomne elle  repartira  pour  Varsovie  et  Moscou  dont  les  théâtres  fondent 
sur  elle  leurs  grandes  espérances  de  l'hiver. 

***  Arban  est  de  retour  à  Paris  ;  il  s'occupe  de  transporter  ses  pénates 
à  la  salle  Valenlino,  et  des  nombreux  embellissements  qui  y  sont  appor- 
tés. —  Son  dernier  concert  à  Madrid  a  été  magnifique;  on  y  a  beaucoup 
applaudi  l'excellent  artiste  et  ses  variations  pour  le  cornet  à  pistons;  sa 
grande  fantaisie  sur  les  Huguenots  a  produit  un  immense  efifet.  Leurs 
Majestés  assistaient  à  ce  concert. 

»*,  Mme  Ugalde  se  propose  de  parcourir  les  villes  du  riord  de  la 
France  en  compagnie  de  trois  ou  quatre  artistes ,  pour  donner  des  re- 
pré^entations  de  la  Grande  -  Duchesse ,  qu'elle  interprète  d'une  manière 
fort  originale.  De  son  côté,  Brasseur  a  le  projet  de  visiter  le  midi  avec 
Une  troupe  d'élite,  et  déjouer  son  désopilant  répertoire,  la  Vfe parisienne, 
le  Brésilien,  eic,  dans  toutes  les  viUes  du  parcours. 

^*^  Levasfor  et  Mme  Teysseire  ont  été  engagés  pour  la  prochaine 
tournée  artistique  Ulmann-Patti. 

^*^  Fleur-de-Thé,  qui  continue  à  braver  avec  avantage  les  chaleurs 
del'été,  n'échappera  à  aucun  des  genres  de  célébrité.  Elle  vient  de  donner 
son  nom,  dans  le  royaume  de  la  mode,  à  une  nouvelle  couleur  qui  pa- 
raît destinée  à  remplacer  la  fameuse  couleur  Bismark,  depuis  un  an  en 
possession  de  la  faveur  de  nos  élégantes. 

,%  M.  Henri  Herz  jeune,  chef  de  la  manufacture  de  pianos  connue 
soiis  le  nom  de  Ph.  Herz  neveu  et  C'°  qui  a  obtenu  la  médaille  d  or  à 
l'Exposition  universelle,  se  marie  le  16  de  ce  mois  ;  il  épouse  Mlle  Ma- 
rie Husson. 

^*^  M.  de  Lenz ,  l'auteur  de  Beethoven  et  des  trois  styles,  prépare  un 
ouvrage  critique  et  biographique  sur  Weber,  et  se  trouve  en  ce  moment 
à  Dresde,  où  il  complète  les  documents  nécessaires  h  .«on  travail.  On  sait 
que  cette  ville  doit  beaucoup,  sous  le  rapport  musical,  à  l'auteur  du 
Preiichiilz,  qui  y  dirigea  plusieurs  années  l'Opéra. 

^*,  11  exi^te  à  Naples,  —  et  c'est  la  propriété  de  l'éditeur  Teodoro 
Cottrau,  —  une  collection  d'autographes  musicaux  peut-être  unique  au 
monde.  Elle  renferme,  en  efifet,  entre  autres  pièces  intéressantes:  la 
partition  ori,:^inale  entière  de  Lucia  ai  Lammerrnoor,  de  Donizetli;  /  tuoi 
frequenli  paliiili,  de  Pacini  ;  l'air  bouffe  de  Pulcinella,  par  Bellini  ;  la 
célèbre  cantate  écrite  par  PaiViello  pour  l'entrée  de  Joseph -Napoléon  à 
Naples;  celle,  non  moins  célèbre,  de  Ros-ini,  pour  la  rentrée  des  Bour- 
bons à  Naples  en  1815;  la  Desiruc'io  di  Jérusalem,  oratorio  de  Zinga- 
relli;  le  Miserere,  écrit  par  Valentino  Fioravanti  pour  la  chapelle  Sixiine; 
la  Messe  de  Ucquiem,  de  l'illustre  Simon  Mayr,  dont  Rossini  fut  l'élève; 
la  CamiUa,  de  Pacr,  etc.  On  remarque  aussi ,  dans  ces  magnifiques  ar- 
chives, 2,000  manuscrit-s  de  toutes  les  partitions  spécialement  écrites 
pour  les  six  théâtres;  lyriques  de  Naples  et  servant  à  la  représentation 
de  ces  opéras.  Le  British  Muséum  de  Londres  viendrait,  dit-on,  d'ac- 
quérir cette  collection. 

^**  On  nous  écrit  de  Vich/ :  «  La  saison  se  présente  sous  de  beaux 
auspices:  le  temps  est  admirable,  aussi  les  étrangers  affluent-ils  de 
toutes  paris.  On  compte  en  ce  moment  près  de  deux  mille  personnes. 
-^  L'orchestre,  composé  de  quarante  musiciens  des  plus  distingués  de 
la  capitale,  vient  de  donner  son  premier  concert,. sous  la  véranda  du 
grand  Casino,  où  la  foule  se  pre.'^sait.  M.  Roméo  Âccursi,  qui  dirige  cet 


orchestre,  est  un  chef  très-habile .  —  11  est  question'  d'une  améjioration 
qui  fera  un  sensible  plaisir  à  nos  lecteurs:  deux  fois  par  semaine,  de  8 
à  10  heures  du  soir,  l'orchestre  se  ferait  entendre  dans  le  kiosque  du 
parc  ;  heureuse  idée  due  à  M.  Callou.  —  Le  Casino  a  ouvert  ses  portes 
depuis  plusieurs  jours,  et  chaque  soir  les  artistes  dramatiques,  sous  la 
direction  de  M.  Menjaud,  artiste  très-distingué,  font  merveille.  —  Le 
mois  de  juillet  sera  des  plus  brillants  cette  année,  et  l'on  annonce  la 
présence  à  Vichy,  pour  cette  époque,  de  Mmes  Marie  Cabcl ,  Werthfini- 
ber,  Ugalde,  qui  ont  eu  de  si  grands  succès  l'année  dernière.  On  parle 
de  M.  Capoul,  de  l'Opéra-Comique.  -  Mlle  Godefroy,  de  l'Opéra,  Mlles 
Gonetti  et  Caussemille,  qui  séjourneront  un  mois  à  Vichy,  contribueront 
beaucoup  à  donner  aux  concerts  du  salon  des  fêtes  le  plus  grand  at- 
trait. 

*%  M.  Coedés,  qui  a  résilié  avec  M.  d'Hôte,  comme  nous  l'avons 
annoncé,  ainsi  que  plusieurs  de  ses  camarades  de  la  troupe  française  par- 
tie pour  le  Brésil,  vient  de  fonder  dans  le  plus  beau  quartier  de  Buenos- 
Ayres  un  théâtre-café,  où  il  exploitera  l'opérette  et  le  vaudeville. 

:t*»  Un  homme  de  lettres  distingué,  auteur  de  vaudevilles  et  qui  a 
marqué  dans  la  presse,  M.  Jules  de  Prémaray,  est  mort  cette  semaine. 

ÉTRANGER 

^*^  Londres.  —  Mlle  Niisson  vient  d'aborder,  pour  la  première  fois, 
et  avec  un  grand  bonheur,  les  rôles  travestis  :  elle  a  chanté  Cherubino 
des  Nozze  di  Figaro,  qui  lui  a  valu  un  splendide  succès,  et  bientôt  elle 
jouera  le  page  Oscar  de  Gustave  III.  —  Mlle  Patti,  dont  l'étoile  brille 
toujours  à  Covent-Garden  de  l'éclat  le  plus  vif,  a  excité  des  transports 
d'enthousiasme  dans  la  Figlia  del  lieçimento.  —  Un  brillant  concert  a 
été  donné  le  9  juin  par  Mlle  Enequist,  la  charmante  cantatrice  suédoise, 
qui  a  dit  d'une  manière  ravissante  plusieurs  mélodies  nationales  et  une 
valse  de  Loret,  Sogni  d'amor.  —  Le  grand  meeting  annuel  des  Charity 
Children ,  ou  Enfants  assistés,  a  été  tenu  à  Saint-Paul,  jeudi  de  la  se- 
maine dernière.  Quatre  ou  cinq  mille  jeunes  voix  chantant  à  l'unisson 
des  psaumes  bu  des  antiennes  produisent  un  effet  dont  on  s'imagine  dif- 
ficilement la  puissance;  et  c'est  à  une  solennité  de  ce  genre,  à  plus  de 
cinquante  ans  de  dislance,  que  deux  musiciens  d'organisations  cependant 
bien  différentes,  Haydn  et  Berlioz,  ont  du  l'une  de  leurs  plus  vives 
impressions. 

^*^  Spa.  ^  Parmi  les  artistes  engagés  pour  la  saison,  on  cite  Mmes  Escu- 
dier-lCasiner,  Léonard,  Mlles  Brunetti,  Schrœder,  Paloc,  Brandt,  MM.  Léo- 
nard, Jehin-Prum,  Dunkler  et  Reuclisel  (ces  deux  derniers  violoncel- 
listes), les  chanteurs  Géraldy,  Jourdan,  Everardi  et  Warnots,  le  flûtiste. 
De  Vroye,  Arban  et  Charles  de  Bériot.  ■ 

jf*^  Bade.— Di\r)s  le  programme  desfêtes  musicales  publié  parla  nou- 
velle direction  des  eaux  de  Bade  il  faut  signaler  quatre  représentations  d'o-. 
péra  allemand  (Lohengrin,  Martha,  le  Postillon  de  Lonjumeau,  Don  Juan, 
joués  du 'S  au  12  septembre),  deux  d'opéra  italien  {^'orma,  la  Favorita, 
pour  les  1-4  et  17  septembre),  deux- représentations  de  ballet  données  par 
la  troupe  de  Darmstadt  et  huit  des  plus  jolies  opérettes  d'Offenbach,  du 
20  septembre  au  lo  octobre  :  au  nsmbre  de  celles-ci,  est  Lischen  et  Fritzchen, 
très-populaire  aux  bords  du  Rhin  et  que  joueront  Désiré  et  Mlle  Zulma- 
Boutïar.  —  Ainsi  que  nous  l'avons  dit,  les  concerts  ont  brillamment  com- 
mencé avec  les  enfants  Frémaux.  M.  Dupressoir  avait  voulu  que  cette 
inauguration  fût  gratuite,  et  il  y  avait  plus  de  deux  mille  personnes  dans 
les  salons  de  conversation;  le  prince  Napoléon  y  assistait.  Après  le  suc- 
cès qu'y  ont  obtenu  les  jeunes  art'stes,  ils  ont  été  appelés  à  jouer  dans 
une  soirée  particulière,  chez  le  directeur  de  l'établissement,  à  laquelle 
assistait  Offenbach,  et  où  ils  n'ont  pas  été  moins  complimentés.  Enfin, 
dans  la  matinée  de  Mme  Viardot,  la  reine  de  Prusse,  qui  l'honorait  de 
sa  présence  ainsi  que  la  grande-duchesse  de  Bade  et  autres  grands  per- 
sonnages, a  voulu  entendre  les  charmants  enfants,  et  SaMajesté  ne  leur 
a  épargné  ni  les  félicitations  ni  les  caresses.  Avant  leur  départ, 
M.  Dupressoir  les  a  invités  à  déjeuner,  et  sous  leur  serviette  les  deux 
garçons  onttrouvé  une  belle  chaîne  d'or  et  la  petite  fille  une  riche  bro- 
che donnés  comme  souvenir  de  leur  séjour  à  Bade. 

^*i^  Berlin.  —  Le  théâtre  de  KroU  continue  à  déployer  une  "  activité 
qui  fait  le  plus  grand  honneur  à  son  directeur,  M.  Engel.  L'opéra  y  est 
donné  presque  chaque  soir;  outre  Martha  et  Czar  et  Gharpenlier,  dont 
nous  avons  parlé,  on  a  joué  le  Trouvère,  et  Rlgolelto,  Eernani,  Lucrezia 
Borgia,  etc. ,  sont  annoncés.  La  salle,  très-spacieuse,  est  comble  chaque 
soir;  six  mille  spectateurs  y  ont  trouvé  place  le  jour  de  la  réouverture. 

^*<,  Vienne.  —  L'Opéra  a  clôturé  la  saison  le  29  mai  avec  Faust.  La 
réouverture  aura  lieu  le  1°'"  juillet.  —  La  nouvelle  salle  sera  inaugurée 
le  i"  avril  prochain;  les  travaux  sont  activement  poussés. 

^*^  Madrid.  —  La  troupe  d'opéra-bulfa  italien  engagée  pour  le  Théâ- 
tre-Rossini  des  C^impos-Elissos  se  compose  de  Mmes  de  Baillou,  Pozzi, 
Emilia  Grassi,  Rasori,  Fos<a  de  Ferrer,  MM.  Piazza,  Altini,  Giannini, 
Alessandro  Bottero  (le  célèbre  buffo  caricato),  Scannoviano,  Grassi.  Les 
représentations  ont  du  commencer  le  11  juin  par  Don  Bucefalo.    . 

Le  Directeur  :  S.  DUFOUR. 


m  KEVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE  DE  PAKIS. 


CHEZ    G.     BRANDUS    ET    S.     DUFOUR,    ÉDITEURS,     103,    RUE    DE    RICHELIEU 


LES 


DRAGONS  DE  VILLARS 

Opéra-comique  en  trois  actes,  paroles  de  MM.  Lockroy  et  Cormon,  musique  de 

A.    MAILLART 

CHANT     ET     PIAWO  I     A  PARTITION  PIAMO^SBUI. 

L'Ouverture 

Pour  le  Piano,  7  fr.  50.  —  A  quatre  mains,  9  fr.  —  Partition  et  Partie*  d'orchestre.  —  Pour  musique  militaire. 


Les  Airs  de  Chant  détachés  avec  accompagnement  de  Piano. 

ARRANGEMENTS  NOUVEAUX  POUR  LE  PIANO  : 
CRAMER.  Bouquet  de  mélodies  i  DUVERNOY.  Fantaisie  de  salon 

Mosaïque  pour  le  Piano,  prix  :  7  fr.  50.  '  Pour  le  Piano,  prix  :  7  fr.  50. 

E.   KETTERER.   Fantaisie  brillante  pour  le  piano,  7  50. 
STRAUSS.  Grand  quadrille  |  BURGMDLLER.  Valse  de  salon 

Pour  le  Piano  et  à  quatre  mains,  prix  :  4  fr.  50.  '  Arrangée  pour  Piano  à  quatre  mains. 


MORCEAUX    DIVERS    POUR    LE    PIANO 


F.  BDRMEIER.  Valse  de  salon S    » 

MARC  BORTY.  Mémento 7  50 

i.  CROISEZ.  Fantaisie  élégante 6    » 

A.  GORIA.  Fantaisie  de  salon 9    » 

LE  CARPENTIER.  Bagatelle 5    » 

Al.  LONCDETIUE.  Fantaisie  brillante.  6    » 


RDMMEl.  Fantaisie 6    » 

—  Amusement  très-facile 4  50 

—  Duo  à  quatre  mains 6    » 

H.  TAllQDET.  Morceau  très-facile...  2  50 

—  Petite  fantaisie  militaire....  5    » 

—  Duo  facile  à  quatre  mains . .  5    » 


SNTDERS.  Petite  fantaisie 6     » 

ED.  WOIFF.  Fantaisie  facile 4  50 

—    Duo  brillant 9    » 

AD.  BERIAN.  Mosaïque   pour  violon 

et  piano 9     » 

COIYNS.  Fantaisie  p.  violon  et  piano  9    » 


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Ettling.  Suite  de  Valses,  3  fr.  —  Musard.  Quadrille  pour  Piano  et  à  quatre  mains,  4  fr.  50.  —  Talexy.  Polka-Mazurka,  5  fr. 

Valiquet.  Quadrille  facile,  4  fr.  50.  —  Gaston  de  Lille.  Polka,  4  fr.  —  Marx.  Schottisch,  4  fr. 

l>e«  Airs  arrangés  poar  Violon,  pour  Flûte,  ponr  Cornet  et  pour  denx  Flûte*. 

Deux  Mosaïques  et  un  Pas  redoublé  pour  Musique  militaire,  par  d'ALLÉE. 

Edition    Populaire 

DE 

PARTITIONS  D'OPÉRAS,  D'OPÉRAS-COMIQUES  ET  D'OPÉRETTES 

Paroles  et  Uastqae  sans  accompa)j;nenient,  avec  analyse  de  la  pièce* 

FORMAT  DE  POCHE.  Partition  conforme  au  théâtre.  FORMAT  DE  POCHE. 

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3S'  Année. 


N'  25. 


ON  S'ABONNE  : 

Dauf  les  Déporlements  et  A  rÉtronger, 

chez  tous  les  Uarchands  de  Musique,  Irs  Librairei, 

«t  lux  Cureâux  de£  Messageries  et  des  Postes. 


.^J-TŒO-^SfeSiE^-ÏŒS- 


REVUE 


21  Juin  lgG8. 


PRIX    DE    L'ABONNEMENT: 

PariB 24   r.  par  on 

Dépnrtements,  Belgique  et  Saisie. ...    30  »      li. 
£lriu)ger 31  »       14. 

14  Joiiniai  puralt  le  Dimanche. 


ET 


GAZETTE  MUS 


DE     PARIS 


tVos  abonnés  reçoivent,  avec  le  numéro  d'aqjoard'hal, 
fe  Jtfeaaage,  nonvelle  mélodie  caractéristique,  paroles 
de  Pli.  Tliéoller,  musique  de  d>.-P.  CiOEiDBEBC 


SOMMAIRE.  — Études  sar  Charles-Marie  de  Weber  (troisième  partie,  4*  arti- 
cle), par  Edmond  IVeakomm.  —  Assemblée  générale  des  trois  Sociétés 
pour  la  perception  des  droits  d'auteur,  par  Tbomas  SauTaçe. — Les  Théâtres 
tyriqoes  secondaires  à  Pans  depuis  182»  fl"  ai  title),  jmr  Arthur  Poupin. 

—  Ministère  de  la  maison  de  l'Empereur  et  des  beaux-arts,  direction  générale 
des  thé&tres,  aris.  —  Nouvelles  des  thé&tres  lyriques.  —  Nouvelles  diverses. 

—  Annonces. 


ÉTUDES  SUR  CEÂRLES-IÀRIE  DE  WEBE). 

D'après   la   blograplile    écrite   par   son  lils. 

TROISIÈME  PARTIE. 

(4«  article)  (1). 

Cependant  "Weber  ne  voyait  pas  l'avenir  d'un  œil  bien  ras- 
suré; il  avait  gagné  les  deux  premières  parties,  mais  avec  quelle 
peine  et  à  travers  quel  réseau  d'intrigues  !  On  ne  doit  donc  pas 
s'étonner  qu'il  accueillit  avec  joie  les  premières  ouvertures  que  lui 
fit,  vers  ce  temps,  le  comte  Brûhl,  pour  remplacer  à  Berlin  le 
maître  de  chapelle  Gûriich,  qui  venait  de  mourir.  "Weber  pesa  bien 
le  pour  et  le  contre  de  la  position  qu'il  occupait  et  de  celle  qu'on 
lui  proposait;  d'une  part  c'étaient,  comme  il  écrivait  à  sa  fiancée  : 
«  Cinq  cents  thalers  de  plus  par  an,  mais  une  vie  plus  coûteuse; 
des  profits  plus  nombreux,  des  concerts,  des  leçons;  un  engage- 
ment à  vie  ;  un  grand  théâtre  ;  mais  aussi  beaucoup  d'ennuis  avec 
ses  collègues  et  une  existence  moins  calme;  »  d'autre  part,  à 
Dresde  :  «  Rien  à  gagner,  rien  à  attendre,  rien  de  certain;  mais 
l'opéra  allemand  dans  cette  ville  était  son  œuvre,  et,  de  plus,  son 

intérieur  y  serait  bien  plus  charmant »  —  Quoiqu'il  en   soit, 

Weber  se  décida  pour  Berlin;    il   accepta  les  offres  de  M.  de 
Brûhl,  et  fit  ses  premiers  préparatifs  de  voyage;  mais,  hélas!  il  avait 


(1)  Voir  les  n"  18,  21  et  23. 


compté  sans  sa  mauvaise  étoile;  car  le  malheur  voulut  que  le 
théâtre  royal  de  Berlin  brûlât,  et  que,  dans  son  mécontentement, 
le  roi  déclarât,  à  la  suite  de  ce  désastre,  que  Giirlich  ne  serait  pas 
remplacé. 

Weber  avait  tenu  secrètes  ces  négociations;  cependant  le  bruit 
s'en  était  répandu,  et  dès  lors  on  pense  quel  parti  s'empressa  d'en 
tirer  le  camp  italien.  «  Quoi,  disait-on,  un  maître  de  chapelle  du 
roi  de  Saxe  s'aviser  d'établir  des  relations  avec  une  autre  cour,  et 
encore  avec  quelle  couri  avec  la  cour  de  Prusse!!  Jamais  un  Ita- 
lien n'aurait  fait  cela!  Et  maintenant,  qu'on  vienne  donc  parler 
de  la  fidélité  tant  prônée  de  cet  Allemand,  de  son  dévouement  à 
ses  princes  !  » 

Ce  dernier  propos  alla  au  cœur  de  Weber,  et  comme  la  fête  de 
la  gentille  princesse  Marie-Anne  Caroline,  fille  d'un  frère  du  roi, 
approchait,  il  prit  la  plume  et  composa  d'un  trait  une  adorable 
petite  cantate,  qu'il  se  proposa  de  faire  chanter  à  Pillnitz,  le  ma- 
tin de  la  fête,  pendant  que  la  famille  prendrait  le  café.  «  Je  me 
levai  à  quatre  heures,  écrit-il  à  Caroline  Brandt,  ces  messieurs  du 
théâtre  vinrent  déjeuner  avec  moi,  puis  nous  partîmes  pour 
Pillnitz.  Lorsque  la  famille  se  mit  à  table  pour  le  café,  nous  nous 
glissâmes  dans  une  pièce  voisine  et  la  musique  commença.  Tu  ne 
sSurais  t' imaginer  quels  furent  la  joie,  l'étonnement,  l'émotion 
des  princes  et  de  quelles  démonstrations  d'amitié  ils  nous  entou- 
rèrent. Nous  dûmes  recommencer  la  cantate,  et  peu  s'en  fallut  que 
mes  chanteurs  ne  pleurassent  avec  les  assistants....  » 

Le  mariage  devait  avoir  lieu  au  commencement  de  l'automne. 
Le  poëte  Celani  avait  dès  longtemps  à  l'avance  versifié  une  can- 
tate de  circonstance  dont  Morlacchi  devait  composer  la  musique. 
Mais  dans  l'intervalle,  Morlacchi  avait  profité  d'une  absence  de 
Vitzthum  pour  demander  un  congé  de  huit  mois  ;  il  l'avait  obtenu 
et  s'était  empressé  de  s'enfuir  à  Naples  avant  le  retour  de  son 
chef,  laissant  toute  sa  besogne  aux  mains  de  Weber,  qui  se 
voyait,  par  suite,  privé  de  son  congé  de  deux  mois.  —  Comme 
dédommagement,  Vitzthum,  à  son  retour,  le  fit  nommer  maître 
de  chapelle  à  vie,  avec  une  gratification  annuelle  de  deux  cents 
thalers  et  deux  mois  de  congé  réglementaires.  —  Weber  fut  donc 
chargé  delà  cantate  officielle;  il  la  composa  sur  unpoëme  allemand 
de  Kind,  qui  portait  le  titre  :  Der  Weinsberg  an  der  Elbe  ;  mais 
cela  ne  faisait  pas  le  compte  de  l'abbé  Celani;  il  intrigua  si  bien 


194 


hKVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


auprès  du  comte  Einsiedel,  que  ce  dernier  enjoignit  à  Weber  d'a- 
voir à  mettre  en  musique  la  cantate  italienne  intitu'ée  : 
«  L'Accoglienza  In  occasione  del  felice  Imeneo  délia  A.  J.  e.  R. 
Leopoldo  di  Toscana  e  Maria  Anna  di  Sassonia.  »  Weber  dut  se 
remettre  à  l'œuvre,  et  en  moins  de  huit  jours  composer  plusieurs 
morceaux,  dont  quelques-uns,  entre  auti-es  le  cliœur  d'introduction 
et  un  hymne  à  la  joie,  —  sont  tout  à  fait  dignes  de  lui. 

Outre  ces  deux  cantates,  Weber,  quoiqu'il  fût  surchargé  de  be- 
sogne, composa  plusieurs  morceaux  dans  le  cours  de  l'année  1817, 
notamment  des  Lieder,  parmi  lesquels  la  Violette,  un  bijou  de 
grâce  et  d'aimable  poésie,  et  surtout,  ce  qui  est  bien  autrement 
important  pour  l'histoire  de  l'art,  les  premiers  fragments  du 
FreiscAûts,  cet  opéra  aux  grandes  et  largos  proportions  que  les 
Allemands  appellent  l'opéra  par  exceUeiice. 

Oa  se  rappelle  que  le  sujet  du  Freischiitz,  qui  est  tiré  d'une 
vieille  légende  allemande,  racontée  par  Apel  dans  son  Livre  des 
Spectres,  avait  attiré  l'attention  de  Weber  dès  l'année  1810,  ii  l'é- 
poque oii  il  se  trouvait  ii  Mannheim,  en  compagnie  de  Gottfried 
Weber  et  d'Alexandre  de  Diisch  ;  ce  dernier  avait  même,  sur  ses 
instances,  esquissé  un  scénario,  que  Weber  se  proposait  démettre 
en  musique.  Pour  le  plus  grand  bonheur  de  l'art  musical,  l'en- 
thousiasme du  jeune  maître  pour  ce  sujet  d'opéra  se  calma  au 
bout  de  peu  de  temps  ;  il  se  remit  à  travailler  à  son  Abu-Hassan, 
qu'il  avait  commencé  à  Suttgard,  et  le  Freischiitz  fut  oublié,  pour 
le  plus  grand  bonheur  de  l'art  musical,  nous  le  répétons,  car  il 
est  permis  de  douter  que  le  Freischiitz  de  1810  eût  valu  celui  de 
1821.  Ce  ne  fut  que  sept  ans  plus  tard,  c'est-à-dire  en  1817,  que 
Weber,  s'étant  lié  d'une  étroite  amitié  avec  le  poète  Ivind,  qu'il 
avait  rencontré  à  son  arrivée  à  Dresde,  se  souvint  "à  propos  du 
conte  qui  l'avait  tant  frappé  dans  sa  jeunesse,  et  pria  ce  dernier 
d'en  tirer  un  libretto,  dont  il  pût  commencer  aussitôt  la  musique. 
On  convint  d'une  somme  de  30  ducats,  une  fois  payée  pour  tous 
lionoraires;  Weber  la  coii*.pta  sur-le-champ  à  son  collaborateur, 
qui  se  mit  activement  à  l'œuvre.  On  verra  dans  la  suite  que  ces 
trente  ducats  furent  la  source  d'un  grand  chagrin  pour  le  maître. 

Le  conte  d'Apel  plut  au  poète  Kind  ;  aussi  eût-il  bientôt  fini  de 
versifier  son  libretto.  Weber  se  hâta  d'en  raconter  le  sujet  à  sa 
fiancée  ;  il  ne  diffère  en  rien  de  celui  que  nous  connaissons,  à 
l'exception  des  deux  premières  scènes,  que  la  petite  Brandt,  avec 
son  expérience  de  la  scène,  lui  conseilla  de  changer;  en  effet, 
dans  le  texte  primitif  de  Rind,  l'opéra  débutait  par  deux  scènes 
entre  Agathe,  Annette  et  l'ermite,  qui  contrastaient  de  la  façon  la 
plus  froide  avec  la  péroraison  si  brillante  de  l'ouverture.  «  Hetran- 
che  ces  deux  scènes;  »  écrit  Caroline  Biandt  à  son  fiancé,  «  entre 
d'emblée  dans  la  vie  populaire  dès  le  début  de  cet  opéra  populaire; 
crois-moi,  et  commence  immédiatement  par  la  scène  de  l'auberge.  • 
—  On  sait  de  quel  effet  est  cette  scène,  avec  son  entrain,  ses 
groupes  de  gens  en  fête  et  ses  joyeux  coups  de  fusils. 

11  appartenait  vraiment  à  Caroline  Brandt  de  donner  à  Weber 
ce  conseil  salutaire;  car,  dans  son  esprit,  il  confondait  avec  elle 
son  autre  fiancée,  la  Fiancée  du  Chasseur  (ce  fut  le  premier  titre 
de  l'ouvrage),  comme  jadis  et  dans  les  mêmes  circonstances,  Mozart 
avait  confondu  dans  son  imagination  sa  fiancée,  Constance  de 
Weber,  —  qui  était,  comme  on  l'a  vu,  la  cousine  de  Charles- 
Marie  de  Weber,  —  avec  la  Constance  de  l'Enlèvement  au  Sérail  ; 
et  c'est  sans  doute  à  ce  rapprochement,  venu  de  la  coïncidence  de 
parenté,  qu'il  faut  rapporter  la  prédilection  toute  spéciale  de  We- 
ber pour  cet  ouvrage  :  «  fliozart,  disait-il  souvent,  aurait  pu,  s'il 
eût  vécu,  composer  vingt  chefs-d'œuvre  pareils  à  Don  Juan;  mais 
il  n'eût  pas  fait  un  second  Enlèvement  au  Sérail.  » 

Weber  travaillait  donc  sans  relâche  à  sa  Fiancée  du  Chasseur, 
mais  de  tête  seulement,  car  la  première  note  ne  fut  écrite  que  le 
12  juillet  de  l'année  1817,  c'est-à-dire  plus  de  cinq  mois  après  sa 


mise  en  possession  du  libretto.  Le  Freischiitz,  qui  est  le  chef- 
d'œuvre  de  Weber,  no  fut  pas  écrit  au  jour  le  jour;  Weber  le  lira 
des  quintescences  mêmes  de  sa  vie,  le  laissant  se  développer  germe 
à  germe,  feuille  à  feuille  dans  le  fond  de  son  cœur.  11  n'y  a  pas 
dans  la  partition  un  morceau  qu'il  n'ait  changé  dix  fois  mentale- 
ment, jusqu'à  ce  qu'il  en  fût  satisfait  et  qu'il  s'écriât  :  «  Voilà 
comme  il  doit  être  !  »  Alors  il  l'écrivait  d'un  trait,  sans  y  changer 
une  seule  note.  Cela  seul  explique  l'imposante  maturité  d'idées 
jointe  à  la  parfaite  clarté  que  l'on  remarque  dans  tous  les  numéros 
de  cet  ouvrage, 

Qu'on  le  sache  bien,  Weber  travaillait  sans  cesse.  Pour  lui,  le 
monde  extérieur  se  composait  de  sons  musicaux,  et,  par  un  en- 
traînement secret  des  phénomènes  de  la  vie,  la  couleur,  la  forme, 
le  temps  et  l'espace  se  traduisaient  dans  son  âme  par  des  mélodies... 
S'il  voyageait,  la  contrée  se  déroulait  symphoniquemeut  à  son 
oreille  comme  elle  se  déroulait  optiquement  à  sa  vue,  et  les 
mélodies  jaillissaient  de  chaque  élévation  de  terrain,  de  chaque 
buisson  agité  par  le  vent.  Ses  voyages  restaient  gravés  dans  son 
esprit  sous  la  forme  de  poésies  musicales,  et  avant  même  qu'un 
site  se  présentât  à  son  souvenir,  il  se  rappelait  le  motif  dans  le- 
quel la  vue  s'en  était  traduite  pour  lui.  Mais  si  parfaitement  que 
sonnassent  les  mélodies  arrachées  de  son  cœur  pendant  la  durée 
de  l'apparition,  Weber  se  gardait  généralement  de  les  écrire  aus- 
sitôt, l'expérience  lui  ayant  enseigné  qu'il  en  était  de  la  valeur  de 
ces  improvisations  comme  des  brillants  impromptus  qui  tombent 
sans  éclat  et  glacés  sur  le  papier. 

Il  ne  faudrait  pas  cependant  conclure  de  la  façon  dont  le  monde 
extérieur  inspirait  Weber,  que  les  similitudes  d'objets  et  d'idées 
fussent  observées.  Bien  au  contraire,  le  paysage  le  plus  splendide 
donnait  souvent  naissance  à  un  caprice  bouffe,  de  même  qu'une 
scène  grotesque  pouvait  engendrer  un  adagio  plein  de  langueur. 
Ses  meilleures  inspirations  prenaient  même  parfois  naissance  dans 
des  circonstances  futiles  ;  c'est  ainsi  que  le  chœur  du  rire,  au  pre- 
mier acte  du  Freischiitz,  a  son  origine  dans  les  fausses  intonations 
de  vieilles  femmes  qui  psalmodiaient  une  litanie,  pendant  un  ser- 
vice à  la  chapelle  de  Pillnitz;  de  même,  la  scène  de  la  Gorge  aux 
loups,  si  puissamment  fantastique,  fut  conçue  dans  un  trajet  de 
Dresde  à  Pillnitz ,  par  un  brouillard  épais  qui  ressemblait  à  de 
gros  nuages  se  pelotonnant  et  s'erichevêtrant  autour  de  la  voiture. 
Que  si  nous  voulons  chercher  un  exemple  plus  saisissant  encore 
de  ce  phénomène ,  c'est  dans  l'enfantement  de  la  belle  marche 
d'Otéi-on  que  nous  le  trouverons.  Le  clarinettiste  Roth,  de 
la  chapelle  royale,  nous  en  a  conservé  un  curieux  récit  ;  nous  le 
reproduisons,  en  ayant  soin  de  lui  laisser  toute  sa  couleur  germa- 
nique : 

«  Quand  on  jouait  l'opéra  au  bains  de  Linke,  dit-il,  M.  le  maî- 
tre de  chapelle  et  moi  avions  coutume  de  nous  y  rendre  aussitôt 
après  le  dîner,  pour  y  prendre  le  café.  Pendant  le  trajet,  M.  le 
maître  de  chapelle  ne  se  montrait  pas  très-communicatif,  il  mar- 
chait la  tête  baissée,  les  mains  derrière  le  dos  et  ne  levait  même 
pas  la  tête,  quand  les  passants,  se  poussant  du  coude,  disaient  : 
«  Voilà  Weber,  »  ce  qu'il  avait  coutume  de  faire  ordinairement  en 
leur  souriaut,  car  il  était  très-fier  d'être  connu  du  peuple.  Ce 
n'est  qu'après  avoir  pris  son  café  qu'il  devenait  plus  expansif. 

»  Un  certain  jour  du  mois  de  mai  1818,  comme  nous  arrivions  à 
la  Porte-Noire,  il  commença  à  pleuvoir  et  M.  le  maître  de  cha- 
pelle avait  la  figure  encore  plus  sombre  que  de  coutume,  d'autant 
plus  qu'un  asthme,  dont  il  souffrait  à  cette  époque,  l'empêchait  de 
marcher  vite.  Quand  nous  arrivâmes  dans  le  jardin  des  bains  de 
Linke,  tout  le  monde  s'était  mis  à  couvert  à  cause  de  la  pluie;  il 
était  vide  et  les  garçons  étaient  en  train  d'empiler  les  chaises  et 
les  tables,  ce  qui  donnait  un  aspect  tout  à  fait  curieux  au  jardin. 
En  voyant   ce  pêle-mêle  de  tables,  de  chaises  et  de  bancs,  for- 


DE  PARIS. 


49S 


rtiant  des  pyramides  insensées ,  M.  le  maître  de  chapelle  s'arrêta 

brusquement  et  s'écria  :  «  Roth,  regardez  donc la  belle  marche 

triomphale! pardieu,    quels    coups   de    trompettes! Eh 

mais,  c'est  ce  qu'il  me  faut! je  la  tiens  donc  enfin!...»  Et, 

entrant  aussitôt  dans  la  grande  salle,  il  demanda  du  papier  à  mu- 
sique et  esquissa  complètement,  pour  instruments  à  vent,  une 
magnifique  marche,  dont  il  avait  besoin  pour  le  drame  de  Henri  IV, 
de  Gehe;  il  avait  terminé  sa  besogne  avant  la  représentation  et 
c'est  cette  même  marche,  orchestrée  à  nouveau,  qui  fut  introduite 
plus  tard  dans  Ohéron.  » 

Edmond  NEUKOMM. 
{La  suite  prochainement.) 


ASSEMBLÉES  GÉNÉRALES 

Des  trol»  Sociétés)  pour  la  perception  de*  droil» 
d'auteurs. 

La  Société  des  gens  de  lettres,  la  Société  des  auteurs  et  com- 
positeurs dramatiques,  celle  des  auteurs,  compositeurs  et  éditeurs 
de  musique  ont  ordinairement  à  cette  époque  de  l'année  et  elles 
ont  eu  dans  ces  derniers  quinze  jours,  une  Assemblée  pour  en- 
tendre leurs  différents  comptes,  et  traiter  les  questions  d'affaires 
présentes  ou  à  venir,"  qui  les  intéressent. 

Les  trois  Sociétés,  quoique  ayant  le  même  but,  la  défense  gé- 
nérale, par  l'association,  des  intérêts  particuliers  et  la  perception 
des  droits  à  frais  communs,  sont  régies  chacune  par  des  Statuts  spé- 
ciaux. Ces  actes  constitutifs  ont  pris  pour  base  et  pour  modèle 
les  actes  de  la  Société  des  auteurs  et  compositeurs  dramatiques,  la 
première  formée.  Cependant,  la  différence  des  produits  et  de  leur 
exploitation  a  nécessairement  amené  des  modifications  dans  les 
conditions  sociales  de  ces  Associations  qui,  en  se  développant,  ont 
dû  étendre  leurs  moyens  d'action.  Une  des  singularités  de  ces 
trois  Sociétés,  c'est  que,  composées  d'hommes  exerçant  les  plus  li- 
bérales des  professions,  fondées  dans  un  temps  oti  l'on  réclame 
toutes  les  libertés,  elles  sont  basées  sur  l'enchaînement  de  la  libre 
disposition  de  la  propriété  de  chacun. 

Je  ne  prétends  discuter  ici  ni  l'utilité,  ni  les  ihconvénients  de 
ces  liens.  Je  constate  seulement  qu'ils  existent  en  vertu  d'actes; 
qu'ils  ont  été  librement,  volontairement  acceptés  par  ceux  qui  ont 
voulu  participer  aux  avantages  de  ces  Sociétés;  qu'il  faut  donc  s'y 
soumettre.  Ces  actes  d'ailleurs  ont  déjà  des  dates  anciennes  :  les  So- 
ciétés se  sont  développées  et  agrandies,  leurs  produits  ont  augmenté 
dans  des  proportions  qu'on  ne  pouvait  prévoir  et  malheureusement 
leur  répartition,  avec  quelque  soin,  quelque  équité  qu'on  la  fasse, 
ne'  saurait  être  égale.  Le  talent,  le  mérite  d'abord,  puis  la  chance, 
le  bonheur,  le  hasard  donnent  les  plus  grosses  parts. 

Il  résulte  de  là  que,  depuis  quelque  temps  dans  les  Assemblées 
de  ces  différentes  Sociétés  règne  une  certaine  agitation  :  on  rêve 
des  créations  utopiques,  des  opérations  fabuleuses,  impossibles  ! 
On  espère  trouver  dans  des  changements  aux  actes  constitutifs  des 
améliorations  aux  situations  pénibles  :  on  les  appelle,  on  les 
demande... 

La  Société  des  gens  de  lettres  elle,  la  première  des  trois, 
après  de  longues  et  nombreuses  réclamations  a  franchement  abor- 
dée les  réformes.  Une  commission  nommée  par  les  réclamants  a 
formulé  leurs  demandes.  Le  comité  a,  de  son  côté,  choisi  un  certain 
nombre  de  ses  membres  pour  s'adjoindre  à  cette  commission  et 
discuter  les  articles  nouveaux  ou  les  amendements  apportés  aux 
anciens.  De  cette  réunion  est  résulté  un  travail  qui  a  été  soumis, 
article  par  article,  au  vote  et  à  la  discussion  d'assemblées  générales 


pendant  trois  années.  Enfin,  le  3  mai  dernier,  lecture  a  été  donnée 
de  l'ensemble  des  Statuts,  pour  l'adoption  desquels  on  a  procédé 
au  scrutin.  Sur  12S  volants,  108  ont  adopté  le  projet,  lo  l'ont 
repoussé,  —  il  y  a  eu  deux  billets  blancs.  L'Assemblée  entière 
a  voté  des  remerciements  à  la  commission  de  révision  des 
Statuts  et  à  la  commission  mixte;  puis  au  scrutin  secret,  M.  Jules 
Simon  a  été  nommé  président,  en  remplacement  de  M.  Paul  Féval, 
dont  le  mandat,  qu'il  avait  accompli  à  la  satisfaction  générale, 
venait  d'expirer. 

Voilà  donc  le  calme  revenu  dans  la  Société  des  gens  de  lettres. 
Croyons  qu'il  s'y  maintiendra  longtemps. 

A  la  Société  des  auteurs  et  compositeurs  dramatiques,  la  séance 
annuelle  a  laissé  les  questions  constitutives  indécises,  irrésolues. 
Il  faudra  pourtant  bien  les  aborder,  et  M.  Brisebarre,  un  des 
nouveaux  membres  appelés  à  la  commission,  dans  une  improvisa- 
tion verveuse  et  incisive,  a  fait  sentir  la  nécessité  de  s'en 
occuper. 

Les  rapports  sur  l'état  financier  et  l'état  moral  de  la  Société 
avaient  en  général  satisfait  l'assemblée,  lorsque  tout  à  coup  une 
immense  tempête  de  réclamations  s'est  élevée  contre  la  direction 
du  théâtre  impérial  de  l'Opéra-Comique. 

Les  auteurs  qui  travaillent  pour  ce  théâtre,  surtout  les  compo- 
siteurs, —  je  ne  dirai  pas  les  jeunes  compositeurs,  car  il  y  en  a 
beaucoup  qui  ont  bien  dépassé  la  quarantaine,  —  ont  vociféré  les 
plaintes  les  plus  violentes  contre  un  système  d'administration  qui 
rend  impossible  leur  abord  de  cette  scène,  contrairement  aux  sti- 
pulations du  cahier  des  charges  imposées  à  la  direction,  pour  prix 
de  la  subvention  de  240,000  francs  qui  lui  est  accordée,  stipula- 
tions qui  l'obligent  à  faire  représenter  chaque  année  vingt  actes 
nouveaux,  savoir  :  quatre  grands  ouvrages  et  quatre  petits. 

L'on  comprend  que  ces  questions  brûlantes  aient  animé,  pas- 
sionné les  intéressés.  Il  a  été  question  de  formuler  un  blâme 
général  contre  cette  administration.  C'était  grave!  —  Des  esprits 
modérés  et  conciliants  ont  ramené  à  faire  décider  qu'il  serait  fait 
par  les  commissaires  une  démarche  auprès  de  la  Commission  du 
budget,  pour  obtenir  que  désormais  le  don  de  la  subvention  soit 
réglé  sur  l'exécution  du  Cahier  des  charges. 

Puis,  on  a  procédé  à  la  nomination  des  commissaires  rempla- 
çant les  membres  sortants  :  le  scrutin  a  donné  pour  résultat  les 
noms,  fort  heureusement  choisis,  de  MM.  Victorien  Sardou,  Emile 
Jonas ,  Brisebarre,  Gondinet ,  Auguste  Maquet.  Suppléants: 
MM.  Emile  de  Girardin,  Th.  Semet. 

Quant  à  la  troisième  Société,  celle  des  Auteurs,  Compositeurs 
ET  Éditeurs  de  musique,  dont  l'assemblée  générale  annuelle  a  eu 
lieu  le  dimanche  14  juin ,  j'allais  en  aborder  le  compte  rendu, 
lorsque  le  Petit  Journal  du  IS, —  je  lis  exactement  et  avec  le  plus 
grand  plaisir  le  Petit  Journal,  pour  moi,  le  meilleur  de  tous  !  — 
lorsque,  dis-je,  le  Petit  Journal  m'apporta  ma  besogne  toute  faite, 
et  faite  comme  sait  faire  son  chroniqueur  si  populaire  :  Timothée 
Tri  mm. 

Le  Petit  Journal  est  sans  doute  lu  de  tout  le  monde  et  de  beau- 
coup d'autres  ;  —  cependant,  comme  dans  son  récit  il  s'est  plus 
occupé  de  détails  relatifs  à  l'origine  de  la  Société  que  des  faits 
de  la  séance  dont  il  s'agit,  je  ne  me  crois  pas  dispensé  de  les 
exposer  ici. 

L'assemblée  était  nombreuse,  et  non  moins  échauffée  par  l'at- 
mosphère que  par  des  discussions  préliminaires  très-animées. 

Dès  l'ouverture  de  la  séance,  présidée  par  M.  Thys,  une  question 
préjudicielle  a  été  posée  par  M.  Avenel  à  propos  de  trois  membres 
du  syndicat  appelés  dans  le  cours  de  l'année  au  syndicat  par  suite 
de  démissions.  —  Les  explications  du  président  ont  démontré 
que  l'approbation  de  cette  triple  nomination  serait  soumise  à 
l'assemblée    en    même   temps   que  le    rapport  du  président,  et 


I 


196 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


l'on  a  pu  aborder  l'ordre  du  jour  qui  appelait  le  rapport  du 
trésorier.  Clair,  lumineux,  logique  comme  Barème,  M.  Ch.  Plan- 
tade  a  signalé  la  notable  augmentation  de  la  recette  (1)  s' élevant 
à  89,632  fr.  64  c.,  la  plus  forte  qui  ait  encore  eu  lieu.  Cet  accrois- 
sement des  produits  a  cela  de  remarquable  qu'il  porte  sur  les  dé- 
partements aussi  bien  que  sur  Paris  ;  tandis  que  l'Exposition,  qui 
a  considérablement  augmenté  les  droits  des  auteurs  dramatiques 
à  Paris,  a  diminué  de  vingt  pour  cent  ces  mêmes  droits  dans  les 
départements. 

On  doit  certainement  attribuer  la  prospérité  croissante  de  la  So- 
ciété des  auteurs,  compositeurs  et  éditeurs  de  musique,  au  ^oût 
généralement  plus  répandu  de  la  grande  musique,  de  la  musique 
d'ensemble,  qui  multiplie  les  concerts  sérieux,  les  sociétés  philhar- 
moniques, les  orphéons. 

Ce  rapport,  fort  approuvé,  après  avoir  donné  lieu  à  quelques 
observations  de  détail  présentées  par  M.  Deshorties,  —  observations 
intéressantes  qui  seront  sans  doute  prises  en  considération  par  le 
syndicat,  —  a  été  suivi  du  rapport  du  président.  L'année  n'ayant 
pas  été  féconde  en  événements,  M.  Thys  n'a  pu  que  constater  la 
marche  régulière  des  affaires.  Mais  ici  ont  surgi  de  nombreuses 
réclamations  sur  l'organisation  de  la  société,  notamment  contre 
l'admission  des  éditeurs. 

Ces  réclamations,  plus  ou  moins  précises,  avaient  été  déjà  for? 
mulées  l'année  dernière  et  à  la  suite  de  la  réunion  annuelle,  une 
demande  d'assemblée  générale,  contenant  certaines  propositions 
hardies,  avait  été  adressée  au  syndicat,  qui  avait  cru  devoir  sou- 
mettre le  tout  à  l'appréciation  de  son  conseil  judiciaire. 

Le  conseil  avait  jugé  que  l'assemblée,  vu  l'objet  que  l'on  s'y 
proposait,  ne  devait  pas  être  accordée. 

C'est  contre  cette  décision  que  l'on  revenait,  ici,  —  ce  que  ne 
pouvait  raconter  Timothée  Trimm,  —  je  dois  le  dire  :  M.  Léo 
Lespès,  nouveau  membre  de  la  Société,  a  payé  sa  bienvenue  avec 
une  de  ces  improvisations  fines,  aimables,  élégantes,  dont  il  gra- 
tifie les  autres  sociétés  auxquelles  il  appartient,  —  homo  triplex  ; 
triple  comme  Hécate! 

Naturellement  encore  très-peu  au  courant  des  afl'aires,  des  sta- 
tuts de  notre  Société,  —  il  ne  lui  appartenait,  a-t-il  dit,  que  depuis 
le  matin  même,  —  et  je  n'affirmerais  pas  que  sa  présence  à  la 
séance  fût  bien  régulière,  le  syndicat  n'ayant  pas  voté  sur  son  ad- 
mission; —  M.  Léo  Lespès  a  dû  se  maintenir  dans  les  généralités, 
et  sa  discussion,  un  peu  vague,  n'est  pas  arrivée  à  des  conclu- 
sions bien  positives  ;  mais  il  a  manifesté  les  plus  louables  inten- 
tions, et,  quant  à  moi,  persuadé  que  cet  esprit  net  et  juste,  ce 
caractère  loyal  et  conciliant  seraient  fort  utiles  à  l'arrangement 
des  difficultés  que  nous  désirons  tous  aplanir,  si  j'avais  pu  pen- 
ser que  cet  excellent  et  très-distingué  confrère  fût  en  disposition 
d'accepter  les  fonctions  de  syndic,  j'aurais  supplié  l'assemblée  de 
joindre  les  quatre-vingt-douze  voix  qu'elle  a  bien  voulu  me  donner 
aux  quarante-huit  que  M.  Léo  Lespès  a  obtenues,  sans  se  porter 
candidat.  Ce  qui  ne  s'est  pas  fait  hier  peut  se  faire  l'an  pro- 
chain . 

L'on  a  enfin  décidé  qu'une  prochaine  assemblée  générale  aurait 
lieu  pour  discuter  l'importance  d'une  révision  des  statuts;  mais 
cette  révision  n'est  pas  l'affaire  d'un  jour. 

Les  nouveaux  syndics  nommés  en  remplacement  des  membres 
sortants  du  syndicat,  tous  élus  à  la  majorité  absolue  de  l'assemblée 
et  au  premier  tour  de  scrutin,  sont  :  MM.  Thomas  Sauvage,  au- 
teur ;  Emile  Jonas,  compositeur,  et  Colombier,  éditeur. 


(1)  La  recette  totale  est  de  384,408  fr.  i3  centimes. 


Il  est  à  remarquer  que,  dans  cette  séance  où  s'était  manifestée 
une  assez  grande  répulsion  conlre  l'adjonction  des  éditeurs,  c'est 
l'ÉDiTEUR  qui  a  réuni  le  plus  grand  nombre  de  suffrages  !  Comme 
l'on  voit,  l'antipathie  n'est  pas  si  prononcée  qu'on  le  dit. 

Thomas  SAUVAGE. 


LES  THÉÂTRES  LYRIQUES  SECONDAIRES  A  PARIS 

DEPVIiS    isieo. 

(Premier  article.) 

On  est  généralement  assez  mal  renseigné  sur  ce  qui  s'est  pro- 
duit de  musical  chez  nous  au  théâtre,  depuis  un  demi-siècle,  en 
dehors  de  nos  grandes  scènes  lyriques.  A  peine  sait-on  qu'il  a 
existé  deux  ou  trois  entreprises  dramatiques,  dans  lesquelles  l'é- 
lément musical  se  combinait  avec  d'autres  pour  constituer  un  en- 
semble varié,  et  d'autant  plus  attrayant  qu'à  cette  époque  les 
genres  étaient  absolument  déterminés.  Quant  à  savoir  au  juste  ce 
que  ces  théâtres  secondaires ,  et  d'une  existence  malheureusement 
trop  courte,  ont  mis  en  lumière  comme  oeuvres,  comme  auteurs, 
comme  artistes,  il  n'y  faut  point  songer;  et  pour  l'apprendre  on 
serait  obligé  d'avoir  recours  à  une  foule  de  livres,  de  journaux, 
de  recueils  spéciaux  aujourd'hui  oubliés ,  et  dans  lesquels  les  re- 
cherches, d'ailleurs,  ne  sont  pas  toujours  faciles. 

Ce  petit  chapitre  du  mouvement  musical  contemporain  n'est  pas 
cependant  sans  intérêt,  et,  ne  fût-ce  qu'à  titre  de  curiosité,  il  nous 
semble  qu'il  n'est  pas  absolument  inutile  de  l'esquisser.  N'est-ce 
pas  sur  les  théâtres  secondaires  dont  nous  voulons  parler  que 
trois  de  nos  compositeurs  les  plus  aimables  et  les  plus  aimés, 
Adolphe  Adam,  M.  Grisar  et  M.  de  Flotow,  ont  fait  leurs  pre- 
mières armes,  c'est-à-dire  remporté  leurs  premiers  succès?  Et  cela 
est-il  indifférent  à  connaître?  Evidemment  non. 

Nous  allons  donc,  remontant  le  cours  des  temps ,  —  mais  seu- 
lement jusqu'à  l'an  1820  —  essayer  de  retracer  ici  le  chapitre  en 
question.  Toutefois,  il  faut  voir  auparavant  à  qui  nous  aurons  af- 
faire, c'est-à-dire  quels  théâtres  vont  nous  occuper,  quels  théâtres 
n'ont  pas  jugé  trop  indigne  d'eux  et  de  leur  public  d'encourager 
quelque  peu  l'art  musical  dans  un  temps  où  celui-ci  était  beau- 
coup plus  protégé  que  de  raison,  c'est-à-dire,  pour  parler  net, 
dans  un  temps  où  l'on  s'efforçait,  sous  le  grand  mot  de  protec- 
tion, d'entraver  le  plus  possible  son  expansion  complète. 

Ces  théâtres  ont  été  les  suivants  :  Gymnase-Dramatique,  ou 
théâtre  de  Madame  (1820-1827);  —  Odéon  (1824-1829);  —  théâtre 
des  Nouveautés  (1827-1831);  —  théâtre  de  la  Renaissance  (1838- 
4841);  —  théâtre  Beaumarchais  (1848-1849);  —  Folies -Nouvelles 
(1854-1860);  —  Bouffes-Parisiens  (1 835-1867);  —  théâtre  des 
Champs-Elysées. 

Nous  suivrons,  dans  ces  études  familières,  l'ordre  chronologi- 
que, et  nous  commencerons  par  conséquent  par  le  Gymnase- 
Dramatique. 

I.  —  Gymnase-Dramatique. 

Jetons  les  yeux  sur  un  recueil  du  temps,  qui  va  nous  montrer 
dans  quelles  conditions  s'est  ouvert  le  Gymnase-Dramatique,  et 
par  suite  de  quel  petit  machiavélisme  la  musique  a  été  pendant 
un  certain  temps  mêlée  à  son  existence, — car  il  est  à  remarquer 
que  celui-ci  est  le  seul  de  ceux  dont  nous  devons  parler  qui  ait 
été  semi-lyrique  à  son  corps  défendant. 

Voici  ce  qu'en  disait  l'Almanach  des  Spectacles,  rédigé  par  Mer- 
ville  et  Coupart,  et  publié  par  le  célèbre  libraire  Barba  : 

«  Ce  théâtre  est  une  critique  parlante  du  système  des  privilèges. 
Pour  l'autoriser   sans    montrer   trop   ouvertement  que   ce    n'était 


DE  PARIS. 


497 


qu'une  faveur  qu'on  accordait,  et  pour  avoir  quelque  chose  à  ré- 
pondre aux  réclamations  qu'on  ne  prévoyait  que  trop,  on  le  sou- 
mit à  un  régime  particulier.  Le  vaudeville  était  déjà  joué  dans 
six  théâtres;  c'était  marquer  beaucoup  de  prédilection  pour  un 
genre  frivole,  que  d'en  créer  un  septième  qui  lui  fût  encore  spé- 
cialement consacré.  On  éluda  la  difficulté,  ou  du  moins  on  fit 
semblant  de  l'éluder.  Les  lettres  patentes  du  Gymnase  en  firent 
une  sorte  de  succursale  du  Théâtre-Français  et  de  l'Opéra -Comi- 
que. Là,  les  jeunes  gens  du  Conservatoire  devaient  s'exercer  sans 
prétention,  et  sous  les  yeux  d'un  public  indulgent,  avant  que  de 
paraître  sur  nos  grands  théâtres.  En  conséquence ,  la  comédie  et 
l'opéra  comique  devaient  faire  partie  de  son  répertoire  ;  et,  pour 
prouver  qu'on  était  de  bonne  foi  dans  ce  dessein,  le  droit  de  jouer 
toutes  les  anciennes  pièces  de  la  scène  française  et  du  théâtre 
Feydeau  lui  fut  conféré,  à  la  seule  condition  de  les  réduire  à  un 
acte.  Les  administrateurs  soutinrent  la  gageure  en  gens  d'esprit  : 
ils  firent  même  la  mauvaise  plaisanterie  de  nous  donner  la  Fée 
Urgèle  et  le  Dépit  amourevx,  estropriés  et  réduits  à  rien  par  leurs 
ciseaux.  Quelques  autres  essais  non  moins  édifiants,  dans  les  genres 
comique  et  lyrique,  achevèrent  de  prouver  que  le  public  ne  vou- 
lait que  des  vaudevilles  au  Gymnase-Dramatique ,  et  le  vaudeville 
y  prit  un  droit  de  bourgeoisie  à  peu  près  exclusif.  Les  meilleurs 
acteurs  des  théâtres  rivaux  furent  gagnés;  un  de  nos  chansonniers 
les  plus  spirituels  (Scribe?)  devint,  comme  en  Italie,  le  poëte  pri- 
vilégié de  la  troupe;  de  nombreux  débuts,  des  acteurs  de  passage 
et  jusqu'à  une  pauvre  enfant  que  des  prôneurs  gagés  donnèrent 
comme  une  merveille  au  public  (1),  qui  le  crut,  et  à  elle-même, 
qui  en  fut  plus  persuadée  encore  (ce  qui  lui  coûtera  cher  un  jour), 
tout  contribua  à  mettre  le  Gymnase  à  la  mode,  et  à  faire  entrer 
plus  d'argent  dans  sa  caisse  que  dans  celles  du  Théâtre-Français 
et  de  l'Opéra-Comique,  dont  il  ne  devait  être  que  l'humble  suc- 
cursale. .  » 

Le  Gymnase,  on  le  voit,  pouvait  jôûer  trois  genres  :  l'opéra- 
comique,  la  comédie,  le  vaudeville,  mais  les  deux  premiers  étaient 
à  l'avance  sacrifiés  au  second,  et  il  ne  pouvait  représenter  que  des 
pièces  en  un  acte.  Son  privilège,  d'ailleurs,  —  quoi  qu'on  en  pût 
dire,  —  ne  lui  avait  point  été  accordé  dans  le  but  de  faciliter 
l'entrée  de  la  carrière  aux  jeunes  compositeurs,  dont  on  se  sou- 
ciait fort  peu  à  cette  époque,  et  dont  les  ombres  désolées  erraient 
nuitamment  —  et  inutilement  aux  abords  du  théâtre.  Ce  qui  le 
prouve  bien,  c'est  que  le  Gymnase  avait  le  droit  de  jouer  toutes 
les  pièces  lyriques  dont  les  auteurs  étaient  morts  depuis  dix  ans. 
11  ne  se  faisait  pas  faute  d'user  de  cette  dernière  faculté,  d'au- 
tant plus  avantageuse  qu'à  cette  époque  les  droits  des  auteurs  s'é- 
teignant  dix  ans  après  leur  mort,  elle  constituait  pour  lui  une 
économie  véritable  sous  ce  rapport.  Aussi  vit-on  revivre  alors  sur 
la  scène  du  boulevard  Bonne-Nouvelle  un  certain  nombre  de  piè- 
ces de  Duni,  de  Dalayrac,  de  Grétry,  etc.  En  ce  qui  concerne  les 
auteurs  vivants,  nous  ne  rencontrons  que  bien  peu  de  noms  : 
ceux  d'Alexandre  Piccinni,  fils  de  l'illustre  auteur  de  Roland  et 
à'Atys,  musicien  remarquable  lui-même  ;  de  Garcia,  le  grand  chan- 
teur, beaucoup  moins  estimable  comme  compositeur;  de  Guénée, 
qui  devait  être  plus  tard  chef  d'orchestre  du  Palais-Royal  ;  d'un 
nommé  Douai,  qui  était  artiste  de  l'orchestre;  de  Champein,  l'au- 
teur fécond  de  tant  d'opéras  aujourd'hui  oubliés  ;  de  Maresse,  mu- 
sicien obscur  dont  on  ne  sait  même  plus  le  nom;  de  Dourlen, 
qui,  ne  trouvant  plus  sans  doute  l'occasion  de  se  faire  jouer  à 
rOpéra-Comique,  n'eût  pas  été  fâché  d'obtenir  un  succès  sur  cette 
scène  secondaire  ;  et  enfin   de  Castil-Blaze,  qui  commença  là  son 


(1)  Il  faut  avouer  que  les  «  prôiieurs  à  gages  »  ne  se  trompaient  que 
de  peu,  car  la  «  pauvre  enfant  »  n'était  autre  que  Léontine  Fay,  l'é- 
mule de  Déjazet,  la  grande  artiste  qui  fut  plus  tard  Mme  Volnys. 


petit  commerce  de  traductions  et  d'adaptations,  commerce  qui  de- 
vint pour  lui  si  productif  par  la  suite.  On  voit  que  les  «  jeunes 
compositeurs,  »  dans  l'intérêt  desquels,  disait-on,  ce  nouveau 
théâtre  était  créé,  n'eurent  pas  lieu  de  se  réjouir  beaucoup  de  son 
existence  et  n'en  profitèrent  que  médiocrement. 

Alexandre  Piccinni,  en  effet,  n'était  déjà  plus  un  tout  jeune 
homme,  puisqu'il  était  né  en  1779;  mais  il  méritait  encore  moins 
la  qualification  de  «  jeune  compositeur,  »  car  il  avait  fait  repré- 
senter déjà  une  vingtaine  d'ouvrages  dont  voici  les  titres  :  les 
Deux  Billets  doux  (théâtre  des  Troubadours,  an  IX),  la  Physiono- 
manie  (id. ,  an  IX),  le  Terme  du  uoi/agre  (théâtre  Montansier,  an  IX), 
Arlequin  au  village  (théâtre  des  Jeunes-Artistes,  an  IX),  la  Pension 
de  jeunes  Demoiselles  (id.,  an  IX),  Arlequin  bon  ami  (id.,  an  IX), 
le  Pavillon  (id.,  an  X),  l'Entres^ol,  en  collaboration  avec  Lemoyne 
(théâtre  Montansier,  an  X),  les  Deux  Voisins  (id.,  an  X),  Lui-même 
(id.,  an  X),  les  Deux  Issues  (théâtre  de  la  Société  Olympique,  an 
XI),  le  Jeune  Sauvage  (théâtre  des  Jeunes -Artistes,  an  XI),  l'A- 
mant rival  de  sa  maîtresse  (Porte-Saint-Martin,  an  XII),  l'Amou- 
reux par  surprise,  ou  le  Droit  d'aînesse  (théâtre  Feydeau,  an  XIII), 
Rien  pour  lui  (théâtre  des  Jeunes  -  Artistes  ,  180S),  Avis  au  pu- 
blic, ou  le  Physionomiste  en  défaut  (Opéra-Comique,  1806),  Us  sont 
chez  eux,  ou  les  Epoux  avant  le  mariage  (id.,  1808),  Alcibiade  so- 
litaire (Opéra,  1814)  (I),  le  Sceptre  et  la  Charrue  (Opéra-comi- 
que, 1817).  Je  ne  suis  pas  bien  certain  que  cette  liste  soit  abso- 
lument complète,  bien  qu'il  y  manque  assurément  fort  peu  de 
chose.  En  tous  cas,  elle  prouve  qu'Alexandre  Piccinni  n'était 
rien  moins  qu'un  apprenti,  et  que  le  Gymnase,  en  accueillant 
ses  ouvrages,  n'encourageait  pas  positivement  des  essais.  Il  était 
d'ailleurs  accompagnateur  à  ce  théâtre,  et  devait  jouir  à  cette  épo- 
que d'une  certaine  réputation,  non-seulement  à  cause  des  nom- 
breux ouvrages  qu'il  avait  fait  représenter,  mais  encore  parce 
qu'il  avait  tenu  cet  emploi  d'accompagnateur  à  Feydeau  et  à  l'O- 
péra, ainsi  qu'à  la  chapelle  royale,  qu'il  avait  été  par  deux  fois 
chef  d'orchestre  à  la  Porte-Saint-Martin,  qu'il  avait  écrit  la  musi- 
que de  plus  de  cent  cinquante  drames  représentés  sur  tous  les 
théâtres  des  boulevards,  enfin  qu'il  était  pianiste  de  la  musique 
particulière  de  la  Dauphine.  Loin  d'être  un  commençant,  Alexan- 
dre Piccinni,  qui  peu  de  temps  après  devait  être  premier  chef  du 
chant  à  l'Opéra  et  chevalier  de  la  Légion  d'honneur,  jouissait  donc 
au  contraire  de  ce  qu'on  peut  appeler  une  position  considérable. 
Artiste  fort  distingué,  du  reste,  deux  des  ouvrages  lyriques  qu'il 
donna  au  Gymnase,  la  Maison  en  loterie  et  la  Petite  Lampe  mer- 
veilleuse, étaient  remarquables  et  obtinrent  de  très-grands  succès, 
Garcia,  lui  non  plus,  n'était  pas  un  débutant.  Il  avait  déjà  fait 
représenter  en  Espagne  et  en  Italie  une  trentaine  d'opéras,  et  cela 
n'eût-il  pas  eu  lieu  que  son  immense  et  légitime  réputation  de 
grand  chanteur  lui  eût  ouvert  facilement  les  portes  du  Gymnase, 
quand  même  un  certain  nombre  de  ses  ouvrages  n'eussent  pas  été 
joués  «  aux  Bouffes,  »  —  comme  on  disait  alors. 

Champein,  compositeur  de  troisième  ordre,  n'en  était  pas  moins 
dans  la  carrière  depuis  près  de  quarante  ans ,  et  son  avoir ,  à  lui 
aussi,  se  composait  d'une  trentaine  de  partitions  dont  quelques- 
unes,  la  Mélomanie,  les  Dettes,  le  Nouveau  Don  Quichotte,  avaient 
obtenu  la  faveur  du  public. 

Quant  à  Dourlen,  s'il  n'avait  jamais  pu  rencontrer  un  succès,  il 
avait  néanmoins   donné    à   l'Opéra-Comique  :  Linnée,  la  Dupe  de 
son  art,  Cagliostro,  Plus    heureux  que  sage,  Frère  Philippe,   Ma- 
rini,  etc.  Ce  n'était  donc  pas  encore  là  un  jeune. 
Restent  Léopold  Aimon,  Guénée,  Maresse  et  Douai. 

Arthur  POUGIN. 
(La  suite  prochainement.) 

{\)  Et  non  1824,  comme  une  erreur  typographique,  sans  doute,  l'a 
fait  dire  à  M.  Fétis. 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


niNISTÊBE  DE  U  MAISON  DE  L'EIPEREUR 

ET    DES    BEAUX-ARTS. 

DIRECTION    GÉNÉRALE    DES   THÉATRE3. 
AVIS. 

Le  concours  institué  au  théâtre  impérial  de  l'Opéra- Comique 
pour  la  mise  en  musique  du  poëme  intitulé  le  Florentin,  sera  clos 
définitivement  le  30  juillet  prochain. 

Les  concurrents  sont  invités  à  déposer,  avant  ce  jour,  leurs  par- 
titions à  la  direction  aénérale  des  théâtres. 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 

^*ji  Faure,  prenant  son  congé  à  la  fin  de  ce  mois,  la  direction  du 
théâtre  impérial  de  l'Opéra  a  donné  celte  semaine  deux  représentations 
de  Guillaume  Tell  et  une  de  Don  Juan,  chefs-d'œuvre  qui  reçoivent  un 
si  grand  relief  de  leur  magnifique  inlerprétation  par  cet  artiste. 

»*,  Des  accidents  survenus  successivement  à  Mlles  Granzow  et  Fio- 
retii  ont  causé  un  nouvel  ajournement  dans  la  première  représentation 
de  la  reprise  à'IIerculanum.  Une  répétition  générale,  a  eu  lieu  ces  jours- 
ci,  et  l'on  pense  pouvoir  être  prêt  pour  la  semaine  prochaine. 

j,*^,  Le  directeur,  M.  E.  Perrin,  vient  de  renouveler  pour  trois  ans 
l'engagement  de  Mme  Gucymard.  —  On  annonce  également  celui  de 
Mlle  Arnaud,  qu'on  avait  fort  remarquée  au  tliéàlre  des  Fantaisies-Pari- 
siennes, et  celui  de  Mlle  Adeline  Corlez,  qui  tient  avec  succès  depuis 
trois  ans  l'emploi  de  contrealto  au  Grand-Théâtre  de  Lyon. 

,j*^  Une  des  premières  nouveautés  qui  vont  être  mises  à  l'étude  est  le 
Sigurth  d'Ernest  Reyer.  —  M.  E.  Perrin  vient,  en  outre,  de  confier  ii 
M.  Duprato,  pour  en  composer  la  musique ,  le  poëme  d'un  opéra  en 
quatre  actes  et  sept  tableaux,  dû  à  la  collaboration  de  MM.  Vict.  Sardou 
et  G.  Du  Locle. 

»*^  Marie  Cabel,  Capoul,  Sainte-Foy  prennent  leur  congé  le  !•'■  juil- 
let. —  L'ergagement  de  Mlle  Marie  Roze  expire  le  31  juillet,  et  jusqu'à 
présent  elle  n'a  pas  voulu  le  renouveler.  Elle  se  propose  de  partir  pour 
l'Italie,  et  d'y  passer  six  mois  pour  y  perfectionner  son  talent.  —  Par 
compensation,  Achard  fera  sa  rentrée  le  l'^''  juillet,  et  Couderc,  que  le 
mauvais  état  de  sa  santé  tenait  depuis  trop  longlemps  éloigné  de  la  scène, 
vient  d'y  reparaître  dans  le  rôle  de  Comniinges  du  Pré-aux-Clcrcs,  où  l'on 
aurait  vainement  cherché  à  le  remplacer.  —  Les  Dragons  de  Villars 
triomphent  des  chaleurs  de  la  saison ,  et  le  charmant  opéra  de  Maillart 
continue  à  remplir  la  salle. 

^*»  D'après  les  renseignements  donnés  tout  récemment  par  M.  de  Fi- 
lippi,  et  à  l'exactitude  desquels  on  peut  se  fier,  M.  Bagier  a  conclu 
presque  tous  ses  engagements  pour  la  saison  prochaine  qui  s'ouvrira  le 
4 «■•  octobre.  A  M"'=  Patti,  à  Fraschiui  et  Tamberlick,  qui,  ainsi  que  nous 
l'avons  annoncé,  se  produiront  successivement,  le  directeur  du  Théâtre- 
Italien  vient  d'ajouter  l'excellent  Délie  Sedie,  Mlle  Ida  de  Murska,  l'élève 
de  Mme  Marchesi,  qui,  après  avoir  débuté  modestement  à  Paris  dans  les 
concerts,  prit  son  vol  pour  l'Italie,  l'Allemagne  et  l'Angleterre,  où  elle 
arriva  promptement  à  de  beaux  succès,  et  Mlle  Ricci,  la  flUe  d'un  des 
auteurs  de  Crispino.  M.  Bagier  conserve  Mmes  Krauss  et  Grossi,  MM.  Ni- 
colini,  Steller,  Verger,  Ciarapi  et  Mercuriali.  Il  serait  aussi  question  de 
Bonnehée,  mais  surtout,  et  ce  qui  ne  serait  pas  une  médiocre  attraction, 
de  pourparlers  avec  Mme  Carvalho,  à  laquelle  un  engagement  de 
10,000  francs  par  mois  serait  oflert. 

^^*^  M.  de  Guédéonoff,  directeur  général  des  théâtres  impériaux  de 
Saint-Pétersbourg,  était  à  Paris  ces  jours-ci,  pour  traiter,  dit-on,  avec 
M.  de  Saiut-Georges,  de  la  composition  d'un  ballet,  qui  sera  joué  l'hiver 
prochain  en  Russie.  Chaque  année,  au  surplus,  M.  de  Guédéonoff  fait  à 
Paris  un  voyage,  dont  le  but  est  de  se  mettre  au  courant  des  nouveau- 
tés et  des  talents  qui  se  sont  produits  dans  nos  théâtres. 

,*»  La  célèbre  cantatrice  Pauline  Lucca  (baronne'Rahden)  vient  de  pas- 
ser quelques  jours  à  Paris.  Elle  se  rendait  en  Suisse  pour  prendre  un 
repos  nécessité  par  l'état  de  sa  santé. 

**,  Le  théâtre  des  Fantaisies-Parisiennes  a  fermé  ses  portes  mardi 
pour  rouvrir  le  1^'  septembre,  si  toutefois  la  combinaison  qui  mettrait 
les  directeurs  du  théâtre  du  Palais-Royal  en  possession  de  la  salle  ne 
reçoit  pas  son  exécution. 

^*,t  Fleur  de  Thé  va  bientôt  transporter  ses  pénates  à  Bruxelles  et  au 
Havre  pour  revenir  plus  brillante  au  !«'  septembre  à  l'Athénée.  M.  Bus- 
nach  s'occupe  d'ailleurs  avec  une  fiévreuse  activité  de  préparer  à  son 
théâtre  une  brillante  réouverture.  On  dit  le  plus  grand  bien  de  la  mu- 
sique composée  par  M.  Laurent  de  Rillé  pour  le  Petit  Poucet,  musique 
dont  le  caractère  tout-à-fait  bouffe  contrasterait  singulièrement  avec  ses 
compositions  chorales.  M.  Busnach  a  d'ailleurs  donné  à  la  pièce  les  in- 
terprètes les  plus  excentriques.  Ce  seront  :  Léonce,  Hamburger,  Daubray, 


I  Mmes  Lasseny,  Bonelli,  Lovalo,  Ducrey,  tous  ayant  fait  leurs  preuves. 
Viendront  ensuite  les  Jumeaux  de  Berr/ame,  opéra-comique  en  un  acte, 
imité  de  Florian.  musique  de  Ch.  Lecocq;  les  Horreurs  de  la  guerre, 
opéra-bouffe  en  deux  actes,  de  Ph.  Gille,  musique  de  M.  Costé;  Première 
fraîcheur,  d'Octave  Gastineau,  etc.,  etc. 

,j%  On  donne  comme  certain  l'engagement  de  Mlle  Schneider  au 
théâtre  des  Boufies-Parisiens  pour  le  l"'  janvier  prochain. 

„,'**  Les  succès  qu'a  rencontré  Mme  Ugalde  dans  les  excursions  entre- 
prises par  elle  avec  la  troupe  qu'elle  a  formée,  l'engagent  à  les  contumer 
sur  une  plus  va.sle  échelle.  Elle  se  dirige  donc  vers  la  ïouraine,  le  Bour- 
bonnais, la  Bretagne,  etc.,  pour  y  jouer  spécialement  la  Grande- Duchesse 
de  Gérolslein;  elle  est  accompagnée  de  MM.  E.  Garnier,  des  Bouffes; 
Hittemans,  des  Variétés;  Henri  Beaucé,  du  Théâtre  Lyrique;  Warlin  et 
Mme  Rodriguez,  du  Théâtre-Déjazet  ;  de  Mlle  Rosine  Bordi,  des  Bouffes; 
enfin,  de  huit  choristes,  hommes  et  femmes.  Mme  Ugalde  s'est  réservé 
le  r(Me  de  l'héroïne  de  la  pièce,  au  service  duquel  elle  met  son  grand 
talent  de  cantatrice  et  sa  verve  de  comédienne.  Les  représentations  débu- 
tent aujourd'hui  même  par  Orléans. 

:j"„  Au  nombre  des  pièces  qui  seront  jouées  à  Vichy  celte  saison,  il 
faut  mentionner  le  charmant  opéra-comique  d'Adam,  le  Farfadet,  repris 
l'hiver  dernier,  avec  succès,  aux.  Fantaisies-Parisiennes. 

*■**  Aux  engagements  faits  par  le  théâtre  de  Bade,  et  dont  nous  avons 
publié  la  liste,  nous  ajouterons  le  nom  de  Mlle  Gruen,  élève  d'Alary, 
et  artiste  du  théâtre  royal  de  Berlin,  douée  d'une  très-belle  voix  et  qui  y 
chaulera  le  l'ôle  de  Norma . 


NOUVELLES  DIVERSES. 

»•*,  Le  grand  orgue  de  Saint-Augustin  (système  Pe.schard-Barker),  dont 
nous  avons  étudié  la  construction  dans  notre  numéro  du  7  juin,  a  été 
solennellement  béni  mercredi  dernier.  A  cette  occasion,  plusieurs  mor- 
ceaux ont  été  exécutés  par  MM.  Gigout,  organiste  de  la  paroisse,  Batiste 
et  Schmitt,  avec  le  talent  qu'on  leur  connaît.  La  maîtrise  et  les  élèves 
de  l'Ecole  de  musique  religieuse  ont  parfaitement  chanté,  sous  la  direc- 
tion de  M.  Hochsietter,  plusieurs  motets  de  Carissinii,  Palestrina,  Beetho- 
ven, etc.,  ainsi  que  le  chœur  final  de  Noël,  oratorio  de  M.  C.  Saint- 
Saëns. 

,1,*^  Samedi  6  juin,  a  été  inauguré  le  nouvel  orgue  de  l'église  Saint- 
Sauveur,  à  Cacn.  S.  G.  Mgr  l'évoque  de  Bayeux  a  daigné  présider  cette 
cérémonie.  Le  conseil  de  fabrique  avait  appelé  comme  experts  MM.  Ch. 
Vervoitte,  l'habile  maître  de  chapelle  de  Saint-Roch  de  Paris,  Haulard, 
Karrcn  et  J.  Cariez,  de  Caen,  qui  ont  fait  le  plus  grand  éloge  du  nouvel 
instrument,  sorti  des  ateliers  de  la  Société  anonyme  des  grandes  orgues, 
établissements  Merklin-Schiitze,  et  qui  ont  surtout  apprécié  favorable- 
ment les  grands  perfectionnements  apportés  dans  cet  orgue,  c'est-à-dire 
d'avoir  oblenu,  avec  un  nombre  de  jeux  relativement  restreints,  par  des 
combiiiaisons  mécaniques  très-heureuses,  récemment  brevetées,  une  va- 
riété d'effets  extraordinaire,  par  le  double  emploi  de  chaque  jeu. 
MM.  J.  Cariez  et  Haulard  ont  exécuté  plusieurs  morceaux,  et  ont  fait 
apprécier  avantageusement  la  douceur  et  la  puissance  vraiment  remar- 
quables de  l'orgue.  M.  Léon  Vasseur,  de  Versailles,  qui  avait  bien  voulu 
prêter  le  concours  de  son  beau  talent,  a  complété  l'épreuve  dans  une 
brillante  improvisation.  La  Société  chorale  de  Saint-Grégoire-le-Grand, 
sous  la  direction  de  M.  Karren,  organiste  de  Notre-Dame,  a  exécuté  ad- 
mirablement plusieurs  morceaux,  entre  autres  un  Aveverum,  dej.  Cariez. 

j*^  Lundi  13  de  ce  mois  a  eu  lieu,  dans  la  salle  de  spectacle  du  Con- 
servatoire, l'assemblée  générale  de  la  Société  des  artistes  dramatiques.  La 
séance  a  commencé  à  deux  heures  et  s'est  terminée  à  quatre  heures  dix 
minutes.  Le  rapport  de  M.  Eugène  Moreau  a  été  couvert  d'applaudisse- 
ments, et  le  discours  de  M.  le  baron  Taylor,  pour  la  clôture  de  l'assem- 
blée, a  été  très-énergique. 

^*^  Les  examens  préparatoires  pour  l'admission  aux  concours  publics 
du  Conservatoire  ont  été  terminés  cette  semaine. 

,j*.  Le  célèbre  imprésario  Merelli  est  en  ce  moment  à  Paris.  U  assistait 
jeudi  au  mariage  de  Mlle  Antoinette  Artôt,  à  Ville-d'Avray.  —  Nous  avons 
dit  à  quel  point  sa  sœur,  Mlle  Désirée,  avait  fait  fanatisme  à  Moscou. 
Sur  l'avis  que  M.  Merelli  l'avait  engagée  pour  la  saison  prochaine,  cent 
quatre  vingt  mille  roubles  (près  de  600,000  francs)  d'abonnements  ont 
été  immédiatement  souscrits,  et  la  salle  entière  se  trouve  ainsi  louée 
d'avance. 

,*,k  Pendant  son  séjour  à  Madrid,  Arban  a  reçu  de  la  reine  d'Espagne 
la  décoration  de  l'ordre  d'Isabelle-la-Catholique.  Le  même  honneur  a  été 
accordé  par  S.  M.  à  deux  solistes  de  son  orchestre  :  MM.  Dunkler,  vio- 
loncelUste,  et  Contré,  fltïtiste. 

»•»  Le  célèbre  contre-bassiste  Boitesini  vient  d'arriver  à  Paris. 

^%  Un  cornettiste  qui  jouit  d'une  grande  célébrité  en  Angleterre  et 
en  Amérique,  M.  J.  Levy,  dont  on  a  pu  déjà  apprécier  le  talent  à  Paris 


UE  PAKIS 


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en  ISG-i,  s'y  fait  de  nouveau  entendre  en  ce  momeni.  —  Ainsi  que  nous 
le  dîmes  à  celle  époque,  M.  Levy  possède  une  grande  agililé  sur  son 
instrument  et  il  en  tire  une  puissante  sonorité.  —  Une  charnianlc  poIKa 
d'Etlling  :  Zer Une-Polka^  Iburnit  chaque  soir  à  M.  Levy  l'occasion  de 
faire  applaudir  ces  qualités. 

***  Une  pianiste  qui  obtint  il  y  a  quelques  années  de  beaux  succès- 
et  par  son  talent  de  virtuose  et  par  d'agréables  compositions,  la  Course 
au  Clocher,  etc  ,  esl  en  ce  moment  à  Paris.  Mlle  Guénée  habite  Lyon, 
où  elle  compte  d'excellentes  et  nombreuses  élèves,  et  elle  se  rend  en 
Italie  pour  y  prendre  quelques  mois  de  repos. 

^'•^  Les  fêtes  musicales  du  16  août  prochain,  à  Grenoble,  auront  l'éclat 
et  l'importance  artistique  que  nous  avons  été  des  premiers  à  leur  pré- 
dire. Près  de  deux'  cents,  sociétés  chorales  et  instrumentales  y  prendront 
part.  Sur  la  demande  d'un  grand  nombre  d'Orphéons  et  de  Fanfares,  et 
à  cause  des  morceaux  imposés,  la  Commission  d'organisation  vient  de 
décider  que  les  adhérions  seraient  reçues  jusqu'au  1=''  juillet,  délai  de 
rigueur. 

^*^  La  charmante  collection  d'opéras,  opéras-comiques  et  opérettes, 
édition  populaire,  entreprise  par  la  maison  Brandus  et  Dufour,  vient  de 
s'enrichir  de  deux  nouveaux  volumes  :  Robert  le  Diable  et  Martha.  Nous 
rappelons  aux  amateurs  que  ces  partiiioiis,  qui  ne  contiennent  que  les 
paroles  et  la  musique,  sans  accompagnement,  se  recommandent  spécia- 
lement aux  artistes  dramatiques  pour  remplacer  la  copie  des  rôles,  — 
aux  sociétés  chorales,  —  et  aux  spectateurs  pour  suivre  la  musique  au 
théâtre. 

**t  L'une  des  plus  belles  pages  de  l'Africaine  est  san.s  contredit  le 
chœur  des  évêques  du  premier  acte.  Une  transcription  de  ce  morceau 
pour  piano,  écrite  par  un  pianiste-compositeur  distingué,  M.  J.  Baur,  et 
d'un  très-puissant  effet,  vient  de  paraître  chez  les  mêmes  éditeurs. 

***  La  fantaisie  pour  piano  de  Mlle  Tercsa  Carreno,  sur  V Africaiiie, 
dont  nous  avons  annoncé  la  pubhcation,  obtient  un  succès  tout  à  fait 
digne  du  talent  de  la  jeune  artiste. 

***  Le  chant  et  la  comédie  ont  souvent  recruté  des  interprètes  distin- 
guées dans  le  corps  de  ballet  de  l'Opéra.  On  annonce  qu'une  artiste  de 
la  danse,  Mlle  Ricois,  douée  d'une  voix  fort  belle,  prend  des  leçons 
de  Warttl,  l'éminent  professeur  de  Mlle  Nilsson,  dans  l'intention  de 
suivre  la  carrière  lyrique. 

ii*tt  Au  nombre  des  journaux  qui  n'attendaient  pour  se  produire  que 
la  promulgation  de  la  nouvelle  loi  sur  la  presse,  on  signalait  la  publi- 
cation du  Goutois,  feuille  politique  et  littéraire,  dirigée  par  M.  H.  de  Pêne,  et 
M.  Edmond  Tarbé  des  Sablons,  qui  se  sont  associés  pour  cette  entreprise. 
On  annonce  aujourd'hui  pour  le  X"'  juillet  Tapparilion  du  nouveau  jour- 
nal. 11  s'appuie  sur  des  éléments  incontestables  de  succès  :  des  capitaux 
suffisants,  d'abord,  puis  l'expérience  d'un  écrivain  qui  a  fait  depuis 
longtemps  déjà  et  de  la  façon  la  plus  brillante  ses  preuves  dans  le  jour- 
nalisme et  dans  la  littérature;  enfin  la  collaboration  de  M.  Tarbé  des 
Sablons,  auquel  sa  plume  élégante  et  facile  comme  critique  musical  et 
son  nom  ont  tout  d'abord  concilié  de  légitimes  sympathies.  A  ces  divers 
titres,  le  Gaulois  recevra  certainement  du  public  et  de  ses  confrères  le 
plus  favorable  accueil  et  nous  le  lui  souhaitons  de  grand  cœur.  —  M.  de 
Pêne  annonce  que  sa  nouvelle  situation  n'apportera  aucun  changement 
à  la  publication  et  à  la  rédaction  de  la  Gazette  des  Etrangers,  à  laquelle 
il  donnera  ses  soins  comme  par  le  passé. 

***  M.  Max  Graziani  vient  de  composer  et  de  faire  paraître,  sous  le 
titre  de  The  Earl,  un  quadrille  entraînant,  dédié  à  M.  le  mar- 
quis de  Hastings,  propriétaire  du  cheval  vainqueur  au  dernier  derby. 

**„:  Aujourdhui  dimanche,  de  midi  à  six  heures,  au  Pré-Catelan, 
représentation  extraordinaire  au  bénéfice  d'une  grande  et  sympathique 
infortune  :  Mme  Péan  de  la  Roche-Jagu,  l'artiste  de  mérite,  le  compo- 
siteur sérieux  et  convaincu.  Les  meilleurs  artistes  de  la  capitale  ont  gra- 
cieusement offert  leur  généreux  concours.  La  fête  sera  clôturée  par  le 
tirage  d'une  riche  Tombola. 

^*^  Un  éditeur  de  musique,  en  même  temps  compositeur  de  mérite, 
M.  Alphonse  Leduc,  auquel  on  doit  une  méthode  de  piano  estimée,  des 
études  ,  de  nombreux  morceaux  de  piano ,  des  romances,  des  quadrilles 
devenus  populaires,  etc.,  est  mort  subitement  mercredi  à  l'âge  de  soixante- 
cinq  ans,  au  moment  où  il  rentrait  chez  lui.  Ses  obsèques  ont  eu  heu 
vendredi  au  miheu  d'un  grand  concours  d'amis  et  d'artistes. 


ÉTRANGER 

:)f*jf  Londres.  —  ^Africaine  a  été  donnée  mardi  pour  la  première  fois 
de  la  .saison  à  Covent-Garden,  avec  son  éclat  et  son  succès  accoutumés, 
auxquels  ont  contribué  pour  une  bonne  part  Mme  Lucca  et  Naudin . 
Adelina  Patti  a  été  ravissante  dans    le  rôle   de  Zerline  de  Don  Juan. 


Christine  Nilsson,  à  Drury-Lane,  continue  d'enthousiasmer  son  public 
dans  le  Nozze  di  Figaro.  —  Le  grand  festival  Iriennal  de  H;endel  a  eu 
lieu  celte  semaine,  lundi,  mercredi  et  vendredi,  dans  l'immen-se  vaisseau 
du  Palais  de  Cristal,  qui  renfermait  vingt  mille  auditeurs.  Une  armée  de 
quatre  mille  artistes,  dirigée  par  le  célèbre  Costa,  a  exécuté  le  premier 
jour  le  Messie,  le  chef-d'œuvre  du  maître,  qu'on  ne  se  la.sse  pas  d'en- 
tendre en  Angleterre,  et  qui  a  vraiment  été  rendu  d'une  manière  admi- 
rable. Le  surlendemain,  le  programme  se  composait  d'une  sélection  em- 
pruntée aux  oratorios  Saiil,  Salomon,  .jarnson.  Judas  Machabée,  Josué, 
Jephté,  Déborah,  la  Résurrection,  aux  cantates  Sémélé,  les  Fêtes  d'Alexzndre, 
Acis  et  Galatée.  Les  .soli  élaient  chantés  par  Mmcs  Tietjen<=,  Kellogg, 
Nilsson,  Rudersdotflf,  Sainlon-Dolby,  Carola,  M.M.  Sims  Rreves,  Santley, 
Foli,  Cummings.  Nous  manquons  encore  de  détails  sur  la  troisième 
journée.  —  Mlle  Kellogg,  dont  l'engagement  se  terminait  cette  semaine, 
l'a  renouvelé  avec  M.  Mapleson  pour  le  reste  de  la  saison.  Elle  retournera 
ensuite  en  Amérique. 

,f**  Bade.  —  Le  deuxième  concert  de  la  saison  a  eu  lieu  le  16  juin 
avec  le  concours  de  Mlle  Brunetti,  la  gracieu.se  cantatrice  ;  de  l'éminent 
clarinettisle  Wuille,  et  de  MM.  Bach,  GrodwoUe  et  Oudshorn.— Mme  "Viar- 
dot  a  donné,  devant  une  auguste  assemblée,  une  quatrième  représenta- 
tion de  sa  nouvelle  opérette  en  deux  actes,  TO^re.  C'est,  comme  nous 
l'avons  dit,  un  conte  de  fées  très-gracieusement  et  très-habileaient  arrangé 
pour  la  scène,  par  M.  Ivan  Tourguénief,  et  dont  toute  l'intrigue  roule 
sur  un  cheveu  d'or,  par  la  vertu  duquel  le  terrible  Micocolembo  (dont 
le  poète  lui-même  joue  le  rôle)  retient  captif  tout  un  essaim  de  jeunes 
filles.  Grâce  au  prince  Saphir  (Mme  Viardot),  l'ogre  finit  par  perdra  sa 
puissance  en  perdant  son  cheveu,  et  ses  charmantes  pri.sonnières  échap- 
pent à  sa  Yoracité.  —  L'ogre  est  le  seul  rôle  d'homme  de  la  pièce  et  il 
n'est  point  chanté;  Mme  Viardot  a  su  néanmoins,  avec  sa  profonde  con- 
naissance du  style  vocal,  jeter  une  grande  variété  dans  son  œuvre.  — 
Trois  morceaux  ont  élé  ajoutés  depuis  la  première  représentation.  — 
L'exécution  a  beaucoup  gagné  comme  sûreté  et  comme  nuances,  et  VOgre 
n'a  fait  que  croître  dans  la  faveur  de  son  public  de  reines  et  de  prin- 
cesses. 

^*,(.  Berlin.  —  Le  théâtre  de  Friedrich-Wilhelmstadt  a  donné  la  pre- 
mière représentation  d'un  opéra-comique  en  deux  actes  de  A.  Conradi  : 
La  plus  belle  Fille  du  bourg,  charmant  ouvrage  qui  a  été  accueilli  de  la 
façon  la  plus  sympathique  par  le  public.  —  L'Association  des  musiciens 
a  adressé  au  Reichstag  une  pétition  réclamant  une  loi  qui  garantisse  aux 
compositeurs  de  musique  de  concert,  vocale  ou  instrumentale,  un  droit 
sur  l'exécution  de  leurs  œuvres,  privilège  dont  ont  joui  jusqu'ici  les 
compositeurs  dramatiques  seuls.  Une  mesure  pareille  aurait  une  grande 
importance  en  Allemagne,  où  la  musique  instrumentale  occupe  une  si 
large  place.  —  La  clôture  annuelle  de  l'Opéra  a  eu  lieu  le  13  juin,  et 
durera  jusqu'au  12  août. 

^*^  Prague.  —  Mlle  Orgéni,  en  représentations  au  théâtre  tchèque, 
a  débuté  par  deux  magnifiques  succès,  obtenus  dans  Lucie  et  le  Barbier 
de  Sévitle.  Son  habileté  comme  chanteuse,  surtout  dans  les  vocalises,  est 
à  la  hauteur  de  son  talent  de  comédienne. 

^*^  Munkh.  —  Les  Meistersaen'ger  de  R.  Wagner  seront  donnés  pour  la 
première  fois  le  dimanche  21  juin;  deux  autres  représentations  sont  an- 
noncées pour  le  23  et  le  28. 

^*^  Gênes.  — La  Société  philharmonique  adonné  le  3  juin,  au  théâtre 
Carlo  Félice,  un  splendide  concert,  dans  lequel  Sivori  a  été  l'objet  d'une 
ovation  chaleureuse,  et  où  la  Marche  indienne  de  l'Africaine  a  produit 
l'effet  le  plus  grandiose. 

,j*:j;  Florence.  —  La  direction  de  la  Pergola  a  engagé  pour  la  saison 
prochaine  Mlles  Camille  de  Maësen  et  Biancolini,  les  tinors  Fancelli  et 
Montanaro,  le  baryton  Cresci,  et  la  célèbre  ballerine  Pochini.  On  donnera 
le  Prophète,  Dinorah  et  le  Comte  Ory. 

^*^  New-York.  —  Les  journaux  d'Amérique  annoncent  que  M.  Max 
Straskosch  s'occupe  de  monter  le  Prophète  au  théâtre  de  Niblo,  avec  une 
splendeur  encore  inconnue  en  ce  pays. 

^*^,  Baliimore.  —  L'union  allemande  des  chanteurs  du  nord-est  des 
Etats-Unis,  annonce  pour  l'été  de  1866,  une  grande  fête  musicale  à  la- 
quelle elle  convie  toutes  les  sociétés  chorales  allemandes.  Elle  a  établi 
également  dans  ce  but,  un  concours  de  composition,  avec  des  prix  de 
100  et  de  tëO  dollars;  leschœurs  devrontêtre  écrits  pour  voix  d'hommes, 
(paroles  allemandes),  avec  accompagnement  d'orchestre,  et  soli  adlibitum, 
et  envoyés  avant  le  i"'  octobre  1868,  avec  devise  et  pli  cacheté  renfer- 
mant le  nom  de  l'auteur,  à  MM.  Joh.  Heckermann  à  Brème. 

^*i),  Philadelphie.  —  Après  son  immense  succès  à  New- York,  la  Grande 
Duchesse  tourne  ici  toutes  les  tètes.  Il  ,en  avait  été  de  même  à  Was- 
hington ;  Mlle  Tostée  est  toujours  l'idole  du  public. 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE  DE  PAKIS. 


CHEZ  G.    BRANDUS    ET   S.   DUFOUR,    ÉDITEURS,    103,   RUE   DE    RICHELIEU. 

THÉÂTRE  DE  L'ATHÉNÉE 


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THEATRE  DE  L'OPERA-GOMIQUE 


MUSIQUE    DE 

A.    MAILLART 

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AIRS   DÉTACHÉS   DE   CHANT, 
ARRANGEMENTS    ET    MUSIQUE    DE   DANSE 

Par  Burgmuller,  Cramer,   Marc-Biirty,  Croisez,  Duvernoy,  Goria, 

Lecarpentier,  Longuevillo,  Kellerer,  llummel,  Valiquet,  Snyders,  Wolff, 

Herman,  Colyns.  —  Slrauss,  Ellling,  Musard,  Talexy, 

Gaston  de  Lille,  etc. 


MUSIQUE    DE 

CH.    LECOGQ 


PARTITION  POUR  PIANO  ET  CHANT,  IN-ô-,  NET  10  FBANGS.  ' 

Eairs  détachés  de  chant,  as^a.E  7  ..  J.^-! 

ARRANGEMENTS    ET  MUSIQUE    DE  DANSE 

Par  Arban  (Quadrille),  Cramer  (Bouquet  de  mélodies), 

Ketterer  (Galop  de  salon),  Mey,  (Quadrilleetpolka-m.azurka),'Roques(Polka), 

Strauss  (Grande  valse). 


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REVUE 


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Élraflger 34»       id 

Le  Journal  paraît  le  Dimanche. 


GAZETTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


SOMMAIRE.  —  Les  droits  des  auteurs  (deuxième  partie,  9'  article),  par  Tho- 
mas Sanvage.  —  Les  Théâtres  lyriques  secondaires  à  Paris  depuis  1820  (2' 
article),  par  Artbnr  Pongin.  —  Les  Maîtres  Chanteurs  de  Nuremberg, 
opéra-comique  en  trois  actes  de  Richard  Wagner.  —  Nouvelles  des  théâtres 
lyriques.  —  Nouvelles  diverses.  —  Annonces. 


LES  DROITS  DES  AUTEURS. 

{Deuxième  partie.) 
SOCIÉTÉ  DES  AUTEURS,   COMPOSITEURS  ET  ÉDITEURS  DE   MUSIQUE. 

(9=  article)  (1). 

Après  le  départ  des  Bouffons,  la  réunion  des  artistes  de  l'Opéra- 
Coniigue  forain  à  ceux  du  théâtre  Italien  n'avait  pas  été  sans 
influence.  Aux  grands  compositeurs  Monsigny  et  Philidor,  qui 
avaient  déjà  débuté  à  la  foire,  on  avait  vu  se  joindre  Grétry,  dont 
le  talent  s'était  révélé  dès  son  premier  ouvrage  le  Huron,  et  le 
drame  lyrique,  grâce  à  ces  trois  hommes  de  génie,  faisait  de  ra- 
pides progrès.  Sa  marche  aurait  été  plus  rapide  ercore  sans  la  ri- 
dicule  résistance    que  lui  opposèrent  les  hommes  de  lettres. 

Comprenant  mal  ou  plutôt  ne  comprenant  pas  les  convenances 
de  l'art  qui  doit  dominer  dans  toute  œuvre  lyrique,  ils  prétendirent 
traiter  la  musique  en  accessoire  et  conserver  aux  développements 
du  drame  à  peu  près  la  même  importance  que  dans  la  comédie 
proprement  dite.  Tandis  qu'en  Italie  le  choix  du  sujet,  la  disposi- 
tion du  plan  sont  entièrement  subordonnés  à  l'intérêt  musical, 
chez  nous  on  voulut  soumettre  le  compositeur  à  la  domination  de 
l'homme  de  lettres  :  en  un  mot,  dans  l'œuvre  commune,  la  litté- 
rature exigea  la  prééminence  sur  la  musique.  Il  résulta  de  cette 
prétention  un  genre  bâtard,  sans  valeur  littéraire  comme  sans  va- 
leur musicale,  que  l'on  nomma  comédie  mêlée  d'ARiETTES,  détes- 
table invention  qui,  chaque  fois  que  la  mode  en  est  revenue,  nous 
a  valu  les  brocards  de  toute  l'Europe  musicienne.  Elle  semble 
due  au  froid  et  lourd  Marmontel;  le  premier,  il  accapara  Grétry, 


(1)  Voir  les  n<"  33,  iO,  il,  43  et  49  de  l'année  1867,  et  les  n°'  7,  9  et 


22. 


et ,  portant  ses  assommantes  prétentions  académiques  jusque 
dans  un  genre  oîi  la  verve  et  le  sentiment  sont  des  qualités  indis- 
pensables, il  p3ut  être  regardé  comme  l'obstacle  le  plus  funeste 
qu'ait  rencontré  la  musique  dramatique. 

Par  bonheur  se  rencontra,  dans  le  même  temps,  le  maçon,  l'illet- 
tré Sedaine  !  Celui-là,  qui  pourtant  au  besoin  savait  écrire  des 
œuvres  comme  le  Philosophe  sans  le  savoir  ou  la  Gageure  imprévue, 
s'effaçant  à  propos  lorsqu'il  s'agissait  d'une  composition  lyrique, 
procura  à  ses  collaborateurs  Monsigny  et  Grétry  des  applaudisse- 
ments qui  durent  toujours  :  un  autre  encore,  un  Anglais,  homme 
de  goût  et  d'esprit,  qui  avait  longtemps  voyagé  en  Italie,  d'Hèle  (1), 
introduisit  sur  notre  scène  lyrique  ces  grands  finales  à  l'italienne 
si  favorables  aux  développements  de  la  musique  dramatique. 

Le  théâtre  de  la  Comédie-Italienne,  qui  jusqu'en  1782  conserva 
le  répertoire  italien  auquel  il  devait  son  nom,  répertoire  augmenté 
des  œuvres  de  Goldoni  que  l'on  avait  fait  venir  exprès  à  Paris, 
jouait  en  outre  et  fort  bien  la  comédie  française;  car  il  créait  la 
Femme  jalouse,  de  Desforges,  les  Etourdis,  d'Andrieux,  les  drames 
de  Mercier,  les  charmantes  arlequinades  de  Florian ,  et  même  les 
vaudevilles  de  Piis,  Barré,  Radet,  etc.,  etc.  —  Le  Théâtre-Italien, 
de  1762  à  1788,  représenta  à  peu  près  deux  cents  ouvrages  avec 
musique  nouvelle,  ce  que  nous  appelons  aujourd'hui  des  opéras- 
comiques.  Soixante-deux  noms  de  compositeurs  figurèrent  sur  son 
affiche,  et  parmi  ces  artistes  on  trouve  : 

Grétry  pour  24  œuvres;  —  Philidor,  12;  —  Monsigny,  S;  — 
Duni,  8;  —  Dezède,  10;  —  Dalayrac,  10;  —  Champein,  9;  — 
Piccinni,  5;  — Martini,  4; —  Sacchini,  2;  — Gossec,  3;  etc.,  etc. 

Tant  d'activité,  les  brillants  succès  qui  en  résultaient,  char- 
maient et  attiraient  la  foule,  chaque  jour  entassée  dans  la  vilaine 
salle  de  la  rue  Mauconseil  (2). 

Il  n'en  était  pas  de  même  à  l'Académie  royale  de  Musique,  qui 
s'éteignait  dans  la  langueur  et  le   marasme,  abandonnée   à  des 


(1)  11  s'appelait  //ate,  que  l'on  prononçait  Hèle,  et  notre  courtoisie 
française  l'avait  décoré  de  la  particule  nobiliaire.  Il  a  donné  :  le  Juge- 
ment de  Midas,  l'Amant  jaloux,  et  ks  Événements  imprévus  en  1778  et 
1779. 

(£)  Où  nous  avons  vu  la  Halle  aux  Cuirs.  Elle  appartenait  à  l'hôpital 
des  Enfants  trouvés,  qui  la  louait  9,000  francs  aux  comédiens. 


202 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


compositeurs  dont  les  noms  étaient  :  Laborde,  Trial,  Desormery, 
Lagarde,  Ponteau  et  autres  non  moins  inconnus. 

L'an'ivée  en  France  d'une  jeune  princesse  allemande,  intelli- 
gente et  spirituelle,  élevée  dans  le  goût  et  dans  la  pratique  des 
beaux-arts,  surtout  de  la  musique,  donna  heureusement  une  nou- 
velle .et  meilleure  direction  à  l'action  du  gouvernement  sur  les 
théâtres  lyriques. 

Marie-Antoinette,  'Dauphine,  ne  voulut  pas  faire  un  seul  acte 
d'autorité  qui  pût  amener  un  conflit,  un  contact  compromettant 
avec  l'indigne  favorite  d'alors  ;  mais  dès  qu'elle  fut  reine,  elle  fit 
venir  à  Paris  le  chevalier  Gluckj  son  maître  de  musique  à  Vienne, 
et  l'année  même  de  son  avènement,  1774,  vit  représenter  Iphi- 
g&nie  e»  Aulide  et  Orphée. 

On  ne  peut  se  figurer  quels  obstacles  le  grand  compositeur 
eut  à  vïincre  pour  arriver  devant  le  public,  même  avec  celte  haute 
protection;  cependant  fes  deux  œuvres  obtinrent  un  immense 
succès.  Pour  que  Gluck  ne  fût  pas  rebuté  par  tous  les  désagré- 
ments qui  accompagnèrent  son  triomphe,  la  reine  lui  fit 
donner  une  pension  viagère  de  6, OCO  francs,  et  ■  garantit  une 
autre  somme  de  6,000  francs  ptur  chaque  partition  qu'il  don- 
nerait à  l'Académie  royale  de  musique.  Gluck  ayant  fait  repré- 
senter cette  année,  1774,  deux  opéras,  reçut  donc  18,000  francs. 

La  musique  sévère  et  déclomce  de  Gluck  arrivant  au  moment 
de  l'enthousiasme  pour  le  genre  chanté  italien,  principalement 
adopté  à  rOpéra-Comique,  qui  jouissait  alors  de  la  plus  grande 
vogue,  on  vit  se  renouveler  les  discussions  soulevées  par  la  pre- 
mière apparition  des  bouffons,  entre  leurs  partisans  et  les 
ramisies  ;  guerre  éternelle!  car,  comme  en  définitive  elle  a  lieu 
entre  la  science  et  la  mélodie,  on  trouvera  toujours  des  génies 
féconds  et  paresseux  qui  soutiendront  que,  puisqu'ils  produisent  et 
plaisent  par  la  seule  inspiration,  la  science  est  inutile,  et  l'on  ne 
manquera  jamais  de  bœufs  sans  idées  qui,  parvenus  à  force  de 
labeur  à  tracer  leur  sillon,  beugleront  sans  cesse  que  la  science 
seule  fait  la  musique  :  in  medio  veritas!  La  grande  difficulté, 
c'est  la  réunion  des  deux  mérites,  des  deux  qualités  dans  des  pro- 
portions convenables.  Il  lui  fallait  un  nom  à  cette  guerre!  On  ne 
peut  pas  chez  nous  admirer  toujours  le  même  homme;  les  partitions 
qui  succédèrent  à  Iphigcnie,  à  Orphée,  à  Cithcre  assiégée,  de  Gluck, 
qui  tomba,  à  Alceste  dont  le  succès  fut  longtemps  conteslé,  k  Armide, 
même  que  l'on  n'accepta  que  difficilement,  avaient  éciairci  les 
rangs  des  pectateurs  Ji  l'Opéra;  on  commençait  à  parler  de  Piccinni, 
dont  Grétry  se  vantait  d'être  l'élève  ;  on  avait  applaudi  avec 
transporta  la  Comédie-Italienne  sa  Bvona  figliola:  l'ambassadeur 
de  Naples,  qui  s'était  fait  à  Paris  son  prôneur,  obtint  de  la  reine 
qu'elle  partageât  ses  bonnes  grâces  entre  Gluck  et  Piccini,  et  on  fit 
venir  ce  dernier  à  Paris.  La  direction  de  l'Opéra,  en  lui  donnant 
un  traitement  très-honorable  (1),  se  l'attacha  et  le  chargea  de 
composer  une  troupe  de  chanteurs  italiens  qui  pût  varier  son 
répertoire  et  faire  connaître  les  chefs-d'œuvre  ulframontains. 
Marmontel,  se  hâtant  de  l'accaparer,  lui  infligea  immédiatement 
un  poëme  de  Quinault,  qu'il  accommoda  à  sa  mode.  Les  représen- 
tations des  bouffons  commencèrent.  Roland,  dePiccinni,  parut,  sui- 
vit à'Iphigénie  en  Tauride  de  Gluck.  Et  les  deux  camps  furent 
baptisés  :  Les  gluckistes  et  les  piccinnistes. 

Dès  lors,  la  musique  devint  la  grande  préoccupation  de  la 
cour  et  de  la  ville.  Pendant  dix  ans  on  put  admirer  et  applaudir 
les  œuvres  des  deux  antagonistes  réunies  à  celles  de  Sacchini,  de 
Salieri,    etc.,  etc.    Cette   période  fut  l'âge  d'or  des  artistes  et  des 


(1)  En  outre  de  ce  traitement  Plccinni  touchait  quatre  cents  francs  par 
représentation  de  ses  ouvrages,  qui  ne  se  donnaient  jamais  seuls.  Au- 
jourd'hui l'Opéra  paye  cinq  cente  francs  par  soirée  pour  tout  le  spectacle, 
à  partager  entre  les  auteurs,  compositeurs  et  chorégraphes,  s'il  y  a  lieu. 


exécutants.  Les  nouvelles  exigences  musicales  avaient  plus  que 
doublé  le  nombre  des  artistes  employés  dans  les  orchestres  de 
l'Opéra,  du  Concert  spirituel  et  de  l'Opéra-Comique.  En  outre,  il 
s'était  formé  plusieurs  réunions  musicales  particulières  sous  les 
auspices  de  quelques  grands  eigneurs,  telles  que  le  Concert  des 
Amateurs  à  l'hôtel  Soubise;  —  la  Musique  du  comte  de  Clermont, 
celle  de  l'ambassadeur  de  Naples,  celle  du  baron  de  Bagte,  vio- 
loniste amateur,  ridicule,  que  l'on  applaudissait  à  outrance  par 
dérision;  celle  du  comte  d'Albaret,  qu'il  logeait  et  nourrissait  dans 
son  hôtel  comme  des  moines  dans  un  couvent.  Toutes  avaient 
chacune  leur  pensionnaires  spéciaux  et  de  plus  attiraient,  accueil- 
laient et  faisaient  entendre  ce  qu'il  y  avait  de  virtuoses  distingués 
à  l'étranger. 

Malgré  les  œuvres  admirables  (1)  que  l'Académie  royale  de 
Musique  offrait  au  public,  I'Opéra-comique  de  la  comédie  italienne 
était  encore  le  genre  qui  attirait  p'us  particulièrement  la  foule; 
cette  préférence  fut  hautemoit  et  ciTicielkment  constatée,  sanction- 
née par  les  lettres  patentes  accordées  à  ce  théâtre  en  1781  et 
dont  voici  le  préambule  : 

«  Louis,  etc. — La  nécessité  des  spectacles  dans  les  grandes  villes 
de  notre  royaume,  et  principalement  dans  notre  bonne  ville  de 
Paris,  est  un  objet  qui  a  de  tout  temps  attiré  l'attention  des  rois 
nos  prédécesseurs,  parce  qu'ils  ont  regardé  le  théâtre  comme 
l'occupation  la  plus  tranquille  pour  les  gens  oisifs  et  le  délasse- 
ment le  plus  honnête  pour  les  personnes  occupées.  C'est  dans 
celte  vue,  qu'indépendamment  de  ses  comédiens  français  ordi- 
naires, le  feu  roi,  notre  très-honoré  seigneur  et  aïeul,  avait 
permis  en  1716  l'établissement  d'une  troupe  de  comédiens  italiens; 
mais,  malgré  les  talents  et  le  zèle  de  ceux  qui  la  composaient,  ils 
n'eurent  qu'une  faible  réussite;  et  ce  spectacle  ne  s'est  jamais 
soutenu  que  par  des  moyens  étrangers  et  toujours  insuffisants, 
jusqu'au  moment  où,  en  1762,  on  y  a  réuni  I'Opéba-Comique.  Si 
depuis  cette  époque  ce  théâtre  a  été  fréquenté  toutes  les  fois 
qu'on  y  donnait  des  opéras  bouffons  et  autres  pièces  de  chant, 
d'un  autre  côté  le  public  montrait  si  peu  d'empressement 
pour  voir  les  comédies  en  langue  italienne  que,  quand  on  les 
représentait,  le  produit  de  la  recette  ne  suffisait  pas  même  à  payer 
la  moitié  des  frais  journaliers;  d'ailleurs,  comme  les  tentatives 
réitérées  qu'on  a  faites  pour  amener  à  grands  frais  des  ac- 
teurs d'Italie  n'ont  produit  aucun  effet,  et  qu'il  ne  reste  plus  au- 
cun espoir  de  remplacer  les  bons  acteurs  morts,  ni  ceux  que  leurs 
longs  services  mettent  dans  le  cas  de  se  retirer,  nous  nous  som- 
mes vu  forcé  de  supprimer  entièrement  le  genre  italien  et  nous 
avons  pourvu  au  traitement  des  acteurs  et  des  actrices  qui  le  re- 
présentaient (2)  en  leur  accordant  des  pensions  de  retraite  et  des 
gratifications  convenables.  Mais,  désirant  conserver  dans  notre 
bonne  ville  de  Paris  un  spectacle  qui  puisse  contribuer  à  l'amuse- 
ment du  public,  nous  avons  établi  une  nouvelle  troupe  qui 
(sous  le  titre  ancien  de  Comédiens-Italiens)  représentera  des  comé- 
dies françaises,  des  pièces  de  chant  soit  à  vaudevilles,  soit  à 
ariettes,  et  des  parodies  (3);  et,  en  conséquence,  nous  avons  permis 


(1)  De  t77i  à  1788,  l'Opéra  fit  représenter,  de  Gluck  :  Iphigénie  en 
Aulide,  Orphée,  Cithére  assiégée.  Alceste,  Armicle,  Iphigénie  en  Taaride, 
Echo;  de  Plccinni  :  Roland,  Atys,  Iphigénie  en  Tawide,  Adèle  de  Ponthieu; 
de  Salieri  :  tes  Horaces,  les  Danaïdes,  Tarare,  Bidon,  Diane  et  Endymion, 
Pénélope;  de  Sacchini  :  Renaud,  Chiméne,  Dardanus,  Œdipe,  Arvire  et 
Evelina. 

(2)  Deux  comédiens  italiens,  Carlin  Berchinazzi,  l'Arlequin,  et  Came- 
rani,  Scapin,  furent  seulement  conservés.  Carlin  mourut  en  1784;  Came- 
rani,  devenu  semainier  perpétuel,  exerça  ses  fonctions  jusqu'en  1816. 

(3)  Par  parodies  on  entendait,  nous  l'avons  dit,  les  traductions  comme 
la  Colonie  et  l'Olympiade,  de  Sacchini,  la  Bonne  fille,  de  Plccinni,  et 
M.  Framery,  le  fondateur  do  la  perception  des  droits  d'auteur  en 
province,  fut  un  des  premiers  et  des  plus  féconds  auteurs  de  Parodies. 


DE  PARIS. 


aux  administrateurs  de  notre  Académie  de  musique  de  faire  à 
ladite  nouvelle  troupe  un  bail  pour  trente  aimées  du  privilège  de 
l'opéra-comique.  Nous  nous  sommes  déterminé  à  cet  arrange- 
ment d'autant  plus  volontiers  que,  par  le  compte  que  nous  nous 
sommes  fait  rendre  de  l'état  de  ce  spectacle  depuis  1762,  nous 
avons  remarqué  que  le  genre  des  pièces  de  chant  y  avait  fait  des 
progrès  aussi  rapides  qu'étonnants. 

»  La  musique  française,  qui  jadis  était  l'objet  de  l'indifférence  ou 
du  mépris  des  étrangers,  est  répandue  aujourd'hui  dans  toute  l'Eu- 
rope, puisqu'on  exécute  les  opéras-bouffons  français  dans  toutes  les 
cours  du  Nord  et  même  en  Italie,  oîi  les  plus  grands  musiciens  de 
Rome  et  de  Naples  applaudissent  au  talent  de  nos  compositeurs 
français.  Ce  sont  les  ouvrages  de  ce  genre  qui  ont  formé  le  goût 
en  France,  qui  y  ont  accoutumé  les  oreilles  à  une  musique  plus 
savante  et  plus  expressive,  et  qui  ont  enfin  préparé  la  révolution 
arrivée  sur  le  théâtre  même  de  notre  Académie  de  musique ,  où 
l'on  voit  applaudir  aujourd'hui  des  chefs-d'œuvre  dont  on  n'aui'ait 
ni  connu  ni  goûté  le  mérite  si  on  les  y  avait  joués  vingt-cinq  ans 
plus  tôt.  On  ne  peut  donc  pas  douter  que  cette  révolution  ne  soit 
le  fruit  des  opéras-bouffons  composés  pour  la  Comédie-Italienne  et 
des  efforts  continuels  des  acteurs  qui  les  ont  exécutés,  parce  que, 
consultant  sans  cesse  le  goût  du  public  et  cherchant  à  le  perfec- 
tionner comme  à  le  satisfaire,  ils  sont  parvenus  à  rendre  leur  spec- 
tacle infiniment  agréable  à  la  nation  et  même  aux  étrangers.  Si 
donc  il  est  possible  de  faire  encore  des  progrès  dans  ce  genre,  on 
doit  les  attendre  des  mêmes  compositeurs  et  des  mêmes  acteurs, 
qui,  encouragés  par  de  premiers  succès,  mettront  leur  gloire  et 
leur  intérêt  à  porter  cet  art  aussi  loin  qu'il  peut  aller. 

»  D'après  cela  nous  avons  pensé  que  nous  ne  pouvions  mieux  té- 
moigner à  ces  mêmes  acteurs  la  satisfaction  que  nous  avons  de 
leurs  services  qu'en  leur  donnant  une  consistance  solide  et  légale 
à  l'instar  de  celle  de  nos  comédiens  français  ordinaires.  Par  là 
nous  contribuerons  à  augmenter  le  goût  et  les  progrès  de  la  mu- 
sique, à  entretenir  l'émulation  parmi  les  gens  de  lettres  et  les  au- 
teurs, et  à  assurer  par  la  même  voie,  non-seulement  l'état  et  les 
fonds  des  acteurs  et  actrices,  mais  encore  leurs  pensions  de 
retraite,  n 

Il  faut  encore  noter  dans  ces  lettres  patentes  le  douzième  et  der- 
nier article,  qui  porte  ; 

«  En  renouvelant  en  tant  que  de  besoin  les  dispositions  de  la 
déclaration  donnée  par  Louis  XIII ,  notre  très-honoré  seigneur  et 
trisaïeul,  en  laveur  des  comédiens,  le  16  avril  1641,  nous  enjoi- 
gnons très-expressément  à  nos  comédiens  italiens  de  régler  tellement 
leurs  représentations  théâtrales  que  la  religion,  les  bonnes  mœurs 
et  l'honnêteté  publique  n'en  puissent  souffrir  la  moindre  atteinte. 
Et,  en  ce  faisant,  nous  voulons  et  entendons  que  l'exercice  de  leur 
profession  ne  puisse  leur  être  imputé  à  blâme,  ni  préjudicier  à  leur 
réputation  dans  le  commerce  public.  » 

Enfin  je  citerai  comme  témoignage  de  l'estime  où  l'on  tenait  gé- 
néralement à  cette  époque  les  exécutants  français,  ce  fait  que  je 
rencontre  dans  les  Mémoires  secrets  de  Bachaumont  : 

«  Le  Grand  Seigneur  actuel  a  engagé  M.  de  Saint-Priest ,  notre 
ambassadeur  à  la  Porte,  d'écrire  à  Paris  pour  former  à  Sa  Hau- 
tesse  une  troupe  de  musiciens  qu'elle  veut  attirer  à  sa  cour.  Elle 
désire  que  rien  ne  soit  épargné  pour  cette  entreprise ,  et  ofTie  de 
payer  très-chèrement  ces  messieurs.  Les  politiques  voient  avec  plai- 
sir ces  dispositions  de  l'empereur  turc  :  ils  espèrent  qu'à  la  longue 
il  en  résultera  une  révolution  chez  cette  nation  barbare,  et  que  les 
arts  la  poliront.  )> 

Mais  ce  que  ne  disent  pas  les  Mémoires  secrets,  qui  pourtant  ne 
sont  guère  discrets  ni  retenus  dans  leurs  révélations,  c'est  que  le 
Grand  Seigneur  ne  tirait  pas  de  Paris  des  musiciens  seulement,  il 


en  faisait  aussi  venir  des  chanteuses  et  des  ballerines  !  A  l'appui 
de  ce  système  d'emprunt  lyrique  et  chorégraphique,  il  me  revient 
en  mémoire  une  anecdote  que  me  raconta  jadis  un  vieil  ami, 
dans  son  temps  médecin  de  presque  tous  les  artistes  des  grands 
théâtres  (1),  dont  il  connaissait  ainsi  singulièrement  la  Chroni- 
que secrète. 

Thomas  SAUVAGE. 
[La  suite  prochainement.) 


LES  THÉÂTRES  LYRIQUES  SECONDAIRES  A  PARIS 

DEPUIS     1S30. 

(2=  article)  (2). 

Aimon  n'était  pas  non  plus  le  premier  venu.  Né  à  Lisle  (Vau- 
cluse)  le  4  octobre  1779,  élève  de  son  père,  violoncelliste  distingué 
qui  fut  attaché  au  ministre  de  Danemark  comte  de  Rantzau ,  il 
dirigeait,  à  peine  âgé  de  dix-sept  ans ,  l'orchestre  du  théâtre  de 
Marseille,  et  se  faisait  remarquer  par  son  ardeur  dans  la  compo- 
sition de  différents  morceaux  de  musique  intrumentale.  Etant  venu 
se  fixer  à  Paris  en  1817,  il  y  fit  représenter  dès  l'année  suivante 
un  opéra  en  troij  actes,  intitulé  les  Jeux  floraux,  dont  Bouilly 
avait  écrit  les  paroles.  Il  fut  choisi  comme  chef  d'orchestre  du 
Gymnase,  mais  n'abusa  pas  de  cette  position  au  point  de  vue  de 
sa  carrière  de  compositeur,  car,  à  part  quelques  airs  placés  par 
lui  dans  des  vaudevilles  (particulièrement  celui  de  Michel  et  Chris- 
tine, qui  acquit  une  sorte  de  célébrité),  il  retoucha  seulement  la 
Fée  Vrgéle,  de  Duni,  pour  laquelle  il  écrivit  une  ouverture  et 
quelques  chœurs  nouveaux. 

Quant  à  Guénée,  violoniste  distingué  qui  avait  eu  pour  professeurs 
Gaviniés,  Rode  et  Mazas,  et  pour  maître  de  composition  Reicha, 
il  faisait  alors  partie  de  l'orchestre  de  l'Opéra  qu'il  devait  quitter 
plus  tard  pour  diriger  celui  du  Palais-Royal,  et  deux  ouvrages  de 
sa  composition  avaient  été  représentés  à  l'Opéra-Comique  :  la 
Chambre  à  coucher,  et  la  Comtesse  de  Troun,  quand  il  vint  don- 
ner au  Gymnase  un  petit  acte  qui  n'eut  pas  plus  de  retentisse- 
ment que  les  précédents. 

Louis  Maresse,  jeune  musicien  qui  publia  un  certain  nombre 
d'œuvres  de  musique  de  chambre,  n'était  point  encore  connu  au 
théâtre,  où  du  reste  il  ne  fit  que  paraître.  C'est  donc  bien  un  dé- 
but qu'il  effectua  en  donnant  au  Gymnase  les  Projets  de  sagesse, 
qu'il  devait  faire  suivre  rapidement  de  l'Habit  retourné,  repré- 
senté à  l'Opéra-Comique  le  11  septembre  1821,  et  qui  fut  son  se- 
cond et  son  dernier  ouvrage  dramatique. 

Maresse  fut  donc,  avec  Douai,  l'un  des  deux  seuls  compositeurs 
absolument  inconnus  auxquels  le  Gymnase  voulût  bien  permettre 
de  se  brûler  les  ailes  aux  feux  de  sa  rampe.  Ce  dernier  était  presque 
un  adolescent,  puisque,  selon  M.  Fétis,  il  était  né  en  1802.  Pre- 
mier violon  à  l'orchestre  de  ce  théâtre  lors  de  son  ouverture,  de- 
venu deuxième  chef  au  bout  d'une  année,  il  sut  mettre  autant, 
que  possible  cette  situation  à  profit  en  faisant  jouer  un  petit  acte, 
la  Bonne  Mère,   son    unique  œuvre  dramatique.  Depuis,  on  n'en 


(1)  Je  tiens  de  cet  aimable  docteur  un  portrait  de  Mme  Dugazon,  d'a- 
près Isabey,  hommage  de  la  célèbre  actrice,  de  l'admirable  créatrice  du 
rôle  de  Nina.  On  lit  au  bas  de  la  peinture  ce  quatrain  de  Dupaty,  ami 
du  donataire  et  de  la  donatrice  : 

Toujours  mon  seul  regard  peignit  son  .sentiment: 
Si  l'on  a,  de  mes  traits,  saisi  la  ressemblance, 
Ce  portrait,  en  vous  regardant. 
Exprime  la  reconnaissance. 
Ce  quatrain  est  écrit  de  la  main  de  Mme  Dugazon;  il  n'est  pas  signé, 
mais  il  contient  une  faute  d'ortliographs  ;  c'est  son  cachet. 

(2)  Voir  le  n"  2S. 


204 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


entendit  plus  jamais  parler  en  ce  qui  concerne  le  théâtre,  bien 
que  cet  artiste  ait  produit  beaucoup  dans  le  genre  de  la  sympho- 
nie et  de  l'oratorio. 

Nous  venons  de  voir  ce  que  le  Gymnase  produisit  en  fait  de 
musiciens.  Ayant  d'énumérer  les  œuvres  que  ceux-ci  y  firent  re- 
présenter, voyons  un  peu  ce  qu'en  pouvait  être  l'interprétation. 

Le  privilège  du  Gymnase  avait,  —  ce  qui  était  assez  dans  les 
usages  de  l'époque,  —  été  accordé  à  un  homme  qui  ne  servait 
que  de  prête-nom,  un  certain  M.  de  la  Roserie,  qui,  je  crois,  était 
employé  de  la  liste  civile.  Mais  le  directeur  de  fait  était  Delestre- 
Poirson,  homme  d'intelligence  et  de  goût,  fort  expert  en  matières 
théâtrales.  Tenu,  au  moins  pendant  un  certain  temps,  de  faire 
entrer  dans  son  répertoire  un  nombre  quelconque  de  pièces  mu- 
sicales, Poirson  commença  par  faire  choix  d'un  chef  d'orchestre 
exercé,  Léopold  Aimon,  et  d'un  excellent  accompagnateur,  Alexan- 
dre Piccinni.  Aimon  ne  conserva  pas  longtemps  cette  situation  ; 
dès  l'année  suivante  il  abandonna  l'orchestre  du  Gymnase  pour 
aller  prendre  la  direction  de  celui  du  Théâtre-Français,  et  laissa 
le  bâton  à  Heudier,  qui  fut  lui-même  remplacé  au  bout  de  quel- 
ques annés  par  Hus-Desforges. 

La  troupe,  composée  d'acteurs  devenus  célèbres,  Pcrlet,  Gontier, 
Klein,  Ferville,  Numa,  etc.,  ne  comptait  aucun  chanteur  propre- 
ment dit,  mais  seulement  des  comédiens  aptes  à  chanter  des  cou- 
plets de  vaudeville.  Il  n'en  était  pas  tout  à  fait  de  même  des 
femmes,  et  l'on  rencontre  parmi  elles  qutilques  artistes  qui  eus- 
sent pu  se  faire  un  nom  môme  dans  le  genre  lyrique ,  par  exem- 
ple Mnies  Grévedon,  Déjazet  et  Nadéje.  Mais  il  faut  citer  tout  par- 
ticulièi'ement  Mlle  Méric,  devenue  si  célèbre  plus  tard,  comme 
chanteuse  italienne,  sous  le  nom  de  Mme  Méric-Lalande,  alors 
qu'elle  créait,  à  Venise  ou  à  Milan,  les  rôles  principaux  des  ou- 
vrages de  Pacini,  de  Morlacchi  ou  de  Meyerbeer. 

Mlle  Lalande,  fille  et  élève  d'un  chef  d'orchestre  de  province 
nommé  Lamiraux-Lalande,  tenait  depuis  plusieurs  années  l'emploi 
des  premières  chanteuses  dans  les  principales  villes  des  départe- 
ments lorsque  l'administration  du  Gymnase  se  l'attacha.  Elle  vint 
donc  à  Paris,  se  plaça  sous  la  conduite  de  Garcia,  qui  compléta 
son  éducation,  et  débuta  le  16  mai  1821  dans  la  Meunière,  ou- 
vrage de  son  professeur.  Entre  autres  créations,  elle  fit  ensuite 
celle  d'Angélique  dans  le  premier  pastiche  de  Castil  Blaze,  les 
Folies  amoureuses,  et  ce  rôle  lui  fit  tant  d'honneur  que  la  direc- 
tion de  l'Opéra  Comique  voulut  se  l'attacher.  Mais  elle  avait  reçu 
de  brillantes  propositions  pour  l'Italie,  et  elle  partit  pour  ce  pays 
à  la  fin  de  1823,  avec  son  mari,  Méric,  corniste  de  l'Opéra-Comi- 
que, qu'elle  avait  épousé  l'année  précédente. 

Voilà,  en  ce  qui  concerne  les  chanteurs,  avec  quels  éléments  le 
Gymnase  se  mit  en  devoir  de  devenir  une  succursale  de  l'Opéra- 
Comique.  Quant  à  l'orchestre,  nous  avons  vu  qu'à  l'ongine  il 
avait  à  sa  tête  un  chef  consommé ,  Léopold  Aimon  ;  il  était  ainsi 
composé  :  cinq  premiers  et  cinq  seconds  violons,  deux  altos  (ce 
qui  est  bien  peu),  cinq  violoncelles  (ce  qui  est  beaucoup),  quatre 
contrebasses,  deux  flûtes,  deux  clarinettes,  deux  hautbois  et  deux 
cors.  Les  trompettes,  les  trombones  et  les  timbales  brillaient  par 
leur  absence,  ce  qui  n'était  pas  un  mal ,  mais  on  s'explique  peu 
l'absence  complète  des  bassons.  Quant  aux  choristes,  ils  étaient  au 
nombre  de  vingt,  partagés  par  moitié  entre  le  sexe  fort  et  le  fai- 
ble; c'était  très-suffisant  pour  un  petit  théâtre. 

Voici  maintenant  le  répertoire  complet,  en  ce  qui  concerne  seu- 
lement la  musique,  bien  entendu  (1). 


(1)  Les  renseignements  très-précis  et  très-détaillés  que  l'oa  trouvera 
dans  ce  répertoire  ont  été  pris  dans  les  journaux  et  recueils  du  temps, 
ainsi  que  dans  une  petite  plaquette  fort  curieuse  et  sans  doute  aujour- 
d'hui fort  rare.  Cette  petite  brochure  in-18,  qui  contient  une  soixantaine 
de  pages  et  qui  est  rempUe  de  détails  intéressants  qu'il    serait   impossi- 


La  Maison  en  loterie,  un  acte,  paroles  de  Picard  et  Radet,  mu- 
sique d'Alexandre  Piccinni,  représentée  pour  l'ouverture  le  2  dé- 
cembre 1820.  Succès  constaté  par  73  représentations.  Cet  ouvrage 
avait  été  donné  pour  la  première  fois  à  l'Odéon,  sous  forme  de 
vaudeville,  le  8  décembre  1817. 

Une  Visite  à  la  campagne,  un  acte,  paroles  de  Bonnet  et  Dan- 
guy,  musique  de  Guénée,  représentée  aussi  pour  l'ouverture,  le  2 
décembre  1820.  Moins  heureuse  que  la  précédente,  cette  petite 
pièce  n'obtint  que  2  représentations. 

La  Fée  Urgèle,  ancien  opéra  en  quatre  actes,  de  Favart,  musi- 
que de  Duni ,  créé  à  la  Comédie-Italienne  le  4  décembre  1765, 
remis  en  un  acte  pour  satisfaire  aux  prescriptions  du  privilège  du 
théâtre  de  Madame,  musique  arrangée  par  Léopold  Aimon ,  chef 
d'orchestre  de  ce  théâtre,  qui  refait  une  ouverture  et  quelques 
chœurs.  L'ouvrage  ainsi  remanié  paraît  devant  le  public  le  6  jan- 
vier 1821,  et  est  joué  21  fois,  mais  que  pouvait-il  bien  rester  de 
la  partition  naïve  de  Duni?  Quelques  couplets,  peut-être. 

Les  Projets  de  sagesse,  un  acte,  paroles  de  Mélesville,  musique 
du  même  (dit  Y  Annuaire  dramatique  de  Ragueneau,  ordinairement 
très-bien  informé)  et  de  Maresse.  Mélesville,  l'aimable  collabora- 
teur de  Scribe  et  l'ingénieux  auteur  de  tant  de  jolies  productions 
dramatiques,  était  donc  musicien?  En  tous  cas,  c'est  la  seule  fois 
qu'il  lui  ait  pris  fantaisie  de  faire  montre  de  ce  talent  particulier. 
Ce  petit  opéra  des  Projets  de  sagesse  avait  été  créé  à  la  Gaîté  le  6 
février  1819,  sous  forme  de  comédie  et  sous  un  autre  titre  :  les 
Deux  Secrets;  donné  au  Gymnase  le  20  mars  1821,  il  y  obtient 
13  représentations. 

Une  Française,  un  acte,  de  M.  de  Saint- Georges ,  musique  de 
Champein  père  et  fils,  représenté  le  10  avril  1821.  Voici  la  pre- 
mière nouvelle  que  nous  ayons  d'un  fils  de  Champein,  musicien 
comme  son  père,  et,  de  plus,  collaborant  avec  lui.  L'exactitude  de 
ce  renseignement  ne  saurait  cependant  être  mise  en  doute,  puis- 
que je  l'extrais  des  Tablettes  du  directeur  du  théâtre  de  Madame. 
Cette  collaboration  ne  fut  pas  heureuse,  du  reste,  car  l'ouvrage  ne 
fut  joué  que  2  fois. 

Cantate,  paroles  de  Cuvelier  et  Hélitas  Demun,  musique  d'A- 
lexandre Piccinni,  exécutée  au  spectacle  gratis  qui  fut  donné  le 
30  avril  1821,  pour  fêter  le  baptême  du  duc  de  Bordeaux.  Les 
Tablettes  ne  mentionnent  pas  cette  cantate,  dont  l'existence  est 
révélée  par  l'Annuaire  dramatique  cité  plus  haut. 

La  Meunière,  un  acte,  paroles  de  Scribe  et  Mélesville,  musique 
de  Garcia,  représentée  le  16  mai  1821.  Obtient  20  représentations. 
C'est  dans  cette  pièce  que  se  produisit,  pour  la  première  fois  à 
Paris,  Mlle  Lalande,  connue  plus  tard  sous  le  nom  de  Mme  Mério- 
Lalande.  Trompé  par  de  faux  renseignements,  j'ai  dit  moi-même 
dans  un  autre  journal,  lors  de  la  mort  de  celte  {,rande  cantatrice, 
survenue  récemment,  qu'elle  avait  débuté  au  Gymnase  seulement 
en  1823,  dans  le  pasticcio  de  Castil-Blaze  intitulé  les  Folies  amou- 
reuses; c'était  une  erreur. 

Le  Grand-Père  ou  les  Deux  âges,  un  acte,  paroles  de  Favières 
fils,  musique  de  Louis  Jadin,  représenté  le  20  juin  1821.  Ceci 
était  la  reprise  pure  et  simple  d'un  ouvrage  créé  sous  le  même 
titre,  à  l'Opéra-Comique,  le  14  octobre  181S;  cette  reprise  ne  lui 
donne  qu'un  appoint  de  15  représentations. 

Alexis  ou  l'Erreur  d'un  bon  père,  un  acte,  de  Marsollier,  musi- 
que de  Dalayrac,  représenté  le  12  juillet  1821.  C'était  une  reprise 
aussi,  et  chacun  sait  l'immense  succès  que  ce  petit  acte  charmant 
avait  obtenu,  au  théâtre  Feydeau ,  où  il  avait  paru  pour  la  pre- 


ble  de  trouver  ailleurs,  est  ainsi  intitulée  :  Théâtre  de  S.  A.  B.  Madame. 
—  Tablettes  du  directeur.  Elle  est  datée  de  1828,  et  fut  évidemment  tirée 
à  très-peu  d'exemplaires,  qui  furent  sans  doute  distribués  aux  action- 
naires, aux  administrateurs  et  à  quelques  personnes  de  la  cour. 


DE  PARIS. 


205 


mière  fois  le  24  janvier  1798.  Il  est  joué  35  fois  au  théâtre  de 
Madame,  avec  le  concours  de  la  jeune  Léontine  Fay,  si  célèbre 
sous  ce  nom,  et  plus  tard  sous  celui  de  Mme  Volnys,  à  la  Comé- 
die-Française. 

Arthur  POUGIN. 
(La  suite  prochainement.) 


LES  MAITRES  CHIUTEUBS  DE  NDREMBERG, 

Opéra- comique  en  trois  actes,  de  Richard  Wagner. 

(Représenté  pour  la  première  fois  à  Munich  le  20  juin  1868.) 

(Premier  article.) 

Voici  l'auteur  de  Lohengrin  désertant  le  domaine  de  la  légende, 
sur  lequel  il  avait  déclaré  vouloir  s'établir  exclusivement,  pour 
nous  donner  dans  les  Meistersinger  un  opéra-comique  de  toutes 
pièces.  Peut-être  n'a-t-il  ainsi  circonscrit  son  terrain  que  posté- 
rieurement à  cet  ouvrage  ;  car,  chronologiquement,  les  Meistersin- 
ger viennent  après  Tannhœuser,  précédant  Lohengrin  et  Tristan; 
ou  bien  ses  principes  se  sont- ils  modifiés,  et  Bienzi  va-t-il  être 
relevé  de  l'excommunication  ?  —  Quoi  qu'il  en  soit,  Wagner  s'est 
assez  épris  de  son  sujet  pour  le  traiter  deux  fois,  dramatiquement 
et  mystiquement  dans  Tannhœuser,  joyeusement  et  mondaine- 
ment  dans  les  Meistersinger.  Il  est  certain  que  rien  n'est  plus  fait 
pour  séduire  un  auteur  que  ces  tournois  poétiques  et  musicaux, 
thème  gracieux  et  facile  sur  lequel  on  peut  broder  à  plaisir  sans 
faire  une  trop  grande  dépense  d'imagination  ;  mais,  après  le  Vais- 
seau fantôme,  après  Lohengrin,  après  Tristan  et  Iseult,  on  a  quel- 
que peine  à  se  représenter  Richard  Wagner  armé  d'une  marotte 
et  courtisant  Thalie.  Aceeptons-le  ainsi  cependant;  car,  si  nous 
l'en  croyons,  il  n'a  point  forcé  son  talent,  il  est  resté  lui-même, 
il  n'a  fait  que  lâcher  une  fois  la  bride  à  la  «  gaieté  sereine  »  de 
son  caractère.  Nous  allons  voir  comment  il  s'y  est  pris. 

Les  dramatis  personœ  sont  les  membres  de  la  corporation  des 
maîtres  chanteurs  de  la  bonne  ville  de  Nuremberg,  vers  le  milieu 
du  xvi"  siècle.  Ces  honnêtes  bourgeois  ont  recueilli,  pour  l'ac- 
commoder à  leur  guise ,  le  noble  héritage  des  anciens  Minnesin- 
ger  ou  chantres  d'amour,  les  émules  de  nos  troubadours  et  mé- 
nestrels français.  Naturellement  h  tradition  de  leurs  aristocrati- 
ques devanciers  s'est  profondément  altérée  entre  leurs  mains  ;  ils 
ont  emprisonné  l'art  dans  des  règles  et  des  formules  sans  nombre, 
afin  sans  doute  de  pouvoir,  une  fois  leur  catéchisme  appris,  com- 
poser plus  à  leur  aise,  derrière  leur  comptoir,  à  l'abri  des  écarts 
de  la  libre  fantaisie.  S'il  est  encore  question  d'amour  dans  leurs 
chansons,  c'est  de  l'amour  pour  le  bon  motif,  de  celui  que  sancti- 
fie l'Eglise,  et  dont  les  accents  ne  profanent  point  le  lieu  saint; 
car  les  Meistersinger  tiennent  leurs  réunions  dans  les  temples.  — 
La  Saint-Jean  va  être  l'occasion  d'un  concours  oîi  les  maîtres  se- 
ront admis  à  se  disputer  la  palme;  la  récompense  du  vainqueur 
sera  la  main  de  la  belle  Eva,  fille  de  l'orfèvre  Veit  (ou  Guy)  Po- 
gner.  Le  chevalier  Walther  de  Slolzing,  jeune  noble  franconien 
qui  a  étudié  l'art  de  la  poésie  et  du  chant  dans  la  nature  autant 
que  dans  un  vieux  livre  de  Walther  de  la  Vogelweide,  —  le  der- 
nier des  champions  du  célèbre  tournoi  de  la  Wartburg,  auquel 
prit  part  Tannhaiuser,  —  est  retenu  depuis  quelque  temps  à  Nu- 
remberg pas  son  amour  pour  Eva.  La  jeune  fille,  dont  le  cœur 
bat  à  l'unisson  du  sien,  lui  apprend  le  double  obstacle  qui  s'op- 
pose à  leur  bonheur  :  Walther  doit  d'abord  se  faire  recevoir 
maître  chanteur,  puis  l'emporter  au  concours  sur  ses  rivaux.  Maî- 
tre chanteur!  c'est  déroger  ;  qu'importe?  Walther  sollicitera  l'hon- 
neur de  devenir  bourgeois  de  Nuremberg.  Pour  commencer,  Da- 
vid, l'apprenti  du  fameux  cordonnier-poëte  Hans  Sachs,  lui  détaille 


ce  qu'il  a  à  faire  :  se  familiariser  avec  une  infinité  de  tons  plus 
ab.surdes  les  uns  que  les  autres,  le  ton  bref,  le  ton  long,  le  ton 
très-long,  les  tons  de  toutes  les  couleurs,  ceux  de  l'alouette,  du 
rossignol,  de  l'aboyeur,  de  l'arc-en-ciel,  de  l'étain  d'Angleterre  et 
du  bâton  de  cannelle,  etc.,  etc.;  puis  s'appliquer  à  trouver  des  vers 
honnêtes  et  bien  rhythmés,  et  enfin  savoir  y  adapter  une  mélodie 
congrue.  Telles  sont  les  épreuves  qu'il  aura  à  subir  pour  passer 
maîtie. 

Walther,  que  les  aveux  d'Eva  remplissent  d'une  confiance  sans 
bornes,  se  présente  à  l'examen  à  peu  près  ex  abrupto.  Devant  la 
docte  assemblée,  au  milieu  de  l'église  Sainte-Catherine,  il  chante 
l'amour,  l'amour  profane!  et  il  le  chante  à  sa  manière, c'est-à-dire 
sans  tenir  aucun  compte  du  fatras  de  règles  consignées  aux  statuts, 
avec  une  verve  et  une  éloquence  qui  font  frémir  les  juges  d'une 
sainte  horreur!  Le  marqueur  de  la  corporation,  le  Stadtschreiber  ou 
greffier,  Sixtus  Beckmesser,  un  soupirant  malheureux  d'Eva,  a  si- 
gnalé, comme  c'était  son  devoir,  les  innombrables  fautes  du  réci- 
piendaire; aussi,  malgré  l'appui  de  Hans  Sachs,  qui  s'y  connaît, 
et  de  Pogner  lui-même,  Walther  est  impitoyablement  repoussé. 
Mais  il  ne  quitte  pas  la  place  sans  avoir  foudroyé  de  son  mépris 
les  maîtres  chanteurs,  ce  qui  produit  un  certain  désordre  dont  les 
apprentis  en  gai  sçavoir  profitent  pour  danser  une  ronde  effrénée 
autour  de  l'estrade;  il  en  résulte  un  premier  finale  assez  mou- 
vementé, comme  on  peut  le  présumer. 

La  figm-e  quasi-légendaire  du  vieil  Hans  Sachs  est  au  premier 
plan  dans  les  deux  derniers  actes.  Le  lourd  Beckmesser,  venu 
nuitamment  pour  donner  une  sérénade  à  Eva  Pogner,  voisine  du 
cordonnier,  est  bafoué  par  ce  dernier,  qui  ameute  la  foule  autour 
de  l'amoureux  transi  et  lui  procure  une  magnifique  volée  de  coups 
de  bâton.  Le  lendemain,  jour  de  la  Saint-Jean,  Walther,  qui, 
malgré  son  insuccès,  a  passé  une  nuit  très-tranquille,  raconte  à 
son  hôte,  le  poëte-artisan,  un  rêve  charmant  qu'il  a  fait. —  «  Nous 
sommes  sauvés  !  s'écrie  Hans  Sachs;  c"est  un  sujet  excellent  pour 
une  chanson  de  maître,  une  chanson  oïl  vous  pourrez  mettre  toute 
votre  âme,  et  qui  en  même  temps  se  prêtera  merveilleusement  à 
être  traitée  dans  les  règles.  »  Et  il  lui  montre  comment  il  faut  s'y 
prendre;  Walther,  rempli  d'ardeur,  a  bientôt  écrit  trois  stances 
auxquelles  les  plus  exigeants  ne  trouveront  rien  à  redire.  Pendant 
qu'il  va  se  parer  pour  la  grande  fête  qui  doit  être  publique, 
Beckmesser  survient  et  trouve  la  chanson  de  Walther;  Sachs  lui 
permet  de  l'emporter,  de  la  chanter  même,  s'il  le  veut,  sachant  bien 
qu'il  ne  saura  en  tirer  qu'un  effet  grotesque.  Beckmesser,  ravi,  et 
croyant  que  la  chanson  est  de  Sachs,  ce  qui  lui  donne  une  grande 
valeur,  se  sauve  avec  son  trésor.  Le  moment  solennel  arrivé,  le 
greflîer-marqueur,  encore  tout  écloppé,  entonne  ses  couplets  d'une 
voix  rauque,  sur  une  mélodie  barbare,  déplaçant  la  prosodie  et 
dénaturant  les  paroles  de  la  manière  la  plus  bouffonne;  il  est 
accueilli  par  les  huées  des  initiés  et  des  profanes.  «  Elle  est  de 
Sachs  !  »  crie-t-il  pour  se  venger.  «  —  Non  pas,  dit  le  cordonnier, 
je  suis  incapable  de  rien  faire  d'aussi  beau.  Celui-là  seul  qui  l'a 
composée  pourra,  je  pense,  la  bien  dire.  »  Walther  s'avance  alors, 
il  chante,  et  bientôt,  à  ces  accents  pathétiques,  à  cette  exécution 
irréprochable,  les  applaudissements  éclatent,  et  le  prix  lui  est  dé- 
cerné d'une  voix  unanime.  Eva  vient  déposer  la  couronne  de 
myrte  et  de  laurier  sur  le  front  du  vainqueur,  Pogner  lui  passe 
au  cou  la  chaîne  d'or  aux  trois  médailles,  insignes  des  maîtres 
chanteurs,  et  Hans  Sachs  termine  la  cérémonie  en  lui  adressant 
quelques  paroles  bien  senties  sur  la  valeur  de  l'inspiration,  sur 
l'utilité  de  la  règle,  —  et  sur  la  mission  de  l'art  allemand,  perverti 
par  le  goût  gaulois  et  par  les  princes. 

Wagner  se  devait  à  lui-même  de  finir  par  ce  trait  ;  on  le  voit, 
c'est  sous  la  dictée  de  Hans  Sachs  qu'a  été  écrit  Art  et  Politique. 
{La  fin  prochainement.) 


206 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


Dans  sa  séance  du  mardi  23  juin ,  le  syndicat  de  la  Société  des 
auteurs,  compositeurs  et  éditeurs  de  musique  a  procédé  à  la  re- 
composition de  son  bureau.  A  la  majorité  de  10  voix  sur  11, 
M.  Th.  Sauvage,  auteur  dramatique,  a  été  nommé  président  ; 
M.  S.  Dufour,  éditeur  de  musique,  ayant  obtenu  9  voix  sur  H,  a  été 
nommé  vice-président;  M.  Cl).  Plantade,  trésorier,  a  été  continué 
dans  ces  fonctions  par  un  vote  unanime  d'acclamation.  Le  comité 
permanent  se  compose  de  M.  Th.  Sauvage,  président,  et  de  MM. 
Nibelle,  J.-B.  Clément,  S.  Dutbur.  Les  membres  supplémentaires 
sont  :  MM.  Laurent  de  Rillé,  Mouttet  et  Girod. 

Il  a  été  immédiatement  décidé  que  l'on  s'occuperait  de  la  de- 
mande d'une  assemblée  générale  pour  la  révision  des  statuts, 
présentée  par  quatre-vingt-neuf  sociétaires.  Le  syndicat,  d'abord 
d'avis  de  faire  cette  réunion  dans  le  plus  bref  délai ,  sur  l'obser- 
vation de  quelques  membres  que  la  saison  éloignait  de  Paris  un 
grand  nombre  de  sociétaires,  a  fixé  la  convocation  au  mois 
d'octobre. 


Monument  à  la  mémoire  d'Edouard  Monnais. 

A  la  liste  des  souscripteurs  que  nous  avons  donnée  dans  notre 
numéro  du  14  de  ce  mois,  il  faut  ajouter  les  noms  suivants  :  M.W. 
Louis  Godefroy,  JoulTroy,  de  l'Institut;  Jules  Janin,  Emile  Des- 
champs, de  Villemcssant ,  Edouard  Rodrigues ,  M.  Kœnigswarter, 
Ad.  Botte,  M.  et  Mme  Fréd.  Leroy;  Mmcs  Adolphe  Adam ,  veuve 
Erard,  veuve  Duport,  Pauline  Boutin,  Marie  Battu;  MM.  Dan- 
hauser,  Cabanis ,  Jules  Cohen ,  baron  Haussmann  ,  Léon  Halévy, 
Emilien  Pacini,  Levai,  Edmond  et  Jules  de  Concourt,  Auguste 
Guérin. 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 

***  Le  théâtre  impérial  de  l'Opéra  a  donné  lundi  Don  Juan ,  et  mer- 
credi et  vendredi  Guillaume  Tell  pour  les  dernières  représentations  de 
Faure  avant  son  congé. 

**,,  Hier  a  eu  lieu  la  répétition  générale  de  la  reprise  à'Herculamim. 
—  Demain  lundi  première  représentation. 

**:j  C'est  Mlle  Laure  Fonla  qui  a  été  choisie  par  M.  Perrin  pour  rem- 
plir dans  Herculanum  le  rôle  de  la  bacchante  créé  par  Emma  Livry.  La 
danse  de  Mlle  Fonta  a  tellement  d'analogie  avec  celle  de  sa  devancière, 
que  le  rôle  sera  rendu  tel  qu'il  a  été  réglé  à  la  création,  et  sans  le 
moindre  changement  dans  la  composition  du  pas.  D  n'est  pas  douteux 
que  Mlle  Fonta  n'y  obtienne  un  très-grand  succès. 

^*^  Demain  lundi  au  théâtre  del'Opéra-Comique  et  après-demain  mardi 
dernière  représentation  d'Un  Premier  Jour  de  bonheur. 

^*^  Par  suite  d'une  foulure  qu'elle  s'est  faite  au  pied,  Mme  Cabel  est 
depuis  quelques  jours  remplacée  dans  Vu  Premier  Jour  de  bonheur  par 
Mlle  Cico,  qui  s'y  fait  fort  applaudir. 

:sf*^  C'est  dans  Zampa  que  Achard,  de  retour  de  son  congé,  va  faire 
sa  rentrée. 

^*»  Le  bruit  qui  a  couru  au  sujet  de  l'intention  qu'aurait  Mlle  Marie 
Roze  de  ne  plus  rentrer  à  ce  théâtre  se  confirme.  Il  serait  question  d'un 
mariage  pour  la  jeune  et  charmante  cantatrice. 

^*^  M.  Strakosch  assistait  avant-hier  avec  Maillart  à  la  représentation 
des  Dragons  de  Villars.  11  a  beaucoup  applaudi  l'œuvre  du  célèbre  compo- 
siteur, et  il  se  pourrait  bien  que  Adelina  Patti  fut  la  première  à  en 
créer  le  principal  rôle  sur  les  scènes  italiennes. 

5^**  Aux  sujets  d'élite  engagés  par  M.  Bagier,  pour  la  saison  prochaine, 
manque  un  contralto  del  primo  cartello.  Nous  savons  que  le  directeur 
de  notre  théâtre  italien  fait  d'activés  démarches  auprès  de  Mme  Alboni 
pour  la  déterminer  à  reparaître  sur  une  scène  qui  vit  ses  plus  beaux 
triomphes  et  qu'elle  a  quittée  prématurément. 

;^*<f  Aux  artistes  engagés  par  la  nouvelle  direction  des  Bouffes-Pari- 


siens il  faut  ajouter  le  nom  de  Montaubry!  Voilà  une  recrue  qui,  avec 
Berthelier,  Nathan,  Désiré,  Mlles  Schneider,  Marie  Périer  et  Berger,  ne 
laisse  aucun  doute  sur  la  valeur  que  la_  nouvelle  direction  veut  donner 
à  sa  troupe. 

<^*^  Le  théâtre  de  l'Athénée  ferme  ses  portes  ce  soir  pour  les  rouvrir  le 
l"  septembre.  Mme  Vestri  débute  dans  cette  dernière  représentation  par 
le  rôle  de  Césarine.  —  Depuis  quelques  jours  Oscar,  bien  connu  par  ses 
succès  sur  les  scènes  des  Délassements,  de  Déjazet  et  des  Bouffes,  rem- 
place Désiré,  auquel  M.  Busnach  a  voulu  donner  quelques  jours  de  re- 
pos avant  l'excursion  que  la  troupe  va  faire  à  Bruxelles  et  au  ïlavre.  Oscar 
s'est  montré  d'un  comique  excellent  dans' le  rôle  du  Mandarin  Tien-Tien, 
et  on  l'a  fort  applaudi. — Les  rôles  de  Césarine  et  de  Pinsonnet  n'ont  nul- 
lement perdu  à  être  repris  par  Mme  Bonelli  et  par  Luce  ;  la  première 
.Y  apporte  beaucoup  de  gaieté  et  sa  jolie  voix  ;  et  le  second,  s'il  est  infé- 
rieur à  Sytter  comme  chant,  l'emporte  de  beaucoup  sur  lui  comme  jeu 
et  comme  entrain. 

»*:,  Jeudi  a  eu  lieu  chez  M.  le  comte  d'Osmond,  devant  une  réunion 
d'amis,  l'audition  à  orchestre  de  la  musique  d'un  ballet,  composée  par  le 
noble  amateur  en  vue  de  l'Opéra;  MM.  Auber,  E.  Perrin,  le  duc  de 
Persigny,  étaient  au  nombre  des  auditeurs.  L'orchestre  a  été  conduit  à 
tour  de  rôle  par  M.  le  comte  d'Osmond  et  par  Braga. 

;,=*.  Une  charmante  représentation  a  été  donnée  le  27  juin  par  les 
élèves  de  l'Ecole  internationale  de  Saint-Germain-en-Laye,  à  l'occasion 
de  la  fêle  de  M.  Brandt,  leur  directeur.  Une  cantate  et  un  opéra-comique, 
le  Rêve  d'un  Ecolier.,  dûs  tous  deux  il  la  collaboration  de  MM.  Longuet 
pour  les  paroles,  et  Gariboldi,  pour  la  musique,  ont  reçu  l'accueil  le 
plus  sympathique  et  le  mieux  mérité. 

»%  La  Grande  -  Duchesse  vient  de  faire  son  entrée  à  Orléans,  entrée 
triomphale  s'il  en  fût.  Mme  Ugalde,  Hittemans,  Beaucé  ,  Garnier  ont 
rivalisé  d'efforts  et  de  talent.  «  Ce  rôle  de  la  Grande -Duchesse,  dit  le 
Journal  du  Loiret ,  a  été  chanté  par  Mme  Ugalde  avec  une  crânerie 
nuancée  de  finesse.  L'éminente  artiste  s'est  surpassée  elle-même  et  a 
atteint  la  perfection  du  genre.  Quelle  méthode  et  quelle  ardeur!  D'au- 
tres chantent  avec  leur  voix,  d'autres  avec  leurs  bras  et  leurs  jambes. 
Mme  Ugalde,  ainsi  que  l'a  dit  M.  Francisque  Sarcey  dans  une  de  ses 
.«spirituelles  causeries  dramatiques,  chante  avec  son  âme,  et  c'est  l'âme 
d'une  artiste.  »  Une  deuxième  représentation  de  l'œuvre  d'Offenbach  a 
été  redemandée  avec  acclamation  pour  le  lendemain. 

if*jf  Une  belle  représentation  des  Dragons  de  Villars  vient  d'être  donnée 
au  Mans.  C'est  Mlle  Heilbron,  du  théâtre  de  lOpéra-Comique,  qui  chan- 
tait le  rôle  de  Rose  Friquet.  Les  trois  actes  du  charmant  opéra  de  Mail- 
lart ont  été  pour  leur  gracieuse  interprète  une  ovation  non  interrompue, 
et  pour  le  public  manceau  un  véritable  plaisir. 

^*^,  Montaubry  s'est  aussi  fait  beaucoup  applaudir  à  La  Rochelle,  dans 
une  brillante  représentation  de  Fra  Diavolo. 

***  Le  Casino  de  Vichy  possédera  Capoul  et  Mme  Cabel  les  2,  S  et 
7  juillet. 

»*jf  De  retour  à  Paris,  Mlle  Géraldine  vient  de  jouer  la  Grande-Du- 
chesse à  la  Rochelle  et  à  Rochefort,  avec  un  succès  des  plus  accentués. 
Dans  ces  deux  villes  le  public  a  prouvé  par  ses  rappels  et  ses  applau- 
dissement à  l'artiste  aimée  des  anciens  Bouffes,  tout  le  plaisir  qu'il  pre- 
nait à  son  talent  spirituel,  à  sa  voix  sympathique,  à  son  jeu  piquant  et 
distingué. 

^*^,  L'événement  de  la  semaine,  à  Londres,  a  été  la  Grande-Duchesse 
de  Gérolstein,  jouée  par  Mlle  Schneider  au  théâtre  Saint-James.  La  gra- 
cieuse souveraine,  aussi  piquante  qu'à  Paris,  mais  un  peu  moins 
prodigue  de  cascades,  par  égard  pour  la  ré.serve  britannique,  a  eu 
un  succès  fou.  MM.  Duplan,  Beckers,  qu'on  a  vu  à  l'Opéra-Comique,  et 
Michel  se  sont  fort  bien  tirés  des  rôles  de  Fritz,  Boum  et  Paul.  Dans  la 
salle,  on  remarquait  le  prince  et  la  princesse  de  Galles,  le  prince  et  la 
prince.-se  de  Hesse,  le  prince  de  Danemark,  le  duc  de  Cambridge,  le 
prince  de  Teck,  le  comte  et  la  comtesse  de  Paris,  le  duc  et  la  duchesse  d'Au- 
male,  le  prince  de  Joinville,  le  duc  de  Wurtemberg,  la  duchesse  de  Man- 
chester, la  marquise  de  Baih,  etc.,  etc. 

^*si,  Le  duc  de  Saxe-Cobourg-Gotha,  compositeur  éminent,  vient  de 
supprimer  la  direction  et  l'intendance  du  théâtre  de  Gotha,  qu'il  entend 
désormais  diriger  lui-même. 


NOUVELLES  DIVERSES. 

^*^  Les  examens  des  candidats  à  l'emploi  de  professeur  de  chant  dans 
les  écoles  de  la  ville  de  Paris  ont  commencé  mardi  dernier.  Le  jury  se 
composait  de  MM.  Rodrigues,  Onfroy,  Ambroise  Thomas,  François  Ba- 
zin, Ermel,  de  Saint-Julien,  Hubert,  Foulon  et  Spenner.  Mgr  Doussot, 
membre  de  la  commission  de  surveillance  du  chant,  faisait  également 
partie  de  ce  jury 


UE  fAlUS 


207 


,**  Le  Concours  d'Orphéons  ouvert  dimanche  dernier  à  Choisy-le-Roi 
a  été  fort  intéressant;  son  organisation  était  du  reste  excellente.  Parmi 
les  membres  du  jury  on  remarquait  :  MM.  Semet,  Laurent  de  Rillé, 
Oscar  Comettant,  Bezozzi,  etc. 

»**  Mme  Ravinet,  veuve  de  M.  Nicodami,  professeur  de  piano,  a  lé- 
gué au  Conservatoire  le  buste  en  marbre  de  son  mari,  et  une  somme  de 
10,C00  francs.  Cette  somme  a  été  convertie  en  rentes,  et,  sur  la  propo- 
sition du  Comité  des  études  du  Conservatoire,  S.  Exe.  le  ministre  d'Étal 
a  consenti  à  ce  que  la  rente  de  500  francs  fût,  cette  année,  donnée  aux 
premiers  prix  de  piano,  savoir  :  230  francs  au  premier  prix  de  la 
classe  des  fenjmes,  et  2S0  francs  au  premier  prix  de  la  cla?se  des 
hommes,  sans  partage. 

»**  Il  y  a  peu  de  jours  qu'a  eu  lieu  l'inauguration  du  nouvel  orgue 
placé  dans  la  magnifique  église  de  Levroux.  Cette  belle  cérémonie  était 
présidée  par  S.  G.  Monseigneur  l'archevêque  de  Bourges.  MM.  Fhric  et 
Forster,  organistes  ye  Châteauroux,  se  sont  joints  à  M.  Ed.  Batiste,  l'ha- 
bile organiste  de  Saint-Eustache  pour  faire  apprécier  toutes  les  qualités 
du  nouvel  instrument,  qui  a  été  construit  par  ]a  Société  anonyme  des 
grandes  orgues  (établissements  Merklin-Schiitze);  il  a  justifié  une  fois 
de  plus  leur  grande  réputatioii. 

»*«  On  nousécrit  deRouen  :  A  l'occasion  delà  récente  promotion  de  M.  Amé- 
dée  Méreaux  au  grade  de  chevalier  de  la  Légion  d'honneur,  ses  élèves  lui 
ont  offert,  lundi,  dans  le  bel  établissement  de  M.  Vallot,  un  banquet, 
comme  témoignage  de  leur  vive  sati.sfaction.  A  cette  fête,  toute  de  fa- 
mille, qui  réunissait  près  de  cent  souscripteurs,  ont  voulu  prendre  part 
également  de  nombreux  amis  de  M.  Amédée  Méreaux,  parmi  lesquels 
on  remarquait  MM.  Louis  Bouilhet  et  Gustave  Flaubert,  hommes  de 
lettres;  Charles  Vervoitte,  maître  de  chapelle  de  Saint-Roch  ;  Bnnnesseur, 
directeur  des  théâtres  de  Rouen;  Lucien  Dautresme,  l'auteur  de  Cardillac,  et 
Frédéric  Deschamps,  avocat,  président  du  banquet.  Deux  toasts,  sous 
forme  de  discours,  ont  été  prononcés  au  dessert,  le  premier  par  M.  Fré- 
déric Deschamps,  et  l'autre  par  l'éminent  professeur  et  compositeur  dont 
nous  aurions  voulu  retracer  les  paroles  éloquentes  et  pleines  d'un  affec- 
tueux dévouement  adressées  à  ses  élèves  et  à  ses  amis. 

^*^  L'ex-roi  de  Hanovre  Georges  a  entrepris,  dans  sa  résidence  de 
Hietzing,  la  publication  de  ses  œuvres  musicales. 

,)(**  Depuis  quelque  temps  déjà  Fra  Diavolo  a  été  exécuté  sur  les 
scènes  italiennes  avec  les  récitatifs  composés  par  Auber,  qui  y  a  même 
ajouté  plusieurs  morceaux.  A  Saint-Pétersbourg  et  à  Londres,  Mme  Pau- 
line Lucca  et  Mario,  à  Berlin  et  à  Moscou,  Mlle  Artôt  y  ont  rencontré 
un  de  leurs  plus  beaux  succès.  La  publication  de  cette  partition,  ainsi 
adaptée  au  répertoire  italien,  était  donc  vivement  désirée.  Les  amateurs 
apprendront  avec  plaisir  qu'il  vient  d'en  paraître  une  fort  belle  édition 
chez  les  éditeurs  Brandus  et  Dufour. 

,j*=iç  Le  compositeur  Joseph  Dessauer,  qui  a  été  l'ami  de  Bellini,  de 
Liszt,  de  Chopin  et  de  George  Sand,  s'occupe  d'un  volume  de  Mémoires 
(en  allemand),  qui  promet  d'être  extrêmement  intéressant. 

^*^  Nous  avons  sous  les  yeux  deux  nouvelles  publications  du  pianiste 
compositeur  Missler,  que  nous  recommandons  avec  confiance  aux  ama- 
teurs; l'une  à  pour  titre  :  Etudes  de  piano  du  Petit  Caporal  des  Grena- 
diers, et  contient  trois  morceaux  très-bien  faits  pour  piano  :  Ballade;  la 
Grande  Armée,  racontée  par  une  grand'mère,  et  le  Moulin  rouge,  rondo 
mignon.  S.  A.  le  Prince  Impérial  a  daigné  en  agréer  la  dédicace;  l'au- 
tre, dédiée  à  Mlle  Nilsson,  est  une  mélodie,  les  Blanches  Etoiles,  poésie 
de  Mongis.  Un  succès  certain  est  réservé  à  ces  deux  morceaux. 

,f*^  Le  grand  succès  obtenu  par  la  Tzigane- March,  de  Magnus,  a  dé- 
cidé l'éminent  pianiste  compositeur  à  l'arranger  à  quatre  mains,  et  elle 
vient  de  paraître  ainsi  chez  les  éditeurs  Brandus  et  Dufour. 

,''*  Vieuxtemps  vient  d'être  cruellement  frappé  dans  ses  plus  chères 
affections.  Mme  Vieuxtemps  est  morte  le  20  juin,  à  la  Celle-Saint-Cloud, 
près  de  Paris,  oii  elle  était  arrivée  la  veille  seulement  pour  soigner  sa 
santé  compromise  depuis  plusieurs  jours.  Après  bien  des  hésitations,  le 
célèbre  violoniste  avait  cru  pouvoir  profiter  d'une  notable  amélioration 
dans  l'état  de  sa  femme  pour  aller  se  faire  entendre  à  Londres,  où 
l'appelait  un  engagement  contracté  avec  la  Musical  Union  ;  il  n'a  pu  re- 
venir à  temps  pour  recueillir  son  dernier  soupir. — Mme  Vieuxtemps  avait 
cinquante  ans.  A  Vienne,  sa  ville  natale,  elle  acquit  une  certaine 
renommée  comme  pianiste.  Elle  servait  d'accompagnateur  à  son  mari, 
et  il  n'aurait  pu  en  rencontrer  un  autre  qui  le  comprît  aussi  bien.  Elle 
laisse  à  l'artiste  dont  elle  fut  la  compagne  dévouée  deux  enfants,  un  fils 
et  une  fille. 

**,,.  On  annonce  la  mort,  à  Gratz ,  du  compositeur  Anselm  Hiitten- 
brenner,  âgé  de  soixante-quatorze  ans,  directeur  du  Conservatoire  de 
cette  ville.  11  avait  été  lié  d'amitié  avec  Beethoven  et  particulièrement 
avec  Schubert.  On  lui  doit  la  publication  des  fragments  de  la  symphonie 
en  si  mineur  de  ce  dernier  maître. 

**,^  Aujourd'hui,  au  Pré-Catelan,  grande  Fête  Champêtre,  Musique  des 


Zouaves,  Fanfare  de  la  Seine,  Bal  d'Enf;ints,  Tombola,  Jeux  de  toute 
espèce.  De  cinq  à  sept  heures,  au  Thi'âtre  des  Fleurs,  deux  Pièces  nou- 
velles :  i"  le  Camp  des  Bourgeoises,  du  théâtre  du  Gymnase;  2°  la  Con- 
signe est  de  Ronfler,  du  théâtre  du  Palais-Royal. 


ETRANGER 


^*^  Londres.  —  C'est  Mlle  Patti,  et  non  plus  Mme  Lucca,  qui  jouera 
le  rôle  d'Angela  du  Domino  noir,  traduit  en  itahen.  —  La  troisième  jour- 
née du  Hœndel-Festival  a  été  en  grande  partie  remplie  par  Israël  en 
Egijpte,  qui  a  été  au  moins  aussi  bien  exécuté  que  le  Messie.  Sims  Reeves 
y  a  été  superbe.  On  a  bissé  V  Oceasional-Ouverturc,  et  la  fête  s'est  ter- 
minée par  l'hymne  national,  arrangé  par  M.  Costa  pour  choeur  et  or- 
chestre. —  L'aflHuence  de  l'auditoire  a  été  énorme  :  79,463  personnes  ont 
fait  acte  de  présence  pendant  ces  trois  jours.  En  1857,  lors  du  premier 
essai,  on  n'avait  compté  que  38,114  assistants;  en  1859,  centenaire  de  la 
mort  de  Hœndel,  ce  chift're  s'éleva  à  81,319,  pour  tomber  en  1862,  l'an- 
née de  l'Exposition,  à  67,567,  et  en  1865,  à  59,434.— Le  trente-troisième 
concert  annuel  de  Benedict  a  eu  lieu  samedi  dernier  à  Saint-James's-Hall, 
avec  un  programe  d'une  longueur  usitée  en  pareille  occurrence,  et  une 
foule  de  noms  d'étoiles  à  côté  de  celui  du  bénéficiaire  :  Patti,  Nilsson, 
Tietjens,  Kellogg,  Arabella  Goddard,  Fricci,  Santley,  etc.  Les  concerts  de 
Benedict  sont  presque  devenus  une  institution,  et  on  peut  toujours  en  pré- 
dire le  succès  à  l'avance. 

„*,t  Ems.  —  Le  premier  grand  concert  de  la  saison  a  eu  lieu  le  16  : 
salle  brillante;  fructueuse  recette,  consacrée  à  une  œuvre  de  bienfai- 
sance. Mlle  Brunetti,  une  pianiste  du  nom  d'Amalie  Wulfinghoft,  M.  Na- 
than, violoncelliste,  défrayaient  le  programme  de  cette  soirée. — Parmi  les 
artistes  attendus  pendant  la  saison  et  qui  se  feront  entendre  au  Kursaal, 
on  cite  déjà  :  Mme  Vandenheuvel-Duprez,  Mlle  Mariraon,  Mlle  Corina 
Simoni,  Mme  Léonard,  Mlle  Marie  Deschamps,  MM.  Vieuxtemps,  Batta, 
Sivori,  Pialti,  de  Bériot,  Léonard,  Arban,  de  Vroye,  Alfred  Jaell,  etc. — 
Les  représentations  théâtrales  ont  également  commencé  par  l'Elixir  de 
Cornélius,  de  MM.  Meilhac,  Delavigne  et  Durand.  Vingt  opéras  ou  opé- 
rettes, la  plupart  écrits  pour  notre  scène  et  qui  forment  la  base  de  son 
répertoire,  Lischen  et  Fritzchen,  entre  autres,  seront  chantés  dans  une 
période  de  deux  mois  environ  par  quatorze  artistes  de  mérite,  recrutés  à 
Paris.— On  attend  ici  la  visite  du  vice-roi  d'Egypte,  du  prince  Georges  de 
Prusse,  du  duc  de  Saxe-Meiningen,  du  prince  Humbert  d'Italie,  qui  vien- 
dra passer  quelques  jours  auprès  de  sa  sœur  la  reine  de  Portugal,  du 
roi  de  Prusse  et  de  plusieurs  autres  hauts  personnages. 

t^*^  Mannheim.  —  Une  opérette  nouvelle  de  Ferd.  Langer,  le  Voisinage 
dangereux  (d'après  Kotzebue)  a  été  représentée  avec  un  succès  com- 
plet. 

i"^-j,  Leipzig.  —  La  place  de  cantor  de  la  Thomasschule,  remplie  en 
dernier  lieu  par  Moritz  Hauptmann,  a  été  donnée  à  l'organiste  E.  F. 
Richter,  professeur  d'orgue  au  Conservatoire. 

,j*,p  Vienne.  —  On  considère  comme  à  peu  près  certaine  la  démission 
de  l'intendant  général  M.  de  Muncli-Belliughausen,  après  l'inauguration 
du  nouvel  Opéra,  qui  aura  lieu  vers  la  fin  de  l'année.  M.  Dingelstedt, 
directeur  actuel  de  l'Opéra,  serait  alors  mis  à  la  tête  des  deux  théâtres 
de  la  Cour,  et  le  chef  d'orchestre  Esser  prendrait  la  direction  artistique 
de  l'Opéra.  —  La  célèbre  Mme  Bockholtz-Falcoui ,  dont  les  leçons  ont 
fourni  à  l'Allemagne  un  si  grand  nombre  d'excellentes  cantatrices,  a 
donné  dans  le  salon  Streicher  un  brillant  concert  avec  ses  élèves;  on  y 
a  particulièrement  remarqué  et  applaudi,  comme  des  artistes  d'avenir. 
Mies  Caroline  Ritter,  Fanny  Schmidt,  de  Martinez  et  Weissert. 

,,*^  Biisseto.  —  Le  théâtre  érigé  nouvellement  en  l'honneur  de  Verdi, 
et  qui  portera  son  nom,  sera  inauguré  le  15  aoiit.  La  prima  donna  Berini 
et  le  ténor  Prudenza  figurent  dans  la  troupe  engagée  à  cet  effet. 

„*^  Padoue.  —  Le  Prophète  vient  d'être  magnifiquement  représenté, 
avec  Mme  Maria  Destin,  la  Sélika  de  Milan,  dans  le  rôle  Fidès. 

^*^  Madrid.  —  Des  réformes  importantes  viennent  d'être  introduites  au 
Conservatoire;  par  exemple,  le  directeur  sera  désormais  remplacé  par  un 
commissaire  royal ,  délégué  du  gouvernement ,  dépendant  immédiatement 
du  ministre  de  l'instruction  publique. 

ii;.*^  Chicago.  —  Un  grand  festival,  dont  la  musique  classique  alle- 
mande fera  les  frais,  est  annoncé.  Reichardt,  l'auteur  de  Was  ist  des 
Deutschen  Vaterland,  a  composé  et  envoyé  un  nouveau  chœur  pour  cette 
solennité. 


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5S'  Année. 


N»  27. 


S  Juillet  18(;8. 


ON   S'ABONNE  : 

Dqds  les  Départements  et  à  l'Étranger, 

diez  tous  les  Marchands  de  Musique,  ks  LibrairCB, 

et  aux  Dureaux  der  Messageries  et  des  Postes. 


REVUE 


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Paris. 24  r.  par  an 

Départements,  Belgique  et  Suisse....    30  «       id. 

Étranger Zi  n      Id. 

Le  Journal  paraît  le  Dimanche. 


GAZETTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


SOMMAIRE.  —  Théâtre  impérial  de  l'Opéra:  reprise  à'Hereulanum,  de  Féli- 
cien David,  par  Panl  Bernard.  —  Les  Maîtres  Chanteurs  de  Nuremberg, 
opéra-comique  en  trois  actes  de  Ricliard  Wagner  (2*  et  dernier  article),  par 
Charles  Bannelier.  —  Les  droits  des  auteurs  (deuxième  partie,  10°  arti- 
cle), par  Thomas  SianTage.  —  Revue  des  théâtres,  par  D.  A.  O. 
Saint-Yves.  —  Nouvelles  des  théâtres  lyriques.  —  Nouvelles  diverses.  — 
A.ononces. 


THEATRE  inPËRUL  DE  L'OPËRÀ. 

HEBCUEtANlTH , 

Opéra  en  quatre  actes,  paroles  de  MM.  Méry  et  Hadot,  musique 
de  M.  Félicien  David. 

(Reprise  le  29  juin  1868.) 

II  y  a  un  an  à  peine  les  cinq  Académies  réunies  décernaient  à 
Félicien  David  le  grand  pris  biennal  de  20,000  francs  fondé  par 
l'Empereur  pour  le  meilleur  opéra  joué  depuis  dix  ans,  et  tout  le 
monde  applaudissait  à  ce  choix. 

M.  E.  Perrin  a  donc  fait  aujourd'hui  acte  de  bon  goût  comme 
de  justice  en  rendant  au  public  une  des  deux  œuvres  qui  avaient 
valu  à  l'éminent  compositeur  cette  haute  distinction  de  l'Institut, 
et  en  dédommageant  l'auleur  A'Hereulanum  des  vicissitudes  qui 
avaient  arrêté  le  succès  de  cette  œuvre  presque  au  début. 

Il  est  effectivement  diflficile  de  voir  un  ouvrage  plus  contre- 
carré que  celui-ci  par  les  hasards  de  la  scène.  Dès  la  cinquième 
représentation,  Mme  Borghi-Mamo,  créatrice  du  rôle  d'Olympia , 
en  entravait  la  marche  par  une  indisposition.  A  la  sixième, 
c'était  Mme  Gueymard  qui  tombait  malade;  à  la  septième 
enfin,  c'était  notre  cher  et  regretté  Roger  qui  subissait  à  son 
tour  la  mal'aria,  et  peu  de  temps  après,  le  terrible  accident  qui 
brisa  sa  carrière. 

Malgré  toutes  ces  tribulations,  Herculanum  gagnait  un  rang  des 
plus  honorables,  et  pendant  trois  ans,  de  I8S9  à  1862,  reparais- 
sait de  temps  à  autre  sur  l'afTiche  de  l'Opéra.  Mlle  Vestvali  y  re- 
prenait un  rôle,  Gueymard  y  succédait  à  Roger,  mais  tout  cela 
n'était  par  fait  pour  établir  la  réussite  d'une  œuvre  si  intéres- 
sante qu'elle  pût  être. 


Toutefois ,  Herculanum  fut  classé  dans  les  meilleures  du 
maître.  A  cette  époque  (le  public  est  ainsi  fait  qu'il  a  des  opi- 
nions stéréotypées),  on  refusait  encore  à  Félicien  David  la  faculté 
dramatique  et  la  grandeur  nécessaire  aux  proportions  de  l'opéra. 
La  mélodieuse  et  large  partition  d' Herculanum  devait  appeler  de 
ce  jugement,  mais  il  fallait  le  temps  de  changer  d'opinion;  dans 
les  arts,  c'est  quelquefois  plus  long  qu'en  politique.  Courage,  mon 
cher  public ,  écoute  seulement ,  et  dis-moi  si  dans  cet  Hercula- 
num tu  ne  retrouves  pas  les  éléments  d'une  véritable  école  et 
d'une  forte  individualité!  L'école,  c'est  celle  de  Meyerbeer  et 
d'Halévy.  L'individualité,  c'est  la  nature  même  de  Félicien,  c'est 
la  poésie  inhérente  à  son  génie,  c'est  le  charme,  c'est  la  couleur 
émergeant  sans  cesse  de  la  féconde,  palette  de  ce  Léopold  Robert 
de  la  musique. 

Il  y  a  dans  Herculanum  une  certaine  alliance  de  la  phrase  ita- 
lienne largement  chantante  et  chaudement  dramatique,  avec 
l'expression  allemande  plus  cherchée  dans  le  détail,  plus  déclama- 
toire et  plus  vraie.  De  cette  alliance  il  résulte  des  mélodies ,  popu- 
lairement tracées,  il  est  vrai,  mais  souvent  drapées  dans  une  dis- 
tinction native  et  développées  avec  un  art  que  négligent  trop  souvent 
les  Italiens.  Il  en  résulte  encore  des  récitatifs  vrais  d'expression, 
des  chœurs  habilement  traités  oîi  l'orchestre  joue  un  grand  rôle, 
des  morceaux  d'ensemble  oîi  les  voix  se  groupent  dans  toute  leur 
sonorité,  sans  arriver  jamais  à  l'acuité,  tranchons  le  mot,  à  la 
vulgarité  ultramontaine.  Cela  forme  d'un  bout  à  l'autre  un  ouvrage 
honorable  à  tous  les  titres,  et  auquel  il  ne  manque  peut-être 
qu'une  de  ces  pages  hors  ligne,  une  de  ces  inspirations  qui  font 
époque,  pour  être  admis  dans  les  chefs-d'œuvre  de  l'école  moderne. 

Que  faut-il  de  plus  pour  que  la  reprise  d' Herculanum  soit  con- 
sidérée comme  un  heureux  événement  artistique? 

Seulement,  d'après  tout  ce  que  je  viens  de  dire ,  on  compren  - 
dra  que  l'interprétation  d'une  œuvre  aussi  chantante  demande  avant 
tout  des  artistes  de  premier  choix  et  des  voix  essentiellement 
prinlanières.  Ce  sont  là  choses  peu  conciliables.  En  général,  hélasl 
le  printemps  manque  de  maturité,  l'expérience  manque  de  fraî- 
cheur. Cependant  l'administration  de  l'Opéra  a  fait  pour  le  mieux. 
Elle  a  donné  large  part  à  l'une  et  à  l'autre  en  confiant  cette  in- 
terprétation à  M.  Obin,  à  Mmes  Gueymard,  Marie  Battu  et  au 
jeune  ténor  Colin.  Certes,  dans  cet  ensemble  il  y  a  beaucoup  à 


210 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


louer,  mais  il  reste  quelques  restrictions  à  faire.  M.  Obin,  qui  a 
conservé  le  rôle  de  Nicanor,  brillamment  créé  par  lui,  est  tou- 
jours l'excellent  chanteur  que  vous  savez.  Malheureusement,  sa 
voix  a  beaucoup  perdu  du  timbre  nécessaire  aux  basses  profon- 
des. Dans  le  récit,  dans  le  solo,  on  saisit  fort  bien  ses  intentions 
toujours  louables  et  de  bonne  école,  mais  dans  les  ensembles  ou 
quand  l'orchestre  parle  trop  haut,  c'est  en  vain  qu'on  écoute  ;  on 
peut  encore  voir  M.  Obin,  mais  on  ne  l'entend  plus.  Du  reste,  il 
est  fort  bon  à  voir,  car  il  semble  impossible  de  mieux  com- 
poser un  personnage  qu'il  ne  le  fait;  il  se  drape,  il  se  pose,  il 
marche  en  grand  comédien,  et  c'est  un  excellent  exemple  pour 
nos  chanteurs,  si  peu  versés  en  général  dans  l'art  théâtral. 

Mme  Gueymard,  qui  jouait  autrefois  le  rôle  de  la  chrétienne  Li- 
lia,  fait  aujourd'hui  la  reine  Olympia.  Devenue  sa  propre  rivale,  il 
reste  à  savoir  ce  qu'elle  a  pu  gagner  au  change.  J'ai  souvenir 
d'une  esclave  simple,  touchante  et  pleine  de  foi  à  laquelle  mainte- 
nant la  pourpre  romaine  ne  sied  qu'à  moitié.  Si  Mme  Gueymard 
manque  un  peu  de  majesté,  elle  rachète  cela  du.  moins  par  un 
sentiment  dramatique  réel  et  entraînant.  Son  chant  est  toujours 
bien  accentué,  quoique  un  peu  lourd  ;  elle  a  été  fréquemment  et 
chaleureusement  applaudie,  au'  premier  acte,  après  le  brindisi 
qu'elle  a  dû  répéter,  et  surtout  dans  l'hymne  à  Vénus,  au  troi- 
sième acte,  oîi  elle  a  su  développer  un  grand  charme  et  une  cha- 
leur concentrée  parfaitement  en  situation. 

La  beauté  sculpturale  de  Mlle  Marie  Battu,  la  pureté,  la  sévé- 
rité même  des  lignes  de  son  visage,  personnifient  admirablement  la 
vierge  chrétienne  des  premiers  temps  du  christianisme.  Mlle  Battu 
a  d'ailleurs  apporté  dans  l'étude  du  rôle  de  Lilia  l'intelligence  et 
le  soin  consciencieux  qui  distinguent  toutes  ses  créations.  Aussi  ne 
craignons-nous  pas  d'être  démenti  quand  nous  dirons  qu'elle  a  eu 
la  plus  belle  part  dans  le  succès  de  cette  reprise.  Dans  le  duo  avec 
Nicanor,  dans  le  Credo,  et  pai-ticulièrement  dans  le  grand  duo  du 
quatrième  acte  avec  Helios,  dont  la  strette  a  été  redemandée  avec 
acclamation,  elle  a  fait  preuve  d'un  sentiment  dramatique,  d'un 
goût  et  d'une  élévation  de  style  qui  ont  provoqué  d'enthousiastes 
bravos,  à  la  suite  desquels  elle  a  dû  reparaître  après  le  deuxième 
acte  et  au  dénoûment. 

Dans  le  Laërte,  à'Hamlet,  nous  avions  trouvé  M.  Colin  très- 
suffisant  parce  qu'il  y  était  en  somme  peu  en  évidence.  Au  con- 
traire, dans  un  rôle  de  l'importance  d'Hélios,  la  valeur  person- 
nelle de  M.  Colin  est  amoindrie;  il  ne  sait  pas  encore  tenir  la 
scène ,  et  sa  voix  elle-même ,  si  réellement  sympathique ,  perd  le 
charme  qu'on  lui  trouvait  tout  d'abord.  Son  chant  est  saccadé ,  sa 
diction  semble  mesquine  ;  pourtant  il  mérite  des  éloges ,  et  nous 
ne  doutons  pas  qu'avec  du  travail  et  du  temps  il  ne  devienne  un 
fort  agréable  ténor.  Nous  craignons  cependant  que  les  rôles  de 
force  ne  soient  pas  de  son  ressort. 

Les  personnages  secondaires  sont  remplis  par  David,  dont  la 
puissante  voix  éclate  dans  le  rôle  de  Satan,  et  par  Gaspard  (le 
prophète).  La  danse,  dont  les  airs,  dans  le  pas  des  Muses  sur- 
tout ,  sont  charmants,  et  oîi  se  place  la  bacchanale  avec  son 
magnifique  chœur  Evohé ,  Evohé ,  est  représentée  par  Mérante  et 
Mlle  Laure  Fonta.  Ici  encore  un  triste  souvenir  :  je  me  rappelle 
avoir  applaudi  l'infortunée  Emma  Livry  dans  le  rôle  d'Érigone.  11 
devait  être  rempli  par  Mlle  Granzow  :  il  est  échu  à  Mlle  Fonta,  et 
elle  s'en  est  acquittée  avec  une  grâce  et  une  élégance  qui  ont,  à 
plusieurs  reprises,  rappelé  les  qualités  de  sa  devancière  et  lui  ont 
valu  de  légitimes  applaudissements. 

L'orchestre  et  les  chœurs  n'ont  rien  laissé  à  désirer.  L'oreille 
est  satisfaite  et  les  yeux  aussi,  car  les  décorations,  dues  à  MM.  Cam- 
bon,  Despleschin  et  Thierry,  les  costumes,  la  mise  en  scène,  tout 
est  splendide  et  digne  du  Grand  Opéra. 

Paul  BERNARD. 


LES  MAITRES  GHANTEDBS  DE  NQBE1SBER6. 

éra- comique  en  trois  actes ^  de  Richard  Wagner. 


(Représenté  pour  la  première  fois  à  Munich  le  21  juin  1868, 


(2=  et  dernier  article)  (1). 


Le  libretto  des  Maîtres  chanteurs  est  riche  en  situations:  le  mu- 
sicien a  dû  être  satisfait  du  poëte,  mais  la  critique  inexorable  a  de 
grandes  réserves  à  faire  au  nom  de  la  logique  et  de  la  vraisem- 
blance. A  quelle  époque  a-t-il  existé,  l'habitant  de  Nuremberg,  le 
bourgeois  de  race  qui  met  sa  fille  au  concours,  au  heu  de  la  don- 
ner tout  bonnement  à  celui  qu'elle  aime  et  qu'il  souhaite  lui- 
même  pour  gendre?  Mais  aussi,  si  Pogner  s'était  comporté  de  cette 
façon  si  raisonnable,  point  de  Maîtres  chanteurs,  et  nous  aurions 
sans  doute  attendu  longtemps  avant  de  savoir  comment  Wagner 
traduit  le  rire.  Des  scènes  d'une  utilité  fort  contestable  remplis- 
sent le  second  acte,  qui  se  passe  tout  entier  dans  la  rue  où  de- 
meurent Pogner' et  Hans  Sachs.  Allégé  de  ces  longueurs,  s'il  avait 
pu  recevoir  quelque  peu  du  trop  plein  du  troisième  acte,  qui  est 
loin  de  manquer  d'intérêt,  mais  qui  dure  près  de  deux  heures, 
un  salutaire  équilibre  se  serait  établi,  et  l'auteur  aurait  épargné  à 
son  public  une  fatigue  physique  qui  ne  peut  être  sans  influence 
sur  ses  impressions. 

Le  comique  de  Wagner  n'est  ni  le  marivaudage  de  la 
plupart  de  nos  opéras-comiques,  ni  la  farce  insensée  qui  a 
usurpé  le  nom  d'opéra-bouffe;  c'est  la  gaieté  de  haut  goût 
de  Shakspeare  et  de  Molière,  moins  les  gros  mots.  La 
scène  où  Beckmesser  reçoit  de  frappantes  marques  du  courroux 
des  bourgeois  troublés  dans  leur  sommeil  a  excité  à  la  représen- 
tion  un  rire  homérique.  Mais  où  pouvait  donc  être  pendant  tout 
ce  tapage  le  veilleur  de  nuit,  qui  arrive  tout  endormi,  à  la  fin  de 
l'acte,  lorsque  tout  est  rentré  dans  l'ordre,  juste  pour  psalmodier 
son  monotone  avertissement  ?  —  La  quatrième  scène  du  second 
acte,  entre  Hans  Sachs  et  Eva,  est,  par  contre,  assez  finement 
traitée,  bien  qu'elle  fasse  longueur.  Quant  à  Wallher,  que  l'auteur 
a  chargé  d'exposer  ses  propres  idées  sur  la  rénovation  de  l'art,  il 
ne  saurait  plaisanter;  il  est  enthousiaste,  passionné,  grave  quel- 
quefois, il  ne  quitte  pas  le  mode  lydien. 

Les  procédés  musicaux  employés  par  Wagner  dans  son  nouvel 
ouvrage  s'éloignent  un  peu  de  ceux  mis  en  pratique  dans  Tann- 
hœuser,  Lohengrin  et  Tristan,  mais  pas  autant  que  le  titre  d'opéra- 
comique  pourrait  le  faire  croire.  Plus  de  phrase  caractéristique 
annonçant  chaque  personnage,  quelques  passages  franchement 
rhythmés,  quelques  cadences  parfaites,  bien  rares  il  est  vrai  ;  mais 
à  peu  près  partout  la  mélodie  infinie,  sans  forme  saisissable,  une 
harmonie  aussi  peu  naturelle  que  possible  et  qui  souvent  défie 
toute  analyse,  des  périodes  à  perte  de  vue,  des  enchevêtrements 
de  parties  qui  ont  l'air  d'une  caricature  du  contrepoint...,  et  tout  à 
coup,  dans  ce  chaos,  une  éclaircie  charmante  ou  bien  une  idée 
puissante  grandiosement  exprimée. 

Dans  tout  cela,  on  cherche  en  vain  où  peut  s'exercer  cette  faci- 
lité de  compréhension  qui  doit,  d'après  Wagner  lui-même,  être 
une  des  principales  conditions  du  beau  dans  l'œuvre  dramatique; 
quant  à  sa  proche  parente,  la  simplicité,  il  n'en  peut  être  question, 
—  les  adeptes  de  l'école  nouvelle  nous  riraient  au  nez,  — non  plus 
que  de  l'unité,  dépossédées  qu'elles  sont  toutes  deux  aujourd'hui 
du  piédestal  où  les  avait  élevées  Winkelmann.  C'est  sur  d'autres 
bases,  plus  solides  sans  doute,  qu'est  établie  l'esthétique  nouvelle. 
Cependant  il  se  trouve  justement  que  les  endroits  où  le  beau  éclate 
dans  l'œuvre  de  Wagner  sont  ceux  où,  échappant  à  la  contrainte 

(1)  Voir  le  n"  26. 


DE  PARIS. 


211 


qu'il  s'est  imposée,  il  veut  bien  rester  à  la  portée  des  simples  qui 
ont  appris  à  sentir  à  l'école  de  Beethoven  et  de  Weber  :  par 
exemple,  les  finales  des  premier  et  troisième  actes  de  Lohengrin, 
la  marche  des  fiançailles,  l'air  de  Lohengrin  à  son  départ  de  la 
terre,  maint  passage  de  Tannhœuser,  etc.  SI  le  but  avoué  des 
novateurs  est  de  démocratiser  l'art,  n'est-il  pas  bien  mieux  rempli 
par  ces  morceaux  auxquels  Wagner  tient  peut-être  médiocrement, 
que  par  les  vagues  échos  de  la  «  mélodie  de  la  forêt?  »  Les  disciples 
du  maître  répondront  évidemment,  comme  l'a  fait  Liszt,  qu'il  faut 
être  spécialement  doué  pour  être  accessible  à  cet  ordre  de  beautés, 
—  et  qu'ils  le  sont.  A  cela  il  n'y  a  rien  à  dire,  sous  peine  de 
tourner  dans  un  cercle  vicieux. 

Le  prélude  des  Maîtres  chanteurs,  plus  développé  que  celui  de 
Lohengrin,  lui  est  bien  inférieur.  Il  est  bâti  sur  le  motif  chanté 
par  Pogner  au  premier  acte  lorsqu'il  déclare  sa  volonté  de  donner 
sa  fdie  au  vainqueur  du  tournoi,  Ein  Meistersinger  muss  er  sein, 
repris  plus  tard  par  Walther  à  la  cinquième  scène  du  second  acte, 
et  sur  la  marche  qui  accompagne  l'entrée  des  maîtres  chanteurs. 
La  scène  de  la  réunion  dans  l'église  et  le  chaut  de  Walther  au 
premier  acte;  celle  entre  Hans  Sachs  et  Eva,  la  sérénade,  oiî 
Beckmesser  envoie,  en  grattant  son  luth,  ses  soupirs  et  ses  ho- 
quets amoureux  à  la  femme  de  chambre  d'Eva,  déguisée  sous  les 
habillements  de  sa  maîtresse,  et  le  finale  du  second  acte;  le  rêve  de 
Walther,  qu'il  répétera  plus  tard  dans  l'assemblée  publique,  au  se- 
cond tableau  du  troisième  acte  ;  le  mouvement  de  valse  vers  le 
début  du  dernier  finale,  et  la  scène  entière  du  concours,  sont  à 
citer  comme  les  pages  principales  de  la  partition.  Les  deux  mé- 
lodies chantées  par  Walther,  à  chacune  de  ses  épreuves  devant  les 
maîtres,  sont  ravissantes,  et  rachètent  bien  des  erreurs  de  goût. 

Il  y  aura  sans  doute  à  revenir  sur  cette  première  impression; 
ce  n'est  pas  du  premier  coup  qu'on  se  fixe  définitivement  sur 
la  portée  d'une  œuvre  de  Wagner.  De  cet  examen,  si  hâtif  qu'il 
ait  dû  être;  se  dégage  cependant  pour  nous  la  conviction  que 
l'opéra-comique  n'a  rien  à  gagner  à  être  transporté  sur  ce  terrain, 
si  l'on  veut  lui  conserver  son  nom  et  ses  allures,  à  moins  de  vou- 
loir en  arriver  à  une  chose  hybride  où  tous  les  genres  seront 
réunis,  et  dont  l'avènement  pourrait  bien  d'ailleurs  n'être  pas 
trop  éloigné. 

Quelques  mots  maintenant  sur  l'exécution.  C'est  le  dimanche 
21  juin  que  les  Maîtres  chanteurs,  si  impatiemment  attendus,  ont 
été  donnés  pour  la  première  fois  au  théâtre  royal  de  Munich.  Le 
public,  très-réservé  d'abord,  est  monté  peu  à  peu  au  diapason  de 
l'enthousiasme  ;  Wagner,  assis  auprès  de  son  royal  ami  Louis  II,  a 
été  acclamé  à  diverses  reprises.  La  représentation  n'a  pas  duré 
moins  de  cinq  heures;  et  encore,  si  Wagner  n'avait  pas  évité  avec 
soin  les  fastidieuses  répétitions  de  paroles  qui  entravent  l'action 
même  dans  nos  meilleurs  opéras,  qui  peut  prévoir  à  quelle  heure 
indue  pour  les  habitudes  allemandes  Hans  Sachs  aurait  achevé  sa 
grande  tirade  politico  -  artistique,  à  laquelle  on  s'attend  si  peu  ?  Les 
ensembles,  grâce  à  cette  précaution,  sont  relativement  courts.  Il 
n'y  a  pas  de  dialogue  parlé,  il  est  à  peine  besoin  de  le  dire.  — 
Les  études,  soigneusement  dirigées  et  préparées  de  longue  main 
par  un  grand  musicien  dévoué  corps  et  âme  à  Wagner,  par  Hans 
de  Bûlow,  ont  abouti  aune  exécution  splendide.  Nachbaur  (Wal- 
ter),  Betz  (Hans  Sachs),  Bausewein  (Pogner),  Schlosser  (David), 
Holzl  (Beckmesser),  Mmes  Mallinger  (Eva)  et  Diez  (Madeleine),  les 
chœurs  et  l'orchestre,  se  sont  admirablement  comportés;  et  ce  n'est 
pas  un  petit  mérite  que  de  chanter  convenablement  une  musique 
aussi  chargée,  aussi  tourmentée,  où  l'esprit  et  l'oreille  sont  continuel- 
lement en  quête  d'un  point  d'appui  pour  ne  pas  dévier  de  l'intona- 
tion. Hans  de  Bûlow,  debout  au  milieu  de  l'orchestre,  la  partition 
devant  lui,  conduisait  sans  presque  y  jeter  les  yeux;  il  sait  par 
cœur  cet  énorme  volume,  rudis  indigestaque  moles! 


On  a  fait  des  prodiges  pour  la  mise  en  scène;  au  deuxième'acte, 
les  coulisses  sont  supprimées  pour  faire  place,  non  plus  à  des  dé- 
cors et  à  des  trompc-l'œil,  mais  à  de  vraies  maisons  moyen  âge. 
Le  roi  avait  ouvert  un  crédit  illimité  à  son  protégé;  on  a  laissé 
pendant  des  mois  entiers  souffrir  les  recettes  du  tliéâtre  pour  ne 
s'occuper  que  des  répétitions  journalières  et  interminables  des 
Maîtres  chanteurs,  dont  on  doit  donner  trois  représentations  seu- 
lement; la  dépense  se  chiffre  par  cinquante  mille  florins!  Quelque 
opinion  qu'on  ait  de  la  valeur  et  de  l'avenir  des  idées  wagnériennes, 
il  n'en  est  pas  moins  consolant  de  penser  qu'un  souverain  a  pu 
faire  autant  pour  l'Art ,  qui  certes  ne  le  lui  rendra  pas  en  écus 
sonnants! 

Charles  BANNELIER. 


LES  DROITS  DES  AUTEURS. 

{Deuxième  partie.) 

SOCIÉTÉ  des  auteurs,    COMPOSITEURS  ET   ÉDITEURS  DE  MUSIQUE. 

(10=  article)  (1). 

Dans  la  seconde  moitié  du  dernier  siècle,  les  demoiselles  des 
chœurs  de  chant  et  de  danse  de  l'Académie  royale  de  musique, 
—  on  disait  alors  tout  bonnement  les  filles  d'Opéra,  —  formaient 
parmi  les  courtisanes  une  classe  à  part  :  chanteuses  ou  danseuses, 
du  moment  qu'elles  montaient  sur  les  planches  de  ce  théâtre  doué 
de  tant  de  privilèges  C2),  semblaient  croire  appartenir  à  la  noblesse 
du  royaume.  Il  est  vrai  qu'à  cette  époque  une  fille  d'Opéra  faisait 
nécessairement  partie  du  train  d'un  seigneur  à  la  mode,  comme 
ses  chiens,  ses  gens,  ses  chevaux,  ses  voitures  :  il  ne  pouvait  s'en 
passer  sans  rester  incomplet. 

Cette  [prédestination  aristocratique  donnait ,  on  doit  le  penser,  à 
ces  demoiselles  une  fierté  qui  les  rendait  inabordables  à  la  roture; 
il  fallait,  avec  elles,  faire  preuve  de  trois  générations  nobles,  comme 
pour  monter  dans  les  carrosses  du  roi.  On  en  a  vu  se  laisser 
piller  par  un  noble  et  jeune  mousquetaire,  plutôt  que  de  déroger 
en  ruinant  un  financier  vieux  et  roturier. 

Un  peu  avant  les  grands  mouvements  politiques  qui  assombrirent 
ce  temps  de  joyeuse  insouciance ,  florissaient  le  fameux  mystifi- 
cateur Musson  et  l'aimable  farceur  de  société  Dugazon,  sociétaire 
de  la  Comédie  française,  mari  de  la  délicieuse  actrice  qui  faisait 
la  fortune  de  la  Comédie  italienne.  Si  Musson,  peintre  médiocre, 
mais  garçon  d'un  esprit  singulier,  avait  mis  peu  à  profit  le  temps, 
dans  les  ateliers  qu'il  fréquentait  pour  l'étude  de  son  art,  du  moins 
l'avait-il  fait  passer  gaiement  à  ses  camarades.  Habile  à  démonter, 
à  faire  jouer  les  muscles  de  son  corps  et  de  sa  face,  ainsi  doué 
d'une  mobilité  de  physionomie  étonnante ,  il  semblait  changer  à 
vue  de  visage  et  de  tournure.  Il  copiait  merveilleusement  les  tics 
et  les  habitudes  des  originaux  qu'il  rencontrait  dans  le  monde;  il 
imitait  encore  avec  une  extrême  facilité  tous  les  accents  étrangers  ; 
enfin  il  savait  amener,  encadrer  ingénieusement,  soit  dans  des  ré- 
cits burlesques,  soit  dans  des  espèces  de  proverbes  fort  amusants, 
ces  caricatures  et  ces  imitations.  Aussi  ses  confrères  voulurent-ils 
qu'après  avoir  distrait  leurs  ateliers  il  vînt  animer  leurs  goguettes  : 
Musson  fut  l'âme,  la  vie,  le  charme  de  toutes  leurs  réunions. 

Bientôt  la  réputation  du  joyeux  artiste  franchit  le  cercle  étroit 

(1)  Voir  les  n™  33,  40,  41,  43  et  49  de  l'année  1867,  et  les  n»'  7,  9, 
22  et  26. 

(2)  Les  artistes  n'y  dérogeaient  pas  de  noblesse  ;  ils  n'étaient  pas  excom- 
muniés, et  les  mineurs  des  deux  sexes,  en  y  signant  un  engagement,  étaient 
émancipés  ! 


212 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


de  ses  confrères,  portée  dans  le  grand  monde  par  les  plus  célèbres 
d'entre  eux  :  on  voulut  voir,  on  voulut  connaître  cet  amusant  con- 
vive, et  Musson,  simple  artiste,  sans  titre,  sans  nom  et  sans  mérite, 
se  vit  inviter  à  la  table  des  plus  grands  seigneurs. 

D'abord,  en  acceptant  les  invitations,  le  plaisant  crut  pouvoir, 
sans  se  mettre  tout  à  fait  sur  le  pied  de  l'égalité  avec  ses  nobles 
convives,  ce  que  les  convenances  lui  défendaient,  au  moins  con- 
server pour  lui-même  sa  liberté  et  son  indépendance,  c'est-à-dire 
se  montrer  gai  et  jovial  à  ses  moments.  11  ne  tarda  pas  à  s'aper- 
cevoir que  l'honneur  d'une  telle  compagnie  ne  lui  était  pas  octroyé 
gratis,  mais  bien  à  la  condition  d'être  amusant  et  toujours  et  sans 
cesse ,  de  payer  son  écot  en  dépense  d'esprit  ;  qu'ainsi  il  ne  lui 
était  pas  permis  d'obéir  au  souci  qui  parfois  plissait  son  front, 
d'écarter  le  chagrin  qui  froissait  son  âme,  qu'enfin  on  le  servait, 
lui,  Musson!  comme  on  sert  le  Champagne  :  pour  égayer  la  so- 
ciété. 

Alors  sa  fierté  d'artiste  et  de  roturier  se  révolta  :  il  fut  prêt  à 
repousser  ces  prévenances,  ces  politesses  achetées  au  prix  d'une 
sorte  d'avilissement...  !  Mais  Musson  était  pauvre;  il  aimait  le  plai- 
sir, la  bonne  chère  et  le  vin  !  Il  capitula.  Il  consentit  à  exercer  le 
métier  de  bouffon,  puisque  ce  métier  le  faisait  vivre  agréablement, 
tout  en  se  promettant  de  se  rattraper,  de  se  venger,  en  pi-enant 
pour  but  de  ses  plaisanteries,  de  ses  bouffonneries  ceux-là  mêmes 
qui  se  croyaient  placés  tellement  au-dessus  de  lui. 

Il  inventa  un  genre  de  mystification  particulier,  qui  consistait 
à  se  faire  passer  pour  un  illustre  étranger,  un  personnage  célèbre 
ou  à  la  mode,  sous  prétexte  d'usages  bizarres,  d'habitudes  singu- 
lières; avec  un  imperturbable  sang-froid,  il  faisait  souffrir  mille 
vexations,  mille  avanies  aux  voisins  de  table  qu'on  lui  avait  donnés, 
presque  toujours  fiers  et  ridicules  gentilshommes  de  province.  — 
Sous  le  nom  de  julord  Go,  pendant  tout  un  hiver  il  mystifia  une 
moitié  de  Versailles  à  la  grande  satisfaction  de  l'autre  ;  tous  les  mé- 
moires du  temps  disent — mais  on  ne  peut  redire  ici —  la  mystifica- 
tion impudente  et  cynique  que,  sous  le  costume  de  la  chevalière 
d'Eon,  il  fit  subir  à  une  réunion  de  dames  des  plus  illustres  et  des 
plus  curieuses! 

DuGAzoN,  dont  la  verve  bouffonne  défrayait  aussi  les  soupers 
libertins,  ne  tarda  pas  à  rencontrer  Musson  dans  le  monde  :  les 
deux  farceurs  se  plurent  et,  pensant  à  l'efiet  immense  qui  pouvait 
résulter  de  leur  association,  ils  se  réunirent  pour  combiner  et  exé- 
cuter des  scènes,  dans  lesquelles  l'un  servait  de  compère  à  l'autre. 
11  ne  tut  plus  dès  lors  permis  d'avoir  Dugazon  sans  Musson,  ni 
Musson  sans  Dugazon. 

A  ce  moment  de  leur  célébrité,  de  leur  gloire,  le  duc  de  la  Vau- 
balière  donna  un  grand  souper,  auquel  furent  invités  les  deux 
plaisants  à  la  mode. 

Le  duc  de  la  Vaubahère  était  ce  joueur  efifréné,  qui,  ayant  com- 
mandé à  son  joaillier  ce  que  l'on  appelait  une  boite  de  crédit  (1), 
reçut  cet  objet  décoré  des  portraits  de  sa  femme  et  de  ses  deux 
enfants  avec  cette  touchante  légende  :  Penses  à  nous.' 

La  recommandation  avait  été  inutile,  car  c'était  pour  célébrer 
une  grande  victoire  au  pharaon  que  le  duc  réunissait  dans  sa 
petite  maison  de  la  rue  du  Rocher  ses  amis  et  leurs  maîtresses  : 
tous  grands  seigneurs  et  toutes  filles  d'Opéra. 

La  soirée  fut  des  plus  folles  et  des  plus  bruyantes  :  on  but,  on 
chanta,  on  brisa...  C'était  un  délke  complet. 

Musson  et  Dugazon  épuisèrent  leur  répertoire  de  charges  et  de 
bouffonneries.  Vers  le  miUeu  de  la  nuit,  deux  des  convives  moins  so- 


(1)  C'est-à-dire  un  boîte  contenant  des  fiches  à  ses  initiales  et  expii- 
mant  promesse  de  100,  200,  SOO,  1,000  louis.  Ces  fiches  se  donnaient 
et  se  recevaient  comme  des  billets. 


lides  ou  peut-être  plus  avides  que  les  autres,  ayant  mis  les  mor- 
ceaux doubles,  succombèrent  à  ces  travaux  d'Hercule,  furent  em- 
portés dans  les  chambres  à  coucher  et  laissèrent  veuves  deux  de  ces 
demoiselles.  C'étaient  deux  danseuses  :  Lolotte  Pigoreaii  et  Fifine 
Soubra.  Vous  retrouverez  leur  nom  et  leur  adresse  dans  l'Almanach 
des  spectacles  de  Duchesne. 

Se  donnant  des  airs  outrés  de  petit-maîtres  et  singeant  les  ma- 
nières des  deux  défaillants,  Musson  et  Dugazon  se  présentèrent 
devant  ces  princesses  comme  remplaçants.  DIabord  on  rit  beau- 
coup de  leurs  grimaces;  mais  les  deux  artistes  ayant  voulu  pous- 
ser les  choses,  Fifine  et  Lolotte  les  écartèrent  d'un  geste  impérieux: 

—  Un  peintre!  pouah! 

—  Un  comédien!  fi  donc! 

—  Du  Roi,  ma  chère! 

—  Ne  dit-on  pas  :  «  Gueux  comme  un  peintre,  »  messieurs? 

—  C'est  :  «  Gai  comme  un  peintre,  »  qu'il  faut  dire,  rétorqua 
joyeusement  Musson. 

La  lutte  de  propos  s'engageait,  on  fit  cercle,  excitant  du  geste 
et  de  la  voix,  comme  aux  combats  de  coqs,  les  assaillants  et  les 
assiégées,  qui,  du  reste,  déjà  fort  animés  parle  Champagne  et  les 
liqueurs,  n'avaient  pas  besoin  de  stimulants. 

—  Allons,  Fifine,  puisque  tu  aimes  la  noblesse,  tu  ne  peux  refu- 
ser tes  bonnes  grâces  au  marquis  de  Mascarille,  —  reprit  Dugazon 
s'avançant  les  bras  ouverts. 

—  Vas  donc  mettre  ton  rouge,  si  tu  veux  jouer  ton  rôle,  dit  la 
belle  en  le  repoussant. 

—  Les  bégueules'  laissa  échapper  Dugazon,  déjà  piqué. 

—  Eh!  mon  dieu!  lui  répondit  Fifine,  qui  l'entendit,  pourquoi 
te  fâcher,  Dugazon?  tu  devrais  être  habitué  à  ce  traitement;  ta 
femme  fait  comme  nous  :  elle  te  met  à  la  porte  pour  recevoir  un 
duc. 

—  Pare  celle-là,  Dugazon,  toi,  si  fort  spadassin!  cria  le  duc  en 
frappant  sur  l'épaule  du  bretteur,  devenu  rouge  de  colère. 

—  Ah!  ça,  mes  petites,  dit  à  son  tour  Masson,  vous  le  prenez 
sur  un  ton?... 

—  Avec  vous?  pourquoi  pas?  répliqua  Lolotte  avec  mépris. 
Si  cela  vous  blesse,  cherchez  vos  maîtresses  chez  Nicolet! 

—  Eh!  mes  toutes  belles,  reprit  Musson,  qui  commençait  à  s'é- 
chauffer, sauteuses  pour  sauteuses,  vivent  celles  qui  sautent  le  plus 
haut  ! 

—  Ah  !  ah  !  il  t'a  payée  en  bonne  monnaie,  cria-t-on  de  toutes 
parts. 

—  Insolents!  dit  majestueusement  Lolotte  en  se  levant;  je  vous 
ferai  donner  cent  coups  de  bâton  par  mes  laquais  ! 

—  Vos  laquais  !  exclama  Dugazon  avec  emphase,  vos  laquais  ! 
Princesse,  ne  sont-ce  pas  messieurs  vos  cousins? 

Uue  explosion  de  rires  accueillit  le  trait  et  sembla  donner  vic- 
toire aux  artistes;  mais  les  danseuses  voulaient  avoir  le  dernier. 

—  Faites  de  l'esprit.  Messieurs,  vous  avez  beau  dire,  les  fiUes 
d'Opéra  ne  sont  pas  pour  vous  ! 

—  J'aimerais  mieux...  tenez!  le  petit  chevaher,  dit  Lolotte  allant 
se  jeter  au  cou  d'un  jeune  homme  qui  restait  modestement  der- 
rière tout  le  monde.  —  Noblesse  et  misère!  voilà  ma  devise! 

—  Et  moi,  fit  l'autre  en  tirant  à  elle  un  gros  podagre,  qui 
faillit  tomber  à  cette  rude  secousse,  je  préfère  le  commandeur 
goutteux. — Viens,  mon  vieux  commandeur,  que  je  t'embrasse  ! 

A  ce  double  trait  de  désintéressement  et  de  dévouement  à  la 
noblesse,  on  applaudit  les  danseuses,  comme  après  la  plus  brillante 
gargouillade. 

Décidément  battus,  puisque  les  objets  en  litige  étaient  adjugés, 
Dugazon  et  Musson  durent  faire  bonne  mine  à  mauvais  jeu.  Mais 


DE  PARIS. 


213 


ils  ne  se  quittèrent  pas  sans  s'être  promis  de  tirer  une  éclatante 
vengeance  de  ces  deux  déesses  du  Magasin  (l). 

Trois  mois  s'étaient  écoulés  depuis  cette  folle  nuit. 

Un  ambassadeur  turc  arriva  à  Paris  ;  on  s'empressa  de  lui  faire 
les  honneurs  de  tous  les  établissements  publics  de  la  capitale,  et  les 
théâtres  ne  furent  pas  oubliés.  On  organisa  en  sa  faveur  des  re- 
présentations extraordinaires  où  l'on  étala  tout  ce  que  nous  possé- 
dions de  mieux  en  œuvres,  en  talents,  en  spectacles.  Ainsi  pro- 
mené, ce  Turc  devint  bientôt  le  sujet  de  toutes  les  conversations, 
dans  les  foyers  de  théâtres.  Aucune  difficulté  politique  n'existant 
alors  entre  la  Sublime  Porte  et  la  cour  de  France,  on  s'évertua 
partout  à  chercher  à  deviner  quel  pouvait  être  le  motif  de  la  vi- 
site inattendue  de  ce  mmaamouchi. 

Thomas  SAUVAGE. 
(La  suite  prochainement.) 


REVUE  DES  THÉÂTRES. 

Théâtre-Français  :  Agamemnon,  tragédie  en  cinq  actes,  imitée 
de  Sénèque,  par  M.  de  Bornier;  reprise  de  une  Chaîne,  co- 
médie de  Scribe.  — Gymnase  :  une  Journée  de  Liderot,  comédie 
en  un  acte,  par  IVffl.  Michel  Carré  et  Raymond  Deslandes;  les 
Amendes  de  Timothée,  comédie  en  un  acte,  par  MM.  Clairville 
et  H.  Gillet.  —  Variétés  :  Garde-toi,  je  me  garde,  vaudeville  en 
un  acte,  par  M.  H.  Meilhac. 

Il  est  bon  que,  de  loin  en  loin,  le  Théâtre -Français  fasse  abstrac- 
tion de  ses  intérêts  pécuniaires  pour  favoriser  d'estimables  tenta- 
tives dans  le  domaine  de  la  littérature  classique.  S'il  n'en  retire 
pas  un  profit  essentiel  pour  sa  caisse,  il  lui  reste  du  moins  l'hon- 
neur d'avoir  prêté  son  appui  à  une  de  ces  manifestations  qui  ont 
droit  ans.  égards  des  gens  instruits  et  éclairés.  L'Agamemnon  de 
M.  de  Bornier  est  dans  ce  cas.  C'est  une  imitation  de  la  tragédie  de 
Sénèque,  qui  elle-même  est  imitée,  comme  l'on  sait,  de  celle  d'Es- 
chyle. Grand  est  le  nombre  des  tragédies  qui  ont  été  faites  sur  ce 
sujet  ;  la  plus  célèbre  est  celle  de  Lemercier.  Mais  les  auteurs  qui 
ont  précédé  M.  de  Bornier  se  sont  plutôt  inspirés  d'Eschyle  que 
de  Sénèque;  car,  il  faut  bien  en  convenir,  la  pièce  latine  est  bien 
inférieure  à  la  pièce  grecque.  Dans  cette  dernière,  le  caractère  de 
Clytemnestre  est  bien  plus  accentué  ;  les  événements  y  sont  pré- 
sentés d'une  manière  plus  tragique.  On  dirait  que  Sénèque  a  pris 
à  tâche  de  féminiser  le  rôle  de  l'épouse  d' Agamemnon  et  de  lui 
donner  des  scrupules,  des  remords,  qu'elle  n'a  pas  chez  le  poëte 
athénien.  Quant  à  l'acition,  elle  se  réduit  à  bien  peu  de  chose. 
L'ombre  de  Thyeste  sort  des  enfers  pour  exciter  son  fils  Egysthe 
à  le  venger  d'Agamemnon.  Egysthe  se  sert  de  l'influence  qu'il  a 
conquise  sur  Clytemnestre,  pendant  l'absence  du  roi  d'Argos,  pour 
la  forcer  à  devenir  sa  complice.  Agamemnon  est  égorgé  au  milieu 
d'un  repas;  Cassandre,  sa  captive,  éprouve  le  même  sort,  et 
Electre,  pour  avoir  protégé  son  frère  Oreste,  est  jetée  dans  un 
cachot. 

M.  de  Bornier,  malgré  tous  ses  efforts,  n'a  pu  donner  la  vie  à 
ce  squelette.  Mais  ce  n'est  pas  là  qu'il  faut  chercher  le  mérite  de 
son  imitation  ;  c'est  dans  les  formes,  c'est  dans  le  style,  c'est  dans 
le  goût  littéraire.  Ses  vers  sont  généralement  bien  frappés,  et  il  y 
en  a  plusieurs  de  très-remarquables.  Le  chœur  des  Argiennes  et 
celui  des  Troyennes  captives  sont  surtout  traités  avec  un  senti- 
ment des  plus  poétiques  :  Mlles  Ponsin  et  Lloyd  leur  ont  prêté 
beaucoup  de  charme.  Mlle  Devoyod  est  une  belle  Clytemnestre  et 
Mlle  Tordeus  s'acquitte  fort  bien  du  rôle  prophétique  de  Cassandre. 


(1)  On  appelait  ainsi  les  demoiselles  du  corps  de  ballet,  dont  l'école 
se  tenait  dans  le  magasin  de  l'Opéra,  rue  Saint-Nicaise. 


Les  hommes  sont  moins  heureusement  partagés  ;  cependant  Séné- 
chal a  eu  de  bons  moments  dans  le  rôle  d'Egysthe,  et,  autour  de 
lui,  on  a  trouvé  moyen  d'applaudir  Masset,  Gibeau,  Chéry  ainsi 
que  Mlle  Marie  Royer. 

On  a  repris,  au  même  théâtre.  Une  Chaîne,  de  Scribe,  et  celte 
comédie,  dont  nous  avons  entendu  bien  souvent  contester  la  va- 
leur, a  obtenu  un  de  ces  francs  et  légitimes  succès  devant  les- 
quels la  critique  n'a  plus  qu'à  s'incliner.  Le  rôle  difficile  d'Emeric 
est  joué  aujourd'hui  avec  infiniment  de  talent  et  de  distinction  par 
Febvre;  Mme  Madeleine  Brohan  a  dû  aussi  éviter  les  écueils  de 
celui  de  Louise.  Bressant  et  Régnier  ont  conservé  leurs  rôles,  et 
personne  ne  s'en  est  plaint,  bien  au  contraire. 

—  Le  Gymnase  a  donné,  dans  une  même  soirée,  deux  petites 
comédies  en  un  acte  qui  ont  reçu  un  excellent  accueil.  La  pre- 
mière s'appelle  une  Journée  de  Diderot  et  rentre  dans  la  catégorie 
des  pièces  dites  de  galerie  qui  sont  un  peu  passées  de  mode.  Elle 
met  en  scène  non-seulement  Diderot  le  philosophe,  mais  aussi  ce 
fameux  neveu  de  Rameau  qui  a  été  esquissé  de  main  de  maître 
par  l'auteur  du  Père  de  famille  dans  une  de  ses  plus  charmantes 
boutades.  Le  neveu  de  Rameau  est  un  chevalier  d'industrie  d'une 
curieuse  espèce.  Professant  le  cynisme  le  plus  éhonté,  il  vit  aux 
dépens  de  tous  les  riches  dont  il  s'est  constitué  le  bouffon.  Parmi 
eux  se  trouve  un  fermier-général  qui  laisse  dans  le  dénûment  le 
plus  complet  sa  belle-sœur  ainsi  que  sa  nièce.  Tout  à  coup  on 
apprend  que  ce  maltôtier  est  mort  intestat,  et  que  par  conséquent 
ses  deux  parentes  héritent  de  ses  grands  biens.  Mais  Diderot  dé- 
couvre dans  les  papiers  de  la  succession  un  testament  en  faveur 
du  neveu  de  Rameau.  Lui  seul  connaît  cet  acte,  et  il  ne  tiendrait 
qu'à  lui  de  l'anéantir.  Néanmoins  le  devoir  l'emporte,  et  Rameau 
pst  mis  en  possession  du  testament.» — Comment?  lui  dit  Rameau 
en  persiflant,  vous  avez  tenu  ce  papier  dans  vos  mains  et  vous  ne 
l'avez  pas  brûlé?  Voilà  bien  mon  philosophe  !  Tenez,  moi,  à  votre 
place,  voici  ce  que  j'aurais  fait.» —  En  même  temps,  il  déchire  le 
testament  et  le  jette  au  feu. 

C'est  Pradeau  qui  joue  le. neveu  de  Rameau;  cet  artiste,  heureu- 
sement doué,  dissimule  habilement  les  côtés  scabreux  de  son  per- 
sonnage. Le  rôle  de  Diderot  est  interprété  par  un  débutant  du 
nom  de  Pujol  qui  a  de  la  tenue,  de  la  distinction,  et  qui  est  appelé 
à  rendre  d'utiles  services  dans  la  troupe  du  Gynmase,  déjà  si  riche 
en  bons  comédiens. 

Les  Amendes  de  Timothée  nous  offrent  l'amusant  tableau  des 
tribulations  d'un  pauvre  mari,  plus  naïf  que  coupable,  qui  essaie 
timidement  de  donner  des  coups  de  canif  dans  le  contrat,  tout  en 
adorant  sa  femme,  et  qui,  pour  le  premier  de  ses  méfaits  imagi- 
naires, s'impose  une  amende  au  profit  de  la  partie  lésée  chaque 
fois  que  sa  conscience  lui  fait  un  reproche.  Un  calepin  sur  lequel 
il  inscrit  cette  singulière  comptabilité  est  découvert  par  sa  femme, 
qui  se  venge  des  prétendues  scélératesses  de  Timothée  en  le  mys- 
tifiant avec  l'aide  d'une  de  ses  amies. 

Landrol  est  très-plaisant,  comme  à  son  ordinaire,  dans  le  rôle 
du  mari  mystifié.  Il  est  bien  secondé  par  Francès,  par  Mlle  Massin 
et  par  Mlle  Magnier. 

—  Garde-toi,  je  me  garde,  tel  est  le  titre  d'un  petit  lever  de 
rideau  de  M.  Henri  Meilhac,  que  les  Variétés  ont  joué  dernière- 
ment à  la  faveur  d'une  représentation  dominicale.  C'est  à  peu 
près  la  même  idée  que  celle  de  la  haine  héréditaire  du  Château 
à  Tolo,  seulement  elle  est  simulée,  au  lieu  d'être  effective.  Bou- 
langé n'est  pas  mauvais  dans  le  rôle  principal. 

D.  A.  D.  SAINT-YVES, 


214 


IlEVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


monnier  et   Léo    Delibes.  Elle  est  soigneusement  montée  et  très-bien 
interprétée  par  MM.  Pacra  et  Mlle  Valérie. 


L'éditeur  E.  Bock,  de  Berlin,  vient  de  prendre  une  initiative 
louable  à  tous  égards  :  il  met  au  concours  le  texte  (allemand)  et  la  mu- 
sique d'un  opéra-comique  en  un  nombre  d'actes  suffisant  pour  remplir 
une  soirée.  Les  poëmes  devront  être  envoyés  avant  le  31  octobre  prochain, 
et  les  trois  meilleurs  se  partageront  des  prix  de  50,  30  et  20  frédérics  d'or; 
les  manuscrits  seront  imprimés  et  mis  le  l'"'  février  suivant  à  la  dispo- 
sition des  compositeurs,  qui  pourront  aussi  cependant  se  servir  d'un 
libretto  écrit  par  eux.  Les  partitions  seront  reçues  jusqu'au  30  septem- 
bre 1869;  trois  prix  de  120,  50  et  30  frédérics  d'or  leur  seront  distri- 
bués, le  résultat  final  sera  publié  le  1"'  janvier  1870.  Les  membres  du 
jury  sont:  MM.  Hans  de  Bîxlow,  H.  Dorn,  J.  Hein,  Ferd.  Hiller,  baron 
de  Perfall,  G.  Zu  Putlitz,  J.  Rielz,  W.  Taubert,  de  Winterfeld  et  baron 
de  WoUzogen.  Les  poëmes  et  partitions  restent  la  propriété  de  l'éditeur  ; 
et  les  auteurs  auront  droit,  en  outre  des  prix  ci-dessus  mentionnés,  à  la 
moitié  des  droits  d'auteur  au  théâtre,  à  partager  entre  eux  dans  la  pro- 
portion d'un  sixième  pour  le  poëte  et  de  deux  sixièmes  pour  le  compo- 
siteur. 


NOUVELLES  DES  THËÀTRES  LYRIQUES. 


^*^  Le  théâtre  impérial  de  l'Opéra  a  donné  lundi  la  première  repré- 
sentation de  la  reprise  A'Herculanum.  Nous  en  rendons  compte.  —  Mer- 
credi on  a  joué  pour  la  deuxième  fois  l'œuvre  de  Félicien  David,  et  elle 
l'eût  été  encore  vendredi,  si  une  indisposition  subite  de  Mlle  Battu  n'a- 
vait forcé  de  lui  substituer  la  Muette  de  Portici.  On  annonce  la  troisième 
pour  mercredi. 

,^**  Mardi  a  eu  lieu  au  théâtre  de  l'Opéra-  Comique  la  dernière  repré- 
sentation du  Premier  Jour  de  bonheur.  Les  interprètes  ont  été  tous  Irès- 
fêtés  ;  des  bouquets  en  grand  nombre  ont  été  jetés  à  Mme  Cabel  et  à 
Mlle  Marie  Roze;  une  couronne  au  feuillage  d'or  est  tombée  aux  pieds 
de  cette  dernière  et  a  été  galamment  posée  sur  sa  tête  par  Capoul.  On 
sait  que  c'est  par  suite  du  congé  que  prennent  à  la  fois  ces  trois  ar- 
tistes que  l'opéra  d'Auber  est  interrompu. 

^''',1,  Les  Dragons  de  Villars  sont  maintenant  en  pleine  possession  de 
la  faveur  du  public,  et  on  y  applaudit  trois  fois  par  semaine  Mmes  Galli- 
Marié  et  Girard,  Melchissédec  qui  remplace  Barré  en  congé,  Lhérie  et 
Ponchard . 

**,  Achard  a  fait  jeudi  une  brillante  rentrée  dans  Haydée.  Le  baryton 
Gailhard  y  a  chanté  pour  la  première  fois  le  rôle  de  Malipieri  et  s'en 
est  bien  acquitté.  Emu  d'abord,  le  débutant  n'a  pas  tardé  à  recouvrer 
ses  moyens;  il  a  été  légitimement  applaudi.  —  Mlle  Belia  chantaitle 
rôle  de  Rafaëla. 

»%  Mme  F.  Sallard,  du  théâtre  de  la  Monnaie  à  Bruxelles,  en  ce 
moment  à  Paris,  chante  ce  soir  le  rôle  de  Galalhée  dans  l'opéra  de  Victor 
Massé. 

^*^  On  répète  l'opéra  de  Poize,  après  lequel  viendra  VOmhre,  de  MM. 
de  Saint-Georges  et  de  Flotow. 

»**  Une  reprise  du  Docteur  Mirobolan  est  prochaine.  Couderc  y  re- 
prendra le  rôle  de  Crispin. 

***  Le  frère  de  Mlle  Baretti,  M.  Georges  Baretti,  jeune  ténor  précé- 
demment au  théâtre  Lyrique,  vient  d'être  engagé  par  MM.  de  Leuven  et 
Ritt.  Son  début  aura  lieu  dans  le  Chalet. 

j*i^  Il  est  question  d'une  opérette-bouffe  en  deux  actes  de  MM.  H.  Meil- 
hac.  Lud.  Halévy  et  Offenbach,  dans  laquelle  Mlle  Schneider  créerait  le 
priticipal  rôle  au  théâtre  des  Variétés,  avant  d'aller  jouer  aux  Bouffes- 
Parisiens.  —  Cet  ouvrage  serait  donné  au  mois  d'octobre. 

,*^  Le  théâtre  de  l'Athénée  a  fait  sa  clôture  dimanche  et  la  troupe  est 
partie  pour  Bruxelles,  où  elle  va  donner  des  représentations  de  Fhur  de 
Thé.  —  L'Athénée  rouvrira  le  1='  septembre  par  le  Petit  Poucet, 

i^*if,  M.  Rekel,  professeur  de  chant,  vient  de  signer  un  engagement 
avec  M.  Busnach  pour  faire  un  cours  de  chant  (vocalises  et  diction  lyri- 
que) aux  jeunes  artistes  du  théâtre  de  l'Athénée. 

,,%  L'Eldorado  joue  en  ce  moment  avec  beaucoup  de  succès  les  Deux 
Vieilles  Gardes,   cette   spirituelle  bouffonnerie   de   MM.  Villeneuve,  Le- 


^,*^,  Dans  une  lettre  datée  de  Cabourg,  M.  Montaubry  dément  la  nou- 
velle qui  avait  couru  de  son  engagement  aux  nouveaux  Bouffes-Parisiens. 

^*if:  Les  Lyonnais  ne  se  lassent  pas  d'applaudir  leur  compatriote  Ber- 
thelier.  La  foule  accourt  à  toutes  les  représentations  qu'il  donne  et  lui 
fait  bisser  ses  chansonnettes. 

^*^  Les  journaux  de  Saumur,  d'Angers,  de  Tours  nous  apportent  les 
nouvelles  de  la  marche  triomphale  de  Mme  Ugalde  et  de  sa  troupe  ; 
dans  ces  diverses  villes  comme  partout,  la  Grande- Duchesse  fait  fureur, 
et  la  célèbre  cantatrice  n'est  pas  moins  fêtée  que  la  pièce.  Quoique  par- 
tie avec  l'intention  de  ne  donner  dans  chaque  localité  qu'une  représen- 
tation de  l'œuvre  d'Offenbach,  Mme  Ugalde  n'a  pu  tenir  ce  programme 
et  elle  a  dû,  après  la  première,  céder  aux  instances  du  public  en  en  don- 
nant une  seconde.  La  scène  de  la  déclaration  au  deuxième  acte  ne 
manque  jamais  son  effet  et  tous  les  soirs  elle  est  bissée. 

»%  L'imprésario  Merelli  exploitera  cette  année  le  théâtre  Italien  à 
Moscou  du  20  septembre  au  8  janvier,  et  à  Varsovie  du  15  janvier  au  15 
avril.  Son  personnel  se  compose  de  Mmos  Désirée  Artôt,  Ferucci ,  Be- 
nati,  soprani,  et  de  Mmes  Honoré  et  Trebelli-Bettini,  contralti  ;  de 
MM.  Stagne  et  Piazza,  ténors;  Padilla,  baryton;  Bossi  et  Finocchi,  iasses. 
M.  Dupont,  chef  d'orchestre. 


NOUVELLES  DIVERSES. 


**,j  Le  grand  prix  de  composition  musicale  vient  d'être  décerné ,  par 
le  jury,  à  MM.  Rabuteau  et  Winzweiller,  tous  deux  élèves  de  M.  Am- 
broise  Thomas. — Le  sujet  de  la  composition  était  «  Daniel  venant  sur- 
prendre Balihazar  au  milieu  de  son  repas  impie.  »  M.-  Rabuteau  a  eu 
pour  interprètes  Mlle  Levieilli,  MM.  Ponsard  et  Grisy,  de  l'Opéra. 
Ceux  de  M.  Winzweiller  étaient  Mlle  Dorasse,  M.  Lhérie,  de  l'Opéra- 
Comique,  et  M.  Aubery,  pensionnaire  du  Conservatoire.  Le  piano  était 
tenu  par  MM.  Fissot  et  Pugni. — MM.  Rabuteau  et  Winzweiller  étaient  les 
deux  seuls  candidats  admis  à  concourir.  Sur  cinq  qui  s'étaient  présen- 
tés, trois  ont  été  écartés — Le  partage  prononcé  par  le  jury  se  fera  dans 
les  conditions  suivantes  :  la  pension  sera  servie  pendant  quatre  ans  au 
premier  des  deux  lauréats,  M.  Rabuteau,  et  pendant  trois  ans  à  M.  Winz- 
weiller. 

»■**  M.  Alphonse  Royer  prépare  la  publication  d'un  ouvrage  qui  pa- 
raîtra à  la  fois  en  français,  en  anglais  et  en  allemand,  sous  le  titre 
d'Histoire  critique  du  théâtre  universel,  et  qui  analyse  les  œuvres  drama- 
tiques les  plus  importantes  de  chaque  pays  et  de  chaque  siècle.  L'unité 
de  pensée  qui  a  dominé  à  toutes  les  époques  entre  les  littératures  dra- 
matiques des  différents  peuples  ressortira  clairement  des  déductions  de 
cet  examen  comparatif. 

if*if  M.  Hippolyte  Grignon,  professeur  de  chant  au  collège  des  Jésuites 
de  Vaugirard,  vient  de  résigner  volontairement  cet  emploi.  Nous  ne 
douions  pas  que  cet  artiste  distingué ,  fils  d'un  chanteur  qui  a  laissé 
d'excellents  souvenirs  à  l'Opéra-Comique,  ne  retrouve  bientôt  une  posi- 
tion nouvelle  complètement  digne  de  son  talent  d'exécutant  et  de  son 
mérite  de  professeur. 

5(,*j  M.  le  ministre  de  l'instruction  publique  vient  de  faire  don  à  la 
Société  des  Compositeurs  de  musique  de  différents  ouvrages  concernant  la 
littérature  et  l'archéologie  musicales. 

^%  L'éditeur  Lavinée  annonce  la  publication  de  la  partition  pour  or- 
chestre d'il  Barbiere,  de  Païsiello,  dans  le  format  dit  tascabile  (portatif), 
dont  l'éditeur  Guidi,  de  Florence,  a  pris  l'initiative  pour  les  partitions 
de  Guillaume  Tell  et  des  Huguenots.  Celle  qu'annonce  M.  Lavinée  est 
également  gravée  à  Florence. 

»*^  Les  compositions  de  Mme  Rossi  Galieno  sont  fort  goûtées  par  les 
amateurs  de  musique  de  piano  ;  nous  sommes  donc  sûrs  de  leur  être 
agréable  en  leur  annonçant  qu'elle  vient  d'en  faire  paraître  deux  nou- 
velles, qui  ont  pour  titre  :  Chants  du  Soir  et  Tarentelle,  et  qui  ne  sont 
pas  réservées  à  un  moins  grand  succès  que  leurs  aînées. 

»**  Le  deuxième  volume  de  Mes  Souvenirs,  par  M.  Léon  Escudier, 
consacré  aux  virtuoses,  vient  de  paraître  chez  Dentu. 

5ic*=!t  Le  premier  numéro  du  Gaulois,  journal  quotidien  (du  soir),  litté- 
raire et  politique,  a  paru  hier.  Ce  numéro  contient  :  un  Salut  au  pu- 
blic, signé  H.  de  Pêne  et  Tarbé  des  Sablons;  la  Première  aux  Gaulois, 
par  M.  Edmond  About;  la  Vie  parisienne,  par  Oct.  de  Parisis;  l'Esprit  des 
autres,  revue  des  Journaux,  par  Edouard  Fournier  ;  Ateliers  et  Coulisses, 
par  Louis  Leroy;  les  Éphémérides  mondaines  et  théâtrales  de  Roger  l'Es- 
trange  ;  la  Gastronomie  de  Balthazar  ;  des  nouvelles  à  la  main  ;  des  me- 


UE  PAKIS 


215 


nus  propos;  les  aparlé  de  la  chanoinesse;  des  échos;  des  faits  divers,  etc. 
En  feuilleton,  la  préface  encore  inédite  de  la  Qucsdon  d'argent,  par 
Alexandre  Dumas  fils.-Demain,  le  Gaulois  commencera  le  roman  de 
Charles  Dickens  :  l'Abîme,  d'où  est  tiré  la  pièce  qu'on  applaudit  au  Vau- 
deville. 

«*»  L'année  dernière,  l'administration  du  Casino  de  Deauville  avait 
engagé,  pour  le  concert  donné  à  l'occasion  des  courses,  Mlle  A.  Patti. 
Il  est  question  pour  cette  fois  d'engager  Mlle  Nillsson. 

^'^  Souhaitons  la  bienvenue  à  un  nouveau  confrère:  le  Monde  des  Arts. 
Son  rédacteur  en  chef,  Elle  Brault,  est  un  jeune  auteur  dramatique  connu 
en  outré  par  des  livres  sérieux,  et  ses  collaborateurs  sont  pour  la  plu- 
part des  écrivains  de  talent.  Cette  nouvelle  feuille  artistique  se  présente 
bien  et  nous  paraît  avoir  de  l'avenir. 

^*^  L'Union  musicale  de  l'Ouest  a  tenu  cette  année  son  congrès  à  Li- 
moges. Deux  concerts  magnifiques  ont  été  donnés;  on  y  a  applaudi 
Achard,  Mme  Carvalho  et  le  sympathique  et  consciencieux  Agnesi,  qui 
remportait  quelques  jours  après  un  nouveau  succès  à  Bade,  en  compa- 
gnie de  Mlle  Harris. 

,*«  Cette  année,  à  l'occasion  de  la  kermesse,  aura  lieu  à  Bruxelles,  les 
dimanche  19  et  lundi  20  juillet,  un  grand  festival  musical  auquel  sont 
appelées  à  concourir  toutes  les  sociétés  d'harmonie  ou  de  fanfare  du 
pays. 

^*4^  On  nous  écrit  de  Bade  :  «  La  première  soirée  musicale  donnée 
dans  la  superbe  salle  Louis  XUI  était  très-brillante.  On  y  a  entendu 
Mlle  Brunetti  et  un  très-agréable  ténor,  M.  Bach,  MM.  GrodvoUe,  Schotte- 
Mayerhofer  et  Oudshorn.  Wuille,  le  célèbre  clarinettiste,  y  a  exécuté  de 
belles  fantaisies  sur  des  motifs  d'Auber,  et  le  concert  s'est  terminé 
par  un  duo  des  Dragons  de  Villars,  chanté  avec  beaucoup  d'âme  par 
M.  Bach  et  Mlle  Brunetti.— Au  deuxième  concert,  qui  aura  lieu  samedi, 
on  entendra  Mme  Harris  et  Agnesi,  Mlle  Caussemille,  MM.  Oudshorn, 
Rucquoy  et  Stennebriigen. 

**,  Mercredi  a  été  célébré  le  mariage  de  M.  Ludovic  Halévy  avec 
Mlle  Bréguet,  au  temple  de  l'Oratoire,  devant  une  nombreuse  assistance 
d'hommes  éniinents  dans  les  lettres,  les  arts  et  les  sciences. 

^*,i,  On  annonce  la  mort  de  M.  Adolphe  Vieyra,  ancien  agerit  de 
change,  cousin  d'Halévy,  par  sa  femme;  —  et  de  Mme  veuve  Emile 
Chevé,  née  Nanine  Paris.  Des  trois  chefs  de  Vécole  du  chiffre,  il  n'en  reste 
plus  un  seul. 

^*^  Vête  de  la  garde  impériale  au  Pré-Catelan. —  Cette  année  la  grande 
fête  musicale  qui  sera  donnée  au  Pré-Catelan,  le  dimanche  12  juillet, 
par  les  admirables  musiques  de  la  garde  impériale,  aura  un  éclat  tout 
exceptionnel.  —  S.  M.  l'Empereur  a  daigné  accorder,  pour  cette  solennité 
de  bienfaisance,  les  musiques  de  la  gendarmerie,  des  1",  2'=,  3^  grena- 
diers, des  zouaves  et  des  chasseurs  à  pied. —  Tout  Paris  assistera  à  cette 
fête  unique,  qui  marquera  comme  l'une  des  plus  belles  dans  les  annales 
des  plaisirs  de  l'été  de  1868. 


ÉTRANGER 


jf*^  Londres.  —  Mme  Lucca  a  terminé  son  engagement  à  Covent-Gar- 
den  le  l"^'  juillet,  par  une  splendide  représentation  à  son  bénéfice,  où 
elle  a  chanté  avec  Naudin  le  deuxième  acte  de  Fra  Diavolo  et  le  qua- 
trième acte  de  V Africaine,  et  avec  Mario  le  troisième  acte  de  Faust.  — 
Pour  la  première  fois  de  la  saison ,  Roméo  et  Juliette  a  été  donné  Jeudi 
avec  Mlle  Patti  et  Mario,  qui  y  ont  remporté  un  très-grand  succès.  — 
Mme  Rey-Balla  a  débuté  dans  les  Huguenots;  le  public  l'a  bien  reçue. 


malgré  le  souvenir  dangereux  pour  elle  de  Mme  Lucca.  —  A  Drury- 
Lane,  Mlle  Kellogg  a  abordé  la  Fille  du  Régiment;  elle  y  a  été  char- 
mante. —  Mlle  Nilsson  a  joué  Faust  pour  la  première  fois  depuis  l'an- 
née dernière;  elle  a  été  aussi  applaudie  que  jamais.  —  Il  est  question 
d'un  grand  voyage  artistique  à  New- York,  que  M.  Mapleson  entrepren- 
drait avec  ses  principaux  artistes,  Santley,  Mongini,  Mmes  Tictjons,  Kel- 
logg et  Trebelli.  Les  représentations  auraient  lieu  à  l'Académie  de  mu- 
sique. —  M.  Frédéric  Guzman ,  le  pianiste  chilien,  a  donné  le  22  juin 
un  très-beau  concert  dans  les  salons  Willis,  avec  sa  femme  et  Mlle  Ene- 
quist.  Dans  un  trio  de  Mendelssohn,  le  septuor  de  Hummel,  plusieurs 
duos  à  quatre  mains  (avec  Mme  Guzman)  et  la  Victoria-Marche  pour 
deux  pianos,  dont  il  est  l'auteur,  il  a  fait  apprécier  sa  brillante  et  solide 
exécution,  et  les  applaudissements  ne  lui  ont  pas  fait  défaut.  —  Rubins- 
tein  est  parti  pour  Odessa,  avec  sa  femme  et  son  enfant. 

»*.;it  Hombourg.  —  La  saison  s'annonce  magnifiquement  ;  la  composi- 
tion de  la  troupe  engagée  par  la  direction  nous  promet  de  vives  et 
artistiques  jouissances.  On  peut  se  dispenser  de  tout  commentaire  en  ci- 
tant les  noms  de  Mlles  Adelina  Patti,  Désirée  Artôt,  Grossi,  Ida  Bettini, 
Marietta  AUievi,  Marietta  Pederzani,  de  MM.  Naudin,  Corsi,  Verger, 
Agnesi,  Ciampi,  Mercuriali. 

^*^  Vienne.  —  C'est  avec  les  Huguenots  que  l'Opéra  a  fait  sa  réouver- 
ture le  !'"■  juillet.  —  L.-A.  Zellner,  bien  connu  comme  rédacteur  des 
Blœtter  fUr  Theater,  Musik,  etc.,  succède  à  feu  Simon  Sechter  comme 
professeur  de  basse  générale  et  d'harmonie  au  Conservatoire. 

:^*,p  Pesth.  —  L'opéra  Zrinyi ,  de  M.  d'Adelburg,  donné  pour  la  pre- 
mière fois  le  23  juin  au  Théâtre-National,  a  reçu  du  public  le  meilleur 
accueil. 

^*^  Padoue.  —  La  brillante  représentation  du  Prophète,  dent  nous 
avons  parlé,  a  été  la  dernière  de  la  saison.  La  prima  donna  Maria  Des- 
tin s'y  est  montrée  cantatrice  achevée  et  grande  actrice.  Nous  ne  devons 
pas  oublier  le  ténor  Villani ,  un  très-remarquable  Jean  de  Leyde,  ni  la 
jeune  et  sympathique  Ostawa  Torriani,  qui  a  rendu  avec  un  grand  soin 
et  un  charme  tout  particulier  le  rôle  de  Berthe,  et  que  de  chaleureux 
et  fréquents  applaudissements  ont  récompensé  de  ses  efforts. 


Le  Directeur  :  S.  DCEOUB. 


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REVUE 


12  Juillet  I8«8. 


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Étranger î*  "      '"1. 

Le  Journal  paraît  le  Dimanche. 


GAZETTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


SOMMAIRE.  —  Études  sur  Charles-Marie  de  Weber  (troisième  partie,  4'  arti- 
cle), par  Edmond  IWeukomin.  —  Les  droits  des  auteurs  (deuxième  par- 
tie, it"  article)  ,  par  Thomas  SauTage.— L'Homme  en  Bellini,  à  propos 
de  :  Sellini,  sa  vie,  ses  œuvres,  de  M.  Arthur  Pougin,  par  Em.  Uatbieu 
de  llonter.  —  Nouvelles  des  théâtres  lyriques .  — Nouvelles  diverses.  — 
Annonces. 


ÉTUDES  SUR  CHÂRLES-^kiiïË  hi  ^LUi, 

D'après   la   blograplile    écrite   par   son 


TROISIEMK  PARTIE. 


{S"  article)  (1). 


n 


Le  congé  accordé  à  Morlacchi,  en  l'absence  du  comte  Vitzthum,' 
avait  singulièrement  ajouté  aux  fonctions  de  Weber;  car,  outre  le 
théâtre  allemand,  confié  à  ses  soins,  il  prenait  en  mains  les  in- 
térêts du  théâtre  italien,  en  même  temps  que  le  service  de  l'é- 
glise catholique  et  celui  de  la  rausiquependant  les  repas  de  gala.  Or, 
il  n'est  pas  inutile  de  dire  que,  seules ,  les  exécutions  musicales 
à  l'église  atteignaient  le  nombre  de  cent  cinquante  par  an,  sans 
compter  les  répétitions  ;  en  effet,  tous  les  dimanches  et  jours  de 
fête,  il  y  avait  messe  et  .vêpres  en  musique,  et  tous  les  samedis 
et  veilles  de  fête,  vêpres  à  quatre  heures.  Le  service  pendant  les 
repas,  auquel  prenaient  part  les  meilleures  forces  instrumentales 
et  vocales,  n'était  pas  moins  fatigant. 

Weber  commença  son  service  à  l'église,  le  27  septembre  de 
l'année  1817,  par  l'exécution  d'une  litanie  de  Naumann,  et  à  ce 
sujet  il  nous  semble  curieux  de  relater  que  Weber  se  confessa  et 
communia  dans  la  matinée  de  ce  jour,  comme  il  avait  coutume 
de  le  faire  toutes  les  fois  qu'il  entreprenait  quelque  chose  de  nou- 
veau. C'était  une  habitude  à  laquelle  il  ne  manquait  pas  ;  aussi 
ne  devons-nous  pas  nous  étonner  de  le  retrouver,  peu  de  temps 
après,  accomplissant  les  mêmes  devoirs,  le  jour  de  son  mariage, 
célébré  à  Prague  avec  une  pompe  inusitée,  tout  le  personnel  du 
théâtre  et  des  sociétés  philharmoniques  et  chorales  ayant  voulu 
participer  à  cette  solennité.  Seule,  la  mère   de    la  petite   Brandt 

(1)  Voir  les  n"  18,  21,  23  et  2S. 


sanglotait  dans  son  coin  ;  et  n'allez  pas  croire  que  ce  fut  par 
sensibilité  maternelle  !  Non  vraiment;  elle  se  désolait...  parce 
que,  à  son  point  de  vue,  ce  mariage  était  une  mésalliance  ;  la 
bonne  dame  ne  pouvait  concevoir  qu'une  aussi  grande  attiste  que 
sa  fille  épousât  un  aussi  petit  compositeur  que  le  jeune  Weber. 
Et  pourtant,  à  cette  époque,  le  maître  avait  déjà  donné  à  l'Alle- 
magne les  chants  patriotiques  qui  l'avaient  enflammée,  depuis  les 
glaces  du  Nord  jusqu'aux  Alpes. 

Quo.  qu'il  en  soit,  Vveuer  et  .'a  leni.iie  qutiièreul  Prague  le  ieu- 
demain  de  leur  mariage.  Il  se  rendirent  par  Baireuth,  Bamberg 
et  Heidelberg  à  Mannheim ,  oîi  ils  arrivèrent  le  14  novembre, 
puis  à  Mayence  oîi  Weber  retrouva  son  vieil  ami  Gottfried  Weber, 
mais,  hélas  !  aussi  froid  et  aussi  compassé  qu'il  s'était  montré  af- 
fectueux, expansif,  aux  beaux  jours  de  Mannheim  et  de  Darms- 
tadt.  Ce  fut  un  grand  chagrin  pour  Weber,  qui  se  hâta  de  quit- 
ter cette  ville,  but  de  son  voyage.  Il  revint  donc  à  Dresde  ,  en 
traversant  Darmstadt,  la  ville  aux  doux  souvenirs,  et  la  Thuringe, 
s'arrêtant  à  Weimar,  où  le  duc  l'accueillit  avec  des  embrassements 
sans  fin.  Le  jeune  couple  arriva  à  Dresde  le  20  décembre. 

Là,  de  nouveaux  tracas  attendaient  le  maître.  Mais  pour  les 
expliquer,  il  est  nécessaire  que  nous  remontions  à  une  époque 
antérieure  aux  événements  qui  marquèrent  le  commencement  de 
l'année  1818. 

Dès  soiv  entrée  en  fonctions  de  directeur  du  théâtre  allemand  de 
Dresde,  Weber  ^vait  pu  se  convaincre  que  l'agencement  de  l'or- 
chestre était  par  trop  différent  de  ce  qu'il  eût  dû  être,  pour  que 
lui,  directeur,  pût  avoir  l'œil  à  tout,  comme  c'était  son  désir. 
L'espace  réservé  aux  musiciens  affectait  la  forme  d'un  carré  long, 
dont  les  deux  extrémités  s'enfonçaient  d'environ  sept  pieds  au- 
dessous  des  loges  d'avant-scène  et  la  Cour  occupait  celle  de 
droite.  Les  cuivres  et  les  instruments  à  percussion  étaient  placés 
dans  cet  enfoncement  de  droite;  aussi  éclataient-ils  souvent  mal  à 
propos,  epipêchés  qu'ils  étaient  de  voir  le  directeur,  placé  devant 
son  piano  au  centre  de  l'orchestre.  Cette  position  avait  en  outre 
l'inconvénient  de  l'isoler  complètement  de  la  scène  et  de  lui  ôter 
la  possibilité  de  communiquer  avec  les  chanteurs  et  les  coulisses  ; 
bien  plus,  elle  l'empêchait  même  le  plus  souvent  d'entendre  les 
chanteurs;  une  contrebasse  et  un  violoncelle  lisant  la  partition  à 
ses  côtés;  dje  plus,  aux  deux  autres  coins  de  son  piano  se  tenaient 


218 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


une  autre  contrebasse  et  un  autre  violoncelle;  à  sa  droite,  le  pre- 
mier et  le  second  violon,  lisant  au  même  pupitre;  devant  lui  et 
tournant  le  dos  à  la  scène,  deux  altos;  à  sa  gauche,  quatre  pre- 
miers et  quatre  seconds  violons;  derrière  les  altos  et  immédiate- 
ment adossées  à  la  scène,  trois  trombones;  à  gauche  deux  flûtes, 
deux  clarinettes,  deux  bassons,  deux  cors  et  deux  trompettes; 
dans  les  cas  oii  quatre  cors  étaient  nécessaires,  on  reléguait  les  deux 
trompettes  dans  la  soupente  qui  se  prolongeait  au-dessous  de  la  loge 
royale. 

Pour  quiconque  a  l'habitude  de  l'orchestre  ,  cet  arrangement 
paraîtra  impossible.  Weber  en  cppiprit  de  suite  toute  la  défectuo- 
sité et  s  efforça  d.'y  remédier;  mais  le  changement  qu'il  souhaitait 
y  apporter,  semblable  à  toutes  les  Jijijovations,  n'avait  aucune  chance 
d'être  accueilli.  11  lui  fut  répond^  ea  haut  lieu,  dès  les  premiers 
mots.  00,4  "^'^  tûMçha,  que  les  clioges  a,\;aient  marché  de  la  sorte  de 
tout  temps,  et  qu'il  eût  à  se  conformer  à  la  tradition,  comme  il 
convenait  au  successeur  de  tant  de  maîti-es  illustres  qui  avaient 
occupé  avant  lui  le  siège  directorial.  Weber  se  tut  et  attendit  une 
occasion  favorable.  Cette  occasion  se  présenta  lors  de  l'exécution 
de  la  cantate  italienne  composée  en  l'honneur  des  augustes  fiancés 
et  que  devait  suivre  une  représentation  de  l'opéra  Titus  de  JUozart. 
Weber  espérait  que  l'attention  du  public,  distraite  par  le  brillant  spec- 
tacle qu'oft'rait  la  salle,  permettrait  à  son  innovation  de  passer 
inaperçue.  En  conséquence,  il  résolut  de  jeter  bas,  d'un  seul 
coup,  tout  l'édifice,  et  dans  ce  but  il  commença,  dès  la  première 
répétition  de  ces  deux  ouvrages,  par  rapprocher  son  piano  de  la 
scène,  en  l'accolant  à  la  boîte  du  souffleur,  de  façon  qu'il  pût 
communiquer  avec  le  théâtre  et  embrasser  tout  son  personnel  ;  en 
outre,  il  plaça  tous  les  instruments  à  cordes  à  sa  droite,  adossant 
les  altos,  les  violoncelles  et  les  contrebasses  au  parquet,  et  il  dis- 
posa les  trombones  au  milieu  des  instruments  à  vent.  Cette  révo- 
lution radicale  passa  effectivement  inaperçue  à  la  représentation 
de  gala;  mais  il  n'en  fut  pas  de  même  lorsqu'il  dirigea,  peu  de 
jours  après,  la  Vestale,  de  Sponlini.  Un  article  ù  ce  sujet  avait  paru 
dans  un  journal  de  Dresde;  une  réponse  assez  sèche  de  W^eber, 
alléguant  entre  autres  raisons  que  l'organisation  première  avait  pu 
suffn-e  au  bon  temps  de  l'opéra  italien,  où  l'accompagnement  se 
prélassait  souvent  pendant  huit  ou  dix  mesures  sur  la  môme  note, 
mit  le  feu  aux  poudres.  Le  parti  italien  éclata  en  malédictions  à  l'a- 
dresse du  novateur,  qui  osait  rompre  ainsi  en  visière  avec  les  saines 
traditions  des  anciens;  les  articles,  les  brochures,  les  pamphlets 
plurent  sur  la  tête  du  malheureux  Weber,  si  bien  que  le  roi  s'émut 
de  cet  orage  et  envoya  au  comte  de  Vizthum  l'ordre  de  rétablir 
sur-le-champ  l'orchestre  comme  il  était  auparavant.  Et  l'orchestre 
fut  rétabli,  à  la  plus  grande  joie  de  tous  ceux  qui  avaient  vu  d'un 
mauvais  œil  la  venue  de  Weber  et  la  création  d'un  opéra  allemand 
à  Dresde. 

On  a  pu  remarquer,  dans  les  chapitres  qui  précèdent,  que  toutes 
les  fois  que  Weber  avait  éprouvé  quelque  désagrihnent  dans  le 
goût  de  celui-ci,  son  ami  et  protecteur  dévoué,  le  comte  Vitzthum, 
s'efforçait  de  cicatriser  la  plaie  en  y  versant  un  baume  salutaire; 
c'est  ainsi  que,  dans  une  circonstance  analogue,  il  avait  d'abord 
fait  nommer  W^eber  maître  de  chapelle,  et  avait  ensuite  obtenu  sa 
commission  à  vie.  Cette  fois,  il  eut  la  main  moins  heureuse  ;  peut- 
être  aussi  s'était-il  trop  hâté  de  demander  une  faveur  qu'on  n'ac- 
cordait, à  cette  époque,  que  rarement  à  un  artiste;  il  avait  pré- 
senté Weber  pour  la  croix  de  l'Ordi-e  civil,  faisant  valoir,  pjirmi  les 
titres  du  candidat,  la  cantate  composée  par  lui  à  l'occasion  du  ma- 
riage de  la  princesse,  et  le  retard  apporté  à  son  propre  mariage  par 
le  fait  de  cette  solennité;  il  ajoutait,  enfin,  que  Weber  n'avait  recueilli 
pour  prix  de  ses  efforts  que  des  déboires  et  des  chagrins  de  toutes 
sortes.  On  conviendra  que  la  forme  de  cette  demande  était  aussi 
maladroite  que  le  moment  était  mal  choisi  pour  la  faire;  la  croix  j 


fut  refusée,  cela  va  sans  dire,  et  même  dans  des  termes  blessants; 
il  était  dit  notamment,  dans  la  lettre  de  refus,  que  le  roi  avait 
donné  ordre  à  son  grand-maître  de  la  cour  de  choisir  une  bague, 
qui  serait  remise  à  M.  de  Weber  pour  le  récompenser  de  sa  nou- 
velle messe. 

Or,  cette  messe,  qui  est  sa  première,  —  celle  en  mi  bémol,  —  avait 
été  composée  par  ordre.  C'était  une  obligation  pour  les  directeurs 
de  la  musique  de  composer  des  messes  qui  restaient  la  propriété 
du  chapitre;  aussi  la  bibliothèque  de  l'église  catholique  de  Dresde 
est-elle  l'une  des  plus  riches  du  monde  en  manuscrits  d'œuvres 
religieuses.  Weber  avait  dû  se  conformer  à  l'usage,  et,  bien  que 
son  génie  le  portât  à  des  travaux  d'un  autre  genre,  il  s'était  mis  à 
l'ouvrage  et  avait  travaillé  nuit  et  jour  à  celle-ci,  qui  fut  exécutée 
pour  la  première  fois,  avec  un  grand  succès,  le  8  mars  1818. 
Redemandée,  elle  avait  dû  être  répétée  peu  de  jours  après,  sur 
l'ordre  du  roi,  qui  n'avait  pu  assister  à  la  première  audition,  et 
qui  s'en  montra  fort  satisfait.  Cela  ne  l'empêcha  pas,  comme  nous 
l'avons  vu,  de  refuser  la  croix  demandée  à  cette  occasion  par  le 
comte  Vitzthum  pour  son  illustre  protégé. 

Malgré  les  nombreux  travaux  officiels  auxquels  Weber  était  as- 
treint, cette  messe  ne  fut  pas  dans  ce  moment  la  seule  œuvre 
musicale  qui  sortit  de  sa  plume;  il  suffit,  pour  s'en  convaincre, 
de  jeter  les  yeux  sur  les  nombreux  fragments  qui  remplissent  la 
première  moitié  de  l'année  1818;  il  semble  que  Weber  eût  prisa 
tâche,  durant  cette  période  de  tribulations  et  d'ennuis,  de  deman- 
der ù  un  travail  continuel  et  fiévreux  l'oubli  des  chagrins  qui 
empoisonnaient  £a  vie.  Outre  sa  messe,  Weber  avait  donc  com- 
posé un  petit  chœur  pour  la  comédie  de  Kotzebue  :  le  Village 
dans  la  montagne;  une  ballade,  des  chœurs  et  des  airs  de  ballet 
pour  la  Maison  d'Arujlade,  de  Théodore  Hell;  un  chœur  pour  voix 
d'hommes  ;  Chantez  en  l'honneur  du  chant,  qui  est  encore  au  ré- 
pertoire de  toutes  les  sociétés  allemandes;  enfin  un  trio  pastoral 
pour  piano,  violoncelle  et  ilûte.  Nous  ne  devons  pas  oublier  non 
plus  la  valse  populaire  et  le  grand  air  de  Max,  formant  le  n"  3 
du  Preyschulz,  qui  sont  consignés  sur  le  catalogue  du  maître  à  la 
date  du  22  avril.  Pour  se  délasser  de  ces  travaux  nombreux, 
Weber  avait  en  outre  écrit  deux  nouvelles  pleines  d'humour  qui 
ne  virent  pas  le  jour. 

Cette  fécondité  paraîtra  d'autant  plus  surprenante  qu'il  ne  com- 
posait guère  que  la  nuit,  à  moins  qu'il  ne  fût  pressé  pour  livrer 
une  commande,  comme  pour  sa  messe,  qu'il  avait  écrite  tout  d'un 
trait.  Ses  matinées  étaient  employées  à  des  travaux  qui  n'exi- 
geaient pas  une  grande  tension  d'esprit,  tels  que  :  copies,  orches- 
tration, etc.,  puis  il  se  promenait,  rendait  des  visites  ou  en  rece- 
vait jusqu'à  l'heure  du  dîner;  les  après-midi  se  trouvaient  géné- 
ralement prises  par  les  répétitions  au  théâtre  ou  à  l'église;  les 
soirées  par  ses  fonctions  directoriales.  Deux  fois  par  semaine,  à 
la  sortie  du  théâtre,  Weber  se  glissait  dans  la  rue  qui  longe  le 
château,  et  pénétrait  chez  l'Italien  Chiapone,  qui  se  vantait  d'être 
le  premier  cuisinier  du  monde,  et  dont  la  boutique  présentait 
toujours  l'aspect  le  plus  affriolant  en  comestibles,  primeurs  et 
fruits,  toutes  clioses  dont  Weber  se  montrait  très-grand  amateur; 
en  outre,  il  y  était  attiré  par  la  société  qui  s'y  réunissait,  et  dans 
laquelle  figuraient  les  poètes  Ivind,  Théodore  Hell,  Ludwig  Tiek, 
Cari  Forster,  qu'on  a  surnommé  le  Pétrarque  de  l'Allemagne,  sans 
oublier  le  vieux  Bassi,  qui  avait  été  dans  son  temps  le  meilleur 
don  Juan  de  l'Allemagne.  D'autres  fuis,  Weber  et  sa  femme  al- 
laient dans  le  monde  dont  ils  étaient  l'âme,  soit  qu'ils  chantas- 
sent des  duos,  soit  qu'elle  récitât  des  vers  pendant  qu'il  impro- 
visait sur  le  piano.  Ainsi  se  passaient  les  longues  journées  d'iii- 
ver,  bien  remplies,  comme  on  voit,  et  surtout  uniformément  rem- 
plies. 


{La  suite  prochainement.) 


Edmond  NEUKOMM. 


DE  PARIS. 


219 


LES  DROITS  DES  AUTEURS. 

(Deuxième  partie.) 

SOCIÉTÉ    DES   AUTEURS,    COMPOSITEURS   ET    ÉDITEURS   DE    MUSIQUE. 

(11«  article)  (1). 

Lolotte  Pigoreau  et  Fifinc  Soubra,  nos  anciennes  connaissances, 
n'avaient  pas  considéré  le  Turc  sous  son  aspect  diplomatique 
comme  les  habitués  de  l'arbre  de  Cracovie;  mais  à  l'Opéra  sa 
présence  avait  soulevé  de  longues  discussions  sur  le  sérail,  sur 
les  odalUques,  et,  ainsi  que  beaucoup  de  leurs  compagnes,  elles 
auraient  vivement  désiré  avoir  des  renseignements  sur  tous  ces 
charmants  mystères. 

Un  matin ,  les  deux  jeunes  filles,  qui  demeuraient  ensemble,  se 
livraient  aux  exercices  préliminaires  de  leur  art  tels  que  plies, 
ronds  de  jambe,  petits  jetés,  etc.,  lorsque  leur  femme  de  chambre 
entre  tout  à  coup,  l'air  effaré,  en  criant: 

—  Mesdemoiselles,  Mesdemoiselles,  un  Turc! 

—  Comment  un  Turc?  où? 

—  Là,  dans  l'antichambre. 

—  Un  Turc  chez  nous?  pourquoi  faire? 

—  Je  ne  sais  pas  ;  il  demande  à  vous  parler. 

—  Nous  parler  turc? 

—  Ehl  non,  il  parle  chrétien  comme  vous  et  moi. 

—  Le  recevrons-nous  ?  dit  Fifine  effrayée  :  un  Turc  ! 

—  Pourquoi  pas?  dit  Lolotte  :  les  Turcs  ne  mangent  pas  les 
femmes;  au  contraire.  Fais  entrer  le  Turc. 

—  Entrez.  Turc,  dit  la  soubrette  en  retournant  ouvrir  la  porte. 

Lentement,  gravement  s'avança  un  amas  de  toutes  sortes  d'é- 
toffes drapées,  roulées,  tortillées  autour  d'une  tête,  de  deux  bras 
et  d'un  corps  à  peu  près  humains,  de  manière  à  former  un  énorme 
paquet,  marchant  et  parlant.  Vers  le  milieu  de  cette  masse,  pres- 
que égale  en  hauteur  et  en  largeur,  brillaient  des  yeux  ombragés 
de  vastes  sourcils  blancs,  descendait  une  longue  barbe  également 
blanche  :  ce  tout  grotesque,  arrivé  au  milieu  de  la  chambre,  éten- 
dit d'abord  son  bras  droit,  ensuite  porta  sa  main  à  son  cœur, 
puis  à  sa  bouche. 

—  Je  crois  qu'il  nous  envoie  un  baiser...  le  gaillard! 

—  C'est  sa  manière  de  saluer  à  cet  homme. 

—  Tiens  !  fit  Lolotte,  il  ne  prend  pas  sa  tête  dans  ses  mains 
comme  Lays,  dans  la  Caravane. 

—  C'est,  répondit  l'inconnu,  que  je  ne  suis  pas  Turc. 

—  Vous  n'êtes  pas  Turc? 

—  Ou,  si  vous  voulez,  mahométan. 

—  Ah  I  ah  !.. .  dit  bêtement  Fifine,  qui  ne  comprenait  pas. 

—  Je  suis  Arménien. 

—  Qu'est-ce  que  c'est  que  ça?...  dit  toujours  Fifine  avec  le 
même  air. 

—  Un  Arménien  est  chrétien,  ajouta  l'étranger. 

—  Au  fait  c'est  vrai!  vous  parlez  comme  nous;  Clairette  l'a- 
vait bien  dit. 

Pendant  l'observation  judicieuse  de  Fifine,  Lolotte  avait  avancé 
un  fauteuil  auprès  de  l'Arménien  ;  mais  celui-ci,  sans  avoir  égard 
à  cette  prévenance,  tira  successivement  les  coussins  de  deux  ber- 
gères, l'oreiller  d'un  canapé  et  se  jeta  sur  ce  divan  improvisé, 
croisant  les  jambes  à  la  façon  des  tailleurs,  ainsi  que  le  fit  obser- 
ver Fifine  à  sa  compagne. 

Les  deux  danseuses  s'assirent  à  leur  tour...  mais  à  la  fran- 
çaise, et  le  cou  tendu,  les  yeux  fixes ,  attendant  que  le  visiteur 
prît  la  parole;  ce  que  l'individu  voyant,  il  commença: 

(f)  Voir  les  n<"  33,  40,  41,  45  et  49  de  l'année  1867,  et  les  n"»  7,  9, 
22,26  et  27. 


—  Mesdemoiselles,  vous  avez  certainement  entendu  parler  de 
l'ambassadeur  turc,  récemment  arrivé  à  Paris? 

—  Mieux  que  ça,  nous  l'avons  vu  à  l'Opéra:  un  gros  court, 
pas  mal  bel  homme  de  figure. 

—  C'est  bien  lui,  vous  le  dépeignez  à  merveille.  Vous  ignorez 
sans  doute  le  but  de  son  voyage? 

—  Oh  !  pour  ça,  parfaitement  ;  les  uns  nous  ont  bien  dit  ci,  les 
autres  ça;  mais  nous  flottons  entre  ces  différents  avis. 

—  Je  puis  vous  fixer,  car  vous  voyez  en  moi  Misti  Moq-Moq,  le 
premier  drogman  de  Son  Excellence. 

—  Drog. . .  quoi? 

—  Drogman,  c'est-à-dire  interprète. 

—  Ah  !  bon,  interprète. . .  je  ne  connais  pas. 

—  Je  lui  répète,  en  turc,  ce  que  l'on  me  dit  en  français  et  je 
transmets  en  français  ce  qu'il  m'a  dit  en  turc. 

—  C'est  un  drôle  d'état!  vous  faites  la  demande  et  la  réponse. 

—  Précisément.  Pour  en  venir  au  motif  du  séjour  de  Son  Ex- 
cellence à  Paris,  motif  qui  vous  concerne  plus  que  vous  ne  pen- 
sez.. . 

—  Nous  !  s'écrièrent  à  la  fois  les  deux  danseuses,  pas  possible  ! 
Comment  se  fait-il. . . 

—  Si  vous  voulez  bien  me  laisser  parler  et  m'écouter,  vous 
allez  l'apprendre.  Sa  Hautesse  l'empereur  d'Orient,  vulgairement 
appelée  le  Grand  ïurc,  comme  vous  ne  l'ignorez  sans  doute  pas, 
conserve  et  entretient  dans  un  lieu  de  délices  nommé  harem  ou 
sérail  un  certain  nombre  de  jeunes  filles  destinées  à  le  récréer 
par  leurs  jeux  et  leurs  danses,  ou  de  toute  autre  manière  quel- 
conque. 

—  Oui,  oui,  dit  Fifine  d'un  air  capable,  il  en  est  question  dans 
la  Caravane.  Mais  on  dit  qu'on  ne  voit  que  des  femmes  dans  vo- 
tre sérail  ;  ça  ne  doit  pas  être  amusant  ! 

—  On  y  voit  Sa  Hautesse,  dont  l'aspect  suffit  pour  porter  la  joie 
dans  les  cœurs. 

—  De  toutes  ces  filles-là?  elles  sont  faciles  à  réjouir  !  fit  Lolotte 
en  secouant  la  tête  et  pinçant  les  lèvres. 

—  Il  y  a  trois  mois,  continua  le  drogman.  Sa  Hautesse  parut 
tomber  dans  un  état  de  langueur  et  d'ennui  fort  singulier:  elle 
mangeait  beaucoup,  mais  silencieusement  ;  elle  se  promenait,  mais 
vite  et  par  saccades,  enfin  elle  n'allait  plus. . . 

—  Où?  interrompit  Fifine. 

—  Visiter  son  harem.  Cette  situation  inquiétait  tout  ce  qui  est 
attaché  à  la  Porte . , . 

—  Quelle  porte?, . .  demanda  encore  Fifine. 

—  Fifine,  tu  es  insupportable,  dit  Lolotte  :  tu  interroges  tou- 
jours comme  un  portier. 

Sans  tenir  compte  de  l'interruption,  l'Arménien  reprit: 

—  J'osai  prendre  la  résolution  hardie  de  sonder  Sa  Hautesse  ; 
un  matin  donc,  qu'elle  paraissait  absorbée  dans  la  contemplation 
des  bouffées  de  fumée,  puisées  à  son  narguilé . . . 

Fifine  fit  un  mouvement:  elle  allait  parler;  mais  elle  se  contint 
en  soupirant.  L'étranger,  qui  l'avait  devinée  lui  dit  obligeam- 
ment : 

—  C'est  une  pipe. 

—  Merci  ! 

—  A  ce  moment,  je  me  précipitai  ventre  à  terre  devant  mon 
souverain,  et,  après  avoir  frappé  trois  fois  le  tapis  de  mon  front, 
je  m'écriai  en  arrosant  ses  babouches  de  mes  larmes  :  0  mon 
maître  !  ô  mon  roi  !.. . 

—  0  Richard!  6  mon  roi!  fredonna  Lolotte,  dont  l'attention 
commençait  à  s'épuiser. 

—  Daigne  déposer  dans  le  sein  d'un  fidèle  sujet  le  poids  qui 
t'oppresse . . . 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


—  Verses  tous  vos  chagrins  dans  le  sein  paternel,  fredonna  en- 
core Lolotte. 

Le  narrateur  continua  : 

—  S'il  ne  peut  le  prendre  entièrement  pour  son  compte,  que 
du  moins  il  le  partage  et  tu  seras  sans  doute  soulagé. 

—  C'était  pas  mal  dit. 

—  N'est-ce  pas?  Aussi  Sa  Hautesse  daigna-t-elle  me  tendre  le 
pied  droit,  je  le  baisai  avec  transport  et  me  relevai. . .  L'empereur 
fumait  toujours. 

—  Ah  çà,  mais  dites  donc,  et  nous  aussi,  mon  brave  homme! 
Allez-vous  bientôt  nous  apprendre  pourquoi  vous  nous  tenez  le  bec 
dans  l'euu  depuis  une  heure? 

—  Je  comprends  votre  impatience  et  j'abrège.  L'empereur  laissa 
tomber  sa  pipe  et  me  dit  avec  un  accent. . . 

—  Grave?  lança  ironiquement  Lolotte,  dont  le  pied  battait  la 
mesure  de  quelque  chaconne,  qu'elle  chantait  intérieurement. 

—  NonI  repondit  froidement  l'étranger,  mais  profond  et  fort 
ému  : 

«  —  Mysti-Moq-Moq  !  »  —  C'est  mon  nom. 

—  Il  est  cocasse  I 

«  —  Mysti  Moq-Moq,  j'ai  un  désir.  —  Votre  Hautesse  a  un  désir 
et  il  n'est  pas  satisfait?  vous  voulez  donc  le  soleil,  en  breloque? 
ou  le  croissant  de  la  lune  pour  votre  turban?  —  Non,  Moq-Moq, 
ce  n'est  pas  le  soleil,  ce  n'est  pas  la  lune  que  je  désire  ;  c'est  des 
femmes.  —  Mais,  d'après  le  dernier  catalogue,  vous  en  avez  six 
mille  deux  cent  quatre-vingt-treize ,  toutes  vivantes  dans  votre 
harem.  —  C'est  vrai;  mais  il  m'en  manque  deux.  » 

—  Au  fait,  ça  finissait  par  treize,  c'est  un  mauvais  compte,  dit 
Fifine. 

«  —  Oii  sont  les  houris  assez  heureuses  pour  avoir  attiré  l'œil 
de  mon  maître,  repris-je  avec  enthousiasme,  je  cours  leur  révéler 
leur  bonheur  et  elles  s'empresseront  de  voler... 

»  — Ah!  Moq-Moq,  s'écria  l'empereur  avec  abattement,  elles 
sont  loin  et  je  ne  les  ai  jamais  vues.  » 

—  Vivement  intrigué  par  l'incohérence  des  discours  du  sultan , 
je  demeurais  stupéfait;  il  ajouta  : 

«  —  Écoute  :  j'ai  vu  dans  mon  harem  des  beautés  de  toutes  les 
couleurs  et  de  tous  les  pays,  j'ai  admiré  leurs  grâces  et  leurs  ta- 
lents variés;  j'ai  possédé  des  Chinoises  aux  pieds  imperceptibles, 
des  négresses  au  nez  épaté,  des  Géorgiennes  au  front  de  neige,  des 
Indiennes  au  teint  de  bronze,  des  Holtentotes  aux  formes  rebon- 
dies, des  Abyssiniennes  aux  jambes  de  gazelle;  j'ai  applaudi  aux 
jeux  des  aimées  d'Egypte,  aux  pas  des  bayadères  de  l'Indoustan; 
mais,  —  s'écria-t-il  en  grinçant  des  dents  et  comme  transporté  de 
fureur,  — j'ignore  les  pirouettes  des  Françaises!...  Il  me  faut  des 
Françaises,  des  Parisiennes,  des  danseuses...  je  veux  tâter  de 
l'Opéra!  » 

—  Tiens  !  tiens  ! 

—  Il  a  dit  ça  le  Grand  Turc?...  dans  son  langage? 

—  Comme  j'ai  l'honneur  de  vous  le  répéter. . .  en  français. 

—  En  bon  français,  dit  poliment  Lolotte. 

—  Je  commence  alors  à  comprendre  de  quoi  il  retourne . 

—  Voilà!  dit  l'envoyé.  Le  mal  de  l'empereur  étant  connu,  il 
fallait  se  procurer  le  remède. 

—  C'est  ça,  il  veut  nous  administrer  comme. . . 

—  Mais,  interrompit  Lolotte,  je  n'ai  pas  vu,  dans  tout  ça,  figu- 
rer l'ambassadeur. 

—  Non,  sans  doute.  Pensant  peut-être  que  l'exportation  de  la 
denrée  que  nous  avions  mission  de  procurer  à  Sa  Hautesse  serait 
prohibée,  on  a  jugé  à  propos  de  masquer  notre  voyage  du  pré- 
texte frivole  d'un  traité  d'alliance  offensive  et  défensive  entre  les 
deux  Etats;  niaiserie  diplomatique,  qui  occupe  les  badauds  et  ca- 
che admirablement  la  partie  sérieuse  de  l'ambassade.  Tandis  que 


Son  Excellence  amuse  les  ministres  du  roi  de  France,    le    grand 
Bah-Aladin. 

—  Baladin  !  pourquoi,  faire  un  baladin  ? 
Vous  reconnaissez  Fifine  à  cette  interruption. 

—  Je  dis  Bah-Aladin;  c'est  le  nom  du  chef  des  Chiaoux. . . 

—  Ah!  quels    animaux   est-ce  que   les?...  je    n'oserai    jamais 
prononcer  ce  mot-là. . . 

—  Les  Chiaoux  sont  les  gardes  de  l'intérieur  du  harem. 

TnoiUAS  SAUVAGE. 
(La  suite  prochainement.) 


L'HOIIE  ES  BELLINI. 

Bellini,  sa  vie,  ses  œnTres,  par  SI.  Arthur  PoDgin  [1], 

Les  siècles  qui  ont  précédé  le  nôtre  ne  demandaient  à  l'historien 
que  le  personnage  de  l'homme,  de  l'artiste,  et  le  portrait  de  son 
génie.  L'homme  qui  était  cet  artiste,  l'âme  qui  était  en  ce  maître, 
le  cœur  qui  a  vécu  derrière  cet  esprit,  nous  les  exigeons  et  les 
réclamons  aujourd'hui.  Cette  science  sans  dédains,  cette  peinture 
qui  descend  à  tout  sans  s'amoindrir,  cette  sagacité  déductive,  cette 
reconstruction  de  l'être  avec  ses  propres  témoignages,  c'est  l'his- 
toire intime,  c'est  ce  roman  vrai  que  l'on  appellera  un  jour  YHis- 
toire  humaine. 

Bellini  a  revécu  pour  moi.  de  1825  à  1833,  dans  les  deux  cents 
pages  oij  M.  Arthur  Pougin,  armé,  lui  aussi,  du  prestigieux  mais 
inexorable  outil  de  l'analyse,  raconte,  non  pas  sans  une  émotion 
et  une  admiration  respectueuses  qui  pour  être  concentrées  et  refou- 
lées n'en  sont  pas  moins  vives,  la  vie  vécue  de  ce  blond,  incons- 
cient et  frêle  Benjamin  de  la  mélodie.  Ici,  plus  d'hypothèses  doc- 
torales ou  de  mensonges  pédants  :  la  vérité;  un  portrait  pris  sur 
le  vif  et  placé  dans  son  vrai  jour.  Rien  de  plus  intéressant  que  d'étu- 
dier ainsi  l'homme  dans  l'artiste  et  d'expliquer  les  œuvres  de  l'un 
par  l'organisation  de  l'autre.  Dans  cette  étude  physiologique, je  n'hé- 
site pas  à  suivre  mon  collaborateur,  car  il  est  de  ces  volontaires 
de  l'histoire,  qui,  dans  l'élan  d'un  généreux  caprice,  recommencent 
le  partial  appel  de  la  critique,  au  profit  des  victimes  de  ses  com- 
plaisances ou  de  ses  erreurs. 

Examinons  donc  rapidement  l'homme,  en  Bellini,  avec  ceux  qui 
l'ont  pratiqué.  «  Physionomie  distinguée,  —  suivant  un  de  ses  bio- 
graphes qui  résume  les  autres,  —  traits  nobles  et  réguliers,  car- 
nation délicate  et  transparente,  abondants  cheveux  blonds  (et  il 
était  de  Catane!  ) ,  enfin  des  yeux  bleus,  grands  et  limpides.  »  Henri 
Heine  serre  de  plus  près  son  modèle,  et,  du  a  jeune  maestro  »  fat 
et  suffisant  parfois,  il  trace  un  croquis  d'un  étrange  et  âpre  relief  : 
«  C'était  un  être  svelte  et  élancé,  ayant  des  mouvements  gracieux 
et  presque  coquets,  toujours  tiré  à  quatre  épingles.  Il  semblait  vou- 
loir étaler  dans  toute  sa  personne  une  douleur  molle  et  flasque. 
Ses  cheveux,  d'un  blond  clair,  étaient  frisés  avec  une  sentimenta- 
lité si  rêveuse,  ses  habits  se  collaient  avec  une  langueur  si  souple 
autour  de  ce  corps  élancé  ;  il  portait  son  jonc  d'Espagne  d'un  air 
si  idyllique!...  Sa  démarche  était  si  demoiselle,  si  élégiaque ,  si 
éthérée  !  Toute  sa  personne  avait  l'air  d'un  soupir  en  escarpins.  » 
L'ironique  et  implacable  Germain,  après  avoir  décoché  cette  flèche  : 
«  Pour  moi,  son  apparition  avait  quelque  chose  de  plaisamment 
gênant,  «  s'empresse  toutefois  de  reconnaître  que  «  le  caractère  de 
Bellini  était  tout  à  fait  bon  et  noble,  n  Dans  ses  intéressants  iMé- 
moires,  M.  d'Alton-Shée,  de  son  côté,  complète  Bellini  par  un 
trait  que  M.   Pougin  a  eu  tort  de  dédaigner  ou  d'ignorer  :  «  11 


(1)  Un  vol.  in-S"  avec  portrait  par  Desjardins  et  deux   autographes. 
Librairie  Hachette  et  C,  77,  boulevard  Saint-Germain.  Paris  1868. 


DE  PARIS. 


221 


s'asseyait  aux  pieds  des  dames,  penchant  sur  leurs  genoux  sa  tête 
charmante.  Vivant  dans  l'amour,  il  ne  comprenait  rien  au-delà; 
chez  lui,  tous  les  degrés  d'affection,  et  jusqu'à  l'amitié,  avaient 
comme  un  pur  reflet  de  ce  sentiment.  »  (C'est  bien  italien,  je  le 
sais,  mais  je  comprends  maintenant  la  gène  plaisante  qu'éprouvait 
Henri  Heine.)  «  Un  jour,  continue  M.  d'Alton-Shée ,  il  m'interpel- 
lait en  nombreuse  compagnie  du  ton  le  plus  simple  :  «  Dis-moi 
donc,  cher,  quel  est  l'amant  de  la  duchesse?...  »  Or,  la  duchesse 
et  sa  mère  étaient  présentes.  Quand,  plus  tard  ,  je  le  grondai,  il 
me  fallut  renoncer  à  lui  faire  sentir  le  scandale  de  sa  question.  » 
Voilà  donc  une  figure  tendre,  rêveuse,  mélancolique,  familière  et 
efféminée,  distinguée  par  nature,  mais  n'ayant  aucune  idée  de  la 
morale  ou  même  des  simples  convenances  ;  un  être  caressant,  naïf, 
superstitieux,  un  peu  suffisant;  un  composé  de  Raphaël,  de  Mo- 
zart et  de  Chénier,  mais  avant  tout ,  essentiellement  un  malade , 
une  victime  de  ses  nerfs  et  d'autre  chose  encore.  S'il  a  eu  beau- 
coup de  succès  auprès  des  femmes ,  je  doute  qu'il  ait  fait  naître 
une  grande  passion.  Ce  n'est  qu'après  de  fréquentes  relations 
que  les  hommes  se  prenaient  à  sentir  pour  lui  un  penchant  réel, 
une  véritable  sympathie. 

Aussi  l'histoire  des  œuvres  du  génie  de  Vincenzo  Bellini  n'est- 
elle  que  la  résultante  de  son  tempérament,  de  son  caractère,  de 
sa  vie.  Il  naît  en  Sicile,  sous  un  ciel  ardent  oii  tout  germe  et 
mûrit,  les  fruits  de  la  terre  comme  ceux  de  l'inspiration  !  II  est 
d'une  famille  où  l'on  cultive  de  père  en  fils  la  musique  :  dès  le 
berceau,  il  apprend  cet  art  divin  qui  nous  vient  d'Italie  et  qui 
lui  vient  des  cieux.  Son  premier  maître,  c'est  son  grand-père, 
l'élève  du  fameux  Piccinni,  qui  le  berce  en  fredonnant  les  ariettes 
de  Roland  et  d'Athys.  Il  a  sept  ans  à  peine,  et  déjà  l'on  remarque 
en  lui  ces  fréquents  passages  d'une  joie  désordonnée  à  une  sombre 
tristesse;  indice  d'une  sensibilité  nerveuse  poussée  à  l'excès  et  dont 
ses  œuvres  porteront  l'empreinte  ineffaçable.  En  raison  môme  de 
l'ultra-sensibilité  de  sa  nature,  de  l'aménité  de  son  caractère,  de 
la  distinction  innée  de  ses  manières,  le  vieux  Zingaielli,  directeur 
du  Conservatoire  de  Naples,  éprouve  pour  son  jeune  maestrino  une 
affection  toute  particulière.  Il  n'étudie  pas,  il  ne  travaille  pas,  ce- 
pendant. Son  intelligence,  plongée,  peidue  dans  la  contemplation, 
reste  rétive  à  tout  enseignement.  Il  s'écoute  rêver,  chanter  en  lui- 
même  :  le  sentiment  et  l'expression  le  dominent.  Une  émotion 
nerveuse,  un  vif  dépit  contre  Zingarelli,  son  maître,  lui  dicte  son 
premier  opéra  :  Adel  son  e  Salvini,  pastiche  dont  «l"un  des  mor- 
ceaux, —  dit  M.  Pougin,  —  est  devenu  la  belle  romance  des  Ca- 
puletti,  Oh  !  quante  volte,  et  l'autre,  le  Meco,  tu  vieni  de  la  Stra- 
niera.  »  C'est  toujours  sous  une  influence  nerveuse  appréciable  que 
s'ouvriront  chez  Bellini  ses  trésors  de  mélodie,  que  se  développe- 
ront les  germes  précieux  de  son  génie  :  l'imagination  qui  crée  les 
pensées  et  la  sensibilité  qui  les  rend  expressives. 

Comment  se  Irouve-t-il  lancé  du  premier  coup  et  entre-t-il 
presque  triomphalement  dans  la  carrière?  C'est  qu'on  le  charge 
de  composer  la  cantate  du  gran  gala  de  182o,  à  San-Carlo,  Ismène, 
qui  doit  être  exécutée  en  présence  de  la  famille  royale,  dans  une 
salle  à  l'aspect  féerique,  devant  un  public  de  grands  seigneurs  et 
de  jolies  femmes,  prêt  à  trouver  tout  bien  et  à  tout  applaudir. 
De  telles  conditions  surexcitent,  donnent  le  courage,  la  foi  et 
l'audace. 

C'est  dans  le  double  but  d'oublier  un  chagrin  d'amour  et  de 
revoir  sa  famille  que  Bellini  écrit  la  partition  de  Bianca  e  Ger- 
nando. 

Le  Pirate ,  où  est-il  écrit  ?  A  Milan  ,  où  Bellini  est  reçu 
d'une  façon  presque  touchante,  où  les  portes  des  maisons  les  plus 
considérables  et  les  plus  recherchées  lui  sont  ouvertes,  où  sa  de- 
meure de  la  Contmda  Santa-Margherita  devient  un  centre  char- 
mant de  réunion,  alors  qu'il  n'ignore  pas  que  ses  interprètes  seront 


RubinI,  Tamburini,  Mme  Méric-Lalande,  —  Mme  Méric-Lalande, 
l'admirable  et  l'héroïque!  —  qui  laissa  sa  voix  aux  situations 
énergiques  et  à  l'atroce  économie  vocale  de  la  Straniera. 

De  quelle  manière  Bellini  compose-t-il  ?  «  Enfermé  dans  ma 
chambre,  écrit-il  à  un  ami,  je  commence  à  déclamer  la  partie  de 
chaque  personnage  du  drame,  avec  toute  la  chaleur  dont  je  suis 
capable. . .  J'observe  l'accent  et  le  ton  de  l'expression  que  la  na- 
ture donne  à  l'homme  livré  aux  passions...  Quand  je  sens  en 
moi-même  une  émotion  correspondante,  je  juge  que  j'ai  réussi.» 
Avec  un  tel  régime,  une  imagination  féconde  et  de  la  volonté, 
on  peut  faire  des  chefs-d'œuvre  peut-être,  mais  on  s'use  à  coup 
sûr  et  on  meurt  à  trente  ans  !  Que  l'inspiration  vienne  en  ces 
heures  d'enfantement  mortel,  et  un  Bellini  écrira  la  Sonnambula, 
cette  idylle  élégiaque,  d'une  grâce  et  d'une  fraîcheur  enivrantes; 
Norma,  l'une  des  plus  belles  et  des  plus  pures  expressions  du  gé- 
nie humain  ;  i  Puritani,  composés  loin  de  tout  bruit,  de  toute 
préoccupation,  aux  bords  verdoyants  de  la  Seine,  dans  une  petite 
maison  amie  cachée  sous  la  glycine  et  les  roses;  i  Puritani,  dont 
le  succès  fut  inouï  et  qui  eurent  même  le  bonheur  d'inspirer  à 
Gastil-Blaze  un  feuilleton  à  peu  près  sensé.  Mais  que,  au  contraire, 
une  mauvaise  prédisposition,  une  influence  fâcheuse  réagisse  sur 
les  nerfs,  sur  le  cerveau  du  poëte,  et  nous  aurons  une  Zaïra,  que 
Giuditta  Grisi,  alors  dans  tout  l'éclat  de.  sa  beauté  radieuse  et  de 
son  talent  (mars  1830,  Venise)  ne  put  sauver  du  naufrage;  nous 
aurons  i  Copule' ti  et  i  M ontevchi,  dont  toutes  les  situations  pathé- 
tiques sont  manquées,  —  c'est  l'avis  de  M.  Pougin  et  le  mien  ;  — 
nous  aurons  une  Béatrice  di  Tenda,  qui  ne  rachète  pas  ses  fai- 
blesses trop  nombreuses  par  un  superbe  quintette  et  un  linale 
remarquable.  Comme  tous  les  malades  en  proie  aux  névroses,  il 
avait  tant  envie  de  vivre,  le  pauvre  et  cher  grand  artiste ,  que  le 
mot  de  mort  excitait  en  lui  un  délire  d'aversion  !  «  Il  ne  voulait 
pas  entendre  parler  de  mourir,  raconte  Henri  Heine;  il  en  avait 
peur  comme  un  enfant  qui  craint  de  dormir  dans  l'obscurité.  » 
C'est  en  proie  à  de  terrible  souffrances,  aggravées  encore  par  cette 
extrême  sensibilité  nerveuse  devenue  de  la  folie  intermittente,  que 
Bellini  quitta  cette  vie  le  23  septembre  183S,  suivi  de  près  dans 
la  tombe  par  la  Malibran,  sa  tendre  amie  et  l'interprète  sublime  de 
ses  œuvres. 

Bellini  fut  plus  poëte  que  musicien,  en  ce  sens  que  ses  œuvres 
brillent  plus  par  le  sentiment  que  par  la  facture.  Il  fut  le  compo- 
siteur de  son  tempérament,  de  ses  nerfs  et  de  leurs  excès.  Rossini 
fait  l'amour,  Meyerbeer  le  ressent  et  l'exprime  en  l'idéalisant, 
Bellini  aime.  L'amour,  une  tendresse  languissante,  une  mélancolie 
rêveuse,  une  douleur  plaintive,  la  joie  et  l'enivrement,  le  repentir 
et  l'immolation,  voilà  le  fond  de  sa  musique.  En  faisant  l'appli- 
cation d'un  mot  de  l'Evangile  au  peu  de  savoir  technique  de  Bellini 
et  à  la  naïveté  de  son  orchestration,  on  peut  dire  qu'il  lui  sera 
beaucoup  pardonné  parce  qu'il  a  beaucoup  aimé. 

Ordre,  clarté,  concision,  réserve,  scrupuleuse  exactitude  histo- 
rique, choix  judicieux  et  contrôle  des  témoignages  et  des  sources, 
telles  sont  les  qualités  que  je  me  plais  à  signaler  dans  ce  livre 
enrichi  d'un  beau  portrait  de  Desjardins,  de  curieux  autographes, 
d'un  appendice  intéressant,  et  dont  l'exécution  matérielle,  alla 
Elzeviriana,  faitgrand  honneur  à  l'unde  nos  plus  modestes  et  intelli- 
gents coopérateurs,  M.  Félix  Boussai'd,  depuis  quinze  ansmetteur  en 
pages  de  cette  Revue  à  l'imprimerie  Chaix,  ainsi  qu'à  son  collègue 
M.  Schneiter.Que  votre  phrase  un  peu  moins  lâchée  enserre  davantage 
lapensée;  que  certaines  négligences  de  style  échappées  à  la  rapidité  de  la 
révision  disparaissent  dans  les  nouveaux  travaux  que  vous  nous  pro- 
mettez, mon  cher  collaborateur,  et,  en  dépit  des  mœurs  littéraires 
actuelles,  je  m'estimerais  toujours  heureux  de  rendre  justice  à  la 
nature  et  à  la  portée  de  votre  talent.  Ce  livre  sur  Bellini,  tel  qu'il 
a  été  conçu  et  réalisé,  est  bien  l'hommage  le  plus  respectueux  et 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


le  plus  digne  que  les  jeunes  hommes  de  notre  génération  pou- 
vaient adresser  à  cette  gloire  d'ordre  secondaire,  à  cet  enfant  chéri 
des  dames  et  de  la  muse,  comme  on  disait  en  1830.  Pour  celui 
surtout  qui,  s'il  eût  tenu  im  pinceau,  aurait  peint  la  Vierge  de 
Foligno:  s'il  eût  manié  le  ciseau,  aurait  sculpté  la  Pstjché  de  Ca- 
nova  ;  s'il  eût  été  poëte  en  vers,  aurait  écrit  les  apostrophes  de 
Job  à  .léhovah,  les  stances  d'Herminie  du  Tasse,  le  portrait  d'Hay- 
dée  de  lord  Byron;  pour  l'artiste  tué  par  son  art  qui  a  aimé  avec 
Roméo  et  soupiré  avec  Adalgise,  chanté  avec  le  Pirate,  sangloté 
avec  Elvino,  c'est  un  récit  impartial  et  ému,  montrant  les  choses 
sans  les  grossir,  enchaînant  les  faits  sans  les  accentuer,  disant, 
désignant  tout  avec  prudence  et  réserve,  comme  les  pages  que  je 
viens  de  lire;  c'est  ce  mémorial  familier  et  touchant  qui  convenait 
le  mieux  à  Bellini,  et  qui  répond  le  mieux  aussi  à  ce  qui  eût  été 
son  plus  doux  vœu  et  son  espérance  la  plus  haute. 

Em.  Mathieu  UE  MONTER. 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 


^%  Le  théâtre  impérial  de  l'Opéra  a  représenté,  lundi  et  vendredi, 
la  Juive.  Belval  rentrait  dans  cet  opéra  par  le  rôle  du  Cardinal,  qu'il  a 
toujours  tenu  avec  une  grande  autorité,  et  qui  lui  a  valu  les  marques 
les  plus  flatteuses  de  sympathie  et  d'approbation.  —  On  sait  avec  quel 
talent  sont  interprétés  les  rôles  d'Éléazar,  par  Villaret,  et  de  Rachel,  par 
Marie  Sass.  Les  deux  éminents  artistes  y  ont  été  applaudis  avec  enthou- 
siasme. —  Mercredi,  Marie  Battu,  rétablie  d'une  indisposition  qui  a  un 
moment  inquiété  ses  amis,  a  repris  son  rôle  de  Lilia  dans  Ilcrculanum, 
et  le  succès  qu'elle  avait  obtenu  à  la  première  et  ;i  la  deuxième  repré- 
sentations de  l'opéra  de  Félicien  David  n'a  fait  que  grandir  à  la  troi- 
sième, qui  a  été  très-belle. 

,*,  L'opéra  d'Ernest  Reyer,  dont  nous  avons  annoncé  la  mise  à  l'étude, 
a  été  entendu  jeudi  pour  la  première  fois  au  piano. 

^**  On  annonce ,  pour  mercredi  prochain ,  le  début  de  Mlle  Hisson 
dans  le  Trouvère,  interprété  par  Caron,  Mbrère  et  Mlle  Bloch,  et  accom- 
pagné de  la  reprise  du  Marché  des  Innocents  avec  Mlle  Fioretti. 

^*^  La  reprise  d'Armick,  avec  Marie  Sass  dans  le  rôle  principal,  est 
toujours  décidée. 

^*ji  Mlle  Granzow  est  remise  de  l'accident  qui  l'avait  tenue,  pendant 
quelques  semaines,  éloignée  de  la  scène.  La  charmante  danseuse  va  donc 
pouvoir  s'occuper  de  créer  le  principal  rôle  d'un  nouveau  ballet  dû  à  la 
collaboration  de  MM.  Nuitter,  Léo  Delibes  et  Saint-Léon,  et  dont  le  su- 
jet est  emprunté  à  un  conte  d'Hoffmann  :  l'Homme  au  Sable.  Il  est 
en  deux  actes  et  trois  tableaux,  et  passerait  du  l'^'  au  tS  septembre,  de 
façon  à  utiliser  les  six  dernières  semaines  de  l'engagement  de  Mlle 
Granzow.  —  Mlle  Fiocre,  en  travesti,  et  Uauty  y  auront  deux  rôles 
importants. 

^*»  Mlle  Nilsson  sera  de  retour  le  l"  août  et  fera  sa  rentrée  le  3. 

^*,  Par  suite  d'une  indisposition  de  Lhérie,  les  Dragons  de  Villars  n'ont 
été  donnés  que  deux  lois  cette  semaine.  Il  reprend  son  rôle  demain  et 
l'opéra  de  Maillart,  qui  captive  de  plus  en  plus  le  public,  sera  donné 
lundi,  mercredi  et  vendredi. 

^"^  Un  grand  succès  accueille  Mme  F.  Sallard  dans  les  représentations 
de  passage  qu'elle  donne  en  ce  moment  au  théâtre  de  l'Opéra-Comique  ; 
elle  a  chanté  trois  fois  Galathée  dans  l'opéra  de  Victor  Massé,  avec  une 
sonorité  d'organe,  un  charme  et  une  verve  remarquables.  Nous  ne  par- 
lons pas  de  sa  beauté,  tout  à  fait  en  rapport  avec  le  personnage  qu'elle 
représente;  on  a  pu  l'apprécier  il  y  a  quelques  années  dans  la  Déesse  et 
le  Berger.  Mme  Sallard  a  été  chaleureusement  applaudie  et  rappelée  par 
toute  la  salle.  A  l'expiration  de  l'engagement  qui  la  lie  au  théâtre  royal 
de  Bruxelles,  elle  pourrait  bien  faire  de  nouveau  partie  du  personnel  de 
notre  seconde  scène  lyrique. 

^*,  La  Part  du  Diable  a  été  jouée  mardi.  Achard  s'est  fait  comme 
toujours  applaudir  dans  le  rôle  de  Rafaël;  Mlle  Brunet-Lafleur  était  sans 
doute  indisposée,  car  elle  a  laissé  beaucoup  à  désirer  dans  celui  de  Carlo. 
Prilleux  charge  trop  le  personnage  de  Gil  Vargas. 

,*^  Hier  on  a  repris  le  Docteur  Mirobolan,  de  MM.  Cormon  et  Trianon, 
musique  de  M.  Eugène  Gautier,  qui  eut  en  18(i0,  époque  à  laquelle  il 
fut  représenté,  un  grand  nombre  de  représentations.  Cette  reprise  était 
interprétée  par  MM.  Couderc,  Prilleux,  Bernard,  Potel,  Nathan,  Leroy; 
Mmes  Beha,  Révilly,  Heilbron,  Tuai,  Coraly. 

^•^  Les  recettes  brutes  des  théâtres  subventionnés,  des  théâtres  de  se- 
cond ordre,  cafés,  concerts,  etc.,  sont  descendues,  pendant  le  mois  de 
juin,  à  la  somme  de  821,049  fr.  74  c. 


,*t  Voici  les  bases  du  nouveau  traité  intervenu  entre  la  direction  du 
théâtre  de  l'Opéra-Comique  et  la  Commission  de  la  Société  des  auteurs 
et  compositeurs  dramatiques  :  d"  La  Société  touchera  12  0/0  sur  la 
recette  brute,  c'est-à-dire  avant  le  prélèvement  du  droit  des  pauvres;  — 
2"  l'Opéra-Comique  s'engage  à  jouer  chaque  année  douze  actes  nouveaux, 
dont  trois  en  un  acte;  —  3°  et,  —  cho.se  bien  importante!  —  les  pièces 
tombées  dans  le  domaine  public  toucheront  12  0/0  absolument  comme 
les  pièces  nouvelles.  —  Ce  nouveau  traité  sera  exécutoire  à  partir  du 
1"  août  prochain.  Il  annule  le  précédent  traité,  qui  avait  encore  dix- 
huit  mois  à  courir. 

,*:R  M.  Noriac,  directeur  des  Bouffes-Parisiens,  vient  d'engager  pour 
chef  d'orchestre  M.  Jacobi,  l'un  des  prenners  violons  de  l'orchestre  de 
l'Opéra.  La  direction  ne  pouvait  faire  un  meilleur  choix,  car  M.  Jacobi 
a  déjà  maintes  Ibis  fait  ses  preuves  pour  la  conduite  d'un  orchestre. 

jk*<,  Apres  avoir  fait  rage  à  Saumur  où  elle  a  dû  être  donnée  deux 
fois,  la  Grande-Duchesfe  passionne  en  ce  moment  Lizieux  et  Laval.  Mme 
Ugalde  et  ses  artistes  continuent  à  recevoir  partout  un  accueil  enthou- 
siaste. Une  modification  a  eu  lieu  dans  le  personnel:  Hiltemans,  dont  le 
jeu,  dans  le  rôle  du  général  Boum,  était  trouvé  par  trop  accentué,  y  est 
remplacé  sans  désavantage  par  Rodriguez,  du  théâtre  Déjazet.  Garnier, 
dans  le  rôle  de  Fritz,  Henry  Beaucé  dans  le  prince  Paul,  ne  laissent 
rien  à  désirer;  la  scène  de  Fritz  au  deuxième  acte,  et  les  couplets  de  la 
Gazette  de  Hollande  sont  toujours  bissés  avec  acclamation.  —  Quant  à 
Mme  Ugalde,  les  journaux  ne  tarissent  pas  en  éloges  sur  la  finesse  de 
son  jeu,  sur  l'adorable  expression  avec  laquelle  elle  dit  la  scène  de  la 
déclaration  et  la  crâneric  qu'elle  met  dans  les  airs  d'un  style  tout  autre 
du  rondo  militaire  et  du  «  Sabre  de  mon  père.  » 

*'♦',  On  écrit  de  Vichy  :  «  Capoul  et  Mme  Cabel  viennent  de  nous 
donner  la  Fille  du  réijiment  ;  les  deux  éminents  artistes  du  théâtre  de 
l'Opéra-Comique  ont  délicieusement  chanté.  La  jolie  salle  du  Casino 
était  comble  et  les  bravos  ont  été  unanimes.  » 

^%  On  nous  écrit  de  Bruxelles  en  date  du  9  de  ce  mois  :  «  La  troupe 
de  VAthénée  de  Paris  a  fait  sa  première  apparition,  le  3,  sur  la  scène  du 
théâtre  du  Parc.  Cet  ouvrage  très-gai'  a  eu  un  succès  colossal  ;  en  même 
temps  qu'il  faisait  rire  aux  larmes,  la  musique  de  M.  Charles  Lecocq  a 
été  trouvée  charmante.  Désiré  et  Léonce  ont  été  ébouriffants,  et  Mmes  Ca- 
bel et  Bonelli  ont  beaucoup  plu.  Il  était  impossible,  à  la  première  repré- 
sentation, pour  laquelle  la  salle  avait  été  longtemps  louée  à  l'avance,  d'y 
trouver  une  place,  et  les  princes  de  Joinville  et  le  duc  d'Aumale,  qui  de 
passage  à  Bruxelles  avaient  voulu  y  assister,  ont  dû  monter  aux  secondes 
loges.  La  recette  a  dépassé  2,000  francs,  chiffre  qu'on  n'avait  jamais  at- 
teint à  ce  théâtre,  et  le  succès  n'a  pas  été  moins  grand  aux  cinq  repré- 
sentations suivantes,  qui  ont  fait  chambrée  complète.  —  Thérésa,  la 
chanteuse  si  populaire  à  Paris,  s'est  produite  dans  les  entr'actes.  Incer- 
taine de  l'accueil  qu'elle  rencontrerait  chez  nous ,  elle  ne  s'est  pas  suffi- 
samment livrée  le  premier  soir,  et  elle  n'a  pas  produit  l'eflet  sur  lequel 
on  comptait;  le  lendemain,  on  a  trouvé  qu'elle  se  lançait  trop;  en 
somme  son  talent,  aussi  original  qu'incontestable,  n'a  pas  été  bien  com- 
pris par  notre  public.  » 


NOUVELLES  DIVERSES. 

,*^  Voici  l'ordre  dans  lequel  doivent  avoir  lieu  les  prochains  concours 
au  Conservatoire.  —  Concours  à  huis  clos  :  mardi  14,  contrebasse ,  con- 
trepoint et  fugue,  harmonie;  mercredi  15,  harpe,  étude  du  clavier; 
jeudi  16,  orgue,  harmonie  et  accompagnement;  vendredi  17,  solfège 
(  120  concurrents).  —  Concours  publics:  lundi  20,  piano;  mardi  21, 
chant;  mercredi  22,  violoncelle,  violon  ;  jeudi  23,  opéra-comique;  ven- 
dredi 24,  tragédie,  comédie;  samedi  2b,  opéra;  lundi  27,  instruments 
à  vent  ;  mardi  28,  instruments  à  vent.  —  La  distribution  des  prix  aura 
lieu  le  mardi  4  août. 

^*^  Dimanche  dernier  a  eu  lieu  l'entrée  en  loge  des  élèves  de  contre- 
point et  fugue  et  d'harmonie  seule.  —  Aujourd'hui  a  lieu  l'entrée  en 
loge  des  élèves  d'harmonie  et  d'accompagnement. 

j*^  Une  audition  des  grandes  orgues  de  Notre-Dame  a  eu  lieu  mer- 
credi à  i  heures  pour  les  membres  de  l'Association  scientifique  de 
France,  sous  la  présidence  de  M.  Leverrier.  M.  Sergent,  organiste  de 
Notre-Dame,  et  M.  Franck  aîné,  organiste  de  Sainte-Clotilde ,  ont  tour 
à  tour  fait  entendre  l'instrument,  et  leurs  improvisations  de  différents 
styles  ont  mis  en  relief  les  sonorités  diverses  de  cet  orgue  aux  propor- 
tions monumentales,  l'un  des  plus  considérables  de  l'Europe,  et  le  plus 
complet  dans  sa  composition  harmonique.  Après  l'audition  de  l'orgue, 
MM.  les  membres  de  l'Association  scientifique,  guidés  par  M.  Cavaillé- 
Coll,  l'habile  constructeur  de  l'instrument,  ont  visité  le  mécanisme  et 
examiné  avec  le  plus  vif  intérêt  toutes  les  parties  de  cet  important  tra- 
vail, qui  peut  être  considéré  comme  le  chef-d'œuvre  de  la  facture  ins- 
trumentale moderne. 

^%  Dans  un  des  salons  artistiques  les  plus  hospitaliers  au  vrai  talent, 
nous  avons  pu ,  lundi  dernier,  renouveler  connaissance  avec  un  jeune 


DE  PARIS 


223 


compositeur-virtuose  de  Berlin,  que  le  Conservatoire  de  Paris  couron- 
nait l'année  dernière,  et  qui  portera  haut  un  jour  le  nom  de  son  ptre 
et  de  son  oncle.  Franz  llies  a  l'ait  entendre  à  un  auditoire  d'élite  son 
nouveau  quatuor  pour  instruments  à  cordes,  lequel,  grâce  à  la  distinc- 
tion et  à  la  noblesse  des  motifs,  à  la  sagesse  et  à  la  sûreté  de  main  que 
décèlent  les  développements,  à  la  richesse  et  souvent  à  l'originalité  de 
l'harmonie  et  de  l'effet  sonore  en  général,  se  place  h  coté  des  plus  belles 
productions  modernes  en  ce  genre.  Quelques  jolies  pièces,  pour  violon, 
notamment  Burleske  et  Mrcarolle,  parfaitement  exécutées  par  l'auteur, 
et  plusieurs  Ikder  où  on  retrouve  la  belle  école  de  Schumann,  et  qu'a 
chantés  avec  infiniment  de  goût  et  de  charme  Mme  Marie  Trélat,  la 
femme  de  notre  célèbre  chirurgien  ,  ont  confirmé  et  fortifié  l'excellente 
impression  que  nous  avait  laissée  l'œuvre  plus  considérable  qui  formait 
le  morceau  de  résistance  de  la  soirée,  et  oii  se  révèle  un  goût  très-pur 
et  un  profond  sentiment  musical. 

***  La  solennité  du  baptême  des  quati'e  cloches  de  la  nouvelle  église 
de  Rillieux  (Ain),  —  l'une  d'elles  a  pour  marraine  la  petite-fllle  de  M. 
le  maréchal  Canrobert,  —  solennité  que  présidait,  dimanche  dernier, 
l'évêque  de  Belley,  a  été  toute  remplie  de  chants  harmonieux  exécutés 
par  une  réunion  de  la  Chorale  de  Rillieux.  des  jeunes  filles  du  chœur 
de  cantiques,  d'amateurs  venus  de  Lyon  et  de  Bourg,  et  de  quelques 
instiumentistes  militaires  choisis  au  camp  de  Sathonay,  sous  la  direction 
de  M.  Sain-d'Arod.  On  a  particulièrement  remarqué  l'admirable  motet 
Sacris  solemnis,  de  Choron,  dont  on  sait  que  depuis  longtemps  M.  Sain- 
d'Arod  s'est  fait  le  continuateur,  dans  l'œuvre  de  popularisation  de  la 
musique  religieuse  en  France. 

,**  Une  indiscrétion  de  journal  (sera-t-elle  confirmée?)  nous  apprend 
que  Rossini  a  destiné,  dans  son  testament,  une  certaine  somme  à  la 
fondation  d'un  Conservatoire  à  Pesaro ,  sa  ville  natale.  Ce  Conservatoire 
serait  appelé  à  devenir  le  premier  du  monde;  les  maîtres  les  plus  célè- 
bres y  seraient  attachés.  Serait-ce  une  réponse  au  ministre  ds  l'instruc- 
tion publique,  M.  Broglio,  qui  a  battu  en  brèche  l'institution  des  con- 
servatoires italiens  en  général? 

-^*,  Dans  sa  séance  du  ^2o  mai  dernier,  l'Académie  des  sciences  de 
Paris  a  chargé  M.  Duhamel,  l'un  de  ses  membres,  de  faire  un  rapport 
sur  un  récent  travail  intitulé  :  Phénomènes  musico-physiologiques,  et  dû  à 
M.  Charles  Meerens,  de  Bruxelles. 

**;,  M.  Stiehl,  compositeur  et  organiste  de  mérite,  résidant  habituel- 
lement à  Saint-Pétersbourg,  vient  d'arriver  à  Paris. 

^\  Après  un  séjour  de  dix  mois  en  Allemagne  et  particulièrement  en 
Autriche,  où  il  a  chanté  avec  son  succès  habituel  les  meilleurs  rôles  de 
son  répertoire  d'opéra  et  d'opéra-comique,  Roger,  l'excellent  ténor,  vient 
d'arriver  de  Prague.  Il  compte  aller  prendre  quelques  mois  de  repos  à 
la  campagne,  et  vers  l'automne  il  ferait  une  dernière  excursion  qui  em- 
brasserait les  principales  villes  de  la  Russie  Orientale,  la  Boukharie  et  la 
Turquie. 

^*^,  L'administration  du  Casino  de  la  rue  Cadet  vient  de  donner  la 
succession  d'Arban,  comme  chef  d'orchestre,  à  Aug.  Mey  qui  dirige  ce- 
lui du  jardin  Mabille.  Elle  ne  pouvait  mieux  choisir;  M.  Mey,  est  un 
musicien  expérimenté  et  en  même  temps  un  compositeur  distingué  de 
musique  de  danse. 

»**  L'éditeur  Carbonel,  à  Marseille,  vient  de  publier  les  Harmonies  de 
la  mer  de  Seligmann.  Ce  morceau  continue  la  série  de  ces  charmantes 
compositions  qui  ont  valu  une  si  brillante  réputation  à  l'éminent  vio- 
loncelliste. Il  sera  accueilli  avec  la  même  faveur. 

^*if  Le  lénor  Stigelli,  qui  jouissait  en  Italie  d'une  réputation  méritée, 
vient  de  mourir,  jeune  encore,  dans  sa  villa  du  lac  de  Cônie,  à  Monza. 
On  ignore  communément  que  son  vrai  nom  était  Stiegel,  et  qu'il  était 
Allemand  de  naissance.  Une  des  premières  scènes  sur  lesquelles  il  se 
produisit,  fut  le  théâtre  Italien  de  Saint-Pétersbourg.  Ce  vaillant  chan- 
teur était,  en  outre,  doublé  d'un  compositeur  de  grand  talent;  ses 
romances  et  ballades  en  font  foi.  Stigelli  laisse  trois  lilles;  il  avait  perdu 
sa  femme  depuis  trois  mois  à  peine. 

„,*,  On  annonce  également  la  mort  de  Midiel  Naum,  fondateur  du 
théâtre  italien  qui  porte  son  nom  à  Constantinople,  et  père  du  directeur 
actuel. 

:t**  Aujourd'hui  au  Pré-Catolan  grande  fête  musicale  de  bienfaisance 
avec  les  musiques  de  la  garde;  on  y  entendra  la  Retraite  de  Crimée. 


ÉTRANGER 

,^*^  Londres.  —  Adelina  Patti  a  chanté  llomeo  et  Juliette  pour  son  bé- 
néfice. Cette  soirée  splendide,  où  la  charmante  diva  s'est  vraiment  sur- 
passée, comptera  au  nombre  de  ses  plus  beaux  triomphes.  —  Elle  a 
prêté  un  efficace  concours  à  la  représentation  donnée  à  Adelphi-ïheatre 
au  bénéfice  de  Mlle  Harris,  qui,  elle  aussi,  a  été  dignement  fêtée.— Une 
grande  fête  musicale  a  eu  lieu  samedi  dernier  au  Crystiil-Palace  en 
l'honneur  du  duc  d'Edimbourg.  Le  nom  d'Adelina  Patti  brillait  au  pre- 


mier rang  parmi  ceux  des  artistes  appelés  à  concourir  à  cette  solennité, 
dont  la  direction  avait  été  confiée  à  Costa.—  Mlle  Teresa  Carreno  est  ici 
rolijet  des  démonstrations  les  plus  sympathiques.  La  jeune  et  déjà  célèbre 
pianiste  a  obtenu  un  immense  succès  dans  un  dis  grands  concerts  du 
Crystal-Palace  et  dans  un  autre  donné  par  elle-même  à  Hanover- Square, 
où  sa  belle  fantaisie  sur  l'Africaine  a  été  particulièrement  applaudie. 

«*»  Ems.  —  Mme  Miolan-Carvalho,  Alf.  Jaell  et  sa  femme,  le  célèbre 
contrebassiste  Boltesini  et  le  violoniste  Wilhelmj  ,  ont  di'frayé  le  pro- 
gramme d'un  très-brillant  concert,  qui  a  été  donné  le  7  juillet,  et  qui 
leur  a  valu  à  tous  les  plus  chaleureux  et  les  plus  sincères  applaudisse- 
ments. 

***  Wiesbadcn.  —  La  saison,  qui  n'est  encore  qu'à  son  début,  a  déjà 
offert  aux  hôtes  de  notre  station  thermale  de  vives  et  pures  jouissances 
artistiques  :  on  vient  de  donner  le  Prophète,  où  Mlles  Lœfïler  et  Otto  ont 
tenu  leurs  rôles  avec  une  grande  distinction,  et  Lucie,  qui  a  été  l'occa- 
sion d'un  très-beau  succès  pour  Mlle  Denay.—  Un  magnifique  concert  a 
eu  lieu  le  26  juin  dans  la  belle  salle  du  Kursaal  ;  on  y  a  applaudi  quatre 
artistes  d'un  grand  mérite:  Mme Escudier  Kastner,  pianiste  de  S.  M.  l'em- 
pereur d'Autriche;  le  ténor  Walter,  de  l'Opéra  de  Vienne,  qui  a  admi- 
rablement dit  la  romance  des  Huguenots;  Mlle  d'Edolsberg,  cantatrice  de 
la  cour  à  Berlin,  et  le  violoniste  Gustave  Friemann,  un  des  plus  brillants 
élèves  du  Conservatoire  de  Paris.  —  Le  prochain  concert  sera  donné  le 
10  juillet  :  on  y  entendra  M.  et  Mme  Jaell,  Mme  Sessi,  du  théâtre  de 
Francfort,  et  le  ténor  Millier,  de  Cassel. 

^;**  Munich.  —  Le  succès  des  Msistersinger  a  été  le  même  à  la  deuxième 
et  à  la  troisième  représentation  qu'à  la  première.  —  Le  théâtre  restera 
fermé  du  1"  au  31  août. 

^*^  Worms.  —  A  la  fête  de  l'inauguration  du  monument  de  Luther, 
à  laquelle  ont  été  consacrées  les  journées  des  24,  23  et  26  juin,  on  a 
exécuté  le  66"  psaume,  mis  en  musique  pour  quatre  voix  d'hommes  par 
Vincent  Lachner,  VAllduia  de  Hœndel,  arrangé  de  la  même  manière  par 
Jadassohn,  le  célèbre  choral  de  Séb.  Bach,  Ein"  feste  Burg  ist  unser  Golt, 
et  l'oratorio  Paulus  de  Mendelssohn. 

*\  Vienne. —  La  réouverture  de  l'Opéra  a  eu  lieu,  avec  Guillaume  Tell, 
le  l"  juillet.  Le  3,  Sontheim  a  commencé  par  la  Favorite  la  série  de 
représentations  pour  lesquelles  il  est  engagé.  Le  célèbre  ténor  nous  re- 
viendra encore  de  temps  en  temps;  mais  le  contrat  qui  l'attache  pour  la 
vie  au  théâtre  de  Stuttgard  fait  le  désespoir  de  ses  nombreux  admira- 
teurs. 

**,(;  Pps(/i.— L'opéra  d'Adelburg,  Zrinyi,  dont  nous  avons  annoncé  la 
première  représentation,  voit  se  confirmer  son  succès.  C'est  un  sujet 
national  que  le  poëte  et  le  compositeur  (une  seule  et  môme  personne) 
ont  supérieurement  traité.  La  presse  hongroise  est  unanime  dans  ses 
éloges. 

■i^*4i,  Madrid.  —  Voici  la  composition  de  la  troupe  italienne  engagée 
pour  la  saison  prochaine  au  théâtre  de  l'Oriente  :  Mmes  Carlotta  et 
Barbara  Manihisio,  Tiberini,  Sonieri,  Ketty  Morensi;  ïamberliek,  Tibe- 
rini,  Selva,  Medini,  Padovani,  Boccohni,  Everardi. 

^*^  Barcelone.  —  C'est  avec  les  Dragons  de  Villars  que  la  troupe 
française  d'opéracomique  a  inauguré  ses  représentations  au  théâtre 
d'été  des  Champs-Elysées.  Cette  première  soirée,  qui  a  été  très-brillanle, 
fait  bien  présager  de  celles  qui  la  suivront.  Mlle  Mathilde  Dupuy,  qui 
débutait  dans  le  rôle  de  Rose  Friquet,  a  subjugué  du  premier  coup  son 
public.  MM.  Blum,  ténor,  et  Arsandaux,  baryton,  ont  été  as.sociés  à  son 
succès.  Galathée  a  valu  à  Mlle  Dupuy  et  à  M.  Bryon-Dorgeval  un 
triomphe  complet. 


Société  philharmonique  Euterpe,   à    Amsterdam. 

Le  jury  au  concours  de  compositions  pour  voix  d'hommes,  composé  de 
MM.  les  professeurs  du  Conservatoire  de  musique  à  Cologne  :  Ferd.  Hiller, 
Franz  Weber,.  Fr.  Gernsheini,  Fr.  Derckum,  Ernst  Rudorff,  a  décerné 
les  trois  prix  de  : 

Une  médaille  en  or  et  lOt)  florhis  chaque,  aux  compositions  suivantes  : 

1»  Genre  sérieux  :   Valkers  Nachsgesang.  Motto.  Ne  quid  nimis; 

2"  Genre  léger  :  Ergo  bibamus.  Motto.  Zum  Eccher  Klang  ein  frokersang; 

3°  Texte  néerlandais  :  Goeden  iSacht.  Motto.  De  toonkunst  sleahts  doorziet 
het  spoor,  etc. 

Ces  trois  compositions  seront  exécutées  par  la  Société  Eutcrpe,  à  l'oc- 
casion du  concours  international  de  chant  d'ensemble,  les  8  et  9  août 
prochain.  Immédiatement  après,  les  billets  cachetés  seront  ouverts  et  les 
noms  des  lauréats  livrés  à  la  publicité. 

MM.  les  compositeurs  des  œuvres  non  couronnées  sont  priés  d'en  dis- 
poser on  s'adressant  à  MM.  Van  Hoorn,  Waal,  6i,  à  Amsterdam,  sous 
indication  des  titres  et  devises. 


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i9  Juillet  1868. 


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Étronjor 34  »       U. 

Le  Journal  paraît  le  Dimanche. 


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Nos  abonnés  reçoivent,  avec  le  numéro  fl'aujonrd'Uul, 
an  nouveau  morceau  «le  piano,  Gavotte,  composé  par 
Cbarles  Iiecoca.  i 


SOMMAIRE.  —  Conservatoire  impérial  de  musique  et  de  déclamation  :  con- 
cours à  huis  clos.  —  Les  droits  des  auteurs  { deuxième  partie ,  12'  article) , 
par  Thomas  SauTage.  —  Les  Théâtres  lyriques  secondaires  à  Paris  depuis 
1820  (3*  article),  par  Arthur  t>nu{;in,  —  Concours  d'Orphéons,  de  Fan- 
fares et  de  Musiques  militaires  à  Sentis,  par  /k.  Elwart.  —  Ministère  de  la 
maison  de  l'Empereur  et  des  beaux-arts,  direction  générale  des  théâtres,  avis. 

—  Entrefilets.  —  Correspondance  :  Bade.  —  Nouvelles   des  théâtres  lyriques. 

—  Nouvelles  diverses.  —  Annonces. 


CONSERVATOIRE  IMPÉRIAL  DE  MUSIQUE  ET  DE  DËCUMÂTION. 

Concours  à  huis  clos. 

Les  concours  à  huis  clos  ont  commencé  cette  semaine  au  Con- 
servatoire. En  voici  les  résultats  : 

Séance  du  mardi  44  juillet. 

Jury:  M.  Auber,  président;  MM.  Barbereau,  Benoist,  Colin,  Henry 
Duvernoy,  Emile  Durand,  C.  Prumier,  Renaud  de  Vilbac  et 
Wekerlin. 

CONCOURS    DE     CONTRE-BASSE. 

Professeur  :   M    Labro. 
Premier  prix  :    M.  Dereul.  —  Deuxième  prix  :    M.    Martin    el 
M.  Georges  Ghys.  —  Premier  accessit  :  M.  Roubié.  —  Deuxième 
accessit  :  M.  Esclobas.  —  Troisième  accessit  :  M.  Charpentier. 

CONTRE-POINT    ET    FUGUE. 

Premier  prix  :  M.  Taudou,  élève  de  M.  Reber.  —  Deuxième 
prix  :  M.  Moullé,  élève  de  M.  Reber.  —  Premier  accessit  :  M.  Pi- 
lot,  élève  de  M.  A.  Thomas.  —  Deuxième  accessit  :  M.  Chavagnat, 
élève  de  M.  V.  Massé.  —  Troisième  accessit  :  M.  Pugno,  élève  de 
M.  A.  Thomas. 


HARUOME . 

I^remier  prix  :  M.  Gasser.  —  Deuxième  prix  :  M.  Cotte.  — 
Premier  accessit  :  M.  Génin.  —  Deuxième  accessit  :  M.  CoUin.  — 
Troisième  accessit  :  M.  d'Homme.  Tous  les  cinq  élèves  de  M.  Au- 
gustin Savard. 

Séance  du  mercredi  15  juillet. 
Jury  :  M.  Auber,  président;  MM.  Ambroise  Thomas,  Marmontel, 

Mathias,  Ûecorabes,  Léo  Delibes,  G.    Pfeffer,  C.    Prumier,   et 

Wekerlin. 

HARPE. 

Professeur  :  M.  Th.  Labarre. 
Pas  de  premier  prix.  —  Deuxième  prix  :  Mlle  Grillon. 

ÉTUDE  DU   CLAVIER. 

Premières  médailles.  (A  l'unanimité.) 
Mlles  Lontski,  élève  de  Mme  Philippon.  —  Bresard,  élève  de 
Mme  Emile  Réty.  —  Donne,  élève  de  la  même. —  Guitry,  élève  de 
la  môme.  —  Derval,  élève  de  la  même.  —  Batiste,  élève  de 
Mlle  Jousselin. —  Bernard-Gjertz  l'",  élève  de  Mme  Philippon. — 
Mottez,  élève  de  Mlle  Jousselin.  — Gaensly,  élève  de  la  même.  — 
Tholer,  élève  de  la  même.  —  Max,  élève  de  Mme  Philippon.  — 
Séguin,  élève  de  la  même. 

Deuxièmes  médailles. 
Mlles  Gaildrau,  élève  de  Mme  Emile  Réty.  —  Meunier,  élève  de 
la  même.  —  Lemarchand,    élève  de   Mlle  Jousselin.  —  Bernard- 
Gjertz  3%  élève  de  Mme  Philippon.— Cceuille,  élève  de  Mlle  Jousselin . 

—  Masson,  élève  de  la  même.  —  Marx,  élève  de  Mme  Emile  Réty. 

—  Labouriau,  élève  de  la  même.  —  Planquelte,  élève  de  Mme  An- 
thiome.  —  Péan  2%  élève  de  Mme  Philippon. 

Troisièmes  médailles. 
Mlles  Torrent,  élève  de  Mme  Anthiome.  —  Prodhomme,  élève 
de  la  même.  —  Letellier,  élève  de  Mlle  Jousselin.  —  Bezancenot, 
élève  de  la  même.  —  Barsolti,  élève  de  Mme  Philippon.  —  Ber- 
nard Gjertz  t,  élève  de  la  même.  —  Praly,  élève  de  Mme  Emile 
Réty.  —  Guillon,  élève  de  Mlle  JousseUn. 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


Séance  du  jeudi  i6  juillet. 

ORGUE. 

Jury  :  M.  Auber,  président;  MM.  Edouard  Batiste,  Emile  Durand, 
Lecouppey.    Mangin,    Ravina,    Renaud    de    Vilbac,    Savard    et 
Welverlin. 
Premier  prix  ;  MM.  Salvayre  et  Covin.  —  Deuxième  prix  :  M. 

Genêt.  —  Premier  accessit  :  M.  WintzweiUer.  —  Deuxième  acces- 

iit  :  M.  Pugno. 

HARMONIE    ET   ACCOMPAGNEMENT. 

Jury  :  M.  Auber,  président  ;  MM.  Edouard  Batiste ,  Benoist ,  Le- 
couppey, Maagin,  Ravina,  Renaud  de  Vilbac,  Savard  et  We- 
kerlin. 

(Hoimnes.) 
Premier  prix  :  M.  Carv.arttes,  élètfe.de  M.  Fratiçois  Bazin.  — 
Deuaicme  prix  :  M.  Cavaillé,  élève  du  même.  —  Premier  accessit: 
M.  Worniser,  élève  du  même.  —  Deuxième  accessit  :  M.  Thomé, 
élève  de  M.  Duprato.  —  Troisième  accessit  :  M.  Rougnon,  élève 
de  M.  François  Bazin. 

(Femmes.) 
Premier  prix  :  Mlles  Chart  et  Renaud,  élèves  de  M.  Eugène 
Gautier.  —  Deuxième  prix  :  Mlle  Jacques,  élève  de  Mme  Du- 
l'resne.  —  Premier  accessit  :  Mlle  Lliomme,  élève  de  M.  Eu^ne 
Gautier.  —  Deuxième  accessit  :  Mlle  Tiger,  élève  de  aime  Uu- 
fresne.  —  Troisième  accessit  :  Mlle  Gaillard ,  élève  de  M.  Eugène 
Gautier. 

Séance  du  vendredi  17  juillet. 
SOLFÈGE  (hommes). 
Jury  :    M.   Auber,  président;  MM.  Colin,  Dauverné,  Léo  Delibcs, 
Marmontel,  C.  Prumier,  Ravina,  Renaud  de  Vilbac,  Wekerliu. 

Premières  médailles. 
MM.  Perrin,  élève  de  M.  Durand.  —  Cognet,  élève  de  JI.  Ba- 
tiste. 

Deuxièmes  médailles. 
MM.  Cavaillé,  élève  de  M.  Durand.  —  Lamartine,  élève  de  M. 
Alkau.  —   Laye,  élève    de,  M.  Danhauser.   —  Samary,  élève  du 
même.  —  Bernis,  élève  de  M.  Alkan. 

Troisièmes  médailles. 
■  MM.  Bouvetier,  élève  de  M.  Decombes.  —  Brunet,  élève  de  M. 
Alkan.  —  Gillet  1",  élève  de  M.  Decombes.  —  Valdejo,  élève  de 
M.  Tariet.  —  Roposte,  élève  de  M.  Alkan.  —  Pointis,  élève  de 
M.  Durand.  —  Colombin,  élève  de  M.  Batiste.  —  Buonsollazzi, 
élève  de  M.  Durand. 

SOLFÈGE  (femmes). 
Premières  médailles. 
Mlles  Guitry,  élève  de  M.  Lebel.  —  Ferrari,  élève  de  Mme  Mau- 
corps. —  Guillot  (Jeanne),  élève  de  la  même. —  Bernard  -  Gjurtz  3'^,. 
élève  de  Mme  Doumic.  —  Tindel,  élève  de  Mlle  Roulle.  —  Liber- 
sac,  élève  de  Mme  Maucorps.  —  Close,  élève  de  Mme  Tarpet.  — 
Batiste,  élève  de  M.  Batiste.  —  Aron,  élève  de  Mlie  Roulle.  — 
Péan  2%  élève  de  M.  Batiste. 

Deuxièmes  médailles. 
Mlles  Gaildrau,  élève  de  Mlle  Hersant.   —   Fauvelle,    élève   de 
Mlle  Barles.  —  Tertre,  élève  de  la  même.  —  Rouch,  élè\e  de  M. 

Lebel. Labouriau,   élève  du   même.  —   Dubois,   élève  de  Mlle 

Roulle.  —  Donne  3%  élève  de  Mme  Maucorps.  —  Thomas,  élève 
de  la  môme.  —  Bezancenot,  élève  de  Mme  Doumic. 
Troisièmes  médailles . 
Mlles  Marchand,  élève  de  M.  Lebel.  —  Huet,  élève  de  Mlle  Bar- 
les. —  Lafïite  2°,  élève  de  M.  Batiste.  —  Marx,  élève  de  Mme  Mau- 


corps. —  Hermann,  élève  de  M.  Lebel.  —  Decagny,  élève  de 
Mme  Maucorps.  —  Praly  l"'",  élève  de  M.  Lebel.  —  LaiTite  2°, 
élève  de  M.  Batiste.  —  Renaud  2%  élève  de  M.  Lebel.  —  Liau- 
zun,  élève  de  Mlle  Barles.  —  Poileux,  élève  de  M.  Lebel.  —  De 
Beaufond,  élève  do  Mlle  Roulle. 


LES  DROITS  DES  ADTEURS. 

{Deuxième  partie.) 

SOCIÉTÉ   DES   AUTEURS,    COMPOSITEURS   ET   ÉDITEURS   DE   MUSIQUE. 

(t2«  article)  (1). 

Je  reprends,  dit  l'Ainnénien  : 

—  Le  grand  Bal)-Aladin  et  moi  nous  l'réqucntons  l'Opéra  et 
notre  coup  d'œil  exercé  découvre,  au  milieu  de  ses  phalanges  de 
nymphes,  deux  merveilles  qui  doivent,  nous  l'espérons,  satisfaire 
complètement  l'empereur,  si  nous  parvenons  à  les  décider  à  nous 
suivre  à  Stamboul  ou  Constaiitinople,  comme  vous  voudrez. 

—  Ça  m'est  égal,  je  ne  connais  ni  l'une  ni  l'autre. 

—  C'est  la  même  ville. 

—  Ah!. . .  j'en  suis  charmée! 

—  Et  ces  deux  merveilles,  sans  être  trop  curieuse?  dit  Lolotte 
en  baissant  les  yeux. 

--  Sont  Lolotte  Pigoreau  et  Fifine  Soubra,  ici  présentes. 

—  Pardine!  je  l'avais  bien  deviné,  murmiu'a  tout  bas  Fifine. 

—  Vous  suivre  à  Constantinople,  reprit  Lolotte,  c'est  bel  et  bon; 
mais  on  ne  s'embarque  pas,  pour  un  voyage  comme  celui-là,  sans 
biscuit. 

—  J'allais  en  venir  au  biscuit. 

—  Bon! 

—  Voyons,  que  nous  proposez-vous?  car  les  femmes  de  votre 
Grand  Turc,  si  j'en  crois  la  Caravane. . . 

Et  vous  pouvez  l'en  croire  ;  c'est  un  tableau  fidèle  des  mœurs 
de  l'Orient. 

—  Eh  bien,  ces  femmes  sont  des  esclaves  achetées,  et  nous, 
nous  sommes  libres,  nous  sommes  Françaises  !  Nous  voulons  bien 
nous  engager,  mais  nous  vendre,  jamais  ! 

—  Jamais  !  répéta  Filine  avec  non  moins  de  lierté. 

—  Aussi  ne  s'agit-il  que  d'un  engagement. 

—  Pour  l'emploi  ? 

—  D'odalisques  ! 

—  C'est  comme  ça  que  ça  s'appelle  ? 

—  Oui! 

—  Ce  nom  est  gentil!  je  l'aime  mieux  aue  celui  de 

—  Et  pour  combien  de  temps'' 

—  Trois  années. 

—  C'est  comme  à  l'Opéra 

—  Va  pour  trois  années. 

—  A  quel  prix? 

—  A  deux  mille  roupies. 

—  Des  roupies!  cria  Filine. 

—  C'est  la  monnaie  du  pays. 

—  Fi,  la  vilaine  monnaie! 

—  Du  tout!  elle  est  d'or  et  vaut  vingt-deux  livres  tournois,  six 
sous,  trois  deniers ,  au  cours  d'aujourd'hui. 

—  Pas  possible  I  Ainsi  nous  aurions  chacune  environ  ?. . . 

—  Quarante-quatre  mille  livres. . . 

—  Ce  sont  des  appointements  de  premier  sujet,  ça  ! 


(1)  Voir  les  n»^  33,  ÀQ,  -il,  43  et  49  de  l'année  18G7,  et  les  n»'  7,  9, 
2,26,  27  et  28. 


DE  PARIS. 


227 


—  Oui,  sans  douLo  ;  mais  les  costume:;,  qu'est-ce  qui  les  four- 
nira ? 

—  Au  fait,  les  costumes  peuvent  être  ruineux. 

—  Non,  dit  gravement  Moq-iMoq  :  une  couronne  de  roses,  un 
collier  et  des  bracelets  de  corail,  avec  des  brodequins  de  satin... 
voilà  le  costume  de  cour  et  la  tenue  de  rigueur  pour  paraître 
devant  Sa  Uautesse. 

—  Que  ça  !.. . 

—  Le  costumier  du  sérail  fournit  tout. 

—  .J'accepte!  approuva  joyeusement  Fifine. 

—  Et  moi  aussi!  Seulement,  comme  je  ne  mets  jamais  rien  de 
côté,  je  suis  sans  le  sou . . . 

—  Ma  foi  !  moi  qui  dépense  tout  ce  que  je  gagne,  je  n'ai  pas 
une  maille. 

—  Soyez  sans  crainte,  nous  nous  chargeons  des  frais  de  route. 

—  Oh!  ce  n'est  pas  ça  qui  m'interloque,  dit  Lolotte  ;  c'est  que 
j'ai  mon  père,  qui  est  suisse  à  l'hôtel  Soubise  ,  à  qui  je  fais  une 
douceur  d'un  petit  écu  par  semaine. 

—  Est-ce  que  je  n'ai  pas  ma  tante  la  garde-malade,  que  je 
nourris  quand  ses  pratiques  se  portent  bien? 

—  Eh  bien ,  qu'est-ce  qu'ils  deviendront  ces  pauvres  gens , 
quand  nous  ne  serons  plus  là?  Il  nous  faut  des  avances,  pour 
leur  assurer  le  même  bien-être  que  si  nous  ne  les  quittions  pas. 

—  Je  n'y  pensais  pas  :  t'as  toujours  de  bonnes  idées,  Lolotte. 
Des  avances  ! 

—  C'est  juste!  on  vous  en  fera. 

—  Alors  tope.  Monsieur  Moq-Moq  ! 

—  C'est  marché  fait.  Monsieur  le  drog. . . 

—  Un  moment  !  Nous  voilà  d'accord  pour  vos  demandes  :  main- 
tenant il  faut  savoir  si  vous  réunissez  effectivement  et  aussi  bien 
que  vous  le  paraissez  toutes  les  qualités  exigées. 

—  Comment? 

—  Je  ne  comprends  pas. 

—  Ceci  regarde  mon  collègue ,  le  grand  Bah-Aladin,  que  je 
vous  amènerai  pour  s'en  expliquer  avec  vous.  Jusque-là,  Mesde- 
moiselles, sur  tout  ceci  le  plus  grand  silence  à  l'Opéra!  Si  l'on  y 
connaissait  notre  mission,  nous  serions  assailhs  de  demandes,  de 
sollicitations. 

—  Pardine  !  celles  de  ces  demoiselles  qui  seraient  bien  aises  de 
quitter  leurs  messieurs. . . 

—  Ceux  de  ces  messieurs  qui  ne  seraient  pas  fâchés  de  se  dé- 
barrasser de  ces  demoiselles. 

—  Nous  aurions  tout  le  monde  sur  les  bras  et  inutilement,  puis- 
que notre  affaire  est  terminée. 

—  Nous  l'espérons. 

—  Et  moi  aussi. 

Pendant  ces  derniers  mots  l'Arménien  s'était  levé.  Au  lieu  du 
salut  par  geste  dont  il  s'était  contenté  en  entrant,  il  s'approcha 
des  futures  odalisques  et  appliqua  sur  les  lèvres,  assez  fraîches  de 
chacune,  un  gros  baiser. 

—  Tiens  !  dit  Filine,  il  parait  que  c'est  à  l'usage  de  tous  les 
pays!  » 

Ce  ne  fut  pas  sans  impatience  que,  l'imagination  remplie  d'i- 
dées si  brillantes  et  si  nouvelles ,  on  attendit  le  lendemain.  Enlîn 
il  ari'iva,  et  avec  lui,  vers  le  milieu  de  la  matinée,  les  deux  étran- 
gers si  vivement  désirés.  Pour  éviter  les  acclamations  des  polis- 
sons, ils  firent  entrer  dans  la  cour  l'énorme  et  antique  coche  qui 
les  voilurait,  et  Von  vit  paraître  à  la  grande  suprise  des  voisins  et 
voisines,  accumulés  aux  fenêtres,  Mysti  Moq-Moq,  te'.l  que  je  vous 
l'ai  dépeint  et  son  acolyte  le  grand  Bah-Aladin,  dont  je  vais  vous 
faire  le  portrait. 

Figurez-vous  un  petit  homme  un  peu  gros,  serré,  dans  une  robe 
de  chambre  de  damas  bleu  à  grandes  fleurs  jaunes,  par  une  cein- 


ture rouge  à  franges  d'or;  botté  de  longues  bottes  en  cuir  cou- 
leur de  bois,  et  coiffé  d'un  chapeau  pointu  semblable  à  celui  de 
Sgaiiarelle,  dans  le  Médecin  malgré  lui. 

L'œil  vif  sous  de  grandes  lunettes,  le  nez  en  bec  de  corbin  et 
le  menton  proéminent,  mais  enseveli  dans  Lis  plis  nombreux  d'une 
éch.irpo  verte  (|ni  lui  faisait  plusieurs  fois  le  tour  du  cou;  sautil- 
lant, gesticulant,  bredouillant,  le  petit  homme  s'avança  vivement 
vers  ce.i  demoiselles  et  débuta  avec  elles  comme  avait  fini ,  la 
veille,  son  camarade  :  par  un  double  baiser. 

Fifine.  peu  effrayée,  se  contenta  de  dire  :  —  A  la  bonne  heure! 
il  ne  fait  pas  de  façons,  celui-là! 

—  Sala maléqui !  salamaléqui!  salamaléquil  dit  d'une  voix 
criarde  le  petit  homme. 

—  Il  vous  souhaite  le  bonjour  et  mille  prospérités,  interpréta 
le  drogman. 

—  Pourquoi  nous  dit-il  ça  dans  ce  patois  peu  clair?  demanda 
l'interrogeante  Fifine. 

—  Parce  qu'il  sait  le  turc,  le  grec,  l'arabe,  le  persan,  le  co- 
plite,  le  sanscrit,  le  malais,  le  chinois;  mais  qu'il  ignore  le  fran- 
çais. 

—  Fallait  donc  le  dire  tout  de  suite. 

—  Nivroc,  salam,  hypocrata  (1),  cria  Bah-Aladin. 

—  Il  vous  engage  à  vous  asseoir  et  demande  à  en  faire  autant. 
Sans  attendre  la  réponse,  Bah-Aladin  s'était  jeté  sur  le  canapé, 

qu'il  occupa  dans  toute  sa  longueur. 

—  Ciirigar  camboto  oustin  moraf. 

—  Yod  II  dit  que  vos  exercices  peuvent  commencer. 

—  Quels  exercices? 

—  Ceux  qu'exigera  votre  service  auprès  de  Sa  Hautesse. 

—  Je  comprends  :  c'est  une  répétition. 

—  A  peu  près,  ou,  plutôt,  un  examen  :  votre  roi,  que  Dieu 
conserve,  a  un  chef  de  gobelet  qui,  avant  de  lui  servir  à  boire, 
doit  goûter  le  breuvage  :  c'est  ce  qu'on  appelle  V essai  du  vin;  il 
a  un  maître  d'hôtel  qui  doit  goûter  les  mets  :  c'est  l'essai  de  la 
viande.  Sa  Hautesse  a  préposé  le  vénérable  Bah-Aladin  pour  con- 
naître et  juger  les  qualités  naturelles  et  acquises  de  ses  odalis- 
ques. 

—  Voyons,  commandez  l'exercice,  dit  résolument  Fifine. 

—  Je  vais  donc  lui  apprendre  que  vous  êtes  à  ses  ordres. 

—  Vous  le  pouvez. 

—  Oustin  salamaléqui,  dit  Mysti  Moq-Moq  à  Bah-Aladin  ,  en 
s'inclinant. 

—  Basum  basa  alla  moran  café,  répondit  le  petit  homme. 

—  11  demande  si  vous  savez  faire  le  café. 

—  Pardine!  sans  doute.  Est-ce  qu'une  Parisienne  peut  vivre 
sans  son  café  au  lait  ? 

—  Opérez  donc  devant  lui  et  servez-nous  ce  breuvage  de  pre- 
mière nécessité. 

Aussitôt  les  deux  danseuses  se  mettent  en  devoir  de  confection- 
ner la  liqueur  demandée,  mais  un  geste  de  Bah-Aladin  les  arrête. 

—  Baballi  dracam  ouraf  tabac,  crie-t-il  vivement.  En  même 
temps  il  tire  de  dessous  sa  robe  une  énorme  pipe,  un  sac  à  tabac 
et  présente  le  tout  à  Lolotte. 

Moq-Moq,  ayant  pris  dans  sa  poche  un  instrument  et  une  pro- 
vision semblable,  les  tend  à  Fifine. 

—  Il  veut  savoir  si  vous  entendez  le  service  de  la  pipe  et  vous 
engage  à  charger  les  nôtres. 

—  Pourquoi  pas?  dit  Fifine,  c'est  pas  la  mer  à  boire  ;  j'ai  assez 


(1)  Ces  trois  mots  sont  ceux  que  prononce  Crispin  dans  l 
amoureuses  pour  rendre  la  raison  à  Agathe,  et  les  autres  mots  préten- 
dus turcs  sont  empruntés  au  Bourgeois  gentilhomme.  Molière  lui-même 
les  avait  pris  pour  la  plupart  à  Rotrou,  dans  la  Sœur. 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


souvent  bourré  la  bouffarde  de  mon  cousin,  qui  est  sergent  dans 
les  petits  corps. 

Ces  princesses,  si  fières,  s'emparent  des  deux  pipes;  de  leurs 
jolis  doigts  parfumées  elles  y  introduisent  le  tabac,  le  pressent, 
le  tassent;  puis,  avec  toute  l'élégance  qu'aurait  pu  exiger  le  maî- 
tre de  ballets  le  plus  difficile,  le  coips  incliné,  les  bras  gracieuse- 
ment arrondis,  elles  offrent  les  deux  tubes  aux  Orientaux. 

—  Marababa  sahem!  dit  le  chapeau  pointu  avec  enthousiasme. 

—  Bah-Aladin  exprime  qu'il  est  enchanté  de  vos  grâces. 

—  Il  est  bien  bon,  Monsieur  Baladin. 

—  Maintenant  mettez  en  train  le  café. 

Les  deux  danseuses  ont  bien  vite  allumé  le  feu  ;  au  milieu  des 
nuages  de  fumée  que  leur  envoient  les  étrangers  et  qui  transfor- 
ment l'air  embaumé  de  leur  boudoir  en  atmosphère  de  tabagie, 
elles  se  livrent  avec  empressement  à  tous  les  détails  nécessaires  à 
cette  préparation. 

Thomas  SAUVAGE. 
{La  suite  prochainement.) 


LES  THÉÂTRES  LYRIQUES  SECONDAIRES  Â  PARIS 

DKPVIS     ISSO. 

(3e  article)  (1). 

Nous  avons  interrompu,  dans  le  précédent  article,  l'énuméra- 
tion  du  répertoire  lyrique  du  Gymnase. 

Nous  la  reprenons,  en  continuant  de  suivre  l'ordre  chronolo- 
gique : 

La  Vente  après  décès,  un  acte,  paroles  d'Etienne,  musique  de 
Dourlen,  représenté  le  1"  août  1821.  On  avait  donné  le  13  sep- 
tembre 1800,  au  théâtre  des  Troubadours  (qui  vécut  environ  deux 
années),  un  vaudeville  en  un  acte,  Rembrandt,  ou  la  Vente  après 
décès,  signé  Morel,  Etienne,  Servières  et  Moras;  c'est  ce  vaudeville 
que  l'un  des  auteurs,  Etienne,  eut  l'idée  de  mettre  en  opéra-comi- 
que, et  dont  Dourlen  fit  la  musique.  La  transformation  n'était 
sans  doute  pas  heureuse,  car  il  ne  fut  joué  sous  cette  nouvelle 
forme  qu'une  seule  et  unique  fois. 

Le  Trésor  supposé,  ou  le  Danger  d'écouter  avx  portes,  un  acte, 
paroles  d'Hoffmann,  musique  de  Méhul,  représenté  le  13  septem- 
bre 1821.  Cet  ouvrage,  créé  à  l'Opéra-Comique  le  29  juin  1802, 
n'y  avait  pas  obtenu  beaucoup  de  succès,  malgré  des  interprètes 
tels  que  Gavaudan,  Solié  et  Mlle  Philis  aînée.  15  représentations 
en  sont  données  au  Gymnase. 

Une  Aventure  de  Faublas,  un  acte,  paroles  de  M.  Sauvage,  mu- 
sique de  Garcia,  représenté  le  20  février  1822.  Jouée  avec  succès 
au  Vaudeville,  quelques  années  auparavant,  cette  pièce  fut  moins 
heureuse  transformée  en  opéra-comique,  car  sa  première  et  uni- 
que représentation  ne  put  même  être  achevée. 

Le  Brahtnine,  un  acte,  paroles  de  Delestre  (Poirson?),  musique 
d'Alexandre  Piccinni,  représenté  le  17  juin  1822.  Obtient  10  repré- 
sentations. 

La  Bonne  Mère,  un  acte,  de  Mélesville,  musique  de  Douay.  C'é- 
tait une  ancienne  comédie  de  Florian,  arrangée  en  opéra-comique, 
et  qui  fut  jouée  11  fois. 

La  Petite  Lampe  merveilleuse,  opéra-féerie  en  un  acte,  de  Scribe 
et  Mélesville,  musique  d'Alexandre  Piccinni.  L'un  des  plus  grands 
succès  du  théâtre  de  Madame  au  point  de  vue  musical.  79  repré- 
entations. 

Les  Folies  amourevses,  pastiche  de  Castil-Blaze,  qui  réduit  en  un 


(1)  Voir  les  n"^  23  et  26. 


acte  l'adorable  comédie  de  Regnard,  et  y  adapte  un  certain  nom- 
bre de  morceaux  de  musique  parodiés  par  lui  sur  divers  fragments 
de  Mozart,  Cimarosa,  Paër,  Pavesi  et  Steibelt.  C'était  le  premier 
essai  de  ce  genre  auquel  Castil-Blaze  dut  sa  fortune,  et  il  porta 
bonheur  à  son  auteur,  ainsi  qu'à  la  cantatrice  chargée  du  rôle 
d'Angélique,  Mlle  Lalande,  qui  se  fit  tellement  remarquer  dans  ce 
rôle  que  l'Opéra-Comique  voulut  se  l'attacher  aussitôt.  Elle  pré- 
féra accepter,  ainsi  que  nous  l'avons  dit  plus  haut,  les  brillantes 
propositions  qui  lui  étaient  faites  pour  l'Italie,  et  quitta  Paris  peu 
de  temps  après.  Données  pour  la  première  fois  le  3  avril  1823, 
les  Polies  amoureuses  atteignirent  le  chiffre  de  42  représenta- 
tions. On  se  souvient  que  cet  ouvrage  a  été  repris  aux  Fantaisies- 
Parisiennes  le  31  mars  1866. 

La  Fête  française,  à-propos  lyrique  en  un  acte,  paroles  de  De- 
lestre-Poii'son,  musique  d'Alexandre  Piccinni,  représenté  le  24 
août  1823,  jour  de  la  Saint-Louis,  fête  du  roi.  (Cette  mention  est 
celle  de  YAlmanach  des  spectacles  dont  Merville  était  l'auteur  et 
qui  était  publié  par  le  libraire  Barba;  elle  est  en  désaccord  avec 
celle  des  Tablettes  du  Directeur,  et  ce  sont  ces  dernières  qui  sont 
fautives,  car  une  erreur  de  rédaction  leur  fait  confondre  ta  Fête 
française  avec  un  autre  à-propos  représenté  peu  après,  la  Fête  de 
la  Victoire,  et  donner  à  l'un  les  auteurs  de  l'autre.) 

L'Epreuve  villageoise,  de  Desforges  et  Grétry,  donnée  le  30  oc- 
tobre 1823.  Il  n'est  pas  besoin  de  faire  l'historique  de  cet  ouvrage 
exquis,  que  tout  le  monde  connaît,  et  qui  a  été  joué  sur  tous  les 
théâtres  où  l'on  s'est  peu  ou  prou  occupé  de  musique.  Il  sert  aux 
débuts  d'une  demoiselle  Florigny  et  obtient  29  représentations. 

La  Fausse  Agnès,  pastiche  de  Castil-Blaze,  arrangé  sur  la  pièce 
de  Destouches,  avec  morceaux  parodiés  sur  des  fragments  de  Ci- 
marosa, Rossini,  Meyerbeer,  etc.  Succès  moins  grand  que  celui 
des  Folies  amoitreuses  ;  début  de  Mme  Mercier;  32  représentations, 
dont  la  première  a  lieu  le  6  juillet  1824. 

A  partir  de  cette  époque,  le  genre  lyrique  est  abandonné  au 
Gymnase,  et  l'on  n'en  trouve  plus  trace  que  dans  le  Mal  du  pays, 
«  opéra-vaudeville  »  donné  le  28  décembre  1827,  paroles  de 
Scribe  et  Mélesville,  musique  d'Adolphe  Adam, — pour  qui  il  est  un 
heureux  début  dans  une  carrière  brillante,— et  dans  quelques  au- 
tres pièces,  la  Batelière  de  Drieals,  Perkins  Warbeck,  etc.  (1), 
pour  lesquelles  le  même  compositeur  écrivit  plusieurs  airs  de  vau- 
deville. Mais  à  dater  de  ce  moment,  l'opéra  proprement  dit 
fut  exilé  du  Gymnase.  Il  nous  faut  cependant  signaler  la  re- 
présentation d'une  pièce  de  ce  genre  qui  eut  lieu  vingt-cinq  ans 
plus  tard  :  Yvonne  et  Loïc,  sorte  d'opérette  donnée  sans  fracas  le 
IS  novembre  18S1,  dont  les  paroles  avaient  été  écrites  par  Jules 
Lorin  et  M.  Michel  Caire,  et  la  musique  par  M.  Delioux. 

Avant  de  terminer,  je  veux  rappeler  un  fait  qui  intéresse  inci- 
demment l'art  musical  et  l'un  do  ses  représentans  les  plus  juste- 
ment glorieux. 

Le  29  novembre  1823,  on  donnait  au  Gymnase  la  première  re- 
présentation d'un  vaudeville  qui  obtint  un  énorme  succès.  C'était 
à  l'époque  où  les  opéras  de  Rossini  triomphaient  avec  éclat  sur  la 
scène  du  théâtre  Italien;  le  maître  immortel  n'avait  pas  encore 
transformé  son  Mosè  en  Moïse,  il  n'avait  pas  fait  de  Maometto,  de 
Siège  de  Corinihe,  il  n'avait  encore  écrit  pour  notre  première  scène 
lyrique  ni  le  Comte  Ory,  ni  ce  splendide  et  incomparable  Guil- 
laume Tell  par  lequel  il-  devait  terminer  si  prématurément  une 
carrière  glorieuse  et  honorée,  mais  il  régnait  en  maître  sur  notre 


(1)  Dans  la  «  Liste  compli'tu  des  ouvrages  d'Adolphe  Adam,  »  placée 
en  tête  de  son  premier  voiume  posthume  de  Souvenirs  a'un  musicien,  et 
dressée  par  une  main  étrangère,  Perkins  Warbeck  est  indiqué  comme 
ayant  été  criJé  aux  iNouveautc.'*.  C'est  une  erreur.  Perkins  Warbeck  fit 
sa  première  apparition  au  Gymnase  le  15  mai  1827. 


DE  PARIS. 


229 


scène  italienne,  et  son  nom  était  dans  toutes  les  bouches.  Aussi 
le  vaudeville  en  question,  qui  était  un  à-propos  plein  d'esprit  si- 
gné Scribe  et  Mazères ,  et  qui  était  intitulé  le  Grand  Repas,  ou 
RossiNi  A  Paris,  fut- il  accueilli  avec  des  transports  d'enthou- 
siasme. 

J'en  veux  citer  les  couplets  suivants,  non  parce  qu'ils  sont  bons, 
mais  parce  qu'il  sont  un  témoignage  du  sentiment  public  d'alors 
au  sujet  de  l'illustre  compositeur  : 

Air  :  Tra  la  la. 

Rossini!  (bis) 
Toi  que  j'implore  aujourd'hui, 

Rossini  !  (6w) 
Pourquoi  n'es-tu  pas  ici  ? 
Sous  tes  accords  enchanteurs, 
On  n'entend  plus  les  chanteurs; 
C'est  pour  ça  qu'à  l'Opéra 
Le  parterre  dit  déjà  : 

Rossini  !  etc. 
Par  lui  l'on  n'entend  jamais 
La  prose  ni  les  couplets. 
A  maint  ouvrage  nouveau. 
On  dit  souvent  à  Feydeau  : 

Rossini  !  etc. 
Partout  son  nom  glorieux 
Attire  un  public  nombreux, 
-       Aussi  chaque  soir,  dit-on. 
On  répète  à  l'Odéon  (d)  : 

Rossini  !  {his) 
Toi  que  j'implore  aujourd'hui, 

Rossini!  (bis) 
Pourquoi  n'es-tu  pas  ici? 

Inutile  de  dire  qu'à  la  première  représentation,  ces  couplets 
chétifs  furent  bissés  avec  frénésie,  en  faveur  du  vieux  dicton  :  Le 
ton  fait  la  chanson. 

Arthur  POUGIN. 
(La  suite  prochainement.) 


CONCOURS  D'ORPHÉONS, 

DE    FANFARES    ET    OE    MUSIQUES    MILITAIRES 

Ouverts  à  Sentis  le  dimanche  i'i  juillet  1868. 

L'institution  orphéonique  progresse  d'une  façon  très-sensible, 
grâce  à  l'obligation  où  sont,  maintenant,  les  Sociétés  de  première 
division  de  concourir  pour  la  lecture  à  première  vue.  —  Quoique 
cette  épreuve  importante  n'ait  pas  fait  partie  du  concours  de  Sen- 
lis,  il  n'en  a  pas  moins  été  des  plus  intéressants.  —  L'Association 
chorale  de  Valenciennes  y  a  obtenu  un  premier  prix  ascendant. 
11  est  bien  peu  de  Sociétés  chorales  chez  lesquelles  l'ensemble,  la 
justesse,  le  sentiment  vrai  de  l'expression,  soient  portés  à  un  tel 
degré  de  perfection.  —  Le  mérite  de  son  habile  directeur,  M.  Jean 
Charle,  est  une  cause  première  de  cette  supériorité  ;  aussi  le  jury 
lui  a-t-il  accordé  une  mention  spéciale  de  sa  satisfaction. — Le  con- 
cours d'excellence  a  été  très-brillant.  —  La  première  et  unique 
médaille  des  deux  divisions  orphéoniques  et  instrumentales  a  été 
remportée  par  le  Cercle  des  Cricks-Sicks  de  Tourcoing,  directeur 
M.  Louis  Rossoor,  et  par  la  Fanfare  Gautrot,  de  Paris,  dont 
M.  Blancheteau  est  le  chef. 


(I)  L'Odéon  se  préparait  alors,  ainsi  que  nous  le  verrons  dans  le  cha- 
pitre suivant,  à  rouvrir  comme  théâtre  lyrique,  et  répétait  déjà  cer- 
taines traductions  que  Castil-Blaze  avait  arrangées  pour  lui  de  quelques- 
uns  des  grands  ouvrages  de  Rossini. 


Un  violent  orage  ayant  interrompu  les  concours,  nous  avons  fait 
aux  auditeurs  de  la  salle  de  spectacle  une  petite  conférence  sur 
l'histoire  de  l'Orphéon  en  France.  Cet  entr'acto  improvisé  s'est  ter- 
miné par  une  collecte  dont  le  produit  a  été  versé  par  M.  Lindheim 
iils,  et  nous,  à  la  caisse  de  secours  de  l'Association  des  artistes 
musiciens.  Au  banquet  qui  a  terminé  la  fête,  on  a  beaucoup  re- 
marqué la  manière  éloquente  avec  laquelle  M.  le  marquis  d'Auray, 
sous-préfi't,  a  su  parier  de  la  musique  et  de  ses  manifestations 
populaires. 

A.  ELWART. 


MINISTËRE  D£  U  MAISON  DE  L'EUPEREUB 

ET    DES    BEAUX-ARTS- 

DIRECTION    GÉNÉRALE    DES   THÉÂTRES. 


Le  concours  institué  au  théâtre  impérial  de  l'Opéra -Comique, 
pour  la  mise  en  musique  du  poëme  intitulé  le  Florentin,  sera  clos 
définitivement  le  30  juillet  prochain. 

Les  compositeurs  qui  y  auront  pris  part  sont  invités  à  se  réunir 
le  samedi  !'"■  août,  à  une  heure,  au  ministère  de  la  Maison  de 
l'Empereur  et  des  Beaux-Arts,  dans  le  cabinet  du  directeur  géné- 
ral des  théâtres,  pour  élire  eux-mêmes  le  jury  chaigé  de  juger  les 
partitions  envoyées  au  concours. 

Ils  seront  admis  sur  la  présentation  de  l'épigraphe  qui  doit 
être  placée  en  tête  de  leur  manuscrit. 


Monument  à  la  mémoire  d'Edouard  Monnais. 

Notre  dernière  liste,  publiée  le  28  juin  dernier,  s'est  grossie  des 
noms  suivants  : 

M.  Ad.  Botte,  Maison  Pleyel-Wolfï  et  C,  MM.  Larivière,  Al.  Rous- 
seau, Victor  Capoul;  Henriquel-Dupont,  de  l'Institut;  Couderc, 
Mme  veuve  Eugénie  Scribe,  MM.  A.  Guillot  de  Sainbris,  Sainte- 
Foy,  Henri  Ravina,  E.  Jancourt,  Lesueur,  la  baronne  de  Maistre, 
MM.  Cavaillé-Coll,  Henri  Potier,  Mlle  Cleo  (Marie),  M.  le  comte  de 
Nieuwerkerke ,  MM.  de  Besselièvre;  Larabit,  sénateur;  Rolle, 
C.-V.  Alkan  aîné;  Ferrand,  chef  du  bureau  des  théâtres;  Obin,  de 
l'Opéra;  Arthur  Pougin,  Mme  veuve  Edouard  Bénazet;  MM.  Cou- 
der, chef  d'orchestre  du  Gymnase;  Beulé,  directeur  de  l'Acadé- 
mie impériale  de-,  Beaux-Arts;  Léon  Achard,  Wekerlin,  Sarasate, 
de  Vatry,  Martin,  Régnier,  Charles  Poisot,  Mme  Remaury,  Mlle  Ma- 
rie Roze,  Mlle  Francine  Cellier,  MM.  L.  Uorus,  le  comte  Pillet- 
Will,  C.-L.  Gruneisen,  W.  Kriiger,  Adolphe  Catelin,  J.  Offenbach. 


Nous  recevons  de  M.  Choudens  les  renseignements  suivants  : 

«  La  Hongrie  résistait  au  traité  international  littéraire  et  artistique 
conclu  entre  la  France  et  l'Autriche.  —  Les  éditeurs  hongrois  préten- 
daient n'être  pas  liés  par  ce  traité.  Les  auteurs  et  éditeurs  français  pro- 
testaient, et  M.  Clioudcns  t^e  disposait  à  poursuivre  les  contrefaçons  des 
opéras  de  M.  Ch.  Gounod,  lorsqu'une  bienveillante  et  officieuse  lettre  de 
S.  Exe.  le  ministre  des  affaires  étrangères  l'informa  de  la  reconnais- 
sance de  nos  droits  en  Hongrie.  Celte  lettre,  qui  témoigne  de  la  haute 
sollicitude  de  M.  le  marquis  de  IVIoustier  pour  les  intérêts  des  auteurs  et 
éditeurs  français  à  l'étranger,  est  ainsi  conçue  : 

«  En  réponse  à  la  demande  d'informations  que  vous  m'avez  fait 
»  l'honneur  de  m'adresser,  je  vous  ai  fait  connaître,  le  4  du  mois  der- 
»  nier,  que  l'assertion  d'après  laquelle  la  convention  littéraire  du  11 
»  décembre  1866,  entre  la  France  et  l'Autriche,  ne  garantissait  pas  les 
»  droits  de  propriété  des  auteurs  français,  en  Hongrie,  est  dénuée  de 
»  fondement.  J'ajoutais  que  vous  pouviez  poursuivre ,  dès  à  présent,  à 
»  Pesth,  les  reproductions  illicites  de  vos  publications. 


230 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


»  J'ai  la  satisfaction  de  pouvoir  vous  annoncer,  aujourd'hui,  qu'à  la 
>i  suite  des  démarches  faites  par  le  consul  de  France  à  Pesth,  les  con- 
»  trefectcurs  de  vos  éditions  ont  reconnu  la  justice  de  vos  réclamations, 
»  et  qu'ils  se  sont  dcclai'és  prêts  à  transiger  avec  vous.  » 

»  Comme  on  le  voit,  S.  Exe.  le  ministre  des  affaires  étrangères  ne  se 
borne  pas  à  signer  des  conventions  internationales,  il  en  protège  l'équi- 
table exécution,  et  nous  savons  qu'en  ce  qui  concerne  les  œuvres  musi- 
cales françaises  si  recherchées  dans  toute  l'Allemagne ,  la  haute  sollici- 
tude de  nos  légations  est  acquise  aux  auteurs  français.  » 


CORRESPONDANCE. 

Bade,  le  i6  juillet  1868. 

...  Les  visiteurs  de  l'année  dernière  ont  peine  à  reconnaître  leur 
Baden-Baden.  Tout  a  subi  une  féerique  transformation;  de  vilaines  bou- 
tiques ont  disparu  pour  faire  place  à  d'élégantes  constructions  ;  des  jar- 
dins ont  surgi  partout;  une  illumination  luxueuse  fait  resplendir  la 
maison  de  Conversation.  Le  kiosque  de  l'orchpstre  a  été  haussé  pour 
aider  à  la  propagation  du  son;  le  nombre  des  nmsiriens  a  été  aug- 
menté, etc.,  etc.  M.  Dupressoir  est  habile  et  de  plus  homme  de  goût; 
ce  n'est  certes  pas  lui  qui  laissera  péricliter  l'héritage  de  son  beau-père 
et  prédécesseur  M.  Bénazet. 

11  a  su  attirer  à  Bade  à  peu  près  toutes  les  célébrités  musicales,  qui 
y  brilleront  les  unes  après  les  autres,  pour  le  plus  grand  plaisir  des 
hôtes  de  cette  charmante  résidence.  Outre  Mme  Escudier-Kastner,  dont 
la  Revue  et  Gazette  musicale  signalait  dernièrement  le  succès,  nous  avons 
entendu  la  gracieuse  Mme  Monbelli,  que  Paris  a  fêtée  cet  hiver  et  qui 
le  méritait  bien  ;  avec  Troy,  Sighicelli  et  Ketterer,  elle  a  fait  de  la 
manière  la  plus  brillante  les  frais  du  troisième  concert.  Puis  nous 
avons  eu  Mme  Norman-Neruda,  l'enchanteresse,  et  Carlotta  Patli  et  ses 
éblouissantes  vocalises  ;  les  applaudissements,  les  rappels  adressés  à  ces 
deux  merveilleuses  virtuoses  n'avaient  pas  de  fin.  Samedi  prochain  aura 
lieu  le  cinquième  concert  avec  Mme  Carvalho  et  Mlle  Schrœder,  du 
théâtre  Lyrique.  —  M.  Dupressoir  est  parti  pour  Vienne  ;  on  peut  donc 
s'attendre  avant  peu  à  quelque  surprise  musicale. 

M.  S. 


NOUVELLES  DES  THEATRES  LYRIQUES. 

,f**  Le  théâtre  impérial  de  l'Opéra  a  donné  lundi  et  vendredi  Hercu- 
lanum.  —  La  reine  de  Mohély  assistait  à  la  représentation  de  lundi 
dans  une  baignoire. 

=);.%  Le  début  de  Mlle  Julia  Hisson  a  eu  lieu  mercredi  dans  le  Trouvère. 
Elève  du  Conservatoire  et  en  dernier  lieu  de  Wartol,  la  débutante  possède 
une  très-belle  voix,  sonore,  d'une  grande  étendue,  bien  timbrée  dans  les  trois 
registres  et  qui  se  prête  adinirablomenl  aux  élans  dramatiques  des  grands 
rôles.  —  Mlle  Hi^son  a  surpris  la  salle  par  l'éclat  avec  lequel  elle  a  dit 
sa  cavatine  d'entrée;  la  cabalette  n'a  pas  été  aussi  heureusement  enlevée 
à  la  première  reprise  ;  la  seconde  a  été  meilleure.  Tout  le  quatrième  acte, 
le  Miserere,  le  duo  avec  le  comte  de  Luna  et  le  duo  final  ont  parfaitement 
fait  apprécier  les  magnifiques  moyens  dont  Mlle  Hisson  est  douée.  —  Ce 
n'est  pas  à  dire  qu'elle  soit  déjà  une  cantatrice  arrivée.  Elle  a  fort  à  tra- 
vailler jusque-là,  et  il  serait  fâcheux  que  des  éloges  exagérés  vinssent 
l'induire  en  erreur  sur  ce  point  et  l'éblouir  prématurément;  il  y  a  bien 
des  choses  à  limer,  à  polir,  bien  des  nuances  à  observer,  beaucoup  à  assouplir 
dansson  exécution.  Maissil'on  considère  que  Mlle  Hisson  n'a  pas  vingt  ans, 
et  qu'elle  débute  dans  un  rôle  comme  celui  de  Léonore,  avec  un  organe 
de  cette  étoffe  et  avec  un  sentiment  dramatique  aussi  caractérisé,  on  peut 
féliciter  la  direction  de  l'Opéra  de  cette  acquisition  et  prédire  un  bel 
avenir  à  Mlle  Hisson.  —  Ce  que  l'on  a  dit  de  sa  beauté  n'est  nullement 
exagéré.  C'est  une  très-belle  personne  ;  son  visage  est  doux  et  agréable, 
sa  physionomie  intelligente  et  expressive,  sa  taille  élevée  et  bien  prise, 
ses  bras  superbes,  ses  gestes  amples,  pleins  de  noblesse  et  de  fierté.  Sans 
doute  on  peut  reprocher  au  jeu  de  la  débutante  de  l'exagération  dans 
certaines  situations,  mais  elle  s'excuse  par  son  inexpérience  de  la 
scène,  et  il  est  même  éionnant  que  son  attitude  et  sa  démarche  ne  s'en 
soient  pas  ressenties  davantage.  —  Applaudie  à  quatre  reprises  par  les 
loges  et  l'orchestre  après  sa  première  cavatine,  les  bravos  ont  redoublé 
au  quatrième  acte  et  Mlle  Hisson  a  été  rappelée  après  la  chute  du  ri- 
deau.— Devoyod  a  très-bien  chanté  son  rôle  du  comte  de  Luna  et  il  a  lé- 
gitimement partagé  le  succès  de  sa  jeune  partenaire.  Mlle  Bloch,  Morère  et 
Castelmaryont  brillamment  contribué  à  l'ensemble  de  cette  représentation, 
qui,  malgré  une  chaleur  accablante,  avait  attiré  beaucoup  de  monde. 

s,*j;  Outre  la  reprise  d'Armide,  il  est  question  de  celle  de  Lucie. 
Mlle  Battu  y  chanterait  le  rôle  principal. 


^*4  Mlle  Julia  Hisson  est  engagée  pour  quatre  ans  à  l'Opéra  à  raison 
de  11,000  francs  la  première  année,  18,000  francs  la  deuxième, 
23,000  francs  la  troisième   et   30,000  francs  la    quatrième. 

„,**  La  reprise  au  théâtre  de  l'Opéra-Comique  du  Docteur  Mirobolan  a 
été  très-bien  accueillie  par  le  public;  la  musique  du  jeunecompositeurest 
bien  au  ton  des  joyeuses  et  comiques  situations  de  l'ouvrage.  Parmi 
les  morceaux  les  plus  applaudis,  nous  citerons  l'ouverture,  le  duo  d'Alcine 
et  de  Dorine,  la  chanson  paysanne  et  un  finale  ingénieux  et  élégant 
Couderc  est  réellement  inimitable  dans  ce  rôle  de  Crispin,  qui  restera 
comme  un  des  plus  complets  de  son  répertoire.  Prilleux  (Mirobolan)  est 
très-plaisant;  .Mlle  Bélia  a  le  mordant  et  la  belle  humeur  du  per- 
sonnage de  Dorine.  Les  autres  rôles  sont  parfaitement  tenus  par  Mlles' 
Tuai  et  Heilbron,  toutes  deux  charmantes,  ainsi  que  par.Polelet 
Leroy. 

,j*,j  La  représentation  des  Dragons  de  Viltars  a  été  honorée  vendredi 
de  la  présence  de  la  reine  de  Mohély. 

^%  On  répète  Zanipa,  qui  sera  chanté  par  L.  Achard  et  Mlle  Brunet- 
Lafleur  dans  les  deux  principaux  rôles. 

^*^,  Dans  ces  derniers  temps  on  a  assigné  plusieurs  causes  au  non- 
renouvellement  de  l'engagement  de  Mlle  Marie  Ro?e  à  l'Opéra-Comique  ; 
on  en  inférait  mèuie  qu'elle  renonçait  au  théâtre.  La  vérité  est  que  la 
jeune  et  charmante  artiste  a  repris,  sous  la  direction  de  son  maître 
François  Wartel,  les  études  qui  lui  pennettront  d'aborder  bientôt  le 
grand  opéra.  Grâce  aux  conseils  de  l'éminent  professeur  de  tant  de 
cantatrices  célèbres,  Mme  Trebelli,  Mlle  Nilsson  entre  autres,  et  tout 
récemment  Mlle  Hisson,  dont  le  succès  vient  d'être  si  décisif  à  POpéra, 
Mlle  Roze  pourrait  bien  compter  pour  une  étoile  de  plus. 

,n*:)i.  Le  nombre  des  musiciens  qui  concourent  pour  la  partition  du 
Florentin,  l'opora-comique  de  M.  Saint-Georges  peut  s'évaluer  à  cin- 
quante. 

***  Voici  la  liste  exacte  des  artistes  engagés  jusqu'à  présent  par 
M.  Noriac  pour  la  nouvelle  exploitation  du  théâtre  des  Bouffes-Pari- 
siens .  Désiré,  Berthelier,  Bonnet,  Nathan,  Aurèle,  Audran,  Barnolt, 
Daniel,  Montbars,  Poirier,  Mousseaux,  Debeer,  Dublex,  Pauly,  Guyard, 
etc.,  etc.  —  Mnies  Schneider,  Thierret,  Font!,  Perler,  Castello,  Gilbert, 
Berger,  Dalbert,  Cap,  Dencux,  Henry,  Marie  Petit,  Gayer,  Sergent  !■'«, 
Sergent  2',  Leduc,  etc.,  etc.  M.  Noriac  est  en  train  de  conclure  encore 
plusieurs  engagements  très-importants.  —  Le  spectacle  de  réouverture 
se  compo.sera  de  (7osco/eMo,  opérette  en  deux  actes,  deMM.Nuitter  et  Tréfeu, 
musique  d'Offenbach,  représentée  à  Ems  avec  succès,  et  de  l'Arche-Marion, 
opéra  en  un  acte  d'Albéric  Second,  musique  d'Ad.  Nibelle.  J.  Offenbaeh 
s'est  engagé  à  donner  aux  nouveaux  Bouffes  trois  actes  par  an  et  à  les 
laisser  jouir  de  son  répertoire. 

:p*4  En  annonçant  le  mariage  de  M.  Raphaël  Félix  avec  Mlle  Hen- 
riette Bloch,  plusieurs  journaux  ajoutent  que  le  célèbre  imprésario,  qui 
vient  d'obtenir  une  si  grande  réussite  à  Londres  avec  les  représentations 
delà  Grande  Duchesse,  prend  la  direction  du  théâtre  de  la  Porfe-Saint- 
Martin.  Le  16  juillet,  il  a  effectivement  signé  avec  les  propriétaires  de 
la  salle  un  bail  de  20  ans. 

^*^  Après  un  mois  pendant  lequel  il  a  chanté,  au  grand  enthou- 
siasme de  ses  compatriotes,  tout  son  gai  répertoire  au  théâtre  des 
Célesiins,  à  Lyon,  Berthelier  est  de  retour  à  Paris,  oit  il  va  se  mettre 
à    la    disposition  du    directeur  des  Bouffes- Parisiens. 

^*^  L'Africaine  vient  d'être  chantée  pour  la  première  fois  à  Troyes. 
Les  journaux  et  les  correspondances  s'accordent  à  reconnaître  que  jamais 
dans  c«tte  ville,  aussi  belle  représentation  n'avait  été  donnée  avec  un 
personnel  d'artistes  aussi  satisfaisant,  avec  une  exécution  aussi  réussie, 
des  décors  aussi  beaux,  une  mise  en  scène  aussi  soignée.  Le  public  a 
fréquemment  témoignépar  ses  bis  et  ses  applaudissements  de  l'admiration 
que  lui  inspirait  le  dernier  chef-d'œuvre  du  maître.  Mlle  Bedora  a  été 
une  Sélika  convenable.  M.  Faivret,  dans  le  rôle  de  Vasco,  a  mérité  les 
honneurs  du  rappel.  Mme  Goury  (Inès)  a  eu  de  très-beaux  moments. 
Les  faveurs  du  public  n'ont  pas  manqué  à  M.  Benaben  (Nélusko),  chan- 
teur et  comédien  excellent.  11  n'est  pas  jusqu'aux  rôles  effacés  de  don 
Pedro  et  de  l'inquisiteur  qui  n'aient  trouvé  dans  JIM.  Feitlinger  et  Larose 
des  interprèles  satisfaisants.  Les  chœurs  ont  bien  marché  et  Porchestre, 
dans  la  mesure  de  ses  moyens,  a  fait  de  son  mieux. 

^*.j.  Le  théâtre  Alberto-^îota,  à  Turin,  vient  d'être  détruit  par  un  in- 
cendie qui  a  éclaté  le  12  juillet,  à  dix  heures  du  soir.  On  jouait  Cris- 
pino  e  la  Comare.  Le  feu  prit  aux  vêtements  d'une  danseuse,  et  se 
communiqua  bientôt  aux  coulisses  et  à  la  charpente,  tout  entière  en 
bois.  Heureusement  la  foule  put  s'écouler  à  temps  et  sans  accidents  ;  la 
danseuse,  cause  première  du  désastre,  en  a  été  quitte  pour  la  peur. 
On  n'a  rien  pu  sauver;  les  murs  seuls  restent  debout.  Du  reste  la  recons- 
truction de  ce  théâtre  avait  été  décidée  pour  l'année  prochaine  par  la 
municipalité. 


DE  fAlUS 


231 


NOUVELLES  DIVERSES. 

**»  Du  procès-verhal  de  classement  des  Sociétés  chorales  et  instru- 
mentales inscrites  au  Concours  musical  de  Grenoble,  —  document  dont 
nous  recevons  communication  par  M.  le  maire  de  cette  ville,  —  il  ré- 
sulte que  90  Orphéons,  2-i  Musiques  d'harmonie,  108  Fanfares  (7,000 
exécutants  environ)  entreront  en  lice  le  '16  août  prochain,  pour  se  dis- 
puter des  prix  d'une  valeur  exceptionnelle.  Les  jurys  seront  déflnitive- 
ment  composés,  en  outre  d'artistes  et  ^mateurs  de  la  localité  et  de  Lyon, 
de  MM.  Ambroise  Thomas,  Gounod,  François  Bazin,  Victor  Massé,  Boïel- 
dieu,  Laurent  de  Rillé,  Delaporte,  Couder,  Besozzi,  Monestier,  E.  Bou- 
langer, Mathieu  de  Monter,  pour  les  Sociétés  chorales;  et  de  MM.  El- 
wart,  jonas,  Paiilus,  Thibaut,  Klosé,  Cokken,  Dauverné,  Sain-d'Arod, 
de  Groot,  Marie,  pour  les  musiques.  Un  grand  Festival  suivra  ces  con- 
cours auxquels  prendront  part  les  meilleures  Sociétés  de  Lyon,  Marseille, 
Avignon,  Chambéry,  Saint-Etienne,  Béziers,  Vienne,  Valence,  etc.,  et 
de  toute  la  région.  Les  chœurs  et  les  morceaux  imposés  sont  de  IIM. 
Gounod,  Ambroise  Thomas,  Laurent  de  Rillé,  Boïeldieu,  Besozzi,  J.  Mo- 
nestier, Paulus,  Klosé,  Thibaut  et  Jonas.  M.  Joseph  Luigini  dirigera  une 
armée  de  S,000  instrumentistes,  à  la  tête  de  laquelle  marchera  la  célè- 
bre Fanfare  lyonnaise.  Le  comité  d'organisation  a  pris  toutes  les  me- 
sures propres  à  assurer  l'éclat  et  l'ordre  de  ces  fêtes  qui  intéressent  vi- 
vement l'opinion  publique  dans  le  Dauphiné  et  qui,  à  en  juger  par 
l'empressement  sympathique  des  populations  et  des  sociétés ,  seront  les 
«  Grands  Jours  »  artistiques  de  cette  loyale  et  vaillante  province.    ■ 

»*„:  Dimanche  dernier  iVogent-sur-Marne  était  en  fête  ;  on  y  a  exécuté 
la  quatrième  messe  solennelle  de  M.  A.  Bessems.  L'auteur  conduisait 
lui-même  son  œuvre. 

,s*:f  Mlle  Adelina  Patti,  l'éblouissante  artistedu  théâtre  Italien,  vient  de 
fournir  à  M.  Guy  de  Charnacé  le  sujet  de  son  premier  chapitre  des 
Etoiles  du  chant,  un  livre  de  haute  critique,  somptueusement  édité  par 
M.  Henri  Pion.  La  première  livraison  de  cet  ouvrage  est,  en  efftt.  con- 
sacrée tout  entière  à  la  biographie  et  à  l'appréciation  du  talent  de 
Mlle  Patti;  elle  est  enrichie  d'un  portrait  gravé  sur  acier  par  M.  Morse, 
un  véritable  chef-d'œuvre,  et  d'un  autographe  de  la  diva.  —  Voici  le 
texte  de  ce  charmant  billet  adressé  à  M.  de  Charnacé  : 
0  Cher  Monsieur, 

i>  Vous  me  demandez  l'autorisation  de  publier  mon  portrait,  gravé 
par  M.  Mor,-e,  dont  j'apprécie  le  talent  charmant,  dans  votre  livre  les 
Etoiles  du  chant,  qui  doit  aussi  contenir  ma  biographie. 

»  Sachant  bien  que  vous  ferez  là  un  acte  de  pénitence,  et  ne  voulant 
pas  nuire  au  salut  de  votre  âme,  je  suis  heureuse  de  vous  donner  l'au- 
torisation que  vous  désirez. 

»  Recevez,  je  vous  prie,  Monsieur,  l'assurance  de  mes  sentiments  les 
plus  distingués. 

Paris,  le  i"  mai  1868.  Adelina  Patti.  » 

:{;**  Notre  excellent  confrère  Achille  Denis  reprend  la  rédaction  en 
chef  du  Messager  des  Théâtres,  qu'il  avait  occupée  dans  l'origine,  et  quit- 
tée pour  celle  de  la  Reuue  et  Gazelle  des  Théâtres.— 'É.  Jules  Ruelle  y 
continue  sa  collaboration.  Tout  est  bien  qui  finit  bien. 

:t*:jf:  La  librairie  Victor  Mas.son  et  fils  vient  de  faire  paraître  un  intéres- 
sant ouvrage  sous  le  litre  de;  Théorie  phyiiologique  de  la  Musique,  fondée 
sur  l'Hudc  des  scnsatiuns  auditives,  par  le  professeur  Helmollz,  traduit 
de  l'allemand  par  M.  Guéroult,  avec  le  concouis,  pour  la  partie  musicale, 
de  M.  Woltf,  de  la  maison  Pleyel-Wolff. 

^*^  M.  Godirey,  l'auteur  de  la  valse  les  Gardes  de  la  Reine,  vient  d'en 
couiposer  une  nouvelle  intitulée  la  Bouquetière;  le  succès  de  cette  valse 
en  Angleterre  a  été  très-grand.  Elle  est  publiée  et  mise  en  vente,  à 
Paris,  chez  l'éditeur  F.  Lambert,   41,  rue  du  Cardlnal-Fesch. 

,^*,  On  a  retrouvé  dans  le  musée  Fitz-'WillIam,  à  Cambridge,  le  cahier 
de  musique  pour  le  virginal  (espèce  d'épinette)  qui  était  à  l'usage  de  la 
reine  Elisabeth  d'Angleterre.  L'état  où  il  est  prouve  que  les  biographes 
de  cette  princesse  ont  probablement  tort  en  vantant  son  talent  sur  cet 
instrument.  Toutes  les  pages  où  sont  des  passages  un  peu  difficiles  sont 
comme  neuves  ;  mais  là  où  se  trouvent  des  morceaux  pour  les  com- 
mençants, les  cornes  et  autres  signes  d'un  fréquent  usage  témoignent 
que  la  reine  s'en  tenait  à  ces  mélodies  toutes  sin.plcs. 

**„  Un  nouveau  jouinal  de  musique  vient  de  paraîtie  à  Turin;  il  a 
pour  titre  //  Nvooo  Pirata,  et  pour  directeurs  MM.  Piacenza  et  Zapcgni, 
ex-rédacteurs  de  l'ancien  Pirata,  qui  vient  de  changer  de  propriétaire 
pour  la  cinquième  ou  sixième  fols  depuis  trois  ans. 

^*,f  M.  Engel,  le  directeur  du  célèbre  établissement  Kroll  de  Berlin, 
est  en  ce  moment  à  Paris. 

^,*.^  Une  cantatrice  qui  faisait  partie  de  la  troupe  italienne  du  théâtre 
de  Cadix,  la  saison  dernière,  Mme  Turoni,  et  qui  chantait  à  côté  de 
Mlle  Lagrua  les  rôles  de  soprano-sfogato  avec  beaucoup  de  succès,  est  en 
ce  moment  à  Paris. 

*%  Une  charmante  cantatrice  américaine,  Mlle  A.  Hauck,  qui  a  fait 
partie  des  troupes  italiennes  de  New-'lfork,  Boston,  Philadelphie,  etc.,  et 


qui  y  chantait  les  rôles  de  la  Sonnambula,  de  Lucla,  Giuliclla,  etc.,  vient 
aus4  d'arriver  à  Paris. 

.K*»  Arban  part  le  28  pour  accomplir  divers  engagements  qu'il  a  con- 
tractés à  Amsterdam,  à  Spa  et  à  Bade;  avant  de  ([ultier  Paris  il  a  tout 
préparé  pour  l'ouverture,  le  2  octobre,  des  concerts  Valentino  qu'il  doit 
diriger. 

.*„,  Pauline  Lucca  est  en  ce  moment  à  Interlaken  avec  son  mari,  le 
baron  do  Rahden . 

.  ^,*^  Mme  Anna  de  Lagrange  est  de  retour  en  France.  Nous  avons 
mentionné  les  succès  remportés  par  elle  dans  son  excursion  en  Améri- 
que. 

***  On  nous  écrit  de  Douai  qu'il  vient  d'y  être  donné  un  grand  concert 
pour  lequel  on  s'était  assuré  le  concours  de  Mlle  Schroeder  et  de  Troy, 
Sivori  et  Bottesini.  Les  quatre  artistes  y  ont  produit  un  effet  indescrip- 
tible. 

***  La  messe  solennelle  de  notre  ami  et  collaborateur  François 
Schwab,  exécutée  cet  hiver  à  Saint-Eustache  et  dont  nous  avons  rendu 
compte,  vient  d'être  chantée  avec  un  succès  égal  à  Strasbourg,  en  l'église 
Saint-Jean.  Cette  œuvre  sérieuse,  interprétée  déjà  sur  plusieurs  points  de 
l'Allemagne,  provoque  partout  de  légitimes  éloges  et  vaut  à  son  auteur 
les  sympathies  les  plus  honorables. 

i^*^  Mme  la  baronne  Nathaniel  de  Rothschild,  musicienne  de  premier 
ordre,  vient  d'envoyer  au  pianiste-compositeur  Michel  Bergson  une  très- 
belle  épingle  en  diamants,  avec  une  lettre  de  félicitalion  sur  ses  re- 
marquables études  caractéristiques  approuvées  par  les  Conservatoires  de 
Paris,  de  Berlin  et  de  Genève  et  sur  ses  dernières  pièces  de  salon. 

*%  M.Viennet,  de  l'Académie  française  et  grand-maître  du  rite  écossais 
franc-maçonnique,  est  mort  cette  semaine,  au  val  Saint-Germain,  dans 
sa  quatre-vingt-onzième  année.  Doyen  des  écrivains  français,  doué  d'une 
verve  plus  vigoureuse  qu'originale,  adversaire  acharné  du  romantisme, 
il  avait  été  dans  sa  longue  carrière  tour  à  tour  militaire,  marin,  poëte, 
journaliste,  auteur  dramatique,  député  et  pair  de  France.  Ses  obsèques 
ont  eu  lieu,  mardi  dernier,  au  milieu  d'un  grand  concours  d'artistes  et 
de  littérateurs.  Entre  autres  œuvres  destinées  à  la  scène,  M.  Viennetavait 
écrit  deux  opéras  qui  ne  furent  pas  représentés:  le  Tournoi  et  un 
Sardanapale  dont  Rossini  avait  promis  de  composer  la  musique.  11 
avait  en  outre  composé  en  1820  un  autre  opéra,  Aspasie  et  Périclés.' 


ÉTRANGER 

^%  Londres. —  Dans  une  semaine  à  Drury-Lane,  dans  deux  à  Covent- 
Garden,  la  saison  aura  atteint  son  terme. — Après  une  courte  indisposi- 
tion qui  l'a  empêchée  de  chanter  Rigoletto,  jeudi,  Adelina  Patti  a  reparu 
dans  Romeo  avec  son  succès  habituel  ;  elle  répète  le  Domino  riero,  qu'elle 
doit  chanter  deux  fois  de  suite,  le  21  et  le  22. — Le  23,  dernière  repré- 
sentation de  la  saison  à  Covent-Garden,  avec  II  Barbiere.  —  Il  Flauto 
magico,  annoncé  pour  samedi  18  juillet  à  Drury-Lane,  n'a  pas  encore 
été  représenté  cette  année. —  M.  Mapleson  adonné  mercredi  dernier  un 
grand  concert  à  son  bénéfice  au  Crystal-Palace.  Mlles  Niisson,  Tîetjens, 
Kellogg,  Sinico;  MM.  Mongiui,  Betliui,  Santley,  Foll,  lui  prêtaient  leur 
concours. 

***  Cologne.  —  La  première  nouveauté  de  cet  été  sera  la  Grande-Du- 
chesse de  Gérolstein  avec  Mlle  Fischer,  de  Vienne.  —  Notre  Conservatoire 
est  sur  le  point  de  faire  une  perle  sérieuse.  A  dater  de  septembre 
prochain,  Mme  Marche.si,  qui  professait  depuis  sept  ans  avec  tant  de 
distinction  à  Cologne,  va,  sur  la  flatteuse  invitalion  qui  lui  en  a  été 
adressée,  reprendre  son  ancienne  position  de  premier  professeur  de 
chant  au  Conservatoire  de  Vienne.  Son  mari  continuera,  mais  seule- 
ment jusqu'au  mois  d'avril  18(i9,  ses  fonctions  de  professeur  de  chant 
au  Conservatoire  do  Cologne.— C'est  Mme  Marcliesi  qui  vient  d'être  char- 
gée rie  l'éducaiion  musicale  d'une  jeune  et  belle  Hongroise,  découverte 
par  l'Imprésario  Uhn:mn  et  qui  posséderait,  dit-on,  une  voix  magnifique 
et  d'étonnantes  dispositions. 

^*^  Munich.  —On  monte  le  Ruy-Blas  de  Max  Zenger,  qui  vient  d'être 
donné  avec  succès  à  Mannheim.  La  première  représentation  est  annoncée 
pour  le  19  juillet. 

,j'*  Saint- l'étersbourg.  —  Il  est  question  de  confier  la  haute  direction 
des  théâtres  impériaux  au  comte  Sollohoub.  On  applaudit  généralement 
à  ce  choix;  le  comte  Sollolioub,  musicien  et  écrivain  distingué,  paraît 
appelé  à  rendre  à  l'art  de  sérieux  services. 

,1,*,^  Constantinople.  —  La  troupe  engagée  pour  la  prochaine  saison  au 
théâtre  Nauni  .se  compose  de  :  Mines  Perclli,  Bo.sisio,  Paolina  Vaneri  (so- 
prani),  Olga  Olgini  (contralto);  MM.  Valentino  Cristiani,  Vidal,  Vanlzan 
(ténors),  Sterbini  (baryton), Miller,  (basse-taille). 


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REVUE 


26  Juillet  1868. 


PRIX    DE    L'ABONNEMENT: 

Paria î<   r,  par  an 

Dûportenients,  Belgique  et  Suisse...,    30  »       id. 

Étranger 34  «      id. 

Le  Journal  parait  le  Dimanche. 


GAZETTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


SOMMAIRE.  —  Conservatoire  impérial  de  musique  et  de  déclamation  :  con- 
cours publics,  par  Charles  Bannelier.  —  Bibliographie  musicale  :  Mi- 
sères d'un  prix  de  Rome,  de  M.  Albéric  Second,  par  Em.  Mathieu  de 
Uonter.  —  Correspondaiices  :  Vichy  et  Londres.  —  Revue  dea  tliiSâtres, 
par  S>.  A.  D.  Saint-V^es.  —  Nouvelles  des  théâtres  lyriques.  —  Nou- 
velles diverses.  —  Annonces. 


CONSERVATOIRE  mPÉBIÂI  DE  MSIQUE  ET  DE  DËGUMTION. 

Concours  publics. 

A  en  juger  par  les  résultats  dont  nous  avons  pu  être  témoin 
pendant  cette  laborieuse  semaine,  les  neuf  mois  d'études  réglemen- 
taires qui  viennent  de  s'écouler  auront  ajouté  à  l'histoire  artistique 
du  Conservatoire  une  année  scolaire  honnête,  riche  surtout  en  ta- 
lents de  second  ordre.  Nous  n'en  faisons  pas  li,  certes  !  car  ils 
sont  aussi  nécessaires  dans  le  royaume  d'Euterpe  que  la  bourgeoisie 
dans  un  Etat.  Point  de  succès  éclatants  ;  point  de  sujets  d'un  mé- 
rite transcendant,  si  ce  n'est  peut-être  au  concours  de  violon  ; 
mais  un  bon  nombre  de  solides  musiciens  qui  vont  grossir  l'in- 
nombrable armée  des  virtuoses  formés  par  notre  Ecole  de  musique, 
et  dont  l'esprit,  nous  sommes  heureu.K  de  le  constater,  s'élève  de 
jour  en  jour.  Ceci,  il  est  vrai,  ne  s'applique  guère  aux  chanteurs, 
qui  brillent  en  général  par  d'autres  qualités;  il  ne  faut  point, 
d'ailleurs,  leur  en  faire  un  reproche,  obligé  qu'on  est  de  tenir 
compte  avant  tout  d'un  instrument  naturel  dont  l'e.xistence  ne  se 
révèle  souvent  que  fort  tard  et  indépendamment  de  toute  aptitude 
artistique. 

M.  Auber  avait  décidé  d'attaquer  le  taureau  par  les  cornes, 
comme  dans  la  mémorable  séance  si  humoristiquement  racontée 
par  Berlioz;  ce  qui  signifie  qu'on  a  commencé  lundi  par  le  con- 
cours de  piano.  Treize  jeunes  gens  et  trente-deux  jeunes  filles  se 
disputaient  les  récompenses  que  leur  a  réparties  un  jury  com- 
posé de  MM.  Auber,  président;  Ambroise  Thomas,  Benoist,  Batiste, 
Jules  Colien,  Lacombe,  Ed.  Mangin,  Fr.  Planté  et  Stamaty.  Parmi 
les  hommes,  qui  avaient  à  exécuter  le  premier  solo  du  concerto 
en  la  mineur  de  Herz,  les  lauréats  ont  été  :  MM.  Bonnet,  élève  de 
M.    Marmontel,  premier  prix  ;  Auzende,  élève  de  M.  Mathias,  se- 


cond prix;  Bourgeois,  élève  de  M.  Marmontel,  premier  accessit  ; 
Thoraé,  élève  du  même,  deuxième  accessit,  et  Artaud,  élève  du 
même,  troisième  accessit. 

M.  Bonnet  s'est  distingué  par  un  jeu  égal,  ferme  et  brillant 
et  par  la  facilite  élégante  avec  laquelle  il  fait  les  octaves  ;  i\l.  Au- 
zende, par  une  sobriété  de  bon  goût,  et  en  général  par  les  qua- 
lités d'un  excellent  musicien;  M.  Bourgeois,  par  un  très-joH  son 
et  une  charmante  attaque  de  la  touche.  La  classe  de  M.  Mathias 
a  cette  année  une  revanche  à  prendre  ;  elle  n'a  évidemment  pas 
compris  la  musique  de  Henri  Herz  de  la  même  manière  que  sa 
riyale.  —  Le  nombre  des  jeunes  filles  admises  à  concourir  prend 
des  proportions  inquiétantes  ;  il  était  le  même  qu'aujourd'hui  lors- 
qu'il y  avait  quatre  classes  ;  les  trois  actuellement  existantes  ont 
dû  fournir  la  totalité  de  leurs  élèves,  car  trente-six  concurrentes 
avaient  été  d'abord  annoncées,  et  quatre  se  sont  retirées  pour 
divers  motifs.  Comment  donc  ne  pas  donner  plusieurs  prix,  plu- 
sieurs accessits,  alors  surtout  que  ces  intéressantes  artistes  jouent 
presque  toutes  de  la  même  manière,  c'est-à-dire  aussi  bien  ; 
alors  que  la  faculté  d'assimilation,  très-dcveloppée  à  ce  qu'il  pa- 
raît dans  les  organisations  féminines,  en  fait  autant  d'excellentes 
copistes  reproduisant  toutes  également  bien  le  modèle,  c'est-à-dire 
la  leçon  du  professeur?  Aussi  comptons-nous  trois  premiers  prix, 
adjugés  à  Mlles  Doumergue,  élève  de  Mme  .  Farrenc,  Gaillard, 
élève  de  M.  Le  Couppey,  et  Ferrari,  élève  de  M.  Henri  Herz,  qui, 
promet  une  véritable  artiste;  trois  seconds  prix,  à  Mlles  Léon, 
de  la  Hautière,  élèves  de  M.  Le  Couppey,  et  Janin,  élève  de 
M.  Henri  Herz  ;  deux  premiers  accessits,  à  Mlles  Boulât,  élève  de 
M.  Le  Couppey,  qui  a  fait  preuve  d'une  grande  habileté  de  lec- 
ture en  transposant  de  mi  bémol  en  ut  le  morceau  à  déchiffrer, 
et  Le  Callo,  élève  de  M.  Henri  Herz  ;  trois  seconds  accessits ,  à 
Mlles  Barbetti  élève  de  M.  Henri  Herz,  Bel  val,  élève  de  M.  Le  Coup- 
pey, et  de  Massas,  élève  de  Mme  Farrenc;  trois  troisièmes  ac- 
cessits, à  Mlle  Rachel  van  Lier,  élève  de  M.  Henri  Herz,  toute 
jeune  enfant  dont  les  lecteurs  de  la  Gazette  musicale  se  sou- 
viennent certainement,  et  qui  a  vraiment  joué  d'une  façon 
charmante,  —  Mlles  Maurion,  élève  de  M.  Le  Couppey,  et  Mau- 
rice, élève  de  Mme  Farrenc.  Total,  quatorze  nominations. 
'  —  Le  morceau  de  concours  était  le  premier  solo  du  concerto 
en   mi  mineur  de  Chopin;    il    a    été,    comme  d'habitude,    plus 


!;KVL:K  El'  GAZETTE  MUSICALE 


ou  moins  défiguré  par  les  additions  et  les  changements  que  se 
sont  permis  la  plupart  des  élèves  ;  non-seulement  des  traits, 
mais  la  mélodie,  l'harmonie  même,  ont  été  dénaturés  ;  cette 
manie  déplorable,  à  laquelle  les  professeurs  ont  grand  tort  de 
prêter  la  main,  est  aussi  en  grande  faveur  dans  les  classes  des 
hommes;  l'un  des  concurrents  du  matin  l'a  même  poussée 
si  loin,  de  son  autorité  privée,  que  ses  malencontreuses  fioritures 
et  ses  octaves  trop  ambitieuses  ont  excité  l'hilarité  de  la'galerie, 
et  plus  tard  le  mécontentement  très-accentué  de  son  maître. 

Les  concours  de  violon  et  de  violoncelle  ont  eu  lieu  mercredi; 
MM.  Auber,  Benoist,  George  Haiul,  Dauverné,  Eug.  Gautier,  La- 
bro,  Deldevez,  Eru.  Altès  et  Lasserre  formaient  le  jury.  Quatorze 
violoncellistes  se  sont  succédé  devant  cet  aréopage,  dont  la  déci- 
sion n'a  pas  été  sans  soulever  quelques  murmures;  après  un  pre- 
mier pt'ix  bieu  gagné  par  M.  de  Miretzky,  élève  de  M.  Franchomme, 
on  eût  voulu  en  voir  accorder  un  second  à  M.  Barbot,  1"  accessit  de 
i866;  c'est  le  très-jeune  M.  Gros,  également  élève  de  M.  Franchomme, 
qui  l'a  emporté.  La  prétention  de  se  substituer  à  un  jury  d'hom- 
mes spéciaux,  est,  nous  le  savons,  d'assez  mauvais  goûtj  mais  nous 
ne  pouvons  nous  empêcher  de  représenter  à  celui  du  concours  de 
violoncelle,  avec  tout  le  respect  possible,  le  danger  de  céder  à  la 
tentation,  si  fréquente  au  Conservatoire,  de  faire  mûrir  trop  vite 
les  talents  précoces  ,  et  l'avantage  qu'il  y  aurait  eu  pour  un  en- 
fant de  onze  ans  et  demi  à  conquérir  ses  grades  l'un  après  l'autre, 
de  sorte  que  chaque  concours  apportât  sou  encouragement,  et  que 
le  premier  prix  n'eût  son  tour  qu'Ji  l'âge  où.  l'écolier  peut  cesser 
de  l'être  pour  devenir  artiste.  Sous  le  bénéfice  de  cette  observation, 
reconnaissons  que  le  jeune  Gros  a  fort  gentiment  joué  le  concerto 
en  ré  de  Romberg,  et  qu'il  a  éveillé  de  nombreuses  sympathies 
dans  l'auditoire.  Les  autres  lauréats  sont  :  MM.  Harndorff,  élève 
de  M.  Chevillard,  1"  accessit;  Spitzer,  élève  de  M.  Franchomme, 
2°  accessit,  et  Austruy,  élève  du  même,  3*=  accessit. 

L'intérêt  qu'excite  généralement  le  concours  de  violon  n'a  pas 
faibh  cette  année.  Un  brillant  i"  prix,  parfaitement  prévu,  a  été 
remporté  par  M.  Franz  Ries,  élève  de  M.  Massart,  qui  l'a  partagé 
avec  le  jeune  Heymann,  élève  de  M.  Alard.  Déjà-  compositeur  d'un 
A'éritable  talent,  musicien  à  toute  épreuve,  M.  Ries  doit  aux  ex- 
cellents conseil  d'un  maître  dévoué  d'avoir  perfectionné  un  talent 
qu'on  aurait  pu  considérer  comme  déjà  formé  avant  son  entrée  au 
Conservatoire.  Nous  entendrons  certainement  parler  de  ce  jeune 
homme,  comme  virtuose  ou  comme  compositeur  ;  il  ne  saurait,  du 
reste,  après  de  tels  débuts,  déroger  à  de  glorieuses  traditions  de 
famille.  Ce  n'est  pas  sans  quelque  égoïste  satisfaction  que  nous 
voyons  l'Allemagne,  qui  nous  est  supérieure  à  tant  d'égards,  rendre 
de  temps  à  autre  hommage  à  notre  école  instrumentale,  à  notre 
école  de  violon  surtout,  en  envoyant  l'élite  de  sa  jeunesse  y  corri- 
ger ce  que  son  enseignement  à  elle  a  de  trop  exclusivement 
rationnel. 

Deux  seconds  prix  ont  été  donnés  à  MM.  Palatin,  élève  de 
M.  Alard,  et  Hérold  (de  Berlin),  élève  de  M.  Massart;  deux  pre- 
miers accessits  à  MM.  Luigini,  élève  de  M.  Massart,  et  Wenner, 
élève  de  M.  Dancla;  deux  seconds  accessits  à  MI.  Fridrich,  élève  de 
M.  Sauzay,  et  Chollet,  élève  de  M.  Massart;  trois  troisièmes  accessits 
à  MM.  Lubinski,  élève  de  M.  Massart,  Samary,  élève  de  M.  Alard, 
et  Jouet  de  Lanciduais,  élève  du  même.  —  Les  concurrents  étaient 
au  nombre  de  28.  Le  morceau  choisi  était  le  concerto  de  Habeneck 
en  mi.  C'est,  nous  dit-on,  un  hommage  que  M.  Auber  a  voulu 
rendre,  une  fois  au  moins,  à  la  mémoire  du  célèbre  chef  d'or- 
chestre ;  à  cela  nous  n'avons  rien  à  dire,  mais  il  ne  nous  déplairait 
pas,  ni  à  personne,  croyons-nous,  de  voir  de  temps  en  temps  fi- 
gurer les  noms  des  vivants  à  côté  de  la  pléiade  classique,  ultra- 
classique, dont  les  chefs-d'œuvre  servent  à  montrer  dans  tout  leur 
jour  le  talent  des  élèves  ;  et  puisqu'on  admet  les  concerts  de  Herz, 


et  de  Franchomme,  qui.  Dieu  merci,  sont  encore  de  ce  monde, 
pourquoi  ne  pas  donner  droit  de  cité  à  ceux  de  Vieuxtemps,  par 
exemple,  dont  on  ne  contestera  pas  la  valeur  au  point  de  vue  aes 
idées,  du  style  et  du  mécanisme,  et  qui  auraient  l'avantage  d'écar- 
ter d'emblée  un  bon  tiers  des  concurrents? 

Le  concours  de  chant  a  été  ce  qu'il  est  tous  les  ans.  Il  a  mis 
en  lumière  deux  ou  trois  voix  fraîches  et  belles,  d'autres,  en  grand 
nombre,  surmenées  ou  ingrates.  Qu'on  prenne  garde  au  'Verdi  à 
outrance!  Dix-neuf  hommes  ont  pris  part  à  ce  concours,  dont  les 
juges  étaient  MM.  Auber,  Ambroise  Thomas,  Benoist,  Victor  Massé, 
Pasdeloup,  Eug.  Gautier,  Achard,Léo  Delibes  et  Wekerlin.  MM.  Au- 
béry,  élève  de  M.  Vauthrot,  et  Solon,  élève  de  M.  Battaille,  se 
sont  partagé  le  l"  prix.  Ces  deux  jeunes  gens  savent  chanter;  la 
voix  de  M.  Aubéry  n'a  rien  de  bien  remarquable,  mais  il  s'en  sert 
avec  beaucoup  d'art  et  en  véritable  musicien;  c'est  d'ailleurs,  on 
ne  l'ignore  pas,  un  excellent  violoniste.  M.  Solon  possède  une  jo- 
lie basse  chantante,  dont  il  tire  un  très-bon  parti  ;  il  vocalise  sur- 
tout avec  une  grande  pureté.  M.  Nicot,  charmant  ténor  léger,  élève 
de  M.  Révial,  a  obtenu  le  2'=  prix;  MM.  Rocton,  élève  de  M.  Bat- 
taille,  et  Bacquié,  élève  de  M.  Grosset,  le  I"  accessit;  MM.  Der- 
rey  et  Auger,  élèves  de  M.  Masset,  le  2^  accessit;  et  MM.  Rives, 
élève  de  M.  Grosset,  et  Idrac,  élève  de  M.  Révial,  le  3°  accessit. 
En  somme,  assez  bon  concours;  les  voix  blanches  sont  en  moindre 
quantité,  on  semble  soigner  davantage  l'émission.  —  Les  élèves 
femmes  ont  été  assez  médiocres;  sur  trente-deux  concurrentes,  le 
jury  n'a  pas  trouvé  à  décerner  un  seul  1"  prix.  En  revanche,  il  a 
libéralement  accordé  cinq  2"'  prix  à  Mlles  Bartkowska,  élève  de 
M.  Révial;  de  Lausnay,  élève  de  -M.  Laget;  Moisset,  élève  de 
M.  Masset;  Gilbert,  élève  de  M.  Vauthrot,  et  Guilllot,  élève  de 
M.  Masset;  trois  1"»  accessits  à  Mlles  Polliart,  élève  de  M.  Délie 
Sedie,  Mineur,  élève  do  M.  Bax ,  et  Brunel,  élève  de  M.  Laget; 
deux  2"  accessits  à  Mlles  Laville  et  Perez,  élèves  de  M.  Laget;  et 
six  3"  accessits  à  Mlles  Bernard,  élève  de  M.  Battaille  ;  Gavet,  élève 
de  M.  Vauthrot;  Caillou  et  Lieder,  élèves  de  M.  Battaille;  Pfeil, 
élève  de  M.  Masset;  et  Labrunie,  élève  de  M.  Vauthrot. 

L'opéra-comique  a  pris  la  journée  de  jeudi.  MM.  Auber,  Arthur 
de  Beauplan,  Amb.  Thomas,  de  Saint-Georges,  de  Leuven,  Bazin, 
Jules  Cohen,  Ravina  et  Wekerlin  composaient  le  jury.  Sur  sept 
concurrents,  5DI.  Aubéry,  élève  de  M.  Couderc ,  et  Nicot, 
élève  de  M.  Mocker,  se  sont  partagé  le  I"  prix;  ils  ont  fait 
preuve,  le  premier  surtout,  d'un  bon  sentiment  scénique.  M.  Nicot 
a  un  défaut  de  prononciation  qui  lui  nuira  beaucoup.  Un  2°  prix 
a  été  donné  à  M.  Bacquié,  élève  de  M.  Mocker;  un  1"  accessit  à 
M.  Victor,  élève  du  même;  un  2<'  à  M.  Idrac,  élève  de  M.  Couderc; 
et  un  3''  à  M.  Wagner,  élève  du  même.  —  Les  récompenses  ont  été 
distribuées  de  la  manière  suivante  aux  femmes,  qui  avaient  con- 
couru au  nombre  de  onze  :  1"  prix,  Mlles  Bloisset  et  Guillot,  élèves 
de  M.  Mocker;  pas  de  2^  prix;  l"  accessit,  Mies  Nondin,  Berdet  et 
Gavet,  élèves  de  M.  Couderc.  Rien  de  bien  remarquable  dans  ce 
concours. 

Vendredi,  c'était  le  tour  de  la  tragédie  et  de  la  comédie.  En 
voici  le  résultat,  que  nous  consignons  ici  sans  commentaire,  pour 
cause  d'incompétence  : 

Jury:  MM.  Auber,  président,  Camille  Doucet,  Ernest  Legouvé, 
de  Saint-Georges,  Léon  Laya,  Arthur  de  Beauplan,  Albéric 
Second,  de  Chilly  et  Berton. 

TRAGÉDIE. 

Hommes.  Pas  de  premier  prix.  —  2^  prix:  M.  Dugaril,  élève 
de  M.  Régnier.  —  1"  accessit  :  M.  Mazoudier,  élève  de  M.  Mon- 
rose;  et  M.  Mounet,  élève  de  M.  Bressant.  —  2'=  accessit  :  M.  Jou- 
mard,  élève  de  M.  Régnier. 

Femmes.   Pas    de  premier  prix.  —  2°  prix  :    Mlle   Héricourt, 


m  PAïus. 


235 


élève  de  M.  Beauvallet;  et   Mlle  Dclmary,  élève    de  M.  iiégnier. 
—  i"  accessit:  Mlle  Paturel,  élève  de  M.  Moiirosc. 

COMÉDIE. 

//oiMwes.  Pas  de  premier  prix.  —  2' prix:  M.  Mounet,  élève 
de  M.  Bressant;  et  M.  Vois,  élève  de  M.  Régnier.  —  I"''»  acces- 
sits :  M.  Uugaril,  élève  de  M.  Régnier;  et  M.  Mazoudier,  élève  de 
M.  Monrose.  —  2°'  accessits  :  M.  Fraisier,  élève  de  M.  Dressant; 
et  M.  Jûurnard,  élève  de  M.  Régnier.  —  3"  accessit  :  M.  Laro- 
che, élève  de  M.  Monrose 

Femmes.  1'"'  prix:  ,Mlle  Reichcmberg,  élève  de  M.  Régnier.  — 
2"  prix  :  Mlle  Tlioler,  élève  de  M.  Régnier  ;  Mlle  Colas,  élève  de 
M.  Beauvallet;  et  Mlle  Thomas  i'",  élève  de  M.  Brossant.  — 
1"  accessit  :  Mlle  Croizelte,  élève  de  M.  Dressant;  et  Mlle  Le- 
grand,  élève  de  M.  Dressant.  —  2'=  accessit  :  Mlle  Chapuy,  élève 
de  M.  Régnier. 

Chaules  DANNELIER. 


On  nous  communique,  au  moment  de  mettre  sous  presie,  la  liste 
du  jury  et  des  lauréats  du  concours  d'opéra,  qui  a  eu  lieu  hier 
samedi  ; 

Jury  :  MM.  Auber,  Arthur  de  Beauplan,  Amb.  Thomas,  Emile 
Perrin ,  de  Saint-Georges ,  Gevaert,  George  Hainl ,  Victor  Massé 
et  Pasdeloup. 

Hommes.  Pas  de  premier  prix.  —  Second  prix  :  MM.  Aubéry  et 
Nicot,  élèves  de  M.  Duvernoy.  —  Premier  accessit  :  MM.  Rives  et 
Bacquié,  élèves  du  même.  — Deuxième  accessit  :  M.  Etchetto, 
élève  du  même.  —  Troisième  accessit  :  M.  Derry,  é\h\e,  de  M.  Le- 
vasseur. 

Femmes.  Pas  de  premier  ni  de  second  prix.  —  Premier  acces- 
sit: Mlles  Laville,  élève  de  M.  Levasseur,  et  Pitteri,  élève  de  M.  Du- 
vernoy, —  Second  accessit  :  Mlle  de  Gray,  élève  de  M.  Duvernoy, 

C.  B. 


BIBLIOGRAPHIE  MUSICALE. 

MISÈRES  D'UN   PRIX  DE  ROME, 

Par  ALBÉRIG  SECOND. 

Vous  souvient-il  d'un  mélodrame  antique,  —  on  \i  jouait  parmi 
les  ruines  du  boulevard  du  Temple,  —  de  celte  pièce  fianche- 
ment  populaire  dans  laquelle  un  «  gentilhomme,  »  de  déveines 
eu  malchances,  devenu  naturellement  égouttier  (et  il  y  avait  de 
la  musique  là  dessus  !)  tenait  au  public  à  peu  près  ce  langage  : 
«  Il  m'arrivo  parfois  de  rencontrer  d'anciennes  maîtresses.  Lors- 
qu'elles me  voient  en  cotte  bleue  en  bottes  fortes,  armé  du  ra- 
cloir  municipal,  les  unes  se  mettent  à  rire;  les  autres  détournent 
la  tète  et  quoique  chose  comme  une  larme  brille  sous  leurs  pau- 
pières. Lesquelles  ont  raison?  Celles  qui  rient,  ou  bien  celles  qui 
pleurent?  » 

Eh  bien,  telle  est  à  peu  près  aussi  l'impression,  la  moralité,  si 
l'on  veut,  qui  se  dégage  du  volume  de  M.  Albéric  Second  :  Mi- 
sères d'un  prix  de  Rome.  Etant  données  les  conditions  d'existence 
de  ces  surnuméraires  du  génie  lyrique,  la  situation  faite  par  les 
règlements  à  ces  apprentis  de  la  Gloire,  faut-il  en  prendre  philo- 
sophiquement son  parti?  Faut-il,  au  contraire,  déplorer  l'état  de 
choses  actuel? 

M.  Albéric  Second,  esprit  facile  et  de  bonne  humeur,  chroni- 
queur fort  au  courant  des  choses  de  la  musique  et  du  théâtre,  a 
groupé,  dans  une  historiette  qui  détruit  la  valeur  même  de  sa  cri- 
tique,  toutes    les    objections    formulées,    depuis    qu'elle     existe. 


contre  l'Ecole  française  de  Rome  ;  mais ,  en  homme  ha- 
bile et  qui  craint  de  se  compromettre,  il  s'est  bien  gardé  de  con- 
clure et  de  donner  son  avis.  11  y  a  là  de  charmants  détails,  de 
eui'ieux  épisodes,  des  portraits  vivants  et  des  incidents  vècus\  il  y 
a  de  piquants  hors-d'œuvre,  de  l'esprit  et  encore  de  l'esprit,  cela 
va  sans  le  dire.  D'où  vient  donc  que  plus  M.  Albéric  Second  raille 
et  moins  on  a  envie  de  se  moquer  et  de  rire  avec  lui?  Pourquoi 
son  ironie  satisfaite  paraît-elle,  à  la  longue,  presque  cruelle? 
Comment  s'ex|)liquer  ce  singulier  manque  d'équilibre  et  de  pro- 
portions entre  le  sujet  et  la  manière  dont  il  est  traité?  Qui  donc 
a-t-oii  voulu  tromper  ici,  avec  une  verve  à  la  fois  si  superlicielle 
et  si  impitoyable?  D'après  l'étiquette,  il  s'agit  d'un  prix  de  Jiome, 
et  l'on  se  trouve  devant  un  «  bohème  »  vulgaire,  qui  n'est  même 
pas  arrière  petit-cousin  du  neveu  de  Rameau,  et  dont  la  confes- 
sion, à  la  fois  sincère  et  d'un...  réalisme  peu  édifiant,  se  résume 
ainsi  : 

«  .l'ai  vu  le  jour  dans  l'arrière-boutique  d'un  boulanger  de  la  rue 
Montmartre.  Je  m'appelle  Godiveau  (Orphée)  et  je  dois  ce  prénom 
saugrenu  à  mon  parrain  Favillet,  deuxième  premier  violon  solo  à 
l'orchestre  du  théâtre  des  Variétés.  C'est  ce  bonhomme  sec  et  ner- 
veux qni  a  décidé  de  mon  avenir,  un  soir  de  Noël  qu'il  s'était 
grisé  consciencieusement.  Dans  l'âge  de  musique  qui  est  le  nôtre, 
maintenant  «  qu'on  installe  au  Panthéon,  à  la  place  de  Voltaire 
et  de  Rousseau,  un  baryton  et  un  pianiste,  »  je  ne  pouvais  être 
que  musicien,  et  je  le  devins  bien  malgré  moi.  Orphelin  à  dix  ans, 
je  fus  recueilli  et  élevé  par  mon  parrain  dans  sa  mansarde  du 
boulevard.  Vous  comprenez  bien  que  travailler  du  matin  au  soir 
le  solfège  de  Rodolphe, la  méthode  de  Viguerie,  les  sonates  de  Dussek, 
de  Gélinek  et  de  Clémenti  ne  m'amusait  guère,  mais  j'avais  si 
grand'peur  de  certaine  cravache  en  permanence  à  côté  du  piano, 
et  si  grand  plaisir  lorsque  je  pouvais  voir,  assis  à  côté  de  mon 
parrain,  à  son  pupitre  du  théâtre,  les  jambes  des  actrices!  Ché- 
rubin! m'admit  au  Conservatoire  :  c'était  un  grossier  personnage 
qui  ne  savait  que  jeter  les  gens  par  la  fenêtre  et  bégayer  cke,  che, 
che.  Mon  premier  professeur  fut  Krakermann,  vous  savez  bien,  le 
célèbre  Krakermann,  qui  avait  fini  par  convaincre  le  public  qu'il 
était  le  professeur-né  de  tous  les  pianistes  connus  et  inconnus. 
Après  avoir  successivement  traversé  les  classes  de  fugue,  de  com- 
position et  d'harmonie,  j'ai  été  jugé  digne  enfin  d'entrer  en  loges, 
de  réchauffer  des  soi:s  de  ma  musique  une  cantate  tout  bonnement 
idiote,  et  l'on  m'a  envoyé  àPiome.  J'aurais  été  une  simple  brute  de  m'y 
fatiguer  à  fau'e  quoi  que  ce  soit.  Logé,  nourri  et  appointé,  je  trouvais 
bien  plus  naturel  de  passer  mes  joui-nées  devant  les  petits  guéridons 
de  bois  du  calé  Greco  et  mes  soirées  près  d'une  foule  de  Marianna, 
d'Elvira,  de  Vincenza  et  autres  signeras.  J'avais  la  jeunesse 
alors,  cette  (leur  sitôt  fanée,  ce  parfum,  ce  rayon,  etc.,  (confidence 
cherchée  ou  regret  involontaire,  c'est  la  seule  trace  d'émotion  que 
je  trouve  en  ces  singuliers  mémoires).  Je  revins  à  Paris,  après  deux 
ans  de  fur  niente.  A  moi  le  succès,  la  fortune,  la  gloire,  les 
amours!  Je  m'installe  à  crédit  dans  un  coquet  petit  appartement. 
Je  fréquente  les  théâtres,  avare  d'éloges,  prodigue  d'épigrammes, 
prétentieux,  suffisant,  cinglant  de  ce  mot  :  «  Nous  autres  en 
Italie!...  »  tout  ce  qui  me  semble  de  taille  à  rétrécir  mon  horizon. 
Je  continue  à  avoir  beaucoup  de  maîtresses  et  à  ne  rien  faire.  Un 
beau  matin  et  de  mon  ton  le  plus  impertinent,  je  vais  proposer 
à  un  directeur  de  théâtre  de  faire  sa  fortune  :  il  n'a,  pour 
cela,  qu'à  me  commander  un  ouvrage  en  cinq  actes.  Croirait- 
on  que  ce  pleutre  a  l'audace  de  me  berner  après  que  je  me  suis 
livré,  moi,  rien  que  pour  l'approcher,  à  toutes  sortes  de  bassesses? 
Si  je  pouvais  faire  exécuter  ma  symphonie  orientale,  le  Chameau, 
demain  je  serais  célèbre,  mais  on  ne  persuadera  jamais  au  directeur 
de  la  Société  des  concerts  qu'un  Parisien  soit  capable  de  composer 
une  symphonie  et  qu'il  soit  permis  au  peuple  français  d'instrumen- 


236 


Ki:VUE  El  GAZETTE  MUSICALE 


ter  autre  chose  que  des  quadrilles.  Reste  la  ressource  des  éditeurs, 
parce  qu'enfin  j'ai  du  génie,  mais  que  voulez-vous  faire  avec  des 
gens  qui  vous  répondent  ;  «  Vous  êtes  un  homme  de  génie,  je 
n'en  doute  pas;  mais  à  présent  tout  le  monde  a  du  génie.  Ils  sont 
^à-bas  dans  mon  magasin  une  soixantaine  qui  ont  tous  du  génie  ! 
Je  serais  encore  éditeur  dans  cent  trente  ans  que  je  n'aurais  pas 
iini  de  publier  toutes  les  œuvres  de  génie  dont  on  m'accable?  » 
C'est  alors  que  je  fondais  un  journal  lyrique,  dont  je  fus  le  rédac- 
teur en  chef  et  où  je  disais  de  ma  musique  tout  le  bien  que  j'en 
pensais.  Mon  bailleur  de  fonds  ayant  l'ait  augmenter  les  appointe- 
ments de  sa  danseuse  à  l'Opéra,  me  supprima  complètement  les 
miens,  et  je  dus  me  résoudre  à  donner  des^leçons.  J'avais); pour 
élève  une  riche  Américaine  :  je  n'eus  rien  de  plus  pressé  que  de 
lui  faire  la  cour  et  de  provoquer  son  frère.  Duel,  cour  d'assises. 
Il  s'ourdit  contre  moi  une  ligue  formidable  de  bourgeois  qui 
avaient  la  petitesse  de  redouter  les  relations  intimes  entre  jeunes 
filles  et  jeunes  professeurs.  Je  devais  succomber  :  je  succombai! 
Ah  I  quelle  est  rapide  la  pente  de  la  misère  !  et  qu'il  est  terrible 
le  vent  de  l'adversité!  Je  dépense  2,900  i'rancs  pour  un  concert  su- 
prême et  la  recelte  s'élève  à  40  francs.  Me  voilàbientôt  sans  ressources, 
sans  logement,  sans  pain,  moi  le  fils  d'un  boulanger!  Je  quitte 
Paris.  J'ai  été  musicien  nomade,  pensionnaire  d'un  saltimbanque, 
,chef  d'orchestre  d'une  troupe  ambulante,  que  sais-je?...  Aujourd'hui, 
je  donne  des  leçons  de  piano  et  de  solfège  à  CO  centimes  le  cachet, 
dans  une  ville  de  sixième  ordre,  je  chante  au  lutrin  et  je  m'habille 
comme  un  comique  du  Palais-Royal,  étant  le  professeur  attitré  de 
deux  pensionnats  de  demoiselles  d'où  les  jolis  garçons  sont  bannis 
rigoureusement.  J'ai  épousé  la  fille  d'un  bedeau  ;  j'ai  deux  enfants. 
De  l'aîné  je  ferai  un  tailleur,  du  cadet  un  cordonnier.  » 

Voilà  le  commencement,  le  milieu  et  surtout  la  fin  de  la  carrière 
des  (i  prix  de  Rome,  »  tels  que  les  connaît,  les  comprend  et  les 
raconte  M.  Albéric  Second.  Eh!  mon  Dieu!  Orphée  Godiveau  n'est 
pas  à  plaindre,  après  tout.  Paix  et  peu ,  il  a  ce  que  méritent  sa 
médiocrité,  sa  paresse  et  le  reste.  Ce  ne  sont  pas  toujours  les 
fautes  qui  nous  perdent,  c'est  la  manière  de  nous  conduire  après 
les  avoir  commises.  Dans  le  calme  et  l'oubli  de  son  village,  ce 
fruit  sec  de  la  réputation, — dans  quel  abandon  tombent  ceux  qui 
s'abandonnent  eux-mêmes  !  —  pourra  méditer  à  loisir  sur  les  ta- 
lents robustes  qui  résistent  au  succès,  après  avoir  résisté  à  la  misère. 
Peut-être  comprendra-t-il,  trop  tard,  hélas  !  la  force,  le  désinté- 
ressement glorieux  des  maîtres,  qui  après  avoir  longtemps  tra- 
vaillé, combattu  et  souffert,  sans  déroger,  sans  avilir  le  sentiment 
de  l'art,  travaillent  encore  et  triomphent  de  tout,  ayant  pour  idéal 
l'horreur  du  mensonge  et  la  passion  de  la  vérité. 

En"définitive,  Godiveau  n'est  ni  un  artiste,  ni  un  prix  de  Rome. 
Vous  avez  beau  l'affubler  du  prénom  d'Orphée,  parce  que  vous 
avez  voulu  en  faire  un  musicien,  pour  protester  à  votre  façon 
contre  les  encouragements  officiels  accordés  à  la  musique,  votre 
héros  n'est  qu'un  pauvre  sire  sans  talent,  sans  conviction,  sans 
vocation,  sans  honneur,  capable  de  tout  au  demeurant;  quanta 
être  fort  drôle,  je  ne  saurais  le  contester.  Mais  pourquoi  ne  pas 
conclure?  Pourquoi  laisser  le  lecteur  sur  une  impression  démora- 
lisante? Nous  ne  vivons,  nous  ne  finissons  pas  tous.  Dieu  merci! 
comme  cette  triste  exception  que  vous  nous  présentez.  Il  y  a 
encore  parmi  nous  des  caractères  qui  ne  relèvent  pas  de  la  for- 
tune. C'est  votre  droit  de  dévoiler  ces  hontes  et  ces  misères,  sans 
vous  départir  de  votre  joyeuse  humeur,  mais  c'était  votre  devoir 
de  réserver  un  mot  respectueux,  sympathique,  tout  au  moins, 
aux  âmes  pudiques  et  fières,  timides  et  hautes  qui  savent  mourir 
sans  s'abaisser.  A  côté  de  tant  d'esprit,  un  peu  de  cœur  eût  été 
de  mise.  A  ceux  qui  sont  arrivés,  aimés,  louanges  et  contents, 
il  sied  de  ne  point  chercher  à  décourager  ceux  qui  travaillent,  de 
ne  point  rire  des  malheureux,  des  faibles,    des  lâches  même  qui 


tombent  en  chemin.  Vous  aurez  beau  dire,  et  malgré  tous  les 
Godiveau  du  monde,  ces  artistes,  musiciens,  poëtes,  peintres,  scul- 
pteurs, ces  hommes  qui  osent  se  mesurer  avec  l'immortalité,  porter 
le  défi  au  temps,  une  partition,  un  livre,  une  toile,  une  statuette 
à  la  main,  penser  ou  chanter  tout  haut  devant  leur  siècle,  sont 
encore  les  plus  intrépides  de  tous  les  hommes,  et  si  on  ne  les 
admire  pas  toujours  pour  leur  talent,  il  faut  les  respecter  toujours 
pour  leur  courage.  Il  est  vrai  que  je  n'ai  pas  eu,  comme  M.  Al- 
béric Second,  le  bonheur  de  rencontrer  à  Royan  des  «  Orphée  Godi- 
veau »  et  de  leur  offrir  du  vin  de  Champagne  à  seule  fin  de  leur  dé- 
lier la  langue,  et  de  jeter  sur  leurs  misères  une  coquette  couverture 
aurore  et  rose!  Vous  ôtes-vous  reconnus,  ô  prix  de  Rome,  et  avez- 
vous  reconnu  l'un  des  vôtres  dans  le  pitre  qu'un  homme  d'esprit 
fait  ainsi  grimacer  devant  vous?...  Il  y  aurait  trop  à  dire  sur  ce 
sujet.  Je  m'arrête. . . 

Em.  Mathieu  DE  MONTER. 


CORRESPONDANCE. 

Vicktj,  le  U  juillet  1868. 

I.a  plus  grande  animation  règne  ici  en  ce  moment  ;  touslps  ))ôtels  regor- 
gent de  monde  et  depuis  sept  anspareillea  fïluence  de  baigneurs  ne  s'était 
produite  à  Vicliy.  La  chaleur  est  grande  comme  partout,  mais  des  ora- 
ges quotidiens  la  modèrent  dans  la  journée  et  la  rendent  suppurlable. 
Aussi  le  parc  otfre-t-il  le  coup  d'œil  le  plus  attrayant  ;  les  jolies  fem- 
mes y  sont  en  nombre  et  les  toilettes  fort  élégantes;  je  me  répéterais  en 
vous  disant  que  le  directeur  de  l'établissement,  M.  Arthur  Callou,  dé- 
ploie une  activité  et  une  sollicitude  rares  et  au-dessus  de  tout  éloge  dans 
l'organisation  et  la  variété  des  divertissements  qu'il  olïre  à  ses  hôtes. 
11  semblait  dès  cet  hiver  avoir  deviné  les  splendeurs  de  cet  été  excep- 
tionnel, et  de  nombreux  engagements  faits  d'avance  lui  ont  assuré  le 
concours  d'arllstcs  d'élite.  Je  ne  parierai  pas  des  comédiens  du  théâ- 
tre Français,  qui  ont  déjà  donné  plusieurs  représentations;  mais  je 
pourrai  vous  entretenir  de  auilUu  de  deux  belles  représentations  de 
Galatliéc,  dans  lesquelles  Mme  Ugalde  et  Mlle  Werlheimber,  qui  furent 
les  créatrices  des  deux  principaux  rôlus  de  l'opéra  de  Massé,  ont  été  écla- 
tantes comme  au  premier  jour.  La  salle  était  pleine  malgré  une  tempé- 
rature de  33  degrés,  et  l'air  de  la  Coupe  a  valu  à  Mme  Ugalde  des  bra- 
vos enthousiastes  et  des  bis  réitérés  à  la  suite  desquels  elle  a  dû  ré- 
péter le  second  couplet. 

Pour  tenir  son  engagement  ici,  Mme  Ugalde  a  dû  laisser  à  Clermont 
la  troupe  avec  laquelle  elle  exploite  si  fructueusement  la  Grande- Duchesse, 
mais  il  se  pourrait  fort  bien  qu'elle  vînt  dans  les  commencements 
d'août  l'aiie  connaître  aux  habitants  de  Vichy  le  chef-d'œuvre  d'Ofï'en- 
bach.  —  La  musique  du  kiosque  a  lieu  maintenant  trois  fois  par  jour, 
et  sans  vouloir  diminuer  en  aucune  façon  le  mérite  de  son  prédécesseur, 
je  dois  vous  dire  que  M.  Callou  a  eu  la  main  heureuse  en  confiant  la 
direction  de  l'orcliestre  à  M.  Accursi,  musicien  distingué;  ses  pro- 
grammes sont  choisis  avec  autant  de  goût  que  de  variété,  f'exécution  en 
est  excellente  et  l'on  peut  juger  du  pfaisir  qu'on  a  à  l'entendre  par  la 
foule  qu'il  attire. 

Une  soirée  musicale  intéressante  a  eu  lieu  vendredi  au  Casino.  M.  Schi- 
mon,  qui  fut  pendant  plusieurs  années  l'excellent  chef  du  chant  au 
Théâtre  italien,  que  vous  n'avez  pas  oublié,  y  faisait  entendre  un 
quatuor  et  un  trio,  pour  instruments  accordes  de  sa  composition.  —  Le 
quatuor  est  en  la  mineur  et  affecte  la  forme  classique,  quoique  les  idées 
mélodiques  appartiennent  plutôt  à  l'école  moderne.  Il  se  compose  de 
quatre  morceaux,  un  andante,  un  allegretto,  un  adagio  et  un  scherzo. 
L'auteur  l'avait  déjà  fait  exécuter  à  Florence,  etles  connaisseurs  l'avaient 
complimenté  sur  la  clarté  du  style  et  le  degré  d'intérêt  obtenu  par  les 
quatre  instruments  concertants.  —  Le  premier  morceau  nous  a  paru 
froid,  le  dessin  mélodique  y  est  indécis,  les  contrastes  font  défaut  et  la 
monotonie  s'ensuit.  L'adagio  est  très-développé,  un  peu  trop  peut-être, 
mais  il  y  règne  plus  de  vie  et  de  passion;  c'est  sans  C(jntredit  la  partie 
la  mieux  réussie.  Le  mouvement  donné  au  scherzo  nous  a  paru  trop 
lent  ;  il  devait  être  enlevé  agitato  et  offrir  l'entrain  ordinaire  qu'on  attend 
d'un  morceau  final.  —  Le  trio  pour  piano,  violon  et  violoncelle  est  en 
ré  mineur.  —  L'adagio  et  le  scherzo  en  ont  été  également  les  parties  les 
plus  goûtées.  Du  reste,  il  faut  dire  que  ces  deux  œuvres,  qui  ne  peuvent 
qu'ajouter  à  la  réputation  de  M.  Schimon,  se  sont,  à  notre  avis,  pro- 
duites dans  des  conditions  tout  à  fait  défavorables  à  ce  genre  de  compo- 
sitions. Elles  exigent  un  local  un  peu  restreint,  de  nombreuses  répétitions 
de  la  part  des  exécutants  et  du  recueillement  de  celle  des  auditeurs  ;  or 
ces  conditions  n'étaient  pas  précisément  celles  qu'offraient  le  vaste  salon 
du  Casino,  avec  ses  grandes  portes  ouvertes  sur  la  ferrasse,  deux  répéti- 
tions faites  à  la  hâte  et  un  public  nombreux  allant  et  venant  sans  cesse 


DE  PARIS. 


237 


pour  chercher  une  brise  rafraîchissante  et  causant  à  son  aise.  Aussi, 
malgré  le  talent  de  l'auteur  qui  tenait  le  piano,  de  M.  Accursi,  qui  avait 
pris  le  premier  violon,  et  de  M.  Van  der  Gucht,  violoncelliste,  le  quatuor 
et  le  trio  de  M.  Schimon  ne  pouvent-ils  être  jugés  sainement  sur  cette 
audition.  —  Mlle  Gonetti,  cantatrice  de  talent,  a  fourni  à  la  séance  un 
agréable  intermède  en  disant,  avec  un  très-bon  style  et  une  netleté  de 
prononciation  trop  négligée  aujourd'hui,  un  air  de  l'oratorio  Suzanne, 
de  Haendel. 

Maintenant,  si  je  mentionne  les  charmantes  soirées  artistiques  que 
M.  Callou  donne  dans  son  intimité,  qui  réunissent  les  notabilités  pré- 
sentes à  Vichy  et  oij  règne  la  plus  exquise  urbanité  unie  à  la  plus 
grande  cordialité  ;  si  je  vous  dis  que  dans  les  grands  hôtels  du  parc 
il  s'organise  des  bals  qui  ne  le  cèdent  pas  aux  plus  brillants  et  aux  plus 
gais  de  Paris  —  ce  dont  je  viens  d'être  à  même  de  juger  par  le  bal  de 
l'hôtel  des  Ambassadeurs  donné  hier  soir  —  vous  en  saurez  autant  que 
moi  sur  ce  célèbre  établissement  thermal,  et  vous  ne  plaindrez  pas 
trop  ceux  qui,  en  venant  y  chercher  la  guérison  de  leurs  maux,  peu- 
vent y  suivre  leurs  ordonnances  au  milieu  de  plaisirs  si  variés. 

S.  D. 


Londres,  22  juillet  4868. 

Mardi  dernier,  à  Covent-Garden,  le  Domino  Noir  d'Auber  a  été  repré- 
senté devant  une  salle  comble.  Immense  succès.  La  mise  en  scène  de 
Harris  est  fort  belle  et  les  décors  sont  superbes.  L'orchestre  de  Costa  a 
été  admirable.  La  chaleur  n'a  pas  entravé  l'enthousiasme  et  les  applau- 
dissements. L'ensemble  était  magnifique,  mais  les  artistes,  à  vrai  dire, 
ne  se  sont  pas  montrés  à  la  hauteur  de  leur  mission.  La  pièce  de  Scribe 
exige  des  acteurs  et  des  actrices  doués  d'esprit  et  de  délicatesse.  Nous 
n'avons  pu  entendre  lancer  le  mot,  dire  le  dialogue,  comme  cela  se  fait 
en  France.  Scribe  brille  d'épigrammes,  mais  même  quand  les  artistes 
savent  leurs  rôles  (et  certes  cela  n'avait  pas  lieu  mardi  passé  )  les  traits 
d'esprit  et  d'ironie  échappent  à  beaucoup  de  monde.  J'ajouterai  qu'en 
anglais  la  traduction  du  Domino  Noir  est  loin  d'être  bonne. 

Le  Domino  Noir,  représenté  pour  la  première  fois  à  Paris  le  2  décembre 
1837,  a  passé  le  détroit  en  d838.  Déjà,  le  12  février,  le  premier  arran- 
gement anglais,  par  feu  M.  Edouard  Lover,  était  entendu  à  Covent-Gar- 
den, dans  le  théâtre  qui  a  été  incendié  depuis.  Malheureusement,  le  rôle 
d'Horace  était  rempli  par  un  ténor  écossais,  M.  Wilson  (mort  en  Amé- 
rique), qui  prononçait  Ifs  paroles  avec  son  accent  national  ;  sa  méthode 
de  chant  était  de  la  même  école.  En  1838,  nos  orchestres  et  nos  chœurs 
n'étaient  pas  trop  forts  à  Londres. 

M.  Harrisson  et  Mlle  Louisa  Pyne  ont  tâché  de  faire  connaître  pour 
la  seconde  fois  les  beautés  étincelantes  du  Domino  noir,  à  Covent-Garden, 
le  20  février  1841,  avec  la  traduction  de  M.  Chorley.  Mais  à  côté  de  miss 
Louisa  Pyne,  qui  chantait  Angèle  parfaitement,  et  d'un  basso  buffo, 
M.  Corri,  qui  fit  fureur  dans  Gil  Perez,  tous  les  autres  rôles  étaient  fort 
mal  tenus  :  le  ténor  notamment  qui  faisait  Horace  était  absolument 
absurde.  M.  Gye  avait  eu  l'intention  d'assigner  Angèle  et  Horace  à  Pau- 
line Lucca  et  à  Mario.  Mais  Mme  la  baronne  de  Rahden  a  quitté  Covent- 
Garden  subitement  et  le  directeur  a  perdu  son  Angèle  n°  1.  Alors  c'est 
Adelina  Patti  qui  a  voulu  attaquer  le  rôle  ;  mais  Mme  la  marquise  de 
Caux  in  futuro  n'a  pas  pu  étudier  un  nouveau  personnage  avec  un  ma- 
riage qui  aura  lieu  le  28  courant,  à  l'ambassade  française,  suivi  d'un 
déjeuner  dont  M.  le  prince  de  la  Tour-d'Auvergiie  fera  les  honneurs. 
C'est  ainsi  que  M.  Gye  a  encore  perdu  son  Angèle  n"  2.  La  troisième  fois 
porte  bonheur,  quelquefois,  et  c'est  Mme  Lemmens  Sherrington  qui  a  éié 
î'Angèle  n°  3.  Tout  le  monde  .sait  qu'elle  est  bonne  musicienne.  Je  ne 
puis  pas,  toutefois,  m'as-ocier  à  la  description  d'Horace  en  affirmant  que 
Mme  Sherrington  «a  la  tournure  la  plus  élégante  et  une  grâce  délicieuse.  » 
De  temps  en  temps  elle  a  chanté  les  roulades  assez  bien,  mais  elle  n'était 
pas  en  pleine  possession  de  ses  moyens.  Quant  à  Naudin,  vous  le  con- 
naissez; quand  il  saura  mieux  son  rôle,  il  aura  peut-être  plus  d'anima- 
mation,  plus  de  chaleur.  Le  succès  le  plus  franc  a  été  pour  Ciampi 
(Gil-Perez).  On  a  voulu  lui  faire  répéter  trois  fois  le  Deo  Gralias,  mais 
il  n'a  pas  répondu  au  troisième  rappel.  Tagliafico  a  joué  lord  Elfort  avec 
le  flegme  et  l'humour  nécessaires  au  type  français  d'un  lord  anglais. 
Au  reste,  les  lords,  et  il  y  en  avait  beaucoup  dans  les  stalles,  ont 
accueilli  avec  bonhomie  leur  caricature.  Costa  a  apporté  beaucoup  de 
soin  à  l'orchestre  et  aux  chœurs.  Le  Domino  noir  aura  désormais  une 
place  permanente  dans  notre  répertoire  lyrique.  La  saison  prochaine, 
Patti  et  Mario  seront  I'Angèle  et  l'Horace,  et  alors  nous  verrons. 

Je  ne  vous  fais  pas  l'analyse  des  récitatifs  et  des  morceaux  ajoutés 
pour  l'arrangement  italien.  Quand  un  compositeur  se  nomme  Aubcr, 
il  appartient  tout  au  plus  à  un  critique  anglais,  amateur  enthousiaste  de 
votre  grand  maître,  comme  tout  notre  public,  en  général,  de  dire  que 
ce  travail  a  toujours  été  digne  du  compositeur  de  la  Muette  et  du  Do- 
mino noir.  C.  L.  Gruneisen.  » 


REVDE  DES  THEATRES. 

Gymnase  :  les  Maris  sont  esclaves,  comédie  en  trois  actes,  par 
M.  de  Léris  ;  les  Souliers  de  bal,  comédie  en  un  acte,  par  M.  Oc- 
tave Gastineau;  le  Mur  de  la  vie  privée,  comédie  en  un  acte,  par 
M.  X.  Y.  Z. —  Gaité  :  reprise  des  Fur/itifs,  drame  de  MM.  Ani- 
cet  Bourgeois  et  F.  Dugué. 

Parmi  les  théâtres  qui  tiennent  bon  contre  les  chaleurs  tropi- 
cales dont  nous  sommes  accablés,  et  cela  au  mépris  de  l'exemple  de 
fermeture  qui  leur  a  été  donné  par  la  Comédie-Française  elle-même, 
il  nous  faut  citer  le  Gymnase,  dont  le  zèle  se  manifeste  par  de  nom- 
breii?es  nouveautés  accouplées  deuxàdeux.  Peut-êtrecst-ce  un  calcul 
pour  désencombrer  les  cartons  afin  de  faire  place  nette  aux  favorisés 
de  [l'hiver!  En  tout  cas,  nous  pouvons  affimer  que  la  direction 
s'est  trompée,  au  moins  à  l'égard  d'une  de  ces  dernières  pièces  qui 
eût  été  digne  assurément  d'obtenir  un  sursis  de  quelques  mois. 
Nous  voulons  parler  de  la  comédie  de  M.  A.  de  Léris,  intitulée  : 
les  Maris  sont  esclaves.  Il  y  a  là  une  excellente  moralité,  présen- 
tée d'une  manière  ingénieuse  et  relevée  par  des  détails  spirituels, 
par  d'heureux  traits  d'observation  ;  avons-nous  besoin  de  dire  que 
ce  titre,  en  apparence  si  aflirmatif  n'est, -à  tout  prendre,  qu'une 
contre-vérité?  Edgard,  ennemi-né  du  mariage,  retrouve,  après  une 
longue  absence,  son  ami  Roger  en  puissance  de  femme,  et  il  n'a 
pas  assez  de  sarcasmes,  assez  de  quolibets  pour  accabler  ces  pau- 
vres maris  qui  aliènent  si  gaillardement  leur  liberté  au  profit  d'un 
tyran  en  jupons.  Roger  a  un  bon  caractère,  il  laisse  parler  son 
ami  Edgard  et  ne  l'en  presse  pas  moins  de  venir  prendre  sa  part 
des  plaisirs  du  foyer  domestique.  Mais  ici,  de  mystérieuses  diffi- 
cultés surgissent.  Edgard  a  toujours  quelques  objections  à  faire 
aux  avances  de  Roger;  il  est  contraint,  inquiet,  bizarre.  Bref,  on 
découvre,  par  des  bavardages  de  valets,  que  ce  célibataire,  si  fier 
de  son  indépendance,  est  tenu  en  charte  privée  par  une  maîtresse 
fort  exigeante,  qui  partage  son  domicile  et  qui  y  règne  en  souveraine 
absolue.  C'est  alors  que  Roger  prend  sa  revanche  des  plaisanteries 
de  son  ami  et  les  retourne  contre  lui.  Mais  au  fond  Edgard  lui 
inspire  plus  de  pitié  que  de  colère,  et  il  achève  de  se  venger  en 
le  débarrassant  de  sa  maîtresse  et  en  le  mariant  à  une  charmante 
petite  belle-sœur,  qu'il  tient  en  réserve  pour  compléter  la  cure. 

Cette  comédie  a  grandement  réussi,  et  le  nom  de  M.  de  Léris  a 
été  proclamé  au  milieu  des  applaudissements.  Elle  est  d'ailleurs 
très-bien  interprétée  par  Landrol,  Nertann,  Victorin,  ainsi  que  par 
Mlles  Angelo  et  Barataud. 

Les  Souliers  de  bal  n'ont  d'autre  valeur  que  celle  d'un  petit 
proverbe  à  deux  personnages,  qui  peut  se  jouer  dans  un  salon, 
entre  deux  paravents.  Suzanne,  une  jeune  et  jolie  veuve,  est  sur  le 
point  de  se  remarier,  et,  en  attendant  ce  grand  jour,  elle  renouvelle 
sa  maison.  On  lui  adresse  une  soubrette,  qu'elle  accepte  de  prime- 
aboi'd,  mais  dont  bientôt  les  étranges  allures  font  naître  ses  soup- 
çons et  sa  défiance.  Il  n'est  pas  naturel,  en  effet,  qu'une 
femme  de  cette  condition  ait  tant  d'esprit,  joue  si  bien  du  piano, 
et  explique  si  couramment  Shakspeare.  Une  lettre  vient  bientôt 
donner  à  Suzanne  le  mot  de  l'énigme.  Sa  soubrette  n'est  autre 
que  la  sœur  de  son  prétendu,  qui  a  voulu  la  connaître  et  l'appré- 
cier avant  de  lui  permettre  d'épouser  son  frère.  Suzanne,  pour 
toute  vengeance,  force  la  grande  dame  déguisée  à  se  mettre  à  ses 
pieds  pour  lui  essayer  des  souliers  de  bal,  après  quoi  l'on  s'ex- 
plique et  l'on  s'embrasse. 

Le  sort  de  ce  gentil  marivaudage  est  confié  à  Mme  Pasca  et  à 
Mlle  Massin,  qui  s'acquittent  à  merveille  de  leur  tâche. 

Nous  oublions  une  troisième  pièce,  qui  a  cependant  le  droit 
de  priorité  sur  les    deux  comédies  dont  nous  venons  de  rendre 


238 


iiEviii-:  i;t  r.AZi:ïTE  musicalf 


compte.  C'est  le  Mur  de  la  vie  prirée,  agréable  production  d'un 
anonyme,  qui  a  été  inspirée  par  la  loi  Guilhoutet.  Par  une  suppo- 
sition passablement  paradoxale,  cette  loi,  bien  loin  de  remplir  son 
but,  n'aurait  pour  résultat  que  de  protéger  tous  les  petits  scan- 
dales de  la  vie  privée,  qu'il  n'est  plus  permis  de  livrer  à  la  répro- 
bation publique.  Une  conséquence  fort  amusante  de  cette  donnée, 
c'est  l'aplomb  superbe  de  ce  domestique  qui  ne  souffre  aucune 
observation  de  la  part  de  son  maître,  sous  prétexte  qu'il  est  abrité, 
lui  aussi,  par  le  mur  de  la  vie  privée. 

—  Les  théâtres  de  drame  se  livrent  tous  à  des  reprises,  au 
nombre  desquelles  nous  signalerons  celle  des  Fugitifs,  qui  a  eu 
lieu  à  la  Gaîté,  et  qui  emprunte  une  certaine  importance  à  la 
façon  dont  elle  est  jouée  par  Paulin  Meinier,  par  Lacressonnière 
et  par  Mme  Marie  Laurent,  ainsi  qu'aux  deux  ballets  nouveaux 
qu'y  a  introduits  M.  Justamant. 

D.  A.  D.  SAINT-YVES. 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRÎQDES. 

**^  Le  Ihéiilre  impérial  de  l'Opéra  a  donné  lundi  et  vendredi  le  Trou- 
vère, et  mercredi  Herculanum. 

*%  Le  premier  et  si  décisif  succès  de  Mlle  Julia  Hisson  dans  le  Trou- 
vère s"  efit  mliàerncnt  conRrmé.  Plus  sûre  d'elle-même,  la  jeune  débu- 
tante a  pu  mettre  toute  la  beauté  et  toute  l'ampleur  de  sa  voix  au  ser- 
vice de  son  profond  sentiment  dramatique.  On  l'a  chaleureusement 
applaudie  à  plusieurs  reprises.  Elle  était,  du  resie,  parfaitement  secon- 
dée par  MUe^Bloch,  ainsi  que  par  Morèro,  Devoyod   ci  Caslelniary. 

,j%  A  rOpéra-Cnmique,  1rs  Drarjons  de  Villars,  Ilaydèe,  le  Domino  noir, 
Gatathée  et  le  Docteur  Mirobolan  continuent  à  braver  vaillamment  les 
chaleurs.  Ce  théâtre  n'aurait  pu  choisir  un  spectacle  d'été  plus  at- 
trayant. L'œuvre  d'Aimé  Maillart  a  été  représentée  trois  fois  cette  se- 
maine. 

^*^  Nous  pouvons  donner  comme  certaine  la  liste  suivante  des  engage- 
ments faits  par  M.  Bngier  pour  la  saison  prochaine  des  Italiens,  de  Paris: 
—  Prime  dorme  :  Mmes  Adelina  Patti,  Irma  de  .Mur^ka,  Grossi,  Krauss, 
Ricci,  Rosello,  Ernestina  Urban  (mime).  —  Ténors:  MM.  Tamberlick, 
Nicolini,  Fraschini,  Palermi,  Ubaldi.  —  Barytons:  M.M.  Dellc  Sedie, 
Verger,  Steller,  Agncsi.  —  Basses  :  MM.  Ciampi,  Zinielli,  Wallcnrcitcr, 
Mercuriali  et  Fallar. 

^'^'j^  La  Belle  Hélène  a  repris  sa  place  sur  l'afliehe  des  Variétés.  Mlle 
Taulin  v  remplit  le  rôle  principal  avec  talent  et  e-prit. 

s**  Après  des  débats  fort  intéressants,  mais  qu'il  nous  est  interdit  de 
reproduire,  le  chapitre  du  budget  relatif  aux  subventions  théâtrales  a 
été  voté,  mardi  dernier,  par  le  Corps  législatif.  La  subvention  du  théâtre 
Lyrique  se  trouve,  par  conséquent,  maintenue;  elle  s'élève  à  '100,000  fr. 
On  sait  que  la  subvention  accordée  à  l'Opéra  est,  avec  les  accessoires,  de 
1,200,000  francs  et  celle  de  l'Opéra-Comique  de  2i0,000  francs. 

,*^  Les  recettes  brutes  faites  pendant  le  mois  de  juin  dernier  dans 
les  théâtres  impériaux,  secondaires,  concerts,  etc.,  ont  été  de  821,049  fr. 

j,*^  Verdi  composerait,  dit-on,  sur  un  livret  de  Ghislanzoni,  un  nou- 
vel opéra  intitulé  :  Falstaff. 

,%  M.  Duprato  travaille  activement  à  la  partition  de  son  nouveropéra 
Griseldis,  poème  de  MM.  Sardou  et  du  Locle. 

„*„  M.  Husson,  directeur  du  Grand-Th('âtre  de  Marseille,  complète,  en  ] 
ce  moment,  sa  compagnie  lyrique.  Les  engagements  déjà  faits  et  les  ou- 
vrages annoncés  par  cet  habile  et  courageux  imprésario  laissent  espérer 
que  le  succès  de  ta  prochaine  campagne  le  dédommagera  des  difficultés 
et  des  sacrifices  de  la  précédente. 

^*,^  Le  théâtre  royal  de  la  Monnaie,  à  Bruxelles,  prépare  sa  réouver- 
ture pour  le  l"'  septembre.  Les  principaux  artistes  engagés  par  M.  Le- 
tellier  sont  :  Mlle  Lombia  (contralto);  Mmes  Sallard,  Marimon,  Marty, 
Dumestre  (premières  scprani)  ;  MM.  Massy,  Jourdan,  Barbot,  Tournade 
(ténors)  ;  Dumestre  et  Ch.  Lepers  (barytons);  Giraudet,  Jamet  et  Cha- 
puis  (basses  chantantes). 


NODVELLES  DIVERSES. 


t*3t  Le  mariage  de  Mlle  Adelina  Patti  avec  M.  de  Caux  est  définiti- 
vement arrêté.  Les  premières  publications  ont  eu  lieu  à  la  mairie  du 
!«''  arrondissement;  en  voici  la  teneur  :  «  M.  Louis-Sébastien-Hehri  de 


Roger  de  Calsuzac,  marquis  de  Caux,  fils  du  comte  et  de  demoiselle  Hu- 
guet  de  Vnrange,  actuellement  femme  du  duc  de  Valmy,  et  Mlle  Adèle- 
Jeanne-Mario  Patti,  propriétaire,  fille  de  M.  Salvatore  Patti  et  de  Cathe- 
rine Bhioza,  rentier,-;.  »  Le  mariage  légal  aura  lieu,  la  semaine  pro- 
chaine, à  l'ambassade  de  France  k  Londres.  Notre  ambassadeur,  M.  le 
prince  delà  Tour-d'Auvergne,  serait,  dit-on,  témoin  de  M.  de  Caux,  dont 
il  est  cousin.  Le  duc  et  la  duchesse  de  Valmy,  mère  et  boau-përo  du 
marquis  deCaux,  sont  partis  pour  Londres.  Le  prince  et  la  princes.se  de 
Galles,  ain.si  qu'un  gr;md  nombre  do  personnages  de  la  plus  haute  aris- 
tocratie anglaise,  ont  déjà  adressé  leurs  félicitations  à  Mlle  Patti  et  à 
M.  de  Caux,  qui  se  serait  montré  doublement  gentilhomme  par  son  dé- 
smtéressement  à  l'endroit  des  conditions  du  contrat.  On  s'est  beaucoup 
occupi!  ces  derniers  temps,  à  propos  de  cette  union,  d'une  question  d'é- 
tiquette de  cour  qui  ne  concerne  personnellement  que  M.  de  Caux, 
officiiT  d'ordonnance  de  l'Empereur.  Nous  rappellerons  à  ce  sujet 
qu'aux  termes  d'une  ordonnance  de  Louis  XIV,  en  date  du  mois  de 
mars  1672,  et  qui  n'a  été  ni  contredite  ni  abrogée  par  d'autres  disposi- 
tions royales  ou  législatives,  «  tous  gentilshommes  et  damoiselles  peuvent 
chanter  (sur  la  scène)  sans  que  pour  cela  ils  soient  censés  dérogera  leurs 
titres  de  noblesse  o  Au  surplus,  ce  qui  nous  fiiit  attacher  une  médiocre 
importance  à  cette  question,  c'est  que  Adelina  Patti  restera  à  la  musique, 
au  théâtre,  du  moins  tant  que  tous  ses  engagements  ne  seront  pas  rem- 
plis et  que  nous  l'applaudirons,  avant  trois    mois,  à  la  salle  Ventadour. 

a,*,^  MM.  le  docteui-  Guillaume  Stade,  maître  de  chapelle  de  la  cour 
de  Saxe-Alteudiourg  et  Charles  Riedel,  directeur  du  Riedel-'^'erein,  célèbre 
société  musicale  de  Leipzig,  ont  adressé  à  Hector  Berlioz  le  télégramme 
suivant  :  «  Nous  avons  l'honneur  de  vous  annoncer  que  votre  Symphonie 
fantastique  et  votre  Kequiem,  exécutés  tous  deux  ici  dans  leur  entier,  ont  eu 
le  succès  le  plus  éclatant  devant  un  auditoire  composé  de  musiciens  de 
tous  les  pays.  Au  nom  de  l'Allemagne,  de  l'Autriche,  de  la  France,  de 
la  Russie,  de  la  Hongrie,  de  la  Belgique,  de  la  Suisse,  de  l'Amérique, 
etc.,  nous  vous  exprimons  le  respect  et  la  vénération  profonde  que  vos 
œuvres  nous  inspirent.  »  Puissent  ces  témoignages  spontanés  et  chaleu- 
reux d'une  admiration  sincère  contribuer  à  apporter  quelque  soulage- 
ment aux  souHrances  de  l'illustre  maître! 

,j;*^  Vendredi  dernier,  le  procès  qu'intente  M.  Blaze  de  Bury  aux  hé- 
ritieis  de  Mcycrbeer  e.-t  venu  à  la  première  chambre  du  tribunal  civil 
de  la  Seine.  11  s'agit  d'un  drame  de  M.  Blaze  de  Bury,  la  Jeunesse  de 
Goethe,  pour  lequel  Meyerbeer  avait  composé,  quelque  temps  avant  sa 
mort,  un  intermède  mu.sical.  Nos  lecteurs  trouveront  des  ren.seignemonts 
précis  à  ce  sujet  dans  notre  numéro  du  9  février  de  cette  année.  L'af- 
faire a  été  remise  à  huitaine. 

)f*^  Mme  Strakosch,  née  Amalia  Patti,  dont  les  succès  de  cantatrice 
ont  éti!  nombreux  en  Amérique,  vient  d'arriver  au  Havre,  oIj  son  mari 
étiiit  allé  à  sa  rencontre.  Elle  va  se  rendre  à  Londres  pour  le  maringe 
de  sa  sœur,  et  se  fixer  ensuite  avec  sa  famille  à  Paris. 

^*^  Mlle  Marie  Lefébure-Wély,  l'une  des  filles  de  l'éminent  organiste 
de  Saint-Sulpice  et  piani.ste  distinguée  elle  même,  a  épousé  celte  se- 
maine M.  Ch.  Vide."oq,  ingénieur  civil  des  mines. 

,^**  De  tous  les  établissements  d'instruction  publique  de  Paris,  l'Insti- 
tution impériale  des  Jeunes  Aveugles  e-t  bien  certainement  l'un  de  ceux 
oîi  la  musique  est  le  plus  en  honneur,  et  où.  elle  est  cultivée,  enseignée 
avec  un  soin,  nous  p.ourrions  dire  avec  une  sollicitude,  qui  permet  aux 
élèves  de  trouver  dans  cet  art  une  ranière.  Nous  avons  déjà  eu  souvent 
l'occasion  de  dire  luut  lu  bien  que  nous  pensions  de  l'impulsion  féconde 
imprimée  à  l'enseignem'-nt  music  d  dans  cette  maison  et  d'en  constater 
les  heureux  résultats.  Dimanche  dernier,  il  nous  a  été  donné  de  pouvoir 
les  apprécier  de  nouveau.  Pendant  la  messe,  les  chœurs  ont  interprété, 
avec  un  ensemble  piirfait  et  un  l'emarquable  agencement  de  nuances, 
un  Introït,  un  Graduel  et  une  Communion,  au  caractère  imposant  et 
large,  de  M.  Roussel,  maître  de  chapelle  et  organiste  de  l'Institution;  un 
Gloria  e[  un  Ajjnus  de  M.  Gauthier,  un  U  Sulutaris  délicatement  ciselé 
par  iMlle  Hesselbeim,  professeur  d'harmonie  de  la  division  dos  femmes. 
Aux  vêpres,  nous  avons  été  charmés  par  la  belle  voix  de  Mlle  Mallard, 
jeune  élève  non-vuyante  qui  a  chanté  avec  le  plus  grand  style,  et  fort 
bien  accompagnée  par  la  clarinette  et  le  quatuor,  un  Aoe  Maria  de 
Clierubini  et  l'.-ly;  verum  de  Mozart.  Les  chœurs  étuient  dirigés  par 
M.  Roussel,  et  l'orgue  était  tenu  par  M.  Lebel,  l'excellent  orgauiste  de 
Saint-Étienne-rlu-Mont,  professeurs  des  plus  méritants  et  des  plus  dévoués 
de  rinsLilutiou.  Le>  fêtes  musicales  de  la  maison  des  Jeunes  Aveugles 
impressionnent  vivement  ceux  qui  y  assistent.  On  est  heureux  de  pen- 
S'  r  que,  grâce  à  de  nobles  efforts  et  à  de  patientes  études,  la  musique 
devient  pour  ces  pauvres  déshérités  de  la  nature  une  consolation,  une 
amie,  comme  une  lumière  intérieure  et  un  avenir! 

^*^,  Nous  sommes  en  retard  pour  parler  de  l'intéressant  concours  annuel 
de  musique  qui  a  eu  lieu  à  l'institution  si  renommée  de  Mlles  Méri- 
geaud  et  Barlas,  dont  maintes  fois  nous  avons  eu  occasion  de  constater 
la  supériorité  des  études.  Entre  autres  professeurs  émérites ,  M.  et  Mlle 
Delioux,  MM.  Kruger,  Masse  et  Hammer  y  ont  formé  et  fait  entendre  de 
fort  bonnes  élève.s,  parmi  lesquelles  nous  avons  surtout  remarqué  Mlles 
G.  Calderon,  R.  Aron ,  Bertout,  Davy,  Blum,  Gautrot,  Hoy  et  Alston  ; 
leur  talent  précoce  et  leur  bonne  méthode  méritent  d'être  -signalés.  Le 


DE  l'A  lus 


"239 


chœur  de  la  Fête  au  Lido  do  llaydée,  exoculc  d'une  iaçoii  trùs-satisfui- 
santc,  a  brillamment  terminé  cette  séance. 

^**  Mme  Oscar  Comettant,  dont  les  cours  de  chant  ont  si  brillam- 
ment réussi  h  Versailles,  réunissait  dimanche  dernier  les  élèves  de  son 
cours  élémentaire  :  une  vingtaine  de  filletles  pétries  de  roses  et  de  laii. 
Ce  petit  monde  a  dit  avec  beaucoup  de  charme  et  de  mesure  deux 
chœurs  à  Irois  parties,  dont  le  dernier  a  été  redemandé  par  le  public 
des  mères  et  des  papas  enthousiasmés.  Pour  le  reste  du  programme,  il 
a  été  rempli  de  la  plus  heureuse  manière  par  deux  premiers  prix  du 
Conservatoire  :  Mlle  Tayau,  violoniste,  et  M.  Antonin  Corbaz,  pianiste. 
Mme  Cumettant  a  chanté  deux  délicieux  morceaux  avec  son  succès  ac- 
coutumé. 

^*^  Nous  nous  empressons  de  reproduire  la  lettre  suivante,  qui  vient 
de  nous  être  adressée  par  M.  Philippe  H.  Herz  neveu  : 

1)  Je  vous  demande  la  permission  de  vous  rappeler  que  notre  maison 
est  la  seule  de  France  qui  ait  obtenu  la  médaille  d'or  à  l'Exposition  uni- 
verselle de  J8C7,  pour  la  fabrication  des  pianos. 

»  L'omission  do  iwtic  nom  dans  la  première  édition  du  catalogue  of- 
ficiel est  le  résultat  d'un  malentendu,  et  elle  va  être  réparée. 

»  Tous  nos  instruments  portent  la  reproduction  de  la  médaille  d'or, 
avec  la  mention  de  la  .'■éance  dans  laquelle  le  jury  international  nous  a 
décerné  cette  haute  récom[]ense.  » 

Nous  n'ajouterons  qu'un  mot  à  cette  lettre.  Pour  qu'une  maison  nou- 
velle, fondée  il  y  a  cinq  ans  à  peine,  obtienne  une  médaille  d'or,  c'est- 
à-dire  la  récompense  la  plus  significative,  la  première  fois  qu'elle  sou- 
met ses  instruments  à  l'appréciation  d'un  jury,  et  alors  qu'elle  a  pour 
concurrents  des  établissements  dont  l'existence  est  bien  plus  ancienne, 
il  faut  que  les  produits  de  cette  nouvelle  maison  aient  une  supério- 
rité éclatante,  incontestable.  C'est  ainsi,  du  reste,  que  le  jury  interna- 
tional a  jugé  les  pianos  de  M.  Philippe  H.  Herz  neveu:  son  vote  le 
prouve.  On  sait,  en  effet,  que  la  médaille  d'or  a  été  décornée  à  ce  jeune 
et  déjà  célèbre  facteur  à  la  majorité  de  14  voix  sur  15  membres  pré- 
sents. Nous  aurons  occasion  de  parler  dans  un  de  nos  prochains  numé- 
ros d'innovations  importantes  que  la  maison  Philippe  H.  Herz  neveu  et 
C^  introduit  en  ce  moment  dans  la  facture  de  ses  pianos. 

^%  Nous  extrayons  d'une  lettre  de  notre  collaborateur,  51.  Elwart,  le 
passage  suivant  :  o  La  statue  de  Lesueur,  à  l'inauguration  de  laquelle 
j'eus  l'honneur  de  prononcer  un  discours  au  nom  des  H.  Berlioz,  des 
Ambroise  Thonaas,  des  Gounod,  des  Xavier  Boisselot,  des  Eugène  Prévost, 
des  Paris  et  de  tous  ses  autres  élèves,  moins  illustres  peut-être,  mais 
non  moins  dévoués  à  sa  chère  mémoire,  a  étél'objet  d'un  pieux  pèlerinage 
de  ma  part  à  Abbeville.  Elle  a  été  érigée  sur  la  place  Saint-Pierre  de 
cette  ville.  C'est  une  belle  et  bonne  composition  due  au  ciseau  de 
M.  Louis  Rochet  et  fondue  eri  bronze  par  M.  Denis.  » 

^*t  Le  défaut  d'espace  nous  oblige  à  remettre  au  prochain  numéro  la 
publication  de  quelques  extraits  d'un  travail  fort  intéressant  que  M. 
Szarwady  vient  de  publier  dans  l'Indépendance  Belge,  sous  le  titre  de  : 
Lettre  allemande  sur  la  musique  fnnçaise. 

^**  Une  commission  vient  dese constituer  en  AllemagneàlVffet  de  recueillir 
des  souscriptions  pour  ériger  à  Leipzig  un  monument  à  la  mémoire  de 
Mendelssohn.  Cette  ville  fut,  en  effet,  la  patrie  adoptive  de  cegrandcomposi- 
teur.l'un  des  mieux  inspirés  et  desplus  sympathiques  de  notre  époque.  11  y 
a  été  aimé  et  honoré  pendant  la  période  la  plus  brillante  de  sa  carrière. 
Ce  fut  par  son  initiative  que  cette  ville  devint  l'un  des  principaux  centres 
d'activité  musicale  de  l'Allemagne;  ce  fut  sous  sa  direction  que  les  con- 
certs du  Gewandhaus  prirent  l'importance  qu'ils  ont  conservée.  Mendels- 
sohn est  mort  à  Leipzig  et  son  souvenir  y  est  resté  l'objet  d'un  culte 
public.  Bien  que  celte  dette  de  reconnaissance  et  de  patriotisme  soit 
allemande  avant  tout,  les  amateurs,  les  artistes  des  autres  pays,  d'Angle- 
terre, notamment,  où  Mendelssohn  a  fait  plusieurs  voyages  et  laissé  de 
vifs  souvenirs,  tiendront  certainement  à  honneur  de  contribuer  à  l'érec- 
tion de  la  statue  de  Leipzig. 

^**  M.  H.  Mendel,  de  Berlin,  l'auteur  de  la  biographie  d'Otto  Nicolaï, 
vient  de  mettre  la  dernière  main  à  celle  de  G.  Meyerbeer.  Ses  relations 
avec  l'auteur  des  Huguenots  et  son  talent  bien  connu  nous  promettent 
un  travail  intéressant. 

f:*^  Deux  curieux  automates  attribués  à  Vaucanson  et  remis  en  état 
par  Robert  Houdin,  une  Joueuse  de  tympanon  et  une  Mandoliniste,  figu- 
rent dans  les  galeries  de  notre  Conservatoire  des  Arts  et  Métiers. 

„,**  On  annonce  la  mort  :  de  M.  Jules  Bovery,  chef  d'orchestre  du 
théâtre  de  Cluny,  auteur  de  quelques  opérettes  et  pantomimes  représen- 
tées aux  Folies-Nouvelles;  —  de  Camille  Michel,  artiste  très- aimé  au 
boulevard,  compositeur  d'un  certain  talent,  habile  pianiste  qui  avait  ob- 
tenu un  premier  prix  de  piano  au  Conservatoire,  et  qui  avait  eu  plu- 
sieurs fois  des  succès  populaires;  —  du  poëte  irlandais  Samuel  Lover, 
le  dernier  des  bardes  :  il  aimait  à  chanter  lui-même  ses  mélodies,  dont 
la  grâce  semblait  alors  plus  séduisante  encore. 


ÉTRANGER 

**«  Londres.  —  Covent-Garden  est  fermé.  Jeudi  a  eu  lieu  kdornièi'e 
représentation,  au  bénéfice  d'Adelina  Patti.  Elle  se  composait  du  premier 
acte  de  liomeo,  du  troisième  de  Pauslo  et  du  second  de  la  Figlia  del 
regimento.  La  jeune  diva  a  été  acclamée,  rappelée,  accablée  de  bouquets. 

—  A  Drury-Lane,  les  extra-nights  ou  représentations  supplémentaires 
durent  depuis  le  li.  Il  Flauto  magico,  avec  Mlle  Nilsson  dans  le  rôle  de 
la  reine  do  la  nuit,  en  italien  yistrifiammante,  dont  elle  a  fait  une  si 
charmante  création,  a  été  donnée  le  18  et  le  23.  Samedi  prochain  la 
clôture  pour  le  bénéfice  de  Mlle  Tietjens. 

sf*:,,  Bruxelles.  —  Un  concert  monstre  a  été  donné  jeudi,  au  Champ  des 
Manœuvres,  pur  toutes  les  musiques  militaires  de  la  garnison,  sous  la 
direction  de  M.  'Valentin  Bender.  Le  programme  comprenait  la  marche 
du  Songe,  de  i\lendelssohn  ;  l'ouverture  de  l'Etoile  du  Nord ,  la  marche 
indienne  de  rAfricaine,  la  bénédiction  des  poignards  des  Huguenots,  etc. 

—  Un  Te  Deum  fort  remarquable,  de  M.  Joseph  Brzowski,  inspecteur  du 
Conservatoire  de  Varsovie,  a  été  exécuté  mardi  dans  l'église  des  SS.  Mi- 
chel et  Gudule,  à  l'occasion  de  l'anniversaire  de  l'inauguration  de  la 
dynastie  régnante. 

„;*„,  Baden-Baden,  —  Samedi  dernier,  le  cinquième  grand  concert  des 
Salons  de  la  Conversation  avait  attiré  un  public  nombreux  et  élégant. 
Mme  Carvalho  a  admirablement  chanté  un  air  A'Actèon.  Le  duo  des  A'oces 
de  Figaro,  dit  par  elle  avec  un  goût  exquis  et  par  Mlle  Schroeder,  a  été 
redemandé.  Cette  dernière,  que  l'on  entendait  ici  pour  la  première  fuis, 
a  fait  preuve  de  beaucoup  de  sentiment  joint  à  une  simplicité  délicieuse 
dans  le  grand  air  du  Freischutz.  On  l'a  très-chaleureusement  applaudie 
et  on  lui  a  offert  un  énorme  bouquet  composé  des  fleurs  les  plus  rares. 
Le  succès  du  violoncelliste  Nathan  a  été  très-franc.  Samedi,  23  juillet, 
sixième  concert.  Le  1='  août  commenceront  les  représentations  de  l'Opéra 
italien. 

.Je**  Hombourg.  —  Le  Théâtre-Italien  a  ouvert  le  18  juillet  par  la 
Fille  du  régiment  av(3C  Agnesi  et  Désirée  Artôt  ;  le  public  leur  a  fait  fête 
à  tous  deux,  mais  il  a  accueilli  Mlle  Artôt  avec  un  véritable  enthousiasme. 
La  célèbre  cantatrice  a  retrouve  ici,  une  fois  de  plus,  les  triomphes  et 
les  acclamations  qui  saluent  ses  débuts  sur  toutes  les  scènes  de  l'Europe. 
On  attend  pour  le  13  août  Adelina  Patti,  qui  commencera  ses  représenta- 
tions par  Marta. 

^*^  Ems.  —  Le  13  juillet,  a  été  donnée  au  Kursaal  une  représentation 
dramatique  dans  laquelle  on  avait  intercalé  une  jolie  opérette  d'Offen- 
bach,  le  Fifre  enchanté,  ou  le  Soldat  magicien.  Malgré  une  chaleur  tropi- 
cale, aucune  place  n'était  vide. 

ii*,Y,  Berlin.— Le  concours  pour  le  prix  de  composition  (fondation  Meyer- 
beer), a  été  ouvert  pour  la  deuxième  fois,  d'après  les  statuts,  le  1"  juillet. 
On  se  rappelle  que  l'illustre  maître  a  laissé  par  son  testament  une  somme 
dont  les  intérêts,  destinés  à  couvrir  les  frais  d'un  voyage  artistique, >ont  at- 
tribués au  lauréat  d'un  concours  qui  a  lieu  touslesdeux  ans.  —  La  Vie 
Parisienne  d'Oflfenbach  va  atteindre  sa  deux-centième  représentation  au 
théâtre  de  Friedrich-Wilhelmstad.  La  direction  fait  des  préparatifs  pour 
ce  jour-là,  et  Offenbach  s'est  engagé  à  écrire  un  prélude. 

^*^  Munich.  —  Les  Ueistersinger  ont  été  donnés  une  quatrième  fois, 
toujours  avec  succès.  On  va  monter  cet  opéra  à  Dresde,  avec  Tichatschek, 
Mlle  Hœnisch  et  M.  Degele. 

„,**  Vienne.  —  La  construction  du  nouvel  Opéra  est  fort  avancée.  La 
scène  pourra  être  livrée  au  directeur  le  1°"'  octobre,  et  le  reste  à  la  fin 
de  décembre.  L'inauguration  ne  pourra  guère  avoir  lieu  avant  le  milieu 
de  février  prochain.  —  Sontheim  a  remporté  un  magnifique  triomphe 
dans  l'Africaine  ;  il  a  chanté  Vasco  avec  l'intelligence  et  la  verve  qu'il 
apporte  dans  tous  ses  rôles,  et  a  provoqué  à  diverses  reprises  des  salves 
d'applaudissements. 

^'^^  Livourne.  —  Mlle  Linda  Caracciolo,  charmante  cantatrice,  élève 
de  Henri  Panofka,  a  obtenu  un  très-vif  succès  à  la  villa  des  époux 
Tiberini,  où  elle  s'est  fait  entendre.  Les  grandes  scènes  de  l'Italie  ne  lar- 
deront certainement  pas  à  attacher  à  leur  ciel  aujourd'hui  un  peu  nua- 
geux, celte  nouvelle  étoile  du  chant. 

»*:j  Barcelone.  —  Le  Domino  noir  a  suivi  sur  notre  scène  les  Dragons 
de  Villars  et  a  produit  un  effet  extraordinaire,  grâce  au  talent  et  à  l'en- 
semble des  interprètes.  Mlle  Dupuy  prête  sa  voix  étendue  et  flexible,  sa 
méthode  parfaite,  sa  remai'quable  facilité  aux  mélodies  et  aux  vocalises 
du  charmant  rôle  d'Angële.  MM.  Blum,  Trillet  et  Dubosc  (Gil-Pérez)  ont 
largement  contribué  au  succès  décisif  de  la  soirée  et  en  ont  été  chaude- 
ment récompensés. 


KKVUE  Kl    CA/KTIK  MUSiCAl.E  DE  l'AIllS. 


EN   VENTE 
CHEZ    G.    BRANDUS   ET    S.  DTTPOUR,   ÉDITEURS. 


103,    RUE    DE    RICHELIEU. 


ËTUDES  POUR  LE  PIANO 


Adam  père  [li.].  CINQUANTE  LEÇONS 
PRÉLIMINAIRES]  pour  les  petites 
mains,  cloigtées,extr.  de  sa  Méthode. .   15     » 

Alkan  (C.-V.).  Op.  31.  VINGT-CINQ  PRÉ- 
LUDES dans  tous  les  tons  majeurs  et 
mineurs  pour  piano  et  orgue,  3  suites, 
chaque 9    n 

—  Op. 05.  DOUZE  ÉTUDES  dans  tous  les 

tons  majeurs,  2  suites,  chaque.   ...  20    a 
Bach  (aean-JSébastien).  LE    CLAVECIN 
BIEN  TEMPÉRÉ  :  Préludes  et  fugues 
dans   tous    les    tons   majeurs  et  mi- 
neurs, soigneusement  doigtés,  2  suites, 

chaque 25     a 

Les  deux  suites  réunies &8    • 

Bériot  flls.  Op.   I.  ETUDE-CAPRICE..   .     9    » 

Blamenthal.  Exaltation,  étude 5    » 

Chopin  (F.) .  VINGT-QUATRE  PRÉLUDES, 

2  livres,  chaque 9    » 

—  Op.   10.     VINGT- QUATRE    ÉTUDES, 

1""'  livre 18    » 

—  Op.  15.  ÉTUDES,  2'  livre 18     » 

—  TROIS  ÉTUDES  extraites  de  la  Méthode 

des  méthodes 7  50 

—  Op.   45.   PRÉLUDE 6     « 

Clementl.  ETUDES  DES  GAMMES  JOUR- 
NALIÈRES. . 6    » 

—  PRÉLUDES  ET  EXERCICES  dans  tous 

les  tous,  2  livres,  chaque 9    » 

Cramer    (.»,-«.).    Op.    73.    VINGT-CINQ 

ÉTUDES  CARACTÉRISTIQUES.    .    .   )5     » 

—  Op.  100.  SOLFÈGE  DhS  DOIGTS,  nou- 

velle école  pratique  du  piano,  consis- 
tant en  cent  exemples  d'une  difficulté 
progressive  et  d'une  grande  variété  de 
formes,  servant  d'exercices  prépara- 
toires à  l'exécution  des  compositions 
modernes  et  des  grandes  études  de 
l'auteur 20    » 

—  Op.   10 ;.    Hommage  à  Mozart.  DOUZE 

GRANDES  ÉTUDES  MÉLODIQUES  . .  20     « 

—  ÉTUDES     EN     QUARANTE  -  DEUX 

EXERCICES,  2"  livre 18    a 

—  EXERCICE  JOURNALIER,  consistant  en 

gammes  dans  tous  les  tons,  en  exer- 
cices calculés  pour  donnei'  aux  mains 
la  position  convenable,  et  iervant 
d'introduction  aux  Études  de  dé- 
menti, Cramer.  Moschelès,  etc.  ...On 

—  ÉTUDES  DE  DÉLASSEMENT,  collection 

de  pièces  doigtées  et  classées  progres- 
sivement        ...  12    » 

Czcrn?  (Ch.).  ÉTUDKS  DES  ÉTUDES. 
Encyclopédie  des  passages  brillants 
tirés  des  œuvres  des  pianistes  célèbres, 
depuis  Scarlatti  jusqu'à  nos  jours, 
classés  par  ordre  chronologique, 
2  livres,  chaque 15    » 

—  Op.  139.  CENT  EXERCICES  doigtés  et 

très-gradués  pour  les  commençants, 

4  suites,  chaque 6    • 

—  Op.337.  EXERCICE  JOURNALIERpour 

atteindre  et  conserver  le  plus  haut 
degré  de  perfection,  consistant  en 
quarante  études 12    ii 

—  Op.  409.  CINQUANTE   ÉTUDES  SPÉ- 

CIALES, 2  suites,  chaque 20    » 

—  Op.  453.  CENT   DIX  EXERCICES  fa- 

ciles et  progressifs,  4  suites,  chaque.  10    d 
Les  quatre  suites  réunies 30    » 

—  Op.  599.  LE    PREMIER    MAITRE  DE 

PIANO,  cent  études  journalières  et 
progressives,  4  livres,  chaque.    ...     6    » 


Czerny  (Ch.  ),  LE  PARFAIT    PIANISTE, 

collection  complète  d'études  : 

l»' vol. Op.  599.  Le  Premier  Maitre  ie 
piano  ,  soixante -quinze  études 
journalières 12     i 

2"  —  Op.  748.  Le  Début,  vingt-cinq  étu- 
des pour  les  petite»  mains  ...  12     » 

3*  —  Op.  749.  Le  Progrès  ,  premiar  li- 
vre ,  vingt-cinq  études 12    » 

4'  —  Op.  750.  Le  Progrès,  2'liv.,  trente 

études 12    » 

0"  —  Op.  151.  Exercices  d'ensemble,  éta- 

des  à  quatre  maios 12    >> 

6"  —  Op.  699.  N"  1.    L'Art  de  délier  les 

doigts,  1"  livre,  vingt-cinq  études.  18    • 

7'  -    Op.  099.   N"  2.  L'Art  de  délier  les 

doiijt»,  2'  livre,  vingt-cinq  études.  18    » 

8'  —  Op.    755.      Le     l'erfeclionneiyient , 

vingt-cinq  études  caractéristiques.  24    " 

9"  —  Op.  756.    N'  1.    Ls  Style,  premier 

livre,  vingt-ci.'q  études  de  salon.  24    > 
10"  —  Op.  756.   N°  2.  Le  Sti/le,  deuxième 

livre,  vingt-cinq  études  de  salon.  24    » 

—  Op.  754.  SIX  É'I  UDES  ou  amusements 

de  salon  : 

1.  Etude 4  50 

2.  Toccata   .   .   .   .    ' 4  50 

3.  Tarentelle 4  50 

4.  Impromptu  &  l'écossaise 4  50 

5.  Romance 4  50 

6.  Impromptu  passionné 4  50 

Les  six  réunis  net 10    » 

—  Op.  77".  LES   CINQ    DOIGTS,    vingt- 

quatre  exercices  très-faciles,  sur  cinq 
notes,  dans  les  tous  les  plus  usités, 

2  suites,  chaque 6    » 

—  Op.  807.  HECTAMÉRON.  Cent   études 

nouvelles,  progressives  et  de  perfec- 
tionnement eu  10    livraisons  chaque.     9    » 

—  Op. 817. LE  JEUNE  ÉLÈVE, quatre-vingts 

morceaux  faciles  et  progicssifs  suivis 
d'études  journalières  dans  tous  les 
tons,  2  livres,  chaque 9     n 

—  Op.  818.    LA  VOLUBILITÉ,    cinquante 

études  en  2   suites,  chaque 12    u 

—  Op.  819.  LA  MÉLODIE,  vingt-huit  étu- 

des    mélodiques    et     harmoniques , 

3  suites,  chaque 9    » 

—  Op.  820.  QUATRE-VINGT-DIX  nouvelles 

études  jouriialièrcs  pour  perfectionner 
l'agilité  des  doigts 12    » 

—  Op.  821.  LES  HEURES  DU  MATIN,  cent 

soixante  exercices,  4  suites,  chaque  .  10    jj 
Uoehler    (Th.),    Op.     4i.    CINQUANTE 

ÉTUDES  DE  SALON,  2  livres  de   ■  me-  20    o 
sures,  3  suites  chaque 70     » 

—  Op.  45.  N°  1.  DEUX  ÉTUDES    compo- 

sées par  la    Méthodes  des  Méthodes.     7  50 

Les  mêmes  arrangées  à  4  mains  .   .     7  50 

Dreyschock.   Op.    4.    LE  TRÉMOLO.   .   .     5    « 

Cerville  (C-P.).  Op.  4.  Rossignol  et  Fau- 
vette, étude  de  salon 5    » 

—  Op.  9.  La  Locomotive,  étude  de  vélocité    6     » 
CSoria.  Les  Regrets,  impromptu-étude  ...     6    » 
Heller   (Stephen).   Op.  81  VINGT-QUA- 
TRE PRÉLUDES  dans  tous  les  tons. 

2  suites  ,  chaque 9  » 

—  Op.  29.  LA  CHASSE,  étude  caractéris- 

tique    6  » 

Henselt.  Op.  2.  POEME  D'AMOUR,  étude.  6  » 

—  LA  GONDOLE,  étude 4  • 

Kalkbrenner  (F.) .  AJAX,  étude 5  <• 

Kessier.  Etudes 30  » 


Knecht.  Op.  10.  Etude  de  concert  pour  la 

main  gauche  sur  Norma 7  60 

Knllack.  Op.  37.  Perles  d'écume,  fautaisie- 

étude 7  50 

lilszt    (Fr.).  VINGT-CINQ  GRANDES  ÉTU- 

DE.S,  2  suites,  chaque ÏO     > 

—  MAZEPPA,  étude 7  50 

Hatbias  (Oeurg^rs),  Op.  10.  DIX  ÉTUDES 

DE  GENRE 20    » 

Mendelssohn  (F.).  Op.  35.  SIX  PRÉLU- 
DES ET  FUGUES 12    i 

—  Etude  en  fa  mineur,  extraite  de  la  Mé- 

thode des  Méthodes 5    » 

—  Prélude  et  fugue 5    » 

Uolard  (\.).  Etudes  mélodiques 18    » 

Uoschelèx.  Op.  95.  DOUZE  GRANDES 
ÉTUDES  CARACTÉRISTIQUES  pour 
le  développement  du  style  et  de  la 
bravoure 18    » 

—  Op.  105.  Deux  études 6    » 

llnller.  PIÈCES  INSTRUCTIVES  pour  le 
piano,  six  livraisons  à  l'usage  des 
pensions,  chaque 5    » 

Palmcr.  Murmures,  nocturne-étude  ....     6     » 

Ilosenhain  (J.).  Op.  20.  VINGT-QUATRE 
ÉTUDEi  MÉLODIQUES  servant  din- 
troduction  à  celles  de  Crammer.   .    .  12     » 

Nchmidt  (A.).  ÉTUDES:  Exercices  pré- 
paratoires pour  obtenir  l'indépen- 
dance et  l'égalité  des  doigts,  suivis 
de  20  études 9     » 

Stœpel.  Op.  41.  VINGT-QUATRE  AIRS, 
précédés  de  petits  exercices  pour  les 
premiers  commençants 6     » 

Taubert.  Op.  41.  LA  CAMPANELLA,  étude    6     » 

Thalberg  (S.)  Op.   26.  DOUZE  ÉTUDES, 

2  suites,  chaque 12  u 

—  Op.  36.  Grande  étude  en  la  mineur  .    .  7  50 

—  La  même,  à  4  mains 7  50 

—  Op.  45.  Thùme  et  étude  en  la  mineur.  7  50 

—  Les  mêmes,  à  4  mains 7  50 

—  L'eux  études  composées  pour  la  Méthode 

des  Méthodes 7  50 

Tirpcnne.  CENT  ÉTUDES  GRADUÉES,  di- 
visées en  cinq  livres  : 

l"liTre  :  Etudes  primaires 12  » 

2"  livre  :  Etudes  élémentaires  ....  12  » 

3'  livre  :  Etudes  de  genre 15  » 

4"  livre  :  Etudes  de  vélocité 15  • 

5'  livre  :  Etudes  des  tonalités.  ...   15  • 

Vlgnerie    LES  GAMMES  dans  tous  les  tons 

majeurs  et  mineurs  en  3  octaves.   .   .     3    » 

Vos8    (Ch.).  Op.    140.   N°l.  Le  Balancier, 

étude  brillante  de  rhyihme 5    i 

—  N°  2.  Le  Collier  de  perles,  étude  bril- 

lante   5    » 

—  Op.  161.  Écume  de  Champagne,  grande 

étude  de  concert 9     • 

—  Op.  167.  Le  Frisson   du   feuillage,  im- 

promptu, étude 5    » 

—  Op.  l'JO.  N"  1.  Plaisanterie,  étude.   .   .     6    » 

N"  2.  Légèreté,  étude 5    » 

—  Op.  171.  Les  Battements  du  Cœur.   .   .     5    » 

—  Op.  184.  Extase,  grande  étude  ....     4    » 

■Wolff  (É.louard).  Op.  20.  VINGT-QUA- 
TRE GRANDES  ÉTUDES  (1"  Hvre).  24     » 

—  Op-    50.    VINGT-QUATRE     GRANDES 

ÉTUDES  dédiées  à  Thalberg  (2'  livre)  24    • 

—  Op.   20.     L'ART  D'î    L'EXPRESSION, 

vingt-quatre  études  faciles  et  progres- 
sives, 2  livres,  chaque 9     « 

—  Op.    100.    L'ART    DE   L'EXÉCUTIOIV, 

vingt-quatre  grandes  improvisations 
en  forme  d'études,  divisées  en  deux 
livres,  chaque 15    » 


UPBIHERIE  CENTRALE   DES  CBEUINS  DE  FEB    —  A. 


E,  30,   A   l'ABlS. 


BUREAUX    A    PARIS  :    BOULEVARD   DES   ITALIENS,  1. 


W  Année. 


^*  31. 


ON  S'ABONNE: 

Dons  lc5  I>épartempnt!t  pt  à  l'Élranger. 

chez  tous  IQS  Marchands  de  Musique,  1<  s  Libraires, 

et  aux  Dareaux  dcr  Messageries  et  des  Postes. 


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REVUE 


2  AoftI  <8«8. 


PRIX    DE    L'ABONNEMENT: 

Paris. 2*   r.paran 

Départements,  Belgique  cl  Suisse —    30  f,       id. 

Étranger 34  i       id. 

Le  Journal  paraît  le  Dimanche. 


ET 


GAZETTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


SOMMAIRE.  —  Conservatoire  impérial  de  musique  et  de  déclamation  :  con- 
cours publics.  —  Études  sur  Charles-Marie  de  Weber  (troisième  partie,  6"  ar- 
ticle], par  Edmond  IVenkomm.  —  Les  Théâtres  lyriques  secondaires  à 
Paris  depuis  1820  (4'  article),  par  Arthur  I*ong^in.  —  Entrefilets.  — 
Revue  des  théâtres,  par  D.  A.  U.  ISaint-'V.eii.  —  Nouvelles  des  théâ- 
tres lyriques.  —  Nouvelles  diverses.  —  annonces. 


COSSERYÀTOIRE  HSPÉRIÂL  DE  fflUSIQUE  ET  DE  DËCUIBATION. 

Concours  pnbltca. 

Les  derniers  concours  publics  ont  eu  lieu  les  lundi  27  et  mardi 
28  Juillet.  Eu  voici  les  résultats  : 

Séance  du  lundi  27  juillet. 

FLUTE. 

Professeur  :  M.  Dorus. 
1"  prix  :  M.  Rauch. — 2' prix  :  M,  Mêlé.  —  jI«f  accessit  :  M.  Leh- 
mann.  —  2'=  accessit  :  MM.  Jouve  et  Houziaux. 

HAUTBOIS . 

Professeur  :  M.  Colin. 
1"  prix  :  M.  Pradel.  —  2°  prix  :  MM.  Vautrin  et  Larrieux.  — 
1"'  accessit  :  M.  Gillet.  —  2°  accessit  :  M.  Eybert.  —  3°  accessit  : 
M.  Pointis. 

CLARINETTE. 

Professeur  :  M.  Klosé. 

1"  prix  :  M.  Rousseau.  — 2°  prix  :  M.  Starck.  —  l"'  accessit  : 
M.  Ansart. — 2°  accessit  :  M.  Schwartz.  —  3°  accessit  :  M.  Creusez. 

BASSON. 

Professeur  :  M.  Cokken. 

1"  prix  :  M.  Bourdeau.  —  2"  prix  :  M.  Foumier.  —  l'f  acces- 
sit :  M.  Quieney.  —  2°  accessit  :  M.  Leziart. 

COR. 

Professeur  :  M.  Mohr. 
l'f  prix  :  M.  Mellet.  —•  2«  prix  :  M.  Willemolte. 


Séance  du  mardi  28  juUlet. 

Jury  :  M.  Auber,  directeur-président;  François  Bazin,  Benoist, 
Jules  Cohen,  Charles  Colin,  Emile  Durand,  Jancourt,  Georges 
Pfeiffer  et  Rousselot. 

TROMPETTE. 

Professeur  :  M.  Dauverné. 
V'  prix  :  M.  Chavanne.  — 2"  prix  :  M.  Dubois.  —  Pas  de  pre- 
mier accessit.  —  2''  accessit  :  M.  Malandran. 

TROMBONE   A  COULISSE. 

Professeur  :  M.  Dieppe. 
Pas  de  premier  prix.  —  2'=  prix  :  MM.  Picarda  et  Bouquet. 


Classes  des  élèTes  militaires  annexés  an  Conserratotre. 

TROMBONE  A  PISTONS. 

Professeur  :  M.  Dieppo. 
1^'  prix  :  M.  Thouvenel.  —  Pas  de  second  prix.  —  l"  acces- 
cit  :  MM.  Bernard  et  Rousseau. 

CORNET  A  PISTONS. 

Professeur  :  M.  Forestier. 
Pas  de  premier  prix.  —  2'  prix  :  MM.  Gassian  et  Baculard.  — 
Pas  de  premier  accessit.  —  2"  accessit  :  M.  Pfersdoff.  —  3°  acces- 
sit :  MM.  Michelin  et  Jacob. 

SAXOPHONE . 

Professeur  :  M.  Sax. 
l":  prix  :  M.  Ollagnier.  —  2°  prix  :  M.  Wetzel.  —  1"*  accessit  : 
M^Leiber.  —  2'  accessit  :  MM.  Pitont  et  Quignard  :  3'  acces- 
sit :  MM.  Pelotier  et  Pericat. 

SAXHORN. 

Professeur  :  M.  Arban. 
l'r  prix  :  MM.  Cha>-anne  et  Jouvenot.  —  2=  prix  :  MM.  Stoltz  et 
Carbonni.  1"  accessit  :  M.  Aubert.— 2"  accessit  :  M.  Godart. 


242 


UEVLE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


ETUDES  SUR  CHÂRLES-MÂBIC  DE  WEBER. 

D'après   la    blograpbic    écrite    par   son    fliN. 


TROISIEME   PARTIE. 


(6»  article)  (I). 


Le  printemps  venu,  Weber  se  liûta  de  transporter  ses  pénales 
au  sein  de  la  campagne  luxuriante  qui  environne  Dresde.  Son 
choix  s'était  arrêté  sur  une  petit  village  nommé  Hosterwitz  ,  situé 
aux  bords  de  l'Elbe,  non  loin  de  la  résidence  royale  de  Pillnitz, 
au  pied  même  de  cet  amas  de  montagnes  et  de  gorges  sombres 
qu'on  appelle  «  la  Suisse  saxonne.  »  Retiré  dans  cette  solitude, 
Weber  ne  se  laissa  distraire  que  par  ses  ibnctions  au  théâtre  de 
Dresde,  qui  exigeaient  souveiit  sa  présence  dans  cette  ville.  Le 
reste  du  temps  se;  passait  en  promenades,  en  parties  sur  l'eau  et 
en  excursions  dans  la  montagne.  Après  un  hiver  aussi  rempli  de 
soucis  que  celui  qu'il  venait  de  traverser,  ce  repos  de  quelques 
semaines  rétablit  la  santé  du  maître,  altérée  par  les  dernières  lut- 
tes ;  il  vivait  heureux  à  Hosterwitz  loin  de  ses  ennemis' et  de  ses- 
envieux,  entouré  de  ses  amis  du  cénacle  de  Chiaponc,  auxquels 
venaient  se  joindre  souvent  le  célèbre  castrat  Sassaroli  et  les 
frères  Roth,  attachés  tous  deux  comme  clarinettistes  à  la  chapelle 
royale.  Weber  eut,  en  outre,  la  joie  d'oH'rir  l'hospitalité  dans  sa 
chaumière  d'Hosterwitz,  ù  son  vieux  compagnon  de  voyage  Baer- 
mann. 

Dès  qu'il  se  sentit  un  peu  reposé,  il  se  remit  au  travail.  L'épo- 
que de  la  fête  de  la  reine  approchait,  et  Morlaechi,  de  retour  de 
son  long  voyage  en  Italie,  avait  déclaré  ne  pouvoir  se  charger  de 
la  cantate  destinée  à  célébrer  cet  anniversaire.  Weber  se  pro- 
posa pour  le  remplacer;  son  olFre  fut  agréée.  Outre  cette  cantate, 
connue  sous  le  litre  de  Piatur  und  Liehe  {Nature  et  Amour),  We- 
l)er-  composa,  durant  cet  été  de  1818,  plusieurs  autres  fragments, 
parmi  lesquels  nous  citerons  une  Chanson  à  houe,  sur  des  vers 
de  Brencr,  dont  l'accompagnement  est  une  merveille  ;  un  air 
commandé  par  le  comte  de  Briihl,  de  Berlin,  pour  être  intercalé 
dans  la  Lodd'ska,  de  Cherubini,  etc. 

Une  composition  d'une  bien  autre  impoi  tance  devait  remplir  le 
mois  d'août  qui  suivit.  Le  peuple  saxon  se  préparait  à  célébrer  le 
cinquantième  anniversaire  du  règne  de  son  roi,  Frédéric- Auguste. 
Ce  souverain,  malgré  sa  raideur  proverbiale  et  son  admiration 
bien  connue  pour  l'empereur  des  Français,  jouissait  d'une  grande 
popularité,  et  ses  sujets  lui  avaient  décerné  le  surnom  de  Juste. 
.  On  seipréparait  donc,  de  toutei  parts,  à  fêter  dignement  le  ju- 
bilé de  son  règne,  et,  comme  on  le  pense  bien,  la  musique,  qui 
joue  un  si  grand  rôle  dans  toutes  les  solennités  allemandes,  n'a- 
vait pas  été  oubliée.  Le  roi  eût  désiré  cependant  que  la  cérémonie 
se  bornât  à  un  service  à  l'église,  pendant  lequel  on  aurait  exécuté 
une  cantate  '  commandée'  au  compositeur  Uber  et  le  Te  Deum  de 
liasse  ;  mais  on  obtint  qu'il  y  aurait  aussi  concert  de  gala  au 
théâtre,  et  Vitzthum  conseilla  à  Weber  d'écrire  pour  cette  occa- 
sion une  cantate,  bien  que  rien  ne  fût  arrêté  relativement  au  pro- 
gramme du  concert;  à  tout  hasard  Weber  alla  trouver  son  ami 
Kind,  qui  se  mit  aussitôt  à  rimer  des  vers  officiels  que  le  maître 
s'empressait  de  revêtir  de  ses  harmonies.  En  neuf  jours  tout  était 
terminé;  Weber,  il  est  vrai,  n'avait  pas  quitté  sa  table  de  travail 
durant  ce  temps.  Lorsqu'il  revint  à  Dresde,  malade,  brisé  de  fati- 
gue, il  avait  perdu  tout  le  bénéfice  de  son  séjour  à  Hosterwitz. 
Dès  cette  époque,  en  effet,  il  ressentait  les  atteintes  du  mal  qui 
devait  remporter  huit  ans  plus  tard.  Son  enfance,  on  se  le  rap- 
pelle, avait  été  maladive,  et   si   sa  santé  avait   paru    se   rétablir 


I  pendant  les  années  de  son  adolescence,  les  symptômes  alarmants 
revenaient  maintenant  s'emparer  de  lui,  plus  inquiétants  que  ja- 
mais. Il  souffrait  d'un  relâchement  du  système  nerveux  et  d'op- 
pressions fréquentes;  en  outre,  il  était  atteint  d'un  violent  en- 
rouement et  par  moment  il  perdait  même  complètement  la  voix. 
Sa  confiance  aveugle  dans  tous  les  teinèdes  qu'on  lui  proposait  lé 
portait  â  se  droguer  sans  cesse.  Il  avait  pour  amis  deux  méde- 
cins :  l'un,  vieux  et  routinier,  le  traitait  pour  une  maladie  abdo- 
minale, tandis  que  l'autre,  jeune  et  novateur,  tenait  sa  gorge 
pour  le  foyer  de  tous  ses  maux.  Weber  se  confiait  alternativement 
à  l'un  et  à  L'autre,  suivant  à  la  lettre  les  ordonnances  du  premier 
jusqu'à  la  visite  du  second,  tantôt  faisant  diète,  tantôt  mangeant 
des  viandes  succulentes,  amalgamant  les  médicaments  les  plus 
divers,  sans  compter  les  nombreuses  infidélités  de  régime  qu'il  fai- 
sait â  ses  deux  confidents. 

Une  triste  nouvelle  acheva  d'ébranler  sa  santé.  Vitzthum  lui 
annonça  que  sa  cantate  ne  serait  pas  exécutée,  mais  que,  par  une 
faveur  toute  spéciale,  le  roi  avait  manifesté  le  désir  d'entendre  au 
cojicert  l'ouverture  de  cet  ouvrage.  Or,  cette  ouverture  n'est  au- 
tre que  la  célèbre  Jubel-Ouverture,  c'est-à-dire  celle  que  l'on  met 
en  parallèle  avec  ses  plus  belles,  celle  par  laquelle  s'ouvre,  en 
Allemagne,  toute  solennité.-  Weber  éprouva  un  grand  chagrin  de 
voir  ainsi  tronquer  son  œuvre,  en  même  temps  qu'une  vive  dé- 
cc|)tion,  car  Morlaechi  avait  été  chargé  de  composer  la  messe  du 
Jubilé,  qui  fut  exécutée  en  grande  pompe  à  l'église  catholique 
dans  la  matinée  du  19  septembre.  Le  lendemain  eut  lieu  le  con- 
cert au  théâtre;  il  se  composait  de  l'ouverture  de  Weber,  de 
morceaux  détachés  de  Morlaechi,  de  Polledro,  Nicolini,  Zingarelli, 
etc.  La  Jubd-Ouverlure  fut  accueillie  avec  enthousiasme.  Peu  de 
jours  après,  la  cantate  tout  entière  que  Weber  lit  exécuter  pour 
son  propre  compte,  reçut  le  même  accueil  à  la  grande  église; 
c'était  la  destinée  du  maître  d'être  toujours  acclamé  par  le  peu- 
ple et  repoussé  par  les  grands.  11  était  fier,  sans  doute,  de  ses 
succès  populaires,  mais  la  froideur  des  cours  à  son  égard  l'affli- 
geait profondément,  car  il  partageait  les  errements  de  la  vieille 
Allemagne,  où  la  faveur  des  grands  gouvernait  toutes  les  exis- 
tences. Et  puis,  il  faut  le  dire  aussi,  Weber  était  sincèrement  dé- 
voué à  la  famille  royale  de  Saxe,  dont  plusieurs  membres  étaient 
pour  lui  remplis  de  prévenances,  et  son  plus  grand  désir  était 
d'attacher  son  nom  à  une  œuvre  digne  de  ses  puissants  protec- 
teurs. 

L'occasion  se  présenta  d'elle-même  peu  de  temps  après.  Au  ju- 
bilé du  règne  allait  succéder  le  jubilé  du  mariage  du  roi  et  de  la 
reine,  ou,  pour  nous  servir  de  l'expression  allemande,  leurs  Noces 
d'or 

Weber  pensa  que  Morlaechi  ayant  composé  la  messe  du  jubilé, 
il  serait,  lui,  chargé  sans  doute  de  celle  de  la  cinquantaine.  Il  se 
mit  donc,  à  tout  événement,  à  l'ouvrage,  et  composa  sa  grande 
messe  en  sol,  qui  porte  le  titre  de  Jubel-Messe.  Cet  ouvrage,  com- 
mencé le  17  novembre,  fut  terminé  Ve  4  janvier.  Weber  eut  cette 
fois  la  joie  de  voir  son  œuvre  acceptée,...  à  la  condition  que  Mor- 
laechi et  l'olledro  y  intercaleraient  un  offertoire  et  une  symphonie. 
Weber  dut  y  souscrire,  heureux  encore  de  se  produire  en  cette 
circonstance.  Sa  messe  fut;  donc' exécutée;  mais  l'Offertoire  de 
Morlaechi,  merveilleusement  interprété  par  un  jeune  ténor  qu'on 
entendait  pour  la  première  fois  à  Dresde,  attira  à  un  si  haut  point 
l'attention  de  l'auditoire  que  le  reste  de  la  messe  passa  pour  ainsi 
dire  inaperçu. 

Sa  maladie  nerveuse  s'accrut  de  ce  désenchantement;  il  devint 
morose,  taciturne,  irritable  ;  dans  un  moment  de  colère  il  se  laissa 
même  aller  à  formuler  une  plainte  ofTicielle  contre  Morlaechi,  ce 
dont  il  ne  tarda  pas  à  se  repentir;  en'  effet,  ayant  entrepris,  peu 
de  temps  après,  de  monter,  sa  Bylvqna  à  Dresde,  il  rencontra  une 


UE  PAJUS. 


243 


telle  mauvaise  volonté  parmi  les  artistes,  qu'au  bout  de  quelques 
répétitions  il  dut  renoncer  à  son  projet  et  mettre  une  autre  œu- 
vre à  l'élude.  Ce  coup  lui  fut  plus  sensible  qu'aucun  autre. 

Cependant,  ù  la  suite  de  ce  nouveau  mécompte,  le  voile  épais 
qui  l'entourait  sembla  se  soulever  un  instant  pour  lui  faire  apjr- 
cevoir  un  horizon  moins  sombre.  Weber  reçut  l'ordre  de  compo- 
ser un  opéra  à  l'occasion  du  mariage  d'un  des  princes.  On  se  fi- 
gure la  joie  qu'il  éprouva  lorsque  le  comte  Vitzthum  vint  lui  an- 
noncer cette  nouvelle  ;  il  ne  pouvait  y  croire  ;  cette  occasion  tant 
désirée,  il  la  tenait  enfm;  et  comme  un  bonheur  n'arrive  jamais 
seul,  ses  vœux  furent  comblés  par  la  venue  d'une  petite  fille  que 
sa  femme  mit  au  monde  vers  le  même  temps.  Tout  souriait  donc 
au  pauvre  grand  maître,  que  deux,  années  précédentes  avaient 
abattu  ;  les  tristes  jours  semblaient  déjà  loin  et  l'on  en  parlait 
comme  d'un  mauvais  rêve! 

Toute  liberté  avait  été  laissés  à  Weber  pour  le  choix  d'un  poëme; 
il  s'adressa  tout  naturellement  à  son  vieux  collaborateur  Kind. 
Celui-ci,  qui  ne  se  laissait  jamais  prendre  au  dépourvu,  avait  pré- 
cisément trois  librettos  en  portefeuille  :  l'un  tiré  de  l'histoire, 
l'autre  de  la  mythologie  et  le  troisième  des  Mille  et  une  Nuits.  Ce 
dernier,  qui  portait  le  titre  d'Alcindor,  obtint  la  préférence.  Le 
texte  fut  retouché  et  Weber  se  mit  à  pense?'  à  son  opéra  ;  — 
penser  est  bien  ici  le  terme  juste,  car  nous  avons  déjà  dit  que 
Weber  n'écrivait  un  morceau  qu'après  l'avoir  travaillé,  changé, 
refait  cent  fois  dans  son  esprit;  nous  en  avons  un  exemple  dans 
le  Freyschiitz,  dont  la  composition  ne  dura  pas  moins  de  quatre 
ans.  Dans  tous  les  cas,  la  surexcitation  que  fit  naître  Aldndor  dans 
le  cerveau  de  Weber  servit  à  ce  même  Freyschiitz,  car  nous  trou- 
vons inscrits  à  la  date  du  13  mars  les  fragments  par  lesquels  se 
complète  le  premier  acte  de  cet  ouvrage,  notamment  l'air  de  Gas- 
pard ;  malheureusement,  cette  surexcitation  fut  des  plus  funestes  à 
la  santé  du  maître.  Ses  douleurs,  sa  prostration  nerveuse  revinrer.t 
plus  écrasantes  que  jamais;  il  fut  même  obligé  de  s'aliter  et  de  re- 
noncer momentanément  à  tous  ses  travaux;  sa  femme,  pour  comble 
d'infortune,  était  également  malade;  ils  eurent  en  outre  le  chagrin 
de  perdre  leur  enfant;  de  sorte  que  le  départ  pour  Hostervvitz 
s'effectua  cette  année-là  tristement,  sans  confiance  dans  l'avenir, 
sans  espoir  de  jours  meilleurs. 

Cependant  tel  est  le  principe  vivifiant  de  l'air  de  ces  montagnes 
qu'au  bout  de  peu  de  temps  la  santé  revint  chez  Weber,  et  avec 
la  santé  la  gaieté  et  l'amour  du  travail.  L'activité  du  maître  se 
porta  tout  d'abord  sur  les  arrangements  pour  piano  d'Abu-Hassan, 
de  la  cantate  et  de  l'ouverture  du  jubilé.  Il  apporta  à  ces  travaux 
un  soin  tout  particulier,  ne  se  bornant  pas  seulement  à  arranger, 
mais  s'efforçant  de  faire  revivre  l'orchestre  dans  le  piano;  en 
même  temps  ses  idées  se  tournaient  vers  son  opéra,  dont  il  se  pro- 
mettait une  grande  gloire.  Hélas!  la  fatalité  veillait  à  sa  porte, 
tandis  que  son  cœur  se  laissait  bercer  par  de  douces  chimères. 

Un  jour,  en  effet,  le  comte  Vitzthum  entra  dans  la  chaumière 
d'Hosterwitz;  il  venait  annoncer  à  Weber  que,  par  ordre,  son 
opéra  ne  serait  pas  exécuté  et  qu'il  serait  remplacé  par  une  can- 
tate de  Morlacchi,  Weber  n'en  pouvait  croire  ses  oreilles;  il  se  fit 
répéter  les  paroles  royales,  puis  se  laissa  tomber  sur  une  chaiselatête 
cachée  dans  ses  mains.  Vitzthum  alors,  qui  avait  lui-même  les  larmes 
aux  yeux,  s'approchant  de  Weber  et  lui  prenant  la  main,  lui  dit 
d'une  voix  émue  : 

«  Weber,  nous  avons  voulu  faire  une  grande  et  belle  chose, 
et,  chacun  selon  nos  forces,  nous  y  avons  bien  travaillé  tous 
deux;  mais  que  pouvons-nous  sans  la  protection  d'en  haut?  J'ai 
lutté  longtemps;  aujourd'hui  j'abandonne  la  partie  ; — j'ai  demandé 
mon  congé et  je  l'ai  obtenu  sans  peine.  Embrassons-nous  et 

adieu.  » 

Edmond  NEUKOMM. 
[La  suite  prochainement.) 


LES  THÉÂTRES  LYRIQUES  SECONDAIRES  A  PARIS 


DEPUIS     1  S90. 

(i«  article)  (1). 


IL 


Odéon. 


L'Odéon,onlesait,  a  de  tout  temps  été  considéré  comme  un  théâtre 
malheureux,  destiné  par  sa  situation  au  delà  de  la  Seine  à  mener 
toujours  une  existence  précaire  et  misérable.  Le  fait  est  qu'il  y  a 
quarante  ans  son  état  n'était  pas  des  plus  florissants,  et  qu'on 
cherchait  par  tous  les  moyens  possibles  à  galvaniser  cet  établisse- 
ment infortuné,  objet  constant  des  brocards  de  tout  Paris. 

On  crut  trouver  une  solution  favorable  en  modifiant  d'une  façon 
toute  particulière  les  conditions  de  son  existence  et  de  son  exploi- 
tation, et  tandis  que,  jouant  uniquement  la  comédie  et  la  tragé- 
die, il  servait  de  succursale  à  la  Comédie -Française  sous  l'admi- 
nistration d'un  directeur  qui  relevait  de  l'intendant  des  théâtres 
royaux  (l'un  s'appelait  alors  Gimel,  l'autre  était  le  baron  de  la 
Ferté),  on  en  fit  une  sorte  de  troisième  théâtre  lyrique  bâtard, 
confié  à  un  administrateur  qui  gérait  à  ses  risques  et  périls,  avec 
la  faculté  de  jouer  tous  les  genres,  excepté  le  ballet,  c'est-à-dire 
la  comédie  et  la  tragédie,  comme  par  le  passé,  plus  l'opéra ,  l'o- 
péra-comique  et  même  le  vaudeville. 

Voyons  comment,  quelques  mois  avant  sa  transformation,  VAl- 
manach  des  Spectacles  (de  1824)  appréciait  ce  changement  de 
régime  : 

«  Les  révolutions  sont  à  l'ordre  du  jour  dans  les  gouvernements 
dramatiques.  L'Odéon  en  va  subir  une  nouvelle  (la  cinquième  ou 
sixième  depuis  son  élévation  au  rang  de  second  théâtre) . 

Voilà  le  précipice  où  l'ont  enfin  jeté... 
non 

Les  attraits  enchanteurs  de  la  prospérité, 

mais  les  prétentions  déplacées  de  ses  acteurs.  Ils  ont  voulu  faire 
les  grands  comédiens  français  ;  les  voilà  désormais  à  la  suite 
d'une  troupe  d'opéra. 

»  Le  nouveau  directeur  a  fait  introduire  dans  sou  privilège  la 
clause,  sine  qud  non,  qu'il  pourrait  ajouter  l'agrément  du  chant 
à  son    spectacle. 

»  Or,  examinez  la  justesse  du  raisonnement  qui  a  fait  accueil- 
lir cette  demande.  L'Odéon,  par  son  éloignement,  peut  être  assi- 
milé à  un  théâtre  de  province;  il  faut  donc  essayer  si,  en  le  trai- 
tant en  théâtre  de  province,  on  ne  lui  donnerait  pas  toute  la 
somme  de  prospérité  dont  il  est  susceptible.  Les  théâtres  de  pro- 
vince sont  à  la  fois  lyriques  et  dramatiques;  il  faut  donc  mettre 
l'opéra  à  l'Odéon.  Mais  on  veut  surtout  respecter  l'ordonnance 
royale  de  1818,  et  maintenir  en  honneur  la  tragédie  et  la  co- 
médie; eh  bien,  c'est  aujourd'hui  une  vérité  vulgaire  que  l'opéra 
a  tué  en  proviwe  la  comédie  et  la  tragédie. 

»  Si  l'erreur  n'était  que  là,  les  gens  de  lettres  seuls  auraient  à 
s'en  plaindre.  Qu'importe  aux  habitants  du  faubourg  Saint-Ger- 
main et  au  reste  des  amateurs  de  la  capitale  que  l'opéra  brille  à 
l'Odéon,  ou  que  ce  soit  le  bon  genre?  Mais  on  ne  conçoit  pas 
comment  cette  idée  a  pu  entrer  dans  une  tête  saine,  que  le  fau- 
bourg Saint-Germain  était  une  ville  de  province,  ou  qu'il  ne  con- 
finait à  Paris  que  par  la  muraille  de  la  Chine.  Si  l'on  voulait  faire 
chaque  soir,  à  l'heure  oii  les  théâtres  finissent,  une  courte  station 
sur  les  ponts  qui  joignent  cette  grande  ville  à  la  capitale,  on 
pourrait  se  convaincre  que  ses  citoyens  ne  regardent  pas  le 
voyage  comme  très-pénible. 

»  Un  bon  spectacle  pourra  attirer  plus  de  monde   à   l'Odéon, 

(i)  Voir  les  n»^  25,  26  et  29. 


244 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


sans  doute  ;  mais  il  ne  fera  pas  que  les  habitants  du  faubourg 
Saint-Germain  rompent  avec  les  spectacles  de  l'autre  côté  de  l'eau. 
Or  ces  spectacles  sont  au  nombre  de  douze  ou  quinze;  il  n'y  a 
pas  de  jour  oîi  l'un  d'eux  n'offre  quelque  attrait  à  la  curiosité,  et 
l'Odéon  est  seul  pour  soutenir  cette  fâcheuse  concurrence.  Les 
accidents,  le  mauvais  temps,  les  saisons  rigoureuses,  tournent  né- 
cessairement à  son  préjudice;  à  peine  ses  rivaux  s'en  ressentent- 
ils.  Il  y  en  a  même  qui  y  trouvent  leur  profit.  Voyez  le  théâtre 
Français,  Feydeau,  les  Variétés  un  jour  de  pluie,  et  voyez  l'O- 
déon. 

»  Le  faubourg  Saint-Germain  est  un  quartier  de  Paris  oîi  l'on 
n'est  pas  moins  Parisien  qu'à  la  Chaussée-d'Antin  et  au  faubourg 
Saint-Honoré  ;  la  mode  n'y  règne  pas  moins  despotiquenient  et 
c'est  sur  la  rive  droite  de  la  Seine  qu'elle  a  surtout  fixé  sa  rési- 
dence. Il  se  peut  que  la  capricieuse  divinité  accorde  parfois  un 
regard  de  faveur  à  l'Odéon  ;  mais  les  avantages  qu'il  en  retirera 
seront  toujours,  en  comparaison  des  autres  théâtres ,  dans  la  pro- 
portion décroissante  d'un  à  six.  On  va  voir  six  fois  une  pièce  qui 
a  réussi  de  l'autre  côté  des  ponts;  quand  on  l'a  vue  une  fois  à 
l'Odéon,  on  l'a  vue,  on  en  peut  parler;  cela  sutTit.  Complerez-vous 
sur  les  acteurs?  Souvenez-vous  de  ce  qu'y  faisaient  ceux  de  l'an- 
cienne Comédie-Française,  les  Mole,  les  Fleury,  les  Grandmesnil, 
les  Contât,  etc.,  dans  des  temps  plus  heureux,  et  dernièrement 
Mlle  George  avec  une  grande  réputation  et  un  grand  talent.  Voyez 
ce  quy  fait  la  réunion,  assurément  fort  remarquable,  de  Joanny, 
Perrier,  Lafargue,  Samson,  Mmes  Gros,  Anaïs,  etc.,  etc. 

»  Les  pièces  nouvelles  attirent  seules  le  public  à  l'Odéon  ;  en 
travaillant  beaucoup,  il  en  montera  deux  ou  trois  par  mois,  tout 
au  plus;  les  autres  théâtres  en  donnent  quelquefois  trois  le  même 
jour.  Ajoutez  les  représentations  de  l'Opéra,  celles  de  Talnia  et  de 
Mlle  Mars,  les  concerts,  etc.,  et  jugez  si  notre  calcul  est  faux. 

»  En  ajoutant  un  nouveau  genre  à  l'Odéon,  on  a  bien  certai- 
nement ajouté  aux  dépenses.  Les  recettes  feront  voir  si  l'on  a  bien 
fait.  On  aura  de  bons  chanteurs,  soit;  mais  Ponchard,  Mme  Ri- 
gaut,  Mme  Boulanger  et  Mme  Pasta  ne  chantent  pas  déjà  si  mal, 
et  quand  on  les  a  à  sa  porte,  pourquoi  crever  des  chevaux  pour 
en  aller  entendre  d'autres? 

»  Ce  que  nous  venons  de  dire  n'est  que  pour  mémoire.  Nous 
voudrions  bien  sincèrement  nous  être  trompé  ;  et  nous  ne  tenons 
pas  tant  à  l'infaillibilité  de  notre  jugement  qu'au  désir  de  voir 
réussir  une  entreprise  utile,  à  laquelle  nous  craignons  bien  qu'on 
n'ait  porté  le  dernier  coup  en  recourant  à  des  moyens  si  dange- 
reux, pour  lui  rendre  une  splendeur  à  laquelle  peut-être  il  ne  lui 
est  pas  donné  d'arriver.  » 

Il  est  certain  que  l'Odéon  n'avait  jamais  été  heureux,  et  le  sort 
fataljqui  pesait  sur  lui  depuis  si  longtemps  n'a  paru  l'abandonner 
que  depuis  une  quinzaine  d'années.  Dans  ces  derniers  temps,  en 
effet,  grâce  surtout  aux  œuvres  surfaites  de  Ponsard,  à  certaines 
pièces  de  M.  Emile  Augier,  à  quelques-unes  des  admirables  con- 
ceptions dramatiques  de  Mme  Sand,  on  l'a  vu  obtenir  des  succès 
nombreux,  retentissants  et  prolongés.  Mais  jadis  il  n'en  était  pas 
ainsi,  et  même  lorsqu'il  n'était  pas  seul  sur  l'autre  rive  de  la  Seine, 
même  lorsque  étaient  debout  et  plus  ou  moins  vaillants  le  théâtre 
du  Palais,  situé  dans  la  Cité,  le  Lycée  dramatique,  à  l'ancienne 
foire  Saint-Germain,  le  théâtre  des  Victoires-Nationales,  dans  la 
rue  du  Bac,  à  l'époque  enfin  de  la  première  et  grouillante  liberté 
des  théâtres,  l'Odéon  ne  put  se  soutenir,  et,  en  1799,  vaincu  par 
la  solitude  qui  se  faisait  autour  de  lui,  il  allait  fermer  ses  portes, 
bien  qu'il  comptât  alors  dans  son  personnel  des  artistes  de  premier 
ordre  tels  que  Larive,  Saint-Prix,  Mlle  Raucourt  et  quelques  autres. 
Heureusement  pour  son  honneur,  le  hasard  ou  la  fatalité  se  char- 


gea de  fournir  un  prétexte  à  sa  ruine  :  le  feu  prit  au  théâtre,  qui 
fut  détruit  en  une  nuit,  le  18  mars  1799. 

Rebâti  dix  après,  il  rouvrit  ses  portes  le  IS  juin  1808,  avec  le 
litre  de  Théâtre  de  l'Impératrice,  mais  la  troupe  tragique  et  co- 
mique ne  jouait  que  quatre  fois  par  semaine,  et  la  salle  servait, 
les  trois  autres  jours  (lundi,  mercredi  et  samedi)  aux  représenta- 
tions de  l'Opéra  italien,  alors  placé  sous  la  direction  de  Picard^ 
Berton  étant  directeur  de  la  musique.  Cette  époque  fut  pour  lui  la 
plus  florissante  :  il  était  de  mode  alors,  et  c'était  un  signe  de  grand 
ton,  bien  plus  qu'aujourd'hui,  d'avoir  sa  loge  aux  •<  Bouffes  ;  »  les 
acteurs  français  se  ressentaient  heureusement  du  succès  de  leurs 
camarades  italiens,  et  le  sort  du  théâtre  était  brillant  des  deux 
côtés. 

Arthur  POUGIN. 
(La  suite  prochainement.) 


Un  écrivain  de  talent  et  d'une  véritable  originalité,  M.  Szar- 
vady,  vient  de  publier  dans  l'un  des  derniers  numéros  de  l'Indé- 
pendance belge,  sous  le  titre  :  Lettre  allemande  sur  la  musique  fran- 
çaise, une  sorte  de  revue  comparative  de  l'inlluence  exercée  sur  la 
musique  dramatique  française  par  le  génie  littéraire  et  artistique 
d'outre-Rliin.  Il  y  a  là  des  choses  très-vraies,  très-finement  pen- 
sées et  dites  en  fort  bons  termes;  une  esthétique  ingénieuse  mise 
en  lumière  et  déduite  sous  une  forme  à  la  fois  élégante  et  pitto- 
resque ;  des  portraits  fidèles,  des  rapprochements  intéressants,  des 
croquis  incisifs.  Nous  regrettons  do  ne  pouvoir  publier  ce  travail, 
en  raison  de  son  étendue  même.  Nous  en  extrayons  les  passages 
suivants  de  nature  à  intéresser  nos  lecteurs. 

«  Si  Amb.  Thomas  est  caractérisé  par  l'étude,  le  travail  savant ,  le 
dessin  sévère,  Aubcr  l'est  au  contraire  par  l'agrément,  la  facilité,  le 
coloris  vivant,  la  mobilité  et  aussi...,  tout  étrange  que  cela  puisse  pa- 
raître, par  l'ininiobililé.  En  effet,  le  maître  de  quatre-vingt-cinq  ans  en 
est  au  même  point  qu'au  commencement  de  ce  siècle,  et  la  chose  se- 
rait encore  plus  évidente,  si  son  librettiste  Scribe  avait  pu  vieillir  avec 
lui...  C'est  bien  de  lui  qu'on  peut  dire  qu'il  n'a  rien  appris  ni  rien 
oublié,  et  qu'il  chante  comme  l'oiseau  dans  les  branches.  Il  chante  tou- 
jours. Les  chansons  Icd  plus  différentes  peuvent  retentir  dans  son  ar- 
bre, il  n'y  fait  pas  attention,  et  quand  même  des  centaines  de  nouveaux 
virtuoses  rempliraient  la  forêt  de  leurs  mélodies,  il  continuerait  à  chan- 
ter avec  le  gosier  q'ie  la  nature  lui  a  donné,  sans  s'inquiéter  le  moins 
du  monde  des  importations  et  des  conquêtes  récentes. . .  L'amabilité,  la 
gaieté,  la  gentillesse,  l'espièglerie,  la  bonne  humeur,  la  sérénité ,  pres- 
que la  sérénité  de  l'art  grec,  fleurissent  là  abondamment,  et  aussi,  ce 
qui  semble  difficile  à  croire,  une  certaine  simplicité  et  naïveté  comme 
on  les  rencontre  souvent  unies  à  la  gaieté  facile,  à  la  légèreté  et  au 
bonheur  de  vivre.  Ce  sont  là  les  plantes  propres  au  sol  de  la  France,  et 
Auber  a  su  s'en  tresser  une  couronne  qu'il  préfère  à  tous  ses  lauriers  et 
qui,  avec  ses  vives  couleurs  et  sa  fraîcheur  de  jeunesse,  sied  réellement 
bien  aux  cheveux  blancs  du  maître  qu'elle  entoure  d'une  grâce  atten- 
drissante. » 

Voici  qui  nous  semble  également  très-juste  sur  les  services  ren- 
dus à  l'art  musical  par  Pasdeloup;  services  plus  grands  qu'on  ne  le 
pense  généralement  : 

i<  ...  Car  ses  concerts  qui  font  entendre  les  cliefs-d'œuvre  du 
répertoire  musical,  bien  que  l'exécution  ne  soit  pas  toujour.-i  irréprocha- 
ble, les  rendent  populaires  et  jettent  en  conséquence  une  large  et  pro 
fonde  base  sur  laquelle  pourra  s'édifier  le  goût  épuré  de  la  masse.  Au- 
jourd'hui même  on  est  déjà  assez  avancé  pour  que  dans  les  concerts  de 
virtuoses,  dans  lesquels  jadis  on  ne  cherchait  que  la  difficulté  vaincue, 
le  public  demande  quelque  chose  de  plus  solide  :  Rubinstein,  ce  héros 
de  la  dernière  saison  et  qui  a  été  accueilli  avec  tant  d'applaudi^sements, 
n'aurait  jamais  obtenu  un  tel  succès,  malgré  son  étonnante  virtuosité  et 
malgré  le  nombre  encore  grand  de  ceux  qui  ne  cherchent  que  l'exécu- 
tion, s'il  n'avait  pas  mis  son  habileté  prodigieuse  au  service  d'un  goût 
excellent.  » 

M.  Szarvady  apprécie  très-judicieusement  aussi  la  personnalité 
artistique  de  Stephen  Heller  : 


DE  PARIS. 


«  Ce  continuateur  des  Mendelssohn,  des  Schumann,  des  Chopin,  des 
compositeurs  de  piano  par  excellence,  a  cette  année  mis  au  jour  toute 
une  série  de  créations,  dignes  de  celles  qu'il  a  déjà  produites,  telles  que 
les  Promenades  d'un  solitaire,  les  Études,  les  Nuits  blanches.  Ce  qui  leur 
manque  en  développement  extérieur,  elles  le  rachètent,  comme  toutes 
les  œuvres  de  Heller,  par  une  grande  profondeur  et  par  une  perfection 
de  forme  telle  que  l'étendue  devient  accessoire.  11  n'y  a  pas  de  doute 
qu'un  aussi  riche  et  aussi  fécond  compositeur,  qui  compte  dans  ses  pro- 
pres domaines  des  œuvres  si  nombreuses,  pourrait  comme  tant  d'autres 
faire  de  longues  sonates  capables  d'inspirer  le  plus  grand  respect  aux, 
critiques  de  l'école.  Mais  il  est  aussi  dans  ce  sens  le  continuateur  de 
Chopin,  un  vrai  lyrique  qui  laisse  chanter  en  lui  et  qui  façonne  avec 
amour  ce  que  lui  apporte  l'inspiration  du  moment  : 
»  D'abord  le  sentiment,  ensuite  la  pensée, 
»  D'abord  l'espace  sans  bornes,  ensuite  la  forme  limitée. 

{Go'éthe.) 


REVUE  DES  THÉÂTRES. 


Palais-Royal  :  Deux  Prisonniers  de  Théodoros,  pièce  en  un  acte, 
de  M.  Jules  Renard,  musique  nouvelle  de  M.  de  Villebichot;  le 
Chatovilleur  du  Puy-de-Dôme,  pièce  en  un  acte,  de  MM.  Chivot 
et  Duru;  reprise  des  Forfaits  de  Pipermans:  reprise  des  Mé- 
moires de  Mimi  Bamboche.  —  Ambigu  :  reprise  de  la  Prise  de 
Pékin,  drame  en  cinq  actes  et  neuf  tableaux,  de  M.  d'Ennery. 

Nous  avons  à  compléter  notre  Revue  de  la  semaine  dernière 
par  la  mention  de  plusieurs  pièces  qui  sont  venues  modifier  coup 
sur  coup  l'affiche  du  Palais-Royal,  et  qui  pourraient  bien  n'être 
plus  qu'un  souvenir  si  nous  les  remettions  à  huitaine.  Les  Deux 
Prisonniers  de  Théodoros  n'ont  de  commun  avec  le  monarque 
abyssinien  que  l'à-propos  de  sa  chute.  Un  marchand  de  jouets 
d'enfant  a  envoyé  là-bas  son  neveu  Lecoq  avec  une  cargaison 
de  polichinels;  mais  le  neveu  s'est  prudemment  arrêté  à  Rou- 
gival,  et,  après  avoir  mangé  les  polichinels  de  son  oncle,  il 
revient  nanti  d'une  foule  d'anecdotes  cocasses  sur  Théodoros  et 
sur  son  lointain  royaume  d'Abyssinie.  Il  y  en  a  même  d'assez  gra- 
veleuses pour  avoir  provoqué  les  scrupules  d'une  partie  des  spec- 
tateurs. Mais  en  somme  la  pièce  est  divertissante,  et  elle  est 
émaillée  d'airs  nouveaux  dus  à  l'inspiration  féconde  de  M.  de  Ville- 
bichot. On  y  retrouve,  en  outre,  avec  plaisir,  un  comique  du  nom 
de  Lacdmbe,  qui  s'est  fait  connaître  avantageusement,  l'hiver  der- 
nier, au  théâtre  des  Rouffes-Parisiens.  C'est  une  excellente  acquisi- 
tion pour  le  Palais-Royal ,  où  il  a  apporté  avec  lui  l'un  de  ses 
meilleurs  rôles,  celui  des  Forfaits  de  Pipermans,  qui  ont  obtenu 
le  même  succès  qu'au  [passags  Choiseul.  Dans  les  Deux  Prison- 
niers de  Théodoros,  Mlle  Alphonsine,  l'ex-actrice  des  Variétés,  con- 
tinue ses  débuts  à  la  faveur  d'un  personnage  excentrique  qui  est 
tout  à  fait  adapté  à  ses  moyens. 

Une  anecdote  bien  connue  a  fourni  le  sujet  du  Chatouilleur  du 
Pvy-de-Dôme,  dont  nous  avons  encore  à  constater  la  réussite.  11 
s'agit  d'un  mari  qui  est  soupçonné  par  son  beau-père  de  se  rendre 
veuf  en  emmaillotant  sa  femme  et  en  lui  chatouillant  la  plante 
des  pieds  jusqu'à  ce  que  mort  s'en  suive.  Mais  lorsqu'on  veut  aller 
aux  preuves  il  se  trouve  que  c'est  le  mari  qui  a  été  emmailloté 
par  sa  femme,  histoire  de  rire  et  de  s'amuser  pendant  la  première 
nuit  des  noces.  Du  reste,  il  y  a  eu  quiproquo  de  la  part  du  beau- 
père,  et  le  gendre  innocenté  est  mis  définitivement  en  possession 
de  sa  jeune  et  jolie  moitié.  Lhéritier  et  Priston  font  valoir  cette 
bouffonnerie  de  manière  à  mériter  les  bravos  du  public. 

On  vient  de  reprendre  au  même  théâtre  les  Mémoires  de  Mimi 
Bamboche,  qui  ont  déjà  eu  un  grand  nombre  de  représentations 
et  qu'une  attraction  nouvelle  va  sans  doute  remettre  en  vogue. 
Mlle  Blanche  d'Arligny,  qui  joue  aujourd'hui  le  principal  rôle  de 
cette  pièce,  est  une  fort  jolie  femme,  très-connue  dans  un  certain 


monde,  et,  par  conséquent,  suivie  au  théâtre  d'une  curiosité  en- 
démique. Elle  possède  quelques  qualités  téméraires  qui  seraient 
peut-être  mal  vues  ailleurs,  mais  qui  n'ont  l'ien  d'insolite  au  Pa- 
lais-Royal. A  côté  d'elle,  Mme  Thierret  a  reparu  dans  le  rôle  de 
Pulchérie,  mais  non  d'une  manière  définitive;  elle  n'est  là  qu'en 
passant. 

—  On  n'a  pas  oublié  l'immense  effet  produit  au  théâtre  impé- 
rial du  Châtelet  par  la  Prise  de  Pékin.  Ce  drame  de  M.  Dennery, 
inspiré  par  l'à-propos  de  notre  campagne  en  Chine,  ne  se  recom- 
mandait pas  seulement  par  un  grand  luxe  de  mise  en  scène;  on  y 
trouvait  une  action  intéressante,  des  détails  ingénieux  qui  ne  se  ren- 
contrent pas  toujours  habituellement  dans  les  pièces  de  circonstance. 
Aussi  devait-il  survivre  aux  événements  qui  en  ont  été  le  prétexte; 
l'Ambigu  s'en  est  emparé,  et  nous  avons  tout  lieu  de  croire  qu'il 
n'a  pas  fait  une  mauvaise  affaire.  Quoique  le  cadre  de  cette  scène 
ne  soit  pas  aussi  vaste  que  celui  du  Châtelet,  l'espace  est  encore 
suffisant  pour  faire  mouvoir  des  masses  respectables  et  pour  obte- 
nir des  résultats  satisfaisants.  Plusieurs  décors  sont  merveilleuse- 
ment réussis,  et,  entre  autres,  l'avant-dernier  qui  réalise  dans 
une  sorte  d'apothéose  le  rêve  enchanté  d'un  fumeur  d'opium. 
Quant  à  la  Fête  du  Palais  d'été,  elle  a  beaucoup  d'éclat,  et  les 
danses  en  sont  bien  tracées. 

La  distribution  des  rôles  ne  laisse  rien  à  désirer.  Clément-Just, 
qui  a  créé  au  Châtelet  le  rôle  original  du  correspondant  du  Times, 
l'a  conservé  à  l'Ambigu  et  s'y  fait  souvent  applaudir  à  juste  titre. 
Castellano  porte  fort  gaillardement  l'uniforme  de  sergent;  Omer, 
dans  un  personnage  dramatique,  a  une  agonie  des  plus  saisissan- 
tes; Régnier  et  Léon  Leroy  contribuent  pour  une  large  part  aux 
émotions  des  spectateurs,  tandis  que  Gaillard,  Allard  et  Boutin  se 
chargent  de  les  dérider.  En  résumé ,  nous  pensons  qu'il  y  a  dans 
la  Prise  de  Pékin  tous  les  éléments  d'une  reprise  longue  et  pro- 
ductive. 

D.  A.  D.  SAINT-YVES. 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 

^*ij:  Le  théâtre  impérial  de  l'Opéra  a  joué  cette  semaine  le  Trouvère, 
Herculanum  et  ta  Juice. 

*•*  La  reprise  d'Hamlet  aura  lieu  le  5  août.  Mlle  Nilsson  et  Faure 
feront  leur  rentrée  par  les  rôles  d'Ophélie  et  d'Hamlet. 

^■"s-,  Mlle  Hisson  continuera  ses  débuts  par  le  rôle  de  Valentine,  des 
Huguenots.  M.  Perrin  a  l'intention  d'entourer  cette  reprise  du  chef- 
d'œuvre,  qui  aura  lieu  au  mois  d'octobre,  d'un  éclat  exceptionnel  ;  les 
chœurà  seront  renforcés,  et  une  nouvelle  mise  en  sène  sera  adaptée  au 
deuxième  et  au  troisième  acte  ;  les  décors  et  costumes  des  trois  autres 
seront  restaurés  et  rafraîchi?,  etc. 

***  Les  études  d\irmide  sont  assez  suivies,  bien  qu'on  ne  sache  pas 
à  quelle  époque  l'œuvre  de  Gluck  sera  reprise  à  l'Opéra.  Voici  la  dis- 
tribution :  Armide,  Mme  Sass  ;  —  la  Haine,  Mme  Gueymard  ;  —  Sido- 
nie,  Mme  Levielli;  —  Phénice,  Mme  Hamakers  ;  —  Renaud,  M.  Villa- 
ret  ;  —  Hidraot,  M.  Devoyod,  —  Ubalde,  M.  Maurel  ;  —  le  Chevalier, 
M.  Warot;  —  Artemidar,  M.  Grisy  ;  —  Aronte,  M.  Gaspard. 

jf*t  Mlle  Marie  Batlu  a  pris  son  mois  de  congé,  à  partir  d'avant-hier 
1"'  août. 

^*«  Mme  Gueymard  a  obtenu  un  congé  de  deux  mois  (novembre  et 
décembre  prochains),  qu'elle  utilisera  en  chantant  à  Madrid  les  rôles  de 
son  répertoire. 

**^  M.  Obin  a  pris  un  congé  pour  raison  de  santé. 

^*sf  11  est  à  peu  près  certain  que  M.  Pasdeloup  prendra  la  direction 
du  théâtre  Lyrique. 

,**  Mme  Patti,  qui  appartiendra,  comme  on  le  sait,  du  !<"■  octobre  au 
1"  janvier  1869,  au  théâtre  Italien  de  Paris,  a  renouvelé  pour  deux  ans 
l'engagement  qui  l'attache  à  dater  de  cette  époque  au  théâtre  impérial 
de  Saint-Pétersbourg. 

»■**  La  réouverture    de  l'Athénée  aiu-a  lieu  le  2  septembre  prochain. 


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REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


par  la  79°  rcprc'scnlation  de  Fleur  de  Thé,  dont  le  succès  es't  loin  d'être 
épuisé . 

»*,  Leconile,  un  comique  qui  ne  manque  ni  de  naturel  ni  de  bon- 
homie, vient  de  débuter  heureusement  aux  Variétés  dans  le  rôle  de 
Calchas,  de  la  Oelle  Hélène. 

^*;s  Les  Dragons  île  Villars,  en  dépit  des  chaleurs  caniculaires,  ont  le 
don  d'attirer  la  foule  au  Gymnase  de  Marseille. 

,*»  Le  charmant  opéra  d'Aimé  Maillart  a  également  séduit  le  public 
de  Carcassonne,  grâce  à  une  complète  et  remarquable  interprétation. 
Mlle  Conti  s'est  tirée  avec  beaucoup  d'aisance  et  d'expression  du  rôle 
de  Rose  Friquel.  La  fjrande  scène  du  troisième  acte  a  été  parfaitement 
rendue.  M.  Rondeau  a  fori  bien  joué  et  chanté  Helamy. 

^*^  Fleur  de  Thé  vient  de  faire  sa  première  apparition  sur  la 
scène  du  Théâtre- français  de  Bordeaux  et  d'y  remporter  un  éclatant 
succès.  Cinq  soirées  n'ont  pu  répondre  complètement  à  l'empressement 
du  public,  car  le  départ  de  Mme  Hose  Bell  a  seul  arrêté  les  représenta- 
tions du  spirituel  opéra-bouffe  de  MM.  Cliivot  et  Daru.  On  a  fait  fêle 
à  la  jolie  musiqne  de  Charles  Lecocq,  qui  sait  rester  m'iodieuse,  fine 
et  distinguée  L'ouverture,  la  chanson  de  la  cantinière,  la  confi- 
dence :  Je  fuis  né  dans  le  Japon,  les  couplets  de  l'alcôve,  la  ronde  du 
Clicquot  ont  été  notamment  goûtés  et  accueillis  par  les  applaudissements 
les  plus  chaleureux.  Mme  Rose  Bell  joue  et  chante  le  rôle  de  Césarine 
avec  une  gaîlé,  un  entrain  remarquables;  aussi  a-t-elle  fait  à  Bordeaux 
ample  moisson  de  bravos  et  de  bouquets,  surtout  à  la  cinquième  re- 
présentation, qui  avait  lieu  à  son  bénéfice.  Mlle  Hermine  Contault, 
MM.  Carrier  (qui  doit  aller  chanter  Fleur  de  Thé  l'hiver  prochain  à 
New-York),  Uoque,  Briet,  etc,  possédaient  bien  leurs  rôles  et  ont  su  se 
faire  également  applaudir. 

^*,  Mme  Ulgade  et  sa  troupe  ont  donné  cette  semaine,  à  Nantes,  une 
représentation  de  la  Grande-Duchesse,  qui  a  rempli  la  vaste  salle  de  la 
place  Brancas. 

:if*^  Berthelier  est  actuellement  en  représentations,  à  Bruxelles,  au 
théâtre  du  Parc:  il  y  a  beaucoup  de  succès,  dans  les  Deux  Aueuglcs, 
rôle  de  GirafTier,  qu'il  a  créé  à  Paris. 

„.**  Les  Théâtres  italiens  ne  sont  pas  près  de  chômer  d'opéras;  les 
compositeurs  de  la  Péninsule  ne  veulent  point  mentir  à  leur  fécondité 
proverbiale.  Ainsi  on  annonce,  entre  autres,  la  prochaine  représentation 
à  Turin  d'un  opéra  de  Lauro  Rossi,  Gli  artisti  alla  fiera,  sur  un  poëme 
de  Ghislanzoni.  —  F.  Marcheiti  termine  un  limj-nius  dont  Carlo 
d'Ormeville  a  fait  le  librelto;  Gaelano  Braga  traite  le  même  sujet 
(par  parenthèse,  on  représente  en  ce  moment  un  nuy-Blas  à  Manheim); 
Arrigo-Boito  met  la  dernière  main  à  un  Ncrone  ;  un  opéra,  llde- 
go7ida,  de  Morales  est  sur  le  point  d'être  donné  à  Florence,  et  Dall'Ar- 
gine  travaille  à  son  Barbiere. 

^*^  On  a  réglementé  à  l'Opéra  de  Vienne,  non  pas  l'enthousiasme  du 
public,  mais  la  manière  dont  les  artistes  doivent  y  répondre.  L'inten- 
dance vient  de  remettre  en  vigueur  une  ordonnance  de  1863,  d'après  la- 
quelle il  est  interdit  aux  chanteurs  ordinaires  du  théâtre,  lorsqu'ils  sont 
rappelés  par  la  salle,  de  reparaître  à  un  autre  moment  qu'à  l'entr'acte. 
Par  exception,  s'ils  sont  rappelés  en  même  temps  qu'un  artiste  en  re- 
présentations, ils  peuvent  reparaître  avec  lui  à  un  autre  moment,  mais 
pas  plus  d'une  fois  par  représentation. 


NOUVELLES  DIVERSES. 


,*,  On  annonce  comme  pri.ichaine,  à  l'Académie  des  Beaux-Arts,  la 
séance  où  M.  Walewski  prononcera  l'éloge  de  la  vie  et  des  œuvres  de 
son  prédécesseur,  Georges  Kastner,  notre  ami  et  collaborateur,  si  univer- 
sellement regretté. 

sf*^,  Le  contrat  de  Mlle  Adelina  Palti  et  de  M.  le  marquis  de  Caux 
a  été  signé  le  27  juillet  à  Londres,  et  le  lendemain  la  cérémonie 
nuptiale  a  eu  lieu  à  l'église  Ste-Marie,  dans  Clapham-Park.  Les  témoins 
de  Mlle  Patti  étaient  M.  Costa  et  le  duc  de  Manchester;  ceux  de  M.  le 
marquis  de  Caux  étaient  M.  le  prince  de  la  Tour-d'Auvergne,  ambas- 
sadeur de  France  à  Londres,  et  M.  Mure,  attaché  de  l'ambassade.  Les 
demoiselles  d'honneur  de  Mlle  Patti  étaient  Mlles  Louisa  Lauw,  Maria 
Harris,  Rita  de  Candia,  Marie  Zanzy.  Mlle  Patti  était  ravissante, 
l'air  heureux  et  souriant  ;  elle  portait  une  robe  de  satin  blanc, 
un  voile  de  dentelle,  et  quelques  fleurs  d'oranger  dans  les  cheveux  ; 
pas    un    seul  bijou.    Le  père  de  Mlle  Patti,  M.  Strakosh,  le  comte  de 


l'Aigle,  le  bai'on  Baude,  le  comte  de  Luart,  M.  Fleury,  consul  général 
de  France,  le  comte  de  Cahen,  le  vicomte  de  Vire),  la  marquise  de 
Villevielle  ,  la  duchesse  de  Sunderland,  Mario ,  Mme  Grisi  et  ses 
filles,  M.  Harris,  M.  et  Mme  Tagliafico,  Clarke,  Carratti,  Gye,  le  di- 
recteur de  l'Opéra,  une  foule  d'ariistes,  enfin  tous  les  habitués  de  Co- 
vent-Garden  dont  Userait  trop  long  do  citer  les  noms,  assistaient  à  la 
cérémonie,  qui  du  reste  a  été  fort  simple.  Plus  de  dix  mille  personnes 
attendaient  les  jeunes  mariés  à  leur  sortie  de  l'église;  ils  ont  été  salués 
par  des  acclamations  enthousiastes.  Après  la  messe,  il  y  a  eu  un  dé- 
jeuner intime  servi  dans  le  jardin  de  Mlle  Patli,  à  la  fin  duquel 
M.  Grunei.sen,  critique  musical  des  plus  notables  en  Angleterre,  a  pro- 
noncé un  remarquable  speech.  M.  et  Mme  de  Caux  ont  traversé  Paris 
cette  semaine. 

t*,^  La  distribution  des  prix  a  eu  lieu  à  l'école  de  musique  reli- 
gieuse Niedermeyer,  le  27  juillet,  sous  la  présidence  de  M.  de  La 
Molle,  représentant  le  Ministre  de  la  justice  et  des  cultes,  en  présence 
de  plusieurs  dignitaires  du  clergé,  de  personnages  distingués  dans  les 
arts,  et  du  Comité  des  études  de  l'école.  Un  concert,  dans  lequel  on  a 
entendu  les  lauréats  des  classes  de  piano  et  des  chœurs  du  xvi"  siècle,  a 
ouvert  la  séance,  puis  M.  le  directeur  des  cultes  a  remis  un  diplôme 
d'organiste  à  l'élève  Edouard  Marlois,  et  un  diplôme  de  maître  de  cha- 
pelle à  Eugène  Baëtz.  Voici  les  noms  des  élèves  qui  ont  remporté  le  plus 
de  prix  :  MM.  Paul  Rakowski,  Eugène  Baëtz,  Alexandre  Georges, 
Ch.   Rauwel ,   Achille   Dupont,  Jules  Stoltz,  Louis  Gross. 

»*t  Les  concours  de  musique  entre  les  écoles  communales  de  la  ville 
de  P.iris  placées  sous  la  direction  de  M.  François  Bazin,  ont  eu  lieu  cette 
semaine.  Cent  vingt-sept  écoles  y  ont  pris  part.  Le»  premiers  prix  ont  été 
remportés  par  celles  des  rues  Bassano,  de  l'Ouest,  d'Eylau,  des  Prêlres- 
Saint-Germain-l'Auxerrois,  du  passage  Saint-Roch,  des  rues  Boissière,  de 
Vaugirard,  de  l'Arbre-Sec ,  Saint-André-des-Arts,  Saint-Jacques,  Saint- 
Eiienne-du-Mont,  de  Pontoise,  de  Reuilly,  de  Cîteaux,  de  la  place  Jeanne- 
d'.\rc,  de  la  rue  Boutetirie,  d'Argenteuil,  etc  ,  dont  les  professeurs  sont 
MM.  Mayer,  Hottin,  Minard  jeune,  Darnault,  Delafontaine,  Divis,  Léon, 
Collet,  Bariteau,  Pillevesse,  Pérou  et  Proust. 

t*„  L'éminent  compositeur  Jules  Bénédict  s'est  trouvé  à  Paris  cette 
semaine. 

**j  On  annonce  l'arrivée  de  F.  Ricci. 

,*»  M.  Ullman  organise  pour  l'hiver  prochain  une  grande  tour- 
née artistique  à  travers  l'Europe  centrale,  tournée  qui  embrassera  la 
Belgique  d'abord,  puis  le  Danemark  et  la  Suède,  ensuite  la  Russie, 
la  Pologne,  la  Suisse,  l'Allemagne  et  la  France.  Les  artistes  engagés 
par  le  célèbre  imprésario  pour  ces  voyages  dont  chaque  étape  est  mar- 
quée par  un  triomphe  sont  Mlle  Carlotta  Patti,  Mme  Tesseire,  MM.  Ge- 
raldy  et  Levassor  pour  le  chant  et  les  chansonnettes,  et  MM.  Vieux- 
temps,  Théodore  Ritter,  Jacquard,  de  Vroye,  Trenka. 

»*,f  Mlle  Laura  Harris,  Sleller,  M.  et  Mme  Alfred  Jaëll  concourent 
au  deuxième  concert  d'été  de  la  Société  philharmonique  de  Boulogne- 
sur-Mer. 

^*«  Mlle  Godefroid,  de  l'Opéra,  et  M.  Capoul,  de  l'Opéra-Comique,  sont 
engagés  pour  le  grand  concert  donné  par  la  Lyre  moulinoise  le  ven- 
dredi 14  août,  à  l'occasion  des   courses  de  Moulins. 

^*.  A  la  suite  du  beau  concert  qu'il  a  donné  à  Douai,  Sivori  s'est 
fait  entendre  dans  la  cathédrale  de  cette  ville,  devant  une  foule  émue 
et  recueillie. 

^"^^  Mlle  Valérie  Janson,  jeune  pianiste  belge  dont  nous  avons  eu 
l'année  passée,  l'occasion  de  mentionner  les  succès,  se  trouve  à  Paris  et 
s'y  fera  entendre  la  saison  prochaine. 

;j*^  M.  Henri  Poëncet,  notre  excellent  violoncelliste,  épouse  Mlle  Marie 
Pierre. 

^*»  Cent  trente-quatre  sociétés  ont  envoyé  leur  adhésion  au  Concours 
d'orphéons,  de  musiques  d'harmonie  et  de  fanfares  qui  aura  lieu  au 
Havre,  le  30  août  prochain.  Les  chœurs  imposés  sont  de  MM.  François 
Bazin,  Adrien  Boiëldieu,  Œschner,  L.  de  Rillé,  Aug.  Blavet  et  Marsch. 

^*,i:  Plus  de  tro:s  mille  chanteurs  s'étaient  donné  rendez-vous  aux 
fêtes  fédérales  qui  viennent  d'avoir  lieu  à  Soleure  (Suisse).  Trois  cou- 
pes d'honneur  avec  couronnes  et  diplômes  ont  été  décernées  aux  socié- 
tés étrangères  :  la  Concordia  et  la  Sainte-Cécile  de  Mulhouse  et  la 
Liedertafel  de  Fribourg.  Le  chœur  «  Aimons  toujours  »,  de  Joseph 
Heyberger,  a  été  vivement  goûté,  et  le  jury  s'e,-t  levé  d'un  commun 
accord  pour  donner  le  signal  des  applaudissements. 

,%  Dans  notre  compte  rendu  du  cinquième  concert  de  la  Conversa- 
tion, à  Bade,  nous  avons  omis  de  mentionner  le  succès  obtenu  par 
l'excellent  pianiste  J.-P.  Pujol,  dont  le  talent  a  été  justement  apprécié 
par  l'auditoire  d'élite  qui  assistait  à  cette  belle  soirée. 

,f*^  Après  avoir  séduit  les  rois  et   entraîné  les  populations  des    deux 


DE  PAIUS 


247 


mondns,  la  Grande- Duclv- an  de  Ccrohicin  a  eu  le  caprice  do  publier  un 
jnur'iial  sous  !i^  titre  ilc  :  la  Fantaisie  parisienne;  nous  eu  avons  le  pre- 
mier numéro  sous  les  yeux.  Ni  mieux,  ni  plus- mal  qu'ailleurs,  on  y 
parle  de  juusique,  de  théâtre,  de  littérature  et  de  modes. 

**.  Un  nouveau  Journal  de  musique  vient  de  paraître  à  Naples,  sous 
le  litre  dé  A'a/io/t  musicute.  \\  a  pouT  directeur  Luigi  Mazzone,  ancien 
rédacteur  cii  dief  de  la  Gazetla  musicale  de  la  même  ville. 

f*^,  Aujourd'hui,  par  extraordinaire,  grand  concert  vocal  et  instru- 
mental donné  au  Pié-Catelan,  avec  le  concours  du  Quatuor  toulousain 
et  de  la  Musique  des  Zouaves. 


ÉTRA  NGER 


»*4  Londres.  —  La  magnifique  représentation  de  clôture  à  Covent-Gar- 
den ,  au  bénéfice  d'Adelina  Putti,  a  produit  le  maximum  de  la  recette, 
trente  mille  francs.  S.  A.  la  duchesse  de  Cambridge,  la  princesse  de 
Teck,  sa  fille,  et  toute  raristocr.itie  anglaise  y  assistaient.  Les  dames  agi- 
taient leurs  iTiouchoirs,  en  envoyant  à  la  charmante  artiste  un  sympa- 
thique :  «  Au  revoir!  »  —  Un  nouveau  ténor,  M.  Bulterini,  a  débuté 
avec  succès  dans  lUgoletlo  à  Her  Majesly's  Opéra.  Avaiit  hier,  vendredi, 
brillante  représentation  au  bénéfîi'e  de  Christine  Nilsson  :  premier  acte 
de  la  Traviala,  deuxième  de  Faust  et  troisième  de  Lucia.  Combien  la 
charmante  artiste  a  été  acclanièe  et  fêtée,  il  n'est  pas  besoin  de  le  dire. 
Hier  samedi  a  dû  avoir  lieu  la  clôture  au  bénéfice  de  Mlle  Tietjens.  — 
Le  cent  cinquante-cinquième  festival  des  trois  chorales  de  Gloucester, 
Worcester  et  Hereford  aura  lieu,  du  8  au  11  septembre  prochain,  à  Glou- 
cester. On  y  exécutera  la  Création,  la  messe  en  ut ,  de  Beethoven,  Èlie, 
Samson,  le  Messie,  di;s  fiagmenis  du  FreisckUtz,  de  la  Loreley,  de  Men- 
delssohn,  de  Don  Giovanni,  etc.  Les  principaux  artistes  sont  :  Mmes  Tiet- 
jens, Liebhart,  Edith  Wynne,  Sain  Ion -Dolby,  Zandrina,  MM.  Sims  Ree- 
yes,  Vernbn  Rigby,  Lewis  Thomas  et  Santlt-y.  Le  docteur  S.  S.  Wesley, 
par  le  droit  que  lui  confère  son  titre  d'organiste  de  la  cathédrale,  diri- 
gera l'exécution.  —  Otto  Goldscbmidt,  le  mari  de  Jenny  Lind,  a  résigné 
ses  fonctions  de  vice-principal  de  l'Académie  Royale  de  musique,  qui 
avaient  été  créées  exprès  pour  lui. 

^%  Spa.  —  Le  premier  concert  de  la  saison  a  eu  lieu  vendredi  de 
rkutre  semaine,  à  la  Redoute.  L'ouverture  de  Sainte-Claire,  du  duc  de 
Saxe-Cobourg,  servait  de  pr.'lude  à  cette  brillante  soirée.  M.  Géraldy  a 
chanté  avec  une  rare  macsiria  plusieurs  morceaux,  l'air  des  Noces  de 
Figaro  notamment.  Mlle  Brunctti  a  dit  d'une  manière  ravissante  une 
Sérénade,  de  Gounod,  et  la  cavatine  de  Lucie.  M.  de  Vroye,  flûtiste  excel- 
lent, dont  la  réputation  s'accroît  chaque  jour,  a  joué  une  fantaisie  sur 
des  mélodies  valaques,  qui  a  été  chaleureusement  applaudie. 

,i.*^  Gand.  —  Dans  un  récent  concert,  une  jeune  cantatrice,  Mme  Fir- 
mani,  s'est  révélée  avec  éclat  en  chantant  l'air  de  Grâce,  de  Hubert,  et  en 
prenant  part  h  l'exécution  de  la  Bénédiction  des  poignards,  des  Huguenots. 
La  basse  'T^lexis  Tasson  et  le  baryton  De  Ligne  ont  obtenu  aussi  le  plus 
grand  succès  dans  l'interprétation  de  la  page  magistrale  de  Meyerbeer  et 
de  la  grande  cantate  Van  Arteveld,  do  Cevaert. 

.^.*,f  Horr.bourg.  —  Le  Faust,  de  Gounod,  a  continué  la  série  des  repré- 
sentations de  l'Opéra-ltalien.  Cette  œuvre  avait  attiré  une  réunion  des 
plus  choisies  et  a  été  admirablement  iuterprétée.  Désirée  Artôt  réalise  le 
type  rêvé  de-  Marguerite.  Son  succès  a  été  plus  accusé  encore,  s'il  se 
peut,  que  dans  la  Fille  du  Hégimcnt  ;  bravos  et  rappels  lui  ont  été  pro- 
digués, et  après  l'air  des  Bijoux,  qu'elle  a  dit  bisser,  les  fleurs  sont  tom- 
bées de  toutes  les  parties  de  la  salle.  Agnesi  continue  à  faire  admirer  .'a 
voix,  son  jeu  et  sa  personne  Mlle  Boltini  débutait  dans  le  rôle  de  Sie- 
bel :  jeune  et  gentille,  elle  dirige  avec  goût  une  fort  belb:  voix  de  con- 
tralto. L'orchestre  et  les  chœurs,  sous  la  direction  de  l'habile  Orsini, 
ont  parfaitcuient  marché. 

/,  Berlin.  —  D'après  le  désir  de  S.  M.  la  reine,  un  compositeur 
d'une  renomniée  européenne,  mais  dont  le  nom  est  encore  un  .secret, 
serait  appelé  à  remplir  ici  les.  fonctions  de  Gencral-Husikdireclor,  ][i.(X[s, 
exercées  avec  tant  d'éclat  par  Spontini  et  Meyerbeer,  et  que  personne 
n'a  occupées  depuis  l'auteur  des  Huguenots. 

^*^  liœnigsberg.  —  Le  22  juillet,  la  Grande- Duches!^e  de  Gérolstein  fai- 
sait sa.  triomphante  apparition  sur  notre  scène.  Mlle  Stubel,  charmante 
acirico  viennoise,  chargée  du  principal  rôle,  y  a  déployé  un  incontestable 
talent. 

^,*ii,  Hambourg,  r-  Un'  franc  succès  a  accueilli  une  jolie  opérelte 
d'Eberlé,  Barbe-Bkue,  donnée  au  théâtre  de  Tivoli. 

,^%  Milan.  —  Depuis  le  décret  qui  supprime  les  subventions  théâ- 
trales accoi;dées  par  le  gouvernement ,   la  Scala  a  toutes  les  peines  du 


monde  à  suhsi.-lor;  la  municipalité  n'a  pu  arriver  à  lui  donner  que 
133.000  francs,  et  a  été  obligée  d'avoir  recours,  pour  arrondir  la  .somme, 
à  une  .souscription  publique  qui,  bien  qu'ouverte  depuis  plusieurs  mois, 
n'a  encore  produit  que  2,S00  francs.  Néanmoins,  les  off'rcs  pour  le  con- 
cours à  la  direction  ne  manquent  pas;  on  elle  au  preinier  rang  le  pré- 
cédent imprésario  G.  Bonola,  qtii  doute  si  peu  de  sa  nomination  qu'il 
fait  déjà  de  nombreux  engagements.'  —  Nous  aurons  probablement  en 
septembre  et  octobre,  au  théâtre  Santa-Radegonda,  la  Grande-Duchesse, 
Fleur  de  Thé,  la  Belle  Hélène,  et  quelques  autres  opérettes  du  répertoire 
boutfc  parisien.  Les  macstri  Gallieri  et  Iremonger,  en  prenant  la  direc- 
tion de  l'aniien  théâtre  Re,  ont  l'intention  d'y  donner  leurs  deux  nouvelles 
partitions  :  Ser  Maltco  et  Una  notle  di  novembri;. 

^"ji,  Turin.  —  Le  théâtre  Alfieri  vient  de  s'ouvrir  avec  Maria,  oh 
Mlles  Sidonie  et  Virginie  Van  der  Beck  ont  fait  furore.  C'est  un  succès 
de  bon  augure  pour  le  reste  de  la  saison. 

^'.^  Florencf.  —  Les  principaux  artistes  engagés  à  la  Pergola  pour  la 
saison  de  carnaval  1808-69  sont  Mlle  Camille  de  Maësen,  le  baryton 
Cresci,  le  basso-bu/fo  Polonini  et  la  première  danseuse  Pochini-Coppini. 

^*^  Naples.  —  Deux  jeunes  danseuses  du  théâtre  Partenope,  Amalia 
Tromba  et  Emilia  Alsaniello,  viennent  de  périr  victimes  de  leur  impru- 
dence; rappelées  après  un  de  leurs  pas,  elles  s'approchèrent  trop  près 
de  la  rampe,  le  feu  prit  à  leurs  robes,  et  elles  ne  purent  être  secou- 
rues à  temps. 


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Tournisaeur  dea  IMInIstèreB  de  la  '                                                                                                          Faetenr  dii    mnai>rvntniv»  x  d» 

fiuerre  e»  de  I.  Marine  de  Vranee  *"«•  •«'  Membres  du  Jury  International  décernent  la  Médaille  à                    .f!     ".       ,     «»■»«"»«»"•«'  ««  «"• 

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9  Août  1868. 


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REVUE 


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Étranger 3i  n       id. 

Le  Joumol  paraît  le  Dimanche. 


TTE  MUSICALE 


DE     PARI 


SOMMAIRE.  —  Conservatoire  impérial  de  musique  et  de  déclamatioa  :  dis- 
tribution des  prix.  —  Les  Etoiles  du  chant  :  Adelina  Patti,  de  M.  Guy  de  Char- 
nacé,  par  Em.  Slatbieu  de  Monter.  —  Correspondances  :  Vicby  et  Deau- 
ville.  —  Entrefilets.  —  Nouvelles  des  théâtres  lyriques.  —  Nouvelles  diverses. 
—  Annonces. 


CONSERVATOIRE  IUPÉRIÂL  DE  MUSIQUE  ET  DE  DËCLÂIÂTION. 

Distribution  des  prix. 

Exercice  4867-1S68. 

La  distribution  des  pri.x  a  eu  lieu  mardi  dernier,  à  2  heures,  au 
Conservatoire,  dans  la  grande  salle,  sous  la  présidence  de  M.  le 
maréchal  Vaillant,  ministre  de  la  Maison  de  l'Empereur  et  des 
beaux-arts. 

A  côté  de  Son  Excellence,  ont  pris  place  :M.  Gautier,  secrétaire 
général  du  ministère  de  la  Maison  de  l'Empereur  et  des  beaux- 
arts  ;  M.  Auber,  de  l'instilut,  directeur  du  Conservatoire;  M.  Ca- 
mille Doucet,  de  l'Académie  française,  directeur  général  de  l'ad- 
ministration des  théâtres  ;  M.  Deschapelles,  sous-chef  du  cabinet 
du  ministre;  M.  Ambroise  Thomas,  de  l'Institut;  M.  deBeauplan, 
commissaire  impérial  près  les  théâtres  lyriques  subventionnés  et 
le  Conservatoire  ;  M.  Albéric  Second,  commissaire  impérial  près  le 
théâtre  de  l'Odéon  ;  M.  de  Lassabathie,  administrateur  du  Conser- 
vatoire ;  les  directeurs  des  théâtres  impériaux. 

Venaient  ensuite  les  professeurs  du  Conservatoire  et  les  membres 
du  jury  des  différents  concours. 

Le  ministre  a  ouvert  la  séance  par  le  discours  suivant,  fréquem- 
ment interrompu  par  les  applaudissements  des  élèves  et  de  l'au- 
ditoire. 

«  Croyez-le  bien,  jeunes  élèves,  ce  n'est  pas  uniquement  à  venir 
une  fois  chaque  année,  comme  je  le  fais  encore  aujourd'hui,  vous 
apporter  des  encouragements  et  des  couronnes  que  se  borne 
l'intérêt  tout  particulier,  j'allais  dire  tout  paternel,  dont  je  me  sens 
de  plus  en  plus  animé  pour  vos  travaux.  Hors  de  cette  enceinte, 
mon  attention  se  porte  souvent  et  avec  sollicitude  sur  l'organisa- 
tion du  Conservatoire,   sur  les  phases  diverses  par  lesquelles  il  a 


passé  depuis  sa  création,  sur  les  services  qu'il  a  rendus,  sur  le 
bien  qu'on  doit  en  attendre,  et  souvent  je  me  suis  demandé  quelles 
améliorations  pourraient  être  mises  en  vigueur  pour  donner  des 
garanties  nouvelles  au  développement  de  l'art  et  à  l'éducation  des 
artistes . 

»  Mais,  si  je  reconnais  volontiers  qu'ici,  comme  ailleurs,  le  pro- 
grès n'a  pas  dit  son  dernier  mot,  si  je  me  sens  pour  ma  part  très- 
désireux  de  seconder  son  essor  autant  qu'il  me  sera  donné  de  le 
faire,  je  n'en  aime  pas  moins  à  rendre  hautement  justice  à  cette 
école  célèbre  d'oîi  sont  déjà  sortis,  dans  toutes  les  branches 
de  l'art  musical  et  dramatique,  tant  de  talents  de  premier  ordre. 

»  Chargé,  comme  son  nom  l'indique,  de  conserver  les  traditions 
des  grandes  époques  artistiques,  le  Conservatoire  a  rempli  sa  mis- 
sion avec  un  respect  pieux,  et  je  l'en  félicite.  Je  le  félicite  égale- 
ment de  la  réserve  prudente  avec  laquelle  il  a  toujours  examiné 
consciencieusement,  et  sans  esprit  de  routine,  avant  de  les  écarter, 
des  inventions  séduisantes,  mais  dangereuses,  dont  l'adoption  eût 
dénaturé  un  enseignement  auquel  ont  été  dus  de  si  nombreux  et 
de  si  brillants  succès. 

»  D'un  autre  côté,  tandis  qu'il  avait  ainsi  la  sagesse  et  le  cou- 
rage de  combattre  pour  l'honneur  de  son  foyer,  le  Conservatoire, 
sans  autre  parti  pris  que  celui  de  bien  faire,  a,  je  le  sais  et  je  le 
constate,  accueilli  a\'ec  empressement  toutes  les  améliorations  qu'il 
a  reconnues  sérieusement  utiles. 

»  Tous  les  perfectionnements  apportés  de  nos  jours  dans  la  fac- 
ture des  instruments,  il  les  a  consacrés  en  les  patronnant;  il  a 
spontanément  adopté  un  grand  nombre  de  nouvelles  et  excellentes 
méthodes  de  chant;  et  d'importants  ouvrages,  marquant  le  point 
culminant  de  la  science  moderne,  ont  été  récemment  introduits 
dans  les  classes  de  solfège,  d'harmonie  et  de  composition,  à  côté 
des  anciens  solfèges  et  des  anciennes  méthodes  qui  seront  toujours 
l'honneur  du  Conservatoire  et  qui  resteront  les  classiques  de  vos 
études. 

»  Mais  ne  nous  y  trompons  pas,  Messieurs,  il  s'en  faut  de  beau- 
coup que  le  secret  de  la  réussite  soit  tout  entier  dans  la  qualité 
des  méthodes  ;  il  est  surtout  et  presque  uniquement  dans'l' aptitude 
naturelle  des  élèves,  dans  leur  intelligence,  dans  leur  zèle,  dans 
leur  persistance  et  leur  soumission  au  travail.  Comme  les  fonda- 


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REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


lions  solides  font  seules  les  monuments  durables,  ce  sont  les  fortes 
études  qui  seules  font  les  grands  artistes.  Bâtissez  donc  de  bonne 
heure,  sur  un  terrain  affermi,  l'édifice  de  votre  avenir.  Le  talent 
ne  s'improvise  pas,  et  le  génie  lui-même,  ce  don  divin,  a  besoin 
d'être  développé  et  soutenu  par  un  profond  savoir.  Aussi,  un 
écrivain  philosophe  a-t-il  osé  dire  :  «  Le  génie  n'est  qu'une  longue 
patience.  » 

»  La  longue  patience  n'est  pas  trop  une  qualité  de  noire  épo- 
que, jeunes  élèves  :  méfiez-vous  des  entraînements,  et  résistez  de 
toutes  vos  forces  à  ce  besoin  d'arriver  vite  que  chacun  semble 
éprouver  aujourd'hui.  Si  ^ous  voulez  aller  jusqu'au  bout,  ne  cher- 
chez pas  trop  à  abréger  la  route  ;  on  s'égare  souvent  en  prenant 
les  cliemins  de  traverse;  marchez  donc  bravement  au  but  loin- 
tain, sans  vous  en  laisser  détourner  par  de  vaines  chimères  ou 
pai*  des  tentations  décevantes. 

»  Que  la  science  garde  sa  vapeur  !  Pour  les  arts  comme  pour 
les  lettres,  le  temps  ne  fait  rien  à  l'affaire:  ce  n'est  pas  en  se  hâ- 
tant outre  mesure,  ce  n'est  pas  en  employant  pour  simplifier  leur 
travail  des  moyens  expéditifs  et  des  procédés  empiriques  que  les 
maîtres  ont  appris  à  composer  ces  chefs-d'œuvre  qui  seront  tou- 
jours vos  premiers  modèles  :  Gluck  et  Mozart,  Beethoven  et  Ra- 
meau, Haydn  et  Méhul,  Cherubini  etMeyerbeer,  tant  d'autres  que 
je  n'oublie  pas  et  dont  les  noms  sont  sur  vos  lèvres,  protesteraient 
en  faveur  des  grandes  études  et  des  grandes  traditions  dont  le 
Conservatoire  est  le  gardien  vigilant  et  jaloux.  A  ces  voix  des 
morts  se  joindraient  celles  des  vivants;  la  plus  autorisée  et  la 
plus  puissante  s'élèverait  à  la  fois  de  Pcisaro  et  de  Passy,  et  dans 
cette  salle  même,  au  milieu  de  vous,  comme  autour  de  moi,  un 
témoignage  unanime  voudrait  au  besoin  défendre  la  maison  qui 
conserve,  et  rendre  hommage  à  l'illustre  chef  qui  la  couvre  de  sa 
gloire. 

»  Je  me  reprocherais  de  vous  faire  longtemps  attendre  vos 
couronnes  et  l'heure  de  votre  liberté. 

»  Mais  comment  nous  séparer  sans  offrir  des  remercîments  aux 
maîtres  que  vous  allez  momentanément  quitter,  et  sans  payer  un 
tribut  de  regrets  à  ceux  que  la  mort  nous  a  ravis  pour  toujours, 
pendant  le  cours  de  cette  année  :  à  MM.  Meifred  et  Giuliani ,  bien 
dignes  tous  deux  de  la  reconnaissance  de  leurs  élèves  ;  à  M.  Pru- 
mier,  mortellement  frappé  dans  une  séance  du  comité  des  études 
musicales,  sur  ce' champ  de  bataille  où  il  s'était  longtemps  dis- 
tingué ;  à  ce  jeur.e  Barthélémy  enfin  qui,  succombant  tout  à  coup, 
après  cinq  mois  à  peine  de  professorat,  semble  n'être  entré  au 
Conservatoire  que  pour  y  laisser  des  regrets. 

»  Vous  m'en  voudriez  de  ne  pas  prononcer  le  nom  de  MM.  Kastner 
et  Edouard  Monnais  :  attaché  au  personnel  du  ministère  des 
beaux-arts,  Edouard  Monnais  remplissait  auprès  du  Conservatoire 
des  fonctions  délicates  que,  par  son  esprit  de  conciliation,  il  avait 
su  rendre  faciles  pour  lui  et  agréables  pour  les  autres.  Il  a  mérité 
ainsi  que  les  deux  administrations,  auxquelles  il  inspirait  Ja  même 
sympathie  et  la  même  estime,  éprouvassent  le  même  chagrin  en 
le  voyant  enlevé  sitôt  à  ses  amis  et  à  sa  famille. 

»  C'est  comme  membre  du  comité  des  études  musicales  que 
M.  Kastner  a  pu  rendre  et  a  rendu,  en  effet,  de  très-réels  services 
au  Conservatoire.  Érudit  de  premier  ordre,  auteur  de  nombreux 
ouvrages  sur  l'histoire  et  la  philosophie  de  la  musique,  il  prêtait 
à  vos  études  le  plus  sérieux  concours  et  encourageait  vos  travaux 
avec  une  infatigable  ardeur. 

»  Le  Conservatoire  a  ce  mérite  et  cet  honneur  que,  pour  peu 
qu'on  l'ait  connu,  on  l'aime  et  on  le  fait  aimer.    • 

»  Au  commencement  de  ce  siècle,  un  brave  professeur  nommé 
Nicodami  enseignait  ici  le  piano  à  ceux  qui  l'ont  enseigné  à  vos 
maîtres.  Héritière  de  ses  sentiments  pour  le  Conservatoire,  sa  veuve 
vient,  en  mourant,   de  nous  léguer  le  buste  en  marbre  du  vieux 


professeur,  avec  une  rente  perpétuelle  de  SOO  francs  que  nous  em- 
ploierons le  mieux  possible  en  son  nom. 

»  Pour  bien  commencer,  et  en  souvenir  de  l'enseignement  spé- 
cial professé  par  Nicodami,  c'est  à  la  classe  de  piano  que  seront 
consacrés  les  premiers  arrérages  de  celte  rente;  une  moitié  en 
sera  remise  à  l'élève  qui,  dans  les  classes  d'hommes,  aura  obtenu 
le  premier  prix  de  piano,  et  l'autre  à  l'élève  qui,  dans  les  classes 
de  femmes,  ayant  partagé  le  premier  prix  avec  deux  de  ses  cama- 
rades, aura  été  désignée  pour  cette  récompense  par  vote  spécial 
du  jury. 

»  Ainsi,  môme  de  la  part  de  ceux  qui  ne  sont  plus,  vous  rece- 
vez des  encouragements  précieux;  mais  les  meilleurs  vous  viennent 
toujours  de  vos  maîtres,  et  avant  tout  de  votre  illustre  chef,  à  qui, 
pendant  sa  brillante  carrière,  le  talent  ne  s'est  pas  lassé  de  rester 
fidèle.  C'est  une  gloire,  pour  la  musique  française  et  pour  nous,  de 
le  voir,  dans  sou  inépuisable  fécondité,  mériter,  à  chaque  nouvehe 
épreuve,  de  garder  sa  place,  la  première,  à  la  tête  de  la  jeunesse 
militante. 

))  Après  lui,  et  marchant  avec  respect  sur  ses  traces,  l'auteur 
de  la  Double  Échelle  et  de  Mlynon,  du  Songe  d'une  nuit  d'été  et  de 
Hamlet,  n'a  cessé,  depuis  trente  ans,  de  donner,  à  ses  rivaux 
d'abord,  et  maintenant  à  ses  élèves,  l'exemple  du  travail  et  du 
succès. 

.1  Pour  l'en  récompenser  et  pour  honorer  en  même  temps  le 
corps  enseignant  du  Conservatoire  dans  l'un  de  ses  plus  dignes 
professeurs,  l'Empereur  a  bien  voulu,  et  je  vous  l'annonce  avec 
grand  plaisir,  élever  M.  Ambroise  Thomas  au  grade  de  comman- 
deur dans  l'Ordre  impérial  de  la  Légion  d'Honneur.  » 

Une  triple  salve  d'applaudissements  a  accueilli  cette  nouvelle. 
M.  Ambroise  Thomas,  en  effet,  est  aimé  de  tous,  autant  pour  l'é- 
lévation de  son  talent  que  de  son  caractère. 

La  séance  s'est  terminée  par  un  concert  et  des  fragments  de 
pièces,  dans  lesquels  les  principaux  lauréats  se  sont  fait  entendre. 

Voici  le  programme  dans  l'ordre  de  son  exécution  : 

1°  Fragment  du  premier  concerto,  pour  piano,  de  Chopin 
(œuvre  H"),  exécuté  par  Mlle  Doumerguc; 

2°  Air  de  la  Dame  du  Lac,  de  Rossini,  chanté  par  M.  Solon; 

3"  Fantaisie  appassionata,  pour  violon,  de  Vieuxtemps,  exécutée 
par  M.  Franz  Ries; 

4'  Air  de  Zaire,  de  Mercadante,  chanté  par  M.  Aubéry  ; 

S"  Duo  pour  saxophone-alto  en  mi  bémol  et  saxhorn-contralto 
en  si  bémol,  exécuté  par  MM.  Ollagnier  et  Chavanne  ; 

6"  Fragments  du  deuxième  acte  de  Mina,  de  M.  Ambroise 
Thomas  ; 

7"  Fragments  du  quatrième  acte  de  Lady  Tartuffe,  de  Mme  Emile 
de  Girardin  ; 

8°  Fragments  du  deuxième  acte  de  l'Eclair,  d'Halévy. 


LES  ÉTOILES  DU  CHANT. 

Première  livraison.    —    Adctfna  Patti, 

Par  M.  GUY  DE  CHARNACÉ. 

A  Monsieur  Guy  de  Charnacé. 

Prenant  pour  guides  votre  délicatesse  de  dilettante,  votre  goût 
de  critique  et  votre  loyauté  de  gentilhomme  —  trois  noblesses!  — 
vous  venez.  Monsieur,  de  demander  à  la  première  l'oubli  «  des 
gi'acieux  sourires  et  des  propos  mahns,  «  d'éviter,  grâce  à  la  se- 
conde, «  le  danger  de  flatter  aux  dépens  de  la  vérité,  »  de  ren- 
contrer enfin  dans  la  troisième  le  rare  secret  d'une  respectueuse 


bE  1>AI!1S. 


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courtoisie,  pour  peindre,  à  votre  tour,  en  «  observateur  conscien- 
cieux, »  cetle  merveilleuse  fillette,  en  moins  de  dix  ans  devenue  la 
diva  cliérie  des  deux  mondes,  cette  adorable  enfant,  bambina 
d'amore,  qui  réunit  la  gaieté  de  Ninon,  la  douleur  d'Iphigénie, 
l'éclat  de  Mme  Tallien,  à  ce  je  ne  sais  quoi  qui  est  son  propre 
charme  et  son  attrait  vainqueur  à  elle. 

De  cette  jeunesse,  de  ces  yeux  brillants,  de  ces  joues  en  fleur,  de 
ce  sourire  expressif ,  de  cette  voix  aussi  sonore  et  aussi  pure  que 
le  cristal  de  roche,  de  cette  âme  d'artiste,  de  tout  ce  bonheur  et 
de  toute  cette  gloire  vous  avez  su  composer.  Monsieur,  un  pastel 
dont  les  fraîches  couleurs  ne  pâlissent  pas  à  côté  du  délicat  burin 
de  Morse.  Cette  légèreté  de  main  et  cette  richesse  de  palette  vous 
prédestinaient,  eu  vérité,  à  créer  la  galerie  des  divinités  lyriques. 
Vous  n'êtes  pas ,  au  surplus ,  de  ces  historiens,  petits-cousins  des 
rhéteurs  qui,  ne  sachant  bien  que  quelques  points  de  leur  sujet,  à 
ces  points  sacrifient  le  reste,  et  sont  obligés,  par  des  suppositions, 
par  des  vues,  par  des  phrases,  de  combler  les  intervalles  et  de  dissi- 
muler leur  embarras.  Non,  rien  de  votre  modèle  ne  vous  était  in- 
connu; vous  l'aviez  étudié  selon  les  conditions  mêmes  de  sa  na- 
ture. Aussi  nous  en  avez-vous  donné  une  vive  et  fidèle  description, 
tout  en  le  classant  impartialement  et  le  mettant  à  sa  place  dans 
l'ordre  artistique.  Vous  n'avez  pas  rempli  toutefois  cette  tâche  dif- 
ficile entre  toutes,  —  cai-  enfin  il  s'agissait  d'une  femme  et  de 
quelle  femme!  En  y  songeant  j'ai  honte  d'être  obligé  de  mettre 
les  mots  pédants  de  classement,  d'ordre  et  de  place,  en  regard  de 
cette  «  fleur  qui  boit  une  chanson;  »  —  vous  n'avez  pas  accom- 
pli votre  œuvre  avec  la  raideur  habituelle  de  l'analyse,  et,  quoique 
vous  cherchiez  à  vous  en  défendre,  si  boutonné  que  vous  vouliez 
être  en  votre  «  rigide  habit  noir  »  d'homme  d'expérience  et  de 
sang-froid,  en  dépit  de  vos  critiques  elles-mêmes,  ah!  comme  on 
voit  bien.  Monsieur,  que  vous  prêtez  une  attention  émue,  une 
oreille  domptée  au  charmant  ramage  qui  gazouille  dans  votre  sou- 
venir; comme  l'on  sent  bien  que  vous  avez  médité  la  gracieuse 
maxime  des  Indous  :  Ne  frappez  pas  une  femme,  même  avec  une 
rose! 

.le  m'explique  parfaitement  que  vous  ayez  voulu  faire  rayonner 
Adelina  Patti,  la  première,  dans  le  ciel  radieux  des  Étoiles  du 
chant,  et  que  votre  enthousiasme  —  un  joyau  que  nul  ne  porte 
mieux  que  vous  —  n'ait  pu  résister  au  désir  légitime  de  placer 
votre  début  sous  la  protection  de  sa  célébrité.  Le  contraire  m'eût 
surpris ,  et ,  cependant ,  il  eût  été  peut-être  plus  sage,  sinon  plus 
habile,  de  commencer  par  l'examen  d'une  étoile  de  moindre  gran- 
deur, de  celles  qui  scintillent  mais  ne  rayonnent  pas  encore,  ou 
de  celles  qui  ont  brillé  d'un  vif  éclat  et  s'éteignent  à  l'horizon; 
de  vous  faire  la  main,  en  un  mot  —  passez-moi  cette  expression 
—  par  l'étude  d'une  personnalité  moins  lumineuse.  Vous  auriez 
pu  ainsi  introduire  plus  d'ordre  dans  votre  plan,  et  au  lieu  de 
présenter,  par  exemple,  un  peu  pêle-mêle,  l'artiste  dans  ses  créa- 
tions diverses,  opposer  plus  directement  ses  créations  les  unes 
aux  autres ,  les  comparer  dans  leur  essence  môme,  et  de  ce 
choc,  de  ce  rapprochement  philosophique,  si  mieux  vous  aimez, 
faire  jaillir  la  vérité  comme  une  étincelle.  Les  publications  du 
genre  de  la  vôtre  ont  une  optique,  vous  le  savez  mieux  que  moi. 
Après  la  sincérité  de  mes  éloges,  me  permettrez-vous ,  Monsieur, 
une  légère  critique?  Eh  bien!  je  suis  persuadé  que,  si  vous  aviez 
écrit  au  préalable  deux  ou  trois  de  ces  livraisons  —  publiées  avec 
un  luxe  qui  rend  exigeant  —  vous  n'eussiez  pas  employé  dans  la 
biographie  d'Adelina  Patti  certaines  expressions,  «  rossignol  en 
colère,  »  par  exemple,  laquelle,  appliquée  à  votre  héroïne,  ne 
laisse  pas  que  de  surprendre  et  de  détonner  un  peu  sur  l'en- 
semble si  mesuré  de  votre  intéressante  appréciation. 

«  La  froide  critique,  —  dites-vous  judicieusement, —  veut  ana- 
lyser les  causes  et  les  effets,  distinguer  le  vrai  du  faux,  l'enthou- 


siasme passager  de  la  gloire  durable,  être,  en  un  mot,  un  ensei- 
gnement. »  Le  beau  programme,  Monsieur ,  et  c'est  le  vôtre  !  Ce 
sera  le  mien,  s'il  vous  plaît,  pour  examiner  d'un  peu  près  quelques 
parties  de  votre  toile,  plus  importante  qu'elle  ne  le  paraît  de 
prime  abord  et  en  appeler  à  vos  souvenirs  et  à  l'impartialité, 
de  votre  jugement.  A  votre  opinion,  à  l'opinion  des  juges  dont 
vous  vous  entourez  comme  d'autant  d'assesseurs  austères,  —  et  à 
ce  propos,  pourquoi  avoir  troublé  le  sommeil  de  M.  Scudo? 
—  j'opposerai,  il  est  vrai,  ma  propre  manière  de  voir  et  celle  de 
mes  tenants,  et  peut-être  arriverons-nous  ainsi  à  un  portrait  plus 
ressemblant  que  nature.  N'a-t-elle  pas  assez  de  malice,  la  char- 
mante marchesina,  pour  nous  donner  tort  à  tous  deux? 

Votre  récit  de  l'enfance  et  des  pérégrinations  artistiques  en 
Amérique  de  la  mignonne  et  capricieuse  petite  prodige  est  parfai- 
tement mené.  Il  m'a  été  agréable  de  vous  voir  rendre  justice  à 
M.  Maurice  Strakosch,  qui  créa  et  mit  au  monde  musical  la  jeune 
Adelina  :  peu  d'hommes,  en  effet,  sont  doués  d'autant  d'habilité, 
de  patience,  de  tact  et  de  volonté  que  cet  étonnant  professeur. 
Votre  définition  de  la  voix  de  la  diva  est  exacte  autant  qu'ingé- 
nieuse; je  crois  cependant  que  votre  pensée  a  été  forcée  par  les 
termes  qui  la  rendent,  lorsque  vous  écrivez  que  «  sa  vocalisation 
est  brusque,  emportée,  violente;  elle  n'a  ni  le  fini,  ni  le  poli,  ni  le 
legato  eportando  la  voce.  »  Passons  donc  condamnation  une  bonne 
fois  sur  ces  notes  piquées,  empruntées  par  elle  à  Mme  de  la  Grange, 
sa  devancière  :  elle  en  abuse  un  peu,  on  le  lui  a  assez  reproché, 
parce  qu'on  ne  pouvait  pas  lui  reprocher  autre  chose;  mais  le 
public  se  pâme  de  joie  à  ces  «  cocottes,  »  et  le  public  l'aime  tant, 
qu'il  faut  bien  qu'elle  fasse  quelque  chose  pour  lui.  C'est  vous- 
même,  mon  cher  confrère,  qui  vous  nous  racontez  cette  jolie  petite 
confidence.  Effaçons  donc  bien  vite  les  mots  sévères  de  tout  à 
l'heure.  Vous  êtes  bien  plus  dans  le  vrai  en  reconnaissant  que  la 
favorite  de  Ventadour  «  soigne  les  andante  et  réussit  à  procurer  le 
plus  vif  plaisir  aux  amants  du  simple.  » 

«  Son  jeu  est  stéréotypé,  vous  écriez-vous  plus  loin;  elle  reste 
toujours  elle.  «  Elle  est  toujours  elle-même  et  toujours  la  même, 
en  effet,  parce  qu'elle  est  vraiment  artiste,  parce  qu'elle  ne  livre 
rien  au  hasard,  parce  qu'elle  n'a  rien  à  changer  à  des  rôles  long- 
temps médités  et  joués  avec  conviction,  avec  conscience.  Quant  à 
son  jeu,  vous  avez  grandement  raison;  il  est  stéréotypé,  parce  qu'il 
est  sa  propriété  exclusive.  Le  rôle  d'Amina  de  la  Sonnambula,  ne 
l'a-t-elle  pas  refait  selon  son  esprit,  selon  son  âme?  A  son  entrée, 
au  lieu  de  se  montrer  sérieuse  et  composée,  suivant  la  tradition, 
elle  bondit  avec  la  vivacité  que  donne  la  joie.  Elle  va  se  marier 
avec  un  brave  garçon  qu'elle  aime  et  dont  elle  est  aimée  :  pour- 
quoi donc  aurait-elle  cet  air  triste  et  dolent,  présage  inutile  de  son 
malheur  futur,  et  annonçant  trop  tôt  qu'elle  est  somnambule? 
Quand  le  comte  s'approche  d'elle  et  lui  adresse  ses  compliments, 
il  faut  voir  comme  la  tendre  Amina,  qui  connaît  la  jalousie  de 
son  Elvino,  se  montre  inquiète  et  avisée,  modérant  l'un,  rassurant 
l'autre  de  ses  regards  finement  dérobés.  Et  dans  le  Don  Giovanni, 
où  elle  n'a  ni  assez  d'espace  ni  assez  de  liberté  pour  donner  plein 
essor  à  sa  voix  hardie,  comme  elle  a  raison  de  ne  pas  nous  mon- 
trer une  Zerlina  plus  fière,  plus  intraitable,  plus  à  cheval  sur  des 
principes  qui  n'attendent  pas  la  fin  d'un  duo  pour  être  battus  à 
plate  couture;  pourquoi  donc  les  forger  d'une  trempe  égale  à 
l'acier?  Rien  de  plus  fin  que  la  physionomie  de  Mlle  Patti  lors- 
qu'elle se  livre  à  sa  délibération  intime.  Céderai-je?  ou  ne  céde- 
rai-je  pas?  Comme  elle  dit  doucement,  tendrement  ce  vorrei,  la 
vérité  vraie  de  son  petit  cœur,  et  comme  elle  articule  avec  vigueur 
ce  e  non  vorrei,  qui  en  est  le  mensonge!  —  Dans  le  Faust  de  Gou- 
Hod, — je  l'y  ai  admirée  à  Londres.  —  elle  sème  des  traits  de  naï- 
veté enjouée,  de  coquetterie  enfantine,  au  lieu  d'être  constamment 
triste  et  rêveuse.  Cela  n'est-il  pas  plus  naturel  pour  une  jeune  fille? 


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REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


Du  moment  qu'une  artiste  grave  aussi  profondément  son  em- 
preinte sur  les  rôles  d'opéras  populaires  et  les  marque  en  quelque 
sorte  à  l'effigie  de  son  individualité,  vous  reconnaîtrez  avec  tous 
les  bons  esprits,  Monsieur,  qu'elle  a  parfaitement  le  droit  de  s'en 
tenir  à  ses  créations  et  d'être  toujours  elle.  Loin,  bien  loin  de  moi 
la  pensée  de  vous  blâmer  d'avoir  songé,  en  voyageant  dans  le 
pays  de  l'Idéal,  à  vos  dieux  absents,  la  Frezzolini,  l'Alboni, 
la  Bosio ,  —  c'est  par  elles  qu'il  eût  fallu  commencer  —  mais 
d'autres  ont  peut-être  trop  cherclié,  et  sans  avoir  la  même  excuse 
que  vous  à  établir  d'inopportunes  comparaisons.  Mlle  Patti  a 
compté  des  adversaires  qui  n'admettaient  pas  qu'elle  réussît  plus 
que  ses  devancières  en  s'y  prenant  autrement,  et,  pourtant,  c'était 
le  vrai  moyen.  Ils  ne  comptaient  pour  rien  sa  nature,  cette  spon- 
tanéité, celte  bravoure  qui  lui  fait  tout  pardonner,  ce  jeu  primesau- 
tier  qui  ne  relève  par  de  l'éducation  spéciale.  A  qui  la  comparer? 
Voilà  ce  qui  embarrassait  les  critiques  auxquels  leurs  profondes 
lectures  et  leur  vaste  mémoire  ne  rappelaient  rien  d'analogue.  Il 
faut  nous  tenir  en  garde  contre  cette  prédisposition  endémique 
d'un  auh'e  âge  et  ce  léger  travers  de  feuilletoniste. 

Je  n'ai  pas  beaucoup  goûté,  je  vous  l'avouerai.  Monsieur,  le 
passage  de  votre  étude  où  vous  reprochez  à  Rosine  de  se  faire 
habiller  par  le  «  tailleur  de  la  ihsltion  «  et  de  n'avoir  dans  ses  cos- 
tumes nul  souci  de  la  tradition.  La  tradition  existe-t-elle  pour  la 
couleur  de  la  robe  de  la  pupille  de  Baitholo?  J'en  doute;  et  que 
voilà  bien  une  grave  question  !  Mais  ne  trouvez-vous  pas,  par 
exemple,  que  l'habit  de  paysanne  d'Adelina  Patti,  dans  la  Gazza 
ladra,  l'année  dernière,  était  simple,  vrai,  légèrement  porté?  Déjà, 
en  1864,  ses  représentations  de  Marta  n'accusaient-elles  pas  une 
science,  un  goût  indiscutable  du  costume?  Avez-vous  oublié  com- 
bien elle  était  belle,  d'une  noble  et  sévère  beauté,  sous  les  draperies 
azurées  à'I  Puritani? 

Je  regrettais  tout  à  l'heure,  Monsieur,  que  vous  ayez  été  cher- 
cher dans  Scudo  des arguments   contre  votre  Etoile  :  «  Elle 

ignore  les  nuances  de  sentiment,  la  différence  des  styles  et  des 
genres;  enchantée  de  son  propre  ramage,  elle  ne  songe  plus  au 
caractère  du  personnage  qu'elle  représente.  »  Comment  se  peut-il. 
Monsieur,  qu'un  délicat,  un  raffiné,  un  homme  de  votre  goût 
épouse  la  querelle  de  ce  lourd  augure?  Votre  main  s'est  trompée. 
Votre  jugement  ne  saurait  être  complice  de  la  nécessité  d'avoir 
des  textes  à  l'appui  de  votre  thèse.  Il  y  a  eu  là  chez  vous  un 
entraînement  —  j'allais  dire  une  glissade  —  trop  imprévu  pour 
n'être  pas  excusable.  Faites  appel  une  fois  encore  à  vos  vrais 
souvenirs,  sans  parti-pris,  mon  cher  confrère,  et  vous  reverrez 
apparaître  Adina  avec  son  arsenal  de  séductions  spirituelles  et  de 
malices  provocantes:  Marta,  dont  le  sentiment  sérieux  perce  à 
travers  la  plus  folle  des  escapades;  Linda,  profitant,  avec  la  faci- 
lité, la  sûreté  d'instinct,  la  promptitude  qui  ne  l'abandonnent 
jamais,  de  cette  transition  naturelle  pour  ai-river  au  drame;  Norina, 
c'est-à-dire  la  coquetterie,  la  séduction,  la  ruse  féminine  dans  son 
expression  la  plus  haute  et  la  plus  triomphante  ;  Zerlina,  compre- 
nant et  sentant  trop  bien  la  musique  de  Mozart  pour  ne  point 
la  suivre  pas  à  pas  avec  l'adoration  que  l'on  doit  au  maître  des 
maîtres  ;  Rosina,  nous  étonnant  par  une  franchise  d'allures  à  la- 
quelle ne  nous  avaient  certes  pas  habitués  les  calmes  révoltes  et  les 
emportements  modérés  des  prime  donne  de  l'un  et  de  l'autre  côté 
des  Alpes;  Elvire,  pouvant  seule  braver  tous  les  souvenirs,  seule 
défier  le  passé;  Giovanna  d'Arco,  même,  faisant  preuve,  dans  ce 
rôle  à  laquelle  sa  nature  se  refusait,  d'une  sensibilité  touchante. 
Si  ce  n'est  pas  là  «  songer  au  caractère  du  personnage  qu'on  repré- 
sente, î  je  vous  serais  obligé,  mon  cher  confrère,  et  je  vous  sup- 
plie de  me  commenter  les  beautés  de  Scudo,  votre  complice,  pour 
me  donner  un  peu  de  judicieux  et  me  rafraîchir  l'intellect! 

Après  avoir  salué  avec  enthousiasme,  dans  Adclina  Patti,  la  su- 


blime interprète  des  sentiments  doux  et  joyeux,  vous  avancez,  que 
dis-je?  vous  déplorez  qu'elle  se  soit  brisée  au  choc  des  grandes 
passions,  et  que  toutes  les  qualités  dramatiques,  «  ampleur,  émo- 
tion, largeur,  noblesse,  flamme,  passion  ()7  y  en  o-t-il  encore?), 
lui  manquent  absolument.  »  C'est  court ,  mais  catégorique.  Mais 
n'allez-vous  pas  trop  loin,  car,  à  cette  accusation  formelle,  le  dilet- 
tantisme contemporain  pourrait  vous  répondre  : 

Le  rôle  de  la  simple  et  imiocente  Gilda  convient  parfaitement  à 
la  physionomie,  à  la  taille,  à  l'âge  d'Adelina  Patti.  Elle  en  a  pris 
possession  avec  la  plus  grande  autorité.  Candide  et  naïve  au 
deuxième  acte,  au  quatrième  elle  se  livre  admirablement  aux  élans 
de  la  passion  désespérée. 

Sans  effort  aucun,  comme  elle  sait  reprendre  dans  Lucia  sa 
dignité,  sa  mélancolie,  ses  larmes  de  véritable  prima  donna.  Dans 
la  scène  de  la  folie,  combien  elle  est  dramatique,  et  avec  quel 
esprit  et  qu'elle  finesse,  sans  dépasser  la  mesure  ni  d'un  côté 
ni  de  l'autre! 

Elle  prouve  dans  /  Puritani  que  la  douleur  ne  lui  sied  pas 
moins  que  le  sourire.  Où  trouver,  enfin ,  une  Violctta  plus  char- 
mante, plus  éblouissante,  plus  irrésistible?  Et  quelle  tristesse  sai- 
sissante au  second  acte.  Ce  sont  des  larmes,  de  vraies  larmes  qui 
coulent  des  yeux  de  la  Traviata.  Et  que  d'amour,  que  d'espoir 
douloureux  daus  sa  teriible  agonie  !  Ce  sont  de  tous  ces  éléments 
combinés  et  pressés  que  se  compose  à  des  degrés  différents  et  va- 
riés le  charme  exercé  par  Adelina  Patti,  et  qui  fait  que  chez  elle 
l'agrément  du  premier  jour  est  aussi  l'agrément  qui  ne  périt  pas. 
Ce  sont  toutes  ces  qualités  réunies  qui  arrachaient,  en  1863,  à 
M.  Edouard  Monnais  —  un  critique  dont  vous  ne  contesterez  pas 
la  sage  impartialité  et  la  haute  compétence  — cette  exclamation  qui 
résume  mon  opinion  :  «  Jamais  artiste  n'a  réuni  au  même  degré  le 
sentiment  dramatique  et  musical.  »  Vous  verrez.  Monsieur,  que  l'avenir 
jouera  à  Scudo  le  mauvais  tour  de  partager  cet  avis.  Quant  aux 
autres  parties  de  votre  livre,  j'estime,  sans  être  grand  prophète, 
qu'il  les  ratifiera  complètement. 

On  peut  dire  de  la  diva  ce  que  don  Pasquale  répond  à  Mala- 
testa  dans  la  scène  où  ce  dernier  lui  présente  sa  prétendue  sœur: 
—  Che  ne  dite  ?  lui  demande  le  docteur,  et  le  bonhomme  de  ré- 
pondre simplement  :  E  un  inconto!  C'est  un  charmel  Et  quand  le 
charme  y  est,  il  défie  tous  les  arguments,  il  bat  en  brèche  toute 
la  science. 

Vous  terminez  votre  étude.  Monsieur,  par  une  chanson  mari- 
vaudante; je  finirai  ma  lettre  par  un  madrigal.  Mlle  Patti  est  au- 
jourd'hui marquise  dans  le  monde  ;  mais  dans  le  royaume  de  l'Art 
elle  a  toujours  été,  elle  sera  toujours  reine,  reine  adorée  de  ses 
sujets,  reine  d'un  empire  où,  comme  autrefois  les  Espagnes,  le  so- 
leil ne  se  couche  jamais.  Je  sais  bien,  Monsieur,  que  ce  compli- 
ment ne  vaut  pas  le  vôtre;  mais  on  fait  ce  qu'on  peut.  Je  n'ai 
pas  au  surplus  l'honneur  de  connaître,  d'approcher  comme  vous 
la  célèbre  artiste,  et  il  était  de  mon  devoir,  en  cette  heureuse  cir- 
constance qui  me  permet  de  rendre  hommage  à  votre  talent  et  à 
votre  caractère,  de  vous  laisser  au  moins  le  dernier. 

Em.  JL^thieu  UE  monter. 


CORRESPONDANCE. 

Vichy,  7  août. 

La  quinzaine  qui  vient  de  s'écouler  aura  été  certainement  la  plus  bril- 
lante de  la  saison.  A  voir  le  nombre  croissant  des  baigneurs,  les  toi- 
lettes de  plus  en  plus  élégantes  des  baigneuses,  mais  surtout  leur  ardeur 
à  envahir  les  bals,  les  concerts,  les  spe.  tacles  que  chaque  jour  amène  et 
qui  ne  leur  laissent  que  l'embarras  du  choix,  il  serait  dilïicile  de  se  croire 
au  milieu  de  gens  atteints  d'une  maladie  dont  le  principal  symptôme 
est  d'aigrir  le  caractère  et  de  rendre  les  individu»  maussades  et  insocia- 


DE  PARIS. 


2S3 


blés.  Aussi  tes  habitués  disunt-ils  que  Vichy  se  dérange  et  crient-ils  à 
l'abomination!  Il  est  de  fait  que  les  séductions  s'y  succèdent  sous  toutes 
les  formes.  Mardi  c'était  un  bal  somptueux  offert  dans  les  salons  et  le 
jardin  illuminé  de  l'hôtel  des  bains  par  Mme  la  marquise  du  Hallay- 
Coëtquen,  née  princesse  de  Chimay  et  par  Mme  la  marquise  de  Danvct, 
avec  une  grâce  et  une  affabilité  rares,  à  la  société  de  Vichy.— Le  lende- 
main et  jours  suivants  c'étaient  Dressant  et  Mlle  Jouassin  de  lu  Comédie- 
Française  remplissant  la  jolie  salle  du  Casino  avec  le  Jeune  Mari,  te 
Barbier  de  Séville,  etc.  Puis  sont  venues  des  Conférences  de  Desbarolles 
lisant  votre  passé  et  pronostiquant  votre  avenir  dans  les  lignes  mysté- 
rieuses de  la  main  —  et  encore  Alberti,  le  prestidigitateur  sans  pareil, 
dont  les  tours  vous  feraient  vraiment  croire  à  la  sorcellerie.  —  Enfin  le 
salon  des  fêtes  regorgeait  hier  d'une  foule  compacte  qu'émotionnaient 
singulièrement  les  expériences  bio-magnétiques  d'un  apôire  du  mesme- 
risme,  M.  Brunet  de  Ballans.  Après  avoir  assisté  à  ces  expériences  et  vu 
les  effets  incompréhensibles  obtenus  par  la  seule  volonté  d'une  jeune 
fille  endormie,  quoique  .saint  Thomas  que  l'on  soit,  il  faut  bien  se  rendre 
à  l'évidence  de  faits  auxquels  vous  participez  pour  ainsi  dire  et  traiter 
sérieusement  un  agent  si  proche  parent  de  l'elec'ricité  si  peu  connu  en- 
core et  avec  lequel  il  faudra  bien  compter  dans  l'avenir. 

Si  je  me  suis  occupé  d'abord  des  distractions  qui  n'avaient  pas  la  mu- 
sique pour  objet,  c'est  que  je  réservais  celle-ci  pour  la  bonne  bouche. 
Je  puis  vous  certifier  qu'elle  a  tenu  pendant  celte  quinzaine  le  haut  du 
pavé . 

Sans  parler  des  concerts  du  Kiosque,  dirigés,  ainsi  que  je  vous  l'ai  dit, 
avec  une  grande  habileté,  par  Romeo  Accursi,  il  y  a  eu  trois  beaux  con- 
certs donnés,  dans  le  Salon  des  Fêtes,  par  son  orchestre  et  avec  le  concours 
de  Mme  Accursi,  qui  possède  un  talent  de  piani^te  de  premier  ordre.  Elle 
y  a  fait  entendre  tour  à  tour  de  la  musique  classique  et  de  la  musique 
moderne,  des  morceaux  de  Bach  et  de  Chopin,  une  délicieuse  tarentelle, 
entre  autres,  de  Stanzicri  ;  du  Mozart  et  du  Herz,  puis,  avec  son  mari, 
le  beau  duo  d'Osbornc  et  Bériot  sur  les  motifs  du  Barbier  de  Séville.  Dans 
CfS  morceaux  de  caractère  si  différent,  on  a  pu  apprécier  et  on  a  cha- 
leureusement applaudi  une  étude  approfondie  des  maîtres,  un  doigté 
d'une  délicatesse  et  d'une  habileté  singulièrement  attra./antes,  le  style  de 
la  bonne  école  et  un  grand  sentiment  des  nuances.  Mme  Accursi  a  obtenu 
dans  ces  concerts,  très-courus  d'ailleurs,  un  véritable  succès. 

Mlle  Wertheimber,  qui  après  la  représentation  de  Urdathée  était  restée 
encore  quelques  jours,  nous  a  fait  ses  adieux  dans  une  opérette  d'Ofï'en- 
bach,  Daphnis  et  Chloë.  Certes  le  maestro  n'aurait  pas  regretté  de  voir  le 
rôle  principal  de  son  œuvre  interprété  avec  la  supériorité  dont  Mlle  Wer- 
theimber l'a  marqué.  Elle  s'y  est  montrée  aussi  bonne  comédienne 
qu'excellente  cantatrice  et  elle  a  été  fortement  applaudie. 

L'apparition  inopinée  des  enfants  Fremeaux  est  venue  aussi  cette  se- 
maine apporter  son  contingent  à  la  curiosité  des  dilettantes.  On  n'était 
pas  sans  connaître  l'accueil  qu'ils  avaient  rencontré  à  Paris  l'hiver  der- 
nier et  leur  récent  triomphe  à  Bade.  Au.ssi  à  peine  leur  arrivée  avait- 
elle  été  annoncée  que  l'élite  de  la  société  des  baigneurs  se  réunissait 
dans  le  magnifique  salon  de  l'hôtel  des  Ambassadeurs  pour  les  entendre. 
Ce  charmant  trio  de  virtuoses  a  complètement  justifié  sa  réputation.  Ils 
ont  été  applaudis  après  chacun  des  morceaux  qu'ils  ont  exécutés;  mais 
on  a  surtout  apprécié  Albert,  le  violoniste,  qui  a  joué  avec  une  ampleur 
de  style,  une  sonorité  et  un  sentiment  surprenants  pour  son  âge,  la  fan- 
taisie de  Vieuxtempssur  ILomhardi  et  celle  d'Alard  sur  la  Traviata.  11  y  a 
dans  cet  enfant  l'étoffe  d'un  véritable  artiste.  Le  petit  Paul  a  charmé 
par  l'aplomb  avec  lequel  il  manie  un  instrument  plus  grand  que  lui, 
par  sa  gentillesse  et  la  façon  correcte  dont  il  a  rendu  le  Songe  d'enfant 
de  Batta  et  une  romance  sans  paroles  de  Rabaud.  Un  beau  bouquet  a 
été  jeté  par  une  dame  à  l'intéressant  trio  qui,  rappelé  avec  acclamation, 
a  reçu  les  félicitations  de  Pauditoire.  A  la  suite  de  ce  succès  la  société 
de  l'hôtel  du  Parc  a  voulu  les  avoir  à  son  tour,  et  ils  ont  été  obligés  d'y 
donner  un  second  concert  avant  de  partir  pour  les  bains  de  njer  de  la 
Manche,  où  ils  sont  appelés  par  divers  engagements. 

Il  est  encore  un  attrait  de  Vichy  que  je  ne  puis  passer  sous  silence; 
mais  celui-là  est  réservé  à  un  petit  nombre  de  privilégiés.  Je  veux  par- 
ler des  soirées  intimes  du  Chalet,  ce  petit  cénacle  ouvert  par  le  directeur 
de  la  Compagnie  fermière  aux  artistes  et  aux  gens  de  lettres  qui  s'y 
voient  accueillis  avec  une  hospitalité  et  une  cordialité  dont  la  franchise 
met  tout  d'abord  chacun  à  son  aise.  —  Là  vous  auriez  pu  rencontrer 
l'auteur  de  Pierre  de  Médicis,  le  prince  Poniatowski,  Louis  Ulbacli, 
Alexandre  Weill,  Malé?ieux,  etc.,  etc.,  de  même  que  leo  artistes  en 
renom  engagés  par  la  direction.  —  La  musique  et  la  comédie  défraient 
ces  soirées,  fort  enviées,  et  que  le  maître  de  la  maison  offre  aux  per- 
sonnes de  son  intimité  ou  qui  lui  ont  été  présentées.  A  l'une  des  der- 
nières, après  la  grande  scène  de  Tartuffe,  admirablement  dite  par  Bres- 
sant  et  Mlle  Jouassin,  Louis  Ulbach  a  fait  à  M.  Callou  la  surprise  d'une 
petite  comédie  de  lui,  inédite  :  l'IJabit  fait  le  moine,  très-amusante,  se- 
mée de  mots  spirituels  qu'ont  fait  très-bien  valoir  Séveste  et  la  charmante 
Dica-Peiit.  Cette  pièce  a  fait  grand  plaisir.  —  Mme  Accursi  et  son  mari, 
—  excellent  violoniste,  comme  vous  savez,  —  Mlle  Gonetti,  Lcvassor,  ce 
Juif-Errant  de  la  chansonnette,  —  Alberti,  ont  mis  ensuite  à  l'envi  leur 
talent  à  la  disposition  des  invités.  Je  vous  laisse  à  penser  si  les  moments 


ont  rapidem(!nt  pn.ssé  jusqu'à  l'heure  réglementaire  do  la  retraite,  dont 
ran)phitryon,  jaloux  do  la  santé  de  ses  liâtes,  a  donné  lui-même  Pim- 
pitoyable  signal. 

S.  D. 


Deauville,  s  août  1868. 
Mon  cher  Directeur, 

Je  suis  encore  tout  enguirlandé,  tout  empanaché,  tout  enivré,  tout 
affolé  des  trois  journées  que  je  viens  de  passer.  Chaque  année,  à  pa- 
reille époque,  Deauville  revêt  ses  habits  de  fêle  et  donne  des  courses  de 
chevaux  classées,  par  le  monde  an  sport,  dans  les  plus  intércsantes  et 
les  plus  sérieu.ses  d'Angleterre,  de  France  et  de  Navarre.  C'est  un  magni- 
fique hippodrome  que  celui  de  Deauville.  Entouré  de  coteaux  boisés  et 
fermé  sur  son  quatrième  côté  par  la  mer,  il  offre  aux  yeux  charmés  le 
plus  beau  point  de  vue  qui  se  puisse  imaginer  quand  il  est  couvert  de 
monde,  de  voitures,  de  cavaliers  et  de  mais  pavoises. 

Le  temps  dn  reste  a  contribué  pour  beaucoup  à  la  splendeur  de  ce 
spectacle.  Pendant  trois  jours  le  soleil  n'a  pas  cessé  d'y  développer  son 
plus  vif  éclat,  mais  aussi  sa  chaleur  la  plus  intense.  La  nuit  venue, 
c'était  le  tour  du  Casino,  et  les  plaisii's  du  soir  répondaient  à  ceux  de  la 
journée.  Nous  avons  eu  d'abord  une  représentation  donnée  par  le  théâtre 
du  Palais-Royal  :  les  Forfaits  de  Pipermans,  par  Lugutt,  Lacombe  et  la 
gentille  Mlle  Worms;  Après  te  Bal,  charmante  petite  comédie  jouée  à 
ravir  par  Céline  Montaland  et  Geoffroy;  enfin  la  Bonne  aux  Camélias, 
dans  laquelle  Mraes  Thierret  et  Honorine  ont  rivalisé  de  verve  et  de  co- 
mique, parfaitement  secondées  du  reste  par  Priston,  Lacombe  et  Luguet. 

Le  lendemain  soir  avait  lieu  le  grand  bal  des  courses.  La  jolie  salle 
du  Casino,  ornée  de  fleurs  et  de  verdure,  était  remplie  des  plus  délicieuses 
toilettes,  de  ces  toilettes,  vous  savez,  que  Pété  comporte  et  que  les  bains 
de  mer  autorisent,  un  peu  excentriques  peut-être,  mais  gracieuses  et 
piquantes.  Ce  bal  des  courses,  à  Deauville,  par  son  animation,  forme 
un  ravissant  kaléidoscope  pour  le  simple  observateur.  Il  est  juste  d'ajouter 
qu'Emile  Desgranges  conduit  l'orchestre  et  qu'il  est  passé  maître  dans  le 
genre;  à  Paris,  nous  le  connaissons  tous.  Ce  qu'on  sait  moins,  c'est  la 
valeur  réelle  de  ce  charmant  garçon  conmie  artiste  sérieux.  Je  ne  l'avais 
jamais  vu  à  l'œuvre  encore  sous  ce  rapport  et  j'en  ai  été  vraiment 
étonné.  Il  a  formé  là  un  orchestre  de  vingt-cinq  musiciens  qui  peut 
aborder  toutes  les  ouvertures  et  la  plupart  de  nos  grands  morceaux 
symphoniques;  cela  dans  les  meilleures  traditions  t;t  avec  les  effets  les 
plus  satisfaisants,  quoique  parfois,  dans  ces  conditions  restreintes,  il  soit 
indispensable  de  modifier  les  timbres.  Je  leur  ai  entendu  dire  les  œuvres 
de  Weber  tont  aussi  bien  que  celles  d'Auber  et  de  Rossini;  celles  de 
Beethoven,  de  Schuraann  et  de  Wagner,  aussi  supérieurement  que  les 
œuvres  plus  douces  de  Mozart  et  d'Haydn.  Je  viens  de  suivre  avec 
beaucoup  d'intérêt  ces  concerts  qui  ont  lieu  régulièrement  deux  (ois  par 
jour,  et  je  ne  saurais  vous  énumérer  tout  ce  qu'on  y  a  joué.  Toutefois, 
je  tiens  à  vous  citer  les  ouvertures  de  la  Muette,  de  Mariha,  des  Dia- 
mants de  la  Couronnf.,  des  Dragons  de  Villars.;  Schiller -Marsch;  les  fan- 
taisies sur  V Africaine,  les  Huguenots,  le  Freyschiitz,  et  le  Cujus  animam 
du  Stabat  Mater  de  Rossini.  Je  ne  vous  dirai  rien  du  répertoire  dansant; 
Emile  Desg.-anges  interprète  d'une  façon  charmante  les  œuvres  de  J. 
Strauss,  de  Vienne,  dont  il  s'est  fait  une  spécialité.  Rien  ne  peut  donner 
un<î  idée  de  ces  concerts  presque  toujours  en  plein  air  avec  la  mer  pour 
horizon  et  dans  un  paysage  digne  de  Page  d'or. 

Maintenant  que  je  vous  ai  parlé  du  général  en  chef  de  cette  phalange 
musicale,  il  me  reste  à  vous  en  nommer  les  principaux  officiers  :  c'est 
Colblain,  l'élégant  violon;  Mas,  le  classique  alto;  ^chidenhelm,  parfait 
violoncelliste  que  Paris  envie  à  Strasbourg  ;  c'est  Cantié,  l'habile  flûtiste; 
Gobin,  le  brillant  piston;  Lalande,  basson  à  l'Opéra-Comique;  Eysseri, 
clarinettiste  en  train  de  se  faire  un  nom;  Lavagne,  hautbois  d'un  talent 
réel.  Il  n'est  pas  extraordinaire  qu'avec  de  pareils  éléments  l'orchestre 
de  Desgranges  puisse  mériter  tous  ces  éloges.  Je  savais  bien  que  la 
plage  de  Deauville  était  charmante,  que  son  Casino  passait  pour  l'un 
des  mieux  ordonnancés,  que  la  vie  y  était  douce  H  salutaire,  mais  je 
ne  comptais  pas  y  rencontrer  des  jouissances  artistiques  d'un  ordre  aussi 
élevé.  Je  me  fais  donc  un  devoir  de  vous  en  faire  part  et  un  plaisir, 
cher  directeur,  de  vous  y  convier. 
Tout  à  vous, 

Paul  BERNARD. 


Aux  listes  de  la  souscription  Edouard  Moniiais,  que  nous  avons 
précédemment  publiées,  nous  sommes  heureux  de  pouvoir  ajouter 
aujourd'hui  encore  les  noms  suivants  : 

Mlle  A.  de  Courcelles,  Ludovic  Halévy,  D.  Pollonnais,  A.  Callou, 
Mme   veuve  Halévy,  GoufTé,  G.  Duprez,   Hippolyte  Rolle,  Charles 


254 


lîEVlJE  ET  GAZI':TTE  MUSICALE 


des  Etangs,  Louis  Diémer,  Samson ,  Charles  Blanc ,  Amédée  Mé- 
reaux,  Victor  Chéri,  Mme  Laborde,  Stamaty,  Marcilhacy,  Mme 
Adelina  Palti,  Strakosch,  François  Wartel,  Mathieu  de  Monter. 


NOUVELLES  DES  THËÀTBES  LYRIQUES. 


**;f  Le  Ihtuître  impérial  de  l'Opéra  a  repris  Hamlet  cette  semaine,  et 
l'œuvre  d'Amb.  Thomas  a  retrouvé  son  succès  légitime.  Le  public  a 
confirmé  par  son  empressement  et  ses  bravos  l'opportunité  de  cette  re- 
prise. Il  a  été  heureux  surtout  de  retrouver  avec  sa  voix  si  pure,  sa 
grâce  si  chaste,  son  talent  si  original,  Mlle  Nilsson  que  Londres  vient 
d'acclamer  pendant  deux  mois.  Dès  le  deuxième  acte,  les  bouquets  pleu- 
raient littéralement  auiour  de  la  grande  et  charmante  artiste,  et  la  soi- 
rée prenait,  pour  les  conserver  jusqu'à  la  chute  du  rideau,  les  allures 
d'un  triomphe.  Faure  en  a  eu  sa  large  et  légiiime  part.  On  sait  avec 
quel  style,  quel  art,  quelle  passion,  quelle  voix  magnifique  il  a  composé 
cette  créalion  d'Hamlet,  qui  restera  l'un  des  plus  be:iii\  titres  do  gloire 
de  sa  carrière.  L'exécution,  au  surplus,  est  de  tous  points  parfaite  dans 
son  ensemble.  l\lme  Gueymarrt,  Belval,  Colin  y  contribuent  puissamment. 
—  Le  Trouvère  et  la  Muette  ont  complété  les  représentations  de  la  se- 
maine. 

*%  Les  bruits  qui  ont  couru  celle  semaine  à  propos  des  conditions  pé- 
cuniaires exagérées  du  rengagement  de  Mlle  Nilsson  à  l'Opéra  n'ont 
aucun  fondement.  Nous  ne  croyons  pas  davantage  que  Mme  Sass  ait 
l'intention  de  se  vouer  à  la  carrière  italienne. 

:j**  M.  Colin,  ténor  de  l'Opéra,  a  épousé  cette  semaine  Mlle  Louise 
Fiocre,  ancienne  artiste  de  la  danse  à  ce  théâtre. 

*^  L'Ambassadrice  a  reparu  sur  l'affiche  de  l'Opéra-Comique,  avec 
les  noms  de  Mme  Cabel  et  de  Capoul  dans  les  deux  principaux  rôles. 
La  représentation  de  mercredi  dernier  a  été  très-brillante ,  et  toutes  les 
loges  étaient  garnies  des  plus  fraîches  toilettes.  Le  public  a  clialeurouse- 
ment  accueilli  Mme  Cabel  et  Capoul,  et  a  fait  fêle  aux  mélodies  populaires 
dont  est  semé  ce  charmant  ouvrage.  L'Ambassadrice  a  été  remontée  avec 
un  soin  qui  fait  le  plus  grand  honneur  à  la  direction  ;  elle  sera,  sans 
aucun  doute,  jouée  longtemps  et  avec  succès.  —  Barré  a  repris  cette  se- 
maine possession  de  son  rôle  de  Belamy  des  Dragons  de  Vitlars,  qui 
attirent  toujours  un  nombreux  public.  —  M.  Gailhard  a  continué  avec 
succès  ses  débuts  dans  le  Toréador. 

*•*;»  Nous  pouvons  donner  comme  certaine  la  nomination  de  M.  Pasde- 
loup  à  la  direction  du  théâtre  Lyrique.  Le  Moniteur  ne  tardera  pas  à  en 
publier  la  nouvelle  officielle. 

»*^  Offenbach  vient  de  remettre  aux  Variétés  le  manuscrit  de  la  mu- 
sique de  sa  nouvelle  grande  pièce  en  deux  actes,  dont  les  paroles  sont 
de  MM.  Meilhac  et  Ludovic  Halévy.  La  lecture  en  sera  faite  cette  se- 
maine aux  artistes.  Mlle  Schneider  et  Dupuis  y  rempliront  les  principaux 
rôles.  Cet  ouvrage,  dont  le  sujet  est  des  plus  piquants,  a  pour  titre  :  la 
Périchole. 

^*:^  Les  délais  accordés  aux  compositeurs  entrés  en  lice,  dans  le  con- 
cours d'opéra-comique  {le  Florentin)  étant  expirés  depuis  le  30  juillet 
dernier,  les  concurrents  ont,  sans  perdre  de  temps,  procédé  à  l'élection 
du  jury  chargé  de  l'examen  de  leurs  compositions,  lequel  jury  se  trouve 
ainsi  composé:  MM.  Féhcien  David,  Maillart,  Gevaert,  Massé,  Ambroise 
Thomas,  Gounod,  Reber,  Semet,  Georges  Hainl,  Berlioz,  Bazin,  Auber, 
Mermet,  Tilmant,  Duprato,  Pasdeloup,  le  prince  Poniatowski,  Elwart. 
Soixante-trois  compositeurs  ont  pris  part  au  concours.  Le  résultat  des 
travaux  du  jury  ne  tardera  pas  à  être  connu. 

,1,*^  Une  Femme  tombée  du  ciel,  amusante  opérette  de  MM.  Blondelet 
et  Baumaine,  musique  de  Léon  Roques,  est  représentée  en  ce  moment, 
avec  beaucoup  de  succès,  à  l'Eldorado. 

»*i  Mme  Meillet  vient  d'être  engagée  au  Grand-Théâtre  de  Bordeaux, 
pour  la  saison  prochaine. 

^%  Une  compagnie  lyrique  française  vient  de  se  former  pour  chanter 
le  répertoire  d'Otfenbach  —  la  Grande  -  Duchesse ,  naturellement  —  à 
Turin,  Florence,  Milan,  Naples  et  autres  villes  d'Italie. 

»*<,  Deux  nouveaux  opéras  italiens  viennent  de  voir  le  jour  :  à  Lodi, 
Faustina,  du  maestro  Bernardi,  el  à  Padoue,  Don  Pedro  re  di  Portogallo, 
du  maestro  Drigo;  deux  macsfrî"  jusqu'à  présent  parfaitement  inconnus. 
Ces  deux  ouvrages  ont  eu  du  succès. 

**»  La  nouvelle  trotipe  d'opéra  bouffe  français  engagée  par  l'impré- 
sario M.  Bateman,  à  New-York,  vient  de  débuter  dans  cette  ville  de  la 
façon  la  plus  heureuse,  au  théâtre  de  Niblos-Garden,  par  Barbe  -  Bleue. 
Mlle  Irma  Marié  a,  dans  le  rôle  principal,  obtenu  un  franc  succès,  par- 


tagé par  le  ténor  Aujac,  Mlles  Lambelé  et  Duclos.  On  répète  activement 
Fleur  de  Thé,  avec  Mlle  Irma  Marié  dans  le  rôle  de  Césarine,  qu'elle  a 
créé.  La  joyeuse  opérette  de  Lecocq  doit  être  suivie  de  la  reprise  de  la 
Grande-Duchesse,  qui  durant  la.  saison  dernière  a  été  portée  aux  nues  à 
New- York.— Un  second  théâtre  d'opéra  bouffi-'  français  sera  inauguré  au 
mois  de  septembre  sous  la  direction  de  M.  Grau,  qui  a  fait  de  brillants 
engagements  en  France.  Geneviève  de  Brabant  et  Fleur  de  Thé  seront  les 
premiers  ouvrages  qu'on  représentera. 


NOUVELLES  DIVERSES. 

»■*,  M.  Ambroise  Thomas  vient  d'être  nommé  commandeur  de  la  Lé- 
gion d'honneur.  C'est  pendant  la  distribution  des  prix  du  Conservatoire 
qu'il  a  reçu  publiquement,  de  la  main  de  S.  Exe.  le  maréchal  Vaillant, 
cette  récompense,  l'une  des  plus  précieuses  que  puisse  ambitionner  un 
artiste. 

^*^  La  distribution  des  prix  du  collège  Chaptal,  si  supérieurement  di- 
rigé par  M.  Monjean,  a  eu  mercredi  dernier  une  solennité  exceptionnelle. 
Elle  était  présidée  par  !il.  Victor  Dillais,  membre  du  conseil  municipal, 
délégué  par  M.  le  préfet  de  la  Seine,  assisté  de  M.  Chaix-d'Est-Ange  et 
d'un  grand  nombre  de  notabilités  scientifiques  et  littéraires.  Cette  fêle  de 
famille  a  été  particulièrement  brillante  au  point  do  vue  musicnl.  Pour 
la  première  fois,  un  orchestre  composé  exclusivement  des  élèves  du 
collège,  a  exécuté  d'une  manière  charmante,  sous  la  direction  d'Her- 
man,  l'éminent  violoniste,  l'ouverture  du  Philtre,  d'Auber.  Un  chœur 
de  la  Création  d'Haydn,  et  des  chœurs  à'Allialie  de  Mendelssohn,  ont  élé 
fort  bien  chantés  par  les  élèves  de  la  division  supérieure  de  chant  et 
accompagnés  par  l'orchestre.  C'est  là  une  innovation  dee  plus  heureuses, 
qu'il  importe  de  signaler  et  d'encourager.  Nous  félicitons  très-sincèrement 
M.  Herman ,  ainsi  que  MM.  Foulon  et  Bourdeau,  professeurs  de  chant, 
des   bons   résultats   obtenus  par  leur  enseignement  en  si  peu  de  temps. 

^*^  La  distribution  des  prix  aux  élèves  de  Notre-Dame-des-.\rts  a  eu 
lieu,  mercredi  dernier,  au  château  de  Neuillj,  sous  la  pré.--idence  de 
l'archevêque  d'Alby.  Dans  cet  établissement  destiné  à  donner  une  édu- 
cation véritablement  utile  aux  filles  d'artistes,  de  littérateurs,  de  sa- 
vants, etc.,  l'enseignement  de  la  musique  a  une  importance  exception- 
nelle. Aussi  a-t-on  accueilli  avec  la  plus  vive  sympathie  et  salué  d'ap- 
plaudissements empressés  les  intéressants  exercices  musicaux  des  élèves. 
Après  l'/lHegret/o  de  la  symphonie  en  (a,  de  Beethoven,  arrangé  pour  piano, 
orgue,  violoncelle  et  violon,  dix  petites  filles  ont  exécuté  sur  cinq  pianos, 
avec  ensemble  et  goût,  plusieurs  morceaux  concertants  de  C.  Stamaty. 
Le  grand  duo  sur  les  Huguenots,  d'Armingaud  et  Jacquard,  pour  piano 
et  violoncelle,  a  permis  d'apprécier  la  remarquable  virtuosité  de 
Mlles  Yvonne  Morel  et  Mathilde  Galitzin  :  on  ne  saurait  apporter  plus 
de  charme,  de  sentiment  et  de  fini  dans  l'exécution.  La  partie  chorale 
n'a  pas  été  la  moins  intéressante  de  la  fête  :  le  chœur  des  prêtresses,  de 
Pharamonil  (Boïeldieu),  et  un  choeur  avec  soli,  la  Peinture  et  la  Musique, 
ont  été  parfaitement  rendus  et  ont  produit  un  excellent  effet.  L'honneur 
de  ces  succès  revient  de  droit  aux  professeurs  de  Notre-Dame-des-Arts 
et  à  la  supérieure-fondatrice  de  ce  pensionnat,  Mme  d'.^nglar. 

»*t  Le  concert  annuel  du  pensionnat  des  Frères  de  Beauvais  avait  at- 
tiré, dimanche  dernier,  près  de  trois  mille  personnes  dans  ce  magnifi- 
que établissement.  Les  élèves  —  chœurs  et  orchestre  —  secondés  par 
quelques  artistes  de  Paris,  ont  exécuté  le  chœur  des  matelots  à'Haydée, 
l'ouverture  du  Jeune  Henri  et  le  Désert,  de  Félicien  David,  en  entier 
M.  Mathieu  de  Monter,  qui  assistait  à  cette  magnifique  soirée,  en  a  rendu 
compte  le  lendemain  dans  le  Journal  de  l'Oise.  Nous  extrayons  de  son 
remarquable  feuilleton  les  passages  suivants  :  «  Les  applaudissements  du 
public,  la  vive  et  unanime  satisfaction  de  tous  ont  sanctionné  le  mérite 
général  de  l'exécution  et  la  haute  valeur  artistique  de  celui  qui  la  diri- 
geait. Les  élèves  du  pensionnat  ont  donné  avec  un  ensemble,  un  élan 
remarquables  et  un  sentiment  très-accusé  de  l'œuvre  dont  une  partie  de 
l'interprétation  leur  avait  été  confiée.  Leurs  voix  sont  bien  posées,  ils 
articulent  et  prononcent  bien,  et  j'ai  retrouvé  avec  plaisir  dans  leur  ma- 
nière d'émettre  le  son,  l'habile  méthode  de  leur  professeur  M.  Auguste 
Boudard.  Beauvais  doit  beaucoup  à  cet  artiste  distingué,  persévérant, 
complètement  dévoué  à  son  art  et  qui  sait  communiquer  aux  autres  son 
ardeur,  son  goût  sûr  et  délicat,  et  l'amour  du  beau  qui  l'anime.  Hier 
soir,  il  a  prouvé  qu'en  de  certaines  circonstances,  les  Heures  pouvaient 
avec  raison  s'appeler  aussi  les  Grâces.  »  Le  pensionnat  des  Frères  de 
Beauvais  est  un  des  établissements  d'instruction  et  d'éducation  de  France 
dans  lequel  la  musique  est  le  plus  en  honneur;  cet  art  fait  partie  inté- 
grante de  l'enseignement  pratique  de  la  maison. 

^%  Notre  collaborateur  A.  Elwart,  qui  avait  élé  diriger  à  Rouen,  le 
31  mai  dernier,  le  Salut  Imjérial  de  sa  composition  devant  LL.  MM. 
l'Empereur  et  l'Impératrice,  vient  de  recevoir  à  cette  occasion  de  M.  le 
baron  Leroy,  sénateur  préfet,  une  lettre  très-flaiteuse  de  remercîments 
et  une  très-belle  médaille  d'argent  au  nom  du  déparlement  de  la  Seine- 
Inférieure. 


DE  PARIS 


^**  Les  journaux  hollandais  sont  remplis  d'éloges  cntliousiastes  à 
l'adresse  de  notre  célèbre  cornettiste  Arban,  qui  a  donné  à  Amsierdam, 
dans  le  Parc,  plusieurs  concerts  très-suivis  et  Irès-brillants.  Sa  rare  habi- 
leté commo  virtuose  n'a  pas  moins  été  appréciée  que  son  talent  de  chef 
d'orciicstre  et  de  compositeur. 

»*^,  Les  premières  étapes  de  la  tournée  artistique  Ullman-Patti ,  en 
l'automne  prochain,  commenceront  parle  Danemark,  la  Suède,  puis  la 
Belgique.  Les  artistes  pngagi-s  pour  celte  nouvelle  expédition  du  célèbre 
imprésario  sont:  Mlle  Carlolta  Patti,  cela  va  siins  le  dire,  M.  et  Mme 
Alfred  Jaëll,  H.  Vieuxtemps,  Grulzmacher,  violoncelliste  du  roi  de  Saxe, 
Trenka  et  Jacquard,  ce  dernier  pour  la  Belgique.  La  tournée  à  travers 
la  France  commencera  dans  les  premiers  jour  de  décembre  avec  les  ar- 
tistes dont  nous  avons  dé,à  donné  les  noms. 

^*^  Mlle  Godefroy,  cantatrice  d'un  mérite  reconnu,  a  donné  le  H  et 
le  19  juillet  dernier,  à  Vichy,  deux  concerts  auxquels  la  sofiété  de  cette 
station  thermale  s'est  portée  avec  empressement.  Entre  autres  morceaux 
chantés  par  Mlle  Godelroy,  la  romance  de  Mignon  et  l'air  des  Dragons 
de  Vitlars  ont  enlevé  tous  les  suffrages  et  provoqué  les  applaudissemenis 
les  plus  chaleureux. 

„;*»  La  Société  philharmonique  Euterpe,  d'Amsterdam,  publie  le  titre 
des  chœurs  pour  voix  d'homme  couronnés  dans  le  concours  de  com- 
po.sition  chorale  ouvert  par  elle;  ce  sont:  Valkers  Nachtgesang  (devise: 
Ne  quid  nimis);  Ergo  bibamus  (devise:  Zum  Bccherklang  ein  froher  Sang); 
Gœden  Nacht  (devise  :  De  loonkunst  stechts  doorziet  hct  spoor).  Ces  com- 
positions seront  exécutées  à  l'occasion  de  la  grande  fête  chorale  des  8  et 
9  août,  après  laquelle  on  fera  connaître  les  noms  des  auteurs.  Chacun 
des  trois  prix  consiste  en  une  médaille  et  en  une  somme  de  "100  florins. 

**,  M.  Chorley,  renonçant  à  la  critique  musicale  de  YAtheneum ,  de 
Londres,  est  remplacé  dans  ses  fonctions  à  ce  journal  par  M.  Francis 
Barnett,  compositeur  de  talent. 

***  A  l'occasion  des  courses  de  Caen,  MM.  Kelterer,  Jules  Lefort,  Si- 
vori  et  Mlle  Laura  Harris  ont  donné  dans  cette  ville  un  très-beau  con- 
cert. Le  grand  duo  d'Erncmi,  pour  piano  et  violon,  de  MM.  Kelterer  et 
Herman,  a  produit  un  grand  effet  et  Mlle  Harris  a  eu  son  succès  accou- 
tumé. 

.**  La  Messe  impériale  d'Haydn  sera  exécutée  à  grand  orchestre  le 
IS  août,  dans  l'église  Saint-Roch,  sous  la  direction  de  M.  Vervoitte.  Le 
lendemain,  16,  fête  patronale  de  Saint-Roch ,  la  4«  messe  d'Haydn  sera 
chantée  dans  la  même  église,  ainsi  qu'un  Domine  Salvum  et  plusieurs 
motets  de  M.  Vervoitte. 

^%  Vendredi  de  l'autre  semaine,  à  Manchester,  une  grande  soirée  mu- 
sicale qui  avait  réuni  deux  mille  personnes  dans  une  salle  de  concerts 
populaires,  a  été  marquée  par  un  horrible  accident.  On  a  cru  à  un  in- 
cendie, et  un  tumulte  indescriptible  a  été  le  résullat  de  cette  panique. 
Il  y  a  eu  trente  morts  et  un  grand  nombre  de  blessés. 

*%  On  annonce  la  mort  :  à  Naples,  de  M.  Carlo  Conti,  correspondant 
de  l'institut  de  France,  compositeur  dont  les  nombreux  opéras  ont  eu 
du  succès  en  Italie  et  en  Espagne,  professeur  depuis  longues  années  au 
collège  royal  de  musique  de  cette  ville,  où  il  avait  éié  le  condisciple 
de  Bellini;  —  à  Bielefeld  (Prusse),  de  la  cantatrice  Mlle  Marie  Cruvelli, 
sœur  de  Mlle  Sophie  Cruvelli,  qui  avait  eu  des  succès  à  l'étranger  et  qu'on 
avait  également  pu  apprécier  à  Paris;  —  à  Paris,  de  M.  Louis- François 
Dauprat,  cornisie  distingué,  longtemps  attaché  à  l'orchestre  de  l'Opéra, 
l'un  des  fondateurs  de  la  Société  des  concerts  du  Conservatoire;  —  à 
Lissa  (province  de  Posen),  du  compositeur  J.-F.  Kittl,  auteur  de  l'opéra 
les  Français  à  Nice,  ancien  directeur  du  Conservatoire  de  Prague. 


ET  R A  NGER 

if.*  ji,  Londres. — HerMajesty'sOpéraadonnésamediderniersa  représentation 
de  clôture,  au  bénéfice  de  Mlle  Tietjens.  Le  progranmie  se  composait  de 
Don  Giovanni  et  du  troisième  acte  de  iVédée.  —  VOrchistral  Union,  jadis 
dirigée  par  le  regrettable  Alfre.l  Mellon,  et  qui  depuis  sa  mort  s'était 
indéfiniment  ajournée,  va  rentrer  en  a<:tivité  sous  la  direction  de 
M.  Kingsburg.  La  première  série  de  concerts  commencera  le  17  août 
dans  la  nouvelle  salle  de  concerts  de  Brighton.  —  L'Eisteddfod,  ou 
congrès  annuels  des  bardes  gallois,  se  tiendra  dans  quelques  jours  à 
Ruthin.  La  poésie  et  la  musique  font  les  frais  de  cette  solennité,  qui 
tend  trop  aujourd'hui  à  se  moderni.'-er  pour  durer  longtemps  encore; 
d'ailleurs  le  nombre  des  bardes  est  devenu  infiniment  restreint. 

^*^  Baden-Baden.  —  Au  sixième  concert  de  la  saison,  Mme  Carvalho 
a  détaillé  avec  un  charme  merveilleux  et  un  luxe  de  vocalises  étonnant, 
l'air  du  premier  acte  de  \a.  Somnambule.  M.  Barré,  de  l'Opéra-Comique,  a 
chanté  délicieusement  un  air  du  Nouveau  Seigneur  du  village.  Le  jeu  de 
Mlle  Marie  Pérez,  jeune  et  jolie  pianiste  marsi-illaise,  a  fait  le  plus 
grand  plaisir.  Quant  à  Batia,  il  a  retrouvé  dans  cette  belle  soirée  les 
bravos  et  les  rappels  qui  ne  lui  font  jamais  défaut. 

j*,  Ems.  —  Aux  représentations  dramatiques  succèdent  les  concerts. 
Dans  l'un  des  derniers,  au  théâtre,  Bntta  a  admirablement  joué  uu 
morceau  de   sa  composition  sur  dos  motifs  de  l'Africaine,  c[a[  a  produit 


un  effet  magique  et  enthousiasmé  l'auditoire.  Cette  semaine  a  eu  lieu 
une  représentation  des  Noces  de  Jeannette,  avec  Mme  Carvalho;  la 
grande  artiste  a  apporté  un  charme  indéfinis.sabic  à  l'interprétation  de 
la  jolie  partition  du  Victor  Massé.  Bottesini,  Antoine  et  Louis  Rubinstein, 
se  sont  fait  entendre  à  la  Conversation  avec  le  prodigieux  succès  dont 
leurs  noms  sont  synonymes. 

^*.f  llombourg.  —  Le  Kurhaus  a  donné,  le  23  juillet,  une  magnifi- 
que représentation  du  Domino  noir,  avec  Mlle  Désirée  Artôt,  dont  le  suc- 
cès ne  fait  que  grandir.  C'est  une  Angèle  inimitable  :  on  a  bissé  plu- 
sieurs morceaux,  et  de, nombreux  rappels,  au  milieu  de  bravos  inces- 
.sants,  ont  prouvé  à  l'éminentc  artiste  combien  on  apprécie  son  talent  si 
souple  et  si  complet.  Elle  a  chanté,  avec  un  succès  non  moins  grand 
l'Elisire  d'Amore  :  chaque  rôle  est  pour  elle  un  nouveau  triomphe  ;  plus 
on  l'entend  et  plus  on  l'applaudit.  Mlle  Artôt  est,  au  surplus,  parfaite- 
ment secondée  par  MM.  Corsi,  Verger,  Agnesi  et  Mlle  Betlini  qui  par- 
tagent avec  elle  la  faveur  et  les  applaudissements  du  public. 

**ij  Prague.  —  Au  mois  de  septembre  sera  représenté  un  nouvel 
opéra  de  F.  de  Flotow,  les  Deux  Compositeurs. 

^*^  Naples.  —  La  municipalité  jirend  elle-même  la  direction  du 
théâtre  San  Carlo.  Rien  n'est  encore  décidé  pour  l'opéra  A'obbligo,  qui 
doit  éclore  chaque  saison. 


Chez  G.  BItANDVS  et  S.  DUFOUR,  éditeurs,  103,  rue  de  Richelieu. 
EN  VENTE  : 

D'OPÉRàS,  D'OPÉRAS-COMIQUES  ET  D'OPÉRETTES 

PARTITIONS  CONFORMES  AU  THÉÂTRE 

Contenant  Paroles  et  Musique  sans  accompagnement. 
Format  de  poche. 

Ahrer Fra  Diavolo net  3  » 

Adam Le  Postillon  de  Lonjumeau 3  » 

Meyerbeea.  Bobert-le-Diable 4  » 

De  Flotow.  Martha 3  » 

Maillart.  .  Les  Dragons  de  Villars 3  » 

Offenbach.  La  Grande-Duchesse  de  Gérolstein. .  3  » 
(Sera  continué.) 

CES   PARTITIONS   SONT   RECOMMANDÉES    SPÉCIALEMENT  : 

Aux  Artistes  dramatiques,  pour  remplacer  la  copie  des  rôles. 

Aux  Sociétés  chorales. 

Aux  Spectateurs,  pour  suivre  la  musique  au  théâtre. 

CHEZ    LES   MÊMES   ÉDITEURS    : 

Morceaux  de  Piano  nouveaux 

J.  Baur.  Transcription  brillante   du  Chœur  des  Evêques 

de  r Africaine 4    » 

Burgmuller.  Valse  de  salon  sur  les  Dragons  de  Villars, 

arrangée  à  quatre  mains  par  Rummel 9    » 

I.  Carreno.  Fantaisie  brillante  sur  l'Africaine 9    » 

Cramer.  Bouquet  de  mélodies  sur  les  Dragons  de  Villars.  7  SO 

—  Bouquet  de  mélodies  sur  Fleur  de  Thé 7  SO 

Duvernoy.  Fantaisie  de  salon  sur  les  Dragons  de   Villan  7  SO 

E.  Ketterer.  Fantaisie  brillante  sur  les  Dragons  de  Villars  7  SO 

—  Galop  de  salon  sur  Fleur  de  Thé 7  SO 

Ch.  Lecocq.  Gavotte 3    » 

E.    Magnus.  Tzygane-Marclie,  souvenir  de  Hongrie 7  SO 

—  La  même,  arrangée  à  quatre  mains 10    » 

Meyerbeer.  Marche  du   Couronnement  du  Prophète,  ar- 
rangée pour  deux  pianos  à  huit  mains 9     » 

Mortier    de    Fontaines.    Rêverie    sur    la    romance  : 

(c  Oh  !  laisse-moi  pleurer,  »  de  Léon  Leroy 4  SO 


Hi:vuE  ET  gazi:tte  musicale  de  pakis. 


MUSIQUE    D'ORGUE  -  HARMONIUM 

Publiée  par  les  éditeurs  BRAIVDUS  et  DUFOUU,  103,  rue  de  Blchelleu. 


METHODES 

BRISSON  (Frédéric).  Ecole  d'orgue  trai- 
tant spécialement  de  soufflerie 
et  contenant  38  exercices  ,  50 
exemples  et  20  études  sur  des 
motifs  de  compositeurs  célè- 
bres     2S     » 

FËSSy.  Méthode  complète  pour  l'har- 
monium,  suivie  d'exsrcices  et 
d'airs 18     » 

AIRS  VARIÉS,  FANTAISIES.  ETC. 

ADAM  (A.).  Vanimsie  sur  la Mîtette  de Por- 
tici,  composée  par  S.  Thalberg, 
arrangée  pour  mélodium  et 
piano 9     » 

AIDAT  (F).  Op.  15.  Les  Hugiienota,  fan- 
taisie brillante  pour  iKirnionium     7  50 

—  Fantaisie  de  salon  sur  l'Étoile  du 

i\ord 7  50 

BADARZEWSKA    (T.).    La    Prière    d'une 

vierge,  pour  harmonium 5     » 

BRISSON.  Adagio  de  Beethoven,  transcrit 
pour  harmonium  ou  orgue  et 
piano 5     ■« 

—  Casta  Diva,    cavatine   de  Norma, 

transcrite  pour  harmonium  ou 
orgue,  piano  et  violon 6    » 

—  La  Somnambule,    trio   pour  har- 

nionium  ou  orgue,  piano  et 
violon 7  50 

—  La  Charité,    choeur    de    Rossini, 

transcrit  pour  harmonium  ou 
orgue,  piano  et  violon 7  50 

—  Op.  66.  Maria,   trio  pour  piano, 

orgue  et  violon 12     » 

—  Op.  69.    Robert  le  Diable,    grand 

duo  caractéristique  pour  piano 

et  orgue 12    » 

—  Op.  70.  Le  Pardon    de  Ploërmel, 

duo  de  concert  pour  piano  et 
orgue 7  50 

—  Op.  71.  Méditation  sur  le  chœur 

religieux  du  Pardon  de  Ploër- 
mel, transcription  pour  piano, 
orgue  et  violon  ou  violoncelle.    7  50 

—  Marche  religieuse  et  chœur   des 

évêquesde  r Africaine,  pour  har- 
monium seul S    » 

—  Mélodies  de  l'Africaine,  arrangées 

pour  harmonium  seul,  trois 
suites chaque    7  50 

—  L'Africaine,    trio    pour    violon , 

piano  et  orgue 12    » 

—  Trente  mélodies  de  Schubert,  trans- 

crites pour  piano  seul  par  St. 
Heller,  arrangées  pour  harmo- 
nium seul,  en  deux  séries  : 

1"  série.  2^  série. 

1.  Adieu.  i.  le  Chassenr  des  Alptl. 

2.  La  Jeune  Hère.  2.  Td  es  te  repos. 

3.  Eloge  des  larmes.  3.  L'IUnsion. 
k.  La  Rose.  L  L'Eiilé. 

!!.  Sur  le  bord  du  lac.  5.  A  flignou. 

6.  La  riainle  du  Pitre .  6.  Impatience . 

7.  Les  Larmes.  7.  Dans  le  bosquet. 

8.  Les  Astres.  8.  les  Plaintes  de  la  jeune  fille. 

9.  la  Berceuse.  9.  Le  ïojageur. 
10.  la  Jeune  Fille  et  la  Mort.  10.  Bonjour. 
H.  Rosemonde.  11.  le  Pécheur. 

12.  La  Sérénade.  i2.   Chanson  des  chasseuri. 

13.  At6  Maria.  13.   la  Truite. 

M.  La  Cloche  des  agonisants.     H.   Le  Joueur  de  rlelle. 

iS.  Iles  Rites  sont  liaii.         15.  Sois  toujours  mes  seules  amoars 
Chaque  morceau 4  50 

BUISSON.  Cantique  du  Domino  noir  en 
trio,  piano,  violon  ou  violoncelle 
et  orgue 10    » 


BRISSON.  .\dagios  de  sonates  de  Beethoven 
transcrits  pour    piano,    violon 
et  orgue  de  salon  : 
N""l.  Largo  de  la  sonate  op.  7    7  50 
2.  Adagio   cantabile  de  la 

sonate  op.  13 7  50 

DURAND,  l"  Romance  sans  paroles  de 
Mendelssohn  en  triopourviolon, 
orgue  et  piano 6    » 

—  Op.  iO.  Grand    duo  sur  les  H'x- 

guenots  pour  orgue  et  piano.  .  10     » 

—  Ouverture  de  la  Sirène  pom  har- 

monium et  piano 9    » 

—  et   KETTERER.   Duo    brillant    sur 

l'Africain',  pour  harmonium  et 
piano 10    » 

ENGEL  (L.).    Fantaisie  pour  harmonium 

sur  l'Étoile  du  Nord 5     » 

—  Grande  fantaisie  pour  orgue-har- 

monium sur  le  Pardon  de  Ploër- 
mel       6     » 

—  Grand  duo  pour  piano  et  harmo- 

nium sur  le  Pardon  de  Plo'érmel.     9    » 

FESST.  Fantaisie  sur  le  chœur  du  Do- 
mino Noir 5     » 

—  Réminiscence  du  Stabat  Mater  de 

Rossini 6    » 

—  Andante  et  boléro  7  50 

—  Cavatine   de    Torquato    Tasso   et 

caprice 7  50 

—  Six   morceaux  sur  des  motifs  de 

Rossini ,    Auber    et    Donizelti. 

2  suites ,  chaque 7  50 

—  et  HERZ.  Deux  duos  concertants, 

pour     harmonium     et    piano. 

2  suites,  chaque 7  50 

N°'  1 .  Cavatine  de  Yaccaj. 
2.  Thème  de  Beethoven. 
FRELON.  Trois  marches  pour  orgue  expres- 
sif à  percussion  : 
N"'  1.  Marche  du  sacre  du  Pro- 
phète      6    » 

2.  Marche  de  flo6er«  ^rucc,     6    » 

3.  Marche  de  la  Muette  de 

l'ortici 6     • 

—  La  Part  du  Diable,  fantaisie  pour 

orgue  et  piano 10    » 

—  .Le  Prophète,  fantaisie  de  concert 

pour  orgue  avec  accompagne- 
ment de  piano  obligé 12    » 

— •    Romance  sans  paroles  de  Thal- 

'berg  pour  orgue  et  piano 9    » 

LEBEAU.  Op.  42.    L'Abandon,   romance 

sans  paroles  pour  harmonium .     5    » 

—  Op.  43.    Danse  brelonne,  vilia- 

nelle  pour  harmonium 5    » 

—  Op.  44.  io  Rosée  du  matin,  ca- 

price potir  harmonium 5    » 

—  Op.  45.  Suivie,  souvenir  d'autre- 

fois, pour  harmonium 5    » 

—  Op.  46.    En   mer,    chant    mari- 

time, pour  harmonium b     » 

—  Op.  47.  Impromptu  pour  harmo- 

nium       5    » 

—  Marche  funèbre  de  Litolff,  à  la 

mémoire  de  G.  Meyerbeer,  ar- 
rangée pour  harmonium  seul.     6    > 

—  Op.  75.  Souvenirs  de  l'Africaine, 

pour  harmonium 6    » 

—  Schiller  -  Marsch,  Marche  triom- 

phale de  G.  Meyerbeer,  trans- 
cription pour  harmonium  seul    7  50 

—  Op.  79.  Duo  de  salon  sur  il/arrto, 

piano  et  orgue 9    » 


LOUIS.  Op.  271 .  Entretiens  familiers  pour 

orgue  et  piano.  3  suites  .  .chaque    6    » 

MARIUS  GUEIT.  Op.  34.  Cinquante  mor- 
ceaux de  différents  caractères, 
classés  ton  par  ton,  et  disposés 
de  manière  à  pouvoir  servir 
d'Antiennes  ou  de  Versets  aux 
chants  de  l'office  divin,  pour 
orgue  ou  harmonium.  En  2 
suites chaque  12    » 

MEREAUX.  Op.  63.  Grand  caprice  sur 
Robert  le  Diable,  pour  harmo- 
uicorde,  piano  et  violon 20    » 

MEYERBEER.  Dernière  Pensée  musicale, 
prélude  au  .3°  acte  de  l'Africaine, 
pour  orgue  harmonium  seul..     2  50 

—  Le  même,    pour   orgue  -  harmo- 

nium et  piano 4    » 

—  Le  même,    en  trio,    pour  piano, 

violon  ou  violoncelle  et  orgue.     6     » 
MOREAUX.  Ouverture    de  Giralda,    pour 

orgue  et  piano 9     » 

—  Ouverture  des  Diamants  de  la  Cou- 

ronne, pour  orgue  et  piano  ...     9     » 
MIOLAN.  Fantaisie    sur  Moïfe,  composée 
par  S.  Thalberg,  arrangée  pour 
mélodium  et  piano 9    » 

—  Choix  de  romances    sans  paroles 

de  Mendelssohn,    pour  harmo- 
nium et  piano  : 

Op.  38.  En  2  suites chaque    9     » 

—  Fantaisie  sur  l'Africaine,  pour  or- 

gue-harmonium       7  50 

—  Fantaisie  sur  il/art/ia,  pour  orgue- 

harmonium  7  50 

RIBALLIER.  Cavatine  du  sommeil  de  la 
Muette  de  Portici,  pour  orgue, 
piano  et  violon,  ou  violoncelle    9     » 

ROMAND  (Giuseppe).  La  Carila,  chœur 
religieux  de  Rossini,  pour  har- 
monium seul 5    » 

—  Ave  Maria,    de  Schubert,    pour 

harmonium  .seul 5     » 

—  Prière  de  Strûdella  (Pieta  signor), 

pour  harmonium  seul 5    • 

BRISSON.  Les  délassements  de  l'étude, 
quarante-huit  mélodies  et  airs 
favoris  tirés  des  opéras  d'Adam, 
Auber,  Flotow,  Maillart,  Meyer- 
beer .  Mozart,  Rossini,  Thomas 
et    Weber,   pour   harmonium 

seul,  en  4  suites chaque    7  50 

1"  suite.  3"  suite. 

1.  Le  Prophite.  25.  lei  Dragons  d^  Villar». 

2.  le  Pardon  de  Ploërmel.     26.  Le  Pardon  de  Ploërmel. 

3.  Siradella.  27.  Le  Roman  d'Elvire. 
i.   la  Hnttte  de  Portici.         28.  Le  Comte  Orj. 

5.  Zerliiie.  29.  La  Fiancée. 

6.  Robert  le  Diable.  30.  le  Pardon  de  Ploërmel. 

7.  Cberon.  31.  La  Muette  de  Portici. 

8.  Le  Po^illiin  de  Lonjumeau.  32.  L'Etoile  du  Nord. 

9.  le  Pro|ihi!le.  33.  Nozze  di  Figaro. 

10.  La  Muette  de  Portici.  3i.  Ilajdée. 

11.  llaila.  35.  le  Pardon  de  Ploërmel. 

12.  la  Sirène.  36.  Le  Roman  d'Eliire. 

2"  suite.  4"  suite. 

13.  le  Phlire,  37.  L'Ambassadrice. 
U.  Guillaume  Tell.  38.  les  Hupenots. 

15.  Lesliicq.  39.  Stradella. 

16.  L'Eoile  du  Nord.  10.  Gnillaume  Tell. 

17.  H.ijJce.  U.  la  Fiancée. 

18.  Uarla.  42.  le  Pardon  de  Ploërmel. 

19.  La  Fiancée.  43.  Le  Roman  d'EInre, 

20.  le  Postillon  de  lonjameau.  44.  Robert  le  Diable. 

21.  Le  Domino  noir.  45.  Fra  Diatolo. 

22.  la  Uurtte  de  Portici.  46.  le  Domino  noir. 
23  Les  Huguenots.  47.  Le  Roman  d'EInre. 
24.  Le  Prophète.  48.  Le  Gheral  de  bronze. 


BU1£R1£  CENTBALE  DES  CBEnmS  DE  FEU  —  A.    CQAIX  ET  C%  BUE  BEBGÈBE,    20,  A  PABIS. 


BUREAUX    A    PARIS  :    BOULEVARD   DES    ITALIENS,  1. 


3S'  Année. 


N'  33. 


ON   S'ABONNE  : 

Dans  les  Dûparttments  ot  û  l'Élrongcr, 

chez  tous  les  Marchands  de  Ifusiquc,  les  Libraires, 

et  aux  Bureaux  der.  Messageries  et  des  Postes. 


16  Août  18G8. 


PRIX    DE    L'ABONNEMENT: 

Paris 'i^   r.  pnr 

Départements,  DL-lgique  ol  Suisse....    30  «       id 
Étranger 34  -»       id 

Le  Journal  paraît  le  Dîmoncho. 


GAZETTE  MUSICAL 


DE     PARIS 


SOMMAIRE.  —  Songe  de  Charles-Marie  de  Weber,  écrit  par  lui-mSme.  —  Les 
droits  des  auteurs  (deuxième  partie,  13°  article),  par  Thomas  Sauvage. 
—  Les  Tliéâtres  lyriques  secondaires  à  Paris  depuis  1820  (5'  article),  par 
Arthur  Poug-in.  —  Bibliograpliie  musicale.  —  Nouvelles  des  théâtres  lyri- 
ques. —  Nouvelles  diverses.  —  Annonces. 


SONGE  DE  CHÂBLES-IÂRIE  DE  WEBER, 

Ecrit  par  Ini-même    (1). 

Endianlé  d'une  symphonie  que  j'avais  heureusement  terminée 
dans  la  matinée,  ainsi  que  d'un  excellent  dîner  que  je  venais  de 
faire,  je  m'endormis  doucement  et  me  trouvai  tout  à  coup  trans- 
porté en  songe  dans  la  salle  ordinaire  des  concerts,  où  tous  les 
instruments  tenaient  une  assemblée  solennelle  et  animée ,  sous  la 
présidence  du  hautbois  sentimental  et  à  l'expression  nasillarde.  A 
droite  s'était  formé  un  club  composé  d'une  viole  d'amour,  d'un 
cor  de  bassette ,  d'une  viole  di  gamba  et  d'une  flûte  douce ,  qui 
tous  se  répandaient  en  lamentations  sur  le  bon  vieux  temps.  A 
gauche,  le  papa  hautbois  tenait  cercle  avec  les  clarinettes  jeunes  ou 
vieilles ,  et  les  flûtes  plus  ou  moins  riches  de  clefs  ;  au  milieu  se 
tenait  le  galant  piano,  entouré  de  quelques  violons  bien  doux  qui 
s'étaient  formés  d'après  Pleyel  et  Girowitz.  Les  trompettes  et  les 
cors  trinquaient  dans  un  coin,  et  les  petites  flûtes  ainsi  que  les 
flageolets  glapissaient  dans  la  salle  avec  leurs  accents  naïfs  et 
enfantins  qui,  suivant  le  papa  hautbois,  sont  la  pure  méthode  de 
Jean-Paul  poussée  par  Pestalozzi  au  superlatif  du  naturel. 

Tout  allait  pour  le  mieux ,  quand  tout  à  coup  la  morose  contre- 
basse entra  bruyamment,  accompagnée  d'un  couple  de  violoncelles. 


(1)  Nous  croyons  être  agréable  à  nos  lecteurs  en  remettant  en  lumière, 
pour  la  génération  artistique  actuelle,  cette  fantaisie,  l'un  des  morceaux 
les  plus  curieux  de  la  littérature  musicale.  Si  nous  avons  lieu  de  faire 
quelques  réserves  sur  l'authenticité  rigoureuse  de  cette  improvisation,  de 
cette  vive  boutade  dont  plus  d'un  trait  pourrait  s'appliquer  à  de  certaines 
tendances  musicales  actuelles,  du  moins  ne  pouvons-nous  ei  ne  pourra- 
t-on  contester  son  esprit,  sa  fraîcheur  et  son  originalité.  Il  nous  a  paru 
au  surplus  intéressant  et  comme  à  propos  de  publier  ce  rêve  du  grand 
maître  dont  nous  étudions  en  ce  moment  la  vie  et  les  œuvres ,  d'après 
les  lettres  de  son  fils. 


ses  proches  parents ,  et  se  jeta  sur  la  chaise  du  chef  d'orchestre 
avec  tant  de  mauvaise  humeur  que  les  violons  en  résonnèrent  de 
frayeur.  Oui ,  s'écria- t-elle,  il  n'y  aurait  plus  qu'à  se  donner  au 
diable,  s'il  fallait  tous  les  jours  subir  de  pareilles  compositions.  Je 
viens  de  répéter  la  symphonie  d'un  de  nos  compositeurs  du  jour; 
et  quoique,  comme  chacun  sait,  je  sois  douée  d'une  passable  dose 
de  vigueur,  il  m'a  pourtant  été  impossible  d'y  tenir  plus  long- 
temps; pendant  cinq  minutes  la  voix  m'a  manqué  sans  retour,  et 
le  sentiment  de  mon  existence  m'a  entièrement  abandonnée.  Je  ne 
suis  pas  faite  pour  sauter  et  me  démener  comme  un  bouc;  je  ne 
suis  pas  obligée  de  me  transformer  en  violon ,  pour  exécuter  ce 
qu'il  plaît  à  M.  le  compositeur  d'appeler  ses  idées;  ma  foi,  j'irai 
dans  un  orchestre  de  bal,  et  je  gagnerai  ma  vie  en  jouant  des  con- 
tre danses,  des  valses  et  des  galops.  —  La  chère  maman  a  parfaite- 
ment raison,  dit  le  premier  violoncelle  en  essuyant  la  sueur  qui 
l'inondait;  je  suis  tellement  fatigué  que,  depuis  le  dernier  opéra 
de  Cherubiui ,  je  ne  me  rappelle  pas  m'être  échauffé  à  ce  point. 
—  Voyons  ,  voyons  ,  contez-nous  cela ,  s'écrièrent  tous  les  instru- 
ments. —  Cela  ne  peut  se  raconter,  et  encore  bien  moins  s'en- 
tendre, interrompit  le  second  violoncelle,  car,  suivant  ce  que  mon 
divin  maître  Romberg  m'a  glissé  à  l'oreille ,  la  symphonie  que 
nous  venons  d'exécuter  n'a  été  composée  ni  d'après  la  nature  de 
quelque  instrument,  ni  pour  développer  une  idée,  ni  enfin  dans  un 
but  quelconque,  si  ce  n'est  celui  de  paraître  neuf  et  original.  On 
nous  fait  grimper  comme  des  violons. ...  —  Eh  bien!  dit  le  pre- 
mier violoncelle,  pourquoi  donc  pas  aussi  bien  qu'eux?  —  Un 
second  violon  :  Que  chacun  reste  dans  ses  limites.  —  La  quinte  : 
Oui,  car  ma  place  est  entre  vous  tous,  et  si  vous  me  quittez,  que 
deviendrai-je?  —  Le  premier  violon  :  Ah!  pour  vous,  il  n'en  est 
plus  question.  Vous  chantez  avec  nous  à  l'unisson,  ou  bien  l'on 
vous  emploie  pour  éveiller  l'attention  ou  la  terreur,  comme  on  Fa 
fait  dans  les  Deux  Journées!  Mais  quant  à  ce  qui  touche  au  beau 
chant...  —  Le  premier  hautbois  :  A  cet  égard,  personne  ne  peut 
se  flatter  d'être  en  état  de  se  mesurer  avec  moi.  —  La  première 
clarinette  :  Mon  cher  monsieur,  vous  nous  permettrez  bien ,  je 
pense,  de  citer  aussi  notre  talent.  —  La  première  flûte  :  Oui, 
pour  jouer  des  marches  ou  des  airs  de  noces.  —  Le  premier  bas- 
son :Eh!  qui  donc  plus  que  \n">\  se  rapprosho  du  divin  téaor?  — 
Le  premier  cor  :  J'aime  à  croire  que  vous  ne  prétendez  pas  réu- 


liEVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


nir  autant  de  vigueur  et  de  suavité  que  moi.  —  Le  piano  :  JMais 
qu'est-ce  que  tout  cela  comparé  à  l'harmonie  que  je  possède  si 
complètement?  Vous  n'êtes,  vous  autres,  que  des  parties  isolées 
d'un  tout;  moi,  je  me  suffis  à  moi-même.  —  Tous  les  insti-uments 
à  la  fois  :  Taisez-vous  donc  ;  il  vous  est  impossible  de  liler  le 
moindre  son.  —  Le  premier  hautbois  :  Aucun  porlamenio.  —  Le 
deuxième  flageolet  :  Oui,  papa  a  raison.  —  Le  deuxième  violoncelle  : 
Mais,  en  vérité,  il  est  impossible  de  faire  entendre  un  seul  son 
raisonnable  dans  un  pareil  tapage!  —  Les  trompettes  et  les  tim- 
bales mugissant  en  fortissimo  :  Silence,  donc!  nous  voulons  par- 
ler aussi.  Que  deviendrait  toute  une  composition  sans  l'cflet  que 
nous  produisons?  Quand  nous  ne  résonnons  pas,  personne  n'ap- 
plaudit. —  La  flûte  :  Il  n'y  a  que  les  âmes  vulgaires  que  le  bruit 
porte  îk  applaudir  :  un  murmure  flatteur  est  cent  fois  préférable. 

—  Le  premier  violon  :  Eh!  si  je  ne  vous  conduisais  pas,  que 
deviendriez-vous  donc  tous?  —  La  conlre-banse  faisant  un  bond  : 
Tu  n'y  penses  pas;  c'est  moi  qui  soutiens  tout,  et  sans  moi  il  n'y 
a  plus  rien.  —  Tous  les  instruments  criant  ensemble  :  C'est  moi, 
c'est  moi  qui  suis  l'âniL'  de  la  musi(]ue;  sans  moi,  plus  de  musique 
possible! 

Tout  à  coup  le  garçon  d'orchestre  entra  dans  la  salle,  et  tous  les 
instruments  effrayés  se  séparèrent  au  plus  vite,  car  ils  connais- 
saient sa  main  puissante,  qui  était  chargée  de  les  porter  à  la  répé- 
tition. Quoi  donc,  s'écria-t-il,  vous  révoltez-vous  encore  une  fois? 
Attendez,  on  va  mettre  sur  les  pupitres  la  symphonie  héroïque  de 
Beethoven;  3t  celui  qui,  après  l'avoir  jouée,  pourra  encore  remuer 
un  membre  ou  une  clef,  n'aura  qu'à  se  présenter.  —  Non ,  pas 
celle-là!  s'écrièrent-ils  tous.  —  l'Iulôt  un  opéra  italien,  rumina  la 
quinte  ;  au  moins  on  peut  de  temps  à  autre  y  faire  son  petit  somme. 

—  Ta!  ta!  ta!  répondit  le  garçon  d'orchestre,  vous  avez  besoin 
d'une  leçon.  Pensez-vous  que  dans  notre  siècle  de  lumière,  où  l'on 
ne  fait  qu'effleurer  toutes  les  idées,  un  œmposileur  ira,  pour  l'amour 
de  vous,  renoncer  au  puissant  élan  de  ses  idées  divines  et  gigan- 
tesques? Dieu  me  pardonne,  il  n'est  plus  question  de  clarté  ni  de 
profondeur,  à  l'ancienne  manière  des  Gliick.des  Haendel  ou  des  Mo- 
zart. Peste!  écoutez  la  recette  que  je  viens  de  recevoir  de  Vienne,  et 
jugez  ensuite.  D'abord,  dans  un  mouvement  bien  lent,  rempli 
d'idées  courtes  et  décousues,  vous  faites  entendre  tous  les  quarts 
d'heure  trois  ou  quatre  notes.  Cela  éveille  l'attention;  ensuite,  un 
roulement  sourd  de  timbales  et  des  traits  mystérieux  de  quinte,  le 
tout  assaisonné  d'une  quantité  convenable  de  pauses  et  de  temps 
d'arrêt.  Enfin,  quand  l'auditeur,  à  force  d'attendre,  a  déjà  renoncé 
à  l'allégro,  un  mouvement  furieux,  dans  knpiel ,  avant  tout,  on  a 
bien  soin  qu'aucune  idée  principale  ne  domine;  cai,  il  faut  bien  lais- 
ser un  aliment  à  l'imagination  de  l'auditeur.  Il  ne  faut  pas  négliger 
non  plus  de  passer  brusquement  d'un  ton  dans  un  autre.  Aacz  vous 
besoin  d'une  modulation?  Vous  n'avez  besoin,  comme  Paër  dans 
Léonore,  que  d'employer  une  suite  de  demi-tons,  et  du  moment  que 
vous  arrivez  à  la  note  dont  vous  a\ez  besoin  conmie  tonique ,  vous 
vous  y  arrêtez,  et  votre  modulation  se  trouve  faite.  Il  faut  éviter  soi- 
gneusement tout  ce  qui  ressemble  à  une  règle,  car  les  règles  ne  ser- 
vent qu'à  entraver  le  génie... 

Tout  à  coup  une  des  cordes  de  la  guitare  qui  était  suspendue  au- 
dessus  de  ma  tête  vint  à  se  rompre,  et  je  m'éveillai  suffoqué  de  ter- 
reur, au  moment  où,  par  mon  rêve,  j'étais  sur  le  point  de  dev3nir 
un  grand  compositeur  dans  le  goût  moderne.  Merci  pour  ton  atten- 
tion délicate,  aimable  instrument  qui  parfois  accompagnes  mes 
chants  !  Je  courus  promptement  reliie  le  nioiceau  que  je  venais 
d'achever,  je  m'assurai  qu'il  n'était  pas  composé  d'après  la  re- 
cette du  savant  garçon  d'orchestre,  et  j'allai  en  toute  hâte,  le 
cœur  rempli  d'une  divine  espérance,  assister  à  la  représentation  de 
Don  Juan. 


LES  DROITS  DES  AUTEURS. 

{Deuxième  partie.) 

SOCIÉTÉ   DES  AUTEURS,    C051P0SITEURS   ET   ÉDITEURS   DE   MUSIQUE. 

(13«  article)  (1). 

Quoique  absorbés  dans  leur  opération  importante,  les  deux 
Turcs  jettent  de  temps  en  temps  un  coup  d'œil  sur  les  futures 
odalisques,  et  d'un  mouvement  de  la  tête  les  animent  et  les  en- 
couragent. Tout  à  coup  Bali-Aladin  fait  un  bond  sur  le  canapé, 
jette  sa  pipe,  frappe  dans  ses  mains  et  crie  : 

—  Cacaracamouchen  ! 

—  .Cacaracamouchen?  répète  Moq-Moq,  en  le  regardant. 

—  Cacaracamouchen!  redit  le  chef  des  Chiaoux,  avec  plus  de 
force. 

—  Cacaracamouchen...  yoc  (2),  l'épond  le  drogman. 

Lolotte  et  Fifine  s'étaient  approchées  au  premier  cri  et  atten- 
daient, immobiles,  le  résultat  de  cet  entretien.  Mysti  Moq-Moq 
s'avança  vers  elles. 

—  Le  vénérable  Bah-Aladin  désire  que,  pour  employer  le  temps 
jusqu'à  ce  que  le  café  soit  prêt,  vous  lui  donniez  un  échantillon 
de  votre  talent  pour  la  danse. 

—  C'est  que,  dit  Lolotte,  nous  ne  sommes  pas  dans  la  tenue. 

—  De  cour? 

—  Non!  de  l'école  :  nos  robes  sont  gênantes. 

—  Quittez-les. 

—  Mais. . .,  fit  Lolotte. 

—  Bah!  dit  Fifine  en  dénouant  un  cordon,  h;  costume  de  cour 
sera  bien  autre  chose  ! 

En  un  instant  les  robes  tombèrent  et  les  deux  pensionnaires  de 
l'Académie  royale  de  musique,  en  jupon  court,  en  blanc  corset, 
comme  disait  la  chanson  à  la  mode  dans  ce  temps-là,  commen- 
cèrent un  pas. 

—  Oh  !  dit  Fifine  en  s'arrêtant,  ça  ne  peut  pas  aller  comme  ça; 
on  ne  danse  pas  sans  violon  ! . . . 

Au  même  moment  et  comme  si  quelque  magicien  n'eût  attendu 
que  l'expression  de  son  désir  pour  le  satisfaire,  se  fit  entendre  la 
cadence.,  avertissement  ordinaire  dont  le  maître  à  danser  fait  pré- 
céder l'air  du  pas  qu'on  doit  exécuter. 

Les  danseuses  restèrent  ébahies,  et  leur  admiration  redoubla 
lorsque,  s' étant  retournées,  elles  aperçurent  Moq-Moq  qui  jouait 
avec  amour  sur  une  poche  de  maître  à  danser,  la  Monaco,  air  alors 
fort  en  vogue. 

—  A  la  bonne  heure  donc!  s'écria  Fifine;  ça  va  marcher  main- 
tenant. 

En  effet,  Lolotte  et  Fifine  se  livrèrent  avec  enthousiasme  à  toutes 
les  fantaisies  chorégraphiques  qui  leur  vinrent  à  l'esprit  et  aux 
jambes,  saiis  souci  aucun  de  la  disposition  légère  de  leurs  vête- 
ments, animées  d'ailleurs  par  l'archet  de  Moq-Moq  qui  pressait  la 
mesure  et  les  entraînait  presque  malgré  efles,  comme  un  tour- 
billon. 

Musicien  et  danseuses  s'arrêtèrent  enfin  épuisés. 

—  Belmen!  cria  Bah-Aladin,  en  étendant  les  bras  vers  les  oda- 
lisques. 

La  pantomime  expliquait  suffisamment  le  mot  :  Lolotte  et  Fifine 

(1)  Voir  les  n°=  33,  -40,  U,  43  et  49  de  l'année  1867,  et  les  n»^  7,  9, 
22,  26,  27,  28  et  29. 

(2)  Bien  qu'ici  Jlysti  Moq-Mcq  emploie  le  mot  yoc  affirmativement,  en 
turc  il  signitie  :  Non.  C'est  dans  ce  sens  que  iMolière  l'emploie  toujours 
dans  la  Bourgeois  gentilhomme. 


DE  PAKIS. 


259 


comprirent  facilement  ce  turc-là  et  vinrent  successivement  recevoir 
le  baiser  de  satisfaction. 

—  Belmenl  cria  à  son  tour  Moq-Moq,  avec  le  même  geste. 
Et  la  même  invitation  fut  suivie  de  la  même  obéissance. 

—  Passons  à  présent  au  café. 

—  11  est  prêt. 

Les  gentilles  compagnes  eurent  en  quelques  secondes  disposé 
sur  une  table  un  cabaret  en  porcelaine,  puis  la  cafetière,  le  pot  à 
crème,  les  petits  pains  :  elles  invitaient  déjà  du  geste  et  du  re- 
gard leurs  convives  à  se  transporter  auprès  de  cet  attrayant  dé- 
jeuner. 

—  Acciam  croc  alla  mouslapha  corbulath,  dit  en  tournant  la 
tête  Bab-Aladin. 

—  Est-ce  qu'il  n'en  veut  plus?  demanda  Lolotte. 

—  Au  contraire  '  répondit  l'interpi'ète  ;  mais  il  veut  le  prendre 
à  la  turque,  afin  que  vous  appreniez,  avec  nous,  le  service  de  Sa 
Hautesse. 

—  Diable  !  grommela  Fifme,  ça  commence  à  devenir  peu  amu- 
sant le  métier  d'odalisque.  —  Et  tout  haut  :  En  bien ,  qu'est-ce 
qu'il  faut  faire? 

—  Nous  mettre  d'abord,  à  chacun,  notre  serviette  de  façon  à 
préserver  nos  vêtements  de  toute  souillure. 

—  C'est  ça  qu'ils  sont  beaux!  murmura  encore  Fifine. 

On  attacha  une  serviette  sous  le  menton  de  chaque  étranger. 

—  Maintenant,  dit  le  drogman,  la  main  de  Sa  Hautesse  ne  de- 
vant toucher  rien  de  ce  qui  doit  se  convertir  en  impureté,  ses 
odalisques  présentent  les  aliments  à  sa  bouche  impériale.  Voyons 
comment  vous  vous  acquitterez  de  ces  augustes  fonctions. 

—  C'est-à-dire  qu'il  faut  vous  faire  manger  ni  plus  ni  moins 
que  des  bambins  au  maillot. . .  C'est  drôle! 

—  C'est  égal,  dit  Fifme,  c'est  pas  difficile,  et  pour  44,000  francs 
on  peut  se  risquer. 

Voici  le  tableau  : 

Bah-Aladin  et  Mysti  Moq-Moq,  la  serviette  au  cou,  sont  assis  à 
la  turque,  l'un  sur  le  canapé,  l'autre  sur  des  coussins  de  bergère; 
les  deux  odahsques,  dans  le  costume  négligé  que  je  vous  ai  in- 
diqué, un  peu  dérangé  même  par  l'exercice  auquel  elles  viennent 
de  se  livrer,  tiennent  d'une  main  une  tasse  de  café,  de  l'autre  un 
fragment  de  petit  pain  taillé  en  mouillette.  Lolotte  s'est  transpor- 
tée auprès  de  Bah-Aladin,  et  debout  derrière  le  canapé,  la  tête 
penchée  vers  le  petit  homme,  lui  insinue  dans  la  bouche  la  mouil- 
lette imbibée  de  liquide,  dont  la  tasse,  placée  sous  son  menton, 
recueillera  les  débris;  Fifine  est  agenouillée  devant  Mysti  Moq-Moq: 
son  regard  et  ses  bras,  levés  vers  lui,  attendent  qu'il  ait  avalé  la 
bouchée  qui  occupe  actuellement  l'activité  de  sa  mâchoire,  pour 
lui  en  administrer  une  autre. 

Tout  à  coup  un  grand  bruit  éclate,  si  soudain  et  si  énorme 
qu'il  frappe  de  stupeur  chacun  des  personnages,  qu'aucun  ne 
bouge  et  que  ce  tableau,  tel  que  je  viens  de  le  décrire,  peut  être 
contemplé  à  loisir  dans  tous  ses  détails  par  la  brillante  et  bruyante 
réunion  de  seigneurs,  témoins,  il  y  a  trois  mois,  de  l'humiliation 
des  deux  célèbres  mystificateurs,  et  qui  fait  irruption  dans  le  bou- 
doir! 

—  Bravo  !  bravo  !  cria-t-on  après  un  moment  donné  à  l'admira- 
tion qu'inspirait  un  pareil  aspect. 

Fifine  et  Lolotte  regardaient  tout  ce  monde,  écoutaient  ces  ap- 
plaudissements et  ne  pouvaient  comprendre. . . 

—  Bravo!  reprit-on  en  chœur,  à  eux  les  tOO  louis  ! 

—  Ils  ont  gagné  la  gageure  ! 

—  Une  gageure? 

—  100  louis? 

—  Qu'est-ce  que  cela  veut  dire?  demandèrent  effrayées  et  pres- 
que suppliantes  les  danseuses. 


—  Salamalequil  salamalequi!  salamalequi!  cria  en  se  levant, 
sautdiant,  bredouillant  autour  d'elles  le  petit  liomme  au  chapeau 
pointu. 

—  Odalisques  de  Sa  Hautesse,  recevez  nos  hommages,  dit  à  son 
tour  l'Arménien  en  leur  envoyant  des  baisers. 

—  Mais  qu'est-ce  donc?  qui  sont  ces  gens-là?  crient  à  la  fois 
Fifine  et  Lolotte,  trépignant  d'impatience  ,  rouges  de  honte  et  de 
colère. 

—  Vos  très-humbles  serviteurs,  répondent,  leur  coiH'ure  et  leur 
barbe  à  la  main,  les  deux  étrangers. 

—  Mysti  Moq-Moq,  le  drogman. 

—  Musson  !!! 

—  Et  Bah-Aladin,  le  chef  des  Chlaoux. 

—  Dngazon!!! 

—  Qui  avaient  juré  de  tirer  une  vengeance  éclatante  de  votre 
impertinente  fierté, 

—  Qui  avaient  parié  qu'ils  vous  amèneraient  à  les  embrasser,  à 
les  divertir,  à  les  servir. . . 

—  Et  qui  ont  gagné  la  gageure;  car  vous  les  avez  servis,  di- 
vertis et  embrassés. 

—  Ma  foi,  c'est  bien  joué!  dit  Fifine  la  bonne  fille,  prenant 
gaiement  son  parti. 

—  Et  nous  devons  encore  les  remercier  de  n'avoir  pas  exigé  le 
costume  de  cour,  dit  Lolotte,  tendant  la  main  à  ses  anciens  en- 
nemis . 

Thomas  SAUVAGE. 
(La  suite  prochainement.) 


LES  THÉÂTRES  LTBIQUES  SECONDAIRES  Â  PARIS 


DEPUIS     tSSO. 


(5"  article)  (1). 


Lorsqu'en  1815  la  Compagnie  italienne  s'en  alla  occuper  la  salle 
de  Louvois,  le  coup  fut  rude  pour  les  acteurs  de  l'Odéon,  devenu 
«  un  second  théâtre  français,  «  lesquels  se  soutinrent  cependant 
jusqu'au  20  mars  1818,  jour  oîi  la  salle  devint  de  nouveau 
la  proie  des  flammes.  Le  théâtre,  reconstruit  rapidement  pen- 
dant que  la  troupe  allait  jouer  à  la  salle  Favart,  rouvrit  le  30  sep- 
tembre 1819.  A  partir  de  ce  moment,  les  vicissitudes  de  l'Odéon 
recommencent,  et  la  décadence  s'annonce  comme  devant  être  ra- 
pide et  complète,  malgré  les  talents  réunis  de  Joanny,  Eric-Ber- 
nard, Chazel,  Sarason,  Armand,  Duparay,  de  Mlle  Georges,  de 
Mlle  Anaïs,  etc. 

Bref,  l'Odéon  s'affaissait  d'une  façon  évidente,  et  les  directeurs, 
fuyant  ce  théâtre  infortuné,  disparaissaient  les  uns  après  les  autres. 
Picard,  qui  avait  tenu  si  longtemps  les  rênes  du  gouvernement,  les 
avait  cédées  à  Gentil  ;  celui-ci  les  repassa  à  Girael,  qui  bientôt 
ne  demanda  qu'à  s'en  débarrasser  au  profit  d'un  successeur  quel- 
conque. C'est  alors  que  se  produisit  la  combinaison  que  nous  avons 
vu  apprécier  plus  haut,  et  qui  était  le  fruit  de  l'imagination  d'un 
des  meilleurs  comédiens  du  théâtre  :  Eric-Bernard.  On  a  vu  que 
cette  combinaison  consistait  à  joindre  l'opéra,  et  même  le  vaude- 
ville, aux  deux  genres  en  honneur  au  second  théâtre  français  :  la 
tragédie  et  la  comédie. 

Eric-Bernard  ayant  fait  approuver  son  projet  par  le  ministère 
et  s'étant  vu  nommer  directeur,  se  mit  eu  devoir  do  le  mettre 
à  exécution.  11  s'occupa  de  choisir  une  troupe  chantante,  de  l'as- 
sembler des  chœurs,  de  composer  un  orchestre,  enfin  de  se  former 
un  répertoire,  toutes  choses  qui  n'étaient  pas  absolument  faciles. 

(1)  Voir  les  n»'  2o,  20,  29  et  31. 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


En  ce  qui  concerne  la  troupe,  voici  le  détail  de  son  personnel 
à  la  date  du  1"  janvier  182S  : 

MJI.  Mmes 

Lecomte  (l^  ténoi),.  Montano(l''' chanteuse,  contralto), 

Campenant  (id.),  Valère  Florigny  (jeune  l"""  chan- 

Bizot  (baryton),  teuse), 

Valère  (l"  basse),  Pouilley  (2"  chanteuse  et  l'"  au 

Camoin  (i"  basse  comique),  besoin), 

Maire  (2'  basse),  Letellicr  (Dugazon), 

Latapy(les  «Colin  selles  Trial),  Régnier  (2°  et  3°  chanteuse), 
Saint-Preux  {Laruette),  Cabinel  {id.), 

Aug.  Lebrun  (2'=  Laruette).  Camoin  (duègne), 

Milen  (id.), 
—  Dorsan  (utilité), 

Saint-Amant  {id.). 

Tous  ces  artistes  venaient  de  la  province  et  formaient,  paraît-il, 
un  ensemble  très-satisfaisant,  bien  que  de  tout  cela  ne  se  détachât 
aucune  personnalité  nette  et  vigoureuse.  Les  chœurs  se  composaient 
de  quatre  «  hautes-contre,  »  six  «  tailles,  »  six  basses  et  douze 
sopranos.  Quant  à  l'orchestre,  qui  auparavant  ne  comptait  que 
quinze  artistes,  il  comprenait  huit  premiers  violons,  neuf  seconds, 
quatre  altos,  cinq  violoncelles,  six  contre-basses,  et  Tharmonie, 
ainsi  que  les  cuivres,  au  grand  complet. 

Dans  cet  orchestre,  je  rencontre  des  noms  connus  :  M.  Seghers 
(premier  violon),  qui  fut,  il  y  a  quinze  ans,  chef  d"orchestro  de  la 
Société  Sainte-Cécile;  Jupin  (violou-solo),  excellent  violoniste,  (jui 
fut  un  compositeur  de  talent;  M.  Aiiressy  (premier  violon),  (jui  au- 
jourd'hui, et  depuis  longtemps,  est  devenu  chel-d'orchestre  de  ce 
théâtre;  Tolbecipie  (alto),  l'aîné  des  trois  frères  de  ce  nom, 
qui  se  fit  quelques  années  une  si  grande  réputation  comme  com- 
positeur de  musique  de  danse  et  chef  d'orchestre  de  bals;  enfin, 
Gallay,  l'un  des  meilleurs  cornistes  que  la  France  ait  possédés,  et 
qui  était  encore,  lorsqu'il  est  mort,  il  y  a  trois  ans,  professeur  au 
Conservatoire.  Quant  au  chef  de  cet  orchestre,  c'était  un  des 
meilleurs  du  temps,  et  do  plus  un  compositeur  habile  :  il  s'appe- 
lait Pierre  Crémont,  et  était  âgé  de  quarante  ans  environ.  Ancien 
élève  du  Conservatoire,  où,  dit  M.  Fétis,  il  s'était  vu  admettre  en 
l'an  VIII,  il  avait  ensuite  dirigé  en  x\ilemagne  l'orchestre  d'une 
troupe  d'acteurs  ambulants,  après  quoi  il  était  allé  se  mettre  à  la 
tête  de  celui  du  Théâtre-Français  de  Saint-Pétersbourg,  et  de  celui 
du  Grand-Théâtre  de  Moscou,  dont  il  avait  même  été  directeur. 
Revenu  à  Paris,  on  lui  avait  confié  en  181 S  le  commandement  de 
l'orchestre  de  l'Odéon,  qu'il  avait  quitté  en  1821  pour  devenir 
deuxième  chef  à  l'Opéra-Comique,  oii  ses  supérieurs  étaient  Fré- 
déric Kreubé  et  Habeneck  (1).  La  nouvelle  administration  de 
l'Odéon,  fort  bien  avisée,  n'eut  rien  de  plus  pressé  que  de  rappe- 
ler l'ancien  chef  d'orchestre  de  ce  théâtre,  celui-ci  étant  destiné  à 
aborder  le  genre  lyrique.  En  quoi  elle  fut  d'autant  mieux  inspirée 
que,  dès  le  début,  cet  orchestre  et  son  chef  se  firent  une  brillante 
réputation. 

(1)  Je  lis  dans  la  Biographie  universelle  des  Musiciens  :  «  Crémont  re- 
vint en  France  en  1817,  et  s'établit  à  Paris.  En  1821  il  fut  nommé  se- 
cond soiis-chrf  d'orchestre  au  théâtre  de  rOpéra-Comique,  et  il  en  reni- 
pht  les  fonctions  jusqu'en  1824,  oij  il  passa  à  l'Odéon  en  qualité  de  pre- 
mier chef  ei  de  directeur  de  la  musique.  » 

Ceci  ferait  supposer  que  Crémont  ne  serait  entré  à  l'Odéon  qu'en  1824, 
ce  qui  est  ui.e  erreur.  M.  Fétis  aura  sans  doute  été  trompé  par  de  faux 
renseignements,  car,  en  consultant  année  par  année  VAnnuaire  dramati- 
que (rédigé  par  Ragueneau  et  publié  par  Mme  Cavanagh),  recueil  très- 
bien  fait  et  surtout  très-exactement  informé,  j'y  trouve,  comme  cliel's 
d'orchestre  de  l'Odéon  :  pour  les  années  1813,  1816,  1817,  1818,  1819  et 
1820,  Crémont  ;  pour  1821  (alors  que  celui-ci  était  passé  à  l'Opéra-Co- 
mique), Lagny;  pour  1822  et  1823  (renseignement  puisé  cette  fois  dans 
VÂlmanach  des  Spectacles  publié  par  Barba,  l'Annuaire  ayant  cessé  d'exis- 
ter), Martin. 


C'est  avec  les  éléments  qui  viennent  d'être  énumérés  que  l'O- 
déon s'apprêtait  à  livrer  bataille,  et  c'est  le  27  avril  1824  qu'eut 
lieu  le  premier  engagement,  je  veux  dire  la  première  représenta- 
tion donnée  par  le  nouveau  directeur.  Le  spectacle  n'était  pas  ab- 
solument corse,  comme  on  dit  aujourd'hui,  mais  il  vaudra  la 
peine  que  nous  nous  y  arrêtions  un  instant,  ne  fût-ce  que  pour 
signaler  l'apparition  d'un  petit  ouvrage  musical  de  circonstance, 
dû  à  la  collaboration  de  deux  de  nos  compositeurs  les  plus  illus- 
tres, et  que  cependant  aucun  biographe,  à  l'exception  de  M.  Fétis 
(2°  édition  de  la  Biographie  universelle  des  Musiciens)  n'a  porté  à 
leur  compte.  Il  s'agit  d'un  prologue  de  réouverture,  intitulé  les 
Trois  Genres,  dont  les  paroles  étaient  l'œuvre  collective  de  Dupaty, 
Scribe  et  Pichald,  et  dont  la  musique  avait  été  écrite  par  Boïeldieu 
et  M.  Auber.  —  Nous  aurons  plus  loin  à  nous  occuper  de  ce  petit 
ouvrage  que  ni  Gustave  Héquet,  dans  son  étude  sur  Bdj'eldieu,  ni 
M.  Jouvin,  dans  sa  biographie  de  M.  Auber,  n'ont  porté  ù  la  con- 
naissance du  public. 

Nous  avons  vu  que  le  théâtre  de  Madame  avait  été  fondé,  — en 
apparence  seulement,  —  dans  le  but  d'être  utile  aux  jeunes  com- 
positeurs, (le  leur  faciliter  l'entrée  dans  la  carrière  II  n'était  point 
question  de  cela  à  l'Odéon,  bien  au  contraire,  car  ce  théâtre  ne 
devait  point  donner  d'œuvrcs  nouvelles,  et  l'une  des  clauses  de 
son  privilège  portait  que,  dans  le  genre  lyriiiue,  il  ne  pourrait 
jouer  que  des  traductions  ou  des  ouvrages  tombés  dans  le  domaine 
public.  Aussi  fût-ce,  pendant  quelques  années,  un  Aéritable  débor- 
dement d'adaptations,  de  traductions,  de  pastiches  dr  toutes  sortes, 
dus  pour  la  plupart  à  la  verve  enragée  de  Castil-Rlaze,  qui  du 
reste,  il  faut  le  reconnaître,  profita  de  la  facilité  qui  lui  était 
offerte  pour  implanter  chez  nous,  avec  plus  ou  moins  d'à-propos 
et  d'intelligence,  un  certain  nombre  de  chefs-d'œuvre  que  le  pu- 
blic français  n'avait  jamais  été  à  môme  d'admirer.  Quelques-uns 
de  ces  chefs-d'œuvre  furent  hciurcux  et  obtinrent  de  grands  succès; 
mais  d'autres  furent  moins  bien  accueillis,  et,  en  somme,  malgré 
de  grands  efforts,  l'administration  de  l'Odéon  ne  parvenait  que 
bien  difficilement  à  équilibrer  les  dépenses  avec  les  recettes.  Si 
bien  qu'en  1826  elle  demanda  une  modification  de  son  privilège 
et  l'autorisation  de  pouvoir  jouer  des  œuvres  tout  à  fait  nouvelles. 
Quelques  écrivains  comme  il  s'en  trouve  toujours,  peu  au  cou- 
rant de  l'art  musical,  profitèrent  de  la  circonstance  pour  affirmer 
comme  d'ordinaire  la  non-existence  d'une  école  musicale  française. 
Parmi  ceux-ci,  je  citerai  M.  Charles  Maurice,  journaliste  expert 
cependant  en  matières  de  théâtre,  et  qui  publia  sur  cette  question, 
dans  le  Courrier  des  Théâtres,  le  singulier  article  que  voici  : 

«  Théâtre  royal  de  V  Odéon.  —  La  représentation  des  opéras  de 
nos  jeunes  compositeurs  sera-t-elle  productive  et  contribuera-t-elle 
aux  progrès  de  l'art  musical?  Nous  verrons  bien.  Mais  pour  rendre 
la  question  facile  à  résoudre,  posons-la.  Deux  théâtres  sont  spécia- 
lement destinés  à  la  représentation  des  opéras  de  l'école  française. 
Nous  voulons  parler  de  l'Académie  royale  de  Musique  et  de  l'Opéra- 
Comique.  Le  premier  se  soutient  aujourd'hui  au  moyen  de  ses 
ballets.  Sans  doute,  son  répertoire  musical  est  riche;  mais  à  qui 
devons-nous  les  chefs-d'œuvre  qui  ont  fait  longtemps  sa  prospé- 
rité"? La  réponse  ne  plaira  sans  doute  pas  aux  personnes  qui  par- 
lent de  nationalité  à  propos  de  beaux-arts,  mais  il  faut  cependant 
bien  le  dire,  c'est  à  des  compositeurs  étrangers.  La  Vestale,  Fer- 
nand  Cartes  appartiennent  à  Spontini;  Sacchini  est  l'auteur 
A'OEdipe.  Parlerons-nous  àHAlceste,  A'Armide,  d'Orphée?  Les  ou- 
vrages de  Méhul,  compositeur  fi-ançais,  ne  sont  plus  représentés. 
Quant  à  ceux  de  Grétry,  on  ne  peut  en  parler  que  pour  la  forme. 
Panurge  et  la  Caravane  ont  beaucoup  d'admirateurs,  mais  peu  de 
spectateurs.  La  lyre  de  Berton  ne  trouve  pas  tous  les  encourage- 
ments qu'elle  mérite;  celle  de  Boïeldieu  se  repose;  M.  Catel  est 
mort   pour   le  théâtre.   On  nous  promet,  depuis  longtemps,    un 


DE  PARIS. 


261 


Alexandre  à  Babylone,  de  M.  Lcsueur,  mais  il  vient  encore  de 
céder  le  pas  à  l'œuvre  de  l'étranger,  le  Siège  de  Corinthe,  de 
M.  Rossini.  Parlerons-nous  des  compositeurs  en  herbe;  de  M.  Daus- 
soigne,  par  exemple?  Hélas!  quel  est  l'homme  si  mal  organisé 
pour  la  musique  qui  aurait  le  courage  d'entendre  deux  fois 
Aspasie  et  les  Deux  Salem? 

»  Reste  rOpéra-Comique.  Ce  théâtre  est  le  vrai  représentant  de 
l'école  française.  Mais  il  vit  en  ce  moment  sur  le  passé,  et  les 
jeunes  compositeurs  lui  promettent  peu.  M.  Auber  a  obtenu  du 
succès  ;  M.  Hérold  mérite  d'en  obtenir.  Mais  ces  musiciens  n'ont  pas 
assez  de  celte  originalité  qui  décèle  te  génie.  Us  sacrifient  à  la  mode, 
et  imitent  presque  constamment  M.  Rossini,  méchant  modèle  dès 
qu'il  s'agit  d'école  et  de  classique.  M.  Carafa  est  encore  un  autre  imi- 
tateur du  même  signor;  d'ailleurs  il  n'appartient  point  à  la  France. 
Que  dire  de  M.  Dourlen,  qui  a  cependant  remporté  le  premier 
prix,  et  de  deux  ou  trois  autres  compositeurs  ejusdem  farinœ? 
Les  habitués  de  Feydeau  sont  bien  heureux  de  ne  jamais  franchir 
les  limites  de  leur  théâtre...  Qui  donc  travaillera  pour  l'Odéon?...  » 

On  voit  que  ce  sont  toujours  les  mêmes  plaintes,  les  mêmes 
doléances  injustes,  relativement  à  la  prétendue  impuissance  de  la 
France  à  produire  des  compositeurs  dramatiques.  Quoi  qu'il  en 
soit,  Eric-Bernard,  n'ayant  pu  obtenir  du  ministère  les  conces- 
sions qu'il  en  espérait,  résigna  son  privilège  et  se  contenta  de 
conserver  à  l'Odéon  son  emploi  de  premier  rôle  dans  la  tragédie. 
Il  eut  pour  successeur  Frédéric  du  Petit-Méré,  qui  prit  possession 
du  théâtre  dans  le  cours  de  l'année  1826.  Mais  la  marche  de 
celui-ci  resta  à  peu  près  la  même  :  tandis  que  le  premier  direc- 
teur avait  monté  les  Folies  amoureuses,  la  Pie  voleuse,  le  Sacrifice 
interrompu,  Robin  des  Bois,  les  ISoces  de  Gamache,  Othello,  la  Dame 
du  Lac,  Prcciosa,  la  Forêt  de  Sénart,  Marguerite  d'Anjou,  le  Ma- 
riage de  Figaro,  c'est-à-dire  des  traductions  et  des  pastiches,  le 
second  livra  au  public  le  Neveu  de  Monseigneur,  Ivanhoé ,  le  Tes- 
tament, Emmeline  ou  la  Famille  suisse,  Pourceaugnac,  la  Folle  de 
Claris,  c'est-à-dire  des  pastiches  et  des  traductions.  Mais  l'un  ne 
réussit  pas  plus  que  l'autre,  et,  le  2  juin  1827,  M.  du  Petit-Méré 
cédait  les  rênes  du  gouvernement  d'outre-Seine  à  M.  Th.  Sauvage, 
le  spirituel  auteur  dramatique,  l'excellent  écrivain  que  les  lecteurs 
de  la  Gazette  musicale  connaissent  trop  bien  pour  que  j'aie  besoin 
de  leur  en  faire  l'éloge.  Mais  M.  Sauvage  lui-môme  ne  conserva 
pas  longtemps  le  «  sceptre  directorial.  »  Il  avait  pris  l'administra- 
tion de  l'Odéon  dans  des  conditions  désastreuses,  et  tous  les  efforts 
de  son  intelligence  ne  pouvaient  réussir  à  sauver  une  situation 
impossible.  Le  14  juillet  1828,  à  la  suite  d'une  soirée  des  plus 
orageuses ,  le  théâtre  dut  être  fermé  par  ordre ,  et  il  ne  rouvrit 
que  le  5  octobre  suivant,  sous  la  direction  de  Lemétheyer.  Mais 
l'opéra  avait  fait  son  temps ,  et  l'Odéon  redevint  ce  qu'il  avait  été 
par  le  passé,  un  théâtre  uniquement  consacré  à  la  tragédie  et  à  la 
comédie,  —  «  à  Melpomène  et  à  Thalie,  »  —  comme  on  disait 
alors.  Son  existence  semi-musicale  avait  duré  un  peu  plus  de 
quatre  ans,  du  27  avril  1824  au  14  juillet  1828,  et  nous  allons 
voir,  en  déroulant  son  répertoire  lyrique,  ce  qu'il  avait  produit  en 
ce  genre  dans  cette  campagne,  incomparablement  laborieuse  d'ail- 
leurs. 

Voici  la  nomenclature  complète  des  œuvres  musicales  représen- 
tées à  l'Odéon  pendant  cette  période  difficile  de  sa  vie  tourmen- 
tée. Nous  nous  contenterons  d'une  simple  mention  relativement 
aux  ouvrages  que  ce  théâtre  emprunta  au  répertoire  de  l'ancienne 
Comédie-Italienne  et  de  l'Opéra-Comique,  mais,  chemin  faisant, 
nous  entrerons  dans  quelques  détails  en  ce  qui  concerne  les  tra- 
ductions nouvelles  et  les  rares  productions  écrites  expressément  à 
son  intention. 

Arthur  POUGIN. 
(La  suite  prochainement.) 


BIBLIOGRAPHIE  MUSICALE. 

'»n!iKin«  yi  ki!i  annx^  —  '.£pioi||jKn-H>loswi.'>pn3||[  'd 

Composée  pour  la  Méthode  des  méthodes  de  piano. 

Une  grande  partie  dos  pianistes  no  connaissent  que  par  réputation  celte 
merveilleuse  Étude  en  fa  mineur,  de  iWendelssohn-Bartliolciy,  oii  l'agilité 
de  l'accompagnement  ne  fait  que  mieux  ressortir  le  charme  et  la  sim- 
plicité du  thème  confié  à  la  main  droite.  C'est  une  page  classique  qui 
n'est  pas  destinée  à  tomber  de  longtemps  dans  l'oubli. 

Aussi  pensons-nous  que  c'est  une  excellente  idée  de  l'avoir  tirée  de  la 
Méthode  des  méthodes,  de  MM.  Moschelès  et  P'élis,  pour  l'éditer  à  part. 
Beaucoup  d'amateurs  qui  hésitaient  à  l'aller  chercher  là,  à  cause  du  prix 
relativement  élevé  de  l'ouvrage,  ne  seront  plus  arrêtés  par  cet  obstacle, 
maintenant  qu'elle  est  à  la  portée  de  tout  le  monde. 


».  Uagnns.  —  Tzigane  -  Marche,  souvenir  de  Hongrie,  pour  le  piano. 

Voici  bien  certainement  une  œuvre  qui  ne  sera  pas  des  moins  goûtées 
parmi  celles  qu'a  déjà  produites  l'infatigable  pianiste  compositeur 
M.  Magnus.  C'est  un  souvenir  de  Hongrie,  dont  l'originalité  dé- 
cèle, à  n'en  pas  douter,  une  tradition  bohémienne.  Le  thème,  franche- 
ment accentué,  sur  im  mouvement  de  marche,  affecte  des  formes  telles 
que  la  science  y  est  cachée  sous  les  élégants  caprices  de  l'inspiration,  et 
que  les  plus  heureuses  modulations  en  découlent  comme  d'une  source 
claire  et  limpide.  Exécutée  par  M.  Magnus,  cette  marche  doit  avoir  une 
séduction  puissante;  mais  ses  difficultés  ne  sont  pas  inabordables,  bien 
loin  de  là,  et  nous  croyons  que  les  artistes,  et  même  les  amateurs  de 
force  secondaire  y  trouveront  un  excellent  sujet  d'étude,  en  même  temps 
qu'un  morceau  de  bravoure  d'un  effet  assuré. 


Ciiarles  liecocq.  —  Gavotte,  pour  piano. 

Tel  est  l'immense  avantage  du  théâtre,  que  le  succès  de  Fleur  de  Thé 
a  certainement  plus  contribué  à  la  réputation  de  M.  Charles  Lecocq  que 
ne  l'eussent  fait  peut-être  vingt  morceaux  d'études,  quelque  estimables 
qu'ils  eussent  été.  Mais  M.  Lecocq  est,  avant  tout,  un  artiste  conscien- 
cieux qui  ne  renie  pas  ses  premiers  titres  à  l'attention  des  connaisseurs. 
Pianiste  distingué  et  auteur  de  plusieurs  œuvres  remarquables,  il  a 
voulu  prouver  sans  doute  que  la  scène  ne  l'avait  pas  absorbé  au  point 
de  lui  faire  oublier  ses  anciennes  aptitudes,  et  c'est  à  cette  pensée  que  nous 
sommes  redevables  de  la  jolie  gavotte  qu'il  vient  de  publier.  Le  caractère 
de  ce  morceau  est  franchement  archaïque,  comme  son  genre  le  com- 
mande, et  il  est  écrit  avec  un  tel  soin,  avec  une  telle  connaissance  du  cla- 
vier, que  l'exécution  en  devient  à  la  fois  brillante  et  facile. 


Mortier  de  Fontaine.  —  Ida,  rêverie  pour  le  piano. 

Le  nom  de  M.  Mortier  de  Fontaine  se  rattache  à  un  très-beau  concert 
qui  a  été  fort  remarqué  parmi  les  nombreuses  auditions  de  l'hiver  der- 
nier. Cet  artiste  a  fait  ses  preuves  comme  virtuose,  et  il  vient  aujourd'hui 
ajouter  un  nouveau  titre  à  ceux  qu'il  a  déjà  mérités  comme  compositeur. 
Le  principal  motif  de  sa  rêverie,  qu'il  a  intitulée  Ida,  est  emprunté  à 
la  romance  de  M.  Luc  Leroy  :  0  laisse-moi  pleurer  I  C'est  une  mélodie  em- 
preinte d'un  certain  sentiment  exalté,  dont  la  vie  et  le  mouvement  vont 
se  perdre  dans  une  accalmie  pleine  de  charme,  et  formant  contraste 
avec  l'introduction  qui  est  d'un  effet  brillant.  La  rêverie  de  M.  Mortier 
de  Fontaine  a  tous  les  droits  possibles  à  un  beau  succès  de  salon. 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 

**#  A  l'occasion  de  la  fête  nationale  du  15  août,  des  représentations 
gratuites  ont  été  données  hier  dans  les  principaux  théâtres  de  Paris.  Le 
théâtre  impérial  de  l'Opéra  a  joué  Hamlet  et  exécuté  l'Hymne  de  Rossini. 
Le  spectacle  de  l'Opéra-Comique  se  composait  des  Dragons  de  Villars,  du 
Docteur  Mirobolan,  et  d'une  cantate  intitulée  :  ta  Bonne  Moisson,  de  M. 
Chariot,  chef  du  chant  des  concerts  du  Conservatoire.  Les  autres  théâtres 
ont  donné  leurs  pièces  en  cours  de  représentation. 

*^*  Le  théâtre  impérial  do  l'Opéra  a  donné  cette  semaine  Hamlet, 
lundi  et  mercredi;  et  vendredi,  te  Trouvère,  pour  la  continuation  des 
débuts  de  Mlle  Hisson. 

^**La  reprise  de  Zampa  a  eu  lieu  la  semaine  passée  à  l'Opéra-Comique 
avec  beaucoup  d'éclat.  Achard  abordait  le  rôle  principal,  et  nous  sommes 
heureux  de  constater  le  succès  légitime  qu'il  vient  d'y  obtenir.  Il  a  le 


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REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


brio,  IVnergin  et  le  charme.  Sa  voix  fi-anclie,  son  style  pur  se  déploient 
à  l'aisf!  dans  les  ravissantes  mélodies  d'Hérold.  Sainto-Foy  est  toujours 
aimisant  au  possible  et  a  égayé  la  salle  entière.  Mlle  Cico  s'acquitte  con- 
venablement lie  t-nn  rôle.  La  direnlioii  a  apporté  un  grand  soin  à  la  re- 
préscnla'inn  rie  cet  ouvrage  qu'elle  tient  à  lionneur  de  conserver  à  son 
répertoire,  ("elle  ri^prise  avait  donc  l'attrait  d'nne  nonveanio,  et  la  belle 
et  bonne  siiin'e  ili^  saoK.'di  dernier  présage  certainement  à  l'Opéra-Co- 
n:iqiie  une  recruilescence  de  vogue. 

,*»  Les  répétiiions  de  l'ouvrage  de  MM.  Labiche,  Delacour  et  Poise, 
avec  M.  Lhéiie  dans  le  rôle  [principal,  .sont  conduites  de  manière  à  ce 
que  la  prom  ère  représentation  pui.sso  avnir  lieu  le  mois  piochain.  On 
prépare  également  le  Café  du  roi,  de  M.  Dell'ès,  qui  fut  joué  avec  suc- 
cès à  Ems  et  au  théâlre  Lyrique.  Mlle  Girard  y  reprendra  le  rôle  de 
Louis  XV  créé  par  elle  à  l'origine. 

jt_*t,  Après  la  pièce  de  M.  Poise,  ce  théâtre  mettra  à  l'étude  un 
nouvel  ouvrage  en  trois  actes  d'Otienbacb  ,  intitulé  Vert-Vert,  et  dans 
lequel  Capoul  remplira  le  rôle  principal. 

„.**  Incessamment  auront  lieu  à  l'Opéra-Comique  les  débuts  de  M.  Ni- 
eot  et  de  Mlles  Moisset  et  Guillot,  lauréats  des  derniers  concours  du 
Conservatoire  engagés  à  ce  théâtre. 

„■"»  D'une  lettre-circulaire  adressée,  en  date  du  5  août,  aux  membres 
de  la  Société  des  auteurs  et  compositeur.s  dramatiques  par  M.  de  Saint- 
Georges,  son  président,  lettre  concernant  les  conventions  nouvelles  in- 
tervenues d'un  commun  accord  entre  M.  de  Leuven,  directeur  de  l'O- 
péra-Comique,  et  la  Société  représentée  par  sa  commission,  il  résulte  : 
—  d"  que  la  part  proportionnelle  des  auteurs  est  fixée  à  douze  pour  cent, 
sur  lu  recette  brute,  sans  déduction  du  droit  des  pauvres,  quelle  que 
.soit  la  composition  du  spectacle;  —  2"  que  MM.  les  agents  percevront 
sur  ladite  recette  brute,  pour  les  ouvi'ages  du  domaine  public,  le  même 
droit  que  si  ces  ouvrages  appartenaient  à  des  auteurs  vivants  ou  à  leurs 
ayants  droits;  —  3"  que  M.  le  directeur  du  théâtre  impérial  de  l'Opéra- 
Com  que  s'engage  à  jouer  douze  actes  nouveaux  par  année;  —  i»  qu'il 
est  convenu  qu'an  nombre  des  douze  actes  qui  devront  être  joués  an- 
nuellement sur  le  théâtre  de  l'Opéra-Comique,  M.  le  directeur  fera  fi- 
gurer trois  pièces  en  un  acte  ;  —  H»  enfin,  que  ces  conventions  seront 
exécutées  à  partir  du  i<"'  août  1868. 

jf*^  On  s'occupe  en  ce  moment  de  la  rédaction  du  cahier  des  charges 
du  théâtre  Lyrique,  dont  les  destinées, -nous  l'avons  dit,  ont  été  confiées 
à  M.  Pasdoloup,  qui  conservera,  néanmoins,  la  direction  de.s  concerts 
populaires  et  ce  le  des  écoles  de  chant  de  la  ville  de  Paris  (rive  droite). 
Notre  confrère  M.  Jules  Ruelle  est  maintenu  par  le  nouveau  directeur 
dans  ses  fonctions  de  secrétaire  général  du  théâtre.  Au  nombre  des 
principaux  engagements  déjà  conclus  par  M.  Pasd^loup,  on  cite  celui 
des  deux  sœurs  de  Vriès  et  du  ténor  Laurent,  remarqué  aux  Fantaisies- 
Parisiennes.  La  date  de  l'ouverture  n'est  pas  encore  fixée. 

,(,*,  Les  recettes  brutes  des  théâtres,  concerts,  etc.,  ont  atteint,  pen- 
dant le  mois  de  juillet  le  chiffre  de  613,806  fr. 

,(:*«  D'après  un  avis  du  ministère  de  la  maison  de  rLmpereur  et  des 
Beaux-Arts,  la  représentation  qui  devait  être  donnée  le  15  août  au 
théâtre  Lyrique  impérial  ne  pourra  avoir  lieu,  par  suite  de  difficultés 
provenant  de  la  situation  actuelle  du  théâlre. 

.  *.*,j  Nous  avons  vu  le  groupe  colossal  destiné  à  couronner  le  nouvel 
Opéra  représentant  Apollon  au  milieu  de  la  Musique  et  de  la  Poésie.  Le 
jeune  dieu  tient  une  lyre  qu'il  élève  au-dessus  de  sa  tête  comme  le 
symbo'o  du  monument.  M.  Aimé  Millet  travaille  depuis  un  an  à  ce 
groupe,  terminé  en  terre  glaise  et  qui  va  être  coulé  en  bronze,  puis  doré. 

,.'*,  On  a  découvert,  celte  semaine,  la  façade  du  nouveau  théâtre  du 
Vaudeville.  Cet'e  rotonde,  évidemment  inspirée  par  le  voisinage  du  pa- 
villon de  Hanovre,  est  ornée  de  plusieurs  statues  et  bustes,  celui  de  Scribe 
notamment,  dus  au  ciseau  de  MM.  Hébert,  Bloche,  Evrard  et  de  Mlle 
Dubois  d'Ave.-nes.  La  travée  du  milieu  de  la  façade  est  surmontée  d'un 
jeune  homme  personnifiant  le  vaudeville,  et  recevant  de  la  tradition 
antique,  représentée  par  de  petits  génies,  les  diflérenis  emblèmes  de  la 
comédie  et  do  la  musique;  le  tout  a  été  sculpté  par  M.  Chevalier.  M. 
iMagne,  architecte  décorateur  de  la  ville  de  Paris,  est  l'auteur  des  plans 
et  dessins  La  nouvelle  salie  sera  éclairée  par  le  système  du  plafond  lu- 
mineux. 

,i,*jf  M.  Albert  Vizenlini  a  composé  la  mjsique  de  la  cantate  du 
Vaudeville . 

,*»  Mme  Gueymard ,  qui  est,  comme  nous  l'avons  dit ,  engagée  au 
théâtre  de  l'Oriente  de  Madrid,  y  cliantera  pour  la  première  fois  le  rôle 
de  Sélika  de  l'Africaine;  Mlle  Krauss  et  le  baryton  Everardi  ont  égale- 
ment signé  avec  M.  Vclasco. 

j,*^  La  prochaine  année  théâirale,  sous  l'intelligente  direction  de  M. 
Husson,  parait  devoir,  à  Marseille,  s'ouvrir  sous  les  plus  heureux  aus- 
pices. On  parle  déjà  de  plusieurs  engagements  qui  sont  des  gages  de 
succès,  et,  entre  autres,  de  celui  de  Mme  Stellani,  contrallo-Stoltz  des 
grandes  .scènes  de  Londres,  Vienne,  Madrid  et  Bruxelles,  qui  par  son 
talent  dramatique,  son  phrasé  pur  et  correct,  son  style  large  et  élevé,  a 
su  se  placer  parmi  les  maîtres  de  l'art  du  chant. 

^*„  ta  Grande-Duchesse  a  été  représentée  cette  semaine  plusieurs  fois 


à  Dieppe.  Le  public  a  beaucoup  ri,  beaucoup  applaudi.  Mlle  Géraldine 
a  été  rappelée  à  deux  ou  trois  reprises.  Mingal  est  désopilant  en  général 
Boum.  —  Deux  fois  par  jour  l'orchestre  du  Placct  exceute  avec  un  en- 
semble parfait  des  œuvres  de  grands  maîtres.  —  La  Compagnie  lyrique 
Ulmarui,  composée  de  Carlotta  Patti,  Viouxtemps,  Ritter  et  Géraldy  a 
donné  le  samedi  10  août  un  concert  dans  le  salon  des  bains  chauds. 
La  soirée  a  été  magnifique  sous  tous  les  rapports.  Du  re.-te,  avec  des 
éléments  d'une  attraction  aussi  puissante,  il  ne  pouvait  en  être  autre- 
ment. 

^\  Un  très-joli  petit  opéra-comique  vient  d'être  joué  trois  fois  avec 
un  succès  très-franc  au  Casino  de  Dunkerque;  il  est  de  M.  V.  Buot  et 
a  pour  titre  :  les  \'oees  bretonnes. 

*%  Les  représentations  de  la  Uraml'.- Duchesse  au  Gymnase  de  Marseille 
sont  Ion  suivies.  La  voix,  le  talent,  le  jeu  original  et  la  beauté 
de  Mme  Rose  iJoll  ont  rencontré  sur  cette  scène  de  nombreux  admira- 
teurs. 

,(;%  M.  Bernard,  directeur  du  théâtre  de  Nanle»,  ayant  été  forcé  de 
renoncer  à  sa  gestion,  la  municipalité  de  celte  ville  vient  de  lappeler 
M.  Henry  Commingo,  directeur  de  Toulouse,  et  de  lui  concéder  de  nou- 
veaux avantages. 

j^*»  D'après  la  Gazdle  de  Moscou,  la  saison  de  l'Opéra  Italien  s'ouvrira 
dans  cette  ville  le  9  du  mois  prochain,  et  se  composera  de  trente-deux 
représentations,  divisées  en  deux  abonnements.  Les  artistes  engagés 
sont  :  Mlle  Ariôt,  prima  donna  soprano;  Mine  Genati,  prima  donna  lé- 
gère; Mme  Fercucci,  prima  donna  dramatica;  M.  Stanio,  tenore  di  forza; 
M.  Padilla,  barilono;  M.  Possis  basso;  M.  Dupont,  chef  d'orchestre.  —  Le 
répertoire  des  œuvres  qui  seront  jouées  comprend  :  le  Domino  noir,  Fra- 
Diavolo,  tes  Huguenots,  Faust,  la  Fille  du  Régiment,  Othello,  Don  Juan, 
les  Noces  de  Figaro,  un  Ballo  in  Maschera,  le  Harbier  de  Séville,  la  Favo- 
rite, ta  Traoiala,  le  Trovatore,  Guillaume  Tell,  Maria,  liigoletto  et  la 
Muette  de  l'ortici. 

*'**  La  compagnie  lyrique  du  théâtre  San-Carlo,  à  Naples,  est  com- 
plète aujourd'hui  ;  elle  se  compose  de  Mmes  Lotli,  Bousquet,  Tati,  Ru- 
bini,  Polonini,  prime  donne;  de  M.\l.  Wazzoleni  et  Zacometti,  ténors;  Co- 
letli  et  Quintili-Leoni,  basse  et  baryton. 


NOUVELLES  DIVERSES. 

^""^  On  lit  dans  le  Moniteur  universel  :  «  Dans  un  article  sur  l'Exposi- 
tion de  1SI)7,  inséré  au  Moniteur,  M.  Méreaux  a  regretté  que  la  France 
n'ait  pas  participe  à  la  plus  haute  catégorie  des  récompenses,  celle  des 
médailles  d'or,  pour  l'industrie  des  pianos.  Le  regret  de  M.  Méreaux , 
nous  sommes  heureux  de  le  constater,  n'était  pas  justifié,  car  une  mé- 
daille d'or,  la  seule  qui  ait  été  décernée  à  un  fabricant  français,  a  été 
obtenu'1  par  la  maison  Philippe  IL  Herz  neveu  et  C,  pour  la  perfection 
de  ses  instruments.  » 

,1,*,^  Arditi,  l'auteur  populaire  du  Ilacio  et  de  Kellog  Valse,  vient  de 
recevoir  la  croix  d'ollicier  du  Medjidié.  Le  sultan,  paraît-il,  tient  en 
haute  estime  le  talent  de  ce  maestro  et  fait  souvent  exécuter  de  ses 
œuvres  par  ses  musiques  militaires.  —  Kellog-Valse,  l'une  des  dernières 
productions  d'.\rditi,  a  eu  à  Londres  un  succès  que  Paris  ratifiera  bien- 
tôt sans  aucun  doute.  Rien  de  plus  gracieux  et  de  plus  entraînant  que  ce 
morceau,  dont  plus  de  50,000  exemplaires  ont  été  vendus  en  Angleterre. 

j^*i,  Mlle  Hauck,  dont  nous  avons  annoncé  l'arrivée  à  Paris,  a  été  en- 
gagée par  M.  Sirakoscli ,  qui  la  fera  débuter  cet  hiver  sur  l'une  des 
principales  scènes  italiennes.  Cette  étoile  qui  se  lève,  possède  une  voix 
magnifique,  servie  par  une  intelligence  remarquable.  Les  soins  et  les 
con.seils  de  l'éminent  artiste-professeur  feront  le  reste,  et  assurent  à 
Mlle  Hauck  une  prochaine  c(>lébrité. 

,p*,t  Henri  Panofka  continue  à  propager  avec  succès,  en  Italie,  les 
bonnes  traiitions  du  chant.  Une  de  ses  élèves,  Linda  Caracciolo,  a  donné 
récemment,  à  Livourne,  un  brillant  concert  où  elle  s'est  révélée  comme 
une  artiste  accomplie,  parfaitement  mûre  pour  les  triomphes  de  la  scène. 
Une  autre,  Margheriia  Daltona,  vient  de  faire  un  très-heureux  début 
dans  le  rôle  d'Azucena  du  Trovatore,  à  Pise.  C'est  une  très-belle  per- 
sonne dont  les  journaux  locaux  sont  unanimes  à  vanter  la  magnifique 
voix  de  mezzo-soprano  et  l'excellente  méthode. 

^*,),  La  Société  libre  des  Beaux-Arts,  comité  central ,  a  donné  diman- 
che dernier  sa  grande  séance  publique  annuelle  avec  le  concours  de 
MM.  Mendioroz,  Tousé  et  Castégnier,  de  Mlles  Marie  Brunot,  Hortense 
Gaiidrau  et  Alice  du  Perluys.  Celte  dernière  est  une  jeune  cantatrice,  à 
peine  âgée  de  dix-huit  ans,  blonde  et  élancée ,  dont  la  riche  voix  de 
soprano  ne  peut  manquer  avec  l'étude  de  fournir  une  artiste  di  primo 
cartello  à  ime  de  nos  grandes  scènes  italiennes.  Mlles  Marie  Brunot  et 
Hortense  Gaiidrau  sont  de  fort  sympathiques  pianistes  ;  M.  Mendioroz, 
qui  appartenait  l'an  dernier  au  théâtre  San-Carlo  de  Lisbonne,  est  un 
baryton  à  la  voix  vibrante  et  colorée;  M-  Castégnier,  un  hautbois  soliste 
de  première  force,  et  quant  à  M.  Tousé,  il  n'y  a  pas  de  bonnes  fêtes 
artistiques  sans  ses  chansonnettes  aussi  piquantes  que  distinguées.  Ajou- 


DE  PARIS 


2G3 


tons,  comme  comprises  dans  la  partie  musicale  de  ci'ttc!  séance,  les  bril- 
lantes appréciations  faites  du  talent  do  MM.  Ambroise  Thomas,  Félicien 
David  et  Emile  Perrin  (le  directeur  de  l'Opéra),  tous  trois  membres 
honoraires  de  la  Société,  par  le  secrétaire-général,  M.  Ch.  Lucas. 

***  Dimanche  dernier,  on  a  exécuté  le  troisième  trio  en  fa  mineur 
d'Adolphe  Blanc,  à  la  séance  des  Enfants  d'Apollon  ;  l'interprétation  a 
été  excellente,  confiée  qu'elle  était  à  MM.  de  Ciivillon,  Lebouc  et  l'au- 
teur. L'andante  en  sourdine  surtout  a  produit  un  grand  effet  :  encore 
un   nouveau  succès   à   enregistrer  au  compte  de  M.  Blanc. 

sf*if  Les  honneurs  du  premier  concert  de  Boulogno-sur-Mer  ont  été 
pour  Jules  Lasserre,  violoncelliste,  dont  le  jeu  est  d'une  grande  pureté. 
La  réunion  de  Stcller,  Laura  Harris,  et  de  M.  et  Mme  Alfred  Jaéll,  dans  le 
second  concert,  a  réellement  émerveillé  le  public  nombreux  attiré  par 
la  réputation  de  ces  quatre  artistes.  Les  duos  de  Dan  Giovanni  et  de  Don 
Pasqualc  ont  été  dits  le  plus  spirituellement  du  monde  par  Steller,  qu: 
est  toujours  un  chanteur  du  plus  haut  mérite,  et  par  la  toute  cbannanto 
Mlle  Harris.  La  fantaisie  sur  Home  siorct  home,  de  .laëll,  a  été  bissée.  Le 
duo  pour  dcu\  pianos  et  la  Marche  liirque,  exécutée  à  quatre  mains  par 
M.  et  Mme  Jaëll,  ont  produit  un  effet  proliyieux.— Mlle  Marie  Schroeder, 
Troy  et  Sivori  sont  engagés  pour  le  troisième  et  dernier  concert  qui 
aura  lieu  le  2 i  de  ce  mois. 

.**  Le  28  juillet  dernier,  Bagncres-d-'-Bigorre  a  inauguré  son  nouveau 
Casino  qui  peut  rivaliser  avec  ceux  des  plus  célèbres  stations  thermales. 
Un  concert  a  été  donné  dans  la  grande  s.ille,  où  plus  de  mille  person- 
nes peuvent  s'asseoir  à  l'aise.  Là  pnlka  Coucou  et  Cricri  et  le  Champa- 
gne-Galop ont  mis  l'assistance  en  belle  humeur  et  retrouvé  là  leur  suc- 
cès habituel. 

***  Dans  un  trè.s-beau  concert  donné  le  27  juillet  dernier  à  Ems,  on 
a  entendu  Mlle  Marimon,  MM.  Yieuxtemps,  Balta,  Géraldy  et  de  'Vroye. 
Le  roi  de  Prusse,  qui  assistait  à  cette  soirée,  a  fréquemment  donné  le 
signal  des  applaudissements  et  a  félicité  les  artistes. 

***  Le  12  septembre  prochain  aura  lieu,  h  Wiesbadeu,  un  grand  con- 
cert pour  lequel  ont  été  engagés  Mlle  Xilsson,  Faure,  Wilhelmy  et  le  flù- 
tiîse  de  Yroye. 

»*^  L'église  paroissiale  de  Dreux  vient  d'être  dotée  d'un  orgue  cons- 
truit par  la  maison  Cavaillé-CoU  de  Paris.  L'inauguration  de  l'instru- 
ment a  eu  lieu  mercredi  dernier  par  M.  Saint-Saëns,  l'éminent  orga- 
niste de  l'église  de  la  Madeleine  de  Paris,  dont  les  improvisations  ont 
charmé  pendant  plus  de  deux  heures  l'auditoire  nombreux  et  choisi 
qu'avait  attiré  cette  belle  cérémonie. 

,*»  Le  jury  nommé  par  le  ministre  de  l'intérieur  de  Belgique  pour  le 
concours  international  de  musique  religieuse  se  compose  de  MM.  Fétis, 
Soubrc,  Benoît,  de  Yroye,  de  Burbure,  Gevaërt,  Ch.  Yervoitte,  Lefebvre- 
îs'iedermeyer,  Franz  Lachner,  Himmerlander  et  Kufferath.  Il  se  réunira 
le  17  de  ce  mois  à  Bruxelles,  et  cent  cinquante  partitions  venues  de 
tous  les  points  de  l'Europe  seront  soumises  à  son  examen. 

**^  La  Société  des  auteurs  et  compositeurs  dramatiques  allemands , 
dont  le  siège  est  à  Yienne,  est  aujourd'hui  constituée  et  a  élaboré  ses 
statuts,  qui  sont  en  partie  calqués  sur  ceux  de  la  Société  française.  Les 
droits  garantis  aux  auteurs  sont  de  dix,  six,  trois  et  deux  pour  cent, 
suivant  l'importance  de  l'ouvrage.  Le  compositeur  est  seul  considéré 
comme  auteur  d'un  opéra,  à  moins  qu'il  ne  déclare  expressément  vou- 
loir associer  le  poëte  à  ses  droits.  Enfin ,  la  survivance  des  honoran-es 
d'un  auteur  mort  n'est  assurée  à  ses  héritiers  que  pendant  dix  ans.  — 
Le  Comité  provisoire  est  compos;  de  MJL  Laube,  Mauthner,  Mosenthal, 
auteurs  dramatiques;  F.  de  Flotow,  Suppé,  compositeurs. 

^*^  Le  flûtiste  de  Yroye  fera  partie  de  la  prochaine  tournée  artistique 
Ullman-Patti. 

,**.  La  ravissante  Valse  des  Etincelles,  de  Jules  Klein,  vient  de  paraî- 
tre chez  MM.  Gérard  et  C'",  éditeurs  de  musique.  La  première  édition  a 
été  enlevée  dans  l'espace  d'une  quinzaine  de  jours.  Rêves  d'automne 
(valse),  du  même  auteur,  sont  sous  presse,  et  paraîtront  dans  quelques 
jours  en  édition  originale,  simplifiée,  à  quaire  mains  et  pour  orche^t^e. 
,f*^  On  annonce  la  mort  à  Paris  :  de  M.  Ernest  Ber,  le  fondateur  du 
Pré-Caielan  ;  — -  de  Mme  Lacour,  pianiste  distinguée;  —  à  Santiago 
(Chili),  du  maestro  Luigi  Deleurie,  mari  de  la  cantatrice  Borsi-Deleurie. 

*.*5(j  Un  grand  Festival  militaire  sera  donné  aujourd'hui,  à  deux  heures, 
au  Pré-Catelan,  par  toutes  les  musiques  du  premier  corps  d'armée  et 
les  fanfares  des  chasseurs  à  pied,  à  l'occasion  de  la  fête  de  l'Empereur. 

ÉTRANGER 

„*^  Baden-Baden.  —  Une  Conférence  poiHique  et  un  Grand  Concert 
ont  composé  les  plaisirs  intelligents  de  la  semaine.  La  première  a  été 
faite  par  Mme  Ernst,  avec  le  talent  saisissant  et  souple  qui  tient  sous  le 
charme  les  auditoires  d'élite.  Dans  le  second,  Mlle  Marie  Roze  a 
admirablement  chanté  la  mélodie  des  Djinns,  du  Premier  Jour  de  bon- 
heur, et  le  grand  air  d'Alice,  de  Robert  le  Diable  :  le  public  lui  a 
fait  une  véritable  ovation.  Plusieurs  morceaux,  la  romance  de  Martha 
entre  autres,  ont  été  parfaitement  dits  par  M.  Monjauze.  M.  Ehrlich, 
pianiste  distingué,  professeur  au  Conservatoire  de  Berlin,  a  exécuté  d'une 


manière  remarquable  le  Concerto  en  mi  bémol  de  Beethoven.  Bolte- 
sini,  enfin  ,  et  sa  contreha.sse  merveilleuse  ont  excité  l'enthousiasme  et 
provoqué  des  bravos  sans  fin.  —  Une  heureu.se  innovation  a  inauguré, 
le  6  aoi'it,  les  Concerts  classiques  a  grand  orchestre,  qui  se  continueront 
tous  les  jeudis,  dans  l'après-midi ,  à  la  Conversation.  Le  programme  de 
la  première  séance  était  des  mieux  choisis  :  Beethoven ,  Mendelssohn , 
Wagner.  M.  Ou'lsdliorn  a  joué  un  Irmihetio  de  Mozart  :  h:  sentiment, 
l'cxprcs-sion  ,  l'ampleur  du  jeu  de  cet  artiste  le  font  préférer  à  tous  les 
violoncellistes  qui  .se  sont  produits  ici  cette  année. 

,f**  Uombourg.  —  Les  représentations  de  la  Compagnie  italienne  se 
conlinuHnt  avec  un  succès  croissant,  et  devant  une  afïluence  toujours 
considérable.  //  Trovatorc  vient  d'être  chanté  par  Désirée  Artôt,  r<orina 
Grossi,  Naudin,  Yerger  et  Agnesi  :  magistral  ensemble.  Chaque  morceau, 
chaque  scène  a  valu  à  Mlle  A' tôt  des  ovations  s;tns  nombre;  mais  le 
Miserere  et  le  duo  suivant  avec  Yerger  ont  .soulevé  un  enthousiasme 
indescriptible,  et  les  deux  artistes  ont  été  plusieurs  fois  rappelés  au  mi- 
lieu des  braves  et  des  fleurs.  NorJna  Grossi  est  une  admirable  Azucena, 
et  Naudin  est  toujours  le  grand  tîhantcur  qu'on  aime  tant  à  entendre. 
Yerger  a  fait,  comme  de  coutume  admirer  sa  voix  .sympathique  .si  habi- 
lement dirigée.  Agnesi  dit  le  racconto  du  premier  acte  d'une  façon  re- 
marquable. Il  Barbicre  a  été  pour  Désirée  Artôt  une  suite  d'ovations 
des  plus  chaleureu.sos.  Impossible  de  dire  avec  plus  de  finesse,  plus  de 
charme  la  fameuse  cavatine  Vna  voce  puco  fa.  A  la  leçon  de  chant,  .Mlle 
Arlût  a  chanté  une  mazurka  de  Chopin  :  l'Oiselet  et  la  Coquette;  elle  y  a 
déployé  des  trésors  de  vocalises  qui  ont  soulevé  un  enthousiasme  indes- 
criptible. Comme  rondo  final,  Mlle  Artôt  a  chanté  ta  Clwrmeusc,  valse 
nouvelle  écrite  pour  elle  par  M.  Ehrlich,  de  Berlin  :  artiste  et  compo- 
siteur ont  été  acclamés.  —  Mme  Patti  donnera  ici,  à  partir  du  I.t  août, 
quinze  représentations  successives  :  elle  chantera  d'abord  Lucia. 

J^iç  Spa.  —  Un  grand  concert  a  été  donné^le  10  à  la  Redoute.  M.  et 
Mme  Léonard,  le  ténor  Jourdan,  Arban ,  M.  de  Bériot  ont  eu  tout  le 
succès  qu'ils  méritaient  et  ont  été  applaudis  jusqu'au  rappel.  Le  public 
a  particulièremen  fêlé  AL  et  Mme  Léonard,  ainsi  qu'Arban.  D'autres  so- 
lennités musicales  sont  annoncées  et  attendues  avec  impatience. 

,^%  Munich.  —  Le  Rmj-Blas  de  Max  Zenger,  donné  récemment  à 
Manheim,  vient  d'obtenir  ici  le  plus  honorable  succès.  Les  principaux 
rôles  étaient  remplis  par  Mlles  Stehle  et  Léonoff,  et  MM .  Vogel  et  Kin- 
dermann. 

,*^  Oldenbourg.  —  Un  grand  festival  des  Sociétés  chorales  de  l'Alle- 
magne du  Nord  a  eu  lieu  ici  dei'nièrement.  L'œuvre  la  plus  importante 
du  programme,  et  celle  aussi  qui  a  eu  le  plus  de  succès,  est  la  cantate 
Salamis  (chant  de  triomphe  des  Grecs),  de  Fr.  Gernsheim,  l'éminent 
compositeur  et  professeur  du  Conservatoire  de  Cologne.  Un  nouveau 
concerto  de  piano  du  même  auteur,  qu'on  entendra  cet  hiver  à  Paris, 
est  appelé  également  au  succès  le  plus  flatteur. 

^*^  Vienne  —  Une  nouvelle  Sélika  vient  de  débuter  dans  l'.ifricaine, 
Mlle  Gindele,  artiste  d'un  mérite  réel  et  qui  a  rendu  et  rendra  encore 
de  précieux  services  à  l'Opéra.  Sans  faire  oublier  ses  célèbres  devancières, 
elle  a  su  marquer  ce  rôle  difficile  d'un  cachet  particulier  et  en  rendre 
avec  un  rare  bonheur  le  côté  sentimental.  —  Dans  une  représentation 
donnée  au  Carltheater  en  l'honneur  des  tireurs  allemands,  on  a  beau- 
coup applaudi  une  nouvelle  opérette  en  un  acte  de  Zaytz,  Der  Meister- 
schuss  von  Poltenstein. 

^*^  Milan.  —  Comme  on  s'y  attendait,  les  destinées  de  la  Scala  sont 
encore  une  fois  remises  entre  les  mains  du  ducemvirat  Brunello  et  Bo- 
nola.  Les  artistes  engagés  jusqu'à  présent  sont  Teresina  Stolz,  Mongini, 
Colonnese,  Junca,  et  la  danseuse  Caterina  Beretta. —  Le  théâtre  Carcano 
se  rouvrira  le  3  septembre  avec  Dinorah.  —  Le  maestro  Francesco  Fac- 
cio,  chef  d'orchestre  de  ce  dernier  théâtre,  musicien  éminent,  vient  d'être 
nommé  professeur  de  con'repoint  et  d'harmonie  au  Conservatoire. 

**,,.  Padoue.  —  Le  Prophète  a  procuré  à  notre  théâtre  une  magnifique 
fin  de  saison.  Seize  représentations  de  ce  chef-d'œuvre  ont  remis  à  flot 
la  direction;  à  la  dernière  notamment,  1,800  billets  (chiffre  inouï  ici) 
ont  été  pris.  Les  cantatrices  Maria  Destin  (Fidès)  et  Ostawa  Torriani 
(Berthe)  méritent  les  plus  sincères  éloges  pour  le  talent  et  le  zèle  qu'elles 
n'ont  cessé  de  déployer  dans  tout  le  cours  de  cette  brillante  campagne. 

Le  Directeur  :  S.   DDFOUB. 


Chez  G.  BRANDUS  et  S.  DUFOUR,  éditeurs,  103,  rue  de  Richelieu. 
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i.  mnaard.  Valse  des  Deux  Aveugles. 

2.  —  Valse  de  Tromb-al-Cazar . 

3.  —  Polka  des  Deux  vieilles  Gardes, 
i.  Herzog.   Polka  Coucou  et  Cricri. 

5.  Arban.    Quadrille  de   la  Grande-Duchesse 

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10.  Patll  (A«l.).  Valse:  Fleur  du  Printemps. 

11.  niuNnrd.   Valse  des  Bavards. 

12.  Arban.   Quadrille  sur /îof/inso;?  Crusoe . 

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1.  Meyertoeer.   Marche  du  Sacre  du  Prophète 1  50 

2.  —      Couplets  de  Robert  le   Diable,  piano    et   chant  1  50 

3.  —      Ballade  de  r/l/")7ca»ie,  piano  solo 1  50 

4.  —      Romance  du  jPa?-rfow  «ie  P/ofr»ie/,  piano  et  chant  1  50 

5.  Adam.   Ronde  du   Postillon  de  Longjumeau 

6.  Schubert.  Ave  Maria,  paroles  françaises 

7.  —      Adieu,  paroles  françaises,  piano  et  chant.  .  .  . 

8.  Mendelssobii.  Chanson  du  Printemps,  romance  sans 

paroles 

9.  Pattî  (Adelina).  Le  Bal,  musique  de  Strakosch,  piano 

et  chant 2  » 

10.  —      Di  Gioja  insolita,  musique  de  Strakosch  ....  2  » 

11.  mnie  Sass.  Air  du  Mancenillier  de  l'Africaine.  ...  1  50 

12.  M.  BîaudiM.  Air  :  0  paradis!  de  l'Africaine 1  50 

13.  M.  Fanre.  Ballade:  Adamastor,  de  l'Africaine .  ...  d  50 

14.  Kelne  Ifortense.  Partant  pour  la  Syrie,  chant  na- 

tional    1  50 

15.  Patti  (Cablotta).  Par  un  sentier,  chanson  irlandaise  1  50 

16.  Offeubach.  Lischen  et  Pritzchen  :  «  Le  rat  de  ville.»  1  50 
n.      —      Les  Deux  Aveugles,  bo'.éro  :  «  La  lune  brille.  »  1  50 

18.  Floto-w    (de).    Mariha,   romance:    «    Lorsqu'à  mes 

yeux  sa  chère  image.» 1  50 

19.  —      Martha  :  «  Seule  ici,  fraîche  rose.  » 1  50 

20.  Aubep.  La  Muette  de  Portici:  «  Du  pauvre  seul  ami.»  i  50 

21.  —      Le  Domino  noir,  couplets  :  «  Ah  !  quelle  nuit.  ».  1  50 

22.  Rossini.  Moise,  prière:  «  Des  cieux  où  tu  résides.»  .  1  50 

23.  —      Robert  Bruce,  barcarolle  :   «  Calme  et  pensive.»  1  50 

24.  Klaillart.   Les   Dragons  de    Villars  :  «  Il  m'accuse.  »  1  50 

25.  —      Lqs  Dragons  de   Villars:  «  Ne  parle  pas, Rose.»  1  50 

26.  Heller  (Stéphen).  Chanson  de  Mai,  pour  piano  ...  1  50 
Album  cliorëgraphique  de   pocbe  contenant  : 

27.  1.  Marx.  Quadrille  sur  J^/art^a,  pour  piano 2  » 

28.  2.  LuMBYE.  Champagne-galop,  pour  piano 1  50 

29.  3.  Stutz.  Polka- mazurka  sur /'.k/Wcame 1  50 

30 .  4.  Arban.  Polka  sur  la  Ronde  du  Brésilien 1  50 

31.  5.  Strauss,  ^alse  sut  Lischen  et  Fritzchen 2  » 


32.  Haydn.  Menuet  du  bœuf,  pour  piano.  .  . 

33.  BaeU.  Gavotte  favorite,  n"  1,  pour  piano.  . 

34.  —      Gavotte  favorite,  n°  2,  pour  piano.  . 

35.  Beetboven.  Le  Désir,  valse  n°l,  p.  piano. 

36.  —      2"  et  3'=  valses,  pour  piano 

37.  —      4%  5'  et  6*^  valses,  pour  piano  .  .  . 

38.  —      Bagatelle,  n"  1,  pour  piano 

39.  Mozap*.  Marche  turque,  pour  piano. 

40.  -      -        . 

41. 


45. 


■}"'  valse  favorite,  pour  piano 
ÏVeber.  Dernière  Pinsée,  pour  piano 

—  Valse  de  Robin  des  bois,  pour  piano 

Haendel.  Gorf  s<ïye  </(e  Çaeere,  piano  et  chant 

—  Rule  Britannia,  piano  et  chant 

—  V'ariations  sur  le  God  saue  the  Queen,  piano  solo. 

—  Id.  Rule  Britannia,    id 

Field.  5''  nocturne,  pour  piano 


48.  CilucU.  «  J'ai  perdu  mon  Eurydice,  »  grand  air  à! Or- 

phée, chant  et  piano 

49.  Gréipy.  «  Une  fièvre   brillante,  »    chant  et  piano  .  . 

50.  —      «  Que  le  sultan  Saladin,  »  chanson,  id 

51 .  —       «  La  danse  n'est  pas  ce  que  j'aime,  »  couplets, 

chant  et  piano 

62.  Chopin.  2"  nocturne,  pour  piano 

53.  —      6=  valse,  pour  piano 

54.  —      Marche  funèbre,  pour  piano 

55.  Koiiget  de  l'Isle.  La  Marseillaise,  piano  et  chant. 

56.  Portrait  de  S.  A.  le  Frince  Impérial.  Fior  di 

Primavera,  valse  composée  par  Adelina  Patti 
et  dédiée  à  S.  A.  le  Prince  Impérial 

57.  Kossinl.  Cavatine  du  Comte  Ory  :  «  Que  les  destins.» 

58.  Sehneider  (Mlle).  Couplets  du  sabre  de  la  Grande- 

Duchesse  de  Gérolslein 

59 .  —      Déclaration  :   «  Dites  lui.  » 

60.  —      Légende  du  verre:  «  Il  était  un  de  mes  aïeux.» 


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UCPmiMEKIB  CKHTAAXE  DBS  CDEMINS  DS  FXB    —  A.   CHAlX  ET  C'%   BVE  BBBCKBB,   30,  A  PABIS. 


BUREAUX    A    PARIS  :    BOULEVARD   DES   ITALIENS,  1. 


oa'  Année. 


N'  34. 


25  Août  [m. 


ON  S'ABONNE  : 

Dans  les  Déportcmcnts  et  à  rKlronjor, 

chez  tous  les  Marchnnds  de  Musique,  h  s  Libraire 

et  aux  Sureaux  iet  Messageries  et  des  Postes. 


REVUE 


PRIX    DE    L'ABONNEMENT: 

Di-piirU'Uiiiils,  llclgiiiui:  et  Suisse....     :îO  »        itL 

litrunyer 34  "       Id. 

Le  Journal  parait  le  Dimanche. 


ICALE 


E     PARI 


SOMMAIRE.  —  Les  Théâtres  lyriques  secondaires  à  Paris  depuis  1820  (6'  ar- 
ticle), par  Arthur  Pou;;!]!.  —  Beethoven  à  Tœplitz.  —  Correspondances  : 
Grenoble,  par  Em.  Matbicu  de  Uouter,  et  Bruxelles.  —  Revue  des 
théâtres,  par  U.  A.  H.  !Sa>ii<-V»c8.  —  Nouvelles  des  tliéâtres  lyriques. 
—  Nouvelles  diverses.  —  annonces. 


LES  THË&TRES  LYRIQUES  SECONDAIRES  Â  PARIS 


DEPUIS     tSSO. 


(6"  article)  (1). 


J'ai  annoncé  le  répertoire  détaillé  de  l'Odéon,  en  ce  qui  se  rap- 
porte à  la  musique,  pendant  la  période  de  son  existence  semi- 
lyrique.  Le  voici  : 

1824.  —  27  avril.  —  Les  Trois  Genres ,  prologue  d'ouverture 
de  Scribe,  Pichald   et  Dupaty,  musique    de    Boïeldieu    et   Auber. 

C'est  le  petit  ouvrage  que  j'ai  signalé  plus  hau(.  Il  fut  très- 
heureusement  accueilli,  et  voici  comment  en  parlait  le  Journal 
des  Débats,  en  rendant  compte  du  spectacle  d'inauguration  de  la 
nouvelle  direction  de  l'Odéon  :  «  ...  L'ouverture  s'est  faite,  le 
jeudi  29  avril,  par  un  très -joli  prologue  de  M.  Scribe,  intitulé 
les  Trois  Genres.  L'objet  du  prologue  était  de  donner  aux  specta- 
teurs accourus  en  foule  à  l'inauguration  du  temple  une  idée  de 
l'organisation  de  la  société  nouvelle  et  des  divers  travaux  aux- 
quels elle  va  se  livrer.  A  l'aide  d'un  cadre  ingénieux,  on  voit 
paraître  tour  à  tour  des  acteurs  tragiques  qui  débitent  un  acte  de 
la  tragédie  de  Turnus,  par  M.  Piciiald,  deux  acteurs  de  comédie 
qui,  dans  une  scène  un  peu  longue,  mais  élégamment  versifiée, 
de  M.  Dupaty,  invitent  par  l'appât  de  la  louange  tous  les  mem- 
bres des  grands  établissements  de  la  rive  gauche  de  la  Seine  à 
visiter  l'Odéon;  et  enfin,  des  acteurs  -  chantants  qui  exécutent  un 
petit  opéra,  dont  la  musique,  par  sa  grâce  et  sa  vivacité,  est  di- 
gne des  auteurs  du  Calife  et  d'Emma.  Le  directeur,  M.  Bernard, 
figure  dans  cet  opéra,  et  il  y  chante,  avec  plus  de  goût  que 
de  force  et  d'éclat,  un  air  de  basse.  Tout  cela  a  été  entendu  et 
accueilli  favorablement;  tout  a  été  applaudi:  vers  tragiques,  vers 

(1)  Voir  les  n«  25,  26,  29,  31  et  33. 


comiques,  dialogue  en  prose,  dialogue  chanté,  exécution  d'un  or- 
chestre ferme  et  vigoureux;  il  était  impossible  de  commencer  sous 
des  auspices  plus  brillants,  plus  complètement  heureux.  » 

l"  mai.  —  Le  Tableau  parlant,  d'Anseaume  et  Grétry,  créé  à 
la  Comédie-Italienne  le  20  septembre  1769.  (Début  d'Auguste  Le- 
brun.) —  Le  Barbier  de  Séville,  de  Rossini,  traduit  par  Castil- 
Blaze,  joué  par  Lecomte,  Valère,  Léon,  Camoin,  Mme  Montano. 
Ouvrage  et  interprètes  obtiennent  un  très-grand  succès,  à  ce  point 
que  Ml,  â  Montano  est  rappelée  sur  !a  scène  à  la  fin  de  îa  pièce, 
ce  qui  n'était  pas  alors  aussi  banal  qu'aujourd'hui. 

11  mai.  —  L'Epreuve  villageoise,  de  Desforges  et  Grétry,  re- 
prise déjà  peu  de  temps  aupai avant,  ainsi  que  nous  l'avons  vu,  au 
théâtre  de  Madame.  (Débuts  de  Saint-Preux  et  de  Mme  Letellier.) 

16  mai.  —  La  Fausse  Magie,  de  Marmontel  et  Grétry,  créée  à 
la  Comédie-Italienne  le  1"  février  1775. 

27  mai.  —  Richard  Cœur-de-Lion,  de  Sedaine  et  Grétry,  créé 
au  même  théâtre  le  21  octobre  1784. 

5  juin.  —  Les  Folies  amoureuses,  arrangées  par  Castil-Blaze, 
d'après  Regnard  pour  les  paroles,  d'après  Mozart,  Cimarosa,  Paër, 
Pavesi  et  Steibelt  pour  la  musique.  On  a  vu,  dans  le  chapitre 
précédent,  que  cet  ouvrage  avait  paru  pour  la  première  fois, 
ainsi  arrangé,  au  théâtre  de  Madame,  mais  en  un  acte  seulement, 
pour  suivre  les  prescriptions  absolues  du  privilège  de  ce  théâtre. 
Cette  fois  il  était  en  trois,  et  l'arrangeur  avait  dû,  par  conséquent, 
modifier  et  considérablement  augmenter  la  partie  musicale. 

22  juin.  —  Sylvain,  de  Marmontel  et  Grétry,  créé  à  la  Comé- 
die-Italienne le  19  février  1770. 

29  juin.  —  On  joue  le  second  acte  de  Raoul,  sire  de  Créqui,  de 
Monvel  et  Dalayrac,  créé  à  la  Comédie-Italienne  le  31  octobre 
1789. 

12  juillet.  —  Biaise  et  Babel ,  de  Monvel  et  Dezèdes,  créé  à  la 
Comédie-Italienne  le  30  juin  1783.  (Débuts  de  MM.  Dulin  et  Ler- 
minez.) 

19  juillet.  —  Le  Paria,  tragédie  de  Casimir  Delavigne,  créée 
peu  d'années  auparavant.  On  y  avait  ajouté  des  chœurs  dont  la 
musique  av?it  été  composée  par  Léopold  Aimon ,  mais  selon  VAL- 
manach  des  Spectacles,  «  la  musique  de  ces  chœurs  n'ayant  pas 
produit  l'effet  qu'on  en  attendait,  on  l'a  supprimée  à  la  troisième 
représentation.  »  Cette  rédaction  ambiguë    ferait    supposer   qu'on 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


avait  laissé  subsister  les  paroles  des  chœurs  susdits,  et  qu'on  les 
aurait  ainsi  chantés  sans  musique.  Je  n'en  crois  rien. 

23  juillet.  —  Philippe  et  Georgette,  de  Monvel  et  Dalayrac,  créé 
à  la  Comédie-Italienne  en  1792.  (Début  de  Mme  Pouilley.) 

2  août.  —  La  Pie  voleuse,  opéra  en  trois  actes ,  paroles  imitées 
du  drame  de  Caigniez  et  Daubigny;  et  ajustées  par  Castil-Blaze  sur 
la  musique  de  la  Gazza  ladra,  do  Rosslni.  —  Grand  succès,  moins 
productif  cependant  que  celui  du  Barbier. 

i"  septembre.  —  L'Amant  jaloux,  de  D'Hèle  et  Grétry ,  créé  à 
la  Comédie-Italienne  le  23  décembre  1778. 

19  octobre.  —  La  Rosière  de  Salency,  de  Pezay  et  Grétry,  créée 
à  la  Comédie-Italiemic  le  28  février  1774.  —  Décidément  l'Odéon 
en  tenait  pour  Grétry,  cl  tout  le  répertoire  de  celui-ci  y  passait 
successivement.  Le  clioix  eût  pu  être  plus  mauvais,  du  re^te. 

21  octobre.  —  Le  Sacrifice  interrompu,  opéra  en  trois  actes, 
paroles  imitées  de  rAllemand  par  de  Saur  et  Saint-Geniès,  musi- 
que de  Wintcr,  arrangée  par  Vogt  et  Crémont.  Cet  ouvrage  avait 
fait  sa  première  apparition  à  Vienne,  vers  179S;  le  succès  qu'il 
avait  obtenu  alors  se  renouvela  à  l'Odéon,  bien  qu'ici  on  le  trou- 
vât un  peu  long. 

3  novembre.  —  Le  Jîèijnc  de  Titus,  cantate  pour  la  fête  du  roi, 
paroles  de  . . . ,  musique  de  Vergue,  artistes  de  l'orchestre  (chef 
d'attaque  des  seconds  violons). 

7  décembre.  —  liobin  des  BAs,  ou  les  Trois  Halles,  opéra-féerie 
en  trois  actes,  traduction  très-libre  du  chcl-d'œuvre  de  Weber, 
le  Frejischiitz,  par  Caslil-Blazc  et  M.  Sauvage.  —  Succès  énorme, 
bien  que  très-incertain  ii  la  première  représentation,  le  public 
étant  dérouté  par  le  caractère  de  cette  nmsirjue,  si  nouveau  pour 
lui.  On  sait,  du  reste,  que  Castil-Blaze  en  avait  pris  à  son  aise 
avec  la  partition  de  Weber,  qu'il  avait  complétée  en  y  ajoutant 
des  morceaux  de  son  crû.  Néanmoins,  liobin  des  Bois  fournit  à 
l'Odéon  une  carrière  si  brillante,  qu'on  jugea  i)lus  tard  h  propos 
de  le  reprendre  à  rOpéra-Comi(iue  (1835),  où  il  eut  un  beau  re- 
gain de  succès  (1). 

1825.  —  9  mai.  —  Les  Noces  de  Gamnche,  opiMM-bouffc,  ])ai'o- 
les  françaises  de  MM.  Sauvage  et  H.  Dupin,  musique  de  Merca- 
danle,  arrangée  pai  M.  Guéiiée  (première  représentation  donnée 
au  bénéliee  de  Joanny).  —  «  La  musique  des  Noces  de  Gamache, 
disait  /e  Constitulionnel,  arrangée  avec  beaucoup  de  goût  par 
M.  Guénée,  est,  comme  on  sait,  de  Mercadante;  elle  a  du  charme, 
de  la  variété,  et  elle  brille  surtout  par  une  abondance  de  motits 
heureux.  On  ne  peut  pas  dire  que  ce  soit  de  grande  musique; 
mais  il  est  certain  que  c'est  de  la  musique  agréable  à  entendre,  et 
qu'on  éprouve,  en  l'écoulant,  l'envie  de  la  chanter.  »  En  somme, 
l'ouvrage  eut  du  succès.  Parlant  ensuite  des  débuts  qui  avaient  eu 
lieu  récemment  ù  l'Odéon,  et  après  avoir  mentionné  ceux 
de  la  tragédie  et  de  la  comédie,  le  même  journal  ajoutait  : 
« .  Enfin ,  dans  l'opéra,  arrive  en  tête  Mlle  Lemoule,  douée 
d'une  très-belle  voix,  et  qui  a  fait  son  second  début  par 
Colombine  du  Tableau  parlant;  Mme  Albert,  qu'on  voit  et 
qu'on  entend  avec  plaisir  ;  Mmes  Meyssin  et  Bultel,  dont  nous 
avons  déjà  parlé;  le  ténor  Cœuriot,  qu'on  a  peu  goûté  dans  le 
Barbier,  mais  qui  a  été  beaucoup  mieux  accueilli  dans  le  rôle  de 
Pierrot  ;  et  Margaiilan,  qui  a  débuté  dans  cet  ennuyeux  Sylvain, 
et  qui,  comme  chanteur,  a  parfaitement  réussi.  » 

7  juin.  —  Louis  XII,  ou  la  Route  de  Reims,   opéra  de  eircoii- 


(1)  Deux  anciens  cm  rages  avaient  encore  été  repris  dans  le  cours  de 
cette  année  à  l'Odéon,  mais  je  n'ai  pu  que  le  constater,  sans  trouver  la 
date  do  leur  représentation.  Ce  sont  :  i°  Ambroise,  ou  Voilà  ma  journée, 
de  Monvel  et  Dalayrac,  qui  avait  été  créé  au  théâtre  Favart  le  12  jan- 
vier 1793;  —  2" /e  Tonnelier,  paroles  it  musique  d'Audinot,  créé  à  l'O- 
péra-Comique  de  la  foire  Saint-Laurent  en  17(55. 


stance  en  trois  actes,  donné  à  l'occasion  du  sacre  de  Charles  X, 
paroles  de  MM.  Lauréal  et  de  Saint-Georges,  musique  tirée  des 
œuvres  de  Mozart,  et  arrangée  par  Crémont  et  Vergne.  —  C'était, 
on  le  voit,  encore  un  pastiche.  «  La  musique  est  de  Mozart,  disait 
le  Constitutionnel;  cela  suffit  à  son  éloge.  On  ira  à  l'Odéon  voir 
cette  pièce  de  circonstance  par  curiosité;  il  est  difficile  de  se  faire 
une  idée  de  la  richesse  et  de  la  pompe  du  spectacle  dont  elle  est 
entourée.  » 

28  juin.  —  Les  Français  au  Sérail,  opéra-comique  en  un  acte, 
réduction  des  Visitandines,  de  Picard  et  Devienne,  créées  à  Fey- 
deau  le  7  juillet  1792.  Il  n'était  pas  permis  alors  —  on  était  aux 
beaux  jours  de  la  Restauration  —  de  mettre  des  religieuses  en 
scène;  trois  hommes  de  lettres,  qui  prenaient  les  noms  d'Hya- 
cinthe, Albertin  et  Fleury,  s'ingénièrent  à  changer  le  sujet  de  la 
pièce  de  Picard,  supprimèrent  quelques  morceaux  de  la  partition 
charmante  de  Devienne,  réduisirent  en  un  seul  les  deux  actes 
primitifs,  servirent  chaud,  et. . .  la  morale  fut  sauve. 

2S  juillet. —  Othello,  opéra  en  trois  actes,  traduit  de  l'italien  par 
Castil-Blaze,  sur  la  musique  de  VOlello  de  Rossini.  Cette  traduc- 
tion avait  été  déjà  donnée  en  province,  et  sa  représentation  à  Paris 
ne  lit  ([ue  conlirinor  le  succès  qu'elle  y  avait  obtenu. 

16  août.  —  La  Comédie  à  la  campagne,  opéra-bouffe  en  deux 
actes,  imité  de  \' Imprésario  in  angustie ,  de  Cimarosa,  paroles  de 
M.  Duvert,  adaptées  à  la  musique  par  Crémont.  —  Succès.  «  L'idée 
de  mettre  sur  la  scène  française  V Imprésario  in  angustie  de  Cima- 
rosa, pour  n'être  pas  nouvelle,  n'en  est  pas  moins  heureuse.  La 
manière  dont  M.  Duvert  l'a  exécutée  lui  fait  honneur.  Les  vers  des 
aria,  des  duo  et  des  morceaux  d'ensemble  de  l'Opéra  à  la  cam- 
pagne, ne  décèlent  point  celte  prétendue  gêne  imposée  par  le 
rhythnie  musical  (pii  fait  dire  tant  de  sottises  à  M.  Castil-Blaze.  C'est 
de  l'imitation,  dit-on,  oui;  mais  imiter  ainsi  vaut  mieux  que  tra- 
duire. Le  succès  de  cet  opéra  a  été  complet,  l'exécution  pai'faite, 
les  applaudissements  se  sont  fait  entendre  d'un  bout  ù  l'autre  :  cet 
ouvrage  a  pourtant  un  défaut  dont  tout  le  monde  a  été  frappé,  et 
beaucoup  trop  rare  pour  n'en  pas  pnmdre  note  :  il  a  paru  court.  » 
{Constitutionnel.) 

31  octobre.  —  La  Dame  du  Lac,  opéra  en  quatre  actes,  imité 
de  la  Donna  del  Lago ,  de  Rossini.  Cette  fois ,  les  paroles  sont  de 
d'Epagny  et  d'Auguste  Rousseau,  et  l'adaptation  est  due  à  Lemière 
de  Corvey.  —  Très-grand  succès. 

17  novembre.  —  Preciosa,  ou  la  Bohémienne,  drame  en  trois 
actes,  imité  de  l'allemand,  de  Wolf,  avec  chœurs  et  intermèdes  de 
Weber.  —  (Jui  avait  fait  cette  traduction?  Est-ce  Castil-Blaze?  Je 
n'en  sais  rien  et  n'ai  pu  trouver  à  ce  sujet  aucun  renseignement. 
Toujours  est-il  que  l'extravagance  de  cette  traduction  était  telle  que 
l'ouvrage  n'atteignit  même  pas  la  fin  de  sa  première  représenta- 
tion et  succomba  sous  les  sifflets.  On  sait  pourtant  quel  succès  il 
obtint  au  théâtre  Lyrique,  le  16  avril  18SS,  avec  la  nouvelle  adap- 
tation de  MM.  Beauraonl  et  Nuitter  (1). 

Avant  de  terminer  le  répertoire  musical  de  l'Odéon  pour  l'année 
1826,  il  me  faut  mentionner  un  fait  qui  alors  passa  à  peu  près 
inaperçu,  mais  qui  depuis  a  acquis  une  valeur  historique.  Je  veux 
parler  du  début  de  notre  grand  ténor  Duprez,  du  chanteur  illusti'e 
dont  la  renommée,  depuis,  est  devenue  universelle,  dont  la  carrière 
a  été  si  brillante.  M.  Duprez  débuta,  à  l'Odéon,  par  le  rôle  d'Al- 
raaviva  du  Barbier  de  Séville,  le  1"  mars  1823,  et  il  resta  attaché 
à  ce  théâtre  jusque  vers  le  milieu  de  1827. 

Arthur  POUGIN. 
(La  suite  prochainement.) 


(1)  Je  trouve  encore,  pour  l'année  1823,  deux  reprises  dont  il  m'a  été 
impossible  d'établir  la  date  précise  :  1°  Raoul  Barhe-Blcue,  de  Sedaine  et 
Grétry,  créé  à  la  Comédie  Italienne  le  2  mars  1789;  —  2°  Zémire  et  Azor, 
de  Marmontel  et  Grétry,  créé  au  même  théâtre  le  16  décembre  1771. 


DE  PARIS. 


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BEETHOVEN  À  TŒPLITZ. 

La  Siiddeutsche  Musikzeitung  publie  une  lettre,  inédite  jusqu'ici, 
adressée  en  1811  par  Varnhagen  'a  son  ami  le  poëte  Louis  Uli- 
land,  et  qu'on  ne  lira  pas  sans  intérêt.  Elle  n'est  point  d'un  ad- 
mirateur banal,  et  elle  est  surtout  précieuse  en  ce  qu'elle  mon- 
tre le  caractère  de  Beethoven  par  son  côté  affable  et  bon,  que  les 
amateurs  d'antithèses  ont  si  souvent  cherché  à  amoindrir. 

«...  J'ai  t'ait  à  Tœplitz,  dans  les  derniers  jours  de  l'été,  la 
connaissance  de  Beethoven  ;  j'ai  trouvé,  dans  l'homme  qu'on  re- 
présente comme  sauvage  et  insociable,  un  grand  artiste  au  cœur 
d'or,  à  l'esprit  élevé  et  aux  manières  pleines  de  cordialité.  11  a 
fait  pour  nous,  dès  la  première  entrevue,  ce  qu'il  a  refusé  à  des 
princes:  il  s'est  mis  au  piano.  J'ai  été  bien  vite  à  mon  aise  avec 
lui  ;  et  l'attrait  qu'exerçaient  sur  moi  ce  noble  caractère,  ce  souf- 
fle divin  dont  je  croyais  sentir  l'influence  continuelle  au  milieu 
du  calme  dont  s'entourait  ce  grand  homme,  devinrent  si  puissants, 
que  je  finis  par  ne  plus  m'apercevoir,  pendant  des  journées  en- 
tières, de  la  difficulté  que  la  faiblesse  de  son  ouïe  apportait  né- 
cessairement dans  nos  relations;  j'ai  môme  passé  tous  ces  der- 
niers jours  exclusivement  dans  sa  société  et  dans  celle  de  son 
ami  Oliva,  un  excellent  homme  que  Kœrner  a  aussi  connu. 

»  Si  je  ne  savais  déjà,  comme  tout  le  monde,  que  Beethoven 
est  le  plus  grand,  le  plus  profond  et  le  plus  magnifiquement  doué 
des  artistes  allemands,  sa  manière  d'être  seule  me  l'aurait  révélé, 
à  moi  qui  cependant  suis  un  ignorant  en  musique.  11  n'a  vécu 
que  pour  son  art;  et  son  incroyable  activité  et  sa  fécondité  sont 
telles  qu'aucune  passion  humaine  n'a  de  prise  sur    lui. 

»  11  lui  faut  l'espace  libre  et  sans  limites  pour  ses  promenades. 
Dans  ses  courses  solitaires  dans  les  montagnes  et  les  bois,  il 
se  repose  par  la  contemplation  des  grandes  scènes  de  la  nature, 
il  médite  des  créations  musicales,  il  goûte  le  bonheur  dans  le  se- 
cret de  son  cœur. 

»  Je  te  fais  part  de  mes  impressions  pour  que  tu  ne  cherches 
pas  à  le  comparer  à  quelque  autre;  il  faut  absolument  le  mettre 
à  part,  lui  donner  une  place  à  lui  seul  dans  le  domaine  de  l'art. 
Je  voudrais  pouvoir  te  dire  combien  il  était  beau,  touchant,  reli- 
gieux et  recueilli,  cet  homme  de  génie  qui  semblait  avoir  reçu  le 
baiser  d'un  dieu,  alors  qu'il  nous  jouait  de  sublimes  variations, 
véritable  manifestation  d'une  puissance  divine  intérieure,  écho  que 
l'artiste  laissait  expirer,  impuissant  qu'il  était  à  le  fixer  sur  le  pa- 
pier! J'ajouterai,  mon  cher  ami,  que  je  lui  ai  donné,  sur  sa  de- 
mande, toutes  tes  poésies,  que  je  regrette  de  n'avoir  pas  eu  le 
temps  de  copier;  tu  peux  espérer  d'en  voir  bientôt  plusieurs  mises 
en  musique.  J'en  suis  aussi  heureux  que  si  elles  étaient  de  moi.  » 


CORRESPONDANCE. 

Grenoble,  20  août  1868. 

0  Les  fêles  que  Grenoble  vient  de  voir  depuis  trois  jours,  à  l'occasion 
du  concours  musical  et  de  l'inauguration  de  la  statue  de  Napoléon  I", 
ont  été  splendides  et  telles  que  le  Dauphiné  en  gardera  le  souvenir  pen- 
dant plusieurs  générations.  Jamais  une  affluence  aussi  considérable  de 
populations,  accourues  de  tous  les  points  du  sud-est  de  la  France,  ne 
s'était  pressée  dans  la  capitale  de  noire  ancienne  province  :  c'est  à  plus 
de  100,000  personnes  qu'il  faut  évaluer  cette  foule  enthousiaste.  »  J'em- 
prunte au  Courrier  de  l'hère,  mon  cher  directeur,  celte  appréciation 
significative  de  l'éclat  des  fêles  musicales  auxquelles  j'ai  assisté  et  dont 
je  crois  devoir  vous  dire  quelques  mots,  car  elles  ont  été  véritablement 
des  manifestations  de  l'art  populaire  par  excellence,  la  plus  haute,  la 
plus  complète,  la  plus  éloquente  de  l'année. 

Trois  jours  durant,  en  effet,  la  musique,  qui  fut  de  tout  temps  la  grâce 
et  l'honneur  de  la  terre  dauphinoise,  qui  commença  de  naître  et  d'y  re- 
tentir dès  les  âges  de  fer,  au  sortir  des  horreurs  sauvages  de  l'Aliobrogie; 
qui  passa  à  côté  des  cloîtres  et  qu'on  y   accueillit  quelquefois;  qui  fui 


l'âme  joyeuse  des  veillées  et  la  fêle  délicate  des  châteaux,  la  musique  a 
surpris  encore  une  fois,  réjoui  et  comme  galvanisé  ce  généreux  pays. 
Du  IS  au  18  août,  Grenoble  a  été  tout  vibrant  de  fanfares  et  de  chœurs, 
tout  bruissant  de  symphonies  et  de  cantates.  Parmi  ces  sept  mille  chan- 
teurs et  instrumentistes,  que  de  belles  voix,  que  de  beaux  talents,  que 
de  modestie  aussi,  de  discipline  et  de  bonne  volonté! 

Pour  permettre  à  cette  armée  de  concurrents  d'entrer  en  lice,  la  ville 
avait  ouvert  aux  chanteurs  populaires  jusqu'aux  prétoires  de  son  Palais 
de  Justice.  On  distribuait  des  médailles  et  des  couronnes,  en  ce  pacifique 
tournoi,  là  même  où  le  ministère  public  requiert  d'habitude  le  juste 
châtiment  des  coupables.  Les  premiers  prix,  dans  les  différentes  divisions 
orphéoniques,  ont  été  remportés  par  la  Chorale  forézienne  de  Saint- 
Etienne,  le  Cercle  choral  de  Vénissieux,  la  Société  philharmonique  de 
Terre-Noire,  l'Harmonie  lyonnaise,  la  Chorale  autunoise,  la  Lyre  de  Crest, 
l'Aigle  de  Marseille,  l'Orphéon  d'Annonay,  le  Cercle  choral  de  Cham- 
béry,  la  Mandoline  de  Romans,  la  chorale  d'Oullins  et  l'Ecole  normale 
de  l'Isère.  Les  premiers  prix  de  musiques  d'harmonies  sont  revenus  aux 
Enfants  de  la  Loire,  à  la  Philharmonique  de  Vienne  et  à  la  Sainte-Cé- 
cile de  Draguignan.  Quant  aux  fanfares  innombrables,  entre  autres  vic- 
torieuses, je  citerai  celles  de  Valence,  RumiUy,  plusieurs  de  Lyon,  de 
la  Côte-Saint-André,  des  Mineurs  de  la  Ricamarie,  d'Annonay,  de  Saint- 
Gends-Laval,  de  Vourles,  de  Saint-Jean  de  Bournaye,  de  Vernaison,  du 
Péage -de-Roussillon  et  de  Fure.  Le  premier  prix  d'excellence  a  été  dé- 
cerné à  l'Union  chorale  de  Lyon,  et  la  municipalité  grenobloise  a  offert  une 
couronne  de  vermeil  à  la  célèbre  fanfare  lyonnaise,  si  habilement  diri- 
gée par  M.  J.  Luigini.  Cet  artiste  éminent  à  également  reçu  du  mi- 
nistre de  l'instruction  publique  un  diplôme  spécial,  en  témoignage  des 
services  rendus  depuis  longtemps  par  lui  à  la  grande  cause  du  progrès 
par  l'Art. 

Les  différents  jurys  se  composaient  de  MM.  François  Bazin,  Laurent 
de  Rillé,  Besozzi,Boulanger,Monestier,  Mathieu  de  Monter,  Rolland,  l'un 
des  premiers  promoteurs  de  l'Orphéon  en  France,  J.  Simon,  Delaporte, 
Sangnier-Dubouret,  Couder,  Paulus,  Thibaut,  Klosé,  Kokken,  Dauverné, 
Léon  Chic,  Aimé  Gros,  Sain-d'Arod,  A.  Elwart,  Jonas,  etc.  Hector  Ber- 
lioz avait  accepté  la  présidence  d'honneur.  Son  apparition  au  banquet  a 
provoqué  une  émotion  indicible  et  des  app!audis.sements  enthousiastes. 
Une  couronne  d'or  a  été  posée  par  le  maire  de  Grenoble  sur  la  tête  du 
maître,  qui  à  l'heure  présente  n'a  plus  d'envieux  et  appartient  déjà, 
quoique  vivant  encore,  à  l'immortalité.  Cet  épisode,  véritablement  impo- 
sant de  la  fête,  et  auquel  un  violent  orage  subitement  déchaîné  et  s'en- 
gouffrant  parmi  les  fleurs  et  les  lumières  de  la  salle  du  banquet  ajoutait 
un  caractère  en  quelque  sorte  fantastique,  revient  de  droit  à  l'histoire 
artistique  contemporaine.  Une  réserve  légitime  ne  me  permet  pas  d'en 
dire  plus  long.  Ce  soin  a  été,  au  surplus,  surabondamment  rempli  d'au- 
tre part  par  M.  Laurent  de  Rillé,  qui  joint  à  beaucoup  de 
mérite  personnel  un  talent  oratoire  remarquable,  sinon  naturel  et  spon- 
tané, et  qui  a  par  trois  fois,  ce  soir-là,  déposé  sur  la  célébrité  de  l'au- 
teur de  l'Enfance  du  Christ  les  fleurs  symboliques  d'une  rhétorique  à  la 
Massillon.  Notre  ami  et  illustre  collaborateur  H.  Berlioz,  quoique  fort 
souffrant,  n'a  pas  é'.é  peu  surpris  d'apprendre  que  son  éloge  funèbre  avait 
été  prononcé  fort  à  son  insu. 

Je  n'insisterai  pas  davantage,  mon  cher  directeur,  sur  les  sérénades 
données  aux  membres  du  jury,  ni  sur  les  ovations  dont  ils  ont  été 
l'objet.  L'hospitalité  grenobloise  a  été,  ces  jours  derniers,  à  la  hauteur  de 
son  antique  répuiation.  C'est  vous  dire  que  nous  avons  été  reçus  et 
accueillis  avec  la  courtoisie  la  plus  généreuse  et  la  mieux  entendue. 

Une  visite  faite  au  monastère  de  la  Grande-Chartreuse  dans  des  con- 
ditions exceptionnelles  et  l'examen  des  antiphonaires  de  cette  illustre 
communauté,  que  je  dois  à  la  haute  obligeance  du  R.  P.  Dom  de  Cerso, 
général  de  l'ordre,  feront  l'objet  d'une  étude  que  les  lecteurs  de  la  Revue 
et  Gazette  musicale  ne  liront  pas,  je  l'espère,  sans  quelque  intérêt.  Je 
l'écris  au  monastère  même  et  vous  l'adresserai  prochainement. 

La  Bibliothèque  de  Grenoble,  formée  en  1771,  possède  plus  de 
90,000  volumes  comprenant  un  grand  nombre  d'éditions  rares  et  pré- 
cieuses et  de  riches  manuscrits  :  les  ouvrages  relatifs  à  la  musique  n'y 
font  pas  défaut  et  sollicitent  même  l'attention  des  écrivains  voués  à  la 
littérature  ou  à  l'histoire  musicales.  La  musique  est  parfaitement  ensei- 
gnée à  Grenoble  par  d'habiles  professeurs,  au  premier  rang  desquels  je 
citerai  M.  Duprey.  Des  cours  de  musique  vocale  sont  tenus  dans  les 
deux  écoles  gratuites  de  garçons  et  de  filles. 

L'Académie  delphinale,  fondée  en  1772,  se  compose  de  cinquante 
membres  tuulaires  et  de  correspondants.  Elle  se  réunit  souvent  pour 
entendre  la  lecture  de  travaux  concernant  les  diverses  branches  de  la 
littérature,  des  sciences  et  des  arts.  Elle  publie  chaque  année  un  volume 
qui  contient  le  bulletin  fort  intéressant  des  travaux  de  ses  membres. 

Le  théâtre  actuel  de  Grenoble  est  trop  défectueux  et  trop  petit  pour 
pouvoir  être  conservé  et  restauré.  La  consiruction  d'une  salle  plus 
vaste,  plus  appropriée  à  sa  destination  ne  saurait  être  ajournée  plus  long- 
temps. 

En  résumé,  mon  cher  directeur,  les  fêtes  de  Grenoble  m'ont  affirmé 
une  fois  de  plus  et  ont  établi  pour  d'autres  une  vérité  indiscutable,  je 
veux  dire  le  caractère  pacifique,  consolant,  aimant  de  l'Orphéon  français. 
Oui  certes,  cette  institution  exprime  la  joie,  l'orgueil  même  et  la  douce 


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REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


satisfaction  de  tous  ceux  qui  tracent  dans  la  terre,  dans  le  fer,  dans  le 
bois,  le  lude  sillon  du  travail.  Elle  en  accompagne  et  en  soulage  le  la- 
beur. Elle  console  souvent,  elle  apprend  à  voir  et  à  sentir  ce  qui  est 
beau  et  bien .  Ces  chœurs  sont  grandement  utiles  :  ils  disent  beaucoup 
en  peu  de  mots,  il-  vont  parlout,  ils  restent  où  ils  vont.  C'est,  la  plu- 
part du  temps,  de  l.i  morale  qui  entre  dans  l'esprit  des  artisans  sans 
qu'ils  s'en  aperçoivent.  Il  n'y  a  d'utile  pour  les  ouvriers  que  ce  qui  est 
clair,  élégant  et  bien  dit.  Les  systèmes  moraux  et  philosophiques  peu- 
vent être  bons,  maisl'.irtisan  ne  les  comprend  pas.  Us  sont  parfois  défec- 
tueux ;  le  chant  populaire  est  complet.  Quand  on  n'a  pas  tous  les 
moyens  de  tirer  de  peine  son  voisin,  c'est  beaucoup  que  de  pouvoir  la 
lui  faire  prendre  en  patience.  Un  beau  concours  d'orphéons  est  une 
œuvre  excellente  et  noble. 

La  cantate  composée  par  M.  Sain-d'Arod,  sur  des  paroles  de  M.  Bel- 
montet,  pour  l'inauguration  du  i<  bronze  impérial  »  a  marché  avec  assez 
d'ensemble  et  a  produit  l'effet  habituel  de  ces  œuvres  de  circonstance. 
Em.  MATurEu  UE  MONTER. 


Bruxelles,  49  août. 

Voici  le  résultat  du  grand  concours  international  de  musique  sacrée, 
donné  sous  le  patronage  du  gouvernement  belge,  par  la  maison  Schott, 
de  Bruxelles,  et  par  MM.  les  membres  du  Congrès  de  musique  religieuse 
de  Belgique. 

Cent  partitions  ont  été  envoyées  à  ce  concours;  une  messe  portant  la 
devise  :  Gloria  tibi  Domine,  est  parvenue  après  l'expiration  du  délai  lixé 
par  le  programme  et  n'a  pu,  par  conséquent,  être  admise. 

Les  pays  d'origine  des  partitions  adressées  à  M.  Schott  sont  :  la  Bel- 
gique, la  France,  l'Angleterre,  la  Hollande,  l'Italie,  l'Espagne,  presque 
tous  les  pays  d'Allemagne  et  les  Etats-Unis  d'Amérique. 

Le  concours  était  partagé  en  deux  catégories  :  la  première  consistait 
dans  la  composition  d'une  messe  pour  trois  voix  d'hommes  (deux  ténors 
et  une  basse)  avec  orgue,  dans  un  style  simple  et  facile,  approprié  aux 
besoins  des  églises  de  campagne  et  des  maîtrises  de  deuxième  et  de 
troisième  ordre  dans  les  villes.  Les  compositeurs  de  tous  les  pays  étaient 
appelés  à  cette  luttf. 

La  deuxième  catégorie  consistait  dans  lu  composition  de  quatre  motels 
de  salut  également  pour  trois  voix  d  hommes  avec  orgue.  Mais  celle 
division  était  réservée  exclusivement  aux  compositeurs  belges. 

Pour  le  concours  international,  le  premier  prix  a  été  décerné,  après 
plusieurs  tours  de  scrutin,  à  l'auteur  de  la  me.-ise  portant  pour  devise 
ces  paroles  :  Laudatc  Dominum  in  lujmnis.  L'ouverture  de  la  lettre  ca- 
chetée et  accompagnant  la  partition  a  fait  connaître  le  nom  de  M.  Ed- 
mond KuETSCHMER,  Organiste  de  la  cour  et  de  l'église  catholique  de 
Dresde  (Saxe) . 

Le  deuxième  prix  a  été  remporté,  à  la  majorité  des  voix,  par  M.  Joseph 
LoEBMANN,  directeur  du  chœur  de  l'église  de  Ostriz,  près  de  Zittau,  en 
Saxe.  Sa  partition  portait  pour  devise  :  Omnia  ad  majoren  Dei  gloriam. 

Le  troisième  prix  a  été  décerné,  également  à  la  majorité  des  voix,  à 
M.  S.  SuMMERS,  compositeur  à  Paris.  Sa  partition  avait  pour  devise  : 
Simplicitas  jusiorum  diriget  cos. 

81  compositeurs  avaient  pris  part  à  ce  concours.  38  ont  été  exclus  de 
la  lutte,  à  cause  des  nombreuses  fautes  de  latin,  des  suppressions  et  des 
inversions  de  paroles  constatées  dans  la  paraphrase  musicale  du  texte 
liturgique.  Le  jury  a  été  unanime  à  reconnaître  que,  quant  aux  43  au- 
tres manuscrits,  une  douzaine  au  moins  méritaient  les  honneurs  de 
l'impression.  Le  concours,  dans  son  ensemble,  peut  être  considéré 
comme  le  plus  brillant  qui  ait  encore  été  donné  en  Belgique,  au  point 
de  vue  de  la  musique  sacrée. 

Pour  la  catégorie  réservée  aux  compositeurs  belges,  le  jury  a  accordé 
un  deuxième  prix,  sur  dix-huit  concurrents,  à  M.  César  Lust,  orga- 
niste de  l'église  du  Jésu,  à  Bruxelles,  auteur  des  quatre  motets  du  Saint- 
Sacrement  portant  pour  devise  :  Cantate  Domino  canticum  novum.  Dans 
cette  catégorie,  dix  partitions  ont  été  exclues  de  la  lutte  à  cause  des 
suppressions  ou  d'inversions  du  texte  latin. 

La  commission  liturgique  du  jury  se  constituait  de  MM.  De  Vroye, 
abbé  Cras  et  X.  Van  Elewyck. 

Nous  ferons  connaître  ultérieurement  l'époque  de  la  distribution  des 
prix  et  de  l'exécution  publique  et  solennelle  des  œuvres  couronnées. 

—  Les  concours  ont  commencé  au  Conservatoire.  De  l'avis  de  tous, 
larement  ils  ont  été  aussi  brillants.  Le  premier  prix  de  composition 
(classe  de  M.  Fétis)  a  été  décerné  à  M.  Félix  Pardon,  jeune  homme  de 
dix-sept  ans,  en  qui  on  pressent  déjà  un  maître.  Les  résultats  des  con- 
cours d'harmonie,  de  contrebasse,  de  violoncelle,  de  violon,  de  chant  et 
de  déclamation  lyrique  ont  été  très-satisfaisants.  Cette  dernière  classe, 
qui  n'est  que  depuis  un  an  sous  la  direction  de  M.  Warnots,  l'excellent 
ténor  belge,  s'est  particulièrement  distinguée. 


REVDE  DES  THEATRES. 

Réouverture  du  Théâtre-Français.  —  Gvmnase  :  Fanny  Lear, 
comédie  en  cinq  actes,  par  MM.  Henri  Mellhac  et  Ludovic  Ha- 
lévy.  —  Variétés  :  les  Chambres  de  bonnes,  comédie  en  trois 
actes,  par  MM.  Hippolyte  Rimbaul  et  Raymond  Deslandcs  ;  (Ine 
Eclipse  de  lune,  comédie  en  un  acte,  par  M.  Gabriel  Ferry; 
la  Vie  privée,  comédie  en  un  acte,  par  MM.  Eugène  Grange  et 
Victor  Bernard.  —  Théâtre  impérial  du  Chatelet  :  Reprise  des 
Pirates  de  la  Savane,  drame  de  MM.  Anicet  Bourgeois  et  Fer- 
dinand Dugué. 

Après  avoir  constaté  que  le  Théâtre-Français  a  repris  le  cours 
de  ses  représentations  le  15  août,  à  la  suile  d'un  mois  de  ferme- 
ture, hâtons-nous  d'entrer  au  Gymnase,  où  nous  attend  une  comédie 
importante  do  MM.  Henri  Meilhac  et  Ludovic  Halévy,  sous  le  titre 
de  Fanny-Lear. 

Nous  sommes  à  la  campagne,  chez  M.  de  Frondevillc  qui,  en 
l'absence  de  sa  leinme  dont  d  est  séparé  à  l'amiable,  mène  joyeuse 
vie  avec  des  amis  devenus  des  commensaux.  Parmi  eux,  il  y  a  un 
M.  Brédif,  dont  il  courtise  la  t'emmc,  au  mépris  des  lois  de  l'hos- 
pitalité. Tout  à  coup  survient,  à  minuit,  par  le  chemin  de  fer, 
Mme  de  Frondevillc  qui  invoque  la  protection  de  son  mari,  pour 
échapper  aux  poursuites  d'un  adorateur  vers  lequel  elle  sent  que 
son  pauvre  cœur  est  sur  le  point  de  verser.  Un  compromis  a  lieu 
entre  les  deux  époux;  Froiideville  aidera  de  tout  son  pouvoir  au 
salut  de  sa  femme,  qui,  de  son  côté,  s'engage  à  désespérer  son 
soupirant,  à  condition  qu'd  ne  sera  plus  question  de  Mme  Brédif. 
Les  choses  sont  en  cet  état,  lorsque  apparaît  sur  l'horizon  M.  de 
Cadières,  l'amoureux  de  Mme  de  Frondevillc,  et  aussitôt  l'action 
s'engage. 

Mais,  au  milieu  de  tout  cela,  où.  est  donc  Fanny  Lear?  Et 
qu'est-ce  que  Fanny  Lear?  Nous  allons  le  .'avoir,  un  peu  tard 
peut-être,  mais  vous  connaissez  le  proverbe  :  vaut  mieux  tard  (jue 
jamais. 

Fanny  Lear  est  une  ancienne  actrice  de  Drury-Lane,  qui,  après 
quelques  incartades  sans  conséquence,  a  pris  dans  ses  filets  lord 
Elphinslone,  l'a  enterré  et  est  devenue  son  héritière  pour  une 
somme  de  plusieurs  millions.  La  voilà  riche,  mais  son  ambition 
n'est  pas  satisfaite.  Elle  veut  un  nom  pour  forcer  les  portes  du 
grand  monde,  qui  lui  sont  fermées.  Justement  il  y  a  dans  les  bas- 
fonds  de  Londres  un  gentilhomme  français  que  sou  inconduite  a 
réduit  à  la  plus  extrême  misère.  Le  marquis  de  Noriolis  est  à 
vendre;  Fanny  Lear  l'achète,  mais,  devenue  marquise,  elle  n'en 
reste  pas  moins  à  l'index,  dans  la  haute  société  anglaise,  et  de 
dépit  elle  passe  avec  son  mari  en  France,  oîi  elle  espère  être  plus 
heureuse. 

Or,  le  château  de  Noriolis  est  voisin  de  la  villa  de  M.  de  Fron- 
deville,  et  le  marquis  a  une  charmante  petite  fille  qui  a  été  pen- 
dant quelque  temps  confiée  aux  soins  de  Mme  de  Frondeville, 
mais  que  la  nouvelle  marquise  a  appelée  auprès  d'elle,  dès  les 
premiers  jours  de  son  arrivée  en  France. 

Ici  commence  en  réalité  le  drame.  Geneviève  de  Noriolis  vient 
se  plaindre  à  Mme  de  Frondevdle  de  la  triste  vie  qu'elle  mène 
entre  une  belle-mère,  égoïste  et  sèche,  et  un  grand-père  tombé 
en  enlancc.  Il  faut  absolument  la  tirer  de  cette  situation,  et,  dans 
ce  but,  M.  et  Mme  de  Frondeville  imaginent  de  lui  faire  épouser 
M.  de  Cadières.  Celui-ci  se  prête  sans  trop  de  répugnance  à  cette 
combinaison  à  deux  fins,  mais  il  est  convenu  qu'après  le  mariage 
il  emmènera  sa  jeune  femme  bien  loin  de  Noriolis  et  de  ses  habi- 
tants. 

Hélas!  on  a  compté  sans  Fanny  Lear,  qui  consent  bien  à 
donner  Geneviève  à  M.  de  Cadières,  mais  à  la  condition  expresse 
que  celui-ci  restera  avec  elle,   car  elle  a  calculé  que  l'honorabilité 


DE  PAHIS. 


269 


notoire  de  son  gendre  la  ferait  enfin  trioinplier  des  susceptibilités 
du  inonde. 

Il  y  a  là  une  impasse  d'où  il  s'agit  de  sortir  à  tout  prix,  et, 
pour  obtenir  ce  résultat,  M.  de  Frondeville,  réunissant  ses  efforts  à 
ceux  d'un  ancien  amant  de  Fanny  Lear,  devenu  son  ennemi  mor- 
tel, se  transporte  au  château  de  Noriolis  pour  essayer  do  paralyser 
l'influence  de  Fanny  Lear  par  celle  du  vieux  marquis. 

Nous  ne  suivrons  pas  ces  messieurs  dans  tous  les  d-5tails  de  leur 
expédition,  qui  va  se  briser  contre  la  folie  du  marquis  e\  contre  la 
surveillance  d'un  médecin  aux  gages  de  Fanny  Lear.  Qu'il  suffise 
de  savoir  que  le  médecin  est  corrompu  à  Deaux  deniers  comptants, 
et  que  le  marquis,  dans  une  lueur  de  boa  sens,  met  délinitivement 
Fanny  Lear  à  la  l'aison,  et  marie  Geneviève  à  M.  de  Cadières. 

Les  auteurs  de  cette  comédie  y  ont  fait  preuve,  à  beaucoup 
d'égards,  d'un  talent  véritable.  Ils  ont  trouvé  de  très-belles  scènes; 
ils  ont  tracé  des  caractères  curieux,  mais  ils  n'ont  pas  tenu  assez 
compte,  selon  nous,  de  l'unité  d'action.  Fanny  Lear,  comme 
Tartuffe,  n'entre  en  scène  qu'au  troisième  acte,  mais  à  travers  une 
intrigue  dont  elle  n'est  pas  l'unique  pivot.  Le  vieux  marquis  ne 
fait  à  son  tour  son  apparition  qu'au  quatrième  acte,  et  il  en  ré- 
sulte que  la  marche  de  la  pièce  est  trop  souvent  subordonnée  à 
des  personnaares  parasites.  C'est  là  un  défaut  qui  nuit  à  l'intérêt. 
Fanny  Lear  n'en  a  pas  moins  obtenu  un  succès  extrêmement 
honorable,  dont  la  durée  ne  fait  pas  un  doute  pour  nous,  surtout 
si  la  température  adoucie  se  décide  à  le  favoriser. 

Il  y  a  d'ailleurs,  dans  ce  succès,  un  motif  réel  d'attraction;  c'est 
la  manière  remarquable  dont  M""  Pasca  a  créé  le  rôle  de  Fanny 
Lear,  et  ce  n'est  cerles  pas  un  petit  mérite  d'avoir  su  triompher 
des  aspérités  de  ce  personnage  odieux,  que  l'on  peut  comparer  à 
VCbjmpe  de  M.  Emile  Augier,  et  qui  rappelle  cette  marquise  d'Or- 
vault  qu'un  procès  récent  a  rendu  tristement  célèbre.  On  doit 
aussi  savoir  gré  à  M""  Pasca  de  la  perfection  avec  laquelle  elle  a 
rendu  le  léger  accent  de  cette  ancienne  actrice  de  Drury-Lane  qui 
possède  toutes  les  iinesses  de  la  langue  française,  mais  qui  n'a  pu 
tout  à  fait  effacer  son  cacliet  britannique. 

Les  autres  rôles  sont  bien  joués  par  Nertann,  Landrol,  Pujol, 
jjmes  pierson,  Angelo,  Manvoy  et  Chaumont.  Mais,  en  somme,  la 
palme  appartient  à  M""  Pasca. 

—  Trois  pièces  nouvelles  nous  attirent  maintenant  au  théâtre 
des  Variétés.  Les  Chambres  de  bonnes,  étant  en  trois  actes,  doi- 
vent avoir  le  pas  sur  les  deux  autres.  Il  s'agit,  dans  cette  comé- 
die de  mœurs  bourgeoises,  de  ce  qui  se  passe  dans  les  mansardes, 
tandis  que  les  maîtres  dorment  bien  tranquillement  au  premier  ou 
au  second  étage.  Voici  d'abord  Mlle  Fanchette  qui  abrite  en  ca- 
chette sous  son  toit  un  mari  de  contrebande,  puis,  sa  voisine,  la 
Marseillaise  Rosalie,  qui  se  laisse  poursuivre  dans  sa  chambrette 
par  un  chanteur  comique  de  l'Alcazar,  dont  la  manie  est  de  cour- 
tiser les  bonnes.  Mais  Mlle  Rosalie  est  toujours  flanquée  de  sa  jeune 
maîtresse,  Mlle  Aline  Quincampoix,  qui  l'accompagne  au  marché 
et  qui  a  fait  de  sa  chambre  un  atelier  de  dessin.  Aline,  trompée 
par  les  allures  du  chanteur  Petitrat,  s'imagine  que  c'est  à  elle 
qu'il  en  veut,  et  de  ce  quiproquo  surgissent  naturellement  des 
situations  non  moins  variées  que  cocasses.  On  danse  chez  M.  Co- 
queluchon,  le  maître  de  Fanchette,  et  Petitrat,  qui  s'y  est  intro- 
duit, y  retrouve  dans  un  méli-mélo  des  plus  grotesques,  la  famille 
Quincampoix  et  toutes  les  bonnes  qu'il  a  séduites.  Les  beaux 
yeux  de  la  dot  de  Mlle  Aline  lui  donnent  pourtant  des  éblouisse- 
ments,  mais  ses  victimes  s'unissent  pour  le  perdre,  et  il  retourne 
à  son  Alcazar,  Gros-Jean  comme  devant. 

Cette  pièce  est  amusante  et  elle  est  joyeusement  interprétée  par 
Grenier,  Christian,  Lecomte,  Gobin,  ainsi  que  par  Mmes  Honorine, 
Carlin,  Legrand,  etc.  Mlle  Aline  Duval,  dans  le  rôle  de  Mme  Quin- 
campoix, a  droit  à  une  mention  particulière. 


C'est  au  figuré  qu'il  faut  prendre  le  titre  d'ilne  Eclipse  de  lune. 
Champfollet  est  dans  sa  lune  de  miel,  quand  on  lui  annonce  la 
visite  inop|)ortunc  de  M.  et  Mme  Bêchepont  qui  viennent  s'instal- 
ler chez  lui  pour  un  temps  plus  ou  moins  déterminé.  Afin  de  se 
débarrasser  de  ces  fâcheux,  Champfollet  conçoit  le  projet,  d'après 
l'inspiration  de  son  domesti(iuc,  de  faire  la  cour  à  Mme  Bêchepont, 
de  manière  à  exciter  la  jalousie  du  mari,  qui  ne  manquera  pas  de 
l'emmener  bien  vite,  pour  la  soustraire  aux  témérités  de  son 
hôte.  Le  plan  machiavélique  de  Champfollet  marche  d'abord  à 
souhait  ;  mais  la  mèche  est  éventée  par  une  indiscrétion,  et  le 
couple  Bêchepont  se  venge  du  faux  Lovelace  avant  de  le  rendre 
aux  douceurs  de  son  novice  ménage. 

Quant  à  la  Vie  privée,  elle  a  le  tort  d'arriver  un  peu  tard,  et 
quand  le  Gymnase  a  déjà  défloré  ce  sujet  semi-politique.  Un  article 
de  journal,  qui  a  remplacé  par  des  initiales  les  noms  véritables 
que  la  loi  nouvelle  lui  défend  d'imprimer,  met  martel  en  tête  à  ce 
brave  Médusier,  très-jaloux  de  sa  femme,  et  soulève  une  tempête, 
dont  les  conséquences  pourraient  devenir  graves,  si  Mme  Charail- 
lard,  une  femme  d'esprit,  no  révélait,  en  temps  opportun,  que  c'est 
elle  qui  a  écrit  ledit  article,  pour  donner  une  leçon  à  son  mari,  un 
peu  trop  porté  à  risquer  des  coups  de  canifs  dans  le  contrat.  Quel- 
ques détails  spirituels  prêtent  un  certain  relief  à  cette  bluette  re- 
tardataire. Une  remarque  à  faire,  c'est  qu'on  s'y  occupe  beaucoup 
d'une  demoiselle  Fleur-de-Thé,  et  que  ce  nom,  emprunté  à  l'opéra- 
bouife  de  M.  Charles  Lecocq,  est  un  hommage  rendu  à  sa  très- 
grande  notoriété. 

—  Au  thiâtre  du  Châtelet,  on  a  repris,  avec  éclat ,  le  fameux 
di-ame  des  Pirates  de  la  Savane,  dans  lequel  cette  pauvre  Adah 
Menken,  si  rapidement  disparue,  a  fait  courir  tout  Paris  au  théâ- 
tre de  la  Gaîté.  Elle  y  est  remplacée  par  miss  Sara  Dowe,  qui  ac- 
complit, aux  bravos  de  toute  la  salle,  la  course  périlleuse  dite  de 
Mazeppa.  La  pièce  est  en  outre  fort  habilement  montée,  et  on  y 
applaudit  des  danses  mexicaines,  très-bien  réglées  par  M.  Honoré, 
sur  une  charmante  musique  de  M.  Semet. 

D.  A,  D.  SAINT-YVES. 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 

**,  Le  théâtre  impérial  de  l'Opéra  a  donné  lundi  et  vendredi  Hamkt 
et  mercredi  la  Juive  avec  Mme  Âlarie  Sass.  ' 

***  L'hymne  composé  par  Rossini  pour  l'Exposition  universelle  a 
été  exécuté  le  dS  août  à  la  représentation  gratuite  de  l'Opéra.  MM.  Caron, 
Castelmary,  Ponsard  et  Gaspard  l'ont  chanté  à  l'unisson,  accompagnés 
par  les  chœurs,  l'orchestre,  la  musique  de  la  garde  de  Paris  et  les 
cloches,  —  le  canon  n'était  pas  de  la  partie  cette  fois.  L'iiymne  a  pro- 
duit beaucoup  d'effet  sur  le  public  très-mêlé,  mais  fort  attentif,  dont  la 
salie  regorgeait,  et  qui  a  distribué  d'intelligents  bravos  à  Faure  et  à 
Mlle  Nilsson  dans  Hamkt. 

**^  M.  Perrin  vient  de  conclure  le  traité  qui  lui  donne  le  droit  de 
représenter  Faust.  Outre  une  mise  en  scène  digne  de  l'Opéra,  l'œuvre 
de  Gounod  bénéficiera  encore  du  développement  que  l'auteur  doit  don- 
ner à  la  scène  de  la  Walpurgisnacht,  oh  sera  ajouté  un  ballet  et  des 
récitatifs  qui  devront  naturellement  remplacer  le  dialogue  parlé.  Le  rôle 
de  Marguerite  est  réservé  à  Mlle  Nilsson,  et  celui  de  Méphistophélès  à 
Faure,  qui  en  a  déjà  fait  à  Londres  une  de  ses  plus  belles  créations. 

**„,  On  répète  activement  les  Huguenots  avec  Mlle  Julia  Hisson  et  Vil- 
laret.  Dans  un  mois,  nous  aurons  de  cette  grande  œuvre  une  magnifi- 
que reprise,  qui  sera  entourée  de  soins  tout  particuliers  ;  ainsi,  des  rôles 
remplis  jusqu'ici  par  des  coryphées,  le  seront  par  des  artistes  de  premier 
orcire. 

*♦#  La  Cantate  exécutée  à  l'Opéra-Comique  le  IS  août,  la  Bonne  Moisson, 
mérite  une  mention  spéciale,  tant  pour  son  mérite  intrinsèque  que  pour 
le  succès  très-vif  qu'elle  a  obtenu.  Son  auteur,  M.  Chariot,  ancien  prix 
de  Rome,  est  chef  du  chant  à  l'Opéra-Comique  et  à  la  Société  des  Con- 
certs du  Conservatoire.  Cette  Cantate,  pour  avoir  été  presque  improvisée, 
comme  tout  ouvrage  de  circonstance,  n'en  décèle  pas  moins  une  main 
ferme  et  habile  ;  la  mélodie  y  est  abondante  et  pleine  de  distinction.  Le 
solo  a  été  fort  bien  dit  par  Gailhard.  —  Les  Dragons  de  Villars  et  le  Docteur 


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REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


Mirobolan,  qui  complétaient  le  spectacle,  ont  été  aussi  très-chaleureuse- 
ment accueillis. 

^*^  La  liste  que  nous  avons  donnée,  il  y  a  un  mois,  des  engagements 
faits  par  M.  Bagier  pour  le  tliéâtre  Italien  ,  se  complète  par  les  détails 
suivants  :  Adelina  Patii  chantera  du  l"'  octobre  à  la  fln  de  décembre  , 
et  du  IS  mars  à  la  fin  d'avril;  entre  temps  elle  remplira  un  engage- 
ment de  six  semaines  à  Saint-Pétersbourg;  Fraschini,  qui  ouvrira  avec 
elle  la  saison  par  Lucia,  nous  quittera  exactement  aux  mêmes  époques  ; 
Tamberlick  ne  restera  que  trois  mois,  au  milieu  de  l'année.  Les  autres  ar- 
tistes feront  toute  la  campagne  —  La  salle  Ventadour  vient  d'être  décorée 
à  neuf;  elle  offre  un  coup  d'œil  magnifique. 

.(;**  Un  des  premiers  ouvrages  que  M.  Pasdeloup  a  l'intention  de  mon- 
ter au  théâtre  Lyrique  est  le  liicnzi  de  Richard  Wiigner.  Cet  opéra,  on 
le  sait,  a  été  le  début  du  compositeur  au  théâtre;  il  n'est  point  encore 
conçu  dans  l'ordre  d'idées  qui  a  plus  tard  présidé  ù  la  création  du  Vaisseau 
Fantôme  et  de  Lohengrin.  —  Les  répétitions  commenceront  à  ce  théâtre 
le  !'"■  septembre. 

<^*j)  Deux  lauréats  des  derniers  concours  de  chant  du  Conservatoire, 
MM.  Aubéry,  baryton,  et  Bacquié,  basse  chantante,  sont  engagés  au 
théâtre  Lyrique. 

**^  La  Périchole ,  la  pièce  nouvelle  de  MIL  Meilhac,  Lud.  Halévy  et 
Off'enbach,  qui  sera  représentée  au  commencement  d'octobre,  vient  d'en- 
trer en  répétitions  aux  Variétés.  Les  rôles  sont  distribués  à  MM.  Dupuis, 
Grenier,  Leccmte,  Christian,  Baron,  Mlles  Schneider,  C.  Renault,  Carlin 
et  Legrand.  '' 

,*»  La  pièce  en  deux  actes  d'Offenbach  que  les  Bouffes-Parisiens  de- 
vaient donner  à  leur  réouverture,  ne  sera  jouée  que  dans  un  des  .spec- 
tacles suivants.  Il  est  question,  pour  la  remplacer,  du  Soldat  magicien, 
dont  les  baigneurs  d'Ems  ont  eu  la  primeur,  et  qui  obtint  beaucoup  de 
succès. 

»*,  A  l'Athénée,  Daubray,  transfuge  du  théâtre  Déjazet,  jouera  le 
rôle  rempli  jusqu'à  présent  par  Désiré  dans  Fleur  de  Thé,  dont  la  repi'ise 
est  prochaine. 

^*,,  Voici  la  distribution  exacte  du  Petit  Poucet ,  grand  opéra  bouffe 
que  donnera  l'Athénée  immédiatement  après  la  reprise  de  Fleur  de  Thé  : 
l'Ogre,  M.  Daubray;  Roulaboul,  M.  Léonce;  Pierrot,  M.  Duval;  l'Ogresse, 
Mme  Lasseny;  Aventurine,  Mme  Bonelli;  Tomate,  Mme  Ducrey. 

if*^  M.  Martinet ,  qui  garde  la  direction  des  Fantaisios-Pari.siennes , 
les  négociations  avec  le  théâtre  du  Palais-Royal  n'ayant  pas  abouti,  s'oc- 
cupe de  recruter  une  troupe.  Les  représentations  recommenceront,  selon 
toute  probabililé,  vers  la  fin  de  septembre. 

»*4i  Au  rebours  de  la  célèbre  Wilhelmine  Schrœder-Devrient,  qui  com- 
mença par  être  danseuse,  puis  se  fît  comédienne,  et  devint  enfin  la 
grande  cantatrice  que  toute  l'AUmagne  a  admirée,  voici  Roger,  le  ténor 
Roger,  qui  abandonne  la  carrière  lyrique  pour  se  faire  acteur,  et  acteur 
de  drame!...  Ce  serait  à  n'y  pas  croire  s'il  n'avait  pas  adressé  lui-mê- 
me à  son  ami  Henri  de  Pêne  la  lettre  suivante,  où  il  lui  annonce  son 
engagement    à  la   Porte-Saint-Manin  : 

R  Je  débute  par  un  drame  de  George  Sand  et  je  renouvelle  par  la 
littérature  une  carrière  consacrée  aux  œuvres  musicales. Où  est  le  mal? 
Yen  a-t-il?  On  en  trouvera.  Mais,  si  je  vous  disais  que  c'est  un  projet  que 
j'ai  caressé  toute  ma  vie...  Alexandre  Dumas  et  Scribe  étaient  fort  de 
cet  avis...  En  Allemagne,  Mlle  Wagner,  la  grande  chanteuse,  et  Formes, 
célèbre  basse,  jouent  Schiller  et  Shakespeare.  Raphaël  a  l'inlention  de 
faire  renaître  à  la  Porte-Saint-Martin  les  grands  jours  du  drame.  Me 
voyant  jouer  à  Vienne,  dernièrement,  l'idée  lui  est  venue  de  faire  de 
moi  un  tragédien.  Ça  le  regarde;  mais  je  tâcherai  de  lui  donner  rai- 
son. Le  théâtre  est  la  passion  de  ma  vie;  et  puis,  je  vais  rester  à  Paris, 
etpuis  j'aurai  des  créations!...  Et  puis,  si  j'ai  des  amis,  j'espère  en  eux 
pour  me  soutenir;  il  y  a  si  longtemps  que  j'en  suis  éloigné!  Le  chan- 
teur pour  cela  n'est  pas  mort;  les  intimes  s'en  convaincront  bien  cet  hi- 
ver, en  petit  comité Cadio,  de  Mme  Sand,  sera  lu  le  2i.  » 

11  nous  souvient  d'une  autre  lettre,  qui  n'a  que  quelques  mois  de 
date,  et  où  Roger,  alors  en  plein  triomphe  à  Pesth,  demandait  qu'on 
le  laissât  chez  ses  Huns  et  ses  Sarmates... 

^%  Mme  Ugalde  et  sa  troupe  continuent  en  province  une  brillante  et 
fructueuse  tournée  dont  la  Grande-Duchesse  fait  presque  tous  les  frais. 
A  Caen,  Cherbourg,  Evreux,  Mantes,  Elbeuf,  etc.,  l'œuvre  d'Offenbach 
et  ses  excellents  interprètes  ont  trouvé  un  accueil  enthousiaste.  Henri 
Beaucé,  le  frère  de  Mme  Ugalde,  obtient  à  côté  de  sa  sœur  un  très- 
grand  succès,  à  ce  point  qu'il  vient  d'être  engagé  à  Bade  pour  vingt  joui-s. 
—  La  seconde  grande-duchesse  n'est  pas  seulement  une  artiste  d'un 
immense  talent,  c'est  aussi  une  femme  d'esprit  et  de  goût,  comme  on 
peut  en  juger  par  la  lettre  suivante,  qu'elle  vient  d'adresser  au  Figaro  : 
«  Monsieur  le  rédacteur, 

»  Je  termine  ma  tournée  en  province  le  15  août,  et  je  rentrerai  sur- 
le-champ  à  Paris. 

»  Il  faut,  en  attendant,  que  vous  me  veniez  en  aide  à  propos  de  mon 
âge,  dont  vous  savez  le  chiffre  aussi  bien  que  moi. 

»  La  presse  de  province  m'a  décerné  les  articles  les  plus  élogieux, 
mais  le  malheur  est  qu'ils  commencent  invariablement  ainsi  : 


«  Malgré  son  grand  âge,  Mme  Ugalde  possède  une  voix  des  plus  irré- 
»  sistibles...  —  Qui  dirait  qu'à  son  âge  Mme  Ugalde  possède  autant  de 
»  voix,  autant  de  charme 'ï  ..  ^  Il  faut  entendre  et  voir  Mme  Ugalde 
»  pour  se  pénétrer  du  talent  exceptionnel  qui  fait  d'elle,  malgré  son  âge, 
»  une  de  nos  plus  célèbres,  etc  ,  etc.. —  Que  de  jeunesse,  que  de  talent! 
»  11  faut  que  Mme  Ugalde  ait  retrouvé  la  fontaine  de  Jouvence!  » 

11  Jusqu'à  un  pompier  : 

«  Comme  elle  est  bien  conservée,  Mme  Ugalde!  On  ne  croirait  jamais 
»  à  la  voir  qu'elle  a  cinquante  ans!...  » 

«  Si  c'est  une  scie,  il  est  temps  qu'elle  finisse.  Car  enfin  cela  peut  me 
faire  un  tort  considérable  pour  la  carrière  qui  me  reste  à  parcourir. 

1)  Je  suis  née  le  5  décembre  1829,  et  comme  ce  mois  est  la  cause  qu'on 
me  vieillit  d'un  an,  je  préfère  me  rajeunir  de  vingt-sept  jours,  en  disant 
que  je  suis  née  le  1"''  janvier  1830.  C'est  peu  de  chose,  et  je  suis  sûre 
que  je  suis  la  seule  à  me  rajeunir  si  peu  ;  mais  je  le  voudrais  que  je 
ne  le  pourrais  pas,  car,  en  disant  mon  âge  vrai,  à  moins  de  me  con- 
naître, on  a  bien  de  la  peine  à  le  croire.  Que  diable!  je  ne  suis  plus 
une  jeune  femme,  mais  je  suis  encore  une  femme  jeune,  n'est-ce  pas  ? 

»  A  vous  et  à  bientôt,  Delphine  Ugalde. 

**»  Parmi  les  artistes  engagés  au  Grand-Théâtre  de  Lyon,  nous  cite- 
rons MM.  Delabranche,  ténor,  à  qui  l'Opéra  de  Paris  a  accordé  un 
congé  d'un  an,  Guillot,  Gu.stave  Barbol,  Martliieu,  Barielle  ;  Mmes  de 
Taisy,  Singeléo,  Cortoz.  La  saison  s'ouvrira  par  les  Hugucnols,  avec  une 
mise  en  scène  nouvelle  et  des  chœurs  renforcés. 

»*»  M.  Husson  a  engagé  pour  la  prochaine  campagne  théâtrale,  à  Mar- 
seille, Mmes  Wollani,  Lafon,  Balbi-Verdier,  MM.  Michot,  Duwast,  Ismacl, 
Falchieri,  Dcrmond-Michel,  Devaux,  Roudil. 

***  Les  Bouffes-Parisiens,  en  attendant  leur  résurrection  à  Paris,  sous 
la  direction  de  M.  Noriac,  donnent  au  Kursaal  d'Ems  des  représentations 
qui  sont  fort  suivies.  Le  programme  du  l.'i  de  ce  mois  comprenait  l'Èlixir 
de  Cornélius,  opéra-comique  de  MM.  Meilhac  et  de  Lavigne,  musique  de 
M.  Emile  Durand;  puis,  Jeanne  qui  pleure  et  Jean  qui  rit,  opérette  de 
M.  Tréfeu ,  musique  d'Offenbach.  Mmes  Lovatu,  Decroix  et  Vanghèle, 
chargées  des  rôles  principaux,  forment  un  joli  trio  de  jeunes  actrices. 


NOUVELLES  DIVERSES. 


**»  Au  nombre  des  chevaliers  de  la  Légion  d'honneur  créés  à  l'occasion 
du  13  août,  nous  voyons  figurer  le  chef  d'orchestre  de  l'Opéra,  M.  Geor- 
ge Hainl,  décoré  sur  la  demande  expresse  et  personnelle  de  S.  Exe. 
M.  le  ministre  des  Beaux-Arts;  M.  Camille  Saint-Saëns,  compositeur, 
organiste  de  la  Madeleine;  M.  Eugène  Gautier,  compositeur,  professeur 
au  Conservatoire,  auquel  on  doit  dix  partitions  applaudies  à  l'Opéra-Co- 
mique  et  au  théâtre  Lyrique,  et  entre  autres  le  Docteur  Mirobolan  et  le 
Trésor  de  Pierrot,  ainsi  que  l'oratorio  la  Mort  de  Jésus,  exécuté  avec 
succès  dans  la  plupart  des  églises  de  Paris;  M.  Dauverné,  professeur  au 
Conservatoire;  MM.  Michel  Carré,  Joseph  Bouchardy,  auteurs  dramatiques; 
Henri  NicoUe,  Octave  Lacroix,  hommes  de  lettres,  Paul  de  Cassagnac, 
Robert  Milchell,  Bouinais,  Marc,  Norbert  Billiart,  Ernest  Daudet,  journa- 
listes. —  M.  Emile  Augieraété  nommé  commandeur. 

jf*^  Parmi  les  médailles  distribuées  parla  Société  libre  des  Beaux- Arts 
dans  sa  séance  annuelle  du  9  août,  nous  devons  citer  celle  qui  a  été 
décernée,  pour  la  musique,  à  Mme  la  baronne  de  Maistre,  auteur  de 
compositions  musicales  empreintes  d'un  beau  et  vrai  sentiment  religieux 
et  de  grandes  richesses  harmoniques. 

^*^  Le  procès  pendant  entre  M.  Blaze  de  Bury  et  les  héritiers  de 
Meyerbeer,  au  sujet  de  la  Jeunesse  de  Gœlhe,  est  revenu  cette  semaine 
devant  la  première  chambre  du  Tribunal  civil  et  a  été  plaidé  par  M"  Cré- 
mieux  et  Le  Berquier.  Nous  espérons  pouvoir  reproduire  la  plaidoirie  de 
M'  Crémieux,  remarquable  à  plus  d'un  titre,  et  surtout  par  une  appré- 
ciation tout  à  fait  artistique  de  l'œuvre  de  Meyerbeer. 

^\  M.  Jules  Benedict,  l'éminent  compositeur,  est  en  ce  moment  à 
Paris. 

^*,f:  Mlle  Clara-Louise  Kellogg,  la  célèbre  cantatrice  américaine,  qui  a 
inspiré  à  Arditi  sa  Kellogg-valse,  était  à  Paris  cette  semaine. 

^*^  Nous  avons  été  parmi  les  rares  privilégiés  qui  ont  pu  entendre 
Mlle  Minnie  Hauck ,  la  nouvelle  prima  donna  américaine  dont  M.  Stra- 
kosch  achève  l'éducation  artistique,  et  qui  est  aujourd'hui  engagée  à 
Covent-Garden  pour  la  saison  prochaine.  C'est  en  réalité  une  merveille 
du  chant  qui,  si  elle  ne  fait  pas  pâlir  bien  des  étoiles  haut  placées  dans 
le  firmament  de  l'art,  y  brillera  certainement  à  côté  d'elles  d'un  aussi 
TÎf  éclat.  Voici  ce  que  nous  lisons  dans  un  journal  de  New-York  : 
«  Mlle  Minnie  Hauck  est  une  jeune  fille  de  dix-sept  ans,  d'une  beauté 
extraordinaire.  Sa  voix  dépasse  en  étendue  celle  des  cantatrices  les  plus 
célèbres.  Chaque  fois  qu'elle  chante,  c'est  un  triomphe  tel  que  la  salle 
est  ébranlée  jusqu'en  ses  fondations.  L'enthousiasme  de  l'assistance  tient 
de  la  folie,  et  la  diva  est  obligé  de  céder  la  place  à  l'avalanche  de 
fleurs  et  de  couronnes  que  le  public  jette  sur  la  scène.  » 


DE  PARIS 


27< 


^*^,  Les  tribunaux  viennenl  de  prononcer  la  séparation  de  corps  et 
de  biens  entre  M.  et  Mme  Gueymard. 

^\  M.  A.  Mey,  qui  dirige  avec  tant  de  talent  la  musique  au  Jardin 
Mabille,  a  été   nommé,  la  semaine  passée,  chef  d'orchestre  du  Casino. 

***  La  distribution  des  prix  a  eu  lieu  dernièrement  au  Conservatoire 
de  Lille.  Les  concours  ont  été  très-brillanls  et  ont  accusé  un  niveau 
d'études  très-élevé.  En  effet,  M.  Victor  Magnien,  qui  dirige  cet  établisse- 
ment, n'a  rien  négligé  pour  le  relever  et  en  assurer  la  prospérité;  au- 
jourd'hui d'habiles  maîtres  y  enseignent  à  peu  près  tous  les  instrumenis, 
le  solfège,  l'harmonie;  un  pas  de  plus,  et  le  Conservatoire  de  Lille  se- 
rait, non  plus  une  succursale,  mais  le  rival  de  celui  de  Paris. 

t*:^  Hier  samedi  a  eu  lieu  l'inauguration  solennelle  du  grand  orgue 
de  la  nouvelle  église  paroissiale  de  Saint-Denis,  construite  i-uus  la  direc- 
tion du  célèbre  architecte  ViolIet-le-Duc.  MM.  Ad.  Delahaye,  organiste  de 
Saint-Denis,  Edouard  Batiste,  Renaud  de  Vilbac  et  'Vasseur,  organiste  de 
Versailles,  ont  dû  faire  apprécier  les  qualités  très-remarquables  de  ce 
nouvel  orgue  construit  dans  les  ateliers  de  la  Société  anonyme  Merklin- 
Schutze,  à  Paris;  la  Société  chorale  les  Enfants  de  Saint-Denis,  sinis  la 
direction  de  Victor  Desmet,  prêtait  son  concours  à  celte  intéressante  so- 
lennité. 

***  La  cérémonie  de  la  clôture  de  l'année  scolaire  du  Gymnase  de 
Salzbourg  s'est  signalée  par  une  particularité  très-intéressante.  Le  pro- 
fesseur de  chant  a  fait  exécuter  une  composition  classique  âgée  de  trois 
siècles  :  des  odes  d'Horace  pour  quatre  voix,  de  Paul  Hochhaimer,  un 
organiste  célèbre,  que  l'empereur  Maximilien  nomma  chevalier  à  cause 
de  son  mérite  hors  ligne.  Les  odes  d'Horace  en  musique  furent  publiées 
en  1339  à  Nuremberg,  dans  un  recueil  intitulé  :  Harmoniœ  pomicœ  Vauli 
Hochhaimeri.  Pour  les  faire  exécuter  aujourd'hui,  le  professeur  de  Salz- 
bourg a  dû  Ips  transcrire  avec  les  signes  des  notes  de  la  musique  mo- 
derne. D'après  les  journaux  allemands,  cette  musique  a  produit  une 
grande  impression  sur  l'auditoire  ;  la  manière  de  Hochhaimer  ressemble- 
rail  beaucoup  à  celle  de  Palestrina 

^*,  M.  Eusèbe  Lucas,  chef  d'orchestre  au  Casino  de  Monaco,  vient  de 
publier  dans  cette  ville  une  brochure  intitulée  VOrchesIre  et  le  public, 
pleine  d'idées  fort  justes  et  élégamment  exprimées  sur  la  musique  ei;  les 
grands  maîtres  de  toutes  les  écoles,  et  qui  mérite  de  devenir  le  vado 
mecum  de  l'amateur  sérieux. 

***  La  maison  d'édition  Schott,  établie  déjà  à  Mayence,  Bruxelles, 
Londres  et  Paris,  vient  de  fonder  une  nouvelle  succursale  à  Francfort- 
sur-le-Mein . 

***  Une  Marche  impériale,  composée  en  1830,  par  la  reine  Hortense 
au  château  d'Arenberg  (Suisse),  sur  des  paroles  deM.  Belmonlet,  aujour- 
d'hui député  au  Corps  législatif,  vient  d'être  arrangée  par  M.  Bousquet 
et  publiée  par  l'éditeur  Latte.  S'il  faut  en  croire  une  lettre  adressée  par 
le  poëte  à  l'éditeur  et  reproduite  par  VEpoque,  cette  Marche  serait  tout 
simplement  un  chef-d'œuvre  dont  la  popularité  est  destinée  à  effacer  celle 
de  l'air  fameux  :  Partant  pour  la  Stjrie. 

si,*^  Les  festivals  et  les  concerts-monstres  ne  datent  pas  d'hier.  Le 
prince  électeur  Jean-Georges  de  Saxe  en  organisa  un  à  Dresde,  le 
13  juin  1613,  pour  l'exécution  d'une  espèce  d'oratorio  intitulé  Holopherne, 
dont  les  paroles  étaient  do  Pflaumenkern  et  la  musique  de  Grundmauer. 
On  réunit  pour  cette  solennité  1,493  musiciens,  —  ou,  comme  on  disait 
alors,  joueurs  d'instruments,  Spielleute,  —  Allemands,  Italiens,  Polonais 
et  Suisses.  Le  contrebassiste  Rakotzky  vint  deCracovie  avec  un  instrument 
haut  de  plus  de  7  pieds  allemands.  La  partie  principale  fut  chantée  par 
un  étudiant  de  Wittenberg,  nommé  Runder.  En  guise  de  timbales,  on 
se  servit  d'un  grand  canon  qu'on  lirait  aux  endroit  marqués. 

**»  On  annonce  la  mort  à  Perpignan  du  violoniste-compositeur  Joseph 
Lomagne,  fondateur  du  Conservatoire  de  cette  ville. 

ÉTRANGER 

3^*^,  Londres.  —  Ou  construit  dans  le  Strand,  un  théâtre  qui  prendra 
le  nom  de  théâtre  de  la  Gaîié;  le  directeur,  M.  Holingshead,  a  l'inten- 
tion d'y  jouer  l'opérelle,  le  drame  et  le  vaudeville. 

^*^  Amsterdam.  —  Ces  jours  derniers  a  eu  lieu  un  concours  internatio- 
nal d'orphéons,  auquel  ont  pris  part  deux  sociétés  lyriques  hollandaises, 
une  prussienne  et  une  française,  celle  des  orphéonistes  d'Arras  Après 
l'exécution  de  plusieurs  chœurs,  interprétés  d'une  façon  remarquable  par 
les  différentes  sociétés  admises  au  concours,  le  premier  prix  a  été  dé- 
cerné, à  l'unanimité,  à  ['Orphéon  d'.irras,  dirigé  par  M.  Duhaupas. 

^*^  Hombourg.  —  Pour  sa  première  soirée,  Adelina  Patti,  toujours 
charmante  et  mieux  en  voix  que  jamais,  a  joué  Lucia  le  14.  Le  roi  de 
Prusse,  arrivé  la  veille,  assistait,  ainsi  que  le  prince  Albert,  à  celte  re- 
présentation. La  salle  était  comble,  et  l'acharnement  qu'on  avait  mis  à 
se  disputer  les  places  n'a  eu  d'égal  que  le  succès  fait  à  la  gracieuse  diva. 
Elle  a  dii  répéter  la  cabalette  S/Jorr/J  d'amore  pianlo.  Fleurs  et  bravos  lui 
ont  été  prodigués;  la  loge  royale  donnait  l'exemple.  Mardi,  Don  Pa^qmle 
a  suivi  Lucia;  même  enthousiasme  traduit  d'une  façon  aussi  significa- 
tive. Le  roi  de  Prusse  étail  encore  présent,  et  n'est  piirti  qu'à  la  fin. 
Naudin,  qui  a  chanté  à  ravir  le  nociurne  du  3°  acte;  Verger,  charmant 


dans  le  rôle  du  docteur;  et  Ciampi,  qui  donne  un  grand  relief  à  celui 
de  Don  Pasquale,  ont  pris  leur  bonne  part  des  applaudis.semenis.  — 
Samedi  prochain,  Semiramide,  avec  Adelina  Patti,  Eleonora  Grossi  et 
Agnesi . 

^%  Bade.  —  L'administration  commence  à  s'occuper  des  fêtes  musi- 
cales qui  vont  se  succéder  presque  sans  interruption.  Le  22,  concert  au 
bénéfice  de  M.  Peruzzi,  avec  le  concours  de  Mmes  Viardol,  Monbelli  et 
Damain,  de  MM.  Cossmann,  violoncelliste,  Ecker  et  Saint-Germain.  Le 
29  ou  le  30,  grand  concours-festival  de  toutes  les  musiques  militaires 
badoises  ;  en  septembre,  concerts,  festivals  et  représentations  allemandes 
et  italiennes,  à  l'occasion  des  courses  d'iffelzheim  :  Lohençjrin,  Don 
Juan,  Martha,  h  Postillon  de  Lonjumeaa,  Korma  et  la  facorite,  fous  la 
direction  de  l'imprésario  Pollini,  et  enfin  trois  grands  concerts  ;  un  au 
bénéfice  de  Mlle  de  Murska,un  autre  auquel  prendront  part  Mlle  Nilsson, 
Faure,  Capoul,  et  un  dernier  pour  célébrer  l'anniver.saire  de  la  naissance 
de  S.  A.  le  grand-duc.  Deux  grands  bals  parés  .sont  en  outre  annoncés, 
sous  l'habile  direction  d'Arban.  —  Le  dimanche  9 août,  une  fête  musicale 
réunissait  une  société  d'élite  à  la  villa  Viardol.  Mme  Viardol  s'y  est 
montrée  grande  cantatrice,  comme  à  son  ordinaire,  et  de  plus  organiste 
de  talent  ;  — elle  a  joué  une  fugue  de  Bach  pour  orgue;  ses  élèves  lui 
ont  fait  honneur,  c'est  tout  dire  !  Ambroise  Thomas  esl  invité  au  festi- 
val du  11  septembre,  oii  Faure  et  Mlle  Nilsson  doivent  chanter  des  frag- 
ments à'Hamtet. 

*%  Wiesbaden.  —  Léonard  s'est  fait  entendre  vendredi  au  concert  or- 
ganisé au  Kursaal,  en  l'honneur  du  roi  de  Prusse;  il  a  eu  un  succès 
colossal  et  a  été  rappelé  à  plusieurs  reprises.  Mlle  Artôt  a  été  étouidis- 
sante  de  brio  et  de  verve,  jamais  sa  voix  n'a  semblé  plus  splendide. 
Naudin,  malgré  une  fatigue  apparente,  a  captivé  l'auditoire  parle  char- 
me de  sa  voix  et  de  sa  ravissante  mezsa-voce.  Les  frères  Thern  ont  dii 
faire  entendre  une  deuxième  fois  la  fameuse  Marcia  alla  Turca  de 
Beethoven,  qu'ils  enlèvent  avec  un  ensemble  et  une  verve  incompa- 
rables. 

^%  Berlin.  —  Les  représentations  de  ballet  ont  recommencé,  le  5,  à 
l'Opéra  par  Flick  et  Flock,  suivi  de  la  Sylphide.  —  Le  théâtre  de  Frie- 
drich-Wilhelmstadt  a  repris  avec  un  très-grand  succès  Coscoletto,  d'Of- 
fenbach,  donné  il  y  a  quelques  années  au  Wallner-Theater.  —  Au  théâtre 
de  Krull,  qui  continue  à  donner  d'excellentes  représentations  d'opéraj 
Mme  Mayr-Olbrich  s'est  fait  chaleureusement  applaudir  dans  le  FmscÂute, 
pour  sa  soirée  d'adieu  ;  elle  n'avait  pas  moins  bien  réussi  dans  le 
Trouvère. 

»*»  Dresde.  —  Trois  opéras  sont  à  l'étude  au  théâtre  royal  :  Die  Hai- 
deschacht  (le  Puits  de  la  Lande)  de  M.  Holstein;  Ondine  de  Lortzing,  et 
les  Meistersinger  de  Richard  Wagner. 

^*.^  Darmsiadt.  —  Le  sixième  festival  du  Rhin  central  aura  lieu  ici , 
les  27  et  28  septembre,  sous  la  direction  de  C.  Mangold.  On  y  exécutera 
le  Samson  de  Hsendel,  la  Symphonie  en  la  de  Beethoven,  des  Motets  de 
Séb.  Bach  et  la  2°  partie  du  Frithjof  de  Mangold. 

^*t.  Nuremberg.  —  Le  27  juillet  a  été  donné  un  concert  pour  contri- 
buer à  élever  un  monument  à  Hans  Sachs.  Sans  les  Maîtres  chanteurs, 
on  n'y  etit  sans  doute  pas  pensé. 

.n*^  Milan.  —  La  saison,  à  la  Scala,  s'ouvrira  avec  les  Huguenots.  Il 
est  question  ensuite  du  Don  Carlos  de  Verdi,  et  d'un  nouvel  ouvrage  de 
Pelrella,  Giovanna  di  Napoli. 

»*^  Venise.  —  La  direction  de  la  Fenice  est  confiée  à  un  nouvel  im- 
présario, le  fabricant  de  pianos  Malipiero,  qui  s'aidera  de  l'expérience  et 
des  conseils  de  son  prédécesseur  Monari-Rocca.  Il  a  engagé  jusqu'ici  les 
piime  donne  Galletti-Gianoli  et  Blume,  le  ténor  Villaui  et  le  baryton  Col- 
lini.    , 

.^*^,  Barcelone.  —  La  troupe  française  d'opéra-comique  obtient  dans  la 
capitale  de  la  Catalogne  une  très-grande  vogue.  On  a  donné  le  Domino 
noir,  la  Fille  du  Régiment,  les  Dragons  de  Villars  et  en  dernier  lieu  le 
Songe  d'une  Nuit  d'été,  d'Ambroi&e  Thomas,  dans  lequel  Mlle  Mathilde 
Dupuy,  MM.  Blum  et  Brion  d'Orgeval  ont  été  justement  applaudis. 


—  Rectification.  —  Dans  l'article  de  notre  dernier  numéro  sur 
les  Théâtres  lyriques  secondaires  de  Paris,  lisez  {passim)  «  Pierre  Ber- 
nard, »  au  lieu  de  «  Eric-Bernard.  » 


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N'  35. 


REVUE 


30  Août  1868. 


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Le  Journul  parall  le  Dimoaclie. 


GAZETTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


Nos  abonnés  reçoivent,  avec  le  nuiuéro  d'anjoard'bnl, 
Sonnet,  préInde  pour  le  piano,  par  SVEPHEIV 
HEIililiB. 


SOMMAIRE.  —  La  Jeunesse  de  Goœthe.  —  Revue  des  théâtres,  par  D.  A. 
D.  Salnt-lfïe».  —  Nouvelles  des  théâtres  lyriques.  — Nouvelles  diverses. 
—  énonces. 


LÀ  JEUNESSE  DE  GŒTHE. 

Le  Tribunal  civil  de  la  Seine  (l^"  chambre)  a,  dans  son  au- 
dience du  vendredi  28  août,  prononcé  son  jugement  dans  le  pro- 
cès intenté  par  M.  H.  Blaze  de  Bury  aux  héritiers  Meyerbeer,  en 
revendication  de  la  musique  composée  par  l'illustre  maître  pour  le 
drame  intitulé  la  Jeunesse  de  Gœthe. 

Voici  la  teneur  de  ce  jugement  : 

«  Le  Tribunal, 

»  Attendu  que  le  testament  de  Meyerbeer  contient  l'ordre  formel  de 
sceller  dans  un  coffre  spécial,  avec  défense  expresse  de  livrer  à  d'autres 
qu'à  ses  petits-enfants,  dans  certaines  conditions  et  sans  exception,  les 
cahiers  manuscrits  contenant  ses  pensées,  esquisses,  morceaux  inachevés 
et  compositions  non  publiées  au  moment  de  son  décès  ; 

»  Attendu  que  cette  expression  de  dernière  volonté  porte  l'empreinte 
d'une  préoccupation  tellement  respectable,  qu'il  faudrait  que  les  preuves 
d'une  volonté  contraire  fussent  bien  évidentes,  et  que  le  droit  à  en  mé- 
connaître les  conséquences  fût  bien  établi  pour  qu'il  pût  être  permis 
d'y  porter  atteinte  ; 

»  Attendu  que  la  convention  dont  se  prévaut  le  demandeur  n'a  jamais 
eu  un  caractère  suffisamment  fermé  et  déiinilif  pour  servir  de  base  à 
une  réclamation  judiciaire  ; 

»  Qu'il  résulte  de  la  correspondance  de  Meyerbeer  avec  Blaze  de  Bury 
que  ce  dernier  n'avait  fourni  que  de  vagues  indications  au  sujet  du 
drame  dont  un  acte  seulement  devait  être  accompagné  de  musique ,  et 
qu'au  moment  où  ladite  correspondance  s'est  arrêtée,  entre  le  poëte  et  le 
compositeur,  Meyerbeer  hésitait  encore  sur  certaines  combinaisons  mu- 
sicales ou  scéniques,  et  se  réservait  de  les  modifier; 

»  Attendu  que  Blaze  de  Bury  ne  peut  pas  davantage  se  prévaloir  d'une 
prétendue  collaboration  de  fait  qui  aurait  existé  entre  lui  et  Meyerbeer, 
de  laquelle  pourrait  résulter  en  sa  faveur  un  droit  de  copropriété  sur 
une  œuvre  commune  et  indivisible  ; 

»  Attendu  que,  s'il  peut  être  juridiquement  admis  que  le  poëme  et  la 


musique  d'un  opéra  ne  constituent  pas  deux  propriétés  distinctes  et  in- 
dépendantes et  ne  forment  qu'une  seule  et  indivisible  propriété,  ce 
principe  n'est  applicable  que  lorsque  le  travail  du  poëte  et  celui  du  mu- 
sicien se  composent  d'un  mutuel  échange  d'idées  et  d'inspirations,  sans 
lequel  l'ensemble  de  l'œuvre  ne  pourrait  avoir  d'existence; 

»  Attendu  qu'il  n'en  est  pas  ainsi  dans  l'espèce  où  le  drame  existe 
indépendamment  de  tout  accessoire  musical,  et  où  la  partition  elle-même 
est  tellement  indépendante  de  l'œuvre  dramatique,  qu'il  apparaît  encore 
de  la  correspondance  que  le  texte  de  cette  œuvre  n'a  jamais  été  connu 
du  compositeur; 

»  Attendu,  enfin,  qu'en  laissant  s'écouler  plusieurs  années  avant  d'in- 
troduire sa  demande,  Blaze  de  Bury  semble  avoir  compris  combien,  en 
l'état  de  la  cause,  il  était  impossible  de  contraindre  Meyerbeer  vivant  à 
se  dessaisir  d'une  œuvre  destinée  à  rester  sa  propriété  personnelle, 
et  combien,  à  plus  forte  raison,  il  est  impossible  aujourd'hui  d'y  con- 
traindre ses  héritiers  dépositaires  fidèles  de  ses  dernières  volontés; 

»  Par  ces  motifs, 

»  Déclare  Blaze  de  Bury  mal  fondé  en  sa  demande,  l'en  déboute  et 
le  condamne  aux  dépens.  » 

L'avocat  impérial,  M.  Chevrier,  avait  conclu  au  rejet  de  la  de- 
mande de  M.  Blaze  de  Bury  par  les  motifs  que  voici  : 

Nous  n'oserions  donner  notre  avis  sur  une  question  aussi  délicate, 
si  d'avance  nous  n'en  avions  fait  le  sujet  de  nos  réflexions.  Il  serait 
souhaitable  qu'une  œuvre  nouvelle  de  Meyerbeer,  son  chef-d'œuvre  peut- 
être,  parût  sur  la  scène.  Mais  nous  devons  dire  avant  tout  qu'il  nous 
semble  bien  difficile,  pour  ne  pas  dire  impossible,  d'accorder  à  M.  Blaze 
de  Bury  ce  qu'il  vous  demande  par  ses  conclusions. 

La  question  délicate  qui  vous  est  soumise  peut  être  envisagée  à  trois 
points  de  vue  :  1»  Le  testament  de  Meyerbeer,  contenant  sa  volonté 
expresse  et  formelle  d'ôter  de  ses  papiers  et  de  renfermer  dans  un  coffre 
toutes  ses  parties  musicales  et  ses  compositions  inédites,  s'apphque-t  il  à 
la  musique  qu'il  a  composée  spécialement  pour  le  drame  de  M.  Blaze  de 
Bury,  la  Jeunesse  de  Gœthe?  2»  Y  at-il  eu  entre  M.  Blaze  de  Bury  et 
Meyerbeer  une  convention  qui  lie  le  grand  compositeur  à  l'auteur  du 
drame,  et  après  lui  ses  héritiers ,  et  qui  ait  amené  entre  eux  une  véri- 
table collaboration?  3°  En  l'absence  d'une  convention,  existe-il  un  prin- 
cipe de  droit  supérieur  que  puisse  invoquer  M.  Blaze  de  Bury? 

Vous  connaissez  le  testament  de  Meyerbeer.  On  vous  a  lu  l'article  18 
de  ce  testament  qu'on  veut  appliquer  à  la  cause.  Meyerbeer  ordonne  que 
tous  ses  cahiers  contenant  ses  pensées  et  ses  compositions  non  publiées, 
soient  renfermés,  cachetés  et  gardés  dans  un  coffre  spécial.  Eh  bien! 
la  Jeunesse  de  Gœthe,  dont  M.  Blaze  de  Bury  réclame  la  partition,  a-t-elle 
été  publiée?  Dans  l'intention  de  Meyerbeer,  cette  partition,  cette  mu- 
sique ,  comme  on  voudra  l'appeler,  devait-elle  être  renfermée  dans  le 
coffre  dont  il  a  parlé? 

Permettez-moi  de  vous  citer  un  exemple  tiré  du  testament  même  de 
Meyerbeer  et  qui  est  de  nature  à  éclaircir  la  difficulté,  si  c'est  possible. 
Meyerbeer,  en  faisant  son  testament,  laissait  une  œuvre  qui  ne    devait 


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UEVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


ùlre  représentée  qu'après  sa  mort.  Ce  n'était  pas,  à  vrai  dire,  une  œuvre 
nouvelle,  puisqu'elle  avait  été  le  fruit  de  vingt  années  de  sa  vie  :  Je 
veux  parler  de  Vasco  de  Gama,  qui  a  été  représenté  sous  le  titre  de 
VAfrknine.  L'opéra  de  Vasco  de  Gama,  au  moment  où  Meyerbeer  faisait 
son  testament,  n'avait  pas  été  publié;  il  foUait  donc  faire  pour  lui  une 
exception  si  Meyerbeer  voulait  qu'il  fût  représenté.  Aussi  a-t-il  eu  soin 
d'excepter  de  la  règle  générale  qui  condamnait  ses  œuvres  inédites  à  un 
oubli  momentané  sa  dernière  compositiou  achevée  et  prête  pour  la  scène, 
Vasco  de  Gama.  Ainsi,  le  sens  du  testament  ne  peut  être  douteux,  Meyer- 
beer a  voulu  qu'aucune  des  œuvres  non  publiées  de  son  vivant  ne  fut 
publiée  après  sa  mort,  et  la  Jeu7Kssi!  de  Gœthe  n'a  pas  été  comprise  dans 
l'exception,  qui  s'applique  seulement  à  Vasco  de  Gama. 

Sur  ce  point,  M.  Blaze  de  Bury  doit  perdre  son  procès,  à  moins  qu'il 
ne  puisse  se  prévaloir  d'une  convention  expresse  arrêtée  entre  lui  et 
Meyerbeer.  Y  a-t-il  eu  une  convention?  Oui,  mais  la  difficulté  est  d'en 
apprécier  la  portée.  Meyerbeer  s'est-il  engagé  à  composer  pour  le  drame 
de  Mf  Blaze  de  Buiy  une  scène,  ou  un  acte,  ou  bien  encore  à  li\Ter  à 
M.  Blaze  de  Bury  la  musique  qu'il  aurait  composée,  dit-on,  pour  la 
Jeuvesse  ée  Gœthe? 

Si  Meyerbeer  s'étaifengagé  à  livrer  sa  musiqrie,  on  pourrait  se  fonder 
sur  le  retard  dans  la  livraison  pour  demander,  contre  sa  veuve  et  ses 
héritiers,  des  dommages-intérêts  :  c'est  là  une  conclusion  juridique. 
Je  parle  ici  en  organe  sévère  de  la  loi  et  non  en  artiste  ou  en  di- 
letlante. 

Rappelez-vous  la  correspondance  entre  Meyerbeer  et  M.  Blaze  de  Bury. 
Meyerbeer  hésite  sans  cesse  et  jusqu'au  dernier  .jour.  Rappelez-vous  ce 
qu'il  dit  de  la  fameuse  srènc  de  la  cathédrale  de  Faust,  où  il  voulait 
atteindre  au  sublime  de  l'art,  et  Mt-yerbecr,  tourmenté  comme  il  l'était 
de  l'amour  ardent  de  l'idéal,  devait  ôtre  bien  agité  devant  un  pareil  ta- 
bleau, car  je  ne  sache  pas  que  le  génie,  pour  s'exalter,  ait  jamais  ren- 
contré une  scène  plus  dramatique  et  plus  musicale. 

Quelle  scène  aussi  que  celle  du  lioi  des  Aulnes!  Rappelez-vous  l'orage, 
le  père  et  le  fils,  et  ces  paroles  qui  s'échangent  dans  la  tempête,  au 
milieu  des  nuages.  La  poésie  du  drame  n'a  jamais  été  ni  plus  haut  ni 
plus  loin. 

Meyerbeer,  ce  génie  qui  n'était  jamais  satisfait  tant  qu'il  n'avait  pas 
cru  alleindre  la  perfection.  Meyerbeer  savait-il  s'il  développerait  celle 
scène  du  lioi  des  Aulnes,  ou  s'il  mettrait  son  génie  à  la  suite  de  la  mé- 
lodie de  Schubert,  qui  a  fait  sur  ce  sujet  une  page  immortelle'?  Savait- 
il  s'il  mellrait  seulement  celle  mélodie  en  relief  et  s'il  signerait,  lui 
Mcverbeer,  l'œuvre  de  Schubert?  Meyerbeer,  nous  le  croyons,  n'avait 
pas  pris  de  parti  définitif. 

On  a  dit  que  Meyerbeer  avait  composé  celle  scène,  qu'elle  était  dans 
sa  tête  de  musicien  de  génie,  conmie  s'il  l'avait  écrite  et  composée  défi- 
nitivement. On  dit  qu'il  l'avait  faite  comme  Virgile  avait  fait  FEnéide 
avant  d'en  écrire  le  premier  vers. 

Vous  .savez  que  certains  génies,  en  effet,  sont  des  génies  do  premier 
jet  dont  l'œuvre  naît  complète,  comme  Minerve,  tout  armée  sortant  du 
cerveau  de  .lupiter.  Vous  savez  aussi  que  ceriains  autres  génies  poursui- 
vent sans  cesse  l'Idéal ,  qu'ils  désespèrent  d'atteindre.  Les  uns  sont  des 
génies  pleins  de  simplicité  et  de  grandeur,  comme  Phidias  et  Platon. 
D'autres,  au  contraire,  .sont  le  labeur  même,  et  l'elïort  toujours  tendu 
vers  l'idéal.  Ch  génie  armé  de  labeur,  c'était  Meyerbeer;  tel  aussi  était 
Beethoven.  J'aime  à  rassembler  ces  deux  génies.  Mais  les  génies  de  pre- 
mier jet  produisent  leurs  œuvres  comme  la  terre  au  printemps  fait 
éclore  ses  fleurs  au  soleil,  et  parmi  ces  génies  de  la  musique  je  citerai 
Mozart. 

Pour  nous,  il  est  malheureusement  certain  que  Meyerbeer,  tel  que 
nous  l'avons  connu,  n'a  pas  achevé  la  Jeunesse  de  Gœthe  et  qu'il  ne  s'est 
jamais  considéré  comme  obligé  par  une  convention  expresse  à  la  livrer. 
C'est  ce  qui  résulte  des  termes  de  son  testament. 

Y  a-t-il  un  principe  supérieur  sur  lequel  puisse  s'appuyer  la  demande 
de  M.  Blaze  de  Bury?  Ce  principe  ne  saurait  être  autre  que  celui  de  la 
collaboration.  Mais  il  est  un  principe  qui  domine  ici.  C'est  que  chacun 
est  maître  de  sa  gloire,  non-seulement  jusqu'à  son  dernier  soupir,  mais 
même  au  sein  de  la  postérité.  Ce  procès  en  est  un  exemple.  J'ai  en- 
tendu, dans  ce  procès,  citer  un  exemple  qu'il  faut,  ce  me  semble,  reje- 
ter du  débat.  Ruysdaël,  disait-on,  a  fait  un  paysage,  pour  les  fonds  et 
les  terrains,  et  on  ajoutait  :  «  11  ne  savait  pas  faire  autre  chose.  »  Cela 
n'est  pas  exact.  Ruysdaël  savait  faire  autre  chose.  Wouvermans  avait 
placé  là  ses  chevaux  et  ses  cavaliers,  qu'il  savait  faire  à  merveille.  On 
demandait  si  Ruysdaël  pouvait  détruire  le  tableau  ou  le  confisquer.  Je 
réponds  qu'il  y  a  dans  un  tableau  ainsi  fait  une  indivisibilité  qui  ne 
permet  pas  d'admettre  le  droit  exclusif  de  l'un  et  de  l'autre  artiste.  Mais 
il  n'en  saurait  être  de  même  dans  une  composition  musicale,  dans  un 
opéra,  du  droit  du  musicien  et  de  celui  de  l'auteur  du  libretto;  on  peut 
séparer  les  deux  œuvres  inlellectuellement  et  matériellement.  Mais  il  ne 
s'agit  pas  ici  d'un  libretto,  il  s'agit  d'une  scène,  d'un  acte;  sur  les  pa- 
roles de  celle  scène,  de  cet  acte,  le  musicien  a  composé  son  œuvre.  La 
musique,  dans  la  Jeunesse  de  Gœthe,  n'est  véritablement  qu'un  orne- 
ment du  drame,  et  l'indivisibilité  dont  je  parlais  tout  à  l'heure  n'existe 
pas  ici.  Dans  ces  circonstances,  la  collaboration  ne  constitue  pas  un  prin- 


cipe de  droit  qui  puisse  remplacer  une  convention  expresse  qu'on  ne 
peut  représenter.  M.  Blaze  de  Bury  n'a  pas,  suivant  nous,  le  droit  d'exi- 
ger, de  la  part  de  Mme  veuve  Meyerbeer  et  des  hérltier.s  du  grand 
maestro,  la  remise  de  la  parilllon  de  la  Jeunesse  de  Gœthe,  et  alors  nous 
nous  trouvons  en  présence  du  testament  de  Meyerbeer,  qui  a  exprimé 
sa  volonté  de  la  manière  que  vous  savez. 

Espérons  que  loutes  ces  pensées  musicales,  ces  compositions  inédites 
qui  dorment  aujourd'hui  dans  le  coffre  où  elles  ont  été  placées  par  la 
main  pieuse  de  Mme  veuve  Meyerbeer,  se  réveilleront  un  jour,  et  qu'un 
des  petits-enfants  du  grand  compositeur,  appelé  à  son  tour  dans  la  car- 
rière musicale  par  une  vocation  véritable,  viendra  couronner  de  ce  lau- 
rier posthume  la  statue  de  son  immortel  aïeul. 

Si  l'on  quitte  le  terrain  juridique,  si  l'on  envisage  au  point  de  vue 
légal  le  résultat  de  ce  procès  que  doit  perdre  M.  Blaze  de  Bury  ;  si  nous 
pouvons  parler  un  moment  en  amateur  de  l'art,  en  admirateur  éclairé 
du  génie  de  Meyerbeer,  nous  n'avons  à  exprimer  que  des  regrets.  L'a- 
vocat de  M.  Blaze  de  Bury  était  le  premier  à  vous  dire  que  c'était  un 
deuil  pour  l'art  de  ne  pas  assurer  à  la  mémoire  de  Meyerbeer  un  nou- 
veau laurier.  Nous  nous  associons  à  cette  pensée.  Mais,  hélas!  la  fortune 
est  changeante  et  mobile,  et-c'est  prudence  peut-être  d'épargner  â  la 
gloire  de  Meyerbeer  le  hasard  d'une  forlune  nouvelle.  Nous  e.>tiraons 
qu'il  y  a  lieu  de  rejeter  la  demande  de  M.  Blaze  de  Bury. 

Quoique  notre  intention  première  eiàt  éUS  de  reproduire  seule- 
ment la  remarquable  plaidoirie  de  JP  Crémieux,  l'intérêt  qui 
s'attache  à  tout  ce  qui  concerne  l'immortel  auteur  des  Huguenots 
et  les  faits  curieux  révélés  par  l'instance,  nous  ont  paru  imposer 
à  la  Revue  cl  Gazelle  musicale  le  devoir  de  consigner  dans  ses 
colonnes  tous  les  détails  de  cette  cause  qui  marquera  dans  l'his- 
toire de  l'art  musical.  Nous  donnons  donc,  dans  ce  numéro,  la 
plaidoirie  de  M"  Le  Berquier,  avocat  du  demandeur,  et  nous  don- 
nerons dimanche  celle  de  M"  Crémieux  pour  les  héritiers  Meyerbeer. 

M"  Le  Berquier  a  exposé  la  demande  en  ces  termes  : 

Messieurs,  il  s'agit  dans  cette  affaire  de  la  dernière  composition  musi- 
cale de  Meyerbeer,  d'un  drame  lyrique  inédit,  la  Jeunesse  de  Gœthe. 
Je  viens  au  nom  de  M.  Blaze  de  Bury,  je  serais  tenté  de  dire  au  nom  de 
tous  les  admirateurs  du  grand  musicien,  demander  à  sa  veuve  et  à 
ses  héritiers  la  restitution  de  cette  œuvre  qui  n'était  point  exclusivement 
la  sienne,  qui  est  le  résultat  d'une  collaboration  et  que  sa  famille  ne 
saurait  retenir.  Quelle  est  celle  œuvre?  Comment  se  Irouve-t-elle  en  la 
possession  des  hériliers  de  Meyerbeer?  Pourquoi  ceux-ci  veulent-ils  la 
conserver?  C'est  ce  que  je  vais  immédiatement  indiquer  au  Tribunal. 

Meyerbeer  avait  connu  Gœthe  et  était  resié  l'admirateur  passionné  de 
ses  œuvres.  11  y  avait  entre  ces  deux  hommes  de  puissantes  sympathies 
et  peut-être  étalent-ils  attirés  l'un  vers  l'autre  par  la  nature  même 
de  leur  génie.  Selon  Gœthe,  il  n'y  avait  que  deux  compositeurs  qui  fus- 
sent à  même  de  le  bien  comprendre,  Mozart  et  Meyerbeer.  Apres  la  mort 
de  Mozart,  il  avait,  dit-on  songé  à  Mej'crbeer  pour  un  Faust,  et  la 
préoccupation,  on  peut  dire  l'ambilicn  de  toute  la  vie  de  Meyerbeer  fut 
de  traiter  ce  grand  sujet. 

Mais  Spohr  s'en  était  emparé  en  Allemagne;  Gounod  l'avait  repris  en 
France  au  grand  chagrin  de  Meyerbeer,  qui  avait  dans  son  génie  musical 
idéalisé,  pour  ainsi  dire  à  l'avance,  tous  les  personnages  du  drame.  Il 
n'est  personne  ayant  approché  l'éminent  maître  qui  ne  l'ait  vu  s'enflam- 
mer sur  ce  sujet.  On  affirme  qu'un  jour,  devant  le  chevalet  d'Ary 
Scheffer  où  s'achevait  la  gracieuse  figure  de  Mignon,  il  s'écria  :  «  Quelle 
dommage  que  je  ne  puisse  mettre  cette  peinture  en  musique  !  —  Bah! 
reprit  le  peintre,  essayez  donc,  et  je  suis  convaincu  que  vous  n'y  réus- 
sirez pas  trop  mal.  —  Vous  croyez?  Eh  bien,  je  tâcherai.  »  Mais  les  an- 
nées s'écoulèrent,  et  peut-être  Meyerbeer  n'eût-il  rien  écrit  sur  les 
conceptions  de  Gœthe  sans  l'incident  qui  nous  conduit  au  procès 
même. 

Un  de  nos  écrivains  distingués,  M.  Blaze  de  Bury,  dont  je  n'ai  pointa 
faire  l'éloge,  avait  donné  à  l'Odéon  une  pièce  ayant  pour  titre  :  La  Jeu- 
nesse de  Gœthe.  C'était  un  drame  où  se  développait  toute  la  vie  du  poêle. 
Il  y  avait,  au  troisième  acie,  une  scène  de  nuit  ;  M.  de  la  Rounat,  qui 
n'est  pas  seulement  un  habile  directeur,  mais  qui  est  aussi  un  artiste 
consommé,  exprima  l'avis  qu'il  y  avait  là  un  puissant  effet  à  tirer  de  la 
musique.  Selon  lui,  il  fallait  introduire  dans  cette  partie  de  la  pièce, 
non  cet  accompagnement  incolore  et  à  l'unisson  des  mélodrames,  mais 
une  véritable  composition  adaptée  à  la  situation  même.  Evidemment, 
cela  dépassait  la  collaboration  ordinaire  des  chefs  d'orchestre.  «  Si  j'en 
parlais  à  Meyerbeer  !  »  dit  M.  Blaze  de  Bury.  M.  de  la  Rounat  ne  com- 
prit pas,  ou  plutôt  il  crut  à  une  plaisanterie;  mais  quand  bientôt  son 
interlocuteur  revint  avec  la  promesse  formelle  du  grand  compositeur,  il 
fallut  bien  se  rendre.  Que  s'était-il  passé?  Le  voici  : 

M.  Blaze  de  Bury,  qui  vivait  dans  l'intimité  de  Meyerbeer,  savait  sa 
prédilection  pour  tout  ce  qui  touchait  à  Gœthe.  11  s'était  hâté  d'écrire  un 


DE  PARIS. 


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scénario,  tout  un  acte  qui  pût  être  musicalement  traité,  et  l'avait  porté 
à  Meyerbeer,  en  lui  expliquant  la  place  qu'il  lui  destinait  dans  sa 
pièce.  «  Mais  c'est  une  partition  que  vous  me  demandez?  lui  dit  celui-ci, 
après  avoir  lu  le  travail.  —  Eh!  sans  doute,  reprit  M.  Blaze  de  Bury  ; 
mais  il  s'agit  de  votre  ami  Gcethe!  »  Une  semaine  après,  Meyerbeer  dé- 
clarait accepter  la  collaboration,  et,  plein  de  son  sujet,  à  la  grande  sur- 
prise de  l'écrivain,  il  en  esquissait  l'ensemble  à  grands  traits,  et  déjà 
chaque  personnage  avait  pris  son  rôle  dans  son  imagination. 

Il  ne  suivait  point  l'auteur  dans  la  marche  du  drame  :  il  laissait  l'ac- 
tion se  développer  jusqu'au  troisième  acte,  et  puis  là,  comme  ill'a  écrit, 
il  intervenait  avec  sa  cataracte,  c'est-à-dire  avec  son  orchestre,  ses  chœurs, 
ses  orgues,  et  rendait,  par  la  puissance  de  la  musique,  tous  les  déchi- 
rements du  jeune  poëte,  et  le  montrait  invoquant  dans  son  imagination 
ce.s  étranges  personnifications  que  connaît  aujourd'hui  le  monde  entier  : 
Faust,  Marguerite,  le  Roi  des  Aulnes  !  Telle  était  la  composition  qui,  du 
premier  coup,  s'était  fixée  dans  le  cerveau  du  grand  cliercheur  d'effets. 

Ceci  se  passait  en  18o9.  Le  manuscrit  de  cet  acte  nouveau  du  drame, 
car  c'était  un  acte  tout  entier,  fut  remis  à  Meyerbeer,  et  le  poète  attendit 
le  musicien  ;  il  attendit  respectueusement  comme  il  convient  quand  c'est 
le  génie  qui  se  recueille,  ne  témoignant  .ses  impatiences  qu'avec  M.  de 
la  Rounat,  plus  capable  que  personne  de  les  comprendre.  Il  se  trahit 
toutefois  dans  une  lettie  du  mois  de  mars  1860;  mais  Meyerbeer,  un  peu 
piqué,  lui  répondit  aussitôt  en  ces  termes  : 

«  Berlin,  10  mars  1860. 
»  Mon  cher  ami, 

»  C'est  avec  un  double  plaisir  que  j'ai  reçu  votre  aimable  lettre  ; 
d'abord  vous  m'y  donnez  de  vos  nouvelles  et  puis  vous  savez  combien 
j'aime  tout  ce  qui  sort  de  votre  plume  spirituelle  et  philosophique. 

»  Vous  avez  l'air,  mon  cher  ami,  de  douter  un  peu  que  je  tienne  la 
parole  que  je  vous  ai  donnée  de  mettre  en  musique  la  scène  du  qua- 
trième acte  de  votre  drame  de  Gœthe,  scène  que  vous  m'avez  remise  à 
mon  départ  de  Paris  et  dont  je  vous  ai  promis  d'achever  la  composition 
pour  cet  automne,  époque  à  laquelle  m'avez-vous  dit,  votre  drame  doit 
entrer  en  répétition.  Je  n'ai  jamais  failh  à  mes  promesses  envers  qui  que 
ce  soit,  et  ce  ne  sera  pas  vis-à-vis  d'un  ami  tel  que  vous  que  j'y  man- 
querai pour  la  première  fois. 

»  Vous  ne  me  parlez  pas  de  votre  tragédie  de  Pétrarque,  que  vous 
aviez  l'intention  de  donner  cet  hiver  à  l'Odéon;  l'ouvrage  n'est-il  pas 
achevé ,  ou  bien  des  difficultés  de  théâtre  vous  empêchent-elles  de  la 
donner?  Vous  savez  combien  tout  ce  qui  a  trait  à  vous,  mon  cher  ami, 
et  à  vos  poétiques  productions,  m'inspire  d'intérêts 

»  Veuillez  me  rappeler  au  souvenir  de  Mme  de  Bury,  de  M.  et  Mme 
Buloz,  mais  avant  tout  et  surtout  à  celui-de  mes  charmantes  protectrices, 
de  mes  bon  avocats,  Mlle  Marie  Buloz  et  Mlle  Zetta  de  Bury.  Dites-leur 
en  même  temps,  s'il  vous  plait,  qu'on  publiera  incessamment  la  marche 
que  j'ai  composée  pour  la  fête  de  saint  Gilles  à  Paris,  et  que  j'ai  donné 
ordre  à  mon  éditeur  d'en  offrir  un  exemplaire   à  chacune  d'elles. 

»  Adieu  et  mille  compliments  affectueux  de  votre  tout  dévoué, 

»  Meyerbeer.  » 

J'ai  lu  cette  lettre  jusqu'au  bout,  afin  de  montrer  au  Tribunal  quelle 
était  la  nature  des  rapports  qui  existaient  entre  les  deux  collaborateurs. 
Cependant,  plus  de  six  mois  s'étaient  écoulés,  et  rien  n'était  encore 
arrivé  de  Berlin.  M.  de  la  Rounat,  à  qui  revenait  la  pièce,  commençait 
à  s'impatienter.  D'ailleurs,  était-il  bien  sur  que  Meyerbeer  écrirait  cet 
intermède?  Ce  doute,  M.  Blaze  de  Bury  déclara  qu'il  ne  pouvait  l'accepter, 
et  il  en  fit  part  à  Meyerbeer;  celui-ci  donna  alors  à  sa  promesse  la  forme 
d'un  véritable  engagement.  Comment  en  douter?  Ils  se  voyaient  tous  les 
jours  à  Paris,  et  c'est  de  Paris  que  Meyerbeer  écrit  à  son  collaborateur 
et  ami  en  ces  termes  : 

«  Paris,  ce  2  septembre  1860. 
»  Mon  cher  Henri  ! 

»  Je  me  rends  avec  plaisir  au  désir  que  vous  m'avez  manifesté  de 
mettre  en  musique  la  grande  scène  qui  forme  le  troisième  acte  de  votre 
drame,  la  Jeunesse  de  Gœthe,  que  vous  destinez  maintenant  au  Théâtre- 
Français  ou  à  rOdéon;  et  je  vous  promets  de  vous  livrer  ma  musique 
le  10  mai  prochain  pour  que  l'ouvrage  soit  représenté  dans  le  courant 
de  la  saison,  mais  sous  la  condition  expresse  que  celui  des  deux  théâtres 
ci-dessus  mentionnés  qui  jouera  la  Jeunesse  de  Gœthe  engagera,  pour  les 
représentations  de  cet  ouvrage,  tout  l'orchestre  et  tous  les  chœurs  du 
Théâtre-Italien  de  Paris,  et,  en  outre,  deux  chanteurs  et  deux  chanteuses 
à  mon  choix,  pour  chanter  les  rOles  de  Mignon,  de  Gretchen,duRoi  des 
Aulnes  et  du  père. 

»  Si  la  pièce  n'était  pas  jouée  le  lo  de  juin,  je  ne  pourrais  plus  don- 
ner ma  musique  que  pour  le  13  septembre.  Je  vous  expliquerai  de  vive 
voix,  cher  Henri,  la  raison  de  cette  dernière  condition.  Il  est  convenu 
aussi  que  \ous  aurez  la  bonté  de  m'écrire  le  10  mars,  à  Berlin,  si  le 
théâtre  a  pris  avec  vous  un  engagement  par  écrit  de  représenter  votre 
ouvrage  à  l'époque  et  aux  conditions  mentionnées  sur  celte  lettre  (pour 
ma  gouverne). 

•  Votre  tout  dévoué,  »  Meyerbeer.  » 


Voilà  donc  un  engagement  formel.  Maintenant,  je  veux,  sans  aller  plus 
loin,  répondre  à  une  préoccupation  qui  a  pu  s'emparer  de  vos  esprits. 
Vous  vous  demandez  peut-être  si  cet  ouvrage  a  été  réellement  composé, 
et  s'il  a  été  composé,  vous  pouvez  encore  vous  étonner  qu'il  n'ait  point 
été  représenté.  Grâce  à  Dieu,  la  correspondance  va  se  charger  de  tout 
expliquer,  et  dans  la  lettre  que  voici,  vous  allez  voir  que  Meyerbeer  an- 
nonce que  l'ouvrage  est  terminé,  et  désormais  il  ne  parlera  plus  que  de 
sa  partition  : 

»  Berlin,  le  28  janvier  1861. 
»  Mon  cher  ami, 

»  Depuis  six  semaines,  j'ai  complètement  terminé  la  musique  de 
l'acte  que  vous  m'avez  chargé  de  faire.  J'attendais  pour  vous  l'annoncer 
l'époque  à  laquelle  vous  m'aviez  promis  de  me  faire  part  si  vous  étiez 
parvenu  à  vous  arranger  avec  un  théâtre.  Je  vois,  par  votre  lettre,  que 
c'est  l'Odéon. 

»  Si  vous  trouvez  pour  vous  les  éléments  nécessaires  dans  la  troupe, 
ainsi  que  pour  la  mise  en  scène  du  quatrième  acte,  et  que  l'on  puisse 
garantir  pour  l'exécution  musicale  les  moyens  qu'il  me  faut  et  que  j'ai 
indiqués  dans  la  lettre  que  vous  possédez  de  moi,  je  crois  que  la  localité 
est  bien  choisie,  surtout  avec  un  directeur  comme  M.  de  la  Rounat,  qui 
a  la  réputation  de  beaucoup  d'intelligence  et  de  courage.  Mais  vous  me 
dites  qu'au  mois  d'avrO,  oîi  nous  étions  convenus  que  je  vous  donnerais 
ma  partition,  M.  de  la  Rounat  a  un  engagement  avec  Mme  Risturi  ;  que, 
par  conséquent,  il  nous  propose  de  donner  l'ouvrage  au  printemps  1862. 
A  cette  époque,  je  serai  certainement  libre,  musicalement  parlant,  car 
l'opéra  nouveau  que  je  prépare  devra  être  donné  dans  le  courant  de 
l'hiver  prochain.  Je  ne  vois  donc  pas  de  difficulté  quant  à  présent. 

»  Toutefois,  mon  cher  ami,  prendre  un  engagement  définitif  pour  une 
époque  aussi  éloignée  que  celle-là,  qui  n'écheoit  que  dans  quatorze  mois, 
c'est  ce  que  je  n'oserais  faire  dans  ma  position  :  père  de  famille,  n'habi- 
tant pas  la  France.  Dans  les  conjonctures  où  nous  vivons,  qui  sait,  dans 
un  avenir  si  lointîiin,  ce  qui  pourrait  me  retenirchez  moi.  Si  nous  atten- 
dons jusqu'au  l""' octobre  prochain  pour  préparer  un  traité  pour  avril 
1862,  époque  que  M  de  la  Rounat  propose,  il  sera  sûr  sept  mois  d'avance 
d'avoir  l'ouvrage,  et  de  notre  coté  l'avenir  ne  sera  pas  enchaîné  pour 
un  si  long  espace.  Je  pense,  si,  comme  vous  dites,  il  a  envie  de  l'ou- 
vrage, que  ça  ne  sera  pas  un  empêchement. 

»  Maintenant,  mon  cher  ami,  causons  un  peu  de  notre  pièce.  Le  ta- 
bleau que  j'avais  craint  le  plus,  et  que  je  vous  avais  proposé  de  changer 
(celui  de  la  cathédrale  de  Faust),  est  celui  qui  est  venu  le  mieux  de  tous, 
et  j'espère  que  vous  n'en  serez  pas  mécontent.  Je  n'ai  aucun  changement 
à  vous  demander  non  plus  pour  tous  les  autres  tableaux  et  mélodrames 
que  j'ai  pu  faire  tels  que  vous  me  les  avez  indiqués.  Il  n'y  en  a  qu'un  seul 
qui  m'inquiète  musicalement,  et  sur  lequel  j'hésite  encore  maintenant  ; 
c'est  celui  du  Roi  des  Aulnes.  La  musique  de  Schubert,  de  cette  bal- 
lade, est  devenue  si  populaire  dans  tout  le  monde,  qu'il  me  paraît  im- 
possible d'en  faire  adopter  au  public  une  nouvelle  sur  les  paroles,  et  moi- 
même  j'en  ai  subi  tellement  l'influence  que  je  n'ai  pu  parvenir  à  faire 
une  autre  musique  qui  me  satisfit.  Je  pense  donc  de  garder  le  tissu  des  mé- 
lodies de  Schubert,  en  mettant  dessous  des  chœurs  pour  les  filles  du  Roi 
des  Aulnes,  et  départager  les  mélodies  de  Schubert  entre  les  trois  inter- 
locuteurs, et  en  même  temps,  cela  va  sans  dire,  d'orchestrer  les  morceaux 
que  Schubert  n'a  fait  que  pour  le  piano. 

T>  Maintenant  il  y  a  deux  façons  de  le  faire  :  l'une  est  de  faire  parler 
en  mélodrame  le  père  et  le  fils,  et  de  donner  pendant  ce  temps  les 
dessins  de  mélodie  de  Schubert  à  l'orchestre,  et  de  ne  faire  chanter  pro- 
prement dit  que  le  Roi  des  Aulnes  et  ses  filles;  l'autre  de  faire  chanter 
aussi  les  parties  du  père  et  du  fils  par  des  chanteurs.  Ayez  la  bonté  de 
me  dire  laquelle  de  ces  deux  versions  vous  préférez.  Au  point  de  vue 
musical  tout  pur,  il  serait  préférable  que  tous  les  trois  chantassent,  mais 
je  me  rendrai  à  votre  décision.  Veuille?  aussi  me  faire  savoir  si,  comme 
vous  en  avez  eu  l'intention,  vous  avez  ajouté  un  chœur  d'étudiants  au 
premier  acte,  et,  dans  ce  cas,  envoyez-le  moi  de  suite,  car  j'aimerais 
mieux  le  faire  maintenant,  où  l'impression  du  rôle  de  la  musique  est 
encore  chaude  dans  mon  imagination,  que  plus  tard,  quand  d'autres  tra- 
vaux m'en  auront  éloigné, 

0  Votre  tout  dévoué,  Meyerbeer.  » 

Ainsi,  la  partition  est  terminée.  Il  n'y  a  plus  qu'à  la  mettre  à  l'étude. 
On  s'est  entendu  avec  l'Odéon.  Ce  choix  est  accepté.  C'est  alors  que  la 
prudence  du  compositeur,  son  esprit  tout  à  la  fois  si  élevé  et  si  pratique 
vont  discuter  pied  à  pied  la  question  d'opportunité  de  la  représentation 
en  vue  du  succès;  Mme  Ristori  était  engagée  pour  une  série  de  représen- 
tations. On  toucherait  à  l'été,  c'est-à-dire  à  la  mauvaise  saison.  Il  faut 
donc  attendre  le  printemps  de  1862.  Mais  est-il  prudent  de  traiter  main- 
tenant quatorze  mois  avant  la  mise  en  répétition  de  l'ouvrage?  D'ici  là 
que  se  passera-t-il  ?  Meyerbeer  connaissait  à  merveille  le  terrain  fondant 
des  théâtres  et  de  la  politique,  et  pour  lui  traiter  avec  un  directeur 
quelques  mois  à  l'avance,  c'est-à-dire  lui  remettre  sa  partition,  cela 
devait  lui  suffire.  Et  puis,  toutes  ses  préoccupations  sont  à  l'Africaine,  qui 
doit  être  donnée  dans  l'hiver  de  1862.  Après  cela,  libre  de  tout  souci,  il 
sera  corps  et  âme  à  la  Jeunesse  de  Gœthe. 


276 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


Mais  l'Africaine  reculait  au  lieu  d'avancer  ;  il  lui  était  réservé,  comme 
au  Pré  aux  Clercs,  de  soulever  à  son  apparition  des  applaudissements 
que  le  compositeur  ne  devait  plus  entendre.  Il  fallait  enfin  traiter  avec 
le  directeur  de  l'Odéon,  qui  pressait.  Pour  cela,  il  était  bon  que  Meyer- 
beer  vînt  à  Paris.  On  lui  écrit,  mais  il  sait  que  le  théâtre  de  l'Odéon 
ferme  au  mois  de  mai.  Il  restera  bien  peu  de  temps  pour  la  Jeunesse  de 
Gœlhe.  Écoutez  l'objection,  écoutez  surtout.  Messieurs,  ce  qu'il  va  dire 
de  l'œuvre  elle-même  et  de  la  part  qu'il  va  faire  à  l'écrivain  dans  cette 
œuvre. 

«  Ems,  le  31   août  1861. 

»  Vous  devez  savoir,  cher  Henri,  car  je  l'ai  dit  l'année  passée  et  vous 
le  trouverez  aussi  dans  la  lettre  que  vous  avez  de  moi  en  main  sur  ce 
sujet,  que  je  ne  puis  venir  à  Paris  que  dans  le  courant  du  mois  d'avril. 
Il  nous  faudra  pour  le  moins  six  bonnes  semaines  de  répétitions  musi- 
cales, car,  quand  la  musique  qui,  déjà  par  elle-même,  est  assez  compli- 
quée (surtout  dans  la  scène  de  l'église)  sera  apprise,  il  faudra  encore  la 
faire  concorder  avec  les  détails  scéniques  des  visions  et  avec  les  positions 
tout  exceptionnelles,  dans  cet  ouvrage,  des  chanteurs  qui  ne  se  trouvent 
jamais  sur  le  devant  de  la  rampe  et,  par  conséquent,  éloignés  de  l'or- 
chestre. 11  faudra  beaucoup  d'essais  et  peut-être  des  changements  partiels 
avant  que  tout  coïncide  ensemble. 

»  Maintenant  vous  m'écrivez  que  le  théâtre  de  l'Odéon  ferme  à  la  fin 
de  mai,  vous  ne  pourriez  donc  avoir  que  huit  ou  dix  représentations 
tout  au  plus  avant  la  fermeture.  Réfléchissez  bien  ,  cher  ami ,  si  c'est 
dans  l'intérêt  de  votre  ouvrage  de  l'interrompre  après  si  peu  de  repré- 
sentations, et  s'il  ne  vaudrait  pas  mieux  dans  ces  conditions,  ou  de  don- 
ner la  pièce  à  un  autre  grand  théâtre  qui  pourrait  vous  jouer  sans  inter- 
ruption tout  l'été,  ou,  ce  qui  me  paraît  encore  plus  avantageux,  de  ras- 
ter  à  l'Odéon,  mais  de  ne  donner  la  pièce  qu'à  la  réouverture,  au  mois 
de  septembre,  où  vous  auriez  tout  l'automne  et  l'hiver  pour  une  longue 
série  de  représentations  devant  vous.  Mais  entendons-nous  bien ,  cher 
ami,  ceci  n'est  qu'un  avis  que  j'émets  et  pas  une  condition.  Votre  inté- 
rêt est  le  plus  important  dans  cet  ouvrage,  et  il  doit  l'emporter  comme 
importance  de  collaboration,  et  comme  quantité,  car  je  n'ai  fait  que  la 
musique  d'un  acte  sur  trois  de  drame. 

»  Vous  me  demandez,  cher  Henri,  si  je  ne  viendrai  pas  maintenant 
un  peu  à  Paris;  mon  intention  avait  été  en  effet  d'y  faire  une  excur- 
sion, après  avoir  fini  ma  cure  ici,  et  mon  but  principal  était  de  con- 
naître enfin  votre  pièce  de  la  Jeunesse  de  Gœlhe,  dont  je  ne  connais  jus- 
qu'à présent  que  ce  que  vous  m'en  avez  raconté  à  l'état  de  plan  projeté. 
Maintenant  il  est  de  la  plus  haute  importance  pour  moi  de  connaître  la 
pièce  achevée ,  pour  savoir  de  quelle  façon  les  actes  qui  précèdent  celui 
que  j'ai  mis  en  musique  préparent  et  justifient  le  caractère  de  ma  mu- 
sique, telle  que  je  l'ai  faite  d'après  la  donnée  générale  de  la  pièce,  que 
vous  m'avez  seulement  indiquée. 

»  Mais  cette  excursion  à  Paris  devient  maintenant  impossible,  car  mon 
roi  vient  de  m'ordonner  de  composer  la  musique  qui  s'exécutera  pen- 
dant son  couronnement  à  Kœnigsberg,  et  il  m'ordonne  en  outre  de  venir 
moi-même  à  Kœnigsberg  pour  diriger  un  grand  concert  qui  fera  partie 
des  fêles  royales.  Déjà  j'ai  dû  composer  sur  ses  ordres  une  cantate  qui 
sera  exécutée  à  Berlin  au  château  après  le  retour  du  roi  de  Kœnigsberg 
également  dans  une  fête  que  le  roi  donnera,  et  que  je  dois  également 
diriger.  Vous  voyez  qu'il  n'y  a  pas  moyen  pour  moi  de  penser  actuelle- 
ment à  un  voyage. 

j)  Vous  m'écrivez  sur  votre  lettre,  cher  ami,  que  vous  me  ferez  peut- 
être  une  petite  visite  à  Ems.  Cela  serait  charmant.  Seulement  il  ne  fau- 
drait par  alors  perdre  du  temps  pour  exécuter  votre  bonne  intention, 
cftr  le  13  septembre  finit  ici  ma  cure,  et  le  14  je  suis  obligé  de  retour- 
ner à  Berlin.  Si  vous  venez,  n'oubliez  pas  surtout  d'apporter  la  Jeunesse 
de  Gœthe  pour  me  la  lire. 

»  Veuillez  me  rappeler  au  souvenir  de  Mme  de  Bury  et  mille  compli- 
ments pour  la  charmante  Mlle  Jetta,  qui,  je  l'espère  bien,  conserve  sa 
bienveillance  à  son  vieil  adorateur. 

»  Meyerbeer.  » 

Voilà  donc  un  nouvel  ajournement.  Remarquez  bien  toutefois  que  le 
compositeur  n'entend  pas  imposer  de  conditions  à  l'écrivain;  ce  sont  de 
simples  conseils  qu'il  lui  donne.  Mais,  vous  le  comprenez  aussi,  des 
conseils  donnés  par  un  tel  homme,  c'étaient  des  ordres.  M.  Blaze  de 
Burj  courut  à  Ems,  y  emporta  le  manuscrit  de  son  drame  qu'il  lut  à 
Meyerbeer,  et  là  il  put  contempler  la  partition,  car  celui-ci,  après  avoir 
constaté  qu'elle  entrait  à  merveille  dans  le  développement  du  sujet,  la 
lui  fit  entendre. 

C'est  maintenant  M.  de  la  Rounat  qui  va  perdre  patience.  Il  écrivait 
donc  le  23  octobre  1861  : 

«  Paris,  le  23  octobre  18Q1 . 
»  Mon  cher  monsieur  Blaze, 
I  II  me  faut  un  engagement  définitif,  je  suis  au  bout  de  mon  attente 
et  il  m'est  impossible  de  marcher  plus  longtemps  sans  avoir  assuré  dé- 
finitivement ma  fin  d'année.  Sur  la  foi  de  votre  parole,  j'ai  refusé  toutes 
les  propositions  qui  m'ont  été  faites,  me  laissant  aller  en  artiste  passionné 


aux  rêves  du  triomphe  éclatant  que  j'espère  et  au  service  duquel  je 
mettrai  tous  mes  moyens  d'action.  Je  vous  en  prie,  do  la  façon  la  plus 
instante,  il  y  va  pour  moi  d'un  intérêt  puissant  et  pressant,  priez  notre 
illustre  maestro  de  m'envoyer  une  certitude.  Je  voudrais  pouvoir  m'occu- 
per  de  la  grande  œuvre  dès  le  13  février,  afin  d'être  prêt  complètement 
au  l'^''  avril.  Si  le  succès  est  ce  que  j'espère,  au  lieu  de  fermer  au  31  mai, 
nous  resterons  ouverts  indéfiniment. 

«  Songez  que  l'année  dernière,  à  pareille  époque,  le  traité  de  Mme  Ris- 
tori  était  signé  depuis  longtemps  déjà  et  elle  jouait  le  23  mars. 

»  Il  faut  de  toute  nécessité  que  je  sois  fixé  le  plus  promptement  pos- 
sible, afin  de  préparer  mes  moyens  d'exécution,  et  surtout  parce  que  si  la 
combinaison  était  rompue  par  le  fait  du  grand  maître,  je  me  trouverais, 
moi ,  dans  le  plus  extrême  embarras ,  ayant ,  comme  je  vous  l'ai  dit , 
compté  aveuglément  sur  la  parole  que  vous  avez  cru  pouvoir  m'en- 
gager. 

B  Pardonnez-moi  cette  mise  en  demeure,  mais  je  suis  forcé  de  vous  la 
soumettre  au  nom  des  intérêts  que  je  représente  et  qu'on  m'accuserait 
d'avoir  aventurés. 

»  Votre  bien  affectueusement  dévoué  ; 

»  Ch.  de  la  Rounat.  » 

Le  21  décembre  1861,  nouvelle  démarche  du  directeur  de  l'Odéon. 
Une  année  s'écoule,  et  la  correspondance  continue.  Mais  l'Africaine  n'ap- 
paraît pas,  et  le  tour  de  la  Jeunesse  de  Gœthe  ne  viendra  qu'après  cette 
vaste  composition.  Puis,  Meyerbeer  s'éteint  subitement  à  l'hôtel  des 
Champs-Elysées  qui  porte  aujourd'hui  son  nom  et  oîi,  dans  les  derniers 
temps,  il  se  plaisait  à  descendre,  il  s'éteint  avant  que  les  deux  dernières 
œuvres  auxquelles  il  ait  attaché  le  sceau  de  son  immortel  génie  fussent 
livrées  à  la  scène. 

11  me  semble  que  cette  partie  du  débat  est  facile  à  résumer,  et  qu'elle 
est  de  nature  à  jeter  une  assez  vive  lumière  sur  les  questions  à  résoudre. 
Oui,  la  partition  existe;  elle  était  achevée  dès  la  fin  de  1860,  puisque, 
le  28  janvier  1861,  Meyerbeer  disait  :  «  Depuis  six  fciiKiines,  j'ai  com- 
plètement terminé  la  musique  de  l'acte  que  vous  m'avez  cliargé  de  faire.  » 
Elle  était  disponible,  M.  Blaze  de  Bury  ne  l'a-t-il  pas  vue  et  entendue  à 
Ems?  Quant  à  la  représentation,  ce  n'était  qu'une  question  d'opportu- 
nité et,  sur  celte  question  même,  le  compositeur  s'en  remellait  à  l'écri- 
vain, dont  c'était  bien  plutôt  l'œuvre ,  et  l'expression  est  à  retenir.  De 
telle  sorte  que  si  M.  Blaze  de  Bury,  ayant  moins  de  déférence  pour  les 
simples  avis  qui  lui  étaient  donnés  à  cet  égard,  avait  dit  un  seul  mot, 
la  partition  était  mise  à  l'étude. 

Vous  comprenez  ce  qui  va  suivre. 

M.  Blaze  de  Bury  a  réclamé  cette  partition,  il  l'a  réclamée  sous  la 
contrainte  de  dommages-intérêts ,  à  Mme  veuve  Meyerbeer,  aux  deux 
filles  de  l'illustre  compositeur,  Mme  Richter  et  Mme  la  baronne  de  Korff, 
et  à  ses  exécuteurs  testamentaires.  Mais  on  lui  a  répondu  :  Toutes  les 
compositions  non  publiées  de  Meyerbeer  ont  été,  sur  ses  ordres,  enfer- 
mées dans  un  coffre  spécial  ;  une  seule  exception  avait  été  faite  par  lui 
pour  Vasco  de  Gama  (l'Africaine).  Nous  ne  pouvons  toucher  à  ce  dépôt, 
à  la  garde  duquel  il  a  intéressé  notre  piété  pour  sa  mémoire. 

Or,  il  est  bien  vrai  que  Meyerbeer  a  prescrit  certaines  mesures  pour 
ses  compositions  inachevées,  ses  pensées  détachées  et  ses  essais.  Il  a 
bien  recommandé  à  sa  veuve  et  à  ses  exécuteurs  testamentaires  de  ren- 
fermer ce  qui  était  à  lui  dans  un  coffre.  Si  donc,  ignorant  l'histoire  de 
cette  partition  de  la  Jeunesse  de  Gœthe,  ils  l'ont  aussi  enfermé  dans  le 
coffre,  ce  fait  en  lui-même  ne  saurait  avoir  une  grande  valeur.  Voyons 
les  termes  du  testament  ;  nous  rechercherons  ensuite  la  pensée  de  celui 
qui  a  écrit  cet  article  18  qu'on  nous  oppose,  et  qu'il  faut  lire  en  en- 
tier, car  c'est  une  page  intéressante  de  la  vie  intime  du  grand  compo- 
siteur, où  se  traduisent  ses  habitudes,  et  où  il  exprime  ses  idées  sur  les 
choses  qui  touchent  à  la  renommée  des  artistes  en  général.  Voici  cet  ar- 
ticle 18  tel  qu'il  a  été  traduit  de  l'allemand  : 

«  Art.  18.  —  Depuis  fort  longtemps  j'ai  l'habitude  de  noter  sur  un 
cahier  de  musique,  destiné  à  cet  usage,  toute  pensée  musicale  qui  me 
traverse  l'esprit  et  qui  me  plaît,  soit  pendant  que  je  suis  au  piano,  soit  à 
tout  autre  moment  ■  je  ne  veux  pas  qu'après  ma  mort  ces  pensées 
soient  remises  entre  les  mains  d'un  compositeur  vivant  pour  fabriquer 
une  œuvre  nouvelle,  ou  pour  compléter  mes  compositions  inachevées 
afin  de  faire  paraître  ensuite  celles-ci  comme  mes  œuvres  posthumes, 
ainsi  que  cela  n'est  arrivé  que  trop  souvent  à  d'autres  artistes  au  détri- 
ment de  leur  gloire.  Ma  famille  n'a  pas  besoin  de  ces  ressources. 

»  Cela  me  serait  également  douloureux  si  par  mégarde  ces  cahiers 
tombaient  entre  des  mains  infidèles,  et  que  par  là  mes  pensées  fussent 
utilisées  par  d'autres  musiciens,  sous  leur  nom.  Ma  volonté  expresse  et 
formelle  est  donc  que  peu  de  jours  après  l'ouverture  de  ce  testament, 
les  cahiers  ci-nommés  contenant  mes  pensées  (lesquels  consistent  en 
cinq  gros  cahiers  de  musique  dont  la  reliure  du  premier  est  bleue,  du 
deuxième  rougeàtre,  du  troisième  multicolore,  du  quatrième  verte,  du 
cinquième  rouge,  et  sur  les  titres  desquels  se  trouve  écrit  :  Pensées  dé- 
tachées; esquisses  et  morceaux  inachevés  de  Meyerbeer)  soient  ôtés  de 
mes  papiers  par  ma  femme  et  les  exécuteurs  testamentaires,  cachetés 
et  gardés  soigneusement  dans  un  coffre  spécial. 


DE  PARIS. 


277 


»  Si  un  de  mes  petits-enfants  devait  un  jour  montrer  une  vocation 
musicale,  mes  cahiers  contenant  mes  pensées  musicales  devront  lui  être 
remis.  J'ordonne  qu'il  en  soit  de  même  à  l'égard  de  mes  compositions 
non  publiées  au  moment  de  mon  décès,  ainsi  que  du  journal  tenu  par 
moi  depuis  la  fin  de  l'année  1846.  Il  ne  doit  être  permis  à  personne, 
sans  exception,  de  prendre  connaissance  de  ces  cahiers,  des  composi- 
tions inédites  et  de  mon  journal.  Si,  parmi  mes  petits-enfants,  il  ne  s'en 
trouve  pas  qui  soit  doué  musicalement,  ce  dont  mes  exécuteurs  testa- 
mentaires seront  seuls  les  juges,  ces  cahiers  contenant  les  pensées  mu- 
sicales, compositions  inédites  et  journal  devront  être  brûlés.  Ceci ,  bien 
entendu,  ne  peut  être  exécuté  que  lorsque  mes  trois  filles  ne  seront 
plus  et  que  mes  petits-flls  auront  atteint  un  âge  qui  permet  d'émettre  un 
jugement  sûr  concernant  leurs  dispositions  musicales. 

»  Si,  à  l'époque  de  ma  mort,  mon  ouvrage  Vasco  de  Gama  n'a  pas 
encore  été  représenté,  j'ordonne  que,  tant  la  grande  partition  que  la 
partition  réduite  au  piano  soient  publiées  par  la  gravure,  et  que  la  re- 
présentation théâtrale  en  ait  lieu,  mais  tout  d'abord  à  Paris,  soit 
au  grand  Opéra,  soit  au  théâtre  Lyrique.  Cette  représentation  à  Paris 
ayant  eu  lieu,  je  permets  que  cet  ouvrage  soit  joué  sur  tous  les  autres 
théâtres.  Comme  le  libretto  de  cet  ouvrage  est  du  défunt  poëte  Scribe, 
mes  exécuteurs  testamentaires  devront  obtenir,  tant  pour  la  publica- 
tion que  pour  la  représentation,  la  permission  de  Mme  veuve  Scribe, 
celle-ci  pouvant,  d'après  les  lois  françaises,  s'opposer  à  la  publication 
ainsi  qu'à  la  représentation . 

»  Je  n'inflige  aucune  pénalité  en  cas  de  non-accomplissement  des 
ordres  indiqués  ci-dessus  concernant  mes  manuscrits  de  musique,  jour- 
nal, etc.,  mais  je  fais  appel  à  la  piété  de  ma  bien -aimée  épouse  et 
de  mes  enfants,  ainsi  qu'à  celle  de  mes  exécuteurs  testamentaires,  et 
leur  recommande  avec  instance  l'accomplissement  entier  de  mes  vo- 
lontés. » 

Ainsi,  notes  courantes ,  pensées  détachées,  compositions  non  publiées, 
tout  a  été  placé  dans  le  coffre  par  Mme  Meyerbeer  et  les  exécuteurs 
testamentaires.  Devaient-ils  y  renfermer  également  la  Jeunesse  de  Gœ- 
the?  Je  comprends  qu'ils  n'aient  point  distingué,  ignorant  les  conven- 
tions arrêtées  à  ce  sujet.  Mais,  en  présence  d'une  collaboration  qui  a 
amené  une  œuvre  commune,  complètement  achevée,  à  la  représentation 
de  laquelle  Meyerbeer  n'a  jamais  fait  que  des  objections  tirées  de  l'op- 
portunité, qu'on  nous  oppose  le  testament  comme  une  fin  de  non- 
recevoir  insurmontable,  voilà  ce  que  je  ne  saurais  admettre. 

Ce  qu'a  voulu  Meyerbeer,  on  le  saisit  sans  effort.  11  y  a  pour  les 
musiciens  comme  pour  les  écrivains,  pour  les  poètes  et  les  peintres, 
bien  des  tâtonnements.  Avant  de  prendre  son  grand  vol,  la  pensée  a 
besoin  de  rompre  avec  les  attaches  qui  la  rétiennent  et  l'embarrassent. 
Meyerbeer,  très-soigneux  de  sa  renommée,  ne  voulait  livrer  au  public 
que  sa  pensée  nette,  épurée,  dans  son  grand  vol.  11  ne  comptait  pour 
rien  ses  essais,  ces  ébauches  et  ces  scories,  ce  fumier  d'Ennius  où  un 
grand  poëte  trouvait  encore  de  si  belles  choses,  par  cela  seul  peut-être 
qu'il  était  un  grand  poëte. 

Tout  cela,  Meyerbeer  le  livre  à  ceux  de  ses  petits-enfants  qui  seront 
musicalement  doués,  comme  un  premier  terrain  à  défricher  et  à  culti- 
ver, renfermant  le  trésor  qu'il  appartient  au  travail  d'en  fair  sortir. 
Mais  si  aucun  d'eux  n'a  d'aptitudes,  eh  bien  !  toutes  ces  choses  seront 
jetées  au  feu!  Ah!  qu'il  en  soit  ainsi  pour  les  œuvres  qui  étaient  ex- 
clusivement les  siennes,  le  sacrifice  peut  se  comprendre.  Mais  Ruysdael 
a  fait  un  paysage  pour  le  fond  et  les  terrains  ;  il  ne  faisait  pas  autre 
chose,  il  est  vrai  qu'il  le  faisait  assez  bien.  Wouwermans  a  placé  là  des 
animaux  et  des  figures.  Le  tableau  est  achevé,  il  a  reçu  les  dernières 
touches,  et  Ruysdael  pourra  le  détruire  ou  le  confisquer! 

Mieux  encore,  Gluck  a  composé  Orphée  sur  le  livret  de  Molin,  qui  a 
la  première  idée  de  l'opéra  et  en  a  donné  le  cadre.  L'ouvrage  est  ter- 
miné, le  théâtre  est  choisi,  et  l'on  attend  pour  la  représentation  l'heure 
propice.  Gluck  meurt  sur  ces  entrefaites,  Orphée  est  renfermé  dans  un 
coftre,  et  quand  le  poëte  viendra  dire  que  c'est  là  une  œuvre  commune, 
on  lui  opposera  le  testament  oà  le  compositeur  a  prescrit  de  jeter  le 
tout  aux  flammes! 

Voilà  cependant  ce  qu'on  nous  répond.  Mais  on  oublie  deux  choses, 
c'est  de  rechercher  quelle  a  été,  en  réalité,  la  pensée  de  Meyerbeer,  quel 
était  son  droit  comme  collaborateur.  Sa  pensée  !  elle  n'est  pas  incertaine, 
et  un  moment  quelconque  a-t-il  voulu  interdire  la  représentation  de  la 
Jeunesse  de  Gœthe?  Il  faut  interroger  tout  à  la  fois  la  correspondance  et 
le  testament.  Dans  la  correspondance,  sa  volonté  est  formelle  et  bien 
arrêtée.  Il  ne  demande  qu'une  chose,  c'est  que  la  pièce  soit  donnée  dans 
les  meilleures  conditions  possibles,  et  encore  s'en  remet-il  sur  ce  point  à 
l'écrivain. 

Mais  le  testament  lui-même  porte-t-il  la  trace  d'une  interdiction 
quelconque?  Remarquez  que  la  volonté  certaine  du  compositeur  ne  pour- 
rait résulter  que  d'une  interdiction  formelle.  Tout  ce  qu'on  peut  dire, 
c'est  qu'il  n'a  point  parlé  de  la  Jeunesse  de  Gœthe.  Est-ce  là  le  résultat 
d'une  omission,  d'un  oubli?  Nous  n'en  savons  rien.  Mais  ce  que  nous 
savons,  c'est  que  le  testament  est  du  mois  de  mai  1863,  et  qu'à  cette 
date,  il  ne  cessait  de  parler  de  sa  dernière  composition,  il  ne  doutait 
pas  qu'elle  ne  passât  incessamment,  il  en  parlait,  je  ne  dis  pas  seule- 


I  ment  à  M.  Biaze  de  Bury,  qui  le  voyait  presque  tous  les  jours  à  Paris, 
qui  l'a  vu  jusqu'à  sa  dernière  heure. 

11  en  parlait  d'ailleurs  à  tout  venant.  J'aperçois  à  cette  barre  notre 
éminent  confrère  M"  Crémieux,  qui  doit  compter  dans  les  bonheurs  de 
sa  vie  d'avoir  été  l'ami  de  Meyerbeer.  Eh  bien  !  je  serais  tenté  de  lui 
demander  s'il  ne  l'a  pas  entendu,  jusque  dans  les  derniers  jours  de  sa 
vie,  parler  de  cette  œuvre  avec  amour  et  passion.  Je  vais  plus  loin  :  le 
testament,  je  le  suppose,  est  formel,  l'interdiction  absolue,  mon  client 
n'a-t-il  aucun  droit?  Un  opéra,  la  Cour  de  Paris  l'a  ainsi  jugé  dans 
l'affaire  des  Joyeuses  Commères  de  Windsor,  est  une  œuvre  commune  et 
indivisible,  résultat  d'un  mutuel  échange  d'idées  el  d'inspirations.  Où 
commence  où  finit  la  collaboration?  La  limite  est  délicate;  mais  il  ne 
peut  dépendre  du  caprice  d'un  des  auteurs  de  priver  l'autre  des  bénéfices 
légitimes  qu'il  attend  de  la  divulgation  de  l'œuvre  commune.  Meyerbeer 
serait  vivant,  que  vous  auriez,  Messieurs,  à  cet  égard  une  appréciation 
souveraine.  Vous  savez  pourquoi  il  n'a  pas  livré  sa  partition,  il  l'a  dit  : 
c'est. une  question  d'opportunité;  mais  les  conventions  entre  Meyerbeer 
et  Blaze  de  Bury  étaient  bien  arrêtées. 

Un  mot  encore.  Messieurs,  je  dois  m'arrêter  à  deux  objections.  Le 
testament  interdit,  nous  dit-on,  de  prendre  connaissance  des  œuvres 
non  publiées.  Cela  n'est  pas  sérieux?  Qu'il  en  soit  ainsi  pour  ses  œuvres 
inédites,  soit,  mais  cela  ne  peut  aller  jusqu'à  empêcher  les  recherches 
de  la  propriété  d'autrui  :  mon  client  se  plaint  qu'on  ait  enfermé  le 
drame  lyrique  dans  le  coffre,  en  réunissant,  sans  examen  et  sans  dis- 
tinction, tous  les  papiers  recueillis  à  Paris  et  à  Berlin,  les  confondant 
dans  un  séquestre  où,  cependant,  les  propriétés  communes  ne  peuvent 
être  condamnées  à  Paris. 

La  seconde  objection  ne  me  paraît  pas  mieux  fondée.  11  y  a,  dit-on, 
entre  l'œuvre  achevée  et  celle  représentée,  des  nuances  parfois  très- 
marquées;  jusqu'au  dernier  moment  les  compositeurs  reviennent  sur 
leur  pensée;  Meyerbeer  n'était  jamais  content  de  la  sienne,  et  c'est  aux 
répétitions  qu'il  lui  donnait  la  dernière  forme.  Ne  peut-il  pas  arriver 
que  la  Jeunesse  de  Gœthe  ait  besoin  de  retouches  ;  qui  oserait  se  les  per- 
mettre? Il  n'était  pas  là  non  plus  cependant  pour  l'Africaine,  et  pourtant 
elle  a  été  donnée;  mais,  nous  dit-on,  il  avait  prévu  le  cas  et  chargé 
M.  Fétis  de  le  remplacer. 

Vous  craignez  pour  la  gloire  de  Meyerbeer,  dites-vous,  eh  bien  que  ne 
chargez- vous  M.  Fétis  de  donner  les  mêmes  soins  à  la  Jeunesse  de  Gœthe, 
il  ne  pourrait  qu'être  flatté  de  cette  mission  ;  en  voulez-vous  d'autres  ; 
vous  pouvez  en  trouver  :  et  si  des  hommes  comme  MM.  Auber,  Berlioz, 
Ambroise  Thomas,  venaient  vous  dire  que  l'œuvre  est  achevée,  parfaite, 
pourquoi  le  Tribunal  ne  s'inclinerait-il  pas  devant  cette  épreuve.  Dira  t-on 
qu'il  n'y  a  ni  chanteurs  ni  orchestre  ;  mais  tout  cela  se  trouvera  dès 
que  la  partition  sera  livrée,  et  soyez  sûrs  que  dans  un  intérêt  commun, 
il  sera  fait  droit  à  toutes  les  réclamations  du  maître,  et  que  tous  ses  con- 
seils seront  religieusement  suivis.  D'ailleurs,  ne  dites  pas  que  l'œuvre 
est  incomplète,  car  Meyerbeer  avait  donné  la  dernière  main  à  tous  les 
personnages,  et  si,  dans  ses  premières  lettres,  il  demandait  l'avis  de  son 
collaborateur  sur  certaines  dispositions  qu'il  n'avait  point  encore  arrêtées, 
dans  les  dernières  il  ne  revient  plus  sur  ces  détails. 

Que  Mme  Meyerbeer  se  rassure  donc,  il  ne  s'agit  nullement  d'aller 
ici  contre  la  volonté  du  grand  compositeur  ;  il  s'agit,  au  contraire,  de  la 
respecter,  car  il  avait  foi  dans  cette  œuvre,  la  dernière  qu'il  léguait  à 
ses  admirateurs.  Qu'elle  soit  donc  représentée,  et  chacun  y  trouvera  son 
compte,  le  collaborateur  et  le  public,  et,  quant  à  sa  gloire,  elle  ne 
saurait  y  perdre,  croyez-le  bien,  car  l'œuvre  est  magistrale  et  tout  à  fait 
digne  de  lui. 

M»  Crémieux  a  pris  ensuite  la  parole  dans  l'intérêt  des  héritiers 
Meyerbeer. 


REVUE  DES  THEATRES. 


Variétés  :  Reprise  du  Joueur  de  Flûte,  opérette  d'Hervé.  —  Palais- 
Royal  :  le  Lys  de  la  Vallée,  comédie-vaudeville  en  trois  actes, 
de  M.W.  Eugène  Grange  et  Victor  Bernard  ;  Madame  est  couchée, 
comédie-vaudeville  en  un  acte,  des  mêmes  auteurs. 

Quand  on  a  donné,  pour  la  première  fois,  le  Joueur  de  Flûte,  il 
y  a  quelques  années ,  Hervé  n'avait  pas  encore  la  réputation  de 
musicien  excentrique,  qu'il  a  définitivement  conquise  avec  son  Œil 
crevé.  Aussi,  pensons-nous  que  l'occasion  est  devenue  opportune 
pour  la  reprise  de  cette  bouffonnerie  romaine ,  qui  va  bénéficier 
du  dernier  succès  de  son  auteur.  Hervé  a  écrit  pour  Mlle  Silly, 
qui  reprenait  son  rôle  dans  son  œuvre,  un  air  qui  n'ajoutera 
rien  aux  mérites  de  la  partition.  Du  reste,  la  rentrée  de  cette  ac- 


278 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


trice  a  été  une  fête  pour  elle.  Dupuis  a  conservé  son  rôle  de  Dia- 
cliylum ,  qui  n'est  pas  à  la  hauteur  de  ceux  qu'on  lui  confie  au- 
jourd'hui. Les  autres  pei'sonnages  sont  tenus  à  nouveau  et  d'une 
façon  fort  convenaole  par  Blondelet,  Guyon  et  Mlle  Garait. 

— Au  Palais-Royal,  deux  auteurs  ont  osé  porter  la  main  sur  le 
Lys  de  la  Vallée,  ce  titre  illustré  par  Balzac,  et  que  le  Théâtre- 
Français  a  mis  un  jour  sur  son  affiche,  mais  sans  pouvoir  l'y 
maintenir,  tant  l'entreprise  est  difficile.  Hâtons-nous  de  dire,  pour 
l'absolution  de  ces  deux  téméraires,  que  leurs  héros  n'ont  rien  de 
commun  avec  le  Félix  de  Vandenesse  et  la  comtesse  de  Mortsauf 
du  romancier;  tout  au  plus  ont-ils  un  point  de  départ  à  peu  près 
semblable.  Le  côté  piquant  de  l'emprunt  consiste  dans  son  appli- 
cation au  marché  de  Paris  oîi  se  débite  la  volaille;  le  Lys  de  la 
Vallée  est  une  grosse  marchande,  placée  dans  un  cadre  populaire. 
Elle  a  des  écus,  cette  brave  Mme  Catherine,  comme  la  boulangère 
de  la  chanson,  et  les  prétendants  ne  lui  manquent  pas.  Mais,  par 
une  fantaisie  bizarre,  elle  les  repousse  en  masse  pour  les  beaux 
yeux  de  son  imbécile  de  garçon  de  boutique  qui  n'y  voit  que  du 
feu.  Rebutée  de  ce  côté,  elle  se  rejette  sur  un  gandin  qu'elle  a 
rencontré  dans  un  bal  par  souscriptions  donné  ti  la  Vallée,  et  qui 
lui  a  dérobé  un  baiser  sur  l'épaule  entre  deux  contredanses.  L'in- 
trigue roule  tout  entière  sur  la  poursuite  obstinée  de  Mme  Cathe- 
rine, et  sur  la  résistance  non  moins  désespérée  du  gandin  Ludo- 
vic, qui  se  sert  d'un  bouquet  au  chloroforme  pour  se  délivrer 
d'elle,  et  qui,  en  fin  de  compte,  échappe  au  mariage  par  le  retour 
d'un  premier  mari  qu'on  croyait  mort. 

Cette  pièce,  rondement  jouée  par  Mlle  Alphonsine,  par-  Lhéri- 
tier,  Priston,  Pelierin,  Hyacinthe  et  Fitzelier,  a  été  bien  accueillie, 
et  tout  nous  fait  croire  qu'elle  fournira  une  carrière  honorable. 

Mais  un  joli  petit  vaudeville  des  mêmes  auteurs.  Madame  est 
couchée,  a  été  reçu  avec  une  faveur  bien  autrement  accentuée. 
M.  Chaponniu  est  parti  pour  Bruxelles;  sa  femme  profite  de  son 
absence  pour  aller  voir  en  catimini  un  bal  de  l'Opéra,  et  la  sou- 
brette, Mlle  Georgette,  pour  donner  â  souper  à  sou  amoureux. 
Mais  voilà  que  M.  Chaponniu  revient  à  l'improviste.  Georgette  se 
débarrasse  tant  bien  que  mal  de  son  Joseph;  mais  elle  aime  sa 
maîtresse,  et  elle  se  dit  que  si  monsieur  veut  entrer  dans  la  chambre 
de  madame,  il  peut  en  résulter  de  graves  inconvénients.  H  s'agit 
donc  d'empêcher  monsieur  d'entrer  chez  madame.  Elle  est  cou- 
chée, elle  a  sa  migraine;  cela  ne  suffît  pas,  et,  à  bout  de  raisons, 
Georgette  fait  accroire  à  Chaponnin  que  c'est  par  jalousie  qu'elle 
lui  interdit  l'entrée  de  la  chambre  conjugale.  Ce  vieux  fat  de  Cha- 
ponnin donne  dans  le  panneau;  il  oubhe  sa  femme  pour  faire  la 
cour  à  sa  servante,  et  Mme  Chaponnin,  de  retour  de  l'Opéra,  met 
à  profit  cette  circonstance  pour  se  faufiler  chez  elle.  Madame  est 
sauvée,  et  Georgette,  plus  tranquille,  se  moque  des  prétentions  de 
monsieur,  à  qui  elle  présente  Joseph  comme  son  futur  époux. 

Cette  bluette  est  vive,  spirituelle,  amusante;  elle  est,  en  outre, 
fort  bien  interprétée  par  l'excellent  Geoffroy,  par  Lacombe  et  par 
Mlle  Reynold ,  une  débutante  qui  joue  aussi  dans  le  Lys  de  la 
Vallée,  mais  qui  n'y  est  pas  aussi  bien  partagée.  Le  rôle  de  Geor- 
gette lui  convient  à  merveille,  et  elle  a  su  en  tirer  un  très-bon 
parti. 

D.  A.  D.  SAINT-YVES. 


NODVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 

**,  Le  théâtre  impénal  de  l'Opéra  a  donné  lundi  le  Trouvère  et  la  Source,  et 
mercredi  et  vendredi  Hamkt.  —  La  reprise  des  Huguenots  est  l'objet  de 
toute  la  sollicitude  de  M.  Perrin  ;  ainsi  que  nous  l'avons  dit,  les  artistes 
les  plus  distingués  de  notre  première  scène  lyrique  ne  dédaignent  point  de 
se  charger  des  rôles  secondaires.  — Tous  les  costumes  se  refont  à  neuf;  le 


décor  du  deuxième  acte  est  entièrement  repeint  et  celui  du  Pré-aux- 
Clercs,  au  troisième  acte,  est  confié  à  M.  Cambon,  qui  l'exécutera  d'après 
les  travaux  historiques  récemment  publiés  sur  le  Louvre  et  la  ville  de 
Paris.  —  Ce  ne  sera  guère  que  dans  un  mois  que  sera  donné  le  nou- 
^'eau  ballet  de  Saint-Léon  et  Dolibes,  qui  doit  clore  les  représentations 
de  Mlle  Granzow. 

**^  Les  Draijons  de  Villars,  Zampa  et  V Ambassadrice  alternent  chaque 
soir  au  théâtre  de  l'Opéra-Comique.  —  La  direction  compte  reprendre 
dans  le  courant  de  septembre  le  Premier  Jour  de  bonheur;  il  est  question 
de  Mlle  Guillot  pour  remplacer  Mlle  Marie  Roze  dans  le  rôle  de  Djelma. 
—  L'opéra  de  MM.  Labiche,  Delacour  et  Poise  continue  d'être  répété; 
toutefois  le  rôle  du  ténor  n'est  pas  encore  distribué. 

***  Quoique,  de  par  l'arrêté  du  22  août  pris  par  le  Ministre  de  la 
Maison  de  l'Empereur  et  des  Beaux-Arts,  M.  Pasdeloup  soit  en  posses- 
sion du  privilège  du  Théâtre-Lyrique,  le  nouveau  directeur  n'a  pas  en- 
core signé  le  bail  de  la  salle  avec  la  Ville.  Les  syndics  de  la  faillite 
Carvalho  auraient  la  prétention  de  lui  imposer  l'acquisition  du  matériel 
et  des  décors  estimés  par  les  experts  à  plus  de  300,000  francs.  M.  Pas- 
deloup résiste  avec  d'autant  plus  de  force  à  cette  exigence  que  la  majeure 
partie  des  décors  et  des  costumes  actuels  s'appliquent  à  des  pièces  qu'on 
a  enlevées  au  répertoire  et  qu'il  ne  pourrait  plus  jouer;  il  veut  donc 
prendre  le  local  nu,  sauf  à  acheter  aux  syndics,  amiablement  ou  aux 
enchères,  la  partie  du  matériel  appropriée  aux  opéras  qu'il  conserverait 
et  qu'il  lui  conviendrait  de  monter.  En  attendant  que  la  question  soit 
vidée,  II.  Pasdeloup  s'occupe  de  ses  engagements,  et  l'on  cite  déjà  comme 
ses  pcn.-ionnairL's  ;  Monjauze,  Bosquin,  Wartel  et  Mlle  Schneder.  Il 
a  aussi  traité,  pour  la  Conduite  de  l'orchestre,  avec  le  célèbre  Karl 
Eckert,  compositeur  allemand  fort  distingué,  très-connu  à  Paris  et  qui 
remplacera  M.  Deloff're.  Enlin,  Mlle  Mai'ie  Roze  fera  aussi  partie  de  son 
personnel. 

***  Ainsi  que  nous  l'avons  annoncé,  M.  Martinet  continuera  l'exploi- 
tation des  Fantaisies-Parisiennes,  dont  la  réouverture  aura  lieu  le  20 
septembre  par  le  Soldat  inal<jré  lui,  opéra-comique  en  deux  actes  de  MM. 
Chivot  et  Duru,  musique  de  Fr.  Barbier.  Aux  anciens  artistes,  MM.  Ar- 
sandaux,  Barnolt,  Gabriel,  Bonnet  et  Mme  Decroix,  sont  venus  s'ajouter 
M.  Soto,  basse-chantante  de  talent,  et  Mlle  Palm,  jeune  suédoise,  la 
future  Niisson  de  l'endroit.  Pour  ce  qui  est  du  répertoire,  M.  Frederico 
Uicci,  un  des  auteurs  de  CriSfdno  e  la  Comare,  a  donné  trois  actes 
sur  un  livret  de  M.  Victor  Walder;  on  parle  aussi  d'un  ouvrage  de 
M.  de  Flotow,  d'une  pièce  inédite  de  Cimarosa  et  de  la  reprise  du  Bar- 
bier, de  Paësiello. 

sf*^  Le  programme  de  réouverture  du  théâtre  des  Bouffes-Parisiens 
se  composera,  comme  nous  l'avons  dit ,  du  Soldat  magicien,  pièce 
d'Otfenbach,  donnée  avec  succès  à  Ems.  d'un  acte  du  maestro ,  en 
collaboration  avec  MM.  Chivot  et  Duru,  et  de  V Arche- Marion,  d'Albéric 
Second,  musique  d'Adolphe  Nibelle. 

,*^  C'est  jeudi  prochain,  3  septembre,  que  le  théâtre  de  l'Athénée 
compte  faire  sa  réouverture  par  la  79°  représentation  de  Fleur  de  Thé. 
Pour  accompagner  cet  opéra-bouffe  on  donnera  un  petit  acte  de 
MM.  Chivot  et  Duru,  .'1  la  Baguette,  \aMà&i\\\e,  représenté  antérieurement 
aux  Boufl'es-Parisiens,  et  qui  sera  joué  par  Pelardy  et  Mlle  Dertelli, 
nouvellement  engagés  à  ce  théâtre.  —  Mlle  Camille  Parent,  sœur  de  la 
danseuse  de  l'Opéra,  a  aussi  été  engagée  par  M.  W.  Busnach. 

^*if  Le  nouvel  opéra-bouffe  d'Oifenbach,  la  Périchole,  est  en  pleine  ré- 
pétition aux  Variétés.  —  La  partition  en  a  été  acquise  par  les  éditeurs 
Brandus  et  Dufour. 

»*:f  On  lit  dans  le  Figaro  :  o  L"Eldorado  vient  de  représenter,  avec  une 
verve  et  un  succès  dignes  du  théâtre,  une  bouffonnerie  mythologique, 
Ténus  infidèle,  paroles  de  M.  A.  Pouillon,  musique  de  M.  Léon  Roques. 
Cette  farce,  qui  joint  au  mérite  d'être  gaie  celui  d'être  courte,  est  crâne- 
ment jouée  et  chantée  par  Mlle  Chrétienne  (Vénus),  Valérie  (Adonis)  et 
M.  Victor  (Mars).  —  Tous  les  soirs,  à  dix  heures  un  quart,  ce  n'est 
pendant  vingt  minutes  que  rires  et  bravos.  On  ne  pouvait  mieux  inau- 
gurer la  saison  d'hiver.  » 

,t*t  On  nous  écrit  de  Bordeaux  :  «  Jamais  notre  Grand-Théâtre  n'avait 
offert  de  féerie  à  ses  habitués  et,  il  fallait  de  la  hardiesse  à  un  directeur 
pour  risquer  cette  innovation.  Mais  le  succès  justifie  tout,  et  M.  Halanzier 
n'a  qu'à  se  féliciter  d'une  tentative  par  laquelle  il  aura  brillamment  pré- 
ludé à  sa  saison  d'hiver,  qu'il  prépare  d'ailleurs  avec  ses  soins  et  son 
habileté  ordinaire.  11  est  vrai  de  dire  que  notre  intelligent  directeur 
n'avait  pas  marchandé  la  dépense,  et  notre  public  a  pu  se  dire  qu'il 
avait  vu  Feau-d'Ane  dans  toute  sa  splendeur  et  telle  qu'elle  a  été  repré- 
sentée à  Paris.  Acteurs,  décors,  costumes,  tout  avait  été  importé,  et  plus 
de  soixante  représentations  consécutives  de  cet  ouvrage  n'auront  pas 
épuisé  la  curiosité  de  notre  public,  qui  s'y  porte  encore  en  foule  et  dont 
il  faut  chaque  soir  refuser  une  partie.  —  De  son  côté  M.  Lambert  va, 
le  1^''  septembre,  rouvrir  le  théâtre  Français  avec  Fleur  de  Thé,  qu'il  a 
interrompue  en  plein  succès.  —  Le  même  jour  verra  aussi  l'inaugura- 
tion du  nouveau  théâtre  Louit,  pour  lequel  il  a  été  dépensé  une  somme 
de  1,200,000  francs.  Nous  l'avons  visité  du  haut  en  bas  et  il  n'y  a  que 


DE  PARIS 


279 


des  éloges  à  donner  à  l'architecte  qui  l'a  construit.  La  coupe  de  la 
salle  est  des  plus  heureuses,  et  elle  peut  contenir  aisément  3,000  specta- 
teurs. Toutes  les  améliorations  réalisées  dans  ces  derniers  temps  ont  été 
mises  à  profit  pour  le  bien-être  et  la  commodité  du  public.  Les  loges  sont 
spacieuses,  l'acoustique  excellente,  et  on  voit  et  on  entend  de  tous  les 
points  de  la  salle:  les  rangs  de  fauteuils  sont  largement  espacés  et  per- 
mettent un  pacsage  facile;  les  sièges  en  sont  élastiques,  les  banquettes  con- 
venablement rembouirécs,  et  ni  le  velours  ni  le  cuir  n'y  ont  été  épar- 
gnés. Les  proportions  et  la  splendeur  du  foyer  ne  laissent  rien  à  désirer, 
et  au-dessous  un  fumoir,  complément  indispensable  aujourd'hui,  s'ou- 
vrira pour  les  amateurs.  —  Mais  ce  n'est  pas  seulement  des  habitués  des 
grandes  places  que  l'on  s'est  occupé,  les  spectateurs  du  paradis  n'auront 
dans  aucun  théâtre  été  si  bien  traités;  la  chaleur  ne  les  étouffera  plus, 
grâce  à  une  douzaine  de  fenêtres  percées  de  distance  en  distance  dans  la 
courbe  et  qui  s'ouvriront  à  volonté;  de  plus,  à  cette  hauteur,  on  a 
trouvé  le  moyen  de  ménager  une  belle  terrasse-foyer  donnant  sur  la  rue, 
où  ils  pourront,  dans  les  entr'actes,  fumer  la  pipe  et  boire  la  chope  à 
leur  aise.  —  Pour  terminer  ce  qui  concerne  la  salle,  disons  que  l'orne- 
mentation en  est  en  même  temps  riche  et  dune  simphcilé  de  bon  goût; 
l'or  le  plus  fin  a  été  employé  pour  les  dorures;  les  peintures  du  plafond, 
les  arabesques  de  chacune  des  portes  des  loges  sont  trcs-snignées  et  l'en- 
semble de  la  décoration  offre  le  plus  harmonieux  coup  d'œil.  La  scène 
est  disposée  sur  huit  plans  de  profondeur  et  se  prêtera  facilement  à 
toutes  les  exigences  du  spectacle. — C'est  sous  la  direction  et  sur  les  avis 
de  M.  Robert  Kemp,  qui  fut,  il  y  a  quelque  trente  ans,  pensionnaire  du 
Théâlre-Français,  que  tous  les  travaux  ont  été  exécuiés  par  des  ouvriers 
bordelais  et  avec  des  matériaux  provenant  tous  du  pays.  Il  s'est  en- 
tendu avec  M.  Louit  pour  exploiter  dans  le  nouveau  théâtre  la  comédie, 
le  drame,  le  vaudeville,  l'opérette  et  l'opéra-comique.  C'est  par  la  comé- 
die qu'il  commencera  ;  sa  troupe,  composée  des  meilleurs  sujets  qu'il  a 
trouvé  à  recruter  en  province,  est  prête;  son  orchestre,  composé  de  vingt 
musiciens,  l'est  également;,  il  possède  une  grande  expérience  pratique 
du  théâtre,  les  prix  d'entrée  sont  modestes  ;  M.  Robert  Kemp  réunit 
donc  toutes  les  conditions  qui  assurent  le  succès.  » 

^'''-i:  La  célèbre  cantatrice  Désirée  Artôt,  après  ses  brillants  succès  à 
Hombourg,  vient  de  revenir  à  Paris.  Elle  prendra  une  semaine  de  repos 
dans  sa^■ilIa  de  Ville-d'Avray,  avant  de  se  mettre  en  route  pour  Moscou, 
où  l'on  sait  qu'elle  est  engagée  pour  plusieurs  mois  à  de  magnifiques 
conditions. 

**jSs  Mme  Ugalde  est  de  retour  à  Paris  de  sa  fructueuse  tournée  en 
province,  où  elle  a  si  brillamment  exploité  la  Grande-Duchesse  de  Gé- 
rdlstein . 

if*^  Mlle  Tietjens,  prima  donna  de  Her  Majest'ys  théâtre,  est  en  ce 
moment  à  Paris.  Mlle  Tietjens  assistait  mercredi  à  la  représentation 
à'Hamlet,  et  après  le  i°  acte  elle  est  allée  complimenter  Mlle  Nilsson. 
—  Le  célèbre  baryton  Santley  est  également  à  Paris. 

if*ii,  Une  artiste  qu'on  a  vue  avec  plaisir  aux  Fantaisies-Parisiennes  et 
à  l'Athénée,  Mme  Bonnelli,  vient  d'être  engagée  à  Milan, 

^*ii;  La  troupe  d'opérette  recrutée  à  Paris  par  le  représentant  de 
M.  Grau,  directeur  du  théâtre  français  de  New- York,  peut  être  considérée 
comme  complète.  Voici  les  noms  des  principaux  artistes  qui  y  figurent  : 
Mmes  Rose  Bell  (Lapommeraye),  Desclauzas,  Goby-Fontanel,  Alard-Gue- 
retti,  Victoria  Maurice;  MM.  Carrier  et  Beckers  (de  l'Opéra-Comique), 
Gabel  (des  Menus-Plaisirs),  Goby  (des  Fantaisies-Parisiennes),  etc.  Le  chef 
d'orchestre  est  M.  Robert  Stœpel.  C'est  Geneviève  de  brabanl  et  le  char- 
mant ouvrae  de  Charles  Lecocq,  Fleur  de  Thé,  qui  ouvriront  la  cam- 
pagne. 

,**  Mlle  Salvioni,  dont  Paris  a  applaudi  la  danse  et  la  mimique,  vient 
de  débuter  au  Grand-Théâtre  de  Vienne  dans  le  Diable  amoureux. 


NOnVEUES  DIVERSES. 

^*sf  En  considération  des  services  rendus  par  M.  J.  Pasdeloup  à  l'ins- 
truction publique,  au  point  de  vue  musical,  M.  Duruy,  par  arrêté  du 
15  de  ce  mois,  l'a  nommé  officier  d'académie. 

^**  Berthelier  est  de  retour  à  Paris.  Avant  de  rentrer  au  théâtre  de 
ses  premiers  succès,  où  il  doit  débuter  dans  une  œuvre  nouvelle  d'Ofïen- 
bach,  il  a  bien  employé  ses  dernières  semaines  de  loisir.  Nous  lisons 
dans  le  Siècle  qu'après  avoir  donné  au  Casino  du  Tréport  un  premier 
concert,  auquel  plus  de  deux  cents  personnes  n'ont  pu  trouver  place  et 
dont  la  recette  a  produit  d,100  francs,  il  a  du  en  donner  successivement 
deux  autres  non  moins  courus  et  dont  le  dernier  était  au  profit  des 
pauvres.  Une  des  chansonnettes  dites  par  l'excellent  comique  et  qui  a 
produit  le  plus  d'effet  est  celle  de  Bourget  et  Lhuillier  :  C'est  ma  fille, 
qu'il  chante  en  costume  avec  une  vérité  de  gestes  et  d'intonation  à  faire 
pâmer  de  rire,  et  qu'il  a  dû  répéter  aux  acclamations  de  la  salle  entière. 
Après  ce  brillant  exploit  Berthelier  est  allé  de  nouveau  se  faire  applaudir 
à  Saint-Malo  en  compagnie  de  Sivori  et  de  Mlle  Harris. 


^"if  A  plusieurs  reprises  déjà  divers  compositeurs  ont,  sans  les  en  pré- 
venir, mis  le  nom  de  MM.  Brandus  et  Dufour  comme  éditeurs  sur  de.s 
publications  dont  le  hasard  seul  leur  a  révélé  l'existence.  Sans  vouloir  pré- 
ciser davantage,  MM.  Brandus  et  Dufour  nous  prient  de  faire  savoir 
qu'ils  protestent  contre  cet  abus  fait  de  leur  nom  et  qualité,  et  qu'ils  en 
déclinent  toute  conséquence. 

t%  On  nous  écrit  de  Saint-Gerniain-en-Laye  :  «  A  l'une  des  inté- 
ressantes et  trop  rares  matinées  de  musique  de  chambre  que  Mme  Ma- 
ckonzie  offre  à  quelques  amateurs  de  son  intimité,  on  a  entendu  une 
jeune  pianiste  étrangère,  Mlle  Flynn,  élève  du  Conservatoire  de  Leipzig, 
qui  exécute  spécialement  la  musique  des  grands  maîtres.  Cette  jeune 
artiste  lajoue  avecun  aplomb,  unesûretéet  une  fougue  vraiment  entraî- 
nante et  qui  lui  préparent  le  plus  bel  avenir.  Elle  a  exécuté  magistrale- 
ment une  sonate  de  Mendelssohn  et  une  polonaise  de  Chopin  avec  l'inap- 
préciable avantage  d'être  accompagnée  par  l'excellent  violoncelliste 
Norblin,  chez  lequel  le  talent  est  traditionnel  de  père  en  fils,  et  qui,  dans 
les  loisirs  que  lui  fait  sa  retraite  de  violoncelle-solo  à  l'orchestre  de 
l'opéra,  habite  avec  sa  famille  au  Vésinet.  Un  magnifique  trio  dellum- 
mel,jouépar  trois  maîtres,  Mme  Mackenzie,  pour  lepiano,  Norblin,  pour  la 
basse,  et  Allard  —  qui  transposait  instantanément  la  partie  de  violon 
pour  la  flûte,  son  instrument  —  a  clos  la  séance  de  la  façon  la  plus 
étourdissante.  » 

»**  L'église  paroissiale  de  Saint-Denis  vient  de  .s'enrichir  d'un  orgue 
de  tribune  sorti  des  ateliers  de  la  Société  Merklin-Schiitze,  à  laquelle  la 
construction  de  ce  bel  in.strument  fait  le  plus  grand  honneur.  Plusieurs 
artistes  émi'nents  avaient  été  appelés  à  la  séance  solennelle  de  réception 
pour  en  faire  valoir  les  qualités.  C'était  d'abord  M.  Ed.  Batiste,  l'émi- 
nent  organiste  de  Saint-Eustache,  puis  M.  Renaud  de  Vilbac,  dont  tout 
le  monde  connaît  le  talent  gracieux  et  facile.  M.  l'abbé  Ply,  maître 
de  chapelle  de  la  cathédrale  de  Soissons,  a  fait  à  son  tour  entendre  un 
grand  chœur  avec  récit  de  voix  humaine,  dont  l'inspiration  religieuse 
élevée  a  été  remarquée  de  tous.  M.  Duval,  organiste  de  la  paroisse  de 
Saint-Jacques,  à  Reims,  et  enfin  M.  Delhaye,  organiste  de  Saint-Denis, 
ont  dignement  clos  cette  intéressante  solennité,  dans  laquelle  la  Société 
chorale  de  Saint-Denis  a  fait  apprécier  la  justesse,  l'ensemble  et  l'expres- 
sion avec  lesquels  elle  a  dit  les  divers  morceaux  intercalés  dans  le  pro- 
gramme de  l'habile,  directeur  M.  Desmet. 

^%  Dimanche  dernier  a  eu  lieu,  à  Dunkerque,  l'inauguration  du  Casino 
de  la  Villa  des  Dunes.  C'est  un  des  plus  beaux  et  des  plus  grands  qui 
existent  en  Europe.  La  situation  en  est  des  plus  pittoresque.  Un  beau 
concert  et  up  bal  ont  signalé  cette  inauguration,  qui  avait  attiré  beau- 
coup de  monde. 

^%  Un  grand  bal,  au  bénéfice  de  M.  Desgranges,  le  chef  d'orchestre 
et  directeur  du  Casino,  vient  de  clore  brillamment  les  fêtes  du  lo  août 
organisées  à  Deauville.  Toute  la  Société  de  Deauville,  à  laquelle  s'était 
jointe  celle  de  Trouville,  s'y  trouvait,  empressée  de  donner  à  M.  Des- 
granges une  nouvelle  preuve  de  son  estime  et  de  sa  S3'mpathie.  Son  or- 
chestre a  fait  merveille  et  le  quadrille  de  Fleur  de  Thé  a  obtenu  un  grand 
succès. 

^'^  La  Société  philharmonique  d'Arras  a  donné,  le  2i,  une  brillante 
soirée  musicale  à  laquelle  le  violon  d'Alard  et  les  voix  charmantes  de 
Mlles  Laura  Harris  et  Schrœder  donnaient  un  attrait  particulier.  VAve 
Maria  de  Gounod,  chanté  par  cette  dernière,  a  été  bissé.  On  a  aussi  beau- 
coup applaudi  Steller,  qui  a  chanté  en  maître  un  air  de  Lucrezia 
Borgia . 

*■*,;;  La  maison  où  naquit  Beethoven ,  à  Bonn,  et  qu'on  a  ornée  il  y  a 
quelque  temps  d'une  plaque  commémorative,  est  aujourd'hui  à  vendre. 

***  Lundi  est  mort  à  Saint-Cheron  le  célèbre  peintre  de  décors 
Ciceri  père;  il  était  âgé  de  86  ans. C'est  la  musique,  dit  M.ï.  Feyrnet, 
qui  l'avait  d'abord  attiré .  A  quatorze  ans,  il  était  à  l'orchestre  de  Séra- 
phin et  jouait  du  violon  pour  accompagner  pohchinelle  et  les  ombres 
chinoises.  Parent  de  Martin  et  d'Elleviou,  il  entra  au  Conservatoire,  où 
il  resta  douze  ans.  Sa  voix  était  charmante,  mais  il  fut  un  jour  ren- 
versé par  une  voiture  et  resta  boiteux  .-  c'est  alors  qu'il  se  tourna  vers 
la  peinture.  11  travailla  sous  la  direction  de  Bellangé,  architecte  du  roi, 
et  entra  dans  l'atelier  de  décoration  de  l'Opéra .  Le  clair  de  lune  de  la 
Vestale  fut  son  premier  succès.  Les  décors  qu'il  fit  ensuite  pour  Armide 
et  pour  la  Lampe  merveilleuse  accrurent  sa  réputation  ;  il  était  dès  lors 
le  premier  artiste  du  genre.  Ciceri  n'a  pas  peint  moins  de  quatre 
cents  décors.  Le  roi  Jérôme  le  fit  appeler  en  1810,  et  le  chargea  de  res- 
taurer le  Grand-Théâtre  de  Cassel.  En  1825,  il  fut  le  décorateur  des 
fêtes  du  sacre  de  Charles  X.  M.  Ciceri  avait  épousé  la  fille  d'isabey,  le 
célèbre  miniaturiste.  MM.  Cambun,  Despléchin  et  Séchan  sont  ses  élèves. 

^f"**  Un  ténor  qui  laisse  une  belle  réputation  en  province,  M.  Péronnet, 
et  qui  obtint,  à  l'Odéoa,  un  grand  succès  dans  le  rôle  d'.llmaviva  du 
Barbier,  vient  de  mourir  à  l'âge  de  78  ans. 

4*,,,  Mme  Victor  Hugo  a  succombé  jeudi  à  Bruxelles  à  une  longue  et 
douloureuse  maladie.  Cette  nouvelle  a  produit  une  grande  sensation  à 
Paris. 


280 


UliVLE  ET  GAZETTE  MUSICALE  DE  I>A11I6. 


t*^  L'éminent  pianiste  compositeur  Louis  Laeombe  vient  d'être  frappé 
dans  ses  plus  chères  affections.  Il  a  cette  semaine  perdu  sa  femme, 
morte  à  la  suite  d'une  longue  et  douloureuse  maladie. 

*%  Notre  collaborateur  Arthur  Pougin  vient  d'avoir  la  douleur  de 
perdre  un  de  ses  enfants. 

ÉTRANGER 

»*(^  Mannheim. —  L'Africaine,  de  Meyerbeer,  vient  d'être  reprise  avec 
un  éclatant  succès.  Tous  les  artistes  ont  chanté  et  joué  leurs  rôles  avec 
talent;  mais  Betz,  l'excellent  baryton  de  Berlin,  a  surtout  été  bruyam- 
ment applaudi  et  rappelé  plusieurs  fois.  Le  rôle  de  Nelusko  paraît  être 
celui  qui  convient  le  mieux  à  la  nature  de  son  talent.  Il  le  détaille  avec 
infiniment  d'arl  et  le  chante  avec  l'ampleur  et  l'énergie  qui  conviennent 
si  bien  au  personnage.  Betz  est  un  véritable  tragédien  lyrique.  Les 
choeurs  ont  chanté  avec  beaucoup  d'ensemble,  et  l'orchestre  est  magnifi- 
que. Lachncr  le  dirige  avec  cette  supériorité  qui  lui  a  acquis  une  si  grande 
célébrité  en  Allemagne.  —  On  va  reprendre  l'opéra  de  Ferdinand 
Langer  :  le  Voisinage  dangereux. 

,*,,  Carlsruhe.  —  Stradella,  de  Flotow,  a  été  repris  et  écouté  avec  le 
plus  grand  plaisir.  Cet  ouvrage  est  très-apprécié  en  Allemagne,  on  le 
considère  comme  le  meilleur  opéra  de  Flolow.—  Betz.  le  baryton  de  Ber- 
lin, a  obtenu  un  véritable  triomphe  dans  Guillaume  Tell. 

^,*^  Hombourg.  —  Semiramide  a  été  donnée  le  22  août.  Adelina  Patti 
y  a  été  ce  qu'elle  est  toujours,  une  cantatrice  admirable;  de  plus,  elle  y 
a  fait  preuve  d'une  profondeur  de  sentiment  et  d'une  ampleur  drama- 
tique qui  semblent  se  développer  chaque  jour.  Trois  cadences  nouvelles, 
que  Rossini  a  écrites  exprès  pour  elle,  ont  émerveillé  l'assistance.  — 
Agnesi  a  été  magnifique  dans  le  rôle  d'Assur. 

»*,f  Wildbnd  (Wiirtemberg) .  —  Seligmann,  E.  Stœger  et  Besekirsky 
ont  donné  dans  la  grande  salle  du  Kurhans  un  magnifique  concert. 
Stoeger  a  joué  avec  la  marche  de  Tannhauser  ses  charmantes  composi- 
tions si  appréciées  en  Allemagne  comme  en  France.  Seligmann  a  fait 
entendre  le  Secret,  Pibroch,  Berceuse  de  l' Enfantelet,  avec  l'immense  suc- 
cès qui  le  suit  partout.  Besekirsky  n'a  pas  été  moins  applaudi  que  ses 
brillants  partenaires  en  exécutant  ses  compositions  et  en  faisant  sa  partie 
dans  le  trio  en  ul  mineur  de  Mendelssohn. 

**,  Leipzig.  —  Un  nouvel  opéra  de  Wesmeyer,  Die  Brandschatzung 
(la  Contribution  de  guerre),  sera  représenté  au  commencement  de  sep- 
tembre. —  Ant.  Rubinstein  est  attendu  ici  au  mois  d'octobre. 

:!,*,  Berlin.  —  Les  représentations  d'opéra  ont  recommencé  le  il  avec 
Fidclio,  suivi  du  Porteur  d'eau  {les  Deux  Journées),  de  Chcrubini,  et  du 
Lac  des  Fées,  d'Auber.  —  Pauline  Lucca,  attendue  le  28,  repartira  dans 
quelques  jours  pour  aller  donner  des  représentations  à  Leipzig,  à  l'occasion 
de  la  foire.  Un  congé  lui  a  été  accordé,  comme  l'année  dernière,  pour 
chanter  à  Saint-Pétersbourg, 

***  Vienne.  —  L'inauguration  du  nouvel  Opéra  aura  lieu  dans  les  pre- 
miers mois  de  1869,  et  non  pas  avec  Lohengrin,  comme  on  l'avait  dit, 
mais  avec  un  opéra  de  Mozart. 

^*^,  Madrid.  —  Mme  Gueymard,  dent  l'engagement  est  maintenant 
certain,  débutera  dans  II  Trovatore;  elle  chantera  ensuite  /(  Profeta, 
la  Favorita,  Gli  Vgonotti  et  l'Africana.  —  La  question  de  la  réorganisa- 
tion des  musiques  militaires  est  à  l'ordre  du  jour  :  le  maestro  Bar- 
bieri  est  parti  pour  Berlin  et  Vienne,  chargé  officiellement  d'étudier, 
avec  le  concours  de  MM.  Wieprecht  et  A.  Zimmermann,  la  composi- 
tion des  musiques  allemandes. 


^\  Bussclo.  —  Le  Théâtre-Verdi,  nouvellement  construit,  a  été  inau- 
guré le  lo  aoiit  avec  Rigoletto.  Verdi  n'était  pas  prâsent;  et  les  hommages 
de  ses  concitoyens  se  sont  adressés  à  son  buste,  qui  a  été  couronné  et 
salué  d'acclamations  chaleureuses.  On  a  aussi  exécuté  à  cette  occasion 
une  sorte  de  .symphonie  historique,  écrite  par  Verdi  à  l'âge  de  douze  ans 
et  intitulée  la  Capricciosa.  —  Les  robes  des  dames  étaient  vertes;  vertes 
aussi  étaient  les  cravates  des  hommes. 

,*^  Milan.  —  L'imprésario  Herrmann ,  directeur  de  la  troupe  fran- 
çaise d'opéra-bouffe  qui  va  parcourir  les  principales  villes  d'Italie,  vient 
d'installer  ses  pénates  au  théâtre  Carcano.  Ses  principaux  artistes  sont 
MM.  Lucien ,  Giraud  ,  Lsevendal ,  Alvarez ,  Mmes  Laurenc,  Bonly,  Fia- 
chat.  La  Grande-Duchesse  ouvrira  la  campagne;  puis  viendront  le  Pont 
des  Soupirs,  la  Belle  Hélène,  la  Chanson  de  Fortunio,  M.  et  Mme  Denis, 
d'Offenbach,  et  Fleur  de  Thé,  de  Lecocq.  —  L'opéra-comique  est  repré- 
senté au  programme  par  Galathée  et  les  Noces  de  Jeannette,  de  Victor 
Massé. 


I.t  Direclaur  :  S.  DnFOUn. 

EN  VENTE  : 
Chez  BRANDUS  et  DUFOUR,  éditeurs,  403,  rue  de  Richelieu. 


Adah  Menken, 

Grande  Valse  tirée  du  ballet  du  drame 

LES  PIRATES  DE  LA  SAVAIVE 


Pour  Piano. 


STRAUSS 


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Grand  Quadrille 

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LES      FUGITIFS 

Drame  de  MM.  Bourgeois  et  Dugué, 

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ALE2LANDRE    ARTUS 

Pour  Piano.  —  Prix  :  4  fr  SO. 


Léos  -  Galop, 

Exécuté  dans  le  drame 

PIRATES    DE    LA    SAVANE 


LES 


Pour  Piano. 


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(Avec  le  portrait  d'Adah  Menken)  Prix  :  5  fr. 


Nouvelle  Collection  (huitième) 

DES   MEILLEURS 

QUADRILLES,   VALSES,    POLKAS,  POLKAS-MAZL^KAS,  ETC. 


i. 

Hasard 

Valse  des  Deux  Aveugles. 

2. 

— 

Valse  de  Tromb-al-Cazar . 

3. 

— 

Polka  des  Deux  vieilles  Gardes. 

4. 

Hersog . 

Polka  Coucou  et  Cricri. 

5. 

Arban . 

Quadrille  de  la  Grande-Duchesse 
de  Gérolstein. 

6. 

Strauss 

Valse  de  la  Grande-Duchesse  de 
Gérolstein. 

Composés  par  Strauss,  Arban,  Marx,  Mey,  Musard,  Roques,  Ettling,  Labitski,  etc., 

ARRANGÉS 

Pour  un  Violon,  pour  un  Cornet  et  pour  une  Flûte. 

7.  Roqnes.  Polka  et  polka  -  mazurka  de  la 
Grande-Duchesse  de  Gérolstein. 

8.  Strauss.  Valse  du  Pardon  de  Ploërmel. 

9.  —         Valse  de  Lischen  et  Fritzchen. 

10.  Patll  (Ad.).  Valse:  Fleur  du  Printemps. 
H.  Slusard.  Valse  des  Bavards. 

12.  Arban.  Quadrille  sur  iîodiiison  Crusoë. 

13.  Strauss.  Quadrille  sur  Martha. 

14.  Marx.  Quadrille  sur  V Africaine . 

La  collection,  net  7  fr.  — 


Chaque  n",  1  fr.,  prix  marqué.  — 


15.  Strauss.    Quadrille   Echo    des    Bouffes- 
Parisiens  . 

16.  liamotte.  Quadrille  sur  Fra  Diavolo. 

17.  Arban.  Polka  du  Brésilien. 

18.  Doppler.  Grande  Polka  des  Horloges  de 
la  forêt  Noire. 

19.  Boaues.  Polka  de  Robinson  Crusoë. 

20.  Arban.  Polka-mazurka  de  F  Africaine. 

Chaque  n",  i  fr.,  prix  marqué. 


inPBlaiEBIE  CBNTBALE  DES  CHEHIKS  DE  FEE   —  A.    CHAIZ  ET  C**,  EVE  BEEGEBB, 


BUREAUX    A    PARIS  :    BOULEVARD   DES   ITALIENS.  1. 


W  Année. 


N'  36. 


G  Septembre  1868. 


ON   S'ABONNE  : 

Dons  les  Diipnricments  ot  û  rKlrongtT, 

chez  tous  les  Marchands  de  Musique,  Us  Libraire», 

et  aui  Cureaux  der  Messageries  et  des  Postes. 


PRIX    DE    L'ABONNEMENT: 

Paris -4    r.itnran 

Déportenr-nts,  Belgique  et  SuissL-.,..    :W  ••       id. 

Étranger 34  •>       i<L 

Le  Journal  paraît  ic  Dimanche. 


GAZETTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


SOMMAIRE.  —  La  Jeunesse  de  Gathe,  —  Études  sur  Charles-Marie  de  WebeJ' 
(troisième  partie,  T  article),  par  Edmond  IVenkomm.  —  Nouvelles  des 
théâtres  lyriques.  —  Nouvelles  diverses.  —  Annonces. 


LÀ  JEUNESSE  DE  GŒTHE. 

Nous  avons  publié  dans  notre  numéro  du  30  août  la  plaidoirie 
de  M"  Leberquier  pour  M.  Blaze  de  Bury,  demandeur.  M"  Cré- 
mieux,  avocat  des  héritiers  Meyerbeer,  a  répondu  en  ces  termes  : 

Messieurs,  si  je  pouvais  demander  au  Tribunal  un  jugement  favorable 
à  la  réclamation  de  M.  Blaze  de  Bury,  j'en  serais  heureux  :  le  théâtre 
livrerait  un  autre  chef-d'œuvre  à  nos  applaudissements;  autour  de  cette 
illustre  mémoire  de  Meyerbeer  resplendirait  un  nouveau  rayon.  Mais  que 
pouvons-nous  devant  la  désolante  parole  du  grand-maitre,  interdisant  la 
publication  de  ses  compositions  inédites?  Que  pouvons-nous  devant  cette 
touchante  parole  de  l'époux  et  du  père  :  «  Je  m'adresse,  pour  que  ma 
volonté  soit  rigoureusement  exécutée,  à  la  piété  de  ma  femme,  à  la  piété 
de  mes  enfants.  »  La  piété  pour  ce  glorieux  époux ,  la  piété  pour  ce 
père  immortel  !  Si  vous  la  connaissiez ,  si  vous  saviez  quelle  tendre  et 
touchante  affection  remplit  l'âme  de  la  veuve,  quelle  vive  et  respectueuse 
vénération  remplit  le  cœur  de  ses  trois  filles!  C'est  le  touchant  souvenir 
de  la  vie  intime  dans  les  intervalles  de  tant  de  travaux,  c'est  l'adoration- 
de  cette  gloire  immense  dont  elles  se  sentent  elles-mêmes  enveloppées  et 
grandies.  Meyerbeer  a  dit  sa  volonté,  il  a  invoqué  la  piété  de  son  épouse 
et  de  ses  enfants;  elles  se  sont  respectueusement  inclinées.  Dès  le  lende- 
main du  jour  où  le  testament  a  été  lu ,  les  cahiers ,  le  journal ,  le  car- 
net, les  pensées  musicales  jetées  sur  des  feuilles  détachées,  les  composi- 
tions inédites ,  toule  cette  précieuse  musique  a  été  religieusement  ren- 
fermée sous  cachet  et  sous  clef.  Puisse  un  de  ses  petits-fils,  animé  de  son 
esprit,  je  voudrais  pouvoir  dire  inspiré  du  soufBe  de  son  génie,  ouvrir, 
dans  quelques  années,  les  coffres,  dépositaires  de  ces  trésors,  livrer  à 
l'admiration  publique  les  pages  monumentales,  et  abandonner  aux  émo- 
tions du  cœur  les  délicieuses  pensées  qui  s'échappent  avec  tant  de  charme 
de  cette  imagination  aussi  suave  dans  ses  œuvres  légères  que  merveil- 
leuse dans  ses  vastes  compositions! 

Messieurs,  la  demande  de  M.  Blaze  de  Bury  peut-elle  réussir  et  faire 
disparaître  la  barrière  qu'entre  lui  et  les  héritiers  de  Meyerbeer  élève  le 
testament  que  vous  connaissez? 

En  d'autres  termes ,  Meyerbeer  a-t-il  contracté  envers  Blaze  de  Bury 
l'obligation  de  lui  délivrer  la  partition  qu'il  réclame  à  sa  veuve  et  à  ses 
enfants,  qui  le  représentent  comme  ses  héritiers?  C'est  la  question  que 
vous  avez  à  résoudre.  Est-ce  une  question?  Où  donc  M.  Blaze  prend-il 
son  droit?  Les  obligations  civiles  n'ont  que  deux  origines  :  la  loi,  le 
contrat.  Assurément,  on  ne  prétendra  pas  trouver  dans  une  loi  l'obli- 
galion  dont  on  veut  l'accomplissement.  Il  faut  donc  la  chercher  dans  un 
contrat.  Mon  habile  adversaire  l'a  compris  ainsi,  et,  à  défaut  d'une  con- 


vention, il  trouve  flans  la  correspondance  qu'il  vous  a  fait  connaître  la 
source  du  droit  qu'il  réclame.  Nous  allons  la  reprendre  et  remettre  sous 
vos  yeux  cette  correspondance  que  l'on  présente  comme  preuve  d'un 
contrat,  et  qui,  à  mon  avis,  est,  entre  nos  mains,  une  arme  qui  repousse 
toute  attaque.  Mais,  avant  tout,  fixons  bien  la  situation  de  Blaze  de  Bury 
et  de  Meyerbeer;  nous  aurons  enlevé  la  plus  spécieuse  des  argumenta- 
tions que  vous  avez  entendues. 

S'il  faut  admettre  le  récit  de  Blaze  de  Bury,  il  a  composé  une  pièce  en 
collaboration  avec  Meyerbeer;  tous  deux  réunis,  ils  ont  coopéré  à  un 
ensemble  qui  constitue  l'œuvre  commune,  absolument  comme  si  dans  un 
tableau  Ruysdael  avait  tracé  un  vaste  paysage  et  Wouwermans  placé 
des  chevaux  qui  courent  noblement  dans  la  prairie.  Dépendrait-il  de 
l'un  des  deux  grands  peintres  de  faire  disparaître  cet  ouvrage,  fruit  du 
génie  de  l'un  et  de  l'autre? 

Non ,  non  !  celte  propriété  indivisible  a  ses  lois  que  nous  n'avons  pas 
besoin  de  rappeler,  et,  sans  chercher  hors  de  la  cause  même,  nous  voyons 
Meyerbeer  s'incliner  dans  le  testament,  devant  le  droit  qui  résulte  de  la 
collaboration.  Ecoutons-le  autorisant  la  représentation  de  Vasco  de  Gama, 
de  V Africaine  :  «  Comme  le  libretto  de  Vasco  de  Gama  est  du  défunt 
poëte  Scribe ,  on  devra  obtenir,  tant  pour  la  publication  que  pour  la 
représentation,  la  permission  de  Mme  Scribe  sa  veuve.  » 

Ainsi  Scribe  a  fait  le  poëme,  Meyerbeer  la  musique.  Il  a  fallu  l'accord 
de  tous  deux  pour  la  composition,  il  faudra  l'accord  de  tous  deux  pour 
la  représentation.  Comment  donc  l'homme  qui  connaissait  si  bien  le 
droit  de  Scribe,  son  collaborateur,  aurait-il  méconnu  le  droit  de  son 
collaborateur  Blaze  de  Bury?  Cela  ne  tombe  pas  sous  le  sens.  Mais  c'est 
que  Blaze  n'est  pas  le  collaborateur  de  Meyerbeer;  c'est  que  l'œuvre  de 
l'un  est  complètement  indépendante  de  l'œuvre  de  l'autre.  Etablissons  de 
suite  cette  vérité.  Blaze  de  Bury  avait  composé  une  comédie,  un  drame  : 
la  Jeunesse  de  Gœthe  ;  il  était  fort  content  de  son  ouvrage,  devançant  les 
applaudissements  du  public  dont  il  a  si  bien  l'habitude  ;  Blaze  était  fort 
lié  avec  Meyerbeer,  plein  de  son  sujet,  il  lui  en  parla  :  Vous  devriez 
bien,  lui  dit-il  modestement,  me  relever  ce  drame  par  votre  musique! 
Le  drame  était  fait,  et  ce  n'était  pas  un  libretto  qu'il  proposait  au  maes- 
tro pour  en  composer  la  musique,  c'est-à-dire  pour  mettre  les  notes  sur 
les  paroles,  des  récitatifs  sur  les  conversations,  de  suaves  mélodies  sur 
les  peintures  dorées,  des  torrents  d'harmonie  sur  des  morceaux  d'en- 
semble, e'  sur  ce  drame  converti  en  opéra,  une  savante  et  merveilleuse 
orchestra  i,  où  se  réfléchissent  tous  les  prodiges  de  l'art.  Non,  non,  ce 
n'était   il      'e  tout  cela. 

Le  dr  me  est  en  prose,  si  je  ne  me  trompe;  il  a  quatre  actes,  et,  à 
la  dernière  scène  du  troisième  acte,  Gœthe  s'endort.  Là  seidement,  dans 
l'entracte  qui  précède  le  quatrième  acte,  Meyerbeer,  comme  je  le  dirai 
tout  à  l'heure ,  avait  eu  la  pensée  d'un  rêve ,  d'une  vision ,  qui  devait 
former  une  scène  à  mettre  en  musique.  Une  scène,  rien  de  plus.  Blaze 
de  Bury  n'a  pas  fait  autre  chose  pour  le  musicien.  Aussi  comment 
Meyerbeer  s'exprime-t-il  dans  ses  lettres  ?  «  Vous  avez  l'air  de  douter  un 
peu  de  la  parole  que  je  vous  ai  donnée  de  mettre  en  musique  la  scène 
du  quatrième  acte  de  votre  drame  de  Gœthe,  scène  dont  je  vous  ai  promis 
de  faire  la  composition.  »  C'est  une  scène,  comme  vous  voyez,  et 
Meyerbeer  la  croit  placée  au  quatrième  acte. 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


Une  autre  fois,  il  écrira  :  «  Mon  cher  ami,  je  me  rends  avec  plaisir 
au  désir  que  vous  m'avez  manifesté  de  mettre  en  musique  la  grande 
scène  qui  forme  le  troisième  acte  de  votre  drame  la  Jeunesse  de  Gœthe.  » 
C'est  toujours  une  scène  ;  cette  fois,  elle  est  grande  et  forme,  non  plus 
le  quatrième  acte,  mais  le  troisième.  D'où  proviennent  donc  ces  singu- 
lières différences.  Le  croiriez-vous,  messieurs?  c'est  que  Meyerbeer  ne 
connaissait  pas  la  pièce;  non,  il  ne  la  connaissait  pas,  même  après  sa 
musique  composée  !  Laissez-moi  vous  rappeler  ce  qu'il  écrit  dans  sa  der- 
nière lettre,  le  31  janvier  1861  :  «  Mon  intention  avait  été  de  faire  une 
excursion  à  Paris;  mon  but  principal  était  de  connaître  enfin  votre 
pièce  de  Gœthe,  dont  je  ne  connais  jusqu'à  présent  que  ce  que  vous 
m'en  avez  raconté  à  l'état  de  plan  projeté.  »  Et  plus  bas  :  «  Si  vous 
venez,  n'oubliez  pas  surtout  d'apporter  la  Jeunesse  de  Gœthe  pour  me  la 
lire.  » 

Comprenez-vous,  messieurs,  mon  contradicteur  se  plaignant  que  Meyer- 
beer ne  veut  pas  remettre  à  Blaze  do  Bury  la  pièce  qu'ils  ont  faite  en 
collaboration  '? 

Qu'a  donc  reçu  Meyerbeer  de  notre  adversaire?  Il  est  temps  de  le 
savoir.  J'ai  dit  :  au  troisième  acte,  le  jeune  Gœthe  s'endort;  c'était  en 
attendant  le  quatrième  acte.  Je  ne  sais,  messieurs,  si  entre  Meyerbeer  et 
Goethe  il  exista  des  rapports  d'intime  amitié,  comme  on  vous  le  disait 
tout  à  l'heure  :  ces  deux  grands  génies  devaient  s'entendre.  Ce  que  je 
sais  bien,  c'est  que  celte  nature  allemande  du  grand  musicien  était  amou- 
reuse du  grand  poète.  Savez-vous  quelle  idée  le  saisit?  Gœthe  dort;  sup- 
posons un  rêve,  dans  ce  rêve  une  vision.  Les  personnages  de  ses  œuvres 
futures  vont  lui  apparaître,  ils  défileront  devant  lui,  chacun  d'eux  faisant 
entendre  les  plus  beaux  vers  dans  ce  magique  spectacle.  Vous  entendrez 
tout  à  l'heure  l'illustre  musicien  rappelant  surtout  Faust  et  le  Roi  des 
Aulnes.  Cette  merveilleuse  pensée,  éclose  du  cerveau  du  musicien,  entr'acte 
placé  entre  le  troisième  et  le  quatrième ,  l'écrivain  en  fera  le  scénario, 
traduisant  en  vers  les  vers  du  poète  incomparable ,  et  c'est  là  ce  que 
Meyerbeer  va  décorer  de  sa  musique.  ' 

Voilà  toute  la  collaboration.  Blaze  de  Bury  a  fait  le  scénario  du  rêve  de 
Gœthe,  formant  un  entr'acte  de  sa  pièce  et  quatre  actes  restés  sans 
aucun  changement,  et  pour  le  chant  il  a  traduit  en  vers  français  les 
beaux  vers  de  Gœthe.  C'est  tout,  pas  autre  chose.  Et  vous  supposez 
deux  grands  peintres  composant  ensemble  un  grand  tableau!  et  vous 
rappelez  Molino  et  Gluck!...  Ah!  je  sais  bien  que  l'immortalité  sera  pour 
Gluck,  c'est  en  lui  qu'est  le  génie;  mais  enfin  Molineaécrit  l'opéra  que 
Gœthe  a  si  miraculeusement  illustré  ;  vous,  Blaze  de  Bury,  vous  avez, 
dans  une  .scène  conçue  par  le  musicien,  traduit  en  poète  la  belle  poésie 
de  Gœthe.  Et  vous  appelez  cela  la  collaboration  de  Meyerbeer  et  de  Blaze 
de  Bury  à  la  Jeunesse  de  Gœthe! 

La  Jeunesse  de  Gœthe  est  toute  de  vous.  Supprimez  le  rêve,  dont  vous 
n'aviez  pas  eu  l'idée;  livrez  vos  quatre  actes,  votre  œuvre  complète; 
aux  applaudissements  de  la  Ibule.  mais  laissez  en  paix  la  cendre  à  peine 
refroidie  de  votre  illustre  ami,  dont  la  modestie  craint  pour  sa  gloire  la 
nii.se  au  jour  d'une  composition  qu'il  n'a  pas  lui-même  voulu  livrer  au 
théâtre,  quoiqu'il  ait  survécu  près  de  sis  ans  à  la  dernière  lettre  que 
vous  invoquez. 

Messieurs,  nous  allons  voir  le  débat  sous  un  autre  aspect.  La  corres- 
pondance établit-elle  un  contrat  qui  oblige  Meyerbeer  par  un  lien  de 
droit,  qui  oblige,  par  conséquent,  ses  héritiers?  Le  contrat  n'est  évidem- 
ment pas  dans  la  première  lettre.  Mon  contradicteur  a  dit  :  «  La  se- 
conde lettre  est  un  véritable  engagement;  »  lisons-la  donc  : 

«  Paris,  ce  2  septembre  1860. 
»  Mon  cher  Henri, 

»  Je  me  rends  avec  plaisir  au  désir  que  vous  m'avez  manifesté  de 
mettre  en  musique  la  grande  scène  qui  forme  le  troisième  acte  de  votre 
drame,  la  Jeunesse  de  Gœthe,  que  vous  destinez  maintenant  au  Théâtre- 
Français  ou  à  rOdéon  ;  je  vous  promets  de  vous  livrer  ma  musique  le 
dO  mai  prochain  pour  que  l'ouvrage  ,soit  représenté  dans  le  courant 
de  la  saison,  mais  sous  la  condition  expresse  que  celui  des  deux  théâtres 
ci-dessus  mentionnés  qui  jouera  la  Jeunesse  de  Gœthe  engagera,  pour  les 
représentations  de  cet  ouvrage,  tout  l'orchestre  et  tous  les  chœurs  du 
Théâtre-Italien  de  Paris,  et,  en  outre,  deux  chanteurs  et  deux  chan- 
teuses à  mon  choix  pour  chanter  les  rôles  de  Mignon,  de  Gretchen,  du 
Roi  des  Aulnes  et  du  père. 

»  Il  est  convenu  ainsi  que  vous  aurez  la  bonté  de  m'écrire  le  10  mars, 
à  Berlin,  si  le  théâtre  a  pris  avec  vous  un  engagement  par  écrit  de  repré- 
senter votre  ouvrage  à  l'époque  et  aux  conditions  mentionnées  sur  cette 
lettre  (pour  ma  gouverne). 

»  Votre  tout  dévoué,  MiiYERBEER.  » 

Voilà,  s'écrie-t-on,  un  engagement  formel.  Supposons-le,  mais  à  quelles 
conditions?  à  la  condition  expresse  qu'on  «  engagera  pour  la  représenta- 
tion de  cet  ouvrage  tout  l'orchestre  et  tous  les  chœurs  du  Théâtre-Italien 
de  Paris,  et,  en  outre,  deux  chanteurs  et  deux  chanteuses,  à  mon  choix, 
pour  chanter  les  rôles  de  Mignon,  de  Gretchen,  du  Roi  des  Aulnes  et 
du  père.  » 

Ce  n'est  pas  tout  :  il  donnera  sa  musique  le  10  mai  prochain,  mais 


il  est  convenu  que  vous  aurez  la  bonté  de  m'écrire  à  Berlin,  le  10  mars, 
si  le  théâtre  a  pris  avec  vous  un  engagement  par  écrit  de  représenter 
votre  ouvrage  à  l'époque  et  aux  conditions  mentionné(is  sur  cette  lettre. 

Où  donc  est  l'engagement  écrit  de  repré.senter  la  pièce  au  10  mai  1861? 

Où  donc  est  l'engagement  écrit  d'avoir  tout  l'orchestre  et  tous  les 
chœurs  du  Théâtre-Italien  de  Paris? 

Où  donc  est  l'engagement  écrit  d'avoir  deux  chanteurs  et  deux 
chanteuses,  au  choix  du  mu.sicien,  pour  chanter  les  quatre  rôles  qu'il 
désigne? 

Pas  de  convention  dans  ces  termes,  pas  d'engagement,  et  il  n'y  a  pas 
eu  de  convention. 
Poursuivons. 
Lettre  du  28  janvier  1861  : 

«  Mon  cher  ami, 
»  Depuis  six  semaines,  j'ai  complètement  terminé  la  musique  de  l'acte 
que  vous  m'avez  chargé  de  faire.  J'attendais,  pour  vous  l'annoncer, 
l'époque  à  laquelle  vous  m'aviez  promis  de  me  faire  part  si  vous  étiez 
parvenu  à  vous  arranger  avec  un  théâtre.  Je  vois,  par  votre  lettre,  que 
c'est  rOdéon.  » 

Blaze  de  Bury,  sans  attendre  le  mois  de  mars,  lui  a  donc  écrit  dès  le 
mois  de  janvier  qu'il  s'est  arrangé  avec  l'Odéon.  Mais  Meyerbeer  tient  à 
l'exécution  de  ses  conditions,  on  ne  lui  en  parle  pas  et  voici  ce  qu'il 
ajoute  : 

«  Si  vous  trouvez  pour  vous  les  éléments  nécessaires  dans  la  troupe, 
ainsi  que  pour  la  mise  en  scène  du  quatrième  acte,  et  que  l'on  puisse 
garantir  pour  l'exécution  musicale  les  moyens  qu'il  me  faut  et  que  j'ai 
indiqués  dans  la  lettre  que  vous  possédez  de  moi,  je  crois  que  la  localité 
est  bien  choisie,  surtout  avec  un  directeur  comme  M.  de  la  Rounat,  qui 
a  la  réputation  de  beaucoup  d'intelligence  et  de  courage.  » 

Ainsi,  pour  qu'il  donne  son  œuvre,  il  faudra  que  l'on  puisse  garantir 
pour  l'exécution  musicale  les  moyens  qu'il  lui  faut  et  qu'il  a  indiqués 
dans  sa  précédente  lettre. 

Et  remarquez  ce  compliment  à  M,  de  la  Rounat  :  «  11  a  la  réputation 
d'un  homme  d'intelligence  et  de  courage.  » 

Et  voici  bien  un  autre  obstacle  :  au  mois  d'avril,  Mme  Ristori  va 
donner  des  représentations  à  l'Odéon,  et,  au  lieu  du  mois  de  mai  1861, 
il  propose  de  donner  l'ouvrage  au  printemps  de  1862.  Voilà  qui  ne  lui 
convient  plus. 

«.  Prendre  un  engagement  définitif  pour  une  époque  aussi  éloignée 
que  celle-là,  qui  n'échoit  que  dans  quatorze  mois,  c'est  ce  que  je  n'ose- 
rais faire  dans  ma  position  :  père  de  famille,  n'habitant  pas  la  France. 
Dans  les  conjonctures  où  nous  vivons,  qui  sait,  dans  un  avenir  si  loin- 
tain, ce  qui  pourrait  me  retenir  chez  moi?  » 

Et,  alors,  il  propose  d'attendre  jusqu'au  mois  d'octobre  1861  pour  pré- 
parer un  traité  pour  avril  1862. 

Nous  voici  enfin  au  mois  d'août  1861,  huit  mois  se  sont  encore  écou- 
lés. Va-t-on  traiter  sous  les  conditions  qu'il  impose?  Un  autre  obstacle 
se  présente.  Il  ne  peut  venir  à  Paris  qu'en  avril  et  le  théâtre  ferme  avec 
le  mois  de  mai.  Ne  vaudrait-il  pas  mieux  ne  donner  la  pièce  qu'à  la 
réouverture,  au  mois  de  septembre  1862?  C'est  un  avis  qu'il  donne,  non 
une  condition  qu'il  impose,  mais  c'est  fini,  la  pièce  ne  se  donnera  plus. 
11  vivra  près  de  six  ans  depuis  cette  lettre,  qui  sera  la  dernière,  et  ja- 
mais on  ne  reviendra  sur  la  pensée  du  traité.  Il  n'en  veut  plus  évi- 
demment; dans  un  instant,  je  vous  dirai  pourquoi;  mais  qui  donc  a  parlé? 
Blaze  de  Bury?  Quelle  lettre  peut-il  nous  montrer  encore?  Quel  écrit? 
Attendez.  Nous  voilà  en  octobre  1861,  et  M,  Blaze  se  fait  écrire  par 
M.  de  la  Rounat;  c'est  le  directeur  qui  demande  un  traité  définitif,  qui 
promet  de  ne  pas  fermer  le  31  mai.  Vaine  démarche!  Dernière  et  inu- 
tile tentative!  Plus  rien  :  1862,  1863,  186i,  186S,  1866  s'écoulent,  Meyer- 
beer a  passé  une  jiartie  de  ces  cinq  années  à  Paris,  pas  de  traité,  pas  de 
convention,  pas  de  contrat  et  pas  une  sommation,  pas  une  mise  en  de- 
meure, et  il  sera  mort,  quand  Blaze  de  Bury,  sortant  de  cet  incroyable 
sommeil,  se  réveillera  pour  demander  aux  héritiers  de  son  collaborateur 
une  musique  dont  un  ordre  sacré  leur  défend  de  disposer. 

Que  parlez-vous  de  votre  amitié  qui  aurait  arrêté  votre  demande  pré- 
cédente? Cette  amitié,  la  mort  la-t-elle  brisée  à  ce  point  qu'elle  reste 
indifférente  devant  ces  mots  sacrés:  «  Que  la  piété  de  ma  femme  et  de 
mes  enfants  respecte  ma  dernière  volonté;  qu'elle  se  refuse  à  livrer  à 
la  publicité  mes  compositions  inédites  !  » 

Et  voulez-vous  savoir.  Messieurs,  pourquoi  le  contrat  ne  s'est  pas 
conclu,  pourquoi  la  musique  du  Rêoe  de  Gœthe  n'a  pas  été  représentée 
sur  un  théâtre,  c'est  qu'elle  n'a  pas  été  finie.  Oui,  vous  avez  raison, 
mon  honorable  confrère,  d'invoquer  mes  souvenirs  ;  oui,  une  des  gran- 
des jouissances  de  ma  vie  a  été  l'amitié  de  Meyerbeer;  oui,  il  m'a  dit 
peu  de  jours  avant  sa  mort  :  k  Ce  Songe  de  Gœthe  sera  représenté  ;  » 
oui,  il  m'a  dit  :  «  La  scène  de  l'église  sera  belle,  je  crois.  » 

Mais,  quand  il  s'agissait  de  livrer  sa  musique,  de  conclure  définitive- 
ment avec  le  directeur,  c'est-à-dire  de  paraître  devant  ce  public  qui  l'a 
tant  acclamé,  et  qu'il  redoutait  avec  tant  et  de  si  vives  perplexités,  c'é- 


DE  PARIS. 


283 


tait,  devant  sa  gloire  acquise,  une  terreur  inouïe  de  la  voir  décroître; 
il  ne  cédait  que  là  où  s'arrêlait  l'inspiration.  Nuu,  vous  n'avez  pas  ou  de 
contrat,  et  il  ne  le  consentait,  il  y  a  sept  ans,  que  sous  des  conditions 
qui  jamais  n'ont  été  consignées  dans  un  acte  quelconque.  En  droit,  vous 
êtes  à  celte  Ijarre  les  mains  vides  de  titre.s.  En  fait,  il  n'était  pas  possi- 
ble que  ce  titre  vous  fut  donné.  Toutes  ces  preuves,  elles  éclatent  dans 
sa  lettre  du  28  janvier,  qui  va  vous  dépeindre  l'homme  tout  entier.  Que 
je  vous  dise  d'abord  qui  lui  avait  inspiré  la  pensée  d'ajouter  un  inter- 
mède musical  à  la  Jeunesse  de  Gœthe. 

Il  avait  un  frère,  Michaël  Béer,  qui  a  laissé  un  nom  illustre  comme 
poëte;  il  est  l'auteur  de  la  tragédie  de  Struensée. 

Meyerbeer  aimait  tendrement  ce  frère,  il  le  perdit  et  voulut  donner  à 
sa  mémoire  un  tribut  d'affectueuse  piété;  il  composa  une  œuvre  musicale 
pour  Struensée:  un  chef-d'œuvre  remarquable  entre  tous.  Les  concerts 
du  Conservatoire,  les  Concerts  populaires  vous  diront  cette  merveille. 

Gœthe,  le  poëte  de  tous  les  pays,  mais  la  grande  gloire  de  l'Allema- 
gne, était  son  idéal.  Blaze  de  Bury  lui  parla  de  la  Jeunesse  de  Gœthe, 
son  imagination  s'enflamma,  il  retrouva  dans  sa  vaste  mémoire  toutes 
les  belles  œuvres  du  poëte  immortel,  il  voulut  leur  donner  une  vie  nou- 
velle. Ce  que  dut  enfanter  de  grand  cette  riche  imagination,  chacun 
peut  le  comprendre,  ses  lettres  le  font  pressentir. 

Vous  avez  vu  dans  l'une  d'elles  ce  qu'il  exige  pour  l'exécution  :  tout 
l'orchestre  et  tous  les  chœurs  des  Italiens,  et  quatre  voix  choisies.  Vous 
avez  vu,  dans  une  autre,  les  difficultés  qu'il  énonce  pour  faire  concorder 
sa  musique,  qu'il  dit  assez  compliquée ,  avec  les  détails  scéniqucs  des 
visions  et  des  chanteurs,  qui  ne  se  trouvent  jamais  sur  le  devant  de  la 
rampe,  éloignés  toujours  de  l'orchestre.  Comme  la  troi.Mëme  lettre  est  à  la 
fois  instructive  et  grandiose  dans  sa  modestie  et  dans  son  admiration 
pour  Schubert!  Reprenons-la,  Messieurs;  elle  mérite  qu'on  vous  la  re- 
lise dans  sa  partie  principale  : 

«  Le  tableau  que  j'avais  craint  le  plus,  et  que  je  vous  avais  proposé 
de  changer  (celui  de  la  cathédrale  de  Faust),  est  celui  qui  est  venu  le 
mieux  de  tous,  et  j'espère  que  vous  n'en  serez  pas  mécontent.  » 

Il  en  était  content,  lui,  il  l'a  dit,  c'est  donc  un  tableau  sublime  que 
nous  perdons.  Suivons  cette  lettre  : 

«  Il  en  est  un  sur  lequel  j'hésite  encore  maintenant  :  c'est  celui  du 
Roi  des  Aulnes.  La  musique  de  Schubert,  de  cette  ballade,  est  devenue 
si  populaire  dans  tout  le  monde,  qu'il  me  paraît  impossible  d'en  faire 
adopter  au  public  une  nouvelle  sur  les  paroles,  et  moi-même  j'en  ai 
subi  tellement  l'influence  que  je  n'ai  pu  parvenir  à  faire  une  autre 
musique  qui  me  satisfît.  Je  pense  donc  garder  le  tissu  des  mélodies 
de  Schubert,  en  mettant  dessous  des  chœurs  pour  les  filles  du  Roi  des 
Aulnes,  et  partager  les  mélodies  de  Schubert  entre  les  trois  interlo- 
cuteurs, et  en  même  temps,  cela  va  sans  dire,  orchestrer  les  mor- 
ceaux que  Schubert  n'a  fait  que  pour  le  piano. 

»  Maintenant,  il  y  a  deux  façons  de  le  faire  :  l'une  est  de  faire  parler 
en  mélodrame  le  père  et  le  fils,  et  de  donner  pendant  ce  temps  les  des- 
sins de  mélodie  de  Schubert  à  l'orchestre,  et  de  ne  faire  chanter  propre- 
ment dit  que  le  Roi  des  Aulnes  et  ses  filles;  l'autre  de  faire  chanter 
aussi  les  parties  du  père  et  du  fils  par  des  chanteurs. 

»  Musicalement  parlant,  il  vaudrait  mieux  les  faire  chanter.  » 

Arrêtons-nous  un  instant  sur  cette  lettre.  Que  de  modestie  dans  ce 
qui  le  touche,  que  d'admiration  quand  il  parle  de  la  musique  de  Schu- 
bert! 

«  J'espère  que  vous  ne  serez  pas  mécontent  de  mon  tableau  de  Faust, 
c'est  celui  que  je  craignais  le  plus  et  qui  vient  le  mieux.  »  Voilà  pour 
sa  musique  à  lui.  Mais  pour  Schubert,  il  semble  n'avoir  pas  d'expres- 
sions assez  vives!  Quel  hommage!  Quelle  admiration!  Ah!  Messieurs, 
c'est  grand  et  beau  de  voir  Meyerbeer  s'incliner  devant  Schubert! 

M'=  Crémieux  s'arrête  un  instant,  puis  il  reprend  : 

Un  souvenir  me  frappe,  qui  tient  à  notre  cher  Barreau  et  que  je  vous 
demande  la  permission  de  rappeler  en  ce  moment.  Quand  on  est  vieux, 
on  a  beaucoup  de  souvenirs,  on  aime  a  les  raconter.  En  1831,  dans  un 
dîner,  dont  j'ai  gardé  le  pieux  souvenir  j'avais  réuni  chez  moi  plu- 
sieurs de  ces  nobles  proscrits  que  l'on  appelait  des  régicides  relaps,  et 
qui  étaient  rentrés  en  France  après  la  chute  du  gouvernement  de  la 
Restauration.  Il  y  avait  là,  notamment,  Merlin,  Mailhe,  Berlier,  Locré. 
La  conversation  tomba  sur  Cambacérès.  Merlin  dit  :  «  Quel  homme  que 
Cambacérès!  c'était  la  loi  et  le  droit  incarnés.  »  Je  pressai  dans  mes 
mains  la  main  amaigrie  du  grand  jurisconsulte  et  je  lui  dis  :  «  Quel 
éloge  dans  votre  bouche!  »  Merlin  s'inclinant  devant  Cambacérès,  ce 
souvenir  m'est  revenu  en  parlant  de  Meyerbeer  s'inclinant  devant 
Schubert. 

Ce  que  je  sais,  d'ailleurs,  sur  cette  mélodie  de  Schubert,  c'est  que 
Meyerbeer  l'a  religieusement  conservée,  et  que  mêlant  à  cette  merveil- 
leuse rêverie  sa  musique  harmonieuse  et  entraînante,  il  a  mis  un  chef- 
d'œuvre  dans  un  chef-d'œuvre. 

Messieurs,  en  vous  ramenant  à  cette  lettre,  je  vous  rappelle  celle  qui 
exige  des  conditions  si  nettement  formulées  et  qui  n'ont  jamais  été  ac- 
cordées par   un  contrat,  je  vous  rappelle  ces  deux  autres  lettres,  l'une 


dans  laquelle  il  propose  de  renvoyer  au  mois  d'octobre  la  représenta- 
tion, l'autre  qui  s'arrête  sur  la  longueur  du  temps  nécessaire  aux  ré- 
pétitions, sur  les  difficultés  qu'il  prévoit,  et  toujours  sur  la  garantie  des 
conditions  auxquelles  il  laissera  exécuter  sa  musique;  encore  une  fois 
dans  quel  traité  avez-vous  accepté  ces  conditions,  où  est  donc  l'arrange- 
ment avec  le  directeur  du  théâtre  Italien,  où  sont  les  pourparlers  avec 
les  chanteurs?  Quels  chanteurs? 

Comment,  vous  réclamez  des  héritiers  de  Meyerbeer  l'exécution  d'un 
prétendu  contrat  écrit  nulle  part;  et  quand  ils  demandent:  Où  donc 
avez-vous  la  preuve  que  ce  contrat  existe,  renfermant  rengagement  du 
directeur,  les  obligations  qu'il  s'impose,  vous  nous  montrez  une  lettre 
de  M.  de  la  Rounat  qui  promet  de  ne  pas  fermer  son  théiltre  au  mois  de 
mai.  Et  vous  appelez  cela  un  lien  de  droit!  Attendez  :  Meyerbeer  qui  au- 
rait livré  sa  musique,  ne  l'a  pas  achevée  comme  il  la  voulait.  Comme 
il  la  voulait  !  Si  vous  pouviez,  Messieurs,  vous  faire  une  idée  de  cet 
homme  d'un  génie  si  vaste,  d'une  imagination  si  belle,  et  d'une  si 
étonnante,  si  incroyable  irrésolution  ;  non,  jamais  il  n'était  bien  décidé 
à  mettre  ses  compositions  devant  la  rampe,  devant  l'assemblée  d'élite 
qui  devait  se  presser  pour  lui  prodiguer  ses  applaudissements. 

S'il  eût  vécu,  l'Africaine  fut  probablement  restée  des  années  encore 
attendue  et  non  représentée.  La  musique  de  votre  scène,  dédiée  à  Gœ- 
the, il  ne  l'a  pas  achevée  à  sa  pleine  satisfaction;  il  n'a  pas  cessé  de  la 
travailler,  mais,  entendez-moi  bien,  pour  lui  elle  n'était  pas  encore 
prête.  II  ne  s'agissait  pas,  comme  vous  le  supposez,  d'une  question  d'op- 
portunité, mais  d'une  question  de  perfection.  Il  voulait  la  perfection,  et 
comment  la  voulait-il?  Jamais  il  ne  croyait  avoir  atteint  le  but.  Il  ne 
livrait  qu'à  son  heure,  à  son  moment,  avec  une  fiévreuse  inquiétude  qui 
ne  l'abandonnait  pas,  jusqu'à  ce  qu'au  milieu  des  cris  et  des  applaudis- 
sements le  rideau  vînt  s'abaisser  sur  la  scène.  En  attendant  le  jour  où 
il  se  décidait  à  se  rendre  plus  immortel,  il  disait  oui,  mais  il  diffé- 
rait sans  cesse.  Vous  l'avez  pressé  en  -1839,  en  4860,  en  1801,  en  1862; 
il  accordait  chaque  fois,  mais  toujours  avec  des  restrictions,  avec  des 
délais. 

Que  de  jours  s'écoulaient  avant  la  rédaction  d'un  contrat!  Que  de 
jours  avant  la  livraison  de  la  partition  !  Que  de  jours  aux  répétitions 
avant  la  solennité!  Que  de  recommandations  jusqu'au  moment  même 
du  lever  de  la  toile!  Et  pendant  ces  années,  jamais  de  repos.  Le  jour, 
la  nuit,  il  composait,  il  retouchait  sans  cesse.  Il  vivait  dans  de  constan- 
tes préoccupations.  Son  existence  se  passait  dans  le  domaine  de  l'art.  A 
la  campagne,  à  la  ville,  il  avait  toujours  un  carnet  sur  lequel  il  écri- 
vait toutes  les  pensées  musicales  qui  se  présentaient  à  lui,  il  les  trans- 
crivait le  soir  sur  le  cahier  dont  parle  son  testament.  Un  pareil  homme 
pouvait  sans  doute  se  lier  par  un  contrat,  mais  il  exigeait  mille  détails, 
et  si  l'on  manquait,  le  contrat  ne  se  faisait  pas.  Pour  vous,  il  vous  a 
promis  de  1839  à  1861;  depuis  sa  lettre  du  mois  d'août  186i,  plus  rien. 
M.  de  la  Rounat  comprend  bien,  lui,  que  sans  engagement  il  n'y  a 
rien  à  faire.  M.  de  la  Rounat  dit  :  «  Je  vous  en  prie,  il  y  va  pour  moi 
d'un  intérêt  puissant  et  pressant;  priez  notre  illustre  maestro  de  m'en- 
voyer  une  certitude. . .  »  Et  plus  loin:  «Si  la  combinaison  était  rompue 
par  le  fait  du  grand  maître,  je  me  trouverais  dans  le  plus  extrême  em- 
barras. » 

Dans  une  autre  lettre  du  21  décembre  1801,  M.  de  la  Rounat  dit  en- 
core à  M.  Blaze  de  Bury  :  «  Ne  pensez-vous  pas  qu'il  serait  bon  d'aviser 
à  renouer  les  flls  rompus  de  nos  projets?  « 

Les  flls  étaient  donc  rompus.  Se  sont-ils  renoués?  Non.  Point  d'écrit, 
point  d'engagement,  point  de  traité,  rien!  Votre  pièce  vivra  sans  sa 
musique:  il  ne  s'en  est  dessaisi  ni  en  1862,  ni  en  1863,  ni  en  ISOi,  ni 
en  186S,  ni  en  1866;  il  n'a  pas  contracté  avec  vous  de  son  vivant,  il 
n'a  pas  reçu  de  vous  un  écrit  constatant  l'acceptation  des  conditions 
expresses  qu'il  exigeait.  Que  voulez-vous  donc  après  sa  mort?  Que  dis-je? 
11  n'a  pas  voulu  pendant  sa  vie  livrer  sa  musique  inachevée;  il  était 
libre  de  tout  engagement  légal.  11  est  allé  plus  loin ,  il  a  défendu  de  la 
livrer  après  sa  mort.  Voilà  son  testament,  sa  dernière  volonté  qui  inter- 
dit la  publication  de  ses  compositions  inédites.  La  date  de  cet  acte  est 
un  argument  terrible  contre  vous.  C'est  en  1863  qu'il  l'a  écrit.  Depuis 
un  an  au  moins,  il  ne  s'était  plus  occupé  de  faire  représenter  le  rêve  de 
Gœthe,  trois  ans  se  sont  écoulés  depuis  et  ni  représentation  ni  contrat 
n'ont  eu  lieu.  Cette  composition  est  restée  inédite,  et  le  testament  in- 
terdit la  publication  de  ses  compositions  inédites. 

En  vain  prétendez-vous  que  cette  interdiction  ne  frappe  pas 'fa  Jeu- 
nesse de  Gœthe;  celle  prétention  tombe  devant  une  réponse  trop  déci- 
sive. S'il  faut  vous  en  croire,  Meyerbeer  avait  un  vif  désir  de  faire 
jouer  cette  composition  ;  vous  m'accorderez  bien  qu'il  avait  alors  deux 
désirs  :  faire  jouer  la  Jeunesse  de  Gœthe,  faire  jouer  l'Africaine.  Je  vous 
accorde  la  même  ardeur  chez  lui  pour  les  deux  compositions  inédites. 
Eh  bien  !  dans  son  testament,  il  ordonne  qu'on  renferme  ses  composi- 
tions inédites;  il  n'en  excepte  qu'une  de  cette  proscription  :  l'Africaine. 
De  Gœthe,  pas  un  mot.  Vous  dites  :  «  C'est  un  oubli.  »  Mais  quoi  !  si 
plein  de  la  composition  de  Gœthe,  si  plein  de  la  composition  de  l'Afri- 
caine, il  réserve  l'Africaine  à  la  publicité,  et  il  oublie  d'excepter  de  l'in- 
terdiction absolue  la  Jeunesse  de  Gœthe'. 
Le  procès  est  plaidé  :  la  question  de_ droit  ne  supporte  pas  l'examen  : 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


point  de  loi,  point  de  contrat.  Les  faits  et  le  testament  condamnent  vo- 
tre prétention.  Elle  sera  donc  condamnée  à  mon  immense  regret,  je  le 
dis  encore.  Mais  quoi?  Ce  grand  génie,  tout  préoccupé  de  sa  gloire, 
craignait  qu'un  souffle  ne  -vînt  la  ternir,  elle  si  grande  et  si  pure.  Il  a 
ordonné,  ne  voulant  pas  qu'après  sa  mort  on  pût  dire  que  son  génie  en 
décroissance  ne  s'était  pas  tenu  à  la  même  hauteur.  Ainsi,  dans  l'an- 
cienne Rome,  Virgile  ordonna  de  brûler  son  VEnéidc,  qu'il  ne  trouvait 
pas  complètement  achevée.  Auguste  brisa  ce  testament,  la  postérité  la 
plus  reculée  [admirera  Enéide.  Messieurs,  Auguste  agissait  en  empereur 
romain,  à  qui  tout  pouvoir  appartenait,  et  il  ordonnait  au  nom  de  la 
gloire  de  la  patrie  dans  un  immense  intérêt  public. 

Vous,  Messieurs,  dans  ce  débat  d'intérêt  privé,  qui  se  réduit  à  une 
triste  question  de  dommages,  vous  déciderez  avec  la  loi  et  vous  respec- 
terez la  dernière  volonté  de  Meyerbeer.  Il  a  préservé  sa  gloire  jusqu'au 
bout.  II  a  pu  dire  en  contemplant  son  œuvre  avant  de  mourir  ce  qu'Ho- 
race avait  écrit  : 

Excgi  monumentum  œre  pcrennius. 

Son  œuvre  ne  périra  pas.  Il  a  placé  sur  son  front  une  couronne  im- 
mortelle; il  ne  nous  appartient  pas  de  vouloir  plus  qu'il  n'a  voulu,  d'at- 
tacher à  cette  couronne  un  nouveau  fleuron  qu'il  a  défendu  d'y  joindre- 
Messieurs,  respecter  la  dernière  volonté  d'un  illustre  mort,  c'est  lui 
rendre  un  hommage  digne  de  lui.  Vous  vous  féliciterez  que  la  loi,  d'ac- 
cord avec  vos  sentiments  élevés,  vous  prescrive  de  consacrer  la  dernière 
volonté  de  Meyerbeer. 

Nous  avons  donné  les  conclusions  de  l'avocat  impérial,  et  nos 
lecteurs  connaissent  le  jugement  rendu  par   le  tribunal. 
M.  Blaze  de  Bury  a  interjeté  appel  de  la  sentence. 


ETUDES  SUR  CHÂRLES-MÀRIE  DE  WEBER, 

D'après    la    blograpbic    écrite    par    «on    HIm. 

TROISIÈME  PARTIE, 

{"«  article)  (I). 

Nous  avons  interrompu  notre  récit  au  moment  où  Weber  rece- 
vait de  la  bouche  de  son  vieil  ami,  le  comte  Vitzthum,  une  nou- 
velle qui  mettait  à  néant  toutes  les  espérances  fondées  sur  la 
réussite  de  son  opéra.  Il  fut  pris  tout  d'abord  d'un  imniensc  dé- 
couragement ;  puis,  sa  nature  prolondément  artiste  prit  le  dessus 
et  il  se  remit  au  travail  ;  à  la  vérité,  il  ne  se  sentit  pas  le  cou- 
rage d'écrire  son  oeuvre,  mais  du  moins  les  motifs  qu'elle  lui  avait 
inspirés  ne  furent  pas  perdus  pour  le  monde  musical,  car  il  s'en 
servit  pour  plusieurs  morceaux,  de  piano  qui  l'occupèrent  pendant 
l'été  de  1819;  c'est  ainsi  q\i' Alcindor  se  fondit  dans  les  huit  pièces 
à  quatre  mains,  si  populaires  en  Allemagne,  dans  le  rondo  en  mi 
bémol,  dans  la  Polonaise,  dans  d'autres  morceaux  encore,  parmi 
lesquels  nous  citerons  le  plus  connu  de  tous,  celui  qui  ouvrit  de 
nouveaux  horizons  à  ce  genre  de  compositions;  nous  avons 
nommé  YJtivitation  à  la  valse.  II  préludait  ainsi  à  ses  grandes 
œuvres  lyriques  par  des  fragments  qui,  bien  que  la  menue  mon- 
naie de  son  génie,  contiennent  en  germe  et  reflètent  tout  ce 
qu'elles  présentent  de  grand  et  de  beau  dans  leur  conception. 

C'est  ainsi  que  se  termina  l'été  de  1819,  durant  lequel  il  eut 
la  joie  d'offrir  l'hospitalité  au  jeune  Marschner,  qui  avait  déjà  tait 
représenter  à  cette  époque  son  Henri  IV  et  d'Aubigné,  ainsi  qu'au 
banquier  Mendelssohn-Bartholdi,  qu'accompagnait  son  fils  Félix, 
alors  âgé  de  dix  ans,  A  sa  rentrée  en  ville,  il  reçut  Spohr  et  sa 
femme,  qui  venaient  se  faire  entendre  à  la  cour,  Hummel,  le 
grand  pianiste,  Moschelès,  Mozart  le  fils,  qui  n'avait  qu'un  tort, 
celui  d'être  écrasé  par  le  nom  qu'il  portait,  enfin  le  jeune  Béné- 
dict,  qu'il  prit  pour  élève  sur  la  recommandation  de  Hummel.  La 
maison  de  Weber  était,  comme  on  voit,  le  rendez-vous  des 
grands  artistes  de  passage  à  Dresde;  une  société  brillante,  ins- 
truite s'y  réunissait,  et  c'était  un  grand  honneur  que  d'y  être 
admis, 

(1)  Voir  les  n"  18,  21,  23,  25,  28  et  31. 


Sur  ces  entrefaites,  le  comte  de  Briihl  avait  prié  Weber  de  luj 
envoyer  le  libretto  de  la  Fiancée  du  Chasseur,  par  lequel  il  dési- 
rait inaugurer  la  nouvelle  salle;  le  comte  s'en  montra  tellement 
satisfait  qu'étant  venu ,  peu  de  temps  après,  passer  quelques  jours 
dans  une  terre  qu'il  possédait  aux  environs  de  Dresde ,  il  traita 
définitivement  avec  le  maître  et  lui  recommanda  de  se  tenir  prêt 
pour  le  mois  de  février  suivant. 

Ce  fut  une  grande  joie  pour  Weber,  qui  se  remit  avec  ardeur 
au  travail  si  longtemps  interrompu  ;  le  premier  acte,  on  se  le  rap- 
pelle, était  seul  terminé.  Le  17  septembre,  il  acheva  le  trio  du 
second  acte  entre  Mas,  Agathe  et  Annette,  et  le  14  novembre  la 
grande  scène  de  la  Gorge-aux-Loups ,  qui  est  la  page  capitale  de 
l'œuvre,  le  duo  entre  Agathe  et  Annette  et  l'ariette  de  cette  der- 
nière :  Qu'un  garçon  jeune  et  candide,  suivirent  de  près  ;  le  grand 
air  d'Agathe  et  l'esquisse  de  la  ronde  favorite  furent  composés  en 
un  jour. 

Le  6  décembre ,  Weber  était  assez  avancé  dans  son  œuvre  pour 
écrire  au  comte  de  Briihl  que  sa  partition  serait  terminée  en 
mars  et  qu'elle  pourrait,  grâce  aux  ressources  dont  le  théâtre  de 
Berlin  disposait,  être  étudiée  et  mise  en  scène  dans  l'espace  de 
deux  ou  trois  semaines;  Briihl  lui  répondit  que  l'ouverture  du 
théâtre  était  remise,  mais  que  le  premier  opéra  représenté  serait 
le  sien. 

Ainsi,  cette  mauvaise  année  de  1819  se  terminait  par  une  bonne 
nouvelle;  le  Freischutz  allait  être  représenté  sur  l'un  des  plus  beaux 
Qiéâtres  du  monde  et  dans  une  ville  qui  passait,  à  juste  titre,  pour 
le  foyer  de  la  renaissance  nationale;  le  premier  jour  de  l'an  se 
passa  donc  gaîmeut  au  milieu  d'amis,  parmi  lesquels  était  venu 
prendre  place  Morlacchi  ;  il  avait,  en  effet,  écrit  le  matin  même  à 
Weber  une  lettre  par  laquelle  il  lui  demandait  d'oublier  le  passé 
et  de  lui  accorder  son  amitié.  Cette  démarche,  de  la  part  du 
maître  de  chapelle  italien,  était  des  plus  louables,  et  c'est  ainsi  que 
Weber  l'avait  considérée;  malheureusement  elle  n'eut  pas  de  longs 
effets,  car  les  luttes  ne  tardèrent  pas  à  recommencer,  plus  vives  et 
plus  acres  que  jamais,  et  cela  dans  des  circonstances  que  nous  ne 
pouvons  passer  sous  silence. 

Dans  les  derniers  jours  de  l'année  qui  venait  de  s'écouler, 
Weber  avait  rais  à  l'étude  Emma  di  Resburgo,  le  nouvel  ouvrage 
de  Meyerbeer,  qui  faisait  fureur  dans  la  péninsule.  Quoiqu'il  blâ- 
mât les  tendances  alors  exclusivement  italiennes  de  son  ancien 
condisciple,  il  avait  tenu  à  ce  que  cet  opéra  fiît  représenté  dans 
toute  son  intégrité,  et  dans  ce  but  il  le  faisait  exécuter  en  langue 
italienne.  Emma  di  Resburgo  obtint  un  grand  succès,  tandis  que 
Abimelek,  du  même  maître,  représenté  à  peu  de  jours  de  distance, 
tomba  ou  à  peu  près.  Cet  ouvrage,  qui  est  antérieur  au  premier, 
est  conçu,  comme  on  sait,  dans  la  manière  allemande,  et  Weber, 
qui  était  Allemand  dans  l'âme,  ne  pouvait  s'empêcher  de  déplorer 
sa  chute,  en  même  temps  qu'il  ne  savait  s'il  devait  se  réjouir  ou 
se  lamenter  du  triomphe  de  l'ouvrage  italien;  il  se  laissa  même 
aller,  à  cette  occasion,  à  écrire  un  article  dans  lequel  il  expliquait 
ses  idées  sur  les  deux  écoles  rivales ,  reprochant ,  avec  une  cer- 
taine aigreur,  à  Meyerbeer  de  «  sacrifier  immodérément  à  la 
fièvre  rossinienne,  »  Cet  article,  qui  parut  dans  une  feuille  locale, 
souleva  des  fureurs  sans  nombre  dans  le  parti  italien;  Morlacchi 
ne  fut  pas ,  comme  on  pense ,  le  dernier  à  bondir  sous  ce  coup 
inattendu;  il  rédigea  une  pétition  au  ministre  Einsiedel,  dans  la- 
quelle les  termes  n'étaient  pas  ménagés  à  l'endroit  de  Weber  ;  il  y 
était  dit  en  outre  que  tous  les  Italiens  résidant  à  la  cour  de  Saxe 
se  regardaient  comme  attaqués  dans  leur  honneur  et  demandaient 
satisfaction;  la  pétition  se  couvrit  de  signatures,  et  peu  s'en  fal- 
lut que  Weber  ne  s'attirât  une  méchante  affaire.  Par  bonheur 
Einsiedel,  influencé  par  le  comte  de  Koenneritz,  qui  avait  succédé 
au  comte  Vitzthum  dans  ses  charges  et  dans  sa  prédilection  pour 


DE  PARIS. 


285 


l'opéra  allemand,  mit  tous  ses  soins  à  ce  que  l'affaire  n'eût  pas  de 
suites;  bien  plus,  il  donna  raison  à  Weber,  du  moins  en  paroles, 
ce  qui  n'empêcha  pas  Morlacchi  de  se  vanter  d'avoir  fait  «  donner 
sur  les  doigts  »  à  son  collègue. 

Dans  une  autre  circonstance,  les  Italiens  prirent  leur  revanche. 
On  avait  annoncé  la  visite  du  roi  de  Prusse  à  la  cour  de  Saxe; 
c'était  la  première  rencontre  des  deux  souverains  depuis  la  confis- 
cation d'une  partie  de  la  Saxe  par  la  Prusse.  Le  roi  de  Prusse 
arriva  dans  une  petite  voiture,  accompagné  d'un  aide  de  camp  ;  il 
portait  une  capote  grise  sur  laquelle  se  dessinait  seule  la  décora- 
tion sévère  de  la  Croix  de  'fer;  le  roi  de  Saxe,  au  contraire, 
portait  perruque  à  catogan,  habit  à  la  française,  souliers  à 
boucles,  etc.;  Weber,  mêlé  à  la  foule  qui  encombrait  les  abords  du 
château  j  ne  put  s'empêcher  de  laisser  échapper  cette  pi'édiction  : 
«  Voici  l'avenir,  voici  le  passé!  »  Le  mot  recueilli,  colporté,  am- 
plifié, ne  tarda  pas  à  venir  aux  oreilles  des  ministres  et  du  roi»; 
Les  Itahens  en  tirèrent  parti ,  leurs  journaux  firent  feu  de  toutes 
pièces.  Weber  fut  tancé  vertement  et  subit  de  ce  fait  une  sorte  de 
disgrâce.  Morlacchi,  au  contraire,  y  gagna  une  véritable  popula- 
rité; il  avait  fait  exécuter  à  l'entrée  du  roi  de  Prusse  dans  le  pa- 
lais l'ouverture  de  la  Pie  Voleuse ,  de  Rossini ,  et  cette  allusion , 
qui  n'avait  échappé  à  personne,  avait  rempli  de  joie  le  cœur  des 
bons  Saxons ,  si  dévoués  jusqu'en  ces  derniers  temps  à  leurs  rois 
et  si  fiers  de  leur  autonomie. 

Quoi  qu'il  en  soit,  Weber  travaillait  sans  relâche  à  son  Freis- 
chutz;  c'était  le  nouveau  titre  de  l'opéra  destiné  au  théâtre  de 
Berlin.  Le  comte  Briihl  avait  demandé  l'envoi  de  la  partition  dans 
le  plus  bref  délai,  aussi  les  morceaux  se  succédaient-ils  avec  ra- 
pidité sous  la  plume  du  maître,  et  le  13  mai  il  terminait  son 
œuvre  par  la  dernière  note  de  l'ouverture;  la  réduction  au  piano 
fut  achevée  en  même  temps  ;  puis  Weber  passa  le  mois  de  juin  à 
revoir  sa  partition,  et  sans  doute  il  la  trouva  parfaite,  car  son 
manuscrit,  qui  appartient  à  la  bibliothèque  de  Berlin,  est  une 
merveille  de  netteté  ;  on  n'y  découvre  pas  une  rature,  pas  une 
correction. 

Pour  donner  à  la  direction  du  théâtre  de  Berlin  la  facilité  de 
commencer  à  temps  l'étude  des  choeurs,  qui  sont,  comme  chacun 
sait,  d'une  grande  importance  dans  le  Freischutz,  Weber  envoya  dès 
le  8  mai  sa  partition  à  M.  de  Brûhl,  en  le  priant  de  la  mettre  à 
l'étude  sous  la  conduite  du  directeur  de  musique  Seidel.  Celui-ci 
s'acquitta  de  cette  tâche  avec  conscience  ;  aussi  Weber  n'eut-il 
à  s'inquiéter  en  aucune  façon  des  chœurs,  qui  marchaient  à  mer- 
veille, lorsqu'il  vint  à  Berlin  pour  diriger  les  répétitions  de  son 
œuvre.  Il  est  vrai  qu'une  année  entière  sépare  ces  deux  dates, 
l'inauguration  de  la  nouvelle  salle  ayant  été  ajournée  au  prin- 
temps suivant. 

Weber  était  en  pleine  inspiration  du  Freischutz  quand  il  reçut 
une  lettre  de  M.  de  Brùhl,  qui  lui  demandait  s'il  pouvait  se  char- 
ger de  la  musique  à  intercaler  dans  une  comédie  de  Wolff,  tirée 
d'une  nouvelle  de  Cervantes  intitulée  Preciosa.  Le  maître  de 
chapelle  de  Weimar,  Eberwein,  avait  entrepris  ce  travail,  mais  il 
n'avait  pas  réussi,  et  la  pièce,  refusée  par  le  prédécesseur  de 
Brulil,  était  restée  dans  les  cartons  du  théâtre  de  Berlin.  Ce  fut, 
comme  nous  venons  de  voir,  le  comte  de  Brûhl  qui  l'en  tira. 
Quoique  Weber  n'aimât  pas  ce  genre  de  compositions ,  cependant , 
pour  l'amour  de  son  gracieux  protecteur  et  de  l'excellent  auteur 
et  comédien  Alexandre  Wolfif,  qu'il  tenait  en  profonde  estime,  il 
accepta  cette  tâche.  Ce  dernier  se  hâta  de  lui  envoyer  sa  pièce, 
et  Weber  se  mit  à  la  besogne.  Il  en  entreprit  d'abord  le  travail 
comme  un  simple  délassement;  mais  au  bout  de  peu  de  temps  il 
se  sentit  entraîné  vers  Preciosa  ;  les  contrastes  qui  existaient  entre 
les  deux  ouvrages  lui  plaisaient.  L'amour  était  autre  au  pied  de 
la  Sierra-Nevada  que  dans  une  forêt   de  Bohême,    et  la  vie   des 


petits-fils  des  Egyptiens  ne  ressemblait  en  rien  à  celle  des  chas- 
seurs allemands.  Weber  se  plut  aussi  à  se  servir,  dans  Preciosa, 
d'airs  espagnols  qu'il  avait  recueillis,  en  1812,  à  Cotha,  de  la 
bouche  même  de  soldats  espagnols  qui  tenaient  garnison  dans 
cette  ville.  Mais  quoi  qu'il  soit  de  ces  différences  dans  les  deux 
ouvrages  auxquels  Weber  travaillait  simultanément,  on  sent  cou- 
rir un  souffle  freischutzien  dans  la  musique  de  Preciosa.  La  mu- 
sique de  Preciosa  prépare  si  bien  à  celle  du  Freischutz,  qu'on 
croit  généralement  qu'elle  a  été  composée  antérieurement.  Il  n'en 
est  rien  ;  car  la  première  note  de  Preciosa  fut  écrite  postérieure- 
meiit  à  l'achèvement  du  Freyschutz.  La  composition  de  ce  nouvel 
ouvrage  présente  ce  fait  remarquable  et  fort  rare,  que  Weber 
commença  par  l'ouverture,  dans  laquelle  néanmoins  il  se  servit 
des  principaux  motifs  qu'on  rencontre  dans  le  reste  de  l'œuvre,  fait 
qui  prouve  surabondamment  que,  suivant  sa  coutume,  il  ne  com- 
mençait à  écrire  qu'après  avoir  en  quelque  sorte  fini  de  composer 
dans  son  esprit.  Dès  le  20  juillet,  la  partition,  terminée,  revue  et 
corrigée,  partait  pour  Berlin.  Preciosa  devait  entrer  en  scène  im- 
médiatement, mais  des  empêchements  en  retardèrent  la  représen- 
tation jusqu'au  mois  de  mars  suivant. 

Cette  année  de  1820  fut  une  des  plus  laborieusement  remphes 
parmi  celles  qui  marquent  l'époque  où  Weber,  dans  la  plénitude 
de  son  talent,  composa  la  série  de  chefs-d'œuvre  qui  l'immortali- 
sèrent. La  perspective  d'être  applaudi  par  un  public  d'élite  et  bien 
disposé  en  sa  faveur  avait  doublé  ses  forces  ;  sa  santé  semblait 
s'êti-e  affermie,  et  son  activité  ne  se  ralentissait  pas  un  moment. 
A  peine  eut-il  terminé  Preciosa  qu'il  se  mit  à  la  recherche  d'un 
autre  poëme,  mais  cette  fois  un  poëme  d'opéra -comique,  qui  le 
reposât  de  ceux  qu'il  venait  de  traiter.  Son  ami,  le  poëte  Théodore 
Hell,  lui  en  apporta  un  qui  lui  plut;  c'était  un  sujet  espagnol, 
dont  le  titre  était  les  Trois  Pintos.  Weber  se  hâta  de  l'acquérir, 
puis  il  se  proposa  d'y  mettre  tout  ce  que  son  génie  lui  dicterait 
de  mieux.  A  partir  de  cette  époque  jusqu'à  sa  mort,  ce  poëme  ne 
le  quitta  plus  ;  malheureusement  on  n'en  a  retrouvé  que  des  frag- 
ments, mais  nous  reparlerons  des  Trois  Pintos.  Ce  que  nous  de- 
vons dire  dès  maintenant,  c'est  qu'à  cette  époque  Weber  ne  vou- 
lait entendre  parler  que  de  sujets  espagnols,  et  que  son  attention, 
après  avoir  erré  sur  Pizarre,  Christophe  Colomb,  don  Juan  d'Au- 
triche, s'était  fixée  sur  le  Cid,  dont  il  voulait  faire  un  opéra  hé- 
roïque. Kind  qui  était,  comme  on  sait,  actif  en  besogne,  s'était 
mis  aussitôt  à  esquisser  son  libretto  ;  mais  Weber  ne  donna  pas 
suite  à  son  idée,  un  opéra  portant  le  même  titre  ayant  été  joué 
sur  ces  entrefaites  à  Munich.  Il  est  permis  de  regretter  cette  abs- 
tention, car  assurément  ce  sujet  lui  eût  mieux  convenu  que  la 
fable  très-médiocre  d'Euryanthe,  sur  laquelle  s'exerça  son  génie 
dans  la  suite. 

Cependant  l'ajournement  de  l'inauguration  du  nouveau  théâtre 
de  Berlin  à  l'année  suivante  créait  à  Weber  des  loisirs  qu'il  mit  à 
profit  pour  exécuter  un  voyage  qu'il  projetait  dans  le  nord  de 
l'Allemagne  et  en  Danemark.  Il  y  recueillit  toutes  sortes  d'ovations 
et  revint  par  Dresde  où,  sur  la  prière  de  son  vieil  ami  Baermann, 
il  organisa  un  concert  dans  lequel  il  fit  entendre,  pour  la  pre- 
mière fois,  l'ouverture  du  Freischutz.  Le  public  parut  étonné, 
surpris,  plutôt  qu'enthousiasmé.  Les  amis  de  Weber,  — Meyerbeer 
était  du  nombrt-,  —  s'en  alarmèrent,  mais  lui  avait  confiance 
dans  son  œuvre,  et  dans  sa  fierté  d'auteur  il  disait  :  «  Laissez 
faire;  il  y  a  dans  le  Freischutz  une  foule  de  choses  qu'on  ne  con- 
naît pas  au  théâtre;  comment  voulez -vous  qu'on  les  saisisse  de 
prime  abord?  » 

Le  succès  très-honorable  de  Preciosa,  représenté  à  Berlin  au 
mois  de  mars  suivant,  le  confirma  dans  ses  espérances.  A  la  vé- 
rité, la  critique  s'était  montrée  froide  à  l'égard  de  cet  ouvrage; 
en  outre,  des  réserves  s'étaient  élevées  çà   et  là   sur   ce  qu'il  y 


286 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


avait  d'osé  dans  la  musique.  Néanmoins,  Weber  avait  pu  conclure, 
de  l'ensemble  des  nouvelles  qui  lui  étaient  parvenues,  qu'il  ob- 
tiendrait un  succès  de  bon  aloi,  et  acquérir  la  certitude  de  l'im- 
pression favorable  que  sa  nouvelle  œuvre  avait  produite  sur  les 
habitants  de  Berlin.  C'était  là  le  point  essentiel,  car  ce  même  pu- 
blic devait  juger,  quelques  mois  plus  tard,  le  Freisckutz- ;  or, 
nous  l'avons  dit,  rien  ne  pouvait  mieux  disposer  les  esprits  en  fa- 
veur de  ce  dernier  ouvrage  que  la  musique  de  Prcciosa  ;  car  les 
liarmonics  pleines  de  hardiesse  et  de  mélodies  coulées  dans  un 
nouveau  moule  que  l'on  remarque  dans  le  Freiscliutz,  devaient 
paraître  bizarres^  inadmissibles,  pour  le  moins  originales ,  aux 
rhéteurs  de  la  musique,  qui  fourmillent  à  Berlin  comme  partout. 
Que  n'eussent  pas  dit  ces  derniers,  à  quels  excès  de  langage  ne 
se  fussent-ils  pas  livrés,  si,  par  bonheur,  les  scènes  de  la  forêt  et 
la  chanson  des  bois  de  Prcciosa  n'avaient  pas  préludé  aux  mu- 
gissements de  la  Gorge  aux  Loups,  ii  la  chanson  à  boire  et  au 
chœur  du  rire  du  Freischutz! 

Edmond  NEUKOiMM. 
(La  suite  prochainement.) 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 

^*^  Le  théâtre  impérial  de  l'Opéra  a  donné  lundi  et  vendredi  Ilnmlet 
et  mercredi  la  Juive.  —  On  annonce  une  reprise  de  Don  Carlos  pour  le 
mois  d'octobre. 

,**  L'Opéra-Comique  a  pris  possession  cette  semaine  du  Café  du 
Roi,  ce  vif  et  spirituel  petit  acte  de  MM.  Meilhac  et  Deffès,  que  le 
succès  le  plus  franc  a  suivi  d'Ems  (oii  il  fut  représenté  pour  la  pre- 
mière fois  il  y  a  huit  ans)  au  théâtre  Lyrique  en  ISG^,  et  maintenant 
sur  notre  seconde  scène  musicale.  Nous  avons  retrouvé  Mlle  Girard  tou- 
jours fine,  toujours  charmante  et  délurée  dans  ce  rôle  de  Louis  XV 
qu'elle  a  créé  avec  tout  le  mordant  et  toute  la  malice  de  son  esprit. 
Dans  la  romance  du  Sommeil  elle  a  de  charmants  effets  de  mezza  voce. 
Mlle  Heilbron,  un  jeune  talent  plein  d'avenir,  forme  avec  Mlle  Girard 
le  pins  piquant  duo  qui  se  puisse  imaginer.  Bernard  tient  convenable- 
ment le  rôle  du  marquis.  On  a  jeté  deux  bouquets  à  Mlle  Heilbron.  On 
ne  peut  que  savoir  gré  à  la  direction  de  l'Opéra-Comique  d'avoir  ou- 
vert une  place  dans  son  répertoire  à  la  perle  musicale  de  M.  Deffès; 
c'est  là  un  acte  de  goût  et  d'excellente  gestion.  —  Le  Café  du  roi  ac- 
compagne, à  présent,  les  Dragons  de  IVHars,  qui  luttent  avantageusement 
contre  la  recrudescence  de  la  chaleur.  —  La  reprise  du  Premier  Jour  de 
bonheur  aura  lieu  du  lo  au  20  de  ce  mois.  C'e.st  Mlle  Moisset,  premier 
prix  au  dernier  concours  du  Conservatoire,  qui  remplacera  Mlle  Roze 
dans  le  rôle  de  Djelma.  —  La  direction  a  aussi  engagé  Laurent,  le 
ténor  des  Fantaisies-Parisiennes  ;  il  débutera  dans  l'opéra  de  M.  Poize, 
qu'on  répète  en  ce  moment.  —Jeudi,  la  reine  de  Mohély  assistait  à  la 
représentation  de  Zampa ,  dans  une  loge  mise  avec  empressement  par 
les  directeurs  à  sa  disposition. 

^*^  Le  directeur  du  théâtre  Italien  vient  de  publier  le  programme  de 
sa  prochaine  saison,  qui  ouvrira  le  l^'  Oi-tobre.  La  salle  a  été  complète- 
ment restaurée.-  Le  réperioire  sera  choisi  parmi  les  meilleurs  ouvrages 
des  maestri  Rossini,  Bellini,  Donizetti,  Mozart,  Cimarosa,  Verdi,  Flo- 
Tovv,  Ricci,  Paesiello,  Poxiatowski ,  etc.,  et  il  sera  donné  au  moins 
deux  opéras  nouveaux  pour  le  théâtre  Italien  de  Paris  dans  le  cours  de  la 
saison  théâtrale.  Les  artistes  engagés  jusqu'à  ce  jour  sont  :  prime  donne 
soprani  :  Mmes  Adelina  Patii,  Minnie  Hauck,  de  Murska,  Ricci;  mezzo 
soprjno  et  conirallo:  Mnies  Krauss,  Grossi  ;  seconde  donne:  Mmes  Rosello, 
Vestri  ;;3n'ma  mima  .-MUeUrban;  primi  tenori:  MM.  Fraschini,  Tamberlick, 
Nicolini,  Palermi;  secondi  tenori  :  Ubaldi,  Arnoldi;  primi  baritoni:  Délie 
Sedie,  Steller,  Verger;  basso  cantante:  Agnesi;  bassi  et  buffi:  MM.  Ciampi, 
Zimelli,  Wallenreiter,  Mercuriali,  Fallar;  chef  d'ordxestre:  Skoczdopole; 
directeur  du  citant:  Alary.— Parmi  les  f-ri'me  do?!ïie,  on  entenrira  pour  la 
première  fois  à  Paris  Mlle  Hauck,  prima  donna  de  l'Opéra  italien  de  New- 
York;  Mlle  de  Murska,  prima  donna  du  théâtre  impérial  de  Vienne,  qui 
a  chanté  deux  saisons  avec  un  très-grand  succès  le  répertoire  italien  au 
théâtre  de  Sa  Majesté,  à  Londres;  et  Mlle  Ricci,  jeune  prima  donna  ita- 
lienne déjà  célèbre  en  llalie,  fille  et  nièce  des  frères  Ricci,  auteurs  de 
Criipino  e  la  Comore.  —  Les  pourparlers  entamés  avec  Mme  Alboni  n'ont 
maliieureusement  pas  abouti.  —  Comme  on  le  voit,  M.  Bagier  n'a  rien 
épargné  pour  rendre  sa  troupe  très-complète,  et  les  habitués  du  théâtre 
Ventadour  ont  toutes  raisons  de  compter  sur  une  saison  intéressante. 

^*^  Divers  journaux  annoncent  que  la  question  du  théâtre  Lyrique  serait 
résolue  par  le  consentement  qu'aurait  donné  M.  Pasdeloup  à  la  reprise  du 


I  matériel  au  prix  d'estimation.  On  doit  supposer  que  pour  faire  revenir 
M.  Pa,sdeloup  sur  sa  résolution  bien  arrêtée  de  ne  pas  se  charger  d'un 
pareil  fardeau,  des  compensations  lui  auront  été  accordées.  Quoi  qu'il 
en  soit,  il  aurait  d'ores  et  déjà  ratifié  définitivement  les  engagements 
qu'il  avait  faits  à  titre  provisoire. 

^*^  M.  Carvalho  étant  demeuré  titulaire  du  bail  de  la  salle  Ventadour 
pour  les  jours  impairs  de  la  semaine,  n'a  point  perdu  l'espérance  d'y 
continuer  l'exploitation  que  ses  embarras  financiers  sont  venus  inter- 
lompre.  Il  fait  des  démarches  actives  dans  ce  but;  mais  il  serait  diffi- 
cile de  prévoir  l'époque  où  il  aura  pu  reformer  une  troupe  convenable  et 
reconstituer  un  répertoire  dont  plusieurs  œuvres  importantes  ont  déjà 
passé  en  d'autres  mains.  M.  Carvalho  possède  toujours  en  sa  femme  une 
prima  donna  hors  ligne,  et  dans  M.  Deloffre  un  excellent  chef  d'orches- 
tre; c'est  quelque  chose,  et  son  courage  uni  à  son  activité  pourront  bien 
faire  le  reste. 

If**  Jeudi  dernier,  l'Athénée  a  rouvert  ses  portes  par  la  reprise  de 
Fleur  de  Thé,  interrompu  en  plein  succès.  Cette  reprise  avait  attiré  un 
nombreux  public.  M.  Daubray,  artiste  remarqué  l'an  dernier  au  théâtre 
Déjnzet,  a  remplacé  Désiré  sans  désavantage  dans  le  rôle  du  mandarin 
Tien-Tien.  Mme  Lovato  est  toujours  l'anmsante  cantinière  que  l'on  sait. 
La  charmante  Lucie  Cabel  fait  des  progrès  de  chant  et  de  jeu  dont  il 
faut  lui  tenir  compte.  Luce  tire  un  excellent  parti  du  personnage  de 
Pinsonnel.  Quant  à  Léonce,  il  est  de  plus  en  plus  Léonce,  et  c'est  tout 
dire;  il  chante  d'une  manière  ébouriffante  une  chanson  nouvelle  inter- 
calée, pour  lui,  au  troisième  acte,  et  qu'on  lui  a  redemandée  avec  accla- 
mation. L'opéra-bouffe  de  Charles  Lecocq  va  tenir  avantageusement  l'af- 
fiche jusqu'à  l'apparition  du  Petit  Poucet,  annoncé  pour  le  10  octobre. 

i*ii  La  direction  des  Bouffes-PaHsiens  a  reçu,  pour  le  jouer  au  mois 
de  novembre  prochain,  le  Moulin  ténébreux,  opéra-comique  en  un  acte 
de  MM.  Charles  Narrey  et  Albert  Vizentini. 

,f*^  Les  trois  actes  que  M.  Frédéric  Ricci  donnera  cet  hiver  aux  Fan- 
taisies-Parisiennes, et  dont  nous  avons  déjà  parlé,  auront  pour  titre 
.Monsieur  de  la  Palisse;  M.  Victor  Walder  est  l'auteur  du  livret.  — 
M.  Martinet  s'est  a'-suré  par  traité,  dit-on,  tout  le  répertoire  des  frères 
Ricci  ;  c'est  ainsi  que  le  Docteur  Crispin  (Crispino  e  la  Comare)  sera  éga- 
lement chanté  cet  hiver  au  boulevard  des  Italiens.  La  Fête  du  village 
voisin,  de  Boïeldieu,  complétera  la  série  des  ouvrages  que  nous  avons 
désignés  comme  devant  être  représentés  durant  la  saison  prochaine  des 
Fantaisies- Parisiennes. 

^**  Le  pupitre  de  chef  d'orchestre  de  la  Porte-Saint-Martin  a  été  of- 
fert par  M.  Raphaël  Félix  à  M.  Albert  Vizentini.  Choix  excellent  et  dont 
la  nouvelle  a  été  accueillie  avec  une  faveur  marquée. 

»*,j  Mardi  dernier,  ainsi  que  nous  l'avions  annoncé,  le  Grand-Théâtre 
de  Lyon  a  inauguré  sa  nouvelle  campagne  avec  les  Mousquetaires  de  la 
Jieine,  pour  les  débuts  d'opéra-comique,  et  les  Huguenots  (décors  nou- 
veaux, chœurs  renforcés),  pour  la  rentrée  de  MM.  Delabranche,  Méric  et 
Marthieu  dans  le  grand-opéra. 

***  Si  l'on  en  croit  un  entre-filets  du  Moniteur,  M.  Strakosch  aurait 
obtenu  du  prince  Poniatowski  la  promesse  de  composer  la  musique  d'un 
opéra  en  trois  actes  sur  un  poënie  italien  de  Rizelli. 

*.**  On  lit  dans  la  Gazette  des  étrangers  :  «  Le  directeur  de  la  Scala 
fait  offrir  à  Mme  Marie  Sass  de  venir  jouer,  pendant  deux  mois,  à 
Milan,  la  Juive  et  l'Africaine,  aux  appointements  de  23,000  francs  par 
mois.  Quel  que  soit  le  sort  de  cette  proposition,  elle  ne  pourrait,  dans 
tous  les  cas,  être  réalisée  immédiatement.  » 

,t*i  La  célèbre  cantatrice  Miss  Kellog  s'est  embarquée  hier  à  Liverpool 
pour  New-York,  où  elle  va  remplir  le  brillant  engagement  qui  l'attend 
en  Amérique  pour  la  saison  d'hiver. 


NOUVELLES  DIVERSES. 

j^*^  La  saison  a  été  fort  brillante  cette  année  à  Dieppe.  Une  société 
nombreuse  et  choisie  n'a  pas  cessé  d'assiéger  la  magnifique  terrasse  du 
Casino,  où  l'orchestre  de  M.  Placet  se  faisait  entendre  de  3  heures  1/2 
à  3  heures  1/2.  Le  soir,  dans  la  rotonde,  nouveau  concert,  ou 
un  bal,  ou  une  représentation  théâtrale.  Dans  ces  derniers  temps,  on 
y  a  applaudi  successivement  la  voix  de  Mme  Enrichetta  Corradi,  celle 
de  M.  Lédérac,  le  violoncelle  de  M.  Lamoury,  le  violon  magique  de 
Mlle  CasteUan,  et  l'intéressant  trio  des  enfants  Frémeaux,  qui  arrivaient 
triomphants  de  Vichy.  Us  ont  donné  deux  concerts  où  l'on  a  chaleureu- 
sement applaudi  leur  précoce  et  remarquable  talent. —  Le  feu  d'artifice  de 
dimanche  dernier,  sur  les  falaises  du  château,  a  obtenu  un  succès  com- 
plet. Enfin,  par  deux  fois,  Mlle  Thérésa  a  chanté,  au  Théâtre,  les  meil- 
leures chansonnettes  de  son  répertoire,  et  la  salle  s'est  trouvée  trop  pe- 
tite pour  conienir  la  multitude  des  admirateurs  de  son  talent  populaire. 


DE  PAIUS 


287 


;f**  Une  compagnie  musicale,  composée  de  virtuoses  éminents  et  dont 
le  répertoire  comprendra  exclusivement  les  pages  les  plus  Iirillanles  de 
l'art  ancien  et  moderne,  se  forme  en  ce  moment  ù  Paris,  sous  la  direc- 
tion de  M.  Thiijaut,  l'un  des  capitaines  de  musique  do  la  garde  natio- 
nale de  Paris.  Cette  Société  a  pour  Ijut  d'entreprendre  des  tournées 
artistiques  en  province  et  de  foire  pour  la  musique  d'ensemble  ce  que 
Ulmann  a  si  complètement  réalisé  pour  quelques  célébrités  vocales  et 
injtrumenlales.  Nous  applaudisfons  sans  réserves  à  cotte  courageuse  initia- 
tive dont  les  résultats  peuvent  être  également  utiles  à  l'art  et  aux  artistes, 
et  nous  appelons  sur  celte  fondation  l'attention  des  localités  désireuses 
d'avoir  des  concerts  formés  d'éléments  nouveaux  pour  elles. 

a,**  Hier  soir,  au  concert  du  jardin  des  Tuilerie.^,  on  a  beaucoup  re- 
marqué et  chaleureusement  applaudi  l'exécution  par  la  musique  tle  la 
gendarmerie  de  la  garde  de  l'originale  et  charmante  mazurka,  Alice,  de 
d'Autherive,  un  nom  promis  au  succès.  Ce  morceau  a  été  arrangé  pour 
musique  d'harmonie  par  M.  Fabre,  l'excellent  clarinettiste  de  cet  or- 
chestre militaire. 

.■i;*:i;  Le  Conservatoire  de  Naples,  où  l'art  musical  a  déjà  son  histoire 
tout  entière  représentée  par  les  monuments  et  les  documents  les  plus 
curieux,  vient  de  s'enrichir  encore  d'une  précieuse  collection  de  portraits 
de  coiiiposiiours  célèbres,  qui  lui  a  été  donnée  par  le  conservateur  de 
SCS  archives,  M.  le,  chevalier  de  Florimo,  l'ami  de  Bellini,  et  composi- 
teur distingué  lui-même.  Au  nombre  do  ces  portraits  à  l'iuiile  authen- 
tiques, la  plupart  d'excellents  peintres  et  dont  quelques-uns  conservent 
les  cadres  de  l'époque,  on  admire  ceux  de  Scarlatli,  Haendel,  Pergolèse, 
Gluck,.  Jomelli,  Joseph  Haydn,  Sacchini,  Cimarosa,  Mozart,  Bellini,  etc. 
Ce  dernier,  dû  à  Pélagie-  Palagi,  le  maître  de  tous  les  peintres  qui  se 
sont  fait  un  nom  dans  l'école  lombarde  contemporaine,  est  particulière- 
ment remarquable.  Le  génie  tendre  et  mélancolique  de  l'auteur  de 
Norma  se  révèle  dans  chaque  coup  du  pinceau  de  l'artiste  philosophe. 
La  presse  musicale  italienne  n'a  pas  ménagé  ses  éloges  à  M  de  Florimo 
pour  ce  don  plus  que  généreux  fait  par  lui  avec  tant  d'abnégation  à  un 
établissement  dont  il  maintient  avec  Mercadante  le  faste  et  la  réputation. 

„:'*  La  bibliothèque  de  Brunswick  vient  de  s'enrichir  d'une  curieuse 
collection  de  iO,00(>  programmes  de  théâtre  de  tous  les  pays,  dont  une 
quantité  notable  remonte  au  siècle  dernier;  il  s'y  trouve  toute  une  série 
de  programmes  de  théâtre  de  foire ,  et  ce  ne  sont  pas  les  moins  inté- 
ressants. C'est  le  major  Haeupler  qui  a  mis  vingt  ans  de  sa  vie  à  réu- 
nir cette  collection . 

,s%  Notre  collaborateur  A.  Elwart  vient  de  faire  une  découverte  pré- 
cieuse :  celle  du  poi'trait  original  de  Haendel,  peint  en  1743  par  le  célèbre 
Hogarth.  La  toile  était  dans  un  état  pitoyable.  M.  A.  Elwart,  aidé  de 
l'habile  restaurateur  de  tableaux  M.  Forgeais,  l'a  fait  rentoiler  et,  dans 
quelques  jours ,  on  pourra  contempler  les  traits  sévères  et  si  profondé- 
ment accentués  de  l'auteur  du  Messie  et  de  tant  d'autres  chefs-d'œuvre. 

^*^,  L'ordre  très-distingué  et  fort  recherché  du  Mérite,  qui  donne  la 
noblesse  et  ne  s'accorde  qu'aux  illustrations  civiles  de  premier  ordre, 
vient  d'être  conféré  par  le  roi  d'Italie  au  compositeur  napolitain  Merca- 
dante. 

**^  Le  bpy  de  Tunis  vient  de  décerrer  à  M.  Capoul  la  décoration 
d'officier  de  l'ordre  du  Nischam. 

t*,f  M.  Albert  Sowinski,  auteur  d'une  remarquable  Vie  de  Beethoven, 
fera  paraître  incessamment  une  Histoire  de  la  Vie  et  de  IVEuvre  de  Mo- 
zart, traduite  de  l'Allemand,  de  G.  N.  Nissen.  On  souscrit  pour  ce  nou- 
vel ouvrage  chez  l'auteur,  rue  de  Grenelle-Saint-Germain ,  39 ,  à  Paris. 

ij,*ii,  Stœger,  Seligmann  et  Besekirsky  sont  en  ce  moment  à  Mannheim; 
ils  annoncent  pour  le  12  septembre  un  concert  qui  promet  d'être  bril- 
lant.—Le  célèbre  quatuor  florentin,  dirigé  par  Jean  Becker,  a  été  ramené 
dans  cette  ville  par  ses  pérégrinations  à  travers  l'Allemagne.  Paris,  où 
on  ne  l'a  jamais  entendu,  est  sur  son  itinéraire  pour  cet  hiver. 

.j;*^  Jeudi  est  mort  à  Paris  M.  Stephen  de  la  Madelaine,  professeur  de 
chant  distingué,  ancien  chanteur  récitant  de  la  chapelle  et  de  la  mu- 
sique particulière  de  Charles  X,  d'où  il  passa  comme  chef  de  bureau  au 
llinistère  de  l'intérieur,  à  la  direction  des  beaux-arts;  il  a  écrit  beau- 
coup d'ouvrages  remarquables  sur  son  art  :  la  Physioloyie  du  Chant,  les 
Théories  complètes  du  Chant,  et,  en  dernier  lieu ,  Etudes  pratiques  du  Style 
vocal;  il  avait  participé  à  la  rédaction  de  plusieurs  journaux  de  mu- 
sique. La  Gazette  Musicale  le  complaît  au  nombre  de  ses  collaborateurs, 
et  il  rédigea  pendant  quoique  temps  le  feuilleton  musical  du  Courrier 
français.  Il  était  âgé  de  soixante-sept  ans.  Ses  funérailles  ont  eu  lieu 
hier  à  l'église  Saiut-Louis-d'Anlin  ,  devant  une  nombreuse  assistance 
d'amis,  d'artistes  et  d'hommes  de  lettres,  auxquels  il  fut  toujours  très- 
sympathique.  M.  Elwart  a  prononcé  quelques  mots  bien  sentis  sur  sa 
tombe. 

s^*jf  Nous  avons  le  regret  d'annoncer  la  mort,  à  Etretat,  du  pianiste- 
compositeur  René  Favarger,  qui  jouissait  en  France,  mais  à  l'étranger 
surtout  et  notamment  en  Angleterre,  d'une  réputation  légitimement  ac- 
quise. Il  est  l'auteur  d'œuvres  nombreuses  qui  ont  beaucoup  de  succès. 


^•,1;  On  annonce  la  mort  :  à  Vienne  (Autriche),  de  Louis  Morelly,  Ûgé 
de  cinquante-quatre  ans,  chef  d'oreiicslrc  et  compositeur  de  musique  de 
danse;  —  à  Prague,  d(^  Sigi.smond  Kole.sowsky,  compositeur  et  directeur 
de  l'Académie  Sopliie  ;  —  ii  Leipzig,  de  Mme  Ueinecke,  née  Scharnke, 
femme  du  directeur  du  Conservatoire  et  ancienne  artiste  lyrique;  —  à 
Francfort,  de  M.  Xavier  Schnyder  de  Warten.sée ,  né  à  Luci'rne  (Suisse), 
et  âgé  de  quatre-vingt-deux  ans,  compositeur  el  théoricien. 

^*i^  Aujourd'hui  dimanche,  C  septembre,  grande  Fête  champêtre  au 
Pré  Catelan;  —  Grand  Bal  d'Enfants,  avec  tombola  à  quatre  heures;  — 
Représentations  au  Théâtre  des  Fleurs  à  cinq  heures.  De  plus  la  remarquable 
musique  des  zouaves  admirablement  conduite  par  M.  Hcmmerlé. 


ETRANGER 

^*^  Bruxelles.  —  Le  1"  septembre ,  le  théâtre  royal  de  la  Monnaie  a 
fait  sa  réouverture  avec  le  Maître  de  Chapelle  et  le  Docteur  Crispin.  — 
La  troupe  reste  ce  qu'elle  était  l'année  dernière,  sauf  les  exceptions  sui- 
vantes :  MM.  Massy  (ténor),  Giraudet  (basse).  Mlle  Marty  succèdent  à 
MM.  Dulaurens,  Vidal,  Mme  Erembert;  Mlle  Marimon,  qui  laissa  ici 
d'excellents  souvenirs  il  y  a  deux  ans,  est  de  nouveau  engagée.  La  sai- 
son sera  abrégée  d'un  mois  et  se  terminera  le  30  avril  IS69. 

^*-jf  Anvers. — Un  oratorio,  ou  plutôt  un  opéra  idéal  intitulé  De  Schelde 
(l'Escaut),  de  Pierre  Benoît,  le  directeur  de  notre  Conservatoire ,  sera 
exécuté  au  mois  de  novembre  prochain.  On  en  parle  déjà  comme  d'une 
œuvre  d'une  grande  valeur. 

^*^,  Spa.—Aa  concert  du  21  aoîit  ont  pris  part  Mlle  Schrœder,  Mme  Es- 
cudier-Kastner  et  M.  Dimkler.  L'air  des  Bijoux,  de  Faust,  celui  de  Sémi- 
ramirie,  ont  fait  valoir  le  talent  gracieux  et  plein  de  charme  de 
Mlle  Schrœder,  Mme  Escudier-Kastner,  la  pianiste  au  jeu  puissant  et 
plein  de  feu,  a  exécuté  la  valse  de  Faust,  le  Feu  follet  et  le  Torrent; 
Dunkler,  enfin,  l'habile  violoncelliste,  a  rappelé  la  manière  si  expressive 
et  si  noble  de  Servais,  dont  il  semble  devoir  recueillir  l'héritage. 

,j*a.  jBade.  —  Les  représentations  d'opéra  allemand,  qui  vont  avoir 
lieu  bientôt,  seront  dirigées  par  le  chef  d'orchestre  Eckert  (de  Stuttgard), 
qui  prend  la  place  de  Reiss  (de  Cassel),  éloigné  de  son  poste  par  les 
suites  d'un  accident. 

**,j  Wiesbaden.  —  Le  célèbre  Wachtel  va  se  fixer  ici,  dans  la  belle 
villa  Blomberg,  dont  il  vient  de  faire  l'acquisiiion  au  prix  de  S0,000  flo- 
rins. 

,%  Berlin.  —  Le  théâtre  de  Kroll,  dont  le  directeur  Engel  a  déployé 
pendant  toute  la  saison  une  si  louable  activité,  a  clos  le  31  la  série  de 
ses  représentations  d'opéra  par  Don  Juan . 

:i:%  Cologne.  —  Les  examens  publics  du  Conservatoire  viennent  d'avoir 
lieu.  Les  classes  de  piano  de  MM.  Gernsheim,  Seiss  et  Rudorfî,  celles 
de  violon  de  MM.  Kœnigslœw  et  Japha,  celles  de  chant  de  M.  et 
Mme  Marchesi,  celle  de  déclamation  de  Mme  Ernst,  se  sont  distinguées 
entre  toutes. 

***  Prague.— Le  Premier  Jour  de  Bonheur,  d'Auber,  vient  d'être  donné 
ici  avec  un  très-grand  succès. 

,^*,j  Saint-Pétersbourg.  —  Le  violoniste  L.  Auer  est  engagé  pour  trois 
ans  comme  professeur  au  Conservatoire  et  concertmeister  ou  violon  solo 
de  la  Société  musicale  russe.  C'est  M.  Schradieck,  qui  lui  succède  daps 
le  poste  de  directeur  des  concerts  philharmoniques  de  Hambourg. 

**,(:  Muscou.—XJn  pianiste  distingué  de  Londres,  M.  Charles  KUndworth, 
vient  d'être  nommé  professeur  de  piano  au  Conservatoire. 


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Chez  BRANDUS  et  DUFOUR,  éditeurs,  i03,  rue  de  Richelieu. 
POUR  PARAITRE  JEUDI  PROCHAIN  : 

LE   DOMIIVO    I¥OIR 
HAYDÉE 

Paroles  et  musique  sans  accompagnement,  avec  analyse  de  la  pièce. 

Partition  conforme  au  théâtre. 

Prix  de  chaque  partition,  net  3  francs. 

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Format  171-8°.  de  l'opéra-bouffe  Prix  net  :  6  francs. 

MUSIQUE  DE 


CHARLES    LECOCQ 


Les    A.irs    de     Gliant     détacliés 

1.  Chanson  de    la   Cantinière  :    Vivandière,   canti- 

nière,  parlez,  que  désirez-vous  ? 3  75 

2.  Couplets  :  J'ai  couru  grossir  la  foule 3    » 

3.  Duo  :  A  l'éviter  j'ai  réussi 7  50 

4.  Chinoiserie'  :  Je  suis  clairvoyant  comme  un  sphinx. .  4  50 
4  bis.  La  même,  arrangée  à  une  voix 3    » 

5.  Trio  :  La  loi  du  Tsinn  est  fort  claire 9     » 


6.  Confidence  :  Je  suis  né  dans  le  Japon 3    » 

7.  Ariette  :  En  tous  pays  l'homme  est  un  être 3  75 

8.  Romance  :   Césarine  à  mes  vœux  docile 3    » 

8  bis.  La  même,  transposée  pour  baryton 3    » 

9.  Duo  :  Rappelle-toi,  ma  chère  amie 9    » 

9  b  is.  Couplets  de  l'Alcôve  :  Ensuite  dans  la  nuit  ...  3    » 

10.  Ronde  du  Clicquot:  Ce  n'est  pas  un  vin  de  carême  2  50 


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Format  itiS". 


L'Ouverture,  pour  le  Piano,  5  fr. 


Prix  net  :  10  fr. 


E.  KETTERER.  Fleur  de  Thé,  galop  de  salon,  pour  le  piano  :  7  fr.  50 . 


CRAMER.  Bouquet  de  Mélodies  pour  le  piano,  7  50 

A.  MEY.  Tien-Tien  et  Ka-clin,  quadrille.  .  .  Zi  50 

STRAUSS.  Grande  Valse  pour  le  piano  ...  5     » 

—    La  même,  arrangée  à  4  mains  et  orchestre.  7  50 


ARBAN .  Quadrille  pour  le  piano &  50 

—  Le  même,  arrangé  à  !i  mains  et  orchestre  .     4  50 
ROQUES.   Clicquot-Polka  pour  le  piano.  ...  A  » 

—  La  même,  arrangée  à  4  mains  et  orchestre.     6  » 
A.  MEY.  Polka-Mazurka  pour  le  piano  ....  4  50 


]\ouvelle  Collection  (huitième) 


DES   MEILLEURS 

QUADRILLES,   VALSES,    POLKAS,  POLKAS -MAZURKAS,  ETC. 

Composés  par  Strauss,  Arban,  Marx,  Mey,  Musard,  Roques,  Ettling,  Labitski ,  etc., 

ARRANGÉS 

Pour  un  Violon,  pour  un  Cornet  et  pour  une  Flûte. 

7.  Koqnes.  Polka  et  polka  -  mazurka  de  la 
Grande-Duchesse  de  Gérohtein. 

8.  Straass.  Valse  du  Pardon  de  Ploërmel. 

9.  —         Valse  de  Lischen  et  Fritzchen. 

10.  Pattt  fAd.).  Valse:  Fleur  du  Printemps. 
H.  Hasard.  Valse  des  Bavards. 

12.  Arban.  Quadrille  sur /iobinson  Crusoë. 

13.  Strauss.  Quadrille  sur  Marlha. 

14.  Harx.  Quadrille  sur  l'Africaine. 

—  La  collection,  net  7  fr.  — 


Valse  des  Detix  Aveugles. 
Valse  de  Tromb-al-Casar . 
Polka  des  Deux  vieilles  Gardes. 
Polka  Coucou  et  Cricri. 

5.  Arban.    Quadrille  de  la  Grande-Duchesse 

de  Gérolstein. 

6.  Stranss.  Valse  de  la  Grande-Duchesse  de 

Gérolstein. 


1 .  Hasard 

2.  — 

3.  — 

4.  Herzog. 


Chaque  n°,  4  fr.,  prix  marqué 


15.  Straass.    Quadrille   Echo    des    Bouffes- 
Parisiens  . 

16.  liamotte.  Quadrille  sur  Fra  Diavolo. 

17.  Arban.  Polka  du  Brésilien. 

18.  Doppler.  Grande  Polka  des  Horloges  de 
la  forêt  Noire. 

19.  Roques.  Polka  de  Robinson  Crusoë. 

20.  Arban.  Polka-mazurka  de  P Africaine. 

Chaque  n°,  4  fr.,  prix  marqué. 


PRIX  ACCORDÉ  A   L'DNANIUITÉ  A   l'EXPOSITION 
OBIVERSELLE  DE   LONDRES  1851 . 


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INSTRUMENTS    DE    MUSIQUE    EN    CUIVRE     a  l'exposition  universelle  de  paris  isss. 
Exposition  UnlTcrselle  de  Londres  1862 


Konrnissear  des  ministères  de  la  .     „     '       V  .       ,  ,,  ■    ,.,j  .„    ,  Facteur  da    Conservatoire  et  de 

.  ^     .    _     .       ...  MM.  les  Membres  du  Jury  International  décernent  la  Médaille  a  u._„j.;„._i„    ■   i„i.  .._  «._.. 

Ctnerre  et  de  la  Marine  de  Trance.  ■'  l'Académie  Impériale  de  Paris. 


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adressées;  elle  garantit  réellement  à  sa  clientèle  des  instruments  irréprochables  sous  tous  les  rapports. 


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3S'  Année. 


N'  37.  ' 


15  Septembre  1868. 


ON   S'ABONNE  : 

Dans  les  Départements  et  û  l'Étranger, 

chez  tous  [es  Uarchands  de  tlusique,  Us  Libraire 

et  aux  Bureaux  dev.  Kessagerics  et  des  Postes. 


REVUE 


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Poris •-*   r-liumn 

Départements,  Belgique  et  Suisse. ...    30  »       id. 

Élrtuiger 34  r.       Id- 

Le  Journal  paraît  le  Dimanche. 


DE     PARIS 


SOMMAIRE. —  La  Critique  musicale,  par  Em.  Hathieu  de  Ilonter.  —  Les 

Théâtres  lyriques  secondaires  à  Paris  depuis  1820  (7'  article) ,  par  Arthnr 
Pong^in.  —  Bibliographie  musicale.  —  Revue  des  théâtres,  par  D.  A.  D. 
Saint-Vies.  —  Correspondance:  Bade.  —  Nouvelles  des  théâtres  lyriques. 
—  Nouvelles  diverses.  —  Annonces. 


LA  CRITIQUE  nUSICÂLE. 

Il  n'y  a  pas  de  climat  où  l'on  s'ennuie  aussi  vite  que  dans  le 
nôtre,  d'aimer  ou  de  ne  point  aimer.  Il  n'y  a  pas  de  peuple  qui 
soit  plus  prompt  à  s'enthousiasmer,  ni  plus  prompt  à  s'en  repen- 
tir. Dites-moi  ce  que  vous  adoriez  hier,  et  je  vous  dirai  ce  que 
vous  raillez  aujourd'hui.  Paris  jette  chaque  jour  ses  vieux  grands 
artistes,  ses  vieux  comédiens,  et  toutes  ses  défroques  théâtrales 
célèbres  de  l'an  passé  dans  ce  fleuve  au  rapide  courant  qui  charrie 
à  travers  le  monde  toutes  nos  gloires  usées. 

Ce  caractère  d'activité  insatiable  et  tout  de  suite  rassasiée  im- 
prime à  la  Critique  musicale  en  particulier  une  mobilité,  une 
versatilité  nuisibles  plutôt  qu'utiles  aux  intérêts  de  l'art.  Devant  ce 
dire,  ce  redire  et  ce  contredire  perpétuel ,  l'opinion  flotte,  indécise, 
et  le  jugement  de  la  loule  ne  se  fixe  pas.  Que  demande,  en  effet, 
le  public,  ce  composé  de  gens  de  bons  sens,  mais  prudents,  hé- 
sitants, dispersés?  Qu'on  le  rallie,  qu'on  lui  dégage  à  lui-même 
son  propre  avis,  qu'on  lui  indique  nettement  ce  qu'il  pense.  Cela 
est  vrai  de  tous  les  publics,  grands  ou  petits,  même  de  ceux  qui 
sont  déjà  un  choix. 

11  y  a  pour  la  Critique  musicale  moderne  deux  lignées  distinc- 
tes :  l'une,  honnête,  scrupuleuse,  impartiale,  née  de  Bayle;  l'au- 
tre, audacieuse,  énergique,  grossière  même  jusque  dans  le  bon 
sens,  née  de  Fréron.  Dans  ces  deux  filiations,  que  de  tribus  di- 
verses !  que  de  tempéraments  diff'érents  ! 

Ceux-ci  ont  le  savoir,  la  plume,  l'érudition,  la  fantaisie.  Qu'une 
œuvre  nouvelle  se  produise,  et  ils  vont  discourir  à  merveille  sur 
le  sujet  ou  à  côté  du  sujet,  développer  leur  esprit,  se  mettre  en 
scène,  vous  conter  leur  humeur  ou  vous  débiter  leur  science  ;  ils 
vous  diront  tout,  excepté  un  jugement;  ils  ont  tout  du  critique, 
hormis  le  judicieux.  Ceux-là,  au  contraire,  nous  poursuivent  sans 


cesse  de  leur  ironie  et  nous  atteignent  au  cœur;  ils  jettent  lejn 
regard  froid  sur  notre  enthousiasme  et  ils  l'éteignent,  et  quand 
ils  nous  voient  faits  à  leur  image,  désenchantés,  sans  croyance, 
et  glacés  comme  eux,  alors  il  nous  classent  parmi  leurs  élus  et 
nous  disent  avec  orgueil  :   «  Vous  êtes  des  nôtres,  allez  !  » 

De  ces  vaillants,  uniquement  occupés  à  détruire,  qui  mettent 
toute  leur  gloire  à  troubler  celle  des  autres ,  toute  leur  jouissance 
à  les  affliger,  toute  leur  adresse  à  les  distraire,  il  n'y  a  qu'un 
moyen  de  triompher,  car  toute  autre  victoire  serait  compromet- 
tante, c'est  de  ne  point  engager  le  combat  avec  eux.  Il  en  est  de 
sincères,  sortes  de  chevaliers  errants  de  la  vérité,  en  même  temps 
maîtres  d'invectives,  qui  insultent  et  injurient  avec  conviction,  dès 
qu'on  n'est  pas  de  leur  avis,  de  l'opinion  ou  du  système  qu'ils 
tiennent  pour  vrais  dans  le  moment.  Je  ne  parle  ni  des  «  on- 
doyants et  divers  »,  ni  de  ceux  qui  fondent  de  petites  feuilles,  à 
la  seule  fin  de  rouler  maladroitement  les  ennemis  de  leur  petite 
chapelle.  Qu'importe  l'espèce?  Aucune  ne  conclut.  Le  propre  de 
la  Critique  musicale  contemporaine  est  d'être  historique  et  éclec- 
tique. Bienveillante,  hostile  ou  neutre  de  parti-pris,  elle  expose 
beaucoup,  elle  comprend  tout,  elle  ne  juge  pas  hautement.  C'est 
une  voie  lar^e  et  féconde,  mais  qui,  à  force  d'être  large,  n'aboutit 
pas. 

Est-ce  à  cause  des  allures  agressives  ou  des  habitudes  de  déni- 
grement de  la  Critique  musicale,  que  je  constate  cette  déperdition 
dans  ses  forces  vives?  Loin  de  là.  Je  suis  d'avis  au  contraire  qu'il 
est  excellent  d'entendre  juger  son  œuvre  par  un  ennemi.  Les  en- 
nemis ont  un  flair  particulier  qui  leur  tient  lieu  de  talent;  ils 
mettent  le  doiîTt  sur  les  défauts  avec  l'ingéniosité  de  la  haine. 
S'ils  pouvaient  préjuger  des  services  qu'ils  nous  rendent,  ils  se 
tairaient,  mai»  la  passion  est  plus  forte  que  la  logique,  et  c'est 
ainsi  qu'un  artiste  consciencieux,  critiqué,  bafoué  même,  arrive, 
après  des  luttes  souvent  renouvelées,  au  degré  de  perfection  que 
la  nature  comporte. 

Comme  nous  voilà  loin  des  maîtres  en  l'art  de  rassembler  toute 
une  œuvre  d'art  dans  une  suite  de  réflexions  fortes  et  concentrées, 
au  moyen  d'expressions  figurées  et  profondes,  et  de  la  juger  par 
un  ou  plusieurs  de  ces  traits  qui  percent  à  jour  les  hommes  et  les 
choses,  et  qui  les  qualifient  éternellement!  Tous  les  hommes  con- 
sidérables auxquels  s'est  appliqué  ce  titré   de    Critique  jugeaient 


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liEVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


des  choses  de  goût  avec  vivacité,  avec  exclusion,  avec  un  senti- 
ment net,  décisif,  irrésistible.  Si  nous  remontons  à  Diderot,  ce 
créateur  de  la  Critique  émue,  empi'esséc,  éloquente,  nous  trouve- 
rons en  lui  cette  faculté  de  dcmi-métamorpliosc,  qui  est  le  jeu  et 
le  triomphe  de  la  Critique,  et  qui  consiste  à  se  mettre  à  la  place 
de  l'auteur  et  au  point  de  vue  du  sujet  qu'on  examine,  à  lire,  h 
écouter  toute  page  musicale  selon  le  sentiment  qui  l'a  dicté,  à  s'en 
échauffer  la  tête  et  le  cœur,  et  à  faire  l'analyse  féconde  des  beau- 
tés avec  la  même  éloquence  que  celle  des  défauts.  De  Feletzs, 
Geolli'oy,  Hoffmann,  Deialot,  les  Berlin,  Fiévée,  Michaud,  Gue- 
neau  do  Mussy,  Mlle  de  Meulan,  Ginguené,  etc.,  gens  d'esprit  et 
de  sens,  judicieux,  instruits,  plus  ou  moins  mordants,  n'em- 
ployèrent pas  un  autre  procédé,  au  commencement  du  siècle, 
pour  remettre  le  bon  ordre  dans  les  choses  de  l'esprit  et  de  l'ins- 
piration et  faire  la  police  des  arts  et  des  lettres. 

Je  crois  fermement  et  je  serai  heureux  si  l'on  partageait  ma 
conviction,  qu'en  critique  le  salutaire  et  le  profitable  seraient  de 
retremper  souvent  sa  raison,  sa  logique,  sa  volonté,  dans  des  étu- 
des d'un  ordre  sé\ère  et  même  de  s'aslremdre  aux  commencements 
arides  de  l'art.  Le  bon  jugement  en  musique,  faculté  très-lente  et 
difficile  à  acquérir,  le  goût,  qui  est  la  conscience  artistique  de 
l'ûme,  et  la  délicatesse,  sans  laquelle  il  n'est  point  de  critique,  ré- 
sulteraient de  ces  travaux  d'examen  et  d'assimilation. 

«  L'art  de  la  critique  musicale  dans  son  sens  le  plus  pratique 
et  le  plusvulgaire,  consiste  à  savoir  lire  ou  écouter  judicieusement 
les  œuvres,  et  à  apprendre  aux  autres  à  les  écouter,  à  les  lire 
de  même,  en  leur  épargnant  les  tâtonnements  et  en  leur  déga- 
geant le  chemin.  »  Telle  est  la  doctrine  des  juges  artistiques  les 
plus  autorisés. 

Le  critique  qui  exerce  une  «  influence  »  véritable  n'est  qu'un 
homme  qui  exprime  parfaitement  ce  que  les  autres  pensent,  et  qui 
réveille  dans  les  esprits  des  idées  ou  des  sentiments  qui  tendaient 
à  éclore.  A  lui  seul,  il  ne  fait  rien  ou  ne  peut  rien.  La  bonne  cri- 
tique —  je  ne  parle  ni  de  l'exploitation,  ni  de  la  réclame  —  n'a 
son  action  que  de  concert  avec  le  public  et  presque  en  collaboration 
avec  lui.  Le  critique  n'est  que  le  secrétaire  du  public,  mais  un 
secrétaire  qui  n'attend  pas  qu'on  lui  dicte,  et  qui  devine,  qui  dé- 
môle, rédige  en  la  rectifiant  au  besoin,  la  pensée  de  tout  le 
monde. 

En  remplissant  ce  rôle,  et  je  l'estime  des  plus  nobles ,  la  Criti- 
que ne  sera  pas  entraînée  à  mettre  sans  cesse  aux  prises  avec 
l'art  des  choses  qui  ne  paraissent  pas  devoir  lui  être  si  constam- 
ment opposées  et  confrontées.  «  Il  faut  surtout  s'attacher,  écrivait 
Gœthe,  le  maître  de  la  critique,  à  l'exécution  dans  les  œuvres  de 
l'artiste,  et  voir  s'il  a  fait  et  comment  il  a  fait  ce  qu'il  a  voulu.  » 
D'après  ce  principe  souverain,  la  notion  du  beau  doit  se  rapporter 
beaucoup  plus  à  l'exécution  qu'à  la  conception  de  l'œuvre  d'art. 
La  vérité,  dans  son  sens  généra!,  voilà  donc  ce  qu'il  faut  entendre 
par  le  Beau.  Il  est  des  idéals  moins  purs,  moins  élevés,  moins 
lumineux! 

Le  judicieux,  ainsi  retrempé  à  sa  source,  y  reprendrait  de  la 
vie  et  de  la  fraîcheur.  Les  vraiment  belles  choses  paraissent  de 
plus  en  plus  telles  à  proportion  qu'on  a  plus  comparé.  Une  atten- 
tion, une  connaissance  plus  étendues,  plus  vraies  rapprocheraient 
les  jugements  dissidents,  remettraient  d'accord  bien  souvent  la 
Critique  et  lui  rendraient  son  action  d'autrefois,  sensiblement 
compromise  aujourd'hui. 

Voilà  la  Critique  telle  que  je  la  comprends;  et  telle  est  la  doc- 
trine de  ceux  qui  l'ont  exercée  avec  la  plus  grande  autorité,  de- 
puis Diderot,  Johnson,  La  Harpe,  Fontanes,  jusqu'à  Sainte-Beuve, 
qui  les  résume  et  les  continue.  Voilà  comme  on  doit,  comme  on 
devrait  toujours  étudier,  analyser,  discuter,  critiquer,  ce  me  semble 
compositeurs,  peintres,  artistes  et  créateurs   de   tout   ordre.    Ces 


hommes  qui  osent  se  mesurer  avec  l'immortalité,  porter  le  défi  au 
temps,  une  partition  à  la  main ,  chanter  ou  penser  tout  haut  de- 
vant leur  siècle,  me  paraissent  les  plus  intrépides  de  tous  les 
hommes.  Si  nous  no  pouvons  toujours  approuver  leur  talent,  ap- 
plaudir à  ses  manifestations,  saluer  leur  génie,  respectons  au 
moins  leur  courage,  prenons  leur  labeur  en  considération,  ayant 
en  haute  estime  leur  honneur  et  leur  dignité! 

Em.  Mathieu  DE  MONTER. 


LES  THÉÂTRES  LYRIQUES  SECOIDÂIRES  À  PARIS 

BSPIJIS    tsso. 

(7-=  article)  (1). 

i  826.  — 14  janvier. —  La  Forêt  de  Sdwar^,pastiche  en  trois  actes 
arrangé  par  Castil-Blaze,  d'après  Collé  {la  Partie  de  chasse  de 
Henri  IV),  pour  les  paroles,  d'après  Webcr,  Beethoven  et  Rossini 
pour  la  musique.  Cette  nouvelle  alla  podrida  obtient  du  succès. 

2  mars. —  La  Jeune  Aveugle,  opéra  en  un  acte,  imité  de  l'alle- 
mand, paroles  françaises  de  Chalas  et  Eugène  de  Monglave,  mu- 
sique de  Gyrovvetz,  arrangée  par  Poisson.  —  Qu'était-ce  que  cet 
arrangeur?  Je  l'ignore  complètement.  Quant  à  l'opéra  en  question, 
je  crois  que  c'était  une  réduction  de  l'ouvrage  en  deux  actes  de 
Gyrowelz,  créé  en  Allemagne  sous  le  titre  de  l'Oculiste. 

\  1  mars.  —  Marguerite  d'Anjou,  opéra  en  trois  actes,  traduit  de 
l'italien  par  M.  Sauvage,  sur  la  musique  de  Meyerbeer.  —  Ici,  il 
n'est  plus  question  d'arrangeur,  et  c'est  Meyerbeer  qui  se  chargea  de 
tous  les  remaniements.  Margherita  d'Angiii,  dont  le  poëme  italien, 
écrit  par  Romani,  était  une  imitation  d'un  drame  de  Guilbert  de 
Pixérécourt,  représenté  en  1810  à  la  GaiLé,  avait  vu  le  jour  à  la  Scala 
de  Milan,  le  14  novembre  1820.  Meyerbeer,  qui  ne  demandait  qu'à 
produire  son  nom  en  France,  en  attendant  qu'il  pût  écrire  des 
ouvrages  expressément  pour  nous,  avait  demandé  lui-même  à  faire 
faire  une  traduction  de  sa  Marguente,  qui  obtint  un  véritable 
succès. 

IS  juin.  —  La  Fausse  Agnès,  pastiche  en  un  acte,  de  Castil- 
Blaze,  représenté  quelques  années  auparavant  au  Gymnase,  ainsi 
que  nous  l'avons  vu  précédemment. 

22  juillet.  —  Le  Mariage  de  Figaro,  opéra  en  quatre  actes, 
arrangé  par  Castil-Blaze  sur  l'admirable  musique  de  Mozart.  Cet 
arrangement  obtint  un  très-grand  succès,  et  la  valeur  du  chef- 
d'œuvre  nous  dispense  ici  de  tout  commentaire. 

7  août.  —  Le  Neveu  de  Monseigneur,  pastiche  en  deux  actes, 
paroles  anonymes,  musique  arrangée  par  Guénée,  et  tirée  de  di- 
vers opéras  de  Morlacchi,  Fioravanti  et  de  Rossini.  Bien  accueilli 
du  public. 

IS  septembre.  —  Ivanhoê,  opéra  en  trois  actes,  ou  plutôt  nou- 
veau pastiche,  paroles  anonymes,  musique  tirée  de  divers  ouvrages 
de  Rossini  {Semiramide,  Mosè,  Tancredi,  la  Gazza  ladra,  etc.),  et 
arrangée  par  Pacini. 

3  novembre.  —  L'Ecole  de  Borne,  opéra-comique  en  un  acte, 
paroles  de  Vulpian,  Lassagne  et  Rochefort,  musique  de  Panseron 
et  RoUe.  —  On  remarquera  que  ceci  n'est  point  une  traduction; 
il  s'agissait  encore  d'un  petit  ouvrage  de  circonstance  destiné  à 
célébrer  la  fête  du  souverain,  et  on  avait  jugé  à  propos  d'en  faire 
écrire  la  partition  à  deux  jeunes  musiciens  français,  sans  doute 
afin  de  pouvoir  crier  par-dessus  les  toits  qu'on  encourageait  l'art 
national. 

1827.  —  22  janvier.  —  Le  Testament,  pastiche  en  deux  actes. 


(1)  Voir  les  n°'  2o,  26,  29,  31,  33  et  34. 


UE  l'AIUS. 


291 


paroles  de  de  Saur  et  Saint-Gcniôs,  musique  tirée  de  divers  opé- 
ras de  Hossini  et  arrangée  par  Lemière  de  Corvey,  qui  avait  mis 
à  contribution  quelques-unes  des  plus  belles  œuvres  du  maître. 
Selon  le  Courrier  des  Théâtres,  qui  constatait  le  peu  de  succès 
obtenu  par  cette  macédoine  musicale ,   voici  la  nomenclature  des 

morceaux  qui  y  étaient  compris  :  —  & Nous  avons  constaté 

que  l'ensemble  de  cet  ouvrage  arrangé  se  compose  de  ce  qui  suit  : 
dans  le  premier  acte  :  l'ouverture  de  la  Cenerentola;  l'introduction 
tirée  d'Elisabeth  et  de  la  Cenerentola;  l'air  de  Mo'ise;  l'air  de  Vln- 
ganno  fortunalo  :  «  Una  voce  ni  ha  colpito;  »  le  trio  de  la  Zel- 
mire  :  «  Soave  conforto  di  un  padre;  »  le  final  composé  d'un  duo 
de  la  Donna  del  lago;  chœur  et  marche  de  Zelmire,  cavaline  : 
«  Ah!  dove  il  cimento,  »  quatuor  et  chœur  final  de  la  Semira- 
mide.  Dans  le  second  acte  :  la  cavatine  de  la  Semiramide  :  «  Bel 
raggio  lusinghier;  »  le  duo  de  l'Italienne  à  Alger  :  «  Ai!  capricci 
délia  forte  ;  »  la  cavatine  de  Bianca  e  Faliero  ;  le  trio  de  l'Italienne 
à  Alger  :  «  Papataci  que  mai  sento  ;  »  l'air  de  Tancrède  :  «  Per- 
ché turbar  la  calma  ;  et  enfin  le  chœur  de  Mo'ise.  » 
6  février.  —  Emmeline  ou  la  Famille  suisse,  opéra  en  trois  actes, 

paroles  imitées  de  l'allemand  par  Charles  S ,  musique  de  Weigl, 

arrangée  par  Trémont.  —  On  sait  que  la  Famille  suisse  est  l'un 
des  meilleurs  ouvrages  du  compositeur  Weigl ,  l'un  de  ceux  qui 
ont  obtenu  en  Allemagne  le  succès  le  plus  durable  et  le  plus  com- 
plet. L'exécution  en  était  très-fâcheuse,   paraît-il,  à  l'Odéon,  car 

voici  ce  qu'en  disait  M.  Fétis  dans  la  Revue  musicale  :   « Il 

faut  qu'il  y  ait  un  grand  mérite  dans  la  musique  de  Weigl,  puis- 
qu'elle résiste  à  l'exécution  déplorable  qu'on  lui  fait  subir  à  l'Odéon. 
Jamais,  je  crois,  on  n'a  chanté  plus  faux  que  ne  le  font  dans  cet 
ouvrage  Adolphe,  Lecler,  Mme  Meyssin,  et  même  Mondonville. 
Mme  Mondonville,  quoique  bien  faible,  est  la  meilleure.  L'orchestre 
est  satisfaisant. ...» 

24  février.  —  Monsieur  de  Pourceaugnac,  opéra  en  trois  actes, 
arrangé  par  Castil-Blaze,  d'après  Molière  pour  les  paroles,  d'après 
Rossini  et  Weber  pour  la  musique.  —  Ceci  touchait  un  peu  à  la 
démence,  il  faut  eu  convenir:  raccourcir  Molière  pour  le  mettre 
en  opéra,  réunir  Rossini  à  Weber,  c'est-à-dire  deux  génies  abso- 
lument dissemblables,  et  les  accoler  tous  deux  à  notre  grand  co- 
mique, il  fallait  vraiment  une  imagination  effrénée  pour  se  per- 
mettre une  pareille  débauche.  Au  reste,  cet  essai  malencontreux 
ne  parvint  même  pas  à  sa  dixième  représentation. 

21  avril.  —  La  Folle  de  Claris ,  opéra  en  deux  actes ,  imité  de 
l'allemand,  paroles  de  M.  Sauvage,  musique  de  Conradin  Kreut- 
zer et  Payer  (1).  Voici  ce  que  disait  M.  Fétis  de  cette  imitation, 
ou  plutôt  de  cette  amplification,  qui,  paraît-il,  n'était  guère  meil- 
leure que  la  précédente  :  «  On  connaît  en  Allemagne  un  mono- 
drame intitulé  Cordelia,  dont  la  musique  jouit  d'une  estime  mé- 
ritée. . .  On  ne  sait  quels  motifs  ont  pu  guider  les  auteurs  qui  ont 
entrepris  de  l'arranger  pour  la  scène  française  sous  le  nom  de  la 
Folle  de  Claris,  lorsqu'ils  se  sont  décidés  à  le  mettre  en  deux  actes, 
et  à  y  introduire  des  personnages  étrangers.  Ces  changements 
n'ont  pu  se  faire  sans  toucher  à  la  musique,  et  conséquemment 
sans  lui  ôter  sa  couleur  individuelle.  La  manie  de  tous  nos  arran- 
geurs est  de  croire  qu'ils  améliorent  les  ouvrages  par  l'amalgame 
de  leurs  idées  avec  celles  des  auteurs  primitifs.  Ils  ne  s'aperçoi- 
vent pas  que  leurs  conventions  vulgaires  sont  incompatibles  avec 
des  créations  originales,  et  que  leurs  prétendues  améliorations  ne 
sont  que  des  avortements  ou  des  superfétations. 

»  La  Folle  de  Claris  prouve  évidemment  ce  que  j'avance  ;  en  dé- 
layant diius  deux   actes  fort    longs    une    situation  fatigante,  M. 


(1)  Payer,  orf,'ani.ste  distingué,  compositeur  d'un  certain  talent,  né, 
selon  M.  Fétis,  à  Meidliiig  (près  de  Vienne),  le  13  février  1787,  mort  à 
Wiedburi,'  en  seplcnibre  18i.j. 


Payer  et  son  collaborateur  ont  rendu  les  défauts  du  sujet  plus  re- 
marquables. En  ajoutant  des  morceaux  à  la  musique  de  M.  Con- 
rad Kreutzer,  ils  lui  ont  ôté  son  cachet  d'originalité,  et  pour 
ajouter  à  cette  malheureuse  idée,  JL  Payer  n'a  fait  que  de  la 
musique  détestable,  de  la  musique  de  piano  mal  faite,  mal  mo- 
dulée, mal  écrite,  et  qu'on  ne  peut  chanter.  C'est  particulièrement 
dans  le  second  acte  que  ces  additions  ont  eu  lieu  ;  c'est  celui  qui 
produit  le  moins  d'elfei.  Il  y  a  surtout  un  trio  qu'on  ne  peut  com- 
prendre. Quoique  le  public  du  théâtre  de  l'Odéon  soit  peu  musi- 
cien, son  instinct  l'a  bien  guidé  dans  cette  circonstance,  car  il  a 
empêché  d'applaudir  ce  morceau.  Ce  qui  est  de  M.  Kreutzer  ne 
brille  pas  par  des  chants  heureux  ;  la  couleur  en  est  peut-être 
trop  uniforme;  maison  y  trouve  de  l'originalité,  une  teinte  locale 
et  de  beaux  chœurs  :  en  un  mot,  c'est  de  la  musique  fort  estima- 
ble. »  —  La  Folle  de  G/ar/s  n'obtint  que  cinq  représentations. 

14  mai.  —  Adolphe  el  Clara,  de  Marsollier  et  Dalayrac,  créé  au 
théâtre  Favart,  le  10  février  1799. 

22  août.  —  Les  Deux  Figaro,  opéra  en  trois  actes,  imité  d'une 
comédie  de  Richaud-Martelly,  qui  avait  été  représentée  jadis  au 
tliéâire  du  Marais,  musique  de  M.  Carafa.  Cet  opéra  avait  été  écrit 
pour  la  Scala,  de  Milan,  où  on  l'avait  donné  vers  1819  ou  1820. 
La  traduction  en  était  faite  par  Tirpenne,  l'arrangement  musical 
par  Leborne.  Laissons  encore  parler  M.  Fétis  :  «  Il  y  a  déjà  en- 
viron huit  ans  que  M.  Carafa  a  écrit  les  Deux  Figaro  pour  le 
théâtre  de  la  Scala,  à  Milan.  Si  on  nous  en  eût  offert  alors  une 
traduction,  elle  eût  eu  beaucoup  de  succès;  mais  la  forme  des 
chants,  celle  de  l'instrumentation,  le  système  enfin  de  l'école  ros- 
sinienne  sont  maintenant  si  usés  parmi  nous  que,  quel  que  soit  le 
mérite  qui  brille    dans  une  composition  établie  sur  ce  système, 

l'auteur  ne  peut  plus  espérer  d'intéresser  vivement  le  public 

Les  Deux  Figaro  n'enrichiront  pas  beaucoup  le  caissier  de  l'Odéon  ; 
mais  cet  ouvrage  variera  agréablement  le  répertoire.  » 

7  septembre.  —  Tancrède,  opéra  en  trois  actes,  paroles  imitées 
de  l'italien  (et  un  peu  aussi  de  Voltaire),  par  Danglemont,  musique 
de  Rossini,  arrangée  par  Lemière  de  Corvey.  —  Succès. 

9  septembre.  —  Les  Deux  petits  Savoyards,  de  Marsollier  et  Da- 
layrac, créés  au  théâtre  Favart,  le  14  janvier  1789. 

13  octobre.  —  L'Eau  de  Jouvence,  opéra-comique  en  un  acte, 
paroles  de ,  musique  de  Conradin  Kreutzer.  —  L'Odéon  com- 
mençait à  être  embarrassé  :  les  traductions  ne  réussissaient  pas 
toujours  et  les  pastiches,  on  l'a  vu,  faisaient  souvent  d'énormes 
fiascos.  L'administration  du  théâtre  aurait  bien  voulu  pouvoir  don- 
ner des  ouvrages  nouveaux,  mais  les  termes  de  son  privilège  le 
lui  défendaient  et  lui  interdisaient  surtout  (ô  protection,  voilà  de 
tes  coups!)  de  mettre  à  profit  les  talents  des  compositeurs  français. 
Elle  en  était  donc  réduite,  ses  demandes  à  ce  sujet  n'aboutissant  à 
aucun  résultat,  à  faire  écrire  des  opéras  expressément  par  des 
musiciens  étrangers  et  à  les  donner  comme  des  traductions.  C'est 
du  moins  ce  qu'elle  fit  pour  l'Eau  de  Jouvence,  ainsi  que  nous 
l'apprend  M.  Fétis  : 

«  Il  devient  chaque  jour  plus  évident  que  les  théâtres  étrangers 
n'olfrent  pas  un  assez  grand  nombre  de  pièces  susceptibles  d'être 
traduites  en  français  pour  alimenter  un  théâtre  musical  tel  que 
l'Odéon.  Déjà  l'administration  de  ce  théâtre,  convaincue  de  cette 
vérité,  cherche  à  démontrera  l'autorité  l'impossibilité  où  elle  se  trouve 
d'exploiter  sou  privilège,  et,  dans  l'attente  des  concessions  qu'elle 
demande,  est  réduite  à  faire  venir  de  l'Allemagne  et  de  l'Italie  des 
compositeurs  dont  la  qualité  d'étrangers  sort  de  passeport  aux 
ouvrages  nouveaux  qu'elle  fait  faire.  Singulière  condition  que  les 
musiciens  français  soient  les  seuls  auxquels  il  n'est  pas  permis  de 
composer,  en  France,  pour  certains  théâtres  !  Je  consentirais  vo- 
lontiers à  me  taire  sur  ce  point  si  l'on  pouvait  alléguer  quelque 
avantage  résultant  d'un  pareil  ordre  de  choses.  Ce  qu'il  y  a  de 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


plus  singulier,  c'est  que  lout  le  inonde  est  d'accord  sur  la  justice 
des  réclamations  à  [ce  sujet.  L'autorité  supérieure  en  reconnaît 
même  tout  le  poids  ;  mais  les  choses  restent  ainsi  parce  qu'elles 
existent  et  par  la  difficulté  qu'on  éprouve  à  faire  le  bien,  lors 
même  que  rien  ne  s'y  oppose.  Quoi  qu'il  en  soit,  une  innovation 
vient  d'avoir  lieu  à  l'Odéon  :  un  opéra  français  écrit  en  France  et 
une  musique  allemande  composée  à  Paris  ont  apparu,  pour  la 
première  fois,  sur  ce  théâtre,  le  13  octobre  dernier.  Le  succès  n'a 
pas  répondu  à  l'attente  de  l'administration » 

23  octobre.  —  Cainille  ou  le  Souterrain,  de  Marsollier  et  Da- 
layrac,  créée  au  théâtre  Favart  le  18  mars  1791. 

3  novembre.  —  Charles  V  et  DwjuescUn,  opéra-comique  en  un 
acte,  de  Vial  et  M.  Carmouche,  nmsique  de  Gilbert  et  Guiraud.  — 
C'était  une  de  ces  pièces  de  circonstance  comme  on  en  était  si 
prodigue  sous  la  Restauration,  et  qui  avait  été  en  quelque  sorte 
improvisée;  peut-être  est-ce  pour  cela  que  le  ministère  s'était 
montré  bénin,  et  avait  permis  enlin  à  deux  compositeurs  français 
de  s'essayer  à  l'Odéon.  Malheureusement,  le  résultat  ne  fut  pas 
heureux,  au  point  de  vue  du  succès  ;  on  commençait  à  être  las 
de  ces  hois-d'œuvre,  absurdes  pour  la  plupart,  et  si  la  prcuiière 
représentation  de  celui-ci  marcha  sans  encombre ,  il  n'en  fut  pas 
de  môme  de  la  seconde,  où  la  chute,  entremêlée  de  huées,  de 
sifflets,  de  brouhaha,  fut  complète  et  irrémédiable.  Cela  était  d'au- 
tant plus  fâcheux  que  les  auteurs  de  la  musique  avaient  fait 
preuve  de  talent  et  d'inspiration  :  —  «  Les  jeunes  musiciens  sortis 
de  l'école  royale,  disait  M.  Fétis,  semblent  avoir  voulu  saisir  l'oc- 
casion de  la  fête  du  roi  pour  se  faire  connaître.  MM.  Guiraud  et 
Gilbert  sont  les  auteurs  de  la  musique  de  Charles  V  et  Diigitesclin. 
L'un  a  obtenu  cette  année  le  premier  grand  prix  de  composition 
au  concours  de  l'Jnstilut  ;  l'autre  a  partagé  le  second.  Tous  deux 
méritent  des  éloges  pour  le  petit  opéra  qu'ils  viennent  de  pro- 
duire. Leur  musique  est  remplie  de  choses  charmantes.  Mal- 
heureusement les  poètes  ne  leur  avaient  pas  fourni  l'occasion  de 
faire  le  plus  petit  morceau  d'ensemble.  Des  chœurs  et  des  cou- 
plets sont  tout  ce  qu'ils  ont  eu  à  mettre  en  musique.  L'instru- 
mentation est  de  la  nouvelles  école,  c'est-à-dire  brillaute  et  légère. 
Il  est  fâcheux  que  ce  premier  essai  de  la  muse  des  jeunes  lau- 
réats n'ait  pas  été  fait  pour  une  meilleure  pièce.  »  Du  reste,  il 
paraît  que  l'exécution  de  ce  petit  ouvrage  était  horrible,  et  qu'elle 
ne  contribua  pas  peu  à  en  accélérer  la  chute.  Quant  aux  deux 
jeunes  musiciens  qui  en  avaient  écrit  la  partition,  ou  n'en  enten- 
dit plus  jamais  parler.  Ayez  donc  du  talent,  et  courez  donc  après 
le  prix  de  Rome.. . 

24  décembre.  —  Don  Juan,  opéra  en  quatre  actes  arrangé  par 
(^stil-Blaze7  d'après  Beaumarchais  et  Da  Ponte  pour  les  paroles, 
d'aprèrMozart  pour  la^^musiquc.  —  Très-grand  succès  (1). 

Arthur  POUGIN. 

(La  suite  prochainement.) 


BIBLIOGRAPHIE  MUSICALE. 


Ernesit  Slacli,  —  Abrégé  du  système  d'acoustique  musical 
de  Helmholtz. 

Les  vulgarisateurs  ne  pouvaient  manquer  à  une  théorie  aussi  sédui- 
sante, présentée  aussi  rationnellement  que  celle  de  Helmholtz.  Le  nom 
du  physicien  de  Heidelberg  est  aujourd'hui  populaire  en  Allemagne,  et, 
grâce  à  une  traduction  récente,   ses  découvertes  acoustiques  sont  à  la 


(1)  Ici  encore,  mais  sans  en  pouvoir  fixer  la  date,  il  me  faut  men- 
tionner la  reprise  de  la  Maison  isolée  ou  le  Vieillard  des  Vosges,  de  Mar- 
sollier et  Dalayrac,  créée  au  théâtre  Favan  en  1797. 


portée  des  lecteurs  français.  Mais,  même  dans  sa  patrie,  il  n'est  pas 
accessible  à  tout  le  monde ,  vu  les  abstractions  nombreuses  dont  ses 
démonstrations  ont  dû  être  étayées  pour  avoir  toute  leur  valeur  aux  yeux 
des  hommes  de  science;  aussi  a-t-on  cherché  à  présenter  la  substance  de 
son  livre  sous  une  forme  moins  aride,  à  la  populariser  surtout  parmi  les 
musiciens,  grands  ennemis  des  chiffres.  L'un  de  ceux  qui  ont  le  mieux 
réussi  dans  cette  tâche  est  M.  Ernest  Mach,  professeur  à  l'Université  de 
Gratz.  Son  ouvrage,  intitulé  Introduction  à  la  Théorie  musicale  de  Helm- 
holtz, n'a  que  le  tort,  considérable  en  France,  d'êlre  écrit  en  alle- 
mand :  quelque  musicologue  bien  avisé  le  traduira  sans  doute,  à  l'usage 
de  ceux  qui  trouvent  Helmholtz  lui-même  trop  savant  et  trop  prolixe. 
Voici  en  quels  termes  M.  Mach  expose  l'objet  de  son  livre  : 

«  Helmholtz  a  fondé  sa  théorie  musicale  sur  la  phjsique  et  sur  la 
physiologie;  ses  travaux  avaient  été  préparés  de  longue  date  par  les  re- 
cherches de  Rameau,  Scheibler,  Young,  Schmith,  Robert,  Ohm,  Seebeck 
et  autres.  11  lui  a  donné  de  telles  bases  qu'on  ne  saurait  douter  de  sa 
justesse  dans  les  points  principaux.  Je  me  suis  attaché  à  rendre  pra- 
ticable cette  théorie  aux  musiciens,  en  éliminant  toute  la  partie  purement 
physique  et  ce  qui  n'avait  point  d'importance  immédiate,  et  en  me  ser- 
vant autant  que  possible  de  la  langue  nuisicale.   » 

Des  plancl;es  explicatives  et  des  exemples  aident  pui^^samment  à 
l'intelligence  du  texte.  M.  Mach  ayant  suivi  pa^  à  pas  son  auteur,  il 
faut  mettre  en  garde  le  lecteur  contre  la  conclusion  du  système  qu'il  a 
naturellement  reproduite,  conclusion  anti-musicale  s'il  en  fut,  et  qui  ne 
pouvait  éclore  que  dans  le  cerveau  d'un  physicien.  Helmholtz  voudrait 
qu'on  en  revînt  aux  consonnances  parfaites,  aux  quintes  et  tierces  abso- 
lument justes,  comme  aux  beaux  temps  du  plainchant  et  des  orgues 
unitonigucsl  Plus  de  tempérament,  et  par  conséquent  plus  de  modula- 
tion! On  pourra,  nous  n'en  doutons  pas,  lirer  autre  chose  de  ces  ingé- 
nieuses découvertes,  dont  la  plus  intéressante  jusqu'ici  est  l'explication 
du  timbre  musical;  —  car  il  faut  absolument  une  base  scientifique  aux 
lois  d'agrégation  et  de  succession  des  sons,  ft  les  règles  empiriques  de 
l'Harmonie,  telles  que  nous  les  possédons,  ne  sauraient  sitisfaire  les  es- 
prits sérieux  et  justes.  Honneur  à  qui  t'i'ra  cette  magnilique  trouvaille! 

Charles  BANNELIER. 


Frédéric  Brisson.  —  Adagios  de  Beethoven,  transcrits  pour  piano, 
violon  et  orgue. 

M.  Frédéric  Brisson  nous  explique,  lui-même,  dans  une  note  qui  pré- 
cède son  œuvre  nouvelle,  qu'il  ne  l'a  entreprise  que  pour  répondre  aux 
regrets  exprimés  par  nos  premiers  violonistes  de  ne  pouvoir  jouer,  au 
moyen  d'un  arrangement  quelconque,  les  magnifiques  largos,  andanti  et 
adagios  que  Beethoven  a  écrits  pour  des  sonates  Ai-  piano. 

En  se  décidant  à  exaucer  ce  desideratum  avec  les  soins  intelligents 
qu'il  apporte  à  tous  ses  travaux,  M.  Brisson  ne  pouvait  rien  imagi- 
ner de  plus  rationnel  que  de  faire  entrer,  dans  son  arrangement,  le  piano 
et  surtout  l'orgue,  dont  les  sons  expressifs  et  majestueux  se  prêtent  si 
bien  à  la  traduction  des  pensées  du  sublime  symphoniste. 

Sur  les  conseils  de  quelques  professeurs  expérimentés,  il  a  fait  choix 
de  six  sonates,  pour  lesquelles  il  a  déjà  obtenu  d'un  grand  nombre  d'ar- 
tistes un  suffrage  honorable,  qui  sera  bien  certainement  confirmé  par  le 
public.  C'est  d'abord  le  Largo  de  la  grande  sonate,  op.  7;  puis  le  Largo 
de  la  sonate,  op.  JO;  l'Adagio-cantabile  de  la  sonate  pathétique,  op.  "13; 
l'Andaute  avec  variations  de  la  sonate,  op.  26;  l'Adagio  sostenulo  de  la 
Sonate  Fantaisie,  op.  27,  et  enfin  l'Adagio  graciozo  de  la  sonate,  op.  31. 

Nous  souhaitons  d'autant  plus  le  succès  de  ces  premières  transcriptions, 
que  M.  Brisson  nous  promet,  dans  cette  hypothèse  plus  que  probable, 
une  collection  des  plus  beaux  adagios  de  Mozart  et  Haydn ,  transcrits 
également  pour  piano,  violon  et  orgue. 


REVUE  DES  THÉÂTRES. 

Théâtre  Français  :  Début  de  Mlle  Karoly  dans  Cinna.  —  Odéon  : 
Jeanne  de  Ligneris,  drame  en  cinq  actes  et  en  vers,  par  M.  Marc 
Bayeux.  —  Théâtre  Déjazet  :  réouverture;  les  Chevaliers  du 
Pince-Nez. 

Les  théâtres  sont  revenus  au  calme  plat  en  attendant  que  la 
température  veuille  bien  leur  permettre  de  ne  pas  se  consumer  en 
efforts  inutiles.  Il  ne  faut  guère  chercher  du  nouveau  que  dans  ceux 
qui  ont  fait  récemment  leur  réouverture. 

Mlle  Karoly,  qui  a  tenu  pendant  si  longtemps  le  premier  emploi 
tragique  à  l'Odéon,  vient  de  débuter  au  Théâtre  Français  dans 
Cinna  et  n'y  a  été  accueillie  qu'avec  un  médiocre  enthousiasme. 


DE  PARFS. 


293 


Est-ce  la  faute  de  l'artiste?  Est-ce  la  faute  de  son  entourage?  Nous 
pencherions  assez  volontiers  vers  ce  dernier  avis,  en  faisant  toute- 
fois nos  réserves  en  faveur  de  Maubant,  dont  la  diction  magistrale 
a  sauvé  l'honneur  du  pavillon. 

—  La  rentrée  annuelle  n'a  pas  été  heureuse  à  l'Odéon.  On  avait 
beaucoup  trop  prôné  à  l'avance  Jeanne  de  Ligneris,  drame  en  vers 
de  M.  Jlarc  Bayeux,  et  nous  croyons  que  ces  indiscrétions  préma- 
turées ont  exercé  sur  son  sort  une  fâcheuse  influence.  Kien  n'avait 
été  négligé  cependant  pour  assurer  le  succès  de  cette  œuvre  pleine 
de  conscience,  et  non  dépourvue ,  çà  et  là ,  d'un  véritable  talent. 
Mais,  dès  le  second  acte,  la  pièce  était  condamnée,  et  il  lui  a  été 
impossible  de  lutter  contre  la  bruyante  désapprobation  qui  l'a 
accompagnée  jusqu'à  la  chute  du  rideau. 

Le  germe  de  Jeanne  de  Ligneris  se  trouve  dans  une  nouvelle  de 
Cervantes  où  Scribe  avait  puisé  l'idée  première  d'une  petite  comé- 
die intitulée  :  le  Gardien.  C'était  là,  selon  nous,  tout  ce  qu'on  en 
pouvait  tirer;  aller  au  delà,  en  creusant  une  situation  très-péril- 
leuse par  elle-même,  c'était  s'exposer  à  une  catastrophe  certaine. 

On  peut  admettre,  sans  trop  se  faire  prier,  la  confiance  de  ce 
mari  qui ,  sur  le  point  d'aller  à  la  guerre ,  place  la  vertu  de  sa 
femme  sous  la  surveillance  d'un  ami  intime.  Que  cette  femme  de- 
vienne éprise  de  son  espion,  et  que  celui-ci  ne  soit  pas  insensible 
aux  charmes  de  la  dame,  cela  s'explique  encore.  Mais  qu'au  retour 
du  mari  il  survienne  un  troisième  larron,  au  profit  duquel  le  gar- 
dien de  l'honneur  conjugal  fasse  bel  et  bien  coffrer  le  revenant 
malencontreux,  et  que  l'action  s'embrouille  dans  une  conspiration 
historique  et  aboutisse  à  un  massacre  universel,  au  milieu  duquel 
le  mari  reste  seul  debout,  voilà  plus  qu'il  n'en  faut  pour  justifier 
l'excessive  sévérité  du  public. 

Joignez  à  cela  une  trop  grande  inexpérience  de  la  scène;  car 
cette  pièce  est  le  premier  ouvrage  dramatique  de  M.  Marc  Bayeux, 
et  le  mérite  de  ses  plus  belles  tirades,  —  on  en  compte  plus  d'une, 
—  est  gâté  par  des  naïvetés  imprévues  qu'un  auteur,  connaissant 
son  monde,  eût  soigneusement  évitées. 

C'est  donc  une  bataille  perdue  pour  M.  de  Chilly,  qui  a  déployé 
au  service  de  Jeanne  de  Ligneris  toutes  les  richesses  d'une  mise  en 
scène  irréprochable,  et  pour  les  interprètes  de  ce  drame,  qui  ont 
fait  tout  ce  qu'ils  ont  pu  pour  le  mener  à  bon  port;  mais  ni  les 
éclairs  de  Taillade,  ni  l'énergie  de  Mlle  Jane  Essler,  ni  l'autorité 
de  ftUle  Agar  n'ont  eu  cette  heureuse  chance.  Nous  devons  dire 
néanmoins,  en  finissant,  que  la  pièce  de  M.  Marc  Bayeux,  si 
éprouvée  le  premier  jour,  a  paru  se  relever  un  peu  aux  l'eprésen- 
tations  suivantes,  et  qu'elle  occupe  encore  l'afBche  de  l'Odéon. 

—  La  réouverture  du  Théâtre  Déjazet  s'est  faite  par  un  ancien 
vaudeville  de  son  répertoire,  les  Chevaliers  du  Pince-Nez,  qui  a 
retrouvé  son  succès  accoutumé,  quoique  Régnard  ne  fût  plus  là 
pour  jouer  le  rôle  légendaire  du  bossu  Chabannais.  Dailly,  qui  le 
remplace,  a  pris  le  parti  de  l'imiter,  et  ni  lui  ni  le  théâtre  n'ont 
eu  à  s'en  plaindre. 

D.  A.  D.  SAINT-YVES. 


CORRESPONDANCE. 

Bade,  le  10  septembre. 

Le  Lohengrin,  de  Richard  Wagner,  a  ouvert,  samedi  dernier,  la  série 
des  représentations  de  l'opéra  allemand.  Ce  n'était  pas  précisément 
une  nouveauté  ici,  où  cet  ouvrage  avait  été  représenté  il  y  a  trois  ans, 
mais  le  bruit  qui  se  fait,  ou  plutôt  que  l'on  fait  autour  du  nom  de  son 
auteur,  donnait  à  cette  représentation  un  certain  attrait  de  curiosité.  Le 
public  nombreux  et  brillant,  un  vrai  public  d'élite  comme  il  s'en  peut 
former  à  Bade,  a  paru  plutôt  surpris  que  charmé,  plutôt  indécis  que  fixé 
sur  sa  propre  opinion.  L'impression  dominante  était  l'étonnement,  et  sauf 
quelques  beaux  et  clairs  passages  chaleureusement  applaudis,  tant  on 
semblait  heureux  de  les  comprendre,  l'ensemble  de  l'œuvre  n'a  pas  laissé 


dans  IVsistance  ces  traces  profondes,  lumineuses  et  durables  qui  sont 
comme  le  sillon  creusé  par  le  génie  dans  l'intelligence  humaine.  Les 
admirateurs  les  plus  fervents  de  Richard  "Wagner  avouaient  même 
que  la  représentation  du  Lahcnr/rin  à  Paris,  tel  qu'il  est  actuellement 
écrit  et  agencé,  leur  paraissait  lîien  périlleuse;  ce  qui  équivaut  presque 
à  une  condamnation,  car  on  ne  saurait  admettre  qu'une  œuvre  d'art, 
c'est-à  dire  un  tout  complet,  puisse  se  scinder,  se  monter  et  se  démon- 
ter suivant  les  goûts,  le  climat,  les  conditions  spéciales  des  endroits  où 
elle  veut  se  produire.  Les  partisans  du  wagnérisme  ne  pourront  pas  attri- 
buer la  non-compréhension  de  la  musique  de  leur  maître  à  l'interpré- 
tation, qui  a  été  excellente  :  Mlle  Mallinger,  le  ténor  Nachbaur,  le  bary- 
ton Betz,  sont  sortis  sans  accident  des  défilés  dangereux  de  la  partition; 
l'orchestre,  dirigé  avec  une  conviction  rare  par  Cari  Eckert,  s'est  montré 
à  la  hauteur  de  sa  tâche  ardue.  Convenons,  toutefois,  qu'un  oratorio  dra- 
matique de  cette  dimension,  écrit  en  vue  d'une  scène  où  les  effets  de  force 
peuvent  se  produire  réellement,  étouffe  dans  le  mignon  théâtre  de  M.  Béna- 
zet.  En  résumé,  cette  reprise  badoisH  du  Lohengrin  n'a  eu  qu'un  Irès-faible 
retentissement  en  Allemagne,  et  le  voyage  d'un  groupe  de  journalistes 
français,  convoqués  pour  la  circonstance,  n'a  pas  suffi  à  lui  donner  l'im- 
portance d'un  événement  artistique. 

Au  dernier  concert  organisé  par  Peruzzi,  Mme  Yiardot  a  chanté  l'air 
d'Agrippine  du  Britannicus  de  Graun,  l'auteur  de  l'oratorio  la  Mort  de 
Jésus;  un  duo  de  la  Gazza  Ladra,  dit  à  ravir  par  Mmes  Viardot  et  Mon- 
belli,  a  été  fort  applaudi.  Le  violoncelliste  Cossmann  a  exécuté  en 
maître  un  concert  inédit  de  Cari  Eckert,  auqm;!  on  s'accorde  à  reconnaî- 
tre une  grande  valeur;  auteur  et  virtuose  ont  obtenu  un  très-grand 
succès.  S, 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 

^**  Le  théâtre  impérial  de  l'Opéra  a  donné  celte  semaine  deux  re- 
présentations à'Hamlet    —  Vendredi,  te  Trouvère  et  la  Source. 

***  L'ouvrage  nouveau  eu  trois  actes  de  MM.  Labiche,  Delacour  et 
Poise,  que  rOpéra-Comique  répète  en  ce  moment,  aura  pour  titre  le 
Corricolo. 

***  Le  nouvel  opéra  de  MM.  OfFenbach,  Meilhac  et  Halévy,  Vert- 
Vert,  sera  lu  cette  semaine  aux  artistes  de  l'Opéra-Comique. 

**,t  Au  nombre  des  artistes  récemment  engagés  à  ce  théâtre  on  cite 
Geraizer. 

:j,%  Les  difficultés  nombreuses  qui  avaient  entravé  jusqu'ici  la  réou- 
verture, on  pourrait  dire  la  restauration  du  théâtre  Lyrique,  ont  été  en- 
tièrement levées  dans  la  journée  de  mercredi  dernier.  M.  Pasdeloup  a 
pris  possession  du  théâtre;  les  artistes  ont  été  convoqués  et  l'administra- 
tion fonctionne  déjà.  Aux  termes  du  référé,  le  nouveau  directeur  est 
autorisé  à  disposer  du  matériel  dont  il  aura  besoin,  mais  il  en  devra 
déposer  la  valeur  à  la  Caisse  des  consignations,  au  fur  et  à  mesure  de 
l'emploi  qu'il  en  fera.  Une  contre -expertise  est  également  ordonnée  par 
le  tribunal  à  l'effet  de  reviser  l'estimation  faite  de  336,000  francs ,  qui 
semble  exagérée.  II  n'est  guère  présumable  que,  même  en  déployant  la 
plus  grande  activité,  le  théâtre  Lyrique  puisse  ouvrir  ses  portes  au  public 
avant  le  dS  octobre  prochain.  Le  Barbier,  de  Rossini,  et  le  Val  d'An- 
dorre, avec  M.  Lutz  dans  le  rôle  du  chevrier,  composeront  le  spectacle 
d'ouverture. 

:^**  Les  Fantaisies-Parisiennes  rouvriront  le  dimanche  26  de  ce  mois 
avec  le  Barbier  de  Séville,  de  Paisiello,  leur  succès  marquant  de  la 
saison  dernière. 

t*^  Les  répétitions  de  la  Périchole  se  poursuivent  aux  Variétés  avec  la 
plus  grande  activité.  Déjà  tout  le  premier  acte  est  su  ;  le  second  ne  tar- 
dera pas  à  l'être  également. 

#**  A  la  liste  des  ouvrages  qui  seront  donnés  dans  le  courant  de 
l'hiver  aux  Bouffes-Parisiens,  on  ajoute  le  Dilettante  d'Avignon,  d'Halévy 
représenté  pour  la  première  fois,  en  \W,1,  à  l'Opéra-Comique. 

***  Offenbach  s'occupe  d'un  ouvrage  promis  à  cette  scène  sous  le 
titre  de  l'Ile  de  Perlutipan. 

^*»  Fleur  de  Thé  continue  à  lutter  courageusement  contre  la  chaleur 
et  marche  vers  sa  centième  représentation.  Nous  avons  dit  quelles  étaient 
les  attractions  de  l'interprétation  nouvelle  de  la  désopilante  opérette  de 
MM.  Duru  et  Chivot,  et  de  la  musique  si  gracieuse  en  son  esprit  de 
M.  Ch.  Lecocq. 

^•,^  La  province  et  l'étranger  veulent  à  leur  tour  applaudir  Fleur  de 
Thé.  Cet  ouvrage,  on  le  sait,  a  été  joué  avec  le  plus  grand  succès  à 
Bordeaux  et  à  Bruxelles.  Les  théâtres  de  Lyon,  Lille,  Nice,  Montpellier, 
Nancy,  Marseille,  Anvers,  Berlin,  Vienne,  Lisbonne,  Stockholm,  Ne>v- 
York,  Buenos- Ayres  le  montent  en  ce  moment. 

,i:*^  Un  nouveau  théâtre  lyrique,  les  Bouffes-Saint-Antoine,  a  ouvert 
cette  semaine  par  deux  opérettes  très-réussies.  Nous  souhaitons  bonne 
chance  et  bon  vent  à  cette  scène  lilliputienne  dirigée  par  M.  Ernest  Mar- 
tin, ancien  artiste  du  théâtre  Lyrique,  excellent  musicien  et  comédien 
habile. 


294 


KEVUE  ET  GAZETTE  MUSICAM' 


^*^  Les  rei'.ottPs  brutes  des  Ibéâlrps,  concerts,  etc.,  se  sont  élevées, 
pour  In  mois  d'.ioi'it,  ;i  la  somme  de  8i9,G3S  fr.  8i  c. 

„*»  L'opéra  ilnlien  on  trois  actes  dem^mlé  à  M.  le  prince  Ponialowski, 
et  à  lui  acheté  en  tonle  propriété  par  M.  Stral<os(h,  est  destiné  à  servir 
de  f.ébuts  à  Mlle  Minnie  Hauck,  la  future  étoile,  dont  on  annonce  ren- 
gagement, à  de  magnifii|ues  conditions,  aux  concerts  prochains  de  la 
Société  pliilharmoniquo  rie  Manchester. 

»*a,  Le  Roland  à  Rcncevaux,  de  Mcrmet,  vient  d'étro  joué  avec  un  en- 
semble satisfaisant  à  Boulognc-sur-Mer. 

^'^  Vendredi  de  l'autre  semaine,  le  Grand-ïbéfitre  de  Bordeaux  a  inau- 
guré l'année  tlK-iltrale  par  les  Mousquetaires  de  la  Reine.  La  soirée  n'a  été 
qu'une  ovation  continuelle  pour  tous  les  artistes,  Mlles  Baretti  et  Nordet, 
MM.  Pescbard,  Emmanuel  et  Bonnefoy.  Une  telle  ouverture  e'^t  sans  pré- 
cédents à  Bordeaux;  il  convient  d'en  féliciter  le  zèle  et  le  dévouement 
de  M.  Halanzicr.  —  Le  nouveau  théâtre  Louit  a  ouvert  ma-di  avec  un 
succès  très-accentué.  Malgré  quelques  détails  qui  peuvent  prêter  à  la 
critique,  cette  salle  immense  et  magnifique,  construite  par  M.  Lamarlo, 
architecte,  est  un  des  plus  beaux  ornements  de  la  ville  de  Bordeaux.  La 
foule  a  fiiJt  bon  accueil  à  la  pièce  d'inauguration,  Bordeaux  après  dhirr, 
saynète  spirituelle  de  M.  Minier. 

*%  Au  Grand-Théâtre  de  Lyon,  Robert  le  Diable  a  caractérisé  le  talent 
des  artistes  composant  la  troupe  du  grand  opéra.  La  voix  étendue  et  dra- 
matique de  Mme  de  Taisy  s'est  trouvée  à  l'aise  dans  le  rôle  d'Alice. 
Mlle  Bléau  (Isabelle)  vocalise  agréablement.  MM.  Barbot  et  Marthieu  ont 
été  reçus  avec  des  bravos  unanimes.  A  l'issue  d'une  représentation  du 
Trouwre.  Mlle  Cortez.  MM.  Dolabranche  et  Méric  ont  été  également  admis 
au  bruit  des  bravos  d'une  salle  enthousiasmée. 

»%  'Virginie  Déjazet  va  bientôt  quitter  le  théâtre.  Ses  dernières  repré- 
sentations ont  eu  lieu,  cette  .semaine,  aux  Célestins,  de  Lyon.  Enthou- 
siasme, applaudissements  et  couronnes  ont  escorté  ces  adieux  définitifs. 

^*^  Mlle  Zulma  Bouffar  donne  en  ce  moment,  au  même  théâtre  lyon- 
nais, des  représentations  de  la  Grande-Duchesse,  où  elle  et  la  pièce  sont 
fort  applaudies. 

^*^  La  Croix  de  ma  Mère,  tel  est  le  titre  d'un  opéra-comique  en  un 
acte,  musique  de  M.  Lafaye,  que  le  public  de  Périgueux  a  applaudi 
ces  jours  derniers. 

^*^:  C'est  très-prochainement,  vers  le  iri  de  ce  mois,  dit-on,  que  le 
nouvel  opéra  de  M.  de  Flotow,  les  Deux  Compositeurs,  sera  représenté  à 
Prague. 

^*^  Le  théâtre  à".  Santa-Radegonda,  de  Milan,  vient  de  représenter 
avec  beaucoup  d'éclat  et  de  succès  la  Grande-Duchesse  de  Gèrolstein. 

^%  Une  partie  de  la  troupe  française  de  M.  Bateman  vient  de  quitter 
New-York  se  i-endant  à  Montréal  (Canada)  pour  y  donner  des  représen- 
tations de  la  Grande-Duchesse. 

^•^  Un  concours  pour  la  place  de  premier  violon  solo  aura  lieu  jeudi 
prochain  il  courant,  au  théâtre  Lyrique,  à  10  heures  du  matin.  Les 
concurrents  sont  priés  d'apporter  leur  musique. 


NOUVELLES  DIVERSES. 

^*^  Dans  sa  dernière  séance,  le  comité  de  l'AssDciation  des  artistes 
musiciens  a  décidé  à  l'unanimité  qu'une  messe  de  .M.  Ambroise  Thomas 
serait  chantée  à  la  fête  de  sainte  Cécile  prochaine. 

»**  Un  concert  d'un  éclat  exceptionnel  et  tel  que  la  chronique  musi- 
cale ne  peut  qu'en  enregistrer  rarement,  a  été  donné  avant-hier  à  Bade, 
à  l'occasion  de  la  fête  de  S.  A.  le  grand-duc.  Mlle  Kilsson,  Faure,  Ca- 
poul,  Sivori,  Rilter,  Arban  et  Mlle  Marie  Dcsehamps  défrayaient  le  pro- 
gramme, composé  du  duo  et  d'une  grande  scène  d'Hamlct,  d'airs  du 
Premier  Jour  de  bonheur,  du  Chalet,  de  Joseph,  de  la  Traviaia,  du  trio 
du  Toréador,  du  Co;-;ccrto  de  violon  de  Mendelssohn,  etc.  Le  télégramme 
que  nous  avons  reçu  de  noire  corrcsfondant  de  Bade,  quelques  heures 
après  celle  soirée  qui  clôture  magnifiquement  la  saison,  nous  apprend 
qu'un  enthousiasme  indescriptible  a  salué  Mlle  Nilsson  à  chacun  de  ses 
morceaux,  et  ajoute  que,  par  le  talent  et  le  succès,  la  grande  artiste 
est  une  seconde  Jenny  Lind.  L'émotion  du  public  a  amplement  sanc- 
tionné ce  jugement  indiscutable. 

^*^.  MM.  .'kmédée  de  Roubin,  inspecteur  des  orphéons  dans  le  dépar- 
tement de  l'Eure;  Eigenschenck,  professeur  de  musique  à  l'Ecole  nor- 
male de  Versailles,  et  Spay,  insiiluteur  à  la  Chapelle  de  Guinchay,  ont  été 
compris  dans  la  récente  promotion  «  d'officiers  d'.\cadémie  »  faite  par 
le  ministère  de  l'inslruciion  publique  et  en  tête  de  laquelle  figurait  M. 
Pasdeloup. 

^*»  Un  banquet  a  été  offert  par  les  artistes  de  l'orchestre  de  l'Opéra  à 
M.  Georges  Mainl,  leur  chef,  pour  fêter  sa  nomination,  accueillie  avec 
une  satisfaction  si  unanime,  de  chevalier  dans  l'ordre  de  la  Légion 
d'honneur. 

,^'^  Mlle  Désirée  Artôt  vient  d'échapper  à    un  grand  danger.  Se  ren- 


dant à  Bruxelles,  avec  une  partie  de  sa  famille,  elle  se  trouvait  dans  le 
compartiment  de  première  qui  a  été  rencontré  et  brisé  par  un  wagon 
de  manœuvre,  il  y  a  huit  jours,  près  de  la  gare  do  Creil.  Les  voya- 
geurs en  ont  été  heureusement  quittes  pour  quelques  contusions  de  peu 
de  gravité.  Mlle  Artôt  a  été  la  moins  atteinte,  et  ses  amis  espèrent 
qu'elle  pourra  bientôt  reprendre  la  route  de  Moscou,  oij  elle  est  attendue 
pour  l'inauguration  de  la  prochaine  campagne  de  la  compagnie  Me- 
relli. 

***  On  annonce  l'arrivée  à  Paris  d'une  artiste  d'un  rare  talent  et 
d'une  lieauté  vraiment  scénique,  Mlle  Elena  Corrani,  qui  a  remporté  les 
plus  grands  succès  à  Saint-Pétcrbourg,  après  avoir  rempli  l'emploi  de  pri- 
ma-donna  sur  plusieurs  scènes  d'Europe  et  d'Amérique.  Nous  espérons 
entendre  Mile  Elena  Corrani  cet  hiver  aux  Italiens.  Ce  serait  pour  le 
dilettantisme  parisien  une  véritable  bonne  fortune. 

**,(.  Bottesini  et  Théodore  Rilter  viennent  d'être  engagés  par  l'impré- 
sario Uiniann,  le  premier  pour  deux  mois,  le  second  pour  trois  ans. 

4:**.  M.  S.  Lée,  violoncelliste  et  compositeur  distingué,  qui  a  formé  de 
nombreux  et  excellents  élèves  pendant  trenle-deux  ans  de  professorat  à 
Paris,  quitte  celte  ville  pour  aller  se  fixer  à  Hambourg. 

»*i.  De  haut  en  bas;  impressions  pijrém'ennes.  —  Sous  ce  titre,  M.  O.scar 
Comeltant  vient  de  faire  paraître  chez  Degorce-Cadot  un  de  ces  livres 
qu'il  excelle  à  écrire  :  causerie  facile,  élégante,  humoristique,  traitant 
de  tout  et  de  quelques  autres  choses  encore,  marchant  au  hasard  du  che- 
min, de  l'aventure  ou  de  l'occasion,  mais  toujours  simple,  agréable  et 
intéressante.  Notre  confrère  n'a  garde  d'oublier  en  ses  ouvrages  que  chez 
lui  le  littérateur,  l'artiste  et  le  causeur  sont  doublés  d'un  excellent  mu- 
sicien; aussi  la  musique  a-t-elle  toujours  sa  part  et  la  meilleure  dans 
ses  amusants  et  instructifs  récits.  Ce  voyage  aux  Pyrénées,  M.  Co- 
meltant l'a  fait  en  partie  avec  Marmonlcl.  On  ne  saurait  avoir  un 
plus  aimable  compagnon  de  route,  et  il  met  en  scène  son  ami  avec  un 
tact  et  un  esprit  cliurmants.  Il  y  a  là  surtout  une  Histoire  pillorescjue, 
aneedotique,  comique,  dramatique,  quelque  peu  scientifique  et  même  véri- 
dique  d'un  allegro  de  sonate,  composé  par  le  célèbre  professeur  sur  les 
hauteurs  de  Gavarnie  et  du  Viguemale,  qui  ferait  à  elle  seule  l'attrait  et 

le  succès  de  ces  impressions  écrites  à  3,000  pieds  au-dessus  du  niveau 

de  la  vulgarité.  Nous  avons,  au  surplus,  l'intention  de  reparler  de  ce 
Ilaul  en  bas,  qui  justifie  si  bien  son  titre  par  sa  variété  et  ses  constrastes 
imprévus. 

^,"',1,  M.  Ch.  Lucas  vient  de  publier  chez  A.  Lévy,  29,  rue  de  Seine, 
sous  le  titre  les  Granls  Architectes,  une  conférence  faite  par  lui  à  l'As- 
sociation polytechnique.  Cet  intéressant  travail  se  recommande  à  l'atten- 
tion des  musiciens  par  des  détails  concernant  les  constructions  théâtrales 
anciennes  et  modernes.  Il  s'en  dégage  surtout  un  très-vif  sentiment  de 
l'art,  «  ce  prisme  au  travers  duquel,  dit  M.  Lucas,  toute  chose  créée  se 
présente  à  nous  avec  plus  de  charme  encore  et  comme  portant  en  soi 
un  ressouvenir  lumineux  de  l'intention  grandiose  du  Créateur.  » 

t,*^.  La  librairie  Didier  vient  de  mettre  en  vente  une  intéressante  et 
consciencieuse  étude  de  M.  Lud.  Cellier,  sur  les  Origines  de  l'Opéra  et  le 
Ballet  de  ta  reine. 

,*»  Un  comité  s'est  formé  à  Paris  pour  ériger  par  souscription  un 
monument  au  moine  d'Arezzo  qui  inventa  la  gamme  diatonique.  Le  pié- 
destal portera  les  armoiries  des  nations  et  des  souverains  qui  auront 
accordé  leur  protectorat  à  cette  œuvre  de  réparation,  ainsi  que  les  noms 
des  principaux  coopérateurs.  Les  souscriptions  seront  reçues,  à  Paris,  à 
dater  du  l'"'  octobre,  dans  les  bureau.\  des  journaux  de  musique,  ainsi 
que  chez  les  principaux  éditeurs.  Les  marchands  de  musique,  chefs  d'or- 
chestre, professeurs,  directeurs  de  sociétés  musicales  des  départements, 
désireux  de  s'associir  à  ce  projet,  peuvent  s'adresser  a  M.  P.  Costa,  43, 
rue  Cler,  à  Paris,  qui  leur  enverra  des  listes  de  souscription  et  les 
instructions  nécessaires. 

ji,*^  Le  Casino  de  Saint-Malo  a  eu  une  seconde  partie  de  sai.son  fort 
brillante  au  point  de  vue  musical.  Après  Sivori,  Berthelier  et  Mlle  Schrœ- 
der,  qui  a  été  particulièrement  goûtée,  sont  venus  les  concerts  de 'Mme  Car- 
valho.  Celui  du  samedi  de  1  autre  semaine,  le  dernier,  s'est  terminé  par 
les  Aoces  de  Jeannette,  que  l'on  n'a  pas  eu  souvent  la  bonne  fortune 
d'entendre  par  Mme  Carvalho,  depuis  l'époque  où  le  rôle  de  Jeannette  fut 
créé  par  elle.  Un  baryton  de  talent,  nommé  Lafont,  donnait  la  réplique 
à  l'éminentc  artiste. 

,^*ij,  La  station  thermale  de  Contrexéville  vient  d'avoir,  elle  aussi,  son 
concert  de  bienfaisance,  organisé  principalement  par  M.  Emile  Ettling, 
dont  les  œuvres  jouissent  d'une  légitime  popularité.  Ce  compositeur  a 
remarquablement  exécuté  sur  le  violon  plusieurs  morceaux  auxquels 
l'assistance,  agréablement  surprise,  a  répliqué  par  de  chaleureux  applau- 
dissements. Mme  Darteaux,  engagée  au  Grand-Théâtre  de  Lyon,  et  Mlle 
B  . . ,  amateur  distinguée  de  la  -sille,  prêtaient  leur  concours  à  cette  in- 
téressante soirée. 

4*4-.  L'excellence  incontesiable  des  grandes  orgues  construites  par  la 
Société  Merklin-Schiitze  et  C'"  (Paris  et  Bruxelles)  désignait  naturelle- 
ment ses  ateliers  aux  administrateurs  de  l'église  Saint-Esprit,  de  Ba- 
yonne,  qui  voulaient  depuis  longtemps  remplacer  l'antique  instrument, 
il  la  voix  chevrotante  et  fêlée,  de  cette  paroisse,  par  un  autre  à  l'or- 
gane plus  puissant.  M.M.  Merklin-Schûize  se  sont  parfaitement  acquittés 


DE  PARIS 


29o 


du  mandat  qui  leur  avait  ctc  confié,  et  mercredi  dernier  avait  lieu  l'i- 
naiiguralion  de  l'orgue  sorti  do  leur  manufacture.  Agissant  on  fabri- 
canls  consciencieux  et  passionnes  pour  leur  industrie,  ces  habiles  fac- 
teurs ont  désiré  donner  à  l'inauguration  du  nouvel  instrument  l'éclat 
d'une  solennité  et  ils  avaient  convié,  à  cet  effet,  deux  organistes  dont  la 
réputation  est  grande,  M.  Renaud  de  Vilbac,  de  Saint -Eugène  à  Paris, 
et  M.  d'Etcheverry,  de  Saint-Paul  à  Bordeaux.  Le  jeu  de  ces  excellents 
artistes  n'a  fait  que  mieux  apprécier  le  fini  et  la  perfection  do  l'instru- 
ment sorti  de  cette  importante  maison. 

**«  Lors  de  la  cérémonie  récente  de  la  distribution  des  prix  au  col- 
lège de  Salzbourg  (Autriche)  on  a  exécuté  les  odes  d'Horace,  mises  en 
musique  à  quatre  voix,  par  Paul  Hoffmeister,  organiste  célèbre  du  xvi" 
siècle.  Elles  furent  publiées,  sous  ce  nom,  en  1339,  à  Nuremberg,  dans 
un  recueil  très-rare  intitulé  :  Harmonies  poétiques. 

»**  Le  Conservatoire  de  Varsovie,  l'un  des  meilleurs  établissements 
de  l'Europe  pour  l'étude  du  chant  et  du  piano,  rouvrira  le  13  de  ce 
mois. 

***  Une  société  allemande,  dont  le  but  est  l'étude  de  l'archéologie  et 
l'histoire  moderne  de  la  musique  (GeseUschaft  fur  Musikforschung)  vient 
de  se  former  à  Berlin.  Elle  fera  paraître  chaque  mois  un  journal  oii 
seront  consignés  les  résultats  les  plus  intéressants  de  ses  recherches. 

***  Ce  n'est  certainement  pas  en  Angleterre  que  les  in.stitutions  mu- 
sicales sont  le  plus  généreusement  patronnées.  Ainsi ,  l'Académie  royale 
de  musique,  qui  a",  à  Londres,  la  même  importance  que  notre  Conser- 
vatoire impérial,  après  des  instances  sans  fin,  a  obtenu,  il  y  a  deux 
ans,  une  subvention  de  12,800  francs.  Cette  subvention  lui  a  été  retirée 
après  une  année,  attendu,  disait  le  vote  du  Parlement,  que  la  Grande- 
Bretagne  est  tenue  à  des  dépenses  plus  sérieuses.  Du  reste,  l'argent 
afflue  de  toutes  parts  dans  les  caisses  de  l'Académie  royale,  depuis  l'appel 
adressé  par  M.  Steriidale-Benett,  directeur,  aux  dileltanti  de  la  métropole. 
Les  concerts  que  donne  chaque  année  cet  institut  musical  ne  permettent 
pas  de  douter  de  la  supériorité  de  son  enseignement.  Depuis  1822,  époque 
de  sa  fondation,  il  a  formé  plus  de  quinze  cents  élèves. 

»**  Un  orchestre  exclusivement  composé  de  dames  donne  depuis  quel- 
que temps  à  Vienne  des  concerts  symphoniques. 

^*^  Nous  extraj'ons  les  curieuses  observations  qui  suivent  d'un  Rap- 
port sur  les  Aérostats,  lu  à  l'Académie  des  sciences  par  M.  C.  Flamma- 
rion :  «  On  entend  le  sifflet  d'une  locomotive  à  3,000  mètres  en  l'air;  le 
bruit  d'un  convoi  de  chemin  de  fer  à  2,S00  mètres;  un  coup  de  fusil, 
l'aboiement  d'un  chien  à  1,800  mètres;  le  cri  d'un  coq,  le  son  d'une 
cloche  à  1,600  mètres;  un  orchestre,  un  roulement  de  tambour,  à  1,400 
mètres;  la  voix  humaine  porte  à  1,000  mètres;  le  coassement  des  gre- 
nouilles à  900  mètres;  le  chant  des  grillons  à  800  mètres.  La  parole 
distincte  de  bas  en  haut  se  perçoit  clairement  à  500  mètres  ;  du  haut 
en  bas  elle  ne  s'entend  bien  qu'à  100  mètres.  Les  autres  phénomènes 
observés  ont  moins  de  précision  :  on  a  seulement  constaté  que  l'écho 
n'est  bien  renvoyé  que  par  la  surface  polie  des  lacs  lorsque  la  voix 
part  des  hauteurs.  » 

^*^  Mlle  Blanchard,  ancienne  duègne  de  l'Opéra-Comique,  est  morte, 
cette  semaine,  à  l'âge  de  soixante-douze  ans. 

it:*^  Dimanche  13  septembre,  grande  fête  champêtre,  avec  bal,  au  Pré- 
Catelan,  à  l'occasion  du  tirage  de  la  loterie  de  Toulouse. 

ÉTRANGER 

^*^  Londres.  —  Le  seul  événement  musical  de  la  semaine  a  été  le  fes- 
tival de  Gloucester,  auquel  prenaient  part  dans  l'origine  les  trois  choirs 
ou  sociétés  chorales  de  Gloucester,  Hereford  et  Worcester,  et  qui  a  réuni 
en  outre  cette  fois  ceux  d'Exeter  Hall  (Londres),  Birmingham,  Br'adford, 
Norwich  et  Exeter.  La  direction  de  celte  imposante  solennité,  qui  a  duré 
du  8  au  11  septembre,  revenait  de  droit,  de  par  son  titre,  au  docteur 
Wesley,  organiste  de  la  cathédrale  de  Gloucester.  On  y  a  exécuté  des 
fragments  du  Freischiitz ,  de  Faust,  des  A'ocrs  de  Figaro,  YElic  de  Men- 
delssohn,  la  Création  de  Haydn,  Samson  et  le  Messie  de  Hasndel,  etc.,  dont 
les  parties  principales  ont  été  chantées  par  Mmes  Tietjens,  Sainlon-Dolby, 
Edith  Wynne,  Liebhart,  Rudersdorff,  Dra.sdil,  MM.  Sims  Reeves,  Sant- 
ley,  Cummings,  vocalists  habituels  de  ces  cérémonies.  Le  but  du  festival 
de  Gloucester  était  tout  charitable;  mais  il  n'aurait  guère  été  rempli  si 
des  dons  volontaires  ne  suppléaient  à  l'insufifistince  des  recettes,  qui  cou- 
vrent à  peine  les  dépenses.  —  M.  Mapleson  a  renoncé  à  sa  tournée  en 
Amérique;  il  la  remplacera  par  un  voyage  dans  les  provinces  anglaises 
avec  les  premiers  sujets  de  son  théâtre  :  Mmes  Tietjens,  Sinico,  Trebelli- 
Bettini,  MM.  Mongini,  Santley,  Crosti ,  Zoboli,  etc.  11  commencera  par 
Liverpool  et  Dublin. 

t,*^,  Bruxelles.  —  Jeudi  dernier,  au  théâtre  de  la  Monnaie,  Mlle  Mari- 
mon  a  mis  en  lumière,  dans  l'interprétation  de  la  Somnambule,  des  qua- 
lités de  vigueur  et  de  passion  auxquelles  son  talent  était  un  peu  resté 
étranger  jusqu'à  ce  jour.  Aussi  a-telle  été  rappelée  plusieurs  fois  par  le 
public,  ravi  de  ce  progrès.  Jourdan ,  qui  méritait  une  part  dans  cette 
ovation,  a  eu  le  bon  goût  de  la  laisser  tout  entière  à  sa  camarade. 


^*,j  Spa.  —  Le  concert  du  8  septembre,  donné  dans  le  grand  salon 
de  la  Redoute,  a  peut-être  été  le  plus  brillant  de  la  saison.  Mlle  Brandt, 
jeune  pianiste  de  Bruxelles,  a  dit  d'une  manière  exquise  un  aniante  et 
la  Grande  Polonaise  de  Chopin.  Mlle  Schepcrs,  de  Liège,  à  la  voix  bien 
timbrée,  a  parfaitement  rendu  l'air  de  Norma.  De  bruyantes  ovations  ont 
été  faites  à  F.  Godefroid,  à  Johann  Ucuchsel,  violoncelliste  passionné,  et 
à  M.  Warnots,  professeur  au  Conservatoire  de  Bruxelles,  qui  a  chanté 
d'une  manière  irréprochable  la  cavatinc  de  la  Dame  lilanchc  et  la  Truite, 
de  Schubert. 

,i;*,ii  Ilombourg.  —  Le  théâtre  continue  à  être  la  grande  attraction  de 
la  saison.  11  n'en  saurait  être  autrement  av.ec  une  compagnie  lyrique  qui 
réunit  Mmes  Patti,  et  Grossi,  MM.  Naudin,  Ciampi,  Agnesi,  Verger, 
Corsi ,  secondés  par  des  cluours  excellents  et  un  orchestre  hors  ligne. 
—  Rigoletto,  Semiramis,  Marta,  il  Barbiere,  Linda  ont  successivement 
depuis  deux  semaines,  fourni  dos  exécutions  complètes  et  brillantes,  et 
se  sont  transformés  pour  Mme  Patii  en  une  longue  suite  de  triomphes. 
Rien  ne  peut  rendre  l'attendrissement  qui  envahit  l'assistani'.e  lors- 
qu'elle chante  la  romance  de  la  Rose  de  Maria  ;  l'émotion  est  à  son 
comble  et  ne  cesse  que  pour  faire  place  à  l'enthousiasme  le  plus 
sincère.  Dans  la  Linda,  la  cavatine,  les  duos,  la  scène  de  folie,  etc.,  sont 
rendus  par  elle  avec  ce  charme  et  cette  élégance  de  style  qui  défient 
toute  critique  comme  toute  analyse.— L'enthousiasme  du  public  pour  la 
grande  artiste,  qui  sait  atteindre  à  un  tel  point  l'idéal  et  la  perfection, 
est  si  unanime,  que  le  directeur  a  supplié  Mme  Patti  de  vouloir  bien 
prolonger  son  séjour  pour  chanter  encore  quatre  fois  après  les  dix  pour 
lesquelles  elle  est  engagée.  Mme  Pntti  a  consenti  à  donner  deux  repré- 
sentations en  plu.s,  l'ouverture  du  Théâtre- Italien  réclamant  sa  présence 
à  Paris  pour  le  i"  octobre. 

„,**  Leipzig.  —  Pauline  Lucca  est  ici  l'objet  des  démonstrations  les 
plus  enthousiastes.  Elle  a  commencé  le  1"  septembre,  par  Faunt,  la 
courte  série  de  représentations  qu'elle  se  propose  de  donner;  cette  soirée 
a  été  pour  elle  un  triomphe  complet. 

,^'^4.  Vienne.  —  M.  Richard  Gênée,  chef  d'orchestr'e  du  théâtre  alle- 
mand à  Prague,  vient  d'être  attaché  en  cette  même  qualité  au  théâtre 
An  der  Vien. 

j^*^  Milan.  —  Lé  Carcâno  a  ouvert  ses  portes  avec  Dinorah,  chantée 
par  Mlle  de  Maesen,  le  ténor  Minetti  et  le  baryton  Moriami.  L'exécution 
a  été  parfaite  de  tous  points,  la  mise  en  scène  splendide  et  le  succès 
très-brillant.  Meyerbeer  a  depuis  longtemps  droit  de  cité  chez  les  Mila- 
nais. —  Une  action  civile  a  été  intentée  au  gouvernement,  après  la  sup- 
pression des  subventions,  par  les  propriétaires  de  loges  (palchettisti)  des 
deux  théâtres  royaux  de  la  Scala  et  de  la  Canobbiana;  leurs  privilèges, 
et  même  leur  propriété  qui  constiiuent  une  partie  de  la  valeur  du  théâtre, 
sont  devenus  à  peu  près  illusoires  par  suite  de  ce  coup  d'Etat.  Le  tribu- 
nal civil  vient  de  rendre  un  arrêt  qui  maintient  l'obligation  du  gouver- 
nement de  conserver  à  ces  théâtres  (il  est  surtout  question  du  premier) 
leur  ancienne  splendeur,  en  comblant  les  déficits  éventuels  de  la  ges- 
tion des  directeurs  lorsque  l'impossibilité  de  mieux  faire  pour  ceux-ci 
aura  été  suffisamment  démontrée. 

^*^  Florence.  —  Le  Pagliano  a  fait  son  ouverture  avec  la  Pietra  del 
Paragone  de  Rossini,  qui  n'a  guère  obtenu  qu'un  succès  d'estime.  — 
Voici  la  liste  des  artistes  engagés  à  la  Pergola  pour  l'automne  et  l'hiver: 
Marietta  Biancolini,  Camille  de  Maesen,  Noëmi  Rey,  Luisa  Ormeny, 
Giuseppe  Fancelli,  V.  Montanaro,  Fr.  Cresci,  M.  Ciapini,  Paolo  Gonnet^ 
Aless.  Polonini. 

,(.*»  Rome.  —  Dinorah  et  i/  Matrimonio  segreto  seront  donnés  cet  hiver 
au  théâtre  Argentina. 

jf*^  Lisbonne.  —  Mlle  Enrichelta  Corradi  est  engagée  au  théâtre  San- 
Carlos,  où  elle  doit  créer  le  rôle  d'Inès  dans  l'Africaine.  Les  sœurs  Mar- 
chisio  y  sont  également  engagées  pour  trois  mois. 


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Opéra  en  5  actes,  net  i  fr. 


CHŒURS     SUEDOIS     ET     NORVEGIENS 

Exécutés  au  théâtre  de  l'Opéra  par  les  Etudiants  de  l'Université  d'Upsal,  de  Copenhague  et  de  Lund. 


N°  1.  Chant  du  Printemps, 

Par  A.  Kappelmann. 
N°  2.  Le  Cortège  de  Noce, 

Par  Kjerulfs. 


Adopté-i  par  les  Orphéons  de  la  ville  de  Paris. 
Revus  par 

PASDELOUP 


N°  3.   Plaintes  du  Roi  des  Mers, 

Svinsk-Folkvisa. 
N°  /i.    Le  Chant  du  Rossig^nol, 

Par  Pacius. 


ÉDITION     POPULAIRE 

CENT  NUMÉROS  nouveaux  de  la  LYRE  FRANÇAISE 

6 

Choix  d'Airs  d'opéras.  Duos,  Romances,  etc.,  etc.,  sans  accompagnement,  des  meilleurs  auteurs  anciens  et  modernes. 


01.  l'irBICAlR. 


303^ 


.  L'AMBASSUBICE Il  était 

LESBAVAigS Sans  ai 

Par 


..Adieu,  mon  doui  riTage BOMANCE. 

Dieu,  que  le  monde  révère PRtERE. 

Sur  mes  genoux,  flls  du  soleil. AIR  DU  SuMH. 
Fille  des  rois  à  toi  l'hommage.. AIR 

Aàamastor,  roi  des  yngues BALLADE. 

O  paradis,  sorti  de  l'onde AIR. 

L'avoir  tant  adorée CATATINE. 

O  ma  SéliVa,  tous  régnez MELODIE. 

Un  cygne  au  doux  ramage. ...ARIETTE. 
T\=Kn,..   iiatelots,  1  équipage... CHOEUR. 

I  vieux  bonhomme. ...COUPLETS. 

>us  a  placés ROMANCE. 

ïr,  ahl  peut.on  vivre. ROMANCE. 

1  chercherait  en  vain.C.deL'ALCADE 

qui  le  rase  COUPLETS. 


C'est  I 

Ouf  !  quel  métier  qu«  d'être. 


C'est  fEspagne...'. CH.  A  BOIRE. 

Le  mari  grogne COUPLETS, 

CEHDBILIOI Je  suis  modeste  et  soumise 

LE  CHEVAL  BE  BBOHZEJ'ai  pour  guides  en  voyage COUPLETS, 

ijeuneoge CAVATINE. 


Ht.  LE  COMTE  OBT. 


LES  DIAHAHTS  DE  LA  CODBOHNE.  Hon  cousin  qui... DUO. 
.  LEDIED  ET  LA  BATASEBE.  0  bords  heureux  du  Gange. NOCTURKE. 
_...  [emploi COUPLETS. 


LE  SOMIIO  BOIB...  .S'il 

Nous  allons  atoi 

L'heure,  la  nuit, 

.  LES  BBAfiORS  BE  VILLABS.  Pour  sédui 


',  grâce  à  Dieu. 

tout CAVATIKE. 

ailettcCHANSON. 


Chaque  numéro  :  23  c. 


334  l'ETOUE  SU  IOBS....n  sonne  et  résonne 

335.         Grenadiers,  fiers  Moscovites. 

336.         ,  Quel  trouble  affreux 

■  "■'.lAFIAHCEE .Jour  heureux  que  mon  cœur 


fameux  régiment. 


j.         Elle  n'a 

L         ■ 11  était  un   de  n 

i-         Eh  bien,  altesse, 

I.BATBEE Je  t'aime,  0  mo_  _ 

ILES ED6IIEII0TS Seigneur,   rempart 


maître 

de  leurs  torches. 


A  la  11 
I.JEAimOT  ET  COLLIH. .  .Je  meu 

I.LESTOCO 0  doux  moment  dont  mon  â 

I.LISCEEMETFBITZCHEHMe  chasser, me  forcer.... 
i.         P'tits  balais,   p'tits  balais 


tendre  enfance. 

tu  résides 

puissant,  Dieututélaire. 


I.MABTHA 

I.HOISE D( 

I.HDETTE  BE  POBTICI..Di 

I.OBEBOH Enfant  de  l'Arabie. 

i.OBPHEE.^ J'ai  perdu  mon  Eurjdi 


rdelB  montag. 

Ah  !  que  j'ai  froid 

Les  blés  sont  bons 


Format  ln-8* 


308.  lA  PABT  on  DIABLE.. 


371.  LE  PIFFEBABO.. 


C'est  elle  qui  chaque  jour. ...AIR. 

Oui,  devant  jioi ROMAÎfCB. 

O  philosophe  ou  voyageur. ..COUPLETS. 


LE  PROPHETE 0  liberté,  c'est  ta  victoire... SOLO  ET  CH. 

Aus^inombreuxquelesétoiles.COUPLETS. 

Uo  jour  danslesflols  delaMeuse.ROMANCKi 


BOBEBT  LE  DIABLE. ...Ils  frappaient  mon  oreiUe... .PRIÈRE. 

Je  t'ai  trompé, je  fuscoupable.AIR. 

.  LE  SEBHEHT En  avant,  cooscrit  en  avant.. 

.  LA  SIBEIE Quand  vient  l'ombre COUPLETS. 

VEBT-Dn-SOIB Etre  bon  époux  CHANSOIT. 

.  LE  VIOLOIEDZ J'saisben  que  c'n'est  point  l'usage. COUPLETS. 

.  ZILBA Malgré  les  regardsd'unjaloui.    

Pour  punir  pareille  incartade .    

Devant  les  charmes  qu'il  adore.ROMANCE. 

Donnez,  donnez  un  peu  d'or.. CHANSOIT. 

En  amour  je  suis  un  larron  .COUPLETS. 

Que  dit  l'oiseau  du  Bengale  ?  .AIR. 

.  ADAM LA  PETITE  CHAHTEDSE Romance. 

.  DASSIER l'OMBEI Ballade. 

-  MEBE  El  PATBIE Romance. 

.  JONAS LE  VIOLOH  BBISE — 

.  MEYERBEER MINA BarcaroUe. 

.  OFFENBACH    .. . JEAHHE-U-BOOSSE Chamon. 

.  PATTI  (AdelinB).BAISEB  D'ADIEU Uilodie. 


Chaque  numéro  :  8S  c. 


IMPUIUEBIE  CKSrrBAlE  DES  CHEHINS  de  FE»  —  A.    CHAIX  ET  C'",  BUE  BEHCtlE,   30,   A  PAKIS. 


BUREAUX    A    PARIS  :    BOULEVARD   DES   ITALIENS,  1. 


35'  Année. 


N'  38. 


20  Septembre  1868. 


ON  S'ABONNE  : 

Dans  lc3  Déportements  et  à  l'Étranger, 

chez  tous  [es  UarchoDds  de  Uusique,  les  Librairei, 

et  aux  Sureaux  dcf  Ucssageries  et  des  Postes. 


REVUE 


PRIX    DE    L'ABONNEMENT: 

Paris. 2^   r.  pur  un 

Départements,  Bclgiquo  et  Suisse....    3b  »       id. 
Étranger 34  n       id. 

Le  Journal  parait  le  Dimanche. 


GAZETTE  MUSICAL 


DE     PARIS 


SOMMAIRE .  —  Le  Chant  liturgique  au  monastère  de  la  Grande-Chartreuse,  par 
Em.  Uatbieu  de  Uonter.  —  Les  Théâtres  lyriques  secondaires  à  Paris 
depuis  1820  (8°  article] ,  par  Arthur  Pong^in,  —  Bibliographie  musicale. 
—  Correspondance  :  le  Havre.  —  Nouvelles  des  théâtres  lyriques.  —  Nouvelles 
diverses.  —  Annonces. 


LE  CHANT  UTURGIQUE 

AV  HOIVASTËBE  DE  VA  «RAlWDE-CHARTBEdSE  (1). 

En  quittant  Grenoble  dans  la  matinée,  après  avoir  traversé  tout 
le  jour  la  vallée  merveilleuse  du  Grésivaudan  et  pris  quelques  ins- 
tants de  repos  à  Saint-Laurent-du-Pont ,  on  arrive  à  la  Grande- 
Chartreuse,  par  le  formidable  et  fantastique  défilé  de  Fourvoirie, 
à  l'heure  où  la  voie  lactée  s'allume ,  comme  un  volcan  d'étincel- 
les, au-dessus  du  Grand-Som.  Le  ciel  mystérieux,  plein  de  ru- 
meurs insaisissables  et  de  parfums  alpestres,  couvre  de  son  éter- 
nelle splendeur  le  calme  du  Désert.  Les  sapins  et  les  chênes,  éta- 
ges comme  de  gigantesques  buffets  d'orgue,  frissonnent  et  gémis- 
sent ;  la  source  de  Saint-Bruno,  devenue  torrent ,  coule  au  fond 
du  ravin,  avec  un  bruit  et  parfois  des  lueurs  étranges.  Par  mo- 
ments, comme  une  plainte,  passe  le  cri  de  l'orfraie.  Puis,  plus 
rien...  Tout  à  coup,  dans  ce  silence  effrayant  un  chant  s'élève, 
grave,  majestueux,  surhumain  presque.  Intermittent  d'abord,  puis 
bientôt  continu  comme  la  sonnerie  alternative  de  deux  cloches 
lancées  à  grande  volée,  tantôt  il  semble  mourir  dans  les  profon- 
deurs de  la  solitude,  tantôt  il  éclate  et  grandit  selon  que  le  vent 
traverse  les  larges  baies  de  la  chapelle.  Minuit  sonne  et  mêle  ses 
vibrations  plaintives  à  la  psalmodie. 

Ce  sont  les  Chartreux  qui  chantent  matines  ! 

On  s'arrête,  ému,  troublé,  avant  de  frapper  à  la  porte  hospita- 
lière du  couvent.  Poëte,  philosophe,  musicien,  on  s'explique  alors 
que  le  chant  religieux  puisse  seul  complètement  exprimer  Vador-a- 


{i)  Extrait  d'un  ouvrage  qui  paraîtra  prochainement  sous  le  titre  : 
Excursion  et  séjour  de  quelques  compositeurs  de  musique  et  artistes  fran- 
çais au  monastère  de  la  Granie-Chartreuse,  en  août  1868,  par  M.  E.-M. 
de  Monter. 


tion,  cet  état  spécial  de  notre  âme  ;  on  comprend  que  la  Musique, 
tille  de  la  prière  et  de  l'étei-nel  amour,  a  dû  naître  au  pied  des 
autels  et  avoir  pour  berceau  une  hymne  et  un  cantique. 


. . .  Cependant,  chaque  religieux  a  quitté  sa  cellule.  Des  lu- 
mières traversent  en  ligne  droite  l'obscurité  du  chœur,  s'abais- 
sent un  instant,  puis  s'éteignent.  Les  stalles  s'emplissent  une  à 
une ,  le  parquet  craque  sous  les  sandales  ;  ou  ouvre  les  antipho- 
naires.  Le  silence  revient  :  pas  un  bruit,  pas  un  souffle.  Du  haut 
de  la  tribune,  on  ne  voit,  à  l'extrémité  de  la  longue  chapelle,  que 
des  ombres  blanches  couchées,  immobiles  dans  l'ombre.  Les  voya- 
geurs et  les  romanciers,  en  décrivant  cette  scène,  n'ont  pas  man- 
qué de  parler  des  «  figures  macérées  »  des  «  yeux  ternis  par  les 
larmes  et  les  tempêtes  du  monde,  »  etc.  Comment  les  auraient-ils 
vus,  dans  la  nuit,  sous  le  capuchon?  La  vérité  est  que  ce  sont  là 
des  hommes  résignés,  croyants,  détachés  de  toute  chose,  et  souf- 
frant ensemble — car  souffrir  ensemble  c'est  encore  aimer — qui 
vont  dire  leurs  heures  monacales.  Et,  en  effet ,  au  bout  de  quel- 
ques minutes,  la  communauté  se  relève  et  l'office  de  nuit  com- 
mence. Il  durera  quatre  heures,  au  milieu  d'alternatives  combi- 
nées d'obscurité  et  de  lumière.  Pendant  quatre  heures,  sans  repos 
ni  trêve,  à  pleine  voix,  sans  la  moindre  altération  de  sonorité,  à 
respirations  égales,  comme  emportés  dans  un  élan  inexorable,  en 
dépit  des  défaillances  de  l'esprit  et  des  révoltes  de  la  chair  sous  le 
cilice,  se  poursuivront,  monteront  dans  les  ténèbres  les  psaumes 
de  David,  les  plaintes  de  Jérémie,  les  prières  des  morts  :  —  orai- 
son extatique  qui  emporte  l'âme  dans  ses  enroulements,  aspiration 
infatigable  du  cœur  gémissant  qui  ne  peut  et  ne  veut  se  reposer 
qu'en  Dieu.  Je  ne  connais  rien  de  plus  noble  et  de  plus  mélanco- 
lique que  ce  plain-chant  pur.  Ce  «  sublime  »  palestrinien  aurait- 
il  son  atmosphère  qui  emparadise  et  rassérène  l'âme ,  comme  les 
horizons  du  matin  dans  les  beaux  jours,  où  le  vent  ne  secoue  que 
l'odeur  saine  et  fortifiante  des  blés  en  fleurs  et  des  chênes  verts? 
Je  ne  sais  ;  toujours  est-il  qu'en  entendant  ces  chants,  l'âme  re- 
vient réellement  à  elle-même  ;  sous  cette  calme  influence,  tout  un 
monde  de  choses  jeunes  et  naïves,  de  sentiments  vrais ,  profonds, 
ingénus,  de  douces  et  consolantes  croyances  renaissent  et  gran- 
dissent. . .  Au  point  de  vue  musical,  j'ajouterai  que  ces  transfuges 


liKVLK  El   HAZETTE  -MUSICALE 


de  la  soci(5té,  que  ces  exilés  voloiilaires  dont  la  fatalité  a  renversé 
les  foyers  et  qui  ont  réclamé  le  droit  d'asile  sur  les  hauteurs,  ser- 
vent généreusement  la  cause  de  l'art  religieux,  en  possédant  sa 
tradition  tout  entière,  en  la  rattachant  à  ses  monuments  les  plus 
purs,  en  la  maintenant  et  en  la  concentrant  dans  la  pratique. 

*    * 

Le  rituel  des  Chartreux  bannit  la  musique  religieuse  proprement 
dite,  qui  repose  sur  la  tonalité  moderne  et  qui  a  subi  tant  et  de 
si  diverses  transformations  depuis  Palcstrina  jusqu'à  Mozartetjusqu'à 
nous. Saint  Bruno,  fondateur  de  l'ordre  cartusicn, connaissait  le  pouvoir 
de  la  musique.  Il  voulut  donc  qu'au  lieu  de  rouvrir  les  plaies  et  de 
raviver  les  souffrances  de  ses  compagnons  en  leur  rappelant  les 
passions  mondaines  sous  lesquelles  ils  avaient  succombé,  elle  de- 
vint pour  eux  un  exercice  rude,  austère,  mais  fortifiant,  dans 
lequel  ils  trouveraient  l'oubli  du  passé  et  l'espérance  de  «  ce 
quelque  chose  qui,  un  peu  plus  tôt,  un  peu  plus  tard,  doit  venir 
à  coup  sur.  »  Pour  donner  à  la  méditation  cette  forme  musicale 
et  l'isoler  de  toute  arrière-pensée  étrangère,  la  règle  de  saint 
Bruno  édicta  l'usage  exclusif  du  plain-chant,  tel  que  saint 
Grégoire  le  Grand  et  ses  successeurs  l'avaient  constitué  définitive- 
ment du  y"  au  ix"  sièclfi  sur  les  restes  de  l'ancienne  musique 
grecque  et  hébraïque.  Palestrina  survint  :  vers  la  fin  du  xv"  siècle 
le  plain-chant  était  pur,  émondé.  Il  devait  subir  peu  à  peu  avec 
le  temps  les  influences  et  même  les  tournures  musicales  extérieures, 
se  moderniser,  en  arriver  aux  messes  de  Lulli  et  de  Dmnont,  qui 
sont  des  plains-chants  absolument  modernes. 

Privés  de  musique  et  d'instruments  pour  la  célébration  des 
offices,  les  Charlreux  voulurent  au  moins  avoir  un  plain-chant 
conforme  à  la  tradition  et  à  leurs  cartulaires.  Le  chapitre  général, 
composé  des  prieurs  de  toutes  les  maisons  d'Europe  et  des  officiers 
de  la  Grande-Chartreuse,  décréta  celte  réforme. 

L'ordre  possédait  non-seulement  l'édition  romaine  de  Palestrina, 
autoritaire  d'après  la  bulle  du  pape  Marcel,  mais  encore  les  ma- 
nuscrits de  Saint-Gall,  les  travaux  du  père  Subiger  et  d'autres  éditions 
incomplètes,  mais  antérieures  ù  Palestrina  et  que  l'on  avait  découvertes 
à  Montpellier.  Tout  du  x"  à  la  fin  du  w  siècle,  tout  fut  étudié.  On 
remonta  aux  sources,  aux  continuateurs  de  Grégoire  le  Grand  qui 
avaient  enrichi  le  plain-chant  d'inspirations  pures:  au  moine  Huc- 
bald,  au  chantre  Théophraste,  au  pape  Urbain  IV,  ancien  élève 
de  la  maîtrise  de  Troyes;  aux  documents  de  la  psallette  de  Metz, 
aux  psaumes  de  Guy,  évèque  d'Auxerre;  de  Raynald,  évêque  de 
Langres;  de  Fulbert,  de  Chartres;  de  Saint-Godefroy,  d'Amiens; 
d'Hervé,  archevêquede Reims;  de  Guido  d'Arezzo,  auteur  de  la  mélodie 
de  la  prose  Lauda  Sion;  de  Pierre,  de  Corbeil,  qui  composa  un  office 
de  la  Vierge,  etc.  On  compara  (pour  le  chant  romain)  les  éditions 
de  Rennes,  de  Reims,  de  Cambrai,  de  Digne  et  d'Avignon,  la  plus 
répandue  dans  le  Midi,  On  s'entoura  enfin  de  tous  les  renseignements 
relatifs  à  la  matière.  Cette  enquête  terminée,  les  Chartreux  arrêtèrent 
l'official  définitif  de  l'ordre,  en  y  intercalant  les  chants  particuliers 
antérieurs  à  la  réformation  du  xv»  siècle,  qu'ils  avaient  en  propre 
comme  certains  autres  ordres  monastiques.  Les  résultats  de  ces 
recherches  ont  été  consignés  dans  un  ouvrage  des  plus  intéres- 
sants, récemment  publié,  à  l'usage  des  maisons  cartusiennes,  par 
le  R.  P.  Marcel.  Maintenant  dans  toutes  les  chapelles  de  l'ordre 
résonnent  les  chants  religieux  du  temps  de  Prudence,  du  pape 
Innocent  III  et  du  roi  de  France  Robert.  Telle  est  l'œuvre  colos- 
sale qu'ont  accomplie  ces  hommes  de  foi  et  de  bonne  foi.  Au  moins 
eux  croient-ils  sincèrement  à  quelque  chose. 

Aussi,  cette  reconstitution  minutieuse  du  plain-chant  donne- 
t-lle  aux  offices  de  la  Grande-Chartreuse  un  caractère  peu  com- 
mun de  dignité  :  la  mélodie  apparente  n'est  pas  étouffée,  là  ainsi 
qu'ailleurs,  sous  une  surcharge  de  notes  redondantes;  la  prosodie 


n'y  est  pas  outragée;  le  rhythme  est  exactement  suivi  sans  sacca- 
des ;  la  netteté  de  l'articulation  est  telle  qu'elle  engendre  pour  l'o- 
reille de  singulières  méprises  de  tonalité. 

Le  chant  est  à  deux  chœurs  ;  l'intonation  du  premier  chœur  est 
imposée  ou  portée  au  second  par  l'anliphone,  chantée  par  toutes 
les  voix  réunies  et  redite  après  chaque  verset  du  psaume.  On 
change  le  ton  de  l'antienne  juxtaposée  au  psaume  suivant.  Si  plu- 
sieurs antiennes  se  trouvent  être  du  même  mode,  en  raison  des 
exigences  du  texte,  la  psalmodie  est  terminée  différemment. 

Chaque  religieux  remplit  à  tour  de  rôle  l'office  de  lecteur  et  de 
grand  chantre.  Ces  voix  ont  un  timbre  particulier  et  qu'on  n'ou- 
blie plus  après  l'avoir  entendu.  On  finit  presque  par  reconnaître 
dans  l'inexorable  spirale  du  psaume  la  disposition  d'esprit  de  celui 
qui  chante.  Aussi  quelle  discipline!  Tous  les  jours  de  l'année 
psalmodie,  à  pleine  voix,  de  minuit  à  quatre  heures  du  matin  et 
de  sept  heures  à  dix  heures  du  matin.  Les  novices  ont  en  outre 
une  heure  de  leçon.  Et  tous  ces  hommes  vivent  de  légumes  et  de 
laitage.  Il  en  est  de  vieux.  Calme  ou  assombrie,  confiante  ou  en 
proie  au  doute,  on  sent,  lorsqu'ils  chantent,  que  l'âme  domine  ici 
la  matière  et  la  dompte  sans  merci.  Quand  le  texte  des  psaumes 
parle  du  repos  dans  la  mort,  la  voix  chez  beaucoup  s'imprègne 
d'un  accent  impersonnel  d'enthousiasme  concentré.  Il  semble  que 
ces  sages,  siégeant  comme  les  anciens  d'Israël,  trouvent  dans  la 
mélopée  sainte  les  accents  qui  acheminent  leur  esprit  au  monde  à 
venir. 

Toute  autre  musique  serait  impossible  à  la  Grande-Chartreuse. 
Le  milieu,  le  site,  tout  réclame  impérieusement  ce  clair-obscur 
sonore.  La  plus  belle  fanfare  détonnerait  dans  cette  cour  d'hon- 
neur où  pleurent  deux  fontaines  glaciales.  Les  plus  grands  artistes 
attaquant  sous  ces  voûtes  les  airs  qui  ont  remué  les  foules  s'arrê- 
tent étonnés  et  surpris  comme  par  un  contre-sens.  Je  ne  sais  de 
quel  sentiment  de  dégoût  on  se  sentirait  envahi  pour  un  plaisantin  qui 
fredonnerait  là  un  inepte  refrain  enjolivé  du  calembour  en  vogue. 
Dans  ces  murailles  vibrera  étrangement  la  trompette  du  jugement 
dernier.  On  est  là  bien  haut  et  bien  loin. 

«  * 

. . .  Quatre  heures  sonnaient  lorsque  nous  quittions  la  tribune 
où  nous  avions  assistés  aux  matines  de  la  Grande-Chartreuse. 

Nos  lumières  à  la  main,  nous  allions  par  les  longues  et  som- 
bres galeries. . .  «  N'importe  !  dit  l'un  de  nous,  —  un  composi- 
teur des  plus  populaires,  —  de  longtemps  je  n'oublierai,  quand  mi- 
nuit sonnera  à  l'horloge  des  foyers  de  théâtre  ou  des  cafés  du 
boulevard,  cet  office  de  nuit.  Cela  impressionne  aussi  profondé- 
ment que  nos  plus  belles  œuvres  dramatiques.  » 

—  Les  impressions  profondes  que  produit  la  musique,  ses  prodi- 
ges psychologiques,  si  vous  voulez,  —  reprit  quelqu'un,  —  sont 
de  tous  les  temps  et  indépendants  du  mérite  du  compositeur  ou 
de  la  composition.  Selon  que  l'esprit  est  monté  à  un  certain  ton, 
l'oreille  se  laisse  gagner  par  des  airs  légers  ou  graves,  tendres  ou 
guerriers.  Quelque  corde  à  l'unisson  avec  ce  que  nous  entendons 
ou  croyons  entendre  est  touchée  en  nous  et  le  cœur  répond.  La 
musique  commence  son  langage  où  la  poésie  finit  le  sien.  Le 
Dante  n'a-t-il  pas  consacré  le  souvenir  des  émotions  délicieuses 
que  le  chant  de  son  ami  Casella  lui  avait  causées?  Le  musicien 
inconnu,  peint  par  Raphaël  avec  tant  de  charme,  avait  sans  doute, 
à  son  tour,  ravi  celte  âme  angélique  et  la  reconnaissance  doit 
avoir  guidé  la  main  du  peintre.  Mais  une  mélodie,  un  cantique, 
un  plain-chant  même  peut  produire  un  effet  de  ce  genre.  La  musi- 
que reproduit  constamment  les  mêmes  effets  ;  elle  ne  cessera  ja- 
mais, elle  n'a  jamais  cessé  d'étendre  son  domaine  et  ses  richesses. 

—  Grâce  un  peu  aux  monastères,  répondit-on.  Durant  la  triste  nuit 
du  moyen  âge,  le  dernier  rayon  de  la  pure  vie  intellectuelle  éclaire 


DE  PARIS. 


299 


le  front  pâle  du  moine.  Au  milieu  d'un  monde  barbare,  la  société 
monastique  conserve  seule  le  sentiment  et  le  f^oût  des  jouissances 
de  l'esprit  et  de  l'art,  ouvrant  un  refuge  à  toute  intelligence  qui 
laissait  voir,  même  sous  le  sayon  de  l'esclave,  quelque  étincelle  de 
génie.  Combien  d'artistes ,  de  poëtes,  de  savants  ont  dû  bénir, 
pendant  des  siècles,  ce  droit  d'asile  respecté  qui  les  avait  arrachés 
aux  misères  poignantes  et  à  la  vie  bestiale  de  la  glèbe!  La  musique 
a  bien  quelque  raison  de  vénérer,  non  pas  ces  moines  pansus  et 
verts  gaillards  de  la  décadence,  qui  ont  fait  la  joie  de  nos  pères  et 
ne  font  pas  la  nôtre,  mais  ces  travailleurs  modestes,  inconnus, 
d'une  abdication  si  résignée,  d'un  renoncement  si  paisible  dans 
son  héz'Oïsme,  qui  nous  apparaissent,  qui  nous  apparais- aient  tout 
à  l'heure  encore  dans  la  cellule  du  R.  P.  Marcel,  creusant  et  per- 
pétuant les  chefs-d'œuvre  de  l'art  musical  religieux...  » 

Et  nous  regagnâmes,  François  Bazin,  Besozzi,  Jules  Mones- 

tier  et  moi,  les  cellules  mises  à  notre  disposition,  —  par  une  fa- 
veur spéciale,  —  dans  VAula  pi-ovinciarium  Italice. 

Em.  Mathieïï  UE  monter. 


LES  THÉÂTRES  LTBIOUES  SECONDAIRES  Â  PARIS 

DEPUIS     ISSO. 

{%"  article)  (1). 

1828.  —  4  février.  — Les  Deux  Aveugles  de  Tolède,  de  Mar- 
sollier  et  Méhul,  créés  à  l'Opéra-Comique  le  28  janvier  1806. 

18  février.  —  Les  Brigands,  opéra-pastiche  en  deux  actes,  pa- 
roles de  MM.  Th.  Sauvage  et  H.  Dupin,  musique  tirée  de  divers 
opéras  de  Dalayrac.  «  Les  Brigands,  non  pas  de  Schiller,  comme 
le  disait  hier  l'affiche,  mais  de  MM.  Sauvage  et  Dupin,  sont  vus 
avec  plaisir  après  les  Éphémères.  Cet  ouvrage  est  d'une  constitu- 
tion un  peu  frêle.  On  voit  qu'il  n'était  pas  destiné  primitivement 
à  une  scène  aussi  élevée  que  celle  du  second  théâtre  ;  sa  forme  est 
celle  du  vaudeville;  il  n'y  manque  que  les  ponts-neufs  obligés. 
Les  auteurs  les  ont  remplacés,  et  ils  ont  bien  fait,  par  des  mor- 
ceaux charmants  empruntés  aux  différentes  partitions  de  Dalayrac. 
Ce  choix  a  été  fait  avec  goût.  Cet  opéra-vaudeville,  comme  l'appelle 
l'afliche,  nous  a  présenté  les  artistes  de  l'Odéon  sous  un  jour 
beaucoup  plus  favorable  que  les  ouvrages  à  grand  orchestre  de 
M.  Rossini,  qui  exigent  des  poumons  extraordinaires  pour  lutter 
avec  avantage  contre  les  accompagnements  obligés  de  timbales, 
cymbales  et  instruments  à  vent.  »         {Courrier  des  Théâtres.) 

10  avril.  — Le  Dernier  jour  de  Missolonghi,  drame  héroïque  en 
trois  actes  et  en  vers  libres,  d'Ozaneaux,  musique  d'Hérold. 

Ceci,  on  le  pense  bien,  était  un  ouvrage  de  circonstance  inspiré  à  un 
poète  par  la  vaillance  du  petit  peuple  qui  venait  de  se  soulever 
en  masse  pour  reconquérir  héroïquement  son  indépendance.  Hérold 
avait  consenti  à  écrire  pour  cet  ouvrage  une  ouverture  et  la  musique  de 
trois  morceaux  plus  ou  moins  importants  :  au  premier  acte,  une  bal- 
lade avec  chœur;  au  second,  une  chanson,  aussi  avec  chœur; 
enfin,  au  troisième,  un  grand  chœur  coupé  par  deux  strophes, 
lesquelles  étaient  chantées,  —  le  fait  est  bon  à  i  appeler,  —  par 
M.  et  Mme  Duprez. 

Quelle  était  la  valeur  des  morceaux  écrits  ainsi  par  Hérold,  à  la 
hâte  sans  doute,  puisque,  nous  l'avons  dit,  il  s'agissait  d'un  ou- 
vrage de  circonstance,  monté  par  conséquent  avec  rapidité,  peut- 
être  presque  improvisé?  11  est  bien  difficile  de  le  savoir,  puisque 
la  partition  n'a  pas  été  publiée.  Nous  devons  nous  en  rapporter 

(1)  Voir  les  n°=  25,  26,  29,  31,  33,  34  et  37. 


aux  jugements  exprimés  par  les  contemporains,  et,  comme  il  arrive 
souvent,  ces  jugements  sont  contradictoires. 

Voici  celui  d'un  musicien,  de  M.  Fétis,  dans  la  Revue  musicale  : 
—  «  Le  Dernier  Jour  de  Missolonghi  n'est  point  un  opéra,  mais  un 
drame,  dans  lequel  on  a  placé  trois  ou  quatre  morceaux  de  mu- 
sique et  une  ouverture.  M.  Hérold,  en  composant  cette  musique, 
semble  s'être  souvenu  du  peu  de  chances  de  succès  qu'un  auteur 
trouve  à  l'Odéon,  car  ses  morceaux  offrent  un  air  de  négligence 
qui  ne  lui  est  point  ordinaire.  Son  ouverture,  formée  de  quelques- 
uns  des  motifs  d'un  air  du  deuxième  acte  et  d'un  chœur  du  troisième,  est 
cousue  par  des  traits  à  la  manière  rossinienne,  qui  sont  mainte- 
nant si  usés  que  l'auteur  lui-même  les  dédaigne  et  les  a  abandonnés. 
On  trouve  au  premier  acte  une  espèce  de  chant  national  qui,  malheu- 
reusement, manque  de  couleur  locale  et  qui  est  trop  modulé.  Les 
couplets  que  chante  Léon,  au  second,  sont  plus  piquants  et  l'ins- 
trumentation en  est  élégante.  Quant  au  chœur  du  troisième , 
que  plusieurs  journaux  ont  présenté  comme  le  meilleur  morceau, 
il  m'a  semblé  qu'il  n'a  rien  de  neuf  et  qu'il  n'est  que  conve- 
nable. Je  suis  persuadé  que  M.  Hérold  porte  sur  cette  légère  pro- 
duction le  même  jugement  que  moi,  et  je  n'insisterai  pas  sur  sa 
faiblesse.  » 

D'autres  étaient  moins  sévères;  témoin  ces  lignes,  que  j'extrais 
du  Courrier  des  Théâtres  :  «  ...  La  musique,  ou  plutôt  les  qua- 
tre ou  cinq  morceaux  qui  composent  la  partition  de  M.  Hérold, 
sont  dignes  de  leur  brillante  origine,  de  cet  aimable  et  fécond 
inspiré.  L'ouverture  est  un  peu  rossinisée;  mais  c'est  plutôt  une 
cojicession  qu'un  défaut,  car  l'auteur  sait  être  lui  quand  il  le  veut. 
Le  chœur  du  premier  acte,  dont  le  motif  est  un  chant  grec,  est 
magnifique.  Le  chœur  qui  accompagne  l'air  de  Léon  est  charmant; 
enfin,  le  morceau  d'ensemble  du  troisième  acte  est  de  toute 
beauté.  Il  ne  lui  manque  que  d'habiles  exécutants  sur  le  théâtre, 
car  ceux  de  l'orchestre  s'en  acquittent  au  mieux.  » 

Témoin  encore  ce  jugement  sommaire  et  favorable  porté  par 
le  Constitutionnel:  «  Les  morceaux  de  musique  ajoutés  par  M.  Hé- 
rold produiraient  plus  d'effet  si  les  parties  de  chant  étaient  aussi 
bien  exécutées  que  les  parties  de  l'orchestre.  L'ouverture  notam- 
ment a  réuni  tous  les  suffrages,  tant  il  est  vrai  qu'en  musique 
l'exécution  décide  le  plus  souvent  du  mérite  du  compositeur.  » 

Enfin,  Théodore  Muret  a  tracé  ces  lignes  sur  l'ouvrage  qui  nous 
occupe  :  «  La  musique  de  cette  ballade  (celle  du  premier  acte), 
celle  des  autres  chants  et  chœurs  jetés  dans  la  pièce,  ainsi  que 
l'ouverture,  ne  démentaient  pas  le  talent  d'Hérold,  et  ne  doivent 
pas  être  oubliées  parmi  ses  œuvres.  Le  principal  rôle,  celui  du 
chef  Capsali,  était  rempli  par  Bocage,  et  Provost  portait  la  barbe 
et  le  turban  de  Tahir-Pacha,  lieutenant  d'Ibrahim.  Un  petit  rôle 
de  jeune  Grec  n'était  pas  dédaigné  par  Mlle  Anaïs ,  bientôt  après 
sociétaire  au  Théâtre- Français.  Un  chanteur  encore  obscur,  dont 
le  nom  devait  retentir  bien  haut,  se  faisait  entendre  dans  la  par- 
tie musicale  sous  le  costume  d'un  guerrier:  ce  chanteur  n'était 
autre  que  Duprez,  sujet  secondaire  dans  la  troupe  lyrique  de  l'O- 
déon. 11  alla  ensuite  débuter  à  l'Opéra-Comique  sans  y  produire 
un  grand  effet,  partit  pour  l'Italie,  et  en  revint  armé  de  son  fa- 
meux ut  de  poitrine,  l'instrument  de  sa  célébrité.  Mme  Duprez 
chantait  auprès  de  son  mari  la  partie  d'une  jeune  Grecque.  {L'His- 
toire par  le  Théâtre,  II,  p.  283.) 

Ce  qui  paraît  certain  pourtant,  c'est  que,  sans  être  indignes  de 
lui,  les  quelques  pages  écrites  par  Hérold  pour  le  Dernier  Jour  de 
Missolonghi  n'étaient  point  de  nature  à  augmenter  sa  renommée. 
Cette  musique,  composée  précipitamment  pour  une  œuvre  de  cir- 
constance, avait  dû  être  émise  au  courant  de  la  plume,  et  n'avait 
pu  être  échauffée  par  le  génie  brûlant  de  l'auteur  de  si  beaux 
chefs-d'œuvre.  Je  n'insisterai  donc  pas  plus  qu'il  ne  faut  à  ce  sujet. 


300 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


15  avril.  —  Marianne,  opéra-comique  en  un  acte,  de  MarsoUier 
et  Dalayrac,  créé  au  théâtre  Favart  le  7  juillet  1796. 

4  mai.  —  Deux  Mots,  ou  une  Nuit  dans  la  forêt. 

18  mai.  —  Gulnare,  ou  l'Enclave  persane,  opéra-comique  on  un 
acte,  de  MarsoUier  et  Dalayrac ,  créé  au  tliéâtre  Favart  le  9  jan- 
vier 1798, 

27  mai.  —  Le  Déserteur,  de  Sedainc  et  Monsigny,  créé  à  la 
Comédie-Italienne  le  6  mars  1769. 

On  voit  qu'à  partir  du  commencement  de  l'année  1828  et  de  la 
représentation  des  Brigands  (car,  malgré  le  grand  nom  d'Hérold, 
le  Dernier  Jour  de  lUissolonghi  ne  peut  être  considéré  comme  une 
œuvre  musicale),  la  musique  proprement  dite  cessa  de  faire  par- 
tie du  répertoire  de  l'Odéon.  On  n'y  représenta  plus  de  ces  grands 
ouvrages,  de  ces  traductions  importantes  qui,  sous  ce  rapport, 
avaient  fait  acquérir  i\  ce  théâtre  une  véritable  notoriété,  et  l'on 
se  contenta  de  quelques  reprises  de  pièces  délaissées  par  l'Opéra- 
Comiquc.  Dès  le  mois  de  février  ou  de  mars  ,  le  personnel  chan- 
tant se  démembrait,  et  l'orchestre  lui-même,  ce  magnifique  or- 
chestre qui  avait  conquis  vaillamment  une  réputation  si  légitime, 
se  voyait  disloqué.  C'est  ce  qui  résuite  dos  lignes  suivantes,  que 
M.  F'étis  publiait  dans  un  des  numéros  de  la  Revue  musicale  île 
février  1828  :  «  L'Odéon  est  à  peu  près  perdu  pour  la  musi(|ue  ; 
le  directeur  de  ce  théâtre  n'en  veut  pas.  Mme  Sdiutz  est  partie  : 
c'est  une  perte;  car,  malgré  des  défauts  considérables,  elle  était 
ce  qu'on  avait  de  mieux.  On  assure  qu'à  la  tin  de  ce  mois,  une 
partie  de  l'excellent  orchestre,  qui  était  à  peu  près  tout  ce  qu'on 
pouvait  louer  à  l'OJéon,  sera  renvoyée.  On  ne  conservera  que  ce 
qui  est  nécessaire  pour  jouer  Biaise  et  Babel,  Ambroise  et  autres 
ouvrages  de  même  force. 

»  Je  convions  que  la  position  de  l'Odéon  ot  la  nature  de  son 
privilège  étaient  do  grands  obstacles  ;i  sa  prospérité ,  mais  je  pense 
qu'on  pouvait  mieux  linir.  « 

Quelques  semaines  après,  Crémont  lui-même  se  retirait  pour 
aller  à  l'Opéra-Comiquc  remplacer  Kreubé  comme  premier  chef 
d'orchestre.  C'est  encore  M.  Fotis  qui  le  constate  en  ces  termes, 
dans  le  même  recueil  :  «  M.  Crémont,  deveim  chef  d'orchestre  en 
remplacement  de  M.  Frédéric  Kreubé,  a  marqué  sa  prise  de  pos- 
session par  une  exécution  plus  soignée  qu'on  n'avait  coutume  de 
l'entendre  à  ce  théâtre ...» 

Bref,  les  choses  allaient  de  mal  on  pis.  L'Odéon  n'avait  plus  ni 
chanteurs,  ni  orchestre,  ni  choristes,  les  représentations  deve- 
naient languissantes  et  faibles,  pour  ne  pas  dire  plus,  et  le  public 
désertait  le  théâtre.  Enfin,  un  soir,  le  mécontentement  des  specta- 
teurs fut  si  grand  et  se  manifesta  de  telle  sorte,  qu'un  lurrible 
tapage  s'ensuivit  et  que  l'autorité  dut  faire  évacuer  la  salle.  Dès 
le  lendemain,  le  théâtre  fut  fermé,  et  l'on  dut  s'occuper  de  nom- 
mer un  nouveau  directeur.  Ce  directeur  fut  Lemétheyer ,  qui, 
déjà,  trois  mois  auparavant,  avait  été  sur  le  point  de  se  charger 
de  l'administration  de  l'Odéon,  ainsi  qu'on  peut  le  voir  par  celte 
note  publiée  au  mois  de  mars  par  un  journal  spécial  :  «  Il  y  a 
trois  semaines,  les  arrangements  relatifs  à  l'Odéon  semblaient  ter- 
minés. M.  Lemétheyer,  régisseur  actuel  de  l'Opéra-Comique,  en 
prenait  la  direction ,  se  chargeait  de  l'acquittement  des  dettes 
moyennant  la  concession  d'y  jouer  tous  les  genres,  et  surtout  l'o- 
péra-comique  nouveau,  et  le  théâtre  allait  ouvrir  ;  mais  lorsqu'il 
a  fallu  régulariser  l'acte  définitif,  des  difficultés  se  sont  élevées,  et 
M.  Lemétheyer  s'est  retiré.  On  parle  maintenant  d'un  entrepre- 
neur qui  bannirait  la  musique  de  l'Odéon,  et  qui  en  ferait,  comme 
autrefois,  un  théâtre  destiné  à  la  comédie  et  à  la  tragédie.  » 

Mais  les  visées  de  Lemétheyer  avaient  changé  de  but,  et  cet 
administrateur  ne  consentit  à  se  charger  des  destinées  de  l'Odéon 


qu'à  la  condition  de  n'y  exploiter  que  les  deux  genres  jadis  con- 
sacrés à  ce  théâtre  :  la  tragédie  et  la  comédie. 

En  arrêtant  ici  cette  période  de  l'histoire  do  l'Odéon,  je  puis 
donc,  avec  on  no  peut  plus  d'opportunité,  terminer  par  cette  phrase 
si  connue  et  qui  n'aura  jamais  été  employée  plus  à  propos  :  E 
finita  la  musica. 

ÂRTiiun  POUGIN. 
(La  suite  prochainement.) 


BIBLIOGRAPHIE  IHUSICÂIC. 

PHÉNOMÈNES    MUSICO  -  PHYSIOLOGIQUES, 
Par  Charles  Meerens  (de  Bruxelles)  (1). 

Le  dédain  avec  lequel  la  plupart  des  musiciens  repoussent  toute  ten- 
tative d'invasion  dos  sciences  exactes  dans  leur  domaine  était  jusqu'à  un 
certain  point  justifié.  Le  secours  que  les  malliématiques  avaient  apporté 
à  la  science  musicale  se  réduisait  toujours  à  fort  peu  de  chose;  à 
peine  avait-on  indiqué  quelques  vagues  analogies  qui  n'expliquaient 
rien.  On  tournait  dans  un  cercle  vicieux;  le  plaisir  de  l'oreille  était 
érigé  en  principe  et  faisait  la  ba^o  de  tous  les  sysicmes. 

On  savait  ceci  :  les  accords  consonnanls  cor."espondent  à  des  rapports 
de  nombres  entiers.  Les  pythagoriciens  tournaient  et  retournaient  ce 
thème  sans  en  tirer  autre  chose  que  des  aphorisnies  sur  l'harmonie  du 
monde  et  sur  la  puissance  occulte  des  nombres.  On  a  voulu  retrouver 
les  sept  notes  do  la  gamme  jusque  dans  le  mouvement  des  astres  et 
dans  les  sept  coulc^urs  do  l'arc-cn-ciel,  ot  le  grand  Kepler  lui-môme  s'a- 
bandonnait volontiers  à  des  spéculations  mystiques  sur  cette  matière. 

Aujourd'hui  que  nos  immenses  rassources  scienlifiques  nous  permet- 
tent de  mettre  on  évidence  les  plus  délicates  inductions,  que  les  progrès 
(le  la  science  marchenl  sur  un  terrain  solide,  la  musique  est,  de  toutes 
les  connaissances  humaines,  celle  qui  offri;  le  plus  d'éléments  phénomé- 
naux exactement  déterminés  ;  mais  l'étude  de  ces  faits  élémentaires,  au 
lieu  de  s'être  continuée  exclusivement  dans  la  direction  tracée  par  un 
sage  esprit  d'observation,  a  servi  de  prétexte  à  la  création  d'une  foule 
de  théories  gratuites,  qui,  fatalement,  s'écartaient  de  la  vérité;  leurs  in- 
venteurs donnaient  ces  fausses  doctrines  comme  vraies;  cependant  ils  ne 
pouvaient,  en  quelque  sorte,  les  affirmer  que  sur  leur  parole  d'honneur, 
et  les  crédules  abusas  les  défendaient  avec  fanatisme. 

Mais  voici  un  petit  ouvrage  que  vient  d'e  publier  M.  Charles  Meerens: 
—  Phénomènes  musico-phtjsiologiques  —  et  qui  paraît  vivement  occuper 
les  théoriciens. 

Dans  cet  ouvrage,  point  d'utopies,  point  de  rêves  creux;  toute  sa  doc- 
trine découle  d'un  phénomène  physiologique  dont  l'existence  est  suf- 
fisamment démontrée  par  l'observation  d'un  musicien  expérimenté.  Le 
principe  en  est  bien  simple  et  a  toutes  les  apparences  de  réaliié,  car  il 
se  confirme  de  plus  en  plus  à  mesure  qu'on  l'applique  à  la  philosophie 
de  l'art,  et  il  vient  ainsi  mettre  en  iumière  les  plus  mystérieux  phéno- 
mcnps  de  la  science  harmonique. 

M.  Meerens  est  arrivé  à  découvrir  que,  dans  la  perception  du  son, 
nous  soumettons  les  vibrations  à  un  système  rhythmique,  c'ist-à-dire 
que  nous  percevons  le  son  par  groupes  ou  séries  d'une  ou  plusieurs  vi- 
brations successives,  et  le  nombre  de  vibrations  dont  ces  groupes  se  com- 
posent détermine  la  fonction  tonale  de  l'intonation.  Ainsi  le  rhythme 
binaire  des  vibrations  nous  fait  entendre  une  tonique,  le  rhythme  ter- 
naire une  dominante  et  les  rhythmes  composés  des  rapports  indirects 
résolvent  le  problème  mystérieux  des  attractions  des  sons. 

M.  Meerens  explique  aussi  la  cause  des  accents  mélancoliques  qui  ca- 
r.ictérisent  le  mode  mineur.  Bref,  il  donne  la  clef  de  tous  les  mystères 
harmoniques  et  des  mouvements  du  mécanisme  intellectuel  qui  fait  naî- 
tre les  sensations  diverses  que  la  musique  nous  fait  éprouver.  Nous 
croyons  que  l'auteur  a  enfin  deviné  une  énigme  vieille  de  deux  mille 
ans. 

Apprécier,  par  des  raisonnements  fondés  sur  des  chifi"res,  ce  que  l'ins- 
tinct a  découvert  et  ce  que  le  génie  a  fécondé,  quelle  science  attrayante, 
quelles  conquêtes  de  l'esprit  d'investigation  et  d'observation  ! 

Osons  chaleureusement  recommander  la  brochure  de  M.  Charles 
Meerens. 

C.  D.  G. 


(1)  Nous  empruntons  au  Guide  musical  cette  appréciation  de  l'opuscule 
de  M.  Meerens,  qui  s'est  déjà  fait  connaître  par  des  recherches  curieuses 
sur  la  musique,  dont  nous  avons  rendu  compte  dans  la  Gazette  musicale. 


DE  PARIS. 


301 


CORRESPONDANCE. 

Le  Havre,  46  septembre. 

La  musique,  mon  cher  Diiecteur,  est  largement  représentée  à  l'Ex- 
position du  Havre,  si  intelligemment  créée,  dans  un  but  philanthropi- 
que et  humanitaire,  par  M.  NicoUe,  homme  de  cœur  et  de  progrès. 

Les  pianos  et  les  orgues  n'ont  eu  garde  de  manquer  au  rendez-vous  ; 
on  n'en  compte  pas  moins  r.e  soixante!  Ils  sont  joués  tous  les  jours  de 
3  à  6  heures,  par  des  virtuoses  spécialement  engagés  et  par  des  artistes 
de  passage.  Aussi  a-t-on  surnommé  la  salle  où  se  trouvent  les  instru- 
ments de  musique  l'aquarium  des  pianistes;  il  est  inutile  de  vous  dire 
que  les  bacs  les  plus  remarqués  sont  de  Pleyel-Wolff  et  de  Erard-Le- 
bourg.  (Pourquoi  ce  second  nom?) 

Passons  aux  virtuoses. 

Ce  sont  d'abord  MM.  Vannier  et  Jacques  Baur,  qui  déploient  beaucoup 
de  talent,  ce  dernier  surtout,  à  faire  valoir  les  pianos  Erard; 

Puis  Mlle  Secrétain,  qui  charme  autant  les  oreilles  que  les  yeux  en 
jouant  l'instrument  de  son  maître  Henri  Herz; 

M.  Magnus,  dont  le  double  talent  de  pianiste  et  de  compositeur  attire 
toujours  un  nombreux  public  près  des  pianos  Pleyel-Wolff,  ee  qui  ne 
l'empêche  pas  quelquefois  de  céder  sa  part  de  succès  à  Mlle  Valentine 
Lefebvre,  jeune  artiste  promise  au  succès  de  par  les  soins  de  son  pro- 
fesseur. Certain,  et  les  leçons  de  son  père,  marchand  de  musique  au 
Havre  et  représentant  de  la  maison  Pleyel-Wolff.  M.  Lefebvre  est  pour 
beaucoup  dans  le  goût  qui  a  présidé  à  l'arrangement  de  la  salle  des 
pianos  ; 

Mlle  Thouret,  artiste  consciencieuse  et  brillante  ; 

Ketterer,  dont  le  caprice  hongrois  provoque  inévitablement  les  bravos; 

Lebeau,  sans  rival  sur  l'orgue  -  harmonium ,  et  bien  d'autres  dont  les 
noms  m'échappent. 

Mais  là  ne  se  borne  pas  la  partie  musicale  de  l'Exposition.  Dans  le 
jardin,  oii,  comme  dans  le  parc  du  Champ-de-Mars,  on  rencontre  des 
kiosques  ornés  de  toutes  sortes  de  surprises,  un  orchestre  de  fanfare  se 
fait  entendre  deux  fois  par  jour,  à  3  heures  et  à  8  heures,  sous  la  di- 
rection de  M.  Jacijuin,  habile  chef  de  musique  de  la  Douane  à  Rouen. 

Il  y  a  aus.si  un  Cercle  international,  dans  lequel  on  donne  des  concerts, 
mais  il  a  été  si  mal  inauguré  que  les  séances  en  sont  peu  suivies;  ce- 
pendant Mme  Ugalde  et  Berthelier  s'y  sont  fait  entendre. 

Le  concert  de  Mlles  Jagoriska,  chanteuses  de  la  chapelle  impériale,  a 
médiocrement  réussi. 

Une  tentative  de  concerts  populaires  n'a  pas  été  plus  heureuse.  La 
salle  est  abandonnée  maintenant  aux  conférences  et  aux  banquets.  On 
banquette,  même  beaucoup  au  Havre.  Que  voulez-vous?  L'air  salin  pro- 
voque tant  l'appétit  et  la  marée  est  si  fraîche! 

Nous  avons  eu  un  très-brillant  concours  d'orphéons  et  de  musique 
d'harmonie;  cent  cinquante-cinq  sociétés  se  sont  présentées,  en  tout, 
quatre  mille  cinq  cents  musiciens!  Jamais  le  Havre  n'avait  reçu  tant  de 
visiteurs  harmonieux!  Jamais  au«si  un  public  aussi  nombreux  pour 
applaudir  au  triomphe  de  la  musique  municipale  de  Roubaix  et  de  la 
Société  chorale  des  Xeuslriens  de  Caen.  C'était  de  l'enthousiasme,  du 
délire,  des  couronnes,  des  médailles  et  des  toasts  à  n'en  plus  finir!  Le 
jury  était  sur  les  dents,  et  plus  d'un  couronné  a  dû  passer  la  nuit  en 
plein  air,  contemplant  l'étoile  polaire,  ce  guide  du  marin,  qui  se  montrait 
radieuse  d'une  aussi  belle  journée. 

Frascati,  l'hôtel  aristocratique  des  baigneurs,  est  le  rendez-vous  fa- 
vori du  plus  beau  monde.  —  Tous  les  soirs  son  jardin  est  rempli 
par  les  amateurs  de  musique  qui  viennent  applaudir  l'orchestre  habile- 
ment conduit  par  M.  Kieffer,  et  ses  jolies  fantaisies  sur  les  Huguenots,  la 
Poupée  de  Nuremberg  et  autres  dans  lesquelles  la  science  s'unit  au  bon 
goût  et  d  la  connaissance  parfaite  de  l'orchestre. 

Au  théâtre,  la  Grande-Duchesse  de  Gérolstein  a  fait  la  conquête  de 
tous  ses  sujets,  et  ils  étaient  nombreux. 

Vous  le  voyez,  mon  cher  directeur,  ainsi  que  je  vous  le  disais  au  début 
de  cette  lettre,  la  musique  occupe  une  large  part  dans  les  plaisirs  du  Havre, 
et  le  directeur  de  l'Exposition  ne  s'en  lient  pas  au  magnifique  aquarium, 
qui  à  lui  seul  vaut  le  voyage  et  suffirait  à  charmer  les  visiteurs. 

FRÉDÉnic  Brisson. 


P.  S.  —  Nous  compléterons  la  lettre  de  notre  correspondant  par  un 
détail  dont  sa  modestie  l'aura  empêché  de  nous  faire  part,  à  savoir  qu'il 
a  touché  plusieurs  fois  les  pianos  de  Pleyel-Wolfif  avec  le  succès  que 
provoquent  partout  où  il  se  fait  entendre  la  pureté  de  son  style  et  la  dis- 
tinction de  son  jeu. 


NOUVELLES  DES  THÉiTRES  LYRIQUES. 

,%  Le  théâtre  impérial  de  l'Opéra  a  donné  lundi  et  vendredi  Hamlet 
et  mercredi  Herculanum. 

**»  Mercredi  a  eu  lieu  la  rentrée  de  Mlle  Marie  Battu  dans  Herculanum. 
Nous  avons  émis  sur  le  rare  talent  avec  lequel  Mlle  Marie  Battu  a  conçu 
et  rendu  le  rôle  de  Lilia,  une  opinion  qui  a  été  partagée  par  toute  la 
presse  et  largement  sanctionnée  par  le  public.  Il  vient  de  nouveau  de  la 
confirmer  hautement  par  l'ovation  qu'a  reçue  de  lui  l'éminenle  artiste  à 
laquelle  il  a  prodigué  les  bravos,  les  rappels  et  les  fleurs.  —  C'est 
Mlle  Bloch  qui  a  chanté  le  rôle  d'Olympia,  Mme  Gueymard  étant  indis- 
posée. 

***  L'Opéra  va  reprendre  la  série  des  repré.sentalions  supplémentaires 
qu'il  est  d'usage  de  donner  pendant  la  saison  d'hiver.  Ces  représenta- 
tions auront  lieu  alternativement  le  dimanche  et  le  samedi.  Elles  com- 
menceront aujourd'hui  dimanche  20  septembre  par  l'Africaine.— Pour  ces 
représentations,  les  loges  de  rez-de-chaussée  et  de  premier  étage,  ordinai- 
rement réservées  à  l'abonnement,  sont  mises  à  la  disposition  du  public. 

**t  Mme  Galli-Marié  a  trouvé,  dans  le  rôle  de  Rose  Friquet,  un  suc- 
cès analogue  à  celui  qu'elle  avait  obtenu  dans  Mignon.  Ce  succès  s'af- 
firme davantage  à  chaque  représentation  des  Dragons  de  Viltars,  et,  à 
l'une  des  dernières,  un  bouquet  monstre  jeté  à  l'éminente  artiste  lui  a 
prouvé  à  quel  point  elle  était  sympathique  au  public.  —  Hier  a  eu  lieu 
la  l'eprise  du  Premier  Jour  de  bonheur  La  direction  a  hésité  longtemps 
dans  le  choix  de  la  cantatrice  qui  devait  remplacer  Mlle  Marie  Roze  dans 
le  rôle  de  Djelma.  La  tâche  était,  en  effet,  difficile  après  le  succès  si  vif 
qui  l'y  avait  accueillie.  Le  choix  de  M.  de  Leuven  s'est  fixé  sur  une 
belle  personne,  Mlle  Moisset,  dont  on  a  pu  apprécier  le  talent  et  l'intel- 
ligence aux  derniers  concours  du  Conservatoire,  où  elle  a  obtenu  un 
premier  prix.  Nous  dirons  dimanche  si,  comme  tout  le  fait  espérer, 
elle  aura  apporté  à  l'œuvre  d'Auber  un  concours  aussi  éclatant  que 
celui  heureusement  rencontré  dans  sa  devancière  par  l'illustre  com- 
positeur. 

^*t  Mme  Adelina  Patti  clora  ses  représentations  à  Hombourg 
par  la  Sonnambula;  elle  sera  à  Paris  le  2i  et  ouvrira,  avec  Fras- 
chini  la  saison  italienne  de  Yentadour  par  la  Lucia.  —  Elle  ne  nous 
restera  que  six  semaines  et  partira  vers  la  mi-novembre  pour  Saint- 
Pétersbourg,  en  passant  par  Bruxelles,  où  elle  s'est  engagée  à  donner 
quelques  représentations.  —  On  dit  merveilles  des  restaurations  et  em- 
belUssements  effectués  dans  la  salle  du  théâtre  Italien.  On  attend,  entre 
autres,  le  plus  bel  effet  des  glaces  dont  les  premières  loges  fermées  ont 
toutes  été  garnies,  et  qui  feront  admirablement  valoir  les  toilettes  et  la 
beauté  des  dames. 

**;ic  Depuis  son  retour  de  Bade ,  le  nouveau  directeur  du  théâtre  Ly- 
rique déploie  la  plus  grande  activité  pour  sa  réorganisation.  Bien  des 
choses  sont  déjà  faites,  le  personnel  est  complet,  les  se^^^ces  fonction- 
nent et  les  travaux  artistiques  ont  commencé.  M.  Pasdeloup  est  d'ailleurs 
parfaitement  secondé  par  son  secrétaire  général,  M.  Jules  Ruelle-  son 
premier  chef  d'orchestre,  M.  Mangin  ;  et  son  chef  de  choeurs,  M.  Eun-ène 
Vast,  un  second  prix  de  Rome,  organiste  de  Saint-Germain-l'Auxerrois 
et  ancien  professeur  de  l'Orphéon  municipal.  C'est  dans  ces  fonctions  que 
M.  Pasdeloup  a  pu  l'apprécier.  Il  a  aussi  fait  une  excellente  acquisition 
dans  M.  Benou,  l'ancien  associé  de  M.  Dormeuil  aux  théâtres  du  Palais- 
Royal   et  du  Vaudeville,  qu'il   a  choisi  pour  administrateur  général. 

Quoique  non  signés  encore,  on  peut  regarder  comme  conclus  les  enga- 
gements de  MM.  Monjauze,  Duwast  et  Massy,  et  de  Mmes  Daram  De- 
vriès  sœur.'! — dont  la  seconde  n'a  point  encore  paru  sur  la  scène  et  qui 
est  élève  de  Duprez— de  Mlles  Duval  et  Marie  Léon,  enfin  de  Mlle  Gil- 
bert, soprano,  auquel  un  bel  avenir  paraît  réservé. — Le  répertoire  doit 
dès  le  début,  être  complètement  renouvelé.  Quant  à  l'ouverture,  on  es- 
père qu'elle  pourra  avoir  lieu  le  13  octobre  et  probablement  par  le  Val 
d'Andorre  et  un  nouvel  ouvrage.  Mais  il  serait  encore  bien  difficile,  au- 
jourd'hui, d'assigner  à  cette  réouverture  une  date  certaine. 

,*^  L'opéra  de  Frédéric  Ricci,  M.  de  la  Palisse,  est  en  quatre  actes, 
et  M.  Martinet,  désirant  donner  tout  l'éclat  possible  à  son  exécution,  vient 
d'engager  pour  le  principal  rôle  de  femme  Mlle  Mai'imon,  qui  obtient 
en  ce  moment  à  Bruxelles  un  grand  succès  dans  le  Docteur  Crispin.  L'en- 
gagement de  Mlle  Marimon  au  théâtre  de  la  Monnaie  expire  au  mois  de 
novembre;  c'est  donc  pour  cette  époque  qu'elle  se  mettra  à  la  disposition 
du  directeur  des  Fantaisies-Parisiennes,  qui  lui  donne  i, 000  francs  d'appoin- 
tements par  mois.  —  Elle  y  chantera  également  le  rôle  d'Annette  dans 
Crispino  e  la  Comare. 

jt*»  Le  24  de  ce  mois-ci  Fleur  de  Tl-.é  atteindra  sa  centième  représen- 
tation à  l'Athénée.  —  Indisposé  pendant  quelques  jours,  Léonce  avait  dû 
céder  .son  rôle  de  Kaolin  à  un  ancien  acteur  du  théâtre  du  Prince-Eu- 
gène, Pelardy,  qui  s'en  est  fort  bien  tiré.  Léonce,  rétabli,  est  rentré  en 
possession  de  son  gracie  de  Général  des  Tigres,  l'une  de  ses  plus  ébou- 
riffantes créations,  et  M.  Biisnacli  a  profité  de  l'occasion  pour  se  l'atta- 


302 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


cher  définitivement  en  renouvelant  son  engagement  pour  deux  ans.  Des 
premiers  créateurs  de  l'opéretle  de  Ch.  Lecocq,  il  ne  reste  plus  que 
Léonce  et  Fleur  de  Thé,  elle-niôme,  la  charmante  Lucy-Cabel. 

**,  Fleur  de  Thé  n'a  pas  moins  de  succès  à  Lille  qu'à  Paris.  Depuis 
huit  jours  le  public  des  Variétés  applaudit  la  charmantechinoiserie  musicale 
de  M.  Lecocq.  L'exécution  et  la  mise  en  scène  ne  donnent  prise  à  aucune 
critique:  l'orchestre  est  bon,  les  chœurs  chantent  juste.  Mlles  Gentien 
(Césurine)  et  Carretier  (Fleur  de  Thé)  recueillent  chaque  soir  une  ample 
moisson  de  bravos.  Edouard  Georges  et  Coste  sont  excellents  dans  les 
rôles  de  Désiré  et  de  Léonce.  Public,  artistes  et  directeur,  tout  le  monde 
se  montre  content! 

**^c  Le  père  de  la  jeune  violoniste  Thérèse  Liebe,  M.  Louis  Liebe,  fait 
en  ce  moment  répéter  au  théâtre  de  Carlsruhe  un  opéra  de  sa  composi- 
tion :  la  Fiancée  d'Azola,  qui  doit  être  représenté  à  l'occasion  de  la  fête 
anniversaire  de  la  naissance  du  grand-duc. 

**,  lîn  vertu  de  la  nouvelle  loi  sur  la  propriété  littéraire,  une  somme 
de  4,000  francs,  perçue  sur  les  ouvrages  de  Weber  représentés  au  théâtre 
Lyrique,  a  été  payée  aux  héritiers  du  maître  par  la  Société  des  auteurs 
et  compositeurs  dramatiques.  —  M.  Hérold  lils,  avocat  à  la  Cour  de  cas- 
sation, touchera  de  même,  pendant  vijigt  ans  encore,  les  droits  des  ou- 
vrages de  son  père  qui  seront  joués  à  l'Opéra-Comique. 

*%  11  serait  question  de  la  construction,  par  une  importante  Société 
formée  ad  lioc,  d'une  nouvelle  salle  de  spectacle  à  l'angle  de  la  rue  Cau- 
marlin  et  de  la  rue  Basse-du-Rempart  ;  mais  c'est  surtout  dans  ces  sortes 
d'affaires  qu'il  y  a  loin...  de  la  coupe  aux  lèvres 


NOUVELLES  DIVERSES. 


***  Après  ses  triomphes  à  Ems  et  à  Bade,  où  il  a  fait  fureur,  Arban 
vient  de  rentrer  à  Paris,  et  il  est  tout  entier  à  l'organisation  de  ses 
concerts  Valentino,  auxquels  il  se  propose  de  donner  un  éclat  exception- 
nel. —  La  transformation  de  la  salle  est  presque  accomplie ,  et  grâce  à 
l'habile  décorateur  chargé  des  travaux,  la  musique  et  la  dan.se  auront 
rarement  eu  un  temple  aussi  élégant  ut  aussi  comfortablc.  Quant  au  ré- 
pertoire et  à  son  exécution,  l'habile  chef  d'orchestre  et  ses  solistes  ont 
fait  leurs  preuves;  on  doit  donc  s'attendre  à  les  voir  faire  merveille. 

jf*^:  L'activité  concertante,  ou,  si  l'on  veut,  la  virtuosité  militante  ne 
paraît  pas  prête  à  se  ralentir,  à  en  juger  par  une  statistique  de  laquelle 
il  ressort  que,  du  l"  janvier  au  31  juillet  de  cette  année,  cinq  cent  dix- 
huit  concerts  ont  été  donnés  à  Paris  seulement,  aux  salles  Erard,  Pleyel, 
Herz  et  autres. 

^*^  Les  chœurs  suédois,  publiés  par  les  éditeurs  Brandos  et  Dulbur,  à 
l'usage  des  sociétés  chorales,  ont  été  de  suite  adoptés  et  se  propagent  avec 
rapidité.  On  sait  que  l'un  d'eux,  le  Roi  des  Mers,  n'est  autre  que  l'ori- 
ginale et  gracieuse  mélodie  de  la  ballade  chantée  par  Mlle  Niisson  au 
quatrième  acte  A'Hamlct  et  qu'Ambroise  Thomas  a  si  heureusement  en- 
cadrée dans  son  œuvre. 

^*^  En  offrant  à  M.  Emile  Deschamps ,  son  voisin  à  Versailles ,  un 
exemplaire  du  livre  qu'il  vient  de  puWier  sous  le  titre  de  Haut  en  Bas, 
M.  Oscar  Comettanl  a  écrit  sur  le  premier  feuillet  du  volume  les  vers 
suivants  : 

De  gloire  vous  êtes  héraut, 

Vous  planez  et  ne  marchez  pas; 

En  vous  offrant  de  Haut  en  Bas 

J'ai  regardé  de  bas  en  haut. 

**a,  Sur  l'initiative  prise  par  M.  Domergue,  chef  d'orchestre  de  la  So- 
ciété philharmonique  de  Laval,  l'administration  municipale  de  cette 
ville  a  voté  les  fonds  nécessaires  à  l'établissement  d'un  Conservatoire  de 
musique.  L'instruction  reçue  dans  cette  école  comprend  le  solfège,  les 
instruments  à  cordes  et  à  vent.  Cinq  professeurs  y  sont  attachés.  C'est  la 
première  institution  de  ce  genre  créée  dans  les  villes  de  l'Ouest,  et  il 
faut  féliciter  l'administration  et  le  professeur  distingué  qui  ont  eu  l'idée 
de  cette  utile  innovation  et  qui  ont  réussi  à  la  mettre  à  exécution. 

^*^  On  nous  écrit  de  Vichy  que  la  saison,  grâce  à  la  prolongation 
du  beau  temps,  se  terminera  aussi  brillamment  qu'elle  avait  commencé. 
L'excellent  orchestre  de  M.  Romeo  Accursi  et  le  talent  de  sa  charmante 
femme  n'auront  pas  peu  contribué  aux  plaisirs  que  la  direction  du 
Casino  n'a  cessé  d'offrir  à  ses  visiteurs.  —  Mme  Accursi  leur  a  fait  ses 
adieux  dans  un  dernier  concert  oti  son  talent,  tout  plein  de  distinction  et  de 
délicatesse,  et  la  grâce  de  sa  personne  ont  valu  à  l'éminente  artiste  les 
suffrages  les  plus  flatteurs  et  les  plus  unanimes.  —  Dans  quelques  jours, 
M.  Accursi  va  revenir  prendre  à  l'orchestre  du  théâtre  Italien  la  place 
qu'il  y  occupe  si  bien,  et  il  est  à  désirer  que  Mme  Accursi  ne  borne  pas 
aux  salons  aristocratiques  la  production  d'un  talent  qui  ferait  sensation 
dans  les  conceris  de  l'hiver  prochain. 


^■"^  Nous  avons  été  des  premiers  à  faire  connaître  l'éclatant  succès  de 
Mlle  Niisson  et  de  MM.  Faure  et  Capoul  au  splendide  concert  donné  à 
Bade  à  l'occasion  de  la  fête  du  grand-duc.  Nous  apprenons  qu'à  la  fin 
de  la  soirée  M.  Dupressoir  aoffert  à  Mlle  Niisson  une  riche  couronne  d'or. 
—A  Wiesbaden,  oij  elle  s'est  rendue  ensuite,  la  célèbre  prima  donna  n'a 
pas  été  moins  royalement  fêtée.  Le  concert  dans  lequel  elle  a  chanté  et 
qui  avait  attiré  une  énorme  affluence,  était  honoré  de  la  présence  du 
prince, de  Prusse. 

„,%  Nous  avons  rendu  compte  l'année  dernière  de  plusieurs  "concerts 
de  bienfaisance  donnés  par  le  célèbre  quatuor  J.  Decker,  à  Strasbourg, 
et  auxquels  s'était  associée  une  de  nos  plus  gracieuses  pianistes  pari- 
siennes, Mlle  Emilie  Desmaisons.  Nous  annonçons  aujourd'hui  avec  un 
véritable  plaisir  la  nouvelle  édition  d'une  des  meilleures  compositions 
de  la  jeune  artiste,  pour  le  piano.  C'est  un  nocturne  en  fa  qui  se  dis- 
tingue autant  par  sa  bonne  facture  qu'il  séduit  par  le  charme  de  sa  mé- 
lodie principale  ;  nous  le  recommandons  chaudement  à  tous  les  amateurs 
de  bonne  musique. 

^*^,  Une  des  bonnes  élèves  de  Marmontel,  Mme  Rousselet,  qui  profes- 
sait avec  distinction  le  chant  et  le  piano  à  Dijon,  se  fixe  à  Paris  pour 
y  ouvrir  des  cours  et  donner  des  leçons.  La  nombreuse  clientèle  qu'elle 
s'était  formée  en  province  .et  les  regrets  qu'elle  y  laisse  la  recommandent 
mieux  que  tous  les  éloges  qu'on  pourrait  faire  de  son  talent. 

^*^  On  annonce  la  mort  de  Michel  Naum,  fondateur  du  théâtre  italien 
de  ce  nom  à  Constantinople. 

#.*>  Aujourd'hui'dimanche,  au  Pré-Catelan ,  de  midi  à  six  heures, 
Fête  annuelle  des  Enfants ,  donnée  sous  le  patronage  des  Mères  de  fa- 
mille. Un  grand  bal  d'enfants  avec  une  riche  tombola  clôtureront  cette 
intéressante  Fête. 


ÉTRANGER 


,"=»  Bruxelles. —  Le  théâtre  royal  de  la  Monnaie  a  donné  cette  semaine 
une  représentation  de  la  Juive,  qui  a  mécontenté  le  public  au  plus  haut 
point.  Le  ténor  Massy  et  la  première  chanteuse  Mlle  Marty,  évidemment 
insuffisants  pour  les  rôles  d'Eléazar  et  de  Rachel,  ont  dû  résilier  leur 
engagement  à  la  suite  de  celte  malencontreuse  épreuve. 

^*^  Londres.  —  M.  Mapleson  et  sa  troupe  sont  arrivés  à  Dublin.  Les 
représentations  ont  commencé  par  fl  Trovatorc,  suivi  de  Freischutz,  Lucia, 
Lucrezia  Borçjia,  Rigoletto  et  Faust.  Le  théâtre  est  plein  chaque  soir. — 
Le  prospectus  des  concerts  du  samedi  au  Palais  de  Cristal  vient  d'être 
publié.  Les  œuvres  suivantes  seront  exécutées  pour  la  première 
fois  :  The  )]'oman  of  Samaria,  de  Stei'ndale  Bennett;  fragments  de  la 
Lorclnj  de  Mendeissohn;  6«  symphonie  de  Schubert;  deux  duos  pour 
clarinette  et  cor  de  bassette  de  Mendelssohn;  marche  des  Maîtres  chanteurs 
de  R.  Wagner;  ode  à  sainte  Cécile  de  Haendel;  Tu  es  Petrus,  pour  chœur 
et  orchestre,  de  Mendelssohn;  la  Guerre  domestique  de  Schubert;  Chant 
de  victoire  de  Miriam,  du  même;  la  Cloche,  de  Romberg  ;  le  Christ  au 
mont  des  Oliviers  et  Prométhéc  de  Beethoven  ;  adagio  et  scherzo  pour  or- 
chestre de  Rubinstein  ;  3»  symphonie  et  ouverture  d'Hermann  et  Dorothée 
de  Schumaun;  concerto  de  violon  de  Max  Bruçh;  nouvelle  symphonie 
d'Arthur  Sullivan.  —  Mmes  Goddard,  Clara  Schumaun,  MM.  Joachim 
et  Ch.  Halle  se  feront  entendre.  Le  chef  d'orchestre  est  loujours  M.  Manns. 

,*,j  Bade.  —  L'opéra  italien  a  eu  son  tour  lundi  dernier.  On  a  commencé 
par  Norma,  qu'ont  interprétée  Mmes  Fricci,  Griin,  Arnoldi,  MM.  Capel- 
lio  Tasca,  Scaria  et  Arnoldi.  Le  public,  qui  semblait  tout  heureux  d'être 
revenu  des  pays  inconnus  oii  il  faut  suivre  Lohengrin ,  a  salué  le  chef- 
d'œuvre  de  Bellini  comme  une  vieille  et  sympathique  connaissance,  et 
n'a  pas  ménagé  les  applaudissements  aux  excellents  artistes  chargés  de 
le  lui  traduire. 

j*,  Ems.  —  Le  concert  que  nous  avons  eu  le  27  août  aura  été  cer- 
tainement l'un  des  plus  remarquables  qui  ait  été  donné  aux  eaux  ther- 
males de  l'Allemagne.  —  M.  Rriguiboul  y  avait  convié  à  la  fois  Sivori, 
Piatti,  Arban  et  Mlles  Corinna  Simoni  et  Marie  Deschamps.  Avec  de  pa- 
reils noms  l'effet  était  certain.  Aussi  a-t-il  répondu  à  l'attente  générale. 

—  Toutes  les  formules  de  l'éloge  ont  été  épuisées  à  l'égard  de  Sivori. 
11   a  été  lui  dans  les  deux  fantaisies  qu'il  a  jouées  et  c'est  tout  dire. 

—  Grands  applaudissements  au  célèbre  violoncelliste  Piatti.  —  Quant  à 
Arban,  il  a  autant  surpris  que  charmé  son  auditoire  par  la  douceur  des 
sons  qu'il  tire  de  son  instrument,  sa  prodigieuse  agilité  et  l'expression 
qu'il  donne  à  la  mélodie. — Mlle  Simoni  est  douée  d'un  organe  délicieux; 
elle  vocalise  admirablement  et  les  bravos  les  plus  chaleureux  l'ont  saluée 
après  chacun  des  morceaux  qu'elle  a  chantés ,  notamment  après  l'air 
des  Dragons  de  Villars.  —  Mlle  Deschamps,  excellente  organiste,  a  eu  sa 
légitime  part  du  succès.  —  On  s'est  retiré  ravi,  enchanté. 

^:%  Aix-la-Chapelle.  —  L'Africaine  est  une  nouveauté  pour  nous.  La 


liE  lUKIS 


303 


direction  s'est  enfin  décidée  à  la  représenter  et  n'a  pas  eu  à  s'en  repen- 
tir, car  le  chef-d'œuvre  de  Meyerbeer  obtient  un  splendide  succès. 
Mlle  Philippine  d'Edelsberg  remplit  à  son  honneur  le  rôle  de  Sélika. 

,*,  Leipzig.  —  Mme  Lucca  a  terminé  sa  campagne  triomphale.  Après 
Faust,  elle  a  chanté  Don  Juan,  /«••  Joi/euses  Commères  de  Windsor,  les 
Huguenots,  où  elle  a  été  vraiment  admirable,  les  Noces  de  Figaro  et  Fra 
Diavolo.  —  Le  premier  concert  du  Gewandhaus  est  annoncé  pour  le 
8  octobre. 

**«  Hambourg.  —  Le  théâtre  de  la  ville,  qui  s'est  rouvert  le  J"''  sep- 
tembre avec  la  Juive,  promet  à  ses  abonnés,  pour  le  courant  de  la  saison, 
Mignon,  Hamlel,  Àm  Runeinsiein,  l'avant-dernier  opéra-comique  de 
MM.  de  Flotow  et  Gênée,  et  enfin  la  Grande-Duchesse  de  Gérolstrin. 

:^\  Berlin.  —  A  l'Opéra,  les  principales  représentations  de  la  semaine 
ont  été  celles  de  Don  Juan,  où  l'on  a  revu  avec  plaisir  Mme  Harriers- 
Wippern  ;  de  Robert  le  Diable,  où  une  artiste  étrangère,  Mlle  Kropp,  du 
théâtre  de  Briinn,  s'est  fait  justement  applaudir  dans  le  rôle  d'Isabelle 
et  du  Sirucnséc  de  Michel  Béer  et  Meyerbeer. —Au  théâlre  de  Friedrich- 
Wilhclmstadt,  la  Grande- Duchesse  en  est  à  sa  cinquantième  représenta- 
tion. 

**,  Vienne.  —  La  Société  chorale  dirigée  par  Herbeck  fêtera  solen- 
nellement, les  M,  12  et  13  octobre,  le  2o«  anniversaire  de  sa  fondation. 
Des  œuvres  de  Schubert,  Mendelssohn ,  Liszt,  Esser  et  Herbeck  seront 
exécutées. 

»**  Prague.  —  Mlle  Yitali  a  obtenu  dans  le  Pardon  de  Ploërmel  le  plus 
brillant  succès  ;  des  applaudissements  sans  fin  l'accueillaient  après  chaque 
morceau,  et  elle  a  dû  répéter  l'air  de  l'Ombre.  —  Voici  sommairement 
le  sujet  de  l'opéra-comique  nouveau,  les  Deux  Compositeurs,  de  F.  de 
Flotow,  paroles  du  chef  d'orchestre  R.  Gênée  (qui ,  pour  donner  raison 
au  titre,  a  aussi  travaillé  à  la  musique)  :  un  principicule  allemand,  ama- 
teur de  musique,  entrelient  un  orchestre,  une  Kapelle,  dont  le  chef,  un 
vieux  routinier  qui  redoute  toute  innovation  et  toute  influence  étran- 
gère, a  fait  interdire  le  séjour  de  la  principauté  à  tous  les  compositeurs. 
Mais  il  a  compté  sans  l'amour,  qui  suggère  à  sa  fille  les  moyens  de 
retenir  et  même  de  faire  attacher  à  l'orchestre  un  jeune  musicien,  plein 
de  talent  et  d'avenir.  Bien  plus,  on  travaille  si  bien  l'intraitable  lîapell- 
meister,  qu'il  en  vient  à  accepter  avec  enthousiasme  un  opéra  de  son 
jeune  rival,  auquel  il  donne,  par  représailles,  la  main  de  sa  fille. —  La 
première  représentation  est  très-prochaine. 

,^*^  Naples.  —  Une  troupe  d'opérette-bouffe  s'est  installée  au  théâtre 
Nuovo  pour  y  jouer  le  répertoire  d'Offenbach ,  etc. ,  traduit  en  dialecte 
napolitain.  La  Belle  Hélène,  qu'on  a  donnée  d'abord  pour  tâter  le  pouls  à 
notre  public ,  n'a  pas  eu  l'heur  de  lui  plaire.  Les  calembours  auront 
été  mal  rendus  par  le  poète  Bidera! 

**t  Bergame.  —  Un  nouvel  opéra  du  maestro  Pontoglio,  la  Schiava 
greca,  vient  d'être  donné  ici  avec  un  succès  contesté. 

if,*^  Lisbonne.  —  La  troupe  de  San-Carlos  est  ainsi  composée  pour  la 
prochaine  saison  :  Mnies  Marchisio  sœurs  (octobre,  novembre  et  décem- 
bre); Rey-Balla,  Enrichetta  Corradi  (toute  la  saison);  Massini  (de  décem- 
bre à  mars);  MM.  Achille  Corsi,  Capellio-Tasca,  Sinigaglia,  ténors;  L. 
Merly,  Bartoloni,  Pacini,  barytons;  Galvani,  Reduzzi,  basses;  Marina 
Mora ,  première  danseuse.  L'administration  est  en  pourparlers  avec  la 
basse  comique  Boltero  et  la  prima  donna  Pozzi  pour  les  premiers  mois 
de  la  saison. 


Chfiz  BRANDVS  et  DUFOVR,  éditeurs,  105,  rue  de  lUchelieu. 


Morceaux  de  Piano  nouveaux 

J.  Baur.  Transcription  brillante  du  Chœur  des  Evûques 

de  l'Ajricaine 4     » 

BurgmuUer.  Valse  de  salon  sur  les  Drayons  de  Villars, 

arrangée  à  quatre  mains  par  Rummel 9     » 

I.  Carreno.  Fantaisie  brillante  sur  l'Africaine 9    » 

Cramer.  Bouquet  de  mélodies  sur  les  Dragons  de  Villars.  7  50 

—  Bouquet  de  mélodies  sur  Fleur  de  Thé 7  30 

Duvernoy.  Fantaisie  de  salon  sur  les  Dragons  de   Villan  7  SO 

E.  Ketterer.  Fantaisie  brillante  sur  les  Dragons  de  Villars  7  50 

—  Galop  de  salon  sur  Fleur  de  Thé 7  50 

Ch.i^Lecocq.  Gavotte 3    » 

E.    Magnus.  Tzygane-Marche,  souvenir  de  Hongrie 7  SO 

—  Lajmême,  arrangée  à  quatre  mains 10    n 

Meyerbeer.  Marche  duî  Couronnement  du  Prophète,  ar- 
rangée pour  deux  pianos  à  huit  mains 9     » 

Mortier   de    Fontaines.    Rêverie    sur    la    romance  : 

<(  Oh  !  laisse-moi  pleurer,  »  de  Léon  Leroy 4  50 


LES  FLEURS  DE  LA  DANSE  LiÏÏlkCfpoS 

mazurkas,  schottichs,  mazurkas,  redowas  les  plus  favoris.  Arrangés  pour 
les  petites  mains  et  soigneusement  doigtés,  par  H.  VAïiKIUET. 

PRIX,    BICBCMENT  nELIÉ    :    3  5    FR. 


Chez  Jules  HEINZ,  éditeur,  rue  de  Rivoli;  146. 


Nocturne  en  fa  pour  le  Piano 

COMPOSÉ   PAR 

EMILIE   DESMAISONS 

Op.  3.  —  Prix  :  6  fr. 

DU  MÊME  AUTEUR  : 

Henriette,  \ aise 5    »        Feuilles  d'automne,  Tê\ene  .  5    s 

Tarentelle S    s        La  Fée  du  lac ,  mazurka. . .  5    » 

Souvenir,  mélodie 5    »        L'Aima ,  polka 4  bO 

Zemfcom.  polka- mazurka 4  50 


PRIX  ACCORDE  A    L  OîiANIUlTE  A    l   EXPOSITION 
UNIVERSELLE  DE  LONDRES  1851. 

FonrnlMsenr  dcK  HIInlstèreH  de  lu 
Guerre  et  de  la  narloe  de  France. 

Seul   agent   à    Londres 

S.  ARTHUR    CHAPELL, 

65,   New  Bond  Street. 


MAISON  FONDÉE  EN  1803. 

INSTRUMENTS    DE    MUSIQUE    EN    CUIVRE 

Exposition  Universelle  de  Londres  1862 

MM.  les  Membres  du  Jury  International  décernent  la  Médaille  à 

ANTOINE  COURTOIS 

PODR  l'EXCElLENCE  DE  SES  CORNETS  A  PISTONS,  CORS,  ALTOS,  BASSES, 

ET  PODR  TOUTE  SA  COLLECTION  D'INSTRUMENTS  EN  GÉNÉRAL. 

»8,   rue    dea    llaraiN- Saint -Slarltn,    SH. 

Ci-devant  rue  du  Caire,  21. 


MÉDAILLE  d'argent  DEI'*  CLASSE 
A    l'exposition  universelle  de  PARIS  1855. 

Facteur  du    Conservatoire  et  de 
l'Académie  Impériale  de  Paris. 

Agent  à  Saint-Pétersbourg: 

A.  BUTINER, 

Perspect.Newsky , maison  de  l'égliseSt-Pitne 


La  maison  ANTOINE  COURTOIS  ayant  agrandi  ses  ateliers,  est  en  mesure  de  satisfaire  à  toutes  les  demandes  qui  pourront  lui    être 
adressées;  elle  garantit  réellement  à  sa  clientèle  des  instruments  irréprochables  sous  tous  les  rapports 


304 


KEVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE  DE  PAKIS. 


Publié   par  BRANDUS   et  DUFOUR ,    Éditeurs   des 
ŒUVRES  COMPLÈTES   DE   MEYERBEER. 


Opéra 
en  cinq  actes. 


ÎU  ^ 


€4ïlî 


Paroles 
de    Scrtbe, 


Grande  partition  d'orchestre. 


MUSIQUE  DE 

G.  MEYERBEER 


Parties    d'orchestre. 


LA    PARTITION  : 

Chant  et  Piano,  grand  format  in-4° net.  40 

—  édition  de  luxe,  grand  in-S» —  30 

—  édition  populaire,  in-S» —  20 

—  paroles    italiennes    et    allemandes , 

format  in-8° —  20 


LA    PARTITION  : 

Chant  et  Piano,  deuxième  partie  de  la  partition,  con- 
tenant 22  morceaux  inédits  et  non  exécutés  à  l'Opéra,  net. 

Piano  solo,  édition  de  luxe,  grand  in-S" — 

—         édition  populaire,  format  in-8° — 

Piano  a  4  mains,  format  iii-4° — 


12 
20 
12 
25 


Avec  paroles  françaises 

46  N" 


Liem   Air.^    détachési   de   Clianl 


Avec  paroles  italiennes 
99  M" 


Eitt  Prière  A  saint  Domlnlqoc,  l  Cbceur  des  Uatelots, 

Arrangée  à  i  voix  d'hommes  par  Pasdeloup,  net 50  c.  '  Arrangé  à  i  voix  d'hommes  par  Laurent  de  Rillé,  net 50  c. 


PIANO. 

li'OuTcrture,  arrangée  pour  le  piano,  par 

Vautlirot 5    » 

Grande  Slarclie  indienne,  édilion  ori- 
ginale   9     1) 

La  même,  édition  simplifiée 7  50 

Uarche    relieieusc,  par  Vauthrot 5    » 

La  même,  édition  simplifiée 5    n 

Airs  de  ballet.  1.  La  Fleur  de  lotus,  idylle 

chorégraphique S    » 

2.  Pas  des  jonj/eurs ,  finale 5    i 

Dernière  Pensée  musicale  de   Meyerbeer 
(prélude  du  5*  acte)  : 

I.  Pour  piano 3    » 

3.  Pour  piano  à  quatre  mains &     » 

3.  Pour  orgu3-harmonium 2  50 

II.  Pour  orgue-harmoniumet  piano..  4    » 
5.  En  trio  pour  piano,  violon  ou  vio- 
loncelle et  orgue 6    » 

Banr  {}.).  Chœur  des  Evoques,  transcription  ù     » 

Beyer  (F.).  Bouquet  de  mélodies 7  50 

—  Op.  26.  Petite  fantaisie  instructive...  G    » 

Burgmnller  (F.).  Valse  de  salon 6    » 

Careno  (F.).  Grande  fantaisie 9     » 

Comboul.   Op.  24.  Fantaisie  brillante 6    n 

Cramer.  Bouquet  de  mélodies,  mosaïque...  9    i> 

—  Deuxième  bouquet  de  mélodies 9    » 

Croisez.  —  Morceaux  de   chant,    transcrits 

pour  piano  seul,  revus  et   approuvés  par 
J.-F.  Félis  : 

1.  Romance  chantée   par  Mlle  Battu 4  50 

2.  Terzettino,    chantée    par    Mlle    Battu, 

MM.  Belval  et  Castelmary 4  50 

3 .  Chœur  des  évêques 4  50 

4.  Air  du  Sommeil,  chanté  par  Mme  Sass.  4  50 

5.  Air  chanté  par  M.  Faure 4  50 

6.  Duo  chanté  par  Mme  Sass  et  M.  Kaudio.  6    » 

7.  Septuor,  extrait  du  finale ft  50 

8 .  Chœur  des  femmes 4  50 

9.  Quatuor,  chœur  des  matelots 4  50 

10.  Prière,  double  chœur 4  50 

11.  Ballade  chantée  par  M.  Faure 4  50 

12.  Duo  chanté  par  MM.  Naudin  et  Belval.  4  50 

13 .  Chœur  des  Indiens ft  50 

14.  Chœur  des  sacrificateurs 4  50 

15.  Grand  air  chanté  par  M.  Naudin 6    a 

16.  Cavatine  chantée  par  M.  Faure 4  50 

17.  Grand  duo  chanté   par    Mme    Sass   et 

M.  Naudin 6    » 

18.  Chœur  dansé 4  50 

19.  Arioso  chanté  par  Mlle  Battu 4  50 

20.  Grand   duo  chanté  par   Mme   Sass   et 

Mlle  Battu 6    » 

21.  Grande  scène  du  Mancenillier,  chantée 

par  Mme  Sass,  cavatine  extraite 6    » 

22 .  Air  extrait  de  la  scène  précédente  ....  450 

23.  Chœur  aérien 4  50 

Les  23    numéros   réunis  eu  un  volume 

broché net.  25    » 

nolmetsch.  Op.  70.  Transcription  de  con- 
cert sur  l'air  du  Sommeil 7  50 

DnTernoy  (J.-B.).  Op.  280.  Fantaisie 6    m 

Favar^er  (R.).  Fantaisie-caprice 7  50 

eodefroid  (F.). Op.  128.  Air  du  Sommeil, 

morceau  de  salon 9    ■> 

—    Op.  129.  Second  morceau  de  salon...  7  50 

Herz  (Henri).  Op.  205.  Grande  fantaisie...  9    » 

Hess  (J.-Ch.)  Op.  98.  Rêverie 6    » 


ARRANGEMENTS    DIVERS. 

•lai-ll  (A.).  Trois  paraphrases  : 

1.  Op.  126.  Romance  d'Inès 7  50 

2.  Op.  127.  Chœur  des    évêques  et 

entrée  des  prêtresses 6    « 

3.  Op.  128.  Grand  air  de  Nélusko. .  7  50 

—  Op.  131.  Illustration 9     -o 

Ketterer  (E.).  Op.  170.  Fantaisie  de  salon.  9    » 
Krufter(W.).  Op.  135.  Fantaisie  brillante 

sur  la  scène  du  Mancenillieret  le  duo 

du  quatrième  acte 9     » 

Iieearpentier.201'et202'bagatelle, chaque.  5     » 

Liiszt.  O  grand  saint  Dominique,  prière....  9    u 

—  Marche  indienne 10     » 

Kiysbergr  (Ch.  B.).  Op.  105.  Fantaisie 9    » 

Mathias.  Op.  49.  Impromptu 6    » 

Xeustedt.  Op.  57.  Fantaisie,  transcription.  7  50 

Polmartin  (Mme).  Op.  25.  Transcription.  7  50 

Rosellen  (H,).  Op.  182.  Fantaisie  brillante.  7  50 

TalexT.  Polka-mazurka  de  salon 6    • 

Valiquet.  Op.   05.    Petite  mosaïque 6    • 

—  Op.  66.  Petite  mosaïque  (secondesuite).  6    » 

Vincent  (A).  Op.  18.  Fantaisie 7  50 

Vos»  (Ch.).   Op.   299.   Grande  fantaisie  dra- 
matique de  concert 9    » 

Wolff  (Ed.).  2  paraphrases  fantaisies: 

N°  1 .  Chœur  des  évêques 7  50 

2.   Boléro 7  50 

MUSIQUE  DE  DANSE. 

Arban.  Inès,  polka-mazurka 4  50 

Ettlin^.  Suite  de  valses 6    » 

Kart.  Quadrille   brillant 4  50 

I^ecarpentler.  Quadrille  très-facile 4  50 

Uarx  (H.)   2'  quadrille 4  50 

Mey  |A.).  Polka  brillante ft    i> 

—  La  même,  très-facile 3    » 

—  Vasco  de  Gama,  galop 4    » 

Strauss.  1"  quadrille 4  50 

—  Grande  valse 6    » 

—  La  même,  très-facile 4    » 

Statz  (P.)  Polka-mazurka 4    » 

A  QUATRE  MAINS. 
Bernard  (P.).  Beautés  de  l'Africaine,  à  qua- 
tre mains,  en  quatre  suites,  chaque. . .  10    » 

Bnrgmuller  (F.).  Valse  de  salon 9    » 

Croisez  (A).  Duo  enfantin 7  50 

Rnmmel.  Souvenir  de  l'Africaine,  duo. ...  7  50 
Wolff.  Op.    273.    Réminiscences  de  l'Afri- 
caine ,  grand  duo 10    • 

—  L'ouverture 9    » 

—  Marche  indienne 12    » 

—  Marche  religieuse 7  50 

—  Airs  de  ballet  1.  2.,  chaque 7  50 

MUSIQUE  DE  DANSE  A  QUATRE  MAINS. 

Iiecarpentier.  Quadrille  très-facile 4  50 

Mey  (A.).  Polka  brillante 6    » 

Stranss.   Quadrille 4  50 

—  Valse 7  30 

VIOLON. 
Altés  (Ernest) .  Op.  17.  Fantaisie  pour  vio- 
lon avec  accomp.  de  piano 9    » 

Grégoire  et  Léonard.   Duo  ponr   piano 

et  violon 9 

Derman.  Op.  76.  Fantaisie  gracieuse  pour 

violon,  avec  accompagnement  de  piano  9     » 

—  Op.  85.  Fantaisie  brillante  pour  violon, 

avec  accomp.  de  piano 10    » 


Herman.  Mélodies  de  l'.ifricaine,  arrangées 

pour  violon  seul,  2  suites,  chaque....     7  50 

—  Mélodies  de  l'Africaine,  pour  2  violons, 

2  suites,  chaque 9    » 

VIOLONCELLE. 

liée  (S.).  Op.  97.   Trois  transcriptions   pour 

violancelIeavecaccomp.de  piano,  chaque    7  50 

Blarx  (A.).  Souvenir  de  l'Africaine,  fantaisie 

pour  violoncelle  avec  ace.  de  piano. ...    9    » 

Poisot  et  Nathan.   Duo   pour   piano    et 

violoncelle 10    » 

ISelig-man.  Op.  78.  Réminiscences  de  l'Afri- 
caine, pour  violoncelle,  avec  accompa- 
gnement de  piano 9    ■ 

Servai»  et  Cirég^oire.  Duo  pour  violoncelle 

et  piano 9    » 

FLUTE,  CLARINETTE,  CORNET,  HAUTBOIS. 

Altés  (Henri).  Op.  29.  Op.  célèbres.  5*  livr. 
L'Africaine,  flûte  et  piano  : 

N°  1.  Réminiscence 6    » 

2.  Fantaisie 9    » 

Berthélemy  (F.).  Op.  8.  Fantaisie  bril- 
lante pour  hautbois  avec  accompagne- 
ment de  piano 9    » 

Coninx  (L.).  Op.  58.  Fantaisie  pour  fiûte 

avec  accompagnement  de  piano 9    a 

Corret.  Souvenir  de  l'Africaine,  fantaisie 
pour  clarinette  ou  hautbois  avec  ac- 
compagnement de  piano 9    > 

Uebillemont.  Mélodies  de  l'Africaine,  pour 

cornet  seul,  2  suites,  chaque 7  50 

—  Mélodies  de  l'Africaine  arrangées  pour 

2  cornets,  en  4  suites,  chaque 7  50 

dariboldi.  Mélodies  de  l'Africaine,  arran- 
gées pour  flûte  seule,  2  suites,   ch,.     6    u 

—  Mélodies  de  l'Africaine,  arrangées  pour 

2  flûtes,  en  4  suites,  chaque 9  n 

CireïTe  (E.).  Fantaisie   pour   cornet  à  pis- 
tons, avec  accompagnement  de  piano.  9  I 
Parent  (J.).  Fantaisie  pour  flûte  avec  piano  9  t> 

ORGUE-HARMONIUM. 
Brisson  (F.).  Trio  pour  violon  et  violoncelle, 

piano  et  orgue 12    » 

—  Marche  religieuse  et  chœur  des  évêques    5    » 

de  rj^/ricaine,  pour  harmonivmi 5    » 

—  Mélodies  de    l'Africaine,  pour  harmo- 

nium, 3  suites,  chaque 9    i 

Ketterer.  Op.  175  et  A.  Durand.  Op.  59. 

duo  brillant  pour  piano  et  orgue....  10    > 
Eiebean  (A.).  Op.  75.   Souvenir  de  l'Afri- 
caine,  fantaisie  pour  harmonium. . .     6    » 
Bliolan.  Fantaisie  pour  orgue-harmonium. .     7  50 
Biss  (George).  Op.  12.  Fantaisie  de  concert 

pour  orgue  expressif 7  50 

MUSIQUE  MILITAIRE. 
Blancheteau.  Fantaisie  pour  petite  fanfare 

et  moyenne  harmonie 9    s 

Branet.  Fantaisie  pour  grande  harmonie. .  15    x 

—  Valse  pour  musique  militaire 9    » 

Fischer.  Transcription  du  duo  du  quatrième 

acte  de  l'Africaine  pour  petite  fanfare.    9  ■ 

Cirard.  Fantaisie  pour  moyenne  harmonie.  12  x 

Viallon.  Fantaisie  pour  grande  fanfare. ...  10  » 
iSelIenik.  Grande  marche  ind.  de  l'Africaine 

pour  musique  militaire 9  > 

—  1"  fantaisie,  id.  id 12  » 


UPBUIEBIE  CEKTBALE  DES  CDEalNS  DE  FEB    —  A.    CUAIX  ET  C'°,  BDE  BEBGEBE,    20,   A  rABIS. 


BUREAUX    A    PARIS  :    BOULEVARD    DES    ITALIENS,  1. 


35'  Année. 


ON  S'ABONNE  : 

Dans  les  Déportements  et  à  t'Ktranger, 

chez  tous  les  Marchands  de  Musique,  les  Libraires, 

et  aux  Sureaux  dp;  Messageries  et  des  Postes. 


N*  39. 


REVUE 


27  Septembre  1868. 


PRIX    DE    L'ABONNEMENT: 

Paria 24   r.  par  an 

DépartemoDts,  Belgique  et  Suisse —    30  n       id. 
BtruD^er 34  "       id. 

Le  Journal  parait  le  Dimanche. 


GAZETTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


Nos  abonnés  reçoivent,  av^ec  le  numéro  d'aajoard'bnl, 
liE  CHOBUR  DES  ÉVÊQUES  de  FA/lricutne,  nouvelle 
transcription  de  alacqaes  Baur,  pour  le  piano. 


SOMMAIRE.  —  Armide,  première  partie,  par  A,  Thnrner.  —  Études  sur 
Charles-Marie  de  Weber  (troisième  partie,  8'  article),  par  Edmond  IVea- 
komm.  —  Revue  des  tlii^âtres,  par  D.  A.  D.  Saint-Yves. — Nouvelles 
des  tliéâtres  lyriques.  —  Nouvelles  diverses.  —  Annonces. 


ârhide. 

PRE!*IÊRE   PARTIE    (1). 

Le  xvii''  siècle  qui  nous  apparaît  quelquefois  si  lourd,  si  com- 
passé, si  correctement  régulier,  pour  nous  servir  d'un  néologisme 
qui  rend  bien  notre  pensée,  le  xvii^  siècle  qui  appliqua  si  rigou- 
reusement les  unités  d'Âristote  à  l'art  dramatique  et  le  compas  de 
Le  Nôtre  à  la  flore  des  jardins,  a  cependant  des  côtés  vraiment 
pittoresques. 

L'Italie  de  la  Renaissance  y  a  laissé  sa  lumineuse  traînée. 

Un  écho  des  élégances  florentines  se  répercuta  jusque  chez  nous; 
l'esprit  des  Médicis  nous  envoya  par  delà  les  Alpes  des  peintres, 
des  chanteurs,  des  musiciens,  des  décorateurs,  des  danseurs,  qui 
partagèrent  souvent  avec  un  roi  lui-même  des  divertissements  et 
des  mascarades  où  la  majesté  changeait  son  rôle. 

Mais  si  nous  remontons  plus  haut  encore  qui  ne  se  souvient  du 
goût  prononcé  qu'avait  pour  la  musique  Charles  IX,  goût  auquel 
Bail  dut  des  lettres  patentes  l'autorisant  à  établir  une  académie 
de  musique  «  à  la  manière  des  Grecs,  »  du  fameux  Ballet  de  la 
Reyne,  par  Beaujoyeulx,  en  1581,  où  les  plus  grands  seigneurs 
du  temps  figurèrent  comme  acteurs,  danseurs  et  chanteurs? 


(i)  L'intention  annoncée  par  le  directeur  de  notre  première  scène 
lyrique  de  faire  incessamment  une  reprise  solennelle  du  chef-d'œuvre 
de  Gluck  donne  à  cette  étude  de  noire  collaborateur,  M.  Thurner,  d'au- 
tant plus  d'intérêt  qu'il  a  recueilli  pour  l'écrire  les  données  les  plus  cer- 
taines, puisées  aux  archives  impériales  et  à  celles  de  l'Opéra  même,  qui 
jui  ont  été,  à  celte  occasion,  gracieusement  ouvertes  par  M.  Nuitler. 


Parlerons-nous  de  la  passion  musicale  de  Louis  XIII,  composant 
des  chansons  à  danser  et  des  airs  langoureux  adressés  à  la  blonde 
Amaryllis  ? 

Et  Louis  XIV  lui-même,  le  Roi-Soleil,  paraissant  dans  des  inter- 
mèdes et  des  ballets,  et,  dans  la  Princesse  d'Élide,  exposant  sa 
personne  et  sa  royale  perruque  à  l'admiration  confite  des  marquis 
de  l'OEil-de-Bœuf?  —  On  sait  que  Louis  XIV  débuta  dès  l'âge  de 
treize  ans,  en  1651,  dans  le  ballet  Cassandre,  de  Benserade,  et 
qu'il  ne  cessa  r«shibition  de  son  talent  chorégraphique  qu'après 
la  mordante  allusion  qu'en  fit  Racine  dans  Britannicus  : 

Pour  toute  ambition,  pour  vertu  singulière, 
11  excelle  à  conduire  un  char  dans  la  carrière, 
A  disputer  des  prix  indignes  de  ses  mains, 
A  se  donner  lui-même  en  spectacle  aux  Romains, 
A  venir  prodiguer  sa  voix  sur  un  théâtre, 
A  réciter  des  chants  qu'il  veut  qu'on  idolâtre! 

Les  tragi-comédies  de  Hardy,  avec  leurs  incidents  bizarres  et 
multipliés,  la  prodigieuse  quantité  de  ballets  où  la  fantaisie  la  plus 
exubérante  régnait,  les  premiers  essais  de  Corneille  et  de  Molière, 
où  le  romanesque  de  certaines  aventures  est  évidemment  inspiré 
par  des  œuvres  italiennes,  sans  compter  les  noms  impérissables 
du  Cid,  de  Don  Sanche,  de  Don  Juan  ou  le  Festin  de  Pierre,  il  y 
a  là  certes  un  mouvement  des  esprits  qui  accuse  une  influence 
particulière. 

La  Fronde  elle-même  sembla  donner  aux  femmes  un  reflet  des 
héroïnes  du  Tasse.  Cette  époque  si  curieusement  troublée  n'eut- 
elle  pas  ses  Hcrminies  et  ses  Bradamantes  ?  Écoutez,  s'il  vous  plaît, 
la  belle  /ulie  d'Angennes  dans  la  chambre  bleue  de  l'hôtel  de 
Rambouillet,  s' extasiant  au  milieu  de  son  cénacle  de  précieuses, 
entre  Voiture  et  Conrart,  aux  beautés  de  l'Arioste!  Suivez  Jean  de 
La  Fontaine  "sant  à  Mme  de  La  Sablière  l'une  de  ses  imitations 
de  Boccace;  entendez  cette  adorable  «  caillette,  »  cette  chroni- 
queuse de  grâce  et  d'esprit,  Mme  de  Sévigné,  raconter  ses  lectures 
de  Pétrarque  et  du  Tasse,  dans  sa  retraite  des  Rochers. 

En  1617,  trois  musiciens,  Guédron,  Boisset  et  Bataille,  s'asso- 
cièrent avec  les  paroliers  Bordier,  Durand  et  Porchères,  pour  la 
confection  d'un  ballet  intitulé  :  la  Délivrance  de  Renaud.  Le  duc 
de  Luynes  représentait  Renaud  et  Louis  XIII  le  démon  du  Feu. 


306 


KEVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


Ce  fut  en  France  le  premier  sujet  du  Tasse  traduit  sur  la  scène. 
On  admira  les  décors  de  l'enfer  et  les  jardins  enchantés  construits 
par  des  «  machinistes  »  italiens.  La  musique  était  composée  de 
soixante-quatre  voix,  vingt-huit  violons  et  quatorze  luths. 

On  connaît  les  tentatives  de  Mazarin  en  faveur  de  la  musique. 
Le  cardinal  voulut  doter  notre  pays  du  genre  de  divertissement  qui 
s'était  manifesté  au  delà  des  monts  dès  1S80. 

Vincenzo  Galilée,  Strozzi,  Bardi  di  Vernio,  Corsi,  Mai,  Péri, 
Caccini,  Rinuccini,  Emilio  del  Cavalière,  puis  Monteverde  et  Ga- 
valli,  furent  les  premiers  poëtes  et  musiciens  dont  la  collaboration 
produisit  en  germe  notre  opéra  moderne.  Ces  premiers  essais 
furent  d'abord  entrepris  dans  l'idée  d'une  restauration  des  tragé- 
dies antiques  avec  la  musique  grecque. 

En  1594,  nous  voyons  à  Florence  une  Dafne  due  à  Péri  et  Ri- 
nuccini, puis,  lors  du  mariage  de  Henri  IV  avec  Marie  de  Médicis, 
Caccini  se  joint  aux  deux  auteurs  ci-dessus  et  compose  une  Ewy- 
dice  jouée  au  palais  Pitti. 

Signalons  Emilio  del  Cavalière  (1600),  qui  essaya  de  donner  aux 
instruments  (violes,  luths,  violas  di  Gamba,  basses  de  violes, 
théorbes,  sacquebutes)  autre  chose  que  la  simple  doublure  du 
chant,  et  inventa  le  trille  et  les  grupetti. 

Puis  arrive  Monteverde,  dont  VOrfeo  (1608),  par  l'audacieuse 
innovation  de  l'accord  de  septième  de  dominante  sans  préparation, 
posa  les  véritables  bases  de  la  musique  dramatique  et  la  sépara 
de  l'antique  liturgie.  Cavalli  survient.  Ce  maître  vénitien,  directeur 
de  la  chapelle  du  grand-duc  de  Toscane,  s'empare  des  découvertes 
de  ses  devanciers,  et,  doué  d'une  fécondité  prodigieuse,  écrit  à 
partir  de  1637  jusqu'en  1676,  époque  de  sa  mort,  une  quantité 
d'opéras.  Mazarin  l'avait  fait  venir  on  France  en  1660,  lors  du 
mariage  du  roi,  et  l'on  joua  au  Louvre  son  Xercès. 

Avant  cela,  en  164S,  Mazarin  avait  appelé  des  Italiens  qui  re- 
présentèrent au  Petit-Bourbon  (emplacement  actuel  de  la  colonnade 
du  Louvre  et  des  parterres)  la  Festa  tealrale  de  Strozzi  ;  enfin 
voilà,  en  16S9,  un  Français,  l'abbé  Perrin,  avec  le  concours  de 
Lambert,  qui  imagine  une  œuvre  chantée  en  français! 

La  Pastorale  en  musique  fut  jouée  chez  31.  de  la  Haye,  à  Issy, 
et  se  trouva  sensiblement  calquée  sur  les  productions  italiennes. 
Le  succès  fut  inouï  et  décida  de  la  création,  par  privilège  royal, 
de  l'Académie  de  musique. 

Torelli ,  Amandini ,  Vigaroni  furent  les  principaux  machinistes 
qui  contribuèrent  à  la  naissance  de  l'opéra  en  France,  Louis  XIV 
ordonna  la  construction  d'une  salle  spéciale  pour  ce  genre  de  spec- 
tacle, et  deux  ans  après  son  mariage,  en  1662,  on  l'inaugura  aux 
Tuileries  par  VErcole  Amante,  de  Cavalli,  représenté  à  propos  de 
la  paix  des  Pyrénées. 

Entre  16S3  et  1672  apparaît  le  «  surintendant  de  la  musique  du 
roi ,  »  composant  gigues ,  courantes ,  chaconnes ,  sarabandes  pour 
toutes  les  fêtes  et  tous  les  divertissements,  collaborant  avec  Ben- 
serade,  faisant  danser  Scaramouche  et  des  Matassins,  Polichinelle 
et  des  apothicaires. 

Nous  avons  nommé  LuUi. 

Nous  ne  redirons  pas  l'histoire  si  connue  de  ce  marmiton  floren- 
tin, qui  des  cuisines  de  Mlle  de  Montpensier  devint  chef  de  la 
bande  des  Petits  Violons  du  roi,  puis  s'empara  astucieusement,  en 
1672,  du  privilège  de  l'Opéra,  concédé  primitivement  à  Lambert, 
Sourdéal  et  Perrin.  On  connaît  cette  figure  où.  se  lisent  à  la  fois 
la  bassesse ,  la  ténacité  et  la  ruse.  Caractère  antipathique ,  nature 
servile  et  despotique;  il  faut  néamoins  savoir  gré  à  Lulli  de  l'im- 
pulsion qu'il  donna  à  la  musique,  à  une  époque  et  dans  un  pays 
qui  en  ignoraient  les  premiers  rudiments. 

Il  forma  le  premier  noyau  d'un  orchestre  digne  de  ce  nom ,  il 
créa  une  troupe  de  chanteurs,  assouplit,  par  sa  volonté  de  fer,  une 
bande  de  musiciens  ignares,  leur  fit  comprendre  ce  que  c'était  que 


l'intonation,  la  justesse,  le  rhythme,  l'ensemble  et  la  mesure.  C'est 
déjà  beaucoup. 

Les  remarquables  aptitudes  musicales  de  Lulli  n'avaient  été 
guère  fécondées  par  des  études  antérieures  aux  productions  qui  il- 
lustrèrent son  nom. 

L'instinct  seul  avait  été  son  guide.  Il  est  hors  de  doute  que 
YOrféo  de  Monteverde  et  le  Xercès  de  Cavalli,  auquel  il  adapta 
des  intermèdes,  turent,  avec  d'autres  œuvres  italiennes,  un  pré- 
cieux enseignement  pour  lui. 

Il  y  a  du  vrai  dans  la  mordante  oraison  funèbre  que  Sennecé 
consacra  à  Lulli  :  Orlando  Lassus  lui  reproche  aussi  l'usage  im- 
modéré de  la  septième,  la  dureté  de  certains  accords.  Vittorio  de 
Spoletto  blâme  la  monotonie  dégoûtante  des  récitatifs,  Luigi 
l'accuse  de  l'avoir  pillé,  et  Carissimi  lui  fait  grâce  des  accompagne- 
ments qu'il  lui  a  soustraits.  [ 

Du  reste,  l'examen  des  partitions  du  fameux  compositeur  indique, 
en  effet,  une  grande  faiblesse  dans  la  trame  harmonique.  Cette 
faiblesse  fut  rachetée  par  une  qualité  précieuse.  La  musique  de 
Lulli  chantait  et  possédait  surtout  le  cachet  scénique.  Il  était  d'une 
rigueur  extrême  pour  la  disposition  du  poëme  et  la  coupe  des 
morceaux. 

Certes,  eu  égard  aux  ténèbres  dont  on  sortait,  cette  musique 
était  une  merveille;  cette  association  des  sons,  du  chant,  de  l'har- 
monie, ou  drame  héroïque,  avec  le  concours  des  divertissements 
et  des  ballets  encadrés  dans  des  décors  où  tout  n'était  que 

festons  et  astragales, 

fait  assez  comprendre  ce  mot  de  Mme  de  Sévigné  :  a  .(e  ne  crois 
point  qu'il  y  ait  d'autre  musique  dans  le  ciel.  » 

Ce  sentiment  se  manifesta  d'abord,  comme  il  a  été  dit  plus  haut, 
dans  ses  ballets  et  intermèdes,  en  collaboration  d'abord  avec  Ben- 
serade,  puis  avec  Molière.  Avec  le  grand  comique  nous  le  voyons 
associé  dans  la  Princesse  d'Elide,  l'Amour  médecin,  le  Mariage  forcé, 
Pourceaugnac,  le  Bourgeois  gentilhomme,  le  Malade  imaginaire . 

Dans  les  Fâcheux,  Molière  indiquait  ainsi  l'ami  qui  devait  le 
spolier  plus  tard  : 

Baptiste,  le  très-cher, 

N'a  point  vu  ma  couranîe  et  je  vais  le  chercher. 

Enfin,   une  fois  maître  de  l'Opéra,  Lulli  s'attacha,  au  prix  de 
quatre  mille  livres  par  an,  un  collaborateur  qui  fut  un  vrai  créa- 
teur, un  allié  puissant  dont  la  poésie  devait  revivre  un  siècle  plus 
tard  sous  les  immortels  accents  de  Gluck. 
Quinault  fut  cet  allié. 

A.  THURNER. 
(La  suite  prochainement.) 


ETUDES  SUR  CHARLES-MÂRIE  DE  WEBER. 

D'après   la   biograplile   écrite   par   son  flis. 

TROISIÈME  PARTIE, 

(8«  article)  (1). 

Aucun  événement  important  ne  marqua  les  mois  qui  précé- 
dèrent l'apparition  du  Freischutz  sur  la  scène  de  Berlin. 

Dans  les  premiers  jours  de  mars,  M.  de  Briihl  avait  écrit  au 
maître  pour  le  consulter  sur  la  distribution  de  la  pièce  ;  Weber 
lui  ayant  répondu  que,  ne  connaissant  aucun  des  artistes  figurant 
dans  la  nouvelle  troupe,  il  s'en  remettait  entièrement  à  lui,  ce 


(1)  Voir  les  n«  18,  21,  23,  25,  28,  31  et  36. 


DE  PAKIS. 


307 


furent  Mme  Seidler  et  Mlle  Eunike,  toutes  deux  aimées  du  public, 
qu'il  désigna  pour  les  rôles  d'Agathe  et  d'Annette  ;  l'excellent  té- 
nor Stiimer  et  la  basse  Blume  furent  chargés  d'interpréter  Max  et 
Gaspard.  La  suite  prouva  que  ce  choix  était  bon,  car  chacun  se- 
conda vaillamment  le  maître  quand  le  jour  du  combat  fut  venu. 

L'ouverture  du  nouveau  théâtre  fut  fixée  définitivement  aux 
derniers  jours  de  mai.  Le  2  de  ce  mois,  Weber  et  sa  femme  quit- 
tèrent Dresde  ;  ils  arrivèrent  à  Berlin  le  4,  et  descendirent  clicz  les 
parents  de  Meyerbeer,  pour  lesquels  leur  séjour  dans  cette  ville 
fut  une  époque  de  fêtes.  Durant  ce  temps,  en  effet,  leur  maison  fut 
le  rendez-vous  de  toutes  les  notabilités  artistiques  de  Berlin. 

Les  répétitions  du  Freischutz  commencèrent  aussitôt  ;  Weber 
fut  satisfait  des  artistes,  notamment  de  la  gracieuse  et  espiègle 
Eunike,  pour  laquelle  il  écrivit  la  romance  :  Un  soir,  défunt  ma 
grand'lante,  et  l'air  qui  suit:  La  tristesse  qui  t'oppresse;  les  chœurs 
étaient  sus  et  marchaient  bien  ;  d'autre  part,  les  décors  étaient 
ébauchés  et  les  costumes  dessinés.  Le  premier  soin  de  Weber  fut 
de  se  mettre  en  rapport  avec  le  décorateur,  dont  les  paysages,  à 
son  point  de  vue,  manquaient  de  vie  ;  il  avait  effectivement  es- 
quissé de  belles  montagnes  bleues  et  de  beaux  sapins  noirs;  We- 
ber, lui,  voulait,  pour  la  scène  de  la  fonte  des  balles,  toute  l'hor- 
reur d'un  sabbat  :  «  Je  vous  demande,  disait-il  au  peintre,  qui 
comprendra  ma  musique  au  milieu  de  vos  collines  et  de  vos  sa- 
pins de  salon?  Faites-moi  donc  briller  les  yeux  des  hiboux,  voler 
des  chauves-souris,  et  faites-moi  surtout  apparaître  dans  votre  dé- 
cor des  spectres  et  des  squelettes  grimaçants  !  »  Quant  aux  cos- 
tumes, ils  le  satisfaisaient  moins  encore;  ils  étaient,  à  son  avis, 
beaucoup  trop  élégants;  mais  il  lui  fut  répondu  qu'on  ne  pouvait 
lui  donner  raison  sur  ce  point.  Par  contre,  Weber  déclara  que  la 
mise  en  scène,  modifiée  suivant  ses  indications,  était  la  meilleure 
qu'on  pût  désirer,  et  même  il  écrivit  a  M.  de  Kœnneritz,  à  Dresde, 
le  priant  d'envoycir  à  Berlin  le  machiniste  en  chef  et  le  régis- 
seur de  l'Opéra  pour  l'étudier. 

On  dut,  au  bout  de  peu  de  jours,  interrompre  l'étude  du  Freis- 
chutz, tout  le  personnel  du  théâtre  étant  requis  pour  VOli/mpie  de 
Spontini,  dont  la  représentation  s'annonçait  comme  magnifique. 
Spontini  occupait  depuis  quelques  années  un  poste  élevé  à  Berlin, 
celui  de  directeur  de  l'Opéra;  il  jouissait  de  la  faveur  toute  spé- 
ciale du  roi  et  ses  œuvres  étaient  tenues  en  haute  estime  à  la 
cour  et  dans  les  hautes  sphères  de  la  société.  Un  nouvel  opéra  de 
lui,  monté  avec  un  luxe  inusité,  dans  lequel  devait  chanter  la 
célèbre  Mme  Milder,  et  pour  lequel  on  avait  dépensé  des  sommes 
considérables,  était  donc  un  grand  événement,  qui  ne  laissait  pas 
d'inspirer,  hâtons-nous  de  le  dire,  des  craintes  sérieuses  et  légi- 
times au  parti  allemand,  qui  comprenait  les  académies ,  l'Univer- 
sité, la  bourgeoisie,  les  sociétés  de  musique,  mais  qui  ne  pouvait 
lutter  avec  avantage  contre  le  camp  opposé,  dont  chaque  tenant 
exerçait  sur  toutes  choses  une  certaine  influence.  Olympie  fut 
donc  représentée  avec  une  pompe  qu'on  n'avait  déployée  jusqu'a- 
lors pour  aucun  autre  ouvrage;  la  valeur  de  la  musique  s'accrut 
encore  de  ces  splendeurs  ;  aussi  le  succès  fut-il  complet.  Malheu- 
reusement, il  ne  se  soutint  pas  ;  le  mérite  incontestable  de  l'œuvre 
demeura  reconnu  comme  il  convenait,  mais  l'engouement  qu'elle 
avait  provoqué  à  son  apparition  s'éteignit.  Olympie ,  quoique  re- 
prise dans  la  suite  avec  éclat  et  demeurée  au  répertoire  de  toutes 
les  scènes  allemandes,  disparut  toujours  de  l'affiche  au  bout  de 
peu  de  représentations. 

On  se  remit  aussitôt  à  l'étude  du  Freischutz.  Les  répétitions  à 
l'orchestre  se  succédèrent  avec  rapidité,  au  milieu  d'un  enthou- 
siasme toujours  croissant.  Il  n'y  en  eut  pas  moins  de  seize ,  dont 
quatre  générales,  qui  furent  de  véritables  représentations.  Pendant 
le  cours  de  ces  études,  Weber  fit  divers  changements  à  sa  parti- 
tion; c'est  ainsi  que  le  dernier  finale  ne  reçut  sa  forme  actuelle 


qu'après  les  premières  répétitions;  de  même,  il  remania  l'entr'acte 
qui  suit  la  scène  de  la  fonte  des  balles.  L'activité  déployée  par  We- 
ber durant  cette  période  tient  du  prodige  ;  il  trouva  le  temps,  au 
milieu  des  occupations  et  des  préoccupations  qui  l'assaillaient  de 
toutes  parts,  de  travailler  à  son  Concertstuck.  Ce  célèbre  morceau, 
qui  est  l'un  des  beaux  fleurons  de  sa  couronne  de  maître,  fut  ter- 
miné le  matin  même  du  jour  oii  le  Freischutz  fut  représenté  pour 
la  première  fois  ;  Weber  en  apporta  les  feuillets  encore  humides 
dans  le  salon  où  se  trouvait  son  élève  Bénédict  ;  il  se  mit  au  piano 
et  joua  son  Concertstuck,  dont  il  traçait  en  même  temps  le  pro- 
gramme. Bénédict  nota  de  souvenir  ce  programme ,  mais ,  quoi 
qu'il  fît,  Weber  ne  voulut  pas  consentir  à  le  laisser  imprimer 
en  tête  de  l'œuvre.  Il  l'a  été  depuis,  d'après  Max  de  Weber, 
auquel  Bénédict  le  communiqua  dans  la  suite;  toutefois  nous 
croyons  devoir  le  reproduire  ici,  en  raison  de  la  célébrité  de  cette 
belle  page  :  «  La  châtelaine  est  à  son  balcon.  —  Elle  interroge 
tristement  l'horizon.  —  Son  époux  est  parti  depuis  longtemps  pour 
la  terre  sainte.  —  Le  reverra-t-elle  jamais  ?  —  De  sanglants  com- 
bats ont  eu  lieu.  —  Et  aucun  message  de  lui!  —  En  vain,  elle 
prie  Dieu.  —  Soudain,  un  affreux  tableau  se  présente  à  son  esprit 
halluciné:  —  son  époux  est  étendu  sur  le  champ  de  bataille, 
abandonné  des  siens;  —  le  sang  coule  à  flots  de  sa  blessure.  — 
Ah!  que  n'est-elle  à  ses  côtés!  —  Mais  la  scène  change,  écoutez  : 
quel  est  ce  bruit  dans  le  lointain  ?  —  Des  armures  brillent  sur  la 
lisière  de  la  forêt;  —  des  bannières  flottent  au  vent.  —  A  leur 
tête  ;  c'est  lui  !  —  Elle  vole  au-devant  de  son  bien-aimé  ;  —  il  se 
précipite  dans  ses  bras  ;  —  quels  élans  d'amour  !  —  quelle  joie  ! 
—  Comme  tout  frissonne  dans  les  bois  et  dans  les  blés,  et  pro- 
clame par  mille  voix  l'éloge  de  l'amour  fidèle.  » 

Enfin  le  18  juin,  jour  fixé  pour  la  première  représentation  du 
Freischutz,  était  arrivé.  Bien  longtemps  avant  l'heure  où  de- 
vait commencer  le  spectacle,  la  foule  assiégeait  les  issues  du  théâ- 
tre; quand  on  ouvrit  les  portes,  la  salle  fut  prise  d'assaut,  au  point 
qu'on  eut  à  déplorer  plusieurs  accidents;  la  jeunesse,  qui  formait 
le  camp  de  l'opposition,  remplissait  le  parterre  ;  les  autorités  des 
cercles  .littéraires  et  artistiques,  ainsi  que  les  gens  de  la  haute 
fashion  occupaient  les  stalles  et  les  loges.  Peu  de  hauts  fonction- 
naires, peu  d'uniformes  prirent  leurs  places  à  l'orchestre.  Les 
musiciens  commencèrent  à  s'accorder.  Pendant  ce  temps,  la  foule 
discutait,  avec  un  bruit  croissant,  des  chances  de  la  bataille  qui 
allait  se  livrer.  Soudain  des  bravos  retentirent  à  l'orchestre; 
Weber  venait  d'y  faire  son  entrée  parmi  les  musiciens.  Aussitôt, 
toute  la  salle  éclata  en  applaudissements  frénétiques.  Trois  fois 
Weber  dut  poser  son  bâton  de  mesure  pour  saluer  avant  de  don- 
ner le  signal  de  l'attaque.  Puis,  un  silence  religieux  se  fit  dans 
l'assemblée,  et  l'ouverture  se  déroula  dans  toute  la  majesté  de  son 
irrésistible  attraction.  Elle  produisit  un  effet  immense;  la  foule 
était  sous  le  charme  d'un  sentiment  indéfinissable;  elle  écoutait 
recueillie;  mais  quand,  après  les  coups  de  timbale  sourds  et  ter- 
rifiants, dont  l'effet  est  si  saisissant,  vint  le  vigoureux  accord  qui 
ouvre  la  péroraison  ardente  et  joyeuse  du  morceau,  un  tel  enthou- 
siasme éclata  dans  la  salle,  un  bis  tellement  unanime  retentit,  que 
l'ouverture  dut  être  répétée;  la  seconde  fois,  le  succès  fut  plus 
grand  encore  qu'à  la  première.  Alors  la  toile  se  leva  sur  le  décor 
de  l'auberge  dans  la  forêt.  La  première  scène ,  enlevée  avec  feu, 
produisit  un  eft'et  extraordinaire  ;  l'air  de  Kilian  et  le  chœur  du 
Rire  ne  reçurent  pas  un  accueil  aussi  enthousiaste;  le  trio  qui  suit 
reconquit  la  faveur  du  public,  surtout  à  la  phrase  :  Ah  !  renais  à 
l'espérance,  déjà  entendue  dans  l'ouverture.  Puis  vint  le  Sonnez, 
cors  joijeux,  dans  la  plaine,  puis  la  valse.  Mais  la  scène  s'obscur- 
cit :  l'air  de  Max  : 

Ah  !  trop  longtemps  de  mes  souffrances 

J'ai  dû  subir  l'horrible  loi  ! 


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REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


absorba  tellement  l'attention  de  l'auditoire  que  l'allégro  suivant  : 

Frais  vallons,  bois,  forêts  sombres, 

passa  presque  inaperçu.  Le  reste  de  l'acte  s'en  ressentit;  la  chan- 
son à  boire  de  Gaspard,  qui  était  écrite  en  dehors  de  toutes  les 
formes  adoptées,  ne  fut  pas  comprise.  Bref,  la  toile  tomba  silen- 
cieusement sur  le  premier  acte,  et  pendant  l'entr'acte,  qui  l'ut  long, 
des  discussions  s'élevèrent  de  tous  côtés.  Dans  la  salle  dominaient 
encore  nombre  de  voix  querelleuses,  lorsque  le  maître  reparut  à  sa 
place.  Le  rideau  se  leva  sur  le  second  acte.  Une  salve  d'applaudis- 
sements salua  l'apparition  d'Agathe  et  d'Annette.  Le  duo  et  sur- 
tout l'ariette  si  fraîche  d'Annette  :  Qu'un  garçon  jeune  et  candide, 
furent  applaudis.  Ce  fut  durant  la  grande  scène  d'Agathe,  Sans 
le  revoir  encor,  faut-il  fermer  les  yeux,  que  le  public  se  sentit 
enlevé,  enthousiasmé.  A  ce  moment,  toute  opposition  disparut. 

Surpris,  charmés,  les  plus  implacables  antagonistes  de  Weber 
subissaient  l'entraînement  général.  Ils  applaudissaient.  Dès  lors, 
la  réussite  de  l'ouvrage  était  assurée.  Le  trio  qui  suit  fut  écouté 
religieusement,  et  la  scène  de  la  Gorge-aux-Loups,  avec  ses  appari- 
tions et  son  décor  sauvage,  termina  triomphalement  le  second 
acte.  Si  le  tumulte  avait  été  grand  après  le  premier,  il  fut  plus 
grand  encore  à  ce  moment.  Mais  quel  autre  caractère  avaient  re- 
vêtu les  cris.  «  C'est  admirable!  c'est  délicieux!  c'est  parfait!  » 
s'écriait-on  de  toutes  parts.  Pendant  ce  temps,  Weber  s'était 
glissé  dans  sa  loge,  et  tenait  pressée  sur  ses  lèvres  la  main  de 
Caroline;  tous  deux  pleuraient... 

On  commença  le  troisième  acte.  La  prière  et  ensuite  la  ro- 
mance d'Annette  furent  applaudies;  la  ronde  fut  redemandée;  le 
chœur  des  chasseurs  obtint  un  moindre  succès;  le  public  ne  s'i- 
dentifia complètement  avec  ce  morceau  que  vers  la  dixième  re- 
présentation. Mais  le  prince  Ottokar  a  donné  le  signal  du  tir,  et 
le  délicieux  finale  se  déroulant,  quoiqu'un  peu  froidement  en  com- 
paraison de  l'elfervescence  qui  avait  accueilli  les  autres  morceaux, 
couronna  glorieusement  cette  mémorable  soirée. 

Le  maître,  acclama,  parut  donnant  la  main  à  Mmes  Seidler  et 
Eunike.  Des  couronnes,  des  bouquets  tombèrent  à  ses  pieds.  Quant 
aux  applaudissements,  ils  ne  paraissaient  pas  devoir  prendre  de 
fin. 

En  rentrant  chez  lui,  Weber  nota  dans  son  agenda  :  «  Ce  soir 
première  représentation  du  Freischutz — accueilli  avec  un  enthou- 
siasme incroyable.  L'ouverture  et  la  chanson  populaire  redeman- 
dées ;  sur  dix-sept  morceaux,  quatorze  applaudis  à  outrance.  Tout 
pour  le  mieux;  rappelé,  je  vins  saluer  en  compagnie  de  Mme 
Seidler  et  de  Mlle  Eunike,  attendu  que  je  ne  pouvais  trouver  les 
autres.  Des  vers  et  des  couronnes  sont  tombés  à  mes  pieds.  Soli 
Deo  gloria.  » 

Edmond  NEUKOMM. 
{La  suite  prochainement.) 


REVUE  DES  THEATRES. 

Théâtre-Français  :  A  deux  de  jeu,  comédie  en  un  acte,  par 
M.  El  iiest  Legouvé.  —  Variétés  :  io  Permission  de  minuit, 
tableau  militaire,  par  MM.  Jules  Moineaux  et  Charles  Dupeuty. 
—  Pai,  us-RoYAL  :  Paris  ventre  à  terre,  pièce  fantaisiste  en  trois 
actes,  par  MM.  Théodore  Barrière  et  Léopold  Stapleaux.  — 
Gaité  :  Nos  Enfants,  drame  en  cinq  actes  et  dix  tableaux,  par 
M.  Ernest  Rasetti. 

La  petite  pièce  que  le  Théâtre-Français  a  donnée  récemment 
sous  le  titre  de  :  A  deux  de  jeu  est  moins  une  comédie  qu'un 
proverbe.  Tout,  jusqu'à  son  titre,  la  classe  dans  la  catégorie  de 
ces  esquisses  légères  qui ,   bâties  sur  la  pointe  d'une  aiguille,  ne 


sont  maintenues  en  équilibre  que  par  l'adresse  de  leurs  inter- 
prètes. 

Une  grande  dame,  une  marquise,  s'est  laissée  séduire,  comme 
une  simple  mortelle,  par  les  dehors  charmants  d'un  jeune  roturier 
qui  tient  tout  vulgairement  la  caisse  d'une  maison  de  banque.  Il 
est  résulté  de  cette  intrigue  clandestine  un  échange  de  lettres  fort 
compromettantes  pour  la  marquise.  Or,  un  soir  que  notre  grande 
dame  se  prépare  à  aller  au  bal,  un  monsieur  se  présente  avec  un 
petit  paquet  et  lui  apprend  que  le  jeune  caissier,  entraîné  par 
sa  passion  pour  elle,  a  fait  des  emprunts  forcés  à  son  banquier, 
et  qu'obligé  de  s'enfuir  il  a  songé  à  lui  renvoyer  sa  périlleuse 
correspondance.  Mais  le  monsieur,  offusqué  des  airs  délibérés  de 
la  marquise,  refuse  d'accomplir  sa  mission,  et  menace  de  divulguer 
ces  lettres  d'amour.  Alors  commence  une  lutte  entre  la  grande 
dame  et  l'inconnu  qui  finit  par  se  laisser  convaincre  et  par  jeter 
les  lettres  au  feu.  C'est  là  que  la  marquise  l'attendait  ;  elle  relève 
la  tête  avec  insolence  et  l'accable  de  sarcasmes.  Mais  le  monsieur 
prend  immédiatement  sa  revanche,  en  faisant  savoir  à  la  grande 
dame  qu'il  est  le  frère  du  caissier,  que  toute  cette  histoire  de 
détournement  d'espèces  est  de  pure  invention,  que  le  jeune  fou 
refusait  un  riche  mariage  pour  rester  fidèle  à  sa  belle  maîtresse, 
et  que,  désormais  édifié  sur  son  compte,  par  la  petite  scène  dans 
laquelle  elle  vient  de  jouer  un  si  triste  riMe,  il  ne  peut  manquer 
de  redevenir  raisonnable  et  d'accepter  l'union  qu'on  lui  propose. 

Cette  bluette  est  signée  d'un  académicien  dont  Irs  lauriers  n'en 
seront  pas  reverdis.  Le  succès  en  est  dû  tout  entier  à  Mme  Arnoult- 
Plessy  et  à  Febvre,  qui  y  font  preuve  tous  les  deux  d'un  talent 
incontestable. 

—  Les  Variétés  sont  dans  une  bonne  veine  et  peuvent  attendre 
la  renti'ée  d'Oflenbach,  dont  la  Périchole  est  en  pleines  répétitions 
et  promet  au  maestro  un  nouveau  et  brillant  triomphe.  Aux 
Chambres  de  Bonnes  qui  sont  le  principal  atirait  du  spectacle  quo- 
tidien, on  vient  d'adjoindre  un  petit  acte  sans  prétention,  intitulé 
la  Permission  de  minuit.  C'est  un  tableau  militaire  oîi  le  rire  est 
produit  par  le  contraste  d'un  long  tanibour-inajor  qui  est  sur  le 
point  de  s'unir  à  une  toute  petite  repasseuse,  frêle  et  délicate, 
tandis  qu'un  embryon  de  trombone  de  cavalerie  a  pour  prétendue 
une  gaillarde  solidement  découplée  et  d'allures  masculines.  A  la 
faveur  d'une  Permission  de  minuit,  nos  deux  troupiers  s'aperçoivent 
qu'ils  ont  fait  fausse  route  et  ils  troquent  gaiement  leurs  amou- 
reuses. Baron  et  Aurèle  ont  tout  à  fait  les  qualités  spéciales  de 
leurs  rôles  ;  Mlle  Julia  est  très-gentille,  et  Mlle  Silly  n'a  recours 
cette  fois  à  aucune  excentricité  d'un  goût  douteux  pour  dérider 
le  public. 

—  Le  théâtre  du  Palais-Royal  nous  a  déjà  montré  la  Vie  pari- 
sienne dans  ce  qu'elle  a  de  plus  amusant  et  de  plus  original. 
L'odyssée  de  ce  baron  suédois  à  travers  le  monde  des  cocottes  et 
des  petits  crevés  ne  visait  pas  d'ailleurs  à  l'enseignement  philoso- 
phique, et  les  refrains  d'Offenbach  n'avaient  d'autre  prétention  que 
celle  de  devenir  populaires.  C'est  ce  qui  a  sans  doute  décidé  ce 
théâtre  à  reprendre  en  sous-œuvre  la  donnée  de  MM.  Meilhac  et 
Ludovic  Halévy  sous  un  aspect  nouveau,  dont  l'idée  première  est 
à  coup  sûr  fort  ingénieuse  et  fort  piquante.  Paris  ventre  à  terre, 
c'est  l'existence  fiévreuse  que  l'on  mène  aujourd'hui  dans  cette 
capitale  de  l'univers  civilisé,  où  le  tourbillon  des  affaires  et  des 
plaisirs  vous  emporte  sans  vous  laisser  le  temps  de  vous  recon- 
naître. Par  ce  temps  de  chemins  de  fer,  c'est  ce  qu'on  peut  appe- 
ler vivre  à  la  vapeur,  dans  le  vertige  d'un  train-express.  Il  y  a  là 
un  bon  point  de  départ;  reste  à  savoir  où  il  nous  conduit. 

Un  jeune  cocodès,  riche  à  millions,  arrive  de  Carpentras  avec 
son  vieil  oncle  pour  goûter  des  plaisirs  de  Paris,  absolument 
comme  le  baron  suédois  de  la  Vie  parisienne.  Au  débotté,  nos 
deux  provinciaux  tombent  entre   les    mains  d'un  Mentor,  moins 


DE  PAIUS. 


309 


plein  d'années  que  d'expérience  pratique,  et  les  voilà  lancés  dans 
le  mouvement.  En  quelques  heures,  le  petit  comte  de  Verasoy, 
grâce  à  la  tutelle  de  son  nouvel  ami  Follebraise,  se  trouve  à  la 
tête  d'une  maison  montée  et  d'une  maîtresse  admirable,  qui  ne  met 
pas  plus  de  quelques  minutes  à  le  trahir.  Il  s'en  console  bien  vite 
en  ébauchant  un  mariage  avec  une  jolie  veuve  qu'il  a  rencontrée 
dans  un  magasin  quelconque.  Mais  Follebraise  l'entraîne  au  bal, 
et  il  y  fait  la  connaissance  de  Mlle  Cléopâtre,  jeune  ingénue,  dont 
la  famille  est  aussi  dans  le  mouvement  jusqu'au  cou.  Affolé  des 
charmes  naïfs  de  Mlle  Cléopâtre,  il  charge  son  oncle,  le  chevalier 
de  Pontcassé,  de  défaire  son  mariage  avec  la  veuve  pour  lui  per- 
mettre d'aspirer  à  l'alliance  des  Beaucornet.  Tout  se  décide  entre 
dpux  contredanses  et  l'on  cherche  dans  le  bal  un  notaire  pour 
dresser  le  contrat.  Seulement,  comme  le  père  Beaucornet,  un  sa- 
vant assez  distrait  de  sa  nature,  a  promis  la  main  de  sa  hlle  à 
trois  personnes  à  la  fois,  il  faut  que  le  comte  de  Verasoy  se  résigne 
à  prendre  son  tour,  ce  qui,  du  reste,  ne  peut  pas  le  retarder 
beaucoup.  En  effet,  les  deux  premiers  prétendants  se  retirent  l'un 
après  l'autre  et  laissent  le  champ  libre  au  comte  de  Verasoy,  pen- 
dant que  l'innocente  fiancée  se  fait  enlever  par  son  maître  de  piano . 
En  fin  de  compte,  elle  est  ramenée  à  temps  pour  signer  son  con- 
trat, qui  la  rend  millionnaire  et  comtesse. 

Cette  comédie  fantaisiste,  comme  dit  l'afTiche,  commence  bien, 
mais  finit  mal.  Le  troisième  acte  est  complètement  manqué;  le 
premier  soir,  il  s'est  terminé  au  bruit  des  sifflets.  Et  ce  n'est  certes 
pas  la  faute  des  acteurs ,  qui  ont  tenté  l'impossible  pour  conjurer 
l'orage.  Or,  il  faut  qu'une  pièce  soit  bien  malade  pour  ne  pas  être 
sauvée  par  une  réunion  d'artistes  tels  que  Geoffroy,  Gil  Pérès,  Lhé- 
ritier,  Priston,  Lassouche,  Mlles  Alphonsine  et  Worms. 

—  La  Gaîté  vient  d'inaugurer  sa  saison  d'hiver  par  un  drame 
intitulé  Nos  Enfants.  Ce  n'est  pas,  comme  on  pourrait  le  croire, 
une  étude  de  mœurs  dans  le  genre  de  A' os  Intimes;  c'est,  au  con- 
traire, une  exception,  qui  a  le  tort  d  être  présentée  comme  une 
généralité.  Tous  nos  garçons,  par  bonheur,  ne  volent  pas  notre 
coffre-fort,  et  toutes  nos  filles  ne  se  laissent  pas  séduire  par  un 
beau  vicomte. 

Dégagé  de  ses  prétentions  dogmatiques,  le  drame  de  M.  Rasetti 
n'est  pas  absolument  sans  intérêt,  mais  il  est  un  peu  vulgaire.  Le 
fils  du  comte  des  Haumes,  après  avoir  rendu  mère  la  fille  d'un 
vieillard  attaché  à  la  maison,  s'est  jeté  dans  la  débauche  et,  pour 
subvenir  aux  dépenses  de  ses  maîtresses,  il  dérobe  les  bijoux  de 
sa  mère,  de  complicité  avec  le  fils  de  son  portier.  Certains  indices 
incriminent  Marguerite,  la  fille  séduite;  aussi,  lorsque  son  brave 
homme  de  père  vient  demander  une  réparation  à  la  famille  des 
Haumes  :  «  On  n'épouse  pas  une  voleuse,  »  lui  est-il  répondu.  Cepen- 
dant, le  complice  du  vicomte  Lucien  est  peu  à  peu  amené  à  faire 
des  aveux.  Alors,  la  situation  change  de  face;  le  comte  des  Hau- 
mes, transformé  par  la  honte  et  par  le  malheur,  se  présente  hum- 
blement devant  le  père  Giraud  et  lui  demande,  pour  son  fils,  la 
main  de  Marguerite.  Celle-  ci  a  réfléchi  ;  indignée,  d'une  part,  de 
la  conduite  de  son  séducteur,  et  touchée,  d'autre  part,  de  l'Bmour 
discret  d'un. jeune  artisan,  qui  consent  à  l'épouser  malgré  sa  faute, 
elle  refuse  l'alliance  de  la  noble  famille,  et  devient  la  femme  de 
l'ouA  rier. 

Cette  analyse  succincte  ne  nous  a  pas  permis  de  faire  ressortir 
le  rôle  du  père  Giraud,  non  plus  que  celui  d'un  enfant  terrible 
appartenant  au  comte  des  Haumes;  ce  sont  néanmoins  les  deux 
principaux  sujets  d'atlraction  ,de  ce  drame ,  si  le  public  se  décide 
à  l'adopter.  Le  père  Giraud  est  joué  par  Lesueur,  comédien  fort 
inégal,  dont  la  mémoire  est  trop  souvent  rebelle ,  mais  qui ,  en 
somme,  est  de  bonne  race.  H  a  des  éclairs  de  talent  qu'il  serait 
injuste  de  méconnaître,  notamment  dans  la  scène  où  il  plaide  en 
faveur  de  sa  fille.  Quant  au  petit  Toto,  c'est  Fanfan  Benoiton  qui 


le  joue  et  qui  s'en  acquitte  avec  l'intelligence  (]u'on  lui  connaît  et 
que  le  Vaudeville  a  mise  en  relief.  Les  autres  personnages  sont 
très-convenablement  interprétés  par  Lacressonnière ,  Charles  Le- 
maître,  Alexandre,  Lacroix,  Mlle  Raucourt  et  Mme  Juliette  Cla- 
rence. 

D.  A.  D.  SAINT-YVES. 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 

:^*^  Le  théâtre  impérial  de  l'Opéra  a  joué  lundi  et  mercredi  Hamlet, 
et  vendredi  l'Africaine.  —  Aujourd'hui,  représentation  extraordinaire  : 
la  Juive. 

***  La  représentation  de  l'Africaine  donnée  dimanche  dernier  par 
extraordinaire  a  fait  salle  comble.  Aussi  la  direction  de  l'Opéra  s'est- 
elle  empressée  de  la  jouer  de  aussi  vendredi  et  le  public  y 
est  de  nouveau  accouru  en  foule.  Depuis  quelque  temps  on 
n'avait  pas  entendu  ces  admirables  mélodies  de  Meyerbeer,  qui  ont  le 
privilège  de  passionner  à  la  centième  comme  à  la  première  audition. 
Aussi  il  fallait  voir  l'attention  avec  laquelle  ce  public  du  dimanche 
les  écoutait,  avec  quel  enthousiasme  il  les  applaudissait  !  Ce  n'était  pas  là 
pourtant  une  reprise  annoncée  avec  grand  fracas,  c'était  pour  ainsi  dire 
une  représentation  improvisée;  mais  quelle  glorification  nouvelle  elle  a 
offerte  du  génie  du  maître!  Il  est  vrai  de  dire  que  la  créatrice  sans  pa- 
reille du  rôle  de  Sélika  s'est  surpassée;  d'un  bout  à  l'autre  elle  a  été 
admirable.  On  aurait  pu  désirer  auprès  d'elle  un  plus  grand  nombre  des 
interprètes  qui  la  secondaient  à  l'origine,  mais  seule  elle  suffirait  encore 
à  porter  le  poids  de  cette  œuvre  gigantesque.  La  berceuse,  l'immortel 
duo  du  quatrième  acte  et  l'air  du  Manceniîlier  ont  été  pour  Marie  Sass 
l'objet  des  bravos  et  des  rappels  les  plus  enthousiastes.  Inutile  d'ajouter 
que  la  célèbre  ritournelle  du  cinquième  acte  a  été  redemandée  avec  accla- 
mation. 

**4  La  distribution  définitive  des  rôles  aux  artistes  qui  doivent  inter- 
préter la  reprise  des  Huguenots  a  été  arrêtée  comme  suit  :  Villaret  (Raoul), 
Faure  (Nevers),  Belval  (Marcel),  David  (Saint-Bris),  Caron  (Thoré),  Grisy 
(Tavannes),  Kœnig  (Cessé),  Mlle  Hisson  (Valentine),  Marie  Battu  (Margue- 
rite), Levielli  (le  page  Urbain).  —  Cette  reprise  à  laquelle  la  direction 
apporte  les  soins  les  plus  méticuleux  ne  pourra  guère,  précisément  par 
cette  raison,  avoir  lieu  avant  la  fm  d'octobre. 

**^  La  reprise  du  Premier  jour  de  bonheur  avait  samedi  rempli  la 
salle  de  l'Opéra-Comique  ;  malgré  le  service  fait  à  la  presse,  la  recette 
a  presque  atteint  6,000  francs.  —  On  attendait  le  comte  et  la  comtesse 
Girgenti  ;  mais  la  loge  impériale  disposée  pour  les  recevoir  n'a  pas  été 
occupée.  —  La  distribu*.ion  de  l'opéra  d'Auber  n'avait  subi  de  modifica- 
tion que  dans  le  remplacement  de  Mlle  Roze,  qui  a  quitté  le  théâtre  de 
la  rue  Favart  pour  continuer  plus  sérieusement  encore  ses  études  du 
chaut  sous  la  direction  de  M.  Wartel.  —  Les  artistes  ont  lutté  de  zèle  et 
de  talent  pour  donner  à  la  réapparition  de  l'œuvre  du  grand  compositeur 
lout  l'éclat  qu'elle  comportait,  et  ils  n'ont  pas  failli  à  cette  tâche.  — 
Capoul  s'est  voué  corps  et  âme  à  une  création  qui  comptera  dans  sa  vie 
d'artiste;  il  a  fanatisé  l'auditoire,  qui  l'a  applaudi,  rappelé  avec  enthou- 
siasme, et  lui  a  fait  répéter  la  romance  du  premier  acte  et  le  brindisi 
du  second.  —  Quoique  souffrante,  Mme  Cabel  n'a  jamais  mieux  chanté, 
et,  après  son  air  du  second  acte,  plusieurs  bouquets  sont  tombés  à  ses 
pieds.  —  L'intérêt  de  la  soirée  se  concentrait  surtout  sur  la  débutante,  à 
laquelle  échéait  la  tâche  difficile  de  remplacer  Mlle  Marie  Roze.  Disons 
de  suite  que  la  direction  a  eu  la  main  heureuse  en  arrêtant  son  choix 
sur  Mlle  Gabrielle  Moisset  qui,  après  de  consciencieuses  études,  a  obtenu 
un  premier  prix  aux  derniers  concours  du  Conservatoire.  Si  Mlle  Roze 
était  une  charmante  blonde,  Mlle  Moisset  est  une  fort  jolie  brune,  dont 
l'entrée  a  tout  d'abord  impressionné  favorablement  le  public.  Sans  doute 
elle  n'a  pas  les  dehors  chastes  et  candides  qui  étaient  une  des  grandes 
séductions  de  sa  devancière,  mais  elle  a  plus  qu'elle  le  type  oriental  de 
la  prêtresse  d'Indra.  Quant  à  son  talent  de  cantatrice,  il  faut  tenir  compte 
de  l'émotion  qui  la  serrait  en  paraissant  pour  la  première  fois  sur  la 
scène,  émotion  malgré  laquelle  on  a  pu  apprécier  un  timbre  de  voix 
des  plus  agréables,  une  diction  intelligente,  de  l'art  et  du  sentiment;  ses 
gestes,  sa  démarche,  ont  été  naturels,  et  il  a  été  facile  de  reconnaître  dans 
ces  qualités  les  soins  de  son  excellent  professeur,  M.  Mocker.  —  La 
célèbre  chanson  des  Djinns,  empreinte  d'une  si  douce  langueur,  a  été  un 
grand  succès  pour  Mlle  Moisset,  qui  a  dû  la  répéter  aux  acclamations 
de  la  salle  entière  ;  elle  n'a  pas  moins  bien  dit  sa  partie  dans  le  nocturne 
à  deux  voix  qu'elle  chante  au  troisième  acte  avec  Mme  Cabel;  l'union 
de  leurs  deux  voix  a  causé  une  vive  impression.  —  Mlle  Moisset  est  donc 
désormais  adoptée,  et  du  Premier  Jour  de  bonheur  datera  pour  elle  un 
premier  jour  de  triomphe. 

,*„  Les  trois  représentations  du  Premier  Jour  de  bonheur  données  cette 
semaine  n'avaient  pas  attiré  moins  de  monde  que  celle  de  samedi  ;  la 


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REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


recette  s'e.=t  tenue  à  7,000  francs.  —  Elles  ont  confirmé  pleinement  le 
succès  obtenu  par  Mlle  Moisset. 

:«•«  C'est  jeudi  prochain  qu'a  lieu  la  réouverlure  du  théâtre  italien, 
dans  les  excellentes  conditions  que  nous  avons  signalées.  La  Lucia,  inter- 
prétée par  Mme  Adelina  Patti,  Fraschini,  Verger  et  Agnesi,  inaugurera 
dignement  la  saison. 

t*^  C'est  aujourd'hui  même  que  Mme  Adelina  Patti  revient  à  Paris. 
Elle  a  terminé  ses  représentations  à  Hombourg,  mardi  dernier  22,  par  la 
Sonnambula.  C'était  sa  treizième  représentation,  et  le  treizième  opéra 
qu'elle  jouait  à  ce  théâtre  en  cinq  semaines.  —  Avant  de  quitter  Hom- 
bourg, Mme  Adelina  Patti  a  contracté  un  nouvel  engagement  avec  la 
direction  du  théâtre  italien  de  cette  ville  pour  une  série  de  quatorze 
représentations,  du  7  août  au  21  septembre  1869. 

,*^  Aux  engagements  déjà  faits  par  M.  Pasdeloup  pour  le  théâtre  Ly- 
rique, et  que  nous  avons  mentionnés  dans  notre  dernier  numéro,  il  nous  faut 
ajouter  ceux  de  MM.  Bosquin,  Coëlho,  Verdellet,  Berti ,  ténors  ;  Lutz,  Meillet, 
Caillot,  A ubéry,  Geraizer,  Labat,  Wartelet  Gabriel,  barytons  et  basses,  etc. 
M.  Pasdeloup  s'est  attaché  comme  accompagnateur  M.  Hector  Salomon,  qui 
remplissait  les  mêmes  fonctions  sous  la  direction  précédente.  —  Les  chœurs 
sont  renforcés. —  De  nouveaux  engagements  sont  encore  projetés.— MM.  Man- 
gin  etVandenheuvel  alterneront  au  pupitrcduchef  d'orchestre.— L'organi- 
sation administrative  est  complète.  —  Les  répétitions  du  Fa(  d'Andorre, 
du  JBarbinr  et  de  Don  Juan  vont  se  poursuivre  activement  sous  la  haute 
direction  musicale  et  scénique  de  MM.  Pasdeloup  et  Vizentini,  régisseur 
général.  Tant  et  de  si  intelligents  elïorts  méritent  d'être  couronnés  de 
succès.  Nul  doute  que  la  réouverture  du  théâtre  Lyrique  (sa  date  n'est 
pas  encore  fixée)  ne  soit  des  plus  brillantes. 

^\  Ainsi  qu'il  l'avait  annoncé,  le  théâtre  des  Fantaisies-Parisiennes  a 
fait  exactement  sa  réouverture,  hier  soir,  par  le  Barbier  de  Sèvillc,  de 
Paësiello,  son  succès  de  l'an  passé.  Nous  reparlerons  de  cette  soirée,  qui 
a  servi  de  début  à  plusieurs  artistes. 

»%  MM.  H.  Lefebvre,  Bouvier  et  Frédéric  Barbier  viennent  de  lire  aux 
Fantaisies-Parisiennes  un  opéra-comique  en  un  acte  ayant  pour  titre  : 
Gervaise.  Les  rôles  de  cet  ouvrage  ont  été  distribués  à  MM.  Barnolt,  Da- 
voust,  Mmes  Decroix  et  Auclaire. 

„,%  Les  nouveaux  Bouffes-Parisiens  doivent  inaugurer  leur  campagne 
d'hiver  mercredi  prochain.  En  même  temps  que  la  salle  a  subi  une  res- 
tauration complète  de  bon  goût,  des  améliorations  notables  ont  été  appor- 
tées dans  le  service  de  la  scène.  La  troupe  se  compose  de  plus  de  qua- 
rante artistes,  à  la  tête  desquels  on  compte  Mmes  Schneider,  Thierret, 
Mlle  Deneux,  MM.  Désiré,  Berthelier,  Bonnet,  Nathan,  Aurèle,  Gil- 
bert, Petit,  etc.  —  L'orchestre,  de  32  musiciens,  est  dirigé  par  M.  Jacobi, 
et  30  choristes  sont  placés  sous  la  conduite  de  M.  Emmelin. — Le  spectacle 
d'ouverture  se  composera  de  deux  pièces  d'Offenbach,  très-heureux,  dit- 
on,  du  réveil  de  son  ancien  théâtre  :  le  Soldai  magicien,  livret  de  AIM.  iNuit- 
ter  et  Tréfeu,  et  une  nouvelle  pièce  de  M.M.  Chirot  et  Duru,qui  attend  en- 
core son  titre  définitif.  L'Arche  Marion,  de  MM.  Albéric  Second  et  Nibelle, 
et  les  Deux  Vieilles  Gardes,  de  Léo  Delibes,  compléteront  le  programme 
de  cette  intéressante  soirée. 

^•^  Le  théâtre  de  l'Athénée  a  donné  jeudi  la  100"  représentation  de 
Fleur  de  Thé.  —  Vers  la  fin  de  la  semaine  le  Petit  Poucet,  de  MM.  Van- 
loo  et  Leterrier,  musique  de  Laurent  de  Rillé,  sur  lequel  la  direction 
compte  beaucoup,  fera  son  apparition  accompagné  d'un  acte  de  M.  Darcy  : 
les  Bons  Principes,  dans  lequel  débutera  M.  Duchesne,  ex-arliste  des 
Bouffes. 

j,%  Les  répétitions,  à  l'orchestre,  'de  la  Perichole  ont  commencé  au 
théâtre  des  Variétés.  Voici  la  distribution  définitive  des  rôles:  MM.  Du- 
puis  (Piquillo),  Grenier  (don  Andrès),  Christian  (Panatellas),  Lecomte 
(don  Pedro),  Blondelet  (Tarapote),  Burdier  et  Horton  (deux  notaires).  — 
Mmes  Schneider  (la  Perichole),  Julia  H.  (Manuélita),  Legrand  (Guada- 
léna).  Carlin  (Berginella),  C.  Renault  (Mastrilla),  A.  Latour  (Frasquita), 
Gravier  (Bambilla),  Bénard  (Nineita).  —  Les  décors  et  les  costumes  sont 
terminés  et  l'œuvre  nouvelle  d'Offenbach  fera  son  apparition  du  12  au 
13  octobre. 

,j*^  On  nous  écrit  de  Bordeaux  :  «  Les'débuts  se  poursuivent  au  grand 
théâtre.  Dans  Robert  le  Diable,  Dulaurens,  notre  premier  ténor,  Mme  Meil- 
let (Alice),  Mlle  Nau  (Isabelle)  ont  conquis  pleinement  la  faveur  du  pu- 
blic. La  voix  puissante  de  Dulaurens  a  produit  un  grand  effet  ;  Mme  Meil- 
let est  supérieure  dans  le  rôle  d'Alice,  et  elle  s'est  élevée  à  une  grande 
hauteur  dans  le  trio,  final.  Mlle  Nau  s'est  fort  distinguée  dans  son  air 
d'entrée  et  dans  l'air  de  Grâce;  fort  jeune  encore  dans  la  cairière  théâ- 
trale, elle  nous  paraît  réservée  à  un  brillant  avenir.  M.  Pons  (Beriram) 
a  une  voix  magnifique,  mais  il  ne  sait  pas  s'en  servir.  Inutile  d'ajouter 
que  les  décors,  les  costumes  et  la  mise  en  scène  ne  laissent  rien  à  dési- 
rer. En  somme ,  la  direction  de  M.  Halanzier  s'annonce  sous  les  plus 
heureux  auspices. 

:i,*:^  Le  théâtre  royal  de  la  Monnaie,  à  Bruxelles,  s'étant  trouvé  brus- 
quement privé  de  premier  ténor  et  de  première  chanteuse,  par  suite  de 
la  résiliation  imposée  par  le  mécontentement  du  public  à  M.  Massy  et  à 
Mlle  Marty,  le  directeur,  M.  Letellier,  s'est  empressé  de  se  rendre  à  Paris 
pour  solliciter  de  M.  Perrin  la  cession  pour  quelque  temps  de  Warot  et 
de  Mlle  Godefroy.  Un  congé  leur  ayant  été  gracieusement  accordé  à  cet 


effet,  les  deux  '  artistes  sont  partis  pour  Bruxelles,  et  M.  Warot  doit  y 
chanter  successivement  la  Muette,  les  Huguenots  et  VAfricaine.  Il  est 
juste  de  constater  en  faveur  de  M.  Massy  que,  dès  qu'il  s'est  senti  libre 
par  sa  résiliation,  il  a  chanté  dans  la  Favorite  et  le  Trouvère  de  façon 
à  faire  regretter  au  public  la  précipitation  de  son  jugement  et  la  sévérité 
qu'il  lui  a  montrée. . 

»*»  L'opéra  de  Louis  Liebé,  la  Fiancée  d'Azola,  dont  ni)us  avions 
annoncé  la  mise  en  répétition  à  Carlsruhe,  a  été  donné  pour  la  première 
fois,  le  9  de  ce  mois,  à  l'occasion  de  l'anniversaire  de  la  naissance  du 
grand-duc.  La  presse  allemande  n'a  qu'une  voix  pour  rendre  hommage 
au  mérite  très-réel  et  très-solide  de  cet  ouvrage,  qui,  avant  le  jugement 
du  public,  a  eu  déjà  l'honneur  bien  envié  de  fixer,  pour  cette  solennité, 
le  choix  de  la  commission  très-sévère  qui  règle  à  Carlsruhe  la  compo- 
.«ition  du  répertoire  lyrique.  Louis  LIebé,  bien  connu  comme  compositeur 
de  lieder  et  de  chœurs,  fait,  avec  la  Fiancée  d'Azola,  ses  premières  armes 
dans  la  musique  dramatique  ;  c'est  une  victoire  complète  qu'il  a  rem- 
portée. Distinction  et  richesse  d'harmonie,  coloris  varié  et  fin  d'instru- 
mentation, abondance  et  très-souvent  bonheur  d'inspiration  mélodique, 
entente  de  l'effet  scénique,  tout  cela  se  trouve  dans  son  œuvre.  Disons 
d'ailleurs  que  le  compositeur  n'a  point  été  mal  servi  par  ses  collabora- 
teurs, MM.  Lindcn,  un  Français,  auquel  appartiennent  l'idée  et  l'exposition 
du  sujet,  et  Adolphe  Kalsch,  Allemand,  qui  a  versifié  le  libretto  dans  sa 
langue.  —  Il  s'agit  d'une  jeune  meunière  qui  devient  la  femme  de  son 
soigneur,  le  marquis  d'Aïola,  qu'elle  aimait,  le  croyant  simple  jardinier. 
De  cette  simple  donnée  sont  sorties  plusieurs  situations  fort  heureuses, 
et  que  le  musicien  a  su  habilement  traiter.  —  Citons,  comme  morceaux 
principaux  de  la  partition,  au  premier  acte,  le  premier  chœur,  très- 
réussi,  un  air  à  boire,  l'ariette  Fin  guter  Ehemann,  le  grand  air  de 
Jeanne  (la  meunière),  le  duo  d'amour,  l'ariette  du  maître  de  poste  ;  au 
second  acte,  le  grand  air  de  Jeanne,  la  charmante  cavatine  avec  accom- 
pagnement de  cor  anglais,  la  valse  chantée,  le  finale  ;  au  troisième  acte, 
le  ballet  et  le  chœur  arrangés  sur  l'air  de  la  Romanesca,  le  duo  sur  le 
motif  de  valse,  et  enfin  le  refrain  de  Jeanne.  —  Le  compositeur,  après 
la  représentation,  s'est  rendu  après  de  longues  hésitations  au  désir  du 
public  qui  l'appelait  sur  la  scène,  avec  ses  principaux  interprètes  ; 
Mlles  Formancck,  Hauser,  MM.  Stoizemberg,  Kœrner,  Oberhofer.  — 
On  peut,  après  cela,  prédire  à  la  Fiancée  d'Azola,  sans  crainte  de  se 
tromper,  un  succès  aussi  durable  qu'il  a  été  honorable. 

,*«  Mlle  Minnie  Hauck  vient  d'être  engagée  à  de  brillantes  conditions 
par  M.  Mapleson  pour  une  série  de  représentations  qu'elle  donnera  sous 
sa  direction  au  théâtre  royal  de  Covent-Garden,  du  26  octobre  au  30 
novembre  prochain  ;  M.  Strakosch,  bien  entendu,  accompagnera  en 
Angleterre  sa  nouvelle  étoile.  —  Mlle  Hauck  nous  reviendra  pour  rentrer 
au  théâtre  italien,  le  20  décembre.  Son  engagement  avec  M.  Bagier 
commence  à  cette  époque. 

f*t  Toujours  de  nouveaux  théâtres  !  On  parle  d'en  édifier  un  au 
boulevard  Haussmann. 


NODVELLES  DIVERSES. 

^*t  Les  examens  d'admission  aux  classes  de  déclamation  du  Conser- 
vatoire impérial  de  musique  auront  lieu  dans  dans  les  premiers  jours 
d'octobre.  Les  aspirants  peuvent  dès  à  présent  se  faire  inscrire  au  Con- 
servatoire, rue  du  Faubourg-Poissonnière,  13. 

***  La  réouverture  des  Concerts  populaires  de  musique  classique  aura 
lieu  le  dimanche  18  octobre ,  sous  la  direction  de  M.  Pasdeloup.  Les 
abonnés  qui  désirent  conserver  leurs  places  sont  priés  d'en  faire  retirer 
les  coupons  dans  les  bureaux  de  location  avant  le  12  octobre;  passé 
cette  époque,  l'administration  en  disposera. 

»%  La  réouverture  du  Casino-Cadet,  qui  lui  aussi  fait  peau  neuve, 
avait  attiré  vendredi  soir  une  foule  immense.  La  salle  complètement 
restaurée  était  étincelante.  L'orchestre ,  sous  la  direction  d'Aug.  Mey, 
chef-d'orchestre  de  Mabile,  qui  succédait  à  Arban ,  '.a.  joué  avec  un  en- 
semble parfait  et  un  grand  entrain  les  ouvertures  de  la  Sirène,  de  Si 
j'étais  roi,  et  les  quadrilles  en  vogue  sur  la  Grande  Duchesse,  Fleur  de 
Thé,  ks  Pompiers,  etc.,  etc.  Plusieurs  ont  été  bissés  et  couverts  d'applau- 
dissements. La  soirée  a  été  des  plus  brillantes  et  d'un  heureux  augure 
pour  celles  qui  suivront. 

,j%  La  transformation  du  théâtre  du  Prince-Impérial  en  Alhambra 
londonnien  revient  de  nouveau  sur  le  tapis  des  nouvellistes  et  de  la 
spéculation.  Ce  ne  serait  pas,  à  vrai  dire,  une  mince  entreprise!  L'Al- 
hambra,  dont  on  voudrait  importer  le  fac-similé  à  Paris,  ne  représente 
pas,  en  effet,  un  capital  moindre  de  2,500,000  francs.  Ce  célèbre  et  ma- 
gnifique établissement  ouvert  depuis  trois  ans  dans  Leicester-Square, 
sous  la  direction  de  M.  Sirange  (aidé  d'un  personnel  de  cinq  cents  em- 
ploj'és  dont  quatorze  constables  particuliers),  attire  chaque  soir  plus  de 
cinq  mille  visiteurs.  L'entrée  est  de  1  shilling  (1  f.  25);  total  moyen  des  re- 
cettes journahères  :  6,230  fr.,  sans  compter  le  bénéfice  des  consommations 
et  des  représentations  de  jour.  L'administration  solde  par  mois  30,000 
francs  d'appointements.  L'orchestre  se  compose  de  soixante  musiciens. 


UE  PAUIS 


3U 


Cent  cinquante  danseuses  forment  le  corps  de  ballet  et  l'on  compte  vingt- 
cinq  chanteurs.  L'aménagement  et  la  décoration  de  l'Alliambra  sont 
d'un  comfort  et  d'un  Iuxh  particulièrement  remarquables.  Le  dimanche 
—  détail  bien  anglais  —  ce  magnifique  établissement  de  plaisir  s'emplit 
de  fidèles  qui  viennent  entendre  des  sermons.  Une  chaire  remplace  sur 
la  scène  les  danses  et  les  harmonies  légères  de  la  semaine. 

^*,  Sivori  vient  de  partir  pour  Gênes;  il  assistera  à  l'inauguration  de 
la  salle  des  concerts,  qui  doit  porter  son  nom.  Le  célèbre  violoniste  se 
propose  de  pasfer  quelques  mois  en  Italie  et  de  se  faire  entendre  dans 
les  principal(!s  villes. 

»*»  On  annonce  l'arrivée  à  Paris:  de  M.  Carlo  Pedrotti,  directeur  du 
Lycée  musical  et  chef  d'orchestre  du  théâtre  Regio,  de  Turin  ,  auteur 
d'ouvrages  dramatiques  qui  ont  eu  un  grand  retentissement  en  Italie;— 
de  M.  Filippo  Filippi,  critique  musical  de  la  Peneveranza;  —  de  M. 
Muzio,  chef  d'orchestre  et  professeur  de  chant  des  plus  distingués. 

»**  Carlo  Pedrotti  a  écrit  un  nouvel  opéra  dramatique  en  quatre  actes, 
intitulé  Olema,  poëme  de  Piave,  qui  sera  représenté  l'hiver  prochain  au 
théâtre  de  la  Fenice  à  Venise. 

^*^  Aimé  Maillart,  après  avoir  passé  à  Trouville  un  mois  qui  a  influé 
très-favorablement  sur  sa  santé,  est  de  retour  à  Paris.  L'auteur  des  Dra- 
gons de  Yillars  va  pouvoir  se  remettre  au  travail  du  nouvel  ouvrage 
qu'il  compose  pour  le  théâtre  de  l'Opéra-Comique,  sur  un  poëme  de 
Maquet. 

*%  En  annonçant  cette  semaine  la  mort  d'un  homme  qui  inventait 
des  cris  de  rues  pour  les  marchands  ambulants,  le  Figaro  rappelait  à 
ses  lecteurs  «  que  de  nombreux  ouvrages  existent  depuis  des  siècles  sur 
les  cris  du  monde  entier,r>  et  pour  préciser  davantage  il  ajoutait  :  «Kastner 
possède  quatre  volumes  de  notes  complètes  sur  cette  partie  inconnue  des 
chants  populaires.  »  Nous  ne  savons  combien  noire  célèbre^ et  regretté 
collaborateur  possédait  —  car  l'cnnée  dernière  la  mort  Fa  ravi  à  ses 
études  favorites  —  de  cahiers  de  noies  sur  cette  partie  des  chants  popu- 
laires, mais  ce  que  nous  pouvons  affirmer  sciemment,  c'est  qu'en  1837 
il  publiait,  sous  le  titre  des  Voix  de  Paris,  un  remarquable  ouvrage, 
fort  consulté  depuis  lors,  et  qui  traite  de  l'importance  philosophique  de 
l'étude  du  cri  ;  du  cri  individuel  et  du  cri  de  labeur;  des  cris  de  Paris 
depuis  le  moyen  âge  jusqu'à  nous;  des  applications  musicales  des  cris 
populaires,  etc. 

***  La  partition  pour  chant  et  piano  de  l'Amour  et  son  carquois,  mu- 
sique de  M.  Cil.  Lecocq,  paraît  aujourd'hui  chez  l'éditeur  Gérard.  On  se 
rappelle  avec  quel  charme  Mmes  Irma-Marié  et  Lovato  ont  créé  les  rôles 
de  l'Amour  et  de  Thisbé  dans  cette  pièce  qui  a  précédé  Fleur  de  Thé 
au  théâtre  de  l'Athénée.  Bien  que  le  succès  de  Fleur  de  Thé  ait  été  beau- 
coup plus  retentissant  que  celui  de  sa  devancière,  la  musique  Ael'Amour 
et  son  carquois  ne  lui  est  cependant  inférieure  en  rien.  Ne  voulant  pas 
entrer  dans  l'analyse  de  cette  partition,  nous  nous  bornons  à  citer  ce 
qu'un  critique  éminent,  M.  B.  Jouvin,  a  dit  à  ce  sujet  :  «  M.  Charles 
Lecocq  a  résolu  le  problème,  difficile  à  trouver  dans  le  petit  théâtre  pour 
lequel  il  travaillait,  d'écrire  de  la  vraie  musique  en  restant  dans  les  con- 
ditions amusantes  de  l'opérette.  Il  y  a  de  la  distinction  toujours,  de  l'ori- 
ginalité quelquefois  dans  son  chant,  qui  conserve  les  franches  et  vives 
allures  de  l'improvisation.  Le  duo  chanté  par  l'Amour  et  Thisbé,  duo 
qui  contraste  avec  le  reste  par  la  note  tendre  et  voilée,  est  un  morceau 
tout  bonnement  exquis.  N'eùt-il  écrit  que  ce  duo,  M.  Charles  Lecocq 
serait  déjà  un  artiste  de  talent,  d'un  talent  tout  formé;  mais  il  y  a  en 
outre  de  bien  jolies  choses  dans  les  pages  légèrement  touchées  de  sa 
partition.  » 

**,  D'après  une  statistique  publiée  cette  semaine  par  l'Opinion  natio- 
nale et  reproduite  dans  d'autres  feuilles,  la  durée  moyenne  de  l'exis- 
tence des  musiciens  serait  de  38  ans.  Or,  Mozart  a  vécu  33  ans;  Bee- 
thoven, 35;  Gluck,  73;  Hacndel,  74;  Haydn,  77;  Grétry,  72;  Weber,  40; 
Boïeldieu,  30;  Halévy,  63;  Meyerbeer,  72.  M.  Auber  à  88  ans.  Sur 
quelles  bases  l'auteur  de  la  statistique  en  question  appuie-t-il  donc  son 
élucubration  fantaisiste? 

,*,  L'excellente  musique  des  zouaves  de  la  garde,  que  nous  avons  eu 
souvent  l'occasion  d'applaudir  au  Pré-Catelan,  a  exécuté  avant-hier,  au 
jardin  des  Tuileries,  une  charmante  fantaisie  intitulée  l'Orientale,  com- 
posée par  son  habile  chef  M.  Hemmerlé.  On  a  aussi  vivement  applaudi 
la  polka  Zerline,  d'E.  Ettling,  pour  piston,  exécutée  avec  une  grande 
perfection  par  M.  Yosse,  digne  émule  de  Forestier,  Lévy,  Arban,  etc. 

)i,*jif  Le  bruit  ayant  couru  dernièrement  qu'une  association  avait  été 
conclue  entre  les  administrations  du  Jardin  Mabile  et  du  Casino-Cadet, 
nous  sommes  priés  de  démentir  celte  nouvelle  qui  n'a  rien  d'exact. 

,*,  Ces  jours  derniers,  M.  Humbert  Ferrand,  l'auteur  du  libretto  des 
Troyens,  de  Berlioz,  est  mort  du  chagrin  de  n'avoir  pu  obtenir  une  com- 
mutation de  peine  pour  l'assassin  de  sa  femme,  Blanc-Gonnet  condamné 
à  mort  et  exécuté. 

ÉTRANGER 

„*^  Bruxelles.  —  La  première  représentation,  impatiemment  attendue, 
des  Géorgiennes  d'OIfenbach,  vient   d'avoir  lieu  au  théâtre  des  Galeries 


Saint-Hubert,  avec  un  succès  complet.  Mme  Delvil  comptera  le  rôle  de 
Féroza  parmi  ses  meilleures  créations.  Une  débutante,  Mlle  Gauthier,  a 
été  très-bien  accueillie.  Duplan,  Calvin  et  Hittemans  sont  fort  amusants 
dans  leurs  rôles  burlesques. 

***  Bade.  —  La  F'avorita  a  succédé  à  Norma.  Les  honneurs  de  la  soirée 
ont  été  pour  Steller  et  Mme  Fricci;  ces  deux  artistes  éminenis  sont  restés 
à  la  hauteur  de  leur  grande  réputation.  Lucia  a  terminé  la  courte  série 
des  opéras  italiens,  qui  ont  cédé,  mardi  dernier,  la  place  '  au  joyeux 
répertoire  d'Offenbach,  et  en  première  ligne  à  la  Chanson  de  Forlunio, 
dont  les  rôles  avaient  été  distribués  à  Désiré,  Jean -Paul,  Mmes  Zulma- 
Bouflfar,  H.  Loyé,  Lévy,  Leniz,  Jouvcn,  Domergue.— Désiré  et  Mlle  Bouffar 
ont  joué  Lisohen  et  Fritzchen.  —  Après  les  concerts,  et  opéras  de  la 
saison,  il  était  à  craindre  que  la  soirée  musicale  de  M.  Besekirsky  n'attirât 
pas  une  grande  affluence.  Le  célèbre  virtuose  a  du  néanmoins  être 
content  de  l'accueil  si  chaleureusement  sympathique  qui  lui  a  été  fait 
par  une  société  d'élite.  —  Il  a  inttrpréBJ  des  morceaux  de  Vicuxtemps  et 
de  Wieniavski  avec  une  grande  habileté;  nous  le  préférons  toutefois 
dans  ses  propres  œuvres,  sa  Polonaise  de  concert,  entre  autres,  et  sa 
Mazurka,  qu'on  a  voulu  entendre  deux  fois.  Mme  Fricci  Baraldi, 
MM.  Neri  Baraldi  et  Steller  apportaient  un  grand  attrait  à  la  partie  vo- 
cale de  ce  concert.—  Besekirsky  est  engagé  pour  cet  hiver  par  les  sociétés 
musicales  de  Cologne,  d'Aix-la-Chapelle  et  de  Dusseldorff,  ainsi  que  pour 
un  concert  du  Gewandhaus  de  Leipsick. 

,^*:i:  Carlsruhe.  —  Mlle  Aglaé  Orgéni  a  donné,  au  théâtre  grand-ducal, 
quelques  représentations  fort  suivies.  Dans  Lucie  et  la  Somnambule,  no- 
tamment, elle  a  conquis  tous  les  suffrages  par  la  beauté  de  sa  voix,  la 
maestria  de  son  chant  et  le  charme  de  son  jeu. 

.**  Weimar.  —  Le  titre  de  «  maître  de  chapelle  »  a  été  accordé  à 
Ed.  Lassen.  Ces  fonctions  n'avaient  été  remplies  par  personne  depuis  le 
départ  de  Liszt. 

***  iJarmstorft.— Le  séjour  de  la  cour  de  Russie  a  stimulé  l'activité 
de  la  direction  du  théâtre  ;  l'Africaine,  le  Postillon,  Roméo,  les  Noces  de 
Figaro,  le  Trouvère  (pour  la  fête  de  l'Empereur),  ont  été  donnés  coup  sur 
coup.  On  annonce  comme  nouveautés  :  la  Belle  Hélène,  le  Premier  Jour 
de  bonheur  et  la  reprise  de  la  Reine  de  Saba,  qui  a  été  fort  goûtée  ici  à 
sa  première  apparition.  —  Le  grand  festival  du  Rhin  central  doit  avoir 
lieu  les  27  et  28  septembre,  à  l'Arsenal. 

***  Leipzig.  —  La  tragédie  Phœdra,  du  prince  Georges,  musique  de 
Taubert,  vient  d'être  donnée  ici  avec  un  brillant  succès.  — Henri  Laube, 
l'auteur  dramatique,  prend  la  direction  du  théâtre  à  partir  du  29  jan- 
vier prochain. 

,j*^  Hambourg.  —  Le  directeur  des  musiques  des  gardes  du  corps 
prussiens,  M.  Wieprecht,  cédant  à  des  invitations  réitérées,  est  venu 
donner  ici  quelques  concerts  avec  les  musiques  des  deux  régiments  qui 
ont  remporté  le  premier  prix  au  concours  de  l'Exposition  universelle  de 
Paris.  Le  dernier  a  eu  lieu  le  3,  jour  anniversaire  de  la  naissance  de 
Meyerbeer;  on  l'avait  entouré,  en  raison  de  cette  circonstance,  d'un  éclat 
inaccoutumé,  et  toutes  les  musiques  de  cavalerie  prussienne  y  ont  pris 
part.  Des  fragments  de  V Africaine  et  des  Huguenots,  très-habilement 
arrangés  et  admirablement  exécutés,  ont  excité  dans  le  public  de  véri- 
tables transports  d'enthousiasme. 

*''„,  Prague.  —  Le  titre  du  dernier  opéra  en  trois  actes  de  MM.  de 
Flotow  et  Gênée  est  maintenant  :  les  Musiciens,  «  die  Musikanten.  i>  La 
représentation  en  est  ajournée  à  l'année  prochaine,  M.  de  Flotow  devant 
se  rendre  incessamment  à  Paris,  où  sera  monté  cet  hiver  au  théâtre  de 
l'Opéra-Comique  son  opéra  l'Ombre,  dont  M.  de  Saint-  Georges  a  écrit  le 
poëme. 

:^*t  Milan.  —  Le  succès  de  Dinorah  grandit  chaque  soir  au  théâtre 
Carcano.  Mlle  de  Maësen  et  le  ténor  Minetti  sont  l'objet  des  plus  flat- 
teuses ovations.  L'air  de  l'Ombre  est,  comme  toujours,  bissé  à  toutes  les 
représentations  ;  Mlle  de  Maësen  le  dit,  du  reste,  avec  un  charme  indes- 
criptible. —  A  Santa  Radegonda,  la  Grande  Duchesse  fait  son  chemin  de 
la  manière  la  plus  brillante.  Mme  J.  Borghè.se,  qui  est  depuis  le  12  en 
possession  du  principal_rôle,  en  tire  un  excellent  parti  et  ne  fait  point 
regretter  sa  devancière.  Les  autres  rôles  sont  remplis  à  souhait.  Les 
Noces  de  Jeannette  et  la  Chanson  de  Fortunio  ont  été  données  cette  se- 
maine. —  Les  instances  les  plus  flatteuses  sont  faites  auprès  de  Henri 
Panofka,  pour  qu'il  se  fixe  d'une  manière  définitive  à  Milan.  Les  succès 
obtenus  par  l'éminent  professeur  dans  l'enseignement  du  chant  ont  mo- 
tivé ces  démarches  qui  n'ont  point  encore  eu  de  résultats.  «  II  est  à 
désirer,  dit  le  Trovatore  à  ce  propos,  qu'enfin  nous  puissions  entendre 
des  chanteurs  qui  chantent!  » 

:f*^  Saint-Pétersbourg.  —  Le  Conservatoire  a  pu,  et  il  faut  l'en  félici- 
ter, reconquérir  pour  sa  classe  de  chant  Mme  Nissen-Saloman,  qui  avait 
quitté  depuis  peu  la  po.sition  qu'elle  occupait  avec  tant  d'éclat  dans  cet 
établissement.  Le  violoniste  Aucr,  nommé  professeur  de  violon  est  déjà 
entré  en  fonctions.  —  Les  représentations  de  l'opéra  italien  commence- 
ront le  4/16  novembre,  avec  Lucia,  et  dureront  quatre  mois  pleins,  jus- 
qu'au 2/14  mars.  —  Mlle  Henriette  Dor,  première  danseuse  de  l'Opéra 
de  Paris,  a  débuté  avec  succès  dans  le  Corsaire. 


s.    UUFOUR. 


312 


KEVUE  El  GAZETTE  MUSICALE  DE  PAKIS. 


CHKZ     BRANDUS     ET     DUFOUR,    ÉDITEURS,     103,    RUE    DE    RICHELIEU. 

Sous    presse  : 

Un  volume,  format  in-8%  prix  net  :  S  francs 


Contenant  les 


VINfiT-QUATRE  PRELUDES  DANS  TOUS  LES  TONS 

DE 


i .  Dédicace. 

2.  L'Obstinée. 

3.  Humour. 

4.  Récitatif. 

5.  Méditation. 

6.  Résolution. 


7 .  Sérénade. 

8.  Affirmation. 

9.  Monologue. 

10.  Arabesque. 

11.  Reproche. 

12.  Scabieuse. 


En    Tente 

13. 
14. 
IS. 
\6. 
17. 
18. 


Souvenir. 
Emportement. 
Berceuse. 
Regrets. 
Chansonnette . 


19. 
20. 
21. 
22. 
23. 
24. 


Songerie. 
Volage. 

Paysage . 
Sonnet. 


Op.  24.  Scherzo,  dédié  à  Liszt  .  . 
Op.  28.  Caprice  symphonique  .  .  . 
Op.  29.  La  Chaxse,   étude  cai-aclé- 

ristique 

Op.  41.  Caprice  sur  le  Dissecteur    . 

Op.  42.  Valse  élégante 

Op.  43.  Valse  sentimentale  .... 

Op.  44.  Valse  villageoise 

Op.  49.  Quatre  arabesques,  en  trois 

suites,  ciiaque 

Op.  50.  Scènes  pastorales,  en  deux 

suites,  chaque 

Op.  52.   Vénitienne 

Op.  53.  Tarentelle 

Op.  54.  Fantaisie 

Op.  55.  La   Fontaine,    mélodie    de 

Schubert,  caprice  .... 

Op.  56.  Sérénade 

Op.  57.  Scherzo  fantastique.  .    .    . 

Op.  58.  Rêveries 

Op.  59.  Valse  brillante 

Op.  60.  Canzonetta 

Op.  61.  Deuxième  tarentelle.  .  .  . 
Op.  62.  Deux  vakes,  deux  suites, 

chaque 

Op.  63.  Capriccio 

Op.  64.  Presto  cappriccio  (Humo- 

reske) 


7  50 

9  " 

6  V 

6  .. 

6  .. 

6  .. 

6  » 


6  « 

9  » 

9  .. 

7  50 


7  50 

6  . 

9  » 

6  » 

6  i. 

7  50 
9  . 

5  » 

6  ■' 


Op.  65.   Deuxième  sonate 15     ^ 

Op.  67.  La  Vallée  d'amour,  mélodie 

de  Meiideissohn 5     » 

Op.  08.   L'.Uuuctle,      mélodie     de 

Schubert,  cnpi'ice  brillant.     5     » 

Op.  69.  Chant  national,  de  Men- 
delssohn-Bartlioldy ,  fan- 
taisie en  Ibrme  de  sonate.     9    u 

Op.  70.  Caprice  brillant  sur  le  Pro- 
phète  7  50 

Up.  71.  Aux  mânes  de  Chopin,  élé- 
gie et  marche  funèbre  .   .     7  oO 

Op.  72.   1.  Le  Chant  du  matin  .    .     4  50 

2.  i«  Chant  du  troubadour    4  50 

3.  Le  Chant  du  dimanche.     4  50 
Op.  73.   1.  Le  Chant  du  chasseur  .     4  50 

2.  L'Adieu  du  soldat.   .    .     4  30 

3.  Le  Chant  du  berceau    .     3     • 

Op.  94.  Tableau  de  genre 9     » 

Op.  98.  Improvisation  sur  une  mé- 
lodie de  R.  Schumann  .   .     7  50 

Op.  101.  Réverit    d'un    promeneur 

solitaire  {i.-J.  Rousseau)  .     9     » 

Op.  102.  Morceau  de  chasse.   ...     9     » 

Op.  109.  Feuille  d'automne  ....     9    » 

Douze  pensées   fugitives ,    op.    30 , 

pour  piano  et  violon,  par 

S.  Heller  et  H.  Ernst,  ch.     6    » 


Trente  mélodies  de  F.  Schubert , 
transcrites  pour  le  piano, 
chaque 


4  50 


Adieu . 

Les  Astres. 

La  Berceuse. 

Jeune  Fille  et  la  Mort. 

La  jeune  Mère. 

Rosemonde. 

La  Sérénade. 

Ave  Maria. 

La  Barcarolle. 


Tu  es  le  repos. 

Dans  le  bosquet. 

Les  Plaintes  de  la  jeune 

fille. 
Impatience. 
Bonjour. 
Le  Départ. 
Le  Voyageur. 
La  Truite. 


Cloche  des  agonisants.  Sois  toujours  mes  seules 


amours. 
Le  Pêcheur. 
Chansou  des  chasseurs. 
L'Echo. 

Désir  de  voyager. 
Mes  rêves  sont  finis. 


Eloges  des  larmes. 

La  jeune  Religieuse. 

Marguerite . 

La  Poste. 

Le  Roi  des  Aulnes. 

Chasseur  des  Alpes. 

Pensée 2  50 

Préludes   pour   le    piano    (tirés  de 
lop.  81): 

1.  Feu  follet.  Sérénade  ....  S  » 

2.  Arabesque,  Rêverie 5  » 

3.  Berceuse,  Deuil  ;  Chansondemai  5  » 

4.  Paysage,  Sonnet S  « 

5.  Appassionato,  Elégie  ....  5  » 


Répertoire   de   Musique   classique   de   Piano 

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I  II 


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N'  40. 


ON  S'ABONNE  : 

Dîjiis  les  Déportpments  ot  A  l'Éimnecr, 

chez  tous  les  Urarchands  de  Musique,. Us  Lihrairca, 

et  aux  Cureaux  àc?.  Slessngeries  et  des  Postes. 


,1  ,       —Tyt^t^f'Kr 


REVUE 


4  Octobre  1868. 


PRIX    DE    L'ABONNEMENT: 

Paris "^   r.  par  ui 

Départements,  Belgiqui;  et  Suisse....     :V)  »       i(L 
ÉlroDger 3i  .,       IJ. 

Le  Journal  paraît  le  Dlmanctie. 


GAZETTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


SOMMAIRE.  —  Théâtre  impérial  Italien:  réouverture;  la  Lucia  di  Lammer- 
moor.  —  Théâtre  des  Bouffes-Parisiens  :  réouverture;  l'Arche-Marion,  le  Fifre 
enchanté  et  l'Ile  de  Tulipatan,  par  £lias  de  Stauze.  —  Théâtre  des  Menus- 
Plaisirs  :  les  Croqueuses  de  pommes.  — Théâtre  des  Fantaisies-Parisiennes: 
réouverture;  le  Sorbier  de  Sévllle,  par  IHaurîee  Ctray.  —  Wachlel  et  le 
Postillon  de  Lonjumeau.  —  Armide  (première  partie,  2°  article),  par  A. 
Tlinrner.  —  Nouvelles  des  théâtres  lyriques.  —  Nouvelles  diverses.  — 
Annonces. 


THÉÂTRE  IMPÉRIAL  ITALIEN. 

(Réouverture  le  1"  octobre  1868.) 
lia  liucla  dt  liammermoor. 

La  salle  Ventadour  offrait  jeudi  soir  l'aspect  d'un  salon  princier 
ouvert  pour  une  fête.  Moulures  blanc  et  or  se  détachant  vivement 
sur  le  velours  et  les  tentures  rouges  des  loges  ;  tout  le  balcon  de- 
venu un  hémicycle  de  balustres  dorés  ;  la  lumière  se  jouant  avec 
bonheur  sur  ces  brillantes  facettes  et  sur  des  glaces  nombreuses; 
c'est  vraiment  élégant,  gai,  étincelant!  —  Mais  aussi  l'on  fêtait  la 
rentrée  de  Mile...  pardon!  de  Mme  Patti  et  de  Fraschini.  La  salle 
était  comble,  et  bien  que  la  plupart  des  abonnés  des  premières 
loges  fussent  encore  à  la  campagne  ou  aux  villes  d'eaux,  elle 
était  on  ne  peut  mieux  occupée.  Ces  deux  noms  :  Patti  et  Fras- 
chini   sur  l'affiche   avaient  suffi  pour  enlever  la  location. 

Il  est  superflu  de  parler  de  l'exécution  de  cet  ouvrage  si  vieux 
et  éternellement  jeune.  L'attrait  de  la  soirée  était  la  rentrée  des 
deux  grands  artistes.  Une  curiosité  toute  naturelle  s'y  joignait, 
pour  la  ravissante  cantatrice  qui  vient  de  changer  la  couronne  de 
fleurs  d'oranger  contre  la  couronne  de  marquise  aux  feuilles  et 
perles  alternées. 

Dès  qu'elle  a  paru,  la  salle  a  fait  éclater  une  triple  salve  d'ap- 
plaudissements: c'était  le  well  corne  donné  à  l'artiste  et  à  la  patri- 
cienne. 

Puis  les  applaudissements  ont  accompagné  tous  ses  morceaux. 
Après  l'air  de  la  Folie,  qu'elle  a  dit  comme  elle  sait  seule  le  dire, 
les  bouquets  se  sont  ajoutés  aux  marques  d'enthousiasme.  Et  on 
ne  cessait  jamais  de  rappeler  la  gracieuse  diva,  delà  saluer  des  cris 
de  brava! 


Il  faut  dire  aussi  que  le  talent  de  l'artiste  dramatique  s'est  bien 
plus  développé  chez  la  cantatrice.  Dans  la  scène  de  la  malédiction 
et  dans  celle  de  la  folie,  elle  a  joué  en  véritable  tragédienne.  Quant 
à  la  voix,  elle  est  aussi  fraîche  et  aussi  pure,  et  elle  a  paru  en- 
core plus  puissante. 

Fraschini  suit  le  sort  heureux  de  cet  heureux  opéra.  Il  a  été 
un  des  premiers  en  Italie  à  chanter  Lucia;  il  la  chante  encore:  la 
voix  est  toujours  belle,  mais  combien  le  talent  a  grandi!  Fraschini 
est  vraiment  le  type  du  ténor  italien.  Quel  style  et  quelle  mé- 
thode! Et  comme  sa  voix  se  marie  bien  dans  le  duo  d'amour  avec 
celle  de  Mme  Patti!  Comme  elle  éclate  dans  le  grand  finale  du 
deuxième  acte,  à  la  scène  de  l'imprécation  ! 

MM.  Verger  et  Agnesi  ont  eu  leur  part  de  succès,  et  bien  méritée. 
Le  quatuor,  ce  morceau  qui  suffirait  à  la  gloire  d'un  compositeur, 
dit  par  ces  quatre  artistes,  a  transporté  l'auditoire. 

Et  en  sortant  de  la  salle  on  lisait  l'affiche  qui  promettait  pour 
samedi  (iiier)  Rigoletto,  avec  Mme  Patti,  Fraschini.,  Délie  Sedie  et 
Mlle  Grossi  ! 

E.  R. 


THÉÂTRE  DES  BOUFFES -PARISIENS. 

(Réouverture  le  30  septembre  1868.) 

L'Arche-Marion,  opérette  en  un  acte  de  M.  Albéric  Second, 
musique  de  M.  Adolphe  Nibelle.  —  Le  Fifre  enchanté, 
opérette  en  un  acte  de  MM.  Nuitter  et  Trefeu,  musique  de  M.  J. 
Offencacii.  —  L'Ile  de  Tulipatan,  paroles  de  MM.  Chivot 
et  DuRU,  musique  de  M.  J.  Offenbagh. 

Lui  aussi,  le  théâtre  des  Bouffes,  a  voulu  faire  peau  neuve,  et 
directeur,  ornemaniste  et  doreur  n'y  ont  ménagé  ni  leur  bourse  ni 
leur  habileté.  Si  le  mot  «  bonbonnière  »  n'avait  déjà  trop  servi, 
nous  l'emploierions  pour  désigner  la  salle  des  Bouffes.  C'est  frais, 
coquet,  charmant!  En  en  prenant  la  direction,  M.  Noriac  a  paru 
montrer  qu'il  tenait  à  conserver  à  cet  amusant  théâtre  sa  double 
physionomie  :  la  gaieté  folle,  la  farce  bouffonne,  le  franc  éclat  de 
rire,  —  et  un  certain  cachet  littéraire,  le  caractère  et  l'esprit  de 
l'opéra-comique  français.  Aussi  nous  a-t-il  donné,  dès  le  premier 


314 


KEVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


soir,  un  heureux  échantillon  des  deux  genres  :  l'opéra-comique 
en  miniature  d'abord,  et  tel  que  l'aurait  pu  jouer  la  salle  Favart; 
ensuite,  la  bonne  et  grosse  farce  désopilan Le, rappelant  les  premières 
années  du  petit  théâtre  qui  depuis...  mais  alors  il  n'était  pas  si 
ambitieux  et  n'avait  pas  encore  touché  aux  dieux  et  déesses  de 
l'Olympe,  il  n'avait  pas  encore  parodié  Homère  et  Gluck. 

L'Arche-Marion  est  une  petite  comédie  à  rôles  jumeaux,  si  l'on 
peut  employer  cetfe  locution.  Deux  individus  ayant  fait  chacun 
une  sottise,  et  n'en  osant  pas  affronter  les  conséquences,  veulentse 
jeter  à  l'eau.  Une  jeune  fdle  accorte  et  pimpante  passe,  et  la  fable 
des  deux  coqs  et  de  la  poule  reste  ù  peu  pi'ès  la  même,  mais  dans 
un  autre  genre.  Ils  étaient  d'accord  pour  se  tuer  ;  voilà  que  cha- 
cun des  deux  voudrait  que  l'autre  sejelâl  dans  la  rivière,  pour  que 
le  survivant  épousât  la  belle  enfant.  Celle-ci,  qui  n'est  pas  béie, 
cherche  uu  expédient,  elle  veut  gagner  du  temps:  Buvons,  dit- 
elle.  L'un  d'eux  se  grise  et  s'endort  ;  l'autre,  plus  avisé,  trouve  | 
le  moyen  de  faire  la  cour  à  la  jeune  lillc  et  de  se  faire  accepter. 
Un  écrivain  public  du  nom  de  Saturne  complète  le  quatuor  ;  c'est 
un  rôle  fort  comique  qui  traverse  toute  la  pièce  et  l'égaie.  Comédie 
et  vers  sont  d'un  homme  de  lettres  et  d'un  homme  d'esprit,  de 
noire  cher  confrère  Albéric  Second. 

La  musique,  de  M.  Adolphe  Nibelle,a  la  saveur  de  l'ancien  opéra- 
comique,  qui  n'est  certes  pas  à  dédaigner;  on  devine  que  le  com- 
positeur a  étudié  les  beaux  modèles  :  légère,  agréable,  facile,  bien 
orchestrée,  elle  gagnera  à  être  mieux  exécutée. 

— Le  Fifre  enchanté  est  un  bijou,  c'est  de  l'Offenbach  de  salon; 
on  y  reconnaît  les  aspirations  mélodiques  de  l'auteur  du  Mariage 
aux  Lanternes  et  de  la  Chanson  de  Fortunio.  11  y  a  là  l'air  du 
Fifre  qui  va  devenir  populaire,  et  surtout  un  morceau  d'ensemble 
sur  ces  mots  :  Ça  sent  la  truffe  !  qui  est  un  modèle  du  genre.  Ces 
deux  suffisent  au  succès  d'une  opérette,  et  ils  ne  sont  pas  les  seuls 
qu'on  ait  applaudis.  Ems  avait  eu  la  primeur  de  cette  ravissante 
opérette,  Paris  en  a  ratifié  le  succès. 

— Après  le  sourire,  le  rire  aux  éclats.  La  pièce  de  MM.  Chivot  et 
Duru  ne  s'analyse  pas.  Elle  roule  sur  une  donnée  des  plus  amu- 
santes. Le  grand-duc  Cacatois  XXII  a  une  fdle  qui  passe  pour  un 
garçon.  Son  sénéchal,  en  revanche,  a  un  lils  qui  passe  pour  une 
demoiselle.  Faites  qu'ils  s'aiment;  mettez  la  mère  du  jeune  homme 
dans  le  secret,  —  et  partez  de  li.  Je  vous  laisse  imaginer  les 
scènes  comiques  qui  s'ensuivent.  On  riait  déjà  à  se  tordre;  mais 
lorsque  Berthelier  (Cacatois  XXII),  ahuri  par  tout  ce  qu'on  vient  de 
lui  dire  au  sujet  du  sexe  des  deux  amoureux,  commence  un 
calcul  arithmétique,  un  fou  rire  s'empare  de  la  salle  tout  entière, 
et  quand  la  toile  tombe  il  n'a  pas  encore  cessé. 

Je  vous  laisse  à  penser  si  Offenbach  a  profité  de  l'occasion 
pour  faire  rire  aussi  ses  mélodies  et  ses  instruments.  L'entrée  de 
Cacatois  XXII  avec  une  mélopée  de  mare  aux  canards  est  une 
trouvaille.  Il  est  vrai  qu'il  n'y  a  que  Berthelier  qui  puisse 
remplir  ce  rôle.  Mme  Thierrct  était  comme  en  famille;  son  appa- 
rition a  égayé  tout  l'auditoire.  Victor  est  un  orchestre  à  lui  seul. 
Quand  il  a  imité  avec  ses  lèvres  le  son  du  violoncelle,  Seligmann, 
qui  était  dans  la  salle,  en  a  pâli. 

On  a  tant  ri,  on  s'est  tant  amusé  à  l'Ile  de  Tulipatan,  qu'après 
la  pièce  presque  tout  le  monde  est  parti.  Nous  ne  savons  pas  de- 
vant qui  on  a  joué  les  Deux  vieilles  Gardes  de  M.  Delibes,  un  bon 
appoint  aux  trois  pièces  nouvelles  et  que  M.  .\oriac  a  donné  peut- 
être  pour  prouver  qu'il  conservait  l'ancien  l'épertoire  des  Boudes. 

Un  mot  encore  :  la  direction  de  l'orchestre  est  confiée  à  M.  Ja- 
cobi,  et  il  s'en  acquitte  à  merveille. 

Elias  de  RAUZE. 


THEâTBE  des  niENUS-FLÂISIRS. 

liES  CROQUEUSES  DE  POUUEJS, 

Opérette  en  cinq  actes,  paroles  de  MM.  Eugène  Grange  et 
Emile  Adraham,  musique  de  M.  Louis  Deffês. 

(Première  représentation  le  28  septembre  18G8.) 

. . .  Cai'  enfin,  si  un  ouvrage  musical  en  cinq  actes,  contenant 
une  trentaine!  de  morceaux  plus  ou  moins  développés,  bourré  d'airs, 
de  couplets,  de  duos,  de  morceaux  d'ensemble,  de  chœurs,  de 
finales,  si  un  tel  ouvrage  ne  constitue  qu'une  opérette,  je  me  de- 
mande comment  on  devra  appeler  des  productions  vraiment  légères 
et  peu  développées,  telles  que  les  Noces  de  Jeannette,  le  Concert  à 
la  cour,  les  Sabots  de  la  Marquise,  les  Trovatelles,  etc.,  et  de 
quelle  façon  un  compositeur  devra  s'y  prendre  à  l'avenir  pour 
écrire  un  véritable  opéra  ?  En  effet,  vous  remarquerez  avec  moi... 

Et  mon  interlocuteur,  dont  la  loquacité  semblait  ne  point  con- 
naître d'obstacles,  aurait  continué  ainsi  pendant  une  heure  ou  deux 
peut-être,  si,  profitant  d'une  ondulation  de  la  foule  à  la  sortie  du 
théâtre,  je  n'avais  réussi  de  cette  façon  à  échapper  à  la  persistance 
d'un  raisonnement  d'ailleurs  lort  sensé. 

Il  est  de  fait  que  la  partition  écrite  par  M.  Dclfès  sur  le  livret(?) 
des  Croqueuses  de  pommes  est  abondamment  fournie,  et  constitue 
un  opéra,  dans  toute  la  force  du  terme.  L'affiche  est  donc  dans 
son  tort  en  la  ([ualifiant  de  simple  opérette.  Il  est  vrai  que  si 
M.  Deffès  a  écrit  tant  de  musique,  c'est  que  ses  collaborateurs  lui 
avaient  tracé  de  nombreux  morceaux;  si  ces  morceaux  étaient 
nombreux,  c'est  que  les  épisodes  ne  l'étaient  pas  inoins,  c'est  que 

les  scènes  se  multipliaient,  et et  voilà  ce  qui  faitque,  à  mon 

sens  du  moins,  la  nouvelle  pièce  des  Menus-Plaisirs,  tout  agréable 
qu'elle  soit,  est  trop  longue  d'un  bon  quart,  et  réclame  d'énergi- 
ques amputations. 

Les  Croqueuses  de  pommes,  eu  effet,  ne  sont  qu'une  répétition 
amusante,  mais  un  peu  délayée,  de  ces  divers  tableaux  de  la  vie 
factice  de  Paris,  de  ces  pièces  à  cocottes  et  à  petits  crevés  q'je  l'on 
présente  si  fréquemment  au  public  depuis  une  dizaine  d'années, 
et  dont  les  Chevaliers  du  Pince-IS'ez  sont  restés  le  type  d'autant  plus 
réussi  qu'il  était  le  plus  court,  le  plus  rapide  et  le  plus  vivement 
mené.  Je  ne  mets  pas  en  doute  le  succès  de  la  nouvelle  pièce, 
mais  cinq  actes  sont  de  trop  pour  cela,  et  je  crois  que  pour  attein- 
dre ce  succès  les  auteurs  devront  consentir  à  de  nombreux  sacri- 
fices, et  jeter  bravement  par-dessus  le  bord  tout  ce  qui  est  inutile 
à  l'action  et  peut  entraver  sa  marche. 

Ceci  établi,  j'en  arrive  à  la  musique  de  M.  Deffès,  dont  on  peut 
dire,  ainsi  que  de  la  Philiberte  de  M.  Augier  : 

Elle  est  charmante,  elle  est  charmante,  elle  est  charmante! 

Pleine  de  grâce,  d'élégance  et  de  finesse,  la  partition  des  Cro- 
queuses de  pommes  est  charmante,  en  effet,  d'un  bout  à  l'autre, 
écrite  simplement,  comme  il  convenait  au  théâtre,  sans  prétention, 
sans  ambition,  sans  hautes  visées,  avec  une  distinction  de  formes 
et  un  art  du  bien  dire  des  plus  remarquables. 

Il  me  serait  impossible,  on  le  conçoit,  de  faire  une  analyse  dé- 
taillée des  morceaux  qui  la  composent  ;  les  colonnes  de  ce  journal 
n'y  suffiraient  pas,  et  j'encourrais  le  reproche  d'accaparement. 
Pourtant,  je  veux  citer  au  moins  quelques  morceaux  de  cette  œuvre 
fine,  délicate,  qui  se  fait  remarquer  surtout  par  une  rare  et 
louable  sobriété. 

Je  mentionnerai  d'abord  une  chanson  rustique  en  si  bémol, 
franche  et  bien  venue  :  Oio  cours-tu ,  ma  brunette  ?  dont  le  refrain 
à  deux  voix  est  d'un  effet  charmant,  et  qui  commence  très-bien  le 
premier  acte,  lequel  se  termine  par  un  excellent  finale.  Au  second. 


DE  PAHIS. 


315 


il  faut  distinguer  une  fort  jolie  romance  de  soprano  :  En  poussant 
mon  aiguille,  dont  l'accompagnement  d'alto  est  très-réussi,  puis  un 
air  bouffe  excellent  :  Je  suis  le  coiffeur  des  dames,  vif,  gai,  mélo- 
dique et  parfaitement  en  scène,  et  un  finale  égal  au  précédent.  Le 
grand  morceau  d'ensemble  du  troisième  acte  est  plein  d'entrain , 
d'une  forme  originale,  et  la  chanson  des  croqueuses  de  pommes, 
qui  y  est  intercalée,  est  un  vrai  bijou.  Mais  je  suis  obligé  d'arrê- 
ter mon  énumération,  tout  en  constatant  que  le  quatrième  acte  ne 
le  cède  en  rien  aux  précédents,  et  que  l'inspiration  de  l'auteur  s'est 
soutenue  du  commencement  à  la  fin  avec  un  rare  bonheur. 

Il  est  fâcheux  pour  lui  qu'il  n'ait  pas  eu  de  véritables  chanteurs 
à  sa  disposition;  mais,  et  c'est  ici  qu'il  faut  le  louer  particulière- 
ment, il  a  écrit  sa  partition  de  façon  que  l'exécution  en  fût  aussi 
facile  que  possible. 

D'ailleurs,  la  pièce  est  montée  avec  un  soin  véritable,  et  les 
interprètes  sont  généralement  dignes  d'éloges.  M.  Gourdon  a  fait 
une  création  excellente  —  excellente  —  d'un  rôle  à  tiroir  comme 
on  en  écrivait  tant  jadis ,  et  où  il  a  établi  un  type  parfait  ;  celui 
du  garçon  de  café  bègue  et  bossu.  Mlle  Marchand,  une  débutante, 
a  montré  do  la  grâce,  une  physionomie  intelligente  et  d'heureuses 
qualités.  Mlle  Marcus  n'a  peut-être  pas  toutes  les  facultés  vocales 
nécessaires  pour  le  rôle  qui  lui  est  confié,  mais  elle  est  jolie  comme 
un  cœur,  et  elle  a  du  mordant,  de  l'esprit  et  de  l'entrain.  Enfin 
MM.  Daniel  Bac,  Paul  Ginet,  Branciard,  Destroges,  complètent  un 
ensemble  très-satisfaisant. 

Quant  à  l'orchestre ,  il  marche  très-bien  et  est  très-habilement 
conduit  par  M.  Marius  Boullard. 

Maurice  GRAY. 


THEATRE  DES  FANTAISIES-PARISIEKSES. 

Béoavertare.  —  MJe  SSafhier  <(e  Sévitte. 

C'est  Figaro  qui  avait  fermé  les  portes  des  Fantaisies-Parisiennes, 
c'est  Figaro  qui  les  rouvre;  et  avec  lui  ses  compagnons  habituels, 
Rosine  et  Lindor,  Basile  et  Bartliolo,  la  Jeunesse  et  l'Eveillé.  Et  le 
public,  sans  leur  tenir  rigueur  de  leur  absence,  n'a  songé  qu'à 
leur  retour,  car  il  est  revenu  cette  fois,  pour  les  entendre,  aussi 
fidèle,  aussi  nombreux,  aussi  bien  disposé  qu'il  l'était  naguère. 
C'est  qu'ils  chantent  tous  de  si  jolis  airs,  et  qu'ils  les  chantent 
avec  tant  d'entrain,  de  verve,  de  bonne  humeur! 

La  physionomie  de  quelques-uns  pourtant  a  changé,  mais  non 
point  l'aspect  général  du  tableau,  qui  est  toujours  aussi  aimable, 
aussi  attrayant.  Rosine,  aujourd'hui,  c'est  3111e  Cazat,  une  jeune 
chanteuse  qui  nous  arrive  de  province  après  avoir  passé  par  le 
Conservatoire,  et  qui  n'en  est  certes  pas  plus  mauvaise  pour  cela  ; 
sa  voix  est  bonne,  flexible,  solide,  et  elle  la  conduit  avec  beau- 
coup de  goût.  Lindor,  je  veux  dire  Almaviva,  a  pris  les  traits 
de  M.  Brisson,  un  transfuge  des  Italiens;  M.  Brisson  paraît  possé- 
der de  véritables  qualités,  pourtant  je  voudrais  l'entendre  de  nou- 
veau. Enfin  Bartholo  s'appelle  de  son  vrai  nom,  Soto,  —  car  Bar- 
Iholo  n'est  qu'un  pseudonyme,  vous  le  savez  bien,  —  et  ce  M.  Solo, 
qui  a  chargé  sa  jeune  tête  des  cheveux  blancs  du  vieux  tuteur, 
est  déjà  presque  comédien  et  se  trouve  en  possession  d'une 
excellente  voix,  avec  laquelle  il  a  fait  merveille  dans  l'air  du  se- 
cond acte.  Quant  à  Figaro,  c'est  toujours  Arsandaux,  un  Figaro 
charmant,  meilleur  encore  peut-être  que  par  le  passé,  qui  va,  vient, 
entre,  sort,  avance,  recule,  se  trémousse  en  tous  sens  avec  une 
jeunesse  et  un  aplomb  superbes,  qui  brûle  enfin  les  planches,  et 
chante  avec  le  style  aimable  et  la  finesse  que  vous  savez. 


Mais  je  m'aperçois  que  je  n'ai  pas  dit  un  mot  de  Paisiello.  Bah  ! 
je  crois  qu'à  l'heure  qu'il  est  il  ne  s'en  soucie  mie!  J'aime  mieux 
terminer  par  un  franc  compliment  à  l'orchestre  et  à  M.  Constantin. 

M.  G.  . 


ÂRISIDE. 

PREMIÈKE    PARTIE. 

(2«  article)   (1). 

Quinault  était  réellement  la  meilleure  âme  du  monde. 

Doux,  candide,  sincère,  obligeant,  il  se  soumettait  avec  une  angé- 
lique  patience  aux  exigences  et  aux  rebuffades  du  musicien.  Que 
de  fois  ne  dut-il  pas  remettre  l'ouvrage  sur  le  métier,  coupant  une 
scène,  allongeant  une  strophe  selon  le  caprice  de  Lulli  I  Ce  n'était 
pas  tout;  suivez  cette  filière  et  dites  s'il  ne  fallait  pas  avoir  l'âme 
bien  trempée  pour  laisser  subir  à  son  œuvre  une  gestation  aussi 
tyrannique  :  1°  présentation  de  plusieurs  sujets  ou  poëmes  au  roi  ; 
2°  canevas  choisi  sur  lequel  Lulli  écrivait  d'abord  l'ouverture  et 
les  airs  de  danse  ;  3°  achèvement  de  la  pièce ,  des  dialogues  et 
récitatifs  soumis  au  jugement  de  l'Académie  française;  4°  examen 
spécial  par  Perrault  et  Boileau ,  le  détracteur  acharné  de  Quinault, 
qualifiant  la  poésie  de  celui-ci  de 

...  Lieux  communs  de  morale  lubrique. 
Que  Lulli  réchauffa  des  sons  de  sa  musique. 

Plus  tard,  Voltaire  a  singulièrement  modifié  l'injuste  arrêt  du 
législateur  du  Parnasse.  Voilà  ce  que  nous  lisons  dans  son  Dic- 
tionnaire philosophique  :  «  Lulli  composait  d'abord  les  airs  de  tous 
ces  divertissements ,  le  poëte  y  assujettissait  les  paroles ,  Lulli  for- 
çait Quinault  d'être  insipide;  mais  les  morceaux  vraiment  poéti- 
ques  de  Quinault  n'étaient  certainement  pas  des  lieux  communs 

de  morale  lubrique Le   sévère  auteur   de   l'Art  poétique,   si 

supérieur  dans  son  seul  i^enre,  aurait  dû  être  plus  juste  envers  un 
homme  supérieur  aussi  dans  le  sien;  homme  d'ailleurs  aimable 
dans  la  société,  homme  qui  n'offensa  jamais  personne  et  qui  hu- 
milia Boileau  en  ne  lui  répondant  point.   » 

De  son  côté,  La  Harpe  venge  également  notre  premier  libret- 
tiste des  attaques  dont  il  fut  l'objet.  «   Une  élégance  aisée, 

noble  et  gracieuse ,  de  l'esprit  et  du  sentiment ,  du  goût  et  du 
nombre,  ce  .sont  là  certainement  des  attributs  très-distingués  et  ce 
sont  ceux  de  Quinault,  »  dit-il,  et^il  place  justement  comme  un 
modèle  le  plan,  les  situations,  la  versification  de  YArmide. 

C'est  dans  le  seizième  chant  de  la  Jérusalem  délivrée  que  se 
trouve  l'épisode  de  l'enchanteresse  Armide  et  de  l'invincible  Re- 
naud. Le  sujet  prêtait  merveilleusement  à  la  magnificence  de  la 
mise  en  scène,  aux  machines  et  aux  danses. 

Ce  fut  la  dernière  œuvre  et  en  même  temps  le  chef-d'œuvre  de 
Quinault. 

Les  scènes  sont  habilement  graduées;  la  tristesse  puis  le  dépi* 
de  la  magicienne  de  n'avoir  pu  vaincre  Renaud,  sont  exposés  sans 
emphase  et  bien  nuancés. 

Sourde  aux  sollicitations  d'Hidraot,  son  père,  qui  l'exhorte  à 
conclure  un  hyménée,  Armide  sent  naître  sa  colère  lorsqu'on 
lui  apprend  l'arrivée  victorieuse  du  guerrier.  Pour  le  vaincre,  elle 
fait  appel  à  ses  enchantements.  L'aspect  des  jardins  féeriques 
captive  le  héros  ;  il  se  dépouille  de  son  armure.  Des  sensations 
inconnues  et  indéfinissables  s'emparent  de  son  âme;  il  cède  enfin 
à  un  sommeil  plein  de  charme  et  de  volupté,  dans  une  atmo- 
sphère pleine  de  murmures  harmonieux. 

(1)  Voir  le  n"  39. 


316 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


C'est  ici  qrr-  se  noue  l'action  et  qu'Armide  espère  tenir  Renaud 
en  sa  puissance.  Quinault  s'est  surpassé  dans  ces  scènes  ou  éclate 
l'amour  de  la  magicienne.  Les  luttes  de  Renaud,  la  fureur  d'Ar- 
mide  quand  elle  craint  que  sa  proie  ne  lui  échappe,  son  évoca- 
tion et  l'apparition  de  la  Haine,  son  terrible  isolement  qui  termine 
le  poënie,  sont  des  pages  où  respire  un  vrai  souffle  lyrique. 

Sur  un  plan  inférieur  se  meuvent  des  personnages  secondaires, 
Ubalde  et  le  chevalier  Danois,  auxquels  Quinault  a  iinement 
donné  des  rôles  qui  par  leur  vérité  côtoient  sensiblement  la  co- 
médie. Tour  ii  tour  enlacés  et  séduits  par  les  grâces  de  deux 
démons  translormés  en  nymphes,  Mélisse  et  Lucinde,  leurs  actions 
démentent  aussitôt,  tant  qu'ils  sont  sous  la  puissance  des  char- 
meresses,  les  austères  objurgations  qu'ils  adressent  à  Renaud. 

La  première  représentation  de  YArmide  de  Quinault  et  Lulli 
eut  lieu  le  15  février  168C. 

C'est  à  cette  représentation  que  l'on  ratache  ce  mot  du  com- 
positeur, lorsqu'on  lui  dit  :  «  Le  roi  attend.  —  Le  roi  est  le 
maître,  s'il  veut  attendre  personne  ne  peut  l'en  empêcher.  »  La 
répartie  circula  de  bouche  en  bouche;  la  platitude  courtisanesque 
n'osa  applaudir  l'œuvre  de  crainte  de  déplaire  au  maître.  Armide 
n'eut  d'abord  qu'un  succès  médiocre.  Le  rusé  musicien  imagina 
de  se  faire  représenter  pour  lui  seul  son  opéra;  le  fait  fut  rap- 
porté k  Louis  XIV,  qui  se  ravisa  en  disant  :  «  Si  Lulli,  qui  s'y 
connaît,  entend  Armide,  je  peux  aussi  l'aller  voir.  » 

Le  chef-d'œuvre  du  librettiste  porta  bonheur  au  compositeur; 
ce  fut  le  seul  de  ses  opéras  qui  balança  plus  tard  les  œuvres  de 
Rameau;  il  ne  succomba  que  sous  les  coups  de  génie  de  Gluck. 

L' Armide  de  Lulli  se  maintint  au  répertoire  jusqu'en  1764;  au- 
jourd'hui, cette  partition  n'est  plus  qu'un  souvenir,  une  étude  ar- 
chéologique. 

Passons  sm-  une  ouverture  de  forme  étriquée  et  d'une  harmonie 
incolore,  passons  même  sur  toute  cette  mélopée  qui  tâtonne  dans 
le  vide  et  qui  forme  le  premier  acte,  et  arrêtons-nous  à  ces  mots 
du  deuxième  :  «  Fuyons  les  lieux  où  règne  Armide,  »  sur  lesquels 
se  dessine  une  ariette  très-heureuse.  Le  duo  :  «  Esprits  de  haine 
et  rage,  >i  commencé  par  Hidraot,  est  traité  scolastiquement  en 
canon.  Dans  l'air  du  Sommeil,  il  y  a  une  lueur  d'accompagne- 
ment descriptif  dans  les  coulés  des  violons  et  des  basses.  Voici  en- 
fin le  morceau  capital  de  la  partition  de  Lulli,  le  monologue 
d' Armide  :  i  Enfin  il  est  en  ma  puissance,  »  auquel  Rameau 
consacra  une  corapendieuse  analyse. 

Ici  se  révèle  le  sens  particulier  de  Lulli  pour  la  déclamation 
lyTique.  —  La  phrase  pressent  déjà  le  sentiment  poétique,  la  note 
accentue  souvent  le  mot  avec  une  profonde  justesse.  Quand  Armide 
s'écrie  :  «  Frappons,  je  veux  percer  son  invincible  cœur,  »  l'excla- 
mation lancée  sur  le  mot  «  frappons  »  se  traduit  presque  de  la 
même  manière  par  Gluck  que  par  Lulli. 

Le  début  de  la  première  phrase  de  ce  morceau  a  une  certaine 
A'éhémencc,  et  les  franches  modulations  de  mi  mineur  en  sol  majeur, 
l'allure  rliythmique  alternant  la  mesure  de  binaire  en  ternaire, 
classent  cette  page  comme  un  jalon  dans  l'histoire  de  l'art  lyrique. 
L'accompagnement  se  fait,  il  est  vrai,  par  de  longues  tenues,  mais, 
songeons-y,  nous  sommes  en  1686  !  Laissons  le  reste  de  la  partition 
dormir  dans  une  «  noble  poussière  :  »  un  récitatif  somnolent  pèse 
lourdement  sur  toutes  les  syllabes;  çà  et  là  quelques  lueurs 
d'accentuation,  et  c'est  tout.  En  1686  on  trouva  cela  sublime. 

L'opéra  à'Armide  était  à  cette  époque  précédé  d'un  prologue, 
fastidieux  et  insipide,  comme  le  sont  tous  ceux  qui  ne  se  lient  pas 
à  l'action. 

On  était  au  lendemain  de  la  victoire  de  Denain.  Le  maréchal 
de  Villars,  assistant  à  l'une  des  représentations,  reçut  une  couronne 
de  lauriers  des  mains  de  la  Gloire,  représentée  par  Mlle  Antier. 
Le  succès  d'Armide  devint  décisif. 


Jouée  avec  perruques  à  massues,  queues  à  la  conseillère,  tonne- 
lets de  satin  brodé,  canons  et  rhingraves  enrubannés,  avec  Renaud 
aux  boucles  de  jarretières  incrustées  dans  les  mollets  et  ayant  son 
épée  garnie  de  pierreries,  ' 

La  famosa  spada 

AU'  oui  valore  ogni  villoria  è  certa... 

Armide,  avec  un  orchestre  de  trente-trois  musiciens,  produisit 
grâce  au  jeu  de  Mlle  Le  Rochois  un  effet  extraordinaire. —  Cette 
célèbre  actrice,  malgré  sa  petite  taille,  sa  laideur,  son  teint  forte- 
ment bruni;  pour  laquelle  on  avait  inventé  les  manches  à  la 
persane  afin  de  mieux  dissimuler  les  angles  de  ses  bras,  possédait 
un  admirable  sentiment  dramatique.  Des  yeux  noirs,  pleins  de 
feu,  une  voix  étendue  et  remplie  de  passion,  la  rendaient  l'idole 
du  public. 

Lorsque  Marthe  Le  Rochois  paraissait  en  scène,  entre  les  deux 
plus  belles  actrices  de  l'époque,  Slllés  Moreau  et  Desmâtins,  et 
qu'au  premier  acte,  à  ces  mots  : 

Je  ne  triomphe  pas  du  plus  vaillant  de  tous, 
L'indomptable  Renaud  échappe  à  mon  courroux, 

elle  étendait  les  bras  comme  pour  saisir  le  héros  chrétien;  sa 
physionomie  prenait  une  telle  expression  qu'elle  éclipsait  ses 
confidentes. 

Au  dernier  acte,  quand  elle  s'avançait  pour  poignarder  Renaud, 
«  tout  le  monde  était  saisi  de  terreur,  dit  un  contemporain,  l'âme 
tout  entière  dans  les  oreilles  et  les  yeux,  jusqu'à  ce  que  l'air  de 
violon  qui  finit  la  scène  donnât  permission  de  respirer  ;  puis  les 
spectateurs,  reprenant  haleine  avec  un  frémissement  de  joie  et 
d'admiration,  se  sentaient  transportés  par  ce  mouvement  unanime 
qui  marquait  assez  la  beauté  de  la  scène  et  leur  ravissement.  » 

Franchissons  maintenant  un  espace  de  quatre-vingt-onze  ans, 
presque  un  siècle,  et  voyons  ce  que  le  même  poème  est  devenu 
entre  les  mains  de  Gluck. 

A.  THURNER. 
{La  suite  prochainement.) 


WÀCHTEL  ET  LE  POSTILLON  DE  LONJUMEÀU. 

On  ne  voit  que  trop  souvent,  par  le  temps  qui  court,  un  infor- 
tuné directeur  de  théâtre  passer  tout  le  temps  de  son  exploitation 
à  chercher  un  ténor  et  y  user  ses  forces  et  son  activité.  Tel  n'est 
point  le  sort  du  directeur  de  l'Opéra-royal  de  Berlin  ;  plongé  dans 
une  douce  quiétude,  il  peut,  à  son  aise,  plaindre  ses  confrères  et 
leur  dire  avec  un  certain  orgueil  :  «  Vous  n'avez  pas  de  ténor, 
vous?  eh  bien,  moi,  j'en  ai  deux,  et  qui  font  la  besogne  de  quatre, 
car  nous  jouons  tous  les  jours,  ou  à  peu  près.  »  Et  ces  ténors 
s'appellent  Wachtel  et  Niemann  !  De  ces  deux  célébrités,  une  seule 
est  bien  connue  à  Paris,  c'est  Niemann  qui  fut  engagé  par  notre 
première  scène  lyrique  pour  le  Tanhœitser,  d'orageuse  mémoire. 
Quant  à  Wachtel,  s'il  a  été  entendu  du  public  parisien,  ce  n'a  été 
que  par  les  auditeurs  d'un  concert  auquel  il  prêta  son  concours 
et  c'est  au  retentissement  de  ses  succès  à  l'étranger  qu'il  doit  sa 
notoriété  en  France .  Plusieurs  journaux  s'étant  récemment  occu- 
pés de  lui,  à  propos  du  Postillon  de  Lonjumeau  et  de  la  supério- 
rité avec  laquelle  il  joue  le  rôle  principal  de  l'opéra  d'Adam,  il 
nous  a  paru  que  quelques  détails  sur  sa  personne  et  ses  débuts 
dans  la  carrière  artistique  ne  seraient  pas  dépourvus  d'opportunité. 

Wachtel  naquit  à  Hambourg  en  1827.  Il  reçut  ses  premières 
leçons  de  chant  de  Mlle  Grandjean,  professeur  alors  en  re- 
nom dans  cette  ville,  et  qui  sut  découvrir  le  trésor  qu'il  possédait 
sans  s'en  douter,  cette  voix  splendide  et  souple  qu'on  admire  en- 


DE  PARIS. 


317 


core  dans  toute  sa  beauté  première.  WaGhtel  clianta  d'abord  dans 
quelques  concerts;  ses  débuts  au  théâtre  de  Scliwerin  et  de 
Dresde  furent  peu  remarqués.  Mais  il  ne  tarda  pas,  en  abordant 
des  rôles  à  sa  taille,  à  faire  sensation  dans  le  public,  qui  l'adopta 
définitivement  et  le  proclama  le  roi  des  ténors  allemands.  L'étendue 
de  sa  voix  est  de  deux  octaves  pleines,  d'uf  en  ut,  dans  le  registre 
de  poitrine;  il  monte  jusqu'au  mi  en  voix  mixte. 

Le  répertoire  de  Wachtel  se  chiffre  par  le  nombre  fantastique 
de  soixante  opéras.  Celui  où  il  s'est  produit  le  plus  souvent  dans 
le  cours  d'une  carri^-re  courte,  mais  encore  bien  remplie,  c'est  le 
Postillon  de  Lonjumeau  d'Adolphe  Adam  :  il  le  jouait,  il  y  a  quel- 
ques mois,  pour  la  millième  fois.  Cet  ouvrage,  fort  populaire  en 
Allemagne,  lui  vaut  chaque  fois  une  ovation,  et,,  comme  en  dehors 
de  son  service  à  Berlin,  il  est  toujours  par  moiïts  et  par  vaux,  en 
Gastspiel  (lisez  :  en  représentations),  à  droite  et  à  gauche,  toutes 
les  villes  un  peu  importantes  d'outre-Rhin  ont  pu  admirer  la 
verve  et  la  crânerie  avec  lesquelles  il  s'incarne  en  Chapelou.  Aussi 
ce  rôle  a-t-il  toutes  ses  tendresses. 

On  a  beaucoup  parlé  d'un  grand  élément  de  succès  qu'il  devrait 
à  la  façon  magistrale  dont  il  fait  claquer  son  fouet.  Alors  que, 
dans  tous  les  théâtres,  la  ritournelle  de  la  fameuse  Ronde  est  ac- 
compagnée par  des  claquements  exécutés  à  l'orchestre  au  moyen  de 
deux  lanières  de  cuir,  lui  joue  du  fouet,  en  mesure,  avec  une  pré- 
cision, une  égalité,  une  beauté  de  son  que  ne  peut  posséder  qu'un 
postillon  artiste...  Aussi  bien,  n'est-ce  qu'une  réminiscence  des 
premières  arjnes  de  Wachtel,  faites  sur  le  siège  des  voitures  de 
louage  dont  son  père  avait  l'entreprise  à  Hambourg,  et  qui  lui 
valurent  jadis  le  titre  de  «  roi  des  cochers  hambourgeois;  »  titre 
auquel  il  tient  encore  à  faire  honneur,  car  il  a  conservé  le  goût 
des  beaux  équipages,  et  il  emploie  une  partie  de  sa  fortune  à  en- 
tretenir des  attelages  superbes. 

Si  l'on  en  croît  la  chronique,  le  précieux  fouet  serait,  après  chaque 
représentation  du  Postillon,  serré  avec  soin  dans  une  boîte  spé- 
ciale, presque  un  écrin,  dont  Mme  Wachtel  seule  a  la  garde.  Il 
paraît  que  tous  les  fouets  ne  sont  pas  bons  :  celui-là  a  sans  doute 
des  qualités  particulières  de  sonorité,  d'élasticité,  de  mordant,  il 
se  prête  aux  nuances,  il  obéit  mieux  que  tout  autre  à  l'inspira- 
tion du...  bras  de  l'artiste;  c'est  un  fouet  sans  pareil,  enfin,  et 
Wachtel  s'y  connaît. 

Il  y  a  quelque  temps,  un  journal  allemand  nous  apprenait 
qu'un  chanteur  dont  les  lauriers  de  son  illustre  rival  troublaient 
le  sommeil,  a  voulu  enchérir  sur  lui,  et  qu'il  a  accompagné  la 
ritournelle  en  question  avec  le  cornet  de  postillon.  C'est  tout  aussi 
couleur  locale;  mais,  quoi  qu'on  puisse  en  penser,  c'est  peut- 
être  moins  difficile.  D'ailleurs,  le  cornet  de  postillon  —  bien  qu'il 
ait  été  ennobli  par  Sébastien  Bach,  à  qui  il  a  inspiré  une  fugue, 
—  semble  n'avoir  pas  fait  son  chemin,  pas  plus  au  théâtre  que  sur 
les  grandes  routes.  Le  fouet  mélodieux  de  Wachtel  l'aura  réduit 
au  silence. 

Wachtel  a  un  fils,  ténor  comme  lui,  qui  a  débuté  l'année  der- 
nière à  Leipzig,  et  qui  depuis  a  chanté  à  Vienne.  Mais  il  n'a 
guère  d'autre  recommandation  que  le  nom  de  son  père. 

Toutes  les  gazettes  allemandes  annonçaient  ces  jours  derniers 
que  Wachtel  venait  d'acheter  la  magnifique  villa  Blomberg,  à 
Wiesbaden.  Raison  de  plus  pour  qu'après  les  mille  représentations 
du  Postillon,  le  fouet  en  question  ait  passé  à  l'état  de  fétiche  ! 

XX. 


lOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 

^**  Le  Théâtre-Impérial  de  l'Opéra  a  donné  lundi  et  mercredi  Hamlet; 
vendredi  le  Trouvère  avec  le  premier  acte  de  Giselle.  —  Aujourd'hui 
dimanche,  représentation  extraordinaire  de  l'Africaine. 

***  Mme  Adelina  Patti  et  Fraschini  devant  chanter  ensemble  le  plus 
grand  nombre  possible  d'opéras  différents,  avant  leur  départ  pour  Saint- 
Pétersbourg  et  l'arrivée  do  Mlles  Minnic  Hauck,  lima  de  Murska  et 
Tamberlick,  il  no  sera  donné  aveo  eux  qu'une  ou  deux  représentations 
de  chaiiue  opéra  de  leur  répertoire.  —  On  a  donc  joué  hier  JHgolelto  qu'ils 
interprétaient  avec  Délie  Sedie.  —  Mardi  aura  lieu  dans  Crispino  c  la 
Comarc  le  début  de  Mlle  Ricci,  fille  de  l'un  des  auteurs  de  cet  opéra- 
bouffe  et  nièce  de  Frédéric  qui  est  en  ce  moment  à  Paris.  Mlle  Ricci  a 
déjà  chanté  en  Italie.  Elle  doit  faire  son  second  début  dans  le  rôle  de 
la  Contessina  du  prince  Poniatowski,  lequel  l'ut  créé  par  Mme  Tiberini. 

*%  M.  Bagicr  n'a  qu'à  se  féliciter  des  soins  qu'il  a  apportés  à  l'or- 
ganisation de  sa  saison  d'hiver.  Les  abonnés  s'inscrivent  avec  empresse- 
ment et  l'on  comptait  à  la  soirée  d'ouverture  toutes  les  notabilités  pré- 
sentes à  Paris. 

**ij;  Le  chef  d'orchestre  du  théâtre  de  l'Opéra-Comique,  M.  Tilmant, 
a  été  frappé  hier  d'une  congestion,  à  la  suite  de  laquelle  il  est  menacé 
de  paralysie.  —  Plusieurs  concurrents  sont  déjà  sur  les  rangs  pour  lui 
succéder  au  pupitre  de  chef  d'orchestre.  On  cite  MM.  Maton ,  Deloffre , 
Bazile  et  Merle. 

^5*»  On  annonce  les  nouveaux  engagements  de  Mlle  Orgeni,  de  Mlle 
Sarolta  et  de  Mlle  Formi,  faits  par  M .  Pasdeloup  pour  le  théâtre  Lyri- 
que. Mlle  Formi  est  élève  de  Wartel. 

*'*.j5  On  a  donné  hier  aux  Fantaisies-Parisiennes  un  petit  acte,  Ger- 
vaise,  de  MM.  Lefebvre  et  Bouvier,  musique  de  M.  F.  Barbier,  en  at- 
tendant une  pièce  plus  importante  de  ce  dernier,  le  Soldat  malgré  lui, 
dont  MM.  Chivot  et  Duru  ont  écrit  le  poëme  et  qui  se  répète  avec  acti- 
vité. Une  jeune  chanteuse  qui  a  obtenu  des  succès  en  province, 
Mlle  Flachat  doit  y  débuter.  —  M.  Fr.  Ricci  assistait  à  la  soirée  de 
réouverture.  Son  opéra,  M.  de  la  Palisse,  ne  sera  représenté  qu'à  la  fin 
de  l'année;  il  sera  interprété  par  Mlle  Marimon,  Mmes  Cazat,  Decroix, 
MM.  Soto,  Arsandaux  et  Brisson.  —  On  répète  avec  activité  la  Fête  du 
Village  voisin,  de  Boïeldieu. 

^*^  Fleur  de  Thé  ne  s'est  point  arrêtée  à  la  centième  représentation; 
elle  continue  à  occuper  l'affiche  en  attendant  la  première  du  Petit  Pou- 
cet, annoncée  comme  très-prochaine  et  qui  passera  immédiatement 
après  la  première  de  la  Périchole. 

,*^  Vendredi  et  hier  ont  eu  lieu  les  répétitions  générales  de  la  Péri- 
chole avec  costumes  et  décors.  —  Demain  première  représentation. 

,f*^  On  nous  écrit  de  Marseille  que  la  réouverture  du  Grand-Théâtre 
s'est  faite  le  26  septembre,  devant  une  salle  comble,  par  le  Trouvère. 
Michot,  Roudil  et  Mme  Lafont  ont  obtenu  un  véritable  triomphe  dans 
cette  belle  soirée  qui  fait  on  ne  peut  mieux  augurer  de  la  saison. 

s^*^  On  lit  dans  les  journaux  anglais  qu'au  dernier  acte  des  Huguenots, 
joués  à  DuWin,  le  ténor  Mongini  a  été  atteint  d'un  coup  de  sabre  à 
l'oreille.  Cet  accident,  qui  pouvait  avoir  des  suites  fâcheuses  pour  le 
célèbre  ténor,  a  causé  une  certaine  émotion  dans  la  salle.  Un  médecin 
qui  s'y  trouvait  et  bientôt  deux  de  ses  confrères  appelés  en  toute  hâte, 
ont  constaté  que  la  blessure,  quoique  saignant  beaucoup,  n'était  pas  dan- 
gereuse, et  ils  ont  pu  rassurer  le  public,  qui  n'avaii  pas  voulu  quitter  la 
salle  avant  de  connaître  par  eux  l'état  du  blessé. 

,**  Après  avoir  échappé  miraculeusement  à  un  accident  qui  pouvait 
lui  coûter  la  vie,  Mlle  Désirée  Artôt  est  arrivée  à  Moscou,  où  la  saison 
du  théâtre  italien  s'est  ouverte  le  21  par  Otdlo.  Nous  avons  dit  l'enthou- 
siasme provoqué  l'hiver  dernier  par  la  célèbre  cantatrice,  les  ovations 
qui  lui  furent  fuites  par  les  dilettantes  moscovites,  le  magnifique  engage- 
ment qui  en  fut  le  résultat  et  l'abonnement  formidable  qu'obtint  l'im- 
présario Merelli  sur  Pannonce  seule  de  cet  engagement.  Le  rôle  de  Des- 
demona  est  un  de  ceux  dans  lesquels  brillent  les  grandes  qualités  drama- 
tique de  Mlle  Artôt  ;  elle  y  a  donc,  à  tous  ces  titres,  été  reçue,  dès  son 
entrée,  par  des  acclamations  qui  ont  duré  plusieurs  minutes;  après  quoi 
chacun  de  ses  morceaux  dans  le  chef-d'œuvre  de  Rossini  a  été  Pocca- 
sion  de  bravos  et  de  rappels  sans  fin.  Un  splendide  bouquet,  envoi  du 
gouverneur  général,  et  de  riches  boucles  d'oreilles,  présent  d'un  admira- 
teur de  son  talent,  ont  signalé  cette  première  soirée.  —  Otello  a  dû  être 
donné  de  nouveau  le  lendemain,  et  sera  suivi  de  la  Figlia  del  regimento. 
—  Le  ténor  Stanio,  qui  rappelle  par  moments  Tamberlick,  possède  une 
voix  mâle  et  bien  timbrée,  il  chante  fort  bien  et  joue  d'une  façon  rare 
pour  un  Italien;  il  a  reçu  un  excellent  accueil.  —  On  attend  mainte- 
nant dans  il/ose  le  début  des  autres  artistes.  —  La  saison  se  prolongera 
de  quinze  jours  au  delà  du  terme  fixé.  La  direction  des  théâtres  impé- 
riaux offre  à  Merelli  un  contrat  de  deux  ans;  s'il  l'accepte,  il  engagerait 
immédiatement  Mlle  Artôt  pour  tout  le  temps  que  durerait  son  entre- 
prise. 


318 


liEVIE  KT  GAZETTE  MUSICALE 


NOUVELLES  DIVERSES. 

***  La  réouverture  dos  Concerts  populaires  rte  musique  classique  aura 
lieu  le  rtimanclie  18  octobre ,  sous  la  directiou  de  M.  Pasdeloup.  Les 
abonnés  qui  désirent  conserver  leurs  places  sont  priés  d'en  faire  retirer 
les  coupons  dans  les  bureaux  de  location  avant  le  12  octobre;  passé 
celle  époque,  l'administration  en  disposera. 

*■*,  C'est  vendredi,  9  de  ce  mois,  qu'ouvrira  le  Concert  Valentino  sous 
la  direction  d'Arban.  L'éminent  chef  d'orchestre  a  voulu  donner  à  cette 
inauguration  toute  la  solennité  possible;  c'est  donc  par  un  très-beau  con- 
cert qu'elle  aura  lieu,  et  entre  autres  compositions  de  grande  musique 
on  y  entendra  sa  remarquable  fantaisie  sur  les  Iliifjuenoh,  pour  orchestre 
avec  chieurs. 

*•»  Paris  compte  en  ce  moment  vingt-huit  cafés-concerts,  disséminés 
sur  tous  les  points  de  la  capitale. 

^%  Les  différents  corps  de  musique  militaire  qui  jouaient  quotidien- 
nement dans  les  jardins  des  Tuileries,  du  Palais-Royal  et  à  la  place  Yen- 
dôme,  ont  cessé  ces  concerts.  A  celui  du  20  septembre  de  la  gai'de  de 
Paris,  que  dirige  avec  tant  de  talent  M.  Paulus,  a  été  exécutée  devant 
3  ou  -i,Ol)0  auditeurs  la  grande  fantaisie  composée  par  M.  Maury  sur 
des  motifs  de  l'Africaine.  On  ne  saurait  se  faire  une  idée  de  l'enthou- 
siasme qu'elle  a  excitée;  toutes  les  mains  battaient  à  l'cnvi  devant  cette 
belle  composition  admirablement  rendue.  —  La  pollia  d'EtIling,  2cr- 
line,  jouée  en  solo  par  Ligner  sur  le  cornet  avec  un  grand  talent,  a  élé 
ensuite  un  des  morceaux  les  plus  applaudis.  Au  surplus,  cette  œuvre 
très-jolie  a  été  jouée  très-souvent  cet  été,  dans  les  concerts  militaires  et 
par  les  orchestres  des  eaux  thermales  et  des  bains  de  mer. 

»*«  Mme  Ugalde  compte  passer  l'hiver  à  Paris  et  y  reprendre  ses 
cours  de  chant.  Elle  compose  en  ce  moment  la  musique  d'une  grande 
féerie  en  cinq  actes  destinée  à  un  de  nos  grands  théâtres. 

,*,  Notre  collaborateur,  Paul  Bernard,  l'éminent  pianiste-compositeur, 
vient  de  rentrer  à  Paris,  où  il  va  reprendre  ses  k^'ons  et  ses  cours  de 
piano.  On  sait  de  quelle  réputation  ils  jouissent  et  à  quel  point  ils  .sont 
suivis.  —  C'est  donc  une  bonne  nouvelle  pour  .ses  nombreuses  élèves. 

^*^,  Le  compositeur  anglais  Alfred  Holmes  est  de  retour  à  Paris,  où 
il  a  fixé  sa  résidence.  Il  vient  de  terminer  une  symphonie  pour  grand 
orchedre  dont  le  titre  est  :  la  Jeunesse  de  Shakespeare,  et  il  travaille  en 
ce  moment  à  un  grand  opéra  dont  les  paroles  sont  de  MM.  Louis  Ul- 
bach  et  Labat.  11  fera  certainement  entendre  cet  hiver  sa  belle  sym- 
phonie héroïque  Jeanne  Darc,  pour  orchestre,  chœurs  et  solis,  qui  a  eu 
l'an  dernier  un  si  beau  succès  au  théâtre  du  Grand-Opéra,  à  Saint-Pé- 
tersbourg . 

*»  Sivori  vient  de  recevoir  du  roi  Victor-Emmanuel  l'ordre  de  la 
Couronne  d'Italie. 

^*»  M.  Cabel  a  rouvert  ses  cours  le  1°'  septembre.  Son  enseignement 
comprend  l'étude  du  chant,  de  la  déclanintion  lyrique,  de  l'analyse  des 
rôles  (musique  et  poëme),  de  la  musique  d'ensemble,  de  la  mise  en 
scène,  enfin  de  tout  ce  qui  constitue  l'éducation  complète  du  chanieur- 
comédien. 

»%  Mlle  Anna  Bockholtz-Falconi,  cantatrice  de  la  cour  ducale  de  Saxe- 
Cobourg-Gotha,  ei  professeur  de  cliant  au  Conservatoire  de  Vienne,  est 
en  ce  moment  à  Paris.  Les  nombreux  élèves  de  celte  artiste  distinguée 
ont  à  peu  près  tous  conquis  une  place  honorable  sur  les  scènes  alle- 
mandes :  tout  récemment  encore,  un  journal  d'outre-Rhin  nous  appor- 
tait la  nouvelle  d'un  succès  aux  proportions  inusitées  remporlé  par  l'une 
d'elles,  Mlle  Minna  Ritter,  de  l'Opéra  de  Munich,  à  un  grand  concert 
donné  à  Salzbourg  en  l'honneur  de  l'anniversaire  de  la  naissance  de 
l'empereur  François-Joseph. 

^*jt  Des  savants  anglais  ont  calculé  la  somme  d'intensité  qu'acquerrait 
la  voix  humaine  si  le  son  émis  par  elle  était  en  proportion  du  volume 
du  corps,  comparativement  à  celui  de  la  sauterelle.  Cet  insecte  se  fait 
entendre  à  une  distance  de  un  seizième  de  mille.  Un  homme  pèse  en 
moyenne  autant  que  26,000  saulerelli's:  si  son  appareil  vocal  était  aussi 
puissant  que  celui  de  la  sauterelle,  l'iiomme  pourrait  se  faire  entendre  à 
une  di.staiice  de  1,000  milles,  c'est-à-dire  que  de  Londres,  par  exemple, 
sa  voix  irait  au  delà  de  Constanlin'iple  jusque  dans  l'Asie- Miueure, 
et  qu'elle  dépasserait  Moscou  de  100  milles. 

,*^  M.  Auguste  Dès  vient  de  commencer  le  quatrième  volume  de  sa 
Biouraphie  des  musiciens  anciens  et  modernes,  avec  te  calalojiie  complet  de 
leurs  œuvres.  Trois  volumes  ont  déjà  paru  de  ce  curieux  et  indispensa- 
ble recueil  qui  e^t  en  que'que  sorte  le  manuel  du  liiiraire  et  de  l'édi- 
teur de  musique.  C'était  là,  au  surplus,  une  lacune  que  M.  Dès,  armé 
d'une  patience  à  toute  épreuve,  a  entrepris  de  combler.  S'il  mène  à 
bien  celte  entreprise,  s'il  arrive  à  dre.sser  le  catalogue  raisonné  des  œu- 
vres publiées  et  inédites  de  tous  les  compositeurs,  l'auteur  aura  bien 
mérité  le  titre  de  Bruuct  de  la  Bibliographie  musi<"ale.  Chaque  volume 
contient  plus  de  cent  noms  et  est  illustré  de  portraits  fort  intéressants. 

aj*.  Dans  quelques  jours  paraîtra  une  nouvelle  composition  pour  le 
piano  de  M.  Hubert  Rolling,  pianiste  émiiient  de  la  Nouvelle-Orléans. 


Sous  le  titre  pittoresque  d'Harmonie  de  la  nature,  l'auteur  applaudi  de 
l'Appel  à  Dieu  a  écrit  un  véritable  poëme  musical  dont  nous  rendrons 
compte  incessamment. 

^*^  Mme  Rosina  Stoltz  (1),  aujourd'hui  baronne  de  Stolzenau  de 
Ketschendorf,  vient  de  recevoir  la  décoration  de  l'ordre  du  Mérite,  fondé 
par  Ernest  l"  et  affilié  à  l'ordre  ducal  de  la  Maison  Ernestine  de  Saxe. 

**4  Le  laryngoscope  pénètre  peu  à  peu  dans  la  pratique  médicale  pa- 
risienne. Cette  nouvelle  intéresse  le  monde  de  la  musique  et  du  théfitre, 
en  ce  sens  que  cet  appareil,  de  l'invention  du  physicien  anglais  Drum- 
mond,  permet  au  médecin  de  diagnostiquer  et  d'opérer  en  toute  certi- 
tude dans  les  affections  du  larynx.  Un  miroir  éclairé  par  un  courant 
d'oxygène  et  d'Iiydrogène  carburé,  en  contact  avec  un  morceau  de  craie, 
réfléchit  cette  lumière  d'une  intensité  extraordinaire  sur  les  parois  du 
larynx,  dont  il  reproduit  l'image  si  fidèlement  qu'aucune  altération  ne 
peut  échapper  au  praticien.  Ce  dernier  peut  observer  facilement  ainsi  la 
structure  et  la  couleur  des  cordes  vocales,  qui  diffèrent  essenliellement 
dans  chaque  individu  :  voir,  par  exemple,  si  elles  sont  longues  et  larges 
chez  la  basse-taille,  courtes  et  étroites  chez  le  ténor;  d'une  proportion 
rationnelle  pour  les  voix  intermédiaires.  L'examen  laryngosnopique  in- 
telligent ne  pourrait-il  pas  permettre  aux  professeurs  de  cla.sser  leurs 
élèves  débutants  suivant  le  registre  véritablement  en  rapport  avec  leur 
appareil  phonique?  Que  de  voix  ménagées,  épargnées  de  cette  manière  ! 
S'il  était  permis  de  mettre  en  doute  le  zèle  et  la  bonne  volonté  constante 
des  artistes  lyriques,  nous  ajouterions  que  les  impresarii  rencontreraie.nt 
dans  le  laryngoscope  un  puissant  auxiliaire  pour  combattre  le  fléau  des 
extinctions  de  voix  factices.  En  effe',  dès  qu'il  n'y  a  pas  rougeur  des 
cordes  vocales,  tant  qu'elles  gardent  leur  coloration  nacrée,  la  voix  est 
vigoureuse  et  l'instrument  ne  fera  pas  défaut;  c'est  là  un  fait  avéré. 
Ceux  qui  chantent  ou  qui  parlent  en  public  ne  pourront  dans  tous  les 
cas  qu'.ipidaudir  à  une  découverte  qui  permet  de  reconnaître  de  visu  toute 
maladie  di;  la  gorge,  d'en  suivre  la  marche,  d'en  arrêter  les  progrès  et 
d'en  amener  par  conséquent  la  guérison. 

*'*'^f  Les  matinées  de  la  villa  Makenzio,  à  Saint-Germain  en-Laye,  con- 
tinuent à  exciter  l'intérêt  du  monde  artiste.  La  dernière  avait  même 
emprunté  un  vif  éclat  à  la  présence,  chez  Mme  Makenzie,  de  Mlle  Fal- 
coni,  la  brillante  cantatrice  italienne  que  Paris  a  trop  peu  entendue, 
mais  que  l'Allemagne  garde  avec  un  soin  jaloux  et  que  le  Conservatoire 
de  Vienne  a  chargée  d'une  classe  de  perfectionnement  de  l'art  du  chant, 
qui  ne  pourrait  se  trouver  en  meilleures  mains.  On  a  donc  fait  d'exi-el- 
lentc  nmsique  mardi  dernier  chez  Mme  Makenzie,  et  nous  devons  citer 
tout  particulièrement  l'exécution  du  'grand  septuor  de  Hummel,  réduit 
en  quintette  et  interprété  par  MVL  Norblin,  Lefaucheux,  le  violoni.ste 
Lecoinle  et  Mme  Makenzie.  Ces  deux  derniers  artistes  ont  joué  avec  une 
grande  maestria  et  une  entente  incomparable  des  nuances  la  sonate  à 
Kreutzer,  et,  dans  deux  airs  de  Mercadante  et  de  Pergolèse,  Mlle  Ealconi 
a  fait  admirer  sa  belle  voix  et  sa  méthode  sans  rivale.  Ajoutons  qu'une 
toute  jeune  et  ravi.ssante  élève  de  Mme  Makenzie  s'est  fait  entendre  dans 
cette  matinée  et  a  joué,  avec  quelque  timidité,  mais  aussi  avec  une  grande 
jus'ese  et  une  certaine  vigueur,  une  sonate  de  Beethoven  et  une  grande 
fantaisie  sur  Don  Juan.  C'est  là  un  début  qui  promettrait  beaucoup  si  la 
jeune  artiste,  comme  la  plupart  des  élèves  de  Mme  Makenzie,  n'était  des- 
tinée à  un  brillant  avenir  et  cultivait  le  piano  autrement  qu'à  l'état 
d'art  d'agrément. 

^*^  Vendredi  23  septembre,  la  Société  chorale  des  Enfants  de  Saint- 
Denis,  dirigée  par  M.  Victor  Desmet,  et  la  Société  d'étude  musicile,  mu- 
sique municipale  de  cette  ville  dont  le  chef  est  M.  Alexandre  Artus,  ont 
donné  à  leurs  membres  honoraires  une  soirée  musicale  fort  intéressante. 
Dans  l'interprétation  de  plusieurs  chcèurs,  le  Duquesnc,  de  François  Ba- 
zin, et  YAdieu,  de  Camille  de  Vos,  entre  autres,  les  Orphéonistes  de 
Saint-Denis  ont  mis  en  évidence  les  qualités  artistiques  qui  les  ont  éle- 
vés et  les  maintiennent  au  rang  des  meilleures  sociétés  chorales  de  la 
région.  Les  progrès  de  la  musique  municipale  affirment  le  zèle  et  l'ha- 
bileté de  son  chef.  Des  fragments  du  Désert,  des  fantaisies,  la  polka  des 
Oiseaux,  d'Arban,  ont  été  exécutés  avec  beaucoup  do  soin,  de  goût  et 
d'cutrain.  L'union  de  ces  deux  sociétés  musicales  d'une  même  ville  est 
du  meilleur  exemple  :  elle  fait  honneur  à  l'esprit  de  conciliation  qui 
anime  Inurs  membres  et  que  développent  leurs  honorables  présidents, 
MM.  H.  Guillaume  et  Gérard. 

^*^  Au  concours  d'orphéons  qui  a  eu  lieu  dimanche  dernier  à  Arca- 
clion,  le  jury,  présidé  par  M.  Ch.  Vervoitte,  a  décerné  le  premier  prix 
de  la  première  diusion  à  la  Girondiue,  de  Bordeaux,  société  chorale  de 
fondation  récente. 

s,*4  Dimanche  dernier,  !a  ville  de  Biarritz  ouvrait  un  concours  musi- 


(!)  Vii-.toire  Noeb.  dite  Rosine  Stoltz,  née  à  Paris,  le  13  février  1S13, 
de  parents  allemands,  épousa  à  Bruxelles,  le  2  mars  1837,  M.  Alphonse- 
4u"iiste  Lescuyer,  lU  Rouen,  dont  elle  est  devenue  veuve  sans  dnute 
puisque  l'ancienne  prima  donna  du  théâtre  de  la  Monnaie  de  Bruxelles, 
puis  de  l'Opéra  de  Paris,  où  elle  brilla  longtemps  sous  la  direction  de 
Léon  PiUet,  porte  aujourd'hui  un  autre  nom  avec  le  titre  de  baronne. 
(Note  du  Guide  musical  belge.) 


UE  PAKIS 


319 


cal  qui  avait  attiré  un  grand  nombre  de  sociétés  chorales  et  instrumen- 
tales,—un  millier  d'exécutants  environ,  — ainsi  que  toutes  les  populations 
basques  voisines  de  cette  ville  et  de  Bayonne.  L'iîmpereur,  l'Impéralrice 
et  le  Prince-Impérial  ont  assisté  au  concours  qui  a  éti'  dos  plus  brillants. 
Les  honneurs  de  la  journée  sont  restés  à  la  Fanfare  Rollet,  de  Bordeaux, 
à  laquelle  l'Empereur  a  daigné  témoigner  la  satisfaction  que  lui  avait 
causés  l'interprétation  d'une  fantaisie  délicieuse  sur  ta  Part  du  Diable. 
Après  une  promenade  aux  flambeaux,  un  punch  a  été  servi  par  les 
ordres  de  l'Empereur  aux  sociétés  chorales  et  instrumentales,  réunies 
dans  l'établissement  des  bains,  sous  la  présidence  de  M.  d'Auribeau, 
préfet  des  Basses-Pyrénées. 

^*f.  On  lit  dans  le  Guide  musical  behje  :  «  A  l'occasion  du  Congres  des 
savants  à  La  Haye,  il  a  été  donné  un  grand  concert  national  au  théâtre. 
Denx  cents  chanteurs  et  un  orchestre  complet  ont  fort  bien  fonctionné 
sous  la  direction  de  iMM.  W.  F.  G.  Nicolaï,  Hol  et  Verhulst.  Los  solistes 
étaient  Mme  Offermans  van  Hove,  soprano;  une  dilettante  d'Utrecht  (con- 
tral(o)  ;  M.  Warnols,  de  Bruxelles  (ténor)  ;  M.  Schelfouth  (baryton),  et  un 
dilettante  de  La  Haye  (basse).  Le  programme  se  composait  d'une  ouver- 
ture de  Bocrs  et  de  Hciligcrlce,  cantate  de  circonstance  composée  par 
Hal,  comprenant  dix  numéros  pour  solo  et  chœur.  A  la  deuxième  partie, 
on  a  entendu  Haasken  van  Gelder,  de  Nicolaï,  œuvre  nationale  s'il  en  fut 
jamais,  et  à  travers  laquelle  le  fameux  Wilhelmusvan  Nassauioen  revient 
toujours  et  finit  par  faire  explosion  vers  la  fin.  Toute  la  salle,  y  com- 
pris la  Cour,  s'est  lovée  et  a  entonné  Fair  patriotique  au  milieu  d'un 
enthousiasme  indescriptible.  Une  œuvre  d'un  jeune  auteur  belge,  Het 
T'Fowd,  de  Van  Gheluwe,  a  obtenu  un  fort  beau  succès.  Puis  est  venu  Lo- 
verkcn.f,  suite  de  lieders  de  Nicolai,  chantés  par  Mme  Offermans;  Vondel, 
introduction  et  chant  de  fête,  de  Verhulst,  et,  pour  terminer,  VOuverlure 
(estivale  de  Verhulst.  » 


***  Une  triste  nouvelle  a  affligé  Paris  cette  semaine.  M.  le  comte 
Walewski  a  succombé  à  Strasbourg  à  une  attaque  d'apoplexie  fou- 
droyante. M.  le  comte  Walewski  n'était  pas  seulement  un  homme  d'Etat, 
il  appartenait  aussi  au  monde  des  lettres  et  des  arts,  et  l'on  se  rappelle 
qu'il  avait  succédé  à  noire  regretté  Georges  Kastner  comme  membre  de 
l'Institut.  --  Les  obsèques  de  M.  Walewsky  ont  eu  lieu  hier  en  grande 
pompe  à  l'église  de  la  Madeleine.  Les  artistes  (hommes)  de  l'Opéra, 
MM.  Faure,  Villaret,  Belval,  David,  Grisy,  Morère  et  les  chœurs,  égale- 
ment d'hommes,  s'étaient  offerts  spontanément  pour  chanter  dans  la  céré- 
monie religieuse.  —  La  commission  des  auteurs  dramatiques  s'y  était  fait 
représenter  par  son  président  M.  de  Saint-Georges,  et  MiM.  Maquet,  Ado- 
nis, Brisebarre,  Gondinet  et  Emile  Jonas.  —  M.  Emile  Perrin  avait  adre.-sé 
en  son  nom  et  au  nom  de  tous  ^s  artistes  de  l'Opéra,  une  lettre  de  con- 
doléances à  Mme  la  comtesse  Walewska  qui,  par  dépêche,  s'est  empressée 
de  lui  en  transmetlre  tous  ses  remerciments. 

„;%  Au  service  de  bout  de  l'an  de  M.  le  docteur  L.  Véron,  chanté 
cette  semaine  à  Saint-Roch,  la  maîtrise  de  cette  paroisse  a  exécuté,  sous 
la  direction  de  M.  Ch.  Vervoitte,  Vlnlroit  de  Jomelli ,  VExavdi  nos  de 
Mozart,  YOfferloire  de  Sallandry,  un  Pie  Jcsu  de  Niedermeyer  et  un 
Agnus  Dei  du  maître  de  chapelle. 


ÉTRANGER 

,,,*;,.  Londres.  —  Les  nouveaux  concerts- promenades  du  Fairy  Palace, 
dans  l'Agriculiural  Hall,  avant-coureurs  de  la  saison  d'automne,  ont 
commencé.  Le  premier  a  été  donné  devant  un  public  de  dix  mille  per- 
sonnes. Le  programme  se  composait  d'œuvres  classiques  et  modernes, 
sérieuses  et  gaies:  Beethoven  y  coudoyait  Auber,  des  fragments  de  la 
Grande- Duchesse  alternaient  avec  un  intermède  de  Gounod,  des  soli  de 
piano  et  de  cornet  à  pistons  et  des  morceaux  de  chant.  Ces  concerts  ont 
de  l'avenir! 

»*.!;  Bruxelles.  —  Adelina  Patti  e.'t  engagée  pour  trois  représentations 
au  théâtre  de  la  Monnaie,  à  partir  du  20  décembre.  — A  la  dernière  re- 
présentation de  la  Juive,  la  basse  chantante  Giraudet  a  été  tellement 
maltraitée  par  le  ptiblic  qu'on  a  dit,  séance  tenante,  annoncer  la  rési- 
liation de  son  engagement.  —  Le  23  septembre,  l'Académie  royale  de 
Belgique  a  tenu  sa  séance  publique  sous  la  présidence  de  M.  Fétis. 
Après  l'ouverture  A'Oberon,  exécutée  par  l'orchestre  du  Conservatoire, 
sous  la  direction  de  M.  Bosselet,  et  un  discours  très-applaudi  de 
l'illustre  président,  on  a  proclamé  le  résultat  du  concours  académique. 
La  séance  s'est  terminée  par  l'exécution  de  la  cantate  Het  Woui  (la 
Forêt)  qui  a  valu  le  second  prix  l'année  dernière  à  M.  Van  Gheluwe, 
et  dans  laquelle  on  a  apprécié  beaucoup  de  savoir-faire  et  une  grande 
distinction  d'idées. 

**^  Francfort.  —  Naudin,  engagé  pour  quelques  représentations,  vient 
de  chanter  avec  un  très-grand  succès  la  Favorite  et  lUgoletto. 

„,*,  Scinvcrin.—Le  cinquième  festival  mecklembourgeois  a  eu  lieu  du 
20  au  22  septembre,  ai'ec  beaucoup  d'éclat.  M.M.Joachim  (ténor,  de  Dresde), 
Bill  (basse,  de  Schwerin),  Krause  (basse,  do  Berlin);  Mmes  llarriers-Wip- 
pern  (soprano,  de  Berlin),  Joachim  (contralto),    y  ont  pris  part  comme 


solistes.  Des  œuvres  de  Beethoven,  Bach,  Hœndel,  Mozart,  Schubert, 
Schumann,  Kucken  et  Taubert  ont  été  exécutées. 

^.*^  Berlin.  —  Le  répertoire  de  l'Opéra  royal,  qui  a  toujours  été  hos- 
pitalier à  toutes  les  écoles,  va  s'enrichir  en  décembre  de  ftoméo  et  Ju- 
liette, de  Gounod,  en  janvier  de  Micjnon,  d'Ambroise  Thomas,  plus  tard 
des  Meistersinger,  de  Rich.  Wagner,  et  du  Frithjof,  de  B.  Hopfer.  Serions- 
nous  près  de  voir  se  réaliser  la  proposition  de  Meyeibeer,  sanctionnée 
par  le  roi  Frédéric-Guillaume  IV,  de  monter  régulièrement  chaque  an- 
née trois  opéras  nouveaux  de  compositeurs  allemands  ?  Avec  l'activité 
que  dépense  la  direction,  jouant  en  moyenne  cinq  fois  par  semaine,  et 
disposant  en  outre  d'un  nombreux  et  excellent  personnel,  il  ne  faut  pas 
en  désespérer. 

.j,*.^  Stellin.  —  Un  Conservatoire  de  musique  vient  d'être  fondé.  11  est 
ouvert  à  partir  du  l"  octobre. 

i:*^  Bonn.  —  Notre  collaborateur  M.  Ch.  Lucas,  architecte,  délégué 
au  congrès  inlernational  archéologique  qui  s'est  tenu  la  semaine  der- 
nière dans  cette  ville,  patrie  de  Beethoven,  nous  écrit  qu'il  a  surtout  été 
émerveillé  de  l'exécution  incomparable  de  la  symphonie  en  ut  mineur  et 
de  l'ouverture  A'Egmont  dans  un  festival  offert  par  la  ville  de  Bonn  à  ses 
invités.  Il  ajoute  que  «  Jllle  Radecke,  du  théâtre  de  Cologne,  a  obtenu 
à  cette  belle  soirée  un  fort  grand  succès  Irès-mérité  p.ir  son  interpréta- 
tion du  grand  air  et  des  lieder  d'Egmonl,  et  que  le  violoniste  Ludwig 
Straus,  de  Londres,  s'est  fait  chaleureusement  applaudir  dans  le  con- 
certo de  Beethoven.  Somme  toute,  remarquable  concert  auquel  semblait 
présider  le  maître  immortel  qui  est  la  gloire  de  Bonn ,  et  dont  cette 
ville  offrait  les  plus  belles  œuvres  à  la  respectueuse  admiration  d'un 
grand  nombre  de  savants  allemands  et  élrangers,  parmi  lesquels  on 
comptait  quelques  Français  de  distinction.  » 

^*^  Copenhague.  —  Trois  concerts  ont  été  donnés  par  la  Compagnie 
Ulmann  avec  un  brillant  succès. 

^*^  Vienne.  —  Il  est  question  du  retour  de  Mme  Gompertz-Bettelheim 
a.  la  scène.  On  assure  qu'elle  a  signé  un  engagement  de  trois  ans  avec 
l'Opéra.  De  tous  cotés  on  désire  la  confirmation  de  cette  nouvelle. — Par- 
mi les  papiers  laissés  par  le  compositeur  Anselme  Hilttenbrenner,  mort 
récemment,  on  a  trouvé  diverses  compositions  inconnues,  de  peu  d'impor- 
tance, de  Mozart,  Beethoven  et  Schubert.  —  Mignon,  d'Ambroise  'Tho- 
mas, sera  représenté  dans  le  courant  de  ce  mois.  En  voici  la  distribu- 
tion :  Mignon,  Mlle  Ehnn  (qui  alternera  probablement  avec  Mlle  Gin- 
dele):  Wilhelm  Meister,  M.  Walter  ;  Philine,  Mlle  Rabatiusky;  Lothario, 
M.  Beck.  —  Cet  opéra  et  un  ballet  sont  les  seules  nouveautés  qui  se- 
ront désormais  données  dans  la  salle  actuelle  de  l'Opéra.  On  espère 
pouvoir  inaugurer  la  nouvelle  au  commencement  d'avril  prochain.  — 
La  faveur  dont  jouit  l'opérette  auprès  du  public  tient  en  éveil  l'activité 
des  maîtres  du  genre.  Le  théâtre  An  der  Wien  en  monte  une  de  Hopp, 
intitulée  Morilla;  le  Carltheater  en  a  promis,  pour  cette  semaine,  une 
autre  de  Suppé,  les  Tourments  de  Tantale,  et  il  prépare  pour  le  mois  de 
décembre  l'Enlèvement  des  Sabines  (en  trois  actes),  de  Zaytz. —  La  pre- 
mière pierre  du  monument  de  Schubert  sera  posée  le  12  octobre. 

^*^  Milan.  —  Après  bien  des  hésitations  et  des  intrigues  pour  le  choix 
de  l'opéra  à'obbligo,  ou  opéra  nouveau  qui  doit  être  donné  au  commen- 
cement de  la  saison  prochaine,  on  s'est  décidé  pour  le  Ruy-lilas  de 
F.  Marchetti,  l'auteur  d'un  Romeo  e  Giuletla  donné  avec  succès  l'année 
dernière  au  théâtre  Carcano.  L'ouverture  aura  lieu,  comme  c'est  l'habi- 
tude pour  les  théâtres  d'Italie,  le  jour  de  Saint-Etienne,  26  décembre. 
Il  sera  donné  quatre-vingts  représentations.  —  La  troupe  est  ainsi  com- 
posée :  Tercsina  Stolz,  N.  Bianchini,  Lucia  Baratti,  Pietro  Mongini,  Enrico 
Harvin,  Enrico  Barbaccini,  Luigi  Colonnese,  Giacomo  Rota,  Giuseppe 
Vecchi. 

^*^  Mantoue.  —  Il  Profeta  n'a  pas  eu  moins  de  succès  ici  qu'à  Padoue. 
La  dernière  représentation  a  eu  lieu  le  20  septembre.  Maria  Destin  et 
le  ténor  Villani,  dignes  interprèles  du  chef-d'œuvre,  ont  été  jusqu'au  bout 
à  la  hauteur  de  leur  tâche. 

J|.*^,  Kaplcs.  —  La  direction  du  théâtre  San  Carlo  a  publié  son  pro- 
gramme pour  la  saison,  qui  durera  six  mois,  de  la  dernière  quinzaine 
d'octobie  à  la  dernière  quinzaine  d'avril.  Deux  opéras  écrits  expressément 
pour  celle  scène  seront  donnés  pendant  cette  période  :  Giovanna  II  di 
Napoli,  do  Peirella,  et  Alba  d'Oro,  de  Vincenzo  Battisla.  —  Les  princi- 
paux artistes  engagés  sont  .  Marcellina  Lotti,  Leonilda  Boschetli,  Giusep- 
pina  Tati,  Francesco  Mazzoleni,  Giovanni  Zaccometti,  Filippo  Coletti,  Vin- 
cenzo Quintili-Leoni,  Errico  Rossi-Galli. 

„,•«  Madrid.  —  Bien  que  les  événements  actuels  laissent  planer  une 
grande  incertitude  sur  l'ouverture  de  la  campagne  lyrique,  plusieurs  ar- 
tistes sont  cependant  partis  pour  se  rendre  à  leur  poste  :  on  cite  entre 
autres  Tamberlick.  L'époque  du  départ  de  Mme  Gueymard  sera  peut-être 
reculée,  d'un  commun  accord,  entre  les  directeurs  de  Paris  et  de  Madrid. 

,^%  Moscou.  —  Les  représentations  de  l'Opéra  russe  ont  recommencé 
le  2/Li  septembre.  On  a  exécuté  des  fragments  de  Faust  et  la  Vie  pour 
k  Czar,  de  Glinka.  Le  i/IG,  on  a  donné  liusslan  et  Ludmiln,  du  même 
compositeur. 

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19. 
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la  lettre  de  la  PÉRICHOLE  à  Pl«l}ll,l4>. 


SOSlMAIPiK.  —  Théâtre  impérial  italien:  Rigotetto  et  Crispino  e  la  Coiiiare, 
par  Elias  ile  Bauze.  —  Théâtre  des  Variétés  :  la  Périchole,  opéra-bouffe  en 
deux  actes,  paroles  de  MM.  H.  MeilhacetL.  Halévy,  musique  de  J.  Offenbach. 
—  Théâtre  de  l'Athénée  :  le  Petit-Poucet,  opéra-bouffe  eu  trois  actes  et  quatre 
tableaux,  paroles  de  MM  E.  Deterrier  et  A.  Vanloo,  musique  de  M,  L.  de  Rillé  , 
par  D.-A.-D.  —  Correspondance:  Bruxelles,  par  Fétis, —  Nouvelles  des  théâ- 
tres lyriques.  —  Nouvelles   diverses.  —  Annonces. 


THEATRE  IfflPÉRIAL  ITALIEN. 

Blgoletto.  —  Crispino  e  la  con>are. 

L'atfiche  ne  reste  pas  stationnaire  au  théâtre  Italien.  La  saison 
vient  à  peine  de  commencer,  et  déjà  nous  y  avons  vu  paraître 
successivement  Lucia,  Rigolelto,  Crispino  e  la  Comare,  la  Traviata, 
et  la  Conlessina.  Il  a  élé  parlé  de  Luda,  à  propos  de  la  réou- 
verture de  la  salle.  On  donne  la  Traviata  au  moment  même  où  le 
journal  va  être  mis  sous  presse.  L'ouvrage  du  prince  Poniatowski 
n'est  annoncé  que  pour  mardi.  Il  ne  nous  reste  donc  à  vous  en- 
tretenir que  de  Rigoletto  et  de  Crispino. 

L'opéra  de  Verdi  ne  pouvait  être  donné  en  de  meilleures  condi- 
tions. Imaginez-vous  le  fameux,  quatuor  chanté  par  Mme  Patti, 
Fraschini,  Delle-SedieetMUe  Grossi.  Quel  ensemble  partait!  On  sait 
quelle  grâce  poétique  donne  Adelina  Patti  à  ce  beau  rôle  de 
Gilda  ,  moitié  rôle  de  vocaliste ,  moitié  rôle  de  cantatrice 
dramatique,  —  ourles  trilles,  les  staccati,  où  toutes  les  difficul- 
tés du  point  d'orgue  le  plus  étourdissant  se  mêlent  aux  gémis- 
sements, aux  plaintes  déchirantes  du  désespoir.  Ce  rôle  est,  sans 
contredit,  un  des  plus  beaux  et  des  plus  riches  du  répertoire  de 
Verdi  ;  il  commence  par  un  sourire  et  se  termine  par  des  sanglots  ; 
il  y  a  tant  d'amour  et  d'abandon  au  commencement,  dans  l'air 
et  dans  le  duo  avec  le  ténor  ;  tant  de  pudeur  cruellement  frois- 
sée, tant  de  tristesse  dans  les  aveux,   au  duo  avec  le  baryton  ;    il 


y  a  enfin  tant  de  douleur  navrante,  à  la  lin,  dans  le  quatuor, 
qu'il  faut  le  double  talent  de  l'actrice  et  de  la  cantatrice  pour 
l'aborder. 

Fraschini  s'était  déjà  fait  applaudir  dans  le  rôle  de  l'insouciant 
libertin.  11  le  chante,  en  effet,  avec  le  talent  hors  ligne  que  vous 
lui  connaissez. 

La  rentrée  de  M.  Delle-Sedie  a  été  chaleureusement  accueillie  par 
les  habitués  de  la  salle  Ventadour,  qui  ne  s'étaient  résignés  qu'à- 
demi  à  le  voir  quitter  la  scène  pour  se  vouera  l'enseignement.  Certes 
il  est  utile  et  méritoire  de  faire  des  élèves ,  d'autant  que  les  maî- 
tres de  l'art  ne  sont  immortels  que  moralement  ;  mais  on  peut  re- 
mettre cette  tâche  au  moment  où  la  voix  ne  répond  plus  au  talent 
de  l'artiste.  RI.  Delle-Sedie  n'en  est  pas  encore  là.  Quel  que  soit 
le  volume  de  sa  voix,  il  sait  la  moduler  avec  tant  d'art  qu'on  la 
préfère  à  des  organes  autrement  plus  vigoureux  ;  et  on  a  parfaite- 
ment raison. 

Mlle  Grossi  n'a  que  le  petit  rôle  de  Madeleine  dans  R'goletlo. 
Ce  n'est  pas  assez  pour  son  talent,  mais  c'est  assez  pour  qu'on  ait 
pu  saluer  sa  rentrée.  Nous  l'attendons  dans  le  Trovatore.  Madeleine 
n'est  qu'un  à-compte  sur  la  dette  que  paiera  Azucena. 

C'est  bien  dommage  que  l'on  ne  puisse  donner  un  plus  grand 
nombre  de  représentations  de  Rigoletto  pareilles  à  celle  de  samedi; 
mais  Fraschini  s'en  va,  et  Mme  Patti  elle-même  ne  doit  pas  rester 
longtemps;  heureusement  qu'elle  nous  reviendra  après  la  saison 
de  Saint-Pétersbourg. 

Deux  débuts  étaient  annoncés  pour  jeudi  dans  Crispino  e  la 
Comare  des  frèr.  ■•  Ricci  :  celui  de  la  nièce  et  fille  des  deux  com- 
positeurs, de  M  'c  Lella  Ricci,  qui  remplissait  le  rôle  d'Annetta,  et 
celui  d'un  jeun»  *énor,  M.  Palermi,  dont  le  rôle,  dans  Crispino, 
n'est  pas  des  me     urs. 

Le  ténor  (nons  commençons  par  lui,  car  c'est  lui  qui  ouvre  cet 
opéra)  a  complètement  réussi.  Il  tremblait  un  peu,  à  son  premier 
air;  mais  le  public  qui  a  pu  apprécier  sa  jolie  voix  et  sa  bonne 
méthode  l'a  encouragé:  sa  frayeur  s'est  vite  dissipée,  et  le  jeune 
artiste  était  déjà  maître  de  tous  ses  moyens  au  duo  avec  la  basse 
Agnesi,  duo  qu'on  a  vivement  applaudi,  et  qui  a  valu  môme  un 
rappel  aux  artistes.  M.  Palermi  est  un  bon  ténor  léger,  et  il  sera 
très-utile  au  théâtre  Italien,  surtout  dans  le  répertoire  rossinien. 
Mlle  Ricci  a  été  différemment  appréciée.  Elle  est  si  jeune  !  Sa 


322 


KEVUE  El'  GAZEITE  MUSICALE 


voix  est  assez  agile,  et,  n'était  le  souvenir  de  sa  brillante  devan- 
cière, elle  aurait  plu  davantage.  Elle  chante  bien,  ne  paraît  pas 
trop  émue,  mais  elle  force  un  peu  son  organe,  surtout  dans  les 
notes  hautes,  ce  qui  donne  à  sa  voix  je  ne  sais  quoi  de  nasillard 
qui  pourrait  lui  nuire,  si  ce  léger  déiaut  n'était  racheté  par  de 
nombreuses  cL  brillantes  qualités.  Somme  toute,  elle  a  été  vive- 
ment applaudie. 

M.  Ciampi,  qui  succède  à  Zucchini  dans  le  rôle  tle  Crispino,  ne 
fait  pas  rtgretlter  son  prédécesseur,  ce  qui  est  déjà  un  fort  bel  éloge. 
Il  est  amusant,  comique  sans  bouffonnerie,  et,  surtout,  il  chante. 
Or  il  est  assez  rare  de  rencontrer  un  bouffe  qui  sache  et  puisse 
chantcS". 

Le  ftmcux  trio  des  honnnes,  Èaiti,  pesta  !  a  été  bissé  comme 
toujouï^!  Mcrcuriali  y  est  à  la  hàtiteur  inespérée  de  Ciampi  et 
d'A^ncSi.  Son  sQccès  date  viè  ce  trro.  îtfais  pourquoi,  quand  an 
l'applaudit,  a-t-il  l'air  de  demander  pardon  au  public  d'avoir  si 
bien  chanté? 

Ce  sont  Mlle  Ricci  et  Ciampi  qui  remplaceront  Mme  ïiberini  et 
Scalèse  dans  la  Coniessina  du  prince  Poniatowski. 

Nous  rendrons  compte  dimanche  prochain  de  cette  reprise,  ainsi 

que  de  celle  de  la  Traviala. 

Elias  de  RALZE. 


THÉÂTRE  DES  VÂRIËTËS. 

liA   PEKBCIIOIiE, 

Opéra-bouffe  en  deux  actes,  paroles  de  MM.  HeiNiu  Meiluac  et 
Ludovic  Halévv,  musique  de  M.  .Iacques  Offenbacii. 

(Première  rcpr«scntalion  le  0  octobre  1808.) 

C'est  M.  Prosper  Mérimée  qui,  le  premier,  nous  a  fait  connaître 
cette  Péricholc ,  une  comédienne  dm  Pérou,  très-célèbre  au  sièch; 
dernier  dans  la  ville  de  Lima,  alors  que  les  Espagnols  étaient  en- 
core les  maîtres  de  l'ancien  empire  des  Incas.  Une  charmante  say- 
nète du  théâtre  de  Clara  Gazul,  intitulée  le  Carrosse  du  Saint- 
Sacrement,  nous  représente  la  Périchole  comme  la  maîtresse  toute 
puissante  du  vice-roi.  Les  carrosses  sont  rares  à  Lima ,  on  en 
compte  cinq  en  tout.  Or,  par  un  caprice  de  jolie  femme,  la  Péri- 
chole ne  veut  pas  se  montrer  à  pied  dans  une  cérémonie  religieuse 
qui  met  toute  la  ville  en  émoi.  Elle  décide  le  vice-roi  à  lui  octroyer 
son  carrosse,  dont  il  ne  peut  user,  parce  qu'il  est  retenu  au  palais 
par  un  violent  accès  de  goutte.  Quel  scandale  pour  la  cité,  et  sur- 
tout pour  les  membres  du  clergé!  Mais  la  Périchole,  après  avoir 
traversé  la  foule  ébahie  dans  son  brillant  véhicule,  a  rencontré  le 
Viatique  que  l'on  portait  pédestrement  au  chevet  d'un  moribond , 
et,  touchée  de  la  grâce,  elle  a  immédiatement  renoncé  à  son  car- 
rosse en  faveur  du  Saint-Sacrement,  qui ,  à  Lima ,  depuis  cette 
époque,  ne  sort  plus  qu'en  voiture.  N'était  la  modestie  de  la  Péi-i- 
chole,  le  clergé,  converti,  lui  élèverait  des  statues. 

Il  faut  lire  dans  Clara  Gazul  cette  spirituelle  ébauche,  dont  notre 
insuffisaîite  analyse  ne  peut  donner  qu'une  bien  faible  idée.  Peu 
connu  aujourd'hui,  malgré  son  incontestable  mérite,  le  livre  de 
M.  Mérimée  a  été  très  en  vogue  dans  les  premières  années  qui  ont 
suivi  la  Révolution  de  1830,  et  son  succès  a  laissé  des  traces 
dans  le  répertoii-e  du  Palais-Royal,  où  l'on  trouve  une  Périchole, 
jouée  tout  naturellement  par  Virginie  Déjazet. 

Si  nous  avons  rappelé  ces  précédents,  comme  c'était  notre  de- 
voir, ce  n'est  pas  pour  les  opposer  à  la  pièce  de  MM.  Henri  Meilhac 
et  Ludovic  Halévy,  qui  se  sont  tenus  sagement  en  dehors  de  tout 
prétexte  de  comparaison,  et  qui  n'ont  pris  à  M.  Mérimée  qu'un 
nom  de  femme  et  un  lieu  de  scène  essentiellement  pittoresques. 
Tout  le  reste  est  de  leur  invention. 


La  Périchole  de  ces  messieurs  est  une  chanteuse  des  rues;  elle 
a  pour  associé  et  pour  amant  un  chanteur  nommé  Piquillo,  et 
n'en  est  pas  plus  heureuse.  Les  mara^édis  sont  rebelles  à  la  quête 
de  nos  artistes  en  plein  vent.  Même  le  jour  de  la  fête  du  vice-roi, 
quand  toute  la  ville  est  en  liesse,  les  pauvres  diables  sont  bien  près 
d'aller  se  coucher  sans  un  morceau  de  pain  sous  la  dent.  Vers  le 
soir,  Piquillo,  plein  d'obstination,  veut  encore  tenter  la  fortune; 
mais  la  Périchole  refuse  de  l'accompagner,  et,  en  vertu  du  pro- 
verbe :  <c  Qui  dort  dîne,  »  elle  fait  son  lit  sur  la  voie  publique. 

Un  autre  proverbe  dit  :  «  La  Fortune  vient  en  dormant.  »  Pen- 
dant que  Piquillo  court  après  elle,  la  fantasque  déesse  se  présente 
à  la  Périchole  sous  la  ligure  d'un  vieux  docteur,  qui  pourrait  bien 
ne  pas  être  ce  qu'on  pense  ;  car  en  ce  jour  de  réjouissance  publique, 
Lima  a  pris  un  singulier  aspect.  Tous  cos  promenenrs,  tous  ces 
joueurs,  tous  ces  buveurs  attablés  au  cabaret  Aes  Trois  Cousines, 
vous  croyez  que  ce  sont  de  vulgaires  citadins,  de  paisibles  bour- 
geois? Pas  du  tout,  ce  sont  des  gens  aux  gages  du  gouverneur  de 
la  ville,  et  voici  pourquoi.  A  l'instar  du  kalife  Haroun-al-Raschid, 
te  vice-'TOi  dn  ï'érou ,  don  Andrès  de  Ribeira ,  a  la  manie  de  se 
déguiser  en  médecin  pour  tâter  le  pouls  de  l'opinion  de  ses  sujets. 
Il  a  même  sur  la  rambla  une  petite  maison  où  il  va  goûter  les 
douceurs  de  l'incognito  avec  les  petites  dames  complaisantes  qu'il 
rencontre. 

Mais  ces  promenades  mystérieuses  ne  sont  pas  du  goût  du  pre- 
mier gentilhomme  de  la  Chambre,  ni  du  gouverneur  de  la  ville, 
qui,  pour  parer  aux  indiscrétions  du  hasard,  appostent  sur  les  pas 
du  vice-roi  un(!  foule  stylée  d'avance  aux  réponses  les  moins  com- 
promettantes pour  les  abus  de  leur  administration.  Eux-mêmes 
montrent  l'exemple  en  endossant  un  costume  populaire. 

C'est  donc  au  milieu  de  cette  mascarade  universelle  que  le  doc- 
teur, ou  —  pourquoi  ne  pas  le  dire  tout  de  suite?  —  le  vice-roi, 
qui  a  soif  de  la  vérité,  avise  la  Périchole  endormie,  la  réveille,  et, 
charmé  de  sa  conversation  non  moins  que  de  ses  attraits ,  en  de- 
vient subitement  amoureux.  Il  lui  révèle,  son  rang  et  lui  propose 
de  l'emmener  au  palais. 

La  Périchole  fait  bien  quelques  façons,  mais  sa  misère  est  si 
profonde  et  elle  a  si  grand  faim'  Cependant  le  premier  genlil- 
homm6.et  le  gouverneur  se  mettent  en  travers  des  velléités  de  leur 
maître,  et  font  observer  que  l'article  9  de  la  Constitution  jurée 
par  lui  défend  l'entrée  du  palais  à  toute  femme  qui  n'est  pas  ma- 
riée. «  Eh  bien!  que  l'on  cherche  bien  vite  un  mari  à  la  Péri- 
chole, et  qu'on  aille  quérir  un  notaire.  »  En  attendant,  le  vice-roi 
lui  offre,  dans  sa  petite  maison,  un  fin  dîner  qui  la  restaurera, 

La  Périchole  ne  résiste  plus,  seulement  elle  demande  à  écrire 
une  lettre  d'adieu  à  son  amant  : 


Ces  paroles-là  sont  cruelles  ; 

Je  le  sais  bien,  mais  que  veux-tu? 

Pour  les  choses  essentielles 

Tu  peux  compter  sur  ma  vertu. 

,1e  '.'adore  ;  si  je  suis  folle, 

C'est  de  toi ... ,  compte  là-dessus, 

Et  je  signe  :  La  Périchole, 

Qui  t'aime,  mais  qui  n'en  peut  plus. 


Le  premier  gentilhomme  et  le  gouverneur,  menacés  dans  leurs 
plans  et  dans  leurs  émoluments,  se  font  un  devoir  d'obéir  aux 
ordres  de  leur  souverain. 

Celui-ci  entre  chez  un  notaire  où  se  trouve  précisément  un  de 
ses  collègues  qui  l'assistera.  Celui-là,  dans  sa  précipitation,  fait 
choir  un  escabeau  sur  lequel  était  monté  un  pauvre  diable  en 
train  de  se  pendre  et  qu'il  décroche  par  ce  mouvement.  C'est  ce 
qu'il  lui  tant.  Est-il  marié?  Sur  sa  réponse  négative,  il  lui  pro- 
pose une  forte  somme  pour  se  laisser  marier.  Mais,  ô  surprise! 


DE  PARIS. 


323 


tous  les  deux  éprouvent  des  résistances  inattendues  :  les  notaires 
ne  veulent  pas  instrumenter  un  jour  de  fête;  le  pendu  a  un 
amour  enraciné  dans  le  cœur,  et  l'on  n'en  sera  pas  surpris  quand 
on  saura  que  c'est  Piquillo  qui  n'a  pas  voulu  survivre  à  la  tralii- 
son  de  la  Périchole. 

Que  taire  alors?  avoir  recours  à  la  cave'  des  Trois-Cousines  et 
faire  perdre  la  raison  aux  deux  notaires,  à  Piquillo  et  même  à  la  Pé- 
richole, dont  les  scrupules  se  sont  réveillés  au  dessert.  L'expédient 
réussit  à  merveille,  seulement  les  griseurs  se  grisent  en  versant 
l'oubli  à  leurs  victimes,  et  c'est  à  la  faveur  d'une  ébriété  générale 
que  s'accomplit  le  mariage. 

Au  deuxième  acte,  les  nouveaux  époux  sont  installés  au  palais, 
mais  séparément.  Piquillo  s'est  réveillé  sans  rien  comprendre  à  sa 
situation,  et  sans  savoir  qui  on  lui  a  donné  pour  femme.  Ici  se 
place  une  excellente  parodie  de  la  fameuse  scène  de  la  Favorite, 
où  les  courtisans  repoussent  la  main  de  Fernand  déshonoré. 
«  Comment  ai-je  souillé  mon  nom"?  répondez-moi. 
—  En  épousant  là  maîtresse  du  roi.  » 

Piquillo  veut  s'en  aller  sans  demander  son  reste  ;  mais  on  lui 
apprend  qu'il  ne  touchera  la  récompense  promise  qu'après  avoir 
pi'ésen té  solennellement  sa  femme  au  vice-roi,  et  cette  considération 
l'arrête,  parce  que,  avec  l'argent  qu'on  lui  comptera,  il  pourra 
plus  facilement  courir  à  la  recherche  de  la  Périchole. 

La  présentation  a  donc  lieu;  Piquillo  reconnaît  sa  compagne, 
et  la  maudit  en  présence  de  toute  la  cour.  Mais  elle  ne  se  trouble 
pas  pour  si  peu  de  chose,  et  à  la  suite  d'une  scène  d'explica- 
tions, elle  fait  la  paix  avec  son  amoureux,  à  qui,  en  dépit  des 
apparences,  elle  n'a  pas  cessé  de  rester  fidèle. 

Pendant  ce  temps,  un  complot  s'ourdit  contre  le  vice-roi  qui  a 
introduit  au  palais  une  saltimbanque,  et  tous  ses  courtisans  lui 
rendent  la  vie  si  dure  qu'il  n'ose  plus  toucher  à  un  mets,  à  un 
vin,  de  peur  d'empoisonnement.  Aussi,  quand  la  Périchole,  suivie 
de  Piquillo,  vient  lui  annoncer  qu'elle  préfère  son  existence  aven- 
tureuse de  chanteuse  des  rues  à  toutes  les  splendeurs  qu'on  veut  lui 
imposer,  le  vice-roi  fait-il  peu  d'efforts  pour  la  retenir,  et  lui 
laisse-t-il  généreusement  tous  les  joyaux  qu'elle  a  reçus  en  don 
pendant  sa  courte  faveur  et  qu'elle  vient  lui  restituer. 

MM.  Meilhac  et  Halévy,  les  collaborateurs  habituels  d'Oiîenbach, 
possèdent  le  rare  mérite  de  savoir  varier  leurs  sujets  et  de  ne  se 
ressembler  jamais.  Non-seulement  la  Périchole  a  une  allure  tout 
autre  que  celle  de  leurs  précédents  opéras,  mais  il  y  a,  dans  la 
donnée  de  cet  ouvrage  un  fonds  d'intérêt,  une  pointe  de  sentiment 
qui  sont  du  fruit  nouveau  pour  nous.  Et  qu'on  n'aille  pas 
croire  que  l'élément  bouffon  en  soit  diminué  ;  bien  au  contraire, 
il  n'en  ressort  que  davantage  par  le  contraste.  La  pièce  abonde 
en  scènes  piquantes,  en  mots  à  effet,  et  l'action  se  meut  dans  un 
cadre  plein  d'originalité. 

La  partition  d'Offenbach  a  remporté  une  victoire  exceptionnelle, 
qui  s'est  traduite  par  cinq  morceaux  redemandés  avec  acclamations. 
Il  y  a  peu  d'exemples  d'un  pareil  enthousiasme  ! 

L'ouverture  est  fort  courte  et  ne  se  compose  que  de  deux  motifs 
principaux  choisis  parmi  les  meilleurs  de  la  pièce.  Quand  la  toile 
se  lève,  le  théâtre  présente  un  tableau  des  plus  animés,  et  dans 
lequel  on  applaudit  un  chœur  brillant,  coupé  par  la  chanson  des 
Trois-Cousines,  sur  un  très-joli  mouvement  de  valse.  On  ne  peut 
mieux  entrer  en  matière. 

L'arrivée  du  vice-roi  est  signalée  par  des  couplets  bouffes  sur 
les  bénéfices  de  l'incognito,  qui  ont  eu,  les  premiers,  les  honneurs 
du  bis,  quoique  dits  par  Grenier,  qui  n'a  pas  la  prétention  d'être 
un  chanteur.  Quel  plus  bel  éloge  peut-on  en  faire? 

Dès  leur  apparition,  Piquillo  et  la  Périchole,  c'est-à-dire  Dupuis 
et  Mlle  Schneider,  font  entendre  coup  sur  coup  deux  chansons  po- 
pulaires,   également  réussies,  chacune  dans  son  genre  :  d'abord 


une  complainte,  l'Espagnol  et  la  Jeune  Indienne,  qui  fournit  à  ses 
interprètes  l'occasion  d'imiter  les  chanteurs  des  rues;  puis  une 
séguedille  pour  soirées,  comme  dit  la  Périchole,  et  qui  a  pour  titre: 
le  Muletier  et  la  Jeune  personne.  La  complainte  a  été  bissée  et 
son  refrain  :  Il  grandira,  car  il  est  Espagnol,  est  destiné  à  une  am- 
mense  notoriété.  Comptez  que  d'ici  à  huit  jours  cette  p'nrase  sera 
dans  la  bouche  de  tous  les  liabitués  du  boulevard  Montmartre. 
Quant  à  la  séguedille,  elle  est  aussi  d'un  brio  entraînant. 

Un  bijou,  une  perle,  c'est  la  lettre  de  la  Périchole,  lue  par  elle 
sur  un  accompagnement  en  sourdine.  Offenbach  avait  déjà  donné 
la  mesure  de  ce  qu'il  pouvait  faire  dans  ce  genre;  la  lettre  de  la 
Périchole  n'aura  pas  moins  de  retentissement  que  la  déclaration 
de  la  Grande-Duchesse. 

Le  premier  acte  se  termine  par  un  très-remarquable  final,  qui 
prendra  place  à  côté  de  celui  à' Orphée  aux  Enfers.  C'est  la  grande 
scène  du  mariage.  Merveilleusement  agencée  par  le  compositeur, 
elle  marche  par  gradations  jusqu'à  l'explosion  la  plus  fougueuse 
qu'il  soit  possible  d'imaginer.  Encore  un  motif  qui  fera  les  délices 
du  bal  de  l'Opéra.  Chemin  faisant,  Mlle  Schneider  détaille,  avec 
un  talent  hors  ligne,  deux  couplets  qui,  au  mérite  de  l'interpréta- 
tion, joignent  celui  de  l'inspiration  musicale.  Il  est  impossible  de 
mieux  rendre  les  effets  de  l'ivresse  chez  une  femme,  ce  qui,  à  la 
scène,  est  toujours  périlleux.  Toute  la  salle  a  rendu  justice  au  tact 
exquis  de  Mlle  Schneider,  en  lui  faisant  répéter  le  second  couplet 
de  Cette  ariette  : 

Je  suis  un  peu  grise, 
Mais!  Chut!...  faut  pas  qu'on  le  dise... 
Chut! 
Citons  encore  dans  ce  finale  l'entrée  de  Dupuis  et  son  duetto  avec 
la  Périchole  :  Je  dois  vous  prévenir.  Madame. 

Le  deuxième  acte  n'est  pas  moins  bien  partagé  que  le  premier. 
On  rencontre  au  début  des  couplets  ironiques  adressés  à  Piquillo 
par  les  demoiselles  d'honneur  du  vice-roi,  et  qui  ont  un  refrain 
à  l'unisson  :  Eh  1  bonjour,  monsieur  le  mari,  qu'avez-voics  fait  de 
votre  femme?  dont  on  a  réclamé  universellement  une  nouvelle 
audition.  Et    de  quatre. 

Même  fortune  a  été  réservée  aux  couplets  suivants  :  Les  femmes, 
il  n'y  a  qu'  ça,  chantés  avec  beaucoup  de  finesse  par  Dupuis,  et 
terminés  par  un  gai  refrain  en  trio.  Et  de  cinq! 

Nous  en  avons  fini  avec  les  morceaux  bissés,  mais  il  nous  en 
reste  encore  à  mentionner,  qui  eussent  peut-être  obtenu  un  suc- 
cès de  nature  analogue,  si  l'heure  avancée  de  la  représentation 
n'y  eût  mis  obstacle.  De  ce  nombre  sont  les  couplets  de  la  Périchole: 
Ah  !  que  les  hommes  sont  bêtes  !  toute  la  grande  scène  de  la  Pré- 
sentation, d'où  se  détache  cet  air  des  Maris  ré-cal-ci-trants ,  un 
modèle  de  bonne  bouffonnerie,  chanté  par  le  vice-roi  et 
répété  par  les  chœurs,  sur  un  piquant  motif  avec  pizzicati  des 
violons,  que  l'orchestre  a  fait  entendre  dans  l'entr'acte,  et  enfin  la 
légende  des  amoureux  :  Cest  au  Pérou,  qui  n'est  certes  pas  une 
des  moins  bonnes  pages  de  la  partition,  mais  qui  a  le  tort  d'arri- 
ver en  dernier.  Nous  nous  proposons  d'ailleurs  de  revenir  sur  la 
musique  lorsque  paraîtra  la  partition,  une  des  meilleures  bien  cer- 
tainement d'Offenbach. 

Nous  avons  distribué,  en  passant,  quelques  éloges  insuffisants  à 
l'adresse  des  principaux  interprètes  de  la  Périchole;  nous  n'en  fi- 
nirions pas  si  nous  prenions  à  tâche  de  payer  à  chacun  le  juste 
tribut  qui  lui  est  dû.  Mlle  Schneider  est,  pour  tout  dire,  ravissante  : 
on  n'a  pas  plus  d'esprit;  on  ne  chante  pas  avec  plus  de  goût.  Du- 
puis est  son  digne  partenaire  ;  le  rôle  de  Piquillo  lui  fera  beaucoup 
d'honneur.  Grenier  est  un  vice-roi  des  plus  amusants  et  des  plus 
excentriques.  Christian  et  Lecomte  tirent  un  très-bon  parti  des 
personnages  grotesques  du  premier  gentilhomme  et  du  gouverneur 
de  Lima.  Blondelet  a  lait  une  ébouriffante  caricature  du  cham- 


324 


KEVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


bellan  Tarapotc.  Les  trois  cousines  sont  i'epr(^'scntées  par  trois  jo- 
lies l'eiumes,  Mlles  Lcgrand,  Carlin  et  Céline  Renaud;  il  n'y  a  pas 
jusqu'aux  demoiselles  d'iionneur,  Mlles  Julia  H.,  Latour,  Gravier  et 
Bénard,  qui  ne  remplissent  leurs  pctils  rôles,  bien  eifacés,  avec  zèle 
et  convenance. 

Nos  compliments  à  la  partie  chorale,  à  l'orcheslre  de  M.  Lind- 
lieim,  au  costumier,  au  décorateur,  par  conséquent  à  la  direction 
qui  K's  a  mis  à  même  d'accomplir  des  prodiges.  Les  Variétés  vi- 
vront tout  l'hiver  sur  la  Pcricitole,  et  si  le  premier  soir  le  succès 
en  a  été  grand ,  c'est  le  cas  de  dire  :  Il  grandira,  car  il  est  Espa- 
gnol. 

D.-A.-D. 


THEATRE  DE  L'ATHÉNÉE. 

I^E   PKTIT-POVCKT, 

Opéra- bouffe  en  trois  actes  et  quatre  tableaux,  paroles  de 

MM.  Eugène  I^eterrier  et  Albert  Vanloo,  musique  de 

M.  Laurent  de  Rillé. 

(Première  représenlation  lo  8  octobre  1808.) 

Le  Pelil- Pouce  t!  Que  de  souvenirs,  que  de  tressaillements  en- 
fantins ce  nom  niagi([Uf  réveille  en  nous!  Comme  on  se  rappelle 
avec  bonheur  l'époqui^  heureuse  où  l'on  frémissait  au  récit  naïf  de 
Perrault,  oii  l'on  tremblait  à  la  voix  de  cet  ogre  insatiable  : 
Ca  sent  la  chaire  fraîche  icil  où  l'on  sympathisait  de  tout  cœur 
avec  les  transes,  avec  les  périls  des  sept  (ils  du  bûcheron ,  et 
comme  on  se  sentait  lier  d'avoir  le  même  âge  que  ce  petit  bon- 
homme qui,  à  force  d'adresse,  triomphait  de  son  cruel  ennemi 
aux  bottes  de  sept  lieues! 

Le  théâtre  a,  plus  d'une  fois,  reproduit  ce  rêve  de  notre  enfance, 
et  jusqu'à  ce  jour  il  s'est  bien  gardé  d'en  altérer  la  tradition. 
Aussi,  n'avons-nous  pas  été  médiocrement  surpris  de  voir  ce  que 
l'Athénée  a  fait  de  notre  cher  Petit-Poucet.  Si  la  poétique  con- 
temporaine exige  de  semblables  travestissements,  qu'on  jette  bien 
vite  au  feu  les  Contes  illustrés  par  Gustave  Doré,  et  qu'on  ne  nous 
parle  plus  de  feu  Perrault. 

Oublions  donc  les  billevesées  de  ce  vieux  radoteur.  Où  a-t-il 
pris  que  le  Petit-Poucet  était  un  enfant  de  sept  ans,  pas  plus  grand 
que  le  poucel  Allez  à  l'Athénée,  et  l'on  vous  y  apprendra  de  la 
bonne  manière  que  le  Petit-Poucet  était  eu  réalité  un  joli  jeune 
homme,  très-amoureux  de  Mlle  Aventurine,  la  fille  aînée  de  l'ogre 
Krock-Mach-Cru,  mais  que  Mme  l'ogresse  Aglaé,  femme  légère, 
repoussait  l'amour  du  faux  ogre  Raslaboul,  pour  disputer  à  sa 
fille  le  cœur  de  ce  séduisant  garçon. 

Eh  bien,  soit  !  Acceptons  ce  thème  nouveau,  puisqu'il  paraît  que 
( 'vst  le  bon,  et  entrons,  sans  plus  de  façon,  dans  la  maison  de 
I'c,;re,  d'autant  plus  qu'il  n'y  est  pas,  et  qu'en  son  absence  on  y 
r;iit  sauter  des  bouchons  de  Champagne.  Un  festin  plantureux  de 
{ lurcuterie  réunit  à  la  même  table  Mme  l'ogresse  et  ses  cinq 
fi'.Ics  (car  elle  n'en  a  que  cinq  toutes  jumelles),  le  faux  ogre  Ras- 
t  ijoul,  le  Petit-Poucet  et  ses  quatre  frères  (eux  aussi  ont  subi 
une  soustraction). 

Mais  le  vrai  ogre  Krock-Mach-Uru  est  un  rusé  compère,  bour- 
geoisement jaloux  de  son  Aglaé,  et  qui  a  feint  un  voyage  de  plu- 
sieurs mois  pour  revenir  la  surprendre  le  soir  même  avec  son 
amant,  qu'il  se  propose  d'accommoder  à  la  sauce  Robert.  Quelle 
aubaine!  Au  lieu  d'un,  il  en  trouve  six,  en  comptant  les  frères 
du  Petit-Poucet,  qui  sont  d'âge  à  inquiéter  un  mari. 

Alors,  a  lieu  la  scène  légendaire  des  couronnes  et  des  bonnets 
de  coton.  Pendant  ce  temps,  Rastaboul  décide  Aglaé  à  fuir  avec 


lui  en  vélocipède,  et  comme  les  filles  de  Krock-Mach-Cru  ont 
échappé  au  couperet  paternel,  tous  nos  personnages  se  retrouvent 
dans  une  même  forêt  et  se  cachent  dans  une  même  caverne. 
L'ogre  arrive  à  son  tour  avec  ses  bottes  de  sept  lieues,  mais  au 
lieu  de  se  les  laisser  dérober,  pendant  son  sommeil,  par  le  Petit- 
Poucet,  il  est  entraîné  dans  un  piégc  par  son  taux  confrère  Rasta- 
boul, et  il  en  sort  débotté  et  muselé.  Ah  !  pour  la  muselière ,  à 
la  bonne  heure,  voilà  une  cocasserie  de  bon  aloi,  bien  que  le  bon- 
homme Perrault  n'y  ait  pas  songé. 

Eu  somme,  la  pièce  de  l'Athénée  a  des  côtés  plaisants,  des  mois 
à  effet,  et  elle  a  réussi  sans  la  moindre  opposition.  Une  fois  qu'on 
a  pris  son  parti  des  innovations  dont  elle  a  fait  un  si  large  usa- 
ge, on  s'y  amuse  franchement  et  on  la  suit  avec  plaisir  dans  sa 
marche  rapide,  car  c'est  là  sa  principale  qualité. 

La  nmsique  de  M.  Laurent  de  Rillé  est  aussi  fort  alerte,  et 
dénote  une  expérience  de  la  scène  qui  ne  doit  pas  nous  étonner. 
Ce  compositeur,  aujourd'hui  inféodé  à  l'Orphéon,  a  débuté  par  le 
théâtre,  et  il  est  un  des  créateurs  de  l'opérette  mythologique,  dont 
on  a  tant  abusé  depuis.  Les  Folies-Nouvelles  et  les  Bouffes  ont 
compté  dans  leur  répertoire  plus  d'un  succès  signé  de  son   nom. 

Après  un  assez  long  silence,  M.  Laurent  de  Rillé  reparaît  sur  la 
brèche,  plein  de  verve  et  d'ardeur  ;  nous  ne  pouvons  que  l'encou- 
rager à  persévérer  dans  cette  voie.  A  en  juger  par  les  nombreux 
morceaux  du  Petit-Poucet,  que  l'on  a  applaudis  avec  justice,  il  y 
trouvera  la  récompense  de  ses  elforts. 

Il  est  assez  difficile  de  nous  rappeler  tous  ces  morceaux,  dont  la 
liste  est  longue,  et  il  faudra  bien  qu'on  se  contente  de  notre  im- 
pression sommaire.  L'ouverture,  par  exemple,  nous  a  semblé  fort 
bien  traitée,  et  il  nous  a  paru  que  l'immixtion  du  vieil  air  :  Ti,  ti, 
Cariibi,  y  faisait  un  très-bon  eifet. 

Dans  le  premier  acte,  nous  avons  remarqué  un  gracieux  air 
chanté  par  Aventurine,  sur  un  motii' de  valse,  l'aird'entrée  du  Petit- 
Poucet,  et  les  couplets  comiques  de  Rastaboul  ;  dans  le  deuxième, 
une  joyeuse  chanson  de  table,  avec  accompagnement  de  Champagne  ; 
un  joli  duetto  d'amour  entre  le  Petit-Poucet  et  la  fille  de  l'ogresse; 
une  tyrolienne,  faite  sans  doute  pour  Mlle  Lassény,  qui  excelle 
dans  celte  spécialité,  et  un  galop  final  dont  l'entrain  ne  laisse  rien 
à  désirer. 

Au  troisième  acte,  nous  citerons  l'air  des  filles  de  l'ogre  qui 
vont  se  coucher:  Bonsoir  papa,  bonsoir  maman,  le  trio  bouffe  à  la 
faveur  duquel  l'ogre,  sa  femme  et  iîaslaboul  préparent  les  ingré- 
dients du  repas,  dont  les  enfants  du  bûcheron  doivent  être  les  pièces 
de  résistance;  puis  le  retour  de  la  chanson  du  Compère  Guilleri 
qu'on  a  déjà  entendue  dans  l'ouverture,  et  qui  revient  cette  fois 
en  variations  chantées  par  le  Petit-Poucet  sur  la  tenue  de  l'air 
primitif  par  ses  quatre  frères.  Ou  a  fait  répéter  ce  morceau. 

Le  quatrième  tableau  se  recommande  par  une  délicieuse  ro- 
mance de  l'Étoile  du  matin,  que  chante  le  Petit-Poucet,  et  qu'il  lui 
a  fallu  redire;  par  un  petit  duo  de  Rastaboul  et  d' Aglaé  sur  leurs 
vélocipèdes,  et  par  deux  couplets  d' Aventurine,  qui  ont  de  l'expres- 
sion, et  qui  ont  été  très-applaudis. 

Le  rôle  du  Petit-Poucet  est  joué  par  Mlle  Van  Ghel ,  une  débu- 
tante, dont  les  formes  se  prêtent  merveilleusement  au  costume 
masculin.  On  reconnaît  tout  d'abord  que  cette  nouvelle  venue 
n'est  pas  novice  à  la  scène;  elle  a  de  la  grâce,  de  l'aisance,  et, 
non  contente  d'être  une  agréable  comédienne,  elle  chante  avec 
goût  et  vocalise  avec  dextérité.  C'est  une  excellente  acquisition 
pour  le  théâtre  de  M.  Busnach. 

Daubray,  qui  joue  le  rôle  de  l'ogre  Krock-Mach-Cru,  sort  du 
théâtre  Déjazet,  où  il  s'est  distingué  en  plus  d'une  circonstance.  Il 
est  à  regretter  que  son  organe,  aphone,  ne  soit  pas  en  harmonie 
avec  le  personnage  qu'il  représente.  Nous  l'attendons  à  une  autre 
création. 


DE  PARIS. 


32S 


Léonce,  dans  le  faux  ogre  Rastaboul ,  a,  coninic  toujours,  des 
élans  d'une  fantaisie  irrésistible.  Mlle  Lassény  prête  à  l'ogresse 
Aglaé  une  physionomie  suffisamment  excentrique,  et  Mlle  Lovato 
est  fort  gentille  sous  les  traits  de  la  petite  Aventurine. 

Selon  son  habitude,  M.  Busnach  n'a  rien  négligé  pour  rendre 

aussi  splendide  que  possible  la  mise  en  scène  du  Petit-Poucet,  et, 

de  son  côté,  M.  Bernardin  ne  s'est  pas  épargné  dans  ses  délicates 

fonctions  de  chef  d'orchestre. 

D. 


CORRESPONDANCE. 

A  M.  le  Directeur  de  la  Revue  et  Gazette  musicale. 
Mon  clier  collaborateur, 

Depuis  longtemps  je  garde  le  silence  envers  les  lecteurs  de  la 
Revue  et  Gazette  musicale;  ce  n'est  pas  que  j'aie  été  saisi  par  la 
paresse  ni  que  l'art  ait  rien  perdu  de  son  intérêt  pour  moi;  mais 
vous  savez  de  quels  grands  travaux  je  suis  occupé  et  quelle  est  la 
multiplicité  de  mes  occupations  journalières.  En  dépit  de  ma 
bonne  volonté,  j'ai  vu  le  temps  s'écouler  sans  vous  rien  envoyer. 
Je  saisis  aujourd'hui  l'occasion  d'une  solennité  musicale  qui  vient 
d'avoir  lieu  à  Bruxelles  et  le  moment  de  repos  que  me  procure 
une  indisposition  légère,  pour  me  rappeler  à  votre  souvenir. 

Le  29  septembre  dernier  un  nouvel  orgue  a  été  inauguré  dans 
l'église  Saint-Boniface,  à  Ixelles,  commune  limitrophe  de  Bruxel- 
les. On  savait  que  plusieui'S  organistes  de  talent  devaient  se  faii'e 
entendre  sur  cet  instrument,  et  longtemps  avant  le  moment  lise 
l'église  était  littéralement  remplie. 

Après  un  scherzo  symphouique  de  Lemraens,  exécuté  par  M. 
Ceuppens,  maître  de  chapelle  et  or.i^aniste  de  l'église  Saint-Boni- 
face, suivi  d'un  motet  de  Palestrina,  chanté  par  les  artistes  de  la 
chapelle  de  cette  église,  M.  Renaud  de  Vilbac,  organiste  de  l'église 
de  Saint-Eugène  de  Paris,  a  joué  une  fugue  admirable  de  J.-S. 
Bach,  en  mi  mineur,  et  un  thème  varié  de  Lemmens,  morceau 
d'une  grande  distinction.  Artiste  d'un  rare  mérite,  M.  Renaud  est 
un  des  organistes  français  de  la  jeune  école  qui  ont  entrepris  la 
régénération  de  l'art  de  jouer  de  l'orgue  en  s'engageant  dans  la 
voie  si  brillamment  ouverte  par  M.  Lemmens,  et  en  abordant  fran- 
chement cette  musique  de  Bach,  l'idéal  de  la  grandeur  et  de  la 
puissance,  sans  toutefois  négliger  les  ressources  de  la  variété  des 
timbres  et  de  leurs  combinaisons  pour  les  choses  de  fantaisie, 
dont  la  facture  moderne  a  doté  les  instruments.  Large  et  puissant 
de  style  dans  la  fugue  de  Bach,  M.  Renaud  de  Vilbac  a  eu  des 
délicatesses  charmantes  et  de  très-heureux  effets  de  sonorité  dans 
le  thème  varié  de  Lemmens,  ainsi  que  dans  la  fantaisie  et  impro- 
visation par  lesquelles  il  a  clôturé  la  séance. 

•J'ai  aussi  à  signaler  un  artiste  qui ,  dans  l'improvisation  sur 
l'orgue,  mérite  d'être  placé  au  premier  rang  :  cet  artiste  est  M. 
Dubois,  aveugle  depuis  son  enfance,  mais  dont  il  est  impossible 
de  supposer  l'infirmité  lorsqu'il  est  au  clavier.  Doué  d'une  riche 
imagination,  il  saisit  à  chaque  instant  son  auditoire  par  des  traits 
inattendus  et  par  des  modulations  aussi  hardies  que  bien  attachées. 
Avec  une  prestesse  que  pourrait  à  peine  égaler  l'homme  le  plus 
clairvoyant  et  l'organiste  le  plus  expérimenté,  il  découvre  immé- 
diatement, en  dépit  de  sa  cécité,  les  ressources  d'un  orgue  qu'il 
joue  pour  la  première  fois,  et  ses  mains  se  portent  avec  une  ra- 
pidité merveilleuse  sur  les  registres ,  dont  il  devine  les  places  et 
qu'il  combine  avec  l'intuition  secrète  et  sûre  de  leurs  effets.  Chez 
cet  artiste  privé  de  la  vue,  il  y  a..,  sans  aucun  doute ,  une  révéla- 
tion spontanée  de  tout  ce  qui,  dans  un  instrument  nouveau,  peut 
être  en  harmonie  avec  les  inspirations  de  son  sentiment.  Dans  une 


fantaisie  très-développée  sur  un  tlièine  origina',  M.  Dubois  a  vi- 
vement impressionné  l'auditoire  réuni  dans  l'église  de  Saint-Boni- 
face par  la  variété  d'idées  et  d'effets  de  son  improvisation. 

Dans  la  même  séance,  M.  Sannen,  organiste  de  l'église  des 
Saints  Jlichel  et  Gudule,  a  exécuté  un  andante,  un  récit  et  une 
fugue  de  sa  composition. 

L'orgue  de  Saint-Boniface,   construit  dans  les  ateliers  de  la  So- 
ciété anonyme  pour   la   fabrication  de  grandes  orgues  (établisse- 
ments Merklin-Schutze),  à  Bruxelles,  est  un  instrument    composé 
de  trois  claviers  manuels,  clavier  de  pédales   séparées ,  vingt-sept 
jeux,  et  dix  pédales  d'accouplements  et  de  combinaisons.  La  cons- 
truction en  est  des  plus  remarquables,  par  la  précision  et  le  fini 
des  détails.  La  puissance^  et  l'ampleur    des  jeux   de   fonds  et  du 
grand  chœur  de   cet    instrument  sont  telles,  que  les  connaisseurs 
ont  cru  entendre  un  orgue  de  cinquante  jeux.    J'ajouterai   que  la 
j  variété  des  timbres  est  si  bien  caractérisée  et  offre  de  si  grandes 
I  ressources  de    combinaisons  que,  sous  les  mains  de  MM.  Renaud 
I  de  Vilbac  et  Dubois,  ces  ressources   paraissaient  inépuisables.  La 
,  séance  d'inauguration  de  ce  bel  instrument  a  offert  un  vif  intérêt, 
pendant  près  de  deux  heures,    aux    artistes    et    amateurs  qui  s'y 
étaient  rendus  en  foule. 

Considérez-moi  toujours,  mon  cher  collaborateur,  comme  votre 
tout  dévoué. 

FÉTIS. 
Bruxelles,  le  7  octobre  1868. 


NOUVELLES  DES  THfiTRES  LYRIQUES. 


:j.*j.  Le  théâtre  impérial  de  l'Opéra  a  donné  lundi  et  vendredi  Hanilet 
et  mercredi  la  Juive. —  Une  douzaine  de  jeunes  Suédois  qui  ont  fait  le 
voyage  de  Stockholm  exprès  pour  entendre  leur  célèbre  compatriote, 
assistaient  à  la  représentation  à'Hamlet,  donnée  mercredi  de  la  semaine 
dernière  et  ils  ont  applaudi  avec  enthousiasme    Mlles  Nilsson  et  Faure. 

—  Aujourd'hui  représeotation  extraordinaire  de  la  Juive. 

^*^  La  représentation  extraordinaire  de  l'Africaine,  donnée  dimanche, 
n'a  pas  été  moins  brillante  que  la  précédente.  Bravos  enthousiastes  et 
rappels  à  Marie  Sass,  l'admirable  Séliks  et  à  ses  partenaires.  —  Vers  la 
lin  du  mois  reprise  solennelle  des  Huguenots. 

^%  Une  indisposition  de  Capoul  avait  interrompu  cette  semaine  les 
représentations  d'un  Premier  Jour  de  bonheur  ;  elles  ont  été  reprises  hier, 

^*»  M.  de  Floto^v  est  depuis  quelques  jours  à  Paris,  oit  il  passera 
l'hiver.  L'auteur  de  Martha  y  termine  son  nouvel  opéra  l'Ombre,  dont 
M.  de  Saint-Georges  a  écrit  le  poëme  et  qui  va  entrer  en  répétitions  au 
théâtre  de  l'Opéra-Comique  pour  être  joué  en  décembre  prochain.  C'est 
un  opéra  à  quatre  personnages,  sans  chœurs. 

:^*»  La  recette  de  la  deuxième  représentation  de  la  Lucia,  au  théâtre 
Italien,  a  atteint  11,800  francs.  —  Hier  on  a  donné  la  Traviata  pour  la 
première  fois  de  la  saison ,  et  mardi  sera  jouée  la  Contessina,  opéra  du 
prince  Poniatowski. 

.15*4  La  plus  grande  activité  règne  au  théâtre  Lyrique  impérial  et  l'on  peut 
affirmer  maintenant  que  la  réouverture  en  aura  lieu  au  plus  tard  vers 
le  2b  de  ce  mois.  —  C'est  par  li  reprise  du  Val  d'Andorre  qu'elle 
se  fera  ;  il  y  a  de  plus  à  Pétude  :  Ipliigénie  en  Tauride,  Don  Juan  et  Ylrato. 
La  nouvelle  direction  compte  au  reste  puiser  largement  dans  le  répertoire 
ancien  et  faire  entendre  à  la  génération  actuelle  d'excellents  ouvrages  qui 
seront  nouveaux  pour  elle.  — Le  personnel  engagé  par  M.  Pasdeloup  est 
considérable,  en  voici  la  liste  :  Soprani  et  mezzo-Soprani  :  Mmes  Orgeni, 
Schrœder,  Daram,  Gilbert,  Jeanne  Devriès,  Fidès  Devriès,  Formi,  Ducasse, 
Duval,  Willème,  Guérin,  Denizet.  —  Ténors  :  MM.  Monjauze,  Massy, 
Bosquin,  Coëlhot,  Raoul  Delaspre,  Berty,  Legrand,  Verdellet.  —  Barytons 
et  basses  :  MM.  Lutz,  Meillet,  Caillot,  Aubéry,  Géraizer,  Labat,  Girardet, 
Wartel,  Gabriel,  Grignon.  Enfin  la  nouvelle  direction,  s'inspirant  de  la 
pensée  qui  a  si  puissamment  contribué  au  succès  des  Concerts  po- 
pulaires, a  revisé  le  tarif  du  prix  des  places  et  lésa  notablement  abaissés. 

—  Désormais,  les  fauteuils  d'orchestre  ne  coûteront  plus  le  soir  au 
théâtre  Lyrique,  que  5  fr.;  les  balcons,  6  fr.  ;  les  secondes  loges,  i  fr.; 
et  le  parquet,  2  fr.— Enfin  des  succursales  de  location  sont  étabhes  au  bou- 
levard Saint-Denis,  chez  Grus,  au  boulevard  desltahens,  chez.  Brandus,  et 
à  la  Madeleine,  chez  Flaxland,  éditeurs  de  musique. 

***  C'est  dans  les  premiers  jours  de  janvier  que  l'opéra  de  Ricci,  Af.  de 
la  Palisse,  composé  exprès  pour  le  théâtre  des  Fantaisies-Parisiennes  fera 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


son  apparition  à  ce  théâtre.  —  Mlle  Marimon,  qui  y  chantera  le  rôle  prin- 
cipal, était  à  Paris  ces  jours-ci  et  l'auteur  le  lui  a  lu  en  lui  donnant  ses 
instructions.  La  cliannanle  cantatrice  l'a  emporté  à  Bruxelles,  où  elle  va 
l'étudier  pendant  le  temps  qui  lui  reste  encore  à  jouer  au  théâtre  de  la 
Monnaie. 

^*if:  La  recette  de  la  troisième  représentation  de  la  Périchole,  au  théâtre 
des  Variétés,  malgré  le  service  fait  encore  ce  jour-là  aux  auteurs  et  à  la 
presse,  a  atteint  -i,300  francs.  Celle  de  la  quatriijme  a  dépassé  5,000  fr., 
et  le  bureau  de  location  ne  désemplit  pas. — De  même  que  cela  a  eu  lieu 
après  la  première  représentation  de  la  Grande- Duchesse,  la  Périchole  a 
subi  à  la  deuxième  de  très-heureux  remaniements  :  les  scènes  qui  fai- 
saient longueur  au  second  acte  ont  été  raccourcies,  divers  morceaux  de 
musique  ajoutés,  d'autres  déplacés  ;  les  acteurs  sûrs  maintenant  de  leurs 
effets,  qu'ils  ont  modifiés  en  certaines  parties,  se  livrent  avec  confiance 
et  entrain  à  leurs  rôles.  Il  y  a  donc  aujourd'hui  homogénéité  parfaite 
dans  la  pièce,  gaieté  étourdissante  d'un  bout  à  l'autre,  et  quant  à  la  nou- 
velle partition  d'Offenbach ,  pas  n'est  besoin  do  rappeler  qu'il  n'y  a  eu 
qu'une  voix  pour  l'acclamer. 

^*j^  Le  succès  des  Croqueuses  de  poinmes  s'est  amplement  confirmé 
cette  semaine.  Débarrassée  de  quelques  longueurs,  la  pièce  marche  bien 
et  constitue  pour  le  théâtre  des  Menus-PJaisirs  un  spectacle  amusant, 
auquel  la  musique  de  M.  Deffès  ajoute  sa  mélodie  et  son  originalité. 
Mlle  Marcus  {noire  compte  rendu  de  la  semaine  dernière  lui  rendait  au 
surplus  pleinement  justice)  joue  et  chante  de  mieux  en  mieux  son  riMe 
et  se  fait  remarquer  parmi  les  meilleurs  interprètes  de  l'ouvrage. 

**^  Après  les  Croqueuses  de  Pommes,  le  même  théâtre  donnera  un 
opéra-bouffe  en  trois  actes  de  MM.  Nuitter  et  Tref'eu  :  la  Princesse 
KelchcUa.  —  La  musique  est  d'Emile  .louas. 

5t*«  Une  combinaison  nouvelle  paraît  surgir  pour  l'exploitation  du 
théâtre  du  Prince-Impérial,  dont  M.  Lemaire,  ancien  directeur  du  théâtre 
de  la  Porte-Saint-Martin,  deviendrait  cessionnaire;  modifiée  intérieu- 
rement selon  les  règles  de  l'acoustique,  la  salle  serait  utilisée  pour  un 
Opéra  populaire,  dont  les  places  seraient  accessibles  aux  bourses  les  plus 
modestes. 

^*^  La  réouverture  de  l'Alcazar  d'hii^er  a  eu  lieu  cette  semaine.  Une 
bonne  troupe,  des  chœurs  bien  dressés,  un  répertoire  varié,  une  ad- 
ministration excellente,  tels  sont  les  éléments  de  succès  qui  maintien- 
nent à  cet  établissement  lyrique  et  chorégraphique  la  vogue  dont  il  jouit 
depuis  longtemps. 

^*^,  La  direction  Halanzier  déploie  au  Grand-Théâtre  de  Bordeaux  la 
plus  louable  activité.  Après  Faust,  magnifiquement  interprété  par 
Mlles  Baretti  et  Nordet,  MM.  Peschard  et  Bonncfoy,  le  public  a  l'evu 
avec  beaucoup  de  plaisir  le  Bouffe  et  le  Tailleur,  ouvrage  par  lequel 
M.  Halanzier  a  commencé  la  réalisation  de  son  intelligent  projet  de 
ressusciter  à  Bordeaux  les  meilleurs  opéras-comiques  de  l'ancien  réper- 
toire.—  Au  Théâtre-Français,  le  Violoiteiur,  d'Offenbach,  a  des  représen- 
tations fort  suivies.  Ce  théâtre  vient  de  reprendre  avec  Mmes  Toudouze 
et  M.  Etienne,  remplaçant  Rose  Bell  et  Carrier,  Fleur-de-Thc ,  inter- 
rompu en  plein  succès  par  la  clôture  annuelle  de  l'été.  Malgré  le  chan- 
gement des  deu.'c  principaux  interprètes,  cette  reprise  a  fait  le  plus  grand 
plaisir,  et  le  directeur,  M.  Lambert,  n'a  eu  qu'à  s'en  féliciter. 

,**  Au  théâtre  des  Célestins  de  Lyon,  Fleur  de  Thé  fait  florès.  A  la 
première  représentation,  qui  avait  attiré  un  public  nombreux  et  choisi, 
la  charmante  chinoiserie  musicale  de  Ch.  Lecocq  a  été  enlevée  dans  un 
éclat  de  rire  général  et  au  milieu  d'applaudissements  continuels.  — 
Luco  a  joué  tout  son  rôle  du  mandarin  avec  un  entrain  étourdissant. 
La  charmante  Clarisse  (Fleur  de  Thé)  et  la  piquante  cantinière  Jeanne 
ont  obtenu  un  succès  légitime,  ainsi  que  MM.  Belliard  et  Singlet,  leurs 
partenaires.  La  direction  a  bien  fait  les  choses  :  costumes  et  décors  sont 
frais  et  jolis. 

,,*^  La  Grande-Duchesse  vient  d'être  reprise  au  théâtre  de  Nice  et  elle 
exerce,  suivant  son  habitude,  une  attraction  irrésistible  et  des  plus  fruc- 
tueuses pour  la  direction .  Mlle  Géraldine  a  toutes  les  traditions  de  l'école 
fantaisiste.  Sa  physionomie  piquante,  son  jeu  verveux  et  spirituel,  sa 
voix  flexible,  ses  costumes  ont  conquis  le  public  et  ont  valu  à  la  char- 
mante artiste  une  édition  nouvelle  de  l'ovation  qui  l'accueille  d'ordinaire 
dans  le  rôle  de  la  souveraine  de  Gerolstein. 

**;j:  L'Agence  dramatique  dirigée  avec  tant  d'honorabilité  et  d'intelli- 
gence par  M.  Formelle  vient  de  recevoir,  dans  la  con.stitution  de  son 
personnel,  une  modification  qui  ne  peut  qu'ajouter  aux  garanties  si  jus- 
tement réputées  de  ses  opérations.  —  M.  Formelle  s'est  adjoint  comme 
associé  M.  Ambroselli ,  qui  s'est  fait  une  excellente  réputation,  à  Paris, 
comme  artiste  et  professeur  de  chant.  —  M.  Ambroselli  est  un  musicien 
accompli;  il  possède  à  fond  le  répertoire  français  et  l'italien.  —  Son 
savoir,  son  expérience  et  ses  connaissances  spéciales,  en  ce  qui  concerne 
l'art  lyrique  et  l'art  dramatique ,  rendront  son  concours  très-précieux 
à  l'Agence-Formelle. 


NOUVELLES  DIVERSES. 

**«  C'est  dimanche,  18,  à  2  heures,  au  Cirque  Napoléon,  que  doivent 
se  rouvrir  les  Concerts  populaires  de  musique  classique  sous  la  direc- 
tion de  M.  Pasdeloup.  —  Voici  le  programme  du  premier  Concert  : 
1"  Ouverture  de  Ruy-Blas ,  de  Mendelssohn  ;  ■ —  2"  Symphonie  en  la  de 
Beethoven  ;  —  15°  Andante  et  menuet  de  Haydn  ;  —  4°  Fragments  des 
Maîtres  chanteurs  de  Wagner  (entr'acte  du  3"  acte,  —  valse,  —  marche 
des  Maîtres  chanteurs). 

t**  Mercredi,  li  courant,  à  1  heures  du  soir,  aura  lieu  dans  la  nou- 
velle et  magnifique  chapelle  des  Pères  Maristes,  132,  rue  de  Vaugirard, 
l'inauguration  de  l'orgue  sortant  des  ateliers  de  la  Société  anonyme  Mer- 
klin-Sdiiitze.  —  MM.  VA.  Batiste  et  Renaud  de  Vilbac,  organistes  de 
Paris,  et  L.  Vasseur,  organiste  de  Versailles,  feront  entendre  l'instru- 
ment. —  Les  motets  seront  cliantés  par  M.  Leibnitz. 

^*,  La  biographie  de  Meyerbeer  par  M.  Hermann  Mendel,  qui  vient 
de  paraître  en  allemand  à  Berlin,  ne  tardera  pas  à  être  traduite  en  an- 
glais à  New-York,  par  Miss  Alice  Asbury,  de  Quincy  (Illinois). 

^*„  L'éditeur  Gérard  vient  de  mettre  en  vente  la  valse  des  Rêves  d^ Au- 
tomne de  Jules  Klein.  C'est  une  de  ces  compositions  qui  se  recomman- 
dent d'elles-mêmes  au  public  dilettante  par  le  charme  de  leurs  mélo- 
dies, et  dont  il  serait  oiseux  de  faire  l'éloge. 

^*^  C'est  par  erreur  que,  dans  notre  dernier  numéro,  nous  avons  an- 
noncé, comme  ayant  déjà  paru,  les  trois  premiers  volumes  de  la  Biogra- 
phie des  Musiciens,  de  M.  A.  Bès.  Ces  volumes  sont  encore  en  manuscrit. 

^,*^  Mme  Rossi-Gallieno ,  qui  vient  de  Milan,  où  ses  compositions  ont 
rencontré  le  plus  chaleureux  accueil,  est  de  retour  à  Paris.  Elle  va  y 
reprendre  ses  cours  de  piano.  Deux  de  ses  nouvelles  compositions  :  les 
Chants  du  Soir  (tarentelle)  et  la  Pileuse,  valse  sentimentale ,  sont  desti- 
nées à  un  grand  succès  cet  hiver. 

^•^  L'abbé  Franz  Liszt  est  retourné  à  sa  résidence  de  Groitaraare, 
qu'il  a  habitée  tout  l'été,  déilinant  les  offres  du  grand-duc  de  Saxe- 
Weimar,  qui,  pour  l'attirer  en  Allemagne,  avait  mis  à  sa  disposition  un 
de  ses  châteaux  de  plai.sance. 

*.%  Il  n'est  bruit,  à  Spa  et  aux  alentours,  que  de  la  découverte  d'un  té- 
nor doué  d'une  voix  merveilleuse,  découverte  qu'un  dilettante  italien, 
M.  J.  de  L...,  doit  au  hasard.  Le  futur  artiste  est  un  jeune  pâtre  de 
Winaniplanclie,  âgé  de  seize  ans,  nommé  Chalsèche.  M.  de  L...,  qui  l'a 
fait  entendre  devant  un  auditoire  d'arti.stes,  s'est  chargé  de  son  éduca- 
tion musicale. 

^*j  I  <?<  orphéonistes  d'Arras  ont  dignement  représenté  la  France  au 
concour.s  iiitcrnalional  d'Amsterdam. 

^*,  11  y  a  huit  jours,  les  Sociétés  chorales  du  Jylland,  province  occi- 
dentale du  Danemark,  réunies  aux  Sociétés  de  Copenhague  (1300  chan- 
teurs), ont  donné,  au  jardin  royal  de  Rosenbord,  un  Festival  de  trois 
journées,  durant  lequel  ont  été  chanté&s  des  œuvres  des  compositeurs 
les  plus  populaires  de  la  Scandinavie,  A.-J.  Gade,  Lindblad,  Hartmann, 
Asger  Hammerick.  La  famille  royale  et  plus  de  vingt  mille  personnes 
assistaient  à  cette  solennité, 

^:*;^  Le  chant  choral  populaire  français  compte  un  organe  de  plus  dans 
le  Moniteur  de  VOrphéon,  journal  hebdomadaire,  dont  le  premier  nu- 
méro a  paru  cette  semaine.  Cette  nouvelle  feuille  se  présente  aux  socié- 
tés orphéoniques  entourée  de  leurs  meilleurs  amis  et  protecteurs;  elle 
s'annonce  comme  indépendante  et  pratique;  elle  s'est  assuré  la  partici- 
pation active  d'Eugène  Delaporte,  qui  a  voué,  comme  on  sait ,  sa  vie  et 
son  intelligence  à  la  propagation  de  l'art  musical  dans  le  peuple. 

^*t  La  direction  du  Conservatoire  de  Perpignan  vient  d'être  confiée  à 
M.  Gabriel  Baille,  musicien  distingué,  auteur  d'un  recueil  (h  Prœludium) 
de  morceaux  pour  l'orgue. 

»''^  Roméo  Accursi,  qui  vient  de  diriger  si  brillamment  les  concerts 
du  Casino  de  Vichy,  est  de  retour  à  Paris.  Il  a  repris  ses  fonctions  de 
premier  violon  solo  à  l'orchestre  du  théâtre  Italien. 

^*,t  Un  hymne  national  espagnol  a  été  spécialement  composé  pour 
être  chanté,  dans  toutes  les  églises  de  la  capitale,  le  jour  de  l'entrée  du 
général  Prim  à  Madrid. 

n,\  Le  Musical  World  du  10  octobre  contient  une  étude  très-remar- 
quable sur  la  sixième  symphonie  de  Schubert,  en  ut,  récemment  décou- 
verte à  Vienne  par  M.  Grove,  et  qui  figure  sur  le  programme  des  con- 
certs du  samedi  au  Crystal  Palace  pour  cet  hiver.  Schubert  a  composé 
neuf  symphonies  (deux  sont  incomplètes);  la  cinquième,  la  sixième  et 
la  septième  n'ont  jamais  été  exécutées. 

,j*^  On  annonce  l'incendie  du  Théâtre  sociale  de  Tréviso  (Vénétie), 
qui  a  été  complètement  détruit  dans  la  journée  du  1"  de  ce  mois.  — 
Heureusement  ce  sinistre  n'a  point  fait  de  victimes.  La  salle  était  élégante 
et  assez  spacieuse.  —  On  devait  inaugurer  sous  peu  de  jours  la  saison 
d'automne.  —  C'était  une  troupe  lyrique  et  les  répétitions  étaient  déjà 
commencées. 

,f%  Un  homme  qui  fut  un  dilettante  passionné,  un  amateur  éclairé  et 
un  protecteur  des  arts,  M.  le  baron  Nicolaï,  ofiScier  général  russe,  parent 


DE  PARIS 


327 


de  M.  le  prince  de  Broglie,  vient  d'entrer  comme  novice  au  monastère 
de  la  Grande-Chartreuse. 

»*^  L'excellent  professeur  de  chant  Bonoldi  vient  de  rentrer  à  Paris 
après  deux  mois  de  séjour  en  Italie. 

-^*^,  Au  service  de  M.  le  comte  Walewsky,  la  marche  funèbre  com- 
posée par  Litolff  en  l'honneur  de  Meyerbeer  a  été  exécutée  par  le  petit 
orchestre  de  Sax  et  a  produit  une  protonde  sensation. 


***  Encore  une  perte  bien  regrettable  pour  la  Revue  et  Gazette  musi- 
calel  L'un  de  nos  plus  anciens  collaborateurs,  Léon  Kreutzer,  est  mort 
mardi  dernier  à  Vichy.  La  cérémonie  funèbre  a  eu  lieu  dans  cette  ville, 
et  le  corps  a  été  ramené  à  Paris,  vendredi,  par  les  soins  de  la  femme 
du  défunt.  Nous  consacrerons  une  notice  biographique  à  ce  grand  ar- 
tiste, compositeur,  critique,  écrivain,  que  nos  lecteurs  ont  pu  apprécier 
et  qui  laisse  le  souvenir  durable  d'un  poëte,  d'un  érudit,  d'un  esprit 
élevé  et  d'une  âme  d'élite. 

***  Une  feuille  artistique  de  New-York  a  apporté  cette  semaine  une 
bien  triite  nouvelle,  reproduite  par  la  presse  parisienne  :  Mlle  de  la  Pom- 
meraye  (Rose  Bell)  aurait  succombé  à  un  mal  foudroyant,  la  veille  de 
ses  débuts  sur  un  théâtre  d'opéra-bouffe  de  cette  ville.  Nous  espérons 
que  le  prochain  courrier  de  New- York  démentira  cet  événement,  d'au- 
tant plus  douloureux  que  Mlle  de  la  Pommeraye  ne  s'est  embarquée 
pour  l'Amérique  qu'après  bien  des  hésitations,  et  comme  à  contre-cœur, 
sous  l'influence  des  tristes  pressentiments  de  son  père. 

^**  La  Scandinavie  vient  de  perdre  l'un  de  ses  compositeurs  les  plus 
populaires,  l'auteur  norwégien  de  Brudefaerden  i  Hardanger  (le  Cortège 
de  noce),  et  d'autres  chœurs  favoris  des  étudiants  d'Upsal  et  de  Copen- 
hague, publiés  en  français  par  la  maison  Brandus  et  Dufour,  et  qui 
sont  du  répertoire  de  l'Orphéon  de  la  ville  de  Paris. 


ET  RANGER 

^*f,  Londres.  —  Les  concerts  du  Palais  de  Cristal  ont  commencé  samedi, 
sous  la  direction  de  M.  Manns.  L'ouverture  d'Oberon,  la  symphonie  en  la 
de  Mendelssohn,  la  Fest-Ouverture  de  Robert  Volkmann,  étaient  les 
morceaux  les  plus  importants  du  programme.  Le  ténor  anglais  Vernon 
Rigby  et  la  jeune  cantatrice  belge  Mlle  Sternberg,  chargés  de  la  partie 
vocale,  s'en  sont  tirés  à  leur  honneur.  M.  Pauer  a  été  trôs-applaudi  dans 
plusieurs  soli  de  piano. 

,1;*:^  Bruxelles.  —  Warot  a  débuté  au  théâtre  de  la  Monnaie  dans 
la  Muette.  Le  sympathique  ténor,  mieux  en  voix  que  jamais,  a  joué 
et  chanté  son  rôle  de  manière  à  satisfaire  les  plus  difficiles  ;  l'air 
du  Sommeil  lui  a  valu  une  ovation  bien  méritée.  Lui  et  Dumestre 
ont  été  magnifiques  dans  le  duo  :  Amour  sacré  de  la  patrie.  —  Parmi 
les  artistes  qui  doivent  remplacer  ceux  qui  ont  résilié,  on  a  remar- 
qué avec  plaisir  le  nom  de  la  basse  Cazaux,  de  l'Opéra  de  Paris, 
cédée  par  M.  Perrin  avec  Warot  et  Mlle  Godefroid;  de  M.M.  Carman 
et  Guffroy  ;  de  Mlle  Peyret,  contralto.  ~  Mlle  Marimon  a  ob- 
tenu un  très-beau  succès  dans  le  Toréador,  succès  qu'ont  par- 
tagé MM.  Jamet  et  Barbet. —  La  Société  chorale  de  l'Orphéon,  une 
des  plus  nouvellement  formées  de  la  capitale  et  non  la  moins  vail- 
lante, a  donné  une  brillante  sérénade  à  M.  Fétis  à  l'occasion  de  sa 
fête.  Elle  a  exécuté  avec  une  verve,  un  ensemble  et  un  fini  remar- 
quables, la  Priéreavant  la  bataille  de  Soubre,  les  Chants  lyriques  de  Saûl  de 
Gevaert  et  les  Buveurs  de  Kiicken.  Apres  la  sérénade,  le  comité  de 
l'Orphéon  s'est  rendu  auprès  de  M.  Fétis,  et  par  l'organe  de  son  pré- 
sident, M.  Richald,  a  offert  au  savant  directeur  du  Conservatoire 
la  présidence  d'honneur  de  la  Société,  que  celui-oi  a  acceptée  avec 
empressement. 

^**  Bade.  —  Le  règne  de  l'opérette  dure  encore,  et  jusqu'au  12  octobre 
Bade  appartient  à  Offenbach.  L'opérette  emportera  bien  des  regrets!  C'est 
que  Lischen  et  Fritzchen,  Jeanne  qui  pleure  et  Jean  qui  rit,  Monsieur 
Choulleurij,  traduits  par  Mlle  Zulma  Bouffar,  Désiré,  Jean-Paul  Beaucé, 
aident  merveilleusement  à  passer  le  temps.  Les  dernières  représentations 
annoncées  comprendront  les  Pantins  de  Violette,  la  Demoiselle  en  loterie, 
la  Chatte  métamorphosée  en  Femme  et  Monsieur  Choufleury. 

,*„,  Darmstet/i.— Les  27  et  28  septembre,  a  été  célébré  le  sixième  festival 
du  Rhin  central,  auquel  ont  pris  part  sept  cent  cinquante  exécutants, 
sous  la  direction  de  C.  Mangold.  Les  oratorios  Samson,  de  Hœndel,  et 
la  Création,  de  Haydn,  la  symphonie  en  la  de  Beethoven  et  le  Frithjof 
figuraient  en  première  ligne  au  programme  cl  ont  été  supérieurement 
rendus.  Parmi  les  chanteurs  solistes,  on  remarquait  Mme  Peschka- 
Leutner. 

»*„  Stutlgard.  —  Southeim  nous  est  revenu.  Le  célèbre  ténor  a  reparu 
dans  son  opéra  de  prédilection,  la  Juive.  Eléazar  a  électrisé  son 
public  d'un  bout  à  l'autre  delà  représentation;  à  la  fin  du  quatrième  acte, 
on  l'a  rappelé  trois  fois,  chose  inouïe  à  Stutlgard!  Ce  chanteur  éminent 
est  désormais  une  des  gloires  de  l'Allemagne  artistique. 


„*^  Berlin.  —On  vient  de  reprendre  à  l'Opéra  le  Templier  et  la  Juive, 
de  Marschner,  avec  Mmes  Voggonhuber  et  Horina,  MM.  Bet7,  Woworsky, 
Salomon,  Fricke  et  Kruger.  Une  cantatrice  allemande  appartenant  au 
théâtre  de  la  Scala  de  Milan,  Mlle  Giovannina  Stella,  engagée  à  Berlin 
pour  quelques  repré.sentations,  a  débuté  avec  succès  dans  la  Somnambule. 
Son  talent  n'est  cependant  pas  unanimement  reconnu.  L'OEdipe,  do  So- 
phocle, mis  en  musique  sur  le  texte  grec,  par  M.  Bellermann,  profcs.scur 
de  chant  au  Gymnase  du  Cloître-Gris,  sera  représenté  prochainement  par 
les  meilleurs  élèves  de  cette  institution.  Les  costumes  ont  été  prêtés  par 
l'intendance  royale  des  théâtres.  (On  sait  que  Mendelssohn,  le  premier,  a 
composé  la  musique  cVOEdipe  et  d'Antigone).  —  Un  concert  a  été  donné 
par  les  musiques  militaires  du  9."  régiment  de  la  garde  et  du  régiment 
de  l'empereur  François,  sous  la  direction  de  M.  Wieprecht,  au  profit  de 
la  caisse  de  pensions  pour  les  veuves  et  les  orphelins  des  musiciens  de 
l'armée,  fondée  par  l'éditeur  Bock.  On  y  a  surtout  applaudi  la  belle  fan- 
taisie de  Wieprecht  sur  le  Prophète. 

^*;j  Munich. —  Le  Premier  Jour  de  bonheur  vient  d'être  donné  avec  non 
moins  de  succès  qu'à  Prague.  Deux  artistes  d'un  très-grand  mérite, 
Nachbaur  et  Mlle  Stehle,  remplissaient  les  principaux  rôles  et  ont  puis- 
samment aidé  à  la  réussite  de  l'œuvre  d'Auber. 

^*,j  Vienne.  —  L'orchestre  de  l'Opéra  donnera  cet  hiver  huit  concerts 
philharmoniques,  du  8  novembre  au  28  février.  La  Fée  Mab  de  Berlioz, 
l'ouverture  de  Sakountala  de  Goldmark,  la  symphonie  en  si  mineur 
d'Esser,  celle  en  ré  mineur  de  R.  Volkmann  y  seront  exécutées. 

^**  Rome.  —  L'ouverture  du  théâtre  Argentina  s'est  faite  par  Lucrezia 
Borgia,  avec  Elvira  Demi  et  Orsini  et  le  ballet  de  Pratesi,  Xelly.  —  On 
répète  Dinorah,  dont  le  principal  rôle  aura  la  Mongini  pour  interprète. 

^',1,  Lisbonne.  —  Fleur  de  Thé  (Flôr  de  chà),  n'a  fait  qu'un  saut  de 
Paris  à  la  capitale  du  Portugal:  la  charmante  opérette  de  Charles  Lecocq, 
pour  sa  première  tentative  auprès  d'un  public  étranger,  l'a  séduit  bel  et 
bien.  Bravos  et  rappels  ont  été  prodigués  aux  artistes  :  Anna  Pereira,  la 
sympathique  actrice  portugaise,  au  bénéfice  de  qui  cette  première  repré- 
sentation était  donnée,  Rosa  Damasceno,  et,  pour  la  partie  masculine, 
Taborda,  Queirez  et  Auguste.  La  direction,  de  son  côté,  a  fait  des  mer- 
veilles pour  la  mise  en  scène.  Elle  peut  légitimement  compter  sur  un 
succès  durable  et  fructueux,  qui  sera  le  bienvenu  au  petit  théâtre  de 
la  Trindade. 

**.;t-  Stockholm.  —  11  vient  de  s'ouvrir  un  nouveau  théâtre  qui  fera 
concurrence  à  l'Opéra  royal,  avec  le  répertoire  lyrique  italien  et  français. 
MM .  Josephson  et  Ahlgrenson  sont  à  la  tête  de  cette  nouvelle  entreprise. 

,f%  Odessa. -- Nous  sommes  sous  le  charme  de  Marta,  que  notre 
théâtre  joue  chaque  soir  devant  une  salle  comble.  Mme  Isturitz,  l'idole 
de  notre  public,  est  délicieuse  dans  l'héroïne  de  l'opéra  de  M.  de  Flotow. 

^*^  Moscou.  —  La  Figlia  del  Begimento  a  mis  encore  une  fois  en  relief 
les  brillantes  qualités  de  Mlle  Artôt:  la  sûreté,  la  hardiesse  de  sa  voca- 
lisation dans  un  rôle  très-ardu  sous  ce  rapport,  n'ont  d'égales  que  son  ad- 
mirable entente  de  l'effet  scénique,  la  verve  et  la  grâce  de  son  jeu.  Le 
jeune  ténor  Piazza  n'a  point  trop  souffert  de  ce  voisinage  :  c'est  un  To- 
nio  fort  convenable.  —  Outre  le  succès  très-mérite  du  ténor  Stagno  et  de 
Mlle  Artôt  dans  Otello,  succès  que  nous  avons  déjà  signalé,  nous  de- 
vons aussi  une  mention  au  baryton  Padilla  et  à  la  basse  Bossi,  deux  ar- 
tistes de  mérite,  deux  excellentes  connaissances  que  le  public  a  revus  avec 
plaisir. 

^*,j  New-York.  —  Miss  Clara  Kellog  vient  d'être  engagée  par  M.  Max 
Strakosch  pour  une  tournée  artistique  aux  Etats-Unis.  C'est  cet  engage- 
ment, parait-il,  qui  a  fait  renoncer  M.  Maplcson,  l'imprésario  de  Londres, 
à  son  voyage  en  Amérique,  voyage  pour  lequel  il  comptait  beaucoup  sur 
Mlle  Kellogg. 

i^*,^  Boston.  —  Le  ténor  Brignoli,  qui  ne  se  contente  pas  d'être  un 
excellent  chanteur,  et  qui  est  aussi  à  ses  heures  un  compositeur  de 
quelque  mérite,  a  fait  exécuter  à  ses  derniers  concerts  une  marche  mili- 
taire dont  il  est  l'auteur  et  qui  a  eu  beaucoup  de  succès. 


Cn  veBle 

Chez  Mme  MAEYENS-COUVREUR,  rue  du  Bac,  40. 


L'ANGE  GARDIEN  DES  ENFANTS 

Mélodie  nouvelle  d' ADOLPHE  BOTTE ,  transcrite  pour  le  piano 
Par  GEORGES  PFEIFFER 

Prix  :  6  francs. 


328 


KKVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE  UE  PAHIS. 


Sous    presse  : 
CHEZ   BRANDUS    ET    OUFOUR,    ÉDITEURS,    103,   RUE   DE    RICHELIEU. 


OPÉRA-BOUFFE    EN   DEUX   ACTES, 

Paroles  de  MM.  Henri  Meilhac  et  Ludovic  Halévy, 

Musique  de 

J.    OFFEPfBACH 

L'OnVERTORE.  ÂRBÀR6ËE  FODR  II  PIANO 


Les  Airs  de  Chant  dé  lâchés  avec  accompagnement  de  Piano 


ACTE  ^^ 

1 .  Chanson  des  trois  cousines,   chantoc   par  iWhf  Le- 

graiid,  Carlin  et   Renault  :    Promptes  à  sercir  la 
pratique ...     îi     •• 

2.  Couplets  DE  l'incognito,  cliaiilrs par  M.  Grenier:  Sans 

en  rien  souffler  à  personne 3    » 

3.  L'Espagnol  et  la  jeune  Lndienne,  complainte,  eluin- 

tée  par  J\llle  Schneider  et  M.  Dupais  :  Le  conqué- 
rant dit  à  la  jeune  Indienne 4  SO 

3  bis.  La  même ,  à  une  voix  et  transposée  un  ton  et  demi 

au-dessous 4    » 

4.  Le  Muletier  et  la  jeune  person.ne,  séguedille    pour 

soirées,   chantée   par   Mlle  Schneider  et  M.   L)u- 

puis  :  Vous  a-t-on  dit  nouvent  :  Ecoulez-moi,  la  fille    3     » 

5.  La  Lettre  ue  la  Périchole,  chantée  par  Mlle  Schnei- 

der :   0  mon  cher  amant,  je  te  jure 3  7o 

5  bis   La  même,  transposée  un  ton  au-dessus 3  73 

6.  Griserie-Ariette,  chantée  par  Mlle  Schneider  :  Ah! 

quel  diner  je  viens  de  faille 3     >■ 

6  bis.  La  même,  transposée  un  ton  au-dessus 3     » 

1 .  Duetto  DU  mariage  ,    chanté    par    Mlle    Schneider   et 

M.  Dupuis  :  Je  dois  vous  prévenir,    Madame  ....     G    » 


acte  II. 

8.  Cancans  Couplets,  chantés  par  Mlles  .Iulia,  Bcnard, 

Gravier  et  Latour  :  On  vante  partout  son  sourire  .     4  30 

!>.  Les  fejuies,  il  n'y  a  qu'ça!  couplets,  chantés  par 
M.  Dupuis  :  Et  Ui,  maintenant  que  nous  sommes 
seuls 3     » 

!»  bis.  Les  mêmes,  traiKsposés  un  ton  et  demi  au-dessous  .     3    » 

10.  Que  les  hommes  sont  uêtes  !  couplets,  chantés   par 

Mlle  Schneider  :   Que  veulent  dire  ces  colères  ?     .     3     » 
10  bis.  Les  mêmes,  transposés  un  ton  au-dessus 3     » 

11.  La    présentation,  rondo    de    bravoure,    chanté   par 

M.  Du|)uis  :  Ecoule,  ô  roi,  je  te  présente 3  75 

1:2    Ronde  des  maris  ré...,  chantée  par  M.  Grenier.  Con- 

duisrz-U,  bon  courtisan 3    » 

13.  Duo  DES  BIJOUX,  chanté  par  Mlle  Schneider  et  M.  Gre- 

nier :  Monneur  le  marchand,  qu'avez-vous .    ...     7  30 
13  bis.  Extase,    chantée   par   Mlle    Schneider:  Ah\    que 

j'aime  les  diamants 3     » 

14.  Final-Séguedille,  chantée  par  Mlle  Schneider  et  M. 

Dupuis  :    Un  roi,    se  promenant,   trouva   certaine 
femme ....     4    » 


Les  Airs  de  Chant  sans  accompagnement,  format  in-8° 

Fantaisie  brillante  pour  le  Piano  par  E.  Ketterer 

BOUQUET      DE      MÉLODIES     P.A.R     GRIMER 
QUADRILLE    PAR    ARBAN.  — =—  GRANDE    VALSE    PAR    STRAUSS 

Polka  par  Roques  et  Strauss.     —    Polka-Mazurka  par  Lindheim 


La  Partition  pour  Chant  et  Piano,  et  la  même  arrangée  pour  le  piano  seul 


SODS  PRE:  SE  :  CHEZ  LES  nAÊMES  ÉDITEURS 

Célèbre    valse   chantée,    composée   par 

A  R  D  I  T  I  l'opéra-comique 

Avec  paroles  italiennes  et  françaises. 

La  même,    arrangée  pour  piano    seul.  Op.  4. 


Fantaisie 

SUR 


GIRALDA  d 

POUR  LE  PIANO  par 
H.     DELAHAYE 


Adolphe  Adam, 
Prix  :  7  fr.  bO. 


IMPBIJIEBIE  CBNTBJILB  DES  CBEHIKS  DE  FEB   —  A.    CBAIX  ET  C",  BUE  BEBGEBE,   SO,  A  PABIS. 


BUREAUX    A    PARIS  :    BOULEVARD    DES    ITALIENS,  1. 


35'  Année. 


N"  42. 


18  Octobre  1868. 


ON   S'ABONNE  : 

Dans  les  Départements  et  û  ri'Urunjer, 

chez  tous  les  Marchands  de  Musiiiui',  lis  Libraire 

et  aui  Bureaux  def  Messageries  et  des  Postes. 


REVUE 


PRIX    DE    L'ABONNEMENT  : 

Paris '.'4    r,\)nrt 

Dôpartements,  Belgique  ot  Suisse....    :'M  »       id. 
Étranger ...    34  »       iiL 

le  Journal  parait  le  Dimaochc. 


GAZETTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


SOM.MAIIîK.    —    Etudes   biographiques   et   critiques,   par  Em.  Slathien  de 
Hontcr.  —  Théâtre  impérial  italien  :  la  Trauiata,  par  Elias  de  Raazc. 

—  La  Péricholc.  —  Correspondance  :  Bruxelles.  —  Ministère  de  la  maison  de 
l'Empereur  et  des  beaux-arts,  direction  générale  des  théâtres.  —  Revue  des 
tliéàtref,  par  II.  A.   B*.  S«îiit-V»e».  —  Nouvelles  des  théâtres  lyriques. 

—  Nouvelles  diverses.  —  Annonces, 


ËTUDES  BIOGRAPHIQUES  ET  CRITIQUES. 

De  même  que  l'on  place  au  plus  bel  endroit  de  sa  demeure  et 
dans  le  «neilleur  jour  les  portraits  de  ceux  qui  vous  sont  chers,  je 
me  plais  à  inscrire  en  tête  de  ces  Etudes  le  nom  d'un  des  maîtres 
de  l'école  moderne  que  j'admire  et  que  j'aime  le  plus.  Le  choix 
de  cette  individualité  artistique  véritablement  originale  me  donne, 
au  surplus,  la  bonne  fortune  d'une  originalité  :  louer,  presque 
sans  restrictions,  en  un  temps  où  l'on  dénigre  sans  réserve.  De 
ce  poiite,  je  n'ose  dire  que  je  me  propose  de  parler  en  poëte, 
mais  du  moins  décrirai-je,  à  mon  tour,  son  œuvre  et  sa  vie, 
avec  cette  conviction  sincère  qu'aujourd'hui  l'essentiel  pour  la  cri- 
tique, active,  pratique,  est  bien  moins  encore  d'avoir  une  science 
profonde  des  choses  que  de  les  ressentir  vivement,  d'en  inspirer 
le  goût  et  de  le  retrouver  autour  de  soi. 

I. 
Stcphen  Ueller. 

Je  me  représente  volontiers  Stephen  Heller  —  et  ceux  qui  con- 
naissent bien  en  lui  l'homme  et  l'artiste  le  retrouveront  ainsi  — 
assis  devant  un  piano  d'Erard,  au  milieu  d'un  salon  de  style  élé- 
gant, tendre  et  sobre,  prenant  jour  sur  un  parc  aux  arbres  touf- 
fus et  voisins  de  hautes  fenêtres.  Dans  ce  lieu  propice  au  recueil- 
lement, se  trouvent  réunies  quelques  personnes  délicates  par 
l'esprit  et  par  l'oreille,  de  celles  qui  savent  écouter,  tout  com- 
prendre, ne  laisser  rien  perdre,  ne  pas  demander  davantage  ni 
surtout  trop  au  compositeur,  au  virtuose  qui  ne  dit  que  ce  qu'il 
faut.  Heller  joue,  et  que  de  souvenirs  doux  et  touchants,  que 
d'impressions  diverses  s'élèvent  du  lointain  des  souvenirs!  Que 
de  tableaux  se  succèdent  dans  le  mirage  de  l'imagination  ! 


Voici  le  printemps,  sa  chanson  d'espérance,  la  sève  de  la  jeu- 
nesse bouillonnant  dans  le  brin  d'herbe  verte,  dans  la  Heur  qui 
livre  son  calice  à  la  brise,  dans  lëcume  du  torrent,  dans  les  fré- 
missements harmonieux  des  roseaux.  Voici  l'automne  et  la  plainte 
aérienne  du  vent  de  mer  dans  les  fibres  des  pins  de  Sicile.  Telle 
de  ces  pièces  fugitives  fait  songer  à  l'amour  léger,  plein  do  ca- 
prices et  d'insouciance  ;  telle  autre  à  l'amour  profond,  passionné; 
plusieurs,  à  la  tendresse  calme,  source  de  la  famille,  à  la  fois 
mérite  et  réco.ni»ie'i«)f' ,  idijal  tissaupi  qui  est  le  charme  et  l'hon- 
neur du  lakisme  anglais.  Cette  mélodie  prête  à  la  mort  précoce 
l'allégresse  et  le  sourire  d'un  joyeux  départ  matinal;  celle-ci  en- 
dort ce  jeune  enfant  rayonnant  dans  son  berceau  comme  un  petit 
Messie;  celle-là  semble  traversée  par  ces  apparitions  que  Dante 
vit  flottant  dans  une  aube  froide  et  pâle,  aux  limites  du  Ciel  et 
de  l'Enfer.  De  l'heure  mystérieuse  du  crépuscule  nous  arrivons  à 
la  nuit,  à  la  nuit  charmante  avec  le  rossignol,  les  bocages,  les 
amants  et  les  sérénades,  ou  sinistre  avec  le  hibou,  la  tempête,  les 
vieilles  forêts  et  les  ténèbres.  Un  rayon  de  l'Espagne  de  l'auteur  de 
RoUa,  un  souffle  de  l'Italie  de  Chateaubriand,  éclaire  ce  boléro, 
traverse  ce  cantique.  J'entends  résonner  dans  la  lande  le  refrain 
des  paysans  de  la  Pustza  qui  viennent  de  fêter  le  vin  brillant  de 
Somlyo  et  la  ronde  des  jeunes  filles  hongroises  aussi  ardentes  que 
leurs  vins.  La  poésie  pittoresque  et  bigarrée  de  la  vie  nomade  a, 
sans  aucun  doute,  inspiré  ce  scherzo.  Je  ne  saurais  dire  pourquoi 
cette  étude  rappelle  à  mon  esprit  la  statuaire  exquise  et  monu- 
mentale de  la  Renaissance,  conçue  pour  les  sens  mais  ne  les  trou- 
blant pas,  la  Dinne  de  Jean  Goujon,  par  exemple,  mouvementée 
comme  la  vigueur  physique,  calme  comme  la  puissance  intellec- 
tuelle. M'expliquerez-vous  par  quelle  magie  de  couleur  et  de  style 
cette  improvisation,  forçant  le  domaine  de  l'abstraction  pure,  arri- 
vera kpeind-e  l'oubli,  la  résolution,  l'aflirmation,  l'incertitude,  et 
jusqu'au  sentiment  d'idéal  de  l'amitié  et  de  la  vie  d'intérieur? 
Telles  sont,  cependant,  entre  mille,  les  sensations  que  la  musique 
d'Heller  peut  éveiller,  les  effets  qu'elle  excelle  à  produire,  lorsque 
ce  «  pianiste,  compositeur  pour  son  instrument,  »  comme  le  qua- 
lifient ingénieusement  les  dictionnaires  biographiques,  l'exécute 
lui  même,  ou  lorsqu'elle  est  exécutée  par  ceux  qui  en  possèdent 
la  tradition 


330 


lŒVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


De  la  vie  calme  et  studieuse  de  Stephen  Heller,  plusieurs  fois 
écrite,  je  ne  veux  retenir  que  ce  qui  explique  ses  œuvres.  Il  est 
né  à  une  époque  des  plus  violemment  tourmentées  de  notre  siècle 
—  1814  —  en  Hongrie,  dans  la  patrie  des  Sandor  Potofî ,  des 
Worosmarty,  des  Alleardo  Allcardi,  de  tous  ces  poètes  qui  unis- 
sent, de  par  le  génie  national,  à  une  concentration  et  à  une  profon- 
deur de  pensée  toutes  germaniques  l'éclat  vigoureux  de  la  forme 
des  méridionaux.  Il  a  été  tour  à  tour  virtuose,  professeur,  compo- 
siteur; il  possède  donc  tous  les  moyens  de  traduire  brillamment 
et  logiquement  sa  pensée. 

Ami  de  Mendelssohn ,  de  Robert  Scliumann,  de  Scliubert,  de 
Ernst,  il  n'a  jamais  cessé  de  croire,  avec  eux  et  comme  eux,  que 
l'œuvre  d'art  ne  doit  exprimer  que  Oc  qui  élève  l'âme,  la  réjouit 
noblement  et  l'ien  de  plus  :  son  sentiment  a  porté  exclusivement 
sur  ce  point;  tout  le  reste  est  faux  pour  lui.  Il  a  fait  seul  son 
éducation  musicale,  ù  peine  dirigé  par  quelques  conseils,  voulant 
apprendre  l'art  d'écrire  en  écrivant.  Qualité  ou  mérite  rare  chez 
un  musicien,  Stephen  Heller  est  littéraire;  pendant  de  longues  an- 
nées, à  son  gré  trop  courtes,  il  a  vécu  dans  l'intimité  des  poëtcs 
et  des  prosateurs  illustres.  La  poésie  a  cela  de  le  transporter  et 
transpercer;  en  elle  il  a  trouvé  des  sources  fécondes  d'inspiration 
et  de  renouvellement;  grâce  îi  elle  il  a  conservé  une  fraîcheur 
séduisante  à  travers  d'incessants  travaux.  Longtemps  méconnu,  il 
a  poursuivi  sa  i-oute,  armé  du  courage  et  de  la  ])ersé\érance  des 
forts,  arrivant  par  la  méditation,  par  le  cœur  à  la  plénitude  de 
son  talent,  ne  réagissant  pas  contre  sa  mélancolie  native,  se  com- 
plaisant niCme  h  cette  âpre  saveur  de  la  tristesse  qui  nous  épure, 
nous  élève  au-dessus  des  régions  vulgaires  et  trempe  les  intelli- 
gences fières  et  croyantes. 

Il  vit  seul,  dans  le  calme  et  l'étude,  sans  misanthropie  toutefois, 
sans  morgue  et  sans  rudesse.  Tout  Heller  est  dans  cot   amour   de 
la  solitude,  de  la  lecture  et  du  travail  ;  dans  ce  dédain  de  la  ba-  | 
nalité  et  des  succès  faciles;  dans    cette   faculté    extraordinaire  de  , 
concentration  hitime    qui  décuple  chez  lui  l'étendue,    la    pénétra-  I 
tion  de  la  psnsée  ;  dans  ce  respect  de  l'Art  et  de  ceux  qui  le  cul-  , 
tivent;  dans  cette  foi  en  lui,  dans  cette  élévation   de    caractère  et 
cette  simplicité  d'existence.  | 

Ajouterai-je  que  cette  élégante  et  fine  nature  de  poëte  devait 
plaire  aux  femmes  distinguées,  et  se  trouver  à  l'aise  dans  leur 
commerce  délicat?  Parlant  de  la  noble  et  première  protectrice  de 
Stephen  Heller,  M.  Fétis,  dans  un  élan  d'enthousiasme  trop  rare 
chez  lui  pour  n'être  pas  sincère,  s'écrie  :  «  Heureux  le  jeune  ar- 
tiste qui  rencontre  une  telle  femme  à  l'aurore  de  sa  carrière  !  » 
Ehl  sans  doute;  mais  l'attention  d'une  femme  supérieure  pour  un 
homme  est  une  distinction  presque  toujours  juste. 

* 

*  * 

Raffiné,  difficile,  sentant  son  idée  supérieure  à  la  réalisation, 
son  sentiment  plus  complet  encore  que  la  traduction,  le  maître 
que  j'essaie  d'étudier  en  quelques  traits  rapides,  écrit  à  des  ins- 
tants choisis,  par  fragments  et  comme  il  pense,  sans  sortir  de 
lui.  N'est-ce  pas  déjà  se  mettre  en  demeure  de  penser  vrai  et  de 
sentir  profondément?  Il  concilie,  dans  une  rare  mesure,  le  pitto- 
resque et  l'alticisme.  Son  style  a  l'air  grand,  la  ligne  ouverte,  le 
dessin  tourmenté  parfois,  mais  toujours  large.  Il  est  tout  varié  de 
nuances  imprévues,  de  rencontres  voulues  et  neuves,  et  d'effets 
qui  lui  sont  propres.  Inquiet  et  parfois  incertain,  il  devient  grave 
et  beau  dès  qu'il  entre  dans  le  sujet. 

Le  travail  harmonique  d'Heller  a  le  souci  et  la  curiosité  des 
timbres  nouveaux,  des  formes  étrangères  aux  formules  de  l'école. 
Son  talent  est  un  grand  recommenceur  :  ce  qu'il  a  manqué  une 
fois,  il  le  ressaisit  une  autre  ;  il  n'est  jamais  à  bout  de  lui-même 
et  ricidi\e  souvent.  Peut-être  Heller   quintessencie-t-il  trop;  si   le 


cerveau,  néanmoins,  prend  chez  lui,  à  de  certains  moments,  la 
place  du  cœur,  du  moins  s'y  mêle-t-il  toujours  de  la  verve  et  du 
feu  de  poésie. 

On  l'a  classé  au  rang  des  fantaisistes  et  des  originaux  :  —  nous 
aimons  tant  aujourd'hui  â  faire  des  collections!  Sa  fantaisie  n'est 
autre  qu'une  conception  spontanée  du  dessin,  de  la  couleur  et  du 
rhythme.  Heller,  en  tant  que  poëte,  a  été  plus  d'une  fois  à  portée 
de  reconnaître  par  elle-même  l'insuffisance  de  la  fantaisie  pure  à 
guider  vers  le  beau,  et  comment  la  fantaisie  succombe  et  dévie 
lorsqu'elle  ne  s'appuie  pas  sur  des  guides,  invisibles  peut-être,  mais 
certains.  De  là,  pour  lui,  l'absolue  nécessité  des  règles,  auxiliaires 
puissants,  qui  contiennent,  dirigent  entre  les  impulsions  diverses, 
assemblent  sous  la  même  loi  les  contraires.  «  On  ne  montre  pas 
sa  grandeur  pour  être  en  une  extrémité,  mais  bien  en  touchant 
les  deux  à  la  fois  et  remplissant  tout  l'entre-deux.  »  Ce  précepte 
de  Pascal,  l'auteur  de  tantd'œuvres  d'essence  si  diverse  n'aurait  eu 
garde  de  le  méconnaître.  Emporté  dans  un  essor  gigantesque,  il 
s'élancera  et  planera  bien  haut,  pour  de  là  redescendre  à  la  terre 
sans  efforts,  sans  secousses  apparentes,  avec  une  grâce  virile. 

Quant  à  l'originalité  dont  on  fait  à  juste  titre  honneur  à  Ste- 
phen Heller,  elle  n'est  ni  de  l'extravagance,  comme  certains  l'ont 
cru ,  ni  le  résultat  de  tendances  excentriques,  comme  d'autres  le 
voudraient  faire  croire,  mais  une  façon  toute  personnelle  et  très- 
vive  de  sentir  et  d'exprimer.  A  vrai  dire,  une  telle  originalité  est 
de  nature  à  surprendre ,  à  frapper  même  singulièrement  à  une 
époque  où  fleurit  le  pastiche,  l'imitation  entre-croisée,  confuse,  de 
toutes  les  manières  antérieures.  Être  soi,  sans  uniformité,  avec  des 
rayonnements  do  prisme  dans  tous  les  courants  de  son  œuvre, 
cela,  après  tout,  n'est-il  pas  beau  et  digne  de  remarque?  Oui, 
mais  «  mélancolique  »  toujours,  m'objctera-t-on.  Et  comment  ne 
pas  accepter  ces  prédispositions  do  tempérament  qui,  dans  la 
sphère  de  la  sensibilité,  dominent  toute  une  carrière,  tout  un  œuvre 
artistiques? 

La  science  musicale  s'est  donné  bien  de  la  peine  pour  faire  des 
Traités  de  l'Expérience  et  du  Beau,  parce  que  la  nature  fait  toute 
seule  les  traités  de  l'Inspiration  et  de  la  Poésie.  Stephen  Heller  ne 
relève  que  de  ces  derniers.  L'analyse  ne  donnerait  qu'une  idée 
bien  imparfaite  de  ses  procédés  rhytlimiques  et  harmoniques.  La 
forme,  voilà  où  il  est  bien  lui,  où  il  est  intéressant,  séduisant  à 
lire.  Comme  coupe,  comme  étendue,  on  peut  comparer  la  plupart 
de  ses  morceaux  à  la  courbe  de  l'arc-en-ciel,  dont  les  commence- 
ments sont  vagues  et  indécis,  le  milieu  élevé  et  radieux;  puis  les 
vives  couleurs  s'affaiblissent  à  mesure  que  le  demi-cercle  s'abaisse, 
les  nuances  lumineuses  s'éteignent,  les  teintes  sombres  prennent 
leur  place  et  tout  s'enfonce  dans  l'obscurité.  En  quelques  mesures, 
Heller  vous  i-avit  dans  son  idéal,  si  élevé,  si  éloigné  qu'il  soit  de 
votre  disposition  morale  ou  intellectuelle.  La  brève  symphonie  ter- 
minée, —  c'en  est  bien  une  et  vous  en  avez  subi  le  charme,  —  il 
vous  faut  un  certain  répit  pour  triompher  de  votre  émotion  et 
revenir  à  la  réalité. 

Il  me  reste  à  étudier  l'œuvre  de  Stephen  Heller. 

Em.  Mathieu  DE  MONTER. 
(La  suite  prochainement.) 


THÉÂTRE  IMPERIAL  ITALIEN. 


lia  Traviata. 


Nous  croyions  pouvoir  parler  et  de  la  Traviata  et  de  la  Contes- 
sina,  mais  nous  avions  compté  sans  les  taquineries  du  temps. 
Mlle  Grossi,  s'étant  trouvée  tout  à  coup  indisposée,  l'affiche  qui 
annonçait  l'ouvrage  du  prince  Poniatowski  fut  remplacée  jeudi  par 


DE  PARIS. 


331 


celle  de  Crispino  e  la  Comare,  qui,  le  soir  même,  dut  être  changée 
à  son  tour.  La  Contessina  est  de  nouveau  annoncée  pour  ce  soir, 
dimanche. 

Il  ne  nous  reste  donc  à  parler  que  de  la  reprise  de  la  Traviata. 

L'interprétation  de  la  délicate  et  poétique  partition  de  Verdi  était 
confiée,  samedi  soir,  à  Mme  Patti,  à  MM.  Nicolini  et  Steller. 

On  sait  ce  que  Mme  Adelina  Patti  fait  du  beau  rôle  de  Violctta , 
du  moins  on  savait  comment  elle  le  chantait;  on  a  vu  samedi  avec 
quelle  vérité  dramatique  elle  le  joue.  Ceux-là  même  parmi  ses 
amis  qui  ne  lui  accordaient  qu'un  talent  hors  ligne  de  cantatrice 
légère,  de  brillante  vocaliste,  ceux-là  même  qui  ne  l'admettaient 
que  dans  la  comédie,  dans  l'idylle  ou  dans  l'élégie,  qui  l'applau- 
dissaient comme  Rosine,  comme  Amina  et  comme  Lucia,  mais  qui 
lui  refusaient  les  poignantes  émotions  du  drame,  les  élans  de  la 
passion,  les  larmes  et  les  sanglots,  ont  dû  constater  qu'un  nou- 
veau talent  se  révélait  en  elle,  que  la  cantatrice  se  doublait  d'une 
artiste  dramatique ,  que  ce  que  la  jeune  fille  n'osait  pas  la  femme 
l'ose. 

En  effet,  le  rôle  de  Violetta,  la  pécheresse  (la  Traviata),  est  à 
ce  point  scabreux  pour  l'interprète,  qu'elle  ne  peut  le  jouer  avec 
vérité  sans  donner  à  penser  qu'elle  en  comprend  trop  toutes  les 
nuances.  Cette  crainte  serait  exagérée  aujourd'hui.  Mme  Patti  a 
pu  la  dissiper  sans  danger.  Il  en  est  résulté  un  jeu  plus  vif,  plus 
serré,  plus  vrai.  Combien  montre-t-elle  aujourd'hui  plus  de  coquet- 
terie dans  les  premières  scènes  du  drame,  plus  d'abandon,  plus 
de  passion  brillante  dans  la  seconde  moitié! 

Quant  à  la  voix,  inutile  de  le  répéter,  elle  semble  faite  pour  les 
ravissantes  mélodies  de  cet  ouvrage,  qu'elles  soient  souriantes, 
comme  dans  le  brindisi,  passionnées  comme  dans  le  duo  d'amour, 
navrantes  comme  dans  l'agonie. 

Steller  a  donné  un  beau  coloris  au  rôle  de  père;  il  a  dit  avec 
beaucoup  de  grâce  la  romance  Di  Provenza  il  mare  e  il  sol; —  ce 
qui  est  déjà  un  assez  bel  éloge  pour  un  baryton  qui  excelle  plutôt 
dans  le  chant  de  slancio  et  dans  les  morceaux  véhéments. 

La  rentrée  de  Nicolini  a  été  sincèrement  fêtée  par  les  habitués 
du  théâtre  Italien.  Le  sympathique  artiste  gagne  chaque  année 
comme  talent  et  comme  succès;  et  le  public  qui  pour  ainsi  dire 
l'a  formé,  le  public  qui  le  croit  presque  son  œuvre,  semble  s'ap- 
plaudir lui-même  en  applaudissant  le  jeune  ténor. 

Elias  de  RAUZE. 


LÀ  PÉRICHOLE. 


Voici  l'opinion  de  quelques-uns  des  principaux  oi'ganes  de  la 
presse  sur  l'œuvre  nouvelle  d'Offenbacli  : 

Que  l'apparition  de  la  Périchole  aux  Variétés  ait  soulevé,  le  premier 
jour,  des  vagues  dont,  la  colère  et  la  hauteur  ont  été  si  bien  décrites 
par  Virgile;  que  l'esquif  de  Jacques  Offenbach  ait  été  tantôt  soulevé  jus- 
qu'à la  crête  du  flot,  puis  replongé  dans  le  gouffre  ;  qu'importe  ! 

Que  le  succès— et  l'on  ne  sait  pourquoi— n'ait  pas  été  au  second  acte 
une  affaire  de  bonne  humeur  entre  l'auteur    et   le  public,  qu'importe  ! 

Qu'importe  encore  que  cette  vicioire  soit  un  viol  ! 

N'est-ce  pas  à  chaque  fois  et  invariablement  le  même  bulletin? 

Quelques  blessés,  quelques  morts  çà  ei  là,  des  pertes  sensibles,  comme 
on  dit  dans  le  langage  atténuatif  des  batailles. 

Mais  le  triomphe!  Il  est  sûr...  Ce  n'est  pas  en  vain  que  nous  aurons 
comparé  Offenbach  à  Alexandre  le  Grand.  11  se  promène  à  travers  tous 
les  théâtres  comme  faisait  le  Macédonien  à  travers  l'Asie. 

Il  annexe  et  garde  ses  annexions. 

(Constitutionnel.)  Nestor  Roqueplan. 

La  partition  écrite  par  M.  Offenbach  sur  ce  canevas  d'une  plaisanterie 
folle  a  les  vives  allures  du  style  de  ce  compositeur  heureux  et  popu- 
laire. On  y  a  applaudi   de   très-jolis   couplets,  un  finale,   un  choeur  de 


femmes  et  la  lettre  de  la  Périchole,  la  page  attendrie  de  cette  nmsique 
enragée  que  Mlle  Schneider  dit  avec  beaucoup  de  charme  et  de  sensi- 
bilité. 

(La  Presse.)  B.  Jouvm. 

...  La  Périchole,  c'cot  Hortcnse  Schneider. 

Hortense  Schneider,  c'est  une  vraie  artiste  et  la  plus  profondément 
parisienne  des  artistes  qui  régnent  sur  Paris. 

Evidemment,  Jupiter,  un  jour  qu'il  daignait  songer  à  nos  plaisirs, 
créa  pour  se  compléter  les  uns  les  autres  Uleilhac  et  Halévy,  Offenbach 
et  Mlle  Schneider,  sans  oublier  Uupiiis. 

Ce  que  produit  la  conjonction  de  toutes  ces  étoiles  de  même  famille 
est  d'autant  plus  charmant  à  nos  yeux  que  le  charme  intime  en  échappe 
à  beaucoup  de  gens  :  Meilhac  a  mis  de  la  littérature  dans  la  cascade  et 
du  bon  sens  dans  l'insenséisme;  Offenbach,  de  la  mélodie,  de  la  grâce 
et  du  sentiment  dans  la  caricature,  et  Mlle  Schneider,  une  séduction 
toute  parisienne,  —  distinguée  et  triviale  tour  à  tour,  —  dans  les  aven- 
tures les  plus  risquées,  de  même  que  Dupuis  a  beaucoup  de  correction 
dans  sa  bouffonnerie. 

On  a  bissé  quatre,  cinq,  six  morceaux.  Le  trio  chanté  pour  voix 
d'hommes  à  l'éloge  des  petites  femmes  a  fait  fureur,  au  second  acte, 
ainsi  que  le  chœur  comique  des  demoiselles  d'honneur  demandant  au 
seigneur  Piquillo  des  nouvelles  de  sa  femme,  qui  est  si  peu  à  lui. 

On  critiquera  d'un  côté;  on  louera  de  l'autre,  et  tout  sera  pour  le 
mieux  dans  l'intérêt  du  théâtre  et  des  auteurs. 

(Gazette  des  Etrangers.)  H.  de  Pène. 


Je  veux  dire  immédiatement  que  je  ne  m'associe  aucunement  aux 
sévérités  que  le  public  a  manifestées  le  premier  soir.  On  peut  m'en 
croire,  je  ne  suis  pas  suspect  de  partialité  à  l'égard  du  genre  et  des  au- 
teurs. Je  trouve  que,  dans  cette  circonstance,  MM.  Meilhac,  Halévy,  Of- 
fenbach ont  fait  des  efforts  pour  relever  leur  manière:  pièce  et  musique 
sont  incontestablement  plus  délicates  que  les  précédentes.  Est-ce  à  cause 
de  cela  que  le  public  s'est  gendarmé?  Est-il  à  ce  point  ancré  dans  ses 
mauvaises  moeurs  qu'un  léger  retour  vers  le  bon  goût  contrarie  ses 
plus  chères  habitudes  ? 

Le  compliment  que  j'adresse  à  la  pièce,  j'en  reporte  une  bonne  part 
à  Mlle  Schneider:  elle  s'est  contenue,  elle  a  mis  une  sourdine  à  ses  tri- 
vialités, et  comme  elle  a  gardé  son  esprit,  sa  voix  charmante,  sa  grâce 
originale,  elle  a  été,  à  mon  avis,  plus  séduisante  que  jamais.  Encore 
une  fois,  —  j'ose  le  répéter,  —  qu'on  veuille  m'en  croire,  car,  en  vé- 
rité, sur  tous  ces  points  je  ne  suis  pas  suspect. 

(Le  Pays.)  G.  de  Saint-Valery. 


. . .  Avec  cette  donnée  fort  simple,  exempte  de  toute  péripétie,  les  au- 
teurs ont  composé  deux  actes  très-amusants  et  très-spirituels.  Ils  se  sont 
fort  habilement  tirés  d'une  situation  scabreuse  au  second  acte,  et  ils  ont 
prouvé  une  fois  de  plus  que  s'ils  côtoyaient  souv'ent  les  écueils,  ils  sa- 
vaient, en  pilotes  habiles,  ne  point  faire  sombrer  le  bon  goût. 

Quant  à  la  musique  de  M.  Offenbach,  elle  est  charmante  d'un  bout  à 
l'autre.  Tous  les  morceaux  ont  eu  un  grand  succès,  et  plusieurs  ont  été 
bissés.  Cet  hiver,  dans  tous  les  salons,  on  valsera  et  on  polkera  sur  les 
airs  de  la  Périchole.  11  serait  impossible  de  rêver  un  compositeur  plus 
Parisien  que  ne  l'est  M.  Offenbach.  Sa  verve  intarissable  est  comme  un 
écho  spirituel  et  railleur  des  bruits  de  ce  Paris  frivole  et  léger  qui 
depuis  quelqups  années  semble  demander  ses  éclats  de  rire  à  ce  talent  à 
la  mode.  Il  importe  de  signaler  l'air  sur  lequel  la  Périchole  apprend  à 
son  amant  qu'elle  va  le  tromper.  Il  y  a  dans  ce  morceau  une  tendresse 
exquise  qui  en  fait  le  digne  pendant  de  la  Chanson  de  Fortunio. 
{Moniteur  universel.)  Gustave  Claudin. 

Ce  qui  m'a  frappé,  dès  le  premier  acte  de  la  Périchole,  c'est  que  le 
sujet,  s'il  était  traité  avec  moins  de  réalisme  et  de  travestissements, 
prêterait  parfaitement  à  un  opéra-comique.  Un  instant  l'action  tourne 
même  au  sérieux;  la  lecture  de  la  lettre,  dont  la  mélodie  est  très-jolie, 
pleine  de  sentiment,  et  très-bien  dite  par  Mlle  Schneider,  laisse  à  l'auditoire 
une  impression  qui  persiste  jusqu'à  la  fin  de  l'acte,  malgré  le  galop  de 
la  scène  du  mariage.  En  général,  la  musique,  écrite  avec  un  très  grand 
soin,  pourrait,  en  majeure  partie,  s'appliquer  à  un  opéra-comique.  Les 
auditeurs  qui  s'attendent  à  des  mélodies  égrillardes  comme  dans  la  Belle 
Hélène,  n'en  trouveront  guère.  Les  morceaux  de  chant  ne  .sont  pas  bien 
nombreux  ;  mais  le  compositeur  était  évidemment  limité  par  les  moyens 
des  auteurs,  surtout  des  hommes.  Mlle  Schneider  et  les  choristes  lui 
offraient  le  plus  de  ressources;  aussi  les  chœurs,  tantôt  comiques,  tan- 
tôt bouffes,  produisent-ils  presque  tous  très-bon  effet.  Par  exception,  la 
citation  d'un  passage  de  la  Favorite  :  «  Quel  marché  de  bassesse,  etc.,  » 
est  plaisante,  parce  que  M.  Offenbach  n'avait  rien  à  changer  à  la  musi- 
que pour  la  rendre  burlesque.  Plus  Paclion  avance,  plus  le   côté  bouffe 


332 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


tend  il  ilominer  ;  et  cependant,  à  y  regarder  de  près,  les  deux  person- 
nages principaux  ont  peine  à  paraître  bouffes,  car  leur  situation  reste 
au  fond  très-sérieuse,  et  l'on  est  peu  porté  à  rire  du  pauvre  Piquillo. . . 
Pour  rtre  moins  volumineuse  que  la  partition  de  la  Grande-Duchesse, 
celle  f.e  la  Périchole  n'en  mérite  pas  moins  de  prendre  rang  à  côté  d'elle. 
(Le  Temps.)  J.  Weber. 


iVI.  Francisque  Sarcey  analyse  avec  beaucoup  de  soin  le  genre  qui  a 
fait  la  foi'tune  et  la  célébrité  d'Offenbach  et  de  ses  deux  collaborateurs 
habituels. 

Il  croit,  du  reste,  que,  dans  la  Périchole,  Oftenbacli  est  en  progrès. 

La  partition  de  la  Périchole,  dit  M.  Monselet,  est  du  bon  Offenbach, 
joli,  brillant,  alerte. 


CORRESPONDANCE. 


Bruxelles,  15  octobre  1868. 

Les  connuenccmenls  de  notre  année  théâtrale  ont  été  fort  agités.  Le 
public  a  tout  d'abord  signifié  au  directeur  qu'il  ne  voulait  d'aucun  des 
nouveaux  chanteurs  qu'il  avait  engagés.  Le  cas  était  grave.  Le  directeur 
assurait,  comme  d'habitude,  qu'il  avait  choisi  ce  qu'il  y  avait  de  mieux 
dans  le  personnel  des  s[icçtaclos  lyriques  provinciaux  de  la  France,  et 
qu'il  ne  savait  comment  s'y  prendre  pour  former  une  nouvelle  troupe. 
Le  public  ne  se  laissa  pas  fléchir,  comptant  sur  la  nécessité  pour  fi^ire 
trouver  la  solution  du  problème.  M.  Lclellier,  qui  ne  savait  à  quel  saint 
se  vouer,  partit  pour  Paris,  et  s'adressa  à  M.  Perrin,  auquel  il  exposa  son 
embarras,  en  le  priant  de  lui  céder  pour  la  saison  ceux  de  ses  chanteurs 
qui  ne  lui  seraient  pas  nécessaires  en  ce  moment.  La  négociation  réus- 
sit, et  M.  Letellier  reprit  la  route  de  Bruxelles  emmenant  MiM.  Warot 
et  Cazeaux,  ainsi  que  Mlle  Godefroid,  et  laissant  le  public  plus  décidé 
que  jamais  à  ne  pas  accepter  des  chanteurs  médiocres  sous  prétexte 
qu'on  ne  peut  pas  s'en  procurer  de  meilleurs.  Le  directeur  avait  fourni 
des  armes  contre  lui  à  ses  ad\ersaires,  lesquels  ne  demandent  pas  mieux 
d'ailleurs  que  de  lui  voir  faire  ses  affaires,  dont  la  prospérité  est  la 
conséquence  naturelle  d'un  spectacle  lyrique  bien  monté. 

M.  Warot  u  débuté  le  premier  dans  la  Muette  de  Portici,  et  a  reçu  le 
plus  brillant  accueil.  On  a  été  charmé  d'entendre  un  ténor  qui  chante, 
lorsqu'il  y  en  a  tant  qui  ne  savent  que  crier.  Une  représentation  des 
Huguenots  a  confirmé  tout  le  bien  qu'on  avait,  de  prime  abord,  pensé 
du  talent  de  M.  Warot.  Le  rôle  de  Raoul  a  eu  en  lui  un  interprèle  des 
plus  intelligents  et  des  plus  distingués.  M.  Cazeaux,  qui  paraissait  pour 
la  première  fois,  a  chanté  le  rôle  de  Marcel  de  la  belle  voix  que  vous 
connaissez.  Les  habitués  du  théâtre  de  la  Monnaie  ont  été  un  peu  plus 
avares  de  leurs  applaudissements  pour  lui  que  pour  M.  Warot;  mais 
il  se  conciliera  leurs  suffrages,  cela  n'est  pas  douteux.  On  n'en  peut  pas 
dire  autant  de  Mlle  Godefroid,  qui  a  débuté  dans  Valentine.  Si,  comme 
on  l'assure,  cette  jeune  artiste  ne  s'était  essayée,  à  l'Opéra,  que  dans  les 
petits  rôles  d'Inès  de  la  Favorite  al  du  page  de  Don  Carlos,  c'était  pour 
elle  une  entreprise  très-hardie  et  fort  périlleuse.  Elle  n'en  est  pas  sortie 
victorieusement.  On  lui  a  trouvé  une  assez  jolie  voix,  quand  elle  ne  la 
force  pas  ;  mais  son  inexpérience  de  cantatrice  et  de  comédienne  s'est 
trahie  dans  les  scènes  importantes,  et,  bien  que  le  public  ne  l'ait  pas 
traitée  avec  rigueur,  les  dispositions  qu'il  a  témoignées  à  son  égard  lui 
ont  fait  prendre  la  résolution  de  résilier  son  engagement  sans  tenter 
une  nouvelle  épreuve.  Nous  \oici  donc  une  seconde  fois  sans  chanteuse 
di  grand  opéra.  Du  reste,  Mlle  Godefroid  doit  rester  jusqu'à  ce  qu'on 
ait  remplacée. 

Tandis  que  le  grand  opéra  ne  marchait  qu'en  boitant,  l'opéra-comique 
s'avançait  d'un  pas  léger.  II  y  a  eu  peu  de  modifications  dans  le  person- 
nel qui  est  resté  presque  le  même  que  l'année  dernière.  Le  changement 
11!  plus  considérable  et  le  meilleur  a  été  l'engagement  de  Mlle  Marimon. 
Seulement  on  croyait  que  cette  charmante  artiste  remplirait  pendant 
toute  la  saison  l'emploi  qu'on  était  heureux  de  lui  voir  confié,  tandis 
qu'elle  restera  jusqu'au  l"  janvier  seulement ,  époque  à  laquelle  elle 
retourne  à  Paris  chanter  le  nouvel  opéra  de  M.  Ricci  au  théâtre  de  M. 
Martinet.  La  laisser  partir  est  une  grande  faute,  car  elle  jouit  de  toute 
la  faveur  du  public  de  Bruxelles,  et  il  sera  bien  difficile  à  une  autre 
cantatrice  de  se  faire  agréer  à  sa  place. 

On  vient  de  représenter  Maître  Wolfram.  La  jolie  partition  de  M.  Reyer 
a  été  très-appréciée  des  personnes  qui  en  musique  font  cas  des  choses 
délicates  et  distinguées. 

On  annonce  comme  très-prochaine  la  première  représentation  d'un 
Premier  Jour  de  bonheur. 

F. 


MINISTÈRE  DE  LA  SAISON  DE  L'EOPEREUB 

ET    DES    BEAUX-ARTS. 

DIRECTION    GÉNÉRALE    DES   THÉÂTRES. 

Concours  institués  au  théâtre  de  l' Opéra-Comique  et  au  théâtre 
Lyrique. 

Le  jury  élu  par  les  compositeurs  de  musique  qui  ont  pris  part 
au  concours  ouvert  à  l'Opéra-Comique  est  aujourd'hui  définitive- 
ment constitué  et  se  compose  de  MM.  de  Leuven,  directeur  de 
rOpéra-Gomique;  Maillart,  Félicien  David,  Gevaërt,  Georges  Hainl, 
Reber,  Semet,  Bazin  et  Elwart. 

L'examen  des  partitions,  retardé  jusqu'à  présent  par  l'absence 
d'un  grand  nombre  de  membres  du  jury,  a  commencé  le  IS  de 
ce  mois,  et,  quand  une  décision  aura  été  prise,  les  concurrents  en 
seront  officiellement  informés. 

Le  concours  institué  au  théâtre  Lyrique  pour  la  composition 
d'une  œuvre  musicale  sera  clos  dclinitivemeiit  le  30  octobre  cou- 
rant. 

Les  concurrents  sont  invités  à  déposer,  avant  ce  jour,  leurs 
manuscrits  (poèmes  et  partitions)  à  la  direction  générale  des 
théâtres. 


REVUE  DES  THEiTRES. 

Odéon  :  Reprise  de  la  Conscience.  —  Gymnase  :  Reprise  du  Monsieur 
qui  suit  les  femmes.  —  Porte-Sai.m-Martin  :  Réouverture,  Cadio, 
drame  en  cinq  actes  et  huit  tableaux,  par  George  Sand  et 
Paul  Meurice.  —  Théâtre  Lmpérial  du  Chatelet  :  l'Armurier 
de  Santiago,  drame  en  six  actes,  par  M.  Joseph  Bouchardy.  — 
Gaîté  :  Reprise  de  Léonard,  drame  en  sept  actes,  par  MM.  Brise- 
barre  et  Eugène  Nus.  —  Théâtre  du  Prince-Impérial  :  l'Ile 
Saint-Louis,  drame  en  six  actes  et  neuf  lableaux,  par  les  mêmes 
auteurs. 

On  se  plaint  de  ne  plus  voir  surgir  de  bons  comédiens  nouveaux 
et  l'on  attribue  cet  état  de  choses  au  système  actuel  qui  consiste, 
dans  la  plupart  des  théâtres,  à  ne  jouer  qu'une  seule  pièce  dont 
le  succès  se  prolonge  parfois  pendant  une  moitié  de  l'année  et 
réduit  à  l'inaction  les  deux  tiers  des  artistes.  C'est  un  mal  sans  doute; 
mais  comment  l'éviter?  Les  directeurs  y  trouvent  leur  compte,  et 
ils  n'y  chercheront  pas  de  remède  tant  qu'ils  auront  la  facilité  de 
s'emprunter  les  uns  aux  autres  les  vieux  acteurs  en  renom  qui  ont 
encore  un  reste  de  crédit  sur  le  public.  Mais  après,  qu'adviendra-t-il? 
Ces  réflexions,  dont  nous  abandonnons  les  conséquences  à  la  saga- 
cité des  lecteurs,  nous  ont  été  suggérées  par  la  rentrée  de 
Laferrière  à  l'Odéon,  dans  la  Cons&ience,  d'Alexandre  Dumas;  par 
le  retour  de  Ravel,  l'ancien  comique  du  Palais-Royal,  qui  vient  de 
reparaître  au  Gymnase  dans  le  Motuieur  qui  suit  les  femmes,  et 
enfin  par  la  distribution  tant  soit  peu  archaïque  du  drame  de 
la  Porte-Saint-Martin. 

Mais  avant  de  nous  occuper  des  interprètes  de  George  Sand, 
disons  quelques  mots  de  sa  pièce,  tirée,  comme  on  sait,  d'un 
roman  dialogué  qui  est  connu  sous  le  titre  de  Cadio.  C'est  M.  Paul 
Meurice  qui  a  accompli  la  transformation  de  ce  livre  en  vue  de  la 
scène,  et  il  est  peut-être  à  regretter  que  son  respect  pour  le  talent 
de  sa  célèbre  collaboratrice  ue  lui  ait  pas  permis  d'opérer  une 
adaptation  plus  radicale.  Un  roman  vit  de  nuances  et  de  détails, 
dont  la  curiosité  fiévreuse  des  spectateurs  s'accommode  difficilement 
au  théâtre.  Pour  avoir  manqué  à  cette  loi,  nous  craignons  que 
M.  Paul  Meurice  n'obtienne  pas  un  résultat  digne  de  son  expérience 


DE  PARIS. 


333 


et  du  nom  de  George  Sand.  La  réussite  do  Cadio  n'est  pourtant 
pas  douteuse,  mais  l' enthousiasme  lui  a  l'ait  défaut. 

Le  cadre  de  ce  drame  est  la  guerre  terrible  des  bleus  et  des 
blancs,  à  l'époque  où  l'abominable  Carrier  régnait  en  proconsul 
à  Nantes.  Le  marquis  de  Sauvières,  vieux  gentilhomme,  penchant 
assez  vers  les  idées  nouvelles,  liésite  à  prendre  partie  dans  la  lutte 
qui  ensanglante  la  Vendée.  Mais  il  a  une  fille  dont  la  beauté  a  fait  im- 
pression sur  un  certain Saint-Gildas. héros  équivoque,  très-considéré 
parmi  les  royalistes,  et  qui  voudrait  l'attirer,  auprès  de  lui,  dans 
les  hasards  de  la  guerre  civile.  Par  ses  soins,  une  quenouille  est 
apportée  au  marquis  de  Sauvières,  et  cette  insulte  décide  du  sort 
du  père  et  de  la  fille.  La  mort  tragique  du  marquis  est-elle  dans 
les  prévisions  de  Saint-Gildas?  Toujours  est-il  que,  par  suite  de  cet 
événement,  il  devient  forcément  le  protecteur  de  Mlle  Jacqueline 
de  Sauvières.  Mais  il  n'est  pas  le  seul  qui  veille  sur  le  sort  de 
l'orpheline.  Il  y  a  d'abord  Cadio,  un  joueur  de  biniou,  qui,  par 
reconnaissance,  s'est  dévoué  corps  et  âme  au  salut  de  Jacqueline, 
sans  s'apercevoir  que  ce  qu'il  éprouve  pour  elle  est  un  amour 
intense  et  profond.  Puis  il  y  a  la  Korigane,  une  paysanne  bretonne, 
qui  est  guidée  par  un  tout  autre  motif;  elle  aime  Saint-Gildas,  et,  si 
elle  exerce  une  surveillance  active  sur  Jacqueline,  c'est  uniquement 
par  jalousie. 

Mlle  de  Sauvières  finit  par  tomber  entre  les  mains  des  bleus; 
le  délégué  de  Nantes,  qu'on  ne  nomme  pas,  mais  qui  a  toutes  les 
allures  de  Carrier,  lui  déclare  qu'elle  n'a  qu'un  moyen  d'échapper 
à  la  mort,  c'est  d'épouser  Cadio,  attaché  à  ses  pas  conmie  un 
chien  dévoué.  Elle  se  résigne  à  cttte  extrémité;  mais,  presque 
aussitôt,  elle  s'enfuit  avec  Saint-Gildas,  sans  s'inquiéter  du  désespoir 
dans  lequel  elle  laisse  le  pauyre  joueur  de  biniou.  Peu  enclin, 
jusque-là,  aux  séductions  de  la  gloire  militaire,  Cadio  trouve  dans 
sa  douleur  le  courage  qui  lui  manque  et  s'engage  dans  l'armée 
républicaine,  où  il  arrive  rapidement  au  grade  de  capitaine.  Alors, 
Jacqueline,  désabusée  sur  le  compte  de  Saint-Gildas,  commence  à 
apprécier  le  dévouement  et  le  mérite  de  son  mari  de  rencontre; 
et,  tandis  qu'elle  lui  fait  amende  honorable,  Saint-Gildas,  régénéré 
par  les  conseils  non  moins  que  par  l'exemple  de  la  Korigane,  va 
chercher  dans  la  mort  du  soldat  l'expiation  de  ses  fautes . 

C'est  donc  par  ce  drame  de  Cadio  que  le  théâtre  de  la  Porte- 
Saint-Martin  a  fait  sa  réouverture,  sous  la  direction  nouvelle  de 
M.  Raphaël-Félix.  Animé  des  meilleures  intentions,  le  frère  de 
Rachel  a  droit  aux  égards,  à  l'appui  de  la  presse.  Mais  tout  en 
applaudissant  son  retour  aux  traditions  littéraires  qui  ont  jeté  un 
si  vif  éclat  sur  cette  scène  dont  les  destinées  lui  sont  aujourd'hui 
confiées,  il  faut  bien  l'avertir  que  le  public  a  soif  de  nouveautés, 
non-seulement  dans  le  fond,  mais  aussi  dans  la  forme.  I^'opinion 
générale  est  que  l'interprétation  de  Cadio  manque  de  sève  et  de  jeu- 
nesse. Mélingue  a  sans  doute  encore  d'excellentes  qualités,  mais 
elles  ne  ressortent  guère  que  dans  la  seconde  partie  de  son  rôle,  où 
il  porte  virilement  l'uniforme  de  la  République;  il  n'est  plus  assez 
jeune  pour  la  première  partie.  Le  personnage  de  Saint-Gildas  n'est 
pas,  non  plus,  dans  les  moyens  actuels  de  Roger.  L' ex-ténor  de 
l'Opéra  et  de  l'Opéra-Comique,  le  charmant  chanteur,  l'habile  comé- 
dien, qui  était  naguère  le  prototype  du  séduci-eur,  vient  de  faire 
une  école  dont  il  a  dit  lui-même  son  meâ  culpâ  dans  pluieurs 
journaux.  Mais  Mlle  Thuillier,  mais  Rrésil,  Tisserant,  Lau- 
rent, etc.,  sont-ils  bien  certains,  eux  aussi,  de  n'avoir  rien  à  se  re- 
procher? Nous  n'insistons  pas,  parce  que  nous  avons  affaire  à  des 
artistes  consciencieux,  mais  nous  ne  saurions  trop  répéter  qu'il  est 
regrettable  de  ne  pas  voir  un  élément  nouveau  se  mêler  à  l'ancien 
pour  le  rajeunir.  Nous  devons  mentionner  la  musique  faite  par 
M.  Albert  Visentini  pour  cette  pièce  ;  elle  est  de  tout  point  digne 
d'être  écoutée. 

—  Passons   sous    silence    l'Armurier  de  Santiago,  de  M,  fiou- 


chardy,  puisqu'il  a  déjà  disparu  de  l'afliche  du  Cliâtelet,  pour  ar- 
river à  la  (iaité,  qui  a  repris  un  diamc,  populaire  il  y  a  six  ans  au 
boulevard  du  Temple,  sous  le  tiire  de  Léonard.  Remonté  avec  soin  et 
joué  par  Dumaine,  Lacressonnière,  Alexandre,  Vizentini  et  Mlle 
Léonide  Leblanc,  il  a  trouvé  —  quoiqu'il  ait  un  peu  vieilli  — 
un  regain  de  son  ancien  succès. 

—  Les  auteurs  de  Léonard  viennent  de  faire  représenter  au 
théâtre  du  Prince-Impérial  un  autre  drame  populaire,  intitulé 
l'Ile  Saint-Louis;  il  paraît  que  c'est  leur  spécialité.  Une  pauvre 
fille  a  été  trompée  par  le  fils  d'un  banquier;  le  père  delà  victime 
contraint  son  séducteur  à  l'épouser.  Mais  elle  esl  malheureuse  en 
ménage,  tellement  malheureuse  qu'elle  s'empoisonne.  Son  père, 
au  désespoir,  jure  de  la  venger,  et  avant  d'aller  la  rejoindre,  il 
tue  le  banquier  et  son  fils.  Cette  sombre  histoire  est  égayée  par 
des  détails  qui  sont  vraiment  du  domaine  de  la  bonne  comédie. 
Nous  citerons,  entre  autres  choses ,  l'épisode  de  ce  millionnaire 
qui  veut  en  finir  avec  la  vie  parce  qu'il  souffre  d'une  gastrite.  Il 
se  jette  à  l'eau,  après  avoir  pris  la  précaution  de  placer  toute  sa 
fortune  dans  un  chapeau,  afin  que  le  premier  passant  venu  en 
profite.  Son  suicide  re.te  inachevé,  et  il  se  reprend  à  l'existence, 
allégé  de  tous  ses  millions  et  en  même  temps  de  sa  gastrite.  Le 
rôle  de  ce  fantaisiste  est  très-bien  joué  par  un  acteur  du  nom  de 
Rrelet.  Les  autres  personnages  sont  convenablement  interprétés 
par  Gravier,  Edmond  Galland,  Scipion  et  Mlle  Fleury.  La  mise  en 
scène  est  très-soignée. 

D.  A.  D.  SAINT-YVES. 


Avec  le  prochain  numéro,  non  abonnés  recevront 
la  Kiéltre  de  ta  Périchaîe  (poar  cbant  et  piano), 
dite  par  Mlle  Scbnelfler  dans  le  nouvel  opéra 
d'Offenbacb,  et  annoncée  par  erreur  pour  notre  der- 
nier naméro. 


NOUVELLES  DES  THEATRES  LYRIQUES. 

^*^  Le  théâtre  impérial  de  l'Opéra  a  donné  lundi  le  Trouvère  et  Gi- 
seHe.  —  Mercredi  et  vendredi,  Hamlet.—Les  fils  du  vice-roi  d'Egypte  as- 
sistaient à  la  représentation  de  mercredi  avec  leur  service  d'honneur  ; 
ils  occupaient  la  loge  de  service. 

j*^  Aujourd'hui  dimanche,  par  extraordinaire,  représentation  de  l'A- 
fricaine . 

^*^  Le  rengagement  de  Marie  Sass  étant  encore  incertain,  les  études 
A'Armide,  dont  elle  doit  chanter  le  principal  rôle,  ont  été  momentané- 
ment interrompues.  Mais  si  Mme  Sass  se  décidait  à  quitter  l'Opéra,  ces 
études  seraient  reprises  avec  une  autre  cantatrice,  M.  Emile  Perrin 
n'ayant  pas  renoncé  à  remonter  le  clief-d'œuvre  de  Gluck. 

^*^  Le  départ  prochain  de  Mlle  Granzow  et  de  Saint-Léon  pour  Saint- 
Pétersbourg,  où  les  rappellent  leurs  engagements,  ajourne,  jusqu'à  leur 
retour,  c'est-à-dire  à  cinq  ou  six  mois,  l'apparition  du  ballet  nouveau 
du  célèbre  maître  de  ballets  et  de  Léo  Delibes.  Un  seul  tableau  sur 
trois  est  généralement  su  ;  les  études  des  deux  autres  continueront  au- 
tant que  le  permettra  l'éloignement  des  principales  parties  prenantes. 

^**  Le  théâtre  Italien  donne  aujourd'hui,  par  extraordinaire,  une  re- 
présentation qui  sera  composée  de  la  reprise  de  la  Contessina,  opéra  du 
prince  Poniatowski,  interprété  par  Fraschini,  Verger,  Ciampi;  Mlles 
Ricci,  Grossi  et  Urban. 

^*^  La  réouverture  du  théâtre  Lyrique  aura  lieu  le  26  par  le  Val 
d'Andoire,  interprété  par  MM.  Monjauze,  Meillet,  Verdellel,  Lutz,  Mmes 
Fidès-Devriès,  Darani,  Villème.  —  Pour  cette  fois,  M.  Pasdeloup  con- 
duira l'orchestre. 

t*^  Une  brillante  reprise  de  Martha  se  prépare  au  même  théâtre,  à 
l'occasion  de  la  présence  à  Paris  du  célèbre  compositeur  auquel  on  doit 
cet  ouvrage. 

if*t  Le  théâtre  des  Fantaisies-Parisiennes  a  donné ,  hier  soir,  la  pre- 
mière représentation. du  Soldat  malgré  lui,  opéra-comique  en  deux  actes 
de  MM.  Chivot  et  Duru,  musique  de  M.  F.  Barbier.—  A  dimanche  le 
compte  rendu. 


■334 


KEVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


jf%  A  l'Athénée,  Liice  a  remplacé  Daubray  dans  le  rôle  de  l'Ogre  du 
Petit-Poucet  dont  le  succès  s'affirme  chaque  jour  davantage. 

^*»  Los  dix  premières  recettes  de  la  Péricholc  ont  produit  43,190  fr., 
soit  une  moyenne  de  plus  de  4,300  francs  par  soirée. 

»'^  Les  recettes  brutes  faites  pendant  le  mois  de  septembre  ISCS, 
dans  les  établissements  soumis  à  la  perception  du  droit  des  indigents  se 
sont  élevées,  pour  les  théâtres  impériaux  subventionnés,  à  329,753  07 
Pour  les  théâtres  secondaires,  vaudevilles,  petits  spectacles,  à  379,982  20 
Pour  les  concerts,  cafés -concerts,  bals,  curiosités  diverses,  à      14S,S94    » 

Total.   .   .   .    1,053,329  27 

^*^  La  réouverture  du  théâtre  de  Nancy  s'est  récemment  effectuée 
avec  les  Dragons  de  Viltars.  Le  séduisant  opéra  de  Maillart,  parfaitement 
interprété  par  la  nouvelle  troupe ,  et  notamment  par  Mlle  Enaux  et 
M.  Boudias,  a  marché  avec  ensemble  et  a  été  accueilli  avec  la  faveur 
marquée  que  le  public  aristocratique  de  cette  ville  réserve  aux  œuvres 
frappées  à  l'empreinte  d'un  sentiment  délicat  et  d'un  talent  incontes- 
table. 

,f*^  On  écrit  de  Bade  :  o  Le  théâtre  a  clôturé  ses  représentations  d'o- 
péretles.  S.  M.  la  rein^  de  Prusse  a  assisté  à  plusieurs  d'entre  elles  et  a 
paru  y  prendre  grand  plaisir.  » 


NOUVELLES  DIVERSES. 


,^%  Les  cours  du  Conservatoire  impérial  de  musique  se  sont  rouverts 
le  1"  octobre.  On  y  a  déjà  procédé  aux  examens  d'admission  des  clas- 
ses de  déclamation.  Prochainement  auront  lieu  les  examens  d'admission 
pour  les  classes  de  chant. 

,.— -^''^jrC'est  aujourd'hui  à  2  heures  qu'a  lieu,  au  cirque  Napoléon,  le 
prélnier  concert  populaire  de  musique  classique  de  la  saison,  sous  la 
direction  de  M.  Pasdeloup.  Nous  on  avons  donné  le  programme,  que 
nous  répétons  :  1°  ouverture  do  liuij-Iilas,  de  Mendelssohn  ;  —  2"  sym- 
phonie en  la,  de  Beethoven;  —  3°  audante  canlabile  et  menuet, 
d'Haydn  ;  —  4°  fragments  des  Maitres  Chanteurs  (première  audition) , 
de  Richard  Wagner  :  (entr'acte  du  troisième  acte  —  valse  —  entrée  des 
Maîtres  Chanteurs,  niarclie). 

ji*^,  Le  beau  jour  à  la  salle  Valentino  est  le  vendredi.— Ce  jour-là 
Arban  compose  son  programme  d'éléments  exceptionnels;  aussi  attire-t-il 
un  auditoire  des  plus  distingués.  Le  premier  vendredi  a  fait  fureur  et 
celui  d'avant-hier  ne  lui  a  cédé  en  rien.  —  On  y  a  applaudi  une  jeune 
personne  qui  a  une  très-belle  voix  et  qui  chante  fort  bien,  Mlle  de  Ban- 
nay,  1""'  prix  de  chant  du  Conservatoire.  —  Le  célèbre  clief  d'orchestre 
se  propose  de  consacrer  successivement  et  par  leur  à  Auber,  Halévy, 
Meyerbeer,  Hossini,  un  de  ces  vendredis,  et  de  n'y  faire  exécuter  que  les 
plus  beaux  fragments  de  leur  leuvre  respective.  Ainsi  le  plus  prochain 
s'appellerait  le  concert  Auber,  le  second  le  concert  Meyerbeer  et  ainsi  de 
suiie.  —  On  y  entendrait,  non-seulement  des  fantaisies  avec  chœurs  sur 
leurs  meilleurs  opéras,  mais  aussi  des  morceaux  d'ensemble  tout  entiers 
pour  l'exécution  desquels  Arban  réunit  tous  les  éléments  néces.^aires. 

^*^Un  nouvel  orgue,  sorti  des  ateliers  de  la  Société  Merklin  et  Schutze, 
vient  d'être  inauguré  dans  l'église  Saint-Ambroise,  récemment  consiruite 
et  l'un  des  plus  beaux  monuments  de  ce  genre  que  possède  la  ville  de 
Paris.  Dans  cette  vaste  église,  dont  la  voûte  est  très-élevée,  l'instrument 
déploie  une  puissance  de  sonorité  si  majestueuse,  si  harmonieuse  et  si 
nourrie  de  jeux  de  fonds  et  d'anches,  que  plusieurs  artistes  distingués, 
qui  assistaient  à  la  séance,  n'ont  pu  croire  qu'après  examen  que  cet 
orgue  est  composé  seulement  de  trente  jeux.  La  variété  des  effets  de 
sonorité  et  la  rich^se  des  combinaisons  a  également  frappé  ces  artistes 
et  le  public.  Les  connaisseurs  ont  particulièrement  admiré  la  simplicité 
des  dispositions  de  toutes  les  parties  du  mécanisme  du  nouvel  instru- 
ment, qu'ils  considèrent  comme  un  chef-d'œuvre  en  son  genre. 
MM.  Batiste  et  Renaud  de  Vilbac  en  ont  fait  valoir  les  belles  qualités, 
le  premier  dans  un  prélude  et  une  fugue  de  Bach ,  le  second  dans  des 
improvisations  charmantes,  qui  ont  mis  en  relief  les  trésors  d'effets 
heureux  que  renferme  ce  nouveau  produit  du  talent  des  facteurs. 

^*^  Notre  vénérable  et  savant  collaborateur  M.  Fétis  père,  directeur 
du  Conservatoire  de  Bruxelles,  est  en  ce  moment  à  Paris.  Le  but  de  son 
voyage  est  de  s'entendre  avec  MM.  Didot  frères,  ses  éditeurs,  pour  la 
mise  en  vente  du  premier  volume  de  son  Histoire  générale  de  la  Musique, 
dont  le  deuxième  volume  est  déjà  à  moitié  imprimé. 

,%  L'éminent  organiste  Louis  Engel  est  aussi  à  Paris;  il  a  passé 
quelques  jours  à  Bruxelles,  et  il  s'est  fait  entendre  dans  quelques  réunions 
intimes,  notamment  chez  M.  Meerens,  le  représentant  des  maisons  Henri 
Herz  et  Alexandre  père  et  fils.  M.  Engel  a  laissé  au  public  d'élite  convié 
à  cette  soirée  un  souvenir  qui  ne  s'effacera  pas  de  sitôt.  Sous  les  doigts  du 
célèbre  virtuose,  l'orgue  Alexandre  devient  véritablement  un  instrument 
du  plus  merveilleux  effet;  aussi  des  instances  ont-elles  été  faites  à  M. 
Engel  pour  obtenir  de  lui  la  promesse  de  revenir  dans  le  courant  de 
l'hiver,  ce  qu'il  a  gracieusement  promis. 


»*»  Le  célèbre  ténor  Naudin,  après  ses  grands  succès  en  Allemagne, 
est  arrivé  à  Paris.  Il  compte  y  rester  jusqu'en  décembre.  A  cette  époque 
il  se  rendra  au  théâtre  de  l'Oriente,  à  Madrid,  où  il  remplacera  Tamber- 
lick,  qui  à  son  tour  viendra  prendre  la  place  de  Fraschini  au  théâtre 
Italien.  ,. 

,''*  Nous  annoncions  dernièrement  l'arrivée  à  P^ris  d'un  artiste  d'élite, 
M.  Muzio,  le  seul  élève  qu'ait  formé  Verdi.  Outre  son  talent  de  compo- 
siteur, M.  Muzio  est  un  chef  d'orchestre  remarquable,  qui  a  fait  ses 
preuvessur  les  théâtres  de  New- York,  Havane,  de  la  Fenice,  Barcelone,  etc., 
etc..  Mais  c'est  surtout  comme  professeur  de  chant  que  M.  Muzio  s'est 
distingué  ;  c'est  lui  qui  a  dirigé  les  premiers  pas  d'Adelina  et  de  Carlotta 
Patti  dans  la  carrière  artistique  ;  c'est  également  lui  qui  a  formé  miss 
Kellogg  et  bien  d'autres  grandes  cantatrices  américaines.  M.  Muzio  paraît 
décidé  à  se  fixer  à  Paris.  Ce  serait  un  excellent  professeur  de  plus  parmi 
nous,  une  bonne  fortune  artistique  dont  on  ne  pourrait  que  se  féliciter. 

**H=  L'excellent  pianiste  compositeur  Magnus,  après  un  séjour  de  trois 
mois  au  Havre,  oîi  il  jouait  à  l'Exposition  les  pianos  de  Pleyel,  et  où  il 
a  donné  plusieurs  brillants  concerts,  est  de  retour  à  Paris.  Il  y  va  re- 
prendre ses  cours  de  piano,  attendus  avec  impatience  par  ses  nombreux 
élèves. 

,*»  A  propos  du  bruit  qui  a  couru  récemment  de  la  mise  au  concours 
d'un  nouveau  chant  national  français,  le  Gaulois  dit  tenir  d'une  per- 
sonne bien  informée  qu'il  n'en  est  point  question,  et  que,  s'il  se  faisait 
quelque  chose  dans  cet  ordre  d'idées,  S.  M.  l'Empereur  ne  serait  pas 
éloigné  de  faire  mettre  à  l'ordre  du  jour  le  chant  illustre  de  Rouget  de 
l'Isle,  qui  cessant  d'être  un  cri  de  discorde  entre  les  partis ,  deviendrait 
désormais  le  chant  de  ralliement  de  la  nation. 

***  L'oratorio  Eli,  du  célèbre  chef  d'orchestre  Michel  Costa ,  exécuté 
en  1833  et  1838  au  festival  de  Birmingham,  et  en  1836  en  présence  de 
S.  A.  R.  le  prince  Albert,  par  la  Sacred  Harmonie  Society  de  Londres, 
sera  donné  le  3  novembre  prochain  au  conc(;rt  de  l'orchestre  royal  de 
Stuttgart.  M.  Costa  a  accepté  la  flatteuse  invitation  qui  lui  a  été  adres- 
sée, de  venir  dans  la  capitale  du  Wurtemberg  diriger  lui-même  son  ou- 
vrage. Le  texte  de  cet  oratorio  est  dû  à  Mlle  Ida  Grïineisen  ,  et  à 
M.  Griinei.sen,  critique  musical  accrédité  à  Londres. 

^''^  Henri  Panofka  a  fini  par  céder  aux  sollicitations  des  amis  de  l'art 
qui  désiraient  ardemment  le  voir  fixer  sa  résidence  à  Milan.  Sa  grande 
expérience  et  la  sûreté  de  son  goût  vont  certainement  profiter  aux  scènes 
italiennes  dont  les  élèves  formés  par  lui  ne  peuvent  que  relever  l'éclat. 

„;%  La  partition  du  l'etit-I'oucet  vient  d'être  achetée  par  M.  Colombier 
à  de  très-brillantes  conditions  pour  son  auteur  M.  Laurent  de  Rillé. 

»'*,f  Nous  recommandons  à  toute  l'attention  qu'il  mérite  le  cours  de 
perfectionnement  pour  l'étude  du  piano  et  le  cours  d'harmonie  pratique 
qu'ouvrira  le  l'^''  novembre  l'excellent  professeur  Michel  Bergson,  précé- 
demment professeur  au  Conservatoire  de  Genève. 

jf*^  M.  et  Mme  Lcbouc  annoncent  pour  la  première  semaine  de  no- 
vembre la  rentrée  des  cours  complets  de  musique  à  l'usage  des  jeunes 
personnes,  qu'ils  ont  fondés  il  y  a  quatre  ans,  rue  Vivienne ,  2.  Ces 
cours  ont  pour  professeurs  M.  Marmontel  pour  le  cours  de  piano  supé- 
rieur, Mme  Réty  pour  le  piano  (1'=''  et  2°  degré),  Mme  Damoreau  pour 
le  chant,  M.  A.  Durand  pour  l'orgue  expressif.  M.  Batiste  fera  le  cours 
de  solfège  et  celui  d'harmonie  appliquée  au  piano,  enfin  M.  Lebouc  celui 
de  musique  d'ensemble. 

<.*>  M.  Camille  Stamaty  est  de  retour  à  Paris. 

^*,  Mme  Pierson-Bodin  reprendra,  le  2  novembre  prochain,  chez  elle 
rue  de  Louvoi.s,  10,  ses  cours  de  chant,  de  solfège  et  de  piano.  Mme 
Pierson-Bodin  donnera  comme  à  l'ordinaire,  cet  hiver,  quelques  réunions 
pour  exercer  ses  élèves  à  se  faire  entendre  en  public  et  à  exécuter  de  la 
musique  d'ensemble. 

„*^,  L'éditeur  Richault  vient  de  metti'e  en  vente  l'Andantc  du  7"  con- 
certo, de  Rode,  transcrit  pour  le  violoncelle  par  Séligmann.  Ce  mor- 
ceau, empreint  d'une  simplicité  touchante,  d'une  grâce  exquise,  est  une 
étude  d'expression  d'une  grande  élévation  de  pensée. — Le  même  éditeur 
vient  de  faire  regraver  un  des  premiers  morceaux  de  Séligmann;  c'est 
une  scène  romantique,  intitulée  :  Il  silenzio  délia  notte,  que  l'éminent 
violoncelliste  fit  entendre  à  la  Société  des  concerts  du  Conservatoire, 
alors  qu'il  commençait  à  se  faire  la  grande  réputation  qu'il  a  acquise 
depuis. 

^''^  M.  Testud  de  Beauregard,  rédacteur  du  Moniteur  de  l'Orphéon ,  a 
découvert  dans  la  production  du  gaz  hydrogène  une  propriété  singulière, 
et  susceptible  de  s'appliquer  à  l'art  musical.  Voici  en  quoi  elle  consiste: 
L'hydrogène,  en  se  combustionnant  dans  un  tuyau  ouvert  par  les  deux 
bouts,  possède  la  propriété  de  faire  vibrer  cet  air  et  de  produire  un  son 
répondant  à  la  vitesse  de  ces  vibrations,  selon  la  longueur  et  la  largeur 
des  tubes,  comme  cela  a  lieu  dans  les  buffets  d'orgue.  «  Frappé  de  l'effet 
de  ces  sons  et  regrettant  que  l'art  n'en  ait  pas  tiré  parti,  j'eus,  dit-il,  la 
pensée  d'en  essayer  publiquement  l'effet,  et  en  collaboration  d'un  de  mes 
amis,  M.  Stéphane  Gaurion,  nous  composâmes  un  petit  opéra-comique 
dans  lequel  une  jeune  fille  priait  pour  sa  mère,  et  l'Eternel,  exauçant  sa 
prière,  manifestait  cette  volonté  à  l'aide  des  accords  éoliens  dont  nous 
venons  de  parler.  Je  regrette  de  n'avoir  pu  faire  représenter  cette  pièce 


DE  PARIS 


333 


sur  une  scène  où  les  éléments  mis  à  notre  disposition  eussent  Hé  assez 
complets  pour  permettre  d'enrichir  l'art  de  ce  phénomène  de  la  science. 
Il  y  a  là  des  effets  mystiques;  il  y  a  dans  ces  sons  un  sentiment  reli- 
gieux que  nul  instrument  ne  saurait  rendre.  C'est  la  prière  des  anges; 
c'est  le  chant  des  séraphins.  On  ne  saurait  se  rendre  compte  de  l'effet 
inouï  que  peut  produire  une  série  d'accords  donnée  par  ces  vibrations  si 
légères,  si  suaves  et  tout  à  la  fois  si  pleines.  L'effet  de  ces  accords  est 
tel  que  ce  ne  sont  plus  seulement  les  tuyaux  qui  vibrent,  c'est  la  salle 
tout  entière,  c'est  l'édifice  lui-même!  » 

***  La  dernière  matimée  de  Mme  Mackenzie,  à  Saint-Germain,  a  été 
des  plus  intéressantes;  sa  fille,  une  toute  jeune  personne,  presque  encore 
un  enfan',  de  seize  ans,  Mlle  Nina  Mackenzie,  a  joué  en  véritable  ar- 
tiste—digne héritière  du  talent  maternel— à  elle  seule,  un  brillant  mor- 
ceau moderne  de  piano,  et  ensuite  un  magnifique  duo  de  Beethoven, 
dans  lequel  elle  a  fait  le  plus  grand  honneur  à  son  professeur  actuel, 
M.  Norblin,  et  qui  a  vériïablement  électrisé  l'assemblée. 

^*^  Nous  n'avons  pas  eu  depuis  longtemps  l'occasion  de  citer  le  nom 
d'un  artiste  distingué  qui  a  longtemps  habité  Paris,  Joseph  Wieniawski  ; 
il  l'avait  quitté  pour  remplir  les  fonctions  de  directeur  de  l'école  de  piano 
à  Moscou.  Une  maladie  grave,  occasionnée  par  la  rigueur  du  climat,  l'a 
forcé  d'habiter  temporairement  Varsovie,  où  il  se  trouve  en  ce  moment. 

#*^  C'est  dans  le  numéro  du  i  décembre  IBM  de  la  Revue  et  Gazette 
musicale  que  fut  donnée  la  gamme: 

I     3.3    5    3.9    3    3.9    3.5    q» 

qui  résume  en  quelques  chiffres  les  belles  découvertes  exposées  dans  la 
récente  brochure  :  Phénomènes  musico- physiologiques  de  M.  Charles  Mee- 
rens.  A  cette  époque  déjà,  l'auteur  était  en  possession  des  principes  qui 
font  sortir  aujourd'hui  le  calcul  appliqué  à  la  théorie  musicale  du  chaos 
où  cette  science  se  trouvait  cachée  depuis  les  temps  les  plus  reculés. 

,**  Un  nouveau  journal  de  musique,  Der  Freischuts,  vient  de  se  fon- 
der à  Stuttgard. 


*''»  Un  de  nos  artistes  les  plus  distingués,  Eugène  Ketterer,  le  pianiste 
compositeur,  vient  d'être  frappé  dans  ses  plus  chères  affections  ;  il  a 
perdu  sa  mère  cette  semaine. 

,t%Le  célèbre  Salvator  Taglioni,  compositeur  émérite  de  ballets,  vient 
de  mourir  à  Naples  à  l'âge  de  soixante-dix-huit  ans. — Frère  de  Mlle  Ta- 
glioni et  beau-père  du  maître  de  ballets  Fuchs,  il  laisse  plus  de  deux 
cents  ouvrages,  parmi  lesquels  les  plus  remarquables  sont  Esmeralda  et 
Faust. 

^%  On  annonce  aussi  la  mort  de  M.  J.  A.  van  Eyken,  compositeur 
estimé,  connu  spécialement  par  son  oratorio  de  Lucifer;  il  était  né  à 
Amerafoort,  mais  il  est  mort  à  Elberfeld,  où  il  était  organiste  de  la 
communauté  évangélique;  il  n'était  âgé  que  de  quarante-cinq  ans. 


ET  R  A  N  G  E  R 

^",1.  Londres.  —  Les  représentations  d'opéra  italien  que  M.  Mapleson 
doit  donner  au  théâtre  de  Covent-Garden,  loué  par  lui  pour  la  saison 
d'autonme,  commenceront  le  2i  octobre.  Mlle  Minnie  Hauck  y  fera  son 
début,  impatiemment  attendu,  dans  la  Sonnambula.  —  On  annonce 
comme  prochaine  l'arrivée  du  célèbre  pianiste  de  Leipzig,  Cari  Tausig, 
l'élève  et  l'émule  de  Liszt. —  La  troupe  d'opérette  formée  par  M.  Russell, 
et  qui  parcourt  avec  tant  de  succès  le  Royaume-Uni,  s'est  décorée  de  ce 
titre  significatif  ;  The  Grand-Duchess's  Company  ! 

^*^  Dublin.  —  Les  artistes  de  i/eri)/a;cs<i/'s,  avec  M.  Mapleson  à  leur  tête, 
continuent  à  attirer  la  foule  au  théâtre.  La  représentation  au  bénéfice  de 
Mlle  Tietjens  a  été  très-brillante.  L'éminente  cantatrice  a  été  reconduite 
à  son  domicile  par  les  étudiants ,  qui  ont  dételé  les  chevaux  de  sa  voi- 
ture et  se  sont  mis  à  leur  place.  On  peut  se  croire  encore  aux  beaux 
jours  de  Jenny  Lind. 

,s*t  Maycnce.  —  La  Société  philharmonique  a  organisé  le  2  octobre  un 
grand  concert,  où  s'est  fait  entendre  la  jeune  et  intéressante  violoniste 
Thérèse  Liébé,  fille  de  l'auteur  applaudi  de  la  Fiancée  d'Azola.  Cette  char- 
mante enfant  a  enthousiasmé  son  public  avec  une  Pastorale  de  Léonard, 
VÉlégie  de  Ernst  et  VAragoncsa  d'Alard. 

i^*^  Cobourg.  —  Mignon,  d'Anib.  Thomas,  a  été  représenté  pour  la 
première  tbis  le  27  septembre,  avec  un  succès  complet. 

^,*^  Hanovre.  —  On  a  donné  ici  aussi  Mignon,  le  30  septembre; 
mais  l'œuvre  du  maître  français  n'a  pas  aussi  bien  réussi  qu'à  Cobourg. 

»**  Berlin.  —  L'Africaine  est  toujours  sur  la  brèche.  On  l'a  jouée  deux 
fois  cette  semaine  avec  Niemann ,  rentré  au  bercail ,  et  Mme  Lucca.  — 
Le  10,  Jean  de  Paris,  avec  Mme  Harriers-Wippern,  Mlle  Grun,  MM.  Wo- 
wor.sky  et  Betz;  le  11,  le  Prophète,  avec  Niemann.  —  Les  soirées  sym- 
phoniques  de  l'orchestre  royal  ont  commencé,  le  7,  à  l'Opéra,  sous  la 


direction  de  Taubert.—  La  reprise  d'un  attrayant  ballet  de  Paul  Taglioni, 
les  Joyeux  Momquelaires,  a  été  pour  une  jeune  danseuse  françai.se, 
Mlle  Judith  David,  l'occa-sion  d'un  Iriomplic  complot.— Mlle  Stella  a  ter- 
miné ses  débuts,  mais  sans  succès;  le  public  récalciltrant  n'a  pas  voulu 
donner  raison  à  son  nom,  qui  a  tout  l'air  d'un  ambitieux  pseudonyme. 

^*:f  Leipzig.  —  Le  8  octobre  a  eu  lieu  le  premier  concert  du  Gewan- 
dhaus.  Le  concertmeister  Ferd.  David  a  joué  avec  sa  maestria  habituelle 
deux  nouveaux  concertos  de  violon  de  Max  Bruch  et  de  Camille  Saint- 
Saëns,  qui  n'ont  obtenu  qu'un  demi-succès.  On  a  beaucoup  applaudi 
l'excellente  cantatrice  Mme  Peschka-Leutncr,  qui  a  chanté  deux  airs  du 
Faust  de  Spohr  et  de  la  Sylvana  de  Weber.  —  M.  Saint-Saëns  est  invité 
à  jouer  lui-même  au  second  concert,  le  IS  octobre,  un  concerto  de  piano 
de  sa  composition.  Joachim  se  fera  entendre  au  troisième. 

»*»  Vienne. — Le  théâtre  An  derWien  prépare  l'opéra-comiqueylmjïuncris- 
tein  (Près  de  la  pierre  runique) ,  de  Fr.  de  Flotow.  —  Une  entreprise 
que  le  succès,  un  succès  de  curiosité  au  moins,  pourrait  bien  favoriser, 
vient  de  se  former  :  la  grande  salle  du  Bain  de  Diane  a  été  convertie  en 
un  théâtre,  dont  tout  le  personnel  appartiendra  au  sexe  faible.  L'or- 
chestre même  sera  composé  d'artistes  femmes;  les  rôles  d'hommes  seront 
joués  par  des  actrices.  L'ouverture  est  annoncée  pour  le  17  octobre.  — 
On  annonce  aussi  la  représentation  prochaine,  à  l'Opéra,  d'un  nouveau 
ballet  de  Saint-Léon  :  Flamme  d'amour. 

,*^  Venise.  —  On  signale,  parmi  les  engagements  faits  à  la  Fenice, 
ceux  de  la  prima-donna  Galletti-Gianoli,  du  ténor  Villani,  du  baryton 
CoUini,  et,  pour  le  ballet,  de  la  Cucchi  et  de  Rossi-Brighenti . 

^*^  Milan.  —  Le  Carcano,  forcé  par  les  engagements  pris  par  les  artistes 
d'arrêter  en  plein  succès  les  représentations  de  Dinorah,  vient  de  don- 
ner Zampa.  Le  chef-d'œuvre  d'Hérold  a  pris  une  glorieuse  revanche  de 
la  chute  qu'il  subit  à  la  Scala  lors  de  sa  première  apparition ,  il  y  a 
trente-trois  atjs.  —  La  direction  de  la  Scala  annonce  quelques  représen- 
tations extraordinaires,  avant  l'ouverture  de  la  saison,  dans  le  double 
but  de  fêter  la  présence  de  S.  M.  l'Impératrice  de  Russie  et  de  venir  en 
aide  aux  inondés. 

^**  Turin.  —  La  saison  a  commencé  brillamment  le  6  octobre  au 
théâtre  Carignano  avec  Dinorah,  qui  fournit  déjà,  il  y  a  quelques  mois, 
au  théâtre  Royal  une  si  belle  carrière.  Mlle  de  Maesen  et  Minetti  sont  encore 
chargés  des  principaux  rôles  :  c'est  dire  que  l'œuvre  de  Meyerbeer  ne 
saurait  être  mieux  rendue.  Le  baryton  Moriani  s'acquitte  aussi  fort  bien 
de  sa  tâche. 

,*,j  Bologne.  —  Le  Théâtre  Communale  s'est  rouvert  le  3  avec  l'Ebrea 
(la  Juive). 

,k*^  Gênes.  —  La  troupe  engagée  au  théâtre  Doria  compte  parmi  ses 
principaux  artistes  :  Luisa  Kapp-Young,  Urania  Ferardi,  Giulio  Perotti, 
Gaetano  Giotti,  Luigi  Vecci.  Fausto  et  Roberto  il  Diavolo  seront  représen- 
tés au  commencement  des  saisons  d'automne  et  de  carnaval. 

j*^  Florence.  —  Le  30  septembre  a  eu  lieu  au  Pagliano  la  première 
représentation  de  la  Schiava  Greca,  de  Pontoglio.  Cet  ouvrage,  qui,  pa- 
raît-il, n'est  point  absolument  sans  mérile,  mais  qui  accuse  une  grande 
inexpérience  et  dont  le  sujet  manque  d'intérêt,  est  tombé  devant  l'ennui 
général . 

a,'*:js  Madrid.  —  Tiberini,  Scalese,  Medini,  Selva,  Mines  Tiberini  et  Mo- 
rensi  sont  arrivés  et  se  sont  mis  à  la  disposition  de  M.  Velasco,  l'impré- 
sario de  l'Opéra.  L'ouverture  aura  lieu  prochainement  par  Mathilda  de 
Schabran.  —  Une  représentation  extraordinaire  de  la  Muette,  avec  Tam- 
berlick  et  Selva,  a  été  donnée  au  bénéfice  des  blessés  du  combat  d'Alcolea. 
—  Le  duo  Amour  sacré  de  la  patrie  a  soulevé  des  tempêtes  d'applaudis- 
sements, qui  ont  redoublé  après  des  stances  espagnoles  de  circonstance 
adaptées  à  la  musique  du  grand  air  du  second  acte  par  le  poëte  Manoel 
Palacio,  et  chantées  avec  beaucoup  d'enthousiasme  par  Tamberlick. 

^%  New-York.  —  Miss  Kellogg  est  arrivée  et  se  prépare  à  entreprendre 
sa  tournée  artistique  avec  M.  Max  Strakosch.  —  Barbe-Bleue  fait  salle 
comble  à  Niblo's  Garden  ;  on  ne  se  lasse  pas  d'applaudir  Irma  Marié, 
en  attendant  le  retour  de  Mlle  Testée,  en  ce  moment  en  représentations 
à  Cincinnati,  et  qui  doit  reparaître  le  14  dans  la  Grande- Duchesse. — La 
troupe  de  Grau  donne  depuis  le  4  ce  même  ouvrage  au  théâtre  Français  : 
il  faut  aller  en  Amérique  pour  voir  une  même  pièce  jouée  en  même 
temps  sur  deux  scènes  rivales  et  amenant  chaque  soir  une  pluie  d'or  dans 
la  caisse  de  chacune!  —  Voilà  pour  la  Grande-Duchesse,  «  sérieuse,  » 
mais  il  paraît  que  les  excentriques  minstrels  nègres,  ou  noircis,  en  pré- 
parent pour  le  mois  prochain  une  «  parodie!  »  On  se  demande  à  quoi  peut 
bien  aboutir  une  parodie  des  joyeusetés  de  fa  Grande- Duchesse?  —  Une 
Université  de  musique  va  se  fonder  avec  Mme  Gazzaniga,  MM.  Albertes  et 
Ronconi  pour  directeurs. 


s.   ULFOUR. 


336 


KliVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE  DE  FAKIS. 


POUR  PARAITRE  INCESSAMMENT 
Chez  BRANDUS  et  DUFOUR,  éditeurs,  103,  rue  de  Richelieu. 


OPÉRA-BOUFFE    EN    DEUX    ACTES, 

Paroles  de  MM.  Henri  Meilhac  et  Ludovic  Halévy, 

Musique  de 

J.    OFFENBAGH 

l'OUVERTDRE.  ARBAFGfE  PODR  EE  PIANO 
Les  Airs  de  Chant  dé  lâchés  avec  accompagnement  de  Piano  : 


50 


1.  Chanson  des  mois  cousines,   chantée   [lar  JHles-   Le- 

grand,   Carlin  et    Renault  :    l'romptos  h  servir  lu 
pratique S 

2.  Couplets  DE  l'i.m:ogmïo,  chantés  par  M.  Grenier:  Sans 

en  rien  sott/Jler  à  personne 3 

3.  L'Espagnol  et  la  jeune  Indienne,  complainte,  chan- 

tée par  Mlle  Schneider  et  M    Dupuis  :  Le  conqué- 
rant dit  il  la  jeune  Indienne 4 

3  his.  La  niônie,  à   une  voix   et  transiwsée  un  ton  et  demi 

au-dessous 4    » 

4.  Le  MuLETiEn  et  la  jeuine  personne,  séguedille    pour 

SOIRÉES,  cliantéc   par   Mlle  Sclnieider  et   M.   Du- 
puis :  Vous  a-t-on  dit  xouve/it  :  Ecoulez-moi.,  la  [l'ie    o     » 

5.  La  Lettre  de  la  Périciiole,  chantée  par  Mlle  Schnei- 

der :  O  mon  cher  amant,  je  te  jure 3  "5 

5  bis    La  même,  transposée  un  ton  an-dessus 3  "S 

6.  Griserie- Ariette,  chantée  par  Mlle  Schneider  :  .1/).' 

quel  dîner  je  viem  di  faire 'à     » 

6  bis.  La  même,  transposée  un  ton  au-dessus 3     >■ 

7.  Duetto  DU  mariage,    chanté    par    Mile    Schni'ider   et 

M.  Dupuis  :  Je  dois  vous  prévenir.    Madame  ...     0    » 


acte  ji. 

8.  Cancans  Couplets,  chantés  par  Mlles  Julia,  Benard, 

Gi'avier  et  Lalour  :  On  vante  partout  son  sourire  .     4 

y.  Les  fem.ues,  il  n'y  a  qu'ça!  couplets,  chantés  par 
M.  Dupuis  :  Et  là,  maintenant  que  nous  sommes 
seuls 3 

!1  bis.  Les  mêmes,  transposés  un  ton  et  demi  au-dessous  .     3 

10.  Que  les  hommes  sont  cétes  !  couplets,  chantés  par 

Mlle  Schneider  :   Que  veulent  dire  ces  colères?     .     3 
■10  liif.  Les  mêmes,  transposés  un  ton  au-dessus 3 

11.  La    piiÉsENTATiOiN,  rondo   de    bravoure,    chanté  par 

M.  Dupuis:  Ecoule,  ô  roi!  je  te  présente 

1:2  Ronde  des  maris  ré...,  chantée  par  M.  Grenier:  Con 
duisez-lf,  bon  courtisan 

13.  Duo  des  uijoux,  chanté  par  Mlle  Schneider  et  M.  Gre- 

nier :  Monsieur  le  marchand,  qu'avez-vous.    .    .    . 
13  bis.  Extase,    chantée    par   Mlle    Schneider:  Ah[    que 

j'aime  les  diamants 3 

14.  Final-Séguedille,  chantée  par  Mlle  Schneider  et  M. 

Dupuis  :    Un  roi.    se  promenant,   trouva   certaine 
femme 4 


50 


3  75 
3  » 
7  50 


Les  Airs  de  Chanl  sans  accompagncrnenl,  formai  in-8°,  chaque  net,  50  c, 


Fantaisie  brillante  pour  le  Piano  par  E.  Ketterer 

BOUQUET      DE      MÉLODIES     PAR      CRAMER 
QUADRILLE    PAR     ARBAN.  — =-  GRANDE    VALSE     PAR 

Polka  par  Roques  et  Strauss.     —     Polka-Mazurka  par  Lindheim 


STRAUSS 


La  Partition  pour  Chant  et  Piano,  et  la  même  arrangée  pour  le  piano  seul 


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PAROLES    DE    MM-    HENRI    CHIVOT    ET    ALFRED     DURU 

musique  de 

«J.    OJlfeHJbactê 

Partition  pour  Piano  et  Chant.  —  Partition  pour  Piano  seul.   -  Parties  d'orchestre. 

Quadrille  par  ARBAN  —  Polka  par  E.  ETTLING 

Bouquet  de  mélodies  par  CRAMER,  etc. 


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3S'  Année. 


J"  43. 


25  Octobre  18(18. 


ON  S'ABONNE: 

Dans  les  Départements  et  à  l'Étranger, 

chez  tous  [es  Marchands  de  Musique,  lis  LîbraircB, 

et  aui  Bureaux  der  Messageries  et  des  Postes. 


REVUE 


PRIX    DE    L'ABONNEMENT: 

Départements,  Belgique  et  SuïHau....    ;tO  n       id. 

Étranger.. ...    34  -»       id. 

Le  Journal  parait  le  Dlmirncbe. 


GAZETTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


Non  abonnés  reçoivent,  avec  te  numéro  d'aujoard'hnl, 
la  Méèttre  de  liA  PÉRICHOL.B  (pour  cbant  et  piano), 
dite  par  nile  Scbnelder  dans  lo  nouvel  opéra 
d'Of  fenbacb . 


SOMAIAIRE.  —  Etudes  biographiques  et  critiques  (2e  article),  par  Km. 
Mathieu  de  Uonter.  —  Tliéâtre  impérial  italien  :  la  Contessina,  Maria, 
Don  Pasqiiale,  par  Elias  de  Ranze. —  Théâtre  des  Fantaisies-Parisiennes: 
le  Soldat  malijré  lui,  opéra-comique  en  deux  actes,  paroles  de  MM.  Duru  et 
Chivot,  musique  de  F.  Barbier.  —  Concerts  populaires  de  musique  classique  au 
cirque  Napoléon,  réouverture ,  par  Cliarles  Bannelier.  —  Entrefilets  :  la 
Périchole.  —  L'Hymne  de  Riego,  par  Arthur  Peui^in.  —  Nouvelles  des 
théâtres  lyriques.  —  Nouvelles  diverses.  —  Annonces. 


ETUDES  BIOGRAPHIQUES  ET  CRITIQUES. 
I. 

Stepben  Heller. 

(2«  article)  (1). 

L'œuvre  d'Heller  renferme  tous  les  genres.  11  a  coulé  le  métal 
pur  et  sonore  de  son  inspiration  dans  les  moules  les  plus  con- 
trastés de  la  composition  musicale,  en  les  frappant,  toutefois,  à 
son  effigie. 

Dans  ses  Sonates,  ses  Scherzo,  ses  Nocturnes,  par  l'élévation  et 
la  distinction  de  la  pensée  méTodique,  il  se  rapproche  des  plus 
beaux  modèles  classiques.  Le  maître  en  l'art  difficile  d'écrire  pour 
le  piano  se  révèle  dans  ses  Etudes,  son  Caprice  caractéristique  sur 
deux  thèmes  de  Mendelssohn,  son  Allégro  -pastorale,  Saltarello,  sa 
transcription  si  remarquable  des  mélodies  de  Schubert.  Le  virtuose 
«  s'affirme  »  avec  un  éclat  incontestable  dans  ses  grandes  Etudes 
de  concert. 

Tandis  que  le  fantastique  s'approprie  la  lutte  de    démons  et 

(i)  Voir  le  n°  i2. 


d'anges  dédiée  à  M.  L.  "Wertheim,  ainsi  que  la  Ballade,  le  Conte 
et  la  Rêverie  du  Gondolier,  écrits  pour  Vincent  Adier,  la  fantaisie 
revendique  ces  Impromptus,  ces  Feuillets  d'Album,  ces  Arabesques, 
ces  Préludes,  délicieux  tableaux  de  genre  peints  avec  un  soin  ex- 
quis, niellures  florentines,  ciselures  du  plus  délicieux  effet.  Cin- 
quante mesures  tout  au  plus  :  une  ombre  qui  passe,  une  vapeur 
azurée  qui  s'élève,  un  feu  follet  qui  danse,  s'éteint  et  ricane  plus 
loin.  Ah!  quel  art  exquis  et  pénétrant!  Quelle  jouissance  intime 
on  éprouve  à  se  délecter  ainsi  de  pensées  originales  traduites  avec 
une  élégance  discrète  el  lumineuse.  Comme  Heller  rompt  alors  en 
visière  au  solennel  et  devient  élégant,  éloquent  et  simple! 

Dans  les  Nuits  Blanches  (quatre  livres  contenant  dix-huit  sui- 
tes chacun)  Heller  laisse  vagabonder  son  imagination  et  courir 
sa  plume.  C'est  bien  là,  n'est-ce  pas,  l'improvisation  dans  son 
allure  la  plus  naturelle  ?  A  quelque  page  que  vous  ouvriez  le  recueil, 
vous  êtes  assuré  d'y  trouver  un  sentiment  original  qui  se  gravera 
d'autant  mieux  en  votre  souvenir  qu'il  semble  inconscient  de  lui- 
même,  sans  apprêts  artistiques?  Ne  vous  y  fiez  pas  toutefois.  L'art 
ici  se  dissimule  au  point  de  laisser  croire  que  le  naturel  parle 
seul. 

La  Sérénade  (op.  §6),  la  Berceuse,  —  deux  merveilles,  —  nous 
montrent  Heller  sous  son  jour  le  plus  poétique  et  le  plus  roma- 
nesque. Il  y  a  là  de  quoi  transporter  l'auditoire  le  plus  indifférent, 
vaincre  l'opposition  la  plus  systématique.  L'émouvante  mélodie  de 
ses  Valses  semble  faite  de  larmes  et  de  sourires  ;  la  note  joyeuse 
y  succède  à  l'accent  mélancolique  ;  les  soupirs  interrompent  le 
rhythme  à  la  fois  languissant  et  brusque.  Est-ce  la  plainte  de 
la  douleur  ou  l'appel  du  plaisir?  Bercé  par  elles,  on  se  prend 
à  penser  à  des  amours  brisés.  Je  ne  sais  rien  de  plus  vrai  d'ex- 
pression et  de  couleur  que  ses  Lieder,  et  parmi  eux  surtout  le 
Chant  du  Chasseur,  l'Adieu  du  Soldat,  Prés  d'un  berceau,  etc.  La 
mélodie  de  ces  petites  pièces  se  perd  un  peu,  toutefois,  dans  la 
somptuosité  du  tissu  harmonique.  Pour  des  chants  populaires,  c'est 
parfois  trop  de  chamarrures.  Et  ce  Sonnet  (op.  81,  Préludes),  ce 
tendre  et  douloureux  petit  sonnet,  dont  on  retrouve  comme  l'écho 
affaibli  dans  la  suite  3  du  1"  livre  des  ISuits  Bla7iches,qvie  ne  don- 
nerais-je  pas  pour  lui,  d'insipides  arrangements  et  de  variations 
prétentieuses  !  J'en  dirais  tout  autant  des  Scènes  italiennes,  de  la  Ta- 
rentelle, de  la  Vénitienne,  des  Cansonettes,  des  quatre  Phantaisie- 


338 


ItËVUE  ET  (iAZETTE  MUSICALE 


Slu'xke,  compositions  musicales  littéraires,  en  ce  sens  qu'elles  ont 
une  couleur,  une  date,  une  scène  histonques  nettement  déterminées, 
qu'elles  ont  été  évidemment  conçues  et  écrites  sous  l'impicssiondc 
lectures  qu'il  serait  facile  de  préciser. 

Je  touche  raainleuant  au  côté  véritablement  caractéristique  du 
talent  ciéateur  d'fleller,  à  cequi  lui  appartient  bien  en  proprect  ne 
saurait  disi)araître  :  ses  Promenades  d'un-  Solitaire  et  ses  Révries 
dans  1rs  Bois.  Oui,  il  s'est  laissé  pénétrer  à  la  nature,  il  s'est  iden- 
tifié avec  elle  et  la  vertu  bienfaisante  des  forêts,  des  champs,  des 
flots,  a  tourné  si's  méditations  eu  transports  mélodiques.  Celte 
fusion  des  impressions  calmes  <Ju  monde  agreste  avec  certaines 
aspirations  orageuses  de  son  cœur  a  engendré  chez  lui  une  dis- 
position d'âme  qu'il  s'est  efforcé  de  retenir  longtemps  et  qu'il  a 
voulu  Utef  ensuite  d'une  manière  durable.  Au  lever  du  soleil,  ou 
quand  la  nuit  s'éclaire  mollement  An  feu  doux,  de  ses  grandes 
étoiles,  longtenips  il  a  marché  devant  lui,  regardant  le  ciel,  admi- 
rant les  lignes  vaporeuses  de  l'horizon,  respirant  les  parfums 
sylvestres  des  clairières,  dans  cet  état  de  somnambulisme  mental 
où  l'on  songe  que  l'on  est  quelque  chose  dans  l'immensité,  tout 
en  oubliant  que  l'on  n'est  qu'un  atome  dans  l'inlini. 

De  ces  «  promenades»  dans  les  bois,  ce  «  solitaire»  a  rapporté 
sept  livies  de  Souvenirs  et  de  Rêveries  qui  condensent  bien  réelle- 
ment son  individualité  arlisticjue.  S'il  m'était  loisible  d'en  décrire 
([uelques  fragments,  je  recomuianderais  aux  artistes  le  n"  3  du  2"'° 
livre,  (lui  débute  par  un  choral  imposant  :  chant  des  druides  cueil- 
lant le  gui  sacré;  la  4''  rêverie  du  même  livre,  chevauchée  guer- 
rière et  chevaleresque,  évoquant  sous  les  seules  ombreuses  châte- 
laines et  pages,  sires  et  varlets,  hommes  d'armes  et  fauconniers;  — 
la  suite  n'S,  livre  Ilf,  est  une  plainte  amoureuse,  toute  vibrante  d'ar- 
deur contenue,  qui  s'exhale  dans  un  |)aysage  matinal  de  printemps; 
—  mais  le  poète  attardé  a  vu  passer  la  chasse  infernale  (suite  G)  : 
les  trompes  sonnent  un  furieux,  hallali,  le  galop  démoniaque  des 
chevaux  se  ande  des  abois  stridents  ,  un  vent  d'orage  tord  les 
arbres  de  la  foiêt;  on  reste,  le  morceau  tei'miné,  sous  nue  impression 
étrange  d'anxiété  ;  —  le  linale  est  un  hymne  de  reconnaissance  ù 
l'Eternel,  tiaduisant  merveilleusement  l'admiration  religieuse  qu'ins- 
pire riioireur  sacrée  des  bois;  une  fanfare  bruissant  à  travers  les 
branches  interrompt  la  prière,  ([ui  reprend  avec  une  majesté  plus 
grande  encore.  L'empreinte  du  génie  est  là,  indiscutable,  saisis- 
sante. 

Sur  les  aspects  changeants  de  la  nature,  que  de  pages  délicieuses 
écrites  par  Heller!  On  ne  peut  les  lire  quelque  temps  sans  en 
avoir  l'âme  toute  remplie  et  comme  tapissée,  ou  pour  mieux  dire 
armée  et  revêtue.  De  même  que  Méry  a  deviné  et  décrit  l'Inde 
sans  y  avoir  jamais  été,  Stephen  Heller  a  le  sentiment  inné  des 
steppes  et  des  solitudes  vierges.  Il  est  sorti  vainqueur  de  cette  tra- 
duction musicale  des  impressions  que  peut  faire  naître, dans  une  ima- 
gination ardente  et  réiléchie,  le  paysage,  cette  partie  de  l'art  réservée 
entre  toutes  et  qui  ne'révèle  ses  charmes  qu'aux  initiés.  Oui  !  pour 
sentir,  pour  célébrer  ainsi  le  charme  de  l'aube  ou  du  crépuscuLe 
dans  les  grau  Js  bois,  le  frémissement  du  ruisseau  qui  coule  sous 
les  saules,  pour  percevoir  les  harmonies  à  la  fois  secrètes  et  pré- 
sentes de  la  nature,  il  faut  être  plus  qu'un  homme,  il  faut  être  un 
poète  ! 

« 
*  * 

Pourquoi  sommes-nous   ainsi  faits,    en  France  et  ailleurs,  que 

lorsqu'un  homme  distingué  et  de  valeur  n'est  pas  entré  à  un  cei- 

tiin  jour  dans  le  courant  de   la  vogue   et  dans  le    train  habituel 

de  l'admir.iiion  publique,  nous  devenions  si  sujet  à  le  négliger  et 

à  le  méconnaître?  Au  contraire,  ceux  qui  sont  une  fois  connus, 

adoptés  par  l'opinion  et  par  la   renommée,  nous    les  avons    sans 

cesse  à  la  bouche  et  nous  les  accablons  de  couronnes. 


Stephen  Heller  n'est  pas  entré  et  ne  pouvaitpas  entrer,  en  raison 
de  son  habitude,  de  son  tempérament,  de  son  sentiment  même, 
dans  ce  courant  de  la  vogue.  Sa  réputation  artistique  est  considé- 
rable, mais  il  ne  jouit  pas  de  la  popularité  et  l'avenir  seul  le 
rendra  célèbre.  Dieu  ne  paie  pas  ses  ouvriers  de  génie  tous  les 
soirs,  mais   chacun  finit  bien  par  recevoir  le  prix  de  ses  œuvres. 

Heller  est  de  ceux,  et  ils  sont  rares,  qui  ont  eu,  ([ui  ont  le  cou- 
rage de  retirer,— qu'on  mepasse  l'expression, — de  la  circulation  artis- 
tique l'idée  et  la  forme  conventionnelles  de  la  Beauté  abstraite,  une 
idole  !  forme  et  idée  auxquelles  se  rattachent  indissolublement  tant 
de  fausses  conceptions,  pour  mettre  à  leur  place,  comme  le  voulait 
Gœthe,  la  Vérité  dans  son  sens  général,  mais  idéalisé.  A  ce  compte, 
et  à  remonter  de  tels  courants,  on  ne  devient  pas  aisément  po- 
pulaire. 

Par  l'ondoyai.'te  et  diverse  poésie  de  sa  nature,  par  l'activité  et 
renlhousiasme  de  son  sentiment  qui  excelle  à  placer  le  grand  et  le 
beau  dans  l'exiguïté  de  la  dimension,  par  ses  aptitudes  si  com- 
])lexes  do  composition,  avec  cet  ensemble  de  qualités  rares  et  aussi 
de  légers  défauls  qui  ont  Uni  par  les  assaisonner,  Heller  demeure 
hors  ligne,  et  il  se  présente  dans  l'histoire  musicale  contemporaine 
à  titre  de  personnalité  unique,  en  la  compagnie  de  Chopin,  de 
Scliumann  et  de  Berlioz. 

Posséder  la  faculté  de  création  et  non  pas  seulement  l'outrecui- 
dant décal([ue  du  génie  des  autres;  avoir  du  talent  et  non  pas  seu- 
lement des  muscles;  de  la  puissance,  mais  aussi  de  la  délicatesse; 
la  verve  qui  remue,  mais  aussi  l'inspiration  qui  émeut;  porter 
du  charme  même  dans  ce  que  l'on  approfondit  et  de  la  grâce 
dans  ce  que  l'on  rêve,  c'est  être  véritablement  novateur,  cela,  c'es' 
mériter,  ù  tous  les  titres,  en  attendant  l'enthousiasme  de  la  pos- 
térité, les  honneurs  souverains  de  la  Biographie  et  de  la  Critique. 
Em.  Mathieu  DE  MONTER. 


THÉÂTRE  IMPERIAL  ITALIEN. 


liii  ContcBsina.  —  Ilarta.  —  Don  Pasqaale. 

L'opéra  du  prince  Poniatowski  n'est  pas  de  ceux  qui  réunissent 
e  mérite  h  ce  qu'on  est  convenu  d'appeler  «  la  chance.  »  Ce  ne 
sont  certes  pas  les  ([ualilés  qui  lui  manquent  :  il  est  bien  conçu, 
bien  écrit,  bien  orchestré,  gai  et  spirituel  sans  tomber  dans  le 
bouffon;  riche  en  mélodies,  élégant,  distingué;  il  a  un  finale  ma- 
gistralement agencé,  un  quatuor  sans  accompagnement,  de  toute 
beauté  ;  une  chanson  pour  contralto  avec  le  chœur,  qui  est  une 
trouvaille,  et  surtout  des  pages  simplement  instrumentales  que 
le  meilleur  harmoniste  serait  fier  de  signer,  —  et  cependant, 
malgré  le  succès,  on  ne  le  voit  pas  souvent  sur  l'affiche.  Comme 
la  Contessina  dont  elle  porte  le  nom,  elle  ne  parvient  pas  à  en 
obtenir  le  titre.  Le  diadème  aux  boules  perlées  semble  s'éloigner 
de  son  front  ;  pourquoi?  Mystère. 

La  Contessina  eut  le  tort,  la  première  fois,  de  paraître  tout  à 
la  fin  de  la  saison;  on  ne  put  la  jouer  que  deux  fois  avant  la 
clôture.  Encore  dût-on  ajouter  deux  ou  trois  jours  à  la  durée  ha- 
bituelle de  la  saison  théâtrale  pour  pouvoir  donner  la  deuxième 
représentation. 

Cette  fois  on  la  repi'end,  et  la  reprise  a  lieu  un  dimanche, 
c'est-à-dire  en  représentation  extraordinaire.  Eu  outre,  le  rôle  le 
plus  important,  celui  de  la  jeune  fille,  de  la  Contessina,  est  rempli 
par  une  débutante,  qu'on  a  pu  applaudir  dans  Crispino  e  la  Co- 
mare,  mais  qui  ne  saui'ait  soutenir  le  poids  d'un  rôle  pour  lequel 
le  talent  expérimenté  de  Mme  Tiberini  était  à  peine  suffisant,  et 
que  seule  Mme  Patti  aborderait  avec  succès. 


DE  PAIUS. 


339 


Certes  ce  n'est  pas  pour  Être  sévère  envers  la  jeune  artiste,  dont 
nous  avons  ici  même  encouragé  les  débuts  dans  Crispino,  mais  on 
ne  saurait  se  dissimuler  que  si  l'exécution  a  boîte  un  peu,  ça  été  du 
côté  de  la  cantatrice.  En  vain  Fraschini,  qui  s'est  réelleniout  sur- 
passé dimanche  dernier,  a-t-il  déployé  son  admirable  talent,  il  n'a 
pu  entièrement  sauver  les  morceaux  où  il  chante  avec  le  soprano. 
Ajoutons,  à  ce  sujet,  qu'on  a  entendu  dimanche  un  air  de  lénor 
que  M.  Tiberini  avait  retranché  aux  deux  représentations  de  la 
saison  dernière,  et  qui  a  valu  à  M.  Fraschini  des  applaudissements 
unanimes  et  des  rappels. 

Un  air  bouffe  avait  été,  de  même,  enlevé  par  M.  Scalese  ;  cette 
fois  M.  Ciampi,  qui  est  excellent  sous  le  costume  de  Ser  Abbondio, 
l'a  rétabli  ;  l'air  a  été,  cette  fois  aussi,  enlevé,  mais  dans  un  autre 
sens.  C'est  en  effet  un  modèle  de  musique  bouffe  et  l'artiste  l'a  dit 
avec  le  brio  et  la  verve  que  vous  lui  connaissez. 

M.  Verger  et  Mlle  Grossi  ont  gardé  leurs  rôles,  et  tous  les  deux 
ont  recueilli  les  plus  vifs  applaudissements.  On  a  redemandé  à 
Mlle  Grossi  la  chanson  de  Rita  la  blonde  au  troisième  acte. 

Enfin,  Mlle  Urban,  qui  mime  avec  tant  de  goût,  de  grâce,  d'in- 
telligence et  d'expression  le  rôle  muet  de  Stella,  a  vu  se  confir- 
mer le  succès  qu'elle  avait  obtenu  à  la  saison  dernière.  Cette  jeune 
artiste  a  pour  elle  la  beauté,  le  talent,  la  distinction,  le  sentiment 
dramatique; — elle  a  maintenant  les  sympathies  du  public.  Nous 
espérons  qu'elle  ne  s'en  tiendra  pas  au  seul  rôle  de  Stella. 

—Mardi,  Mme  Patti,  qui  ne  se  repose  que  le  dimanche,  selon  le 
précepte,  a  reparu  dans  Marta.  La  salle  était  comble,  comme  vous 
le  pensez  bien  I  Les  autres  rôles  étaient  remplis  par  Mme  Grossi , 
Fraschini,  Ciampi  et  Agnesi;  aussi  l'exécution  a-t-elle  été  parfaite. 
La  ravissante  romance  de  la  Rose,  ce  joyau  mélodique,  et  le  beau 
quatuor  du  rouet  ont  été  redemandés.  Mme  Patti  allume,  dans  ce 
dernier  morceau ,  un  petit  feu  d'artifice  de  notes,  qui  vous  éblouit 
comme  le  bouquet  de  la  fin.  Il  n'y  a  qu'elle  pour  ces  tours  de 
force-là  ! 

Chacun  a  eu  sa  part  de  succès,  chacun  a  été  applaudi  ou  rap- 
pelé. La  basse  Agnesi  a  dit  d'une  façon  remarquable  sa  chanson 
à  boire. 

M.  de  Flotovv  était  dans  la  salle.  Il  a  dû  être  très-satisfait  de  la 
manière  dont  les  artistes  du  théâtre  Italien  ont  interprété  sa  belle 
partition.  Celle-ci  réunit  un  grand  mérite  à  une  chance  heureuse  : 
au  théâtre  Lyrique  Martha  était  Mlle  Niisson,  au  théâtre  Italien 
Marta  est  Mme  Patti.  La  beauté  du  rôle  et  le  talent  des  canta- 
trices y  marchent  de  pair. 

Jeudi,  Don  Pasquale ,  avec  Mme  Patti...  toujours!  (heureuse- 
ment) et  avec  Verger,  Ciampi  et  le  jeune  ténor  Palermi.  Ce  dernier, 
qui  s'était  révélé  dans  Crispino,  qui  avait  un  peu  faibli  dans 
il  Barbiere,  s'est  raffermi  dans  Don  Pasquale.  Décidément  c'est  une 
bonne  acquisition  que  M.  Bagier  a  faite  en  lui. 

Verger  a  chanté  tout  son  rôle  en  véritable  artiste,  surtout  la 
fameuse  romance: 

Bella  siccome  un  angelo, 

qu'il  a  soupirée  â  ilevr  de  lèvres  et  avec  toute  la  grâce  qu'elle 
exige. 

Le  rôle  de  Don  Pasquale  est  un  grand  écueil  pour  les  basses 
comiques.  On  leur  oppose  toujours  le  souvenir  écrasant  (je  sou- 
ligne à  dessein)  de  Lablache.  Zucchini,  cependant,  s'en  tirait  assez 
bien.  Ciampi,  même  dépourvu  de  Vampleur  physique,  y  met  tant 
de  bonhomie,  tant  de  talent  comique,  qu'il  en  fait  un  de  ses  plus 
beaux  rôles.  N'oublions  pas,  surtout,  qu'il  chante,  ce  qui  est  assez 
rare  chez  les  basses  comiques. 

Et  Mme  Patti?  Eh,  mon  Dieu!  que  voulez-vous  que  j'en  dise? 
Quel  que  soit    l'opéra  dans    lequel    elle    paraisse,    on    dit  :    C'est 


celui  là  qu'elle  devrait  chanter  de  préférence. — Toujours  le  rôle 
dans  lequel  on  l'entend  est  son  meilleur  rôle! 

Nous  ne  lui  trouvons  qu'un  tort  :  elle  nous  force  à  nous  répéter. 
C'est  très-peu  aimable  de  sa  part! 

Elias  de  RAUZE. 


THEATRE  DES  FANTAISIES-PARISIENNES. 

liE  SiOI.iDA'r  HIALGnÉ  I.VI, 

Opéra-comiqve  en  deux  actes,  paroles  de  MM.  Duru  et  Chivot, 
musique  de  M.  Fhédébic  Barbier. 

(Première  représentation  le  17  octobre  1808.) 

Les  auteurs  de  Fleur  de  Thé  viennent  d'ajouter  un  titre  nouveau 
à  la  liste  des  succès  qu'ils  obtiennent  depuis  quelque  temps  sur 
les  nombreuses  scènes  où  fleurit  l'opérette.  Leur  dernière  pièce 
n'est  pourtant  pas  une  bouffonnerie  à  la  hauteur  de  l'Ile  de  Tuli- 
patan.  C'est  un  opéra-comique  taillé  sur  le  patron  de  ceux  qui 
se  jouent  ù  la  salle  Favart,  et  où  l'on  rencontre  une  certaine  dose 
de  gaieté,  mêlée  à  une  dose  égale  d'intérêt  doux  et  calme. 

Nous  sommes  dans  un  duché  allemand,  dont  le  souverain  n'est 
pas  sans  quelque  point  de  ressemblance  avec  le  roi  de  Prusse 
Frédéric-Guillaume,  qui  avait  la  manie  d'enlever  à  leurs  champs, 
et  même  à  ceux  de  ses  voisins,  tous  les  beaux  hommes  qu'il 
jugeait  propres  à  orner  les  cadres  de  son  i"  régiment  des  gardes. 
Or,  le  prince  eu  question,  voyageant  incognito,  s'arrête  dans  une 
ferme,  et  y  avise  un  garçon  de  bonne  mine,  sur  lequel  il  jette 
immédiatement  son  dévolu.  Mais  Christophe  n'a  aucun  goût  pour 
l'état  militaire  ;  il  préfère  les  joies  paisibles  du  ménage,  et  il  serait 
l'homme  le  plus  heureux  du  globe,  si  la  fermière,  Mme  Edwige, 
consentait  à  le  prendre  pour  mari.  Précisément,  Mme  Edwige,  de 
son  côté,  se  dit  qu'elle  ne  pourrait  faire  un  meilleur  choix  que 
son  garçon  de  ferme.  11  ne  s'agit  que  de  s'entendre,  et  la  chose 
est  bientôt  faite.  Tout  irait  pour  le  mieux,  si  le  grand-duc  ne 
venait  se  mettre  à  la  traverse  de  ces  amoureux  projets.  Ne  pou- 
vant décider  Christophe  à  entrer  dans  ses  gardes,  il  le  fait  arrêter 
par  un  vieux  major,  esclave  de  la  consigne,  et  lui  donne  pour 
prison  une  caserne  du  voisinage. 

Là,  ce  pauvre  Christophe  est  bien  forcé  de  faire  l'apprentissage 
du  métier  de  soldat  ;  mais  il  ne  s'y  prête  qu'à  contre-cœur,  et  il 
se  promet  bien  de  lasser  la  patience  du  grand-duc,  en  faisant 
preuve  d'une  inaptitude  et  d'un  mauvais  vouloir  exemplaires;  il 
va  même  jusqu'à  se  sauver  de  la  caserne  pour  rejoindre  Mlle  Ed- 
wige. Mais,  par  une  chance  bizarre,  et,  il  faut  le  dire,  très-ori- 
ginale, chacune  de  ses  escapades,  au  lieu  d'atteindre  le  but  qu'il 
se  propose,  est  prise  en  si  bonne  part,  qu'elle  lui  procure  de 
l'avancement  et  rive  par  conséquent  sa  chaîne  d'une  manière  plus 
solide. 

Le  grand- duc  se  garde  bien  de  lui  rendre  sa  liberté,  et  même, 
pour  adoucir  ses  regrets,  il  prend  la  résolution  de  l'unir  à  celle 
qu'il  aime.  Dans  cette  intention,  il  va  trouver  la  fermière,  qui  ne 
le  connaît  pas,  et  il  la  prie  de  porter  au  major  une  lettre  cachetée 
dont  il  ne  lui  révèle  pas  le  contenu.  Mme  Edwige  consent  par 
politesse,  mais,  le  grand-duc  parti,  elle  a  des  scrupules,  et,  ne 
voulant  pas  se  risquer  dans  une  caserne,  elle  charge  une  grosse 
servante  de  la  commission  qu'elle  a  acceptée.  Avons-nous  besoin 
d'ajouter  que  ladite  lettre,  adressée  au  major,  contient  l'ordre 
formel  de  marier  sur-le-champ  la  femme  qui  la  lui  apportera  au 
soldat  Christophe?  L'anecdote  est  bien  connue;  elle  ligure  aussi 
à  l'actif  du  roi  Frédéric-Guillaume,  et  elle  a  fourni  le  prétexte  de 
plus  d'un  vaudeville.  Dans  la  tradition,  le  mariage  a  lieu  entre  le 


340 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


sol'l.'t  aux  gardes  et  une  vieille  femme,  bien  laide  et  bien  ridée. 
Aux  Fantaisies-Parisiennes,  comme  il  faut  que  tout  finisse  bien, 
le  grand-duc  arrive  à  temps  pour  empêcher  la  méprise,  et  Chris- 
loplie,  rendu  à  sa  première  existence,  épouse  la  fermière  Edwige. 

Sur  cet  amusant  canevas,  M.  Frédéric  Barbier  a  brodé  une  par- 
tition qui  n'est  certes  pas  sans  mérite.  Ce  jeune  compositeur  a  des 
qualités  recolles  d'harmoniste  ;  il  manie  très-bien  l'orchestre  ;  il 
entend  la  scène;  son  dessin  est  correct  et  son  style  agréable. 
Nous  ne  lui  ferons  qu'un  reproclie,  c'est  de  trop  sacrifier  à  l'effet, 
quand  cet  effet  n'est  pas  en  proportion  avec  la  scène  modeste  sur 
laquelle  il  se  produit.  Ainsi  les  chœurs  et  le  finale  du  premier  acte 
gagneraient  beaucoup  à  être  exécutés  dans  un  local  plus  vaste.  A 
cela  près,  nous  devons  constater  que  plusieurs  morceaux  ont  été 
parfaitement  accueillis  et  méritaient  de  l'être.  Nous  citerons  d'abord 
l'ouverture  qui  repose  presque  entièrement  sur  un  fort  joli  motif 
exécuté  par  le  cor  d'harmonie;  un  air  d'entrée  pour  basse  chan- 
tante, écrit  avec  beaucoup  de  verve  ;  une  tyrolienne  chantée  par  la 
fermière  et  les  couplets  bouffes  du  vieux  major,  qui  ont  été  rede- 
mandés ;  enfin,  une  jolie  romance  pour  ténor. 

Le  rôle  d'Edwige  est  bien  joué  et  bien  chanté  par  Mlle  Flachat, 
une  nouvelle  recrue  de  M.  Martinet,  qui  s'est  placée  tout  d'abord 
au  premier  rang.  Mme  Decroix  est  excellente  dans  le  rôle  de 
Catherine.  Quant  au  personnage  du  soldat  malgré  lui,  il  est  fort 
convenablement  interprété  par  Gabriel  Bonnet.  Nous  avons  eu  déjà 
occasion  de  remarquer  Soto  dans  le  Bartholo  du  Barbier  de  Sé- 
viUe;  il  a  droit  à  une  mention  nouvelle  pour  la  manière  dont  il 
joue  le  vieux  major.  Enfin,  Davoust,  qui  vient  de  l'Opéra-Comiciue, 
représente  dignement  le  grand-duc. 

D.-A.-D. 


CONCERTS  POPULAIRES  DE  HDSIQUE    CLASSIQUE 

AU    CIRQUE    NAPOLÉON. 

BéonTerture. 

(8'  année.) 

Le  mot  vogue  porte  en  lui  l'idée  d'instabilité  et  d'inconstance  ; 
nous  voudrions  pouvoir  lui  ôter  ce  caractère  pour  l'appliquer  à  la 
grande  et  salutaire  entreprise  des  Concerts  populaires,  qui  a  tou- 
jours rencontré  plus  que  ce  qu'on  est  convenu  d'appeler  le  succès, 
et  dont  l'existence,  grâce  à  l'infatigable  activité  et  au  grand  sens 
artistique  du  fondateur,  est  aujourd'hui  plus  solide  que  jamais. 
M.  Pasdeloup  a  édifié  sur  le  roc,  et  dès  le  premier  jour,  avec  une 
hardiesse  et  un  bonheur  incomparables  ;  viennent  maintenant  les 
orages!  Il  est  aventureux,  mais  les  grains  ne  l'elfi-aient  pas;  nous 
ne  voudrions  môme  pas  affirmer  qu'ils  lui  fussent  absolument  dé- 
sagréables. 

Dimanche  dernier,  par  exemple,  il  savait  parfaitement  qu'il 
s'exposait  à  une  vraie  tempête  en  mettant  sur  son  programme  des 
fragments  des  Maîtres  Chanteurs  de  Richard  Wagner;  aussi  ces 
fragments  terminaient-ils  le  concert,  pour  laisser  toute  latitude 
aux  enthousiastes  (juand  même  et  aux  opposants  systématiques, 
qui  s'en  sont  donné  à  cœur  joie  cinq  minutes  dm-ant,  tandis  qu'on 
évacuait  la  salle. 

Les  trois  morceaux  des  Maîtres  Chanteurs  sont  empruntés  au 
troisième  acte:  c'est  le  prélude  ou  entracte,  la  valse  et  la  mar- 
che des  Mailres.  Le  prélude,  qui  vise  à  l'élévation,  est  fort  ambi- 
tieux, et  rien  de  plus;  il  débute  par  une  phrase  de  sept  mesures 
sans  caractère,  confiée  aux  violoncelles  seuls.  Ce  thème,  qui  n'est 
pas  un  thème,  puisque  ce  qui  suit  n'en  est  pas  le  développement, 
on  en  cherche  vainement  la  signification  et  la  raison.  Plus  loin, 
on  écoute  de  toutes  ses  forces,  mais  sans  comprendre.  Çà  et  là  un 


éclair  perce  la  nue  et  répand  dans  ces  ténèbres  une  vive  lueur, 
aussitôt  évanouie.  Il  nous  a  toujours  paru  fort  difficile  de  s'iden- 
tifier avec  la  pensée  d'un  homme  qui  n'a  pas  été  claire  pour  lui  : 
cest  trop  souvept,  croyons-nous,  le  cas  pour  Wagner.  —  La  valse 
consiste  proprement  en  une  phrase  de  sept  mesures,  originale  et 
bien  trouvée  quoique  boiteuse,  et  promenée  successivement  dans 
divers  tons.  Elle  débute  par  un  trait  en  triolets  rapides  des  se- 
conds violons  seuls,  une  dégringolade  fortissimo  à  partir  du  sol  sur- 
aigu pendant  "sept  mesures.  Il  ne  faut  rien  moins  que  le  charme 
du  motif  qui  suit  pour  détruire  l'effet  vraiment  grotesque  de  celte 
entrée  en  matière.  —  Quant  à  la  marche,  qui  accompagne  l'en- 
trée des  Maîtres-chanteurs  et  qui  sert  de  premier  thème  à  l'ou- 
verture, c'est  un  des  morceaux  auxquels  Wagner  a  donné  le  plus 
d'importance  dans  sa  partition,  mais  c'est  un  morceau  manqué; 
le  début  seul  a  de  la  grandeur  et  de  l'éclat,  le  reste  est  défiguré 
par  d'affreuses  duretés  d'harmonie,  et  par  des  progressions  mal- 
habiles. Wagner,  évidemment,  ne  sait  pas  son  Sébastien  Bach.  — 
Le  tout  est  savamment  orchestré;  il  s'y  trouve  d'heureux  contras- 
tes de  sonorités  et  de  nuances.  Nous  avons  dit  l'accueil  final  que 
ces  fragments  avaient  reçu  du  public  :  le  prélude  a  été  écouté 
sans  protestation,  la  valse  avec  un  sentiment  de  plaisir  marqué, 
et  la  marche  a  provocjué  l'explosion  de  l'ouragan.  Du  reste,  dans 
ce  dernier  morceau,  qui  est  fort  difficile,  l'orchestre  n'a  pas  été 
parfaitement  sur  de  lui.  Le  prélude,  annoncé  de  nouveau  au  pro- 
gramme du  second  concert  (avec  la  par.i  phrase  méditât  ion  que  ne 
porte  point  la  partition),  gagnera  sans  doute  sous  ce  rappoi't  à 
une  seconde  exécution. 

La  belle  ouverture  de  Ituy-Blas  de  Mendelssohn,  qui  ouvrait  le 
concert,  la  symphonie  en  la  de  Beethoven,  un  andante  (bissé)  et 
un  menuet  de  Haydn,  qui  venaient  ensuite,  ont  été  salués,  comme 
d'habitude,  des  plus  cbaleureux  ;i|)[)laudissements.  Le  public  des 
Concerts  populaires  est  désormais  formé,  et  nous  ne  savons  si  le 
chef  d'orchestre  le  troquerait  contre  celui  du  Conservatoire,  mieux 
élevé  pourtant  et  dilettante  jusqu'au  bout  des  ongles. 

Une  ovation  bien  méritée  a  été  faite  à  M.  Pasdeloup  à  son  ar- 
rivée au  pupitre,  et  elle  s'est  répétée  à  la  fin  du  concert. 

Charles  BANNELIER. 


Aux  appréciations  des  principeux  organes  de  la  pi'csie  sur  la 
Périchole,  que  nous  donnions  dans  notre  dernier  numéro ,  nous 
ne  pouvons  nous  empêcher  d'ajouter  celle  de  M.  Paul  de  Saint- 
Victor,  le  brillant  courriériste  de  la  Liberté: 


u  Tout  ce  premier  acte  est  d'une  turbulence  réjouissante,  et  l'esprit 
de  M.  Meilhac  jette  de  fines  note.s  dans  son  brouhaha.  —  N'est-ce  pas 
une  fantaisie  voltairienne,  dans  Is  goût  des  épisodes  de  Candide,  que  ce 
Pérou  de  carton  au  milieu  duquel  se  prélasse  un  vice-roi  mystifié?  Of- 
fenbach  l'a  rempli  d'airs,  de  chœurs  et  de  rondes  à  faire  damner  tous 
les  alcades  des  Etpagnes  et  à  défrayer  toutes  les  sérénades  de  Paris. 
Cette  fois,  ce  n'est  plus  de  la  caricature  musicale,  mais  un  tableau  de 
genre  plein  de  couleur  et  d'esprit.  Le  musicien  reste  léger  dans  la 
charge,  élégant  dans  la  bouffonnerie:  se»  coq-à-I'âne  même  ont  des 
ailes.  —  Quelle  excellente  parodie  des  romances  de  carrefour  que  Pair 
de  l'Espagnole  et  la  jeune  Indienne  !  C'est  l'orgue  de  Barbarie  tourné  par 
un  musicien  qui  s'amuse.  Imaginez  encore  un  artiste  en  gaieté  retou- 
chant d'un  pinceau  moqueur  une  image  sentimentale  à  2  sous  de  la 
rue  Saint-Jacques,  avec  sa  légende  moitié  castillane  et  moitié  française. 
—  L'ariette  :  Ah  !  quel  dîner  je  viens  de  faire',  fer-ait  mousser  le  vm  dans 
les  verres.  Jlais  le  joyau  de  ce  premier  acte  est  une  lar-me.  Ce  n'est  pas 
la  Périchole,  c'est  Manon  elle-même  qui  devrait  chanter  ces  charmants 
couplets  de  la  Lettre,  mêlés  de  tristesse  et  de  malice  ,  où  circule  un 
sourire  perfide  et  attendri  tour  à  tour. 

»  Si  au  2"  acte,  l'esprit  des  auteurs  s'endort,  la  verve  du  musicien  reste 
éveillée  jusqu'au  bon  t. — Je  n'aime  guèr'e  les  couplets  de  Piquillo:  Les  femmes, 
il  n'y  a  que  ça  !  un  gros  refrain  de  café-concert,  fait  pour  être  rbytlimé 
par  le  bruit  des  chopes.  Kn  revanche,  rien  de  plus  drôle  et  de  plus  pi- 


DE  PARIS. 


341 


quant  que  l'ariette  cliantée  par  la  Périchole  :  Mon  Dieu,  que  les  hommes 
sont  bêlesl  Citons  encore  l'aubade  railleuse  des  dames  de  la  cour:  Eh\ 
bonjour.  Monsieur  le  mari,  qui  ferait  un  charmant  pondant  au  Bonsoir, 
Monsieur  Pantalon,  de  Grisar. 

»  La  PiVichole,  c'est  Mlle  Schneider,  qui  n'a  jamais  clé  plus  char- 
mante. , .  Son  originalité  est  surtout  dans  la  finesse  qu'elle  sait  donner 
au  couplet  risqué  et  au  mot  grivois.  Elle  gaze,  quand  elle  veut,  avec 
des  doigts  do  fée.  La  réticence  qui  glisse,  le  sous-entendu  qui  effleure, 
le  trait  retenu  qui  chatouille  malicieusement  les  coins  du  sourire,  ce 
sont  là  ses  grâces  et  ses  enchantements.  Il  y  a  de  la  chatte  métamor- 
phosée en  femme  dans  la  coquetterie  souple  et  leste  qu'elle  met  à  tra- 
verser certains  passages  scabreux  de  ses  rôles.  Cette  scène  d'ivresse  du 
premier  acte,  qui  rase  la  borne,  qui  frise  l'ivrognerie,  elle  la  joue  avec 
une  mesure,  une  réserve,  une  adres.se  exquises.  On  dirait  une  jolie  bo- 
hème faisant  tourner  au  bout  d'une  baguelle  un  verre  rempli,  sans 
qu'une  goutte  en  tombe.  —  11  faut  l'entendre  encore  chanter  sa  lettre  à 
Piquillo,  et  en  souligner  tous  les  fins  passages,  avec  un  accent  de  ten- 
dresse moqueuse  et  d'enjouement  triste.  C'est  à  la  fois  touchant  et  comi- 
que :  le  persiflage  y  borde  le  sanglot.  En  ce  momeni,  la  Périchole  a  la 
voix  et  le  cœur  de  Manon  Lescaut. 

«  Dupuis  est  toujours  comique  dans  ce  personnage  de  bellâtre  adoré, 
niais,  épanoui,  qui  est  l'uniforme  de  son  talent.  Grenier  fait  plaisam- 
ment ressortir  la  bonhomie  tyrannique  et  la  paillardise  hébétée  du  vieux 
vice-roi:  c'est  Schahabaham  amoureux.  Christian  est  drôle  en  homme 
sauvage  ;  mais  il  devrait  bien  mettre  une  sourdine  à  .son  organe  formi- 
dable. La  cascade  avec  lui  tourne  à  la  canonnade  :  on  croirait  entendre 
le  tonnerre  lâchant  des  lazzis.  » 


L'HYMNE  DE  BEGO 

Il  y  a  quelques  mois  à  peine,  Carjat,  notre  excellent  photogra- 
phe, organisait  chez  lui  une  petite  fête  dont  le  produit  était  des- 
tiné à  soulager  un  pauvre  artiste,  un  homme  d'honneur  et  de  ta- 
lent, qui,  après  avoir  connu  des  jours  heureux,  était  tombé  dans 
un  état  voisin  du  dénùment.  La  vie  de  cet  homme,  à  son  au- 
rore, promettait  d'être  brillante  :  entré  comme  cadet,  à  dix-sept 
ans,  dans  l'armée  espagnole,  doué  d'intelligence  et  pourvu  d'une 
bonne  instruction,  l'avenir  semblait  lui  sourire.  Le  sort  en  décida 
autrement,  et  proscrit,  chassé  de  son  pays,  il  se  lit  musicien  pour 
vivre.  Quoique  à  force  de  travail  il  eut  acquis  un  certain  talent, 
il  fut  loin,  comme  on  vient  de  le  voir,  de  parvenir  à  la  fortune. 

* 
*  * 

C'était  dans  les  premiers  jours  de  septembre  1820.  L"Espagne, 
cette  terre  classique  des  révolutions,  venait  de  se  soulever  contre 
Ferdinand  Vn,  et  deux  des  généraux  insurgés,  Riego  et  Quiroga, 
entraient  en  vainqueurs  à  Madrid,  obligeant  le  roi  à  octroyer  une 
constitution  à  son  peuple. 

L'effervescence  était  dans  tous  les  esprits,  l'émotion  populaire 
était  à  son  comble,  toute  l'Espagne  enfin  était  dans  une  sorte  d'eni- 
vrement facile  à  concevoir.  C'est  à  ce  moment  que  deux  hommes 
se  rencontrèrent  dans  une  môme  pensée,  celle  de  doter  leur  pays 
d'un  hymne  de  résurrection,  d'un  chant  patriotique  et  national. 
L'un  d'eux,  le  colonel  Evariste  San-Miguel,  ancien  officier  de  l'ar- 
mée de  Cadix  lors  du  soulèvement  de  1812,  ancien  rédacteur  du 
journal  VEspeclador,  «  tribun  et  poëte  en  même  temps  que  sol- 
dat, »  était  chef  d'état-major  de  Riego;  l'autre,  jeune  cadet  dans 
l'armée,  était  un  adolescent  de  dix-sept  ans,  ayant  un  peu  étudié 
la  musique,  et  s'appelait  Huerta. 

Tous  deux  associèrent  leur  inspiration,  et  dans  une  nuit  de 
fièvre  ils  enfant(>rent  un  chant  auquel  il  donnèrent  le  nom  du  li- 
bérateur, et  qu'ils  appelèrent  V Hymne  de  Riego  (ce  qui  n'est  pas 
de  tout  point  conforme  à  l'assertion  du  dictionnaire  Bouilkl,  qui 
prétend  que  cet  hymne  est  l'œuvre  du  général  Riego).  L'Espagne 
avait  trouvé  sa  Marseillaise,  et  huit  jours  après,  ce  chaut,  devenu 
rapidement  célèbre,  retentissait  dans  les  airs  d'un  bout  à  l'autre 
du  pays. 


Mais  on  sait  quels  turent  les  résultats  de  la  révolution  espa- 
gnole. En  1823,  grâce  à  l'appui  de  la  France,  elle  était  vaincue 
par  Ferdinand  VII,  et  celui-ci  se  vengeait,  Dieu  sait  comment, 
des  humiliations  qu'on  lui  avait  fait  subir.  Riego  était  pendu 
comme  un  malfaiteur,  Quiroga  se  réfugiait  en  Angleterre,  Evariste 
San-Miguel  s'en  allait  servir  sous  les  ordres  de  Mina,  et  son  col- 
laborateur, le  jeune  Huerta,  devait  s'estimer  heureux  de  pouvoir 
franchir  la  frontière  française.  C'est  ce  dernir  .seul  qui  nous  inté- 
resse. 

Parvenu  en  France,  il  y  fallait  vivre.  Huerta  |)0ssédait  une  jolie 
voix,  une  certaine  pratique  musicale;  il  vint  à  Paris,  se  fit  chan- 
teur et  y  obtint  de  grands  succès,  même  auprès  de  l'aristocratie, 
curieuse  de  voir,  d'entendre  et  de  connaître  le  jeune  auteur  du 
chant  national  de  l'Espagne.  Huerta  se  rendit  ensuite  en  Améri- 
que, mais  là,  atteint  d'une  affection  du  larynx,  il  perdit  complè- 
tement la  voix  et  fut  obligé  de  se  rejeter  sur  un  instrument.  Il 
choisit  la  guitare,  cet  instrument  démodé,  et  acquit  un  talent  tel 
qu'il  la  remit  presque  en  honneur  ,  et  se  fit  comme  guitariste  une 
énorme  réputation.  Huerta  est,  en  effet,  le  seul  guitariste  du 
monde,  et  plus  d'une  fois  les  colonnes  de  ce  journal  ont  enregis- 
tré ses  succès. 

Et  cependant,  après  nombre  d'aventures,  Huerta,  malgré  ces 
succès,  est  tombé,  on  l'a  vu,  dans  une  pauvreté  lamentable.  Son 
pays,  il  faut  l'espérer,  ne  le  laissera  pas  dans  cet  état  fâcheux.  La 
Révolution  espagnole,  dont  nous  n'avons  pas  à  parler  ici,  a  ra- 
vivé sa  popularité.  Un  demi-siècle  après  son  éclosion,  et  après 
avoir  été  interdit  pendant  tant  d'années,  l'Hymne  de  Riego  vient 
de  reprendre  son  essor.  L'Espagne  ne  peut  moins  faire  pour  son 
chantre  national,  pour  le  pauvre  Huerta,  devenu  vieux  et  mi- 
sérable, que  la  France  no  fit,  sous  Louis-Philippe,  pour  Rouget 
de  Lisle. 

-* 
*  * 

«  Dans  l'Hymne  de  Riego,  dit  une  notice  que  j'ai  sous  les  yeux, 

l'honneur  est  pour  le  musicien  plus  que  pour  le  poëte.  M.  Jacques 

Foule,  dans  son  Recueil  des  chants  nationaux  des  deux  mondes,  a 

publié  une  traduction  en  vers  français  des    vers    espagnols.  Cette 

traduction  est  insuffisante  à  donner  une   idée   du  mouvement  des 

stances  espagnoles.  En  voici,  d'ailleurs,  le  premier  couplet  ; 

Qu'une  noble  allégresse 
Sur  nos  fronts  apparaisse; 
Chantons  avec  ivresse 
Notre  hymne  audacieux. 
Que,  dans  sa  sympathie, 
Le  monde  entier  nous  crie  : 
Le  Cid,  race  aguerrie, 
Est  bien  de  vos  aïeux. 

»  Cette  traduction  est  assurément  fort  médiocre.  La  traduction 
en  prose  de  ce  même  couplet,  telle  que  l'a  donnée  M.  Audebrand 
dans  une  bonne  étude  publiée,  il  y  a  quelques  années,  sur  Huerta, 
rend  plus  exactement  la  pensée  du   poëte    espagnol  : 

»  Joyeux,  allègres,  pleins  d'audace,  chantons,  soldats,  l'hymne 
de  la  guerre  !  Que  la  terre  s'émeuve  à  nos  accents;  que  le  monde 
admire  en  nous  les  fils  du  Cid.  » 

Nous  citerons  encore  le  couplet  suivant  d'après  le  même  tra- 
ducteur ; 

i(  Soldats,  la  patrie  nous  appelle  au  combat.  Jurons  pour  elle 
de  vaincre  ou  de  mourir.  Jamais  le  inonde  ne  vit  plus  noble  au- 
dace; jamais  n'a  lui  un  jour  plus  grand  en  courage  que  celui  où 
nous  fûmes  embrasés  du  feu  qui  excitait  en  Riego  l'amour  de  la 
patrie.  » 

Le  refrain  est  très-énergique  : 

((  Qu'il   tremble,  qu'il    tremble,   le   méchant    (Que  tiembel  que 


342 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


tiembe!  que  tiembcl  el  malvolo...),  lorsqu'il  verra  briller  la  lance 
du  soldat.  » 

L'exemplaire  de  l'Hymne  de  liiego  que  j'ai  sous  les  yeux  n'est 
qu'une  simple  transcription  au  piano,  sans  paroles.  Il  est  fort 
difficile  de  porter,  dans  de  telles  conditions,  un  jugement  sur  une 
œuvre  de  ce  genre.  L'hymne  est  écrit  en  six-huit  ;  le  refrain  a  de 
l'accent,  une  certaine  fierté  d'allure,  et  ne  manque  pas  de  vigueur. 
Des  deux  phrases  qui  forment  sans  doute  la  mélodie  du  couplet, 
la  première  est  assez  vulgaire,  la  seconde  a  de  l'élan,  de  la  vi- 
gueur,  de  la  sonorité. 

Le  dessin  général  du  morceau  se  meut  dans  l'espace  d'une  neuvième  ; 
il  est  très-simple  et  facile  à  chanter,  qualité  indispensable  à  une 
production  destinée  à  devenir  populaire.  L'originalité  est  ce  qui 
me  semble  faire  le  plus  défaut  à  ce  chant,  qui  d'ailleurs  est  bien 
rhylhmé  et  dont  le  caractère  n'est  pas  sans  puissance. 

JVIais  c'est  dans  le  forum,  c'est  sur  la  place  publique  qu'il  faut 
entendre  un  hymne  national  pour  en  pouvoir  juger  et  en  détermi- 
ner le  vrai  caractère.  Il  faut  qu'il  soit  entonné  par  des  milliers  de 
voix,  et  soutenu  par  une  instrumentation  puissante  et  vigoureuse. 
Faute  de  ce,  je  me  garderai  déporter  ici  un  jugement  quelconque 
sur  l'Hymne  de  Riego,  et  me  bornerai  aux  courtes  observations  (pic 
je  viens  de  présenter  à  son  sujet. 

Arthur  POUGIN. 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 

,*»  La  représentation  extraordinaire  de  iAfrkaine  donnée  dimanche  à 
l'Opéra  avait,  comme  toujours,  attiré  une  grande  affluencc,  et  le  chef- 
d'œuvre,  parfaitement  interprété  par  l'élite  des  artistes,  a  produit  son 
effet  accoutumé.  —  Lundi,  on  a  joué  Hcrculanum.  œuvre  dans  laquelle 
Muies  Marie  Battu  et  Gueymard  chantent  en  perfection  les  rôles  de  Lilia 
et  d'Olympia.  —  Mercredi  HamUl  et  vendredi  la  Juive.  —  Deniaui,  De- 
voyod  chantera  pour  la  première  fois  le  rôle  de  Giiil-laume  dans  Guil- 
laume Tell. 

:),%  La  réouverture  du  théâtre  Lyrique  a  Vwu  |>ar  le  Val  d'Andorre,  au 
moment  où  nous  mettons  sous  pretse.— Mlle  Villrnic,  chargée  du  rôle  de 
Thérésa,  étant  subitement  tombée  malade,  la  représentation  courait  le 
risqui!  d'être  encore  retardée  si  M.  Pasdeloup  n'avait  eu  l'heureuse  idée 
de  s'adresser  aux  directeurs  du  théâtre  de  l'Opéra-Comique  pour  le  tirer 
d'embarras;  MM.  de  Lenven  et  Ritt,  faisant  acte  d'excellente  confrater- 
nité, se  sont  empressés  de  mettre  ii  sa  disposition,  jusqu'au  rétablisse- 
ment de  sa  pensionnaire,  Mlle  Révilly,  pour  chanter  ce  rôle  de  Thérésa 
dont  elle  a  été  la  créatrice.  —  Nous  rendrons  compte  dimanche  de  cette 
solennité.  —  Le  Val  (lAmlorrc  sera  d'ailleurs  joué  aujourd'hui  comme 
les  jours  de  semaine.  —  Nous  rappelons  qu'on  peut  se  procurer  des  billets 
peur  toutes  les  représentations  du  théâtre  Lyrique  chez  les  éditeurs  de 
musique  Brandus,  103,  rue  de  Richelieu,  Flaxland  et  Crus.  —  On 
annonce  pour  demain  la  reprise  de  Martha  avec  Mlle  Devrics. 

^"•^  On  a  repris  au  théâtre  des  Bouifes-Parisiens  les  Dâux  Aveugles,  ce 
premier  et  populaire  succès  d'Oftenbach.  Benhelier  y  reparaissait  dans 
le  rôle  de  Giraffler,  si  heureusement  créé  par  lui,  et  qui  fut  le  point  de 
départ  de  sa  réputation.  —  On  prépare  au  même  théâtre  une  éclatante 
reprise  des  fîarorrfs,  qui  précéderaient  un  acte  d'E.  Jouas  et  une  opérette 
bouffe  de  Léo  Delibes.  —  Désiré  va  faire  sa  rentrée  dans  Jean  qui  pleure 
et  Jean  qui  rit.  — Enfin  on  a  lu  aux  artistes  une  pièce  en  deux  actes  de 
M.  de  Najac,  musique  de  Dcffès.  On  voit  que  ce  n'est  pas  l'activité  qui 
manque  k  la  nouvelle  direction,  et  elle  en  est  d'ailleurs  récompensée  par- 
l'affluence  du  public. 

..  *^  Le  théâtre  des  Variétés  encaisse  tous  les  soirs  i,800  à  5,000  francs 
avec  la  Périchote.  Le  beau  monde  en  a  promptement  pris  la  route,  et 
nombreux  sont  les  équipages  de  luxe  qui  stationnent  à  onze  heures  de- 
vant le  passage  des  Panoramas.  —  Les  fils  du  vice-roi  d'Egypte,  avec 
leur  service  d'honneur,  assistaient  à  l'une  des  représentations  de  celte 
semaine,  et  l'on  y  remarquait  le  maréchal  Canrobert,  M.  Auber,  M.  de 
Narischkin,  etc.  —  Atin  de  prévenir  un  empêchement,  tous  les  rôles  ont 
été  étudiés  en  double  et  sont  sus  par   les  suppléants. 

^*»  Nous  sommes  heureux  de  pouvoir  complètement  démentir  aujour- 
d'hui le  bruit  qui  avait  couru  de  la  mort  de  Mme  Rose  Bell,  en  Amé- 
rique, bruit  auquel  nous  n'avions  ajouté  qu'une  foi  médiocre. — A  la  date 
du  30  septembre  dernier,  l'excellente  artiste  écrivait  de  New-York  qu'elle 
était  en  parfaite  santé  et  qu'elle  devait  débuter  le  5  octobre,  cl  en  effet 
son   début  a  eu  lieu  ce  jour-là   dans  la  Grjnde-Duchesse,   par   laquelle 


M.  Grau  a  ouvert  le  nouveau  théâtre  français.  La  salle  réunit  tous  le  s 
éléments  de  comfort  pour  l'espace  réservé  à  chaque  spectateur,  et  de  sé- 
curité pour  l'écoulement  rapide  du  public  en  cas  d'incendie. 

»%  La  Crnndc-Diichessc  a  conquis,  dès  le  premier  soir  de  ses  repré- 
sentations au  théâtre  de  Brest,  les  sympathies  dii  public.  M.  Dupin  et 
Mlle  Sézanne,  dans  les  deux  principaux  rôles,  ont  droit  à  tous  les  éloges 
pour  le  spirituel  entrain  de  leur  jeu,  la  fraîcheur  de  leur  voix  et  l'exac- 
titude de  leurs  costumes. 

,**  Comme  à  Nancy  récemment,  comme  partout,  du  reste,  les  Dra- 
gons de  Villars  viennent  d'être  revus  à  Strasbourg  en  provoquant  les  ap- 
plaudissements unanimes  du  public.  La  pièce  est  parfaitement  montée 
et  l'ensemble,  sur  lequel  se  détachent  Mme  Dupuy,  MM.  Rougé  et -Ge- 
nevois, est  excellent. 

**:,:  L'activité  déployée  à  Bordeaux  par  la  direction  Halanzier  ne  se 
dément  pas,  et  la  physionomie  du  Grand-Théâtre  présente  avec  celle  de 
l'année  dernière  un  contraste  saisissant.  Bonne  troupe,  études  suivies, 
répertoire  intéressant  et  varié,  exactitude,  toutes  les  branches  des  services 
régulièrement  a&surées,  voilà  ce  dont  il  y  a  lieu  de  féliciter  l'habile  ira- 
pre^sario.  Aussi  le  public  fréquente-t-il  assidûment  le  théâtre,  et  l'ère  des 
scènes  orageuses  et  des  désastres  financiers  paraît-elle  défînitivemeni 
conjurée. 

»*,^  Avant  de  partir  pour  Saint-Pétersbourg,  le  maestro  Ricci  a  lu 
avec  les  artistes  et  le  chef  d'orchestre  Constantin,  sa  partition  de  Mon- 
sieur Lapalisse.  Cette  lecture  a  produit  un  grand  effet.  —  La  pièce 
pourra  être  représentée   au   mois   de  janvier. 

»**  Le  poète  Ivvan  Turguenieff  écrit  en  ce  moment  un  nouveau  livret 
d'opéra  pour  Mme  Viardot.  Le  sujet  est  emprunté  aux  cycles  légen- 
daires du  Nord. 

»*,»  Fleur  de  Thé  va  être  jouée  au  théâtre  Michel,  à  Saint-Pétersbourg. 
—  L'opérette  bouffe  fait  son  chemin  en  Russie  ;  les  journaux  de  ce  pays 
annoncent  qu'on  y  traduit  en  langue  russe  Orphée  aux  Enfers  et  la  Belle 
Hélène,  pour  être  représentés  sur  le  théâtre  de  Kieff. 


REVUE  DES  THÉÂTRES. 


,*,j  Le  premier  tirage  des  airs  détachés  de  la  Périchole  a  été  enlevé  le 
jour  même  de  la  mise  en  vente.  —  La  partition  pour  piano  et  chant 
paraîtra  cette  semaine. 

»*at  Voici  le  programme  du  deuxième  concert  populaire  de  musique 
classique  qui  sera  donné  aujourd'hui  à  2  heures  au  cirque  Napoléon, 
sous  la  direction  de  J.  Pasdeloup  :  1»  .^«rucnsee,  tragédie  de  Michel  Béer, 
musique  de  Meyerbeer  (Ouverture.  —  L'auberge  du  village.  —  Le  Rêve 
de  Struensée  . —  Marche  funèbre.— La  Bénédiction.— Dernier  moment.); 
—  2°  fragment  de  la  symphonie  Wallenstein  (1"  audition),  de  M.  Jos. 
Rhi'inberger  ("Scherzo.  Le  camp. —  Chanson  des  Orangistes  du  temps  de 
la  réformation.  —  Sermon  du  capucin.);  —3°  symphonie  en  sol  mineur 
de  Mozart  (allegro.  —  Andaiite.  —  Menuet.  —  Finale.);  —  4°  entr'acte 
des  .Matins  Chanteurs  (méditation)  de  Richard  Vi'agner; —  5°  fragments 
du  septuor  de  Beethoven  (Thème  et  variations.  —  Scherzo,  finale),  exécu- 
tés par  MM.  Grisez  (clarinette),  Espeignei  (basson),  Mohr  (cor)  et  tous 
les  instruments  à  cordes. 

^*:i,  Le  concert  donné  vendredi  à  la  salle  Valentino,  et  qu'Arban  avait- 
appelé  Festival  Meyerbeer,  a  pleinement  justifié  cette  qualification  par 
l'intérêt  exceptionnel  du  programme,  par  l'habileté  qui  a  présidé  à  l'ar- 
rangement des  morceaux  el  par  l'excellence  de  l'exécution.  Aussi,  malgré 
un  bien  mauvais  temps,  un  public  nombreux,  un  public  d'amateurs —  à 
en  juger  par  sa  religieuse  attention, — se  pressait  dans  la  splendide  salle 
de  la  rue  Saint-Honoré,  et  couvrait  de  ses  applaudissements  la  3°  Marche 
aux  flambeaux,  les  airs  de  ballet  de  Ilobert  le  Diable,  la  marche  et  les 
airs  de  ballet  du  Prophète,  mais  particulièrement  les  belles  fantaisies 
d'Arban  avec  chœurs  sur  les  Huguenots  et  VÀfrieaine,  l'ouverture  de 
l' Étoile  du  Xord,  la  Polonaise  de  Struensée,  etc.  En  fait  de  solistes,  Arban, 
sur  un  air  varié  du  Crociato  pour  cornet  à  pistons,  a  soulevé  un  véritable 
enthousiasme,  et  l'on  a  fort  bien  accueilli  Mlle  de  Bannay,  qui  a  chanté 
avec  beaucoup  de  sentiment  et  une  belle  voix  l'air  de  «Grâce»  de  Robert 
et  très-dramatiquement  le  grand  air  du  Prophète. --Le  buste  de  Meyerbeer, 
placé  au  pied  de  l'astrade,  présidait  à  cette  solennité.  —  Arban  nous  pro- 
met pour  vendredi  le  Festival  Auber.  —  Il  nous  étonnerait  bien  que  la 
salle  Valentino  ne  devînt  pas,  cet  hiver,  le  rendez-vous  à  la  mode  de 
tous  les  amateurs  de  bonne  musique. 

^*^  Les  concerts  Ullmann  ont  à  peu  près  fait  le  tour  de  l'Europe.  En 
dernier  lieu,  Hambourg,  Copenhague,  Gothembourg,  Stockholm  ont  ap- 
plaudi la  pléiade  d'artistes  réunis  par  l'habile  imprésario:  Carlotta 
Patti,  Vieuxtemps,  Griitzmacher  et  Alf.  Jaëll.  Ce  dernier,  en  particulier, 
a  récolté  de  nombreuses  ovations;  des  bis  fréquents  lui  étaient  adressés, 
et  il  a  su  constanmient  tenir  son  auditoire  sous  le  charme  par  sa  bril- 
lante et  puissante  exécution.  Les  œuvres  de  Mendeissohn  ont  été  parti- 
culièrement goûtées  dans  le  nord  de  l'Europe.  —  Après   un   repos    de 


DE  PARIS 


dis. 


quelques  jours  à  Paris,  la  vaillante  petite  troupe  ira  visiter  la  Belgique. 
—  Carlotta  Patti  est  aussi  de  retour. 

***  L'éditeur  Heu  vient  de  mettre  en  vente  les  airs  détaches,  la  par- 
tition pour  piano  et  chant,  la  partition  pour  piano  seul  et  les  parties 
d'orchestre  de  l'Ile  de  Tulipatrin,  d'Offenbach,  qui  obtient  un  grand  suc- 
cès au  théâtre  des  Bouffes-Parisiens. 

^*.j.  Un  nouveau  journal  artistique  vient  de  paraître  à  Barcelone  avec 
ce  titre  original:  Corre,  vé  y  di  le  (Cours,  va  et  dis-lui...).  L'éditeur- 
propriétaire  est  M.  Eduardo  de  Canals,  littérateur  musical  bien  connu 
dan.s  cette  ville. 

:(,*,  Un  ouvrage  posthume  de  Moritz  Haiiptmann,  l'auteur  célèbre  de 
Natur  der  Harmonik  und  der  Melrik,  vient  de  paraître  à  Leipzig,  chez 
Breitkopf  et  Hœrtel;  il  est  intitulé  :  Die  Lehre  von  der  Harmonik. 

***  Depuis  longtemps  l'Orphéon  de  la  ville  de  Paris  et  les  Sociétés 
chorales  libres  de  la  capitale  espèrent,  sur  la  foi  d'un  projet  de  la  pré- 
fecture de  la  Seine,  avoir  une  salle  spéciale  pour  leurs  fêtes  et  leurs 
réunions  d'ensemble.  Si  les  renseignements  recueillis  par  le  Moniteur  de 
l'Orphéon  sont  exacts,  il  pourrait  bien  se  faire  que  les  travaux  de  cet 
édifice,  dont  les  proportions  .seront  réellement  monumentales,  fussent 
commencés  dans  un  avenir  très-prochain  sur  la  place  du  Château-d'Eau, 
à  l'angle  du  boulevard  Magenta. 

.j,**  Les  Sociétés  musicales  de  Grenoble  viennent  d'élire  comme  prési- 
dent d'honneur  M.  Jules  Monestier,  compositeur  dont  les  œuvres  nom- 
breuses et  brillantes  sont  aujourd'hui  populaires  dans  l'Orphéon  français. 
Un  charmant  bronze  d'art  a  été,  en  outre,  envoyé  avec  une  dédicace 
des  plus  flatteuses,  à  l'auteur  de  la  Gaule  romaine  et  de  la  Séparation 
des  Apôtres. 

»%  Dans  la  première  semainede novembre  s'ouvriront  rue  de  Méuars,  8,  les 
cours  d'instruction  et  de  musique  dirigés  depuis  quatre  ans  par  les  demoi- 
selles Couchonnal.  Cours  de  piano  par  M.  Delioux  ;  de  solfège  par  M.  Emile 
Durand;  d'accompagnement  par  BI.  Hamraer;  de  chant  par  Mme  Ra- 
baud-Dorus;  d'orgue  par  M.  Franck.— La  partie  scientifique  est  toujours 
dirigée  par  Mlle»  Couchonnal,  avec  le  concours  de  M.  Dupaigne,  pour 
les  sciences,  et  de  M.  Thiodon  pour  l'anglais. 

*%  M.  Adolphe  de  Groot  ouvrira,  le  mardi  3  novembre,  son  Cours 
d'harmonie  à  la  succursale  Pleyel,  Wolf  et  C'°,  95,  rue  de  Richelieu. 
Le  professeur  y  fera  l'explication  de  la  Théorie  des  Accords,  de  leur 
enchaînement,  etc.,  de  telle  façon  qu'au  bout  de  quelques  mois  ceux 
qui  suivront  cet  enseignement  pourront,  non-seulement  se  livrer  à  des 
essais  écrits,  mais  encore  à  des  préludes  improvisés,  exempts  de  ces 
fautes  qui  attestent  une  connaissance  insuffisante  des  lois  constitutives 
de  l'Harmonie. 

^%  L'excellent  pianiste  compositeur  W.  Kriiger  est  de  retour  à  Paris, 
et  il  s'est  remis  à  la  disposition  de  ses  nombreux  élèves. 

i*,^  La  réouverture  des  cours  de  chant  et  de  solfège  de  M.  Kœnig, 
artiste  de  l'Opéra,  aura  lieu,  à  partir  des  3  et  S  novembre ,  en  son  do- 
micile, 13,  rue  Neuve-Coq uenard. 

;j;**  Un  violoniste  et  compositeur  distingué,  M.  Antoine-Auguste  Bes- 
sems,  est  décédé  lundi,  à  l'âge  de  62  ans.  Ses  obsèques  ont  eu  lieu 
mercredi  au  milieu  d'un  grand  concours  d'artistes  et  de  gens  du  monde. 


sf*^  Les  grandes  fêtes  champêtres  du  Pré-Catelan  seront  clôturées  cette 
année  par  un  magnifique  Festival  militaire,  qui  promet  merveilles.  Pour 
la  première  fois,  les  SI"  et  62"  régiment  de  ligne  joueront  la  Pamola  et 
le  Cocoyer,  airs  mexicains  de  l'effet  le  plus  pittoresque.  Deux  retraites 
nouvelles  :  la  retraite  Espagnole,  et  la  retraite  des  Chasseurs  exécutées 
avec  300  tambours  ,  fifres  et  clairons  couronneront  le  Festival  d'au- 
jourd'hui, qui  marquera  comme  le  plus  brillant  dans  les  plaisirs  de 
l'été  1868. 


ET  R  A  N  G  E  R 

.^*,jii  Londres.  —  Le  concert  du  10  octobre,  au  Crystal  Palace,  offrait 
l'intérêt  de  plusieurs  nouveautés;  mais  on  leur  a  fait  un  accueil  peu 
encourageant,  sauf  au  fragment  de  l'opéra  de  Reinecke,  le  Roi  Manfred, 
qui  a  été  très-goùté.  La  marche  des  Maîtres  Chanteurs,  de  Wagner,  et 
une  scène  intitulée  Concert-.iria,  de  Hager,  ont  rencontré  de  l'indifl'é- 
rence,  et  même  de  l'hostilité.  Le  violoniste  Carrodus  a  été  très-applaudi 
dans  un  solo  de  Ernst.  —  La  reconstruction  du  théâtre  de  Sa  Majesté 
marche  rapidement;  on  compte  pouvoir  en  faire  l'inauguration  au  mois 
d'avril  prochain.  —  Une  utile  précaution  vient  d'être  prise  par  M.  Ma- 
pleson  pour  le  corps  de  ballet  de  son  théâtre  :  les  robes  des  danseuses 
seront  désormais  imprégnées  de  iungslate,  solution  C(iii  aura  la  propriété 
de  les  préserver  du  feu  et  de  leur  conserver  longtemps  leur  éclat  et  leur 
fraîcheur. 

,*^  Bade.  —  Sur  le  désir  exprès  de  S.  M.  le  roi  de  Prusse,  on  a 
donné,  le  li,  les  Huguenots,  avec  Mlle  Orgéni.  Cette  jeune  artiste,  qui 
s'est  vite  conquis  une  honorable  place  en  Allemagne  à  côté  des  Lucca 
et  des  Mur.ska,  a  joué  et  chanté  le  rôle  de  Valentine  de  façon  à  trans- 


porter son  public,  un  vrai  public  de  connaisseurs.  L'art  du  chant  n'a 
plus  de  secrets  pour  elle,  et  elle  est  devenue  en  peu  de  temps  une  ac- 
trice consommée;  l'expérience  des  planches  a  achevé  ce  qu'avait  com- ' 
mencé  l'admirable  enseignement  de  Mme  Pauline  Viardot.  Son  aristocra- 
tique auditoire  lui  a  prodigué  les  applaudissements,  les  rappels  et  les 
fleurs. 

^*^  Cologne.  —  Le  premier  concert  du  Giirzenich  est  fixé  au  20  octobre. 
—  MM.  Bcsekirsky,  le  violoniste  russe,  Camille  Saint-Saëns,  et  le  pia- 
niste Cari  Tausig  sont  engagés  pour  la  première  .série,  qui  se  termine 
à  Noël. 

«**  Leipzig.  —  Le  second  concert  du  Gewandhaus  a  eu  lieu  le  IS. 
M.  Camille  Saint-Saons,  qui  y  a  exécuté  son  concerto  de  piano  en  sol 
mineur,  a  été  mieux  accueilli  qu'au  précédent,  où  Perd.  David  avait 
joué  son  concertsitick  pour  violon.  On  a  surtout  applaudi  le  second  mor- 
ceau, un  charmant  allegro  scherzando.  Après  une  barcarolle  de  Chopin 
et  la  polonaise  op.  89  de  Beethoven,  rôminent  virtuose,  répondant  à- un 
rappel  du  public,  a  ajouté  au  programme  une  bourrée  de  S.  Bach.  — 
Mlle  Wilhelmine  Rilter,  de  Munich,  a  fort  bien  chanté  des  fragments  du 
rôle  de  Titus  de  Mozart  et  du  Mitrane  de  Russi. 

*%  Berlin.  —  On  a  repris  avec  succès  le  18,  à  l'Opéra,  VÉtoile  de 
Touran,  de  Richard  Wiierst,  avec  Pauline  Lucca  et  Nieniann.  —  Le 
théâtre  de  Friedrich-Wilhelmstadt  a  donné,  au  bénéfice  de  Mlle  Clara 
Ungar,  la  première  représentation  d'une  opérette-boufle  de  Rossenberger, 
Ariane  à  Maxos.  Tout  le  talent  des  acteurs  n'a  pas  réussi  à  sauver  cette 
nouvelle  liurleske  d'un  naufrage  complet.  —  Ant.  Rubinstein  commencera 
cette  année  par  Berhn  ses  voyages  artistiques;  il  annonce  un  concert  à 
la  Singacademie  dans  les  premiers  jours  de  novembre. 

,:**  Vienne.  —  L'Orphéon  viennois  (Mîennergesangverein),  dirigé  par 
Herbeck,  vient  de  fêter  avec  beaucoup  d'éclat  son  premier  jufcjte,  ou  le 
vingt-cinquième  anniversaire  de  sa  fondation.  L'intérêt  artistique  de  cette 
solennité  se  concentrait  sur  le  festival  du  11  octobre,  qui  a  été  vraiment 
splendide.  Celte  admirable  Société  a  exécuté  awc  un  ensemble,  une 
justesse  et  une  entente  des  nuances  peu  communes,  même  en  Alle- 
magne, des  œuvres  de  Liszt  (18=  psaume);  Schubert  (quintette  de  l'opéra 
le  Comte  de  Gleichen);  Mendelssohn,  Schumann,  Fr.  Lachner  (qui  a  di- 
rigé lui-même  son  chœur  Abendfriede) ,  Herbeck,  Weiawurm,  etc.  L'em- 
pereur, deux  archiducs,  les  ministres,  plusieurs  généraux,  le  corps  mu- 
nicipal viennois  étaient  présents.  Les  Sociétés  chorales  allemandes  de 
New-York  avaient  envoyé  des  députés.  —  La  cérémonie  de  l'inauguration 
du  monument  à  la  mémoire  de  Schubert  a  eu  lieu  le  lendemain  12  oc- 
tobre; la  Société  a  clianté  le  chœur  de  ce  maître  inunortel,  la  Nuit. 
Les  autorités  municipales  présidaient  la  fête.  Des  discours  ont  été  pro- 
noncés, et  le  tout  s'est  terminé  par  un  grand  concert  vocal  auquel  ont 
assisté  trois  mille  personnes. 

^%  Prague.  —  Au  théâtre  tchèque,  on  a  donné  la  première  représen- 
tation d'un  opéra  en  cinq  actes  du  second  chef  d'orchestre  Schebor,  inti- 
tulé la  Fiancée  hussite.  Cet  ouvrage,  où  l'auteur  a  fait  preuve  d'un  véri- 
table talent,  a  beaucoup  plu  au  public. 

^%  Milan.  —  La  direction  de  la  Scala  n'a  donné  qu'une  des  six  re- 
présentations qu'elle  se  proposait  d'offrir  à  S.  M.  l'impératrice  de  Rus- 
sie; Mme  Ferni,  malade,  n'a  pu  aller  plus  loin,  et  c'est  à  peine  si  elle 
a  trouvé  la  force  de  chanter  une  fois  Norma,  où  cependant  elle  a  été 
chaleureusement  applaudie,  ainsi  que  Pancani. 

^*^  Florence.  —  On  répète  à  la  Pergola  le  Prophète,  qui  sera  prêt  à 
être  représenté  à  la  fin  du  mois.  —  Au  théâtre  Niccolini,  l'imprésario 
Meynadier  monte  la  Grande-Duchesse;  le  principal  rôle  est  réservé  à 
Mlle  Borghèse,  dont  Milan  se  souvient  avec  plaisir. 

^''^  Bologne,  -r  Le  nouveau  Barbiere  de  Dali'  Agine  sera  exécuté 
par  la  Contarini,  le  ténor  Marin,  le  baryton  Sparapani,  la  basse  Mare 
et  le  buffo  Mattioli  Alessandrini. 

^*^  Madrid.  — On  a  dû  reprendre,  le  20,  l'Africaine  avec  Mlle  Reboux, 
Tamberlick  et  Boccolini.  Nous  en  reparlerons. 

^*^  Borcetone.— Voici  les  éléments  de  la  troupe  italienne  du  Liceo  : 
Mmes  Giovannoni-Zacchi,  Federici,  Antonioli,  Alemani,  soprani;  Rossi- 
Lana,  contralto;  MM.  Steger,  Garibay,  Bicchielli,  ténors;  Squarcia,  Mauro- 
Zacchi,  barytons;  Derivis,  Marchetti,  "Vives,  Cancellotti,  basses.  —  La 
saison  a  été  inaugurée  le  15  avec  Guillaume-Tell,  chanté  par  Steger, 
Squarcia  et  Mme  Ruggero-Antonioli. 


s.  UUFOUR. 


Maestro     E.     IMCUZZO, 

Maestro  di  bel  canto. 
S'adresser  pour  les  leçons  :  rue  de  Luxembourg,  5,  au  i" 


344 


RKVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE  DE  PAKIS. 


EN    VENTE 
Chez  BRANDUS  et  DUFOUR,  éditeurs,  103,  rue  de  Richelieu. 


OPÉRA-BOUFFE   EN   DEUX    ACTES, 


Paroles  de  MM.  Henri  Meilhac  et  Ludovic  Halévy, 

Musique  de 

J.    OFFENBAGH 

rODVERTORE.  ARRANGÉE  POUR  EE  PIANO 
Les  Airs  de  Chant  délachés  avec  accompagnement  de  Piano 


ACTE    l". 

1 .  Chanson  des  trois  cousines,   chantée   par  Mlles  Le- 

P'aiid,   Carlin  et    Renault  :   Promptes  à  serrir  la 
pratique S     « 

2.  Couplets  DE  l'incognito,  ctiaiités par  M.  Grenier:  Sans 

en  rien  soxifjler  à  personne 3     » 

3.  L'Espagnol  et  la  jeune  Indienne,  complainte,  chan- 

tée par  Mlle  Schneider  et  M.  Dupuis  :  Le  conqué- 
rant dit  à  la  jeune  Indienne 4  50 

3  bis.  La  même,  à  une  voix   et  transposée  un  ton  et  demi 

au-dessous 4    « 

4.  Le  Muletier  et  la  jeune  personne,  séguedille    pour 

SOIRÉES,  chantée   par  Mlle  Schneider  et  M.   Du- 
puis :  Vous  a-t-on  dit  souvent  :  Ecoulez-moi,  la  pile    o     » 

5.  La  Lettre  de  la  Périchole,  chantée  par  Mlle  Schnei- 

der :  O  mon  cher  amant,  je  te  jure 3  "S 

5  his    La  même,  transposée  un  ton  au-dessus 3  "5 

6.  Griserie-Ariette,  chantée  par  Mlle  Schneider  :  Ah! 

quel  diner  je  viens  de  faire 3     » 

6  his.  La  même,  transposée  un  ton  au-dessus 3     » 

7.  Duetto  DU  mariage,    chanté   par    Mlle    Schneider   et 

M.  Dupuis  :  Je  dois  vous  prévenir.   Madame  ...     6    » 


50 


3 


acte  II. 

8.  Cancans-Couplets,  chantés  par  Mlles  Julia,  Benard, 

GiM\  ier  et  Lalour  :  On  vante  partout  son  sourire  . 

9.  Les  femmes,  il    n'y    a    qu'ça!  couplets,    chantés  par 

M.  Dupuis  :  Et   là,  maintenant  que   nous  sommes 
seuls 

9  his.  Les  mêmes,  transposés  un  ton  et  demi  au-dessous  . 

10.  Que  les  hommes  sont  bêtes!  couplets,  chantés  par 

Mlle  Schneider  :   Que  veulent  dire  ces  colères  ?     . 

10  bis.  Les  mêmes,  transposés  un  ton  au-dessus 3     » 

11.  La    présentation,  rondo    de    bravoure  ,    chanté  par 

M.  Dupuis:  Ecoule,  6  roi!  je  te  présente 3  75 

l'a.  Ronde  des  maris  ré...,  chantée  par  M.  Grenier:  Con- 
duisez-le, bon  courtisan 3     » 

13.  Duo  DES  BIJOUX,  chanté  par  Mlle  Schneider  et  M.  Gre- 

nier :  Monniciir  le  marchand,  qu'avez-vous.    ...     7  50 
13  his.  Extase,    chantée    par   Mlle    Schneider:  Ah\   que 

j'nime  (es  diamants 3     » 

14.  Final-Séguedille,  chantée  par  Mlle  Schneider  et  M. 

Dupuis  :    Un  roi,    se  promenant,   trouva   certaine 
femme 4    » 


Les  Airs  de  Chant  sans  accompagnement,  format  in-8°,  chaque  net,  50  c, 


Fantaisie  brillante  pour  le  Piano  par  E.  Ketterer 

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QUADRILLE    PAR     ARBAN.  — =—  GRANDE    VALSE     PAR 

Polka  par  Roques  et  Strauss.     —     Polka-Mazurka  par  Lindheim 


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REVUE 


l''  Novembre  1868. 


PRIX    DE    L'ABONNEMENT: 

Départements,  Belgique  et  Suisso 30  m       il. 

Étranger 34»       idl. 

Le  Journal  parait  le  Dimanche . 


GAZETTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


SOMMAIRE.  —  Théâtre  Lyrique  iiDpérial:  Réouverture,  par  Armand  Croa- 
zleu .  —  Théâtre  des  Folies-Dramatiques  :  Chilpéric,  opéra-bouffe  en  trois  actes 
paroles  et  musique  de  M.  Heré.  —  Léon  Kreutzer  (1"  article),  par  Ai-thur 
Paulin.  —  Ministère  de  la  maison  de  l'Empereur  et  des  beaux-arts,  diiec- 
tion  générale  des  théâtres,  avis.  —  Revue  de»  théâtres,  par  O.  A.  II. 
Nniiii-VieN.  —  Nouvelles  des  théâtres  lyriques.  —  Nouvelles  diverses.  — 
Annonces. 


THEATRE  LYRIQUE  IMPERIAL. 

Rëoiiverture. 

Le  théâtre  Lyrique  a  enfin  rouvert  ses  portes.  Ce  n'a  pas  été 
sans  secousses,  on  le  sait,  et  c'est  une  épopée  aussi  compliquée 
qu'instructive  que  celle  «  de  la  mort  et  de  la  résurrection  d'un 
théâtre  sérieux  en  l'an  d'opérette  1868.  »  Aujourd'hui  que  cette 
épopée,  dont  les  journaux  ont  publié  des  fragments  plus  ou  moins 
authentiques,  —  en  prenant  des  airs  plus  ou  moins  renseignés, 
—  est  à  peu  près  oubliée ,  quelques-uns  en  attaquent  le  dénoû- 
ment  et  le  trouvent  insuffisant  et  banal.  Tant  de  bruit,  disent-ils, 
pour  en  arriver  au  Val  d'Andorre  et  à  Martha,  une  pâle  reprise 
d'une  pâle  partition  et  un  opéra  usé  par  la  précédente  direction. 
Il  faudrait,  ce  nous  semble,  être  moins  sévère  et  plus  juste,  et  ne 
point  regarder  comme  définitif  un  résultat  que  nous  trouvons  fort 

extraordinaire,  pour  avoir  été  presque  improvisé. 

Tout  était  à  refaire,  en  effet,  dans  ce  théâtre  que  semblait  ha- 
biter la  mauvaise  chance  ;  il  fallait  infuser  un  sang  artistique 
nouveau  dans  les  veines  de  cette  malheureuse  scène  moribonde, 
et,  en  quelques  mois,  y  ramener  la  vie.  Eh  bien  !  la  vie  est  re- 
venue, mais  (pour  continuer  cette  vieille  comparaison)  il  serait 
injuste  d'exiger  des  prodiges  de  force  d'un  convalescent. 

Que  les  impatients  se  rassurent,  le  nouveau  directeur  connaît 
et  pratique  l'éternel  précepte  du  sage  :((le  temps  n'épargne  pas  ce 
qui  se  fait  sans  lui. »M.  Pasdeloup  marche  prudemment  et  prépare 
.sûrement  l'avenir  décisif  de  sa  difficile  entreprise.  Nous  ne  nous 
défendons  pas  d'une  très-vive  sympathie  pour  le  fondateur  des 
concerts  populaires,  qui  n'a  pas  voulu  abandonner  l'œuvre  com- 
mencée, et  qui  trouve  dans  son  exubérante  activité  le  moyen  de 


mener  de  front  ses  concerts  classiques,  sa  direction  d'une  divi- 
sion de  l'Orphéon  de  la  ville,  et  de  guider  vers  un  but  longue- 
ment médité  son  entreprise  théâtrale,  ouvrant  à  la  fois  au  public 
les  trois  portes  du  temple  :  la  symphonie,  l'opéra  et  le  chant 
choral  populaire. 

Ce  qu'il  a  obtenu  jusqu'ici  au  théâtre  Lyrique  est  bien  fait 
pour  justifier  les  sympathies  acquises  à  son  labeur;  en  quelques 
mois,  il  a  créé  une  de  ces  troupes  d'ensemble  qui  n'existent  plus 
depuis  que  le  système  des  étoiles  a  ruiné  les  directeurs  et  détruit 
l'homogénéité  d'exécution.  Il  a  fait  ce  qui  a  consolidé  le  succès 
dans  un  de  nos  théâtres  de  comédie  :  il  a  créé  un  Gymnase  lyrique. 
De  même  que  la  main  expérimentée  de  M.  Montigny  touche  à  tout 
et  remet  chaque  artiste  à  son  plan,  au  profit  d'une  interprétation 
d'ensemble,  celle  de  M.  Pasdeloup  s'est  tantôt  posée  sur  le  clavier 
durépétiteur,  tantôt  elle  a  pris  l'archetdu  chef  d'orchestre,  en  mettant 
ensuite  à  sa  place  normale  chaque  chanteur  pour  arriver  aune  fusion 
complète.  Cela  se  sent  jusque  dans  les  plus  minces  détails  d'exé- 
cution, et  c'est  là  un  de  ces  tours  de  force  dont  il  faut  bien  tenir 
compte  à  un  directeur  qui  a  eu  tant  de  difficultés  à  surmonter. 

Deux  soeurs,  dont  l'une  avait  fait  une  apparition  du  temps  de 
M.  Carvalho,  au  théâtre  Lyrique,  toutes  deux  élèves  de  Duprez, 
Mlles  Devriès,  se  sont  fait  apprécier  du  public  dans  les  rôles  de 
Martha  et  de  Rose  de  Mai,  par  des  qualités  différentes. 

L'une  d'elles,  l'aînée,  croyons-nous,  a  fort  convenablement  chanté 
le  rôle  de  Martha,  qui  fut,  sur  cette  même  scène,  une  des  bonnes 
créations  de  Mlle  Nilsson  ;  ce  qui  lui  manque,  c'est  une  voix  égale 
ne  se  brisant  pas  à  chaque  changement  d'octave  ;  ce  qui  lui  nuit, 
c'est  une  certaine  insuffisance  de  la  respiration  qui  donne  à  sa 
voix  quelque  chose  de  haletant,  surtout  dans  les  andante.  Ainsi, 
dans  la  «romance  de  la  Rose)>  oîi  il  est  de  tradition  de  lier  la  fin  de 
la  première  phrase  à  la  reprise  du  début,  on  s'apercevait  de  cette 
difficulté  à  la  première  note  mal  assurée  de  la  reprise  ;  ce  que  cette 
artiste  possède,  c'est  un  sentiment  très-délicat  et  très-distingué, 
qui  saura  se  montrer  avec  plus  d'avantages  encore,  lorque  la  fai- 
blesse d'une  nature  à  peine  développée  aura  été  vaincue. 

Mlle  Fidès  Devriès  a  débuté  dans  un  rôle  qu'elle  a  appris ,  dit- 
on,  avec  une  extrême  rapidité  et  une  facilité  qui  fait  l'éloge  de  ses 
qualités  de  musicienne,  et  ce  rôle  n'est  pas  précisément  celui  de 
l'emploi  qu'elle  est  appelée  à  tenir,  quand  l'autorité  du  talent  l'aura 


346 


REVUE  ET  GAZEITE  MUSICALE 


classcie  à  son  véritable  rang.  Ce  rôle,  qui  fut  écrit  pour  Mlle  Darcier, 
est  plutôt  un  rôle  de  comédienne  qu'un  rôle  de  chanteuse,  et  la 
jeune  artiste  y  a  fait  preuve  de  beaucoup  d'intelligence;  un  peu 
trop  de  zèle  parfois  donne  ;\  son  jeu  une  exagération  qui  n'est  pas 
favorable  à  sa  beauté  régulière,  et  à  ses  gestes  saccadés  une  gau- 
cherie que  fait  encore  ressortir  la  distinction  naturelle  de  l'attitude. 
Ce  sont  L\  défauts  de  débutante  encore  intimidée  et  qui  essaie, 
par  ces  mouvements  un  peu  déréglés,  de  détourner  son  émotion; 
l'assurance  viendra ,  et  M.  Pasdeloup  pourra ,  croyons-nous ,  tirer 
un  excellent  parti  de  sa  nouvelle  pensionnaire. 

M.  Monjauze  s'est  acquitté  de  son  rôle  avec  son  talent  ordi- 
naire. 

Lutz  avait  déjà  fait  ses  preuves  devant  le  publie  du  théâtre  Ly- 
rique; mais  le  rôle  de  Jacques  Sincère, —  l'un  des  plus  beaux  fleu- 
rons de  la  couronne  de  Baltaille,  —  était  une  lourde  t-âche.  Sous  le 
rapport  de  la  voix,  il  s'en  est  tiré  à  son  honneur,  mais  il  laisse  à 
désirer  comme  comédien. — M.  Bosquin  joue  et  chante  avec  cons- 
cience, et  la  main  dirigeante  dont  nous  parlions  l'a  placé 
à  son  vrai  plan.  Mlle  Daram  fait  des  progrès,  elle  rendra  de 
grands  services;  c'est  une  artiste  sur  laquelle  on  peut  compter. 
— Dans  les  rôles  où  il  faut  un  peu  de  chant  et  d'habitude  scénique , 
Mlle  Ducasse  sera  fort  utile.  —  Qui  ne  se  rappelle  Jourdan  dans  le 
rôle  de  Saturnin?  M.  Verdellet  s'y  montre  bien  insuffisant  et  ne 
fait  pas  oublier  son  devancier. 

Enfin  nous  avors  retrouvé  la  bonne  et  joyeuse  figure  du  compère 
Meillet,  un  précieux  et  sympathique  chanteur,  qui  est  aussi  un 
fort  amusant  comédien  plein  de  rondeur  et  de  bonhomie. —  A  pas 
mal  d'années  de  distance,  malheureusement,  3Ime  Révilly,  gra- 
cieusement prêtée  par  l'Opéra-Comique ,  a  repris  ce  rôle  de  Thé- 
résa,  l'une  de  ses  bonnes  créations,  et  s'y  est  montrée  l'excellente 
artiste  que  nous  connaissons. 

Ce  n'est  pas  pour  diminuer  d'autant  le  mérite  du  nouveau  chef 
d'orchestre,  mais  on  sent  que  «  l'entraîneur,  »  si  l'on  peut  em- 
ployer ce  mot  spécial,  a  été  celui  des  concerts  populaires;  il  est  le 
commandant  en  chef  qui  a  tracé  le  plan  de  la  bataille.  M.  Mangin 
est  le  général  qui  a  gagné  la  victoire. 

En  un  mot,  il  y  a  beaucoup  à  attendre  de  cette  troupe  et  de  cet 
orchestre  d'ensenible,  et  nous  croyons  les  beaux  temps  du  théâtre 
Lyrique  enfin  revenus.  L'art  en  profitera. 

Armand  GOUZIEN. 


ÏHÉÀTBE  DES  FOUES-DBÂIÂTIQDES. 

CHULPÉRIC, 

Opéra-bouffe  en  trois  actes,  paroles  et  mmiquc  de  M.  Hervé. 

(Première  représentation  le  2i  octobre  1868.) 

S'il  est  des  circonstances  où  il  soit  vrai  que  la  critique  perd  ses 
droits,  c'est  à  coup  sûr  lorsqu'il  s'agit  de  ces  pièces  qui  sont  en 
dehors  de  toutes  les  règles  reçues ,  comme  l'Œil  crevé  ou  Chil- 
péric.  Il  faut  les  accepter  les  yeux  fermés,  et  attendre  tranquille- 
ment l'arrêt  du  public,  sans  essayer  de  le  lui  dicter.  Les  spectateurs 
lettrés  des  premières  représentations  sont  en  cette  matière  des 
juges  d'une  incompétence  reconnue,  et  il  se  passera  encore  du 
temps  avant  qu'ils  puissent  faire  ployer  leur  raison  sous  le  joug 
de  ces  capricieuses  fantaisies,  ennemies-nées  de  la  logique  et  du 
sens  commun.  Le  monde  des  oisifs  est  moins  susceptible  ;  pourvu 
qu'on  lui  arrache,  n'importe  à  quel  prix,  un  bon  gros  éclat  de 
rire,  il  est  satisfait,  et  comme,  en  définitive,  c'est  pour  ce  monde 


là  surtout  qu'on  fait  les  pièces,  s'il  est  content,  le  but  est  atteint. 
On  nous  permettra  néanmoins  d'avoir  notre  opinion  personnelle 
sur  la  dernière  œuvre  d'Hervé,  et  de  trouver  qu'elle  n'a,  à  cer- 
tains égards,  ni  l'imprévu  excentrique,  ni  l'insanité  originale  de 
l'Œil  crevé:  Cela  vient  peut-être  de  ce  que,  selon  nous,  les  faits 
de  l'Histoire  de  France  se  prêtent  difficilement  à  une  parodie  irré- 
vérencieuse qui  n'a  aucune  portée  avec  des  personnages  de  con- 
vention. Est-ce  que  Voltaire  lui-même  n'a  pas  échoué  dans  son 
indigne  travestissement  de  la  vierge  de  Domrémy?  On  a  beau 
faire,  il  n'est  pas  aisé  d'exploiter,  sous  forme  de  facéties,  les  som- 
bres aventures  de  ce  Mérovingien  continuellement  en  échange  de 
trahisons  avec  ses  frères,  et  de  sa  maîtresse  Frédégonde  montant 
au  trône  sur  le  cadavre  de  la  reine,  sa  rivale.  Cela  manque  de 
gaieté,  et  nous  ne  comprenons  pas  le  choix  d'un  pareil  sujet  quand 
on  n'a  qu'à  se  baisser  pcTnr  en  prendre  un  autre. 

C'est  ce  qui  explique,  toujours  selon  nous,  l'embarras  de  l'au- 
teur dans  la  première  partie  de  sa  pièce,  dont  le  début  rappelle 
celui  de  Norma_,  et  n'a  pas  l'air  d'être  la  préface  d'un  opéra 
bouffon.  Après  tout,  c'est  peut-être  un  calcul  pour  faire  ressoitir, 
par  l'effet  du  contraste,  la  suite  de  l'action.  Quelques  détails  co- 
miques égaient  cependant  cette  exposition ,  et  nous  remarquerons 
en  passant  qu'ils  sont  empruntés  au  règne  animal.  Chilpéric  fait 
son  entrée  et  chante  sa  première  cavatine  sur  un  superbe  cheval 
blanc  ;  le  médecin  de  la  cour  chevauche  à  sa  suite  sur  une  bour- 
rique noire,,  et  de  la  carnassière  d'un  grand  officier  s'échappe  un 
cliat  roux.  A  travers  cette  oUa  podrida  de  quadrupèdes,  Chilpéric 
rencontre  Frédégonde  dans  une  forêt  consacrée  au  culte  des 
druides:  il  en  tombe  amoureux  et  l'emmène  au  palais. 

Au  deuxième  acte,  Galsuinthe  arrive  d'Espagne  pour  épouser 
Chilpéric,  et  ce  monarque  volage  met  à  la  porte  Frédégonde,  qui 
opère  son  déménagement  dans  une  voiture  à  bras  poussée  par  le 
docteur  Ricin.  Pour  le  coup,  nous  revoilà  en  pleine  fantaisie,  et 
le  bénéfice  de  l'acte  des  druides  se  fait  sentir,  comme  nous  l'avions 
prévu,  par  opposition. 

Se  charge  ensuite  qui  voudra  d'éclaircir  les  impénétrables  mys- 
tères de  la  chambre  nuptiale.  Qu'on  n'attende  pas  de  nous  ce  tour 
de  force.  Nous  sommes  comme  le  docteur  Ricin  qui,  métamorphosé 
tout  à  coup  en  guerrier,  ne  veut  pas  même  qu'on  lui  demande 
comment  il  se  fait  que,  dans  l'espace  de  cinq  minutes,  il  ait  pu  se 
passer  tant  de  choses.  Si  on  les  comprenait,  elles  ne  seraient  plus 
drôles. 

Faisons  maintenant  à  Hervé  la  part  du  musicien  ;  elle  est  claire, 
celle-là,  et  nous  ne  craignons  pas  de  nous  y  tromper.  On  retrouve 
dans  cette  nouvelle  partition  les  qualités  principales  qui  le  distin- 
guent. Seulement,  ainsi  que  nous  le  disions  au  début,  soit  qu'il 
ait  voulu  montrer  qu'au  besoin  il  écrirait  de  la  musique  sérieuse, 
soit  qu'il  ait  voulu  mettre  en  relief  les  morceaux  du  genre  bouffe, 
on  y  rencontre  des  contrastes  remarquables,  entre  autres  le  chœur 
des  Druides,  au  premier  acte,  qui  doit  être  bien  étonné  de  se 
trouver-là. 

Dans  le  genre  mixte,  nous  signalerons  la  Légende  de  Chilpéric, 
chantée  par  Frédégonde  sur  un  joli  motif  de  valse  qu'on  a  rede- 
mandé. 

Nous  aimons  moins  la  chanson  du  Jambon  de  Pharamond,  que 
Chilpéric  chante  sur  son  cheval  blanc.  Il  faut  encore  mentionner 
dans  ce  premier  acte  le  duo  entre  Chilpéric  et  Frédégonde  et  un 
finale  que  nous  désignerons  sous  le  nom  de  finale  des  parapluies, 
parce  que  tous  les  personnages,  exposés  aux  cataractes  du  ciel,  le 
chantent  à  l'abri  de  parapluies  de  toutes  couleurs. 

Comme  paroles  et  comme  musique  le  deuxième  acte  est  le 
meilleur  des  trois.  Il  s'ouvre  sur  un  chœur  de  pages,  gracieux, 
avec  strophes  pour  chacun  des  chanteurs  ou  plutôt  des  chanteuses. 


DE  PARIS. 


347 


car,  selon  l'usage  invariable,  les  pages  sont  représentés  par  de 
jeunes  et  gentilles  femmes.  On  a  applaudi,  et  avec  justice,  la  chan- 
son du  Papillon  bleu,  et  des  couplets  bouffes  que  le  docteur  Ricin 
fait  bien  valoir  et  qui  ont  eu  les  honneurs  du  bis;  il  en  a  été  de 
même  du  duo  des  Adieux  entre  Chilpéric  et  Frédégonde.  Enfin, 
l'ensemble  du  dénoûment  de  cet  acte,  dans  lequel  est  placé  l'air 
chanté  par  Galsuinthe ,  avec  accompagnement  de  castagnettes,  se 
termine  heureusement. 

Le  troisième  acte  est  long,  au  point  de  vue  musical  ;  le  grand 
air  de  Frédégonde  y  est  de  trop,  et  il  serait  encore  suffisamment 
corsé  avec  le  chœur  bachique,  un  autre  chœur  que  l'on  chante 
dans  la  coulisse,  un  agréable  boléro,  et,  enfin,  le  chœur  guerrier 
du  dernier  tableau. 

On  sait  que  l'artiste  chargé  du  rôle  de  Chilpéric  ayant  été  atteint 
d'une  indisposition  subite  à  la  fin  des  répétitions,  c'est  Hervé  lui- 
même,  déjà  auteur  et  compositeur,  qui  l'a  remplacé  comme  acteur; 
on  n'a  pas  trouvé,  il  faut  bien  le  dire,  que  l'exécution  eût  gagné 
à  cette  substitution. 

Mlle  Blanche  d'Antigny,  que  le  Palais-Royal  a  prêtée  généreuse- 
ment aux  Folies- Dramatiques,  est  une  fort  belle  personne  qui 
est  bien  plus  éblouissante  par  ses  diamants  que  par  sa  voix. 
A  cela  près,  elle  s'acquitte  convenablement  du  rôle  de  Frédégonde. 
— Milher,  le  gendarme  de  rOE (7  crevé,  est  amusant  sous  les  traits 
du  docteur  Ricin. — A  un  moindre  degré  d'importance,  Chaudesai- 
gues,  Béret,  Mendasti,  Mlles  Berthull,  Jullien,  Cuinet,  Massue,  con- 
tribuent au  bon  ensemble  de  la  représentation.  N'oublions  pas  un 
rôle  de  majo  Espagnol  qui  est  joué  par  Monroy. 

M.  Moreau-Sainti,  le  directeur  des  Folies-Dramatiques,  a  fait 
pour  Chilpéric  des  frais  énormes  de  mise  en  scène  ;  costumes, 
décors,  accessoires,  tout  est  d'une  richesse  fabuleuse 

D. 


lÉON  KREDTZER. 

(Premier  article.) 

La  Revue  et  Gazette  musicale  ne  faillira  pas  à  la  promesse  qu'elle 
a  faite  à  ses  lecteurs,  qu'elle  s'est  faite  à  elle-même,  d'apprécier  ici 
la  vie  et  de  retracer  les  travaux  d'un  de  ses  plus  anciens  et  de  ses 
plus  précieux  collaborateurs.  A  partir  de  l'année  1842,  Léon 
Kreutzer  fut  en  etfet  l'un  des  rédacteurs  les  plus  assidus  de  ce 
journal,  et  si,  dans  ces  derniers  temps,  il  avait  fait  trêve  à  ses 
travaux  de  critique  pour  se  livrer  d'une  façon  plus  complète  à  la 
composition  (il  n'avait  conservé  que  le  feuilleton  musical  de  l'U- 
nion, qu'il  partageait  même  avec  un  collaborateur),  on  n'a  pas 
oublié  les  solides  études  qu'il  a  publiées  dans  ces  colonnes  sur  la 
Damnation  de  Faust  de  Berlioz,  et  sur  l'Élie  de  Mendelssohn,  non 
plus  que  son  excellente  série  d'articles  sur  l'Opéra  t?!  Europe,  et 
ses  comptes  rendus  si  sincères  et  si  remarquables  des  séances  de 
la  Société  des  concerts  du  Conservatoire. 

Léon  Kreutzer  était  doué  d'une  'intelligence  vaste  et  diverse, 
rehaussée  par  une  instruction  solide,  pratique  et  variée.  Musicien 
profond  et  très-expérimenté,  né  et  élevé  dans  un  milieu  extra-ar- 
tistique, ses  connaissances  théoriques  étaient  relevées  encore  par 
un  rare  savoir  littéraire  et  par  la  possession  de  plusieurs  langues, 
avantage  inappréciable  pour  qui  veut  s'occuper  d'études  critiques 
et  historiques  concernant  un  art  ou  une  science  quelconque.  Très- 
versé  dans  les  littératures  étrangères,  l'esprit  étendu  par  le  fait 
des  voyages  fréquents  que  sa  position  de  fortune  lui  permettait 
d'effectuer,  il  possédait  toutes  les  qualités  nécessaires  pour  faire 
un  critique  excellent  et  respecté.  Sa  mort,  on  l'a  déjà  dit,  laissera 


un  vide  difficile  à  combler  parmi  les  juges  les  plus  autorisés  en 
matière  musicale,  d'autant  que,  plein  de  respect  pour  son  art,  il 
éprouvait  une  haine  profonde  pour  les  vulgarités  qui  semblent 
passionner  le  public  bien  plus  que  les  grandes  œuvres  et  les  no- 
bles conceptions.  Mais  n'anticipons  point  sur  la  marche  des  choses, 
et  commençons  le  récit  de  la  vie,  d'ailleurs  peu  accidentée,  de 
cet  artiste  distingué. 

«  Bon  chien  chasse  de  race,  »  dit  la  sagesse  des  nations.  A  ce 
compte,  Léon  Kreutzer  ne  pouvait  faire  autrement  que  d'être  un 
excellent  musicien.  Son  oncle,  Rodolphe  Kreutzer,  qui  fut  chef 
d'orchestre  à  l'Opéra  et  directeur  de  la  musique  de  ce  théâtre,  qui 
se  fit  connaître  par  la  musique  de  plus  de  trente  opéras  parmi 
lesquels  plusieurs  obtinrent  un  très-grand  succès,  Astyanax,  Aris- 
tippe,  la  Mort  d'Abel,  Paul  et  Virginie,  Lodoiska,  Charlotte  et 
Werther,  le  Petit  Page,  l'Homme  sans  façons,  etc.,  fut  aussi  un 
virtuose  des  plus  remarquables  et  l'un  des  plus  grands  violonistes 
dont  la  France  puisse  s'enorgueillir;  professeur  au  Conservatoire 
dès  la  fondation  de  cet  établissement,  il  y  forma  un  grand  nombre 
d'élèves  dont  la  plupart  reproduisirent  les  qualités  de  son  jeu  élé- 
gant et  chevaleresque.  Quant  à  son  père,  Auguste  Kreutzer  (1), 
c'était  aussi  un  violoniste  habile,  qui  s'essaya  dans  la  composition 
instrumentale,  et  qui  succéda  à  son  frère  comme  professeur  au 
Conservatoire.  On  conçoit  que  Léon  Kreutzer,  élevô  dans  un  tel 
milieu,  suça  en  quelque  sorte  l'amour  de  l'art  par  le  seul  fait  de 
ses  attaches  et  de  ses  fréquentations.  Ce  n'est  pourtant  point  le 
violon  qui  l'attira,  et  c'est  comme  pianiste  qu'il  se  fit  une  réputa- 
tion de  virtuose,  d'ailleurs  renfermée,  depuis  longues  années,  dans 
un  cercle  d'intimes  amis. 

Léon-Charles-François  Kreutzer  naquit  à  Paris,  le  23  septem- 
bre 1817.  Après  avoir  étudié,  sans  doute  avec  son  père,  les  prin- 
cipes du  solfège,  il  fut  placé  sous  la  direction  d'un  artiste  nommé 
Flèche,  qui  remporta  un  premier  prix  de  piano  au  Conservatoire 
en  1830,  et  travailla  avec  lui  cet  instrument.  Il  reçut  ensuite  des 
leçons  de  composition  de  M.  Benoist,  l'excellent  professeur  d'or- 
gue. «  A  vrai  dire  la  plus  solide  instruction  musicale  de  Léon 
Kreutzer,  dit  M.  Fétis,  fut  puisée  dans  ses  lectures  de  partitions  et 
de  livres  relatifs  à  l'art,  dans  la  comparaison  des  productions  d'épo- 
ques différentes  et  du  style  des  maîtres.  Ces  études,  faites  dans 
l'isolement,  ont  donné  pour  résultats  à  l'artiste  des  théories  esthé- 
tiques et  des  vues  sur  l'art  toutes  personnelles,  indépendantes  et 
peut-être  un  peu  trop  exclusives.  Epris  d'un  amour  passionné 
pour  l'art  pur,  il  n'a  point  transigé  avec  le  fait  des  succès  de  vo- 
gue et  des  entraînements  de  la  mode.  Poussant  môme  à  l'excès 
son  penchant  pour  le  sérieux  et  sa  haine  du  frivole  en  musique, 
il  n'a  pu  éviter,  comme  critique,  une  certaine  roideur  d'opinions 
qui,  parfois,  a  faussé  ses  jugements.  »  Cette  dernière  réflexion  est 
exacte,  —  à  mon  sens,  du  moins ,  car  je  ne  prétends  imposer 
mes  opinions  à  personne,  —  et  la  haine  du  banal  a  poussé  par- 
fois Léon  Kreutzer  à  l'expression  de  théories  étranges,  qui  ne 
s'arrêtaient  qu'aux  dernières  limites  de  ce  qu'on  est  convenu 
d'appeler  la  «  musique  de  l'avenir.  » 

Dès  sa  première  jeunesse,  il  s'appliqua  à  la  composition,  et  pro- 
duisit une  quantité  considérable  d'œuvres  diverses,  soit  vocales, 
soit  instrumentales ,  qui  se  faisaient  déjà  remarquer  par  une 
grande  pureté  de  forme  et  de  facture,  une  fantaisie  aimable  et 
une  rare  élégance.  Il  commença  aussi  à  se  faire  connaître  comme 


(1)  Pressé  par  l'heure,  n'ayant  point  de  documents  sous  la  main,  et 
obligé  d'écrire  un  article  à  l'aide  de  mes  seuls  souvenirs,  .j'ai  fait  moi- 
même  une  confusion  et  dit  dans  un  autre  journal,  lors  de  la  mort  de 
Léon  Kreutzer,  que  cet  artiste  était  fils  de  Rodolphe  et  neveu  d'Auguste, 
tandis  que  c'est  le  contraire  qui  est  la  vérité.  La  notice  de  M.  Félis  est 
fort  exacte  sous  ce  rapport. 


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REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


virluose,  et  obtint  des  succès  très-mérités  sous  ce  rapport.  Enfin, 
à  pc  ne  âgé  de  vingt-trois  ans,  il  se  lança  dans  la  critique  et  fut 
chargé  du  feuilleton  musical,  non,  comme  on  l'a  dit  à  tort,  de 
l'Union,  qui  n'existait  pas  encore,  mais  de  la  Quotidienne  (1). 
Presque  aussitôt,  et  comme  nous  l'avons  dit,  il  devint  l'un  des 
collaborateurs  assidus  et  remarqut^s  de  la  Revue  el  Gazette  musi- 
cale, où  ses  premiers  travaux  le  mirent  immédiatement  hors  de 
page. 

Ces  Études  de  critique  n'occupèrent  pourtant  point  tellement  son 
esprit  qu'elles  lui  fissent  délaisser  la  composition.  Mais  le  genre 
de  son  talent  el  la  nature  de  son  caractère,  naturellement  fier  et 
un  peu  poussé  à  la  misanthropie,  empêchèrent  la  vive  expansion 
de  ses  oeuvres  musicales.  «  Pourquoi  ces  œuvres,  s'écriait  der- 
nièrement M.  Delphin  Balleyguior  dans  les  lignes  qu'il  a  consa- 
crées à  Léon  Kreutzer,  si  elles  sont  originales,  inspirées,  bien  écri- 
tes, n'ont-elles  pas  été  jusqu'au  public?  Parce  que  d'abord  M.  Léon 
Kreutzer  a  débuté  dans  un  moment  où  la  musique  classique  était 
loin  de  jouir  de  la  faveur  générale,  ce  qui  fa  sans  doute  décou- 
ragé, et  qu'ensuite  il  eût  fallu  trop  de  pas  et  de  démarches  pour 
décider  ceux  qui  tiennent  les  orchestres  sous  leur  domination  à 
essayer  ses  ouvrages,  et  que  solliciter  était  contraire  à  sa  na- 
ture. Nous  avons  cependant  entendu,  il  n'y  a  pas  longtemps,  son 
introduction  de  la  Tempête  de  Shakspeare,  et  nous  sommes  quel- 
que peu  surpris  que  ce  morceau,  qui  ne  le  cède  en  rien  aux 
plus  belles  œuvres  de  Mendelssohn,  et  qui  est  gravé,  ne  fasse  pas 
partie  du  répertoire  des  Concerts  populaires  de  musique  classi- 
que. » 

Il  est  vrai  que  la  forme  très-classi(iue  des  premières  composi- 
tions de  Léon  Kreutzer  était  loin  d'être  une  recommandation  aux 
yeux  du  public  français  d'il  y  a  vingt-cinq  ans.  A  cette  époque, 
on  le  sait,  les  œuvres  sérieuses  n'étaient  point  l'atiaire  du  grand 
nombre,  et  les  programmes  des  concerts  parisiens  étaient  exclusi- 
vement composés  de  «  fantaisies  »  ou  de  «  transcriptions  »  ins- 
trumentales, d'un  ou  deux  airs  légers  d'opéra,  et  d'une  véritable 
cargaison  de  romances  et  même  de  «  scènes  comiques,  »  ainsi 
qu'on  appelait  alors  les  chansonnettes  dialoguées,  apanage  de 
MM.  Levassor,  Achard,  Chaudesaigues  et  Malézieux. 

Venu  au  monde  vingt  ans  plus  tard,  Léon  Kreutzer,  protitant 
de  la  réaction  qui  s'est  opérée  depuis  quelques  années,  grâce  à  des 
efforts  intelligents  et  réitérés,  eût  atteint  sans  nul  doute  le  suc- 
cès, et  se  lut  acquis  une  grande  et  légitime  réputation.  Mais,  dans 
ces  derniers  temps,  il  semblait  déjà  las  et  fatigué,  et  s'il  pro- 
duisit en  public,  il  y  a  un  ou  deux  hivers,  quelques-unes  de  ses 
œuvres,  le  bon  accueil  qu'elles  reçurent  ne  l'encouragea  pas  à  de 
nouveaux  efforts. 

Arthur  POUGIN. 
{La  suite  prochainement.) 


OIinSTÈRE  DE  L&  IBÀISON  DE  L'EHPEREUB 

ET    DES    BEAUX-ARTS- 

BJRECTION    GÉNÉRALE   DES    THÉÂTRES. 

ATIS. 

Le  concours  institué  au  théâtre  Lyrique  impérial  pour  la    com- 


(t)  L'Union  naquit  vers  1846,  si  je  ne  me  trompe,  de  la  fusion  de 
trois  journaux  légitimistes  :  la  France,  la  Quotidienne  et  l'Echo  français. 
Dès  la  création  de  la  nouvelle  feuille,  Léon  Kreutzer  y  prit  place  comme 
critique  musical,  conservant  ainsi  les  fonctions  qu'il  remplissait  à  la 
Quotidienne. 


position  d'une  œuvre  musicale,  a  été  clos  définitivement  avant- 
hier  yo  octobre. 

Les  compositeurs  qui  y  auront  pris  part  sont  invités  à  se  réunir 
le  mardi  3  novembre  prochain,  à  une  heure,  au  ministère  de  la 
Maison  de  l'Empereur  et  des  Beaux-Arts,  dans  le  cabinet  du  di- 
recteur général  des  théâtres,  pour  élire  eux-mêmes  le  jury  chargé 
de  juger  les  partitions  et  les  poëmes  envoyés  au  concours. 

[Is  seront  admis  sur  la  présentation  du  titre  de  leur  poëine  et 
de  l'épigraphe  annexée  à  leurs  manuscrits. 


REVUE  DES  THÉÂTRES. 

Théâtre-Français  :  reprise  de  Mcrcadcl,  de  Balzac— Odéon  :  le  Comité  de 
lecture,  comédie  en  un  acte  et  en  vers  de  M.  Léon  Bertrand.—  Gym- 
nase :  Thérèse  Ilumhert,  comédie  en  trois  acies,  par  M.  Armand  Du- 
rantin;  Suzanne  et  les  deux  Vicillifds,  comédie  de  M.  Henri  Meilhac. 
Vaudeville  :  Où  l'on  va,  comédie  on  trois  actes,  par  Mme  Charlotte 
Dupuis;  les  Affaires  avant  tout,  comédie  de  MM.  Hugot  et  de  Bruges; 
reprise  des  Erreurs  de  Jean  et  des  Femmes  d'emprunt.  —  Palais-Royal  : 
A  qui  le  singe?  comédie  de  MM.  H.  Crémicux,  et  Jaime  fils;  un  Ma- 
lade au  mois,  folie-vaudeville,  avec  écurie  et  remise,  par  MM.  Cham  et 
A.  de  Lasalle;  le  Bouquet,  comédie  de  MM.  H.  Meilhac  et  Ludovic  Ha- 
lévy. —  Ambigu  :  te  Satrilétje,  drame  en  cinq  actes  et  huit  tableaux, 
par  MM.  Th.  Barrière  et  L.  Bcauvallet.  —  Théâtre  ou  Chatelet  : 
reprise  du  Naufrage  de  la  Méduse. — Théatre-Déjazet  :  Céphale  et  Pru- 
cris,  opérette  en  un  acte,  paroles  et  musique  de  M.  Moniot. 

Balzac  a  écrit  le  Faiseur,  eu  1839,  a\ec  la  plume  do  Beaumar- 
chais, et  parfois  même  avec  celle  de  La  Bruyère.  C'était,  à  l'époque 
où  il  a  paru,  le  portrait  fort  ressemblant  d'une  race  d'hommes 
d'affaires  qui  a  bien  changé  depuis.  Aujourd'hui  le  héros  de 
Balzac  n'est  plus  dans  le  mouvement;  il  a  été  dépassé  de  cent 
coudées  par  les  mains  audacieuses  de  nos  spéculateurs.  Comme 
ils  doivent  le  trouver  naïf!  Conuiie  ils  doivent  se  moquer  de  ses 
timides  capitulations  de  conscience  '  Ah!  nous  avons  bien  marché! 

Mais  il  en  est  de  Mercadet  comme  du  Turcaret  de  Lesage.  S'ils 
ne  sont  plus  dans  nos  mœurs,  ils  n'en  restent  pas  moins  les  pro- 
totypes très-vivants  et  très-curieux  du  temps  où  ils  sont  venus  au 
monde.  A  ce  titre,  Mercadet  avait  tous  les  droits  possibles  à  l'ho- 
norable reprise  que  la  Comédie-Française  vient  de  lui  décerner 
Nous  disons  reprise  parce  que  si  le  Faiseur  n'a  jamais  été  joué 
sous  sa  forme  primitive,  personne  n'ignore  qu'après  avoir  subi 
une  amputation  de  deux  actes  el  quelques  menus  arrangements 
pratiqués  avec  une  rare  intelligence  par  M.  d'Ennery,  il  a  été  re- 
présenté en  18ol,  au  Gymnase,  sous  le  nom  de  Mercadet. 

Il  était  interprété  alors  d'une  manière  vraiment  remarquable  par 
Geoffroy  ;  Dupuis,  celui  qui  nous  a  été  enlevé  par  la  Russie,  jouait 
le  rôle  de  M.  de  la  Brive,  et  le  petit  père  Violette  était  le  point  de 
départ  de  la  réputation  de  Lesueur.  Au  Théâtre-Français,  il  y  a 
peut-être  plus  de  perfection  savante  dans  le  jeu  des  artistes  ;  mais 
on  y  chercherait  vainement  cette  verve  prime-sautière  et  hardie 
des  anciens  interprètes  de  Balzac.  Malgré  tout  son  talent,  Got  ne 
fait  pas  oublier  Geoffroy,  et  ne  l'égale  que  dans  le  troisième  acte, 
où  il  semble  entraîné  par  la  situation.  Febvre  se  rapproche  davan- 
tage de  Dupuis,  dans  son  personnage  de  dandy.  Lesueur  n'est  pas 
distancé  par  Kime.  Les  autres  rôles  sont  tenus  convenablement 
par  Barré,  Séveste,  Eugène  Provost,  Mme  Guyon,  Mlle  Roger  et 
Mme  Pauline  Granger.  En  somme,  c'est  une  reprise  heureuse  que 
celle  de  l'œuvre  du  grand  romancier. 

—  Le  parterre  de  l'Odéon  a  fait  le  plus  gracieux  accueil  au  Comité 
de  Lecture,  comédie  en  un  acte  et  en  vers  de  M.  Léon  Beitrand. 
Étant  donné,  d'une  part,  un  jeune  auteur  qui  ne  sait  trop  com- 
ment faire  accepter  sa  pièce,  et  de  l'autre  deux  auteurs  moins 
novices,  dont  l'un  fournit  les  sujets  que  l'autre  élabore,  il  advient 
que  le  premier  prend  la  place  de  ses  deux  concurrents  devant  le 


DE  PARIS. 


349 


comité,  et  qu.;  son  œuvre  est  reçue  par  acclamation.  En  vain  l'ac- 
cuse-t-on  de  plagiat;  il  est  reconnu  que  le  fournisseur  de  sujets  a 
ramassé  dans  les  Tuileries  le  brouillon  de  Tout  ou  rien  et  qu'il  l'a 
porté  à  son  collaborateur.  Les  vers  de  M.  Léon  Bertrand  sont  de 
la  bonne  fabrique  et  les  jeunes  comédiens  de  l'Odéon  les  font 
très-bien  valoir. 

—  Dans  les  théâtres  de  genre,  c'est  un  déluge  de  nouveautés. 
Nous  allons  les  passer  rapidement  en  revue,  ce  qui  n'est  pas  une 
besogne  facile,  eu  égard  aux  limites  qui  nous  sont  assignées.  Au 
Gymnase,  une  comédie  en  trois  actes  ouvre  la  marche.  Elle  s'appelle 
Thérèse  Humbert,  et  elle  est  bâtie  sur  la  pointe  d'un  article  du 
Code  civil.  Un  mariage  contracté  à  l'étranger  par  un  mineur  est-il 
valable  lorsqu'il  n'a  pas  été  confirmé  en  France  et  qu'il  n'a  pas 
eu  le  consentement  de  la  mère  du  mari?  Cette  pauvre  Thérèse 
Humbert  apprend  à  ses  dépens  que  la  loi  n'a  pas  été  observée  ; 
heureusement  elle  a  un  enfant  qui  finit  par  gagner  son  procès 
en  seconde  instance  auprès  d'une  belle-mère  beaucoup  moins  in- 
traitable qu'elle  ne  veut  le  paraître.  Cette  leçon  de  procédure,  un 
peu  sèche,  un  peu  aride,  est  mitigée  par  l'interprétation  qui  en  est 
confiée  à  Berton,  à  Pradeau,  à  Mme  Fromentin  et  à  Mme  Bamelli. 

A  la  suite  de  Thérèse  Humbert,  le  même  théâtre  joue  une  char- 
mante comédie,  Suzanne  et  les  deux  Vieillards,  oîi  il  n'est  pas  du 
tout  question  d'articles  du  Code.  Cette  Suzanne,  qui  sort  du  cou- 
vent, est  une  fine  mouche,  singulièrement  avancée  pour  son  âge 
et  sa  position.  Placée  entre  deux  vieillards  qui  menacent  ses 
amours  avec  un  jeune  musicien,  elle  se  garde  bien  de  leur  tenir 
tête,  mais  elle  s'arrange  de  façon  à  les  forcer  de  se  désister  eux- 
mêmes  de  leurs  prétentions  surannées  et  elle  épouse  le  musicien 
de  ses  rêves.  Mlle  Massin  est  une  adorable  Suzanne  ;  Pradeau, 
Dorval,  Berton  la  secondent  à  merveille. 

—  Une  ancienne  actrice  du  Palais-Royal^  qui  a  laissé  quelques 
traces  de  son  passage,  Mme  Charlotte  Dupuis,  vient  de  faire  repré- 
senter au  Vaudeville  une  pièce  en  trois  actes,  intitulée  Om  l'on  va. 
C'est  bien  vague,  car  cela  dépend  d'où  l'on  part.  Un  homme  qui  a 
débauché  une  jeune  fille,  sans  pouvoir  l'épouser,  parce  qu'il  est 
en  puissance  de  femme,  a-t-il  bien  le  droit,  lorsqu'il  devient  libre, 
de  décliner  ses  promesses,  sous  prétexte  qu'il  a  des  enfants  et 
qu'il  ne  peut  introduire  sous  leur  toit  une  belle-mère  dont  ils  aient 
à  rougir?  C'est  l'avis  de  M.  Devrin,  mais  ce  n'est  pas  celui  de  sa 
maîtresse,  Antoinette.  Aussi  songe-t-elle  à  le  punir  de  sa  déloyauté, 
en  le  frappant  dans  la  personue  de  son  fils  dont  elle  est  aimée, 
et  dans  celle  de  sa  fille  que  le  frère  d'Antoinette  peut  aisément  sé- 
duire. Cette  vengeance  reçoit  un  commencement  d'exécution,  mais 
elle  n'aboutit  pas,  grâce  à  M.  Devrin  qui,  un  peu  tard,  se  décide 
à  réparer  ses  torts.  Un  rôle  de  médecin  philosophe  sert  de  lien 
entre  tous  les  personnages  de  cette  pièce  et  s'efforce  de  l'égayer. 
C'est  à  Delannoy  que  revient  cette  tâche  malaisée.  Mme  Doche  est 
fort  bien  sous  les  traits  d'Antoinette.  Munie  et  Délessart  contribuent 
à  l'effet  de  la  comédie  de  Mme  Dupuis,  qui  n'fîst  pas  sans  influence 
sur  les  recettes. 

Un  lever  de  rideau,  les  Affaires  avant  tout,  nous  montre  deux 
négociants  qui  négligent  leurs  commandes  pour  s'amuser  avec  des 
petites  dames,  et  qui  sont  sauvés  de  la  ruine  par  leurs  ménagères 
assidues  au  travail.  Mlles  Louise  Leroux  et  Lovely  prêtent  infini- 
ment de  charme  à  cette  bluettc  légère. 

Le  Vaudeville  a  fait  en  outre  deux  reprises,  les  Erreurs  de  Jean 
et  les  Femmes  d'emprunt,  la  première  pour  Saint-Germain,  et  la 
seconde  pour  Arnal  qui  remplit  dans  cette  vieille  pièce ,  non  le 
rôle  qu'il  y  a  créé  en  1833,  mais  celui  qui  était  joué  alors  par 
Bernard-Léon. 

—  Inscrivons  trois  nouveautés  au  bilan  du  Palais-Royal  : 

A  qui  le  singe?  bouffonnerie  d'une  prodigieuse  excentricité,  où 
l'on  voit  Lassouche  sortant  d'un  bal    masqué  dans  la  peau  d'un 


singe  vert  et  tombant  en  plein  drame  de  reconnaissance  filiale. 
De  qui  est-il  le  fils?  De  Mme  de  Verluisant,  de  Baldaquin  ou  de 
son  ami  Cliabourel?  Décidément  il  est  le  fruit  des  amours  de  ce 
dernier  avec  une  jardinière.  Figurez-vous,  à  côté  de  Lassouche, 
ces  joyeux  compères  qui  répondent  aux  noms  de  Geoffroy  et 
d'Hyacinthe,  et  je  vous  défie  bien  de  ne  pas  rire  à  ventre  débou- 
tonné. 

Un  malade  au  mois,  c'est  un  cocher  que  Gll- Pérès  a  pris  à 
l'heure  sans  pouvoir  le  payer  et  qu'il  héberge  chez  lui,  après  lui 
avoir  persuadé  qu'il  est  malade.  Le  cocher,  qui  a  balafré  la  fi- 
gure d'un  passant  et  qui  se  croit  en  danger  d'être  arrêté,  ne  de- 
mande pas  mieux  que  de  se  laisser  soigner  avec  de  bonnes  côte- 
lettes et  de  bon  vin  de  Bordeaux.  Or,  le  dévouement  de  Gil-Pérès 
a  ému  l'Académie  qui  lui  envoie  le  prix  de  vertu.  Le  savant 
qu'on  a  investi  de  cette  mission  est  précisément  le  passant  bala- 
fré par  le  cocher;  mais  comme  son  coup  de  fouet  lui  a  valu 
l'honneur  d'être  décoré  de  l'ordre  de  l'Artichaut  par  un  souverain 
invraisemblable,  tout  s'arrange  pour  le  mieux  sur  la  scène  comme 
dans  la  salle. 

Le  Bouquet  est  une  comédie  moins  folle  que  les  deux  précé- 
dentes, mais  de  beaucoup  supérieure.  Gaillardin  est  encore  un  de 
ces  maris  qui  courent  la  prétentaine  ;  il  a  promis  à  sa  femme  un 
bouquet  de  lilas  blanc,  et  pour  s'acquitter,  il  souffle  un  bouquet 
adressé  à  la  cocotte  qu'il  courtise  ;  mais,  parmi  ces  fleurs,  il  de- 
vait se  trouver  10,000  francs  en  billets,  et  comme  Mme  Gaillardin 
a  jeté  le  bouquet  par  la  fenêtre,  il  faut  que  le  mari  désintéresse 
Mlle  Antonia.  Vous  voyez  d'ici  les  transes  de  Gaillardin,  les  co- 
lères de  sa  femme,  jusqu'au  moment  où  l'on  rapporte  le  bouquet 
qui  ne  contenait  aucun  billet  de  banque.  Cet  imbroglio  est  très- 
gaillardement  enlevé  par  Geoffroy,  Gil-Pérès  et  Mlle  Hortense 
Neveux.  Il  faut  entendre  chanter  par  Gil-Pérès  «  le  Sergent  et  le 
Conscrit  du  21^  de  ligne,  »  c'est  à  pouffer  de  rire. 

—  L'Ambigu  a  mis  la  main  sur  un  drame  très-bien  fait  et  très- 
émouvant.  Il  a  pour  titre  le  Sacrilège,  mais  pendant  les  quatre 
cinquièmes  de  la  pièce,  on  se  demande  pourquoi  ce  titre;  ce  n'est 
qu'au  dénoûment  que  la  réponse  arrive.  Peu  importe  d'ailleurs, 
puisque  les  autres  ont  réussi  à  faire  prendre  jusque  -  là  patience 
au  public.  Et  avec  quelle  habileté  !  Dès  les  premières  scènes,  sept 
ou  huit  cohéritiers  sont  en  présence  pour  assister  à  l'ouverture 
d'un  testament.  Chacun  d'eux  suppute  avec  complaisance  la  part 
qui  doit  lui  revenir.  Mais,  ô  désappointement  !  le  testateur  laisse 
tous  ses  biens  à  une  jeune  orpheline  qu'il  a  adoptée.  Les  choses 
étant  ainsi  nettement  posées,  leur  déduction  se  fait  toute  seule. 
Les  collatéraux,  ligués  contre  Angèle,  l'héritièi-e,  ont  pour  chef 
de  file  une  coquine  du  demi-monde  qui  ne  recule  devant  aucun 
forfait.  Nous  ne  la  suivrons  pas  dans  cette  voie  détestable  ;  cela 
nous  mènerait  ti-op  loin.  Disons  seulement  qu'un  jeune  homme, 
séduit  par  ses  charmes,  finit  par  la  maudire  et  va  mettre  son 
cœur  aux  pieds  d'Angèle,  qui  l'a  sauvé  d'un  grand  péril.  Angèle 
n'est  pas  insensible  à  l'amour  de  Jacques  Bernard;  mais,  atteinte 
d'un  anévrisme,  elle  succombe  à  son  émotion,  et  les  scélérats  de 
collatéraux  se  dépêchent  de  la  faire  descendre  dans  le  caveau  de 
famille,  où  on  lui  élève  un  beau  tombeau.  A  l'imitation  de  Ro- 
méo, Jacques  veut  la  revoir  une  dernière  fois,  et  il  viole  sa  sépul- 
ture; c'est  là  le  Sacrilège  tant  annoncé.  0  bonheur!  Angèle  n'est 
pas  morte,  elle  est  rappelée  à  la  vie  par  les  baisers  de  Jacques, 
et,  pendant  ce  temps,  l'affreuse  femme  qui  la  poursuivait  est  as- 
sassinée par  des  bandits.  Tout  est  bien  qui  finit  bien. 

Ce  drame,  parfaitement  monté  sous  le  rapport  matériel,  est 
aussi  très-bien  interprété  par  Guichard,  de  la  Comédie-Française, 
par  Castellano,  Orner,  Régnier,  et  par  Mlle  Saint-Marc  et  Dica 
Petit. 

—  Nous  ne  finirons  pas  sans  mentionner  le  grand  succès  que 


3S0 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


le  théâtre  du  Cliâtelet  vient  d'obtcnii-  avec  la  reprise  du  Naufrage 
de  la  Méduse,  et  la  réussite  plus  modeste  de  Céphale  et  Procris, 
opérette  du  théâtre  Déjazet,  dont  M.  Moniot  a  fait  h  la  lois  les 
paroles  et  la  musique,  comme  l'auteur  de  CJnlpéric.  Cette  petite 
pièce,  dont  on  a  fort  apprécié  la  musique  est  jouée  avec  entrain 
par  Dailly,  Legrenay  et  Mlle  Pauline. 

D.  A.  D.  SAINT-YVES. 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 


**»  Le  théâtre  impérial  de  l'Opéra  a  donné,  lundi  et  vendredi,  deux 
représentations  à^IIamlct,  et  mercredi  une  de  Guillaume  Tell.  Mme  Gncy- 
mard  étant  partie  pour  Madrid,  oii  elle  e.»;!  engagée  pendant  les  mois  de 
novembre  et  décembre  à  l'Oriente,  c'est  i\Illo  Mauduit  qui  a  pris  le  rôle 
de  la  Reine  dans  Hamlct,  et  elle  s'en  acquitte  fort  bien  ;  on  ne  peut  lui 
reprocher  que  de  paraître  trop  jeune  pour  avoir  un  fils  de  l'encolure  du 
prince  de  Danemark.— Devoyod  chantait  pour  la  première  Ibis  le  r(Me  de 
Guillaume  dans  le  chef-d'œuvre  de  Rossini.  Malgré  les  belles  qualitcs 
dont  il  a  fait  preuve  jusqu'à  ce  jour,  ce  n'était  pas  une  mince  respon- 
sabilité qu'assumait  le  jeune  artiste.  Certes,  il  n'a  pas  fait  oublier  Faure, 
qu'on  peut  lui  reprocher  d'imiter  un  peu  trop  sorvilemcnt,  mais  il  s'y 
est  montré  plein  d'intelligence,  de  verve  et  d'énergie.  Sa  voix,  quoique 
péchant  un  peu  dans  les  notes  graves,  est  belle  et  tris-bien  timbrée  ;  des 
applaudissements  légitimes  ont  à  maintes  reprises  encouragé  cette  len- 
tative,  qui  fait  de  mieux  en  mieux  augurer  de  l'avenir  de  M.  Devoyod. 
Du  reste,  la  représentation  était  des  plus  brillantes;  Villaret,  David  et 
Mlle  Battu  se  smt  surpassés;  on  a  particulii^remcnt  remarqué  le  grand 
style  avec  lequel  la  belle  cantaU'ice  a  dit  la  cavatine  de  Sombres  forêts. 
Mlle  Bloch  a  très-bien  tenu  le  rôle  d'Edwige. 

**»  Aujourd'hui,  représentation  extraordinaire  de  l'Africaine. 

**«  Le  théâtre  de  l'Opéra-Comique  vit  sur  le  Premier  Jour  do  bonheur 
auquel  les  pièces  du  rJ^pertoire  servent  de  lendemain.  —  La  reprise  de 
Jl/ijno»  aura  lieu  demain,  et  bientôt  le  Corricolo  de  Poise,  retardé  par  les 
modifications  apportées  au  troisième  acte,  viendra  apporter  un  nouvel 
élément  à  la  variété  des  spectacles.  —Mlle  Jeanne  GuiUot,  premier  prix 
d'opéra-comique  au  concours  du  Conservatoire,  débute  aujourd'hui  dans 
le  Chalet. 

,**  Le  théâtre  Italien  a  donné  hier  la  dernière  représentation  dcLucia 
avec  Fraschini.  —  Mardi  la  Coiitcssina  sera  jouée  avec  Mlle  Krauss  dans 
le  principal  rôle.  —  Cette  cantatrice,  qui  n'ira  pas  à  Madrid,  chantera 
également  celui  de  la  Serva  Padrona  qu'on  répète  activement.  —  Picco- 
lino,  de  Sardou,  musique  de  Mme  la  comtesse  de  Grandval,  chanté  par 
la  même  Mlle  Krauss,  Mme  Grossi,  MM.  Nicoliui,  Verger,  Agnesi  et  Zi- 
melli  suivra  de  près,  en  attendant  Otello,  Mosc  et  Poliuto  qu'on  prépare 
pour  les  représentations  de  ïamberlick. 

»*,  Fraschini  paraît  décidé  à  ne  pas  aller  à  Saint-Péterbourg,  dont  il 
redoute  le  climat.  Il  se  rendrait  à  Nice  pour  y  passer  deux  mois,  et  re- 
viendrait ensuite  terminer  son  engagement  à  Paris. 

***  Le  théâtre  Lyrique  joue  alternativement  le  Val  d'Andorre  et 
Martha.—\l  reprendra  celte  semaine  le  Barbier  de  •MJciV/c,  dans  lequel  dé- 
butera par  le  rôle  de  Figaro  M.  Aubéry,  premier  prix  de  chant  du  Con- 
servatoire, —  Iphigcnie  en  Aulide.,  avec  Mme  Gaston  Lacaze  dans  le  rôle 
d'Iphigénie  et  MM.  Bosquin  et  Aubéry  dans  ceux  de  Pylade,  suivra  de 
près  l'opéra  de  Rossini. —i)o«  Juan  sera  joué  par  Caillot,"  Labat,  Giraudet, 
Bosquin  et  Legrand,  Mmes  Daram,  Gilbert  et  Schroeder. 

^*^  Le  théâtre  des  Variétés  continue  à  faire  le  maximum  des  recettes 
avec  ta  Périchok.  —  Le  Pont  des  Soupirs  va  être  repris  pour  les  repré- 
sentations du  dimanche.  —  M.  Cogniard  aurait  jeté  lesjeux,  pour  rem- 
placer Mlle  Schneider  lorsqu'elle  le  quittera,  sur  uneartistequi  a  obtenu 
de  très-grands  succès  au  Brésil  et  qui  aurait  toutes  les  quilités  de  l'em- 
ploi. Elle  s'appelle  Mlle  Aimée;  c'est  un  nom  d'heureux  augure. 

:t*»  La  partition  pour  piano  et  chant  de  la  Périchole  sera  mise  en  vente 
mercredi. 

**,  Malgré  le  succès  du  Petit-Poucet  au  théâtre  de  l'Athénée,  l'activité 
de  M.  Busnach  ne  se  ralentit  pas.  On  répète  les  Jumeaux  de  Bergame, 
opéra-comique  en  un  acte  imité  de  Florian,  musique  de  Lecocq  ;  le 
Vengeur,  opéra-bouffe  en  un  acte  de  Nuitter  et  Beaumont,  musique  d'Isi- 
dore Legùuix.  L'Ours  et  l'Aynateur  des  jardins,  bouffonnerie  musicale  de 
M.  Marquet,  musique  de  Lecocq. — Ces  trois  pièces  succéderont  à  l'opérette 
de  M .  Laurent  de  Rillé.  Mlle  Van-Ghell  jouera  dans  les  deux  premières. 

**«  Li  Périchole  aura  bientôt  les  honneurs  de  la  parodie.  Sous  le  titre 
de  la  Péri-Colle,  elle  se  prépare  à  l'Eldorado  avec  Mlle  Chrétienne, 
MM.  Perrin  et  Adolphe.  On  compte  sur  un  grand  .succès. 

»*,  Offenbach  est  de  retour  de  Vienne  depuis  quelques  jours,  et  il  y  a 
reçu  maintes  ovations.  Pendant  les  quelques  jours  qu'il  a  également  passés 
à  Berlin,  il  s'est  entendu  avec  l'éditeur  Bock  pour  diverses  modifications 


apportées  au  livret  de  Itobinson,  traduit  en  Allemand,  et  qui  doit  être  re- 
présenté à  Darmstadt  d'abord.  Ces  modifications,  qui  sont  fort  importantes 
et  qui  donnent  au  poëme  mi  intérêt  nouveau,  comportent  entre  autres 
le  spectacle  du  naufrage  du  vaisseau  qui  portait  Edwige.  Le  célèbre 
machiniste  Brandt  fait  pour  cet  acte  une  merveilleuse  décoration. 

^*^  M.  Montaubry  vient  de  se  rendre  acquéreur  du  théâtre  des  Folies- 
Marigny,  administré  par  M.  Monrouge,  avec  une  grande  habileté  et  un 
rare  bonheur.  Le  nouveau  directeur  possède  le  talent,  les  qualités  et  l'ex- 
périence spéciale  qui  continueront  sans  aucun  doute  la  prospérité  de  la 
jolie  petite  .scène,  dont  le  genre  d'exploitation  paraît  devoir  rester  le 
même.  M.  Montaubry  s'est  assuré,  pour  les  premiers  six  mois  de  son 
entreprise,  le  concours  de  M.  Monrouge. 

»**  D'après  les  derniers  journaux  américains,  le  grand  succès  de  Mme 
Rose  Bell,  au  Théâtre-Français  de  New-York,  dans  la  Graiidc- Duchesse, 
aurait  engagé  Mme  Marie  Desclauzas,  qui  devait  également  débuter  dans  ce 
rôle,  h  prier  son  imprésario  Grau  d'ajourner  ses  débuts  à  une  autre  époque, 
ne  voulant  pas  interrompre  le  .succès  de  sa  camarade.  C'est  un  acte  — 
peu  commun  —  de  bon  goût  et  de  confraternité  artistique  à  mentionner- 

*'„  Plusieurs  journaux  de  théâtre  répètent  à  l'envie  la  nouvelle  de  la 
découverte  qu'aurait  faite  le  directeur  du  théâtre  de  Prague  de  l'opéra 
de  Gluck,  l'Arbre  magique  joué  à  l'occasion  du  mariage  de  Marie-An- 
toinette et  du  Dauphin  ;  ils  n'oublient  qu'une  chose,  c'est  que  l'année 
dernière  cet  opéra  arrangé  par  M.  Wilder  a  été  représmté  par  M.  Mar- 
tinet au  théâtre  des  Fantaisies-Parisiennes. 

»*»  On  nous  écrit  de  Bnrd(vaux  que  Mlle  Daniele  vient  d'obtenir  un 
beau  succès  dans  Faust.  M.  Halanzier  l'avait  choisie  pour  remplacer  une 
de  SCS  meilleures  pensionnaires,  Mlle  Baretti,  que  l'état  de  sa  santé  a 
forcée  de  revenir  à  Paris. 

,^*,i,  On  lit  dans  le  Siècle  :  «  11  n'y  a  encore  que  les  Orientaux  pour 
savoir  allier  la  fantaisie  à  la  générosité.  Le  vice-roi  s'ennuie  au  Caire, 
qu'on  lui  bâtisse  vite  un  théâtre!  Sept  mille  ouvriers  sont  assemblés  qui 
travaillent  jour  et  nuit.  Eu  même  temps  un  télégramme  mande  nu 
Caire  l'imprésario  du  théâtre  de  Péra.  11  arrive,  et  il  apprend  qu'on  l'a 
fait  venir  pour  monter  la  Grande- Duchesse,  la  Belle-Hélifnc  cl  Barbe-Bleue, 
qui  ont  tant  diverti  îi  Paris  Ismaïl-Pacha  et  que  Son  Altesse  veut  revoir. 
On  met  à  la  disposition  dudit  imprésario  une  frégate  de  l'Etat,  il  part 
pour  Marseille,  et  il  est  en  ce  moment  à  Paris  recrutant  une  troupe.  On 
dit  qu'il  offre  )00,OÛO  francs  à  Mlle  Schneider  pour  trois  représentations 
au  Caire.  Heureux  Ism.aïl  !  » 


NOUVELLES  DIVERSES. 


^*^:  Au  second  Concert  populaire,  dimanche  dernier,  des  fragments  de 
Struensée  (l'ouverture,  l'auberge  du  village,  le  rêve,  marche  funèbre, 
dernier  moment)  figuraient  en  tète  du  programme.  Cette  admirable  et 
dramatique  conception ,  qui  serait  le  chef-d'œuvre  de  Meyerbeer  s'il 
n'avait  pas  écrit  les  Huguenots  et  Robert,  fait  maintenant  partie  du  réper- 
toire courant  des  Concerts  populaires;  le  public  l'a  eu  bientôt  comprise, 
et  il  en  a  donné  la  preuve  dimanche.  —  Le  fragment  de  la  symphonie 
Waltcnstcin,  de  M.  Joseph  Rheinberger  (scherzo,  chanson  orangisle,  ser- 
mon du  capucin),  a  été  accueilli  avec  une  certaine  ré-serve.  C'est  de  la  jolie 
musique,  presque  de  la  musique  de  ballet,  qui  n'a  pu  être  écrite  que 
par  une  plume  très-exercée,  mais  qui  n'est  point  symphonique.  Le  genre 
descriptif  est  un  terrible  écueil  pour  qui  n'a  que  du  talent!  —  Le  troi- 
sième entr'acte  des  Maîtres  chanteurs,  redonné  avec  le  titre  de  c  Médita- 
tion, »  ne  nous  a  pas  semblé  gagner  à  une  nouvelle  audition.  On  a  beau 
chercher,  avec  la  meilleure  volonté  du  monde,  à  se  mettre  au  point  de  vue 
de  l'auteur,  faire  abstraction  de  tout  système  préconçu,  ce  malheureux 
morceau  reste  une  énigme,  surtout  dans  le  cadre  de  l'opéra-comique,  aussi 
relevé  qu'on  puisse  se  le  figurer.  A-t-il  d'ailleurs,  dans  la  pensée  de  Wag- 
ner, autant  d'importance  que  veut  lui  en  donner  M.  Pasdeloup?  Des 
applaudissements  obstinés ,  des  sifflets  interminables  l'ont  accueilli.  — 
La  symphonie  en  sol  mineur  de  Mozart,  et  des  fragments  du  septuor  de 
Beethoven,  complétaient  le  programme  et  ont  produit  leur  effet  accou- 
tunié. 

•^^f^Aujourd'hui  à  2  heures,  au  cirque  Napoléon,  troisième  concert 
populaire  de  musique  classique,  .sous  la  direction  de  J.  Pasdeloup.  On  y 
entendra  :  1°  ouverture  de  Lorelei  de  V.  Wallace  (ballade  allemande)  ; 
—  2°  suite  d'orchestre  (op.  lOI),  première  audition,  de  Joachim  RafF 
(introduction  et  fugue,  menuet,  adagietlo,  scherzo,  marche);  — -  3»  alle- 
gretto un  })oco  agitato  de  Mendelssohn  ;  —  i"  hymne  de  Haydn ,  par  tous 
les  instruments  à  cordes;  —  5°  symphonie  en  ut  mineur  de  Beethoven 
(allegretto,  andante,  scherzo,  finale). 

^''t  Les  concerts  de  l'hiver  prochain  verront  probablement  apparaître 
une  jeune  et  gracieuse  cantatrice  du  talent  le  plus  distingué,  Mlle  Anna 
Reiss.  Comme  Mlle  Schrœder,  comme  Mlle  Orgeni,  Mlle  Reiss  est  Alle- 
mande. Un  bon  accueil  lui  est  certainement  réservé  et  elle  le  mérite  à 
tous  égards,  si  nous  en  jugeons  par  le  récit  de  ses  plus  récents  succès 
à  Vienne,  Weimar,  Kissingen,  etc.,  que  nous  fournissent  les  journaux 


DE  PARIS 


331 


allemands  célébrant  à  l'envie  la  voix  fraîche,  pleine  et  sonore  de  la 
jeune  artiste;  qualités  qu'on  a  pu  apprécier  dans  les  grands  airs  de  nos 
plus  célèbres  opéras.  Bienvenue  donc  par  avance  à  la  jeune  étrangère. 

***  La  visite  du  célèbre  pianiste  Ant.  Rubinstcin  nous  est  encore  pro- 
mise pour  cet  hiver.  Sa  tournée  artistique  comprendra  Berlin  et  le  Nord 
de  l'Allemagne,  puis  la  Belgique  et  lu  France. 

**;^  Mme  Norman-Neruda,  Féminente  violoniste,  se  propose  aussi  de 
donner  des  concerts  cet  hiver  en  Allemagne  et  en  France.  —  Deux 
bonnes  nouvelles  à  enregistrer. 

***  M.  Henri  Vieuxtemps  est  de  retour  à  Paris  pour  quelques  jours 
seulement.  Le  i  novembre,  le  célèbre  compositeur-virtuose  reprendra, 
avec  la  compagnie  Uhiiann-Patti ,  une  nouvelle  tournée  de  concerts  qui 
doit  comprendre  Bruxelles,  Gand,  Anvers,  Liège,  Bruges  et  les  princi- 
pales villes  de  la  Belgique.  MM.  Botlesini,  F.  Godefroid,  Jaëll,  Hermann- 
Léon  et  De  Yroye  font  partie  de  cette  expédition. 

^*»  Dimanche  prochain,  8  novembre,  à  l'occasion  de  la  fête  patronale, 
M.  Hurand,  maître  de  chapelle  à  Saint-Eustacho,  fera  exécuter  en  cette 
église  une  messe  à  grand  orchestre,  composée  par  M.  François  Benoist, 
professeur  au  Con  servatoire  impérial  de  musique.  Les  soli  seront  chantés 
par  MM.  Perrié  et  Guyot.  —  M.  Ed.  Batiste,  organiste  de  la  paroisse, 
touchera  le  grand  orgue. 

i*^.  Rossini  a  composé  dernièrement  et  envoyé  au  ministre  de  l'ins- 
truction publique  d'Italie,  M.  Broglio,  une  fanfare  pour  musique  militaire, 
intitulée  la  Corona  d'Italia.  Elle  sera  exécutée  au  palais  Pilti,  à  Florence, 
en  présence  du  roi,  par  toutes  les  musiques  de  la  garnison. 

^**  Par  décret  impérial,  en  date  du  24  octobre  courant,  M.  Théophile 
Gautier  a  été  nommé  bibliothécaire  de  S.  A.  I.  Madame  la  Princesse 
Mathilde. 

/^  Mme  Oscar  Comettant  annonce  la  réouverture,  pour  le  S  novembre, 
dans  son  domicile,  29,  rue  d'Angivillier,  à  Versailles,  de  ses  cours  de 
chant,  qui  auront  heu,  comme  par  le  passé,  les  samedis  de  2  à  4  heures. 

,%  Nos  lecteurs  et  abonnés  apprendront  avec  plaisir  que  les  excellents 
cours  de  piano,  chant,  accompagnement  et  orgue,  dirigés  par  Mme  A. 
Fabre,  avec  le  concours  de  MM.  Ketterer,  Lebrun  et  Durand,  reprendront 
le  3  novembre  dans  son  domicile,  rue  d'Hauteville,  23.  —  Un  cours  de 
piano  et  solfège  élémentaires,  pour  les  jeunes  filles,  sera  adjoint  cette 
année  à  ces  cours  qui  auront  lieu,  comme  l'année  dernière,  deux  fois  par 
semaine . 

*%  Mme  de  Sievers,  30,  rue  de  Bruxelles,  va  ouvrir  un  cours  de 
chant,  orgue,  piano  et  accompagnement,  qui  aura  lieu  tous  les  jeudis  et 
dimanches,  de  1  heure  à  -4  heures,  à  partir  du  jeudi  3  décembre  jusqu'à 
la  fin  d'avril  18C9. 

»%  Nousavions  hésité  à  répéter  dimanchela  nouvelled'une  grave  indisposi- 
tion qui  empêchait  l'illustre  maestro  Rossini  de  quitter  Passy  pour  repren- 
dre à  Paris  sa  résidence  d'hiver.  Celte  indisposition  s'étant  aggravée  au  point 
d'inquiéter  sérieusement  ses  amis,  nous  nous  sommes  tenus  exactement 
renseignés  sur  les  phases  qu'elle  a  subies,  et  sur  la  situation  actuelle  de 
l'intéressant  malade.  Voici  jusqu'à  ce  jour  le  résultat  de  nos  informations. 
Depuis  quelques  années  Rossini ,  à  l'entrée  de  l'hiver,  était  sujet  pen- 
dant quelques  semaines  à  de  violents  accès  de  toux.  Cette  année,  l'in- 
vasion de  ce  catarrhe  chronique  a  redoublé  de  gravité  et  a  déterminé 
une  fluxion  de  poitrine,  qui  s'est  compliquée  d'une  fistule,  au  fonde- 
ment. La  fluxion  de  poitrine  a  été  combattue  avec  succès,  mais  il 
s'en  est  suivi  une  prostration  notable  des  forces,  et  il  faudrait  qu'elles 
revinssent  pour  permettre  une  opération  de  la  fistule  devenue  indispen- 
sable. Tel  est  aujourd'hui  l'état  de  Rossini,  sur  lequel  il  faut  ajouter  que 
les  médecins  ne  se  monlrent  pas  rassurés,  et  qui  préoccupe  à  bon  droit 
tout  le  monde  artistique.  Le  Ministre  de  la  Maison  de  l'Empereur  envoie 
chaque  jour  prendre  de  ses  nouvelles. 


^,**  Un  ancien  éditeur  de  musique,  M.  Challiot,  est  mort  le  27  de  ce 
mois.  Il  était  dans  sa  62«  année. 


ET  R  A  N  G  E  R 


j,*^  Londres.  —  Samedi  dernier  a  commencé  au  théâtre  de  Covent- 
Garden,  cédé  par  M.  Gye  à  M.  Mapleson,  la  saison  d'automne  avec  la 
troupe  de  Her  Majesty's  Opéra.  Jamais  Londres  n'avait  eu  de  représen- 
tations lyriques  d'aussi  bonne  heure  :  c'est  une  innovation  un  peu  hardie 
peut-être  ici,  mais  que  le  succès  semble  devoir  sanctionner.  On  a  donné 
Lucrezia  Borgia,  qui  a  été  supérieurement  interprétée  par  Mmes  Tietjens, 
Trebelli,  MM.  Mongini  etSantley.  Il  Trovatore  eut  venu  ensuite;  et  enfin 
jeudi,  on  a  pu  juger  la  nouvelle  prima  donna  américaine,  Mlle  Minnie 
Hauck,  dans  la  Sonnambula.  Très-jeune,  comme  Adelina  Patti  à  ses  dé- 
buts, produite  par  le  même  professeur,  abordant  le  même  opéra  pour  son 
coup  d'essai,  elle  ne  pouvait  esquiver  une  comparaison  qu'elle  semblait 
plutôt  chercher.  On  peut  dire  qu'elle  n'en  a  point  souffert,  et  que,  mal- 
gré une  inévitable  émotion,  des  qualités  précieuses  se  sont  révélées  en 


elle  dès  le  premier  .soir,  telles  que  la  pureté,  le  charme,  la  souplesse 
de  la  voix  et  beaucoup  d'expression  dans  la  manière  de  phrascr  aussi 
bien  que  dans  le  jeu.  Mlle  Hauck  n'a  pas  tardé  à  captiver  .son  public, 
et  les  applaudissements  sont  allés  en  croissant  jusqu'à  la  lin.  Mongini, 
qui  jouait  Elvino,  en  a  pris  sa  bonne  part. 

^"^  Francfort- sur-Mein.  —  Le  Premier  Jour  de  bonlieur  a  éti;  donné  le 
22  et  les  jours  suivants  et  a  obtenu  un  succès  très-vif. 

,f%  Cologne.  —  Mignon,  d'Amb.  Thoma.s,  représenté  pour  la  première 
fois  le  22  octobre,  a  généralement  plu.  On  a  beaucoup  applaudi  les  deux 
cantatrices,  Mlles  Radecke  et  Deichmann. 

,j%  Leipzig.  — Au  troisième  concert  du  Gewandhaus,  on  a  exécuté  une 
nouvelle  .symphonie  de  Max  Bruch  (on  mi  bémol  et  œuvre  28),  sur  le 
mérite  de  laquelle  la  critique  est  à  pou  près  unanime  et  qui  a  obtenu 
un  très-brillant  succès.  Le  grand  violoniste  Joachim  a  joué,  comme  il 
sait  le  faire,  le  G"  concerto  de  Spohr  et  la  fugue  du  3"  de  J.-S.  Bach. 

^*,i,  Berlin.  —  La  Vie  Parisienne  vient  de  doubler  le  cap  d(!  la  deux 
centième  représentation  au  théâtre  de  Friedrich-Wilhelmstadt. 

^,*^  Breslau.  —  Le  quatuor  des  frères  Millier  a  maintenant  à  sa  tête 
M.  Schiever,  un  élève  de  Joachim.  Il  a  déjà  donné  avec  succès  plusieurs 
soirées  de  quatuors. 

**,c  Dresde.— L'opéra  de  M.  de  Holstein,  Dcr  Jlaidcschacht,  a  reçu  à  sa 
première  représentation,  le  22  octobre,  un  très-sympathique  accueil.  — 
L'auteur  a  été  rappelé  plusieurs  fois. 

j^*^,  Vienne.  —  La  première  représentation  de  Mignon  a  eu  lieu  le  24. 
—  Le  monument  funèbre  de  Mozart,  profané  déjà  il  y  a  quelques  mois 
l'a  encore  été  tout  récemment  :  une  main  sacrilège  a  brisé  et  enlevé  le 
médaillon  qui  représentait  les  traits  du  grand  homme,  un  candélabre  et 
une  inscription,  le  tout  en  bronze. 

***  Milan.  —  Mlle  Ida  Benza,  du  théâtre  de  la  Porte-de-Carinthie  à 
Vienne,  vient  d'être  engagée  pour  la  Scala  par  l'imprésario  Bonola,  qui 
a  dii  payer  un  dédit  de  6,000  florins  pour  faire  annuler  son  premier 
contrat.  —Aune  soirée  donnée  à  la  villa  d'Esté,  résidence  de  S.  M. 
l'Impératrice  de  Russie,  l'éminente  cantatrice  Mlle  Rosa  Csillag  s'est  fait 
entendre  dans  plusieurs  lieder  de  Schubert,  Mendelssohn,  Schumann, 
etc.,  et  avec  un  tel  talent,  que  l'impératrice  a  voulu  la  complimenter 
elle-même.  Le  même  soir,  le  prince  Bariatinsky  lui  a  remis,  de  la  part 
de  Sa  Majesté,  une  magnifique  montre  enrichie  de  pierres  précieuses. 

^*„  Florence.  —  La  Società  del  Quartctlo  a  eu  la  bonne  fortune  de 
pouvoir  s'assurer  le  concours  de  Sivori  pour  quelques  concerts. 

***  Àrezzo.  —  On  a  commencé  les  travaux  pour  l'érection  du  monu- 
ment au  moine  Guido.  Le  municipe  a  voté  dans  ce  but  330,000  lire. 

^:*^  Madrid.  — La  reprise  de  l'Africaine  a  été  magnifique.  La  débutante, 
Mlle  Reboux,  a  dépassé  tout  ce  qu'on  attendait  d'elle;  elle  est  parfaite- 
ment à  l'aise  dans  ce  rôle  écrasant  de  Sélika,  et  elle  a  conquis  son  public 
du  premier  coup.  Tamberlick  est  toujours  un  Vasco  modèle.  Boccolini, 
qui  succédait  à  Bonnehée  dans  le  rôle  de  Nélusko,  héritage  lourd  à  porter, 
n'a  pas  eu  à  se  plaindre  de  l'accueil  du  public.  Mlle  Riïa  Sonieri,  qui 
joue  Inès  avec  une  grande  distinction,  a  été  rappelée  après  le  septuor  du 
second  acte.  La  salle,  comme  chaque  fois  qu'on  donne  l'Africaine,  était 
comble.  —  On  prépare  la  Juive,  qu'interpréteront  les  mêmes  artistes, 
moins  Boccolini. 


Le  Directeur      S.  DDFOCR. 

Maestro    E.     IKEUZIO, 

Maestro  di  bel  canto. 
S'adresser  pour  les  leçons  :  rue  de  Luxembourg,  5,  au  1' 

Ches  Mme  MAEYENS-COUVREUR,  rue  du  Bac,  40. 


L'ANGE  GARDIEN  DES  ENFANTS 

Mélodie  nouvelle  d' ADOLPHE  BOTTE,  transcrite  pour  le  piano 

Par  GEORGES  PFEIFFER 

Prix  :  6  francs. 


3S2 


IJKVI'K  ET  GA/KTI'K  MUSICALK  DE  l'AIU^. 


Chez  BRANDUS  et  DUFOUR,  éditeurs,  103,  rue  de  Richelieu. 

POUR  PARAITRE  MERCREDI  PROCHAIN  : 

liH    PARTITIOî*     POUlt     CHAMT     ET     PIAMO 

Format  -in-S".  de  l'opéra-bouffe  en  3  actes  Prias  net  :  10  francs. 


fe*3^ 


Paroles  de  MM.  Henri  Meilhac  et  Ludovic  Halévy, 

Musique  de 

J.    OFFENBAGH 


EN    VENTE 

Les  Airs  de  Chant  détachés  avec  accompagnement  de  Piano  : 


1 .  Chanson  des  trois  cousines,  chantée  par  Mlles  Le- 

grand,  Carlin  et   Renault  :    Promptes  o  servir  la 
■pratique 5    » 

2.  Couplets  DE  l'incognito,  chantés  par  M.  Grenier:  Sans 

en  rien  souffler  à  personne 3    » 

3.  L'Espagnol  et  la  jeune  Indienne,  complainte,  chan- 

tée par  Mlle  Schneider  et  M.  Dupuis  :  Le  conqué- 
rant dit  à  la  jeune  Indienne 4  SO 

3  bis.  La  même,  à  une  voix  et  transposée  un  ton  et  demi 

au-dessous 4    » 

4.  Le  Muletier  et  la  jeune  personne,  séguedille    pour 

SOIRÉES,  chantée   par   Mlle  Schneider  et  M.   Du- 
puis :  Vous  a-t-on  dit  .auvent  :  Ecoulez-moi,  la  fille    S     » 

5.  La  Lettre  de  la  Périchole,  chantée  par  Mlle  Schnei- 

der :  0  mon  cher  amant,  je  te  jure 3  75 

5  bis   La  même,  transposée  un  ton  au-dessus  ......     3  75 

6.  Griserie-Ariette,  chantée  par  Mlle  Schneider:  Ah! 

quel  diner  je  inetis  de  faire 3     » 

6  bis.  La  même,  transposée  un  ton  au-dessus 3     » 

7 .  Duetto  DU  MARIAGE ,   chanté   par   Mlle   Schneider  et 

M.  Dupuis  :  Je  dois  vous  prévenir,    Madame  ...     6    » 


4  50 


ACTE    II. 

8.  Cancans  Couplets,  cliantés  par  Mlles  Julia,  Renard, 

Gravier  et  Latour  :  On  vante  partout  son  sourire  . 

9.  Les  femmes,  il    n'y    a    qu'ça!  couplets,    chantés  par 

M.  Dupuis  :  Et   là,  maintenant  que  nous  sommes 
seuls 3    » 

9  bis.  Les  mômes,  transposés  un  ton  et  demi  au-dessous  .     3    » 

10.  Que  les  hommes  sont  bêtes!  couplets,  chantés  par 

Mlle  Schneider  :  Que  veulent  dire  ces  colères  ?     .     3     » 

10  bis.  Les  mêmes,  transposés  un  ton  au-dessus 3    » 

11 .  La   présentation,  rondo   de    bravoure,    chanté  par 

M.  Dupuis:  Ecoule,  ô  roi!  je  te  présente 3  75 

12.  Ronde  des  maris  ré...,  chantée  par  M.  Grenier:  Con- 

duisez-le, bon  courtisan 3     » 

13.  Duo  DES  bijoux,  chanté  par  Mlle  Schneider  et  M.  Gre- 

nier :  Monsieur  le  marchand,  qu'avez-vous.    ...     7  50 
13  bis.  Extase,    chantée   par  Mlle    Schneider:  Ah\   que 

j'aime  les  diamants 3     » 

14.  Final-Séguedille,  chantée  par  Mlle  Schneider  et  M. 

Dupuis  :    Un  roi,    se  promenant,   trouva  certaine 
femme 4    » 


Les  Airs  de  Chant  sans  accompagnement,  format  in-8°,  chaque  net,  50  c, 


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BUREAUX    A    PARIS  :    BOULEVARD   DES   ITALIENS,  1. 


35*  Année. 


N'  45. 


8  Novembre  1868. 


ON  S'ABONNE  : 

Dans  les  Déportt'inents  et  A  l'Élrangpr, 

chez  tous  les  Marchands  de  Musique,  lis  Libraire 

et  aui  Eureaux  der.  Messageries  cl  des  Postes. 


REVUE 


PRIX    DE    L'ABONNEMENT: 

Paria. 24  r.pacaa 

Départements,  Belgique  et  Siiitae....    2b  »       Jd. 
Étranger • 34  »       11. 

Le  Journal  paraît  le  DlnumohQ* 


GAZETTE  MUSICAL 


DE     PARIS 


SOMMAIRE.  —  Études  sur  Cli;iili's-Marie  de  Weber  (troisième  partie,  8=  arti- 
cle), par  Edmond  IVcukomiii.  —  Théâtre  impérial  Italien:  Lucresia 
Borgia,  par  Elias  de  Bauze.  —  Bibliograpliie  musicale.  —  Entrefllets.  — 
Nouvelles  des  tliéàtres  lyriques.   —  Nouvelles  diverses.  —  Annonces, 


ÉTUDES  SUR  CHÂRLES-fflÂRIE  DE  WEEER. 

D'après    la    blograplile    écrite    par    soa    fliM. 

TROISIÈME    PARTIE, 

(9=  article)  (1). 

Dans  notre  Histoire  du  Freischulz  (2),  parue  lors  de  la  dernière 
reprise  de  cet  opéra  à  Paris,  nous  nous  sommes  étendu  lon- 
guement sur  les  événements  que  nous  avons  résumés,  le  cadre 
du  journal  ne  nous  ayant  pas  permis  de  procéder  autrement. 
D'autre  part,  l'époque  du  Preischute  et  de  Préciosa,  qui  marque 
entre  toutes  dans  la  vie  du  maître,  est  aussi  la  plus  connue. 
Nous  nous  bornerons  donc  à  constater  le  succès  éclatant  et  qui 
grandissait  à  chaque  représentation,  du  Freischutz  à  Berlin,  et 
abandonnant  cet  ouvrage  à  ses  brillantes  destinées,  nous  allons 
reprendre  la  biographie  de  l'homme  illustre  qui  nous  occupe. 
Aussi  bien,  nous  sommes  entré  dans  la  phase  glorieuse  qui  mar- 
que les  dernières  années  de  sa  yie.  Au  Freischulz  vont  succéder 
Eurianthe  et  Ohéron,  puis  au  lendemain  même  de  cette  dernière 
création,  la  mort  implacable  viendra  briser  ce  génie  musical, 
alors  qu'il  s'élevait,  en  dépit  de  la  souffrance,  au-dessus  de  tous, 
et  que  déjà  mourant  il  projetait  ses  rayons  vivifiants  sur  le  monde 
entier.  Gloire  et  douleur,  tel  est  le  triste  bilan  des  années  qui 
nous  séparent  de  sa  dernière  heure  ! 

Peu  de  jours  après  la  première  représentation  ài\.'  Freischuiz, 
Weber  revint  à  Dresde;  la  réouverture  du  théâtre,  remis  à  neuf 
pendant  son  absence,  était  annoncée,  et  c'était  par  Don  Juan, 
chanté  pour  la   première   fois    en  allemand  dans    la   capitale  du 


(1)  Voir  les  n»»  18,  21,  23,  2S,  28,  31,  36  et  39. 

(2)  Chez  Liepmanssohn  et  Dufour,  11,  rue  des  Saints-Pères. 


royaume  de  Saxe,  qu'il  avait  formé  le  projet  d'inaugurer  la  nou- 
velle saison.  Son  intention  ne  put,  à  la  vérité,  se  réaliser;  car 
ordre  fut  donné  d'ouvrir  par  la  Donna  del  Lago,  de  Rossini,  et 
de  faire  représenter  Don  Juan  sur  le  petit  théâtre  des  Bains  de 
Linke.  Il  est  à  remarquer  cependant  que  ce  fut  Weber  qui  fut 
chargé  de  diriger  l'œuvre  du  maître  italien,  en  l'absence  de  son 
c'oUègue  Morlacchi.  Ses  soins  se  portèrent  ensuite  sur  le  théâtre 
allemand,  où  plusieurs  ouvrages  nouveaux  succédèrent  rapide- 
ment k  Don  Juan;  parmi  eux  nous  citerons  Adolphe  et  Clara,  Gu- 
lislan,  de  Dalayrac,  et  le  Nouveau  Seigneur  du  village;  Weber 
avait  monté  ce  dernier  ouvrage  a\'ec  la  religion  qu'il  professait 
pour  notre  Boïeldieu  ;  le  seul  changement  qu'on  se  fut  permis 
était  la  substitution  du  Hochheimer  des  bords  du  Rhin  au  Cham- 
be,-tin  classique. 

A  ee  moment  là  même,  il  reçut  de  la  cour  de  Hesse  l'offre  de 
prendre  la  direction  du  théâtre  de  Cassel  ;  les  avantages  qui  res- 
sortaient  de  cette  ouverture  étaient  bien  faits  pour  le  tenter  :  un 
engagement  à  vie,  une  pension  et  un  traitement  de  2,S00  thalers, 
tandis  qu'à  Dresde  il  n'avait  que  1,500  thalers;  mais  tel  était 
l'attachement  de  Weber  pour  les  murs  de  cette  ville,  — attachement 
incompréhensible  si  l'on  veut  bien  passer  en  revue  tous  les  maux 
qu'il  y  endura,  —  qu'il  refusa,  après  en  avoir  référé  au  surinten- 
dant, M.  de  Kœnneritz.  Celui-ci  lui  fit  avoir,  comme  dédomma- 
gement, une  augmentation  de...  300  thalers;  il  faut  dire  que, 
pour  ne  pas  faire  de  jaloux,  on  accorda  la  môme  faveur  à  Mor- 
lacchi. Sur  la  demande  qui  lui  fut  faite  de  désigner  un  rempla- 
çant pour  le  poste  de  Cassel,  Weber  recommanda  chaudement 
Spohr,  dont  il  tenait  le  talent  en  haute  estime;  c'est  cette  place 
que  Spohr  remplit  avec  tant  d'honneur  jusqu'à  la  fin  de  sa  car- 
rière. 

Pour  se  consoler  d'un  sacrifice  qui  ne  laissait  pas  que  de  lui 
laisser  dvis  regrets,  en  présence  surtout  de  l'indifférence  qu'il  avait 
rencontrée  chez  ses  chefs  en  cette  dernière  occasion,  et  aussi  pour 
chasser  un  autre  chagrin  que  lui  causait  une  brouille  survenue 
entre  lui  et  son  ami  Kind,  son  unique  collaborateur  des  dernières 
années,  lequel,  dans  sa  yanité  d'auteur  et  de  poète,  affectait  de 
ne  regarder  la  musique  du  Freischuiz  que  comme  une  consé- 
quence toute  naturelle  de  sa  poésie,  et  accusait  Weber  de  le  sa- 
crifier complètement ,  le  maître  résolut  de  se  remettre  au  travail. 


3S4 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


Il  composa  deux  numéros  de  ses  Trois  Pintos,  un  duo  et  un  trio, 
un  chœur  pour  voix  d'hommes,  Hussarenlied ,  et  une  longue  can- 
tate à  l'occasion  de  la  fête  d'une  sœur  du  roi,  la  princesse  des 
Deux-Ponts  :  il  est  à  noter  que  le  finale  de  cette  cantate  est  de- 
venu, presque  sans  changements,  le  premier  finale  d'Euryant/ie. 

Tandis  qu'il  s'occupait  de  ces  travaux,  le  Freischutz,  dont  le 
succès  grandissait  chaque  jour;  était  à  l'étude  sur  toutes  les  scènes 
de  l'Allemagne.  Représenté  dès  le  6  septembre  à  Vienne,  il  l'était 
peu  de  temps  après  à  Prague,  à  Leipzig,  à  Breslau,  ù  Carlsruhe, 
à  Kœnigsljerg,  etc.,  et  franchissait  la  frontière,  en  commençant 
par  Copenhague,  où  le  roi  de  Danemark  l'avait  demandé  pour  la 
célébration  de  son  jour  de  naissance.  En  présence  de  cet  enthou- 
siasme universel  pour  son  œuvre,  Weber  pensa  à  la  produire  de- 
vant le  public  de  Dresde;  mais  il  était  dit  que  Dresde,  qu'il  ai- 
mait tant,  serait  toujours  pour  lui  la  ville  maudite;  quel  qu'eût 
été  le  succès  qui  accueillit  le  Freischutz  lorsqu'il  y  fut  représenté, 
on  ne  saurait  imaginer  les  tribulations  de  toute  nature  qui  ac- 
compagnèrent la  période  de  sa  mise  à  l'étude.  La  santé ,  déjà  si 
chancelante,  du  maître  n'y  résista  pas  ;  les  symptômes  de  plus  en 
plus  alarmants  d'une  maladie  qui  ne  pardonne  pas,  ne  laissèrent 
bientôt  plus  aucun  doute  à  ses  amis.  Un  jour  qu'il  venait  de  por- 
ter son  mouchoir  ii  ses  lèvres,  il  le  relira  taché  de  sang  ;  il  pâlit 
et  murmura  :  «  A  la  grâce  de  Dieu!  » 

Dès  ce  moment,  fort  de  la  puissance  de  son  génie  dont  il  avait 
conscience,  son  unique  but  fut  de  consigner  dans  une  œuvre  im- 
périssable, tout  ce  qu'il  sentait  en  lui  de  grand  et  de  sublime.  Une 
occasion  inespérée  servit  à  souhait  sa  résolution  :  le  directeur  du 
théâtre  de  Vienne  lui  écrivit  pour  lui  demander  un  opéra.  Weber 
ne  pouvait  en  croire  ses  yeux,  et  Spohr,  qui  était  présent  lorsque 
la  lettre  lui  parvint,  dut  la  relire  après  lui  et  en  constater  l'au- 
thenticité. La  joie  fut  si  grande  qu'en  un  moment  le  passé  et  le 
présent  furent  oubliés  pour  ne  penser  qu'à  l'avenir,  à  la  gloire 
future;  Spohr,  levant  son  verre,  but  au  nouveau  chef-d'œuvre. 
Après  renseignements  pris,  Weber  s'empressa  d'accepter;  toute- 
fois, par  un  sentiment  d'exquise  délicatesse,  il  crut  devoir,  avant  de 
s'engager,  prévenir  le  ministre  Einsiedel ,  et  lui  déclarer  qu'il  ne 
signerait  avec  Vienne  qu'autant  que  son  gracieux  souverain  ne 
tiendrait  pas  à  avoir  pour  sa  capitale  la  primeur  de  son  opéra. 
Le  gracieux  souverain  fit  répondre  qu'il  n'y  avait  pas  lieu  de 
commander  un  ouvrage  nouveau  à  W^eber  puisqu'on  répétait  le 
Freischutz,  qu'il  fallait  avant  tout  voir  comment  le  public  ac- 
cueillerait cet  opéra. 

Weber  était  donc  libre.  Il  se  mit  tout  d'abord  en  quête  d'un 
bon  poëme.  Ne  pouvant  plus  compter  sur  Kind,  dont  le  mécon- 
tentement croissait  avec  le  succès  du  Freischutz,  il  lui  fallut  cher- 
cher un  nouveau  collaborateur.  Les  poètes  ne  manquaient  pas  à 
Dresde,  et  il  n'avait  qu'à  étendre  la  main  pour  trouver  un  homme 
de  talent  qui  lui  confectionnât  un  libretto  sortable.  La  fatalité  vou- 
lut qu'il  tombât  sur  un  bas-bleu,  alors  fort  à  la  mode,  qui  tenait 
dans  cette  ville  académie  de  petits  vers  doux,  tendres  et  langou- 
reux. Un  soir  de  thé  savant,  comme  la  dame  en  donnait  toutes  les  se- 
maines dans  son  salon  devenu,  en  dépit  de  la  saleté,  du  désordre  et 
du  peu  de  comfort  qui  y  régnaient,  le  rendez-vous  des  beaux 
esprits  de  la  capitale,  Weber  lui  ayant  entendu  lire  ime  nouvelle 
de  son  cru,  lui  proposa  de  devenir  sa  collaboratrice.  On  pense  si 
elle  se  hâta  d'accepter.  Restait  le  choix  d'un  sujet.  Hehnine  de 
Chezy,  —  c'était  le  nom  de  cette  dixième  muse,  —  mit  sa  biblio- 
thèque idtra-romantique  à  la  disposition  de  Weber;  aprôf.  maintes 
recherches,  on  s'en  tint  au  Recueil  de  légendes  du  Moyen-Age,  de 
Frédéric  Schlegel,  et  parmi  les  fragments  qui  le  composaient, 
ce  fut  au  moins  dramatique  de  tous  qu'on  s'arrêta;  un  conte 
traduit  du  français,  portant  ce  titre  :  Histoire  de  Gérard  de  ISevers 
et  de  la  belle  et  vertueuse  Euryanlhe,  sa  mie.  Weber   avait  une 


trop  grande  habitude  du  théâtre  pour  ne  pas  sentir  les  faibles 
ressources  que  présentait  ce  sujet  au  point  de  vue  dramatique; 
cependant  il  partagea  l'enthousiasme  d'Helmine  de  Chezy,  et  la 
pressa  de  se  mettre  à  la  besogne  :  «  Faites-moi  la  vie  aussi  dure 
que  vous  pourrez,  avec  des  coupes  métriques  bien  difficiles  et  des 
rhythmcs  bien  imprévus,  hii  avait- il  dit;  cela  fait  sortir  les  idées 
de  l'ornière  pour  les  conduire  dans  de  nouvelles  voies.  »  Mlle  de 
Chezy  n'eut  garde  de  manquer  dans  la  suite  à  cette  recommanda- 
tion ;  pour  le  moment,  elle  esquissa  un  scénario,  dans  lequel  elle 
apporta  diverses  modifications  à  l'intrigue  première  ;  il  plut  mé- 
diocrement à  Weber,  qui  le  refit;  Helmine  le  changea  à  nouveau; 
puis  encore  une  fois  Weber  à  son  tour,  de  sorte  que  le  dernier 
projet  s'éloignait  de  plus  en  plus  du  conte  de  Schlegel  ;  enfin , 
Weber  le  renvoya  en  disant  qu'il  ne  se  mêlerait  plus  de  le  re- 
faire, et  qu'il  en  laissait  dorénavant  tout  le  soin  à  sa  collabora- 
trice. 

Pendant  ce  temps,  les  répétitions  du  Freischutz  avançaient  à 
l'Opéra  de  Dresde.  Weber  n'en  fit  pas  faire  moins  de  dix,  sans 
compter  six  ou  sept  répétitions  générales,  dont  les  deux  dernières 
furent  de  véritables  représentations.  Malgré  toutes  ces  précautions, 
il  redoutait  la  partie  qu'il  allait  jouer;  c'est  que  le  public  de 
Dresde,  pour  lequel  il  s'était  pourtant  sacrifié ,  était  moins  bien 
disposé  en  sa  faveur  que  celui  de  Berlin  ;  le  parti  italien  con- 
tinuait d'y  être  tout- puissant,  le  parti  allemand  humble  et  ti- 
moré ;  c'est  aussi  qu'il  sentait  régner  autour  de  sa  personne  une 
hostilité  toujours  prête  à  se  manifester  au  grand  jour  ou  dans 
l'ombre,  et  ce  qui  revenait  à  ses  oreilles  des  bruits  de  la  ville 
n'était  pas  fait,  dans  cette  circonstance,  pour  le  rassurer.  Enfin, 
des  symptômes  alarmants  s'étaient  produits  peu  de  temps  aupa- 
ravant; ainsi,  l'ouverture  du  Freischutz,  exécutée  dans  un  concert, 
avait  été  accueillie  très-froidement,  et  le  parti  opposé  à  Weber  ne 
s'était  pas  fait  faute  de  profiter  de  cet  avantage.  Quoi  qu'il  en  soit, 
le  maître,  qui  avait  conscience  de  la  valeur  de  son  œuvre,  atten- 
dait avec  courage,  sinon  avec  confiance,  le  jour  de  son  appari- 
tion, et  grande  fut  la  compensation  des  ennuis  qui  l'avaient  précé- 
dée, car  ce  jour  venu  (22  janvier  1822) ,  le  Freischutz  alla  aux 
nues,  contre  toute  attente.  Le  public  voulut  même  entendre  deux 
fois  le  chœur  des  chasseurs,  ce  qui  était  tout  à  fait  inusité  à 
Dresde;  à  la  fin  de  la  soirée,  l'enthousiasme  était  tellement  à  son 
comble,  que  Weber  dut  paraître  sur  la  scène. 
Fidèle  à  son  habitude,  il  nota  le  soir  sur  son  agenda  : 
«  Tout  a  marché  dans  la  perfection.  Rien  à  dire;  rien  à  repren- 
dre. Le  public  m'a  rappelé  et  je  suis  venu  saluer  en  compagnie  de 
Mmes  Funk  et  Haase.  J'ai  regretté  de  ne  pouvoir  pas  amener  à 
ma  suite  l'orchestre,  les  chœurs,  les  machinistes,  car  tous  avaient 
mérité  cet  honneur!  » 

Peu  de  jours  après  l'exécution  du  Freischutz,  à  Dresde,  Weber, 
sur  l'invitation  du  directeur  Barbaja,  se  mit  en  route  pour  Vienne. 
Il  y  arriva  le  17  février,  après  un  court  séjour  à  Prague,  où  il 
entendit  une  jeune  cantatrice  qui  donnait  des  espérances;  elle 
s'appelait  Henriette  Sontag;  Weber  nota  sur  son  agenda  :  «  La 
Sontag  chante  assez  gentiment;  elle  est  jolie;  mais  c'est  une  débu- 
tante qui  a  l'air  d'une  grue.  » 

Le  lendemain  de  son  arrivée  dans  la  capitale  de  l'empire  d'Au- 
triche, il  assista  à  une  représentation  du  Freischutz,  mais  quelle 
représentation!  D'une  part,  la  censure  avait  mutilé  l'œuvre  d'un 
bout  à  l'autre  ;  elle  avait  supprimé  les  rôles  de  l'ermite  et  de 
Samiel;  de  l'autre,  pour  plaire  à  l'empereur,  qui  n'aimait  pas  les 
coups  de  fusil,  on  avait  remplacé  la  carabine  de  Max  par  une 
arbalète,  de  sorte  que  la  scène  si  fantastique  de  la  fonte  des  balles 
s'était  changée  en  une  insipide  recherche  de  flèches  enchantées. 

Weber  ne  put  dissimuler  son  mécontentement;  il  songea  à  repar- 
tir aussitôt,  et  peu  s'en  fallut  qu'il  ne  composât  son  Euryanthe. . . 


DE  PARIS. 


355 


pour  Paris!  En  effet,  il  venait  de  recevoir  une  lettre  de  l'éditeur 
Maurice  Schlesinger,  dans  laquelle  celui-ci  lui  proposait  d'être  son 
intermédiaire  pour  un  ouvrage  composé  spécialement  pour  le  Grand- 
Opéra  de  Paris.  Schlesinger  ajoutait  qu'il  ne  doutait  pas  du  succès. 
Cotte  offre  était  tentante,  et  il  menaça  Barbaja  de  l'accepter.  Par 
Lonlieur. . .  pour  les  Viennois,  Mme  Schrœder,  qui  était  l'idole  du 
public,  eut  l'idée  de  le  supplier  de  diriger  le  Freischulz  le  jour  de 
son  bénélice.  Après  beaucoup  d'hésitations  Weber,  qui  tenait  et  ^ 
bon  droit  Mme  Schrœder  en  grande  estime,  y  consentit;  mais  il 
y  mit  pour  condition  que  son  opéra  serait  exécuté  dans  toute  son 
intégrité ,  et  il  fit  tant  et  si  bien  qu'on  lui  rendit  ses  balles ,  son 
ermite  et  son  Samiel.  Cette  représentation  ne  fut  qu'un  long 
triomphe  pour  Weber,  qui,  dès  lors,  rompit  ses  négociations  avec 
Schlesinger  et  ne  songea  plus  qu'à  étudier  les  ressources  que  lui 
présentait  Vienne  pour  Euryanthe. . .  Satisfait  de  son  examen,  il 
retourna,  après  un  mois  de  séjour  dans  celle  ville,  à  Dresde,  où, 
peu  de  jours  après  son  arrivée ,  sa  femme  lui  donna  un  fils ,  qui 
reçut,  en  l'honneur  du  héros  du  Freischutz,  le  prénom  de  Max. 
Ce  fils  n'est  autre  que  le  pieux  biographe  auquel  nous  emprun- 
tons le  récit  de  la  vie  du  grand  homme  qui  nous  occupe. 

Edmond  NEUKOMM. 
(La  suite  prochainement.) 


THÉÂTRE  IMPERIAL  ITALIEN. 

liucrexta  Borgia. 

Décidément,  la  Contessina  joue  de  malheur!  On  favait  annoncée 
pour  mardi  dernier,  et  c'était  Mlle  Krauss  qui  devait  remplir  le 
rôle  créé  par  Mme  Tiberini,  pris  ensuite  par  Mlle  Ricci;  ce  beau 
rôle  d'Herminie,  moitié  d'artiste  dramatique,  moitié  de  cantatrice 
légère,  et  que  le  musicien  a  caressé  le  plus  amoureusement.  Mais 
une  indisposition  de  M.  Fraschini  a  forcé  la  direction  à  chan- 
ger brusquement  l'affiche.  C'est  dommage,  car  les  représentations 
du  célèbre  ténor  sont  comptées  ;  le  temps  qu'il  doit  rester  à  Paris 
lui  est  mesuré  d'une  main  avare.  A  moins  donc  que  M.  Nicolini 
ne  lui  succède  dans  le  rôle  de  Conrad,  —  qui  doit  lui  aller  à  mer- 
veille, —  on  pourrait  craindre  que  la  nouvelle  série  des  représen- 
tations de  l'ouvrage  du  prince  Poniatowski  ne  fût  courte.  La  pre- 
mière l'a  été  déjà  trop. 

C'est  par  Lucrezia  Borgia  qu'on  a  remplacé  l'œuvre  de  l'artiste 
patricien . 

Mais,  là  aussi,  il  devait  y  avoir  un  accroc  :  cette  fois  c'était  Nico- 
lini  qui  était  enrhumé.  Il  y  a,  paraît-il,  une  épidémie  parmi  les 
ténors.  Nicolini  devait  chanter  à  la  place  de  Fraschini.  C'est  Pa- 
lermi  qui  a  chanté  à  la  place  de  Nicolini.  Palermi  n'est  pas  pré- 
cisément le  ténor  des  opéras  dramatiques.  Il  excelle  dans  le  genre 
léger;  bon  vocaliste,  il  a  tout  à  gagner  en  s'enfermant  dans  le 
répertoire  rossinien,  ou  en  ne  choisissant  que  les  partitions  des 
autres  compositeurs  dans  lesquelles  le  chant  l'emporte  sur 
l'élément  dramatique.  Lucrezia  Borgia,  malgré  les  ravissantes  mé- 
lodies qui  composent  la  plus  grande  partie  du  rôle  de  Gennaro, 
n'est  pas  de  ce  nombre.  Toutefois,  il  faut  savoir  gré  au  jeune  teno- 
rino  du  zèle  qu'il  a  déployé  et  surtout  de  la  complaisance  dont  il 
a  fait  preuve  en  chantant  cet  opéra  au  pied  levé,  comme  l'on  dit. 

Par  bonheur,  les  autres  rôles  étaient  distribués  avec  intelligence 
et  parfaitement  appropriés  aux  moyens  des  divers  interprètes  : 
Mlle  Krauss,  Mlle  Gi-ossi,  M.  Steller. 

Steller,  on  le  sait,  a  débuté  par  cet  opéra.  Sa  belle  prestance, 
son  organe  mâle  et  robuste,  une  certaine  noblesse  dans  le  jeu,  je 
ne  sais  quoi  de  saccadé  et  de  véiiément  dans  les  passages  drama- 
tiques, en  font  un  don  Alphonse  excellent.  A  notre  avis,  ce  rôle, 


qui  paraissait  effacé,  a  été  relevé  par  le  nouveau  baryton  de  la 
place  Ventadour.  La  strelta  de  son  air,  sur  des  paroles  qui  res- 
semblent un  peu  trop  à  un  entrefilet  de  journal  polili<iue,  cotte 
stretla  plutôt  diplomatique  que  musicale,  a  été  enlevée  par  M.  Sti;!- 
1er  d'une  façon  très-heureuse.  Jamais  on  ne  l'avait  tant  applaudie; 
il  l'a  fait  ressortir  admirablement.  On  oublie  la  question  de  droits 
des  gens  dont  elle  traite  pour  ne  s'occu[)er  que  du  talent  de 
l'artiste,  que  de  la  vigueur  avec  laquelle  il  l'attaque.  1!  a  surtout 
des  effets  de  colère  concentrée  trouvés  avec  une  intolligonce  peu 
commune.  —  Dans  le  trio  aussi,  ce  modèle  do  déclamation  lyri- 
que, M.  Steller  s'est  montré  aussi  excellent  acteur  que  chanteur 
distingué. 

Le  rôle  d'Orsini  est  le  bonheur  des  contralti.  Il  a  la  délicieuse 
romance  :  Nella  fatal  di  Rimini  ;  il  a  le  fameux  brindisi  : 
Il  segreto  pcr  esser  felici.  Ces  deux  morceaux,  d'un  effet  cer- 
tain, suffisent  à  l'artiste,  si  bornés  que  soient  ses  moyens,  pour  la 
faire  applaudir.  C'est  le  compositeur  qu'on  applaudit  dans  la  can- 
tatrice ;  mais,  quand  on  est  assez  heureux  pour  posséder  un  con- 
tralto de  la  force  et  du  talent  de  Mlle  Grossi,  ou  applaudit  tout  à 
la  fois  et  la  musique  et  l'exécution,  et  l'on  nidemande  le  brindisi. 

Nous  avons  gardé  Mlle  Krauss  pour  la  fin,  peut-être  pour  nous 
conformer  aux  paroles  de  l'Écriture  :  «  Les  derniers  seront  les 
premiers.  » 

Mlle  Krauss  est  musicienne  et  cantatrice  hors  ligne.  Elle  a  la 
voix,  elle  a  la  physionomie,  elle  a  le  jeu;  elle  sent  ce  qu'elle  dit, 
et  le  dit  à  ravir.  Quand  elle  apparaît  masquée,  au  premier  acte, 
pour  contempler  son  fils  Gennaro  assoupi,  on  la  dirait  descendue 
du  cadre  de  quelque  tableau  de  l'école  vénitienne.  On  s'étonne  de 
l'entendre  chanter,  d'un  voix  si  douce,  ces  tendres  paroles  : 

Com'  è  bello  !  quale  incanto  ; 
ce  sont  les  baisers  maternels  de  la  tigresse  !  Mais,  plus  tard,  lors- 
qu'Orsini  lui  arrache  ce  masque  au  travers  duquel  on  voyait  ses 
yôux  lancer  des  éclairs,  la  femme  se  révèle,  le  sang  des  Borgia 
bouillonne  dans  ses  veines;  ces  hommes,  qui  l'ont  insultée  en  fris- 
sonnent :  ils  devinent  qu'ils  paieront  cher  leur  outrage. 

Dans  le  trio,  lorsque  tremblante,  éperdue,  folle  de  crainte  et  de 
terreur,  elle  implore  d'un  regard  don  Âlfouso,  qui  la  courbe  sous 
sa  cruelle  et  froide  ironie,  Mlle  Krauss  est  vraiment  remarquable 
de  sentiment  dramatique.  Et  notez  qu'il  en  faut  beaucoup,  car 
chacun  des  morceaux  qu'elle  chante  dans  cet  opéra  est  d'une  cou- 
leur et  d'un  caractère  différents  :  il  y  a  la  mère,  la  femme  tantôt 
révoltée,  tantôt  soumise,  la  vengeresse;  tendresses,  prières,  me- 
naces, défis,  désespoir,  il  y  a  de  tout  dans  ce  rôle  multiple  et  chan- 
geant. 

Mlle  Krauss ,  répétons-le,  l'a  chanté  et  joué  avec  un  talent  égal 
au  succès;  et  ce  succès  a  été  immense,  légitime,  mérité. 

Nous  l'attendons  avec  impatience  dans  le  rôle  de  la  Contesiina. 
Comment  la  sombre  et  terrifiante  Lucrèce  deviendra-l-elle  la  co- 
quette et  vaniteuse  Herminie?  Nous  verrons. 

Elias  de  RAUZE. 


BIBU06RÂPHIE  MSICÂLE. 

•Jacques  Daur.   Chœur  des  Éréques ,  de  l'Africaine  ,  transcrit  pour 
piano.  —  Térésa  Carreno.  Fantaisie  sur  l'Africaine,  pour  piano. 

La  transcription  du  Chœur  des  Évêques  de  l'Africaine  a  fourni  à 
M.  Jacques  Baur  l'occasion  d'écrire  quelques  pages  d'un  haut  intérêt  et 
d'une  maestria  saisissante.  Ce  magnifique  morceau,  l'une  des  plus  splen- 
dides  inspirations  de  Mcyerbeer,  ne  pouvait  manquer  d'exercer  son  in- 
fluence sur  le  talent  du  transcripteur,  qui  s'est  maintenu  constamment, 
dans  cette  œuvre  courte  et  substantielle,  à  une  grande  élévation,  bien 
digne  de  son  sujet.  On  peut  prédire  avec  assurance  que  ses  efforts  n'au- 
ront pas  été  stériles. 


3S6 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


L;i  Fantaisie  de  Térésa  Carreno  a  plus  d'étendue,  el  ne  se  borne  pas 
à  i  11  seul  morceau  de  l'opéra  posthume  de  l'auteur  des  Huguenots.  C'est 
en  quelque  sorte  la  quintessence  des  beautés  de  cette  partition  grandiose. 
L'arrangeuse,  pianiste  d'un  mérite  reconnu,  a  fait  preuve,  dans  sa  Fan- 
taisie, d'un  goût  parfait,  uni  à  la  science  la  plus  pure  et  à  la  mise  en 
œuvii;  la  plus  complète  des  ressources  de  son  instrument. 


Ernest  Ktocgcr. —  Trois  morceaux  de  concert  :  1°  Impromptl-scheuzo; 
2°  PnÉLUDE  ;  3°  Novelletta,  pour  le  piano. 

Nous  ne  saurions  trop  appeler  l'attention  sur  ces  œuvres  nouvelles  de 
M.  Ernest  Stoeger,  un  jeune  et  brillant  artiste ,  qui  n'est  pas  moins 
digne  d'intérêt  comme  compositeur  que  comme  virtuose.  Nous  avons  vu 
et  entendu  l'effet  produit  par  ces  trois  morceaux  de  concert,  et  nous 
pouvons  attester  qu'il  est  considérable.  11  est  vrai  que  les  doigts  d'acier 
de  l'niiteur  leur  donnent  un  cachet  d'autorité  et  de  puissance  auquel  il 
n'est  pas  fort  aisé  d'atteindre.  11  n'y  a  pas  là  pourtant  d'obstacle  infran- 
chissable, et  l'on  peut  encore,  après  lui,  arriver  à  un  résultat  satisfai- 
sant. 

VImpromptu-Scherzo,  tout  plein  de  détails  piquants  et  divers,  est  une 
étude  attachante  pour  l'agihié  de  la  main  et  pour  la  mesure  à  contre- 
temps. Les  développements  de  ce  morceau  ont  permis  à  M.  Stoeger  d'y 
affirmer  la  réalité  de  son  savoir  harmonique,  qui  est  incontestable.  Le 
PréluJr  a  moins  d'ampleur,  mais,  en  peu  de  pages,  il  offre  un  rare 
exemple  de  style  et  d'expression.  Enfin,  la  NnvcUclta  est  une  délicieuse 
fantaisie,  dont  le  thème  principal  s'impose  forcément  à  la  mémoire,  en 
raison  de  son  originalité,  et  dont  le  passage  par  octaves  rapides  pré- 
sente un  sujet  de  difficultés  à  vaincre  pour  la  justesse  du  doigté.  Chez 
M.  Stoeger,  les  procédés  de  l'exécution  marchent  toujours  de  pair  avec 
ceux  de  l'inspiration  musicale. 


S  b.  A.  Palmer.  —  Mukmures,  nocturne,  élude  pour  le  piano  ;  Si  vous 
n'avez  rien  a  me  dire,  poésie  de  Victor  Hugo,  pour  Is  chant. 

Sous  le  titre  de  Murmures ,  M.  Palmer,  pianiste  distingue,  vient  de 
faire  paraître  un  nocturne-étude,  qui  se  recommande  par  des  qualité:* 
essentielles.  Après  un  largo  d'une  quinzaine  de  mesures  plaquées  en 
accords  graves,  le  compositeur  entre  immétiiatement  en  matière  par 
l'exposition  d'un  chant  calme  et  soutenu,  dont  la  clarté  est  exemplaire, 
et  dont  le  charme  égale  la  simplicité.  Repris  en  sous-œuvre,  ce  chant 
est  agrémenté  de  délicates  broderies,  murmurées  pour  ainsi  dire  par  la 
main  droite  et  se  fondant  dans  un  pianissimo  final.  C'est  ainsi  que  le 
titre  est  justifié. 

Les  jolis  couplets  de  Victor  Hugo  :  S»  vous  n'avez  rien  à  me  dire,  ont 
été  mis  déjà  plusieurs  fois  en  musique,  et  non  sans  succès.  Ces  précé- 
dents n'ont  pas  effrayé  M.  Palmer,  qui  a  eu  parfaitement  raison  de  ne 
pas  reculer  devant  la  concurrence,  car  l'inspiration  que  lui  a  suggérée 
la  poésie  de  l'illustre  auteur  diHemani  est  neuve  et  piquante.  Nous  croyons 
que,  comme  ses  aînées,  elle  obtiendra  la  faveur  des  salons,  qu'elle  mé- 
rite à  tous  égards. 


jr.-P.  Ooldlierg;.  —  Le  Message  (die  Potschaft), 
mélodie  caractéristique. 

On  a  fait  bien  des  mélodies  sur  les  hirondelles,  ces  messagères  com- 
plaisantes qui  emportent  tour  à  tour  avec  elles  un  souvenir  d'amour  ou 
une  plainte  d'exilé.  C'est  presque  un  lieu  commun,  qui  n'aurait  plus  sa 
raison  d'être  s'il  n'était  rajeuni  par  une  poésie  nouvelle  et  charmante 
comme  celle  de  M.  Ph.  Théolier.  Le  plus  grand  éloge  qu'on  puisse  faire 
de  ses  vers,  c'est  qu'ils  ont  inspiré  à  M.  Goldberg  un  chant  caractéris- 
tique, qui  remue  et  caresse  les  fibres  les  plus  intimes  du  cœur.  La  cou- 
leur germanique  de  cette  mélodie  lui  prête  une  certaine  ressemblance 
avec  les  Lieders  d'outre-Rhin.  Il  n'est  pas  inutile  d'ajouter,  pour  com- 
pléter ce  rapprochement,  qu'une  version  allemande  est  jointe,  dans  le 
texte,  aux  paroles  françaises  de  M.  Théolier. 


J.-B.  Duvernoy.  Fantaisie  brillante  sur  les  Dragons  de  Villars, 
pour  le  piano.  —  E.  Kcttcrer.  Fantaisie  brillante  sur  le  même 
opéra. 

11  semble  que  MM.  Duvernoy  et  Ketterer,  en  venant,  à  leur  tour,  com- 
menter l'opéra  de  M.  Aimé  Maillart,  si  longtemps  après  son  apparition, 
ne  soient  que  des  retardataires  qui  ont  laissé  passer  l'heure  de  la  mois- 
son et  qui  arrivent  quand  les  blés  sont  rentrés.  Mais  il  est  bon  de  con- 
sidérer que  rOpéra-Comique,  en  prenant  à  son  répertoire  les  Dragons  de 
Villars,  vient  de  leur  donner  une  seconde  existence  qui,  à  tous  les  points 


de  vue,  recommence  et  même  dépasse  la  première.  Les  commentateurs 
peuvent  donc  de  nouveau  se  mettre  à  l'œuvre,  sans  craindre  de  prêcher 
dans  le  désert. 

Nous  n'avons  pas  à  énumér«r  les  morceaux  saillants  de  ce  remar- 
quable ouvrage;  ils  sont  nombreux,  et  les  compositeurs  n'ont  que  l'em- 
barras du  choix  pour  en  faire  le  sujet  de  leurs  arrangements.  M.  Duver- 
noy, dans  une  Fantaisie  brillante  et  très-habilement  agencée,  a  jeté  son 
dévolu  sur  les  thèmes  :  Espoir  charmant!  et  :  Oui,  c'est  moi  qu'il  a 
choisie,  du  grand  air  de  Rose  Friquet.  Ces  deux  principaux  motifs  sont 
liés  par  de  légers  fragments  qui  complètent  un  ensemble  des  plus  agréa- 
bles et  des  plus  gracieux.  —  Quant  à  M.  Ketterer,  il  s'est  emparé  aussi 
de  la  romance  ;  Espoir  charmant  !  qu'il  a  ornée  de  ces  étincelanies  bro- 
deries dont  il  a  le  secret,  et,  par  une  ingénieuse  transition,  il  y  a  joint 
les  couplets  devenus  populaires  de  la  Clochette  de  l'Ermite.  On  retrouve 
dans  cette  Fantaisie  toutes  les  qualités  de  composition  et  de  style  qui 
distinguent  les  œuvres  de  l'éminent  pianiste. 


La  Cour  impériale  vient  de  l'aire  une  application  très- impor- 
tante de  la  loi  rendue  en  4866  sur  la  propriété  littéraire  et  artis- 
tique. 

Divers  sculpteurs  et  fabricants  de  bronze  avaient  Intenté  à  d'au- 
tres fabricants  un  procès  en  contrefaçon  de  statuettes  et  d'animaux 
dont  il  sont  les  auteurs  ou  les  cessionnaircs.  Un  jugement  du 
Tribunal  de  première  instance  leur  avait  donné  gain  de  cause. 
Deux  des  prévenus  avaient  inteijeté  app.'l.  Mais  la  Cour,  dans  un 
arrêt  rendu  le  19  mars  dernier  et  fortement  motivé,  a  mis  cet 
appel  au  néant,  et  les  a  condamnés  coiiiine  contrefacteurs. 

Il  ressort  de  ce  jugement  que  : 

«  Les  lois  du  8  avril  18oi  et  du  14  juillet  186(i,  qui  ont  prolongé  la 
durée  des  droits  des  veuves  et  des  héritiers  des  auteurs  et  artistes,  s'ap- 
pliquent indistinctement  à  toutes  les  œuvres  non  tombées  dans  le  do- 
maine public. 

V  En  conséquence,  bien  qu'en  principe  les  droits  résultant  d'une  suc- 
cession se  trouvent  déterminés  par  la  législation  en  vigueur,  au  mo- 
ment du  décès,  les  veuves  et  héritici-s  des  auteurs  et  artistes  décèdes  an- 
térieurement aux  lois  de  185i  et  186(i  ont  profité  des  diverses  prolon- 
gations de  droit  accordées  par  ces  lois. 

»  Vainement  soutiendrait-on  que  l''  terme  fixé  par  la  législation  an- 
térieure constituait  un  droit  acquis  pour  le  public,  et  que  ce  serait  don- 
ner aux  lois  nouvelles  un  effet  rétroactif.  Tant  qu'une  œuvre  littéraire 
ou  artistique  n'est  pas  tombée  dans  le  domaine  public,  il  ne  peut  y 
avoir  qu'une  expectative  et  non  un  droit  acquis. 

•  En  admettant  que  les  lois  de  1853  et  1866  doivent,  pour  les  œu- 
vres des  jiuteurs  el  artistes  décédés  avant  leur  promulgation,  profiter 
aux  veuves  et  héritiers  de  préférence  aux  cessionnaires,  la  déclaration 
des  ayants  cause  de  l'auteur  ou  de  l'artiste  qu'ils  entendent  continuer 
aux  cessionnaires  le  bénéfice  de  la  cession  ,  suffit  pour  légitimer  les 
poursuites  en  contrefaçon  intentées  par  ces  derniers.  » 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 


»*^  Le  théâtre  impérial  de  l'Opéra  a  donné,  lundi  et  mercredi,  Hamlet, 
et  vendredi  Herculanum.  On  répète  aujourd'hui  et  on  répétera  mardi  géné- 
ralement les  Huguenots,  dont  h  reprise  aura  lieu  mercredi  ou  vendredi. 
—  Par  suite  d'une  indisposition  prolongée  de  M.  Petilpa,  la  direction 
a  chargé  M.  Justament  de  s'occuper  de  la  chorégraphie.  C'est  à  tort 
qu'on  a  dit  qu'il  y  serait  fait  des  additions  de  musique;  il  n'en  existe 
pas  d'autre  que  celle  qui  a  été  entendue  dès  l'origine;  mais  le  diver- 
tissement a  reçu  une  nouvelle  disposition  très-heureuse  et  qui  produira 
sans  aucun  doute  beaucoup  d'effet. 

^*:,;  Dimanche  dernier  le  théâtre  de  l'Opéra-Comique  donnait  le  Cha- 
let pour  le  début  de  Mlle  Guillot,  prix  du  Conservatoire.  Un  accueil  des 
plus  encourageants  a  été  fait  à  cette  jeune  artiste,  qui  compte  à  peine 
dix-sept  ans  ;  elle  possède  un  physique  gracieux  et  sympathique,  joue 
avec  intelligence  et  chante  fort  agréablement.  Elle  doit  continuer  ses  dé- 
buts par  le  rôle  d'Irma  du  Ma^on. 

jf*^  Mercredi  a  reparu  Mignon,  qu'une  indisposition  de  Mme  Galli- 
Marié  ajournait  depuis  un  quinzaine.  L'opéra  d'Amb.  Thomas  n'a  pas 
reçu  un  accueil  moins  chaleureux  que  s'il  ne  comptait  pas  déjà  160  re- 
présentations. Tous  les  interprètes  y  ont  été  fêtés,  particulièrement 
Mme  Galli-Marié  à  laquelle  on  a  prodigué  les'bis,  les  rappels  et  les  bou- 
quets, et  l'excellent  Couderc  qui  reprenait  son  rôle  de  Laerte,  l'une  de 


1>E  PAlilS. 


357 


ses  meilleures  créations.   Mme  Adelina  Patti  assistait  à  la  représentation 
et  donnait  le  signal  des  applaudissements. 

***  La  Fontaine  de  Bcrny,  tel  est  est  le  titre  d'un  opéra-comique  en 
un  acte,  paroles  de  MM.  Michel  Carré  et  Albéric  Second,  musique  de 
M.  Ad.  Nibelle,  qu'on  va  mettre  prochainement  en  répétition  au  même 
théâtre. 

***  Onze  représentations  de  Mme  A.  Patti,  données  pendant  le  mois 
d'octobre,  ont  produit  à  la  direction  du  théâtre  Italien  la  somme  de 
H7,0.12  francs,  soit  une  moyenne  de  13,449  francs  par  représentation, 
et  cela  malgré  huit  services  de  première  faits  à  la  presse. 

»*:^  Mlle  Hauck,  dont  nous  avons  annoncé  le  grand  succès  à  Lon- 
dres, sera  de  retour  à  Paris  à  la  lin  de  ce  mois,  où  elle  doit  commen- 
cer ses  représentations  au  théâtre  Italien. 

**«  Au  théâtre  Lyrique,  mardi  dernier,  au  lendemain  de  Martha  et  du 
Val  (TAndorre,  le  Barbier  de  SévUle  s'est  produit.  Le  public  n'a  pas 
manqué  et  ne  manquera  pas  d'aller  se  délecter  à  ce  chef-d'œuvre  qui, 
depuis  bien  longtemps,  n'avait  pas  été  chanté  en  français.  La  partition 
rossinienne  servait  de  début,  dans  le  rôle  de  Figaro,  à  M.  Aubéry,  pren)ier 
prix  de  chant  et  d'opéra-comique  aux  derniers  concours  du  Conservatoire, 
et  élève  de  Vauthrot.  Ce  jeune  artiste,  originaire  de  Toulouse,  s'est 
heureusement  tiré  de  cette  épreuve  difficile.  Sa  voix  manque  de  puis- 
sance dans  le  médium  et  le  timbre  pourrait  en  être  plus  agréable,  mais 
il  chante  habilement  et  il  a  dit  avec  esprit  et  un  excellent  sentiment 
musical  les  parties  les  plus  périlleuses  de  son  rôle.  C'est,  en  résumé,  un 
bon  début  et  qui  permet  de  bien  augurer  de  l'avenir  de  cet  intelligent 
chanteur  et  comédien.  —  Le  rôle  difficile  d'Almaviva  incombait  à 
M.  Blum,  qui  s'est  fait  entendre,  il  y  a  quelques  années,  ce  nous  semble, 
dans  Rigoktto.  Voix  sympathique  et  pure,  vocalisation  facile,  méthode 
excellente,  M.  Blum  a  tout  ce  qu'il  faut  pour  réussir,  à  la  condition 
d'introduire  un  peu  de  chaleur  dans  son  jeu  et  de  surmonter  l'effroi  qui 
paralyse  ses  moyens.  —  Mlle  Jeanne  Devriès,  sous  les  traits  de  Rosine, 
a  plutôt  conquis  que  véritablement  séduit  le  public.  Sa  voix  étendue  et 
exercée,  son  exécution  brillante,  sa  virtuosité  qui  vise  aux  difficultés  pour 
les  surmonter  avec  un  rare  bonheur,  manquent  un  peu  de  charme  et 
de  sentiment.  —  MM.  Wartel  et  Labat  ont  fort  bien  tenu  les  rôles  des 
deux  basses.  —  L'orchestre,  sous  la  direction  de  M.  Mangin,  s'est  ac- 
quitté de  sa  tâche  avec  un  ensemble,  une  finesse  et  une  précision  remar- 
quables. —  La  seconde  représentation  du  Barbier  a  été  très-belle  et  a 
valu  à  Mlle  Devriès  d'unanimes  applaudissements.  Ce  succès  et  celui  du 
Val  d'Andorre,  joué  déjà  sept  fois  devant  une  salle  comble,  a  décidé  la 
direction  à  ne  donner  que  dans  quelques  jours  la  reprise  d'Ipliigénie  en 
Tauride,  de  Gluck,  auquel  elle  travaille  depuis  son  entrée  en  possession 
et  qui  est  toute  prête. 

,*»  Le  théâtre  des  Bouffes-Parisiens,  dont  le  public  élégant  a  réappris 
le  chemin ,  a  modifié  son  spectacle  la  semaine  dernière.  La  Chanson  de 
Fortunio  et  Jeanne  qui  pleure  et  Jean  qui  rit  ont  été  repris,  cette  der- 
nière pièce  pour  la  rentrée  de  Désiré.  Mlle  Périer,  le  nouveau  Yalentin 
de  la  Chanson,  n'a  pas  tout  à  fait  tenu  ce  qu'elle  promettait  dans  le  Fifre 
enchanté.  L'interprétation  générale  n'était  pas  d'ailleurs  irréprochable  — 
Le  retour  de  Désiré  a  été  fêté  par  de  chaleureux  applaudissements.  — 
Mlle  Fonli,  dans  le  double  rôle  de  Jean  et  de  Jeanne,  s'est  fait  surtout  re- 
marquer comme  chanteuse. 

^*«  Par  suite  d'une  indisposition  d'Arsandaux,  le  théâtre  des  Fantai- 
sies-Parisiennes ne  donnera  que  demain  la  reprise  de  la  Fête  du,  village 
voisin,  opéra  de  Boïeldieu.  11  sera  interprété  par  Thierry,  Mortier,  Ar- 
sandaux,  Davoust,  Mmes  Cazal,  Flachat,  Decroix,  Persini. 

^*^  Au  nombre  des  ouvrages  mis  à  l'étude  par  ce  théâtre,  nous  de- 
vons mentionner  le  charmant  opéra-comique  d'Adolphe  Adam,  la  Poupée 
de  Nuremberg,  qui  obtint  dans  le  temps  un  si  grand  succès  au  théâtre 
Lyrique. 

***  La  nouvelle  direction  des  Folies-Marigny  vient  de  s'annoncer  par 
deux  succès  :  celui  d'un  charmant  vaudeville,  A  qui  le  faux-col?  et  d'une 
opérette,  Jean  qui  pleure  et  Jean  qui  rit,  dont  la  musique  fait  honneur  à 
M.  Marc  Chautagne.  Il  y  a  là  une  chanson  du  Vieillard  très-réussie.  Les 
deux  ouvrages  sont  fort  bien  interprétés.  — Aux  soins  que  prend  M.  Mon- 
taubry,  on  peut  s'attendre  à  voir  la  petite  scène  des  Champs-Elysées  ac- 
quérir une  véritable  importance. 

^.**  Le  théâtre  du  Palais-Royal  vient  de  reprendre  une  des  meilleures* 
bouffonneries  de  son  répertoire,  le  Brésilien.  On  se  rappelle  la  vogue  im- 
mense qu'obtint  la  Chanson  du  Brésilien,  d'Offenbach,  intercalée  dans  la 
pièce,  et  que  chantaient  d'une  façon  si  plaisante  Brasseur  et  Gil-Pérez. 

,*,  Les  principales  scènes  de  France  et  de  l'étranger  s'apprêtent  à 
monter  la  Périckole,  qui  continue  à  remplir  tous  les  soirs  la  salle  des 
Variétés.  On  la  répète  au  théâtre  des  Galeries,  à  Bruxelles,  qui  sera  le 
premier  à  la  représenter. 

^*^  A  Lorient,  la  première  représentation  de  la  Grande-Duchesse  a  été 
un  succès  complet  et  définitivement  consacré  sur  cette  scène  par  les  re- 
présentations qui  ont  suivi.  Ensemble  excellent;  mise  en  scène  luxueuse; 
costumes  et  décors  d'une  fraîcheur  printanière.  Mme  Libert  est  une  sou- 
veraine des  plus  excentriques,  M.  Gilbert  un  Fritz  étourdissant  de  naïveté. 
Cela  a  été  une  belle  partie  pour  la  direction  et  bien  gagnée. 


.^,*t  Pendant  le  règne  de  la  reine  Isabelle  II,  la  censure  avait  interdit 
la  représentation,  en  Espagne,  de  la  Grande-Duchesse  de  Gcrolstein.  A 
peine  l'ordre  de  choses  a-t-il  été  changé,  que  le  directeur  du  théâtre  des 
Btifos  s'est  empressé  de  faire  traduire  l'opéra  d'Odenbach  en  espagnol,  et 
la  première  représentation  a  dû  en  avoir  lieu  hier. 

*'**  On  nous  écrit  de  Saint-Pétersbourg  :  «  Le  ballet  le  Roi  Candaulc, 
qui  vient  d'être  donné  au  bénéfice  de  notre  première  danseuse  Mlle  Dor, 
a  obtenu  le  plus  éclatant  succès.  Le  scénario  est  de  M.  de  Saint-Georges, 
la  chorégraphie  de  Marius  Petipa,  et  la  musique  de  Pugny.  Les  décors 
sont  merveilleux  et  l'on  a  particulièrement  applaudi  les  3»,  4"  et  dernier 
tableaux,  qui  représentent  une  forêt,  le  camp  des  Lydiens,  l'entrée  triom- 
phale à  Sardes,  la  salle  des  bains  de  la  reine,  la  chambre  ii  coucher  de 
Candaule,  le  fnstin  du  deuxième  mariage.  Les  costumes,  faits  à  Paris, 
sont  d'une  richesse  inouïe,  et  on  compte  sur  une  vogue  analogue  à  celle 
qu'obtint,  il  y  a  quelques  années,  la  Fille  de  Pharaon.  La  salle  était 
comble  et  toute  la  Cour  assistait  ;i  cette  représentation,  qui  a  valu  à  la 
bénéficiaire  des  cadeaux  d'une  grande  valeur.  —  Au  théâtre  Michel , 
on  a  représenté  Fleur  de  Thé,  malheureusement  sans  la  Schneider  de  notre 
théâtre,  Mme  Deveria;  l'accueil  fait  à  la  charmante  opérette  de  Ch.  Lecocq 
s'en  est  un  peu  ressenti ,  mais  on  n'en  a  pas  moins  apprécié  le  mérite 
de  l'œuvre.» —  De  Moscou,  les  nouvelles  ne  sont  pas  moins  brillantes  : 
«  les  représentations  du  Théâtre  Italien  font  fureur  et  les  chefs-d'œuvre 
s'y  succèdent  avec  une  rapidité  qui  fait  le  plus  grand  honneur  à  l'acti- 
vité et  au  goût  de  la  Direction.  Les  deux  étoiles  de  la  troupe  sont 
Désirée  Artôt  et  le  ténor  Stagne  ;  notre  prima  donna  a  retrouvé  les  ova- 
tions enthousiastes,  les  triomphes  qui  ont  signalé  son  apparition  sur  la 
scène  de  Moscou  la  sa  son  dernière.  Elle  passionne  littéralement  notre 
public  qui  n'a  d'yeux  et  d'oreilles  que  pour  sa  cantatrice  favorite.  La  ville 
de  Moscou  est  inondée  des  produits  les  plus  variés  qui  ont  tous  pour 
estampille  le  nom  de  votre  célèbre  compatriote;  on  ne  voit  que  :  gâteaux 
Artôt,  gants  Artôt,  cigarettes  Artôt,  etc.,  etc.  »  Le  rôle  de  Valentine 
des  Huguenots  a  été  l'occasion  d'un  nouveau  triomphe  pour  la  grande 
artiste,  admirablement  secondée  par  Stagno,  qui  possède  une  magnifique 
voix  de  ténor,  à  laquelle  il  joint  un  talent  de  comédien  et  de  chanteur 
de  premier  ordre.  —  Deux  cantatrices  de  mérite  ont  aussi  débuté  :  l'une, 
Mme  Benali,  dans  II  Barbiere;  l'autre,  Mme  Ferucci,  —  superbe  personne 
possédant  une  admirable  et  puissante  voix  de  mezzo-soprano  qu'elle  con- 
duit avec  beaucoup  d'art,  —  dans  la  Muta  di  Portici,  donnée  au  béné- 
fice du  chef  d'orchestre  Joseph  Dupont.  Le  chef-d'œuvre  d'Auber  avait  été 
monté  avec  un  soin  extrême  et  un  grand  luxe  de  mise  en  scène.  Le 
tableau  final  est  d'un  effet  magique,  la  scène  immense  du  Théâtre  Impé- 
rial (la  plus  grande  de  l'Europe)  convenant  admirablement  à  ces  spec- 
tacles grandioses.  —  Antoine  Rubinstein  vient  d'arriver  et  a  annoncé 
plusieurs  séances  de  musique  classique,  lesquelles  promettent  d'être  extrê- 
mement intéressantes.— Les  concerts  du  Conservatoire,  sous  la  direction  de 
Nicolas  Rubinstein,  auront  lieu  seulement  en  janvier  après  la  saison  ita- 
lienne, qui  finira  vers  cette  époque. 

^**  Quatre  capitalistes  anglais  viennent  de  faire  construire  à  Londres, 
dans  le  Strand,  un  théâtre  qui  a  coûté  deux  millions,  et  dont  l'inaugu- 
ration aura  lieu  le  24  décembre  prochain.  Son  nom  est  Gaiety  ;  son  di- 
recteur, M.  Hollingshead,  ancien  administrateur  de  l'Alhambra.  Tout  le 
service  intérieur  sera  fait  par  des  femmes  qui,  au  lieu  de  payer  la  direc- 
tion seront  rétribuées  par  elles.  Des  lorgnettes  seront  mises  gratuitement 
à  la  disposition  du  public.  Des  jets  d'eau  de  Cologne  jailliront  dans  les 
endroits  indispensables.  Un  service  télégraphique  partant  de  la  direction 
communiquera  avec  tous  les  dépositaires  de  billets  de  Londres.  Toutes  les 
places  seront  numérotées  ;  la  location  ne  se  paiera  pas  en  sus  du  prix 
du  bureau.  Deux  grands  cafés-restaurants,  communiquant  avec  le  théâtre, 
resteront  ouverts  jusqu'à  une  heure  du  matin  et  donneront  la  facilité  de 
souper  sans  sortir.  Les  genres  exploités  seront  le  drame,  l'opérette,  le 
ballet  et  les  clowns.  Le  spectacle  d'ouverture  se  compose  de  :  les  Deux 
Arlequins,  opérette  ;  On  the  Cards  (l'escamoteur),  drame  en  trois  actes  ; 
et  une  parodie  de  Robert  le  Diable. 

**:^  Un  agent  théâtral  très-accrédité  à  Milan,  M.  le  docteur  Giuseppe 
Lamperti,  vient  de  faire  paraître,  dans  cette  ville,  une  brochure  très- 
remarquable  sur  la  question,  vitale  pour  Milan,  de  la  dotation  du  grand 
théâtre  de  la  Scala.  Ses  réflexions  viennent  à  l'appui  de  la  sentence 
prononcée  en  première  instance,  il  y  a  quelques  mois,  et  qui  impose  au 
gouvernement  l'obligation  de  ne  point  laisser  péricliter  une  institution 
d'une  aussi  grande  importance  artistique.  M.  Lamperti  demande  le  réta- 
blissement de  la  subvention  de  300,000  lire  italiennes,  quelques  sacrifices 
de  la  part  du  municipe,  propose  une  réorganisation  complète  de  l'admi- 
nistration intérieure,  et  indique  plusieurs  mesures  à  prendre  pour  réaliser 
des  économies,  bien  nécessaires  dans  une  entreprise  devenue  ruineuse. 
—  La  Canobbiana,  le  seul  théâtre  royal  de  Milan  avec  la  Scala,  serait, 
dans  son  projet,  réservée  aux  jeunes  compositeurs,  sous  le  nom  de 
Theatro  Lirico. 

,t**  Un  procès  qui  soulève  une  question  intéressante,  relative  aux 
droits  réciproques  des  collaborateurs  d'une  œuvre  dramatique  lyrique, 
surgit  en  ce  moment  entre  M.  J.  Oifenbach  d'une  part,  et  M.  Martinet, 
directeur  des  Fantaisies-Parisiennes,  de  l'autre,  à  l'occasion  des  représen 
talions  de  l'opérette  «  ie  66 ,  »  sur  le  théâtre  de  ce  dernier.  C'est  avec 
l'autorisation  de  l'auteur  des  paroles  que  M.  Martinet  a  joué  cette  pièce, 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


et  aujourd'hui  le  compositeur,  dont  les  intérêts  se  trouveraient  lésés  par 
le  peu  de  produit  qu'il  tire  de  son  œuvre,  prétend  avoir  le  droit  de  la 
retirer  pour  la  porter  à  un  autre  théâtre.  11  en  appelle  aux  tribunaux 
et  compte  épuiser  tous  les  degrés  de  juridiction  nécessaires  pour  faire 
fixer  un  point  d'une  si  grande  importance  pour  son  nombreux  réper- 
toire. 

3^*»  Demain  représentation  à  l'Eldorado  de  la  parodie  la  Pericollc, 
jouée  par  Mlle  Chrétienne,  MM.  Perrin  et  Adolphe.  Cette  excentricité  est 
due  à  la  plume  de  MM.  Blondelct  et  Baumaine. 


NOUVELLES  DIVERSES. 


^*^  Les  examens  annuels  du  Conservatoire  pour  l'admission  aux  places 
vacantes  dans  les  classes  de  chant  ont  eu  lieu  jeudi  et  vendredi  de  la 
semaine  dernière.  —  Le  jury  se  composait  de  MM.  Auber,  président; 
Arabroise  Thomas,  V.  Massé,  Bazin,  Emile  Perrin,  Georges  Hainl, 
Masset.  Ces  messieurs  ont  entendu  deux  cent  quarante-huit  candidats; 
une  cinquantaine  seulement  ont  été  reçus,  parmi  lesquels  deux  pension- 
naires, l'un  ténor  et  l'autre  baryton,  doués  de  très-belles  voix. 

^,%  Voici  le  programme  du  quatrième  concert  populaire  de  musique 
classique  qui  sera  donné  aujourd'hui  à  2  heures,  au  cirque  Napoléon, 
sous  la  direction  de  J.  Pasdeloup  :  1°  symphonie  en  ut  majeur  (op.  ;W) 
de  Mozart;  —  2°  adagio  de  la  symphonie  l'Océan  de  A.  Rubinslein;  — 
3°  ouverture  de  concert  (op.  7) ,  première  audition,  de  J.  Rietz  ;  — 
•4°  prélude  du  5"  acte  de  l'Africaine  de  Meyerbeer  ;  —  5"  Songe  d'une 
nuit  d'été  de  Mendelssohn  (ouverture,— allegro  appassionato, —scherzo, — 
nocturne, — marche.) 

>>*,.;  Le  dernier  numéro  de  l'Art  musical  contenait  une  lettre  adressée  de 
Shang-Haï  à  M.  Azevedo,  par  un  artiste  que  tout  le  monde  se  rappellera, 
Rémusat,  flûtiste  aussi  dislingué  qu'il  était  original  et  gai,  Réniusat,  que 
l'on  avait  cru  mort  pendant  quelque  temps  et  que  son  caractère  aven- 
tureux avait,  après  de  longs  voyages,  pous-^é  jusqu'en  Chine  où,  après 
des  efforts  et  un  travail  inouï,  il  e.st  parvenu  à  planter  le  drapeau  de  la 
bonne  musique.  11  a  réussi  à  y  créer,  d'un  modeste  quatuor,  seul  alors  à 
la  personnifier,  une  société  de  plus  de  trente  instrumentistes  et  de  vingt- 
cinq  choristes  formés  la  plupart  par  lui,  et  à  y  faire  admettre  quatre 
cent  cinquante  membres  honoraires.  Anglais,  Allemands  et  Français  l'ont 
suivi  dans  cette  voie  et  ont  fait  construire  des  théâtres;  de  sorte  que 
Shang-Haï  n'aura  bientôt  plus,  grâce  à  la  flûte  et  au  bâton  de  chef  d'or- 
chestre de  Rémusat,  devenu  l'homme  important,  rien  à  envier  à  l'Europe. 
«Enfin,  dit-il,  je  viens  de  recevoir  par  la  dernière  malle  la  partition  et 
les  parties  d'orclieslre  du  Stabat  Mater  de  notre  grand  Rossini,  et  il  sera 
exécuté  dans  les  premiers  jours  d'octobre...  »  Qui  aurait  dit,  il  y  a  dix 

ans,  qu'on  exécuterait  à  Shang-Haï  le  Stabat  de  Rossini? — Au  reste, 

Rémusat  n'est  pas  le  seul  qui  cherche  à  gagner  le  Céleste  Empire  à  la 
musique  européenne.  :  Un  pianiste  hongrois,  Franz  Jachimek,  qui  a  déjà 
parcouru  la  Sibérie,  la  Perse  et  le  Japon,  a  conçu  et  exécuté  la  témé- 
raire idée  de  donner  quelques  concerts  dans  la  ville  de  Pékin.  Il  a  eu 
chaque  fois  un  public  fort  respectable,  composé  du  corps  diplomatique, 
de  négociants  européens,  et,  pour  une  bonne  part,  de  mandarins  et  de 
riches  particuliers  chinois. 

»**  M.  Lemmens.  le  savant  professeur  d'orgue  des  Conservatoires  de 
Bruxelles  et  de  Londres,  est  attendu  à  Paris  cette  semaine.  On  nous  fait 
espérer  que  ce  célèbre  organiste  se  fera  entendre  sur  les  grandes  orgues 
de  Notre-Dame  et  de  la  Trinité  récemment  construites  par  la  maison 
A.  Cavaillé-Coll. 

^*jf  Outre  Rubinstein  et  Mme  Neruda,  nous  entendrons  aussi  très-pro- 
bablement cet  hiver  Cari  Tausig,  le  célèbre  pianiste,  et  le  non  moins 
célèbre  violoniste  Wilhelmj. 

^*»  Mme  Miolan-Carvalho  a  l'intention  de  se  faire  entendre  dans 
beaucoup  de  concerts  cet  hiver;  elle  s'est  déjà  engagée  pour  ceux  des 
Sociétés  philharmoniques  de  Roubaix,  de  Chalon-sur-Saône,  de  Bordeaux, 
d'Orléans,  etc. 

^%  Nous  n'avons  pas  à  faire  aujourd'hui  l'éloge  de  l'école  de  chant  de 
Duprez;  les  services  qu'elle  rend  à  l'art,  les  élèves  qu'elle  a  formés  ont 
suffisamment  établi  et  son  utilité  et  sa  réputation.  Mais  nous  devons 
signaler  une  amélioration  d'une  haute  portée  que  le  célèbre  professeur 
vient  d'y  introduire.  C'est  l'adjonction  d'un  orchestre  composé  de  musiciens 
de  choix  qui,  au  moins  deux  fois  par  mois,  accompagnera  les  exercices  du 
vendredi.  On  comprendra  aisémentrimmense  avantage  offert  par  cette  inno- 
vation aux  élèves  qui  se  destinent  au  théâtre  et  qui  n'auront  plus  ainsi  à 
se  préoccuper  de  la  différence  du  chant  au  piano  et  du  chant  à  l'or- 
chestre. —  L'école  de  Duprez  aura  été  jusqu'à  présent  la  seule  qui  ait 
pris  une  aussi  coûteuse  initiative;  il  convient  d'en  féliciter  son  éminent 
directeur. 

**^,  Nous  annoncions  dernièrement  que  l'excellent  violoniste  Alfred 
Holmes  venait  de  composer  une  grande  symphonie  ayant  pour  titre  la 
Jeunesse  de  Shakspeare.  On  nous  informe  que  M.  Pasdeloup  ayant  pris 


connaissance  de  ce  morceau,  en  a  décidé  spontanément  la  mise  à  l'étude 
pour  être  exécutée  à  l'un  de  ses  prochains  concerts  populaires. 

„,*,  M.  Kowalski,  pianiste-compositeur  des  plus  distingués,  a  terminé, 
le  29  octobre  dernier,  à  Saiot-Gérmain-en-Laye,  par  une  très-belle  soirée 
mu.sicale,  la  tournée  artistique  qu'il  avait  entreprise,  en  compagnie  de 
Mlles  Schroeder  et  Praldl,  de  MM.  Troy,  le  baryton  et  Lasserre,  le  vio- 
loniste, dans  plusieurs  villes  de  l'Ouest,  du  Midi  et  de  la  frontière  d'Es- 
pagne. Partout,  le  public  a  répondu,  avec  le  plus  grand  empressement, 
à  l'appel  de  ces  éminents  artistes,  et  toujours  de  vifs  applaudissements 
ont  accueilli  M.  Kowalski  dans  Fexéculion  de  son  remarquable  Galop  de 
concert  et  du  duo  sur  les  Huguenots,  de  Thalberg  et  Bériot. 

»*,^  Vendredi  dernier,  un  concert  fort  intéressant  a  été  donné  à  Nantes, 
sous  la  direction  de  M.  Bourgault-Ducoudray,  au  bénéfice  de  la  Caisse  de 
secours  de  l'Association  philharmonique.  Le  programme  comprenait,  entre 
autres  œuvres  choisies,  des  chœurs  de  Palestrina,  Orlando  de  Lassus,  Haon- 
del,  Haydn,  exécutés  par  les  Sociétés  chorales  et  un  orchestre  improvisé 
d'une  façon  d'autant  plus  satisfaisan  te,  que  c'était  la  première  fols  que  l'on 
essayait  à  Nantes  de  réunir  les  éléments  nécessaires  à  l'interprétation  des 
œuvres  chorales  classiques  (avec  ou  sans  accompagnement).  Les  excellents 
instrumentistes  MM.  "Weingartner,  Bernard,  Pusterle  et  Alexandre  de 
Czeké  ont  prêté  leurs  concours  à  l'exécution  de  deux  quatuors  de  Beetho- 
ven ,  dont  le  parfait  ensemble  a  été  accueilli  avec  enthousiasme.  On  a 
applaudi  chaleureusement  Mlle  Marie  Nondin,  une  cantatrice  d'un  très- 
beau  talent,  dans  deux  airs  d' Auber.  Les  efforts  de  M.  Bourgault-Ducou- 
dray ne  seront  perdus  ni  pour  la  cause  de  la  musique  classique,  ni  pour 
la  prospérité  de  l'Association  philharmonique  nantaise. 

»■*»  M.  Al.  Bourgault-Ducoudray,  grand  prix  de  Rome,  fonde  une  so- 
ciété chorale  d'hommes,  composée  d'artistes  et  de  gens  du  monde.  Cette 
société  se  propose  spécialement  d'exécuter  des  chœurs  sans  accompagne- 
ment. Les  personnes  qui  désireraient  en  faire  partie  peuvent  se  présenter 
chez  M.  Bourgault-Ducoudray,  boulevard  de  Magenta,  136,  tous  les  jours 
entre  onze  heures  et  midi. 

t*it  On  nous  écrit  de  New-York  :  «  Mlle  Kellogg,  engagée  par  Max 
Strakosch  pour  une  tournée  artistique,  vient  de  débuter  ici  de  la  façon 
la  plus  brillante.  L'annonce  de  son  concours  à  un  concert  composé  de 
divers  morceaux  et  du  troisième  acte  de  Faust  avait  attiré  une  affluence 
énorme  au  théâtre;  la  recette  est  montée  à  10,000  francs.  Mlle  Kellogg 
excite  le  plus  vif  enthousiasme,  qui  s'est  traduit  de  toutes  les  façons.  — 
Puisqu'il  est  question  de  celte  cantatrice,  disons  que  la  charmante  valse 
chantée,  dont  Arditi  lui  a  fait  hommage,  réunit  tous  les  caractères  d'une 
œuvre  populaire  .'ans  vulgarité,  et  telle  que  la  dédicace  à  la  gracieuse 
cantatrice  peut  la  faire  supposer.  La  mélodie  en  est  naturelle,  entraînante, 
sans  cesser  d'être  distinguée;  il  ne  s'y  trouve  pas  une  note  qui  n'ait 
son  effet,  pas  une  phrase  indifférente  ou  seulement  mal  placée.  Le 
charme  ne  cesse  qu'à  la  fin,  et  Arditi  a  su  le  graduer  avec  infiniment 
d'art.  La  Kellogg-valse  atteindra,  nous  n'en  doutons  pas,  au  succès  d'/i 
Baccio. 

^*^  Par  une  lettre  des  plus  aimables  adressée  à  M.  Ed.  Tarbé  et  que 
publie  le  Gaulois,  M.  Henri  de  Pêne  informe  ses  lecteurs  qu'il  abandonne 
sa  part  de  direction  dans  ce  journal.  L'intention  de  M.  de  Pêne  est  de 
fonder  une  nouvelle  feuille  littéraire  et  politique  destinée  à  remplacer  la 
Gazette  des  Etrangers  ;  elle  aura  pour  titre  Paris,  et  commencera  à  paraî- 
tre le  13  de  ce  mois.  La  façon  dont  M.  de  Pêne  a  contribué  au  succès 
qu'en  si  peu  de  temps  le  Gaulois  a  rencontré,  ne  laisse  aucun  doute  sur 
celui  qui  attend  sa  nouvelle  entreprise,  et  les  nombreuses  sympathies 
qu'il  a  su  se  concilier  en  sont  d'ailleurs  la  plus  sûre  garantie. 

„.*,(,  M.  Arthur  Pougin,  notre  collaborateur,  vient  de  prendre  la  direc- 
tion du  Paris-Magazine,  avec  MM.  Philibert  Audebrand,  Louis  Moland, 
Henri  Maret,  Emile  Maison,  Louis  Dépret,  Charles  Joliet,  Emmanuel  des 
Essarts,  Hippolyte  Philibert,  Roger  du  Tranois,  A.lcide  DusoUier,  François 
Coppée,  Xavier  de  Ricard,  Emile  Daclin,  Jules  Forni,  H.  Cazahs,  Paul 
Verlaine,  etc.,  pour  collaborateurs. 

t*^  Asger  Hammerick,  compositeur  suédois,  dont  les  œuVres  sont  em- 
preintes au  plus  haut  degré  de  la  suavité  et  de  la  mélancolie  des  chœurs 
populaires  Scandinaves,  chers  aux  étudiants  de  Copenhague  et  si  heureu- 
sement intronisés  en  France  par  l'Orphéon  de  la  ville  de  Paris,  Asger 
Hammerick  vient  de  terminer  un  grand  opéra  en  cinq  actes  intitulé  : 
Hjalmar  et  Ingeborg.  Ceux  qui  l'on  entendu  en  disent  le  plus  grand  bien. 

^*,j  Le  journal  barcelonais  Corre,  vé  y  dite,  dont  nous  annoncions 
dernièrement  l'apparition,  a  changé  son  titre  dès  le  second  numéro,  et 
s'appelle  maintenant  El  Correo  de  Teatros. 

^"^  Le  nouveau  Barbiere  di  Siviglia,  de  Constantino  Dali'  Argine,  vient 
de  paraître  chez  l'éditeur  Luigi  Trebbi,  à  Bologne. 

i*4  Sous  le  titre  de  l'Echo  des  concerts  et  des  théâtres,  il  se  publie 
quatre  fuis  par  mois  un  programme-revue  des  cafés-concerts,  concerts- 
promenades,  théâtres,  bals,  etc.,  dont  M.  Ch.  Grou,  propriétaire  de  la 
Librairie  musicale  et  chansonnière  est  le  directeur-gérant.  Un  public, 
des  renseignements  et  des  intérêts  spéciaux  assureront  sans  doute  à  ce 
journal  la  prospérité  que,  pour  notre  part,  nous  lui  souhaitons  bien 
sincèrement. 

„*^  Deux  siècles  à  l'Opéra  ;  tel  est  le    titre   d'un  volume  publié  chez 


DE  PARIS 


359 


Dentu,  dans  lequel  M.  Nérée  Desarbres,  ancien  secrétaire  de  la  direc- 
tion A.  Hoyer,  a  groupé  les  documents  principaux  relatifs  au  passé  de 
ce  théâtre.  Nous  rattacherons  l'examen  de  ce  travail  à  celui  de  l'ouvrage, 
récemment  paru,  de  IVI.  Lud.  Celler:  les  Origines  de  l'Opéra,  qui  le  com- 
plète au  point  de  vue  historique. 

**^.  Mme  Clara  Pfeiffer  a  repris  ses  cours  d'études  sym"phoniques  à 
plusieurs  pianos,  —  si  utiles  pour  exercer  les  élèves  à  la  musique  d'en- 
semble, —  à  la  succursale  Pleyel,  rue  de  Richelieu. 

»**  L'éminent  professeur  de  cliant  Géraldy  est  de  retour  à  Paris,  et 
il  reprend  ses  cours  pour  toute  la  saison  d'hiver. 

11,*^  Les  concerts  de  la  salle  A'alentino  ont  décidément  conquis  la 
vogue.  La  direction  a  compris  qu'ils  devaient  être  spécialement  réservés 
aux  familles ,  aussi  sont-ils  devenus  le  rendez-vous  à  la  mode  de  tout 
ce  qui  aime  la  bonne  musique. 

^*^  On  annonce  comme  prochaine  l'inauguration  de  grandes  soirées  dan- 
santes qui  doivent  être  données  les  mardi,  vendredi  et  dimanche  de  cha- 
que semaine  au  cirque  des  Champs-Elysées.  En  quelques  jours,  la  salle 
déjà  si  belle  du  Cirque  d'été,  vient  d'être  transformée  de  la  manière  la 
plus  splendide  en  un  vrai  palais,  afin  de  l'approprier  aux  habitudes 
d'élégance  et  de  comfort  de  la  haute  /ashion  parisienne,  pour  qui  ces  bals, 
d'un  genre  tout  exceptionnel,  ont  été  créés,  et  qui  doivent  devenir  le 
rendez-vous  de  notre  belle  jeunesse  dorée  et  des  dames  de  la  plus  haute 
élégance.  Pour  lout  dire  en  un  mot,  la  salle  est  décorée  dans  le  goût  le 
plus  exquis,  avec  des  rideaux  et  des  tentures  soie  et  or  ;  l'éclairage,  déjà 
si  splendide,  est  encore  doublé  par  l'addition  de  huit  lustres  en  cristal. 
L'orchestre  sera  dirigé  par  H.  Marx  et  le  célèbre  café  Tortoni  y  a  élu 
domicile  pour  les  rafraîchissements  et  les  soupers- 

,,%  Les  amis  et  les  admirateurs  de  Rossini,  qu'avait  rassurés  la  façon 
dont  l'illustre  maestro  avait  supporté  l'opération  pratiquée  par  M.  Nélaton, 
sont  de  nouveau  inquiets.  Les  membres  s'enflent  et  des  dépôts  d'eau  se 
sont  formés  dans  les  jambes.  Espérons  encore  que  la  science  triomphera 
de  ces  fâcheuses  complications. 


**^  M.  Germain  Delavigne,  frère  de  l'auteur  des  Enfants  d'Edouard 
et  de  Louis  XI,  est  mort  celte  semaine  à  Montmorency,  des  suites  d'un 
refroidissement.  Il  était  âgé  de  soixante-seize  ans.  Ami  et  collaborateur 
de  Scribe,  M.  Germain  Delavigne,  dès  sa  jeunesse  et  pendant  les  loisirs 
que  lui  créait  sa  position  de  garde-magasin  du  mobilier  de  la  Couronne, 
sous  le  règne  de  Louis-Philippe,  a  écrit  un  très-grand  nombre  de  pièces 
de  théâtre,  parmi  lesquelles  nous  citerons,  en  ce  qui  nous  concerne  spé- 
cialement :  la  Neige,  le  Maçon,  la  Vieille,  les  Mystères  d'Vdolphe,  opéras- 
comiques;  la  Muette  de  Portici,  Robert-le-Diable  (en  collaboration),  la 
Nonne  sanglante  et  Charles  VI,  grands  opéras.  Sa  manière  était  élégante 
et  simple,  non  sans  une  certaine  élévation,  et  son  vers  bien  frappé  se 
prêtait  facilement  aux  exigences  musicales.  Le  service  funèbre  de  Ger- 
main Delavigne  a  eu  lieu  à  Saint- Vincent-de-Paul  :  la  Commission  des 
auteurs  et  compositeurs  dramatiques  y  était  représentée  par  une  dépu- 
tation . 

***  Mme  Delphine  Calderon,  artiste  du  théâtre  Italien,  vient  d'avoir 
la  douleur  de  perdre  son  mari. 

^*^,  S.  A.  le  duc  Ernest  de  Wurtemberg,  qui  avait  épousé  la  cantatrice 
Nathalie  Frassini,  vient  de  mourir  à  Cobourg. 

»*„:  On  n'a  pas  oublié  la  charmante  danseuse  russe,  Mlle  Mouravieff, 
qui  reçut  durant  deux  saisons  un  si  chaleureux  accueil  au  théâtre  de 
l'Opéra.  Elle  avait  quitté  les  théâtres  impériaux  de  Saint-Pétersbourg  pour 
faire  un  riche  mariage;  cette  remarquable  artiste  vient  de  mourir  pré- 
maturément à  Kazan. 


ÉTRANGER 


^'^-.jf  Bruxelles.  —  La  première  représentation  du  Premier  Jour  de  bon- 
heur vient  d'avoir  lieu  au  théâtre  de  la  Monnaie  devant  une  salle  comble. 
Le  public  a  fait  le  meilleur  accueil  à  ce  charmant  ouvrage,  qui  est  inter- 
pi'été  d'ailleurs  avec  une  rare  distinction  par  Jourdan  et  Mlle  Marimon. 
On  a  beaucoup  applaudi  le  duo  et  la  romance  du  ténor,  au  premier  acte, 
la  chanson  du  petit  Caporal  et  le  finale  du  deuxième  acte,  de  même  que 
le  rondo  chante  par  Guffroi  au  troisième.  La  chanson  des  Djinns,  grâce 
à  l'émotion  de  la  débutante,  Mlle  Paula,  n'a  pas  produit  tout  son  effet; 
mais  elle  ne  peut  tarder  à  être  appréciée  comme  tout  le  reste. — Le  ré- 
gisseurM.  Polel  a  apporté  tous  ses  soins  à  la  mise  en  scène,  qui  est  très- 
réussie. 

.,;*;j  Londres.  —  Les  Huguenots,  avec  Mlle  Tietjens  et  Mongini,  ont  fait 
salle  comble  samedi  dernier  à  Covent-Garden.  —  Mlle  Hauck  a  vu  se 
confirmer  pleinement  son  grand  succès  le  mardi  suivant,  où  elle  a  joué 
Zerlino  de  Don  Giovanni.  Ce  rôle  .semble  avoir  été  écrit  pour  elle,  tant  elle 
y  met  de  naturel  et  de  grâce.  —  Les  Concerts  populaires  du  lundi  (on- 
zième année)   recommenceront,  le  16  novembre,  sous  la  direction  de 


j  M.  Bénédict.  Il  (;n  siira  donné  dix-neuf,  et  l'on  y  entendra  comme 
d'habitude  les  artistes  éminents  qui  ont  nom  Joachim,  L.  Strauss,  Sain- 
ton,  Piatti,  Pauer,  Ch.  Halle,  Mmes  Arabella  Goddard  et  Clara  Schu- 
man n. 

***  Bade.  —  Un  très-beau  concert,  auquel  ont  pris  part  Mmes  Viar- 
<lot,  Orgéni,  Elise  Lang,  Hélène  Heermann,  le.i  chefs  d'orchestre  Cari 
Eckert  et  Miloslaw  Kœnnemann,  a  été  donné  au  bénéfice  des  inondés 
de  la  Suisse,  dans  les  nouveaux  salons  de  la  Maison  de  Convei-sation, 
gracieusement  mis  par  M.  Dupre.ssoir  à  la  disposition  des  organi.sateurs 
de  cette  bonne  œuvre.  Malgré  la  .saison  avancée,  la  .salle  était  pleine, 
et  au  premier  rang  des  auditeurs  on  remarquait  S.  M.  la  reine  de  Pru.sse, 
LL.  AA.  le  grand-duc  et  la  grande  ducliesse  de  Bade,  S.  A.  R.  le  prince 
Wasa,  lady  Marie  Hamilton,  etc.  La  recette,  qu'aucims  Irais  importants 
ne  sont  venus  diminuer,  a  dépassé  1,300  francs. 

Rotterdam.  —  Quatre  représentations  de  l'Africaine,  données  dans  le 
courant  d'octobre,  ont  exercé  une  grande  attraction  sur  le  public;  et 
cependant,  dit  la  Cœcilia,  l'exécution  n'a  pas  été  constamment  irrépro- 
chable. —  On  a  repris  Stradella,  de  Flotow,  avee  beaucoup  de  succès. 

,*,^  Stuttgard.  —  L'oratorio  Eli,  de  Michel  Costa,  a  été  exécuU;  avec 
un  grand  succès,  le  3  novembre,  dans  le  Kœnigsbau.  Le  nombre  des 
exécutants  était  moindre  qu'aux  festivals  anglais  où  cet  ouvrage  a  été 
déjà  donné  ;  mais  tous  étaient  des  artistes  de  premier  ordre,  et  il  en  est 
résulté  un  admirable  ensemble,  qui  a  parfaitement  fait  ressortir  les 
beautés  dont  l'œuvre  du  célèbre  chef  d'orchestre  est  pleine.  Les  solistes 
étaient  Mmes  Klettner  et  Ellinger,  MM.  Schuttky,  A.  Jaeger,  Braun,  Horn 
et  Fromada.  Le  roi  et  la  reine  étaient  présents.  —  Eli  sera  exécuté  en- 
core le  jour  des  Rameaux.  On  a  en  outre  demandé  à  Costa  .son  autre 
oratorio  Naaman,  pour  une  époque  encore  indéterminée.  —  .M.  Camille 
Saint-Saëns,  l'éminent  pianiste-compositeur  français,  s'est  fait  entendre 
ici  avec  succès. 

*%  Cologne.  —  Le  premier  concert  du  Gùrzenich  a  été  donné  le  20  oc- 
tobre, sous  l'habile  direction  de  Ferd.  Hitler.  On  y  a  beaucoup  applaudi 
le  violoniste  russe,  Besekirsky,  et  le  chanteur  Wallenreiier,  de  Londres. 

,^*^  Leipzig.  —  Au  quatrième  concert  du  Gewandhaus,  le  29  octobre, 
l'intérêt  s'est  partagé  entre  la  Reformations-Symphonie  de  Mendelssohn  et 
l'exécution  du  second  concerto  de  Weber  (en  mi  bémol) ,  par  une  jeune 
pianiste  de  Vienne,  Mlle  Gabrielle  Joël,  qui  a  fait  preuve  d'un  sérieux 
talent.  —  VEuterpe  a  donné,  le  27,  son  premier  concert,  sous  la  direc- 
tion de  M.  Jadassohn. 

^'^,1,  Berlin.  —  Rubinslein  a  donné  un  premier  concert  dans  la  salle 
de  la  Sing-Académie.  Il  a  été  à  sa  hauteur  habituelle;  on  l'a  saltié  des 
applaudissements  les  plus  enthousiastes. 

^*^  Vienne.  —  Le  succès  de  Mignon,  donnée  pour  la  première  fois  le 
24  octobre,  a  été  complet.  L'ouverture  a  été  redemandée,  et  plusieurs 
morceaux  auraient  eu  également  les  honneurs  du  bis,  si  un  règlement 
récent  ne  l'interdisait  pas  pour  les  morceaux  de  chant.  Les  rôles  étaient 
distribués  à  Mlles  Ehnn  (Mignon),  Rabatinsky  (Philine),  MM.  Walter 
(Wilhelm  Meister),  et  Beck  (Lothario).  Toute  la  cour  assistait  à  cette  repré- 
.sentation,  qui  a  été  suivie  de  trois  autres  également  brillantes. 

**„:  Naples.  —  L'ouverture  du  théâtre  San  Carlo  a  eu  lieu,  le  2.i  oc- 
tobre, avec  l'opéra  Jone,  de  Pelrella.  La  représentation  a  pu  à  grande 
peine  être  terminée,  et  la  toile  s'est  baissée  au  milieu  des  sifflets  adre.ssés 
au  ténor  et  au  baryton .  —  Le  ballet  nouveau  de  Borri,  Nephté,  n'a  été 
guère  mieux  reçu;  la  Ferraris  a  cependant  été  applaudie.  —  Une  seconde 
représentation  n'a  pu  être  achevée;  et  le  théâtre  s'est  fermé  pour  une 
semaine.  11  rouvrira  avec  Fausto  et  un  nouvel  imprésario,  M.  Presireau. 

,^*,  Madrid.  —  Mme  Gueymard  est  arrivée  et  elle  a  débuté  dans  // 
Trovatore.  La  vaillante  artiste  a  été  chaleureusement  acclamée  pendant 
tout' le  cours  de  la  représentation,  et  rappelée  après  chaque  acte.  Tam- 
berlick  a  partagé  son  succès. 

:f*^  Lisbonne.  —  Fleur  de  Thé  continue  d'attirer  la  foule,  et  la  critique 
fait  de  grands  éloges  de  la  traduction  portugaise  due  à  MM.  Oliveira 
et  Mondes  Leal. 


Le  Directeur      S.  DDFODB. 

aXaestro     E.     XVIUZIO, 

Ouverture  d'im  cours  de  chant  exclusivement  italien. 
Chez  lui,  rue  de  Luxembourg,  S,  au  \". 


360 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE  DE  PARIS. 


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téristiques, en  3  cahiers,  chaque    9 

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Prélude.  Sérénade. 

L'arrivée  du  printemps.  Valse  gracieuse. 

2'  cahier  : 

Entrée  dans  la  forêt.    Un  rêve. 
Chasse.  Etude. 

3°  cahier  : 

Souvenir  du  temps  passé.      Scherzetto. 
Promenade  dans  les  champs.  Adieu. 


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Rnseniiniu   (J.).  Rondo,   quatrième 

solo  de  concours 6 

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Bizet  (G.) .  Berceuse 

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—  La  Coccinelle 

—  Ma  vie  a  son  secret 

—  Pastorale 

—  Rêve  de  la  bien-aimée 

liorct  (Ch.).  Chanson  de  Barberine... 

—  Dernière  larme 

—  Plainte 

—  Rayon  d'amour 

Saial-Siaens   (C).    A   quoi  bon  en- 
tendre les  oiseaux  des  bois  . . . 

—  Le  chant  de  ceux  qui  s'en  vont 

sur  mer 


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IS  Novembre  1868. 


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REVUE 


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Paris, "J*   r,  par  au 

Département»,  Bi-lgi<]U';  et  Suisse...-    '.Ht  »       id. 

ÉtruDger Zi  »      Id. 

Le  Journal  parait  le  Dimanche, 


TTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


SOMMAIRE.  —  Mort  de  Rossini.  —  Théâtre  impéi'ial  de  l'Opéra:  reprise 
des  Huguenots,  par  Blias  de  Banze.  —  Théâtre  des  Fantaisies-Pari- 
siennes: reprise  jt  ce  théâtre  de  la  Fête  du  village  voisin,  opéra-comique  en 
trois  actes,  paroles  de  Sewrin,  musique  de  Boieldieu.  —  Léon  Kreutaer  (2'  et 
dernier  article),  par  Arthur  Peng^ln.  —  Entrefilets.  —  Nouvelles  des 
théâtres  lyriques.   —  Nouvelles  diverses.  —  Annonces. 


Rossini  a  succombé  ! . . . .  Après  quinze  jours  d'incerti- 
tudes ,  de  douleurs  et  d'angoisses  ;  malgré  les  efforts  de  la 
science,  les  soins  d'une  femme  et  d'amis  dévoués;  malgré  les 
vœux  ardents  de  tous  les  amis  de  l'Art;  en  dépit  de  la  sympa- 
thie universelle  rayonnant  comme  une  auréole  autour  de  ce 
chevet  glorieux ,  la  Mort,  l'impitoyable  Mort  n'a  pas  reculé  et  a 
emporté,  vendredi  18  novembre,,  à  minuit,  par  une  soirée  glaciale 
et  brumeuse,  ce  génie  lumineux  entre  tous! 

L'Europe  musicale  pleure  l'un  de  ses  compositeurs  dramati- 
ques les  plus  illustres  et  les  plus  populaires.  En  Joachim  Rossini, 
la  musique  perd  une  organisation  merveilleuse  servie  par  une  rare 
finesse  d'esprit 

A  l'âge  de  trente-sept  ans,  alors  que  tant  d'autres  luttent  encore, 
Rossini  avait  atteint  à  des  sommets  assez  élevés  pour  se  condamner 
au  silence  —  au  grand  regret  de  ses  admirateurs  et  de  ses  amis  — 
et  pour  échapper  à  la  loi  commune  de  ce  sentiment  noble  et  pur 
qui  fait  cultiver  l'art  pour  lui-même. 

Nous  consacrerons  une  étude  spéciale  à  cette  grande  mémoire, 
à  ce  génie  impérissable. 

L'écho  des  œuvres  rossiniennes  ne  saurait  d'ailleurs  abandonner 
\e  domaine  de  l'art.  Le  Barbier,  Guillaume  Tell,  Otello,  le  Stabat 
et  tant  d'autres  de  styles  si  différents  feront  toujours  retentir  leurs 
accents  touchants,  joyeux,  passionnés  ou  religieux  sur  les  grandes 


scènes  des  deux  mondes  et  ne  cesseront  de  soulever  les  transports 
d'enthousiasme  des  générations  futures. 

La  mort  n'a  fait  qu'idéaliser  cette  étonnante  personnalité,  que 
lui  ouvrir  le  chemin  de  l'empyrée  où  les  Grecs  plaçaient  leurs 
demi-dieux. 

La  France  et  Paris  ont  glorifié  Rossini  de  son  vivant.  Paris 
s'apprête  à  rendre  à  ce  mort  illustre  un  dernier  et  éclatant  hom- 
mage. 

De  telles  funérailles  ne  peuvent  être  qu'une  apothéose  et  comme 
la  préface  de  l'immortalité. 


THEATRE  mPËRIÀL  DE  L'OPÉRA. 

Beprlse   des  Jffuguenot». 

Après  l'excellente  reprise  de  Guillaume  Tell  qui  fut,  l'on  s'en 
souvient,  une  véritable  restauration,  le  directeur  de  l'Opéra  s'était 
appliqué  à  faire  pour  un  des  chefs-d'œuvre  de  Meyerbeer  ce  qu'il 
avait  fait  avec  tant  de  succès  pour  le  chef-d'œuvre  rossinien.  II 
voulait  reprendre  les  Huguenots,  mais  de  façon  à  ne  plus  faire  re- 
gretter les  beaux  jours  de  son  apparition,  qui  furent  en  même 
temps  ceux  de  son  apothéose,  quand  les  interprètes,  ou  plutôt  les 
créateurs  des  principaux  rôles  étaient  :  Mlle  Falcon,  Nourrit,  Levas- 
seur,  etc. 

Tout  ce  qu'on  peut  mettre  de  zèle ,  de  soins ,  de  bon  vouloir, 
de  culte  pour  l'art,  de  vénération  pour  le  Maître,  d'amour  pour 
les  œuvres  impérissables,  M.  Perrin  l'employa  à  cette  restaura- 
tion. 

Il  semblait  donc  que  le  directeur  de  l'Opéra  n'eût  plus  qu'à 
jouir  et  à  faire  jouir  son  public-  du  succès  de  ses  efforts  ;  mais  il 
avait  compté  sans  la  male-chance,  qui  ne  vient  que  trop  souvent 
déjouer  les  projets  les  mieux  combinés  ! 

Ainsi,  au  jour  même  de  l'épreuve,  c'est  Mlle  Hisson, —  comptée 
comme  élément  de  grand  intérêt  dans  une  interprétation  nouvelle 


362 


HEVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


du  rôle  principal,  —  c'est  Mlle  Hisson,  dont  nous  ne  prétendons 
pas  pour  cela  diminuer  le  mérite,  qui  fait  défaut!  —  C'est  Villaret, 
que  l'intempérie  de  la  saison  cloue  dans  son  lit!  —  Entin  c'est 
Mlle  Battu,  l'artiste  vaillante,  qui,  malade  dès  la  veille  et  comp- 
tant trop  sur  son  courage,  voit  son  magnifique  talent  compromis 
par  son  dévouement  et  son  abnégation! 

Aussi,  regarder  cette  représentation  comme  le  résultat  vrai  de  la 
louable  tentative  de  M.  Perrin,  serait  injuste  et  intempestif.  — 
Bornons-nous  donc  aujourd'hui  à  esquisser  les  grandes  lignes 
accusées  par  la  soirée  d' avant-hier  et  qui  ont  largement  suffi  à  faire 
briller,  pour  la  S00'=  fois,  du  plus  grand  éclat,  l'immortel  chef- 
d'œuvre  de  Meyerbeer,  c'est-à-dire  :  triomphe  de  Marie  Sass;  révé- 
lation du  talent  de  Colin  dans  un  nMe  considéré  comme  l'un  des 
plus  lourds  du  répertoire  et  qu'il  abordait  à  l'improviste  après 
quelques  heures  de  répétition;  supériorité  dans  l'exécution  par  l'or- 
chestre, par  les  chœurs,  notamment  au  troisième  acte  et  dans  la 
Bénédiction  des  poignards  ;  enfin  comme  accessoires ,  deux  belles 
décorations  peintes  à  neuf,  des  costumes  de  la  plus  gi'ande 
richesse  et  l'addition  au  troisième  acte  d'un  nouveau  ballet 
qui   a    remplacé    celui   d'autrefois. 

Ce  rapide  aperçu  nous  suffira  pour  distribuer  à  chacun  sa  part 
de  mérite  dans  une  reprise  appelée  à  tenir  avant  quelques  jours 
tout  ce  qu'elle  avait  promis. 

En  procédant  par  ordre,  nous  applaudirons  Faure  comme  le 
public  l'a  applaudi  dans  ce  rôle  du  comte  de  Nevers  dont  il  a  su 
doubler  l'importance  par  la  beauté  de  sa  voix,  sa  tenue  pleine  de 
distinction  chevaleresque  et  l'énergie  de  son  accent  à  la  grande 
scène  de  la  Conspiration. 

Nous  ne  louerons  pas  Belval  sans  restriction  ;  lui  aussi  sans  doute 
subissait  quelque  peu  l'influence  de  la  malaria.  Toutefois,  il  faut 
signaler  la  belle  pai't  qu'il  a  prise  au  grand  duo  du  troisième  acte 
avec  Valcntine,  et  au  trio  du  cinquième  acte. 

Valentine,  c'était  Marie  Sass,  attendue  comme  l'arc-en-ciel  qui 
devait  ramener  la  sérénité  troublée  ;  Marie  Sass  qui,  dans  le  beau 
duo  avec  Marcel,  dans  le  grand  duo  du  quatrième  acte  et  dans  le 
trio  du  cinquième,  a  eu  tour  à  tour  des  élans  de  tendresse  con- 
tenue, des  accents  de  brûlante  passion  nuancés  avec  un  talent 
infini,  et  qui  font  d'elle  l'interprète  née  de  ces  grands  rôles. 

Nous  disions  que  le  jeune  ténor  Colin  s'était  révélé  dans  cette 
pi'ise  de  possession  improvisée  du  rôle  de  Raoul.  Personne  de 
ceux  qui  l'entendaient  ne  nous  contredira;  après  avoir  dit  avec 
beaucoup  de  mesure  et  de  justesse  la  difficile  romance  du  premier 
acte,  le  duo  avec  la  reine  au  deuxième,  et  s'être  fait  remarquer 
dans  le  septuor  du  troisième,  il  a  montré  dans  le  grand  duo  du 
quatrième  les  qualités  les  plus  remarquables  ;  c'est-à-dire  une  voix 
bien  timbrée,  passant  aisément  de  la  douceur  à  l'énergie,  de  l'am- 
pleur dans  la  phrase  et  une  grande  expression  dramatique.  De 
même  que  Marie  Sass,  il  a  provoqué  des  bravos  aussi  enthousiastes 
que  mérités.  Après  de  nombreux  rappels  on  a  jeté  à  cette  dernière 
une  belle  couronne  de  fleurs  ornée  de  rubans. 

David  chantait  le  rôle  de  Saint-Bris  ;  sa  scène  principale  est  celle 
de  la  Conspiration.  Sa  voix  vibrante,  le  caractère  sombre  et  fana- 
tique dont  il  a  su  empreindre  le  personnage  y  ont  produit  le  meil- 
leur eiîet. 

Mlle  Beaugrand  a  été  pour  la  danse  l'étoile  de  la  soirée  ;  elle  a 
eu  des  échos  d'une  légèreté,  d'une  correction  étonnante,  mais  d'une 
audace  à  donner  le  vertige. 

Les  deux  décorations  nouvelles  sont  deux  vrais  tableaux  ;  celui 
qui  représente  le  Pré-aux-Clers  fait  le  plus  grand  honneur  à  M. 
Camhon  ;  le  site  a  été  reproduit  avec  la  plus  grande  fidélité  d'après 
des  dessins  de  l'époque. 

Nous  ne  parlerons  point  de  quelques  rôles  insuffisants  tenus  par 


des   artistes  que  nous  ne  voulons  pas  affliger,  puisqu'ils  y  seront 
nécessairement  remplacés  à  la  prochaine  représentation. 

Concluons  plutôt  en  iélicitant  de  nouveau — et  quoi  qu'on  puisse 
dire — le  directeur  de  notre  première  scène  lyrique  d'avoir  consacré 
ses  soins  et  sa  bonne  volonté  à  une  reprise  aussi  importante  et 
aussi  généralement  attendue. 

Elias  de  RAUZE. 


THÉÂTRE  DES  FANTAISIES-PARISIENNES. 

REPRISE   A  CE   THÉÂTRE   DE 
1<A  ï'ËTB  nu  VIMiAOE  VOISIIW , 

Opéra- comique  en  trois  actes,  paroles  de  Sewrin,   musique  de 

BOÏELDIEU. 

(Première  représentation  le  H  novembre  1868.) 

Il  y  a  un  peu  plus  d'un  demi-siècle  que  ce  charmant  opéra  de 
Boïeldieu  fut  représenté  pour  la  première  fois;  il  date  du  5  mars 
1816.  Repris  bien  souvent  depuis  cette  époque,  nous  croyons  que 
sa  dernière  exhibition,  à  l'Opéra-Comique,  remonte  au  mois  de 
juillet  1857,  oîi  il  fut  joué  pour  les  débuts  du  baryton  Stock- 
hausen. 

Le  théâtre  des  Fantaisies-Parisiennes,  qui  s'est  imposé  la  louabie 
tâche  de  remettre  à  la  scène  les  opéras  célèbres,  délaissés  à  tort 
ou  à  raison  par  ses  confrères  subventionnés ,  ne  pouvait  faire  un 
meilleur  choix  que  celui  de  la  Fête  du  village  voisin.  Le  livret  de 
Sewrin,  inspiré  par  les  Jeux  de  l'amour  et  du  hasard,  n'est  pas,  à 
coup  sûr,  un  chef-d'œuvre  d'esprit  et  d'invention;  mais  il  n'est 
pas  ennuyeux ,  il  a  une  marche  rapide ,  et  il  affecte  en  outre  des 
proportions  modestes  qui  ne  dépassent  pas  les  ressources  d'un 
théâtre  limité  dans  ses  effoj'ts,  comme  doit  l'être  celui  des  Fantai- 
sies-Parisiennes. Il  en  résulte  que  cette  pièce  y  est  montée  avec 
toute  la  perfection  désirable. 

Quant  à  la  partition  de  Boïeldieu,  elle  est  toujours  ravissante. 
Quelques  formules  vieillies  font  à  peine  tache  sur  cette  musique 
tout  aimable  et  toute  gracieuse,  dont  la  plupart  des  mélodies  ont 
conservé  une  saveur  fraîche  et  parfumée,  qu'on  ne  rencontre  guère 
au  même  degré  chez  les  compositeurs  du  temps.  Nous  n'avons  pas 
à  faire  l'éloge  de  cette  cavatine  si  connue  :  Simple,  innocente  et 
joliette;  elle  est  dans  toutes  les  mémoires.  D'autres  morceaux, 
dont  on  se  souvient  moins ,  ont  pourtant  aussi  leur  mérite  et  se 
recommandent  par  une  foule  d'éminent(!s  qualités  :  l'ouverture,  par 
exemple,  un  modèle  de  ces  sortes  de  préfaces;  l'air  de  la  sou- 
brette :  La  gaieté  sied  à  notre  âge;  le  trio  du  premier  acte,  l'air 
de  la  petite  marchande ,  et  surtout  le  délicieux  quintette  :  Quand 
la  mémoire  est  infidèle,  où  l'inspiration  s'unit  si  bien  à  la  science. 

Le  rôle  de  Henri,  l'une  des  plus  séduisantes  créations  de  Martin, 
a  été  joué  et  chanté  par  Arsandaux  d'une  manière  satisfaisante, 
quoique  ce  jeune  baryton  ne  fût  qu'incomplètement  remis  d'une 
indisposition  assez  sérieuse.  La  cavatine  du  troisième  acte  lui  a 
valu  plusieurs  salves  d'applaudissements.  Mlles  Gazât  et  Flachat 
ont  été  fort  convenables,  aussi  bien  au  château  qu'au  village. 
Mlle  Persini,  la  jeune  et  jolie  marchande  du  deuxième  acte,  a  bien 
dit  ses  couplets;  Mme  Decroix,  qui  justement  i-emplissait  ce  petit 
rôle  à  la  dernière  reprise  de  l'Opéra-Comique,  l'a  échangé  contre 
celui  de  la  fermière  Geneviève.  Enfin,  Mortier,  Davoust  et  Thierry 
se  sont  acquittés  à  merveille  de  leurs  divers  personnages.  Et 
comme  il  ne  faut  oubher  personne,  nous  ajouterons  que  l'orchestre 
a  fortement  contribué  au  bon  effet  de  cette  interprétation.  Il 
mérite  les  plus  grands  éloges. 

D. 


DE  PAlilS. 


363 


LÉON  KREUTZER. 

(2°  ut  dernier  article)  (1). 

D'un  article  publié  dans  l'Union,  par  M.  Laureutie,  peu  de 
jours  après  la  mort  de  Léon  Kreutzer,  j'extrais  les  lignes  qui  sui- 
vent. IVI.  Laurenlio,  l'un  des  doyens,  l'un  des  patriarches  les  plus 
honorés  du  journalisme  contemporain  (je  puis  le  dire  en  toute 
franchise,  car  je  suis  loin  de  partager  ses  opinions),  pouvait  par- 
ler de  son  collaborateur  presque  comme  un  père,  car  il  l'avait 
connu  tout  enfant,  et  la  mère  du  jeune  artiste  l'avait  pour  ainsi 
dire  chargé  de  son  avenir. 

«...  Léon  Kreutzer,  dit  M.  Laurentie,  est  le  dernier  qui  em- 
porte nos  regrets  et  nos  souvenirs.  Je  lui  dois  plus  que  d'autres 
un  hommage;  car  sa  mère  me  l'avait  confié  en  quelque  sorte 
comme  un  enfant,  qui  serait  exposé  parfois  peut-être  à  ne  savoir 
que  faire  de  son  génie. 

»  Cette  mère,  Mme  Kreutzer,  a  laissé  une  longue  trace  dans  la 
mémoire  de  ceux  qui  avaient  vu  son  élégant  petit  salon  de  la  rue 
Saint-Georges.  Femme  d'un  esprit  orné  et  d'un  goût  délicat,  elle 
gardait  comme  un  culte  le  nom  des  deux  Kreutzer,  et,  par  ce 
nom  qu'elle  portait  avec  orgueil,  son  enthousiasme  plein  d'amour 
remontait  au  nom  de  la  reine  Marie-Antoinette,  qui  avait  entouré 
d'affection  et  d'honneur  les  deux,  grands  artistes. 

»  Ces  mots  disent  d'eux-mêmes  quelle  direction  fut  donnée  à 
la  vie  de  Léon  Kreutzer,  et  quel  instinct  l'associa  à  nos  pensées 
et  à  nos  travaux. . . 

»  Il  y  a  deux  hommes  à  considérer  dans  Léon  Kreutzer:  le 
compositeur  et  le  critique.  Le  compositeur  n'a  point  été  connu  de 
la  foule.  Son  génie  —  je  dis  son  génie  avec  hardiesse  —  n'avait 
rien  de  ce  qu'il  faut  pour  devenir  populaire.  Son  caractère  aussi 
peut-être  se  refusait  à  la  poursuite  des  moyens  qui  donnent  la 
gloire;  il  n'avait  ni  l'intrigue,  ni  la  vanterie  de  soi-même,  ni  la  flat- 
terie des  autres;  il  en  avait  plutôt  l'inverse;  insouciant  et  distrait, 
tantôt  irritable,  tantôt  facile,  tour  à  tour  humble  et  fier,  il  se 
renfermait  en  son  œuvre,  et,  content  du  suffrage  d'une  élite,  il  se 
dérobait  au  jugement  de  la  multitude.  » 

J'ai  transcrit  ces  lignes  parce  que,  tracées  avec  tout  le  tact, 
toute  la  délicatesse  d'un  ami  qui  parle  d'un  ami,  elles  viennent 
à  l'appui  de  ce  que  j'ai  dit  moi-même  plus  haut  du  caractère  un 
peu  fantasque  de  Léon  Kreutzer.  M.  Laurentie  dit  encore  ceci  : 
«  Mais  quel  que  fût  son  dédain  de  la  renommée  bruyante,  il 
avait  ses  échappées  d'irritation  contre  l'indifférence  des  juges  qui 
semblent  chargés  de  donner  la  gloire.  Il  ne  pouvait  s'ignorer  lui- 
même,  il  avait  le  droit  de  penser  que  son  œuvre  et  son  nom  de- 
vaient lui  ouvrir  l'épreuve  du  Conservatoire  ;  mais  l'art  français 
est  ainsi  fait:  les  dieux  étrangei-s  sont  ses  dieux,  et  volontiers  il 
leur  sacrifie  les  dieux  domestiques.  >> 

Ces  réflexions  partent  d'un  point  de  vue  parfaitement  juste.  La 
Société  des  concerts  du  Conservatoire,  immuable  dans  son  prin- 
cipe comme  elle  paraît  l'être  dans  ses  destins,  s'épanche  chaque 
jour  en  doléances  au  moins  exagérées  sur  la  nécessité  où  elle  se 
trouve  d'avoir  sans  cesse  recours  à  l'art  étranger,  et  lorsque  nous 
avons,  chez  nous,  un  artiste  sérieux  qui  peut  lui  donner  des  ga- 
ranties, elle  passe  à  côté  de  lui  sans  paraître  même  l'apercevoir. 
Nous  possédions  ainsi,  en  France,  deux  artistes  d'un  mérite  très- 
réel  et  prisé  des  délicats  :  M.  Théodore  Gouvy  et  Léon  Kreutzer. 
La  Société  ne  paraît  pas  se  douter  de  l'existence  du  premier  ; 
quant  au  second,  elle  vient  de  le  laisser  mourir  sans  lui  avoir 
donné  la  satisfaction  d'entendre  et  sans  s'être    donné  le   mérite 


(1)  Voirie  n"  U. 


d'exécuter  une  de  ses  œuvres.  Il  en  est  de  même  de  M.  Pasdc- 
loup  —  dont  la  situation,  il  faut  le  dire,  est  plus  délicate  —  mais 
qui,  nous  semble-t-il,  pourrait  bien  faire  entrer  plus  souvent 
le  nom  d'un  artiste  français  contemporain  dans  la  composition 
d'un  de  ses  programmes  lorsqu'il  veut  faire  un  essai  ;  à  tout 
prendre,  je  crois  que  l'audition  d'une  page  signée  Berlioz,  Théo- 
dore Gouvy,  Léon  Kreutzer,  Hen.-i  Ueber,  Félicien  David,  vaudrait 
bien  celle  des  œuvres  de  MM.  Abert,  Lachner,  Ralf  et  tuUi 
quanti. 

Quoi  qu'il  en  soit,  Léon  Kreutzer  n'eut  jamais  l'honneur  ni  le 
bonheur  de  s'entendre  exécuter  soit  au  Conservatoire,  soit  au 
cirque  Napoléon;  et  quand  il  produisit  en  public  ses  œuvres  sym- 
phoniques,  ce  fut  à  ses  frais,  et  en  prenant  à  sa  charge  toutes  les 
dépenses  d'une  exécution  à  grand  orchestre,  dépenses  toujours 
fort  lourdes,  comme  chacun  sait,  mais  que  lui  permettait  du  reste 
son  état  de  fortune.  Je  ne  sais  si  les  deux  symphonies  qu'il  a 
laissées  (l'une  en  si  bémol,  l'autre  en  fa  mineur)  ont  été  ainsi 
toutes  deux  par  lui  livrées  au  public.  L'une  d'elles,  tout  au 
moins,  fut  entendue;  j'ai  le  regret  de  ne  pas  la  connaître,  et  de 
ne  pouvoir,  par  conséquent,  porter  sur  elle  un  jugement  motivé  ; 
mais  ce  que  j'en  ai  entendu  dire  par  quelques  artistes  m'en  fait 
concevoir  le  plus  grand  bien,  et  me  porte  à  la  considérer  comme 
une  œuvre  supérieure  au  point  de  vue  de  la  forme  ,  remarquable 
comme  inspiration,  et  originale  sous  le  rapport  du  coloris  instru- 
mental. 

L'œuvre  la  plus  connue  de  Léon  Kreutzer  est  son  concerto- 
symphonie  pour  piano  et  orchestre,  que  Mme  Massart,  femme  de 
l'excellent  professeur  du  Conservatoire,  exécutait  avec  son  talent 
magistral,  et  qu'elle  a  propagé  avec  la  constance  et  la  conscience 
d'une  grande  artiste.  Mme  Massart  fit  entendre  cette  grande  com- 
position, d'abord  dans  la  salle  du  Conservatoire,  puis  chez  Herz, 
je  crois,  puis  enfin  à  l'Athénée,  avant  sa  transformation  en  théâ- 
tre. C'est  dans  ce  dernier  endroit  que,  pour  ma  part,  j'eus  le 
plaisir  de  l'entendre.  «...  Enfin,  dit  à  ce  sujet  M.  Laurentie, 
une  grande  épreuve  éclata,  comme  à  l'improviste;  ce  fut  l'exécu- 
tion, non  pas  au  Conservatoire,  mon  Dieu!  mais  dans  la  salle  oc- 
troyée, non  sans  hésitation,  de  ses  séances,  l'exécution,  dis-je, 
d'un  concerto-symphonie  pour  piano  et  orchestre.  Cette  fois,  un 
grand  public  était  présent,  public  sérieux  et  compétent,  mêlé 
d'artistes  et  d'amateurs  instruits,  tous  disposés  à  la  justice,  sans 
parti  pris  d'enthousiasme.  Mme  Massart,  la  grande  artiste,  tenait 
le  piano  ;  un  brillant  orchestre  était  sous  les  armes  ;  la  curiosité 
était  attentive.  Le  doute  faisait  silence  ;  il  s'agissait  de  savoir  si  la 
France  avait  un  symphoniste  digne  d'être  mis  en  regard  du  nom 
glorieux  de  Beethoven.  Ce  fut  un  grand  combat;  le  piano  fit  mer- 
veille, l'orchestre  rivalisa;  l'œuvre  se  déroula  savante,  magnifi- 
tique,  resplendissante  ;  l'exécution  dura  une  heure,  heure  pleine 
d'émotions  et  de  surprises,  et  Léon  Kreutzer,  que  personne  ne 
vit  ce  soir-là  nulle  part,  n'eut  d'autre  embarras  que  de  savoir 
comment  il  allait  recevoir  la  gloire  qui  venait  de  lui  arriver  avec 
cette  profusion  d'applaudissements  et  de  sympathies.  » 

En  faisant  la  part  de  l'exagération  amicale,  les  lignes  qui  pré- 
cèdent retracent  l'exacte  vérité.  Léon  Kreutzer  remporta  en  effet 
ce  soir-là  une  brillante  victoire,  et,  on  peut  le  dire,  une  victoire 
méritée.  Son  concerto  était  véritablement  une  œuvre  très-remar- 
quable, un  peu  outrée,  à  mon  sens,  dans  ses  développements,  et 
qui  aurait  gagnée  à  être  un  peur  accourcie,  mais  c'était  une  noble 
composition,  aux  grandes  lignes,  au  style  sévère,  à  l'instrumen- 
tation puissante  et  vigoureuse  par  instants,  délicate  et  sémillante 
dans  d'autres,  et  toujours  remplie  de  détails  originaux  et  char- 
mants. 

J'ai  sous  les  yeux  trois  quatuors  de  Léon  Kreutzer,  pour  instru- 
ments  à   cordes,   gravés  en  partition   (premier,   dédié  à  M.  Ch. 


364 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


Dancla;  deuxième,  à  M.  Gouffé  ;  troisième,  à  M.  Hector  Berlioz). 
Ces  trois  œuvres  importantes  décèlent  un  talent  rare,  une  grande 
sûreté  de  main  et  une  forme  très-personnelle.  La  mélodie  s'y 
voile  parfois  sous  l'agencement  des  parties  et  le  tissu  des  combi- 
naisons harmoniques;  elle  ne  s'y  montre  pas  moins  très -réelle, 
et  parfois  très-franche.  La  facture  est  très-serrée,  le  sentiment, 
élevé,  poétique  ou  délicat,  selon  l'occasion,  et  le  caractère  relatif 
à  chaque  instrument  y  est  on  ne  peut  mieux  observé.  Un  repro- 
che seulement  est  à  faire  à  l'auteur  relativement  à  la  façon  dont  il 
écrit  au  point  de  vue  du  doigté  et  du  démanché.  Dans  l'midan- 
tino  du  premier  quatuor,  je  remarque  divers  passages  en  notes 
coulées  qui  sont  de  véritables  casse-cou ,  et  dans  le  scherzo  cer- 
taines attaques  qui  sont  au  moins  scabreuses. 

Je  dois  mentionner  aussi  ses  trois  sonates  pour  piano,  dont 
l'une,  «  dana  le  style  ancien,  »  est  dédiée  à  M.  Marmontel.  Celle- 
ci  est  un  pastiche  très-réussi,  dans  lequel  on  retrouve,  non-seule- 
ment la  coupe  des  anciennes  pièces  de  clavecin,  mais  les  rhythmes, 
les  dessins  et  les  agi'éments  du  temps.  Léon  Kreutzer,  qui  pour- 
tant n'avait  point  l'esprit  poussé  à  la  gaieté,  a  écrit,  comme  troi- 
sième morceau,  un  canon  rigoureux  qui  est  d'un  effet  très-singu- 
lier et  très-comique.  Les  deux  autres  sonates  présentent  des  qua- 
lités de  premier  ordre,  mais,  il  faut  bien  le  dire,  leurs  développe- 
ments dépassent  toute  espèce  de  proportion;  l'auteur,  on  le  voit, 
savait  rarement  se  borner,  et  oubliait  trop  complètement  l'apho- 
risme de  Boileau.  Néanmoins,  je  recommande,  dans  la  seconde, 
la  phrase  de  début  de  Yandante,  qui  est  superbe  et  d'un  caractère 
admirable,  puis  le  finale,  danza  rustica,  dont  le  rhythme  continu, 
l'allure  rapide  et  les  dessins  charmants  sont  pleins  de  feu,  d'en- 
train et  d'originalité.  Je  dois  faire  remarquer  que  ces  sonates 
sont  des  morceaux  de  première  force,  qui  réclament  des  virtuoses 
consommés. 

Dans  ses  oeuvres  diverses ,  aussi  bien  que  dans  ses  études  de 
piano,  dans  ses  dix  valses  (qui,  comme  celles  de  Beethoven,  ne 
sont  point  faites  pour  être  valsées),  et  les  deux  écossaises,  la  qua- 
lité dominante  du  compositeur  est  l'horreur  du  banal  et  la  re- 
cherche de  l'originalité,  recherche  qui  le  conduit  parfois  un  peu 
près  de  l'étrangeté,  mais  qui  n'enlève  jamais  à  son  inspiration  ni 
la  distinction  des  formes,  ni  la  grâce  des  contours,  et  qui  la  revêt 
d'une  sorte  de  manteau  brillant  aux  couleurs  chatoyantes  et  aux 
reflets  lumineux. 

Il  me  reste  à  parler  maintenant  de  ses  compositions  vocales. 

Celles-ci  consistent  en  deux  séries  de  Ballades  et  Mélodies  (l'une 
de  26,  l'autre  de  20),  écrites  sur  des  paroles  de  Ronsard,  de 
Charles  d'Orléans,  de  Charles  Dovalle,  de  Chateaubriand,  Musset, 
Lamartine,  Victor  Hugo,  Th.  Gautier,  Casimir  Delavigne, 
Mme  Desbordes- Val  more,  etc.  Le  seul  choix  de  ces  collaborateurs 
indique  suffisamment  la  nature  de  l'esprit  très-cultivé  de  Léon 
Kreutzer.  Ces  diverses  compositions  se  font  toutes  remarquer  par 
un  soin  tout  particulier  de  la  forme,  une  rare  souplesse  de  main, 
un  grand  sentiment  poétique,  la  recherche  de  la  couleur  et  du 
pittoresque,  et  enfin,  au  seul  point  de  vue  musical,  par  des  pensées 
élégantes  ou  élevées,  une  harmonie  très-distinguée,  quoique  par- 
fois peut-être  un  peu  hardie,  des  accompagnements  très-fouillés  et 
pleins  d'originalité.  Je  suis  embarrassé,  vraiment,  pour  faire  un 
choix  dans  tout  cela,  et  citer  les  unes  plutôt  que  les  autres.  J'ai 
cependant  particulièrement  distingué  celles  qui  ont  pour  titre  : 
Ghazel,  l'Ange  au  berceau,  le  Danube  en  colère,  la  Véritable  Ma- 
nda, Chanson  d'Avril....  Mais  je  n'ose,  je  l'avoue,  recommander 
celles-ci  plutôt  que  celles-là.  On  sent,  en  lisant  ces  pièces,  de  carac- 
tères très-divers,  que  l'auteur  a  étudié  tous  les  compositeurs  de  lieder 
allemands,  depuis  Schubert  et  Mendelssolm  jusqu'à  Schumann  et 
Meyerbeer  ;  ce  dernier  surtout,  pour  lequel  il  professait  une  admi- 
ration profonde  et  avec  lequel  son  tempérament  musical  sympa- 


thisait complètement.  (Juelques-unes  de  ces  mélodies  ont  été  traduites 
en  allemand  par  M.  Richard  Lindau,  et  pour  un  certain  nombre 
d'entre  elles  l'auteur  avait  écrit  un  accompagnement  d'orchestre 
qui  semble  indiqué  du  reste  par  leur  nature  même. 

Léon  Kreutzer  a  laissé  en  manuscrit  les  partitions  de  deux  ou- 
vrages dramatiques  :  Serafina,  opéra-comique  en  un  acte,  et  les 
Filles  d'azur,  opéra  fantastique.  Pourquoi  ces  deux  ouvrages 
n'ont-ils,  malgré  le  nom  et  le  talent  de  leur  auteur,  trouvé  l'hos- 
pitalité sur  aucun  théâtre?  C'est  ce  que  que  je  ne  me  charge  pas 
d'expliquer.  J'ignore  s'ils  ont  été  exécutés  dans  quelque  circons- 
tance particulière.  En  tout  cas  je  n'en  saurais  parler. 

Je  disais  à  l'instant  que  Léon  Kreutzer  professait  une  admiration 
réelle  pour  Meyerbeer.  C'est  surtout  comme  critique  qu'il  en  a 
donné  des  preuves,  et  cela  m'amène  à  parler  de  son  talent  d'écri- 
vain. Je  me  rappelle  encore  le  feuilleton  enthousiaste  et  ému  qu'il 
écrivit,  dans  l'Union,  au  lendemain  de  la  représentation  de  l'Afri- 
caine, de  cette  œuvre  superbe  que  le  maître,  un  peu  par  sa  faute 
sans  doute,  n'eut  pas  le  bonheur  de  voir  naître  à  la  lumière,  mais 
que  son  bruyant  succès  a  peut-être  fait  frémir  d'aise  dans  le  calme 
Oli  il  repose.  Léon  Kreutzer  considérait  Meyerbeer,  on  peut  le  dire, 
comme  le  grand  maître  de  l'art  moderne,  et  l'on  doit  avouer 
qu'il  eiit  pu  fixer  plus  mal  ses  préférences.  Il  lui  consacra  dans 
la  Revue  contemporaine,  en  18o3,  une  série  d'articles  fort  remar- 
quables et  dans  lesquels  le  génie  du  grand  créateur  était  soumis  à 
une  analyse  savante,  détaillée  et  minutieuse.  Il  est  regrettable  que 
ces  articles  n'aient  pas  été  réunis  en  un  volume,  qui  serait  fort 
utile  à  consulter,  et  dont  la  critique  analytique,  sévère  et  toute 
musicale,  compléterait  merveilleusement  les  dissertations  poétiques 
et  sensibles  contenues  dans  le  livre  sincère  et  élégant  de  M.  Henri 
Blaze  de  Bury.  Pour  ma  part,  je  confesse  que  j'ai  beaucoup  profité 
de  la  lecture  de  ces  articles  substantiels  lorsque,  à  la  mort  de 
Meyerbeer,  je  publiai  une  biographie  de  ce  grand  homme. 

Quelques-uns  des  lecteurs  de  la  Gazette  musicale  n'ont  peut-être 
pas  oublié  la  série  d'articles  que  Léon  Kreutzer  donna  jadis  dans 
ce  journal  sous  le  titre  de  l'Opéra  en  Europe.  L'ensemble  de  ces 
articles  formait  un  tout  complet,  et  leur  auteur,  dans  ces  derniers 
temps,  songeait  à  en  faire  une  publication  séparée,  après  les  avoir 
revus  et  corrigés  avec  le  plus  grand  soin.  Je  ne  sais  si  ce  projet 
a  reçu  un  commencement  d'exécution;  cela  serait  fort  à  souhaiter, 
et  dans  ce  cas  il  est  à  espérer  que  sa  famille  tiendrait  à  honneur 
d'achever  l'œuvre  commencée. 

J'ai  dit  que  Léon  Kreutzer  avait  collaboré  à  l'Encyclopédie  du 
XIX<=  siècle.  Il  rédigea  particulièrement  dans  ce  recueil,  avec 
M,  Edouard  Fournier,  l'article  Opéra,  Opéra-Comique,  dont  les 
deux  auteurs  firent  faire  un  tiré  à  part  sous  ce  titre  :  Essai  sur 
l'art  lyrique  au  théâtre,  depuis  les  anciens  jusqu'à  Meyerbeer.  (Pa- 
ris, Bouchard-Huzard,  1849,  in-12.)  Il  prit  part  aussi  à  la  rédac- 
tion du  journal  le  Théâtre,  à  l'époque  oîi  M.  Édourd  Fournier  en 
était  le  rédacteur  en  chef,  et  il  fut  chargé  pendant  un  certain 
temps  de  toute  la  partie  musicale  de  cette  feuille  (1). 


(1)  Le  lecteur  voudra- t-il  bien  ne  pas  m'accuser  d'outrecuidance  si  je 
consigne  ici  un  souvenir  personnel  ?  —  C'est  à  Léon  Kreutzer  que  je 
dois  indirectement  d'avoir  vu  mes  premières  lignes  imprimées  dans  un 
journal.  J'étais  fout  jeune  alors  qu'il  publia  dans  le  Théâtre  (où  je  tins 
modestement  plus  tard  la  place  qu'il  avait  occupée  d'une  façon  si  bril- 
lante) un  article  sur  le  concours  de  violon  du  Conservatoire.  J'étais  fort 
loin  de  partager  l'opinion  qu'il  exprimait  sur  ce  concours,  et,  encouragé 
par  mes  camarades  d'orchestre,  qui  étaient  aussi  mes  camarades  de 
classe,  j'écrivis  au  journal  une  longue  lettre  en  réponse  à  son  article. 
Mais,  par  prudence,  et  afin  de  ne  pas  provoquer  mon  renvoi  du  Con- 
servatoire en  cas  de  publication  de  ma  prose,  je  signai  seulement  celle- 
ci  de  mes  initiales.  Léon  Kreutzer  crut  que  la  réfutation  de  son  ariicle 
venait  d'un  des  membres  du  jury  du  concours,  et  répondit  longuement 
en  faisant  connaître  cette  supposition.  Un  membre  du  jury  avait  en  eifet 
les  mêmes  initiales  que  l'auteur  de  la  lettre  :  c'était  Auguste  Panseron. 


DE  PARIS. 


3m 


On  voit  que  la  vie  de  Léon  Kreutzer  a  été  laborieuse  'ol  bien 
remplie.  C'est  qu'il  était  de  la  race  de  ces  esprits  d'élite  qui 
croient  ([uo  la  fortune,  cette  servante  du  hasard,  ne  dispense  pas 
l'homme  des  devoirs  qu'il  a  à  remplir  sur  la  terre,  et  qu'un  peu 
d'argent  n'empêche  ni  l'âme  de  songer,  ni  lé  cerveau  de  réfléchir. 
Intelligence  rêveuse,  nature  mélancolique  et  distinguée,  caractère 
indépendant  et  fier,  il  avait  tout  ce  qu'il  faut  pour  atteindre,  non 
peut-être  la  célébrité,  mais  du  moins  une  juste  renommée  et  le 
suffrage  des  délicats.  Ce  suffrage,  cette  renommée  ne  lui  ont  point 
fait  défaut,  et  s'il  n'a  pas  été  à  même  de  captiver  la  foule,  c'est 
que  peut-être  il  manquait  de  la  force  nécessaire  à  qui  veut  s'im- 
poser à  elle,  de  c(itte  énergie  soit  patiente,  soit  violente,  sans  la- 
quelle nul  ne  forcera  jamais  l'oreille  du  grand  public ,  l'attention 
des  masses.  Sa  vie  du  moins  n'a  pas  été  inutile,  et  l'on  peut  dire 
qu'il  laisse,  avec  des  œuvres  très-recommandables,  le  souvenir 
d'une  carrière  honorablement  remplie. 

Arthur  POUGIN. 


On  lit  dans  l'Alsace,  journal  de  Colmar  du  7  de  ce  mois  : 

«  La  bibliothèque,  en  voie  de  formation,  du  Conservatoire  de  musique 
de  Colmar,  vient  d'être  l'objet  d'un  acte  de  haute  libéralilé.  La  veuve 
de  M.  Georges  Kasf.ner  a  bien  voulu  lui  faire  don  d'un  exemplaire  des 
œuvres  les  plus  remarquables  qui  ont  illustré  son  mari. 

»  Les  amateurs  et  les  artistes  du  Haut-Rhin  se  sont  toujours  rappelé 
l'accueil  bienveillant  qu'ils  ont  reçu  de  Georges  Kastner.  Quand  fut  fon- 
dée notre  école  de  musique,  il  en  avait  suivi  avec  intérêt  la  création,  et 
plus  tard,  les  progrès.  Aussi,  nulle  part  la  mort  prématurée  du  grand 
artiste  ne  fut-elle  plus  vivement  sentie  qu'à  Colmar. 

s  Le  don  que  Mme  Kastner  vient  de  faire  au  Conservatoire  est  un 
souvenir  touchant  de  ces  sentiments  de  sympathie  réciproque. 

»  Parmi  les  œuvres  dont  l'étude  sera  la  plus  utile  aux  professeurs  et 
aux  élèves  les  plus  avancés,  citons  d'abord  divers  traités  d'harmonie, 
dHnstrumentation  et  de  contrepoint.  Ces  ouvrages  ont  été  adoptés  pour 
l'enseignement  par  l'Institut,  dont  Kastner  fut  constamment  un  des 
membres  les  plus  laborieux  et  les  plus  influents. 

»  C'e.-it  lui  aussi  qui  a  été  un  des  plus  ardents  promoteurs  de  la  réor- 
ganisation des  musiques  militaires  en  France.  Ses  idées  sur  ce  point, 
développées  dans  son  Manuel  général  de  musique  militaire,  ont  été  adop- 
tées en  très-grande  partie.  Grâce  à  lui,  nos  bandes  de  musiciens  sont 
d'une  force  aujourd'hui  à  lutter  contre  n'importe  quel  corps  de  musique 
étranger. 

»  C'est  encore  à  Georges  Kastner  que  l'on  doit  en  grande  partie  le  dé- 
veloppement du  goût  de  la  musique  dans  les  masses  et  l'institution  des 
Orphéons,  qui  chantent  aujourd'hui  sur  tous  les  points  du  sol  français, 
et  jusque  dans  les  plus  petits  villages.  Ce  çuafuor  de  chanteurs  alsaciens 
qu'il  produisit  dans  le  temps,  dans  les  salons  de  Paris  et  devant  les  mu- 
siciens les  plus  complets,  ne  tarda  pas  à  rejeter  au  second  plan  les 
chanteurs  tyroliens  et  pyrénéens  qui,  jusqu'alors,  avaient  accaparé  la 
vogue.  Les  Chants  de  la  vie,  cycle  choral,  etc.,  contiennent  tout  à  la  fois 
l'histoire  du  chant  choral  pour  voix  d'hommes  et  un  recueil  de  mor- 
ceaux à  quatre,  à  cinq,  à  six,  à  huit  voix,  auquel  on  n'a  peut-être  pas 
assez  rendu  justice. 

n  Citons  encore  parmi  Ips  travaux  de  notre  grand  musicien  les  ou- 
vrages suivants  dont  vient  d'être  dotée  la  bibliothèque  du  Conservatoire: 
La  Harpe  d'Eole  et  la  musique  cosmique  ;  éludes  sur  les  rapports  des  phé- 
nomènes, de  la  nature  avec  la  science  et  l'art;  —  Les  Chants  de 
l'armée  française;  —  Parémiologie  musicale  de  la  langue  française,  ou 
explication  des  proverbes,  etc.,  qui  tirent  leur  origine  de  la  musique;  — 
Les  Voix  de  Paris,  essai  d'une  histoire  littéraire  et  musicale  des  cris  popu- 
laires de  la  capitale,  depuis  le  moyen  âge  jusqu'à  nos  jours. 

n  Tous  ces  traités,  vrais  trésors  d'érudition,  trouvent  en  quelque  sorte 
leur  sanction  au  point  de  vue  musical  dans  une  composition,  ordinaire- 
ment une  cantate,  qui  les  suit  et  forme  comme  une  sorte  de  résumé  ou 
de  récapitulation  des  théories  exposées  dans  la  première  partie.  Et  que 
l'on  ne  se  figure  pas  n'avoir  à  faire  ici  qu'aux  élucubrations  profondes, 
mais  fastidieuses,  d'un  savant  en  us.  Kastner,  il  est  vrai,  était  docteur 
en  philosophie  et  des  mieux  versés  dans  l'histoire  et  la  philologie;  mais 
ses  livres  se  lisent  avec  charme  et  sans  la  moindre  fatigue.  Il  écrivait 
avec  l'érudition  d'un  AOemand  et  avec  une  plume  toute  française.  Rien 
de  curieux  et  d'intéressant  comme  son  histoire  littéraire  et  musicale  des 
Voix  de  Paris  et  la  symphonie  humoristique  qui  la  termine. 

»  Chaque  page  de  ses  œuvres  contient  les    observations  les  plus  pi- 


quantes, les  révélalions  les  plus  inallondues.  Dans  ses  Chants  de  l'armée 
française,  Kastner  élalilit  d'une  manière  irrécusiible  les  droits  de  Rouget 
de  risle,  comme  auteur  de  la  HarseiUaise.  Quand  il  arrive  à  la  période 
de  1830,  il  fait  riiisltiire  de  la  l'arisienne.  Cliose  étrange!  On  a  tou- 
jours su  que  Casimir  Delavigne  était  l'auteur  des  paroles,  nuiis  pei^ 
sonne  ne  pouvait  dire  de  qui  était  la  musique.  On  l'a  attribuée  à  Auber 
et  il  maint  autre  composiioui'  français.  La  vérité  est  que  le  cliant  de  la 
Parisienne  est  tout  simplement  un  \ieil  air  populaire  de  l'Allemagne  du 
Nord,  que  certains  régiments  étrangers  cliantaient  souvent  pendant  les 
campagnes  de  1SJ3  à  I.SI.'Î.  On  conviendra  que,  pour  un  chant  patrio- 
tique franç^us,  l'emprunt  est  assez  original.  La  preuve  de  ce  fait  se 
trouve  consignée  dans  le  recueil  de  Curiosa  que  M.  Kastner  a  laissé  et 
qui  doit  contenir,  sur  la  matière  musicale ,  qui  a  été  le  culte  de  toute 
sa  vie,  des  documenis  fort  intéressants.  Dei.uhe.  » 


Le  défaut  d'espace  nous  oblige  à  renvoyer  au  numéro  prochain 
la  Revue  des  Théâtres. 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 

j*^  Le  théâtre  impérial  de  l'Opéra  a  donné  lundi  et  mercredi  Hamlet, 
et  vendredi  la  reprise  des  Huguenots. 

,t%  Le  ténor  Lhérie,  qui  -s'était  fait  tout  récemment  remarquer  dans 
le  rôle  de  Sylvain  des  Dragons  de  Villars,  vient  de  résilier  son  engage- 
ment avec  la  direction  du  théâtre  de  l'Opéra-Comique,  et  d'en  contracter 
un  avec  le  directeur  du  grand  théâtre  de  Marseille. 

jf*^  Le  théâtre  Italien  a  donné  cette  semaine  Linda  di  Chamouni,  la 
Sonnambula  et  Crispino.  Mme  Adelina  Patti  a  joué  dans  ces  trois  pièces 
avec  son  .succès  habituel,  et  chaque  soir  devant  une  salle  comble.  — 
On  annonce  pour  mardi  Semiramide  avec  Mlle  Krauss,  et  prochainement 
la  Serva  Padrona  de  Paësiello.  Mlle  Urban  est  chargé  du  rôle  mimé.  — 
On  poursuit  les  répétitions  de  Piccolino ,  de  Mme  de  Grandval ,  et  l'on 
prête  à  M.  Bagier  l'idée  i1e  monter  Idomeneo,  de  Mozart. 

**^  Le  baryton  Graziani  est  souffrant  depuis  quelque  temps  et  craint 
d'augmenter  cet  état  maladif  en  retournant  à  Saint-Pétersbourg.  II  y 
sera  remplacé  par  Steller,  que  M.  Bagier  a  obligeamment  mis  à  la  dis- 
position du  directeur  des  théâtres  impériaux.  On  sait  que  Fraschini  a 
aussi  renoncé  à  son  engagement. 

^*^  Le  Val  d'Andorre  et  le  Barbier  fournissent  une  belle  carrière  au 
théâtre  Lyrique.  Demain  première  de  VIrato  de  MéhuI,  et  bientôt  après 
la  reprise  d'Iphigénie  en  Tauride.  —  Mlle  Schroeder  vient  de  rompre  son 
engagement  avec  M.  Pasdeloup.  Le  chef  des  chœurs,  M.  Vast,  se  retire 
également.  —  La  direction  vient  de  recevoir  un  opéra  en  trois  actes. 
Don  Quichotte,  musique  de  M.  Ernest  Boulanger,  paroles  de  MM.  Michel 
Carré  et  J.  Barbier. 

^*j,  Au  nombre  des  opérettes  d'Offenbach  que  la  direction  des  Bouffes- 
Parisiens  se  propose  de  reprendre ,  il  faut  mentionner  l'excellente  bouf- 
fonnerie Vent  d'i  soir,  qui  obtint  dans  l'origine  un  si  grand  succès  avec 
Désiré  et  la  blonde  Mlle  Garnier.  La  pièce  a  subi  de  la  part  des  auteurs 
quelques  remaniements  et  additions  qui  doivent  renouveler  son  succès. 

»*^,  Les  30  premières  représentations  de  la  Périchole  ont  produit 
131,988  francs.  Le  public  se  porte  toujours  en  foule  au  théâtre  des  Va- 
riétés et  y  applaudit  avec  enthousiasme  l'œuvre  nouvelle  d'Offenbach,  et 
ses  excellents  interprètes  Mlles  Schneider  et  Dupuis. 

,*;j  Les  recettes  brutes  des  théâtres  subventionnés,  théâtres  secondaires, 
cafés-concerts,  etc.,  ont  atteint,  pendant  le  mois  d'octobre,  le  chiffre  de 
1,776,029  fr.  56  cent. 

jj**  Lorsque  nous  donnions  dimanche  des  nouvelles  de  Moscou,  qui 
signalaient  le  nouveau  triomphe  de  Mlle  Artôt  dans  les  Huguenots,  — 
oii  elle  n'a  pas  été  rappelée  moins  de  27  fois,  —  nous  nous  réservions 
de  payer  au  chef  d'orchestre  de  la  Compagnie  italienne,  M.  Joseph  Du- 
pont, un  tribut  d'éloges  bien  mérité  pour  le  zèle ,  l'activité  et  le  talent 
déployés  dans  l'accomplissement  de  la  tâche  délicate  qui  lui  incombait, 
pour  produire  dignement  devant  un  public  aussi  connaisseur  que  diffi- 
cile, le  chef-d'œuvre  d'Auber  et  celui  de  Meyerbeer.  Déjà  l'accueil  le  plus 
sympathique  avait  été  fait  par  ce  public  à  M.  Dupont,  lors  de  la  repré- 
sentation de  la  Muta  di  Portici  donnée  à  son  bénéfice.  Au  moment  où 
il  prenait  place  au  pupitre,  une  salve  prolongée  d'applaudissements  accom- 
pagnait la  présentation  d'une  belle  couronne;  l'ouverture  soulevait  en- 
suite de  si  enthousiastes  bravos  que,  chose  sans  précédent  à  Moscou, 
l'orchestre  était  obligé  de  la  redire;  un  nouveau  témoignage  de  satisfac- 
tion attendait  M.  Dupont  après  le  deuxième  acte  :  le  public  le  rappelait 
avec  tout  le  personnel  des  artistes  et  des  chœurs,  et  les  abonnés  lui 
offraient  un  magnifiqtie  chronomètre  en  or  avec  sa  chaîne,  le  tout  d'une 
valeur  de  500  roubles  (2,000  francs).  Enfin,  à  la  chute  du  rideau,  M.  Du- 
pont fut  encore  rappelé  3  fois.  En  présence  de  pareilles  démonstrations, 


366 


HEVllE  K'ï  GAZETTE  MUSICAIJ'", 


on  conçoit  l'empressement  des  artistes  à  contracter  des  engagements  pour 
la  Russie. 

**:j  La  réunion  des  compositeurs  qui  ont  pris  part  au  concours  musi- 
cal institué  au  théâtre  Lyrique  impérial  a  eu  lieu  mardi  dernier  au 
ministère  de  la  maison  de  l'Empereur  et  des  Beaux-Arts.  Deux  jurys  ont 
été  nommés,  l'un  pour  l'examen  des  partitions,  le  second  pour  l'examen 
des  libretti  envoyés  à  ce  concours.  Le  nombre  des  œuvres  déposées  s'é- 
lève à  quarante-trois. 

;^**  Fleur  de  Thé  vient  de  faire  son  apparition  au  Gymnase  de  Mar- 
seille, ave;  un  grand  luxe  de  mise  en  scène.  La  pièce  a  parfaitement 
marché,  et  ti'ois  représentations  par  semaine  ne  ralentissent  pas  son 
franc  et  loyal  succès.  Mlle  Rolland  est  ravissante  dans  le  rôle  de  Fleur 
de  Thé;  Mlle  Laurentis,  chanteuse  de  talent,  a  de  l'entrain;  MM.  Lesbros 
et  Perricaud  sont  d'un  comique  irrésistible. 

*%  Les  journaux  américains  qui  nous  arrivent  confirment  le  succès 
qu'obtient  Mme  Rose  Bell  dans  le  répertoire  d'Ofîenbach,  et  particulière- 
ment dans  la  Grande-Duchesse ,  dont  les  représentations  font  encaisser 
2,500  dollars  par  soirée  (12,300  fr.)  au  directeur,  M.  Grau. 


NOUVELLES  DIVERSES. 


^.**  Le  premier  concert  de  la  société  des  Concerts  du  Conservatoire 
est  fixé  au  dimanche  i3  décembre  prochain. 

.'\  Au  troisième  concert  populaire,  on  a  entendu  pour  la  première 
fois  dans  son  entier  la  Suite  d'orchestre,  œuvre  dOl  de  Joacliim  Raff, 
dont  deux  morceaux,  Vadagielto  et  le  scherzo,  avaient  déjà  été  exécutés 
l'année  dernière.  Cette  œuvre,  dans  laquelle  on  sent  la  main  d'un  maître, 
et  qui  se  distingue  par  une  clarté  qu'on  ne  trouve  pas  toujours  chez  cet 
auteur,  a  été  très-favorablement  accueillie.  On  a  beaucoup  applaudi 
aussi  la  belle  ouverture  de  Lorclei,  de  Vincent  Wallace,  et  Vaïlegrctto  un 
poco  agitato  de  la  Symphonie-cantate  de  Mendelssohn  a  été  bissé.  — 
Au  quatrième  concert,  l'intérêt  se  concentrait  sur  l'adagio  de  la  sym- 
phonie l'Océan  d'Ant.  Rubinstein,  déjà  connu  du  public  du  Cirque  par 
une  ou  deux  exécutions,  et  dont  les  défauts  balancent  les  incontestables 
qualités,  —  et  sur  l'ouverture  de  concert  de  Rietz,  nouvelle  pour  Paris. 
L'œuvre  de  l'éminent  capellmeister  de  Dresde  procède  çà  et  et  là  de 
Weber,  de  Schubert  et  de  Mendelssohn  ;  elle  est  écrite  avec  un  très- 
grand  talent,  pleine  de  mouvement,  de  distinction,  agréable  à  entendre 
même  pour  des  oreilles  profanes.  Nous  ne  comprenons  donc  point  la 
froideur  avec  laquelle  on  l'a  accueillie.  Le  prélude  du  cinquième  acte 
de  l'Africaine,  supérieurement  exécuté,  a  produit  un  immense  eifet; 
il  a  été  redemandé  avec  acclamations.  On  a  bissé  également  le  'scherzo 
du  Songe  d'une  nuit  d'été. 

^*^  Aujourd'hui  à  2  heures,  au  cirque  Napoléon,  cinquième  concert 
populaire  de  musique  classique,  sous  la  direction  de  J.  Pasdeloup.  On  y 
entendra  :  1°  symphonie  en  ré  majeur,  n«  31,  de  J.  Haydn  (introduc- 
tion, allegro,  andante,  menuet,  finale)  ;  —  2'  ouverture  de  Coriolan  de 
Beethoven  ;  —  3°  symphonie  en  si  bémol  de  R.  Schumann  (introduc- 
tion, allegro,  andante,  scherzo,  finale)  ;  —  4°  larghetto  du  quintette 
(op.  108),  de  Mozart,  exécuté  par  M.  Grisez  (clarinette),  et  tous  les  ins- 
truments à  cordes;  —  5°  ouverture  du  Tannhauser  de  R.  Wagner. 

.*»  Le  mardi  24  novembre,  à  onze  heures  précises,  l'Association  des 
artistes  musiciens  célébrera,  à  l'église  Saint-Eustache,  la  fête  solennelle 
de  Sainte-Cécile.  La  messe  à  grand  orchestre,  avec  soli  et  chœurs 
d'Ambroise  Thomas,  sera  exécutée  par  cinq  cents  artistes  d'élite  sous  la 
direction  de  Georges  Hainl,  chef  d'orchestre  de  l'Académie  impériale  de 
musique.  Les  soli  de  cette  œuvre  magiotrale  seront  chantés  par  Mlle  Nils- 
son  et  M.  Battaille,  professeur  au  Cont:ervatoire,  deux  grandes  célébrités 
artistiques.  Les  chœurs  seront  conduits  par  MM.  Hurand,  Steenmann  et 
Pickaërt,  maîtres  de  chapelle  de  Saint-Eustache,  Saint-Vincent  de  Paul 
et  Notre-Dame  des  Victoires.  Le  grand  orgue  sera  tenu  par  M.  Edouard 
Batiste.  Le  produit  de  cette  solennité  musicale,  l'une  des  plus  remarqua- 
bles de  la  saison,  est  entièrement  destiné  à  la  caisse  de  secours  de  la  So- 
ciété de  bienfaisance  des  artistes  musiciens. 

:j*j,  Le  concours  international  d'orphéons,  de  musiques  d'harmonie  et 
de  fanfares  que  la  ville  de  Reims  organise  pour  le  mois  de  mai  1869 
s'annonce  comme  devant  avoir  un  éclat  inaccoutumé.  Il  réunira  dans 
l'ancienne  capitale  de  la  Champagne  les  meilleures  sociétés  chorales  et 
instrumentales  de  la  France,  de  la  Belgique,  de  l'Allemagne  et  de  la 
Suisse.  La  direction  de  la  partie  active  de  cette  solennité  a  été  confiée 
à  M.  Gustave  Bazin,  artiste  de  talent,  qui  a  laissé  à  Paris  les  meilleurs 
souvenirs  et  qui  a  acquis  parmi  l'Orphéon  français,  dont  il  fut  l'un 
des  premiers  et  des  plus  ardents  promoteurs,  une  notoriété  légitime. 

,**  Pour  réaliser  l'excellent  projet  de  l'adjonction  d'un  orchestre  aux 
cours  de  son  Ecole  spéciale  de  chant,  mentionné  dans  notre  dernier  nu- 
méro, M.  Duprez,  dont  les  élèves  ne  sont  pas  riches  et  ne  pourraient  sup- 
porter ce  surcroît  de  dépenses,  vient  d'adresser  une  requête  d'abonnement 
«  à  tous  les  amis  de  l'art  vocal.»  Moyennant  iO  francs  une  fois  payés, 
l'abonné   deviendrait  prolecteur  de  l'école  et  pourrait  assister  tous  les 


vendredis,   pendant  quatre  mois,  aux  exercices  ordinaires  et  extraordi- 
naires, avec  le  droit  de  céder  sa  place. 

**«  On  a  beaucoup  remarqué  et  surtout  beaucoup  applaudi,  à  l'un  des 
derniers  concerts  de  Valentino,  une  cantatrice,  Mme  Tarnni ,  qui,  après 
avoir  figuré  avec  avantage  comme  comédienne  sur  les  scènes  des  Va- 
riétés et  du  Palais-Royal,  sous  le  nom  de  Mlle  Dahmen,  avait  quitté 
Paris,  il  y  a  cinq  ans,  pour  se  livrer  à  la  carrière  italienne  ;  après 
avoir  recueilli  maints  succès  en  Italie  et  en  Espagne,  elle  est  revenue  à 
Paris,  où  elle  ne  sera  pas  longtemps  sans  trouver  sa  place.  On  a  pu 
apprécier  au  concert  d'Arban,  dans  un  air  italien  et  le  boléro  des 
Vêpres  siciliennes,  sa  jolie  voix  de  soprano  aigu  et  l'agilité  de  ses 
vocalises. 

^*^  M.  le  baron  Frémont  a  légué  à  l'Académie  des  Beaux-Arts  une 
somme  annuelle  de  4,000  francs  pour  la  fondation  d'un  prix  d'encoura- 
gement destiné  à  un  jeune  compositeur.  Dans  une  de  ses  dernières 
séances,  l'Académie  a  décidé  que  ce  prix  serait  accordé  cette  année  à 
M.  Léonce  Cohen,  grand  prix  de  Rome,  auteur  d'un  solfège  trè.s-complet 
approuvé  par  l'Institut  et  par  le  Conservatoire. 

»**  L'assemblée  générale  extraordinaire  de  \ii  Société  des  auteurs,  compo- 
siteurs et  éditeurs  de  musique,  convoquée  pour  discuter  sur  la  révision  des 
statuts  sociaux,  aura  lieu  le  Dimanche,  22  novembre  courant,  dans  la 
salle  du  Grand-Orient,  16,  rue  Cadet,  à  1  heure  précise.  MM.  les  socié- 
taires sont  instamment  priés  d'assister  à  cette  réunion. 

^*^  Trois  fantaisies  nouvelles  pour  piano  sur  la  Grande- Duchesse 
viennent  encore  d'être  publiées  par  les  éditeurs  Brandus  et  Dufour. 
Des  deux,  de  Brinley  Richard,  l'une  .s'inspirant  de  la  Déclaration  d'a- 
mour, met  poétiquement  en  œuvre  cette  mélodie  ardente  et  contenue, 
dont  l'effet  est  irrésistible;  T'autre  est  une  transcription  burlesque  du 
fameux  air  du  Sabre.  Le  morceau  du  brillant  pianiste  Boscowitz  traite 
les  thèmes  les  plus  saillants  de  la  partition,  les  enchaîne  avec  une  verve 
entraînante,  et  les  brode  des  plus  délicates  arabesques.  Dans  cette  mine 
inépuisable,  les  deux  pianistes-compositeurs  ont  su  trouver,  chacun,  un 
nouveau  et  précieux  filon.  Nous  aurons  à  reparler  de  ces  morceaux  qui 
suivront  l'œuvre  d'Ofifenbach  dans  son  succès  toujours  grandissant. 

j,*^,  M.  et  Mme  Léonard  sont  revenus  de  leur  tournée  artistique  à 
Wiesbade,  Ems  etSpa,  et  ont  réouvert  leurs  cours  de  violon,  de  chant  et 
de  musique  de  chambre.  Ils  reprendront  aussi  bientôt  leurs  intéressantes 
soirées  du  samedi,  dans  lesquelles  on  entendra  principalement  les  qua-  • 
tuors,  trios  et  sonates  de  Beethoven,  Schumann,  Mendelssohn  et  Joachim 
Rafif,  exécutés  par  M.  Léonard  et  ses  élèves. 

^*^,  L'excellent  violoniste  et  compositeur,  M.  de  Cuvillon,  est  de  retour 
à  Paris,  et  il  vient  de  reprendre,  dans  son  domicile,  3,  rue  de  Camba- 
cérès,  ses  leçons  de  violon  et  ses  cours  d'accompagnement. 

."i",  L'éminent  pianiste -compositeur  E.  Stœger  est  aussi  de  retour 
d'une  excursion  à  Bordeaux  où  il  s'est  fait  entendre  avec  un  très-grand 
succès.  Il  a  repris  le  cours  de  ses  leçons. 

."^j  Carlotla  Patti  abandonne  M.  Ulmann  ;  c'est  l'heureux  M.  Max 
Strakosch  qui  la  lui  enlève,  grâce  à  un  contrat  de  20,000  francs  par  mois. 
Sur  ce  pont  d'or,  Carlotta  passera  l'Atlantique  pour  aller  fanatiser  les 

Yankees.  —  Comment  vont  s'appeler  désormais  les  concerts  Patti si 

tant  est  qu'il  puisse  y  eu  avoir  encore? 

^*^  Un  des  professeurs  les  plus  distingués  du  Conservatoire,  M.  Révial, 
vient  de  donner  sa  démission.  Cette  détermination  a  été  provoquée  par 
une  mesure  qui  a  fait  passer  contre  son  gré  un  élève  de  sa  classe  dans 
celle  de  M.  Vauthrot. 

„,'*»  Les  matinées  de  M.  Lebouc  ont  commencé  lundi  dernier.  Il  y 
avait  beaucoup  de  monde,  et  le  programme,  comme  l'exécution,  a  reçu 
de  l'auditoire  l'accueil  le  plus  flatteur. 

,,*,  Le  maestro  Orlandi  vient  de  découvrir  à  Naples  le  manuscrit  de 
l'hymne  national  composé  par  Cimarosa  en  1799,  pour  la  république 
parthénopéenne. 

,*,f  Un  pianiste-compositeur  distingué,  M.  Ferdinand  Dulcken,  déjà 
connu  par  plusieurs  œuvres  accueillies  avec  faveur,  et  dont  on  a  fort 
remarqué  en  dernier  lieu  l'Adieu  à  Meyerbeer,  une  Fantaisie-Caprice  et 
une  Marche  polonaise,  va  faire  paraître,  chez  les  éditeurs  Brandus  et 
Dufour,  deux  nouveaux  morceaux  :  Marche  turque  et  «  l'Air  de  Grâce  » 
de  Robert  le  Diable,  fantaisie  pour  la  main  gauche.  Ces  deux  composi- 
tions font  grand  honneur  au  talent  de  M.  Dulcken  et  ne  peuvent  qu'a- 
jouter à  sa  réputation. 

***  Cette  semaine,  va  paraître  chez  les  mêmes  éditeurs  de  musique 
une  nouvelle  œuvre  d'Eug.  Ketterer,  destinée  à  faire  sensation;  c'est  une 
grande  fantaisie  pour  le  piano  sur  les  Huguenots.  On  connaît  et  l'on 
apprécie  chaque  jour  davantage  la  supériorité  avec  laquelle  Ketterer  traite 
ce  genre  de  composition.  La  grandeur  du  sujet  l'a  encore  mieux  inspiré 
cette  fois  que  d'habitude,  et  nous  ne  croyons  pas  nous  avancer  en  disant 
qu'il  va  compter  un  grand  succès  de  plus. 

^"■^  Les  éditeurs  Magnus  et  C'"  viennent  de  faire  paraître  plusieurs 
morceaux  nouveaux  pour  piano;  ce  sont  :  la  Barque  et  le  Cabriolet, 
suites  italiennes,par  M.  Ch.  Widor;  —  Sérénade,  Metamolie  et  Coquette, 
par  M.  Danrède;  —  Rose  de  Mai  et  Sensitive,  par  Franz  KoUbach.— Nous 
les  recommandons  aux  amateurs  de  bonne  musique. 


DE  PARIS 


367 


^**  M.  Jacques  Baiir  est  de  retour  à  Paris.  Nous  avons  eu  souvent  à 
enregistrer  les  succès  remportés,  l'été  dernier,  dans  les  salons  et  à  l'iîxpo- 
sition  du  Havi'O,  par  ce  jeune  et  dgà  cclrbre  pianisle-composileur,  auteur 
de  la  remarquable  transcription  du  Chœur  des  Évêques  de  l'Africaine, 
dont  parlait  noire  dernier  numéro. 

***  On  n'a  point  oublié  le  succès  qui  accueillait  il  y  a  quelques  années 
chacune  des  romances  de  M.  Ern.  Dassier  à  leur  apparition.  Son  fils, 
M.  Alfred  Dassier,  paraît  destiné  à  continuer  la  réputation  de  son  père 
dans  ce  genre  de  composition.  On  chante  en  ce  moment  à  l'Eldorado 
de  Rouen  une  chansonnette  de  lui  :  Comment  l'esprit  vient  aux  yarçons, 
et  une  trcs-jolie  romance:  C'est  le  printemps,  dédiée  à  Adelina  Patti,  qui 
y  attirent  une  foule  considérable  et  qui  valent  rappels,  bis  et  bouquets 
aux  interprètes. 

«*.  Un  honorable  éditeur  de  musique,  M.  Jules  Heinz,  vient  de  ma- 
rier sa  fille,  Mlle  Elisa  Heinz,  qui  se  distinguait  dans  le  personnel  chan- 
tant de  l'église  Saint-Germain-l'Auxerrois.  Elle  a  épousé  lundi  dernier 
M.  Lefevre,  et,  à  la  cérémonie  nuptiale  qui  réunissait  un  auditoi^-e 
nombreux  et  sympathique,  on  a  entendu  avec  un  véritable  plaisir 
Mme  Thuot,  qui  a  chanté  avec  beaucoup  de  sentiment,  et  Croisez,  qui 
a  joué  de  la  harpe  pendant  l'office  religieux. 

»%  Le  carnaval  est  court  celte  année.  C'est  le  samedi  12  décembre 
qu'aura  lieu  le  premier  bal  masqué  de  l'Opéra,  sous  la  direction  de 
Strauss;  le  célèbre  chef  d'orchestre  prépare  ses  nouveautés,  en  tête  des- 
quelles figureront  sa  belle  valse  et  son  nouveau  quadrille  sur  la  Péri- 
choh. 


*%  M.  Violet  d'Epagny,  ancien  directeur  de  l'Odéon,  vient  de  mou- 
rir, à  l'âge  de  quatre-vingt-un  ans,  dans  son  château  de  Boigny.  H  s'était 
acquis  une  certaine  réputation  comme  auteur  dramatique;  ses  Rivaux 
de  village    obtinrent  dans  le  temps  quelque  succès  au  théâtre  Feydeau. 


ÉTRANGER 

.jf*^  Bruxelles.  —  Dimanche  dernier  a  eu  lieu  la  réouverture  des 
concert':  populaires,  sous  la  direction  de  M.  Samuel.  Quelque  froideur 
régnait  au  début  dans  la  salle,  mais  la  symphonie  en  la  de  Beethoven, 
en  a  eu  bien  vite  -raison.  L'ouverture  écossaisse  de  Gade,  la  marche 
funèbre  de  Chopin  (orchestrée),  les  variations  de  Taubert,  un  frag- 
ment de  quatuor  de  Mendeissohn  et  l'ouverture  des  Maîtres  chanteurs 
complétaient  le  programme.  Ce  dernier  morceau  a  été  accueilli  par  un 
silence  glacial.  —  M.  UUmann  et  sa  pléiade  d'artistes  ont  donné  le  12, 
un  premier  concert,  dont  le  résultat  a  été  très- satisfaisant.  Un  second 
aura  heu  mardi  prochain.  —  Le  troisième  prix  du  grand  concours  inter- 
national de  musique  religieuse,  ouvert  par  la  maison  Schott,  a  été 
décerné  à  M.  J.  Sumraers,  de  Paris.  Derrière  ce  pseudonyme,  se 
cachait  l'un  de  nos  meilleurs  compositeurs  de  musique  d'église, 
M.  Nicou-Choron.  —  Les  trois  messes  couronnées  ne  tarderont  pas  à 
paraître  en  parti'ion  et  parties  de  chant  séparées,  chezMlI.  Schott  frères. 

,*^  Londres.  —  M.  Mapleson  déploie  une  1res  grande  activité,  et  le 
succès  l'en  récompense.  Après  le  Trovitore  et  \'orma,  où  Mlle  Tietjens 
a  été  très-remarquable,  comme  toujours,  Mlle  Hauck  a  reparu  dans  la 
Sonnambula,  puis  dans  Fausto^oii  elle  a  remporté  deux  nouveaux  triom- 
phes. Le  public  a  décidément  adopté  cette  charmante  artiste.  —  Mlle  lima 
de  Murska  a  débuté  lundi  dans  Lucia,  avec  beaucoup  d'éclat.  On  s'at- 
tendait surtout  à  un  succès  de  vocalises,  car  Mlle  de  Murska  est  notoire- 
ment une  des  premières  chanteuses  à  roulades  (Coloratursœngerin)  d'Al- 
lemagne ;  on  a  été  agréablement  surpris  de  lui  voir  jouer  son  rôle  avec 
un  sentiment  et  un  soin  dont  elle  paraissait  souvent  faire  bon  marché. 

^*j^  Francforl-sur-le-Mein.  '  —  La  Société  de  Sainte-Cécile  (  Cœcilien- 
Verein)  a  célébré,  le  28  octobre,  le  cinquantième  anniversaire  de  sa  fon- 
dation. 

^*»  Cologne.  —  Au  second  concert  du  Giirzenich,  M.  Camille  Saint- 
Saëns,  qui  accomplit  en  ce  moment  une  brillante  tournée  en  Allemagne, 
a  été  apprécié  comme  virtuose  et  comme  compositeur.  On  a  beaucoup 
goûté  son  concerto  en  sot  mineur. 

,f*«  Berlin.  —  Mme  Lucca  est  partie  pour  Saint-Pétersbourg,  après 
avoir  pris  congé  de  son  public  dans  l'Africaine.  —  On  a  repris  à  l'Opéra 
Ernani,  qui  été  reçu  assez  froidement  parle  public.  —Cari  Eckert  vient 
d'être  nommé  chef  d'orchestre  de  l'Opéra  et  des  concerts  de  la  Cour. 

j*^f  Leipzig.  —  Le  cinquième  concert  du  Gewandhaus,  qui  a  eu  lieu 
le  5  novembre,  était  tout  entier  (sauf  la  Symphonie  héroïque'),  composé 
d'œuvres  de  Mendeissohn,  mort  le  i  novembre  18i7. 

^,*^  Dresde.  —  C'est  le  maître  de  chapelle  Julius  Rietz  qui  dirigera, 
pour  la  neuvième  fois,  le  prochain  festival  rhénan,  à  Dusseldorf. 


,*,  Florence.  —  La  Pergola  a  fait  une  brillanic  réouverture  avec  le 
Prophète.  L'œuvre  de  MeyerbeiT,  longtemps  et  .soigneusement  étudiée  sous 
la  direction  de  Carlo  Romani,  confiée  d'ailleurs  k  de  bons  interprètes 
Mme  Biancolini,  une  excellente  Fidès,  Mlle  N.  Roy,  et  Fancelli,  est  allée 
aile  stelle.  La  mise  en  scène  était  somptueuse  et  intelligente. 

»*»  Saint-Pétersbourg .  —  Lohengrin  vient  d'être  donné  pour  la  pre- 
mière fuis.  Un  public  très-bien  disposé,allemand  en  grande  partie,  atout 
applaudi,  beautés  et  laideurs:  il  a  témoigné  sa  satisfaction  aux  artistes 
et  au  chef  d'orchestre,  qui  .se  sont  vraiment  surpassés.  Mais  pour  qui 
connaît  un  peu  le  public  russe,  il  semble  diffir.ile  que  ce  succès,  arraché 
pour  ainsi  dire  par  surprise,  se  soutienne  longtemps. 


,*«  Salle  Valentino.  —  Mardi  prochain,  17  novembre,  inauguration 
des  nouvelles  fêtes  qui  prendront  pour  titre  :  Fête  des  Fleurs;  la  salle, 
déjà  si  belle,  sera  Iransformée  en  un  magnifique  jardin  d'hiver. —  Con- 
ceits  d'Arban  les  lundi,  mercredi;  vendredi  grand  festival. 

:f**  C'est  mardi,  17  novembre,  à  huit  heures  et  demie  du  .soir,  qu'aura 
lieu  l'inauguration  des  Bats  du  Cirque  de  l'Impératrice.  Toutes  les  sommi- 
tés de  la  presse,  toutes  nos  célébrités  artisliques,  tonte  la  fashion  pari- 
sienne, et  les  étrangers  de  distinclion,  se  donneront  rendez-vous  à  ces  fêtes 
dont  la  magnificence  et  le  comfort  dépasseront  tout  ce  qui  a  été  tenté  en 
ce  genre.  Ces  fêtes  se  continueront  les  mardi,  vendredi  et  dimanche  de 
chaque  semaine. 


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traits tout  artistiques  et  d'une  grande  ressemblance;  par  la  perfection  de 
la  musique  photographiée,  dont  les  types,  quoique  aussi  réduits  que  pos- 
sible, sont  cependant  tiès-lisibles;  enfin  par  un  format  exceptionnel  qui 
la  rend  vraiment  portative.  Rien  de  plus  commode,  en  effet,  que  de 
pouvoir  placer  dans  sa  poche  un  étui  renfermant  vingt  à  trente  cartes- 
musique;  rien  de  plus  gracieux  à  offrir  comme  cadeau. 

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Fantaisies,  etc.) 

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90,  94,  14-2) 

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39,49,  70 

8.  bis.     —    Compositions    (op.  12,  21,  62, 

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13.  Beethoven.  Toutes  les  10  sonates 

14.  Mozart.  Toutes  les  18  sonates 

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15.  Haydn.  Tous  les  83  Quatuors 

16.  Mozart.  Les  célèbres  10  Quatuors 

17.  —    Les  autres  17  Quatuors 

18.  —    Les  célèbres  5  Quintuors 

19 .  —    Les  autres  5  Quintuors 


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Meunière,  Voyage  en  hiver.  Chant  du 

Cygne,  compl.  et  lieder  choisis) 4    » 

Cet  album  contient  tous  les  Lieder  popu- 
laires de  Schubert. 
96.     —    Le  même,   pour   mezzo   soprano  ou 

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21.  Bach.  Chœurs,  vol.  I  (allem.) 12     » 

22.  —  Chœurs,  vol.  II  (allem.) 12  » 

23.  —  Passion  de  Matthieu  (allem.) 12  » 

24.  —  Messe  en  si  mineur   (latin) 12  i 

25.  —  3  messes  courtes  (latin) 16  n 

26.  —  Oratorium  de  Noël  (allem.) 10  » 

27.  —  Passion   de  Jean  (allem.) 8  » 

28.  —  6   motettes  (allem.) 6  » 

29.  —  Magnificat  et  4  sanctus  (latin) 4  » 

30.  Beethoven.    Concert   pour    piano,    en 

ul 4  y> 

31.  Id.     si  bémol 4  » 

32.  Id.     ««  mineur 4  » 

33.  Id.     sol 4  » 

34 .  —    Concert  de  violon 4  » 

35.  Hœudel.   Messie  (allem.  et  angl.) 12    > 

PARTITIONS  POUR  PIANO 

avec  texte. 


Lille,  faubourg  Saint-Germain, 


Bach.  Passion  de  Matthieu  (allem. ).l. ..  4  » 

—  Messe  en  si  mineur  (latin) 4  » 

—  Oratorium  de  Noël  (allem.) 4  i 

—  Passion  de  Jean  (allem .  ) 3  j> 

—  Magnificat  (latin) 2  n 

—  J'ai  beaucoup  de  soucis  (allem.)....  2  » 

—  Temps  de  Dieu  (allem.) 2  i 

—  Ah  !  comme  c'est  fugitif  (allem.). ..  2  » 
Beethoven.  Fidelio  (allem.) 2  75 

—  Missa  solemnis  (latin) ....  ; »  » 


Clnck.  Orphée  (allem.,  franc.,  ital.).  . 

—  Alceste  (allem.,  franc.) 

—  Paris  et  Hélène  (allem.,  franc.)..,. 

—  Iphigénie  en  Aulide  (aliem.,  franc.). 

—  Armide  (allem.,  franc.) 

—  Iphigénie  en  Tauride  (allem.,  franc.). 
Hœndel.  Messie  (allem.,  angl.) 

—  Judas   Macchabée  (allem.,  angl.}... 

—  Josué  (allem.,  angl.) 

—  Samson  (allem.,  angl.) 

—  Israël  en  Egypte  (allem.) 

—  Fête    d'Alexandre  (allem.,  angl.)... 
Haydn.  Création    (allem.,  angl.) 

—  Saisons  (allem.,  angl.) 

aXomelli.  Requiem  (latin) 

Mozart.  Don  Juan    (allem.,  ital.) 

—  Figaro  (allem.,  ital.) 

—  Flûte  enchantée  (allem.,   ital.) 

—  Koi  Thamos   (allem.) 

—  Messe  n°  l  en  fa  (latin) 

—  Messe  n"  2  en  sol  (latin) 

—  Vesperac   en  ut  (latinj 

—  Requiem  (latin) 

BoBSini.  Barbiere  (allem.,  ital.) 

Npohr.  Jessonda   (allem.) 

IVeber.  Robin  des  Bois  (allem.) 

—  Oberon  (allem.) 

PARTITIONS  POUR  PIANO  A  2  MAINS 
sans  texte. 

Beethoven.  Fidelio 

Bellini.  Norma 

—  Sonnambula 

Donize<ti    Elisirc  d'amore 

Mozart.  Don  Juan 

—  Figaro 

—  Flûte  enchantée 

Bossini .  Barbiere 

■Weber.  Robin  des  Bois 

—  Oberon 

Sera  continué. 


1  50 
1  50 
1  50 
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1  50 
1  50 


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UIPBIMERIE  CENTRALE  DES  CHEUIIVS   DE  FE&    —  A.    CHAIX  ET  C**',  BUE  BEBGÈBE,   20,  A  PABIS. 


BUREAUX    A    PARIS  :    BOULEVARD  DES     ITALIENS.  1. 


35'  Année. 


N'  47. 


ON  S'ABONNE  : 

Dans  les  Déparlements  et  rt  rKlrunger, 

chez  tous  les  Marchands  de  Musique,  h-s  I.ibrairei. 

et  aux  Bureaux  der.  Hessageries  et  des  Postes. 


_.=s-=-=v^3»io  «r=  - 


REVUE 


22  Novembre  1868. 


PRIX    DE    L'ABONNEMENT: 

l'uris, -**   r.para 

Départements,  Belgique  et  Suisse...,    :jl>  <       id. 
ÉlTuagCT 3i  "       UL 

Le  Journal  parait  le  Dimanclw. 


GAZETTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


Notre  itrocliain  numéro  contiendra  la  nomenclature 
des  PrimeetEtrennes  que  nous  nous  proposons  d'offrir, 
cette  année,  à  nos  Abonnés.  Ces  primes,  en  dehors  de 
leur  valeur  artistique  et  matérielle,  offriront  un 
grand  intérêt  d'actualité. 


SOMMAIRE.  —  Funérailles  de  Rossioi,  par  Em.  Uallitea  de  Honter.  — 

Revue    des   tliiiâtres ,  par  D.  A.   D.  Saint- Vf  es.  —  Nouvelles  des  théâ- 
tres lyriques.   —  Nouvelles  diverses.  —  Â.DDODces, 


FONËRAILLES  DE  ROSSINI. 

Depuis  hier,  samedi,  Gioacchino-Antonio  Rossini  repose  au  Père- 
Lachaise,  dans  la  paix  éternelle  du  tombeau,  non  loin  des  émules 
et  des  témoins  contemporains  de  ses  triomphes  :  Bellini,  Chopin, 
Boïeldieu,  Cherubiiii,  Hérold,  hôtes  muets,  aujourdhui,  hélas!  de 
la  funèbre  «  Vallée  des  artistes  !  » 

La  dépouille  mortelle  de  Rossini  avait  sa  place  marquée  dans 
ce  Panthéon  parisien  des  morts  illustres.  Il  ne  pouvait  quitter 
tout  à  fait  Paris  dont  il  avait  la  marque,  l'allure,  les  habitudes,  la 
prédilection,  l'esprit  joyeux  et  fort  par  conséquent,  cet  enfant  de 
Pesaro  que  Bologne  et  Naples  ne  surent  pas  garder  et  qui  en  se 
mesurant  à  Beaumarchais,  éleva  comme  à  une  puissance  supérieure, 
par  l'élan  de  sa  finesse  et  de  sa  verve,  l'esprit  entraînant  et  iro- 
nique du  plus  vivant  des  Français  du  xv»!»:  siècle  et  du  nôtre;  il 
ne  pouvait  nous  abandonner  complètement,  cet  Italien,  qui  tradui- 
sit dans  Guillaume  Tell  en  accents  sublimes  l'amour  de  la  pa- 
trie, notre  honneur  et  notre  gloire  inaltérables. 

Les  funérailles  de  Rossini  ont  été  célébrées  hier,  à  midi,  en  l'église 
de  la  Trinité  (Chaussée-d'Antin),  avec  un  appareil  très-simple, 
sous  la  présidence  du  nonce  du  Pape.  Ni  tentures,  ni  écussons. 
Le  cercueil,  couvert  d'un  drap  de  velours  noir,  brodé  d'étoiles 
d'argent,  a  été  porté  de  l'entrée  de  l'église  dans  un  catafalque 
d'ordonnance  sévère,  élevé  devant  la  grille  du  sanctuaire.  Sur  le 
drap  mortuaire  étaient  placées  deux  couronnes  de  laurier. 

Dans  la  grande  nef,  les  bas-côtés,  les  chapelles   et  les  galeries 


se  pressaient  plus  de  quatre  mille  personnes  représentant  les  aris- 
tocraties d'intelligence  et  de  talent,  de  naissance  et  de  fortune, 
que  Paris  réunit  en  une  imposante  communauté  de  sentiments  et 
d'hommages,  aux  grands  jours  de  ses  deuils  et  de  ses  fêles  artis- 
ti']ues.  On  remarquait  au  premier  rang,  M.  Gautier  et  M.  Camille 
Doucet,  les  amis  de  l'illustre  défunt;  l'Institut  au  grand  complet; 
le  Conservatoire  impérial  de  musique  ;  le  ministère  de  la  Maison 
de  l'Empereur,  représenté  par  le  maréchal  Vaillant;  la  Commission 
des  auteurs  et  compositeurs  dramatiques,  M.  de  Saint-Georges, 
son  président,  en  tête  ;  les  députations  de  l'Association  des  artistes 
musiciens,  de  l'Ecole  de  musique  religieuse,  de  la  Commission  de 
surveillance  du  chant  de  la  Ville  de  Paris,  des  principales  Sociétés 
chorales  et  instrumentales  de  Paris,  de  plusieurs  villes  et  Conser- 
vatoires d'Italie;  M.  Gruneisen,  délégué  de  la  presse  de  Londres; 
nombre  de  compositeurs,  d'artistes  célèbres,  de  journalistes,  d'édi- 
teurs ,  d'écrivains,  de  directeurs  de  théâtre,  de  dilettantes,  etc. 
L'Empereur  s'était  fait  représenter  par  M.  le  vicomte  de  Laferrière, 
son  premier  chambellan,  et  le  roi  d'Italie  par  M.  le  chevalier 
Nigra,  son  ambassadeur  à  Paris. 

Les  tribunes  du  chœur  et  du  grand  orgue  avaient  été  réservées 
aux  exécutants,  groupés  sous  la  direction  de  M.  Jules  Cohen,  ins- 
pecteur de  la  chapelle  impériale.  Aux  chœurs  composés  du  per- 
sonnel de  l'Opéra,  du  théâtre  Italien,  de  trois  cents  élèves  du 
Conservatoire,  et  de  la  majorité  des  artistes  lyriques  de  Paris, 
s'ajoutaient  des  contre-basses,  des  harpes,  et  l'orgue  d'accompa- 
gnement parfaitement  tenu  par  M.  Salomé. 

Malgré  certaines  difficultés  d'organisation,  que  je  crois  inoppor- 
tun de  rappeler  ici,  mais  dont  il  faut  tenir  compte,  les  honneurs 
suprêmes  rendus  à  Rossini  ont  été  dignes  de  son  illustration, 
grâce  aux  artistes  célèbres  entre  tous  qui  avaient  tenu  à  honneur 
d'acquitter  ce  tribut  d'admiration  ou  de  reconnaissance,  grâce  aussi 
à  la  perfection  des  oisembles.  Si,  au  point  de  vue  exclusivement 
musical,  il  y  avait  lieu  de  regretter  l'absence  d'un  orchestre,  il 
serait  injuste  de  ne  pas  reconnaître  néanmoins  que  ces  masses 
chorales,  soutenues  par  les  orgues  et  les  harpes,  avaient  un  carac- 
tère de   grandeur  et  d'austérité  bien  approprié  à  la  circonstance. 

Ld  nature  même  de  cette  cérémonie  désignait  au  choix  du 
comité  chargé  d'en  préparer  la  partie  musicale,  la  messe  de  Re- 
quiem composée  de  fragments  d'œu^■res  de  Rossini  agencés  par 


370 


UEVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


M.  Aulagnier,  d'après  le  rituel  ordinaire  et  sur  les  prières  de  la 
liturgie  catholique. 

Après  un  prélude  exécuté  au  grand  orgue  par  M.  Cliauvet,  orga- 
niste de  la  Trinité,  sur  les  Ténèbres  de  Mo'ise,  et  l'imposant  IntroU 
de  la  Messe  des  Morts  de  Jomelli,  pour  laquelle  Rossini  professait 
une  admiration  particulière  et  souvent  manifestée;  le  Dies  irœ 
adapté  à  la  musique  du  «  Mater  Dolorosa  »  du  Stabat  de  Rossini 
a  été  dit  par  Mlles  Nilsson  et  Blocli ,  MM.  Nicolini ,  Tamburini  et 
les  chœurs.  Comment  traduire  l'impression  produite  par  l'Alboni 
et  Mme  Patti  chantant  le  Quis  est  homo  du  Stabat  {Liber  Scriptum), 
avec  leur  art  inimitable,  leurs  voix  merveilleuses  et  une  émotion 
qui  a  gagné  toute  l'assistance?  Non,  jamais  nous  n'entendrons  de 
plus  nobles  accents  !  Venaient  ensuite  :  le  Pro  peccatis  {Stabat)  sur 
l'antienne  Quid  sum  miser,  de  la  Messe  des  Morts,  admirablement 
interprété  par  Faure  ;  —  le  Lacrymosa  du  Requiem  de  Mozart,  par 
les  chœurs;  —  pour  l'Offertoire,  le  Vidit  suum  du  Stabat  de  Per- 
golèse,  que  Mlle  Nilsson  a  chanté  avec  sa  voix  la  plus  pure  et  un 
sentiment  religieux  pénétrant;  —  ù  l'Elévation,  le  Pie  Jesu  adapté 
au  quatuor  Quanclo  corpus  du  Stabat  de  Rossini,  auquel  Mmes  Krauss 
et  Grossi,  MM.  Nicolini  et  Agnesi  ont  apporté  une  perfection  et  un 
style  remarquables;  —  enfin,  pour  VAgniis  Dei  et  sur  ses  paroles, 
cette  majestueuse  prière  de  Mo'ise,  l'une  des  plus  belles  inspira- 
tions du  génie  humain,  s'élcvant  comme  la  plainte  et  l'espérance 
d'un  peuple  tout  entier,  avec  Faure,  Bonnehée  et  Obin  chantant 
à  l'unisson,  Mlle  Bloch  et  les  chœurs.  Avant  l'absoute,  le  quatuor 
de  saxophones  de  Sax  a  joué  la  Marche  funèbre  de  Beethoven 
(arrangée  pour  la  circonstance  par  Govaërt),  qui  est  venue  ajouter 
encore  aux  beautés  mélodiques  de  la  cérémonie  et  au  saisissement 
de  l'assistance. 

A  deux  heures,  le  cortège  de  ces  obsèques  triomphales  se  met- 
tait en  marche,  sous  un  ciel  assombri,  et  suivait  la  diaussée 
d'Anlin  et  la  ligne  des  boulevards,  au  milieu  des  flots  pressés  de 
la  population,  dans  l'ordre  suivant  : 

Deux  bataillons  du  29^  de  ligne  avec  leurs  tambours;  —  les 
musiques  de  deux  légions  de  la  garde  nationale,  chefs  JDI.  Thi- 
baut et  Colin,  réunies  sous  la  direction  de  M.  Emile  Jonas,  inspec- 
teur-général, et  jouant,  d'après  l'arrangement  de  ce  dernier,  la 
marche  funèbre  de  la  Gazza  ladra,  la  prière  de  Moise  et  des  frag- 
ments du  Stabat; — une  voiture  de  deuil; — le  corbillard  aux  ten- 
tures brodées  de  lauriers;  les  cordons  du  poêle  tenus  à  tour  de 
rôle  par  MM.  le  chevalier  Nigra,  M.  C.  Doucet,  Auber,  Amb.  Tho- 
mas, Taylor,  de  Saint-Georges,  Fr.  Bazin,  prince  Poniatowski, 
Ehvart ,  Tamburini,  Duprez,  Faure,  et  autres  notabilités;  — 
diverses  députations  musicales  avec  des  bouquets  d'immortelles  à  la 
boutonnière  ;  l'Institut,  le  Conservatoire,  puis  une  foule  énorme 
composée  de  toutes  les  classes  de  la  Société. 

Au  Père-Lachaise,  sept  discours  ont  été  prononcés,  au  milieu  du 
plus  profond  recueillement,  par  MM.  C.  Doucet,  Amb.  Thomas, 
pour  l'Institut;  d'Ancona,  au  nom  de  l'Italie;  Perrin,  au  nom  des 
théâties  Lyriques;  de  Saint-Georges,  pour  la  Société  des  composi- 
teurs; le  baron  Taylor,  au  nom  de  l'Association  des  artistes  dra- 
matiques; Arthur  Pougin,  au  nom  de  l'Association  des  artistes 
musiciens;  et  A.  Ehvart,  au  nom  du  Conservatoire.  Nous  nous 
bornerons  pour  aujourd'hui  à  reproduire  ceux  de  SIM.  G.  Doucet, 
Amb.  Thomas  et  Perrin. 

M.  Camille  Doucet  a  pris  la  parole  en  ces  termes  : 

Messieurs,  les  Arts  sont  en  deuil,  et  c'est  au  nom  de  leur  douleur 
trop  légitime  que  je  vous  vois  rassemblés  en  ce  moment  autour  de  la 
tombe  qui  vient  de  jeeevoir  les  restes  mortels  d'un  de  ces  rares  inspi- 
rés que  la  Grèce  ancienne  eût  divinisé  sans  doute,  dans  son  admiration 
naïve  et  sa  poétique  reconnaissance. 

Si,  moins  lyrique  et  plus  positive,  notre  époque  n'a  pas  d'Olympe 
pour  ses  artistes,  elle  ne  laisse  pas  cependant  que  d'être   aussi    sensible 


qu'aucune  autre  l'ait  jamais  été,  au  charme  infini  des  arts.  Toujours  le 
talent  la  séduit;  toujours  le  génie  la  domine. 

Ce  que  je  dis  là,  Messieurs,  personne  ne  l'a  plus  éprouvé  à  coup  sûr, 
et  ne  l'a  mieux  prouvé,  que  le  grand  enchanteur  qui,  depuis  plus  d'un 
demi-siècle,  a  tenu  le  monde  captif  sous  la  puissance  de  ses  accents. 
Qu'ils  s'élevassent  d'abord,  tour  à  tour  de  Venise  ou  de  Rome,  de  Naples 
ou  de  Milan,  plus  tard  enfin  de  Paris,  et  avec  plus  d'éclat  alors  que 
jamais,  tous  les  échos  les  ont  saisis,  retenus  et  répétés  sans  cesse  ;  tous 
les  cœurs  s'en  sont  émus,  toutes  les  mains  y  ont  applaudi. 

Je  m'oublierais  volontiers  jusqu'à  retracer  ici  cette  vie  à  la  fois  si  lon- 
gue et  si  courte;  cette  immense  carrière  parcourue  en  si  peu  de  temps; 
ce  trésor  de  plus  de  vingt  chefs-d'œuvre  produits  à  la  hâte  en  quinze 
ans  de  travail,  et  qui,  dans  toute  la  fraîcheur  de  leur  première  jeunesse, 
survivent  encore  maintenant  à  quarante  années  de  repos.  Mais  en  agis- 
sant ainsi,  j'obéirais  plus  à  mon  goût  qu'à  mon  devoir.  Cette  tâche  ap- 
partient à  d'autres  qui,  mieux  que  moi,  auront  qualité  pour  la  remplir. 

Il  m'eût  été  doux  cependant  de  pouvoir  rendre  hommage  à  la  part 
que  Rossini  a  prise  avec  tant  d'éclat  à  ce  grand  mouvement  des  aris  et 
des  lettres,  que  les  sciences  continuent  aujourd'hui,  et  qui,  depuis 
soixante  ans,  est  l'un  des  plus  brillants  et  des  plus  féconds  dont  la 
France  ait  à  s'honorer. 

En  entrant  pour  la  première  fois  dans  Paris,  vers  la  fin  de  l'année 
1823,  l'auteur  de  Tancredi  et  du  Barbier,  d'Othello  et  de  la  Semiramide, 
trouva  chez  nous  ses  œuvres  triomphantes,  en  pleine  possession  de  l'en- 
thousiasme public,  étonné  peut-être  un  moment  par  la  nouveauté,  mais 
bientôt  conquis  à  jamais  par  l'admiration. 

Son  génie  ardent  a  ouvert  une  nouvelle  route  et  marqué  une  nouvelle 
époque  dans  l'art  muaical,  disait  alors  Lesueur  en  saluant  le  nouveau 
venu,  et  en  le  plaçant  ainsi  lui-même  à  la  tête  d'une  renaissance  de  la 
musique  française. 

Six  ans  plus  tard,  après  une  seconde  carrière  aussi  rapide  que  la  pre- 
mière et  non  moins  brillante,  l'auteur  du  Siège  de  Corinthe  et  de  Moïse, 
du  Comte  Onj  et  de  Guillame  Tell,  s'éloignait  un  jour  de  la  France,  en 
promettant  de  lui  rapporter  avant  peu  quelque  œuvre  nouvelle;  mais 
alors,  fatigué  de  la  gloire  et  trompant  notre  espérance,  il  se  renferma 
pour  toujours  dans  une  retraite  obstinée,  par  une  sorte  de  caprice  du 
génie,  par  une  certaine  originalité  qui  peut-être  ne  messied  pas  à  sa 
grandeur. 

On  l'a  tant  dit  et  on  le  redira  tant  de  fois  encore,  que  j'hésite  à  vous 
montrer  Rossini,  à  peine  âgé  de  trente-sept  ans,  ne  quittant  pas  la  terre 
comme  Raphaël,  mais  se  livrant  lui-même  de  son  vivant  au  jugement 
de  la  postérité,  et  se  résignant  avant  l'heure  à  une  abdication  volontaire 
qui,  pour  tout  autre,  eut  été  la  source  de  déceptions  cruelles,  tandis 
qu'elle  ne  lui  \alut,  en  réalité,  qu'une  longue  et  constante  succession 
d'hommages. 

On  serait  tenté  de  croire  que  la  modestie  lui  inspira  ce  sacrifice  de 
lui-même,  quand  on  le  voit,  au  lendemain  de  J\Joise,  refusant  la  croix  de 
la  Légion  d'honneur,  qu'il  ne  voulait  pas  avoir  encore  méritée,  et  dont 
il  ne  se  jugea  digne,  en  effet,  que  deux  ans  plus  tard,  après  le  succès 
de  Guillaume  Tell,  c'est-à-dire  quand  toute  son  œuvre  était  achevée  et 
sa  grande  tâche  accomphe. 

La  dette  des  arts  a  été  payée  depuis.  En  -1833,  le  chevalier  de  1829 
fut  nommé  commandeur  de  la  Légion  d'honneur,  -sans  avoir  passé  par 
le  grade  d'officier,  et,  peu  d'années  après,  l'Empereur  a  voulu  encore 
que  la  croix  de  grand-officier  honorât  la  glorieuse  \'ieillesse  d'un  des 
hommes  qui  ont  le  plus  adopté  et  le  plus  illustré  la  France. 

La  France,  à  qui  le  testament  de  Rossini  a  légué  sa  dernière  pensée, 
sera  fière  de  garder  ses  cendres,  comme  elle  gardera  sa  mémoire  et  les 
œuvres  de  son  génie.  Elle  veillera  avec  respect  sur  cette  tombe  précieuse 
que  tant  de  douleurs  entourent  et  devant  laquelle  il  m'a  été  donné  de 
venir  déposer  publiquement  un  double  tribut  de  regrets  au  nom  des  arts 
et  du  pays. 

M.  Ambroise  Thomas  s'est  ensuite  exprimé  ainsi  : 

Mon  émotion  est  profonde  et  j'aurais  peine  à  surmonter  le  trouble 
extrême  que  j'éprouve,  si  je  n'étais  soutenu  par  cette  pensée  que  je  parle 
ici  au  nom  de  l'Académie  des  Beaux-Arts  de  l'Institut. 

En  me  faisant  l'honneur  de  me  confier  la  mission  redoutable  de  la 
représenter  en  ce  moment ,  elle  a  voulu  que  l'expression  de  ses  regrets , 
que  ce  solennel  et  public  hommage  rendu  par  elle  au  confrère  illustre 
qu'elle  était  si  fière  de  posséder,  sortît  de  la  bouche  d'un  musicien,  le 
plus  humble  et  le  plus  fervent  de  ses  admirateurs. 

Messieurs,  lorsque  nous  voyons  disparaître  un  homme  de  génie,  lorsque 
nous  voyons  s'éteindre  une  de  ces  flammes  qui  ont  illuminé  tout  un 
siècle,  s'incliner  dans  un  douloureux  silence  serait  peut-être  le  plus  élo- 
quent des  éloges. 

Je  n'essaierai  donc  pas  de  vous  retracer  la  vie  et  l'œuvre  de  Rossini, 
d'autres  rempliront  cette  tâche  immense;  mais,  à  cette  heure  du  suprême 
adieu,  il  appartient  à  l'Académie  de  rappeler  quelle  influence  entraînante 
cet  homme  extraordinaire  a  exercée  sur  son  art. 


DE  PARIS. 


371 


Sorti  de  la  belle  et  suave  école  Italienne,  cloué  d'une  imagination 
féconde,  animé  de  l'esprit  le  plus  étincelant,  dès  le  début  de  sa  glorieuse 
carrière  il  enrichit  la  scène  d'œuvres  d'une  verve  et  d'un  éclat  incom- 
parables. 

Qui  ne  se  souvient  de  l'étonnement,  des  débats  cl  des  orages  que  pro- 
voqua son  apparition  en  Italie?  Mais  de  quels  triomphes  ces  luttes  furent 
suivies  !  Le  bruit  en  retentit  bientôt  dans  l'Kurope  entière,  qui  s'éprit  de 
ce  lumineux  génie  et  salua  l'heureux  novateur. 

C'est  par  la  forme  extérieure  qu'il  sut  donner  à  son  œuvre,  et  par  la 
variété  de  ses  rhythmes  saisissants,  c'est  aussi  par  l'art  merveilleux  avec 
lequel  il  mil  en  évidence  le  talent  et  le  charme  des  virtuoses  du  chant, 
qu'il  mérita  ce  titre  de  novateur. 

Celle  supériorité  seule  el  l'universelle  faveur  alors  attachée  au  chant 
italien,  jusque  dans  ses  excès,  auraient  suffi  pour  faire  de  Rossini  le 
grand  enchanteur  du  monde. 

Sa  rapide  et  prodigieuse  renommée,  due  aux  séductions  d'un  art  qui 
n'échappera  jamais  entièrement  au  reproche  de  sensualisme  et  de  frivo- 
lité, eût  été  de  moins  longue  durée  peut-être,  si  à  l'attrait  de  cette  forme 
extérieure  ne  se  joignaient  des  beautés  d'un  ordre  plus  élevé.  La  vie  et 
le  mouvement  de  la  scène,  la  vérité  des  caractères,  l'abondance  et  la 
clarté  des  idées,  l'harmonie  des  proportions,  l'élégance  et  la  pureté 
du  style,  voilà  ces  beautés  que  Rossini  a  répandues  dans  ses  ouvrages, 
les  marquant  ainsi  du  sceau  d'un  grand  maître. 

Si  dans  la  musique  légère,  si  dans  la  comédie,  il  s'est  montré  souvent 
inimitable,  jusqu'oîi  ne  s'est-il  pas  élevé  lorsqu'il  a  traité  les  sujets  les 
plus  sévères?  Avec  quelle  noblesse  de  sentiment  et  de  quelle  main  puis- 
sante il  a  tracé  les  scènes  les  plus  grandiosesl  Son  dernier  chef-d'œuvre 
dramatique,  écrit  spécialement  pour  la  France,  Guillaume  Tell,  fait  res- 
plendir dans  la  plus  admirable  unité  l'élévation  de  sa  pensée,  la  richesse 
de  son  imagination  et  la  sérénité  majestueuse  de  son  style. 

Dans  le  souvenir  et  dans  la  contemplation  de  l'œuvre  de  Rossini, 
n'avons-nous  pas,  aujourd'hui  plus  que  jamais,  à  puiser  un  enseignement 
salutaire  ? 

Comment  ce  mélodiste  si  merveilleusement  doué  est-il  devenu  un  pen- 
seur et  un  grand  musicien?  C'est  par  l'étude  assidue  des  modèles  de 
toutes  les  écoles,  c'est  en  méditant  surtout  Haydn  et  Mozart,  pour  lesquels 
il  professa  toute  sa  vie  un  véritable  culte,  que  ce  génie  spontané  se  sou- 
mit aux  saines  traditions  et  qu'il  acquit  ce  sentiment  du  beau,  cet  amour 
de  la  forme  et  des  grandes  lignes,  cette  science  de  l'ordre  architectural 
qui  font  les  œuvres  d'art  impérissables. 

Qu'on  ne  s'y  trompe  pas  !  Rossini,  sous  une  apparence  de  scepticisme, 
cachait  un  artiste  de  grande  foi.  Ceux  qui  l'ont  vu  dans  ses  années  de 
retraite,  encore  si  remplies,  encore  si  fécondes,  on  le  reconnaîtra  bientôt; 
ceux  qui  ont  eu  le  bonheur  d'apprécier  la  finesse  de  son  esprit  et  l'amé- 
nité de  son  caractère,  ceux-là  savent  avec  quel  intérêt  il  suivait  le  mou- 
vement musical  et  comme  il  jugeait  bien  cette  période  de  trouble  et 
d'égarements  que  traverse  notre  art.  Il  envisageait  l'avenir  avec  calme  ; 
tout  en  lui,  jusqu'au  sourire,  annonçait  sa  confiance  dans  le  triomphe 
des  principes  immuables  du  beau. 

Il  avait  droit  de  compter  sur  l'équitable  jugement  de  la  postérité  et  de 
croire  avec  nous  à  l'immortalité  de  son  œuvre  ! 

Messieurs,  encore  un  mot,  encore  un  hommage  à  rendre  non  pas 
seulement  au  grand  génie,  mais  aussi  à  l'homme  de  cœur  ! 

Désirant  laisser  un  dernier  témoignage  de  son  amour  de  l'art  et  de  sa 
sympathie  pour  la  France,  sa  patrie  d'adoption,  Rossini  vient  d'instituer 
deux  prix  de  3,000  francs,  qui  seront  décernés  chaque  année  et  en  son 
nom,  l'un  à  une  poésie,  l'autre  à  une  composition  musicale  lyrique  ou 
religieuse. 

L'Académie  sera  fière  de  s'associer  à  cette  noble  et  généreuse  pensée. 
Au  nom  des  jeunes  artiste.?  français,  seuls  admis  à  concourir,  hâtons- 
nous  de  déposer  ici  l'expression  d'une  vive  et  profonde  reconnaissance. 

M.  de  Saint-Georges  a  prononcé  le  discours  suivant  : 

Messieurs,  on  peut  dire  que,  pour  l'homme  illustre  que  nous  venons 
de  conduire  à  sa  dernière  demeure,  l'immortalité  avait  devancé  la  mort. 
Cette  dernière  conservatrice  des  noms  les  plus  éclatants  est  ici  superflue, 
car  celui  qui  dort  dans  ce  cercueil  s'y  est  étendu  rassasié  de  gloire  el 
de  renommée. 

Parmi  les  existences  si  diverses  des  grands  artistes,  il  n'en  est  point 
de  plus  surprenante  :  son  adolescence  fut  comme  une  éclosion  spontanée 
des  dons  les  plus  merveilleux;  sa  jeunesse  semait  en  se  jouant  des  œu- 
vres tour  à  tour  charmantes  et  sublimes;  à  l'heure  oii  sonna  l'âge  viril, 
au  moment  où  d'autres  commencent  leur  carrière,  il  termina  volontai- 
rement la  sienne  en  la  couronnant  par  ce  chef-d'œuvre  impérissable  qui 
se  nomme  Guillaume  Tell. 

Ne  semble  t-il  pas  que  le  nom  de  Rossini  définisse  à  lui  seul  ce  mot 
divin:  le  Génie!  De  Tancrbde  à  Guillaume  Tell,  seize  années  à  peine  se 
sont  écoulées,  trente  partitions  sont  sorties  de  ce  cerveau  merveilleux. 


Que  d'idées  jetées  au  courant  du  fleuve  de  l'Art,  qui  va  roulant  ses 
eaux  sans  ces,se  renouvelées,  mais  auquel  nul  ne  versa  des  sources  plus 
abondantes  et  plus  pures.  Que  de  passions  soulevées,  que  d'esprits  char- 
més, que  de  cœurs  émus  à  ces  accents  qui  retenti.s.sent  à  la  fois  sur  tous 
les  théâtres  du  monde,  qui  traversent  les  mers,  qui  enchantent  tous  les 
peuples,  qui  leur  fait  à  tous  comprendre  et  parler  la  même  langue: 
l'idiome  fraternel  de  la  musique. 

Puis  tout  à  coup  l'aigle  s'arrête  en  plein  vol.  Au  sommet  li;  plus  élevé 
de  sa  carrière,  l'artiste  brise  sa  lyre.  Il  .se  lait.  Il  veut  se  taire.  Ni  les 
obsessions,  ni  les  promesses,  ni  les  prières  ne  le  peuvent  vaincre.  Il  a 
scellé  de  ses  propres  mains  les  portes  du  temple  de  son  génie.  Nul  ne 
saura  les  forcer  à  les  rouvrir. 

Ne  cherchons  pas  à  pénétrer  le  secret  de  ce  silence.  Etait-ce  lassitude 
ou  dédain,  ou  la  loi  suprême  de  son  éclatante  destinée?  La  source  de  l'ins- 
piration n'était  pourtant  pas  tarie.  Elle  s'échappait  parfois  e,i  gerbes  lu- 
mineuses, témoin  l'admirable  Stabat,  aujourd'hui  si  populaire,  et  cette 
sublime  messe  qu'il  ne  voulut  faire  exécuter  qu'une  snule  fois  devant 
un  public  choisi  par  lui;  mais  l'auteur  de  Moise  et  de  Guiltanme-Tell 
avait  dit  au  théâtre  un  dernier  et  inexorable  adieu! 

L'histoire  nous  montre  des  souverains  lassés  de  leur  grandeur,  dépo- 
sant volontairement  le  sceptre  et,  redevenus  simples  citoyens,  assistant 
impassibles  aux  grands  événements  qu'ils  avaient  provoqués. 

Ainsi  ce  souverain  de  l'art  vécut  dans  la  retraite,  appuyé  sur  une  af- 
fection dévouée,  entouré  d'un  petit  cercle  d'amis,  contemplant  d'un  re- 
regard calme  el  indifférent,  un  peu  railleur,  ceux  de  ses  contemporains 
qui  continuaient  la  lutte.  Il  put  voir  s'accomplir  sur  ses  propres  œuvres 
le  travail  patient  et  sûr  des  années.  11  suivit  de  ses  propres  yeux  leur 
marche  ascendante,  il  les  vit,  s'élevantjour  par  jour,  atteindre  les  cimes 
les  plus  élevées  de  la  région  sereine  où  resplendissaient  les  plus  purs 
chefs-d'œuvre . 

Ce  sera  l'orgueil  de  la  scène  française  que  d'avoir  donné  la  plus  haute 
expression  du  génie  de  Rossini.  Moïse  eomplété,  Guillaume-Tell  écrit  en 
entier  pour  notre  première  scène  lyrique,  forment  comme  la  clef  de 
voûte  d'un  édifice  merveilleux.  C'est  l'orgueil  de  la  France  d'attirer 
ainsi  à  elle  toutes  les  gloires,  de  les  absorber  dans  son  sein,  de  leur 
donner  un  nouvel  éclat  en  les  faisant  nationales  et  françaisesi  à  leur 
tour. 

Le  maître  a  voulu  le  reconnaître  et  témoigner  de  son  amour  pour  sa 
nouvelle  patrie.  Tandis  qu'il  léguait  ses  biens  à  la  petite  ville  qui  l'a 
vu  naître,  il  ordonnait  que  son  corps  reposât  parmi  nous,  sur  cette 
terre  française,  dans  ce  Paris  qui  s'empresse  autour  de  son  cercueil  et 
dont  le  pieux  concours  lui  fait  de  royales  funérailles. 

Certes,  à  voir  disparaître  ainsi  les  hommes  qui  ont  porté  si  haut  la 
gloire  de  l'art  musical,  on  se  sent  pris  d'une  inquiétude  profonde, 
comme  d'une  grande  tristesse.  Mais  sur  cette  tombe  même  il  est  per- 
mis de  ne  pas  désespérer,  c'est  la  gloire  suprême  de  ces  grands  hommes 
de  frayer  la  route  de  l'avenir;  aux  clartés  qu'ils  projettent  marchent 
les  talents  nouveaux,  et  s'avancent  les  générations  nouvelles.  Rossini 
repose,  mais  son  œuvre  veille;  l'art  ne  périt  pas  avec  ce  maître  immortel  : 
la  nuit  ne  se  fait  pas  dans  un  ciel  que  son  génie  a  peuplé  d'astres  si 
lumineux  ! 

M.  Arthur  Pougin  a  ainsi  parlé  : 

Messieurs,  c'est  au  nom  de  l'Association  des  artistes  musiciens,  qui 
m'a  chargé  du  douloureux  et  périlleux  honneur  de  la  représenter  ici, 
que  je  viens  rendre  un  dernier  hommage  au  grand  homme  qui  n'est 
plus.  Rossini  était  l'un  des  présidents  d'honneur  de  notre  Société,  qu'il 
avait  daigné  encourager  de  son  bienveillant  patronage,  et  qui  lui  doit, 
plus  que  toute  autre,  son  tribut  d'admiration,  de  reconnaissance  et  de 
regrets.  Mon  humble  voix  n'acquiert  donc  en  ce  moment  quelque  autorité 
que  parce  qu'elle  est  l'écho  sincère  de  la  douleur  de  plusieurs  milliers 
d'individus.  Pourtant  je  croirais,  je  l'avoue,  amoindrir  ma  mission  en 
parlant  au  seul  nom  d'une  corporation,  quelque  importante  qu'elle  soit, 
en  m'exprimant  au  nom  d'un  seul  pays,  ce  pays  fùt-il  la  France,  cette 
France  si  chère  à  tous  les  artistes,  et  qui,  depuis  longues  années,  était 
devenue  la  terre  d'élection  de  Rossini.  Le  rôle  qu'on  a  bien  voulu  me 
confier  me  paraît  plus  noble  et  plus  élevé.  «  La  patrie  des  grands 
»  hommes  est  le  monde!...  »  a  dit  un  illustre  penseur,  et  l'on  peut  ajou- 
ter :  Leur  génie  est  universel.  Permettez-moi  donc  de  considérer  ici  le 
représentant  de  l'Association  des  musiciens  français  comme  celui  de  l'art 
musical  tout  entier,  et  laissez-moi  croire  que  je  parle  au  nom  de  tous 
deux. 

Depuis  longtemps,  Messieurs,  Rossini  était  perdu  pour  l'art  actif  et 
militant.  Après  avoir  livré  de  rudes  combats,  après  avoir  remporté  un 
triomphe  magnifique  et  plus  complet  que  tous  ses  triomphes  passés,  il 
s'était  volontairement  retiré  de  la  mêlée,  et  spontanément  avait  abdiqué 
la  souveraineté  que  personne  alors  ne  paraissait  de  taille  à  partager  avec 
lui .  Ce  grand  génie  s'était  arrêté  en  pleine  floraison,  après  avoir  donné 
à  la  France  un  chef-d'œuvre  impérissable;  cet  artiste  sublime  s'était 
condamné  au  repos  absolu,  après  avoir  reculé  les  bornes  de  l'art  dans 


372 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


ce  suprême  chef-d'œuvre,  en  tête  duquel  il  eût  pu  inscrire  les  paroles 
fameuses  :  Ea>egi  monumentum  ! 

Mais  pourtant  il  était  là,  parmi  nous,  toujours  aimable,  toujours  sou- 
riant ;  et  c'était  une  consolation  de  voir  que,  si  l'artiste  avait  en  quelque 
sorte  disparu,  l'homme  du  moins  nous  restait,  et  que  nous  pouvions 
chaque  jour  lui  rendre  l'hommage  dû  à  son  génie,  à  ses  incomparables 
facultés. 

Hélas  !  aujourd'hui,  celte  consolation  même  nous  est  ravie  !  Nous  ne 
pouvons  plus  que  pleurer  sur  la  dépouille  de  celui  qui  nous  fut  cher,  que 
nous  incliner  devant  cette  majesté  de  la  mort,  plus  grande  encore  que 
toutes  les  majestés  de  la  vie;  nous  no  pouvons  plus  que  déposer  devant 
cette  tombe  encore  entr'ouverte  l'expression  désolée  d'une  affection  pro- 
fonde et  d'une  admiration  sans  bornes.  11  nous  faut  dire  enfin  :  Rossini 
n'est  plus  !  et  voiler  d'un  crêpe  funèbre  la  statue  de  l'art  qu'il  a  si  digne- 
ment et  si  glorieusement  représenté  ! 

Rossini  appartient  maintenant  à  l'Histoire, à  la  Critique  artistiques. 
Lorsqu'en  faisant  large  part  des  influences  d'école,  des  courants 
de  la  vogue,  des  entraînements  de  l'imagination,  elles  étudieront 
—  sans  précipitation,  toutefois,  et  sans  parti-pris  — cet  artiste, 
dans  la  véritable  acception  du  mot,  qui  se  reposa  toujours  sur  son 
génie  du  soin  de  sa  réputation  et  dont  la  personne  est  sauvegardée 
par  son  œuvre  même,  l'Histoire  et  la  Critique  n'auront  garde  d'ou- 
blier que  Rossini  avait  reçu  dès  le  berceau  le  don  de  la  mélodie 
et  de  la  grâce  incomparable.  «  C'est  —  disait  déjà  le  dilettantisme 
cosmopolite  d'il  y  a  trente  ans  —  c'est  la  floraison  la  plus  riante, 
la  plus  parfumée  et  la  plus  vivace  de  notre  printemps.  » 

Dans  un  avenir  prochain,  sans  doute,  quelque  grand  artiste 
sculptera,  pour  soutenir  et  garder  le  glorieux  cénotaphe,  les  muses 
éplorées  de  la  Tragédie  et  de  la  Comédie  lyriques.  La  mémoire 
de  l'auteur  à'Olello  et  du  Barbier  de  Séville  revendique  à  plus  d'un 
titre  ces  allégories  ;  mais,  pour  symboliser,  pour  résumer  d'une 
manière  plus  complète  et  plus  intime  cette  vie  et  cet  œuvre,  il 
faudra  qu'un  ciseau  délicat  ajoute  au  monument  funéraire  les 
figures,  —  bien  italienne  et  bien  gauloise  chacune  —  de  la  Cavatine 
et  de  l'Ironie. 

Em.  Mathieu  DE  MONTER. 


^*jit  Mardi  on  a  ouvert  le  testament  de  Rossini  ;  en  voici  les  principales 
clauses  :  Mme  Rossini  a  l'usufruit  de  toute  la  fortune  laissée  par  le 
maître.  Après  la  mort  de  Mme  Rossini,  cette  fortune  fera  retour  à  la 
ville  de  Pesaro,  et  servira  à  fonder  un  Conservatoire  de  musique,  qui 
portera  le  titre  de  Conservatoire  Rossini.  —  Mme  Rossini  a,  en  toute  pro- 
priété, la  villa  de  Passy.— Une  rente  de  6,000  francs  sera  affectée  annuel- 
lement à  l'Institut  de  France  pour  la  fondation  d'un  prix  de  composition 
d'une  œuvre  lyrique,  savoir  :  3,000  francs  pour  le  poëte  et  3,000  francs 
pour  le  musicien.  —  Rossini  lègue  SO  écus  romains  à  la  municipalité  de 
Bologne,  et  SO  écus  à  l'hospice  de  la  même  ville.— Enfin,  il  est  dit  que 
tous  les  objets  lui  appartenant,  et  dont  il  a  dressé  une  longue  liste  avec 
le  plus  grand  soin,  seront  vendus  aux.  enchères,  et  que  le  produit  ap- 
partiendra à  Mme  Rossini. 


*'*»  M.  Michotte,  chargé  par  Mme  Rossini  de  prendre  toutes  les  dispo- 
sitions relatives  aux  funérailles,  a  contribué,  dans  la  mesure  de  sa  mis- 
sion, à  rendre  cette  cérémonie  digne  de  tous  points  du  grand  génie  dont 
le  monde  entier  déplore  la  perte. 


»•*  —  Le  choix  du  Libéra  de  Jomelli  a  été  motivé  par  l'admiration 
que  Rossini  avait  témoignée  en  entendant  ce  magnifique  morceau  aux 
séances  de  la  Société  de  musique  sacrée  dirigée  par  M-  Vervoitte. 


,*,>  Mlle  Marie  Battu,  par  suite  de  l'enrouement  dont  elle  souffrait  à  la 
représentation  des  Huguenots,  est  forcée  de  garder  un  repos  complet. 
La  célèbre  cantatrice  n'a  donc  pu,  à  son  grand  regret,  se  joindre  aux 
artistes  qui   ont  pris  part  à  la  messe  des  funérailles  de  Rossini. 


#•*  M.  Francesco  Lucca,  l'un  des  principaux  éditeurs  d'Italie,  averti 
trop  tard  du  jour  de  la  cérémonie  des  obsèques  du  maître,  a  exprimé,  par 
dépêche,  à  Mme  Rossini,  tout  son  regret  de  n'avoir  pu  se  joindre,  en 
cette  triste  circonstance,  à  ses  confrères  de  Paris. 


Le  défaut  d'espace  nous  oblige  à  renvoyer  au  numéro  prochain 
les  comptes  rendus  des  opérettes  :  le  Grand-Duc  de  Matapa.  les 
Jumeaux  de  Bergame  et  le  Vengeur. 


BEVUE  DES  THÉÂTRES. 

Une  petite  comédie,  jouée  d'abord  entre  deux  paravents,  vient 
de  subir  l'épreuve  du  public  véritable,  au  Théâtre-Français,  où  on 
l'a  accueillie  avec  la  politesse  due  aux  proverbes  de  salon.  His- 
toire ancienne,  tel  est  le  titre  de  cette  bluette  à  deux  personn  âges, 
qui  a  pour  auteurs  MM.  Edmond  About  et  de  Najac.  Il  s'agit 
d'ime  jeune  veuve  qui  a  dû  naguère  épouser  M.  Georges  de  Gaille 
et  qui,  par  des  raisons  inutiles  à  raconter,  a  pris  un  autre  mari, 
tandis  que,  de  son  côté  Georges  prenait  une  autre  femme.  Cinq  ans 
après,  les  deux  anciens  amoureux  se  rencontrent;  Georges  est 
veuf  aussi,  et  quoiqu'il  soit  toujours  épris  de  Clotilde,  il  l'aborde 
avec  des  intentions  fort  peu  matrimoniales  :  une  première  union 
l'a  blasé  sur  ce  chapitre.  Clotilde,  piquée  au  vif,  se  promet  de 
donner  une  leçon  à  Georges,  et,  dans  ce  but,  elle  lui  fait  accroire 
qu'elle  s'est  remariée  ;  il  n'en  faut  pas  davantage  pour  amener 
Georges  à  se  déclarer  et  à  se  laisser  prendre  au  piège  tendu  par 
la  veuve. 

,  Ce  marivaudage  n'a  aucune  importance,  mais  il  est  agréablement 
distillé  par  Coquelin  et  par  Mme  Madeleine  Brohan.  Aussi,  pourra- 
t-il  rester  quelque  temps  au  répertoire. 

—  M.  Bélot  a  escompté  d'avance  sa  nouvelle  pièce  de  l'Odéon 
dans  le  feuilleton  du  Figaro.  Un  certain  retentissement  s'est  t'ait 
autour  du  Drame  de  la  rue  de  la  Paix,  découpé  en  chapitres  de 
roman.  Il  était  hors  de  doute  que  ce  livre,  plein  d'un  intérêt  puis- 
sant et  réaliste,  serait  tôt  ou  tard  transporté  à  la  scène.  Mais  on 
se  demande  si  sa  place  était  indiquée  au  second  Théâtre-Français 
plutôt  qu'à  un  théâtre  d'ordre  inférieur.  Quelques  mots  d'analyse 
répondront  pour  nous. 

Un  assassinai  a  été  commis  sur  la  personne  de  Maurice  Vidal 
et  les  soupçons  de  la  justice  se  sont  portés  sur  un  aventurier  du 
grand  monde,  nommé  Albert  Savary,  qui  a  été  mis  en  état  d'arres- 
tation préventive.  Le  juge  d'instruction  l'interroge,  et  ne  trouvant 
pas  contre  lui  de  charges  suffisantes,  le  tait  mettre  en  liberté.  Mais 
la  veuve  de  Maurice  Vidal  n'est  pas  convaincue  de  l'innocence 
d'Albert  Savary,  et  d'accord  avec  un  agent  qui  partage  ses  doutes, 
elle  cherche  à  obtenir  les  preuves  que  la  justice  n'a  pas  su  dé- 
couvrir. 

Sous  un  nom  supposé,  elle  se  fait  présenter  Albert  Savary  dans 
une  maison  interlope  qu'il  fréquente,  et  elle  use  de  coquetterie 
pour  attirer  sa  confiance.  Mais  elle  se  laisse  prendre  à  ce  jeu  dan- 
gereux; l'amour  qu'elle  a  inspiré  à  Albert,  elle  le  ressent  pour  son 
propre  compte,  et  elle  se  persuade  peu  à  peu  qu'un  homme  aussi 
séduisant  ne  peut  être  un  criminel.  Elle  va  même  jusqu'à  repousser 
avec  dédain  les  insinuations  vraisemblables  de  l'agent  Vibert  et  à  se 
débarrasser  de  lui.  En  partant,  l'agent  éconduit  se  borne  à  inviter 
Mme  Vidal  à  se  faire  connaître  à  Albert  sous  son  véritable  nom. 
En  effet,  Albert,  siu-pris  par  cette  révélation  inattendue,  se  confesse 
à  la  veuve  de  sa  victime;  c'est  bien  lui  qui  a  tué  Maurice  Vidal 
pour  rentrer  en  possession  de  lettres  de  change  qui  étaient  entre 
ses  mains.  Après  cet  aveu,  qui  détruit  toutes  ses  espérances  d'av*!- 
nir,  il  se  plonge  dans  le  cœur  le  couteau  avec  lequel  il  a  commis 
son  crime. 

N'est-on  pas  forcé  de  reconnaître  que  cette  pièce  aurait  dû  être 
portée  à  un  théâtre  de  drame?  Contesté  à  la  première  représentation 
le  succès  s'est  nettement  dessiné  aux  représentations  suivantes; 
il  est  dû  surtout  au  premier  et  au  dernier  acte,  l'un  d'un  intérêt 
très- puissant  et  l'autre  éminemment  dramatique. 


DE  PAIIIS. 


373 


Le  Drame  de  la  nui  de  la  Paix  est,  du  reste,  interprété  avec  un 
grand  talent  par  Berton  et  Mlle  Sarali  Bernliart,  chargés  des  deux 
principaux  rôles.  Taillade  a  de  bons  moments  dans  celui  de  l'a- 
gent Vibcrt.  Raynard  tire  un  assez  bon  parti  d'un  personnage 
accessoire  qui  a  pour  mission  d'égayer  un  peu  la  pièce. 

— Malgré  l'abus  que  l'on  a  fait  du  titre  biblique  et  du  sujet  de 
l'Enfant  prodigue,  M.  Becque,  qui  fut  le  collaborateur  de  M.  de 
Joncières  pour  l'opéra  Sardanapale,  n'a  pas  hésité  à  le  donner  au 
vaudeville  que  le  théâtre  de  la  place  de  la  Bourse  vient  de  repré- 
senter. C'est  toujours  le  jeune  gars  choyé,  caressé,  dorloté  dans  la 
maison  paternelle,  qui  se  lasse  de  cette  félicité  pour  courir  le 
monde,  qui,  à  Paris  comme  en  Egypte,  tombe  entre  les  mains 
d'hétaïres  habiles  à  le  plumer,  et  qui  se  trouve  trop  heureux  d'être 
ramené  au  foyer  domestique  par  un  père  plus  ou  moins  mêlé 
malgré  lui  aux  frasques  de  M.  son  lils.  —  Quoique  ce  nouvel 
Enfant  prodigue  témoigne  d'une  grande  inexpérience  de  la  part  de 
l'auteur,  on  ne  peut  disconvenir  qu'il  n'ait  rajeuni  heureusement 
par  beaucoup  de  gaieté  et  d'entrain  cette  vieille  histoire. 

Il  y  a  dans  la  pièce  de  M.  Becque  une  \'eine  de  borme  humeur 
très-prononcée,  et  nous  nous  tromperions  fort  si  cet  auteur  n'a- 
vait pas  de  l'avenir  au  théâtre. 

Saint-Germain  et  Delaunay  ont  fait  deux  bons  types  de  l'enfant 
prodigue  et  du  papa  de  Montélimart.  Mlle  Bianca  est  très-avenante 
sous  les  traits  de  la  grisette  Clarisse,  et  Mlle  Louise  Leroux,  en 
servante  égrillarde,  laisse  à  regretter  que  son  rôle  ne  soit  pas  plus 
développé. 

—  Qu'est-ce  que  le  Monde  où  l'on  s'amuse  ?  C'est  celui  qui  tient  le 
milieu  entre  le  demi-monde  aux  allures  trop  libres  et  le  grand 
monde  à  l'aspect  trop  gourmé,  celui  qui  ouvre  ses  salons  à  des 
gens  d'esprit,  de  moeurs  faciles  et  complaisantes,  à  des  femmes 
aimables,  à  de  gais  jeunes  gens.  On  danse  beaucoup  dans  ce 
monde-là,  on  y  cause  encore  davantage,  et  il  n'est,  pas  plus  que 
les  autres,  exempt  d'intrigues  cachées  ou  transparentes.  C'est  donc 
dans  le  Monde  où  l'on  s'amuse  que  Paul  de  Bussac  a  rencontré  la 
baronne  Brunner,  dont  le  seul  défaut  est  d'avoir  un  mari  qui 
s'attache  aux  préférés  de  sa  femme,  de  façon  à  en  faire  des  es- 
claves. Paul,  que  son  oncle  veut  marier,  ne  tarde  pas  à  se  lasser 
d'un  rôle  qui  fait  du  favori  de  Madame  le  souffre-douleur  de  Mon- 
sieur. Il  se  fait  remplacer  par  un  ami,  qui  a  reconnu  dans  la  ba- 
ronne certain  domino  dont  il  s'est  épris  au  bal  et  qui  ne  trou- 
vera pas  la  tâche  trop  lourde. 

Cette  comédie,  dont  l'auteur  est  M.  Pailleron,  digne  du  Gym- 
nase où  elle  a  été  représentée,  a  réussi ,  non  moins  par  des  dé- 
tails ingénieux  que  par  une  remarquable  interprétation,  confiée  à 
Ravel,  Landrol,  Blaisot,  Mmes  Pierson,  Magnier  et  Angelo. 

—  La  Porte-Saint-Martin  a  renoncé  à  Cadio,  et  pour  faire  oublier 
cette  erreur  de  Georges  Sand  elle  a  repris  Madame  de  Chamblay, 
un  drame  d'Alexandre  Dumas,  qui  a  été  joué  l'année  dernière  au 
théâtre  Ventadour.  Brindeau  y  a  conservé  son  rôle;  les  autres 
personnages  sont  tenus  par  Charles  Lemaître,  Charly,  Schey, 
Mmes  Rousseil  et  Desmonts.  Une  petite  pièce  de  l'Odéon,  la  Der- 
nière Idole,  commence  le  spectacle  alternativement  avec  la  Fille 
de  l'Avare,  et  Bouffé  dans  le  principal  rôle. 

—  A  la  Gaîté,  une  nouvelle  attraction  a  été  ajoutée  au  drame 
de  Léonard.  Thérésa  s'y  fait  chaque  soir  applaudir  avec  fureur 
dans  deux  chansonnettes  de  son  répertoire. 

D.  A.  D.  SAINT-YVES. 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 


*%  Dimanche,  à  l'occasion  de  la  Siiinle-Eiijjcnie,  Ions  Ifis  tlicAtres  ont 
illuminé. 

»*,  Le  Théfttro  Impérial  fie  l'Opéra  a  donné  lundi  la  douxième  représen- 
tation de  la  reprise  rt<!s  Iluijucnols.  La  salle  était  encore  plus  remplie 
qu'à  la  première.  Colin  ayant  à  son  tour  été  indisposé  après  son  succès 
du  premier  jour,  c'est  Morèn;  qui  a  chanté  le  rôle  de  Kaoul.  Mlle  Ha- 
mackers  a  repris  celui  de  la  Reine  et  Grisy  a  chanté  les  couplets  du 
Rataplan.  La  soirée  n'a  donné  lieu  cette  fois  qu'à  d<'s  applaudissements; 
Marie  Sass  s'y  est  encore  surpassée,  s'il  est  possible;  et,  malgré  une  émo- 
tion bien  naturelle,  Morère  est  sorti  viclorieux  de  sa  difficile  tâche.  Mais 
M.  Perrin  n'est  pas  encore  satisfait,  et  il  veut  tenir  jusqu'au  bout  la  pro- 
messe qu'il  s'est  faite  de  ne  rien  laisser  d'imparfait  dans  cette  reprise  du 
chef-d'œuvre  de  Moyerbeer;  il  a  engagé  pour  deux  ans  Mme  Carvalho, 
qui  dès  demain  chantera  le  rôle  de  la  Reine.  —  Vendredi  on  a  joué 
Hamlet,  et  hier,  par  extraordinaire,  en  l'honneur  de  Ro.ssini,  Guillaume 
Tell. 

***  S.  M.  la  reine  Isabelle  et  toute  sa  famille  assistaient  .samedi  à  la 
représentation  de  Crispino  e  la  Comare,  au  théâtre  Italien.  —  Mme  A. 
Patti  donne  en  ce  moment  la  dernière  représentation  de  chacune  des 
pièces  de  son  répertoire.  —  Mardi  on  a  représenté  la  Traviata,  jeudi  la 
Lucia  ;  hier,  on  a  exécuté  en  l'honneur  de  Rossini  le  Stabat,  chanté  par 
l'élite  des  artistes,  et  son  buste  a  été  couronné. 

5j;*,j  Le  théâtre  Lyrique  conlinue  à  faire  de  belles  recettes  avec  le  Val 
cVAndorre  et  le  Barbier.  —  Aujourd'hui,  représentation  exiraordinaire, 
entièreujent  composée  d'œuvres  de  Rossini  et  consacrée  à  la  mémoire  du 
maître.  Le  programme  se  compose  de  :  i"  ouverture  de  Sémiramide  ; 
2"  Stances  à  Rossini,  dites  par  M.  Monjauze;  3°  Vlnflammatus  du  Stabat, 
chanté  par  Mlle  Schrœder  ;  i°  la  Charité  (chœur  avec  orchestre)  :  le  solo 
par  Mlle  Gilbert.  Cet  intermède  suivra  la  représentation  du  Barbier.  — 
Mardi ,  première  représentation  de  Vfphigénie  en  Tauride,  de  Gluck,  qui 
n'a  pas  été  représentée  depuis  quarante  ans  à  Paris.  Le  rôle  d'Oreste 
sera  chanté  par  le  baryton  Aubéry. 

^*^  On  a  donné  vendredi  au  théâtre  de  l'Athénée  la  première  repré- 
sentation des  Jumeaux  de  Bergame,  musique  de  Ch.  Lecocq,  et  celle  du 
Vengeur,  paroles  de  MM.  Nuitter  et  Beaumont,  musique  de  Legouix.  On 
répète  l'opéra-bouffe  de  MM.  Gille  et  Costé,  joué  l'an  dernier  dans  une 
soirée  particulière,  au  Conservatoire,  sous  le  titre  des  Horreurs  de  la 
Guerre.  Ce  litre  devra  être  changé. —  Les  rôles  ont  été  distribués  à  Léonce, 
Brice,  Niveleau,  Mmes  Van  Ghell,  Wilhelmine  et  Lévy. 

,*^  Mercredi,  le  prince  et  la  princesse  de  Galles  assistaient  à  la  repré- 
sentation de  la  Périchole. 

^**  Voici  comment  les  compositeurs,  qui  ont  pris  part  au  concours 
du  théâtre  Lyrique,  ont  constitué  leur  double  jury  :  Pour  l'examen  des 
partitions,  ils  ont  nommé  MM.  Ambroise  Thomas,  Victor  Massé,  Albert 
Grisar,  Limnander.  Mermet,  prince  Poniatowski,  Labarre,  Deloffre;  et 
pour  l'examen  des  poèmes,  MM.  Emile  Augier,  de  Saint-Georges,  Michel 
Carré,  Alexandre  Dumas  fils,  Sardou  et  Fournier.  Enfin,  en  quahté  de 
juges  critiques  des  deux  éléments  poétique  et  musical,  ont  été  nommés 
encore  MM.  Théophile  Gautier,  Sarcey,  Jouvin  et  Blaze  de  Bury.  Plusieurs 
compositeurs,  auteurs  et  critiques  en  renom,  ont  été  ajoutés  à  la  liste 
pour  suppléer,  s'il  est  besoin,  aux  absents  ou  aux  non  acceptants. 

,1,*^  Le  théâtre  d'Avignon  a  donné,  ces  jours-ci ,  plusieurs  représenta- 
tions de  Fleur  de  Tlié.  Le  public  a  fort  goûté  la  vive  et  charmante  mu- 
sique de  cette  opérette,  dont  l'interprétation  aurait  pu,  cependant,  être 
plus  satisfaisante. 

^**  Après  la  Grande- Duchesse,  qui  vient  d'être  le  grand  succès  du  jour 
à  Alger,  le  théâtre  Impérial  de  cette  ville  a  joué  la  Rose  de  Saint-Flour, 
pour  la  continuation  des  débuts  de  Mme  Geoffroy.  La  pièce  et  sa  prin- 
cipale interprète  ont  été  toutes  deux  fort  applaudies.  —  L'Africaine  est 
à  l'étude  et  sera  jouée  prochainement. 

**^  Mlle  Poinsot,  qui  fut  longtemps  pensionnaire  de  l'Opéra  et  qui  est 
de  retour  d'Italie,  où  elle  a  eu  de  beaux  succès,  vient  d'être  engagée  par 
M.  Letellier,  directeur  du  théâtre  de  la  Monnaie,  à  Bruxelles. 

^*t  On  nous  écrit  de  Saint-Pétersbourg  que  Marta  vient  d'y  être  donnée, 
avec  le  plus  grand  succès,  pour  la  rentrée  de  Mme  Volpini. 


NOUVELLES  DIVERSES. 


^*,  La  section  des  beaux  arts  de  l'Institut  de  France  aura  à  donner  un 
successeur  à  son  doyen,  Rossini,  qui  était  associé  étranger,  depuis  1833, 


374 


IIEVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


et  qui  avait  remplacé  Paisiello,  également  auteur  d'un  Barbier  de  Séville. 
Mercadanle  et  Verdi  sont  au  nombre  des  neuf  associés  étrangers  actuels 
de  l'Académie. 

»'*^  M.  Ambroise  Thomas  fait  partie  de  la  deuxième  série  des  invités 
aux  fêtes  de  Compiègne. 

^*^  M.  Riedel  s'est  démis  de  ses  fonctions  de  chef  de  musique  du  régi- 
ment de  gendarmerie  de  la  garde. 

5^*,  Roger  a  été  choisi  pour  remplacer  M.  Révial,  démissionnaire  des 
fonctions  de  professeur  de  chant  au  Conservatoire.  Tous  ceux  qui  ont 
si  longtemps  applaudi  l'excellent  ténor  à  l'Opéra-Comique  et  à  l'Opéra 
ont  accueilli  avec  une  véritable  satisfaction  la  nouvelle  de  sa  nomi- 
nation. 

**»  M.  Dorus,  professeur  de   flûte  au  Conservatoire,  vient,  pour  des 
.  raisons  de  santé,  de  donner  sa  démission.  11  est  remplacé  par  M.  Altès. 

^%  Nous  recevons  de  M.  Révial  une  lettre  à  laquelle  le  défaut  d'es- 
pace ne  nous  permet  pas  de  donner  place  aujourd'hui.  Elle  n'a  d'ailleurs 
d'autre  objet  que  de  faire  connaître  les  motifs  tout  à  fait  respectables 
qui  l'ont  déterminé  à  donner  sa  démissiondo  professeur  de  chant  au  Con- 
servatoire, fonctions  qu'il  remplissait  depuis  vingt  ans  avec  autant  de 
zèle  que  de  talent,  et  nous  avons,  dans  notre  dernier  numéro,  mentionné 
le  fait  et  la  cause  qui  avaient  provoqué  cette  regrettable  détermination. 

*'»  Par  arrêté  du  i  novembre,  S.  Exe.  le  ministre  de  la  Maison  de 
l'Empereur  et  des  Beaux-Arts  vient  do  nommer  M.  Jules  Cohen  pro- 
fesseur de  la  classe  d'ensemble  vocal  au  Conservatoire  impérial  de  mu- 
sique et  de  déclamation. 

»*,j  M.  Dubois,  ex-grand  prix  de  Rome,  maître  de  chapelle  à  l'église 
Sainte-Clotilde,  qui,  l'an  dernier,  fit  exécuter  les  Sept  paroles,  si  bien 
interprétées  par  Caron  et  Villaret,  de  l'Opéra,  vient  d'être  nommé  maître 
de  chapelle  de  la  Madeleine. 

»*»  M.  Maurice  Strakosch  vient  de  recevoir  de  S.  H.  le  Sultan  la 
décoration  d'officier  de  l'ordre  du  Medjidié. 

^*,  La  Symphonie  en  la  majeur  {n°  SI)  d'Haydn  ouvrait  le  concert 
populaire  de  dimanche  dernier.  Le  public  a  fait  particulièrement  fête  au 
Menuet,  l'une  des  pages  les  plus  délicates  et  les  plus  fraîches  du  vieux 
maître,  traduite  par  l'orchestre  avec  une  précision  admirable.  —  On  a 
bis.sé  la  magnifique  ouverture  de  Coriolan,  trop  connue  pour  qu'il  soit 
besoin  d'insister  sur  le  souffle,  passionné  jusqu'à  la  fièvre,  qui  la  traverse 
et  qui  l'emporte.  —  Le  Larghetto  du  Quintette  (Op.  108)  de  Mozart, 
exécuté  par  M.  Grisez  et  tous  les  instruments  à  cordes,  a  également  reçu 
les  honneurs  traditionnels  du  bis.  —  La  Symphonie  en  si  bémol  de 
R.  Schumann,  qui  constituait  le  morceau  capital  de  cette  séance,  a  été 
écoutée  avec  beaucoup  d'attention  et  un  bon  vouloir  manifeste;  on  semble 
aujourd'hui  goiiter  davantage  cette  oeuvre  remarquable,  quoique  inégale, 
et  c'est  à  peine  si  quelques  marques  d'opposition  se  sont  manifestées  à 
la  fin.— L'orchestre  a  apporté  à  l'exécution  de  l'ouverture  de  Tannhauser, 
sa  chaleur  et  son  soin  habituels. 

"  ^\  Aujourd'hui  dimanche,  à  deux  heures,  au  Cirque  Napoléon, 
6°  concert  populaire  de  musique  classique,  sous  la  direction  de  M.  Pas- 
deloup.  Ou  y  entendra  :  l"  Ouverture  à'Euryanthe,  de  Weber; —  2"  Sym- 
phonie héroïque,  de  Beethoven  (allegro,  marche  funèbre,  scherzo,  finale); 
—  3°  Ouverture  de  Guillaume  Tell,  de  Rossini  ;  —  i"  Andante  religioso, 
de  Mendelssohn  ;  —  b°  Marche  hongroise,  d'H.  Berlioz. 

^*^  Une  audition  artistique  a  eu  lieu  lundi  soir  chez  MM.  PleyeWolff  et 
C».  M.  le  professeur  Lemraens,  qu'on  avait  entendu  dimanche  sur  les 
grandes  orgues  de  Notre-Dame  et  de  la  Trinité,  ■  nouvellement  cons- 
truites par  la  maison  A.  Cavaillé-Coll,  a  fait  connaître  ses  nouvelles 
compositions  sur  l'harmonium  Muslel.  Elles  ont  vivement  intéressé  l'au- 
ditoire d'élite  qui  s'était  réuni  chez  MM.  Pleyel-Wolf  et  C". 
M.  Lemmens  était  déjà  connu  dans  le  monde  musical  par  des  œuvres 
magistrales  pour  le  grand  orgue,  écrites  à  la  manière  de  J.  S.  Bach. 
Sa  méthode  d'orgues,  adoptée  par  tous  les  Conservatoires  d'Europe,  a 
beaucoup  contribué  aux  progrès  qui  se  sont  accomplis  en  ces  derniers 
temps  dans  le  grand  art  de  l'organiste.  Ses  compositions  pour  harmonium, 
quoique  d'un  caractère  moins  austère,  n'en  révèlent  pas  moins  un  grand 
maître  en  l'art  d'écrire  et  un  exécutant  de  premier  ordre.  L'har- 
monium devient  entre  ses  mains  un  orchesire  avec  toutes  ses  nuances 
et  toutes  ses  ressources;  on  a  particulièrement  remarqué  un  staccato  très- 
brillant  et  d'un  effet  étincelant,  mais  d'une  exécution  difficile  à  laquelle 
peu  d'artistes  pourraient  prétendre.  Les  pièces  traitées  dans  le  style  de 
l'orgue  sont  d'une  sévérité  magistrale  et  d'un  grand  effet;  on  a 
surtout  applaudi  une  scène  symphonique  intitulée  la  Danse  des  Sorcières, 
d'une  grande  originalité  et  d'un  effet  éblouissant  ;  enfin  l'ouverture 
de  Guillaume  Tell,  jouée  par  M.  Lemmeus  sur  l'harmonium,  n'a  jamais 
été  mieux  rendue  à  l'orchestre.  Cette  séance,  d'une  durée  de  plus  de 
trois  heures,  a  amplement  satisfait  les  nombreux  artistes  et  amateurs 
qu'avait  attirés  la  renommée  déjà  si  grande  du  savant  professeur. 

,%  On  lit  dans  le  journal  la  France  :  a  Nous  rappelons  avec  plaisir  à 
nos  lecteurs  que,  conformément  à  une  note  insérée  au  Moniteur  universel. 


en  date  du  1-4  août  dernier  :  «  C'est  par  erreur  que  la  maison  Philippe-H. 
»  Herz  neveu  et  C'%  fondée  en  1863,  ne  figure  pas  au  catalogue  officiel 
»  des  récompenses  décernées  à  l'industrie  des  pianos  à  l'Exposition  uni- 
»  verselle  de  1867.  »  C'était  là  une  omission  d'autant  plus  regrettable 
(car  elle  est  aujourd'hui  réparée)  que  cette  maison,  seule  en  France,  a 
obtenu  la  médaille  d'or,  c'est  à-dire  la  plus  haute  récompense  décernée  à 
la  fabrication  des  pianos.  Tout  éloge  devient  inutile  en  présence  d'un 
pareil  succès,  obtenu  après  cinq  années  d'existence  seulement,  et  venant 
consacrer  avec  tant  d'éclat  la  réputation  d'une  jeune  maison  dont  nous 
avons  eu  déjà  l'occasion  d'encourager  les  efforts  et  de  signaler  les  pro- 
grès. » 

»**  Aujourd'hui,  à  l'occasion  de  la  Fête  de  Sainte-Cécile,  la  messe 
solennelle  en  si  bémol  de  Haydn,  sera  exécutée  dans  la  chapelle 
du  palais  de  Yersailles,  sous  la  direction  de  M .  Emile  Renaud. 

t,\  Aujourd'hui  dimanche,  à  midi,  en  l'église  Sainte-Geneviève 
(Panthéon),  la  messe  du  Saint-Esprit  sera  chantée  par  les  élèves 
des  écoles  et  lycées. 

^;*,^  La  cérémonie  des  funérailles  de  Rossini  ayant  eu  lieu  hier 
samedi,  le  Comité  des  artistes  musiciens  a  retardé  l'exécution  de 
la  messe  de  Sainte-Cécile  qui  devait  être  célébrée  cette  semaine  dans  l'église 
Saint-Eustache,  et  l'a  remise  au  mardi  l*'  décembre. 

«*,  Au  programme  de  la  dernière  et  très-remarquable  séance  des 
Enfants  d'Apollon,  figurait  le  compositeur  Adolphe  Blanc.  Ce  programme 
était  des  mieux  choisis  :  un  septuor,  une  sonate  pour  piano  et  cor  et  un 
trio  pour  piano,  flûte  et  violoncelle,  de  sa  composition,  ont  été  délicieu- 
sement exécutés  et  longuement  applaudis.  La  sonate  surtout  a  été  enle- 
vée avec  un  brio  extraordinaire  par  Mme  Béguin -Salomon  et  M.  Schlot- 
mann,  premier  cor  des  Italiens.  Mme  Léonard  a  eu  sa  part  de  succès 
en  chantant  avec  beaucoup  de  goût  l'Invitation  à  la  Mazurka  et  l'Invi- 
tation à  la  Valse  de  M.  Blanc. 

,*,  La  société  des  Orphéonistes  d'Amiens  vient  d'engager  l'excellent 
violoniste-compositeur  Herman  pour  le  prochain  concert  qu'elle  va  don- 
ner. Nous  saisissons  avec  empressement  cette  occasion  pour  démentir  un 
bruit  qui  prêtait  à  l'émincnt  artiste  l'intention  de  cesser  de  se  faire  en- 
tendre en  public  et  de  renoncer  au  professorat.  Non-seulement  il  n'en  est 
rien,  mais  tout  récemment  encore  Rossini,  en  entendant  Herman  chez 
M.  le  comte  Pillet-Will,  disait  en  s'adressant  à  ce  dernier:  «  Je  n'ai  ja- 
»  mais  entendu  chanter  sur  le  violon  d'une  manière  aussi  expressive.  » 
Et  celui-là  s'y  connaissait  ! 

,*,,  La  Société  des  concerts  de  musique  classique  du  Conservatoire  de 
Strasbourg  a  récemment  inauguré  au  foyer  du  théâtre  de  cette  ville  sa 
troisième  année  d'existence,  par  un  concert  qui  comprenait  l'ouverture 
de  Ruy-Blas,  la  Symphonie  héroïque  et  l'introduction  du  Lohengrin. 
Mme  Viardot,  qui  prêtait  son  concours  à  cette  solennité  musicale,  a  été 
l'objet  d'ovations  enthousiastes.  Il  faut  savoir  gré  à  M.  Hasselmans  de 
poursuivre  et  de  diriger  avec  un  rare  talent  cette  entreprise  purement 
artistique. 

jf*^,  Mme  de  Sievers  va  rouvrir  prochainement  son  cours  de  compo- 
sition, de  chant  et  d'orgue. 

*%  L'inauguration  des  bals  du  Cirque  de  l'Impératrice  a  eu  lieu  mardi 
dernier,  ainsi  que  nous  l'avions  annoncé.  La  réunion  était  nombreuse, 
mais  presque  exclusivement  composée  d'hommes,  ce  qui  ne  contribuait 
guère  à  la  rendre  amusante  et  gaie.  L'orchestre  a  été  la  partie  la  plus 
intéressante  de  la  soirée.  Sous  la  baguette  de  Marx,  il  a  enlevé  avec 
une  verve  magnifique  les  quadrilles  entraînants  des  ouvrages  en  vogue, 
la  Grande-Duchesse,  la  Périchole,  Fleur  de  thé,  etc.  Ce  succès  musical 
est  de  bon  augure. 


^\  Nous  avons  le  regret  d'annoncer  la  mort  de  M.  François-Jules 
Simon,  rédacteur  en  chef  du  journal  l'Orphéon.  Le  chant  choral  popu- 
laire, l'art  musical,  la  presse  spéciale,  l'Association  des  artistes  musiciens, 
perdent  à  la  fois  en  lui  un  propagateur  ardent  et  convaincu,  un  virtuose 
des  plus  distingués,  un  écrivain  aux  vues  larges  et  au  style  brillant,  un 
confrère  conciliant  et  dévoué.  Cœur  loyal,  âme  fière,  nature  sympathique,. 
Jules  Simon  était  fait  pour  aimer  tous  les  arts  et  les  pratiquer  tous  avec 
succès.  II  est  mort  littéralement  à  la  peine.  Il  emporte  l'estime  et  les 
sympathies  de  tous  ceux  qui  l'ont  connu.  Ses  obsèques  ont  eu  lieu, 
lundi  dernier,  au  milieu  d'une  affluence  considérable  de  compositeurs, 
d'artistes,  de  journaUstes  et  de  directeurs  de  sociétés  chorales.  Plusieurs 
discours  ont  été  prononcés  sur  sa  tombe  par  MM.  le  baron  Taylor, 
Elwart,  Eugène  Delaporte,  L.  Le  Roy,  etc. 

,*^  On  annonce  la  mort,  à  Londres,  le  9  novembre,  de  M.  William 
Harrison,  qui  chanta  à  divers  théâtres  et  dirigea  quelque  temps  celui  de 
Her  Majesty.  II  était  âgé  de  S5  ans. 


DE  PARIS 


373 


ÉTRANGER 

t*^  Londres.  —  On  répètu  activement  Dinorah  à  Covent-Gardcn.  La 
saison  sera  terminée  dans  quinze  jours.  —  L'excellent  violoniste  Henry 
Holmes  annonce  quatre  séances  de  musique  de  eliamhre  à  Saint-George's 
HalL  La  première,  dont  le  programme  était  fort  intéressant,  a  dû  avoir 
lieu  mercredi  dernier  avec  le  concours  du  pianiste  Ernest  Pauer  et  de  la 
cantatrice  Miss  Robertine  Henderson.  —  Le  premier  concert  populaire 
(onzième  année)  a  eu  lieu  le  16  novembre  à  Saint-James's  Hall.  MM.  Sain- 
ton,  Louis  Ries,  H.  Blagrove,  Piatti  et  Pauer  ont  exécuté  des 
quatuors  et  sonates  de  Mendelssohn,  Beethoven,  Mozart,  Schubert,  Boc- 
cherini  et  Dussek.  La  salle  était  comble  comme  toujours.  —  Au  concert 
du  Palais  de  Cristal,  samedi  dernier,  on  a  beaucoup  apphudi  l'air  •  de 
l'Ombre»  de  Dinorah,  chanté  par  Mme  Lemmens-Sherrington,  et  un  ca- 
price brillant  de  Stephen  Heller  sur  la  Truite  de  Schubert,  exécuté  par 
M.  Charles  Halle. 

,*^  Leipzig.  —  Le  violoniste  russe  Besekirsky  s'est  fait  entendre  au 
sixième  concert  du  Gewandhaus.  Il  a  exécuté  un  concerto  de  Paganini 
et  une  polonaise  de  sa  composition,  avec  un  talent  qui  a  été  très- 
apprécié.  —  Le  Premier  Jour  de  bonheur  vient  d'être  donné  pour  la  pre- 
mière fois  et  a  obtenu  un  très-honorable  succès. 

»*,  Berlin.  —  Ant.  Rubinstein  a  donné  à  la  Singacadémie  un  concert 
qui  n'a  pas  été  moins  brillant  que  le  premier. 

^*j,  Hambourg.  —  Mignon,  dAmbroise  Thomas,  a  été  accueillie  ici 
avec  peu  de  chaleur. 

^*^  Vienne. — La  Société  philharmonique  a  donné  son  premier  concert. 
On  y  a  exécuté  avec  un  très-grand  succès  le  scherzo  de  la  Fée  Mab,  de 
Berlioz,  qui  a  été  bissé  avec  enthousiasme. 

,*^  Turin.  —  Le  théâtre  Carignano  est  sur  la  voie  d'un  grand  succès 
avec  le  nouvel  opéra-comique  de  Lauro  Rossi  —  le  directeur  du  Conser- 
vatoire de  Milan  — Gli  artisti  alla  Fiera  {libretlo  de  Ghislanzoni) .  La  pre- 
mière repésentation,  qui  a  eu  lieu  le  7  novembre,  n'a  été  qu'un  long 
triomphe  pour  le  compositenr  et  les  artistes.  Rossi  a  écrit,  sur  les  vers 
charmants  de  Ghislanzoni,  une  musique  brillante,  facile,  élégante,  ita- 
lienne en  un  mot;  c'est  une  bonne  partition  à  ajouter  au  nombre  déjà 
respectable  de  celés  qu'on  lui  doit  déjà  et  parmi  lesquelles  s'en  trouvent 
de  fort  remarquables. 

,1,*^  Florence.  —  Le  13  novembre,  la  Società  del  Quartette  a  inauguré 
la  huitième  année  de  son  existence  par  une  très-brillante  séance  à  la- 
quelle ont  pris  part ,  outre  les  artistes  habituels ,  le  célèbre  Camillo  Si- 
vori  et  deux  excellents  pianistes,  Carlo  Ducci  et  Mlle  Mathilde  Platonofi'. 
Le  concours  du  grand  violoniste  était  l'attrait  principal  de  ce  premier 
concert;  le  public,  électrisé  par  sa  magnifique  exécution,  lui  a  fait  ova- 
tion sur  ovation.  —  On  attend  aussi  l'arrivée  de  Bazzini.  —  Le  8  novembre, 
les  musiques  militaires  de  la  garnison  ont  exécuté,  pour  la  première  fois, 
la  fanfare  nouvelle  et  dernière  de  Rossini,  la  Corona  d'Italia. 

^*^  Valence.  —  Un  très-heureux  début  vient  d'avoir  lieu  au  Teatro 
Principal  :  c'ast  celui  de  Mlle  Linda  Caracciolo,  l'une  des  meilleures 
élèves  de  l'éminent  maestro  Panofka.  Cette  jeune  artiste,  qui  est  admi- 
rablement douée,  a  pu  développer  entièrement,  sous  une  aussi  habile 
direction,  ses  belles  qualités  naturelles;  l'année  dernière  déjà,  on  pouvait 
prévoir,  dans  les  concerts  où  elle  a  chanté  à  Livourne,  l'avenir  brillant 
qui  l'attendait,  et  dont  la  préface  est  l'engagement  qui  lui  a  été  offert 


au  théâtre  de  Valence.  Elle  abordait  pour  la  première  fois  la  scène, 
le  28  octobre  dernier,  dans  Un  ballo  in  maschera;  la  salle  a  retenti 
des  chaleureux  applaudissements.  Les  directions  des  grandes  scènes  ita- 
liennes vont  certainement  avoir  l'œil  sur  Linda  Caracciolo. 

«*a,  Bologne.  —  Le  Barhiere  di  Sivigiia  de  Dali'  Argine,  depuis  si  long- 
temps annoncé,  a  été  donné  enfin  au  théâtre  Communal  le  H  novembre. 
C'est,  jusqu'à  présent,  un  succès  de  bruit  et  de  curiosité;  deux  cabales, 
également  ardentes,  se  partngent  le  public;  le  théâtre  regorge  chaque 
soir.  Il  est  encore  difficile  de  savoir,  en  présence  de  ces  démonstrations 
passionnées,  si  la  nouvelle  partition  vaut  tout  le  tapage  qu'un  fait  autour 
d'elle. 

»'',  Rome. — Dinorah  exerce  une  grande  attraction  au  théâtre  Argen- 
tina.  La  musique  de  Meycrbeer  est  chaque  jour  mieux  comprise,  et  au- 
cun morceau  ne  passe  sans  applaudissements.  Danieli,  Cima,  Mmes  Mon- 
gini,  Dory  et  Gianoli  remplissent  leurs  rôles  avec  zèle  et  talent. 

^*t  Lisbonne.  —  Une  traduction  portugaise  des  Bavards,  d'Offenbach,  à 
laquelle  travaille  M.  Francisco  Palha,  sera  donnée  cet  hiver  au  théâtre 
Da  Trinidade.  —  La  Grande-Duchesse  a  atteint,  au  théâtre  du  Principe 
Real,  le  chiffre  de  HO  représentations  en  sept  mois  et  demi,  et  rempli 
en  proportion  la  caisse  de  l'empresa  Pinto  Bastos. 

»*«  Madrid.  —  La  Grande-Duchesse  compte  un  nouveau  triomphe.  La 
foule  va  désormais  se  porter  au  théâtre  des  Bufos  Ardenius,  qui  vient  de 
la  représenter. 

,t%  Saint-Pétersbourg .  —  Un  de  nos  plus  anciens  éditeurs  de  musique 
de  Saint-Pétersbourg,  M.  Bernard,  qui  publie  aussi  un  journal  musical 
estimé,  vient  d'être  nommé  par  S .  M.  l'Empereur,  éditeur  de  musique  de 
la  cour  impériale. 


^,%  Salle  Valentino.  —  La  nouvelle  fête  des  Fleurs  a  été  brillamment 
inaugurée.  Le  monde  élégant  qui  s'y  trouvait  ne  s'est  retiré  qu'à  regret. 
Nous  sommes  heureux  d'enregistrer  ce  nouveau  succès,  car  il  en  promet 
beaucoup  d'autres,  pour  les  bals  et  les  concerts  qui  se  donnent  tous  les 
jours.  On  nous  promet  même  un  grand  Festival-Rossini,  en  l'honneur 
du  maître  illustre  dont  l'art  musical  pleure  aujourd'hui  la  perte. 

,t*^  Cirque  de  l'Impératrice.  —  Grandes  fêtes  les  Mar  lis,  Vendredis  et 
Dimanches.  —  Aujourd'hui,  troisième  grande  fête. 


Le  Directeur  :  S.  DUFOUR. 

miaestro    E.     XHIUZZO, 

Ouverture  d'un  cours  de  chant  exclusivement  italien. 
Chez  lui,  rue  de  Luxembourg,  5,  au  1". 

Chez  BRANDVS  et  DUFOUR,  éditeurs,  i05,  rue  de  Richelieu. 

lA      IVDC     CDAMPAICr    (««iStîon  populaire),  choix 

LH  Llnll  rnHIiyHloC  d'airs  d'opéras,  duos,  roman- 
ces, etc.,  etc.,  sans  accompagnement,  des  meilleurs  auteurs  anciens  et 
modernes. 

4tOO  LIVRAISONS.  —  Prix  de  chaque  :  3  S  centimes  net. 


CHEZ    BRANDUS    ET    DUFOUR,    ÉDITEURS,     103,    RUE    DE    RICHELIEU. 


ROSSINI 

A  quatre  voix,  avec  accompagnement  de  piano  et  d'orchestre,  contenant  : 
Le  Requiem,  le  Kyrie,  la  Prose  complète,  le  Sanctus,  le  Benedictus  et  TAgnns  Dei, 

■nftlqae  tirée  des  aifférents  ouvrages  de  Rosslnl.        —         les-te  latin,  adapté   à   la  maslqne    par   Anlagaier. 

Format  in-8».  OUVRAGE  APPROUVÉ  PAR  ROSSINI.  Prix  net  :  10  fr. 


Scnlpté  par  Ciodebski  en  1865  (hauteur,  55  centimètres). 
Epreuve  en  plâtre  (moulée  dans  les  ateliers  du  Louvre),  20  fr.  —  Epreuve 
à  la  stéarine  (imitant  le   marbre),  %i  fr.  —  Epreuve  bronzée  par  la 
galvanoplastie ,  30  fr . 


Dessiné  snr  pierre  d'après  nature, 

Et  photographié  en  1866  par  Desmaisons. 
Papier  de  Chine.  {Grand  Colombier.)  Prix  ; 


S  fr. 


37(5 


KliVL'E  ET  GAZETTE  MUSICALE  DE  PAKIS. 


Œuvres  de  Rossini 

Publiées   par  les   éditeurs  BRANDUS   et  DUFOUR,  à  Paris,  103,  rué  de  Richelieu. 


MUSIQUE    RELIGIEUSE 


T^B.^^ 


.^"X^JJ^IR. 


Grande  Variliion 


Parties  d'orcbestre 


POUR  DEUX  SOPRANI,  TÉNOR,  BASSE  ET  CHŒUR  A  4  OU  5  VOIX. 

La    Partition 

Pour  le  Piano  seul,  arrangée  par  H.  Herz      I  Pour  Chant  et  Piano,  in-8°,  net  :  8  f.— Paroles  latines.    [  Pour  le  Piano  à  A  mains,  arrangée  par  Czerny 
Format  in-i".  —  Prix  net  :  8  fr.  '       La  même,  format  in-i».—  Prix   net  :  10  fr.  Format  in-4°.  —  Prix  net  :  10  fr. 

Coniplaiiite  à  la  Tlerge,  Partition  avec  paroles  françaises,  imitées  du  Stabal,  par  Reboul,  in-4",  prix  net  :  8  fr. 

LES  AIRS  DÉTACHÉS  DE  CHANT. 
Arrang^emeiits  divers  par  Adaœ,  Bertiul,  Brlnley  -  Ridiards,  Cramer,  Czerny,  Fcs8]',  Fama^alli,  Herman,   Kalkbrenner, 

liecarpentier,  Liiszt,  Rnmmel,    Vallquet,    etc. 

MERCADANTE.  Grande  Ouverture  sur  quelques  ninlif>  du  Sfnbaf.       —  STA8AT  MATER,  arrangé  pour  orchestre  seul,  par  FESSY. 


Cnnde  Partiiion. —  A  3  voix,  avec  accompag.  de  piano,  9  fr. —  Parllii  d'oreheslri.    \  Grande  Partilion.    —  Pour  voix  de  basse,  acc.  de  piano,  7  30. — Partie»  d'ortlieilre , 

TROIS    CHŒURS     RELIGIEUX    A    TROIS    VOIX    DE    FEMME  : 

N"  1.     lia  Foi 6  fr.    I    N°  2.     l.' Ksiiërance 6  fr.    |    N»  3.     lia  Cliaritë 6  fr. 

Les  3  chœurs  réunis,  net  :  8  fr.  —  Les  mêmes,  avec  paroles  italiennes. 
Transcriptions   pour  Piano  et  Harmonium,  par  VAVli  BERJV.%RD.  ilEIVRI   HERZ,  lilSZT.  BRISSOIV  et  ROMAIVO . 


MUSIQUE    DRAMATIQUE  : 


IiB    €®  HTM   ®  B¥ 


10  fr. 


I.A  PARTITIOIV 

10  fr.    I    POUR  CH.\NT  ET  PIANO,  in-8",  net.    .    .     13  fr.    |    POUR  PIANO  SEUL,  in-8%  net 
Iie«i  Airs  détaehés  de  Citant.  Parties  d'orcliestre . 

Arrani/cinents  jiow  te  Piano  et  pour  divers  instruments,  par 
Adam,  Brisson,  Duvernoy,  Favarger,  Fessy,  H.  Herz,  Lecarpentier,  Rosellen,  Rummel,  Valiquet,  Wolff,  Osborne,  Bériot,  Massart,  etc. 


POUR  PIANO  SEUL,  in-8%  net. 
Grande  partition 


ROBERT  BRUCE 

Grande  partition.  —  Parties  d'orchestre. 


moïse 


SIÈGE  DE  GORINTHE 


Partition  d'orchestre. 


Partition    d'orchestre. 
liA     PARTITIOIV 

In-i°,  net  30  f.   Piano  et  Chant,  in-8%  net  50  f.— In  i-,  net  30  f.  Piano  et  Chant,  iD-8%  net  20  f.  — In-i',  net  30  f.  Piano  et  Chant,  in-8%  net  20  f. 

LES     AIRS     DE     CHANT     DÉTACHÉS 

Arrangements  pour  le  Piano  et  divers  instruments,  par  Adam,  Paul  Bernard,  Bériot.  Comeltanl,  Cramer,  Croisez,  Czerny,  Duvernoy, 
Hall,  Hérold,  Herz,  Lecarpentier,  Leduc,  Magnus,  Méreaux,  Micheuz,  Osborne,  Pixis,  Redler,  Thalberg,  Valiquet,  Wagner,  Wolff,  etc 


PARTITIONS,    CHANT    ET    PIANO,    DES    OPÉRAS  : 

îîa  B^UBîiiii^  —  nmmiWLJkmi'B'm  —  T^mGMLM'Bi  — 

Format  in-4°.  Prix  de  cliaque  partition,  net  :    1S  fr. 

££S     AIBS     BE     CEMJT     DÉTACHÉS 

Arrangements  par  Bertini,  Cramer,  Croisez,  Lecarpentier,  H.  Herz,  Osborne,  Rosellen,  Thalberg,  Valiquet,  Wolff,  Bériot,  Lafont, 

Tulou,  Walckiers,  Batta,  Lee,  etc.,  etc. 


Format  in-i». 


MUSIQUE    DIVERSE 


liDIMIi:^^  MÏÏBlQMIsMl 


1 .  La  Promessa,  canzonnetta 3    » 

1  bis.  io  même,  un  ton  plus  bas.    ...  3     » 

2.  H  rimprovero,  canzonetta 3    » 

3.  La  Partenza,  id 3    » 

4.  L'Orgia,  arietta 4  oO 


Huit  Ariettes  et  quatre  Duos  italiens,  avec  une  traduction  française  : 

3.  L'Invite,  boléro 3    »  8  bis.  La  Danza,  un  ton  plus  bas.   .   .  5    » 

6.  La  Pastorella  dell'Alpi,  triolesse  .   .     3    »          9.  La  Regata  veneziana,  notturno  s.s.  5    » 
6  bis.  La  même,  un  ton  plus  bas  .    .    .     3     »         10.  La  Pesca,  notturno  s.s 3  73 

7.  La  Gita  in  gondola,  barcarola  ...    4  30         11.  La  Serenata  ,  notturno  s. t.   ...  4  73 

8.  La  Danza,  tarentella.       .....     3 


12.  Li  Marinari,  duetto  t.b. 


Transcription  des  douze  morceaux  pour  le  Piano  seul,  par  F.  lil^XT. 

Arrangements  divers  par  Bénédict,  Bériot,  Osborne,  Kalkbrenner,  Lecarpentier,  Liszt,  Seligman,  Sivori.Thalberg,  Tulou. 


mélodies  avec  paroles  françaises  et  italiennes: 

L'Ame  délaissée 2  50  ,   La  Gaieté 2  50 

L'Amour  perdu 2  SO      Orage  et  beau  temps,  2  voix  2  30 

Beppa  la  Napolitaine  ...    2  50      Œdipe,  air  de  basse  ....  4  30 

Le  Chant  du  soir 2  30      Stances  à  Pie  IX 3    » 


JLe  Rendez-vous  de  chasse,  fanfare  pour  4  trompes.  S 

La  même,  arrangée  pour  le  piano 3 

marelle  du  sultan   Abdul-medjid,  pour  piano S 

La  même,  arrangée  pour  le  piano  à  quatre  mains 6 

Deux  Pas  redoubles  et  une  marche,  3  s.,  4  m.,  ch.  6 


IHPRIHEBIE  CENTBALE  OES  CHEMIKS  DE  FER  —  A.    CBAIX  ET  C,  BUE  BEBGÈRE,    20,   A  PABIS. 


BUREAUX    A    PARIS  =    BOULEVARD  DES    ITALIENS,  1. 


35'  Année. 


N'  48. 


29  Novembre  1808. 


ON   S'ABONNE  : 

Dans  les  Départements  et  l't  l'KIrongfer, 

chez  tous  les  filarchands  de  Musique,  les  Librairei, 

et  aui  ûureeux  der.  Messageries  et  des  Postes. 


REVUE 


PRIX    DE    L'ABONNEMENT  : 

Pari» '-«   r|'«CQn 

Départements,  Delgiiiue  et  Sttl«»e. ...    3*  •       i*. 

Étranger 31  .       lll. 

Le  Journal  paraît  le  Dimanche. 


GAZETTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


1869 


PRIMES 


1869 


Offertes  aux  Abonnés  de  la  Revue  et  Gazette  musicale, 
A  l'occasion  du  renouvellement  de  l'année. 

(36'  ANNÉE    DE  SON   EXISTENCE) 


DE    REQUIEM 

Avec  accompagnement  de  Piano.  Musique  tirée  des  différents  ouvrages  de 

BOli^IMI 

Texte  latin  adapté  à  la  musique  par  Aulagnier 

ET  CONTENANT  LES  UORCEADX  SUIVANTS   : 

Requiem  ;  —  Kyrie ,  —  Dies  iiœ.  —  Prose  :  Air  de  ténor ,  Duo , 
Airs  de  basse ,  Air  et  Récit ,  Quatuor ,  Air  de  soprano ,  Air  de 
ténor,  Quatuor.  —  Sanctus,  —  Renedictus,  —  Agnus  Dei. 


Ouvragée  approaré  par  Bosstnl, 

Et  exécuté  en  partie  à  ses  obsèques,  en  l'église  de  la  Trinité, 
y  volume  in-S"  de  1/3  pages. 


ALB  U  M 

COMPOSÉ   DE 

MORCEAUX  DE  PIANO  INÉDITS 

SAVOIR  : 

■/.Attente,  romance  sans  paroles Paul  Bernard. 

Aujoupd'bui,  méditation M.  Bergson. 

Esquisse Stephen  Heller. 

Elodia,  mazurka  de  salon E.  Ketterer. 

Scbcrzo  (de  Sonate) D.  Magnus. 

Uarcbe  funèbre E-  Stoeger. 

Cbanaon  polonaise E.  Wolff. 


Vn  beau  ftoi'ti'ait  de  la  cantatrice 


Nouvellement  photographié  et  dessiné  sur  pierre  par  Desmaisons. 


Dans  le  courant  de  l'année  1869,  la  Gazette  musicale   donnera 
chaque  mois,  en  supplément,  un  morceau  de  Piano  ou  de  Chant. 


Au  mois  de  janvier  nos  Abonnés  recevront  comme  prime 
exceptionnelle  un  volume  format  grand  in-S",  contenant: 

Vingt-quatre  Préludes  pour  le  Piano 

Dédicace.  —  L'Obstinée.  —  Feu  follet.  —Récitatif.  —  Méditation.  — 
Appassionato.  —  Sérénade.  —  Affirmation.  —  Monologue.  —  Ara- 
besque. —  Reproche.  —  Élégie.  —  Rêverie.  —  Emportement.  — 
Berceuse.  —  Regrets.  —  Chanson  de  Mai.  —  %*  —  ***  —  Songerie. 
—  Volage.  —  ***  —  Paysage.  —  Sonnet. 


COMPOSÉS  PAR  STEPHEN  HELLER 


Nos  abonnés  reçoivent,  avec  le  numéro  d'aujourd'hui, 
Kï:iil.OCiCi-VAIi!iiE,  composée  par  Arditi,  et  arrangée 
pour  le  Piano  par  Boques. 


SOMMAIRE.  —  Tliéâtre  impérial  de  l'Opéra:  reprise  des  Huguenots;  Mme 
Carvalho,  par  Elias  de  Bauze.  —  Théâtre  impérial  Italien  :  Semiramide, 
par  le  même.  —  Théâtre  Lyrique  impérial  :  Iphigénie  en  Tauride,  de  Gluck, 
par  Panl  Bernard.  —Théâtre  de  l'Athénée:  le  Vengeur,  opéra-bouffe  en 
un  acte,  paroles  de  MM.  Nuitter  et  Beaumont,  musique  de  M.  Legouix.  — 
Théâtre  des  Menus-Plaisirs  :  le  Grand-Duc  de  Matapa,  opéra-bouffe  en  trois 
actes  et  cinq  tableaux,  paroles  de  MM.  Clairville  et  Gastineau,  musique  de  M. 
Debillemont.  —  Note  sur  un  point  de  l'histoire  de  l'harmonie  et  de  la  tonalité, 
par  F«-ti(i.— Discours  de  MM.  de  Saint-Georges  et  Elwart  sur  la  tombe  de  Ros- 
sini.  —  Entre.'ilets.  —  Correspondance.  —  Nouvelles  des  théâtres  lyriques.  — 
Nouvellps  diverses.  —  Annonces. 


THÉÂTRE  miPÉRUL  DE  L'0P£RÂ. 

JDe»  Buguenat».  —  Hme  Carvalbo. 

Il  faut  remonter  aux  jours  heureux,  des  premières  représenta- 
tions des  Huguenots  pour  se  faire  une  idée  de  celle  de  mercredi 
dernier.  On  se  rappelle  qu'à  la  reprise  du  chef-  d'oeuvre  de  Meyer- 
beer  on  avait  regretté  des  défaillances,  quels  qu'eussent  été  le  zèle 
et  les  soins   de  la  Direction  pour  entourer   cet   ouvrage  de  tout 


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REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


l'éclat  qu'il  exige.  Non -seulement  ces  défaillances  ont  complète- 
ment disparu  à  la  représentation  de  mercredi,  mais  la  soirée  a  été 
splendide  à  tous  les  points  de  vue.  L'attrait  principal  était  le  début, 
sur  notre  première  scène  lyrique ,  de  Mme  Carvalho,  —  si  tou- 
tefois on  peut  se  servir  du  mol  début,  pour  une  des  plus  émi- 
nentes  cantatrice  dont  s'honore  l'école  française,  et  dont  la  carrière 
a  été  une  suite  non  interrompue  de  brillantes  créations  et  de  suc- 
cès plus  brillants  encore. 

C'est]  vraiment  «  par  droit  de  conquête  »  que  Mme  Carvallio 
est  arrivée  à  l'Académie  impériale  de  musique,  et,  comme  il  était 
facile  de  le  prévoir,  sa  première  apparition  a  été  un  triomphe. 
Elle  se  sentait  là  dans  un  milieu  digne  de  son  beau  talent  ; 
on  eût  dit  qu'elle  y  respirait  plus  à  l'aise,  qu'elle  prenait  plus  li- 
brement son  essor.  Habituée  de  longue  date  à  l'interprétation  des 
grands  maîtres  allemands,  elle  ne  pouvait  liésiter  à  se  mesurer 
avec  l'œuvre  de  Meyerbeer.  Le  rôle  de  Marguerite,  quoique  court  et 
difficile  pour  bien  d'autres  artistes,  même  de  premier  ordre,  parais- 
sait écrit  tout  exprès  pour  elle.  C'est,  d'ailleurs,  le  propre  des  beaux 
rôles  et  des  grands  interprètes.  L'auditoire  tout  entier,  en  lui  pro- 
diguant les  applaudissements,  se  félicitait  de  la  voir  sur  cette  scène 
et  félicitait  M.  Pcrrin  d'avoir  eu  l'heureuse  idée  de  s'assurer  le 
précieux  concours  de  la  grande  artiste. 

Déjà  le  premier  acte  avait  marché  avec  un  ensemble  parfait  et 
très-favorablement  prédisposé  les  spectateurs.  L'orchestre  tout 
d'abord;  puis  MM.  Faure,  Belval,  Colin,  et  Mlle  Hamackers, — un 
fort  gracieux  Urbain,  —  rivalisant  de  zèle  et  de  talent,  avaient 
fait  pressentir  que  la  représentation  serait  irréprochable. 

Plus  tard,  quand  Mme  Carvalho  a  paru,  il  s'est  fait  dans  la  salle 
un  de  ces  silences  qui  révèlent  en  même  temps  la  plus  vive  cu- 
riosité et  l'attention  la  plus  soutenue.  Ce  silence  devait  être  rompu 
par  des  applaudissements,  enthousiastes  unanimes,  répétés,  aux- 
quels n'ont  manqué  ni  les  rappels  ni  les  couronnes. 

Puis  c'a  été  le  tour  de  Mme  Sass.  Chez  elle,  rien  n'étonne 
plus;  on  l'avait  déjà  entendue  le  premier  jour,  alors  que  d'autres 
hésitaient  ou  faiblissaient,  et  qu'elle  seule,  forte  de  son  incompa- 
rable talent,  confiante  dans  ses  moyens  exceptionnels,  brillait  de 
l'éclat  le  plus  fulgurant  et  triomphait. 

A  partir  de  ce  moment,  nous  ne  dirons  pas  que  la  partie  était 
gagnée  :  avec  de  pareils  éléments,  elle  n'aurait  pu  être  douteuse  ; 
mais  nous  constaterons  que  le  succès  est  allé  toujours  en  grandis- 
sant. On  sait,  d'ailleurs,  qu'il  en  est  de  même  de  la  marche  de  la 
partition.  Si  beaux,  si  saisissants  que  soient  la  scène,  le  morceau 
qu'on  entend,  ce  qui  le  suit  est  encore  plus  saisissant  et  plus 
beau.  C'est  un  admirable  crescendo  qui,  après  s'être  reposé  sur 
le  fameux  duo  du  quatrième  acte,  comme  pour  se  complaire,  ne 
cesse  qu'à  la  lin  de  l'ouvrage. 

Et  cette  inimitable  page  de  la  Bénédiction  des  poignards  !  A- 
t-elle  été  assez  largement  interprétée  !  A-t-elle  été  rendue  dans 
toute  son  ampleur  et  avec  tout  le  soin  scrupuleux  des  nuances! 
La  salle  en  était  électrisée  ! 

ML  Faure,  Belval,  Colin,  David,  Mlle  Hamackers,  en  dehors 
de  Mmes  Sass  et  Carvalho,  ont  tous  eu  une  large  part  du  succès 
de  cette  reprise  que  la  persévérance  de  la  direction  et  le  talent 
des  artistes  ont  élevée  au  rang  d'une  restauration. 

L'orchestre  s'est  surpassé, — c'est  à  tort  que  plusieurs  organes  de 
la  presse  ont  blâmé  les  mouvements  dans  lesquels  M.  Georges 
Hainl  a  fait  exécuter  la  partition  ;  ce  sont  précisément  ceux  qui  ont 
été  indiqués  par  Meyerbeer  lui-même  à  M.  Hainl,  et  dont  l'or- 
chestre s'était  peu  à  peu  écarté. — Les  danses  ont  paru  plus  char- 
mantes ,  tant  l'ensemble  de  la  représentation  a  été  remar- 
quable. Mlles  Beaugrand  et  Eugénie  Fiocre  ont  été  ravissantes. 
En  un  mot,  et  pour  finir  par  où  nous  avons  commencé,  on  se 
serait  cru  aux  premières  représentations  des  Huguenots. 

Elias  de  RAUZE. 


THÉÂTRE  IMPERIAL  ITALIEN. 

Siemiramide. 

Le  théâtre  Italien  a  rendu  samedi  dernier  un  hommage  digne 
de  lui  à  la  mémoire  de  Rossini,  en  exécutant  avec  l'élite  de  ses 
artistes  une  des  plus  belles  œuvres  de  l'illustre  maestro  :  le  Stabat. 
Le  Cujus  animam  a  valu  trois  salves  d'applaudissements  à  Nicolini, 
et  Mlle  Krauss  n'a  pas  été  moins  bien  traitée  après  Ylnflammatus . 
Mlle  Grossi  et  Agnesi  ont  eu  aussi  une  bonne  part  de  bravos.  A 
l'entr'acle,  l'orchestre  a  joué  l'ouverture  de  la  Gazsa  ladra  pendant 
que  le  buste  de  Rossini  était  couronné  par  les  artistes  du  théâtre  et 
autres  qui  s'étaient  joints  à  eux,  Duprez  en  tête. 

Il  fallait  bien  un  ouvrage  et  une  exécution  qui  assurassent 
des  lendemains  aux  soirées  de  Mme  Patti.  M.  Bagier  a  un 
peu  tâtonné ,  nous  devons  l'avouer,  mais  il  a  fini  par  trouver. 
C'est  au  répertoire  rossinien  qu'il  a  demandé  cet  ouvrage, 
au  même  répertoire  qui  lui  a  donné  il  Barbiere.  Seulement,  pour 
le  Barbiere,  il  a  Mme  Patti,  et  cette  fois  il  avait  besoin  d'une  par- 
tition de  nature  à  réussir  sans  le  concours  de  la  cantatrice-étoile. 

C'est  Semiramide  qui  pourra  désormais  alterner  sans  crainte  avec 
le  Barbiere  et  avec  tous  les  autres  opéras  que  chante  Mme  Ade- 
lina  Patti. 

La  représentation  de  jeudi  soir  l'a  incontestablement  prouvé. 

Depuis  le  séjour  à  Paris  des  sœurs  Marchisio,  on  n'avait  pu 
reprendre  cette  grande  œuvre  du  maître  dont  le  monde  musical 
regrette  la  perte  récente.  La  disette  toujours  plus  accusée  de  chan- 
teurs de  l'ancien  répertoire  contribuait,  elle  aussi,  à  rendre  difficile 
la  reprise  de  Semiramide.  Mais,  par  une  heureuse  coïncidence, 
M.  Bagier  compte  dans  sa  troupe  assez  d'artistes  dont  la  spécialité 
est  plutôt  l'ancien  opéra  italien.  Il  en  a  profité,  et  le  succès  lui  a 
donné  raison. 

Mmes  Krauss  et  Grossi  ont  succédé  aux  deux  sœurs  Marchisio  : 
la  première,  dans  le  rôle  de  Sémiramis;  l'autre,  dans  celui  d'Ar- 
sace.  Chacune  d'elles  a  montré  sa  vaillance  dans  les  sali.  Mais  c'est 
au  fameux  duo  que  le  public  les  attendait,  et,  pourquoi  ne  le  di- 
rions-nous pas?  il  paraissait  s'être  dit  à  l'avance  que  le  souvenir 
des  Marchisio  nuirait  inévitablement  aux  nouvelles  pensionnaires 
de  M.  Bagier.  Il  s'était  trompé.  Et  c'est  avec  bonheur  qu'il  l'a  dé- 
claré, en  redemandant  à  grands  cris  de  bis  le  célèbre  duo,  et  en 
rappelant  quatre  fois  (je  souligne  à  dessein)  les  deux  artistes. 

Palermi  a  été  fort  bien  dans  le  rôle  d'Idreno,  qui  lui  sied  bien 
mieux  que  tous  les  autres;  on  disait  qu'il  fait  de  rapides  et  sen- 
sibles progrès.  Non  ;  on  ne  peut  progresser  à  ce  point  du  jour  au 
lendemain.  Seulement  il  chante  mieux  le  répertoire  rossinien  que 
le  nouveau.  Il  avait  eu  un  simple  succès  d'encouragement  dans 
Don  Pasquale,  il  en  a  eu  un  très-légitime  dans  Semiramide.  Nous 
l'engageons  seulement  à  ne  pas  trop  forcer  son  charmant  organe; 
c'est  plutôt  le  poète  qui  lui  donne  ce  conseil,  car  il  a  dit  (à  peu 
près)  : 

iNe  forçons  pas  notre  instrument. 

Nous  ne  ferions  rien  avec  grâce. 

Nos  félicitations  les  plus  sincères  à  la  basse  Agnesi.  Il  a  été  su- 
perbe dans  le  rôle  si  redoutable  d'Assur,  que  Tamburini  a  rendu 
presque  impossible  pour  ses  sucesseurs.  Rarement  nous  avons  re- 
marqué autant  de  souplesse  dans  un  organe  aussi  robuste.  Et  il 
faut  être  excellent  musicien  pour  vocaliser  de  la  sorte.  Ajoutons, 
à  son  éloge,  que  l'artiste  dramatique  a  été  au  niveau  du  chanteur. 

E.  R. 


DE  PAHIS. 


379 


THEATRE  LYRIQUE  IMPÉRIAl. 

MttMgénie  en  TattrMe,  de  Cilttck. 

(Reprise  le  2G  novembre  1868.) 

Je  suis  heureux,  pour  la  première  fois  que  je  viens  clans  ce 
journal  parler  du  théâtre  Lyrique,  de  n'avoir  guère  que  des  élo- 
ges à  adresser  et  de  pouvoir  complimenter  le  directeur  sur  son 
excellente  idée  de  remonter  celles  désœuvrés  du  temps  passé  qui, 
par  leur  mérite  et  l'influence  qu'elle  ont  exercée  sur  l'art,  seront 
toujours  remplies  d'intérêt  ou  d'enseignement.  J'aimerais  qu'un 
jour  fût  réservé  par  semaine  au  Théâtre-Français  pour  jouer  éter- 
nellement Corneille,  Racine,  Molière,  Voltaire,  elc,  et  je  suis  per- 
suadé que  la  jeune  littérature  n'aurait  qu'à  gagner  à  aller  écouter 
des  chefs-d'œuvre  devenus  froids  peut-être,  mais  impérissables 
comme  la  beauté  plastique.  Ce  n'est  donc  pas  moi  qui  trouverai 
mauvais  que  M.  Pasdeloup,  à  ses  risques  et  périls,  ait  pris  l'initia- 
tive de  faire  connaître  à  notre  génération  YJphigénie  en  Tauride 
de  Gliick  ;  je  le  remercie  au  contraire  de  la  soirée  intéressante 
que  j'ai  passée  hier  à  écouter  cette  belle  partition  que  je  ne  con- 
naissais que  pour  l'avoir  lue,  puisque  sa  dernière  exécution  en 
France  remonte  déjà  à  une  soixantaine  d'années.  En  Allemagne, 
la  religion  de  ces  grandes  œuvres  est  bien  plus  religieusement 
conservée,  et  les  ouvrages  de  Gliick,  particulièrement,  ne  quittent 
jamais  le  répertoire. 

Chez  nous  il  y  a  un  certain  courage  à  essuyer  la  poussière  tom- 
bée sur  les  vieux  maîtres.  Au  théâtre  les  élus  sont  rares,  les  places 
sont  prises,  les  ambitions  nombreuses;  il  semble  qu'une  œuvre 
ancienne  empêche  une  nouvelle  d'arriver  et  l'on  crie  :  Place  aux 
jeunes!  Comme  s'il  ne  fallait  pas  toujours  se  nourrir  des  belles 
choses  et  des  grands  exemples.  Place  aux  jeunes,  oui  certes!  mais 
aussi,  respect  aux  vieux  !  En  musique,  comme  en  littérature, 
comme  en  peinture,  sachons  conserver  notre  musée  du  Louvre  à 
côté  de  nos  expositions  des  Champs-Elysées. 

L'accueil  fait  à  l'exécution  très-soignée  d'Iphigénie  a  été  géné- 
ralement chaleureux;  on  voyait  une  salle  attentive,  intéressée, 
reconnaissante  des  efforts  accomplis.  Les  applaudissements  étaient 
nombreux,  fréquents,  et  quelques  parties  de  l'œuvre  ont  produit 
un  grand  et  légitime  effet. 

Il  est  juste  de  dire  que  Ylphigénie  en  Tauride  de  Gliick  est  l'un 
des  opéras  les  plus  estimés  de  ce  créateur  réel  de  la  tragédie  ly- 
rique. Placé  par  les  connaisseurs  sur  la  même  ligne  que  YOrphée 
et  VAlceste,  il  ne  lui  manque  que  d'être  aussi  connu  pour  qu'on 
l'apprécie  à  sa  haute  valeur.  Mieux  que  YAlceste,  cette  partition 
est  peut-être  destinée  à  plaire  aux  masses,  en  ce  qu'elle  offre  une 
couleur  sombre  moins  générale  et,  par  suite,  des  oppositions  plus 
tranchées.  Les  oppositions?  n'est-ce  pas  là  un  des  principaux  mo- 
biles de  l'intérêt,  et  Orphée  n'en  est-il  pas  la  preuve  évidente  ; 
Orphée,  dont  chaque  acte  présente  une  couleur  si  tranchée? 

Le  sujet  antique  d'Iphigénie  met  en  présence  la  grâce  native  des 
Grecs  et  la  fougue  sauvage  des  Scythes;  après  les  douces  prêtresses 
de  Diane  il  fait  surgir  les  impitoyables  Euménides.  Remarquez 
aussi  que  l'un  de  ses  plus  touchants  moyens  d'action  est  l'amitié 
d'Oreste  et  de  Pylade,  et  vous  comprendrez  tout  le  parti  que  pou- 
vait tirer  d'un  tel  assemblage  un  génie  aussi  virilement  trempé  que 
celui  de  Gliick.  Les  parties  déclamatoires  de  l'œuvre  sont,  comme 
toujours,  splendides.  Les  effets  d'orchestre  atteignent  quelquefois 
jusqu'au  sublime,  et  l'on  se  demande  ce  que  pourrait  produire 
aujourd'hui  un  tel  homme  avec  les  ressources  de  l'instrumentation 
moderne. 

Mais  laissons  ces  considérations  générales  pour  examiner  acte 
par  acte  les  beautés  principales  qui  vont  se  présenter. 


Une  teinte  violente  et  sauvage  se  répand  sur  presque  tout  le 
premier  acte.  La  colère  des  dieux,  le  désespoir  d'Iphigénie,  la 
fureur  des  Scythes  s'y  succèdent  presque  sans  répit,  et  l'on  arrive 
au  dernier  accord  dans  un  état  de  surexcitation  réelle.  On  lemar- 
que  cependant  un  air  d'Iphigénie:  Otoi  qui  prolongeas  mes  jours , 
dont  la  couleur  expressive  fait  une  heureuse  diversion  et  dont  la 
mélodie  est  largement  tracée.  L'entrée  des  Scythes  est  saisissante 
de  sauvagerie,  et  le  chœur:  Il  nous  fallait  du  sang  pour  expier  nos 
crimes,  a  vraiment  le  tranchant  du  glaive.  C'est  au  milieu  de  ce 
dernier  morceau  que  passe  un  fragment  symphonique  qui  n'est 
rien  moins  qu'un  petit  joyau.  Cela  accompagne  une  danse  guer- 
rière fort  bien  réglée,  ma  foi,  et  d'un  effet  très-pittoresque.  Le 
tout  est  comme  pimenté,  et  quand  la  toile  baisse  on  se  regarde 
un  peu  étourdi,  mais  subjugué.  Du  reste,  grâce  à  la  Société  du 
Conservatoire,  toute  cette  scène  des  Scythes  a  été  maintes  fois  ap- 
préciée. 

Le  second  acte  nous  présente  d'abord  les  deux  amis.  Un  air 
d'Oreste  déplorant  ses  malheurs  et  ses  crimes  précède  l'air  très- 
connu  de  Pylade  :  Unis  dès  la  plus  tendre  enfance.  C'est  un  chef- 
d'œuvre  de  sentiment  que  ce  dernier,  et  il  a  été  pour  M.  Bosquin, 
qui  possède  une  charmante  voix  de  ténor,  l'occasion  d'un  succès 
très-mérité.  Ce  jeune  artiste  a  détaillé  dans  le  meilleur  style 
cette  page  hors  ligne  qu'on  a  bissée  d'enthousiasme.  Je  citerai  l'air 
d'Oreste  :  Le  calme  rentre  dans  mon  cœur,  pour  son  joli  accompa- 
gnement et  j'appellerai  l'attention  sur  la  grande  scène  des  Eumé- 
nides où  le  génie  de  Gliick  se  montre  tout  entier.  Un  air  d'Iphi- 
génie, avec  accompagnement  obligé  de  basson  et  de  hautbois,  pré- 
cède un  très-beau  chœur  de  prêtresses  où  la  tonalité,  tournant 
perpétuellement  du  majeur  au  mineur  et  du  mineur  au  majeur, 
produit  un  singulier  et  délicieux  effet.  Ce  second  acte  d'ailleurs 
est  le  plus  riche  de  l'ouvrage.  Dans  les  deux  qui  vont  suivre  nous 
serons  plus  avare  de  citations  et  le  public  lui-même  a  paru  s'y  in- 
téresser dans  une  moindre  mesure.  Serait-ce  que  dans  ce  genre 
un  peu  sérieux,  beaucoup  vieilli,  où  la  mélodie  carrée  n'existe 
guère  qu'à  l'état  d'embryon,  la  monotonie  ne  se  fasse  forcément 
sentir  au  bout  d'un  certain  temps  ?  Quand  la  fatigue  survient,  l'in- 
térêt tombe  et  c'est  un  peu  ce  qui  s'est  présenté  vers  la  fin  de  la 
pièce. 

Il  faut  dire  aussi  que  nous  sommes  maintenant  habitués  à  en- 
tendre des  morceaux  d'ensemble  destinés  à  faire  opposition  aux 
soli.  Les  duos,  les  trios  et  jusqu'aux  septuors  que  présentent  nos 
partitions  modernes  n'existaient  pas  alors.  Les  airs  succédaient  aux 
airs,  et  il  était  bien  rare,  sauf  les  chœurs,  que  les  voix  se  marias- 
sent dans  un  ensemble.  Un  duo  entre  Oreste  et  Pylade  se  présente 
pourtant  dans  le  troisième  acte,  et  je  l'attendais  à  l'avance,  persuadé 
qu'il  ferait  sensation;  il  a  passé  inaperçu.  Peut-être  son  exécution 
a-t-elle  été  un  peu  pâle. 

Dans  le  quatrième  acte  je  citerai  rapidement  un  grand  air  d'I- 
phigénie: Je  t'implore  et  je  tremble  ;  l'hymne  des  prêtresses:  Chaste 
fille  de  Latone  ;  une  charmante  phrase  dite  par  Oreste:  Dans  cet 
objet  touchant  ;  et  enfin  le  chœur  final  d'allégresse  écrit  dans  un 
grand  style  et  d'un  fort  beau  caractère. 

L'exécution  mérite  des  éloges  bien  sincères.  L'orchestre,  dirigé 
par  M.  Pasdeloup  en  personne,  a  été  très-remarquable.  Les  nuances 
difficiles  de  cette  musique,  les  accents,  les  appogiatures,  les  grupetti, 
tout  cela  a  été  rendu  avec  un  rare  bonheur.  Il  y  a  là  une  phalange 
d'instruments  à  cordes  qui  s'est  vaillamment  comportée.  Chose  di- 
gne de  remarque,  l'orchestration  de  Gliick  a  été  conservée;  c'est 
l'œuvre  exacte  du  maître  que  nous  avons  entendue,  ce  qui  a  bien 
son  charme. 

Deux  observations  seulement.  Tous  les  mouvements  sont-ils  bien 
traditionnels  et  les  accompagnements  n'ont  ils  pas  été  quelquefois 
un  peu  forts? 


380 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


Entre  le  3"  et  le  4«  acte,  M.  Pasdeloup,  a  fait  endre  le  larghetto 
du  quintette  en  la  de  Mozart.  Quoique  délicieux  et  supérieurement 
exécuté,  était-il  aussi  bien  à  sa  place  qu'aux  concerts  populaires  ? 

La  mise  en  scf'ne  est  très-soignée.  On  sent  partout  l'œil  du 
maître. 

Les  chœurs,  considérablement  augmentés  pour  cet  ouvrage  et 
qui  comptent  beaucoup  d'élèves  du  Conservatoire,  ont  été  superbes. 
Chœurs  d'hommes,  chœurs  de  femmes,  chœurs  réunis,  tous  ont 
chanté  juste  et  en  mesure. 

Il  nous  reste  à  parler  des  artistes  : 

A  M.  Bosquin  la  place  d'honneur,  et  par  droit  de  conquête  et 
par  droit  d'ancienneté.  Déjà  pensionnaire  de  M.  Carvalho,  il  s'é- 
tait fait  applaudir  dans  Martha.  Mais  aujourd'hui  il  a  fait  mieux, 
il  s'est  montré  artiste  de  goût  et  chanteur  délicat.  Sa  voix  fraîche 
et  pénétrante  s'assimile  parfaitement  au  personnage  sympathique 
de  Pylade. 

Le  début  de  Mme  Lacaze  dans  le  rcMe  difficile  d'Iphigénie  est 
honorable,  mais  pas  davantage.  Il  y  a  de  l'habileté  dans  son  chant 
et  elle  possède  une  certaine  habitude  de  la  scène  ;  par  malheur  la 
voix  est  d'un  timbre  défectueux,  le  médium  seul  pourrait  plaire, 
et  quant  à  la  dicticm  «lie  est  telle  qu'on  ne  saisit  pas  une  phrase, 
pas  un  mot.  Dans  la  musique  de  Gliick,  cela  est  plus  grave  que 
dans  toute  autre. 

Je  n'ai  pas  vu  M.  Aubéry  dans  le  Barbier;  on  m'a  dit  qu'il  y 
était  tort  bien.  Dans  le  rôle  d'Oreste  il  manque  d'ampleur  et  sa 
voix  est  un  peu  cotonneuse.  On  sent,  toutefois,  le  complet  musi- 
cien en  M. Aubéry,  sa  phrase  est  correcte,  ses  attaques  irréprocha- 
bles; malheureusement,  le  tout  manque  de  nerf  et  de  vie. 

M.  Caillot  s'est  fort  bien  tiré  du  petit  rôle  de  Thoas.  11  y  a 
montré  une  belle  voix  de  baryton  et  une  gi-ande  bonne  volonté. 
Nous  l'attendons  à  une  épreuve  plus  importante,  ainsi  que 
Mlle  Priola,  qui,  dans  quelques  mots  seulement,  a  fait  entendre 
une  fort  jolie  voix  bien  timbrée,  bien  conduite.  En  résumé  M.  Pas- 
deloup a  dû  être  fort  satisfait  de  cette  soirée.  Pendant  qu'il  faisait 
des  rêves  de  gloire,  son  caissier  devait  faire  des  rêves  d'or.  Mais 
il  ne  faut  pas  s'arrêter  en  si  beau  chemin  et  négliger  de  mettre 
en  chantier  quelque  autre  chose.  Après  l'ancien,  le  nouveau  ;  et 
pour  retourner  la  proposition  du  commencement  de  cet  article, 
respect  aux  vieux,  dirons-nous;  mais  aussi,  place  aux  jeunes! 

Paul  BERNARD. 


THEATRE  DE  L'ÂTHENÉE. 

liE  TENCiEVR, 

Opéra-bouffe  en  un  acte,  paroles  de  MM.  Nuitter  et  Beaumont, 

musique  de  M.  Isidore  Legouu. 

(Première  représentation  le  20  novembre  1868.) 

Allez  donc  vous  promener  en  Espagne,  et  faites  y  la  cour  à 
quelques  beautés  agaçantes  !  Tout  n'est  pas  roses  dans  le  métier  de 
galant  d'une  senorita,  à  en  juger  par  les  mésaventures  du  héros 
de  l'opérette  qu'on  appelle  le  Vengeur.  Ce  pauvre  Cotignac,  un 
Gascon,  cela  va  sans  dire,  ne  sait  que  trop  ce  qu'il  en  coûte  de 
s'adresser  au  cœur  d'une  Andalouse  pur  sang.  Puisqu'il  adore 
Elvire,  il  doit  être  prêt  à  venger  ses  injures.  Il  faut  qu'il  la  dé- 
livre, par  un  bon  coup  de  poignard,  d'un  infidèle  qui  a  méconnu 
ses  attraits.  Mais  qu'il  n'aille  pas  se  tromper  et  faire  disparaître  le 
frère  de  la  belle,  en  le  prenant  pour  son  amant,  car  Elvire  punira 
le  meurtrier  de  son  frère  et  lui  fera  avaler  une  forte  dose  de  poi- 
son. Par  bonheur,  tant  de  tués  que  de  blessés,  il  n'y  a  personne 


de  mort,  et  Cotignac  s'échappe  en  jurant  bien  qu'on  ne  l'y  rat- 
trapera plus. 

Cette  petite  pièce,  très-bien  venue  et  bourrée  de  situations  plai- 
santes, a  inspiré  à  M.  Isidore  Legouix  plusieurs  motifs  qui  ne 
manquent  ni  de  gaîté  ni  de  franchise.  L'air  d'Elvire  :  Je  suis 
Espagnol  ;  les  couplets  de  Cotignac  avec  ce  refrain  populaire  : 
Voilà  l'  vengeur.  Mesdames,  voilà  V  vengeur;  un  petit  nocturne  à 
deux  voix,  un  quatuor  final  bien  agencé,  tels  sont  les  morceaux 
qui  nous  ont  le  plus  frappé  £t  qui    ont  obtenu  le  plus  de   bravos. 

Dans  le  rôle  d'Elvire,  Mlle  Van  Gheel  fait  preuve  d'un  vrai  talent 
de  transformation.  Léonce  est  amusant  comme  toujours,  avec 
bizairerie,  dans  son  personnage  mystifié  de  Cotignac.  Luce  et 
Lorentz  représentent  d'une  manière  convenable  le  frère  et  l'amant 
de  l'Andalouse. 

Nous  ne  quitterons  pas  l'Athénée  sans  adresser  nos  compliments 
à  M.  Bernardin,  ainsi  qu'à  son  orchestre. 

D. 


THËÂTBE  DES  lENUS-PLÂISIRS. 

I>E  CBAlWn-DUC  DE  UATAPA, 

Opéra-bouffe  en  trois  actes  et  cinq  tableaux,  paroles  de  MM.  Clair- 
ville  et  Octave  Gastineau,  musique  de  M.  Debillemont. 

(Première  représentation  le  16  novembre  1868.) 

Malgré  ses  allures  bouffonnes,  cette  pièce  est  loin  d'être  aussi 
insensée  que' certaines  fantaisies  d'un  goût  déplorable,  qui  ont 
eu  leur  instant  de  vogue.  Le  fils  du  grand-duc  de  Matapa,  un 
digne  héros  des  contes  de  fées,  se  rend  auprès  du  seigneur  de 
Cabochagiff  pour  épouser  une  de  ses  filles;  mais  en  route,  dans 
une  forêt,  il  fait  la  rencontre  d'une  petite  chevrière  dont  il  de- 
vient très-amoureux,  et  finalement,  cette  chevrière  se  trouve  être 
une  princesse  à  laquelle  il  peut  s'allier,  sans  ternir  le  blason  pa- 
ternel . 

Quoi  de  plus  raisonnable?  A  cela  joignez  des  talismans  à  l'aide 
desquels  se  produisent  des  situations  vraiment  comiques,  et,  entre 
autres,  des  fusils  qui  partent  tout  seuls,  quand  ils  sont  touchés  du 
bout  du  doigt  par  une  femme...  légère,  et  vous  conviendrez  qu'il 
y  a  là  quelque  chose  qui  est  fait  pour  plaire  à  l'esprit  en  même 
temps  qu'aux  yeux. 

Pour  sa  part,  la  musique  de  M.  Debillemont  caresse  agréable- 
ment l'oreille.  Elle  est  gaie,  comme  il  convient  à  une  partition 
d'opéra-boutfe,  mais  sans  cesser  jamais  d'être  fine  et  distinguée. 

L'ouverture  est  bien  faite;  son  plan  est  habilement  tracé;  les  déve- 
loppements en  sont  heureux.  Le  quatuor  qui  lui  succède,  pour  deux 
voix  d'homme  et  deux  de  femme,  a  de  la  grâce  et  de  la  fraîcheur. 
Les  couplets  de  la  che\rière  sont  bien  venus,  et  nous  pouvons  en 
dire  autant,  sous  un  autre  aspect,  de  l'air  comique  du  seigneur 
de  Cabochagitt'.  Par  un  singulier  hasard,  la  mise  en  scène  du 
finale  du  premier  acte,  où  l'orage  amène  un  effet  de  parapluies, 
ressemble  à  celle  du  premier  finale  de  Chilpéric.  Mais  là  s'arrête 
l'analogie;  M.  Debillemont  a  trouvé  pour  ce  baisser  de  rideau  un 
de  ses  plus  entraînants  motifs. 

Au  deuxième  tableau,  le  marquis  de  Cabochagiff  chante  une 
tyrolienne  fort  plaisante,  et  Raoul  de  Matapa  une  jolie  romance. 
Au  troisième  encore  un  air  bouffe  de  Cabochagiff  sur  les  fusils  en- 
chantés, et  des  couplets  avec  ensemble  à  la  suite  de  l'épreuve.  Le 
quatrième  tableau  nous  offre  un  contingent  encore  plus  riche; 
deux  gracieux  morceaux  chantés  successivement  par  les  filles  du 
marquis  ;  les  couplets  piquants  :  On  a  vu  des  rois  épouser  des  ber- 
gères et  la  ronde  comique  du  grand-duc  de  Matapa.  Ce  tableau  se 


DE  PARIS. 


3Sl 


ermine  par  un  motif  de  danse  plein  de  verve  et  de  gaieté.  Dans 
le  dernier  tableau  enfin,  on  remarque  un  charmant  quintette  cl 
un  duo  bouffe  entre  Cabochagiff  et  le  grand-duc  de  Matapa. 

L'âme  de  cette  pièce,  c'est  Gourdon,  qui  prête  au  marquis  de 
Cabochagiff  une  physionomie  des  plus  originales.  Raoul  de 
Matapa  est  fort  bien  joué  par  Aurèle.  Le  grand-duc  de  Matapa  ne 
paraît  qu'au  dernier  tableau  ;  mais,  joué  par  Paul  Ginel,  il  n'en 
est  pas  moins  drôle. 

Mme  Debrigny-Varney,  dans  le  rôle  de  la  chevrière  Bichette, 
fait  preuve  d'acquit  et  de  savoir  musical  ;  il  ne  lui  manque  qu'un 
peu  plus  de  velouté  dans  le  registre  haut  de  la  voix.  Mme  Mar- 
chand et  Mlle  Séchel  s'acquittent  avec  une  convenance  parfaite  des 
personnages  de  Finette  et  de  Dondinette,  les  tilles  du  marquis. 

Costumes  et  décors  sont  d'une  exécution  irréprochable  ;  les 
choeurs  fonctionnent  avec  ensemble,  et  l'orchestre  mérite  uue 
mention  toute  spéciale. 

D. 


NOTE  SUR  UN  POINT  DE  L'HISTOIRE  DE  L'HÂBIHOIIIE 


ET  DE  liA  TOWAI.n'E. 


Je  viens  de  lire,  dans  le  Ménestrel  du  22  novembre,  la  fin  d'un  tra- 
vail de  M.  Gevaërt  sur  ce  qu'il  appelle  les  Origines  de  la  tonalité  mo- 
derne, et  j'y  vois  qu'il  conteste  à  Monteverde  la  priorité  d'emploi  de 
l'harmonie  de  septième  mineure  avec  tierce  majeure ,  de  laquelle  est 
sortie  cette  tonalité,  et  dont  je  l'ai  proclamé  l'inventeur.  M.  Gevaërt 
vient  un  peu  tard  pour  renouveler  sur  ce  sujet  des  attaques  com- 
mencées il  y  a  trenle-six  ans  et  que  j'ai  mises  à  néant.  Ses  arguments 
sont  ceux  de  ses  prédécesseurs;  ce  n'était  pas  la  peine  de  les  reproduire. 
Je  n'ai  plus  de  temps  à  perdre  en  discussion  de  journaux  ;  mais  il  s'a- 
git d'un  point  important  de  l'histoire  de  la  musique  ;  cette  considération 
seule  me  fait  surmonter  le  dégoût  que  m'inspire  la  polémique. 

Ce  fut  dans  mon  cours  de  philosophie  de  la  musique,  fait  à  Paris  en 
d832,  que,  pour  la  première  fois,  l'attention  des  artistes  fut  appelée  sur 
le  principe  générateur  de  la  tonalité  moderne,  et  sur  l'évidence  de  l'exis- 
tence de  ce  principe  dans  les  accords  dissonants  naturels,  dont  Monte- 
verde avait  fait  le  premier  usage  dans  son  cinquième  livre  de  Madrigali, 
puWié  en  -1599.  S'il  existe  encore  quelques  personnes  qui  suivirent  ce 
cours,  elles  se  souviendront  de  l'émotion  de  l'assemblée  lorsque  je  dé- 
montrai, par  une  foule  d'exemples  au  piano,  que  la  tonalité  actuelle,  la 
modulation  inattendue  et  la  vraie  cadence  harmonique  sont  inhérentes 
aux  accords  de  ce  genre.  Depuis  lors,  j'ai  développé  cette  théorie  dans 
plusieurs  de  mes  ouvrages. 

Quiconque  énonce  une  vérité  nouvelle  s'expose  aux  démentis,  surtout 
si  cette  vérité  fait  son  chemin,  comme  celle  dont-je  parle:  j'en  eus 
bientôt  la  preuve.  La  première  attaque  parut,  en  1834,  dans  une  bro- 
chure anglaise  dont  l'auteur  m'était  inconnu.  On  y  alléguait  des  pas- 
sages d'anciens  harmonistes  où  l'on  croyait  trouver ,  avant  Monteverde, 
l'existence  des  accords  employés  par  lui  ;  tout  cela  provenait  de  prolon- 
gations qui  n'avaient  point  de  rapport  avec  les  audacieuses  nouveautés 
de  l'illustre  musicien.  Je  fis  une  réponse  de  quelques  pages  à  celte  bro- 
chure, et  je  n'entendis  plus  parler  de  mon  adversaire. 

Ceux  qui  vinrent  ensuite  méritaient  plus  d'attention  :  le  premier  fut  le 
chanoine  Proske,  de  Ratisbonne,  savant  éditeur  de  la  Musica  divina.  Il 
n'appartenait  pas  à  son  caractère  de  chercher  à  faire  de  l'effet  dans  un 
journal,  par  des  critiques  d'opinions  contraires  aux  siennes:  ce  fut  à 
moi  qu'il  exposa  ses  doutes  dans  des  lettres  confidentielles  remplies  de 
bienveillance.  Il  croyait  avoir  trouvé  dans  les  œuvres  de  Palestrina  bon 
nombres  d'exemples  de  ces  harmonies,  dont  j'avais,  disait-il,  gratifié 
Monteverde.  Je  me  livrai  à  l'analyse  de  ces  passages  et  fis  voir  à  mon 
savant  critique  qu'entre  ces  retards  de  consonnances  par  les  prolonga- 
tions, et  ces  suspensions  de  cadences,  et  les  harmonies  du  maître  véni- 
tien, il  n'y  avait  aucune  analogie  tonale.  Je  lui  citai  de  plus  divers  textes 
publiés  immédiatement  après  la  publication  du  cinquième  livre  des 
Madrigali  de  Monteverde,  où  se  manifestent  l'étonnementet  l'effet  que  ve- 
naient de  produire  les  hardiesses  harmoniques  qui  s'y  trouvent.  Après 
plusieurs  lettres  échangées,  nous  nous  rencontrâmes  à  Venise  en  i8U, 
et  M.  Proske  se  déclara  convaincu  que  j'étais  dans  le  vrai. 

La  lulle  fut  plus  ardente  et  plus  longue  avec  le  conseiller  Kiesewetter, 
de  Vienne;  car  il  était  obstiné  et  médiocrement  harmoniste.  11  m'oppo- 
sait aussi  des  choses  qui  n'avaient  que  faire  dans  la  question,  et  remon- 
tait même  jusqu'au  xy''  siècle,  prétendant  qu'on  y  connaissait  déjà  les 
harmonies  de  Monteverde.  Je  mis  fin  à  ses  dissertations,  insérées  dans 
les  journaux  allemands ,  par  l'article  Monteverde  de  la  première  édition 


de  la  Biographie  des  musiniens ,  et  par  le  premier  chapitre  du  troisième 
livre  de  mon  Traité  d'harmonie  :  Kiesewetter  ne  souffla  plus  mot. 

En  I85:î,  ce  fut  M.  le  comte  Durutte  qui  me  prit  à  partie  et  qui  vint 
aussi,  dans  la  Gazette  musicale  de  l'aris,  opposer  à  la  découverte 
importante  que  j'avais  attribuée  à  Monteverde ,  des  cho.ses  du  genre 
de  celles  que  reproduit  aujourd'hui  M.  Gëvaert.  Par  une  leUre  au  direc- 
teur de  ce  journal,  en  date  du  10  avril  de  la  même  année,  j'ôtai  à  mon 
adversaire  l'envie  de  continuer  la  polémique. 

Je  ne  croyais  pas'  voir  se  renouveler  ces  fastidieuses  diseussions  où  le 
doute  n'est  plus  possible  pour  un  musicien  de  bonne  foi,  s'il  comprend 
la  question.  Que  m'oppose  M.  Gevaërt?  Que  l'accord  de  sixte  du  second 
degré,  ré.  fa,  si,  fait  sa  résolution  sur  i:t,  mi,  sol,  ut,  ce  (/ui  a  manifes- 
tement, dit-il,  la  même  valeur  lonaln  et  harmonique  que  ré,  fa,  sol,  si,  fai- 
sant sa  résolution  sur  le  même  accord!  Est-ce  sérieusement  que  M.  Ge- 
vaërt produit  cet  argument?  Quoi,  un  insignifiant  accord  de  sixte,  au 
point  de  vue  tonal,  aurait  la  même  valeur  que  cet  accord  de  septième, 
qu'il  suffit  de  faire  entendre,  sans  que  rien  ne  le  précède  ni  ne  le 
suive,  pour  que  le  ton,  quel  qu'il  puisse  être,  soit  immédiitement  connu 
avec  toutesles  conditions  de  lagamme,  etquesa  résolution  détermine  égale- 
ment le  mode?  Musiciens  de  tous  les  pays,  que  dites-vous  de  cela? 
M.  Gevaërt  ne  pouvait  être  plus  mal  inspiré  que  d'imaginer  cei  argu- 
ment pour  sa  cause,  dont  je  comprends  très-bien  le  but. 

Comme  tous  ses  prédécesseurs,  il  m'oppose  des  passages  de  Palestrina 
sur  lesquels  je  me  suis  expliqué  vingt-fois,  notamment  dans  mon  Traité 
de  l'Harmonie,  faisant  voir  que  ces  retards  de  consonnances  n'ont  rien 
à  faire  avec  cet  aciMrd  de  septième  et  celui  de  neuvième  attaqués  fran- 
chement et  sans  préparation  aucune  par  Monteverde,  et  qui,  dès  son  appa- 
rition, a  créé  une  tonalité  nouvelle.  Quant  au  passage  d'un  madrigal  de 
Caccini,  que  rapporte  M.  Gevaërt,  il  est  sans  valeur  pour  ce  dont  il 
s'agit,  car  l'ouvrage  d'où  il  est  tiré  n'a  paru  qu'en  1601,  à  Florence, 
chez  Marescotti;  et  le  cinquième  livre  des  Madrigali  de  Monteverde  a 
été  publié  à  Venise,  chez  Anijelo  Gardane,  en  1599.  Il  est  vrai  que  Caccini 
dit,  dans  son  avis  au  lecteur,  qu'il  avait  fait  entendre  ses  pièces  plu- 
sieurs années  auparavant  à  Florence  et  à  Rome,  chez  des  amis;  mais 
cela  n'eut  aucun  retentissement  avaat  la  publication  des  Nuove  musiche, 
tandis  que  les  Madrigali  de  Monteverde  causèrent  une  profonde  émotion 
immédiatement  après  a"oir  vu  le  jour,  comme  le  prouvent  les  critiques 
qui  en  furent  faites  aussitôt.  En  1600,  le  savant  professeur  de  contre-point 
Artusi  publiait  à  Bologne  son  livre  intitulé  :  YArfusi,  overo  délie  imper- 
fettioni  délia  mnderna  musica,  où  se  trouvent  d'amères  critiques  des  au- 
daces de  Monteverde.  Au  commencement  du  deuxième  ragionamento 
(feuillet  39),  Artusi  rapporte  qu'ayant  été  invité  à  entendre  de  nouveaux 
madrigali  chez  Antonio  Gozetti,  noble  Ferrarais,  on  cacha  d'abord  le 
nom  de  l'auteur,  poiu'  avoir  son  opinion  sans  prévention  aucune.  La 
facture,  dit-il,  n'en  était  pas  mauvaise  {era  la  tessitura  non  ingrata), 
mais  on  y  trouvait  de  nouvelles  règles,  de  nouveaux  modes,  de  nouvelles 
phrases  d'expression,  qui,  pour  le  dire,  sont  dures  et  peu  agréables  à 
l'oreille  (sono  pero  aspri,  et  alV  udito  poco  piacevoli).  Après  ces  critiques 
viennent  immédiatement  les  passages  de  Monteverde,  qui  sont  l'objet  des 
contestations  actuelles.  Plus  loin  (à  la  page  -i4),  Artusi  ajoute  :  Nos  an- 
»  ciens  n'ont  jamais  enseigné  que  les  septièmes  dusseiTt  être  attaquées  aussi 
»  résolument  et  sans  préparation.  (Le  nostri  vecchi  non  ensegnarono  mai, 
»  che  le  settime  si  devessero  usare  cosi  assolute  et  scoperte).  » 

Ne  nous  étonnons  pas  de  voir  un  savant  professeur,  élevé  dans  la  docte 
école  bolonaise,  repousser  des  nouveautés  qui  allaient  transformer  l'art  et 
porter  de  rudes  atteintes  aux  choses  qui  avaient  charmé  sa  jeune.sse,  en 
créant  des  beautés  qu'il  ne  pouvait  prévoir  :  réservons  plutôt  notre  éton- 
nement  pour  ceux  qui  ferment  les  yeux  pour  ne  pas  voir,  nient  l'his- 
toire de  ces  transformations  et  en  méconnaissent  les  monuments.  On 
accorderait,  n'importe  à  qui,  la  gloire  d'avoir  trouvé  cette  tonalité,  à  la- 
quelle nous  devons  tant  d'œuvres  magnifiques  de  musique  dramatique 
et  autres,  plutôt  que  de  reconnaître  pour  son  auteur  le  seul  homme  de 
génie  de  la  fin  du  xvi"  siècle  et  de  la  première  moitié  du  xvn".  C'est 
cependant  ce  même  artiste  qui,  le  premier,  a  trouvé  de  vrais  accents 
dranmatiques  pour  la  douleur  A' Ariane  abandonnée;  qui  a  inventé  le  ré- 
citatif obligé,  avec  des  formes  d'instrumentation  dont  nous  nous  servons 
encore,  dans  l'épisode  du  combat  de  Clorinde  et  de  Tancrède;  qui  a  rem- 
pli sa  partition  de  VOrfeo  d'une  multitude  de  choses  intéressantes  incon- 
nues avant  lui;  enfin,  à  qui  l'on  dut  les  premiers  opéras  représentés  sur 
les  théâtres  de  Venise,  lesquels  furent  accueillis  avec  enthousiasme.  C'est, 
dis-je,  à  ce  même  homme  qu'on  dispute  l'invention  qui  a  donné  nais- 
sance à  la  tonalité  moderne,  nonobstant  les  preuves  évidentes  que  je 
viens  d'en  donner  pour  la  dixième  fois.  Peut-être  demandera-t-on  la 
cause  de  cette  obstination  contre  la  vérité?  Cette  cause,  je  la  connais; 
mais  je  ne  crois  pas  devoir  la  dire. 

FÉTIS. 


Nous  donnons  les  discours  prononcés  sur  la  tombe  de  Rossini 
par  M.  de  Saint-Georges,  au  nom  de  la  Commission  des  auteurs 


KEVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


dramatiques  (1),  et  celui  de  M.  Elwart,  au  nom  du  Conservatoire. 

La  Commission  des  auteurs  et  compositeurs  dramatiques,  qui  s'Iionore 
d'avoir  compté  parmi  ses  membres  le  grand  maître  que  nous  pleurons, 
s'empresse  d'apporter  sur  cette  tombe  le  tribut  de  ses  immenses  regrets. 

L'une  des  plus  éclatantes  lumières  de  ce  siècle  vient  de  .s'éteindre; 
l'un  de  ces  rares  météores  qui  traversent  le  monde  en  l'éblouissant  a 
disparu,  mais  non  sans  laisser  des  traces  brillantes  de  son  passage. 

Rossini  n'est  plus! 

Le  créateur  de  toute  ime  splendide  école .  le  novateur  hardi  qui  se 
fraya  sa  route  au  milieu  de  toutes  les  gloires  qui  avaient  précédé  la 
sienne,  Rossini  s'est  élancé  vers  les  sources  éternelles  de  ces  divines 
mélodies  qui  descendaient  du  ciel  dans  son  âme  et  ne  se  tarirent  jamais 
pour  lui. 

Des  voix  plus  autorisées  que  la  mienne  vous  raconteront  l'odjssée  de 
ce  conquérant  de  l'art,  dont  chaque  pas  fut  marqué  par  un  triomphe. 

C'est  au  burin  de  l'histoire  à  graver  pour  la  postérité  les  travaux  im- 
mortels de  ce  maître  unique,  sans  faiblesse,  sans  défaillance,  ei  toujours 
parfait,  quelque  genre  qu'il  abordât,  quelque  sujet  qu'il  lui  plût  de 
traiter. 

Tel  est,  Messieurs,  le  privilège  du  génie  ! 

Et  quel  génie  fut  plus  constamment  égal  à  lui-même  que  celui  qui 
écrivit  la  plus  spirituelle  musique  de  notre  époque  dans  le  Barbier  de 
Séville  el  trouvâtes  chants  sublimes  de  Guiilaume  Tell'! 

Tragique  comme  Shakspeare  dans  Othello,  biblique  et  inspiré  comme 
les  prophètes  dans  Moïse,  il  fait  tressaillir  en  nos  âmes  l'amour  de  la 
patrie  aux  accords  du  Siège  de  Corinihe,  et  y  jette  la  terreur  avec  les 
sombres  et  magnifiques  harmonies  de  Sémiramis . 

Puis,  par  une  merveilleuse  métamorphose,  habile  enchanteur,  il  nous 
transporte  de  ces  hauteurs  lyriques  dans  les  plaines  riantes  de  la  gaieté, 
devant  ces  ravissantes  folies  de  la  Cenerentola,  de  l'Italienne  à  Alger,  <lu 
Turc  en  Italie,  adorables  joyaux  qui  n'ont  rien  perdu  de  leur  premier 
éclat. 

Ne  citons  plus,  Messieurs  ;  laissons  parler  le  maître  lui-même,  juge 
bien  sévère  de  ses  œuvres  pour  la  place  qu'il  leur  assignait  dans  l'a- 
venir. 

A  l'une  de  ces  heures  d'épanchement  où  il  se  révélait  à  ses  amis, 
Rossini  nous  dit  un  jour  :  «  La  musique  est  un  art  fugitif;  ce  qu'ad- 
mirait un  siècle,  un  autre  siècle  le  dénigre,  et  le  courant  de  la  mode 
entraîne  bien  souvent  avec  lui  ce  qu'une  génération  croyait  impérissa- 
ble!... J'espère  pourtant  que  trois  choses  me  survivront:  le  troisième 
acte  à'Olhello,  le  second  de  Guillaume  Tell  et  fe  Barbier  de  Séoille  tout 
entier.  » 

Non,  grand  maître  I  ce  qui  te  survivra,  c'est  ton  œuvre  complète!... 
Pour  toi  pas  d'enthousiasme  d'école  ou  de  parti  !..  Tu  n'es  pas  le 
musicien  d'un  pays;  tu  es  et  tu  resteras  celui  de  toutes  les  nations!  car 
ta  renommée  est  de  celles  qui  franchissent  les  distances  comme  elles  tra- 
versent les  âges  et  bravent  les  caprices  du  temps. 

Pourquoi  Rossini  brisa-t-il  sa  lyre,  quand  elle  aurait  dû  résonner  long- 
temps encore?  Etrange  mystère  qu'il  ne  révéla  jamais!  Peut-être  pensa- 
t-il  avoir  assez  fait  pour  sa  gloire. . .  Triste  résolution  néanmoins  qui 
nous  priva  de  plus  d'un  chef-d'œuvre! 

Le  dieu  rentra  dans  son  temple,  et  ne  voulut  plus  être  que  le  meil- 
leur et  le  plus  charmant  des  hommes... 

Et  c'est  là  que  devient  plus  amère  la  douleur  des  nombreux  amis  qui 
entourent  ce  tombeau  ! . . . 

Qui  nous  rendra  cet  esprit  séduisant,  ce  sourire  affectueux  à  notre 
approche,  cet  accueil  bienveillant,  ces  causeries  intimes  auxquelles  on 
se  sentait  heureux  et  fier  d'être  admis? 

Et  quand  il  voulait  bien  nous  ouvrir  le  trésor  de  ses  souvenirs, 
quelle  mine  féconde  et  riche,  dont  chacun  de  nous  pouvait  rapporter 
quelques  parcelles  précieuses  ! 

Si  le  talent  de  Rossini  créa  des  fanatiques ,  les  qualités  de  son  cœur 
lui  valurent  de  vives  amitiés,  et  ces  amitiés  là  lui  sont  restées  fidèles 
jusqu'à  la  mort  ! 

Messieurs,  on  n'inspire  pas  de  tels  regrets  quand  on  ne  fut  qu'il- 
lustre ! 

Que  sa  grande  âme  plane  sur  nous  ! 

Que  ces  chants  sacrés  que  nous  venons  d'entendre,  derniers  échos  de 
son  génie  et  de  sa  foi,  accompagnent  son  entrée  dans  un  monde  meil- 
leur! 

L'immortalité  ne  commence  pas  pour  lui...,  elle  continue! 


(d)  Nos  lecteurs  ont  pu  remarquer,  dans  notre  dernier  numéro,  que 
par  une  inadvertance  d'impression ,  le  discours  de  M.  de  Sainl-Georges, 
reçu  trop  tard,  a  été  attribué  à  M.  Emile  Perrin. 


M.  Elwart  s'est  exprimé  ainsi  : 

Si  je  ne  considérais  que  ma  propre  faibles,se,  je  n'offrirais  au  grand 
artiste,  cause  d'un  deuil  universel,  que  le  tribut  de  mes  larmes  soli- 
taires.— Mais  c'est  au  nom  d'une  Ecole,  sur  les  progrès  de  laquelle  le 
génie  de  Rossini  a  exercé  une  action  puissante  que  je  viens  déposer  sur 
sa  tombe  l'expression  de  suprêmes  hommages  et  de  regrets  éternels. 

L'influence  de  Rossini,  Messieurs,  a  été  immense  sur  les  transforma- 
tions de  notre  art  dont  son  génie  a  reculé  les  limites.  —  Sa  muse, 
comme  la  colombe  de  l'arche,  est  descendue  sur  la  terre  au  moment 
où  l'Europe  décimée  par  une  guerre  de  Titans,  était  plongée  dans  une 
anxiété  profonde.  —  Elle  a  jeté  son  poétique  rameau  sur  le  passé, 
consolé  le  présent  et  donné  plus  d'espoir  en  l'avenir.  L'apparition  de  cet 
astre  mélodieux  a  lait  surgir  en  Italie,  puis  en  France,  de  brillants  sa- 
tellites qui,  rayonnant  de  sa  lumière,  se  sont  partagé  d'avance  une  par- 
tie des  palmes  de  son  immortalité. 

Sortez  de  vos  glorieux  tombeaux,  venez,  Bellini ,  Donizetti,  Hérold, 
Adolphe  Adam,  Pacini!  venez  confesser  ici  que  c'est  à  Ro.^sini  que  vous 
êtes  redevables  d'avoir  donné  à  vos  productions  la  vie,  la  forme  et  la 
couleur;  ces  trois  grandes  vertus  esthétiques  qui  constituent  la  beauté 
de  toute  œuvre  d'art.  Pourquoi  pleurer,  Messieurs,  sur  la  perte  de  ce 
grand  génie?  Depuis  plus  de  quarante  ans  déjà  l'immortalité  n'avail- 
elle  pas  ceint  son  front  de  sa  couronne  glorieuse,  lorsque  le  souffle  de 
la  mort  a  flétri  ses  lauriers  terrestres  ? 

Le  Conservatoire,  plus  que  toute  autre  institution  musicale ,  avait  le 
droit,  Messieurs,  d'exprimer  ici  son  admiration  pour  le  grand  artiste 
qui,  par  ses  œuvres  sublimes  et  si  variées,  fut  le  protesseur  moral  de 
ses  professeurs,  et  le  maître  favori  de  leurs  élèves  les  plus  acclamés. 

Rossini,  Messieurs,  possédait  une  qualité  bien  précieuse  :  il  aimait  la 
jeunesse;  et  lui,  qui  fut  toujours  jeune  par  son  charmant  esprit  et  son 
caractère  enjoué,  n'était  jamais  plus  heureux  que  lorsqu'il  se  voyait  en- 
touré des  jeunes  maîtres  de  notre  temps. 

On  ne  doit  pleurer.  Messieurs,  que  ceux  qui,  en  quittant  la  terre, 
meurent  tout  entiers!  —  mais  vous,  cher  regretté,  votre  nom  survivra  à 
toutes  les  révolutions  qui  pourront,  dans  l'avenir,  changer  la  face  de 
l'art. 

Comme  l'œuvre  de  Palestrina,  de  Pergolèse,  de  Bach,  de  Haendel,  de 
Mozart,  d'Haydn  et  de  Grétry,  votre  œuvre  traversera  la  nuit  des  temps, 
et  nos  arrière-neveux  se  réchaufferont  aux  rayons  lumineux  de  votre 
génie  immortel  ! 

Adieu,  cher  maître! 

Reposez  en  paix  dans  le  sein  de  Dieu  dont  vous  avez  sublimement 
célébré  la  toute -puissance  et  la  miséricorde  par  une  œvre  religieuse 
qui,  à  votre  insu,  aura  été  votre  testament  d'artiste  et  de  chrétien  I 

Adieu,  une  dernière  fois  I 


Mme  Rossini  a  été  vivement  touchée  de  l'hommage  rendu  à  son  il- 
lustre époux.  Dans  l'impossibilité  de  s'adresser  individuellement  à  cha- 
cun des  artistes  qui  ont  bien  voulu  y  prendre  part,  elle  leur  en  témoi- 
gne publiquement  sa  profonde  reconnaissance. 


Les  branches  de  laurier  tressées  en  couronne  et  déposées  sur  le  cercueil 
de  Rossini  le  jour  de  ses  obsèques  provenaient  de  deux  arbres  de  son 
jardin  de  Passy,  plantés  par  Méry  en  1853  :  leurs  boutures  avaient  été 
empruntées  aux  lauriers  du  tombeau  de  Virgile,  à  Naples,  et  du  tom- 
beau du  Tasse,  au  jardin  de  Saint-Onuphre. 


Des  manifestations  nombreuses  et  témoignant  toutes  d'une  admiration 
respectueuse  et  unanime  ont  eu  et  ont  encore  lieu,  dans  les  principales 
villes  de  l'Italie,  en  l'honneur  de  Rossini.  —  Le  gouvernement  italien  a 
décrété  qu'un  service  solennel  serait  célébré  aux  frais  de  l'Etat ,  à  la 
mémoire  de  l'illuslre  maestro,  et  qu'une  souscription  nationale  serait 
ouverte  pour  lui  élever,  dans  Santa-Croce,  un  monument  dont  le  mu- 
nicipe  de  Florence  s'est  empressé  d'offrir  l'emplacement.  —  A  Milan, 
une  Commission  présidée  par  Lauro  Rossi  a  pris  l'initiative  d'un  Con- 
cert funèbre  dont  le  produit  servira  de  base  à  une  plus  large  collecte 
ayant  pour  objet  d'ériger  dans  cette  ville  une  statue  au  grand  homme. 
—  Bologne  et  Pesaro,  héritières  de  Rossini,  suivent  l'exemple  de  la 
Lombardie.  —  Par  une  lettre  adressée  à  l'éditeur  Tito  Ricordi  et  destinée 
à  la  publicité.  Verdi  a  émis  le  vœu  que  «  les  compositeurs  italiens  les 
plus  distingués,  Mercadante  en  tête,  composassent  un  Requiem  qui  se- 
rait exécuté  à  San  Petronio,  de  Bologne,  le  jour  anniversaire  et  à  tous 
les  anniversaires  de  la  mort  du  grand  musicien.  »  Cette  messe,  qui  ne 
devrait  ni  prêter  à  la  spéculation,  ni  se  prêter  à  la  curiosité,  serait  dé- 
posée, dans  ce  but,  aux  archives  du  Conservatoire  de  Bologne.  —  Dans 
presque  tous  les  théâtres    lyriques   de   la   Péninsule,   au  Carcano,  de 


DE  PARIS 


383 


Milan,  notamment,  le  buste  [de  Rossini,  voilé  de  crfpe,  a  été  publi- 
quement couronné.  —  L'orchestre  du  théâtre  communal  de  Trieste, 
entre  autres  faits  de  ce  genre,  a  exécuté,  debout,  devant  l'assistance, 
également  debout  et  découverte,  la  symphonie  de  la  Gazza  Ladra,  tan- 
dis que  les  artistes  en  deuil  venaient  saluer  le  portrait  du  maître  sur  la 
scène  toute  tendue  de  noir.  —  Les  journaux  italiens  sont  remplis  des 
récits  de  ces  ovations  posthumes,  parmi  lesquelles  nous  avons  dû  forcé- 
ment choisir. 


La  députation  italienne  qui  a  assisté  avec  un  caractère  officiel  aux  ob- 
sèques de  Rossini  se  composait  de  M.  le  sénateur  comte  Amiani,  an- 
cien ministre  de  S.  S.  le  pape  Pie  [X,  de  M.  le  marquis  d'Ancona,  dé- 
puté de  Bologne  au  Parlement  italien,  de  M.  Liverani,  délégué  de  Pe- 
saro,  et  du  maestro  Vaccaj,  auteur  estimé  de  l'opéra  Romeo  e  Giuletta. 
M.  d'Ancona,  ainsi  que  nous  l'avons  dit,  a  porté  la  parole  au  nom  de  la 
députation,  en  s'excusant,  au  préalable,  de  son  peu  d'habitude  de  notre 
langue  :  son  discours,  aux  vues  larges  et  élevées,  développait  cette  thèse 
que  l'Italie,  en  donnant  Rossini  à  la  France,  était  quitte  envers  la 
France  qui  lui  avait  donné  l'unité  nationale. 


Des  villes  de  France,  après  Paris,  Rouen  a  été  la  première  à  rendre 
un  soleimel  hommage  d'outre-lombe  à  Rossini,  l'admirateur  et  l'ami  de 
son  glorieux  enfant,  Boïeldieu.  Guillaume  Tell  a  été  exécuté  avec  un  soin, 
un  luxe  de  mise  en  scène  et  d'interprétation  chorale  dignes  de  la  cir- 
constance. Après  la  lecture  de  strophes  de  M.  Henri  Brière,  une  riche 
couronne  a  été  posée  sur  le  buste  de  Rossini,  pendant  que  l'orchestre 
exécutait  la  prière  de  Mo'ise. 


Le  dernier  concert  populaire  a  été  également  témoin  d'une  ovation 
faite  à  la  mémoire  de  Rossini.  Après  l'andante  de  l'ouverture  de  Guillaume 
Tell,  après  la  pastorale  et  à  la  fin  de  l'ouverture,  spectateurs  et  musi- 
ciens se  sont  levés  en  masse  luttant  de  bravos  frénétiques,  et  le  his  a  été 
réclamé  avec  un  enthousiasme  indescriptible. 


Samedi,  jour  de  l'enterrement  de  Rossini,  le  Conservatoire  impé- 
rial de  musique  et  de  déclamation  a  été  fermé  par  ordre  du  ministre 
de  la  maison  de  l'Empereur  et  des  Beaux -Arts. 


Voici  le  texte  de  la  disposition  testamentaire  de  Rossini  en  faveur  de 
la  France  : 

«  Je  veux  qu'après  mon  décès  et  celui  de  mon  épouse,  il  soit  fondé 
à  perpétuité,  à  Paris,  et  exclusivement  pour  les  Français,  deux  prix,  de 
chacun  3,000  francs,  pour  être  distribués  annuellement  :  un  à  l'auteur 
d'une  composition  de  musique  religieuse  ou  lyrique,  lequel  devra  s'at- 
tacher principalement  ii  la  mélodie,  si  négligée  aujourd'hui;  l'autre  à 
l'auteur  des  paroles  (prose  ou  vers)  sur  lesquelles  devra  s'appliquer  la 
musique,  et  y  être  parfaitement  appropriées,  en  observant  les  lois  de  la 
morale  dont  les  écrivains  ne  tiennent  pas  toujours  assez  compte.  Ces 
productions  seront  soumises  à  l'examen  d'une  commission  spéciale  prise 
dans  l'Académie  de  Beaux-Arts  de  l'Institut,  qui  jugera  celui  des  con- 
currents qui  aura  mérité  le  prix  dit  Rossini,  qui  sera  décerné  en  séance 
publique  après  l'exécution  du  morceau,  soit  dans  le  local  de  l'Institut 
ou  au  Conservatoire. 

»  J'ai  désiré  laisser  à  la  France,  dont  j'ai  reçu  un  si  bienveillant  ac- 
cueil, ce  témoignage  de  ma  gratitude  et  de  mon  désir  de  voir  perfec- 
tionner un  art  auquel  j'ai  consacré  ma  vie.  G.  Rossini.  » 


CORRESPONDANCE. 


A  M.  le  directeur  de  ta  Revue  et  Gazette  musicale. 

Monsieur, 

Voulez-vous  me  donner  dans  votre  journal  l'hospitalité  que  je  n'ai  pu 
rencontrer  ailleurs?  Avant  la  représentation  des  Jumeaux  de  Bergame, 
j'avais  informé  par  une  lettre  M.  Jules  Prével ,  rédacteur  du  petit  cour- 
rier des  théâtres  au  Figaro,  «  que  la  dernière  répétition  ne  m'ayant  pas 
satisfait,  j'avais  notifié  à  la  Direction  que  la  pièce  serait  jouée  malgré 
moi  et  que  je  déclinais  la  responsabilité  de  cette  exhibition.  » 

Maintenant  vous  savez  que  je  n'ai  pu  retirer  définitivement  ma  pièce 
qu'après  deux  représentations  qui,  si  elles  n'avaient  pas  eu  lieu,  m'eus- 


sent épargné  les  quelques  .sévérités  de  la  critique,  sévérités  qu'a  dCi  par- 
tager mon  infortuné  collaborateur,  le  chevalier  de  Florian. 
Agréez  mes  cordiales  salutations. 

Ch.  Lecocq. 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 


;^*«  La  représentation  de  Guillaum£-Tell,  qui  devait  être  donnée,  au 
théâtre  impérial  de  l'Opéra,  à  l'occasion  des  obsèques  de  Rossini  et  que 
l'indisposition  de  Villaret  avait  dû  faire  ajourner,  a  eu  lieu  hier  au  bé- 
néfice de  la  Caisse  des  pensions  de  retraite  des  artistes  lyriques. 

^.'^  Lundi,  on  a  représenté  la  Fiancée  de  Corinlhe  et  le  Corsaire; 
mercredi  et  vendredi,  les  Huguenots.  —  Les  trois  premières  représenta- 
tions de  cette  reprise  ont  produit  le  maximum  de  la  recette,  c'est-à-dire 
qu'elles  ont  dépassé  12,000  francs. 

n:*jf  II  est  question  de  reprendre  aussi  lioberl  le  Diable  avec  Mmes  Car- 
valho  et  Niisson. 

«**  La  députation  de  Pesaro,  venue  à  Paris  pour  les  obsèques  de  Ros- 
sini, assistait  heir,  à  l'Opéra,  à  la  représentation  extraordinaire  de 
Guillaume  Tell,  dans  une  loge  que  M.  Perrin  lui  avait  offerte. 

i,*<f  Nous  avions  dit  que  Mme  Carvallio  avait  été  engagée  par  M.  Em. 
Perrin  pour  deux  ans;  c'est  pour  trois  ans  que  cet  engagement  a  été 
fait.  —  Celui  de  Mlle  Niisson  avait  été,  quelques  jours  avant,  renouvelé 
pour  un  an. 

»*:t  Hier  samedi  a  eu  lieu  au  théâtre  de  l'Opéra-Comique  la  première 
représentation  du  Corricolo,  opéra  de  MM.  Labiche  et  Delacour,  musique 
de  M.  Poise.  Nous  en  rendrons  compte  dimanche.  Mme  Cabel  y  jouant 
le  principal  rôle  de  femme,  c'est  Mlle  Cico  qui  a  pris  depuis  quelques 
jours  celui  d'Hélène  dans  le  Premier  Jour  de  bonheur. 

a,*4  Le  poëme  du  nouvel  opéra-comique  de  MM.  Meilhac  et  Nuitter, 
dont  J.  Offenbach  compose  la  musique,  a  été  lu  cette  semaine  aux  ar- 
tistes, et  voici  comment  les  rôles  ont  été  distribués  :  Valentin,  sous  le 
nom  de  Vert- Vert,  Capoul  ;  —  le  comte,  officier  de  dragons,  Barré  ;  — 
Bitaubin,  maître  de  danse,  Couderc  ;  —  Binet,  jardinier,  Sainte-Foy  ;  — 
Bellecour,  chanteur,  Ponchard  ;  —  Bergerac,  officier  de  dragons,  Potel  ; 
—  Friquet,  officier  de  dragons,  Leroy  ;  —  Maniquet,  directeur  de  théâtre, 
Bernard;  —  La  Corilla,  cantatrice,  Mmes  Girard;  -  Mimi,  pensionnaire, 
Cico; —  Mlle  Paturelle,  sous-maîtresse,  Révilly;  —  Batilde,  Moisset  ;  — 
Emma,  Tuai. 

»**  M.  Deloffre  vient  d'être  engagé  comme  chef  d'orchestre  par 
MM.  de  Leuven  et  Ritt.  Il  entrera  en  fonctions  le  i"  janvier  prochain. 
M.  Delofire  n'a  accepté  la  place  qu'à  la  condition  qu'une  pension  de 
retraite  serait  servie  à  son  prédécesseur,  M.  Tilmant,  vieilli  sous  le  harnais 
et  tombé  de  nouveau  malade. 

:j:*,s  Dimanche  et  mardi  le  directeur  de  théâtre  Lyrique  avait  eu  l'idée 
très-opportune  d'ajouter  à  la  repré.sentation  du  Barbier  un  intermède 
composé  d'œuvres  de  Rossini;  la  salle  était  comble. —Jeudi  on  a  donné 
la  première  représentation  de  la  reprise  d'//)%em'e  en  Tauricfe,  de  Gliick; 
nous  en  rendons  compte  aujourd'hui . 

^*^,  Le  théâtre  des  Bouffes-Parisiens  va  renouveler  en  grande  partie 
son  affiche  et  reprendre  trois  pièces  d'Ofifenbach:  Apothicaire  et  Perru- 
quier, Lischen  et  Fritzchen  et  M.  Choujleuri  restera  chez  lui.  —  On  a  mis 
à  l'étude  au  même  théâtre,  Jean  belle-face,  opéra  en  deux  actes,  paroles 
de  M.  de  Najac,  musique  de  M.  Louis  Deflfès. 

»*a,  L'Enfant  de  36  mères,  donné  mardi  au  théâtre  Déjazet  pour  les 
représentations  de  Darcier,  n'a  pas  été  favorablement  accueilli.  La  pièce 
est  loin  d'être  amusante.  Darcier  est  un  peu  trop  mûr  pour  jouer  les  enfants, 
et  quant  à  la  musique,  qui  est  de  M.  Déjazet  et  qui  paraît  faite  avec 
soin,  l'exécution  en  a  été  si  déplorable  qu'il  a  été  impossible  de  la 
juger. 

*%  Le  succès  constant  de  la  Périchole,  qui  réalise  4,000  francs  de  re- 
cette chaque  soir,  a  déterminé  le  directeur  des  Variétés  à  ne  pas  donner 
de  revue  cette  année.  Outre  diverses  pièces  à  l'étude,  on  s'occupe  d'une 
opérette  en  un  acte,  d'Ofifenbach,  destinée  aux  débuis  à  ce  théâtre  de 
Mlle  Zulma  Bouffar,   et  de  la  nouvelle  arrivée,  Mlle  Aimée. 

***  La  Commission  d'examen  a  autorisé  M.  Gille  à  garder  pour  son 
opérette  de  l'Athénée  le  titre  des  Horreurs  de  la  guerre.  —  On  la  répète 
activement. 

,1,*^,  La  Périchole  a  été  jouée  lundi  à  Lille.  Le  succès  a  été  très-grand 
et  Mlle  Garait  du  théâtre  des  Variétés,  en  ce  moment  en  congé,  en  a  eu 
sa  bonne  part.  Elle  a  été  charmante  dans  le  rôle  de  la  Périchole  et  a 
dû  répéter  la  romance  de  la  Lettre. — Les  couplets  de  Viqml\o( Les  Fem- 
mes), la  chanson  espagnole  «  II  grandira  »  et  tout  le  finale  du  premier 


384 


KEVUE  Ei  GAZETTE  MUSICALE  UE  PAKIS. 


acte  ont  été  chaudement  applaudis.— Le  directeur,  M.  Bertrand,  n'avait 
d'ailleurs  rien  négligé  pour  assurer  la  réussite; décors etcoslumesétaient 
de  la  plus  grande  exactitude  et  trè*  soignés.  —  Lille  est  la  première 
ville  de  province  qui  aura  représenté  la  Périchote. 

t*t  La  Poupée  de  Nuremberg,  d'Adolphe  Adam,  est  représentée  en  ce 
moment  avec  beaucoup  de  succès  au  théâtre  de  Gand  ;  l'interprétation 
de  cette  amusante  petite  pièce  ne  laisse  rien  à  désirer. 

t*t  L'ouverture  du  théâtre  Italien  de  Saint-Pétersbourg  s'est  faite  par 
Marta.  La  troupe  est  ainsi  composée  :  Prime  donne  :  Mmes  Lucca  (du  16 
novembre  au  28  décembre  1868);  Adelina  Patti  (du  43 janvier  1869  jus- 
qu'à la  fin  de  la  saison,  c'est-à-dire  jusqu'au  Lo  mars);  Fricci,  Volpini, 
Trebelli  et  Gall.  Seconde  donne  :  Mmes  Dali'  Anese,  Berini,  Perdrini. 
Primi  tenori:  Calzolai-i,  Stagne  (en  remplacement  de  Fraschini),  Marco 
et  Neri-Baraldi.  Secondi  tenori:  Rossi  et  Paltrinieri.  Primi  bariloni:  Stel- 
ler,  Graziani,  Gassier  et  Meo.  Primi  bassi  :  Angelini,  Bagagiolo.  Primo- 
basso-bu/fo  :  Zucchini.  Secondo  basso:  Forluna.  Chef  d'orchestre:  Vianesi. 
Régisseur  en  chef  :  Harris. 

*%  La  direction  des.  théâtres  impériaux  de  Russie  a  fait  as>^igner  Fras- 
chini en  inexécution  de  traité  et  lui  demande  un  dédit  de  80,000  francs 
pour  avoir  refusé  de  venir  chanter  à  Saint-Pétersbourg  comme  il  s'y 
était  engagé.  La  cause,  appelée  mercredi,  a  été  remise  à  huitaine.  M. 
Caraby  plaidera  pour  la  direction. 


NOUVELLES  DIVERSES. 


,*:,:  Jeudi  de  la  semaine  dernière,  chez  M.  le  comte  de  Nieuwerkerke, 
surintendant  des  beaux-arts,  M.  Membrée  a  lu  au  piano  quelques  frag- 
ments d'un  opéra  inédit  de  sa  composition  :  la  Filleule  des  Anges,  dont 
les  paroles  sont  de  M.  Foussier.  Le  succès  de  cette  audition,  à  laquelle 
assistaient  nombre  d'hommes  marquants  dans  la  musique  et  le  théâtre, 
a  été  très-accentué. 

^*^  Aujourd'hui  dimanche,  à  onze  heures  précises,  à  l'église  Sainte- 
Geneviève  (Panihéon),  Mme  de  Grandval  fait  exécuter  une  messe  de  sa 
composition.  Les  chœurs  et  l'orchestre  seront  dirigés  par  M.  Pasdeloup. 

^i*^  Mardi,  messe  solennelle  de  Sainte-Cécile  de  M.  Ambroise  Thomas, 
exécutée  à  Saint-Eustache  par  l'Association  des  artistes  musiciens,  sous 
la  direction  de  M.  George  Hainl,  avec  MlleNilsson  et  M.  Battaille  comme 
solistes.  Les  chœurs  seront  conduits  par  JIM.  Murand,  Steenmann  et 
Pickaërt;  le  grand  orgue  sera  tenu  par  M.  Edouard  Batiste.  Le  produit 
de  cette  solennité  musicale  est,  comme  ou  le  sait,  destiné  à  la  caisse  de 
secours  des  artistes  musiciens. 

^*4  Dimanche  6  décembre,  deuxième  exécution,  à  l'église  Saint-Séverin, 
à  10  heures  du  matin,  d'une  messe  composée  par  M.  Covin,  maître  de 
chapelle  de  la  paroisse. 

»*^  Voici  le  programme  du  septième  concert  populaire  de  musique 
classique,  qui  sera  donné  aujourd'hui,  à  2  heures,  au  cirque  Napoléon, 
sous  la  direction  de  J.  Pasdeloup  :  1°  Réfomiations-Sinfonie,  n°  3,  de 
Mendelssohn  (introduction,  allegro,  —  scherzo,  andante,  —  choral  de  Lu- 
ther, —  finale.)  ;  —  2°  adagio  du  septuor  de  Beethoven  (exécuté  par  M.  Gri- 
sez (clarinette),  Espeignet  (basson),  Mohr  (cor),  et  tous  les  instruments 
à  cordes);  — 3°  symphonie  en  mi  bémol  de  Mozart; —  i°  andante  et  va- 
riations de  Haydn;  — 3°  ouverture  du  Vaisseau-Fantôme  de  R.  Wagner. 

»■*«  M.  J.  Bonewitz  reprendra  le  samedi  3  décembre,  à  la  salle  Herz, 
ses  soirées  de  musique  de  chambre.  Le  programme  de  la  première  se 
compose  du  septuor  de  Humrael,  de  morceaux  de  Mozart  et  Mendelssohn, 
d'un  psaume  de  Martin  Luther,  d'un  duo  de  Kalkbrenner  pour  deux 
pianos,  exécuté  par  M.  Bonewitz  et  une  de  ses  jeunes  élèves,  d'un  trio 
de  M.  Bonewitz,  de  la  scène  Ah  !  perfido  de  Beethoven  et  de  deux  lieder 
de  Schubert,  chantés  par  Mlle  Gastoldi. 

»*,t  La  partition  de  la  Périchole  pour  piano  seul,  arrangée  par  Léon 
Roques,  vient  de  paraître  chez  les  éditeurs  Brandus  et  Dufour. 

j*j  L'Académie  des  beaux-arts,  dans  sa  séance  du  25  novembre,  a  élu 
M.  Charles  Blanc  à  la  place  d'académicien  libre,  vacante  par  suite  du 
décès  de  M.  le  comte  Waleswski . 

^*^  Dans  l'assemblée  géuérale  de  la  Société  des  auteurs,  compositeurs 
et  éditeurs  de  musique,  qui  a  eu  lieu  dimanche  au  Grand-Orient,  il  a 
été  voté,^  à  la  majorité  de  vingt-trois  voix,  qu'il  y  avait  lieu  de  reviser 
les  statuts.  —  La  commission  nommée  pour  formuler  uj  projet  à  cet 
égard  se  compose  de  MM.  Léo  Lespès,  Henriou,  Tourte,  Audray-Deshor- 
ties,  Avenel,  Bazzoni,  Marc-Constantin,  de  Villebichot,  Poizot,  auteurs  de 
paroles  et  compositeurs,  et  des  éditeurs  Gérard,  Gambogi  et  Vieillot.  — 
Quatre  membres  supplémentaires  ont  été  nommés:  ce  sont  MM.  A.  Boïel- 
dieu,  Javelot,  Ettling  et  Philibert.  —  Les  voix  se  sont  divisées  sur  deux 
éditeurs,  MM.  Lemoine  et  Lebailly,  ce  qui  exphque  pourquoi  un  qua- 
trième éditeur  ne  fait  pas  partie  de  la  commission.  —  Sa  première  réunion 
doit  avoir  lieu  le  2  décembre. 

**,  On  sait  que  la  ville  de  Hal  fait  élever  un  monument  à  Servais. 
M.  Godebski,  son  gendre,  à  qui  a  été  commandée   la  statue  qui  doit 


décorer  ce  monument,  est  le  même  artiste  qui  a  sculpté  le  beau  buste 
de  Rossini,  dont  le  marbre  ornait  la  chambre  de  l'illustre  maestro,  et 
dont  le  plâtre  a  été  cédé  à  MM.  Brandus  et  Dufour. 


ÉTRANGER 

^%  Londres.  —  Dinorah  a  été  donnée  samedi  et  marài  à  Covent- 
Garden,  avec  Mlle  lima  de  Murska  dans  le  rôle  principal,  Santley  dans 
celui  de  Hoël,  et  Bettmi  dans  celui  de  Corentin.  C'est  un  immense  suc- 
cès pour  ces  excellents  artistes,  principalement  peur  MUe  de  Murska, 
qui,  tout  en  lançant  ses  éblouissantes  vocalises,  ne  néglige  pas  la  partie 
dramatique  et  s'y  montre  l'égale  de  ses  plus  célèbres  devancières.  La  salle 
était  comble  à  ces  deux  représentations.  Lundi,  30,  clôture  de  la  saison. 
—  La  Grande- Duchesse  vient  d'être  donnée  au  Standard,  avec  les  mêmes 
artistes  qu'à  Covent-Garden,  il  y  a  quelques  mois  ;  le  succès  l'y  a  fidè- 
lement suivie.  —  Au  concert  de  samedi  dernier,  au  Crystal-Palace,  on  a 
exécuté  pour  la  première  fois  la  Symphonie  inédite  de  Schubert,  en  ut 
(n°  6),  dont  la  critique  p.îrle  avec  admiration,  et  qui  a  produit  un  très- 
grand  effet  sur  le  public.  —  Mlle  Minnie  Hauuk  a  chanté  cette  semaine 
les  rôles  de  la  comtesse  dans  les  Nozze  di  Figaro  et  de  Zerlina  dans  Don 
Juan.  Elle  y  a  obtenu  le  plus  éclatant  succès.  —  Lundi  prochain  elle  doit 
faire  ses  adieux  au  public  iiar  le  rôle  de  Marguerite  de  Faust. 

*%  Carlsruhe.  —  Mme  Viardot  quitte  Bade  pour  passer  ici  l'hiver. 
Nous  posséderons  donc,  quelque  temps  au  moins,  une  belle  école  de 
chant  qui,  jusqu'à  présent,  nous  a  fait  défaut. 

,*4  Weimar.  —  Joseph  Servais,  le  fils  du  célèbre  violoncelliste  belge, 
vient  d'être  nommé  violoncelle-solo  de  l'orchestre  grand-ducal,  11  occupe 
la  place  laissée  vacante  par  le  concertmeister  De  Swert,  appelé  à  Berlin 
il  y  a  quelques  mois  déjà. 

»*,  Berlin.-^VOpèra.  a  donné,  le  19,  les  Huguenots  pour  la  première  fois 
de  la  saison.  Mlle  Sessi  chantait  le  rôle  de  Marguerite;  elle  a  recueilli 
les  applaudis-semenLs  du  public  et  les  éloges  de  la  critique. 


t%  Valentino.  —  Le  succès  toujours  croissant  des  Concerts-Arban  va 
recevoir  encore  une  nouvelle  impulsion,  avec  le  magnifique  Festival  que 
l'infatigable  chef  d'orchestre  prépare  pour  le  vendredi  4  décembre.  Ce 
Festival  sera  entièrement  consacré  à  Rossini  ;  parmi  les  morceaux  que 
l'on  y  exécutera,  nous  citerons  :  les  grandes  fantaisies  (avec  chœurs)  sur 
Guillaume  Tell  et  Moise,  chantées  par  les  Enfants  de  Lutèce;  des  frag- 
ments du  Stabat  Mater,  chantés  par  des  lauréats  du  Conservatoire.  Ce 
programme  se  complétera  par  les  célèbres  ouvertures  de  l'illustre  maître. 


le  Directeur  :  S.  DDFOUB. 


Chez  G.  BRANDUS  et  S.  DCFOVR,  éditeurs,  103,  rue  de  Richelieu 


EDITIONS  NOUVELLES  DE 

La  Partition  pour  Chant  et  Piano 

De  la  tragédie  lyrique  en  quatre  actes 

Paroles  de  Guillard,  musique  de 

In-4°,  net  :  12  fr.        ^   i-i    U    v^    -tS^  In-8»,'net  :  7  fr. 

Alkan. —  Transcription  du  chœur  des  Scythes,  pour  le  piano,  i  fr.  50. 

La  Partition  arrangée  pour  le  Piano  seul 

De  l'opéra-bouffe 

LA    PERICHOLE 

Format  in-8°.  De  J.  OlTenbacli.  Prix  net  :  6  fr. 

Quadrille  nmiveau  par  MARX  sur  des  thèmes  de  la  Périchole. 

miaestro    E.     miUZIO, 

Ouverture  d'un  cours  de  chant  exclusivement  italien. 
Chez  lui,  rue  de  Luxembourg,  5,  au  i". 


IMPBinEBIE  CEKTSAIJB  DES  CHEHINS  DE  FBB  —  A.    CHAIZ  ET  C'°,  BUE  BEBGÈBB,   30,  *  P&BIS. 


BUREAUX    A    PARIS  :    BOULEVARD    DES    ITALIENS.  1 


3S'  Année. 


N'  49. 


ON   S'ABONNE  : 

Dans  les  Dâpnrtenicnts  et  û  l'Klrangcr, 

chez  tous  tes  Karchands  de  Musique,  les  Librairet. 

et  aux  Dureaux  der  SIessngeries  et  des  Postes. 


REVUE 


6  Décembre  1868. 


PRIX    DE    L'ABONNEMENT: 

Piiri» '•<   1-  pnr  111 

Uùliurtonirat»,  Belgique  et  Suisse...     ;i;  •■  ni. 

lïtninger. 3i  .r  ij. 

te  Journal  paraît  le  Dimaocbc. 


GAZETTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


1869 


PRIMES 


1869 


Offertes  aux  Abonnés  de  la  Revue  et  Gazette  musicale, 
A  l'occasion  du  renouvellement  de  l'année. 

6'  ANNÉE    DE  SON   EXISTENCE) 


DE    REQUIEM 

Avec  accompagnement  de  Piano.  Musique  tirée  des  différents  ouvrages  de 

BO^ISIMI 

Texte  latin  adapté  à  la  musique  par  Aulagnier 

ET  CONTEKANT  QUATORZE   MORCEAUX. 

OaTra^e  appronfé  par  Rossini. 

Et  exécuté  en  partie  à  ses  obsèques,  en  l'église  de  la  Trinité. 
■/  volume  in-S"  de  i13  pages. 


ALB  U  M 

COMPOSÉ  DE 

MORCEAUX  DE  PIANO  INÉDITS 

SAVOIR  : 

Méditation M.  Bergson. 

■/.attente,  romance  sans  paroles Paul  Bernard. 

EBijuisse Stephen  Heller. 

Elotlia.  mazurka  de  salon E.  Ketterer. 

Sicberzo  (de  Sonate) D.  Magnus. 

Harcbe  funètore E.  Stoeger. 

Cbarnson  polonaise E.  Wolff. 


L'n  beau  portrait  de  la  cantatrice 

Nouvellement  photographié  et  dessiné  sur  pierre  par  Desmaisons. 


Dans  le  courant  de  l'année  1869,  la  Gazette  musicale   donnera 
chaque  mois,  en  supplément,  un  morceau  de  Piano  ou  de  Chant. 

Au  moii  de  janvier  nos  Abonnés  recevront  comme  prime 
exceptionnelle  un  volume  format  grandr  in-S",  contenant: 

Vingt-quatre  PréIndes  pour  le  Piano 
COMPOSÉS   PAR  STEPHEN  HELLER 


SOMMAIRE.  —  Tliéâtre  impérial  de  l'Opéra-Comique  :  le  Corricolo,  opéra- 
comique  en  trois  actes,  paroles  de  MM.  Labiche  et  Delacour,  musique  de  M. 
Ferdinand  Poise,  par  Paul  Bernard.  —  Études  sur  Charles-Marie  de 
Weber  (troisième   partie,  10°  article),    par  Edmond   IVenkomin.  —  La 

Semaine  religieuse.  —  Nouvelles  des  théâtres  lyriques.  —  Nouvelles  diverses. 
—  Annonces. 


THÉÂTRE  mPERIÂL  DE  L'OPÉRÂ-COmQDE. 

KiB  COBBlCOliO, 

Opcra-comique  en  trois  actes,  paroles  de  MM.  Labiche  et 
Delacour,  musique  de  M.  Ferdinand  Poise. 

(Première  représentation  le  28  novembre  1868.) 

Je  ne  vou.s  dirai  pas  ce  que  c'est  qu'un  «  corricolo.  »  Alexandre 
Dumas  nous  l'a  appris  dans  ses  inimitables  causeries  sur  l'Italie, 
et  nous  savons  tous  à  l'en  croire  que  ce  véhicule  était  à  peu  de 
chose  près  à  Naples  ce  que  le  coucou  fut  si  longtemps  à  Paris. 
L'un  comme  l'autre,  renversés  par  la  ci-silisation  moderne,  sont 
passés  à  l'état  légendaire,  et  il  faut  vraiment  aller  à  l'Opéra- 
Comique  pour  en  retrouver  quelque  vestige. 

MM.  Labiche  et  Delacour  se  sont,  il  paraît,  voués  aux  pièces 
voyageuses,  puisque,  à  leur  Voyage  en  Chine,  d'heureuse  mémoire, 
ils  font  succéder  aujourd'hui  un  imbroglio  dont  le  principal  inci- 
dent repose  sur  un  ctmflit  de  voitures,  et  qui  se  déroule  cahin- 
caha  à  travers  les  plaines  de  la  Lombardie. 

En  quelques  mots,  voici  ce  dont  il  s'agit  : 

Un  peintre  français,  quoique  marié  à  une  jeune  femme  char- 
mante, est  allé  en  .Italie  faire  de  l'art  et  autre  chose  encore  ,  si 
l'on  en  croit  les  bruits  qui  parviennent  jusqu'aux  oreilles  de  la 
pauvre  délaissée.  Décidée  à  savoir  à  quoi  s'en  tenir,  celle-ci  fran- 
chit les  monts,  ayant  pour  porte-respect  son  intendant  déguisé 
en  vieux  général  et  qu'elle  présente  comme  son  oncle.  Dans  une 
auberge,  elle  fait  la  rencontre  de  son  mari  fort  occupé  à  courir 
après  une  cantatrice  dont  il  s'est  épris,  mais  pour  se  venger  elle 
feint  de  ne  point  le  connaître,  et  se  faisant  passer  pour  demoi- 
selle, accepte  les  soins  d'un  ami  de  son  volage  époux.  C'est  alors 


386 


KEVUE  ET  GAZE'ITE  MUSICALE 


que  celui-ci,  pour  empfclier  la  fuite  de  sa  femme,  casse  une 
roue  du  corricolo  qui  doit  l'emmiener;  le  jeune  soupirant  en  em- 
prunte une  à  son  tour  à  celui  du  mari  pour  reconstituer  le  sien, 
et  en  fin  de  compte,  l'infidèle  reste  en  butte  aux  quolibets  de  tout 
le  village  pendant  que  le  couple  fugitif  s'envole  du  côté  de  Venise. 

C'est  à  Bergame  qu'on  se  retrouve,  et  là  je  renonce  à  vous  ra- 
conter toutes  les  péripéties  qui  se  présentent.  Un  podestat  comme 
il  a  dû  en  exister  fort  peu,  un  véritable  podestat  d'opéra-comique, 
prend  le  dé  de  l'action  et  remplit  le  rôle  du  Deus  ex  machina.  Il 
lui  faut  six  mille  sequins,  à  ce  pauvre  podestat,  pour  acquitter 
le  tribut  que  l'on  doit  à  Venise,  et,  sous  prétexte  de  rançonner  les 
voyageurs  qui  passent  par  Bergame,  il  arrête  la  jeune  femme  et 
son  cavalier,  il  arrête  le  faux  oncle,  il  arrête  le  mari.  Ce  financier 
éméi'ite  a  trouvé  un  singulier  moyen  de  remplir  les  caisses  de  la 
municipalité.  Il  a  rédigé  un  tarif  où  toutes  les  actions  de  la  vie 
sont  soumises  à  un  droit.  Les  déclarations  d'amour,  les  sérénades, 
les  soufflets  môme,  tout  se  paie,  et,  grâce  à  cette  idée  lumineuse, 
il  espère  pouvoir  bientôt  contenter  l'insatiable  Venise.  Nos  person- 
nages, du  reste,  lui  donnent  parfaitement  la  réplique.  Le  mari, 
sachant  qu'on  court  après  une  chanteuse  qui  s'est  enfuie  avec  le 
neveu  du  podestat,  fait  passer  sa  femme  pour  elle,  mais  le  jeune 
soupirant  à  son  tour,  dénonce  le  pauvre  mari  comme  l'imprésario 
de  la  troupe.  Imprésario,  d'accord,  dit  ce  dernier;  puis  il  ré- 
clame le  jeune  homme  comme  premier  ténor  et  le  faux  oncle 
comme  basse-taille.  Les  voilà  tous  en  prison. 

Le  dernier  acte  nous  les  montre  faisant  une  répétition  sous  les 
yeux  môme  de  l'autorité,  qui  veut  leur  faire  donner  une  répré- 
sentation, toujours  au  bénéfice  des  six  mille  sequins.  Tout  en 
répétant,  ils  pensent  à  s'évader;  mais  la  Providence,  qui  n'aban- 
donne jamais  le  dénoiîment  d'un  opéra-comique,  veille  sur  eux, 
Dieu  merci  !  et,  grâce  à  l'intervention  de  Venise  elle-même,  les 
voilà  délivrés.  La  jeune  femme  pardonne,  le  mari  en  est  quitte 
pour  la  peur,  et  tout  le  monde  est  content,  sauf  toutefois  le  pau- 
vre amoureux  qui  n'a  servi  que  d'amorce  et  dont  je  n'apprécie 
pas  bien  la  récompense. 

La  pièce  est  gaie  et  fourmille  de  détails  plaisants.  On  sent, 
comme  dans  le  voyage  en  Chine,  la  griffe  des  vaudevillistes. 
Peut-être  la  sent-on  trop,  car  cela  n'est  pas  favorable  au  musi- 
cien. Ce  qui  manque  en  somme  à  ce  nouvel  ouvrage,  c'est  un 
intérêt  soutenu,  c'est  un  nœud  réel  à  l'action.  Pendant  trois  actes 
la  situation  est  la  même  et  ne  saurait  avoir  d'autre  solution. 
Aussi,  la  fatigue  prend-elle  le  dessus,  à  un  moment  donné,  et  les 
plaisanteries  un  peu  surannées  du  podestat  ont-elles  beaucoup  de 
peine  à  en  triompher. 

Je  viens  de  le  faire  pressentir,  la  tâche  du  musicien  était  un 
peu  ingrate;  sauf  deux  ou  trois  morceaux  habilement  triturés  au 
point  de  vue  musical,  le  reste  des  situations  prêtait  peu  à  l'agen- 
cement lyrique.  Il  faut  reconnaître  que  M.  Poise  s'est  tiré  fort 
habilement  de  cette  épreuve  difficile.  Il  est  du  nombre  de  ces  com- 
positeurs que  l'on  pourrait  comparer  à  ces  causeurs  aimables  au- 
près desquels  n'existe  pas  l'ennui,  et  qui  savent  donner  du  charme 
aux  choses  les  plus  ordinaires.  Sa  musique,  facilement  faite,  sem- 
ble taillée  à  grands  coups  de  ciseaux  dans  une  étoffe  riche  et 
brillante.  Elle  participe  de  l'école  charmante  de  notre  adorable 
Adolphe  Adam.  M.  Poise  était  du  reste  un  élève  chéri  du  maître, 
et  l'on  retrouve  souvent  en  lui  la  touche  délicate  et  sentimentale 
de  l'auteur  du  Chalet.  Quelques  harmonies  finement  ciselées,  une 
mélodie  constante  et  essentiellement  gracieuse,  voilà  leurs  points 
de  contact.  Un  peu  de  faiblesse  de  facture,  une  orchestration  bien 
faite  mais  sans  recherche,  voilà  au  contraire  ce  qui  établit  une 
différence  entre  le  maître  et  l'élève.  Patience!  M.  Poise  n'en  est 
encore  qu'à  son  premier  ouvrage  en  trois  actes. 

L'ouverture,  fidèle  aux  traditions  de  l'opéra-comique,  fait  enten- 


dre tout  d'abord  quelques  motifs  principaux  de  la  pièce  ;  j'y  ai 
remarqué  un  très-joli  solo  de  cor  anglais,  tiré  d'un  duo  du  second 
acte.  J'aime  beaucoup  toute  l'introduction  formée  d'un  chœur  vil- 
lageois et  d'une  petite  sayiiette  entre  deux  fiancés.  C'est  frais  et 
pimpant,  joyeux  et  distingué.  Beaucoup  de  jolies  choses  se  pré- 
sentent maintenant  coup  sur  coup  :  des  couplets  très-fins,  chantés 
par  Mme  Cabel  :  Un  baiser  par-ci ,  par-là  ;  d'autres  couplets  dans 
la  bouche  de  Mlle  Heilbron,  dont  le  refrain  :  C'est  indiscret,  ofl're 
une  gracieuse  terminaison;  l'air  du  Corricolo;  un  duo  entre  Lau- 
rent et  Barré  : 

Ta,  ta,  ta,  je  le  dis, 
C'est  encore  une  cousine. 

Et  enfin  une  très-jolie  romance,  adorablement  dite  par  Barré, 
certainement  la  plus  franche  inspiration  de  la  partition  et  aussi  la 
plus  suave,  sur  ces  paroles  : 

Faut-il  que  sitôt  on  oublie. 

La  première  phrase  en  est  très-nouvelle;  elle  procède  par  une 
note  longuement  répétée  et  d'un  elfet  vraiment  original. 

On  me  permettra  de  ne  citer,  dans  le  second  acte,  que  le  sex- 
tuor en  mi  majeur,  morceau  capital  et  fort  habilement  traité,  dans 
lequel  ces  mots  :  C'est  le  tarif!  reviennent  chaque  fois  d'une  ma- 
nière plus  ingénieuse  et  plus  piquante.  Voilà  qui  fait  le  plus  grand 
hoimeur  à  M.  Poise;  c'est  le  morceau  d'ensemble  de  la  partition  le 
mieux  réussi. 

Le  troisième  acte  renferme  un  duetto  des  deux  femmes,  des 
couplets  de  Sainte-Foy,  un  duo  entre  Mme  Cabel  et  Barré,  et  enfin 
le  grand  morceau  de  la  répétition  basé  sur  le  motif  de  l'abre 
d'Eglantine  : 

11  pleut,  il  pleut,  bergère.  ^ 

Ce  motif  populaire  est  curieusement  agencé  et  modulé.  Il  est 
en  outre  rehaussé  de  délicates  et  brillantes  variations  comme 
Mme  Cabel  sait  les  gazouiller.  Cela  rappelle  pour  la  forme  les  va- 
riations du  Toréador;  nous  leur  souhaitons  le  même  succès. 

Dirai-je  que,  dans  le  courant  du  premier  acte,  on  a  entendu  pas- 
ser dans  la  salle  comme  un  écho  des  Hirondelles,  de  Félicien  David, 
et  qu'au  second  acte  une  certaine  sérénade  a  fait  penser  à  Don 
Pasquale?. . . 

Si  je  le  dis,  je  n'en  adresserai  pas  moins  tous  mes  compliments 
à  M.  Poise,  en  l'engageant  toutefois  pour  l'avenir  à  choisir  des 
livrets  dans  lesquels  l'élément  tendre  soit  plus  développé  que  dans 
le  Corricolo.  A  en  croire  le  souvenir  que  m'ont  laissé  ses  œuvres 
antérieures,  la  corde  sentimentale  serait  en  lui  l'une  des  plus  com- 
plètes et  des  plus  naturelles.  Les  Absents,  Don  Pèdre  sont  là  pour 
le  prouver.  Bonsoir  voisin  vient  montrer  dans  quelles  proportions 
l'élément  comique  peut  venir  s'y  joindre. 

L'exécution  générale  de  l'ouvrage  est  convenable,  comme  dans 
un  théâtre  qui  se  respecte.  Les  honnem-s  de  la  partie  scénique 
reviennent  à  Sainte-Foy,  qui,  dans  le  rôle  du  podestat,  s'est  véri- 
tablement surpassé.  Mme  Cabel  est  toujours  le  rossignol  de  la  salle 
Favart  ;  Mlle  Heilbron  me  semble  en  voie  de  progrès  ;  je  la  crois 
appelée  à  rendre  de  réels  services.  Prilleux  parle  toujours  comme 
une  trompette  ;  c'est  drôle  quelquefois.  M.  Barré,  le  baryton  élé- 
gant, est  décidément  un  enfant  gâté  du  public  ;  les  bis  et  les  ap- 
plaudissements ne  lui  font  jamais  défaut.  M.  Laurent,  transfuge 
des  Fantaisies-Parisiennes,  débutait  dans  le  rôle  du  ténor.  Sa  voix 
est  fraîche  et  agréable,  mais  rien  pour  le  reste  ne  s'élève  au-dessus 
de  l'ordinaire.  Attendons  une  seconde  épreuve  pour  voir  s'il  se 
dessinera  en  lui  un  peu  de  personnaUlé. 

L'orchestre  a  fait  de  son  mieux  en  attendant  son  nouveau  chef, 
dont  nous  félicitons  grandement  la  direction  de  l'Opéra-Comique 
de  s'être  assuré  le  concours.  Le  passé  de  M.  Deloffre    répond  de 


DE  PARIS. 


387 


l'avenir.  Les  auteurs  ne  pourront   que  se    fùliciter  do    voit'   leurs 
intérêts  l'emis  en  de  si  vaillantes  mains. 

La  mise  en  scène  et  les  décors  qui  ont  été  brossés  par  MM. 
Rubé  et  Chaperon,  sont  de  tout  point  dignes  de  l'Opéra-Comique. 

Disons  enfin  que  si  le  Corricolo  ne  fournit  pas  un  aussi  long 
trajet  que  le  Voyage  en  Chine,  il  n'en  est  pas  moins  vrai  que 
MM.  Labiche  et  Delacour  sont  de  fort  agréables  compagnons  de 
route.  Aussi,  dès  aujourd'hui,  je  m'inscris  comme  excursionniste 
pour  leur  premier  train  de  plaisir.  Je  'souhaite  bien  sincèrement 
que  M.  Poise  en  fasse  partie. 

Paul  BERNARD. 


ETUDES  SDK  CHÂRLES-fflÂRIG  DE  WEBER, 

D'après    la    blograpUic    écrite    par    son    tilti. 


TROISIEME    PARTIE, 

{10"  article)  (1). 

Aux  premiers  beaux  jours  du  printemps  de  1822,  Weber  s'ins- 
talla dans  son  cottage  d'Hosterwitz,  pour  y  goûter  un  repos  dont 
il  avait  grand  besoin  après  son  séjour  à  Vienne.  Il  se  mit  aussitôt 
à  travailler  à  Euryanthe,  qu'il  avait  promis  de  livrer  au  commen- 
cement de  l'année  suivante;  et,  selon  sa  coutume,  il  ne  suivit 
pas  l'ordre  du  libretto ,  prenant  au  hasard  les  fragments  qui  lui 
convenaient  :  c'est  ainsi  que  l'air  d'Adolar,  Je  vais  la  voir,  et  le 
duo  entre  Eglanline  et  Lysiart,  au  second  acte,  furent  composés 
en  premier.  Vinrent  ensuite  :  le  chœur  d'introduction  du  premier 
acte,  le  lécitatif  Eh  bien,  tu  sais  quel  est  le  beau  séjour,  et  l'en- 
semble qui  suit,  portant  la  date  du  14  juin;  puis  la  romance 
Qu'il  m'est  doux,  charmants  rivages  et  le  chœur  Gloire  à  son  nom; 
enfin  il  compléta  le  premier  acte,  à  l'exception  du  final,  par  la 
vision,  le  duo  Maintenant,  je  dois  tout  craindre  (27  juillet),  l'air 
d'Eglantine,  Ah!  pour  elle  il  a  pu  me  fuir,  et  la  cavatine  Le  flot 
soupire  (24  octobre). 

En  outre  de  ces  fragments,  il  composa  une  fanfare  pour  le  régi- 
ment des  hussards  noirs ,  qu'il  introduisit  plus  tard  dans  le  pre- 
mier final  A'Euryanthe ,  et  il  refit  son  grand  concerto  pour  bas- 
son. Une  cantate  pour  le  mariage  du  prince  Jean,  qui  obtint  un 
Irès-grand  succès,  l'occupa  durant  les  derniers  mois  de  l'année. 

Le  retour  d'Hosterwitz  eut  lieu  dès  les  premiers  jours  de  l'au- 
tomne ,  à  cause  d'un  séjour  que  Spontini  fit  à  Dresde  vers  cette 
époque.  Weber  s'efforça  de  le  recevoir  dignement;  il  lui  fit  les 
honneurs  dé  la  cour  et  de  la  ville,  et  réunit  plusieurs  fois  chez  lui, 
en  son  honneur,  le  cénacle  qui  composait  sa  société  habituelle.  On 
sait  que  ce  cercle  comprenait  toutes  les  illustrations  littéraires  et 
musicales  de  Dresde.  Le  poëte  Théodoie  Hell,  qui  en  était  l'un  des 
principaux  fidèles,  a  tracé  de  l'une  de  ses  réunions,  tenue  chez  le 
restaurateur  Chiapone,  un  récit  charmant,  dont  nous  ne  pouvons 
nous  empêcher  d'extraire  un  fragment  relatif  à  Weber,  parce  que 
ce  fragment  peint  son  caractère  et  aussi  ses  petites  faiblesses.  La 
piété  filiale  de  Mas  de  Weber  n'a  pas  craint  de  l'introduire  dans 
son  ouvrage;  nous  ne  serons  donc  pas  accusé  d'un  crime  de  lèse- 
génie  en  le  reproduisant  : 

«  Je  mentirais,  —  ainsi  s'exprime  Théodore  Hell,  —  en  disant 
que  la  conversation  resta  longtemps  dans  les  bornes  de  la  plus 
stricte  convenance.  Weber  ne  l'entendait  pas  ainsi.  Quand  il  le 
fallait,  il  pouvait  être  sérieux.  Mais  quand  les  circonstances  lui 
permettaient  de  se  laisser  aller  à  son  joyeux  naturel ,  il  se  don- 
nait tout  entier  ;  il  devenait  enfant   et  communiquait  sa   bonne 


humeur  à  toute  l'assistance.  C'était  un  feu  d'artificede  bons  mots 
et  do  traits  d'esprit  marqués  toutefois  au  coin  de  la  plus  grande 
bienveillance  . .  Il  faisait  malheureusement,  s<)us  ce  rapport,  une 
exception  à  l'endroit  de  Rossini,  et  c'est  dans  cette  seule  circons- 
tance que  le  grand  homme  se  montra  petit.  A  l'égard  de  Rossini, 
il  demeura  et  voulut  demeurer  aveugle.  Il  ne  convint  jamais  des 
beautés  que  renferment  les  ouvrages  de  ce  maître...  Bien  plus, 
le  peu  d'estime  de  Weber  pour  la  musique  italienne  moderne ,  et 
en  particulier  pour  celle  de  Rossini,  lui  mit  maintes  fois  la  plume 
du  critique  à  la  main,  notamment  un  jour,  oià,  dans  sa  mauvaise 
humeur,  il  parodia  le  sermon  du  capucin,  de  Schiller,  pour  lan- 
cer tous  ses  sarcasmes  à  la  face  du  cygne  de  Pesaro.  Je  le  dis 
hautement  :  c'était  indigne  de  lui,  et  cette  action  est  à  mes  yeux, 
une  tache  sur  sa  mémoire,  quels  que  soient  le  respect  et  l'admiration 
qu'elle  m'inspire...  Dans  la  suite,  il  m'a  pourtant  semblé  que  le 
Barbier  avait  trouvé  grâce  auprès  de  lui. . .  Ce  jour-là,  chez  Chia- 
pone, la  discussion  fut  encore  plus  chaude  que  de  coutume...  » 

Il  est  à  noter  que  Spontini,  pendant  son  séjour  k  Dresde,  com- 
muniqua à  Weber  les  premiers  journaux  français  qui  avaient 
parlé  de  ses  œuvres  ;  c'étaient  le  Journal  des  Débats  et  le  Courrier 
des  Spectacles.  Ils  appelaient  l'attention  des  musiciens  sur  Ylnvi- 
tation  à  la  valse,  ou  plutôt  \' Introduction  à  la  valse.  Ces  articles, 
fort  élogieux,  causèrent  une  grande  joie  à  Weber. 

Cependant  la  composition  d'Euryanthe  avançait,  malgré  les  sur- 
croîts de  travaux  occasionnés  par  une  grave  maladie  de  Morlacchi; 
de  son  côté,  l'autre  directeur,  Schubert,  se  mourait  depuis  déjà 
plusieurs  mois  ;  de  sorte  que  leurs  tâches  respectives  retombaient 
sur  Weber  qui  menait  de  front  :  l'église,  la  chambre  royale,  les 
concerts,  le  théâtre  italien  et  l'opéra  allemand.  Le  peu  de  temps 
que  ces  diverses  fonctions  lui  laissaient  de  libre,  il  l'employait  à 
composer.  Le  matin,  il  écrivait  ses  idées,  mais  de  telle  sorte  que 
lui  seul  pouvait  s'y  reconnaître  ;  au  point  que  lorsqu'on  voulut, 
après  sa  mort,  mettre  au  jour  ses  Trois  Pintos,  qui  étaient  es- 
quissés de  cette  façon,  Marschner,  puis  Meyerbeer,  chargés  de  com- 
pléter la  partition,  durent  y  renoncer,  n'arrivant  pas  à  deviner  les 
intentions  de  l'auteur;  à  tout  moment  ils  étaient  déroutés.  Ainsi 
que  nous  l'avons  déjà  dit,  en  effet,  Weber  n'écrivait  un  morceau 
que  lorsqu'il  était  complètement  terminé  dans  son  esprit,  et  alors 
il  lui  sufTisait  de  quelques  indications,  —  vagues  pour  tout  autre, 

—  pour  se  retrouver  quand  venait  le  moment  d'orchestrer.  Cela 
est  si  vrai,  que  beaucoup  de  musiciens  ont  déclaré  avoir  entendu 
jouer  à  Weber,  sur  ses  partitions  ainsi  préparées ,  des  fragments 
très-longs  de  ses  ouvrages  avec  toutes  les  intentions,  toutes  les 
nuances  et  tous  les  détails  qu'on  y  remarqua  dans  la  suite.  — 
Dans  la  journée,  il  se  promenait  plusieurs  heures  durant  les- 
quelles il  composait.  Le  soir,  il  orchestrait.  Pour  donner  une  idée 
de  la  célérité  avec  laquelle  il  accomplissait  ce  dernier  travail,  il 
nous  suffira  de  dire  que,  bien  qu'il  ne  pût  y  consacrer  que  bien 
peu  d'instants  chaque  soir,  le  premier  acte  d'Euryanthe  fut  or- 
chestré en  douze  jours,  le  second  en  treize,  le  troisième  en  quinze. 

—  Ajoutons,  pour  compléter  ce  tableau  de  la  manière  de  travail- 
ler de  W^ebçr,  que  bien  qu'il  considérât  un  morceau  comme  par- 
fait, quand  il  l'écrivait,  il  ne  faisait  aucune  difficulté  pour  y  in- 
troduire des  changements,  sur  l'avis  de  personnes  compétentes  ; 
par  exemple,  l'allégro  :  Trompeurs  attraits,  soyez  maudits,  du  se- 
cond final  d'Euryanthe,  ne  vint  qu'à  la  suite  d'un  troisième  rema- 
niement, et  le  motif  de  l'apparition  d'Emma  fut  introduit  dans 
l'ouverture  aux  dernières  répétitions  de  l'ouvrage  à  Vienne. 

Un  remaniement,  dont  l'opportunité  se  faisait  bien  autrement 
sentir,  c'était  celui  du  libretto  tout  entier,  dont  le  manque  absolu 
de  valeur  et  d'intérêt  s'accentuait  davantage  à  mesure  que  Weber 
avançait  dans  son  travail  de  composition.  Ce  n'était  pourtant  pas 
faute  d'avoir  été   remanié  qu'on  y  remarquait  d'aussi  nombreuses 


388 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


imperfections  ;  car  Mme  de''Chezy  ne  l'avait  pas  refait  moins  de 
neuf  fois.  La  destinée  d'Euryanthe  fut  d'ailleurs  d'être  remanié 
jusqu'au  jour  même  de  son  apparition.  Les  poètes  Tiek  et  Fors- 
ter,  auxquels  Weber  soumit  le  cas  pendant,  déclinèrent  le  soin  de 
le  résoudre,  ainsi  qu'il  les  en  priait  ;  ils  donnèrent  leur  avis, 
mais  ce  fut  tout;  Eioryanthe  demeura  donc,  comme  devant,  dans 
ses  données  essentielles,  et  le  maître  se  remit  à  composer  sur  les 
vers  de  Mme  de  Cliezy. 

Sur  la  fin  de  l'année,  une  bonne  nouvelle  parvint  à  Weber. 
Après  une  glorieuse  carrière  de  dix-huit  mois,  le  Freischutz  allait 
être  représenté  pour  la  cinquantième  fois  à  Berlin,  et  à  cette  oc- 
casion tous  les  cercles  littéraii'es  et  musicaux  de  cette  ville  pré- 
paraient une  manifestation  éclatante  en  l'honneur  du  composi- 
teur. Weber,  surchargé  de  travaux,  dut  refuser,  à  son  grand  regret, 
l'invitation  qui  lui  fut  faite  d'y  assister,  et  il  dut  se  contenter  d'une 
lettre  officielle  de  M.  de  Briihl,  accompagnée  d'une  gratilication 
de...  cent  Ihalers!  — Il  est  bon  de  noter  que  l'ouvrage  avait  rap- 
porté jusqu'à  ce  jour  plus  de  trente  mille  ihalers  à  l' administra- 
tion. —  La  lettre  fut  bien  accueillie;  quant  à  la  gratification, 
Weber  la  refusa,  cela  va  sans  dire. 

Dans  les  premiers  mois  de  l'année  1823  sa  fièvre  de  composi- 
tion se  ralentit  un  peu.  Morlacchi  et  Schubert  étaient  toujours 
très-malades.  Weber,  quoique  soufl'rant  aussi ,  succombait  donc 
sous  la  charge  des  occupations  de  leur  ressort.  En  outre,  il  s'ap- 
pliquait à  monter  dignement  le  Fidelio  de  Beethoven  ,  qui  devait 
servir  de  début  à  Wilhelmine  Schrœder,  engagée  par  lui  lors  de 
son  dernier  séjour  à  Vienne.  Fidelio  était  à  ses  yeux  le  chef-d'œu- 
vre des  chefs-d'œuvre,  et  il  avait  même  coutume  de  dire  que 
c'était  une  des  œuvres  sublimes  de  l'esprit  humain.  Pour  que  rien 
ne  manquât  à  l'éclat  de  la  représentation  qu'il  se  proposait  d'en 
donner,  il  se  mit  en  relation  avec  Beethoven.  Les  deux  grands 
hommes  échangèrent  alors  plusieurs  lettres  au  sujet  de  cet  ou- 
vrage. Cette  correspondance  lenfermait  sans  doute  de  précieux 
renseignements;  malheureusement,  il  ne  nous  est  pas  doimé  d'en 
profiter,  car  les  lettres  qui  la  composaient  n'ont  jamais  été  re- 
trouvées. En  tous  cas,  ces  rapports  établirent  entre  Beethoven  et 
Weber  un  commerce  d'amitié  sincère  et  solide,  qui  se  cimenta 
davantage  encore  lorsqu'ils  se  connurent  à  Vienne.  Ces  détails 
font  tomber  la  croyance  généralement  accréditée  d'une  rivalité  qui 
aurait  existé  entre  les  deux  maîtres.  Max  de  Weber  dit  à  ce  su- 
jet :  «  Tout  ce  que  Schindler  et  d'autres  ont  écrit  relativement  îi 
des  ditférends  qui  se  seraient  élevés  entre  Beethoven  et  Weber  est 
de  pure  invention  !  » 

Fidelio  fut  représenté  le  29  avril.  Un  incident  grotesque,  —  un 
chien  traversant  la  scène  au  moment  le  plus  pathétique,  —  faillit 
compromettre  le  succès,  à  cause  du  fou  rire  qui  s'empara  du  pu- 
blic et  des  artistes.  L'ouvrage  fut  apprécié  à  Dresde  mieux  que 
partout  ailleurs.  Après  Fidelio,  Weber  réussit  à  faire  représenter 
son  Abou-Hassan,  pour  les  débuts  de  l'excellente  Mme  Haase,  et, 
à  l'occasion  d'une  visite  et  sur  la  demande  expresse  du  roi  Louis 
de  Bavière,  Preciosa.  —  Joconde,  de  Nicolo,  fut  également  monté 
par  lui  dans  ce  temps. 

Pendant'  les  rares  loisirs  que  lui  laissaient  ces  importantes  créa- 
tions, Weber  travaillait  à  son  Euryanthe,  dont  on  hâtait,  de 
Vienne,  l'achèvement.  Le  7  mars,  il  écrivit  la  grande  scène  de 
Lysiart,  par  laquelle  s'ouvre  le  second  acte,  puis  le  22  du  même 
mois  le  duo  d'Adolar  et  d'Euryanthe  au  troisième  acte,  et  peu  de 
jours  ensuite  le  grand  final  du  premier  acte;  entre  ces  deux  mor- 
ceaux se  place,  à  la  date  du  28  mars,  le  charmant  chœur  des 
paysans  :  Au  mois  de  mai,  bergère.  Le  1"  avril,  il  commença  le 
travail  d'orchestration.  Enfin,  il  compléta  sa  partition  dans  le 
courant  des  mois  qui  suivirent  ;  le  8  août  elle    était  entièrement 


achevée,  à  l'exception  de  l'ouverture  qui  fut  écrite  plus  tard  à 
Vienne. 

Le  16  septembre,  Weber  quitta  son  cher  Hostcrvvitz,  où  étaient 
venus  lui  dire  adieu  ses  amis  Wolff,  Hummel  et  Pixis,  pour  se 
rendre  à  Vienne,  afin  d'y  diriger  sa  nouvelle  œuvre.  Son  fidèle 
Benodict  l'accompagnait. 

En  passant  par  Prague,  il  traita  avec  le  directeur  du  théâtre  de 
cette  ville  pour  £'!(/'(/a7i^/ie,  et  celui-ci  lui  compta  10  ducats  de 
plus  qu'il  n'avait  demandés,  bien  que  rien  ne  pût  faire  augurer 
encore  du  succès  de  l'ouvrage.  Rara  avis  in  terra!  s'écria  Weber, 
qui  allait  se  trouver  en  rapport  avec  des  gens  moins  magnifiques. 

Edmond  NEUROMM. 
(La  suite  prochainement  ) 


LÀ  SEMAINE  RELIGIEUSE. 

Hentie  de  Siafnte-Céclle,  «l'jftmbrolse  Tbomas,  exécutée 
à  Kafnt-EuBlaclie,  pour  la  fètc  de  r Association  des 
Artistes  muslclenai.  —  liesse  de  Kalnte-Céclle.  de  lime 
de  Orandval.  à  JÉtalnte-tienevIève. 

11  y  a  seize  ans,  alors  que  tant  d'autres  compositeurs  do  musique  sacrée 
égaraient  la  pensée  religieuse,  pour  eux  confuse,  dans  les  nuages  de  la 
fantaisie,  l'otouffaient  sous  les  caprices  de  l'imagination  ou  la  noyaient 
dans  le  luxe  exubérant  d'une  orchestration  théâtrale,  Ambroise  Thomas 
ressaisissait  déjà,  plus  qu'aucun,  l'idéal  du  symbolisme  chrétien,  et  il  l'ap- 
pliquait surtout  à  sa  messe  dite  de  Sainte-Cécile,  sans  effort  et  comme  par 
unedéduction  invincible.  Dans  cette  œuvre  le  présent  se  rattache  au  passé, 
les  formes  des  diverses  écoles  se  fusionnent,  et  le  caractère  aiisière  et 
profond  de  la  tradition  se  pare  de  toutes  les  richesses  de  la  science  harmo- 
nique. Varié,  mais  constanunent  tnajestueux  et  élevé,  ce  style  impres- 
sionne, émeut  profondément,  en  même  temps  qu'il  permet  d'augurer  une 
prochaine  et  désirable  transformation  dans  les  compositions  de  musique 
religieuse  de  notre  pays. 

Le  Revue  cl  Gazette  musicale  a  analysé  cotte  œuvre  lors  de  sa  pre- 
mière et  de  sa  seconde  exécution,  à  Saint-Eustache,  en  1832  et  1833. 
Elle  a  mis  en  relief  les  beautés  hors  ligne  qu'elle  renferme,  le  Credo 
notamment,  dont  le  début  est  imité  d'un  plain-chant  dorien,  le  Laudate 
final  magniliquement  déployé  sur  le  plain-chant  du  sixième  mode  ecclésiasti- 
que, etc.  Je  n'ai  donc  pas  à  revenir  sur  ce  que  mes  prédécesseurs  ontdit 
avec  toute  l'autorité  de  leur  talent  et  de  leur  compétence. 

Mardi  dernier,  cette  même  messe  a  été  une  fois  encore  chantée  à 
Saint-Eustache,  l'Association  ayant  voulu  témoigner  ainsi  de  sa  respec- 
tueuse svmpathiH  pour  l'un  de  ses  membres  les  plus  célèbres  et  s'associer 
aux  hautes  distinctions  dont  il  a  été  l'objet  cette  année. 

L'exécution,  dirigée,  sous  l'œil  et  les  indications  du  maître,  par 
M.  Georges  Hainl  —  l'homme  des  masses  vocales  et  instrumentales  — 
avec  un  soin,  un  tact  et  une  autorité  remarquab'es,  a  été  de  tous  points 
digne  de  l'Association,  de  la  circonstance,  de  la  pensée  qui  avait  pré- 
sidé au  choix  de  l'œuvre  et  de  cette  ceuvre  elle-même.  On  ne  se  rappelle 
pas  avoir  depuis  longtemps  entendu,  à  Paris,  une  interprétation  de  messe 
avec  chœurs  d'hommes,  de  femmes  et  d'enfants,  soli  et  orchestre,  aussi 
correcte,  aussi  pure,  aussi  bien  menée,  sans  tiraillements  et  sans  à  peu 
prés,  dans  ses  moindres  détails.  Les  principaux  théâtres  lyriques  avaient 
fourni  le  contingent  choral  et  instrumental;  le  personnel  de  l'Opéra  était 
au  grand  complet.  MM.  Pickaërt  ri  Steenmann  conduisaient  les  chœurs 
avec  leur  expérience  consommée.  Le  morceau  joué  au  grand  orgue  par 
M.  Batiste  a  préludé  d'une  façon  noble  et  solennelle  à  la  majesté  et  à  la 
pompe  de  la  messe  d'Amb.  Thomas.  L'organiste  du  chœur  a  droit  à 
sa  part  de  félicitations.  Les  soli  ont  été  magnifiquemimt  chantés  par  les 
excellents  MM.  Battaille  et  Grisy,  dont  l'éloge  n'est  plus  à  faire;  par 
Mlle  N'ilsson  qui  dans  l'Ave  Maria  de  Gounod,  à  l'offertoire,  a  certainement 
égalé  l'Alboni  aux  obsèques  de  Rc-ssini  et  a  produit  une  impression  égale, 
aussi  saisissante.  Cette  voix  cristalline  et  veloutée,  douce  dans  la  force,  d'une 
puissance  contenue  dans  la  douceur,  ce  sentiment  d'une  pureté  angélique, 
cet  art  exquis  et  sûr  de  lui-même,  tout  cela  fait  monter  les  larmes  aux 
yeux  et  courir  un  frisson  chez  tous  ceux  qui  ont  l'amour  et  le  culte  du 
beau. 

Les  nefs  et  le  transept  de  Saint-Eustache  étaient  remplis  d'une  foule 
compacte  ;  la  quête  faite  au  profit  de  la  caisse  de  l'Association  a  produit 
une  somme  élevée.  L'intérêt  qui  s'attache  de  plus  en  plus  aux  mani- 
festations de  l'art  religieux  n'a  pas  seulement  la  curiosité  pour  base;  on 
reconnaît  la  vraie  grandeur  de  la  musique  sacrée,  on  la  proclame,  on 


DE  PARIS. 


sm 


veut  s'honorer  soi-même  en  lui  trouvant  de  nouvelles  raisons  d'être  et  de 
s'accroître.  Mardi  dernier,  la  messe  de  sainte  Cécile  a  répond»  à  ces  vœux 
et  satisfait  à  cos  aspirations.  Je  n'hiisile  pas,  pour  ma  part  ;i  ranger  cef.c 
solennité  parmi  les  événements  artistiques  de  l'année  et  ;i  exprimer  le 
vœu  que  les  voûtes  de  nos  vieilles  basiliques  retentissent  aux  jours  de 
grandes  fêtes,  des  sublimes  accents  de  cette  partition  essentiellement 
chorale,  d'une  hante  porlée,  d'un  caractère  véritablement  relljçieux,  et 
dans  laquelle  la  science,  loin  d'accuser  un  pompeux  étalage,  .se  colore  du 
rayon  mélodique  et  se  déguise  sous  les  fleui's  de  la  poésie. 

* 

*  * 

Mme  la  vicomtesse  de  Grandval,  dont  les  compositions  jouissent  d'iine 
certaine  réputation  dans  le  dilettantisme  mondain,  a  entouré  du  plus 
grand  luxe  vocal  et  instrumental  :  —  sept  cents  enfants  des  écoles,  Pasde- 
loup  et  son  orchestre,  elle-même,  l'auteur,  chantant  les  soli  avec  Mme  la 
baronne  de  Caters  et  un  ténor  fort  distingué  de  maintien,  mais  excessi- 
vement ému,  —  l'exécution  à  Sainte-Geneviève,  dimanche  dernier,  de  sa 
messe  de  Sainte-Cécile,  déjà  chantée,  l'an  pas>é ,  à  Saint-Eustache. 
Cette  partition,  au  caractère  essentiellement  mélodique,  accuse  moins  de 
la  part  de  son  auteur  la  possession  complète  des  soui'ces'  pures  du 
grand  art  des  Palestrina  que  l'étude  de  Lesueur  et  le  vif  désir  d'atteindre 
aux  effets  eherubiniens.  La  partie  vocale  est  bien  écrite,  bien  traitée, 
dans  le  /l'j/n'e  et  l'Agnus,  surtout,  qui  sont  très-remarquables  ;  par  contre, 
l'orchestre  visant  constamment  au  pompeux,  à  grand  renfort  de  cuivres 
et  de  batteries,  n'arrive  qu'au  bruyant,  et  ce  n'est  pas  même  chose,  La 
messe  de  Mme  de  Grandval  n'en  est  pas  moins,  ces  réserves  faites,  une 
œuvre  fort  honorable  et  imprégnée  d'un  sentiment  religieux  pénétrant. 

M.  M. 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 

^%  Le  théâtre  impérial  de  l'Opéra  a  donné,  lundi,  Hamlet  ;  mercredi 
et  vendredi,  les  Uuyuenots. 

„.*,(;  Le  succès  de  la  reprise  des  Huguenots  s'est  encore  accru  mer- 
credi par  le  concours  de  Caron,  auquel  M.  Perrin  a  confié  le  soin  de 
chanler  \e  Bâta  plan  du  troisième  acte.  Il  y  a  produit  sur  les  spectateurs  la 
plus  agréable  surprise  et  le  plusgrand  effet;  couvert  d'applaudissements, 
il  a  dû  le  répéter  aux  acclamations  de  la  salle  entière.  Obin  chantait  le 
rôle  de  Marcel  en  remplacement  de  Belval  indisposé.  L'ensemble  des 
interprètes  est  donc  aujourd'hui  aussi  complet  qu'on  puisse  le  désirer.  Aussi 
l'empressement  du  public  à  entendre  le  chef-d'œuvre  de  Meyerbeera-t-il 
pris  de  telles  proportions,  que  le  bureau  de  location  est  littéralement 
assiégé  et  qu'à  la  représentation  de  vendredi  les  bureaux  sont  restés  fer- 
més, comme  ils  l'avaient  été  pour  la  précédente. 

^*^  La  représentation  solennelle  de  Guillaume  Tell,  donnée  le  samedi  28 
pour  honorer  la  mémoire  de  Rossini,  a  été  digne  de  l'illustre  composi- 
teur comme  de  notre  première. scène}  lyrique. — La  statue  de  Rossini,  œuvre 
d'Etex,  placée  dans  le  vestibule  d'entrée  et  son  médaillon  par  Chevalier 
suspendu  dans  le  foyer  public  avaient  été  ornés  de  couronnes.  Entre  le 
deuxième  et  le  troisième  acte,  le  rideau  s'est  relevé,  laissant  voir  le  buste 
du  défunt  par  Dantan,  placé  sur  un  piédestal  orné  de  fleurs  et  de  guir- 
landes de  laurier.  Autour,  neuf  sujets  de  la  danse  représentant  les 
Muses,  et  tout  le  personnel  des  artistes  étaient  groupés  et  occupaient 
la  scène  jusqu'aux  derniers  plans.  Pendant  que  le  busie  était  couronné 
aux  applaudissement  frénétiques  de  la  salle  entière,  l'orchestre  exécutait 
le  commencement  de  l'introduction  de  Moise  et  le  finale  du  quatrième 
acte  de  Guillaume  Tell,  sur  de  nouvelles  paroles  appropriées  à  la  circon- 
stance et  chantées  avec  une  indicible  expression  par  Faure,  Obin,  Ylllaret, 
Mlle  Battu  et  les  chœurs  augmentés  de  ceux  du  théâtre  Italien,  qui  avaient 
tenu  à  honneur  de  concourir  à  celte  solennité.  On  a  dû  lever  le  rideau 
une  seconde  fois  aux  acclamations  des  spectateurs  qu'accompagnait  une 
pluie  de  fleurs  et  de  couronnes  d'immortelles.  — La  députation  de  Pesaro 
assistait  à  cette  imposante  cérémonie  dans  la  loge  de  Rossini;  elle  est 
venue  ensuite  sur  le  théâtre  remercier  au  nom  de  l'Italie  les  artistes 
français. 

^:%  En  assistant,  samedi  de  la  semaine  dernière,  à  cette  repré.sen- 
tation,  le  public  ne  se  doutait  pas  qu'il  entendait  pour  la  dernière 
fois  Mlle  Marie  Battu  sur  cette  scène.  D'un  commun  accord,  en 
effiet,  elle  venait  de  résilier  son  engagement  avec  M.  Em.  Perrin. 
Ce  n'est  pas  sans  avoir  fait  de  pressantes  instances,  pour  retenir  la 
célèbre  cantatrice,  que  M.  Perrin  a  consenti  à  la  laisser  partir.  On  eût 
dit,  au  reste,  que  Mlle  Battu  voulait,  dans  cette  soirée,  laLsser  un  souvenir 
ineffaçable  de  son  séjour  à  l'Opéra;  car  jimals  elle  n'avait  été  plus  admira- 
ble dans  ce  beau  rôle  de  Mathilde ,  qu'elle  joue  et  chante  si  supérieure- 
ment, et  jamais  aussi  elle  n'y  avait  été  applaudie  avec  plus  d'enthousiasme. 
Mlle  Battu  est  dans  toute  la  force  de  son  talent  et  danst  tout  l'épanouisse- 
ment de  sa  beauté;  elle  a  brillé  d'un  grand  éclat  dans  la  carrière 
italienne  et  à  l'Opéra,  elle  n'a  donc  pas  à  s'inquiéter  de  son  avenir  ; 
les  portes  de  toutes  les  grandes  scènes  lyriques  lui  sont  ouvertes. 

.JK*,  M.  Justament,  que  M.  Perrin  avait  chargé  de  régler  le  divertisse- 


ment dansé  au  Iroi.sième  acte  des  Ilunuenols,  vient  d'être  engagé  en  qua 
llté  de  maître  de  ballets  de  l'Académie  impériale  de  musique. 

»%  Le  ténor  Ch.  Nicot,  premier  prix  au  dernier  concours  du  Con- 
servatoire, qui  avait  signé  un  engagement  au  théâtre  des  Fantaisies- Pa- 
risiennes, vient,  aux  termes  des  règlements,  d'être  réclamé  par  le  théâ- 
tre impérial  de  l'Opéra-Comlque,  et  c'est  sur  celte  scène  qu'il  fera  .ses 
débuts. 

***  Adelina  PattI  a  été  Indispo.sée  cette  semaine,  à  la  suite  d'un  re- 
froidissement, et  elle  a  été  obligée  de  garder  le  Ut.  —  Mlle  Grossi  a  dû, 
au  dernier  moment,  la  ren)placer  dans  le  rôle  de  Rosine  d'il  Barbiere, 
qui  était  affiché,  et  elle  s'est  acquittée  de  sa  tâche  avec  autant  de  bonne 
volonté  que  de  talent.  Toutefois,  la  majeure  partie  des  spectateurs  venue 
pour  entendre  A.  Patti  s'est  fait  restituer  son  argent,  et  la  recette  était 
de  17,000  francs  !  .Jeudi,  ou  a  joué  il  Trovatore  au  lieu  de  Crii/jino  e 
la  Coinare;  Mmes  Krauss  el  Grossi,  NIcolini  et  'Verger  s'y  sont  fait  beau- 
coup applaudir.  —  Hier,  samedi,  la  eleuxlèuie  représentation  de  Semira- 
mide  a  confirmé  le  succès  de  la  première,  et  valu  le  plus  chaleureux 
accueil  aux  deux  cantatrices  et  à  Aj;n&sl,  excellent  dans  le  rôle  d'Assur. 

^*t  Mme  Adelina  PattI  va  beaucoup  mieux.  Son  départ  de  Paris  est 
toujours  fixé  au  20  de  ce  mois  ;  elle  s'arrêtera  à  Bruxelles  pour  y  don- 
ner trois  représentations,  et  elle  .sera  rendue  à  Saint-Pétersbourg  dans 
les  dix  premiers  jours  de  janvier,  délai  fixé  par  son  engagement. 

**t  Mlle  MInnie  Hauck  est  arrivée  de  Londres.  La  jeune  et  charmante 
canthtrice,  qui  vient  d'y  chanter  avec  un  .si  beau  succès,  s'est  mise  à  la 
disposition  de  M.  Bagier,  et  ses  débuts  auront  lieu  à  la  fin  du  mois. 

*'^*  Le  Piccolino,  de  Mme  de  Grandval,  et  la  Serua  Padronn,  de  Paë- 
siello,  passeront  presque  en  même  temps  au  théâtre  ItHlien,  dans  une 
huitaine  de  jour.s. 

***  L'effet  produit  par  Iphiyénie  en  Tauride,  à  la  première  repré.sen- 
tation,  s'est  encore  plus  accentué  aux  suivantes,  et  M.  Pasdeloup  n'a 
qu'à  se  féliciter  de  son  initiative.  —  Le  Brasseur  de  Preston,  d'Ad.  Adam, 
est  à  l'étuJe.  —  Don  Quichotte  a  été  lu,  mais  la  disiribution  des  rôles 
n'est  pas  encore  arrêtée.  —  Mlle  Saint-Urbain,  que  le  public  n'a  point 
oubliée,  vient  d'être  engagée  à  ce  théâtre. 

.^■'^  Le  théâtre  de  l'Athéiu-e  donne  en  ce  moment  les  dernières  repré- 
sentations du  Petit  Poucet.— La  première  des  Horreurs  de  la  Guerre,  opéra- 
bouffe  en  deux  actes,  est  irrévocablement  fixée  à  mardi  prochain,  8  cou- 
rant. 

***  Les  cinquante  représentations  de  la  Périchole,  données  jusqu'à  ce 
jour,  ont  produit  206,890  francs;  soit  une  moyenne  de  l,13J  fr.  iO  c. 
par  soirée. 

t*^  Le  succès  de  la  Périchole,  en  France  et  à  l'étranger,  se  propage 
avec  rapidité.  Nous  avons  mentionné  celui  qu'elle  obtient  à  Lille  avec 
Mlle  Garait.  —  Demain ,  elle  sera  jouée  à  Bruxelles.  —  Marseille,  Bor- 
deaux,  Nice,  Avignon,  Châlons,  Dunkerque,  Valenciennes ,  Cambrai. 
Genève,  etc.,  l'ont  mise  à  l'étude,  et  nous  recevons  de  .\ew-York  l'avis 
que  la  Direction  Battman  la  répétait  activement  au  théâtre  Pike,  où  la 
première  représentation  est  annoncée  pour  cette  semaine  même.  —  Nous 
avons  des  nouvelles  analogues  de  RIo-Janeiro. 

*%  Fleur  de  Thé  vient  d'obtenir  un  très-grand  succès  au  théâtre 
d'Alger. 

***  Le  Casino  de  Hombourg  vient  d'engager,  pour  la  saison  prochaine, 
Mme  A.  Patti,  Nicolini  et  Verger. 


NOUVELLES  DIVERSES. 


t*»  Le  concours  d'harmonie  écrite  et  d'orchestration  des  élèves  mili- 
taires du  Conservatoire  impérial  de  musique  a  eu  lieu  lundi  sous  la  pré- 
sidence de  M.  Auber.  En  voici  le  résultat  :  Premier  prix  :  M.  Schwartz, 
du  10=  de  ligne,  élève  de  M.  François  Bazin.  —  Deuxième  prix  :  M.  Ey- 
bert,  du  3"  du  génie,  élève  de  M.  François  Bazin.  —  Premier  accessit  : 
MM.  Michelin,  du  Al"  de  ligne,  élève  de  M.  François  Bazin,  et  Jacoutot,  , 
du  16°  pontonniers,  élève  de  M.  Jonas.  —  Deuxième  accessit  :  M.  Stoitz, 
du  l"  de  ligne,  élève  de  M.  Jonas.  —  Troisième  accessit  :  M.  Meister,  du 
49=  de  ligne,  élève  de  M.  François  Bazin.  -~  Voici  le  résultat  du  con- 
cours de  solfège  (classe  des  élèves  militaires)  qui  a  eu  lieu  lundi  dernier 
au  Conservatoire  :  Premier  prix  :  M.  Welsch,  élève  de  M.  Alkan,  et 
MM.  Schwartz  et  Meister,  élèves  de  MM.  Emile  Durand.  —  Premier  ac- 
cessit :  M.  Gassian,  élè\e  de  M.  Emile  Durand.  —  Deuxième  accessit  : 
M.  Marx,  élève  de  M.  Emile  Durand.  —  Troisième  accessit  :  M.  Lieber, 
élève  de  M.  Alkan. 

^*^  Le  programme  du  sixième  concert  populaire  n'off'rait  aucune  nou- 
veauté ;  aussi,  n'avons-nous  guère  à  signaler  que  l'accueil  enthousiaste  fait 
à  l'ouverture  de  Guillaume  Tell,  qui  trouvait  là  sa  place  toute  naturelle 
au  lendemain  des  funérailles  de  son  immortel  auteur.  —  Au  septième 
concert,  M.  Pasdeloup  a  fait  exécuter  la  Reformatiotis-Sijmphonie  de 
Mendeissohn,  déjà  donnée  l'année  dernière,  et  qui,  tout  inférieure  qu'elle 


390 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


soit  aux  autres  grandes  œuvres  du  maître,  gagne  à  être  mieux  connue. 
Le  piquant  et  gracieux  Scherzo,  instrumenté  avec  la  délicatesse  familière 
à  Mendelssohn,  a  été  bissé.  Peut-être  n'est-il  pas  en  harmonie  avec  la 
couleur  un  peu  sévère  de  l'ouvrage  entier;  il  fait  notamment  le  plus 
grand  contraste  avec  le  final,  bâti  sur  le  choral  :  Ein'  (este  Burg  ist  unser 
Gott,  et  dans  lequel  Mendelssohn  use  et  abuse  du  genre  fugué.  —  On  a 
bissé  encore  Vandante,  avec  variations  de  Haydn,  et  la  bataille  ordinaire 
s'est  livrée  à  la  fin  du  concert,  à  propos  de  l'ouverture  du  Vaisseau 
fantôme,  de  Richard  Wagner. 

»»**  Aujourd'hui  dimanche,  à  deux  heures,  au  Cirque-Napoléon,  hui- 
lièiiie  concert  populaire  de  musique  classique,  sous  la  direction  de  .].  Pas- 
deloup.  On  y  entendra  :  1°  Ouverture  d'Athnlie,  de  Mendelssohn;  —  ^<' 
Symphonie  en  fa,  de  Beethoven  ;  —  3°  Fragment  symphonique,  de  F. 
Schubert;  —  i"  Huitième  concerto  pour  violon,  de  Rode  (exécuté  par 
M.  Heymann,  premier  prix  du  Conservatoire  1868)  ;  —  .'i"  Prélude  de 
Lohem/rin,  de  R.  Wagner  ;—  (i"  Invitation  à  la  valse,  de  Weber  (orchestrée 
par  Berlioz). 

^%  M.  Lebouc  a  déjà  fait  entendre  deux  programmes  aux  deux  séries 
d'invités  de  ses  matinées  du  lundi;  il  est  toujours  entouré  des  mêmes 
artistes  d'élite  qui  interprètent  admirablement  la  musique  des  grands  maî- 
tres :  Mme  Beguin-Salomon,  MM.  A.  Duvernoy,  Rose,  White,  Diépedaal, 
Trombetta  et  Gouffé.  En  fait  de  morceaux  nouveaux  nu  peu  connus, 
signalons  les  variations  de  Weber  pour  piano  et  clarinette,  le  quintette 
de  Schumann,  deux  transcriptions  pour  violoncelle  d'un  air  de  Lotti  et 
d'une  mazurka  de  Chopin,  par  M.  Lebouc,  la  valse  de  concert  pour  vio- 
lon, d'Ad.  Blanc,  une  étude  pour  piano,  d'A.  Duvernoy,  enfin  une 
mélodie  de  Mendelssohn,  Suleilca,  très-bien  chantée  par  Mlle  Doré.  A  la 
dernière  matinée,  Mme  Marie  Damoreau  a  obtenu  un  grand  succès  dans 
trois  morceaux  du  regretté  Ro.s.sini  :  la  romance  du  Saule,  A'Otello,  et  les 
airs  de  Guillaume  Tell  et  de  l'Italienne  à  Alger. 

^.*^.  Lundi  dernier,  la  société  chorale  allemande,  le  Liederkranz,  diri- 
gée par  M.  Ehmant,  donnait  son  premier  concert  dans  U  salle  du  Grand- 
Orient,  et  y  exécutait,  avec  ce  soin  et  cet  admirable  ensemble  qu'on  lui 
connaît,  les  chœurs  à'Athalie,  de  Mendelssohn.  A  celte  brillante  soirée, 
qui  avait  réuni  de  nombreux  invités,  se  sont  fait  également  entendre 
Mlle  Schrœder,  la  sympathique  cantatrice  du  théâtre  Lyrique,  le  bril- 
lant pianiste  Henri  Fi.ssot,  qui  a  pris  rang  depuis  longtemps  parmi  les 
maîtres,  et  l'habile  violoncelliste  Lasserre. 

^*^  Mlle  Cécile  Meyerbeer,  seconde  fille  de  l'illustre  compositeur,  vient 
d'être  fiancée  au  baron  Adrian-Walburg,  membre  de  l'Institut  archéolo- 
gique à  Vienne . 

**»  On  annonce  l'arrivée  à  Paris  de  Mlle  Rosario  Zapater,  la  jeune  et 
déjà  célèbre  cantatrice- poëte  de  Madrid,  l'auteur  du  libretlo  de  l'opéra 
italien  Gli  Amanti  di  Terruel,  applaudi  à  Valence  il  y  a  trois  ans,  et, 
sous  le  modeste  voile  du  pseudonyme,  l'une  des  plumes  les  plus  vaillan- 
tes de  la  critique  littéraire  et  musicale  en  Espagne. 

^*t  M.  Camille  Saint-Saëns  est  de  retour  à  Paris  de  sa  brillante  tour- 
née artistique  en  Allemagne.  11  doit  exécuter,  au  concert  du  20  dé- 
cembre, son  nouveau  concerto  de  piano  en  sol  mineur. 

^*,fc  Alfred  Jaëll  a  quitté  la  compagnie  IJlmann  à  Bruxelles,  pour  se 
rendre  en  Hollande,  oii  il  se  fera  entendre,  avec  sa  femme,  dans  une 
douzaine  de  concerts.  Le  directeur  des  concerts  populaires  de  Bruxelles, 
M.  Samuel,  l'a  engagé  pour  la  séance  du  20  décembre.  Paris  possédera 
M.  et  Mme  Jaëll  pendant  une  partie  de  l'hiver  prochain. 

^*,i,  M.  Dancla  a  obtenu  le  prix  décerné  tous  les  ans  à  la  musique 
de  chambre  par  l'Académie  des  beaux-arts. 

»%  Nous  recommandons,  au  début  de  l'Avent,  quatre  Offertoires  pour 
orgue  (sans  pédales)  écrits  spécialement  pour  ce  temps  liturgique  de  l'an- 
née, par  l'éminent  organiste  de  la  Trinité,  M.  A-  Chauvet,  et  publiés 
par  Mme  Mayens-Couvreur. 

^*^  Mlle  Delanoue  vient  de  rouvrir  ses  cours  de  piano  pour  la  saison 
d'hiver,  7,  rue  Saint-Lazare.  Ces  cours,  qui  se  divisent  en  cours  élémen- 
taires pour  les  jeunes  enfants,  en  deuxièmes  cours  et  en  cours  supérieurs, 
ont  lieu  deux  fois  par  semaine  et  sont  très-suivis;  Mlle  Delanoue,  excel- 
lent professeur,  y  donnant  personnellement  tous  ses  soins. 

^^*^  Nous  sommes  heureux  d'annoncer  à  nos  lecteurs  que  Mme  M. 
Persiani,  élève  et  fille  de  la  célèbre  et  regrettée  Mme  Persiani,  continue 
l'enseignement  du  chant  que  Péminente  artiste  avait  professé  avec  tant 
d'éclat,  et  qui  a  formé  de  nombreuses  et  brillantes  élèves.  —  Mme  M. 
Persiani  s'est  réservé  certains  jours  de  la  semaine  pour  se  rendre  chez 
les  élèves  qui  ne  pourraient  venir  chez  elle,  rue  de  Chartres,  2  (porte 
Maillot),  Neuilly. 

,^*„  M.  Paliantl,  —  le  fils  de  l'excellent  régisseur  du  théâtre  de  l'O- 
péra-Comique, —  qui  depuis  longtemps  était  premier  violon  au  théâtre  du 
Gynmase,  vient  d'être  nommé  second  chef  d'orchestre  ;  M.  Montigny  ne 
pouvait  faire  un  meilleur  choix. 

^*^  M.  Goldberg,  l'excellent  professeur  de  chant,  l'auteur  d'un  bon 
nombre  de  charmantes  compositions  vocales,  parmi  lesquelles  nous  ci- 
terons le  Message,  quitte  définitivement  Londres  pour  se  fixer  à  Paris. 
Le  succès  qu'à  toujours  rencontré  son  habile  et  artistique  enseignement 
l'y  suivra  certainement. 


„,**  On  nous  promet  pour  cet  hiver  la  vi.site  du  célèbre  chanteur 
Jules  Stockhausen. 

„,*„,  (Jn  grand  nombre  de  violonistes  se  pressaient  samedi  delà  semaine 
dernière  à  l'hôtel  Drouot,  où  se  vendait  toute  une  collection  de  violon?  de 
Stradivarius,  de  Bergnnzi,  de  WillaumedeMéricourt  ;  d'archetsde  Tourte, 
de  Lafleur,  de  Pecaite,  et  quelques  violoncelles.  Un  Stradivarius  a  été 
vendu  2,400  fr.,  un  Bergonzi,  700  fr. 

,,,**  Le  grand  violoniste  Caniillo  Sivori  est  en  ce  moment  à  Bologne, 
où  il  se  propose  de  donner  quelques  concerts. 

,!(*„,  Un  épouvantable  incendie  vient  de  dévorer  à  Londres,  dans 
Drury  Lane,  les  ateliers  de  MM.  Grieve ,  peintre.s-décorateurs  de  la  plu- 
part des  théâtres  anglais.  Les  décors  destinés  à  l'ouverture  d'Her  Ma- 
jesty's  ont  été  réduits  en  cendres. 

;^**  M.  Emile  Abraham,  collaborateur  des  journaux  i'Enfr'octe  et  la  Vo- 
gue parisienne,  auteur  des  Croqueuses  de  pommes,  a  épousé  jeudi  Mlle  Ul- 
mann. 

^*t  Les  Sociétés  orphéonique  et  philharmonique  d'Arras  ont  célébré, 
cette  année,  la  fête  de  sainte  Cécile  avec  un  éclat  inaccoutumé.  La 
messe  de  Cherubini,  dite  mes.se  du  sacre,  a  été  remarquablement  exé- 
cutée par  elles,  sous  l'habile  direction  de  MM.  Duhaupas  et  Pois,son. 
Talent  et  bienfaisance  peuvent  résumer  cette  solennité  musicale. 

**»  Séances  d'orgues  d'église,  système  nouveau  et  perfectionné,  les 
lundis  et  vendredis,  de  quatre  à  six  heures,  par  les  plus  célèbres  orga- 
nistes, dans  l'établissement  Merklin-Schiitze  (Société  anonyme  des  grandes- 
orgues),  boulevard  Montparnasse,  49.  Entrée  gratuite. 

#*^c  Une  me.>-se  du  bout  de  l'an  a  été  célébrée  mercredi  matin  à  Notre- 
Dame-de-Lorette  en  l'honneur  de  M.  Benazet.  En  outre  des  parents  du 
défunt  on  y  comptait  un  nombre  considérable  de  ses  amis,  auxquels  s'é- 
tait jointe  une  foule  de  littérateurs  et  d'artistes  restés  fidèles  à  la  mé- 
moire de  celui  qui  les  a  accueillis  si  longtemps  avec  une  hospitalité  prin- 
cière.  Faure  a  chanté  à  la  messe  un  Pie  Jesu  avec  un  sentiment  et  une 
voix  incomparables. 

*■**  Barrez,  l'ancien  maître  des  ballets  de  l'Opéra,  vient  de  mourir; 
il  était  âgé  de  soixante-quinze  ans. 

»%  On  annonce  de  Leipzig  la  mort  de  M.  Brendel,  auteur  d'une  His- 
toire de  la  musique  qui  a  eu  quatre  éditions.  11  a  été  le  fondateur  de 
l'As-sociation  musicale  allemande  et  le  propagateur  des  grandes  réunions 
périodiques  des  artistes  allemands. 


DÉPARTEMENTS 

^*f:  Versailles.  —  L'organiste  de  la  chapelle  du  palais  de  Versailles 
M.  Emile  Renaud  a  fait  exécuter,  le  dimanche  22  novembre,  à  l'occa- 
sion de  la  fête  de  .sainte  Cécile  la  messe  en  si  bémol  de  Haydn.  Le  Credo  de 
Dumont  a  été  chanté  par  Bus?ine  et  répondu  alternativement  par  250  voix 
du  petit  séminaire.  VO  salutari^  admirablement  chanté  par  Mlle  Dron- 
sart  et  M.  Dekéghel,  a  produit  beaucoup  d'effet.  M.  Alexandre  Batta,  le 
célèbre  violoncelliste,  a  joué  l'Ave  Maria  de  Schubert  et  l'air  de  Stradella 
avec  la  perfection  qu'on  lui  connaît.  11  était  admirablement  accompagné 
sur  l'orgue  par  M.  Emile  Renaud.  La  quête  pour  les  pauvres  de  la  ville 
a  été  très  alîondante. 

,t'*.if  Poitiers.  —  Notre  collaborateur  M.  Charles  Lucas,  architecte,  en  tour- 
née archéologique  dans  l'ouest  de  la  France,  nous  écrit  de  Poitiers:  «  J'ai 
eu  la  bonne  fortune  d'assister  à  une  messe  en  musique  du  R.  P.  Hermann, 
célébrée  le  dimanche  22,  en  l'honneur  de  sainte  Cécile,  dans  l'église  de 
Sainte-Radegonde.  Un  organiste  de  talent  et  une  société  chorale  ont  fait 
merveille;  mais  j'ai  surtout  été  impressionné  par  une  élégie  exécutée  par 
le  violon  pendant  l'élévation  et  que  l'on  m'a  dite  avoir  été  récemment 
écrite  par  l'auteur  M.  Emile  Lévêque  à  la  Mémoire  de  Eossini.  Ce  mor- 
ceau empreint  d'un  profond  sentiment  mélancolique  et  dont  le  chant, 
large  et  grandiose,  revêt  un  heureux  caractère  mélodique  fait  honneur  à 
M.  Lévêque,  violoniste  de  talent,  applaudi  autrefois  à  Paris  dans  les 
concerts  du  Comité  central  des  artistes,  auteur  de  nombreuses  compositions 
pleines  de  charme,  et  premier  violon  solo  de  la  Grande  Association  mu- 
sicale de  l'Ouest. 

^*j.  Marseille.  —  Le  ténor  Lherie,  qui  e.st  venu  en  représentation 
l'année  dernière  et  qui  n'est  point  un  inconnu  pour  notre  public,  a  été 
engagé  par  M.  Husson,  immédiatement  après  la  résiliation  de  son  enga- 
gement avec  l'Opéra-Comique  de  Paris;  il  a  remplacé  Duwast  et  son  dé- 
but a  été  parfaitement  accueilli. 


ÉTRANGER 

^*j  Bruxelles.    —    On  vient  de   reprendre,  au  théâtre    de   la  Mon- 
naie, la  Juive,    avec  Warot  et   Mlle  Poinsot,  qui    ne    s'est  point  mon- 


DE  PAhIS 


391 


trée  à  la  hauteur  de  sa  tâche  dans  le  rôle  de  Rachcl  ;  et  Ilmjdéc,  qui  a 
valu  à  Jourdan  et  à  Mme  Sallard   un    accueil  des   plus  syinpatliiques. 

—  Une  imprudence  de  Mlle  Marimon,  qui  aurait  pu  avoir  des  suites  fort 
graves  (la  sympathique  artiste  s'est  presque  empoisonnée  en  prenant  une 
dose  trop  forte  de  belladone  pour  retrouver  sa  voix  momentanément 
altérée),  va  nous  priver  quelque  temps  encore  du  Pardon  de  IHonmel ; 
contre-temps  d'autant  plus  fâcheux  que  le  répertoire  n'est  rien  moins  que 
varié.  —  Ferdinand  Hiller  a  donné,  au  Cercle  artistique  et  littéraire, 
une  très-intéressante  séance  où  il  a  fait  entendre  un  bon  nombre  de  ses 
compositions  ,  et  entre  autres  sa  jolie  Opérette  sans  paroles.  De  chaleu- 
reux applaudissements  ont  prouvé,  ii  l'éminent  directeur  du  Conserva- 
toire de  Cologne ,  en  quelle  haute  estime  on  tient  ici  son  double  talent 
de  compositeur  et  de  virtuose. 

3;%  Londres.  —  La  courte  campagne  d'automne,  entreprise  par  M.  Ma- 
pleson  à  Covent-Garden  sur  un  terrain  rival,  que  la  "  clôture  annuelle  » 
rendait  neutre,  s'est  terminée  lundi  dernier  par  une  brillante  représen- 
tation de  Guillaume  Tell.  On  a  fêté  tous  les  artistes  en  leur  associant 
l'habile  chef  d'orchestre  Arditi,  le  bras  droit  de  M.  Mapleson,  dont  l'ac- 
tivité et  le  talent  sont  universellement  appréciés.  —  La  question  de  l'adop- 
tion du  diapason  normal  français,  déjà  établi  dans  presque  toute  l'Alle- 
magne et  l'Italie,  préoccupe  en  ce  moment  le  public  musical.  Le  célèbre 
chanteur  Sims  Reeves  a  adressé  à  la  Sacred  Harmonie  Society  une  lettre, 
dans  laquelle  il  déclare  qu'il  se  retuse  à  prêter  désormais  son  concours 
à  cette  institution,  dont  il  a  été  toujours  le  meilleur  soutien,  si  elle  ne 
se  décide  pas  à  introduire  dans  son  orchestre  le  nouveau  diapason. 

^'^t  Berlin.  —  Une  Américaine,  iMlle  Maria  Calisto,  a  débuté  dans  la 
Traviata.  On  lui  a  trouvé  une  assez  grande  habileté  technique,  mais 
peu  d'expression.  Elle  chantait  en  italien  ,  ainsi  que  les  artistes  chargés 
des  principaux  rôles,  tandis  que  le  chœur  lui  donnait  la  réplique  en 
allemand.  —  MJI.  Dorn  et  Taubert  ont  cessé  d'être  chefs  d'orchestre  à 
l'Opéra-Royal  de  Berlin;  M.  Charles  Eckert  a  été  récemment  nommé  à  cet 
emploi.  M.  Dorn  ne  reste  attaché  à  l'Opéra  que  comme  professeur  de  chant 
pour  les  jeunes  élèves  artistes,  et  M.  Taubert  conserve  seulement  ses 
fonctions  de  directeur  des  concerts  de  la  Cour  et  des  soirées  sympho- 
niques.  —  Tausig  a  donné  un  grand  concert  qui  a  fait  sensation, 
comme  ceux  de  Rubinstein,  son  émule.  Ces  deux  grands  artistes  se  par- 
tagent l'attention  générale,  et  on  ne  saurait  dire  lequel  l'excite  à  un 
plus  haut  degré. 

^''^  Leipzig.  —  Au  septième  concert  du  Gewandhaus,  Friedrich  Griitz- 
macher  a  exécuté  pour  la  première  fois  le  concerto  pour  violoncelle  de 
Robert  Schuraann  (œuvre  129). 

,^*,„  Zurich.  —  Le  compositeur  Fr.-X.  Schnyder  de  Wartensee,  mort 
dernièrement  à  Francfort  à  l'âge  de  quatre-vingt-trois  ans,  a  laissé  par 
testament  toute  sa  fortune  à  notre  ville,  à  charge  par  elle  d'en  con- 
sacrer le  revenu  à  la  publication  de  bons  ouvrages  scientifiquos  ou  ar- 
tistiques, dont  le  manque  de  ressources  ou  d'éditeurs  empêcherait  l'im- 
pression . 

j%  Turin.  —  On  vient  de  représenter  Un  Fallo  (une  Faute),  ballet 
de  Rota,  avec  un  succès  complet.  Elvira  Salvioni  a  été  chaleureusement 
applaudie. 

^*jf,  Florence. — Les  représentations  du  Profeta  sont  toujours  très-suivies 
à  la  Pergola;  le  public  prodigue  ses  encouragements  à  la  Biancolini.  — 

—  Sivori  a  donné  deux  concerts  au  théâtre  Pagliano.  Il  a  joué  ses  mor- 
ceaux les  plus  applaudis,  le  Carnaval  de  Venise,  la  Prière  ae  Moise,  etc., 
avec  cette  merveilleuse  aisance,  ce  brio,  cette  incomparable  beauté  de 
son  qu'on  lui  connaît,  Après  fe  Carnaval  de  Venise,  le  grand  virtuose  a 


été  rappelé  six  fois.  —  Une  crise  financière  a  obligé  le  théâtre  l'agliano 
à  fermer  ses  portes.  La  direction,  dans  l'impossibilité  de  satisfaire  inimé- 
dialenjcnt  aux  réelanjations  du  corps  de  ballet,  a  dû  interrompre  la  re- 
présentation et  renvoyer  le  public,  qui  n'a  pas  môme  eu  la  consolation 
de  ravoir  sou  argent,  la  recette  ayant  été  saisie. 

»%  Bologne.  —  On  commence  à  pouvoir  porter  un  jugement  impartial 
sur  le  nouveau  Barbierc  de  Dali'  Argine,  et  ce  jugement  est  bel  et  bien 
une  condamnation  sans  appel.  Le  jeune  et  présomptueux  mae.stro  aurait 
pu  essayer  de  faire  non  pas  mieux,  mais  autrement  que  Ro.ssini,  comme 
Rossini  avait  fait  autrement  que  l'aisiello;  il  a  préféré  prendre  le  sujet 
corps  à  corps,  sans  changer  une  syllabe  au  libretto  dont  s'ist  servi 
l'illustre  Pésarais  et  l'a  revêtu  d'une  musique  prétentieuse  et  lourde, 
presque  n)élodramatique.  La  plupart  des  caractères,  celui  de  Figaro  en 
première  ligne,  sont  manques.  L'unité  est  absente  de  cette  œuvre  indi- 
geste et  tous  les  styles  s'y  heurtent.  M.  Dali'  Argine  a  une  bonne  mémoire, 
mais  point  d'originalité  ni  de  finesse.  Quelques  morceaux  n»stz  réussis 
ne  rachètent  point  ces  graves  défauts 

^'■,(  Madrid.  —  Les  Huguenots  ont  été  donnés  le  2-1  novembre  pour  la 
première  fuis  de  la  saison.  Cette  splendide  représentation  n'a  été  qu'un 
long  triomphe  pour  l'œuvre  et  ses  interprètes,  Mmes  Gueymard,  Son- 
nieri,  Morensi,  MM.  Tamberlick,  Selva  et  Padovani. 

^*,p  Barcelone.  —  On  a  aussi  représenté  ici  les  Huguenots  le  27  no- 
vembre, et  pour  la  première  fois  également.  Immense  succès  pour  Steger 
et  Mme  Giovannoni-Zacchi.  —  La  reprise  de  l'.ifricainc  est  annoncée 
comme  très-prochaine. 

„;*,  Saint-Pétersbourg.— Apres  l'inauguration  brillante  de  notre  théâtre 
italien  par  Maria,  avec  la  Volpini  et  Calzolari,  suivie  de  la  Norma  pour 
la  Fricci,  nous  attendions  avec  impatience  la  rentrée  de  Mme  Lucca, 
annoncée  depuis  trois  semaines  et  qui  provoque  des  demandes  de  pla- 
ces à  des  prix  fabuleux.  Malheureusement  cette  rentrée  est  retardée  par 
une  indisposition  de  la  célèbre  cantatrice.  —  Le  Société  nmsicale  russe  a 
inauguré  la  saison  par  quatre  séances  de  quatuors,  sous  la  direction  de 
M.  Balakireff,  et  avec  le  concours  de  MM.  Auer,  Pickel,  Weiksman  et 
Davidofl'. — Elle  donnera  cet  hiver  dix  concerts  à  orchestre  dans  lesquels 
elle  fera  entendre  grand  nombre  de  fragments  d'opéras  ^us^es.  —  On 
écrit  de  Moscou  que  le  Grand-Théâtre  vient  d'engager  Mme  Monbelli 
pour  la  saison  de  1869-1870. 


,j%  Bals  de  l'Opéra.  —  Incessamment  l'ouverture  des  bals  masqués. 
Strauss  et  son  orchestre.  —  Abonnement  pour  la  saison  1868-1869  (dix 
bals,  40  francs).  —  S'adresser  pour  la  location,  rue  Drouot,  3. 


Le  Directeur  :  S.  DUFOUR. 

Maestro     E.     MUZIO, 

Ouverture  d'un  cours  de  chant  exclusivement  italien. 
Chez  lui,  rue  de  Luxembourg,  S,  au  1". 


En  vente  chez  E.  HEU,  éditeur,   10,   rue  de  la  Chaussée-d'Antin. 


K^m'F 


•'>■ 


Tragédie  lyrique  en  cinq  actes  et  neuf  tableaux, 
Paroles  traduites   de  Shakspeare   par  Pierre   de  Garai,  musique  de 

ARISTIDE    IIIGNARD 

Partition  Piano  et  Chant,  prix  net  :  20  fr. 


DU  MÊME  AUTEUR 


Pour  -wolx  de  remmes  avec  duos  et  «oIoh  et  accompagaernent  de  piano  à  quatre  mainB. 

Chaque  chœur  en  partition,  prix  net  :  3  fr.    —    Chaque  partie  séparée,  prix  net  :  50  e. 


DU  MÊME  AUTEUR 


392 


KEVUE  El   GAZETTE  3IUSICALE  DE  PAKIS. 


Nouvelles   publications  chez  l'éditeur  J.  MAHO,   25,   faubourg  Saint-Honoré,   à  Paris. 


STEPHEN  HELLER 

Op.  119.  Préludes    composré    pour    Mlle    Lili,    pour    piano, 

2  livres,  chaque 10 

Op.  120.  Mélodies  pour  piano. 10 

Op.  ISl.  Trois  morceaux  pour  piano  : 

1.  Ballade 5 

2.  Conte 6 

3.  Rêverie  du  Gondolier S 

Op.  122.  Valses-rêveries   pour  piano 10 

Op.  123.  Feuilles  volantes  pour  piano 12 

Op.  124.  Scènes  d'enfants   pour  piano 12 

Op.  125.  (Sous  presse.)  24  études  d'expression  et  de  rliytlune  en 

2  suites,   cliaque 10 

Promenades  d'un  solitaire,  18  morceaux    pour   piano   réunis   en 

1  vol.  in-8',  net 8 

Nuits  blanches,  18  morceaux  pour  piano  réunis  en  1  vol.  in-8°, 

net 6 

NOU V  ELLE 


F.  MBNDBLSSOHN-BARTHOLDY 

Op.  60.  La  Nuit  de  Sabbat  (Walpurgisnaclit),  ballade  pour  soles, 
chœurs  et  orchestre  ;  partition  chant  et  piano,  texte 

français  et  allemand,  net 8 

Op.  104.  Trois  préludes  pour  piano 9 

Op.  10!-  bis.  Trois  études  pour  piano. 9 

Op.  105.  Sonate  en  sol  mineur  pour  piano 10 

Op.  106.  Sonate  en  si  bémol  pour  piano .  10 

Op.  107.  La  Réformation,  symphonie  à  grand  orchestre  en  par- 

titinn,  in  S",  net 13 

I.a  même,  en  parties  séparées,  net 1S 

La  même,  arrangée  à  .4  mains,  net 10 

La  même,  arrangée  pour  piano 12 

Op.  109.  Romance  sans  paroles  pour  violoncelle,  avec  accompa- 
gnement de  piano 0 

Op.  109  bis.  Romance  sans  paroles  pour  piano  seul 6 

ÉDITION 


Adopté  au  Conservatoire  et  approuvé  par  l'Institut, 


FÉLIX  LE  COUPPEY 


1.  L'A  B  C,  méthode  pour  les  commençants iS 

2.  L'ALPHABET,  25  études  très-faciles  et  sans  octaves,  op.  17.  .  -12 

3.  LE  PROGRÈS,  25  études  faciles  et  sans  octaves,  op.  24.  ...  12 

4.  LE  RHYTHME,    école   de  la  mesure,  25  études  sans  octaves. 


op.    22. 


5.  L'AGILITÉ,  25  études  progressives  de  mécanisme  et  de  légèreté, 

op.    20 12 

6.  LE  STYLE,  23  études  de  genre,  op.  21. 13 

7.  LA  DIFFICULTÉ  (sous  presse),  13  études  pour  délier  les  doigts.  12 

8.  ÉCOLE  DU  MÉCANISME,  13  séries  d'exercices 15 


Altermann  (E.).  Polka-mazurka  pour  violon,  avec  accompa- 
gnement de  piano 

Bazia  (F.).  Op.  7.  Souvenir  de  Monchoix,  fantaisie-impromptu 
pour  piano 

—  Op.  8.  Marrhe  solennelle  pour  piano 

Belaiise  (S.).  Op.  3.  Trois  impromptus  pour  piano 

Ebmant  (A.l  Op.  13.  Dix  mélodies  pour  soprano,  avec  accom- 
pagnement de  piano,  paroles  allemandes 

Haner  (J.-C).  Op.  1.  Rêverie  pour  piano 

Hartos  {E.  de).  Op.    46.   Suite   pour    deux  violons,    alto   et 

violoncelle 

Op.  48.    Prologue   symphonique    pour   Jeanne   d'Arc,  de 

Schiller,  arrangé  pour  piano    à  quatre    mains   par  H. 

Salomon 

Klel  (Fréd.).  Op.  12.  Trois  morceaux  pour  violoncelle  et  piano. 

—  Op.  26.  Deux  caprices  pour  piano,  n°'  1  et  2,  chaque  .   . 

—  Op.  36.  Trois  gigues  pour  piano 

—  Op.  38.  Souvenirs  de  voyages  pour  piano,  1"  livre.  .   .   .   . 

—  Op.  41.  Id.  id.  2=  livre 

Op    42.  Humoresques  pour  piano  à  quatre  mains.   .  ,   . 

—  Op.  43.  Trois  valses  pour  piano 

liacombe  (P.).  Op.  8.  Sonate  pour  piano  et  violon 

Iianghanfs  (L.).  Op.  18.  Deux  sonatines  pour  piano,  chaque.   . 
L.e  Couppey  (Félix).  Transcriptions  pour  piano  : 

N*  13,  Mozart,  duo  de  Don  Juan  :  «  La  ci  darem  la  mano  » . 

N°  14,  Haydn,  rondo  hongrois,   extrait  du  1"  trio.   .   .   . 

Hlkuli  (C).  Op.  3.  Mazurka  pour  piano 

—  Op.  4.  Id.  

Pfelâffer  (G.).  Op.  38.  Deux  feuillets  d'album  pour  piano.   .   . 


4  » 

6  . 

6  » 

9  » 

12  .. 


10  » 

10  >. 

6  » 

6  » 

6  » 

6  » 
10  . 

7  30 
18  » 

6  I) 

5  » 

6  » 
5  » 


RafT   (J.).  Op.  125.  Trois  morceaux  pour  piano  : 

N-  1.  Gavotte 

N*  2.  Berceuse 

N»  3.  L'Espiègle,  valse-impromptu 

—  Op.  126.  Trois  morceaux  pour  piano  : 

N°  1.  Menuet 

N"  2.  Romance 

N»  3.  Capricietto 

Saint-Saens  (C).  Op,  19.  Les  Noces  de  Prométhée,   cantate, 

pour  solos, chœursetorchestre.  Grande  partition ,  net  .   . 

Partition,  chant  et  piano,  net 

—  Op.  20.  Concerto  pour  violon  avec  accompagnement  depiano. 
Le  même,  grande  partition  d'orchestre,  net 

Sari  (L.).  Op.  7.  Marie-Thérèse,  valse  pour  piano 

Scbubert  (Fr.).  Op.  94.  Pensées   musicales  pour   piano,    en 

deux  suites,  chaque 

Scbumann  (Rob.).  Op.  112.  La  Vie  d'une  rose,  légende  pour 

solos,  chœur  et  orchestre,  partition  chant  et  piano  (texte 

français  et  allemand),  net 

iSpindler  (Fr.).  Op.  148.  Valse  de  salon  arrangée  pour  piano 

à  quatre  mains 

SteinkttlUer   (Em.).    Op.   69.  Douze   études    caractéristiques 

pour  piano 

—  Op.  72.  4»  trio  pour  piano,  violon  et  violoncelle 

IViaor  (Ch.-M.).  Op.  4.  Airs  de  ballet  pour  piano. 

—  Op.  7.  Quintette  pour  piano,  deux  violons,  alto  et  violon- 

celle, net 

—  Op.  9.  Caprice  pour  piano 


3     • 

13     » 

6     » 

6    » 


10  » 

6  » 

15  » 

20  » 

10  » 

10  » 

6  » 


inPRIHEBIE  CENTBALE  DES  CBEBIIIVS   DE  FER   —  A.    CHAIX  ET  G'*^,  BUE  BEBGÈBE,   20,    A  PABIS. 


BUREAUX    A    PARIS  :    BOULEVARD    DES    ITALIENS,  1. 


3S'  Année. 


N'  50. 


{5  Décembre  i868. 


ON  S'ABONNE  : 

Dnna  les  Déportrnients  ot  ù  l'Élrongcr, 

chez  tous  les  Itlorchaiiâs  de  Musiqut^,  U'S  lilirnircs, 

et  aux  Dureaux  der.  Messageries  et  des  Postes. 


REVUE 


PRIX    DE    L'ABONNEMENT: 

Puris. ■.■4    r.|i(iraii 

Dôpartuments,  Udgiquc  et  Suisse —     30  t       id. 

ÉtruDger 3i  »       Id. 

Le  Journal  parult  le  DimaDchc. 


GAZETTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


1869 


PRIMES 


1869 


Offertes  aux  Abonnés  de  la  Revue  et  Gazette  musicale, 
A  l'occasion  du  renouvellement  de  l'année. 

(36*  ANNÉE    OE   SON   EXISTENCE) 


W^^ 


DE    REQUIEM 

Avec  accompagnement  de  Piano.  Musique  tirée  des  différents  ouvrages  de 

ROIS^IMI 

Texte  latin  adapté  à  la  musique  par  Atdagnier 

ET  CONTENANT   QUATORZE   MORCEAUX. 

OnTrag^e  approaré  par  Bossini, 

Et  exécuté  en  partie  à  ses  obsèques,  en  l'église  de  la  Trinité. 
i  volume  in-S"  de  115  pages. 


ALB  U  M 

COMPOSÉ  DE 

MORCEAUX  DE  PIANO  INÉDITS 

SAVOIR  : 

Héfiitation M.  Bergson. 

I/Attentc,  romance  sans  paroles Paul  BEnNAKD. 

Esquisse Stephen  Heller. 

Elodia.  mazurka  de  salon E.  Ketterer. 

SicberKO  (de  Sonate) D.  Magnls. 

Marcbe  funèbre E.  Stoeger. 

Cbanson  polonaise -  E.  Wolff. 


Un  beau  portrait  de  la  cantatrice 

Dessiné  sur  pierre,  d'après  nature,  par  Desmaisons. 


Dans  le  courant  de  l'année  1869,  la  Gazette  musicale   donnera 
chaque  mois,  en  supplément,  un  morceau  de  Piano  ou  de  Chant. 

Au  mois  de  janvier  nos  Abonnés  recevront  comme  prime 
exceptionnelle  un  volume  format  grand  in -8",  contenant: 

Vingt-quatre  Préludes  pour  le  Piano 

Composés  par  STEPHEN  HELLER 


SOMMAIRE.  —  Études  sur  Charles-Marie  de  Weber  (troisième  partie,  H'  ar- 
ticle), par  Edmond  IVenkonun.  —  Théâtre  de  l'Athénée:  les  llorrews 
de  la  guerre.  —  Revue  des  théâtres,  par  D.  A.  D.  Siaiiit-lTtes.  — 
Entrefilets.  —  Nouvelles  des  théâtres  lyriques.  —  Nouvelles  diverses.  —  An- 
nonces. 


ETUDES  SUR  CHARLES-ffiÂRIE  DE  WEBER. 

D'après   la   blograpble    écrite   par   son   flls. 


TROISIEME  PARTIE. 


(11"  article)  (1). 


Le  temps  était  on  ne  peut  plus  mal  choisi  pour  l'apparition 
d'Euryanthe  à  Vienne.  L'engouement  du  public  pour  l'opéra 
italien  était  à  son  comble  dans  cette  ville,  et  les  maîtres  allemands, 
Beethoven  en  tête,  relégués  dans  les  salles  de  concerts,  avaient 
dû  s'incliner  devant  le  sceptre  tout-puissant  de  Rossini,  écrasés 
qu'ils  étaient  surtout  par  l'interprétation  merveilleuse  de  ses  œu- 
vres préférées.  La  troupe  réunie  alors  à  Vienne  pouvait  en  effet 
passer  à  juste  titre  pour  la  plus  remarquable  qu'on  eût  possédée 
jusque-là.  Weber  lui-même,  qu'on  n'accusera  pas  de  complai- 
sance à  l'endroit  des  Italiens,  s'en  montre  émerveillé:  d  Vois-tu, 
écrit-il  à  sa  femme  au  sortir  d'une  représentation  du  Matrimonio 
segreto,  vois-tu,  je  n'ai  pas  encore  vu  une  paire  d'artistes  comme 
la  Fodor-Mainvielle  et  Lablache.  C'est  la  perfection  la  plus  pure; 
c'est  ce  que  la  nature  a  pu  faire  pour  les  voix  de  plus  sublime  et 
déplus  grand  ;  c'est  tout,  tout  ce  qu'on  peut  exiger  de  deux  artistes. 
J'étais  ému  au  possible  et  la  Fodor  a  chanté  si  merveilleusement 
un  air  intercalé,  que,  j'en  suis  sûr,  si  elle  chantait  Euryantlie,  on 
en  deviendrait  fou.  Quel  sentiment!  quelle  passion  !  et  avec  cela 
comme  elle  est  toujours  maîtresse  de  ses  moyens  d'action  ! . . .  Il 
est  heureux  que  mon  opéra  soit  retardé,  car  du  moins  l'opéra 
italifa  sera  un  peu  sorti  de  leurs  oreilles.  » 

Pour  expliquer  cette  phrase,  il  est  bon  de  dire  que  la  saison 
italienne  touchait  à  salin,  et  que  l'opéra  allemand,  qui  lui  succé- 

(1)  Voir  les  n"  18,  21,  23,  25,  28,  31,  36,  39,  të  et  49. 


394 


HEVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


(lait,  devait  s'ouvrir  peu  de  temps  après  par  un  ouvrage  de  Riotte; 
Euryanlhe  était  inscrit  pour  être  représenté  en  second.  C'est  en 
effet  le  2S  octobre  seulement  que  ce  chef-d'œuvre  fit  son  appari- 
tion à  Vienne. 

Nous  ne  suivrons  Weber,  pendant  le  temps  qui  sépare  le  jour 
de  son  arrivée  à  Vienne  de  cette  date,  que  dans  les  circonstances 
se  rapportant  directement  à  l'étude  et  à  la  représentation  à'Eu- 
ryanthe,  bien  que  son  séjour,  dans  cette  capitale,  ait  été  marqué 
par  mille  incidents  qui  appartiennent  à  sa  biographie;  il  nous 
suffira  de  dire  que  les  ennuis  ne  lui  manquèrent  pas,  là  comme 
ailleurs,  et  que  notamment,  sa  collaboratrice,  Mme  de  Cbezy,  ne 
lui  laissa  pas  un  moment  de  repos,  l'obsédant  sans  cesse  de  ses 
exigences  pécuniaires  aussi  peu  édifiantes  que  mal  fondées.  A  un 
autre  point  de  vue,  il  serait  intéressant  de  passer  en  revue  les 
grands  artistes  avec  lesquels  il  se  trouva  en  rapport;  mais  le  temps 
nous  presse,  et  pour  arriver  à  compléter  cette  étude  dans  les 
'imites  fixées,  il  faut  que  nous  sacrifiions  impitoyablement  tout  ce 
qui  n'est  pas  du  ressort  immédiat  de  la  vie  artistique  de  Weber. 
Ici  se  place  cependant  une  circonstance  que  l'on  lie  saurait 
passer  sous  silence,  nous  voulons  parler  de  la  rencontre  de  Bee- 
thoven et  de  Weber  qui  a  été  si  étrangement  appréciée  par  les 
biographes  de  l'auteur  de  Fidelio.  Nous  la  rétablissons  dans 
toute  sa  vérité  d'après  le  témoignage  de  Bénédict,  qui  accompa- 
gnait Weber  dans  sa  visite  à  Bade,  près  Vienne,  où  le  vieux  lioti 
vivait  retiré. 

Jusqu'à  l'époque  où  le  Freyschiitz  fit  son  apparition,  Beethoven 
avait  tenu  Weber  en  médiocre  estime.  Aussi  se  montra-t-il  fort 
étonné  lorsqu'il  parcourut  cette  partition  :  «  Eh  !  mais,  dit-il, 
ce  beau  muguet,  je  ne  l'aurais  jamais  cru  capable  de  cela  ;  il  faut 
maintenant  qu'il  écrive  des  opéras,  de  vrais  opéras,  opéra  sur 
opéra.  »  Et  après  le  second  finale:  «  C'est  bien,  mais  j'en  suis 
tout  abasourdi,  je  vois  bien  ce  qu'a  voulu  Weber,  mais  il  y  a 
fourré^toutes  sortes  de  diableries;  quand  je  parcours  ce  finale,  — 
là,  surtout  à  la  chasse  infernale,  —  je  ris  malgré  moi  ;  et  pour- 
tant il  est  dans  le  vrai  ;  »  puis  il  ajouta,  avec  un  long  soupir  : 
«  Il  faut  entendre  cela,  —  seulement  l'entendre.  » 

Le  cœur  battait  à  Weber  et  à  son  élève  Bénédict,  quand  ils  en- 
trèrent dans  la  chambre  où  se  tenait  le  grand  maître,  et  là  quel 
spectacle  s'offrit  à  leurs  yeux?  Un  désordre  effroyable;  par  terre, 
pèle  mêle  de  la  musique,  des  effets,  de  l'argent  ;  sur  le  lit,  sale  et 
défait,  du  linge  empilé;  le  piano,  couvert  de  poussière;  sur  la 
table,  une  cafetière  cassée.  Quant  au  maître  du  logis,  voici  le 
portrait  qu'en  a  laissé  Bénédict  :  «Il  nous  apparut,  dit-il,  comme 
le  roi  Lear  ou  les  bardes  ossianesques  :  les  cheveux  gris,  épais, 
échafaudés  sur  la  tête,  par  places  entièrement  blancs  ;  le  front  et 
le  crâne  extraordinairement  bombés  ;  le  nez  carré  comme  celui 
d'un  lion;  la  bouche  noble  et  agréable;  le  menton  large  et  une 
mâchoire  à  casser  les  noix  les  plus  dures;  une  couche  de  rouge- 
brun  recouvrait  sa  face  grêlée  ;  enfin,  sous  des  sourcils  touffus  et 
se  rejoignant,  de  petits  yeux  brillants  [mais  pleins  de  douceur.  » 

Beethoven  reconnut  de  suite  Weber  ;  il  le  serra  dans  ses  bras 
s' écriant  :  «  Eh!  te  voilà  donc,  mon  gaillard;  car  sais-tu  que  tu 
es  un  fameux  gaillard;  sois  le  bien-venu.  »  Puis  il  lui  tendit  son 
ardoise  et  la  conversation  s'établit.  Tout  en  causant,  le  vieux 
maître,  jetant  à  terre  la  musique  qui  encombrait  le  sopha,  se  mit 
en  devoir  de  s'habiller  sans  cérémonie  devant  ses  visiteurs.  Beetho- 
ven se  plaignit  amèrement  de  la  position  qui  lui  était  faite;  il  dé- 
clama contre  toutes  choses  :  contre  les  directeurs  de  théâtres, 
contre  les  entrepreneurs  de  concerts,  contre  le  public,  contre  les 
Italiens,  contre  le  goût  du  jour,  et  surtout  contre  l'ingratitude  de 
son  neveu.  Weber  lui  conseilla  de  faire  une  tournée  artistique  en 
Allemagne  pour  se  rendre  compte   de  ce  que    le    monde   pensait 


de  lui.  —  «  Trop  tard,  »  répondit  Beethoven  en  faisant  le  mouve- 
ment de  jouer  du  piano. 

«  Eh  bien,  reprit  Weber,  allez  en  Angleterre  où  chacun  vous 
admire. 

—  Trop  tard,  trop  tard,»  répéta  Beethoven,  en  passant  son  bras 
sous  celui  de  Weber  pour  l'emmener  dîner  à  l'auberge  où  il  pre- 
nait ses  repas.  Le  dîner  fut  très-gai;  Beethoven  se  montra  d'une 
joie  tout  à  fait  insolite.  La  conversation  ne  tarda  pas,  comme  on 
pense,  à  tomber  sur  Euryanthe;  Beethoven  s'informa  du  libretto, 
et,  comme  Weber  faisait  la  moue  :  «  C'est  toujours  la  même  chose, 
fit-il  avec  un  gros  rire,  les  poètes  allemands  ne  savent  pas  faire 
un  libretto. 

—  Cependant  Fidelio?  interrompit  Weber. 

—  L'original  est  français^  il  a  été  traduit  en  italien  d'abord,  et 
ensuite  en  allemand. 

—  Et  quels  libretti  tenez-vous  pour  les  meilleurs? 

—  Ceux  de  la  Vestaleet  du  Porteur  d'eau,  »  répondit  sans  hésiter 
Beethoven. 

Weber  ne  se  faisait  plus,  à  cette  époque,  aucune  illusion  sur  le 
poëme  d' Euryanthe  ;  les  faiblesses  lui  en  apparaissaient  davantage  au 
fur  et  à  mesure  que  les  travaux  des  répétitions  avançaient.  En 
effet,  la  première  fois  que  Weber  lut  l'ouvrage  aux  artistes,  ce  fut 
un  déluge  d'observations  et  de  demandes  d'éclaircissements,  qui  ne 
fit  que  s'accroître  aux  répétitions  suivantes;  malheureusement,  il 
n'était  plus  temps  d'introduire  des  changements,  et  l'on  se  rappelle 
d'ailleurs  que  le  poëme  tout  entier  n'avait  pas  été  remanié  moins 
de  neuf  on  dix  fois. 

Dans  les  premiers  jours  qui  avaient  suivi  son  arrivée  ci  Vienne, 
Weber  avait  fait  la  distribution  des  rôles  :  les  excellents  chanteurs 
Leipoldt,  Haitzinger  et  Forti  devaient  représenter  le  roi,  Adolar 
et  Lysiart;  chacun  se  montrait  fort  content  de  la  tâche  qui  lui 
incombait.  Moins  satisfaite  était  Mme  Grunbaum,  à  laquelle  était 
échu  le  rôle  d'Églantine;  et  comme  ce  n'était  pas  celui  qui  don- 
nait le  titre  à  la  pièce,  elle  voulait  que  l'on  changeât  ce  titre. 
Restait  Euryanthe...  Un  jour  que  l'on  avait  demandé  à  Weber 
pour  qui  il  a\'ait  composé  ce  rôle,  il  avait  répondu  :  «  Pour  Eu- 
ryanthe !  »  Malgré  cette  réponse,  il  est  cependant  permis  de  pen- 
ser qu'il  avait  en  vue,  en  le  composant,  la  cantatrice  Charlotte 
Unglier,  qui  l'avait  fortement  impressionné  lors  de  son  premier 
voyage.  Dans  l'intervalle,  on  lui  avait  proposé  la  jeune  Henriette 
Sontag,  qui  venait  de  débuter  avec  succès  à  Vienne.  On  se  rap- 
pelle l'opinion  peu  flatteuse  qu'avait  émise  d'elle  Weber,  après 
l'avoir  entendue  vers  la  même  époque  à  Prague  ;  aussi  ne  se 
montra-t-il  tout  d'abord  que  très  -  médiocrement  disposé  à 
lui  confier  le  premier  rôle  de  son  nouvel  ouvrage,  et  ce  choix 
parut- il  d'autant  plus  étrange,  quand  il  l'eut  ratifié;  le  bon 
public  ne  manqua  pas  de  dire  que  c'était  parce  que  le  maître 
était  amoureux  de  la  débutante.  Weber  étudia  donc  avec  soin  ses 
moyens  avant  de  se  décider,  et,  en  vérité,  il  ne  la  reconnut 
pas  tout  d'abord,  tant  ses  progrès  tenaient  du  merveilleux.  Dans 
Don  Juan,  où  elle  jouait,  avec  un  égal  succès,  tantôt  le  rôle  de  donna 
Anna,  tantôt  celui  de  Zerline,  elle  le  ravit;  puis,  l'ayant  entendue 
dans  la  Donna  del  Lago,  son  parti  fut  pris  :  dès  le  lendemain,  il  se 
rendit  chei  elle,  sa  partition  sous  le  bras  et  lui  chanta  le  rôle 
qu'il  lui  destinait;  cette  première  entrevue  acheva  de  le  décider. 
«  La  mère  et  la  fille,  écrit-il  à  sa  femme,  se  sont  montrées  très- 
émues;  les  larmes  ont  coulé,  et  ma  foi,  moi,  vieille  bête,  qui  ai 
pourtant  fait  la  chose,  cela  m'a  remué  aussi.  » 

Le  rôle  d'Euryanthe  fut  le  commencement  de  la  fortune  d'Hen- 
riette Sontag.  On  sait  quelle  carrière  brillante  parcourut  cette 
grande  cantatrice,  dont  le  nom  et  la  gloire  ont  rempli  l'univers. 

Il  n'y  eut  pas  moins  de  dix-sept  répétitions  d'Eurtjanthe,  du- 
rant  lesquelles  Weber   ne   perdit   pas  un  seul  instant  courage. 


DE  PARIS. 


395 


malgré  ses  appréhensions  au  sujet  du  libretto.  Ses  lettres  témoi- 
gnent de  son  contentement  ainsi  que  du  zèle  montré  par  tous  ses 
interprètes;  il  ne  tarit  pas  d'éloges  à  l'endroit  des  chœurs  et  de 
l'orchestre  ;  en  un  mot  il  paraît  sûr  de  vaincre.  —  Heureuse  con- 
fiance! car  le  public  viennois,  alors  sous  le  charme  du  plus 
grand  enchanteur  de  la  Péninsule,  le  public  viennois  si  élégant, 
si  grand  seigneur,  si  folâtre  dans  ses  goûts  et  dans  ses  amusements, 
devait  paraître  bien  autrement  difficile  à  persuader  que  celui  de 
Berlin  !  —  Heureuse  insouciance,  dirons-nous  encore  !  Car  dans  la 
ville  on  ne  se  faisait  pas  faute  de  clabauder  par  avance  sur  le 
mérite  de  l'œuvre  qui  était  très-discuté  par  les  musiciens  admis  aux 
répétitions,  à  la  tête  desquels  nous  voyons  à  regret  figurer  le  grand 
Franz  Schubert. 

On  critiquait  aussi  beaucoup,  —  et  l'on  n'avait  pas  tort,  —  la  lon- 
gueur de  l'ouvrage,  et  les  beaux-esprits  proposaient  déjà  de  chan- 
ger le  titre  d' Euryanthe  contre  celui  d'Ennuijante.  Heureusement, 
Weber  n'entendait  pas  ou  ne  voulait  pas  entendre  ce  qui  se  disait 
dans  les  ruelles;  il  savait  qu'il  pouvait  compter  sur  la  partie  intel- 
ligente du  public,  ainsi  que  sur  la  presse  qui  lui  était  toute  dé- 
vouée, cela  lui  suffisait,  et  puis,  il  savait  surtout  qu'il  pouvait 
compter  sur  son  œuvre  même,  dont  il  estimait  les  beautés  à  leur 
valeur. 

Aussi  est-ce  sans  crainte  qu'il  vit  arriver  la  date  du  25  octobre, 
fixée  dès  longtemps.  Deux  heures  avant  la  représentation,  il  écri- 
vait une  longue  lettre,  qui  se  termine  par  ces  mots:  «  Je  suis  dans 
cet  état  qui  résulte  de  l'attente  des  choses,  quand  bien  même  on 
est  assuré,  comme  je  le  suis,  d'une  heureuse  solution.  Car  enfin, 
le  ciel  m'a  favorisé  jusqu'à  ce  jour;  mon  étoile  a  eu  sa  bonne 
portion  d'éclat.  Donc  je  compte  sur  le  bon  Dieu  et  sur  Eu- 
ryanthe. » 

C'est  dans  cette  disposition  d'esprit  qu'il  se  rendit  au  théâtre, 
où  peu  d'instants  après  devait  s'engager  la  plus  émouvante  partie 
qui  eût  marqué  sa  vie  d'artiste. 

Edmond  NEUKOMM. 
(La  suite  prochainement.) 


THEATRE  DE  L'ATHÉNÉE. 

l.i:«  HORREURS  DE  I.A  dUERBE, 

Opéra-bouffe  en  deux  actes,  paroles  de  M.  Philippe  Gille, 
musique  de  M.  Jules  Costé. 

(Première  représentation  le  9  décembre  1868.) 

Cette  pièce  n'était  pas  précisément  une  nouveauté  pour  les  trois 
quarts  des  spectateurs  qui  assistaient  à  sa  première  représentation. 
L'Union  des  Arts  en  eut  la  primeur,  et  pius  tard  Mme  la  princesse 
de  Beauvau  en  fit  la  principale  attraction  d'une  soirée  consacrée 
à  une  œuvre  de  bienfaisance.  Les  amis  de  M.  Jules  Costé  se  re- 
trouvaient donc  en  nombre  mercredi,  au  théâtre  de  l'Athénée,  où 
devait  avoir  lieu  cette  fois  une  épreuve  décisive  ;  disons  de  suite 
qu'elle  a  été  tout  à  l'avantage  des  auteurs. 

La  pièce  de  M.  Ph.  Gille  a  le  mérite  d'être  courte  et  de  faire 
rire.  Ce  sont  de  ces  sujets  qui  ne  se  racontent  pas,  il  faut  les  voir 
et  les  entendre.  Deux  caricatures  de  princes  allemands,  un  peu 
cousins  de  la  grande-duchesse  de  Gérolstein ,  sont  voisins. 
L'un  possède  136  sujets,  l'autre  137  ;  mais  le  duc  Cédéric  est 
marié  et  le  duc  Ernest  est  garçon.  Or,  celui-ci  chasse  sur  les  terres 
conjugales  de  son  voisin  :  inde  hélium.  Seulement,  cette  guerre  ne 
fera  pas  couler  beaucoup  de  sang  ;  car  les  deux  adversaires  n'ont 
pas  plus  envie  l'un  que  l'autre  de  se  rencontrer,  et  ils  y  réussis- 
sent en  prenant  un  chemin  différent  pour  envahir  chacun  de  son 


côté  le  domicile  ennemi  et  y  faier  main  basse  sur  le  mobilier. 
Seulement,  la  part  du  duc  Ernest  a  été  la  plus  riche  puisqu'il  s'est 
cmpai'é  de  la  duchesse  Frédérique.  La  paix  se  fait  à  la  condition 
que  la  duchesse  sera  rendue,  —  plus  ou  moins  intacte,  —  à  son 
auguste  époux. 

M.  Jules  Costé  est  un  "musicien  amateur,'  es  qui  ne  veut  pas  dire 
qu'il  n'ait  tous  les  droits  possibles  au  titre  d'artiste  expérimenté 
et  consciencieux.  Il  y  a  déjà  plusieurs  années  qu'il  a  fait  ses  preu- 
ves, et  nous  avons  souvenance  d'une  certaine  polka  intitulée  le 
Carillon  de  Nancy,  qui  eut  un  très-franc  succès  aux  concerts 
Musard  de  l'hôtel  d'Osmont,  et  dont  l'effet  était  doublé  par  un 
accompagnement  obligé  de  cloches.  Ce  n'était  qu'un  début  origi- 
nal et  plein  de  promesses.  Depuis,  M.Jules  Costé  a  fait  de  sérieuses 
études;  son  talent  s'est  développé,  et  les  Horreurs  de  la  guerre 
nous  ont  révélé  un  compositeur  avec  lequel  il  faudra  désormais 
compter.  Sa  manière  est  simple,  facile,  exempte  de  prétentions; 
son  style  est  élégant,  et  sa  mise  en  œuvre  décèle  une  connais- 
sance parfaite  des  ressources  de  l'harmonie.  Il  possède  en  outre 
l'instinct  de  la  scène,  et  l'art  peu  commun  de  restreindre  ses  dé- 
veloppements dans  des  limites  raisonnables.  Aucune  longueur 
n'entrave  la  marche  de  sa  partition. 

Une  introduction  gracieuse,  de  quelques  mesures  seulement, 
précède  le  lever  du  rideau ,  et  la  pièce  s'ouvre  par  un  morceau 
d'ensemble  habilement  agencé,  dans  lequel  les  habitants  des  deux 
principautés  célèbrent  les  douceurs  de  la  paix,  du  repos  et  de  la 
promenade  à  l'ombre  des  grands  arbres.  Celte  entrée  en  matière 
est  excellente,  et  se  complète  par  un  morceau  de  nature  différente, 
où  ces  mêmes  peuples  boivent  de  la  bière  avec  leurs  sou\erains  à 
la  perpétuité  de  la  concorde  qui  règne  parmi  eux  ;  il  y  a  là  une 
phrase  enlevée  par  la  duchesse  de  Nihilbourg  et  répétée  par  les 
autres  femmes  qui  est  d'une  hardiesse  entraînante.  Comme  contraste, 
nous  avons  ensuite  des  couplets  pleins  de  charme  et  de  sentiment 
sur  cet  adage  si  connu  :  Une  chaumière  et  Ion  cœur.  Il  est  \Tai 
que  Mlle  Van-Ghell,  qui  joue  le  rôle  de  la  duchesse,  les  fait  valoir 
avec  une  rare  perfection.  Le  morceau  final  du  premier  acte,  une 
véritable  trouvaille,  dans  le  genre  bouffe,  est  chantée  tour  à  tour 
par  les  hommes  des  deux  duchés,  sur  ces  mots  :  Nous  avons  des 
fusils  se  chargeant  par  la  culasse,  et  les  femmes  s'y  unissent  par 
une  sorte  de  prière  de  l'effet  le  plus  heureux  et  le  plus  comique. 
C'est  le  morceau  capital  de  la  pièce. 

Au  deuxième  acte,  nous  citerons  un  chœur  de  femmes  sur  le 
thème  de  l'introduction^  un  duo  d'amour,  parodie  spirituelle  des 
duos  généralement  donnés  par  cette  situation,  et  une  délicieuse 
valse,  chantée  en  forme  de  récit  par  la  duchesse  sur  ces  paroles  : 
//  était  nuit.  La  reprise  du  chœur  Nous  avons  des  fusils,  termine 
de  la  façon  la  plus  heureuse  ces  horreurs  guerrières  pour  rire. 

A  la  première  représentation,  presque  tout  les  morceaux  ont  été 
bissés,  notamment  ceux  chantés  par  Mlle  Van-Ghell.  C'est  qu'en 
réalité,  il  est  difficile  d'être  plus  complètement  attrayante  que 
cette   nouvelle  étoile  ;  tout  en  elle  séduit  et  entraîne. 

Que  dire  de  Léonce  dans  le  rôle  du  duc  Ernest  de  Microbourg? 
c'est  toujours  le  comédien  bizarre  et  imprévu  que  vous  savez.  11  a 
pour  compère  dans  le  personnage  du  duc  de  Nihilbourg,  un  ac- 
teur soigneux,  un  chanteur  agréable  du  nom  de  Luce,  qui  lui 
donne  merveilleusement  la  réplique.  Il  faut  les  voir  tous  les  deux, 
à  chaque  moment  d'effusion,  s'attacher  sur  la  poitrine  une  dé- 
coration tirée  d'une. petite  boîte,  et,  quand  la  boîte  est  vide,  aller 
en  chercher  dans  l'uniforme  de  leurs  courtisans. 

N'oublions  pas,  dans  les  rôles  secondaires,  Mlle  Bonelli,  mieux 
partagée  ordinairement,  ainsi  que  Brice  et  Niveleau  qui  représen- 
tent deux  armuriers,  dans    lesquels  on  a   cru  deviner  une  inten- 
tion Chassepot. 
Nous  serions  surpris    si    l'Athénée  ne  tenait  pas  un  succès,    et 


396 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


nous  ajouterons  qu'il  sera  mérité  par  la  manière  dont  les  Horreurs 
de  la  guerre  ont  été  montées  ;  les  costumes  et  les  uniformes  alle- 
mands constitueraient  à  eux  seuls  un  véritable  attrait  de  curiosité. 

D. 


REVUE  DES_THÊÂTRES. 

Vaudeville  :  Miss  MuUon;  Autour  du  lac;  le  Petit  Voyage.  — 
Palais-Royal  :  le  Roi  d'Amatibou.  —  Porte-Saint-Martin  :  la 
Dame  de  Monsoreau.  —  Folies-Marigny  :  A  la  barque!  A  h, 
barque  ! 

Le  Vaudeville  n'y  va  pas  de  main  morte  ;  d'un  seul  coup,  il  a 
renouvelé  son  affiche,  par  l'exhibition  de  trois  pièces  nouvelles, 
dans  une  même  soirée.  La  plus  importante  a  trois  actes  et  s'ap- 
pelle Miss  Multon.  C'est  un  drame  dont  les  situations  n'offrent 
guère  de  variété,  mais  se  résument  dans  un  sentiment  maternel, 
fort  apprécié  des  masses  et  principalement  de  leur  portion 
féminine.  M.  Maurice  Delatour  n'a  pas  eu  à  se  louer  de  sa  pre- 
mière femme,  qui  est  pai'tie  en  lui  laissant  deux  enfants,  ce  qui 
ne  l'a  pas  empêché  d'en  prendre  une  seconde,  lorsqu'on  est  venu 
lui  apprendre  que  le  n°  1  avait  péri  dans  la  traversée  des  Etats- 
Unis.  Mais  c'était  un  faux  bruit;  Fernande  n'est  pas  morte,  et, 
après  quelques  années  d'absence  et  de  remords,  elle  a  été  prise 
de  la  nostalgie  du  ménage,  ou  plutôt  de  la  maternité;  sachant 
que  Maurice  a  contracté  de  nouveaux  liens,  elle  ne  songe  pas  un 
seul  instant  à  les  faire  rompre.  Elle  n'a  qu'un  but,  c'est  de  se 
rapprocher  de  ses  enfants,  et  pour  cela  elle  se  présente  au  foyer 
conjugal  sous  le  nom  de  miss  Multon,  et  s'y  fait  accepter  comme 
gouvernante.  Est-elle  tout  d'abord  reconnue  par  soa  mari  ?  C'est 
ce  que  nous  ne  saurions  affirmer.  Un  vieux  professeur  est  le  seul 
être  de  la  maison  qui  soulève  son  masque  et  qui  cherche,  mais 
vainement,  à  l'éloigner.  Fernande  a  retrouvé  son  cœur  de  mère, 
et  elle  ne  peut  se  résoudre  à  abandonner  encore  une  fois  ses 
enfants.  D'un  autre  côté,  il  y  a  un  bien  grand  danger  pour  elle  à 
affronter  chaque  jour  le  spectacle  du  bonheur  de  la  rivale  qui  lui 
a  succédé  dans  les  affections  de  Maurice.  Un  moment  arrive  où 
elle  est  prête  à  éclater  et  à  revendiquer  ses  dj-oits  d'épouse.  Mais 
alors  Maurice  n'hésite  plus;  il  accepte  la  déclaration  de  Fernande; 
seulement  il  exige  que,  pour  reprendre  sa  place,  elle  révèle  elle- 
même  à  ses  enfants  les  causes  terribles  qui  la  lui  ont  fait  perdre. 
Il  n'en  faut  pas  davantage  pour  ramener  Fernande  à  la  raison  et 
pour  la  décider  à  reprendre  la  route  de  son  exil. 

On  devine  tout  le  parti  qu'une  habile  comédienne  peut  tirer  de 
ce  rôle  de  femme  coupable,  et,  malgré  tout,  de  mère  intéressante. 
Mlle  Fargueil  a  dépassé,  sous  ce  rapport,  ce  qu'on  était  en  droit 
d'attendre  de  son  talent  et  de  sa  haute  intelligence.  Aussi,  est-ce 
à  elle  seule  qu'il  faut  attribuer  l'empressement  du  public  à  adop- 
ter Miss  Multon .  Ce  n'est  pas  la  pièce  de  MM.  Nus  et  Belot  qu'on 
applaudit,  c'est  l'actrice,  et  jamais  Mlle  Fargueil  n'a  obtenu  un 
triomphe  plus  mérité. 

On  joue  avant  Miss  Multon,  au  lever  du  rideau,  une  petite  co- 
médie sans  prétention,  intitulée  Autour  du  lac.  Encore  une 
femme  du  inonde  qui  est  prise  pour  une  cocodette  et  qui  se  venge 
du  quiproquo  en  mystifiant  son  adorateur  de  rencontre.  Un  débu- 
tant du  nom  de  Vérat,  a  réussi  dans  cette  bluette,  à  côte  de  Saint- 
Germain  et  de  Mlle  Lovely. 

Le  spectacle  se  termine  gaiement  par  une  pochade  de  M.  Labi- 
che, basée  sur  la  manie  britannique  des  nouveaux  ménages  qui, 
en  sortant  de  l'église,  montent  dans  une  chaise  de  poste  et  ac- 
complissent un  Petit  voyage,  au  hasard  du  chemin  de  fer  et  des 
auberges  de  province.  Les  tribulations  piquantes  de  Saint-Germain 
et  de  Mlle  Davril  sont  assaisonnées  par  un  rôle  narquois  de  valet, 
dans    lequel  Ai'nal  est  d'un   comique  achevé. 


M.  Labiche  n'a  pas  été  aussi  heureux  avec  le  Roi  d'Amatibou, 
dont  la  représentation  a  provoqué  une  véritable  tempête  au  théâtre 
du  Palais-Royal.  Nous  n'avons  donc  pas  à  nous  occuper  de  cette 
triste  cocasserie,  si  ce  n'est  pour  constater  que  directeurs  et  auteurs 
ont  fait  acte  de  déférence  envers  le  public,  en  la  supprimant 
après  la  troisième  épreuve  et  en  la  remplaçant  par  la  Cagnotte. 

—  A  la  Porte-Saint-Marlin,  la  reprise  de  la  Dame  de  Monso- 
reau atteint  chaque  soir  le  maximum  des  recettes,  comme  si 
c'était  la  Biche  au  bois.  Ce  retour  de  faveur  au  profit  du 
drame  historique  est  d'ailleurs  justifié  par  le  soin  extrême  que 
M.  Raphaël  Félix  a  déployé  dans  la  mise  en  scène  de  la  pièce 
de  MM.  Alexandre  Dumas  et  Maquet.  Et  puis  le  rôle  de  Chicot  est 
un  des  meilleurs  de  la  riche  cargaison  de  Mélingue.  Quelle  re- 
vanche de  Cadiol  Les  autres  personnages  ne  sont  pas  moins  bien 
distribués  cette  fois.  Maurice  Coste  représente  dignement  le  roi 
Henri  III  ;  Charles  Lemaître  a  de  bons  moments  dans  Bussy,  ainsi 
que  Charly  dans  le  duc  d'Anjou.  Brésil  est  irréprochable  sous  le 
harnais  du  sire  de  Monsoreau;  le  moine  Gorenflot  semble  avoir 
été  créé  et  mis  au  monde  pour  ce  brave  Laurent.  Enfin,  la 
Dame  de  Monsoreau  est  convenablement  tenue  par  Mlle  Léonide 
Leblanc. 

—  Pour  inaugurer  sa  prise  de  possession  du  petit  théâtre  des 
Folies-Marigny,  M.  Montaubry  avait  convoqué,  l'autre  soir,  toute 
la  presse  à  une  représentation  extraordinaire  de  sa  nouvelle 
revue,  qui  a  été  offerte  le  lendemain  au  public  véritable,  sous  le 
titre  de  :  A  la  barque!  A  la  barque!  Malgré  nos  préventions 
pour  ces  sortes  de  pièces,  dont  le  règne  commence  à  passer,  nous 
sommes  forcés  de  convenir  que  celle-ci  remplit  toutes  les  condi- 
tions voulues  pour  galvaniser  le  succès  au  delà  des  bornes  les  plus 
invraisemblables.  Les  dix  tableaux  dont  elle  se  compose  sont 
pleins  de  surprises  ingénieuses  et  de  plaisanteries  spirituelles.  Il 
n'y  a  pas  de  revue  sans  compère  ;  c'est  à  l'ancien  directeur 
Montrouge  qu'est  dévolue  cette  tâche  dont  il  s'acquitte  à  merveille 
en  compagnie  de  Mlle  Marie  Jolly.  Dans  le  défilé  des  curiosités  du 
jour,  nous  citerons  aussi  Mme  Macé-Montrouge,  au  jeu  si  entraî- 
nant, Mlle  Bade  qui  dit  à  ravir  la  jolie  musique  de  M.  Léveillé  et 
Paul  Legrand  qui  parodie  Hervé-Chilpéric  de  la  manière  la  plus 
amusante.  Ajoutons  à  la  louange  de  M.  Montaubry,  que  son  ballon 
d'essai  ne  laisse  rien  à  désirer,  au  point  de  vue  de  la  richesse  et 
du  bon  goût. 

D.  A.  D.  SAINT-YVES. 


A  notre  grand  regret,  le  défaut  d'espace  nous  force  à  remettre 
à  dimanche  prochain  une  réponse  que  nous  recevons  de  M.  Ge- 
vaert  à  la  note  de  M.  Fétis  publiée  dans  notre  n°  48. 


Nous  avons  publié  la  note  rectificative  par  laquelle  le  Moniteur 
universel,  réparant  l'omission  commise  dans  le  Catalogue  officiel 
de  l'Exposition  de  1867,  au  préjudice  de  la  maison  Philippe  H. 
Herz  neveu  et  Cie,  constatait  que  cette  jeune  maison  était  la  seule, 
en  France,  qui  eût  obtenu  la  médaille  d'or  pour  la  perfection  et  la 
supériorité  de  ses  instruments. 

A  l'époque  de  l'inauguration  de  ses  salons  de  la  rue  Scribe, 
en  1864,  la  presse  avait  été  unanime  à  reconnaître,  avec  tous  les 
artistes,  les  progrès  énormes  que  le  chef  de  la  nouvelle  manufac- 
ture venait  de  réaliser  dans  la  fabrication  des  pianos  ,  et  l'admi- 
j.ation  provoquée  alors  par  ses  produits  faisait  facilement  prévoir  la 
victoire  remportée  à  l'Exposition  de  1867. 

Dans  cette  industrie  de  la  fabrication  des  pianos,  qui  a  pris  tant 
d'extension  depuis  quelques  années,  cinq  médailles  d'or  seulemen 


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DE  PARIS. 


397 


ont  été  accordées  par  le  jury  international  :  deux  à  la  facture 
américaine,  une  à  l'Autriche,  une  à  l'Angleterre,  une  enfin  à  la 
facture  française,  décernée  à  M.  Philijjpe  H.  Hcrz  neveu  et  Cie. 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 

»**  Le  théiltrc  impérial  de  l'Opéra  a  donné  lundi  et  mercredi  les  Hu- 
guenots ;  vendredi  liainlet.  -  Aujourd'hui  rcprésenlation  extraordinaiio 
de  Guillaume  Tell. 

t*^  Faust,  interprété  par  Mlles  Nilsson  et  Mauduit,  Faure,  Colin  et 
Devoyod,  va  entrer  en  répétition,  et  on  espère  qu'il  pourra  Cire  donné 
en  février  prochain.  —  Avant  son  départ  pour  Rome,  M.  Gounod  a  re- 
mis à.  M.  Perrin  la  musique  du  divertissement  qui  sera  exécuté  pendant 
la  nuit  de  Walpurgis  et  aussi  celle  d'un  nouveau  morceau  ajouté  au  rôle 
de  Méphistophélès. 

^%  En  attendant  le  Vert-Vert  d'Offenbach,  la  direction  du  théâtre  de 
rOpéra-Comique  se  propose  de  reprendre  Jagnarila  d'Halévy.  —  La 
semaine  prochaine  aura  lieu  la  représentation  à  bénéfice  due  à 
Mme  Ugalde.  La  célèbre  cantatrice  s'y  montrera  dans  les  rôles  qui 
furent  le   plus  à  son  avantage. 

^*^  Mme  Adelina  Pat'i  a  pu  enfm  reparaître  hier  dans  Rosine  d'/i  Bar- 
hiere:  inutile  de  dire  comment  la  diva  a  été  reçue  par  un  public  en- 
thousiaste, qui,  malgré  une  augmentation  de  prix,  remplissait  la  salle 
jusqu'aux  combles.  —  Espérons  pour  M.  Bugier  que  la  santé  de  la 
célèbre  cantatrice  lui  permettra  de  donner  sans  interruption  les  quelques 
représentations  dont  ses  admirateurs  ont  encore  à  jouir  avant  son  départ 
pour  la  Russie.  —  Mardi  et  jeudi  la  direction  a  suppléé  à  son  absence 
parle  Trovatore  et  Riç/oletto.  C'est  Mlle  Krauss  qui  la  remplaçait  dans  le 
rôle  de  Gilda.  —  N'eus  n'aurons  pas  le  mauvais  goût  et  nous  ne  commet- 
trons pas  la  maladresse  d'établir  des  comparaisons.  Elles  sont  toujours 
malséantes  et  souvent  désagréables.  On  ne  compare,  d'ailieurs,  que  deux 
choses  homogènes,  deux  talents  de  la  même  nature.  Nous  redirons  seule- 
ment, car  nous  l'avons  déjà  dit,  i[ue  Mlle  Krauss  est  une  excellente  mu- 
sicienne. C'est  ce  qui  lui  permet  d'aborder  tous  les  rôles,  depuis  Sémi- 
rainis  jusqu'à  Piccolino  (qu'elle  va  bientôt  créer  dans  l'opéra  de  MM.  Sar- 
dnu  et  de  Lauzières,  n)usique  de  Mme  de  Grandval).  Elle  sait  chanter, 
et  sa  voix  est  souple  et  étendue;  elle  sent  ce  qu'elle  chante,  et  sait  trou- 
ver des  accents  dramatiques.  Le  seul  tort  qu'a  eu  la  direction,  a  été 
de  l'engager  cinq  ou  six  ans  trop  tard.  Quoi  qu'il  en  soit,  on  l'a 
vivement  applaudie  dans  le  rôle  de  Gilda,  et  elle  y  a  été  parfaitement 
secondée  par  tous  ses  partenaires.  . 

**^  C'est  à  partir  de  la  semaine  prochaine  que  Tamberlick  commen- 
cera ses  représentations  ;  à  la  Gn  du  mois  débutera  Mlle  Minnie  Hauck, 
et  le  10  janvier  Mlle  de  Murska  se  mettra  à  la  disposition  de  -M.  Bagier. 

*%  Le  théâtre  Lyrique  s'occupe  avec  activité  de  Don  Quichotte,  dans 
lequel  un  jeune  artiste,  nommé  Giraudet.  créera  le  rôle  du  Chevalier  de 
la  Manche.  Ricnzi  est  également  à  l'étude.— En  attendant,  le  Val  d'An- 
dorre, le  Barbier  et  Iphifjénic  forment  un  répertoire  qui  attire  le  public. 
—  L'exécution  à^Iphigénie  a  beaucoup  gagné  depuis  son  apparition. 

^**  Le  théâtre  des  Bouffes-Parisiens  vient  de  faire  débuter,  dans  Lis- 
chen  et  Frilzchen,  une  artiste  jeune  et  accorte,  Mme  Rayniande,  qui  pa- 
raissait pour  la  première  fois  sur  le  théâtre.  Mme  Raymonde  n'a  qu'à 
se  féliciter  de  l'accueil  encourageant  qu'elle  a  reçu.  Le  rôle  de  Fritzchen 
est  une  des  bonnes  créations  de  Désiré,  qui  y  fait  preuve  d'excellente 
bouffonnerie.  —  La  semaine  prochaine,  passera  sans  doute  la  pièce  de 
MM.do.Xajac  et  Detfès.  — Pour  les  débuis  de  Hamburger,  on  donnera  une 
bouffonnerie  de  MM.  .laime  et  Gille,  musique  de  Léo  Delibes,  et  c'est 
dans  un  nouvel  ouvrage  d'Offenbach,  en  collaboration  avec  MM.  Meilhac 
et  Halévy,  la  Diva,  que  reparaîtra  Mlle  Schneider  à  ce  théâtre. 

»%  M.  Sauvage  vient  de  traiter,  avec  M.  Martinet,  pour  faire  jouer 
sur  son  théâtre  Gille  Ravisseur,  de  Grisar,  dont  il  a  é^rit  le  poëme.  Cet 
ouvrage  qu'on  n'a  pas  entendu  depuis  plu^ieurs  années,  sera  revu 
avec  plaisir  aux  Fantaisies-Parisiennes.— Léopold  Ketten,  le  jeune  ténor 
qu'on  a  entendu  au  théâtre  italien,  a  été  engagé  à  ce  théâtre,  pour 
créer,  dans  l'opéra  de  Ricci,  le  principal  rôle  destiné  d'abord  au  ténor 
Nicot.  —  M.  Martinet  avait  également  annoncé  le  Toréador;  mais  la  di- 
rection du  théâtre  de  l'Opéra-Comique,  qui  le  donnera  mardi,  l'nyant  joué 
depuis  moins  d'un  an  et  un  jour,  lui  en  interdit  judiciairement  la  re- 
présentation. 

*'.j  L'Eldorado  passe  définitivement  à  l'état  de  théâtre.  Après  te  Sou- 
per d'Arlequin,  \oici  qu'on  y  donne  l'Hisluire  d'un  Sou,  vaudeville  de 
Clairvilliï  et  Lambert  Tliiboust,  joué  il  y  a  quelques  années  au  Palais- 
Royal,  et  que  M.  Léon  Roques  vient  de  transformer  en  opérette  en  y 
adaptant  une  fort  jolie  musique  de  sa  composition. 

»*^  Plusieurs  directions  théâtrales  de  province  traversent  en  ce  mo- 
ment de  rudes  épreuves  par  suite  des  exigences  déraisonnables  et  tou- 
jours croissantes  du  public,  exigences  qui  se  traduisent  par  des  violences 


et  des  brutalités  inqualifiables.  Elles  ont  été  si  loin  à  Toulouse  que  l'au- 
torité a  dû  fermer  le  théâtre  du  Capitole,  et  qu'à  IJijon  et  ailleurs  pareils 
excès  cniraiiieiont  sans  doute  pareilles  mesures. 

^*,  Ou  nous  écrit  de  Bordeaux  :  «  Le  directeur  de  notre  Grand-Théâtre 
compte  autant  de  succès  que  de  repré.sentations.  Au  nombre  des  plus 
accentués  il  faut  mentionner  Martiui;  chaque  fois  que  l'opéra  si  mélo- 
dieux de  Flolow  est  annoncé,  les  bureaux  de  location  ne  désemplissent 
pas  et  on  renvoie  du  monde.— La  pièce  est  d'ailleurs  interprétée  d'une 
façon  hors  ligne  par  Mlle  Baretti  et  Peschard,  qui  recueillent  tous  les 
soirs  des  bravos  aussi  chaleureux  que  légitimes.  » 

*'•*  On  lit  dans  le  Guide  musical  de  Bruxelles  :  «  La  reprise  de  l'Afri- 
caine vient  d'avoir  lieu  sur  notre  scène  lyrique  avec  le  plus  brillant 
succès.  En  attendant  que  nous  en  parlions  avec  détail,  bornons-nous  à 
constater  que  .Mme  Franchino,  une  débutante,  chargée  du  rôle  d(;  Sélika. 
s'est  montrée  à  la  hauteur  de  .sa  tâche,  et  qu'elle  a  reçu  du  public  un 
excellent  accueil.  Ajoutons  que  M.  Warot,  qui  abordait  pour  la  première 
fois,  à  Bruxelles,  le  rôle  de  Vasco  de  Gama,  un  de  ses  succès  de  Paris, 
en  a  vaillamment  surmonlé  toutes  les  difficultés.  Jamais  le  duo  du  qua- 
trième acte  n'avait  été  aussi  bien  chanté  à  Bruxelles.  Les  artistes  ont 
été  chaleureusement  applaudis  et  rappelés  à  la  chute  du  rideau.  » 

***  On  nous  écrit  de  la  même  ville  que  la  l™  représentation  de  la 
Périchole,  montc'e  avec  le  plus  grand  soin  par  M.  Delvil,  a  obtenu  un 
succès  fou  sur  le  théâtre  des  Galeries-Saint-Huhert.  Mme  Delvil  a  été 
ravissante  dans  le  rôle  de  la  Périchole,  et  l'on  n'a  cessé  depuis  le  com- 
mencement jusqu'à  la  fin  d'applaudir  la  musique  du  maestro  et  de 
ses  interprètes.  Les  couplets  :  Les  femmes,  les  femmes,  ceux  de  l'I- 
vresse; la  complainte  -.11  grandira;  la  lettre  de  la  Périchole,  n'ont  pas 
produit  moins  d'effet  qu'à  Paris.  C'est  une  suite  longue  et  assurée  de 
représentations  fructueuses  pour  M.  Delvil. 

***  On  mande  de  Madrid  que  le  départ  de  Tamberlick  va  porter  le 
dernier  coup  au  théâtre  de  POriente,  dont  la  situation,  par  suite  des  af- 
faires politiques ,  était  déjà  fort  précaire.  —  Mme  Gueymard  se  pré- 
parait à  retourner  à  Paris. 

*'^.  Les  recettes  des  théâtres  subventionnés,  théâtres  secondaires,  con- 
certs, cafés-concerts,  etc.,  ont  atteint  dans  le  mois  de  novembre  le  chiffre 
de  1,783,151  fr.  10  c. 


NOUVELLES  DIVERSES. 


^**  Le  concert  populaire  de  dimanche  derniers'ouvraitparlamagnifique 
ovtverhne  d'Athalie,  de  Mendeissohn,  dont  l'effet  a  été  très-grand,  comme 
d'ordinaire.  La  symphonie  en  fa  de  Beethoven,  qui  venait  ensuite,  a  dû  au 
charme  irrésistible  qui  y  règne  d'un  bout  à  l'autre,  d'être  applaudie,  quoique 
les  mouvements  en  aient  été  certainement  trop  précipités.  Cette  accélération 
s'est  fait  surtout  remarquer  dans  le  ravissant  allegretto  scherzando  qu'on 
a  néanmoins  bissé  avec  acclamations.—  On  a  fait  le  meilleur  accueil  au 
fragment  de  la  symphonie  inachevée  en  si  mineur  de  Schubert  (déjà 
exécuté  l'année  dernière),  une  des  plus  heureuses  et  des  plus  poétiques 
inspirations  de  ce  maître  chez  qui  la  fibre  sentimentale  devait  être  bien 
vivace  et  bien  vraie,  puisque,  dans  son  œuvre  immense,  dont  peu  de 
parties  sont  réellement  faibles,  il  intéresse  constamment  par  elle  seule 
et,  pour  ainsi  dire,  sans  l'aide  de  la  science  qu'il  ne  s'était  pas  donné  le 
temps  d'acquérir.— M.  Heymann,  un  tout  jeune  homme,  élève  d'Alard  et 
lauréat  des  derniers  concours  du  Conservatoire,  a  exécuté  le  premier  allegro 
du  huitième  concerto  de  Rode  avec  beaucoup  de  pureté  et  de  justesse, 
et  un  son  très-joli  quoique  un  peu  faible;  mais  il  paraît  assez  bien  or- 
ganisé pour  gagner  sous  ce  rapport.  —  Une  tempête  comme  le  Cirque 
n'en  avait  pas  encore  vu  a  été  soulevée  par  le  prélude  du  Lohengrin  de 
Wagner,  dont  le  bis  était  demandé  par  une  fraction  de  l'auditoire,  tandis  qu'il 
était  repoussé  par  l'autre.  Après  avoir  vainement  essayé  de  le  faire  ré- 
péter, M.  Pasdeloup,  que  le  sang-froid  a  abandonné  un  instant,  a  pro- 
noncé quelques  paroles  intempestives,  sans  doute,  mais  dont  la  conclu- 
sion, très-raisonnable  du  reste,  renvoyait  à  la  fin  du  concert  la  répé- 
tition du  morceau  contesté,  ce  qui  laissait  aux  opposants  la  faculté  de 
l'entendre  ou  de  s'en  aller.  Espérons  que  ces  regrettables  conflits  ne  se 
reproduiront  plus! 

„:*«  Aujourd'hui  dimanche  à  2  heures,  dans  la  salle  du  Conservaloire, 
a  lieu  le  premier  concert  de  la  Soci('té  des  concerts;  il  sera  dirigé  par 
Georges  Hainl,  et  en  voici  le  programme:  1°  symphonie  en  fa,  de  M. 
Gouvy  ;  —  2"  98"  psaume  (double  chœur),  de  Mendeissohn  ;  —  3°  ada- 
gio du  septuor,  de  Beethoven,  exccuié  par  deux  clarinettes,  deux  cors, 
deux  bassons  et  tous  les  instruments  à  cordes;  —  i"  chœur  des  Pèle- 
rins du  TannhaU-er,  de  R.  W^igncr;  —  S' .symphonie  en  ut  majeur,  de 
Beethoven . 

,^*^  Voici  le  programme  du  neuvième  concert  populaire  de  musique 
classique,  qui  aura  lieu  aujourd'hui  à  '2  heures  au  cirque  Napoléon, 
sous  la  direction  de  M.  J.  Pasdeloup  :  1"  symphonie  en  la  mineur  de 
Mendeissohn  ;  —  2"  adagio  du  36°  quatuor  d'Haydn  ,   exécuté  par  tous 


15EVUE  lîT  GAZETTE  MUSICALE 


les  instruments  à  cordes;  —  3°  ouverture  de  Léonore.  (n"  3),  de  Beetho- 
ven ;  —  -4°  concerto  en  sol  mineur  pour  piano,  de  Saint-Saijns  (andante 
soslenuto,  sclierzo),  exécuté  par  l'auteur  (première  audition);  —  S"  ou- 
verture d'06eron,  de  Weber. 

***  Mardi  dernier,  la  salle  Sax  s'est  ouverte  pour  la  première  fois 
aux  soirées  intimes  et  artistiques  dirigées  par  Mlle  Virginie  Huet  et 
M.  d'Ernesti,  pianistes.  Un  public  d'élile,  des  artistes  d'un  mérite  re- 
connu, l'exécution  d'œuvres  intéressantes,  permettent  de  bien  augurer 
de  l'avenir  de  cette  entreprise.  La  seconde  et  la  troisième  soirée  sont 
fixées  aux  mardis  1 3  et  29  de  ce  mois. 

***  Mme  Pierson-Bodin  a  donné,  dimanche  29  novembre,  sa  première 
matinée  musicale,  avec  le  concours  d'excellents  artistes  et  devant  un  bril- 
lant auditoire.  Un  sextuor  de  Mme  Farrencpour  piano  et  instruments  à 
vent,  a  été  interprété  à  la  perfection  par  Mme  Pierson,  MM.  Taffanel, 
Lalliet,  Turban,  Schlottmann  et  Verroust.  M.  Ad.  Lebrun,  dans  une  so- 
nate de  Haydn  avec  Mme  Emile  Louis;  M.  Schlottmann,  dans  un  solo  de 
cor  délicieux;  MM.  Lalliet  et  Taffanel,  dans  un  duo  pour  hautbois  et 
flûte  sur  Guillaume  Tell;  Mlle  Carmen  Munoz  dans  une  chanson  espa- 
gnole d'Yradier,  ont  proi'oqué  les  plus  vils  applaudissements. 

***  Dimanche  prochain,  20  décembre,  à  huit  heures  du  soir,  dans  la 
grande  salle  de  la  Sorbonne,  concert  au  profit  de  l'insiitut  de  la  Provi- 
dence. On  y  entendra,  pour  la  partie  vocale,  Mlle  M.  Bruneili,  M.  Ma- 
rochetti,  etpour  la  partie  instrumentale  Mlle  Valérie  Janscn,  MM.  Sara- 
sate  et  Jules  Lasserre. 

»**  M.  Dorus,  professeur  de  flOite  au  Conservatoire,  a  donné  sa  démis- 
sion pour  raison  de  santé.  11  est  remplacé  par  M.  Allés. 

^*^,  Mlle  Minnie  Hauck  et  Capoul  viennent  d'être  engagés  pour  chan- 
ter dans  un  grand  concert  donné  par  le  Cercle  du  Nord  à  Lille. 

^*^  Mme  Adelina  Paiti  vient  d'offrir  à  la  tombola  des  Artistes  dra- 
matiques une  magnifique  coupe  d'argent  ciselé  de  la  maison  Barbedienne. 

***  M.  Cappa,  musicien  espagnol  distingué,  auteur  de  nombreuses  com- 
positions fort  appréciées  par  delà  les  monts,  est  en  ce  moment  à  Paris . 

,^'*,p .  L'éditeur  Colombier  vient  de  mettre  en  vente  la  musique  du  Pe- 
lit-Poucet,  se  composant  des  airs  détachés  de  la  partition  pour  piano  et 
chant,  et  des  airs  de  danse  de  Strauss  très  réussis.  On  sait  le  suc- 
cès qu'a  obtenu  à  l'audition  le  charmant  ouvrage  de  M.  Laurent  de 
Rillé  ;  la  môme  faveur  est  réservée  à  la  lecture  de  sa  partition . 

^*,  Depuis  plus  de  vingt  ans,  M.  Alphonse  Royer  amassait  et  classait 
les  documents  relatifs  à  son  Histoire  universelle  du  Théâtre,  dont  les  deux 
premiers  volumes  viennent  de  paraître  chez  l'éditeur  Franck.  Après  quel- 
ques vues  génér'ales  sur  le  théâtre  antique,  l'auteur  passe  successive- 
ment en  revue,  époque  par  époque,  les  théâtres  des  différents  peuples, 
et  il  esquisse  toutes  les  figures,  grandes  ou  petites,  qu'évoque  son  sujet. 
Le  second  volume  s'arrête  au  début  du  xvii"  siècle.  Les  sympathies  du 
public  ne  feront  pas  défaut  à  cette  œuvre  immense,  qui  a  demandé  tant 
de  recherches  et  qui  révèle  tant  d'érudition  et  de  goût.  Ce  livre,  recom- 
mandé d'ailleurs  par  un  nom  à  bon  droit  estimé  et  par  des  éludes  pré- 
liminaires fort  intéressantes,  entre  autres  dos  traductions  de  Tirso  de 
MolinaetdeCarloGozzi,  aura  bien  certainement  tout  le  succès  qu'il  mérite. 

j*^  Nous  croyons  être  utile  aux  professeurs  de  piano  et  à  tous  ceux 
qui  jouent  de  cet  instrument,  en  leur  recommandant  le  tabourei-Conla- 
min.  Commodes,  solides,  élégants  et  légers,  ces  sièges  s'exhaussent  spon- 
tanément et  s'abaissent  avec  rapidité,  .sans  pivoter  sur  eux-mêmes;  ils 
portent  une  échelle  graduée  qui  permet  au  maître  de  modifier  et  de  corriger 
les  mauvaises  positions  de  l'élève.  On  trouve  le  tabouret-Contamin,  dont 
le  prix  n'est  pas  plus  élevé  que  les  tabourets  et  chaises  à  vis,  à  la  ma- 
nufacture de  pianos  de  Henri  Herz  et  au  magasin  de  musique  Brandus, 
103,  rue  de  Richelieu. 

^%  Une  souscription  est  ouverte  en  Allemagne  pour  élever  un  monu- 
ment à  la  mémoire  de  Gliick  dans  sa  ville  natale,  Weidenwang,  district 
de  Beilngries,  dans  le  Haut-palatinat  bavarois.  Les  sommes  doivent  être 
adressées  à  M.  Fischer,  bailli  de  Beilngries. 

^*^  Un  service  funèbre  a  été  célébré  à  Rouen,  dans  Téglise  de  Sainte- 
Madeleine,  à  la  mémoire  de  M.  Verdrel,  maire  de  cette  ville  ;  toutes  les 
notabilités  rouennaises  y  assistaient.  M.  Charles  Vervoitte,  ancien  maître 
de  chapelle  de  la  cathédrale,  remplissant  aujourd'hui  les  mêmes  fonc- 
tions à  l'église  Saint-Roch ,  à  Paris,  avait  tenu  à  honneur  d'y  apporter 
son  concours;  deux  des  meilleurs  artistes  de  sa  maîtrise  ont  chanté, 
sous  sa  direction ,  des  morceaux  d'un  très-beau  caractère ,  qui  n'ont  fait 
qu'ajouter  à  l'imposant  effet  de  cette  cérémonie. 

»*»  L'éditeur  Jules  Heinz  a  interjeté  appel  du  jugement  de  première 
instance  qui  l'a  condamné  en  200  francs  de  dommages-intérêts  envers 
M.  Ch.  Dancla,  dans  un  différend  ayant  pour  objet  des  titres  de  mor- 
ceaux de  musiquiî  publiés  il  y  a  dix  ans. 

if*.  Notre  collaborateur  Arthur  Pougin  vient  de  réunir  en  une  élé- 
gante brochure  les  articles  qu'il  a  consacrés,  dans  la  Revue  et  Gazette 
musicale,  a  la  mémoire  de  Léon  Kreutzer.  Cette  brochure,  intitulée  Léon 
Kreutzer,  et  tirée  seulement  à  cinquante  exemplaires,  se  trouve  chez 
MM.  Liepmannssohn  et  Dufour,  à  la  librairie  ancienne  et  moderne,  H, 
rue  des  Saints-Pères. 


«%  MM.  Tessier  et  C',  longtemps  établis  à  Tours,  se  proposent  d'ouvrir 
prochainement  un  magasin  pour  la  vente  de  la  musique  et  des  instru- 
ments, rue  de  Rivoli,  n">  •Ili. 

**»  L'éminent  pianiste  compositeur  W.  Kriiger,  ouvre  un  cours  de 
piano  que' son  nom  et  son  talent  recommandent  suffisamment.  Voici 
d'ailleurs  en  quels  termes  il  motive  sa  détermination  : 

«  Une  longue  expérience  acquise  dans  l'enseignement  du  piano,  et 
affirmée  depuis  spîze  années  par  les  réunions  annuelles  de  mes  élèves, 
m'autorise  à  fonder  une  école  de  piano  classique  et  moderne. 

»  Deux  motifs  principaux  me  guident  dans  cette  entreprise  : 

»  Le  premier  est  de  prendre  l'élève  dès  le  début  de  son  éducation  mu- 
sicale, pour  le  conduire  progressivement  au  but  qu'il  doit  atteindre,  au 
moyen  d'un  enseignement  méthodique; 

.  Le  second  est  d'offrir  au  public  cet  enseignement  dans  les  condi- 
tions qui  doivent  en  faciliter  la  gér.éralisation. 

»  J'ai  la  conviction  qu'apportant  à  cette  œuvre  ma  direction  person- 
nelle, tout  mon  zèle  et  tout  mon  dévouement,  j'obtiendrai  bientôt  de» 
résultats  dignes  de  m'assurer  la  faveur  des  personnes  qui  désirent  faire 
profiter  leurs  enfants  de  l'enseignement  de  mon  Ecole. 

>'  W.  Krugek. 
»  Pianiste  de  S.  M.  le  roi  de  IVurtemberg.  » 

»**  Notre  collaborateur  M.  Mathieu  de  Monter  vient  d'épouser  Mlle 
Louise-Amélie  Bonneville. 


,**  On  annonce  la  mort  d'Auguste  Marque,  violoniste,  l'un  des  doyens 
des  arti,>.tes  musiciens  français.  Né  à  Paris  le  26  janvier  1781,  il  avait 
été  élève  du  célèbre  chevalier  de  Saint-Georges  et  de  Navoigille,  puis 
chef  d'orchestre  des  bals  du  prince  de  Condé  et  du  duc  d'Orléans. 

.*„,  Un  de  nos  vaudevillistes  les  plus  applaudis  de  1813  à  1840,  un 
librettiste  qui  fut  le  collaborateur  d'Hérold,  et  écrivit  avec  lui  Charles  de 
France  et  les  Troqucurs ,  M.  Achille  d'Artois  de  Bournonville,  vient  de 
mourir  îi  Versailles,  âgé  de  soixanlcdix-sept  ans. 

*%  On  annonce  aussi  la  mort  :  à  Londres,  de  Desmond  Henry  Ryan , 
critique  musical  distingué,  el  sub-editor  â\i  «Musical  World»  depuis  1846  ; 
—  ;i  Milan,  du  maestro  Ronzoni,  âgé  de  77  ans,  ancien  chef  d'orchestre 
du  théâtre  d'Odessa;  —  à  .New-York,  d'un  des  critiques  musicaux  de 
cette  ville,  Edouard  Rimack,  âgé  de  36  ans,  né  dans  la  Pologne  prus- 
sienne. 


ÉTRANGER 

^,*^  Bruxelles.  —  Il  y  a  des  concerts  de  toutes  sortes;  il  y  en  a  de 
sérieux  et  de  frivoles,  de  robustes  el  de  délicats.  11  y  a  des  concerts  appro- 
priés à  tous  les  degrés  de  culture  musicale  et  de  dilettantisme,  des  con- 
certs du  passé  et  de  l'avenir;  des  concerts  de  musique  d'ensemble  et  de 
virtuosité  privée.  Celui  dont  nous  allons  parler  n'appartient  à  aucune  de 
ces  catégories.  Il  est  à  part,  comme  espèce  et  comme  genre;  il  se  dis- 
tingue des  autres  autant  par  ses  éléments  que  par  les  impressions  des 
auditeurs  qui  ont  eu  la  bonne  fortune  d'y  être  admis.  C'était  un  concert 
sans  grandes  affiches,  sans  pompe  solennelle,  en  petit  comité,  ayant  pour 
assistants  un  nombre  limité  de  fervents  amateurs.  Dans  cette  matinée 
rare  et  charmante,  on  a  entendu  Mme  Pleyel,  qui,  depuis  plusieurs 
années,  se  montrait  avare  d'un  talent  dont  on  se  demande  si  elle  avait 
bien  le  droit  de  priver  les  amis  de  la  musique,  attendu  que  quiconque 
possède  de  grandes  facultés  d'artiste  est  tenu  d'en  user  au  profit  du  pu- 
blic, non  du  profanum  vulgus ,  mais  des  personnes  capables  de  l'appré- 
cier. On  a  d'abord  entendu  un  trio  de  Mendel.ssohn,  dans  lequel  Mme  Pleyel 
avait  pour  partenaires  MM.  Beumer  et  Massart;  superbe  début  offrant  le 
double  intérêt  d'une  composition  magistrale  et  d'une  interprétation  accom- 
plie, où  la  vaillante  artiste  met  tout  ce  qui  est  possible,  et  plus  encore, 
de  puissance,  de  grâce,  d'élégance,  de  brillantes  couleurs  et  de  nuances 
délicates;  rendant  admirablement  la  pensée  du  maître;  faisant  apparaître 
Mendelssohn  tout  entier  dans  son  œuvre.  Des  mélodies  très-originales  de 
Ferdinand  Hiller,  parfaitement  chantées  par  M.  Warnots ,  ont  séparé  le 
trio  de  Mendelssohn  de  deux  études  oii  Mme  Pleyel  a  déployé  toute  la 
puissance  et  tout  le  charme  d'un  talent  inépuisable  en  ses  ressources. 
Deux  choses  dominent  dans  l'exécution  des  pianistes  de  notre  époque  : 
la  vigueur  et  la  grande  vélocité.  Ces  deux  choses,  Mme  Pleyel  les  a  ; 
elle  y  joint  la  grâce  et  la  séduction  qui  ont  malheureusement  disparu 
du  domaine  du  piano.  Ce  qu'elle  possède  encore,  c'est  l'art  de  varier  les 
timbres  de  l'instrument,  d'en  tirer  des  sons  qui  ne  se  produisent  sous 
aucune  autre  main  que  la  sienne.  L'inexorable  mécanique  disparaît;  le 
moyen  matériel  du  coup  de  marteau  semble  être  supprimé  :  la  corde 
sonore  vibre  pure  et  moelleuse.  Le  piano  ne  se  borne  pas  à  retentir;  il 
chante;  chaque  note  a  un  accent  et  un  sens.  Le  grand  attrait  de  cette 
séance  où  tout  fut  attrayant,  c'était  la  transcription  pour  le  piano  de  la 
Révolte  de  Struensée  de  Meyerbeer,  avec  le  chœur  invisible  chanté  par 
les  membres  de  la  Réunion  Lyrique.    Ce  fut  merveille  vraiment  d'en- 


UE  PAhIS 


399 


tendre  comme  le  piano  rc-niplaça  l'orcheslrc,  comme  il  en  reproduisit 
tous  les  efifets,  tomes  les  sonorités.  A  peine  est-il  permis  d'appeler  cet 
accompagnement  une  réduction ,  tant  il  rendait  complètement  dans  ses 
masses  comme  dans  ses  détails  la  p;irlition  s^mplioniquo.  Quelque  invrai- 
semblable que  cola  soit,  il  est  certain  que  le  talent  de  Mine  l'ievcl  s'est 
élevé,  pendant  ces  dernières  années  de  retraite  et  d'études,  à  un  degré 
auquel  il  n'atteignait  pas  à  l'époque  où  l'on  ne  supposait  point  qu'il  put 
grandir  encore.  Voilà  ce  que  se  disaient  tous  ceux  qui  avaient  assisté  à 
cette  belle  et  intéressante  matinée  dont  ils  conserveront  un  précieux 
souvenir.  L'excellent  instrument,  joué  par  Mme  Pleyel  dans  cette  ma- 
tinée, sort  des  ateliers  de  la  mai.'^on  Pleyel,  Wolff  et  Cie. 

^*^  Gand.  —  L'Africaine,  qui  dans  l'origine  avait  obtenu  un  si  grand 
succès  sur  notre  théâtre,  vient  d'être  reprise  à  la  grande  satisfaction  de 
notre  public,  qui,  depuis  longtemps,  n'avait  été  k  pareille  fête;  l'exécu- 
tion est  de  beaucoup  supérieure  à  celle  que  nous  avons  eue  déjà  du 
chef-d'œuvre  de  Meyerbeer.  Mme  Smitz-Erambert,  tout  simplement 
magnifique  dans  le  rôle  de  Sélika,  s'est  vue  l'objet  des  bravos  les 
plus  enthousiastes.  Le  baryton  Lepers  (Nelusko),  le  ténor  Cazabon 
(Vasco)  et  Mlle  Guérin  l'ont  parfaitement  secondée. 

n:*^  Londres.  —  La  Sacred  Harmonie  Society  a  repris  ses  concerts. 
L'oratorio  Naaman,  de  Michel  Costa,  a  été  exécuté  à  la  première  séance 
avec  son  succès  habituel. 

fy  Fribourç/  en  Brisgau.  —  Un  nouvel  opéra.  Le  Roi  Georges,  paroles 
et  musique  du  directeur  de  musique  Ehrlich,  de  Magdebourg,  vient  d'être 
représenté  pour  la  première  fois  et  a  réussi. 

^*^  Berlin. —On  va  monter  Dinorah,  le  seul  ouvrage  de  Meyerbeer  qui 
n'ait  pas  encore  été  représenté  ici.  Les  rôles  sont  distribués  à  Mlle  Mathilda 
Sessi  qui  sera  une  excellente  Dinorah,  à  MM.  Betz  (Hoël)  et  Wo- 
worsky  (Corentin).  —  Mlle  Mallinger,  du  théâtre  de  Dresde,  vient  d'être 
engagée  à  l'Opéra;  son  début  n'aura  lieu  qu'au  mois  de  novembre  de 
l'année  prochaine.  —  Le  Voyage  en  Chine  de  F.  Bazin  retrouve  au 
théâtre  de  Friedrich-Wilhelmsiadt  le  succès  qui  l'a  accueilli  en  18(57 
au  Wallner-Theater. 

Leipzig.  —  On  a  exécuté,  au  huitième  concert  du  Gewandhaus,  la 
cantate  avec  chœurs  Salamis  (chant  de  victoire  des  Grecs)  de  Fr.  Gerns- 
helm,  qui  a  obtenu  un  très-beau  succès.  La  musique  de  M.  Max  Bruch 
sur  le  même,  texte,  a  été  déjà  reçue,  il  y  a  quelque  temps  par  le  même 
public,  d'une  manière  aussi  favorable. 

^,*4  Venise.  —  Le  théâtre  de  San-Benedetfo,  pour  qui  Rossini  a  écrit 
l'Italiana  in  Algieri  et  Edoardo  e  Crislina,  s'appellera  désormais  «  Teatro 
Rossini.  »  Le  3  décembre,  on  a  fêté  la  nouvelle  dédicace  par  une  repré- 
sentation  extraordinaire   composée    exclusivement  d'œuvres  du  maître. 

**,t  Saint-Pétersbourg.  —  Mme  Lucca  est  toujours  malade,  et  Graziani, 
indispose  à  son  tour,  a  dû  être  remplacé  pir  Steller,  qui  a  chanté,  du 
reste,  la  Traviata  et  Unballo  in  maschera  d'une  façon  très-remarquable. 
Mme  Volpini  a  été  applaudie  avec  enthousiasme  dans  ces  deux  opéras  ; 
grâce  à  elle,  on  attend  sans  trop  s'impatienter  le  rétablissement  de 
Mme  Lucca. 

j^.**  Woscou.  —  Mlle  Sarolfa  a  débuté,  le  4  décembre,  dans  Don  Gio- 
vanni, avec  un  succès  colossal  ;  elle  a  été  acclamée  et  rappelée  un  grand 
nombre  de  fois.  Elle  a  dû  chanter  ensuite  la  Traviata. 


if*jj.  Hais  de  VOpèra.  —  Samedi  19  décembre,  l""'  liai  masqué.  SinAiiss 
et  son  orchestre.  Les  portes  ouvriront  à  minuit.  S'adresser  pour  la  lo- 
cation, rue  Drouot,  3. 

,^*,i,  Les  bals  du  Cirque  de  l'Impératrice,  dont  l'orchestre  est  dirigé  par 
Marx,  continuent  à  jouir  de  la  vogue  du  public.  Les  mardis  et  verAredis, 
grandes  soirées  dansantes.  Les  dimanches  le  prix  est  réduit  à  3  francs. 

Le  mardi  22  décembre,  inauguration  des  Bols  masqués. 

^*^,  Salle  Valentino.  —  Le  grand  Festival  k  la  mémoire  de  Rossini  a 
définitivement  placé  les  Concerts  Arban  au  premier  rang.  —  Soirée  com- 
plète et  intelligemment  conduite.  —  Grand  succès  pour  Mme  de  Baunay, 
MM.  Idrac,  Echetto,  Mourey  et  les  Enfants  de  Lutèce.  La  deuxième  au- 
dition a  encore  été  plus  brillante  que  la  première.  —  Les  Fêtes  des 
Fleurs,  de  chaque  Mardi,  sont  dorénavant  inscrites  sur  le  carnet  du 
monde  amateur  de  plaisirs.  —  Samedi,  19  décembre,  premier  grand 
Bal  masqué. 


le  Directeur  ;  S.   UUFOUH. 


Ch-ez  G.  BRANDUS  et  S.  DCFOVR,  éditeurs,  405,  rue  de  Richelieu 


IIorceaii3t  de  Piano  nouveaux 

SCÈNE  DE  BAL  —  TOCCATA  —  RHAPSODIE 

Prix  :  6  fr.  Composés  par  Prix  :  6  fr. 

Op.  141.  A.   DREYSCHOCK  Op.  141. 

Arrangements  nouveaux  sur  des  tlièmes  de 

LA  GRANDE-DUCHESSE  DE  GÉROLSTEIN 

La  déclaration  —     Le  sabre  de  mon  père 

Deux  transcriptions  pour  le  Piano  par 
Prix  :  S  fr.  BRINLEY    RICHARDS  Prix  :  S  fr. 


FANTAISIE    BRILLANTE    POUR    LE    PIANO 

PAR 

Op.  75.  B  O  S  C  0  W  I  T  Z  Prix  :  7  fr.  SO. 


Maestro     E.     m.U'LlO, 

Ouverture  d'un  cours  de  chant  exclusivement  italien. 
Chez  lui,  rue  de  Luxembourg,  5,  au  1'^''. 


91  u  s  I  <!  u  c 
classique 


Etrennes» 

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EDITIOISr     PETERS 

lia  plus  correcte,  la  plus  belle  et  la  moins  chère  des  classiqucB 

En  vente  chez  E.  JUNG  -  TREUTTEL,  seul  dépositaire,  Paris,  19,  rue   de  Lille,  faub.  Saint-Germain, 

Bureau  de  musique  à  Leipzig  et  Berlin. 
(Suite  du  catalogue  inséré'dans  le  numéro  du   15  novembre  1868  de  la  Gazette  musicale. 


Piano  à  2  mains. 


Clemcuti.  13  sonatines. 
iSchubert.    10   sonates. 


Ouvertures  pour  piano  à  2  mains. 


Rectkovpii.  11  ouverturps. 
Uuz.-irt  10  ouverluns. .  . 
Wcber.  10  niiverturps.  .  . 
Schubcri,  Spolir,  LiMdpuin 
Ouvertures 


1  50 
1  50 


Lieder  pour  piano  à  2  mains  sans  texte. 

[Schubert.  La  belle   Meuni(:re 1  40 

—  Voyage  en  hiver 1  40 

—  Le  Chant  du  Cygne 1  40 

—  22  Lieder  célèbres 1  40 


Piano  à  i  mains. 

Beethoven.  11  ouvertures '  2  73 

Slozart.    10  ouvertures 3     » 

IVcbcr.  10  ouvertures 2    » 

Nchuberf:  Spohr,  Lindpaintner;  8  ouvertures.  2  75 

—  Compositions,  vol.  1°'' 3  50 

—  —                  II 3  50 

—  —                  III 3  50 

Piaiio  et  violon. 

Beethoven.  Toules  les  10  sonates 6    y> 

llozart.  'foules  les  18  sonates 14    » 

Schubert.   La  llelle  Meunière 2  25 

—  Voyage  en  hiver !f  25 

Le  Chant   du   Cygne 2  25 

--  ■ 2  25 


22  Lieder  célèbres 
Envois  franco  à  ces  prix  nets  contre  mandais  de  poste  ou  timbres-poste 


Piano  et  violoncelle. 

Schubert.  La  Belle  Meunière 2  25 

—  Voyage  en  hiver 2  25 

—  Le  Chant  du  Cygne 2  25 

—  22   Lieder  célèbres 2  25 

Pour  paraître  prochainement  : 

Ucthoven.  Tous  ses  concertos  à  2  mains.   .  4    » 

—  'Ions  les  duos  de  violoncelle 4    » 

—  Tous  les  trios  pour  piano 10     n 

—  Touslesquaiuorspourinstrumentsàcordcs.  8    » 

Clcmeiiti.  Les  célèbres  £o;iates 2  75 

Uiiyiln.  Les  célèbres  trios  pour  piano 4    » 

—  Les  célèbres  symphonies  à  4  mains.  .  .  4  d 
.Schubert.  Quatuors  pour  instruments  à  cordes  ô  » 
Oberon,  Euryanthe,  Preciosa,  Norinn,  la  .Somnambule, 

Monlecchi,  les  Puiitains,    t'ElUir  d'amour,  à  4  m. 


400 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE  DE  PAKIS. 


Paris,   chez  COLOMBIER,  éditeur,  6,  me  Vivienne. 

Il  ]E    ]p  3E  T  1  ^T"  IF  O  U  O  ^  T 


Opéra-bouffe  en  quatre  actes,  musique  de  LAURENT  DE  RILLË. 

Partition  Piano  et  Cliant.  prix  net  :  lO  francs. 


AIRS  DÉTACHÉS  CHANT  ET  PIANO. 


QUADRIILE  ET  VAISE  DE  STBADSS. 


POIEA  DE  DESGRANGES. 


NOUVELLES    PUBLICATIONS     POUR    LE    PIANO 


Ali.  liliarC.     —    Fleurs  religieuses. 

Il  est  né  le  divin  enfant 6 

Hélas!  quelle  douleur 6 

Quand  l'eau  sainte 6 

Goûtez,  âmes  ferventes 6 

0  Roi  des  cieux  ! 6 

Triorapliez,  Reine  des  cieux 6 


J  IiE¥B%CH.     —     Bécréations  caractërlstiques . 

4.  Tyrolienne , 6 

5.  Danses  de   Naïades 6 

6.  I  Puritani       6 

7.  Nornia 6 

C'H.  IaK    COBBEIIiliER. 

Les  gouttes  d'or,  rêverie 6 


OUVRAGES    DE    THÉODORE    GOUVY 

Publiés  par  Simon  Ricliault.  4.  boulevard  des  Italiens. 


OËuv.  4-6.  Sérénades  pour  piano  seul,  n°'  2  à  5, 
—    8.  1"  trio  pour  piano,  violon  et  violoncelle 

(en  mi  mineur) 

symphonie  en  mi  b.  partition  in-8°, 


net 


Parties  d'orchestre 

La  même,  à  quatre  mains 

—  10.  6°  sérénade  pour  piano  seul 

—  11.  Sérénade  en  quintette  pour  2  violons, 

alto,  violoncelle  et  contrebasse 

La  même,  à  quatre  mains 

—  12.  2°  symphonie  en /o,  partition  in-8°,  net 

Parties  d'orcliestre 

La  même,  à  quatre  mains 

—  13.  1"  ouverture  de  concert  (en  ré]    id.. 

—  U.  2»  ouverture  de  concert  (en  mi)    id.. 

—  15.  Le  dernier  hymne  d'Ossian,  sc^ne  ly- 

rique pour  voix  de  basse  avec  orchestre 

Partition  in-8°,  net 

Parties  d'orchestre 

La  même,  avec  accompagnem.  de  piano. 

—  16.  Deui  quatuors  pour  2  violons,  alto  et 

basse,  chaque 

—  17.  1"  sonate  pour  piano  seul 

—  18.  2"'trio  (en  la  mineur)  pour  piano,  vio- 

lon et  violoncelle 

—  19.  3'  trio  (en  si  b.)      id 

—  20.  3°  symphonie  (en  ut  majeur),  partition 

in-8*,  net 

Parties  d'orchestre 

La  même,  à  quatre  mains 


(Kuv.  21 .  Six  mélodies  pour  voix  de  baryton,  pa- 
roles françaises  et  allemandes  ,  réunies.  : 

—  22.  4'  trio   (en  fa]  pour   piano,    violon  et 
violoncelle '. 

—  23.  Douze  chœurs  à  6  voix  d'homme,   sans 

accompagnement,    paroles   françaises   et 
allemandes,  net 

—  2i.   Quintette  pour  piano,  2  violons,    alto 

et  violoncelle : 

—  25.  4' symphonie  (en  rf  mineur),  partition 

in-S",  net. 

Parties  d'orchestre i 

La  même,  à  quatre  mains 

—  56.   Douze  lieder  pour  voix  de  téuor,  pa- 

roles françaises  et  allemandes,  en  2  ca- 
hiers, chaque 

—  27.  Trois  sérénades  pour  piano  seul,  n°«  7, 

8,  9,  cliaque 

—  28.  Décaméron,  dix  morceaux  pour  piano  et 

violoncelle  en  5  livres,  chaque 

—  29.  2'  sonate  pour  piano  seul 

—  30    5'  symphonie  en  si  b.,  partition  in-S", 

Parues  d'orchestre 

—  31.  Sérénade  en  quatuor  pour  piano,  vio- 

lon, alto  et  basse 

—  32.   Trois  chœurs  à  Capella,  cantiijues  de 

Rousseau,  2  sopranos,   ténor   et  ba>se, 
avec  :.ccomp.  de  piano  ad  libitum,  net  . 

—  33.  5' trio  p.  piano,  violon  et  violoncelle. 


4  50 

7  50 


C£uv.  31.  Cinq  duettos  pour  pinnoet  violon,  ch.     6 

—  35.  Hymne   et   marche,    dans   la    forme 

d'une  ouverture,  partition,  net 5 

Parties  d'orchestre 15 

La  même,  à  quatre  mains 9 

—  36.  Sonate  à  quatre  mains 20 

—  37.  Six   odes    de    Ronsard,  pour   voix    de 

ténor  avec  accompagnement  de  piauo.   .  15 

—  38.  Trois  sérénades  pour   piano  seul,  10', 

U'  et  12°,  chaque 4  C 

—  39.  Trois  sérénades,  id.,  13%  14%  15*,  ch.     4  ! 

—  41.  Neuf  poésies   de    Ronsard,    pour    une 

voix  avec  accompagnement  de  piano   .   .   15 

—  42.  Six  poésies  de  Ronsard,  pour  voix  de 

ténor  ou  soprano 15 

—  43.  Quatre  odes  de  Ronsard,  pour  voix  de 

baryton 12 

—  44.  Huit  poésies  de  Ronsard,  pour  voix  de 

ténor  ou  soprano 15 

—  45.  Dix-huit    poésies   de   Desportes,    pour 

une  voix  avec  accompagnement  de  piano    » 

—  46.  Trois  élégies  à  deux  voix,  chaque  .   .     4 

—  47.  Sept  poésies  de  Ronsard,  avec  piano.  15 
Les  quarante  poésies  de  Ronsard,  réunies 

en  1  vol.  in-8°,  paroles  françaises  et  al- 
lemandes, net 15 

—  48.    La  Pléiade   française,  douze    poésies 

du  XVI*  siècle,  pour  une  voix  avec  piano     » 

—  49.  2*  sonate  à  quatre  mains » 


Publications  de  J.  RIETER-BIEDERMANN,  à  ^Vinterthur. 

En  dépôt  chez  Marcel  Colombier,  85,  rue  Richelieu. 


Hitler  (Ferd.).  Op.  106.  Opérette  sans  paroles, 
douze  morceaux  ponr  le  piano  à  quatre 

mains 16    » 

—    Opérette  110.   Fantaisie  pour  le  piano  à 

2  mains 4  70 

Hendelssohn  (F.  Bartholdy).  Op.  1 03.  Marche 
funèbre  pour  musique  d'harmonie,  par- 
tition.               2    » 


Hendelssahii.  Parties  séparées 4    » 

—  Pour  grand  orchestre,  partition 2    » 

—  Parties  séparées 4    » 

—  Pour  piano  à   4  mains 3    » 

—  —            à  2  mains 2    » 

Schubert  (François).  Grand'messe   en  mi  bé- 
mol, partition 30  70 

—  Parties  séparées  d'orchestre 25  35 


Schnbert.  Partition  de  piano 20  d 

—  Parties  séparées  de  chant 2  » 

—  Pour  piano  à  quatre  mains 14  » 

—  Trois  morceaux  de  piano,  n""  1,  2,  3.   .   .  2  70 
Schamann  (R).  Scherzo  et  presto  appassionato 

pour  piano,  n"  1,  scherzo 2  » 

—  N°  2,  presto 4  » 


PRIX  ACCORDÉ  A  l'dNANIHITÉ  A  l 'EXPOSITION 
ONIVBRSBLLE  DB  LONDRES  1851. 


Vourulsseur  des  ininlstèrei»  de  la 
ttiierre  et  de   la  Marine  de  rrnnce 


Seul   agent    à    Londres 

S.  ARTHUR   CHAPELI., 

45 ,   New  Bond  Street. 


MAISON  FONDÉE  EN  1803.  uédaille  d'argent  deI"  classe 

INSTRUMENTS    DE   MUSIQUE    EN    CUIVRE     *  l'exposit.os  dniversellb  de  paris  1855. 
Exposition  Universelle  de  Londres  1862 

MM.  les  Membres  du  Jury  International  décernent  la  Médaille  à 


ANTOINE  COURTOIS 

PODE  l'EîCEllENCE  DB  SES  COMETSS  A  PISTON,  COBS,  AITOS,  BASSES, 

ET  POUR  TODIE  SA  COLLECTION  d'iNSTRDBENTS  EN  GÉNÉRAL. 

KS,   rue    des    Maralii- Saint -Blart In.    SH. 

Ci-devant  rue  du  Caire,  21. 


Facteur  du    Conservatoire  et  de 
l'Académie  Impériale  de  Paris. 


Agent i  Saint-Pétersbourg: 

A.  BUTINER, 

Perspect. Newsky, maison  de  l'égliscSt-Pierre 


La  maison  ANTOINE  COURTOIS  ayant  agrandi  ses  ateliers,  est  en  mesure  de  satisfaire  à  toutes  les  demandes  qui  pmirront  lui    être 
adressées;  elle  garantit  réellement  à  sa  clientèle  des  instruments  irréprochables  sous  tous  les  rapports. 


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Lemercier  et  CLms 


BUREAUX    A    PARIS  •    BOULEVARD    DES    ITALIENS,  1. 


3S'  Année. 


N'  51. 


20  Décembre  18()8. 


ON  S'ABONNE  : 

Dans  les  Dépnrtrmftnts  et  ù  l'Élrdngcr, 

chez  tous   les  Murchands  de   Musique,  lis  Liltraire 

et  aux  uurcaux  der  Messageries  et  dos  Postes. 


REVUE 


PRIX    DE    L'ABONNEMENl  ; 

Paris -*   r.  iKir  (in 

Département»,  Belgique  et  Suisse....    :Ht  »      id. 

Ûirooger 3i  -.       i(L 

I.e  Journal  parolt  le  Dimanche. 


GAZETTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


1869 


PRIMES        1869 


Offertes  aux  Abonnés  de  la  Revue  et  Gazette  musicale, 
A  l'occasion  du  renouvellement  de  l'année. 

(36°  ANNÉE    DE  SON    existence) 


WM.1E 


DE    REQUIEM 

Avec  accompagnemenl  de  Piano.  Musique  tirée  des  différents  ouvrages  de 

R  <lli  ^  I  M  I 

Texte  latin  adapté  à  la  musique  par  Aulagnier 

ET  CONTENANT   QUATORZE   UORCEACX. 

Ouvrage  approoré  par  Rossini, 

Et  exécuté  en  partie  à  ses  obsèques,  en  l'église  de  la  Trinité. 
4  volume  in-S"  de  H 3  pages. 


ALB  U  M 

COMPOSÉ   DE 

MORCEAUX  DE  PIANO  INÉDITS 

SAVOIR   : 

méditation M.  Bergson. 

I/Attente,  romance  sans  paroles Paul  Bernard. 

Esquisse Stephen  Heller. 

Elodia.  mazurka  de  salon E.  Ketterer. 

Scherzo  (de  Sonate) D.  Magni's. 

marche  funèbre E.  Stoeger. 

Chanson  polonaise E.  Wolff. 


Un  beau  portrait  de  la  cantatrice 


Dessiné  sur  pierre,  d'après  nature,  par  Desmaisons. 


Dans  le  courant  de  l'année  1869,  la  Gazelle  musicale   donnera 
chaque  mois,  en  supplément,  un  morceau  de  Piano  ou  de  Chant. 

Au  mois  de  janvier  nos  Abonnés  recevront  comme  prime 
exceptionnelle  un  volume  format  grand  in- 8",  contenant: 

Vingt-qualrc  Préludes  pour  le  Piano 

Composés  par  STEPHEN  HELLER 


SOMMAIRE.  —  Études  sur  Charles-Marie  de  Weber  (troisième  partie,  12'  ar- 
ticle) ,  par  Edmond  IVenkomin.  —  Société  des  Coacerts  du  Conservatoire 
impérial  de  musique  et  de  déclamation,  par  Charles  Bannelier.  —  Mlle 
Uinnie  Hauck.  —  Correspondance.  —  Nouvelles  des  théâtres  lyriques.  — 
Nouvelles  diverses,  —  A-nnonces. 


ÉTPES  SUR  CHÂRLES-MÂRIE  DE  WEBER. 

D'après    la   biographie    écrite    par   son   fils. 


TROISIEME  PARTIE. 

(12=  article)  (1). 

Bien  avant  l'heure  fi.vée,  une  foule  compacte  s'était  entassée 
dans  le  théâtre  de  la  porte  Kaernthner  [Kaernthnerthor-theater) . 
Comme  à  Berlin,  l'aristocratie  de  la  naissance  et  de  l'argent  gar- 
nissait les  loges,  parée  comme  pour  une  représentation  de  gala; 
tout  ce  qui  appartenait  au  monde  musical  de  Vienne  remplissait 
le  parterre  et  les  galeries. 

Peu  d'instants  avant  qu'on  ne  commençât,  un  incident  grotesque 
se  produisit,  qui  n'était  pas  à  l'avantage  de  la  situation  ;  un  grand 
bruit  se  fit  à  l'entrée  du  parterre  et  l'on  vit  s'avancer,  au  milieu 
des  rires  et  des  huées,  enjambant  les  banquettes  et  semant  l'alarme 
sur  son  passage,  une  grosse  mégère,  mal  mise,  les  épaules  cou- 
vertes d'un  châle  homérique,  et  qui  criait  à  tue-tête  :  «  Faites -moi 
place,  je  suis  l'auteur  des  paroles  !  » 

C'était  eu  effet  Mme  de  Chezy  qui,  ayant  oublié  son  billet  chez 
elle,  s'ouvrait  ainsi  un  passage  jusqu'à  ce  qu'enfin  elle  tombât 
comme  une  masse,  au  milieu  de  jurons  de  toutes  sortes,  sur  un 
banc  déjà  encombré. 

L'apparition  de  Weber  à  l'orchestre  mit  fin  aux  rires  qui  sem- 
blaient ne  pas  vouloir  prendre  fin.  A  sa  vue  un  enthousiasme 
indescriptible  éclata  dans  toutes  les  parties  de  la  salle.  Après  avoir 
salué  à  diverses  reprises,  il  frappa  plusieurs  coups  sur  son  pu- 
pitre pour  donner  le  signal . 


(1)  Voir  les  n»» 


18,  21,  23,  23,  28,  31,  30,  30,  «,   iO  et  50. 


402 


lîEVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


Un  silence  religieux  s'en  suivit  : 

L'ouverture  commença  et  son  début  impressionna  vivement  l'au- 
diloire;  malheureusement,  son  exécution  ne  devait  pas  être  à  la 
hauteur  de  la  réputation  de  l'orchestre  de  Vienne.  Soit  que  les 
musiciens  eussent  péché  par  excès  de  zèle,  soit  que,  ce  qui  est  plus 
probable,  les  répétitions  à  l'orchestre  n'eussent  pas  été  assez  nom- 
breuses, l'ensemble  manqua  absolument,  et  en  plusieurs  endroits 
les  violons  jouèrent  taux;  —  aussi  l'enthousiasme  du  public  pour 
cette  grande  page  fut-il  bien  loin  d'égaler  celui  qui  l'accueillit 
plus  tard  à  Berlin  et  à  Dresde. 

L'introduction,  avec  son  contraste  bien  accentué  entre  le  char- 
mant chœur  de  femijies  et  l'ensemble  si  noble  des  chevaliers,  fut 
admirablement  enlevée.  Elle  eût  obtenu  un  succès  immense  sj 
les  danses  qui  [suivent  n'eussent  distrait  et  refroidi  l'attention. 
A  vrai  dirCj  la  mise  en  scène  de  ce  tableau  n'était  pas  conforme  à 
l'idée  du  maître:  le  public  rie  voulut  y  voir  qu'une  pâle  copié  du 
menuet  de  Don  Juan. 

La  romance  d'Adolar  n'eut  pas  le   don  de    faire  i-evcnir  l'audi- 
.  toire  de  celte  fâcheuse  impression. 

L'entrée  de  Lysiart  ranima  l'attention;  mais  Forli,  voulant  don- 
ner à  son  rôle  un  caractère  par  trop  «  mauvais  sujet,  »  dépassa 
le  but  et  n'obtini  pas  du  public  l'accueil  favorable  auquel  il  était 
habitué. 

Le  début  de  l'ouvrage  n'était  donc  pas  de  nature  à  rassurer 
Weber.  Heureusement,  la  grande  scène  du  déli  fut  vivement 
applaudie  et  le  maître  acclamé. 

L'apparition  d'Euryanthe  amena  imc  véritable  explosion  de  bra- 
vos et  de  vivais.  On  lit  à  Henriette  Sonntag,  alors  dans  la  lleur  de 
sa  grâce  et  de  sa  beauté,  une  entrée  triomphale;  l'ovation  dura 
plus  de  cinq  minutes.  «  A'ie'  aïe!  dit  Weber  en  se  penchant 
à  l'oreille  d'un  musicien  son  voisin,  ils  brûlent  trop  tôt  leur 
poudre!  » 

Il  n'avait  pas  lort,  car  la  cavatine,  prise  trop  lentemçnt,  de  l'avis 
de  tous  les  juges  compétents  présents  à  cette  représentation,  laissa 
le  public  parfaitement  froid. 

L'entrée  de  ftlme  Griinbaum,  qui  avait  été  jusque-là  l'idole  du 
public,  fut  bien  moins  chaleureuse  que  celle  que  l'on  venait  de 
faire  à  Mlle  Sonntag;  aussi  l'air  si  passionné  de  :  Oh\  ma  peine  est 
bien  amére,  fut  â  peine  remarqué. 

Le  r-^citatif  qui  suit  et  le  récit  d'Euryanthe  fatiguèrent  par  leur 
longueur.  —  Dès  la  seconde  représentation  Weber  élagua  cette 
scène. 

L'enthousiasme  se  ranima  au  duo  des  deux  femmes.  Mais  aussi 
quelle  interprétation  !  Jamais  ce  morceau  n'a  été  chanté  depuis, 
comme  il  le  fut  ce  jour-là  par  les  deux  grandes  cantatrices.  On 
voulut  l'entendre  et  l'applaudir  deux  fois. 

La  grande  scène  d'Ëglantine,  qui  vient  ensuite,  produisit  un  effet 
beaucoup  moindre. 

Mais  les  trompettes  du  finale  éclatent;  le  chœur  avec  ballet, 
l'apostrophe  si  passionnée  de  Lysiart  et  la  réponse  mélodieuse 
d'Euryanthe  se  déroulent  au  milieu  d'une  indicible  émotion;  la 
chaleur,  la  vie  sont  revenues  dans  la  salle,  et  le  premier  acte  se 
termine  au  milieu  d'un  immense  enthousiasme.  A  la  chute  du 
rideau,  Weber  fut  rappelé  deux  fois  avec  tous  ses  interprètes. 

Ce  iinale  du  premier  acte  avait  ramené  la  confiance  dans  tous  les 
cœurs  dévoués  au  maître;  au  foyer,  dans  les  couloirs,  tout  le 
monde  en  fredonnait  les  motifs  et  déjà  les  enthousiastes  prédisaient 
à  Euryanthe  un  plus  grand  succès  qu'au  Freisclmts.  —  Mais, 
comme  l'avait  bien  dit  Weber,  on  avait  déjà  brûlé  trop  de  poudre, 
le  public  commençait  à  se  fatiguer:  une  réaction  se  lit  bientôt 
sentir,  et  elle  influa  défavorablement  sur  la  destinée  des  deux  actes 
suivants. 
Forti    n'avait  ni  la  grâce  voulue  pour  l'andante,   ni  la  fougue 


nécessaire  pour  l'allégro  de  son  grand  air  d'introduction,  qui  pro- 
duisit peu  d'effet;  mais  il  s'échauffa  dans  le  duo  qui  suit,  entraîné 
qu'il  était  par  le  jeu  magistral  de  Mme  Griinbaum  ;  ils  furent  rap- 
pelés tous  deux  après  ce  morceau. 

Le  décor  de  la  galerie  royale  éclairée  pour  la  fête,  succédant  à  la 
scène  ténébreuse  de  la  conjuration,  fut  salué  par  une  nouvelle 
explosion  d'applaudissements,  à  laquelle  succédèrent  des  murmures 
occasionnés  par  la  façon  pénible  dont  Hailzinger  chanta  son  air  : 
Comme  un  heureux  z-éphir,  qui  est  pourtant  une  merveille  de  grâce 
et  de  tendresse. 

Le  duo  suivant,  dans  lequel  on  se  plut  à  trouver  une  réminis- 
cence du  Tancrède,  de  Rossini,  eut  un  meilleur  sort:  il  est  même 
à  remarquer  que  les  spectateurs  des  loges,  qui  jusque-là  s'étaient 
abstenus  de  toute  manifestation,  mêlèrent,  à  cet  endroit,  pour  la 
première  fois,  leurs  applaudissei»ents  à  ceux  de  la  niasse  du 
public.  Le  duo  fut  redemanclé. 

Le  finale  ne  produisit  pas  l'effet  auquel  on  s'attendait  ;  Mlle  Sonn- 
tag paraissait  très-fatiguée;  sans  la  slrette  :  Trompeurs  attraits, 
soyez  maudits,  admirablement  enlevée  par  les  chœurs,  le  second 
acte  se  serait  terminé  au  milieu  d'un  silence  glacial. 

(irâce  à  ce  fragment,  le  maître  fut  rappelé,  mais  l'opposition 
qui  s'était  lus  au  premier  acte,  se  manifesta  alors  très-visible- 
ment. 

Un  nouvel  entr'acte  d'une  demi-heure  indisposa  encore  davan- 
tage l'auditoire. 

Mlle  Sonntag,  de  plus  en  plus  lasse,  ne  put  réussir  à  faire 
goûter  le  long  duo  par  lequel  s'ouvre  le  troisième  acte.  Haitzin- 
gcr  donnait  également  des  marques  d'épuisement.  La  scène  d'Eu- 
ryanthe et  la  cavatine  Là,  près  des  flots  ne  purent  effacer  l'impres- 
sion produite,  (!t  les  amis  de  Weber  virent  avec  désespoir  que  les 
loges  commençaient  à  se  vider. 

A  ce  moment,  la  partie  pouvait  être  considérée  comme  perdue;  les 
plus  vaillants  perdaient  confiance;  les  plus  fervenls  se  regardaient 
en  hochant  la  tête;  le  péril  était  imminent,  la  chute  inévitable, 
quand  soudain  le  chœur  des  chasseurs,  avec  son  rhylhme  nouveau 
et  ses  effets  de  cor,  vint  relever  la  situation.  Le  succès  de  cet  en- 
semble fut  immense,  il  dut  être  répété  trois  fois  ! 

Par  jnalheur,  le  duo  d'Euryanthe  et  du  roi  vint  refroidir  mo- 
mentanément l'enthousiasme  provoqué  par  ce  morceau;  l'air 
d  Euryanthe  le  releva  de  nouveau.  Le  public  voulait  l'entendre 
deux  lois,  mais  la  pauvre  Mlle  Sonntag,  morte  de  fatigue, 
s'excusa.  Une  autre  perle  mélodique,  le  chœur  des  paysans  :  Au 
mois  de  mai,  bergère  aux  yeux  si  bleus,  fut  égalemenl  redemandé; 
l'heure  avancée  ne  permit  pas  de  répondre  au  vœu  du  public. 
La  marche  nuptiale  eut  un  sort  moins  favorable,  elle  passa  ina- 
perçue, ainsi  que  la  scène  entre  Ëglantine  et  Lysiart.  La  lassitude 
gagnait  la  salle,  qui  accueillit  avec  la  même  froideur  le  grand  duo 
avec  chœur,  l'une  des  pages  les  plus  dramatiques  de  l'œuvre.  Par 
contre,  le  finale,  dans  lequel  revient  la  phrase  :  Viens,viens  encore  à 
moi,  qui  était  encore  dans  toutes  les  oreilles,  réveilla  une  dernière 
fois  l'enthousiasme,  et  c'est  au  milieu  d'applaudissements  prolon- 
gés que  se  termina  cette  mémorable  représentation. 

Tels  furent  les  incidents  qui  en  marquèrent  le  cours.  Le  nouvel 
ouvrage  avait-il  remporté  un  véritable  succès? Ce  fut  du  moins  l'avis 
de  Weber,  qui  était  trop  sous  l'inqjression  d'une  excitation  nerveuse 
pour  juger  sainement,  car  il  écrivait  le  soir  même  à  sa  femme: 

(I  Ma  bonne  chérie,  remercie  Dieu  avec  moi  du  grand  succès 
d'Euryanthe.  J'ai  été  rappelé  après  chaque  acte;  deux  fois  après 
le  second.  Le  chœur  des  chasseurs  a  dû  être  répété  trois  fois.  A 

demain  les  détails,  je  suis  mort  de  fatigue Charles.» 

La  lettre    du  lendemain  confirmait  cette  bonne  opinion  : 

«  Ainsi  s'est  terminé   ce  jour,  écrit-il,  qui  ne  s'effacera  jamais 


DE  PAUIS. 


403 


de  ma  mémoire    et   dont  la  place  est,  je  l'espère,  marquée   dans 
l'histoire  de  l'art.  » 

Quoi  qu'il  eu  soit,  quelle  différence  entre  l'apparition  d'Eurijaii- 
ihe  et  celle  du  Freischulii,  deux  ans  auparavant! 

Edmond  NEUKOMM. 
(La  suite  prochainement  ) 


SOCIËTE  DES  CONCERTS 

DU     CO:%SëRVATOIRE     IUPÉIIIALi    oc    lUL»iIQUE. 

(il"   ANNÉE.) 

l'reinier  concert,  le  dimanche  13  décembre  1868. 

Quarante  et  un  ans  se  sont  écoulés,  et  cette  vaillante  Société  est 
toujours  debout,  plus  solide  que  jamais!  En  y  soni?eant,  on  n'a 
plus  la  force  de  lui  faire  pour  la  centième  fois  un  reproche  de  sa 
tmiidité  en  face  du  nouveau,  depuis  surtout  quelle  a  fait  quelques 
etforls  pour  la  surmonter.  Elle  a  bien  le  droit,  en  considérant  son 
glorieux  passé,  de  voir  la  garantie  de  son  avenir  dans  sa  prudence 
habituelle;  et  elle  vivra  parce  que,  si  elle  est  circonspecte,  on  ne 
peut  dire  qu'elle  soit  vraiment  réfractaire  au  progrès  et  qu'elle  se 
refuse  à  croire  au  mouvement. 

C'est  toujoui^  cet  admirable  orchestre  qu'aucun  autre  ne  sur- 
passe, dont  l'équilibre,  l'entrain,  et  en  même  temps  la  sagesse 
n'ont  pas  varié  ;  c'est  à  peine  si,  de  temps  à  autre,  une  légère 
tache,  un  accroc  isolé  se  fait  remarquer  au  miheu  de  cet  étonnant 
ensemble.  S'entendre  traduire  par  de  pareils  interprètes  est  m\  pri- 
vilège envié,  et  M.  Théodore  Gouvy,  îi  qui  cet  honneur  était 
accordé  pour  la  première  fois,  dimanche  dernier,  peut  hardiment 
attribuer  à  la  splendeur  de  l'exécution  une  partie  du  succès  ho- 
norable, bien  qu'assez  peu  accentué,  qui  a  accueilli  sa  symphonie 
en  fa. 

Cette  symphonie  est  connue  en  Allemagne,  où  l'auteur  réside 
depuis  longtemps;  elle  a  été  jouée  à  Paris  à  l'ancienne  Société 
des  jeunes  artistes  et  aux  concerts  populaires  en  mars  1863.  Elle 
a  d'ailleurs  au  moins  vingt  ans  de  date  et  a  été  publiée  il  y  a  long- 
temps (1).  C'est  la  deuxième  des  cinq  qu'a  composées  M.  Gouvy, 
et  celle  qu'il  produit  le  plus  volontiers  en  public,  parce  que  c'est 
celle  dont  l'effet  est  le  plus  immédiat.  De  fait,  il  nous  a  semblé 
que  M.  Gouvy  cherchait  l'expression  de  la  force  et  qu'il  ne  ren- 
contrait que  l'éclat,  c'est-à-dire  assez  encore  pour  séduire  certaines 
organisations.  Ses  idées  mélodiques  ne  sont  pas  toujours  très-châ- 
tiées,  non  plus  que  très-heureuses;  mais  il  développe  habilement  et 
manie  supérieurement  l'orchesire.Le  morceau  le  mieux  réussi  est  sans 
contredit  le  scherzo,  Irè.s-déiicat  et  original,  qui  a  pourtant  le  tort 
de  pouvoir  être  pris  dès  le  début  pour  un  allegretto  qui  en  dou- 
blerait la  mesure.  Le  premier  morceau,  qui  est  le  meilleur  après 
le  scherzo,  débute  pompeusement;  on  y  trouve  des  sonorités  et  des 
formes  qui  conviendraient  plutôt  à  une  ouverture.  Cette  observa- 
tion s'applique  bien  mieux  encore  au  linale.  Décidément,  ce  mal- 
heureux linale  est  la  partie  la  plus  souvent  manquée  d'une  sym- 
phonie, et  partant  la  plus  diflicile  à  faire.  On  ne  s'en  douterait 
guère  à  voir  l'-apkmib  avec  lequel  certains  musiciens,  qui  même 
ont  du  talent,  attaquent  ïj  cette  place  un  pas  redoul)lé  pour  termi- 
ner avec  entrain  ;  cela  fait  l'effet  d'une  fugue  sur  Amen  après  un 
beau  morceau  religieux. — Ceci  ne  regarde  point  M.  Gouvy,  qui, 
nous  l'avons  dit,  a  presque  fait  une  ouverture.  Son  andante  est  très- 
soigucusenient  travaillé;  on  y  reconnaît  la  main  du  musicien  ha- 
bile et  exercé.  Comme  inspiration,  il  n'a  rien  de  bien  remarquable. 

(I)  Chez  l'éditeur  Kicliaull. 


—  Eu  sonnnc,  cette  symphonie,  avec  ses  imperfections,  n'était 
nullement  indigne  du  baptême  de  la  Société  des  Concerts.  L'auteur 
est  un  homme  d'un  sérieux  talent  dont  l'œuvre,  assez  considé- 
rable, renferme  peut-être  des  parties  plus  complètement  réussies; 
nous  désirons  vivement  les  connaître. 

Nous  nous  sommes  attardé  avec  M.  Gouvy,  et  il  ne  nous  reste 
que  peu  d'espace  pour  parler  du  reste  du  programme.  Le  ma- 
gnifique 98'  psaume  de  Mendeissohn  (double  cliœur,  avec  orgue, 
harpes  et  orchestre)  a  été  supérieurement  l'cndu.  Dans  l'adagio 
du  septuor  de  Beethoven,  qu'on  sait  un  peu  trop  par  cœur,  les 
instruments  à  vent  sont  doublés  pour  faire  équilibre  à  la  masse  des 
cordes;  il  en  résulte  que,  bien  qu'ils  ne  jouent  pas  constamment 
à  due,  il  se  produit  lorsqu'ils  sont  à  découvert,  suitout  dans  l'aigu, 
une  légère  discordance,  des  battements  qui  pruvieinient  du  défaut 
de  justesse  absolue  de  deux  instruments  à  vent  jouant  à  l'unisson, 
et  qui  ne  laissent  pas  que  d'être  sensibles.  On  pourrait  obvier  à 
cet  inconvénient  en  évitant  de  doubler  ailleuis  que  dans  les  forte 
et  dans  le  médium  ou  le  grave. 

Le  chœur  des  Pèlerins  du  Tannhœuser,  parfaitement  exécuté, 
a  été  bissé;  enfin  l'oi'chestre  a  terminé  par  la  symphonie  en  ut 
majeur  de  Beethoven,  qu'il  a  dite  avec  sa  maestria  habituelle. 

Charles- BANNELIER. 


La  presse  anglaise  s'est  beaucoup  occupée  des  débuts  à  Covent- 
Garden  de  Mlle  Minnie  Hauck,  dont  l'apparition  à  Londres  a  fait 
sensation,  et  que  le  public  français  va  être  appelé  à  juger  dans 
quelques  jours.  L'Illustrated  London  News  a  cons.icré  à  la  jeune 
cantati'ice  une  notice  biographique  à  laquelle  nous  empruntons 
quelques  fragments  aussi  curieux  qu'intéressants. 

«  La  nouvelle  pensionnaire  de  M.  Bagier  est  née  à  New- York, 
le  16  novembre  18o.3.  Son  père,  Allemand  de  naissance,  homme 
érudit  et  distingué,  embrassa  avec  ardeur,  en  1848,  les  idées  nou- 
velles et  prit  une  ])art  eff'ective  au  mouvement  révolutionnaire 
qui  agitait  alors  l'Europe  entière.  Forcé  de  s'expatrier,  il  se  rendit 
aux  États-Unis  avec  sa  famille. 

»  Excellente  musicienne  dès  l'âge  de  huit  ans,  Minnie  Hauck 
fut  appelée  à  chanter  des  cantiques  à  l'église  métropolitaine.  Elle 
y  déploya  une  voix  si  pui'e  et  un  sentiment  si  profond  que  tous 
les  fidèles  eu  furent  émus  aux  larmes.  Ces  auditions  se  répétèrent, 
et  durant  plusieurs  années  il  ne  fut  question,  à  New- York,  que  de 
la  petite  prima  donna  de  la  chapelle  catholique.  Cependant  Minnie 
travaillait  et  grandissait  en  talent,  sous  la  direction  des  meilleurs 
maîtres,  lorsque  des  événements  imprévus  obligèrent  son  père  à 
se  rendre  avec  sa  famille  dans  l'Arkansas  (Ouest  des  Etats-Unis). 
C'était  au  moment  le  plus  terrible  de  la  guerre  de  1861.  Ici  se 
place  une  aventure  qui  exerça  sur  les  destinées  de  la  jeune  fille 
une  influence  décisive.  L'histoire  pourra  paraître  invraisemblable 
à  ceux  qui  ont  perdu  de  vue  celte  guerre  fratricide  et  les  inci- 
dents à  In  fois  horribles  et  bizarres  qu'elle  a  enfantés  :  elle  est  vraie 
pourtant  dans  ses  moindres  détails.  Vivant  au  milieu  des  Indiens, 
la  famille  Hauck  fut  avertie  un  matin  qu'un  riche  habitant  du 
Nord,  M.  Jérôme,  était  tombé  entre  les  mains  d'un  parti  d'Indiens 
tenant  pour  les  gens  du  Sud.  Les  sauvages  avait  imaginé  pour 
M.. lérôme un  supplice  étrange  et  en  rapport  avec  leurs  mœurs  bar- 
bares. Après  l'avoir  mis  dans  l'impossibilité  dese  mouvoir,  lis  l'avaient 
placé  sur  les  rails  d'un  chemin  de  fer  au  moment  même  où  un 
ti'ain  lancé  à  loute  vapeur  devait  y  passer.  Déjii  l'on  entendait  le 
sifflet  strident  de  la  locomotive,  les  Indiens  s'étaient  retirés,  lors- 
qu'une jeune  fille,  une  enfant,  s'élança  sur  la  voie  et,  année  d'un 
couteau,  coupa  en  un  clin  d'œil  les  lidis  qui  uiveloppaicnt  de 
toutes    parts    l'infortuné  prisonnier.   Gjtte  enfant,  c'était  Minnie 


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REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


Hauck.  M.  Jérôme  était  sauvé  d'une  luorl  att'reuse;  les  Indiens, 
stupéfaits  par  cet  acte  d'audace  sans  pareil,  s'agenouillèrent  de 
vant  la  Irêle  enfant  et  laissèrent  la  famille  Hauck  recueillir  celui 
qui  venait  d'être  aussi  miraculeusement  sauvé. 

»  Quelques  années  plus  tard,  M.  Jérôme  faisait  bâtir,  dans  sa 
maison,  à  New-York,  et  tout  exprès  pour  Minnie  Hauck,  un  ma- 
gnilique  théâtre,  sur  lequel  elle  fit  ses  premiers  essais  dramati- 
ques. Mais  là  ne  devait  pas  s'arrêter  la  reconnaissance  du  riche 
New-Yorkais  : 

»  Le  soir  même  du  début  de  Mlle  Hauck  à  l'Académie  de  mu- 
sique de  New-York,  il  lui  remit  devant  témoins  un  chèque  de 
iOOjOOO  dollars  (200,000  francs),  en  accompagnant  cette  donation 
des  plus  tendres  paroles  et  des  plus  touchantes  exhortations.  Min- 
nie Hauck  était  riche  dès  ce  jour,  mais,  éprise  de  son  art  et  d'ac- 
cord avec  ses  parents  et  son  bienfaiteur,  elle  résolut  de  poursui- 
vre la  carrière  dans  laquelle  elle  venait,  d'ailleurs,  de  remporter 
un  succès  qui,  du  premier  coup,  la  plaçait  au  nombre  des  canta- 
trices en  vogue.  C'est  ainsi  qu'elle  parcourut,  l'année  dernière, 
avec  éclat,  les  principales  scènes  des  Etats-Unis.  Arrivée  à  Paris, 
au  commencement  de  cet  été,  elle  fut  immédiatement  engagée 
par  M.  Mapleson,  l'intelligent  directeur  du  théâtre  de  la  Reine,  à 
Londres.  La  voici  de  retour  à  Paris,  prêt''  à  se  produire  au  théâ- 
tre impérial  Italien,  où  il  n'est  pas  douteu.v  que  sa  jeunesse,  sa 
grâce  et  son  talent  ne  plaident  victorieusement  sa  cause  devant  le 
public  à  la  fois  le  plus  difficile  et  le  plus  bienveillant  de  l'Eu- 
rope. » 


CORRESPONDANCE. 

A  M.  le  Directeur  de  la  Revue  et  Gazettk  musicale. 

Monsieur, 

Sous  le  titre  de  Note  swr  un  point  de  l'histoire  de  l'harmonie  et 
de  la  tonalité,  votre  numéro  du  29  novembre  contient  un  article 
de  M.  Fétis  où  je  suis  vivement  pris  à  partie.  Mon  célèbre  compa- 
triote y  défend  avec  une  ardeur  toute  juvénile  ses  doctrines  histo- 
riques :  rien  de  plus  naturel.  Ce  qui  a  droit  de  m'étonner,  c'est 
que  M.  Fétis  donne  à  entendre  que  mes  opinions,  en  cette  matière, 
seraient  dictées  par  des  considérations  étrangères  à  la  science... 
A  deux  reprises,  il  est  question  de  je  ne  sais  quel  but  occulte  que 
M.  Fétis  connaît  et  qu'il  ne  veut  pas  révéler. . .  Je  déclare  ici 
hautement  que  le  sens  de  ces  allusions  m'échappe  tout  à  fait. 
Aussi  je  ne  m'en  occuperai  pas  davantage,  à  moins  toutefois  que 
M.  Fétis  ne  se  décide  à  mettre  de  côté  les  réticences  et  les  sous- 
entendus  pour  s'expliquer  clairement. 

Quant  à  la  question  scientifique,  c'est  différent.  Malgré  la  répu- 
gnance que  j'éprouve  à  engager  une  polémique  avec  un  homme 
dont  l'âge  et  les  travaux  considérables  m'inspirent  un  profond 
respect,  j'ai  le  devoir  de  maintenir  ce  que  je  crois  la  vérité. 

Veuillez,  Monsieur  le  rédacteur,  donner  une  place  dans  vos  co- 
lonnes à  cette  lettre  et  à  la  note  que  j'ai  l'honneur  de  vous 
adresser,  et  agréer  l'assurance  de  mes  meilleurs  sentiments. 

Mole  en  réponse  à  celle  de  M,  Fétfs, 

Dans  rinlention.de  son  auteur,  celte  note  était  destinée  à  réfuter  les 
idées  que  j'ai  émises  sur  l'origine  de  notre  tonalité,  dans  une  conférence 
tenue,  il  y  a  quelques  moif,  à  la  Société  des  compositeurs  de  musique 
et  dont  le  résumé  a  paru  dans  le  Ménestrvl  (numéros  du  S,  15  et  22 
novembre  1868) .  En  réalité  mon  savant  contradicteur  se  borne  à  re- 
produire une  fois  de  plus  sa  thèse  favorite:  «  l'invention  de  l'accord  de 
septième  de  dominante  par  Monteverde.  »  Bien  que  ce  ne  soit  là  qu'un  des 


-petits  cûics  du  problème  que  j'ai  traité,  j'accepte  le  débat  sur  le  terrain 
étroit  qu'il  a  plu  à  M.  Fétis  de  choisir,  et  je  vais  fournir  quelques  nou- 
velles preuves  à  l'appui  des  arguments  que  j'invoque. 

Ces  arguments,  au  dire  de  M.  Fétis,  ne  sont  pas  nouveaux;  je  n'en 
sais  rien;  assurément  les  siens  ne  le  sont  pas  davantage,  et  je  ne  sache 
pas  qu'il  y  ait  ajoute  un  iota  depuis  183S. 

Qu'il  me  soit  permis  de  préciser  encore  une  lois  le  point  en  discussion. 

Monteverde,  oui  ou  non,  est-il  le  plus  ancien  conipositeur  chez  lequel 
on  trouve  l'accord  de  septième  de  dominante  sous  une  forme  autre  que 
celle  de  la  syncope?  M.  Fétis  dit  oui.  D'autres  musiciens  plus  ou  moins 
fompelenis  disent  non.  Je  suis  de  ces  derniers,  et  à  l'affirmalion  de  M.  Fé- 
tis j'uppote  les  t<^lis  suivants: 

PriEMiÈUE  ODjECTioN.  —  L'cmploi  constant,  depuis  le  xn"^  jusqu'au  xvn« 
siècle,  du  second  renversement  de  l'accord  en  question  {re-fa-(sol)-si), 
avec  suppression  de  la  quarte  (fondamentale  de  l'accord).  Cette  assimi- 
lation n'est  pus  admise  par  mon  contradicteur  qui  ne  voit  dans  l'agré- 
gation ré-fa-si,  qu'un  simple  accord  de  sixte  insignifiant  au  point  de 
VUE  TONAi,...  Comment!  insignifiant  au  point  de  vue  tonal,  l'accord  qui 
renferme  le  triton,  le  fameux  diabolus  in  musicâ  du  moyen  âge.  N'est-ce 
pas  M.  Félis  qui  écrit  dans  son  Traité  d'harmonie  (§  23,  p.  9):  «  11  est 
reniaïquable  que  ces  intkuvalles  (fa-si,  si-fa)  caractérisent  la  tonalité 
MODEiiNE  par  les  tendances  énergiques  de  leurs  deux  noies  constitutives  : 
la  note  sensible  appelant  après  elle  la  tonique,  et  le  quatrième  degré  suivi 
eu  général  du  troisième.   » 

Quoi  qu'il  en  soit,  AI.  Fétis  trouve  mon  argument  parfaitement  absurde, 
et,  dans  une  apo^tl•ophe  tant  soit  peu  théâtrale  pour  la  circonstance,  il 
prend  à  témoin  de  mon  ignorance  les  musiciens  de  tous  les  pays!  Je 
suppose  qu'il  exclut  de  son  appel  la  plupart  des  théoriciens  harmonistes 
qui,  sur  ce  point,  me  donnent  complètement  raison  Parmi  ceux  que 
j'ai  sous  la  main,  je  me  bornerai  à  citer  deux  Allemands  :  Reicha 
(Cours  de  composition  musicale,  p.  33)  et  Marx  (Di'e  Lehre  von  der  musi- 
kalischcn  Composition,  I,  Ml)  ;  deux  Français  :  Baiibereau  {Traité  de 
lomposition,  1,  il,  132),  et  Ucrutte  (Technie,  ou  Lois  génér.les  du  si/s- 
Icme  harmonique,  128);  enfin  un  Espagnol  :  Eslava  (Escuela  de  composi- 
ci'on,  Tralndo  primera,  i3,  Madrid,  1801).  Je  ne  possède  malheureusement 
aucun  traité  d'harmonie  italien,  anglais  ou  russe,  mais  il  n'est  pas  dé- 
raisonnable de  supposer  que  je  trouverais  encore  de  ce  côté  quelque 
témoignage  en  faveur  de  mon  opinion. 

Deixiè.me  OBJECTION.  —  L'existencc  de  l'accord  complet  de  septième 
dominante  chez  les  conlrepointistes  et  notamment  chez  Palestrina  dans 
son  motet  si  répandu  :  Ajaramus  le  Chrisle...  Voici  comment  M.  Fétis 
rétorque  cet  argument  :  »  Comme  tous  ses  prédécesseurs,  if  (M.  Gevaërt) 
m'oppose  des  passages  ('!)  de  Palestrina  sur  lesquels  Je  me  suis  expliqué 
vingt  lois,  notamment  dans  mon  Traité  d'harmonie.  »  J'ai  toujours  lu 
avec  asidité  les  écrits  de  M.  Fétis;  son  Traité  d'harmonie  en  particulier 
m'est  bien  connu,  mais  je  n'ai  pu  découvrir  huile  part  un  commentaire 
sur  le  pa.ssage  en  question.  Je  .«erais  curieux,  je  l'avoue,  de  voir  cette 
succession  expliquée  par  le  seul  mécanisme  de  la  .syncope  ou  ligature  au 
sens  des  anciens  conlrepointistes. 

L'exemple  de  Palestrina  est  le  seul,  au  reste,  que  j'ai  cité  pour  la 
période  du  contrepoint  classique.  J'aurais  pu  en  ajouter  quelques  autres  : 
j'aurais  pu  même  citer  une  foule  de  cas  où  ce  fameux  accord  est  com- 
pliqué (d  après  la  théorie  de  M.  Félis)  d'une  substitution  et  d'une  pro- 
longation, mais  il  n'entrait  pas  dans  mon  plan  de  dépouiller  toutes  les 
compositions  du  moyen -âge  pour  constater  un  fait  d'importance  très- 
secondaire  à  mes  yeux. 

J'arrive  à  ma  troisième  et  dernière  objection,  que  je  reproduis  textuel- 
lement pour  éviter  toute  équivoque. 

«  Que  si  l'on  objectait  qu'il  s'agit  de  l'emploi  de  la  septième  de  domi- 
nante à  rétat  direct  et  immédiatement  avant  le  repos  tonal,  nous  répon- 
drions que,  même  à  cet  égard,  Monteverde  ne  peut  prétendre  à  la  priorité. 
En  effet,  ce  cas  se'  présente  dans  la  plupart  des  morceaux  des  Nuuue 
Musiche  (je  l'ai  relevé  en  plus  de  vingt-cinq  endroits),  et  notamment 
dans  un  des  plus  anciens  essais  monodiques  de  Caccini-  le  madrigal  do- 
vrà  dunquc  morire,  composé  bien  certainement  avant  1398.  » 

M.  Fétis  ne  conteste  pas  absolument  ma  date  (je  l'ai  établie  dans  l'In- 
troduction historique,  qui  ouvre  le  premier  volume  des  Gloires  de  l'Ita- 
lie), mais  il  trouve  l'argument  sans  valeur  pour  le  cas  dont  il  s'agit, 
car,  dit-il,  «  l'ouvrage  d'où  le  madrigal  est  tiré  n'a  paru  qu'en  1601, 
deux  ans  api  es  le  cinquième  livre  des  Madriyali  de  Monteverde.  11  est 
vrai  que  Caccini  dit,  dans  son  avis  au  lecteur  ,  qu'il  avait  fait  entendre 
ces  pièces  plusieurs  années  auparavant,  à  Florence  et  à  Rome,  chez  des 
amis;  mais  cela  n'eut  aucun  retentissement  avant  la  publication  des  Nuove 
Musiche.  » 

On  a  lieu  de  s'étonner  d'une  affirmation  énoncée  en  termes  aussi 
absolus.  Eh  quoi  !  des  œuvres  exécutées  devant  un  auditoire  composé  de 
gens  tels  que  Galilei,  Mei,  Rinuccini,  Péri,  Cavalicri,  répétées  ensuite 
devant  toute  la  ville  de  Florence,  le  centre  intellectuel  et  artistique  de 
l'Italie,  ces  œuvres  seraient  restées  inconnues  à  Monteverde  ?  Caccini  ne 
dit-il  pas  expressément  que  bien  longtemps  avant  la  publication  de  son 
volume,  SCS  madrigaux  et  ses  airs  étaient  continuellement  exécutés  par 


DE  PARIS. 


40S 


les  plus  fameux  chanteurs  elles  plus  célèbres  cantatrices  d'ilalie  et  qiie 
tous  les  compositeurs  s'étaient  approprié  son  style.  Et  la  publication  des 
A'uorc  Musiclie  n'eùt-ellc  pas  précisément  pour  but  de  donner  une  version 
exacte  de  ces  chants  qui  s'élaicnt  altérés  en  passant  de  main  en  main  ? 

Si  M.  Fétis  pouvait  douter  de  l'influence  exercée  sur  Monteverde  par 
les  nionodistes  florentins,  (pi'il  prenne  la  peine  de  relire  la  célèbre  lettre 
de  Pietro  deila  Valle  et  quelques  passages  de  Doni  (entre  autres  le  cha- 
pitre IX  du  Trattalo  dclla  inusica  scenicai,  il  verra  quelle  était  à  cet  égard 
l'opinion  des  contemporains.  El  ce  fut  non-seuleinent  en  Italie  que  les 
compoï-itions  de  Caccini  causèrent  une  profonde  impression,  elles  péné- 
trèrent jusque  dans  le  nord  de  l'Europe.  La  belle  mélodie  «  AmariUi  mia 
bcUa  »  était  devenue  populaire  en  Hollande  aux  temps  du  vénérable  poète 
Cats,  ainsi  qu'on  peut  s'en  convaincre  par  l'examen  d'une  de  ses  chan- 
sons composées  vers  1630.  (Aile  de  Wercken  van  Jacob  Cals,  Zwolle,  1862 
I,  G2!l).  La  même  uiélodie  est  indiquée  dans  un  autre  chansonnier  hol- 
landais de  la  même  époque .  (h'ruls  ;  M  inné  Spiujhd  dcr  deughJen.  Ams- 
terdam, 1640,  o,  li.) 

Si  les  nouveautés  de  Caccini  à  leur  apparition  ne  provoquèrent  pas  les 
censures  des  théoriciens,  cela  tient  au  milieu  dans  lequel  elles  se  pro- 
duisirent. Les  académiciens  de  Florence  se  souciaient  fort  peu  du  contre- 
point, le  destructeur  de  la  poésie,  laceramcnto  délia  poesia,  selon  eux; 
d'un  autre  côté,  la  monodie  était  un  genre  trop  dédaigné  par  les  Artusi 
pour  qu'ils  se  donnassent  la  peine  d'y  relever  les  infractions  aux  règles 
établies . . . 

Qu'on  ne  se  trompe  pas  sur  le  sens  de  mes  paroles.  Je  ne  veux  pas 
élever  autel  contre  autel,  opposer  Caccini  à  Monteverde,  dénigrer  celui-ci 
pour  exalter  celui-là.  Je  n'imiterai  pas  M.  Fétis  quand  il  dit,  de  son 
héros,  qu'il  fut  le  seul  homme  de  génie  de  la  fin  du  xvi«  siècle  et  de  la  pre- 
mière moitié  du  xvu'.  .\  la  rigueur,  c'est  là  une  simple  affaire  de  goiit 
individuel,  mais  encore  M.  Fétis  devrait-il  nous  expliquer  comment  il  est 
devenu  tout  à  coup  si  sévère  pour  Cavalieri,  Frescobaldi,  Giovanni  Ga- 
brieli,  Gumpellzhaimer,  Jean-Léon  Hassler.  Péri;  et  pourquoi  il  retire  à 
ces  illustres  contemporains  de  Monteverde  le  brevet  d'homme  de  génie, 
dont  il  les  gratifiait  si  généreusement  dans  la  2«  édition  de  sa  Biogra- 
phie universelle  ? 

Comment  en  un  plomb  vil  Vor  pur  s'est-il  changé'.' 

Plus  loin  nous  lisons  que  «  c'est  à  Monteverde  que  l'on  dut  les  pre- 
miers opéras  représentes  sur  les  théâtres  de  Venise.  •  M.  Fétis  cepen- 
dant ne  peut  ignorer  que  cette  gloire  revient  plus  légitimement  à  Ma- 
nelli,  Sacrati,  Cavalli,  Ferrari,  dont  les  opéras  ont  précédé  ceux  de  Monte- 
verde sur  les  scènes  vénitiennes  (vérifier  dans  les  catalogues  d'Ivanovich 
et  de  Groppo). 

Maintenant  que  j'ai  répondu  presqueligneparligneà  lanoledeM.  Fétis, 
qu'il  veuille  bien  me  permettre  de  lui  adresser  une  question.  Pourquoi 
s'est-il  borné  à  un  point  accessoire  de  mon  étude,  et  s'est-il  tu  sur  mes 
conclusions  générales,  qui  contredisent  bien  plus  gravement  son  système 
historique  que  mes  opinions  sur  la  septième  dominante?  Ce  silence  me 
surprend  d'autant  plus  que  j'ai  eu  soin  d  e  répéter  ces  conclusions  dans  la 
dernière  partie  de  mon  travail. 

Eh  quoi  !  M.  Fétis  ne  trouverait-il  rien  à  objecter  à  ces  proposi- 
tions? Mais  alors  que  devient  la  question  Monteverde?...  Une  simple  cu- 
riosité d'érudit,  un  petit  problème  chronologique. 

Si,  au  contraire,  comme  il  est  plus  simple  de  le  supposer,  M.  Fétis  n'a- 
bandonne aucune  de  ses  convictions,  alors  qu'il  définisse  rigoureusement  ce 
qu'il  appelle  la  tonalité  du  plain  chant,  ainsi  que  les  principes  harmoniques 
et  mélodiques  sur  lesquels  elle  est  basée  ;  qu'il  nous  démontre  que  cette 
tonalité  ne  s'est  pas  altérée  dans  ses  éléments  essentiels,  depuis  saint 
Grégoire  jusqu'à  la  veille  de  la  publication  de  ces  fameux  madrigaux,  et 
que  les  transformations  que  je  constate,  siècle  par  siècle,  sont  une  pure 
illusion;  qu'il  explique  (toujours  par  les  données  de  son  système)  la  fu- 
sion graduelle  des  deux  modes  majeurs  antiques,  l'apparition  de  la  note 
sensible  dans  le  dorius,  l'extinction  graduelle  du  phrygius,  et  l'existence 
d'un  majeur  unique  au  commencement  du  xvi*  siècle. 

En  outre,  arrivé  à  la  fin  de  ce  xvii"  siècle,  qu'il  nous  fasse  voir  clai- 
rement l'action  destructive  de  la  septième  de  dominante  sur  cette  tonalité 
dix  fois  séculaire;  surtout  qu'il  n'omette  pas  de  nous  expliquer  comment 
cet  accord,  selon  lui,  la  cause,  l'agent  direct  de  la  révolution,  comment, 
dis-je,  cet  accord  à  peine  entrevu,  disparaît  presque  complètement  pen- 
dant un  demi-siècle,  juste  au  moment  où  sa  présence  est  le  plus  néces- 
saire. Quand  il  ne  restera  plus  rien  de  tout  ce  que  j'ai  avancé,  quand 
mes  exemples  seront  re  onnus  apocryphes,  mes  assertions  mal  fon- 
dées, mes  conclusions  vicieuses,  quand  il  sera  bien  prouvé  que  notre 
onaiité,  cette  atmosphère  musicale  que  nous  respirons,  ce  moule  qui  a 
suffi  à  contenir  la  pensée  d'un  Bach  et  d'un  Beethoven,  que  cette  chose 
essentiellement  impersonnelle  est  l'œuvre  d'un  seul  homme,  alors  M.  Fé- 
tis pourra  être  justement  fier  d'avoir  révélé  au  monde  un  fait  unique  et 
sans  analogies  dans  les  annales  de  l'esprit  humain.  Alors,  mais  alors  seu- 
lement, il  .sera  intéressant  de  savoir  si  l'humanité  doit  saluer  ce  nouveau 
Prométhée  du  nom  de  Monteverde  ou  de  Caccini. 

Jusque-là,  que  M.  Fétis  con.sentc  à  voir  .ses  doctrines  historiques  dis- 
culées, ses  as.sertions  contrôlées,  seshypothèses  réduites  à  leur  juste  valeur. 


Loin  de  moi  la  prétention  de  donnera  M.  Fétis  une  leçon  d'histoire  ou 
d'a.spirer  moi-même  au  titre  d'historien.  Je  n'aspire  ([u'au  rôle  plus 
humble  d(!  vulgarisa'.eur.  Si  je  me  suis  parfois  exercé  à  traiter,  dans  de 
modestes  réunions,  quelque  sujet  ayant  Irait  au  passé  de  notre  art,  mon 
but  n'a  été  que  de  mettre  mes  confrères  au  courant  des  résultats  positifs 
de  la  science  de  notre  temps,  de  fixer  leur  attention  sur  des  travaux 
trop  peu  connus;  jamais  je  n'ai  appelé  la  publicité  sur  ces  essais,  encore 
moins  ai-je  cherché  à  provoquer  des  polémiques. 

Ce  que  j'ni  eu  toujours  à  cœur,  c'est  de  me  dégager  de  tout  parti 
pris,  de  n'avancer  que  des  faits  que  j'avais  examinés  par  moi-même  ; 
d'avouer  mon  ignorance  sur  les  puinUs  que  je  n'avais  pas  suflisamment 
étudiés,  de  tenir  grand  compte  des  opinions  d'autrui  et  surtout  de  ne 
jamais  supposer  chez  mes  contradicteurs  un  autre  mobile  que  le  simple 
amour  de  la  vérité. 

F. -A.  GKVAERT. 
Paris,  10  décembre  1868. 


Le  défaut  d'espace  nous  oblige  à  ajourner  au  prochain  numéro 
le  compte-rendu  du  premier  e.\.ercice  avec  orchestre  des  élèves 
de  l'Ecole  spéciale  de  chant,  de  MM.  Duprez,  qui  a  eu  lieu  ven- 
dredi dernier  avec  un  grand  succès. 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 


if*,t  Le  théâtre  impérial  de  l'Opéra  a  donné  cette  semaine  deux  fois 
les  Huguenots  et  une  fois  Hamlet.  —  Aujourd'hui  représentation  extraor- 
dinaire de  la  Muette  de  Portici. 

^*^  Lundi,  après  la  centième  représentation  d'Un  Premier  Jour  de  bon- 
heur, les  artistes  de  l'orchestre  du  théâtre  de  l'Opéra-Comique  se  sont 
rendus  chez  M.  Auber  pour  lui  donner  une  aubade.  L'illustre  maître 
s'est  montré  fort  touché  de  cette  attention  et  il  en  a  remercié  les  ar- 
tistes avec  effusion . 

Si**  Le  Toréador  a  été  donné  mardi  avec  Mlle  Girard,  Gailhard  et 
Ponctiard.  L'autorisation  des  auteurs,  dont  M.  Martinet  se  prévaut  pour 
jouer  également  ce  charmant  ouvrage,  va  probablement  donner  lieu  à 
un  procès. 

,i,*3j  La  représentation  au  bénéfice  de  Mme  Ugalde  est  annoncée  pour 
mercredi  23. —  L'excellente  cantatrice  s'y  fera  entendre  dans  le  premier 
acte  du  Domino  noir,  le  deuxième  acte  de  Galathée,  le  troisième  et  le  qua- 
trième acte  de  Gil-Blas.  Les  Noces  de  Jeannette  seront  jouées,  cette  seule 
fois,  par  Mme  Yandenheuvel-Duprez,  le  tout  sera  varié  par  des  intermèdes 
auxquels  concourront  Mmes  Carlotta  Patti  Wertbeimber,  Cabel,  Galli-Ma- 
rié,  Girard,  Bélia,  Lambquin  ;  —  MM.  Capoul,  Achard,  Bataille,  Couderc, 
Sainte-Foy,  Sarrasate  et  Diemer.  —  Après  cette  représentation,  la  béné- 
ficiaire se  rendra  à  Toulon,  oii  elle  est  engagée  pour  un  mois.  Elle  y 
jouera  le  répertoire  d'Offenbach  en  compagnie  de  M.  Grenier,  et  y  créera 
le  rôle  de  la  Périchole. 

,*,(.  Adelina  Patti  a  terminé  cette  semaine  ses  représentations  au  théâtre 
Italien;  elle  a  joué  dans  Don  Pcisqualr,  L'ucia  et  Crispino.  Aujourd'hui, 
pour  dédommager  les  abonnés  que  sa  maladie  avait  privés  de  l'en- 
tendre, elle  donne  une  dernière  représentation  qui  se  compose  du 
deuxième  acte  de  Crispino,  —  du  premier  acte  de  la  Traciata,  —  du  troi- 
sième acte  de  la  Sonnambula.  —  et  du  deuxième  acte  de  Semiramide, 
chanté  par  Mmes  Krauss,  Grossi,  et  MM.  Palermi  et  Agnesi.  — Mme  Ade- 
lina Patti  part  pour  la  Russie,  d'oii  elle  reviendra  pour  chanter  tout  le 
mois  d'avril  à  Paris.  —  Mardi,  Tamberlick  fera  sa  rentrée  dans  Otello. 

,^**  Le  théâtre  Lyrique  a  repris  dimanche  le  Maître  de  Chapelle,  de 
Paér  ;  il  a  été  très-bien  iniei'prété  par  Caillot,  Legrand  et  Mlle  Duval.  — 
C'est  Lutz  qui ,  dans  Iphigénic  en  Tauridn ,  a  pris  le  rôle  d'Ore^te  que 
chantait  M.  Aubéry.  M.  Pasdeloup  a,  de  cette  façon,  parfaitement  com- 
plété l'exécution  de  l'œuvre  de  Gluck,  car  M.  Lutz  est  un  artiste  aussi 
distingué  que  consciencieux,  et  son  succès  a  été  aussi  grand  que  légitime. 
—  Le  Val  d'Andorre  va  céder  la  place  au  Brasseur  de  Preston,  qui  sera 
joué  mercredi.  —  Deux  ouvrages,  qui  avaient  été  reçus  par  M.  Carvalho, 
le  Timbre  d'Argent,  de  Saint-Saëns,  et  Quentin  Metzijs ,  de  M.  Chérou- 
vrier,  ont  été  de  plus  agréés  par  le  directeur  actuel.  —  Enfin  les  études 
de  Don  Quichotte  et  de  Rienzi  se  poursuivent  avec  activité. 

^*^  On  a  donné  hier,  aux  Bouffes-Parisiens,  la  première  représenta- 
tion de  Petit  bonhomme  rit  encore,  paroles  de  M.  de  Najac,  musique  de 
M.  Deifès.  —  Nous  en  rendrons  compte  dimanche  prochain. 

^*^  Le  titre  de  l'opéra  de  Fr.  Ricci,  qui  doit  être  représenté  au  théâtre 
des  Fantaisies-Parisiennes,  vient  de  subir  une  modification.  Au  lieu  de 
M.  de  La  Palisse,  il  s'appellera  Une  folie  à  Rome.  On  pense  au  théâtre 
qu'il  pourra  être  donné  dans  la  première  quinzaine  de  janvier. 


406 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


^**  l.îi  princesse  de  Melternich  assistait  à  la  quatrième  représentation 
des  Horreurs  de  lu  guerre.  La  salle  est  comble  tous  les  soirs  el  l'on  applau- 
dit beaucoup  la  charmante  musique  de  M.  Jules  Costé.  La  pièce,  qui  a 
des  scènes  d'unf  bouffonnerie  très-originale,  est  fort  bien  jouée  par 
Léonce,  Luce  et  Mlle  Yan  Ghell. 

^«,  f.a  Périchole.  ne  devant  plus  avoir  qu'un  petit  nombre  de  repré- 
sentaîions  avec  Mlle  Schneider,  qui  passe  aux  Bouffes  à  la  fin  du  mois, 
éprouve  une  recrudescence  de  succès,  et,  depuis  trois  jours,  on  refuse 
du  monde  chaque  -^oir.  —  La  pièce  d'OffVnbach ,  qu'on  prépare  pour 
Mlles  Zulma  Bouffar  et  Marie-Aimée,  s'appellera  le  Saut  de  Leucate. 

^*^  La  fermeture  du  théâlre  de  l'Oriente  a  ramené  tous  les  attisles 
qui  étaient  à  Madrid  ,  entre  autres  les  époux  Tiberini,  Everardi,  Sca- 
lese,  etc.  —  Mme  Gueymard  est  de  retour  depuis  lundi  et  s'est  mise  à 
la  disposition  de  M.  Perrin. 

^*^  On  nous  écrit  de  Nantes  que  les  représentations  de  la  troupe  ita- 
licnie,  au  théâtre  de  la  Renaissance,  sont  de  plus  en  plus  suivies. 
Mlle  Laure  Harris  y  est  l'idole  du  public.  —  MM.  Strozzi  et  Tombesi  la 
secondent  très-bien. 

**.,  Mme  Borgtii-Mamo  donne  eu  ce  moment  des  représentations  au 
théâtre  impérial  de  Nice;  son  succès  y  est  immense.  Chaque  soir  ramène 
les  applaudissements,  les  bouquets  et  les  manifestations  enthousiastes  de 
la  veille. 

**^  Les  éditeurs  Brandus  et  Dufour  viennent  d'acquérir  la  propriété 
de  l'opérette-bouffe  les  Horreurs  de  la  guerre,  de  MM.  Ph.  Gilles  et  Jules 
Costé,  représentée  au  théâlre  de  l'Athénée. 


NODVELLES  DIVERSES. 


**»  Voici  le  résultat  du  concours  de  solfège  (classes  des  élèves  militaires) 
qui  a  eu  lieu  au  Conservatoire,  la  semaine  dernière  :  1'"''  prix  :  M.  Welscli, 
élève  de  M.  Alkau;  et  MM.  Schwartz  et  Mei  ter,  élèves  de  M.  Hmile  Du- 
rand; i"  accessit  :  M.  Gassian,  élève  de  M.  Emile  Durand;  2«  accessit  : 
M.  Marx,  élève  rie  M.  Emile  Durand;  3°  accessit  :  M.  Liéber,  élève  de 
M.  .\lkan. 

,*,j.  Au  concert  populaire  de  dimanche  dernier,  on  a  beaucoup  ap- 
plaudi M.  Camille  Saint-Sacns  et  sou  concerto  de  piano  en  fol  mineur. 
L'œuvre  le  méritait  a  l'égal  du  jeu  nerveux  et  brillant  du  virtuose.  La 
liei-uc  et  Gazette  musieale  a  déjà  dii  en  temps  et  lieu  tout  le  bien  qu'elle 
pensait  de  ce  concerto,  dont  le  scherzo,  en  particulier,  est  une  perle,  et 
qui  vient  d'obtenir  un  véritable  succès  en  Allemagne,  où  l'auteur  l'a 
exécuté.  —  Le  reste  du  concert  se  composait  d'oeuvres  du  répertoire 
classique  :  la  symphonie  en  la  mineur  de  Mendelssolm  (Symplionie  écos- 
saiseï,  l'adagio  du  SO'  quatuor  de  Haydn,  et  les  ouvertures  de  Léanore 
et  d'Otcron. 

;j*.  Aujourd'hui,  ;i  deux  heures  précises,  deuxième  concert  donné  par 
la  Société  des  Concerts  dans  la  salle  du  Conservatoire,  sous  la  direction 
de  Georges  Haiul.  On  y  entendra  :  1°  symphonie  en  fa  de  M.  Guuvy; 
■ — i"  98°  psaume  (double  chœur),  de  Mendelssohn;  —  3"  adagio  du  sep- 
tuor de  Beethoven  (exécuté  par  deux  clarinettes,  deux  cors,  deux  bnssons 
et  tous  les  instruments  à  cordes);  —  4°  choeur  des  Pèlerins  du  Taniiluu- 
ser  de  M.  Wagner;  —  3°  symphonie  en  ut  majeur  de  Beethoven. 

^*^  Le  dixièniH  concert  populaire  de  musique  classique  aura  lieu  au- 
jourd'hui à  deux  heures,  au  cirque  Napoléon,  sous  la  direction  de 
J.  Pasdeloup.  En  voici  le  programme  :  !<•  ouverture  de  Sémiramis  de 
Rossini;  —  2°  symphonie  en  rc  mineur  (!'"  audition),  de  R.  Schumann 
{introduction,  —  romanza,  —  scherzo.  —  finale)  ;  —  3°  air  de  ballet  de 
Promcthée  de  Beethoven  (le  solo  de  violoncelle  par  M.  Poëncet)  ;  — 
•4'  fragment  de  Itoméo  et  Julielle  de  H.  Berlioz  (le  jardin  de  Capulet, 
scène  d'amour); — 5°  largo  et  finale  de  Haydn. 

»*,t  Le  jour  de  Noël,  à  Saint-Roch,  M.  Charles  Vervoitte  fera  exécuter 
l'Oratorio  de  Lesueur  pendant  la  messe,  et  le  soir,  après  vêpres,  un  salut 
solennel  de  sa  composition. 

^*^  Le  double  jury  élu  par  les  compositeurs  qui  ont  pris  part  au  con- 
cours ouvert  au  tnéâtre  Lynque  impérial  est  aujourd'hui  définitivement 
constitué,  et  se  compose,  pour  la  musique:  de  MM.  Benoît,  Deloffre,  Du- 
pré,  Eug.  Gautier,  Labarre,  Victor  Massé,  prince  Poniatowski,  Weber, 
et,  pour  les  poëuies,  de  M.  Azevedo,  Blazc  de  Bury,  Alexandre  Dumas 
fils,  Edouard  Fournier,  Jouvin,  Hippolyte  Prévost,  Louis  Roger,  Sar- 
cey.  L'examen  des  ouvrages  envoyés  à  ce  concours  a  commencé  le  17  de 
ce  mois;  quand  une  décision  aura  été  prise,  les  concurrents  en  seront 
.  officiellement  informés. 

3,',;.  M.  Leroy  e^t  nommj  pr^ife-^seur  de  clarinette  au  Conservatoire,  à 
partir  du  mois  de  janvier  prochain,  sn  remplacement  de  M.  Klosé,  ad- 
mis à  faire  valoir  ses  droits  à  la  retraite. 

-  „:*,  Le  gouvernement  italien  vient  de  fiire  célébrer  en  grande  pompe, 
à  Sauta-Croce  de  Florence,  les  obsèques  de  Rossini.  La  plupart  des  mi- 
nistres et  de  nombreuses  députations  s'y  sont  rendus  spontanément. 


^*f  Mme  Rossini  a  consenti  h  ce  que  les  cendres  de  son  mari  fussent 
déposées  dans  l'église  florentine  de  Sanla-Croce;  la  dépouille  mortelle 
rie  l'illustre  iléfunt  y  sera  donc  transportée.  Mme  Rossini  y  a  mis  pour 
condition  qu'elle  reposerait  elle-même,  après  sa  mort,  dans  la  partie 
extérieure  ilu  caveau  attenante  au  monument  et  ménagée  à  cet  effet  en 
dehors  de  l'église . 

^*^  /,'■  Mémorial  diplomatique  contient  Is  catiiloguc  des  œuvres  pos- 
thumes de  Rossini.  Nous  reproduisons  cette  pièce,  curieuse  à  plus  d'un 
titre  :  «  Los  amis  intimes  du  maître  ont  souvent  vu  ce  catalogue  qui 
était  très-exactement  et  trôs-soigneusemenl  tenu  par  lui.  11  forme  une 
trentaine  do  feuillets  d'une  écriture  compacte,  et  est  divisé  en  deux 
parties  ,  en  tête  de  chacune  desquelles  ont  lit  ces  «nets:  Péchés  devieillessc 
de  G.  Hossini.  I.a  première  partie  se  compose  de:  i"  Miscellanée:,  com- 
prenant la  petite  messe  et  vingt-deux  autres  morceaux,  dont  quelques- 
uns  sont  considérables.  Un  d'eux  porte  le  titre  facétieux  de  :  Canon 
anti-sacant,  dédié  aux  Turcos  par  le  Singe  de  Pcsaro;  —  2"  Album  ita- 
lien, J2  morceaux;  —  3°  Album  français,  paroles  d'E.  Pacini,  12  mor- 
ceaux également;  —  i"  Album  olla  pudrida,  12  morceaux  encore,  dont 
un,  le  Chant  des  Titans,  a  été  exécuté  à  grand  orchestre,  en  18(51,  au 
Conservatoire,  et  a  eu  un  succès  prodigieux:  cependant  il  n'a  point  été 
publié.  La  seconde  partie  du  catalogue  porte  des  divisions  analogues: 
l"  Miscellnnées,  16  morceaux;  —  2"  Les  quatre  iIendi^nts  et  les  quatre 
Hors-d'œuore,  divisés  en  8  morceaux,  intitulés  :  les  Figues,  les  Aman- 
des, les  Noisettes,  les  Raisins,  les  Radis,  le»  Anchois ,  les  Cornichons  et 
le  Beurre;  —  3"  Album  pour  les  enfants  adolrscenls  ;  —  i"  Album  pour 
les  enfants  dégourdis  ;  —  3"  Album  de  chaumière  ;  —  (i"  Album  de  château. 
Chacun  de  ces  albums  contient  12  morceaux;  quelques-uns  portent  les 
titres  suivants  :  Oufl  les  pelils  pois,  farce  écrite  après  une  indigestion  de 
légumes  {sic);  —  Boléro  tarlare,  morceau  dé.sopilant  d'une  difficulté  en- 
diablée; —  Etudes  d'fcartcment  pour  le  piano,  à  l'usage  des  pianistes 
doués  d'un  large  mélarcarpe;  —  Hachis  romantique; —  Etude  asthma- 
tique; —  l'Huile  de  ricin,  petite  valse;  —  Valse  anti-dansante,  etc.  » 

,*.  Lundi  dernier  a  vu  naître  à  la  place  de  la  Gazette  des  Etrangers, 
un  grand  et  beau  journal  ayant  pour  titre  Paris  —  capitale  de  l'Europe. — 
lin  véritable  bataillon  d'écrivains,  parmi  lesquels  nombre  de  noms 
réputés  dans  la  pres.se,  s'est  chargé,  sous  la  direction  d'un  chef  qui  a  fait 
ses  preuves,  M.  Henri  de  Pêne,  de  lui  donner  la  vie  et  la  pui.ssance,  et, 
à  en  juger  par  les  numéros  déjà  publiés,  la  nouvelle  feuille  paraît  cons- 
tituée de  façon  à  ne  manquer  ni  de  l'une  ni  de  l'autre.  Du  reste,  pour  tous 
ceux  cpii  depuis  quinze  ans  ont  vu  à  l'œuv  re  le  rédacteur  en  chef  du  Paris, 
pour  qui  a  pu  apprécier  les  sympathies  qu'il  a  su  se  concilier  et  la  part 
qui  lui  revenait  dans  le  succès  d'un  journal  lancé  tout  récenimcnt;  pour 
tous  ceux-là,  disons-nous,  l'avenir  de  sa  nouvelle  entreprise  n'a  pu  lais- 
ser un  instant  de  doute,  el  nous  ne  serons  pas  les  seuls,  si  nous  n'avons 
pas  été  les  premiers,  i  lui  souhai'er  la  bonne  chance  que  mérite  son 
infatigable  labeur. 

,*»  A  rocca>ion  de  la  fête  de  la  patronne  des  musiciens,  la  Société 
chorale  d'Elbeuf  a  chanté,  dans  l'église  de  Saint-Etienne,  une  messe  dont 
les  différents  morceaux  avaient  été  choisis  avec  un  goût  parfait,  et  dont 
l'interprétation,  rcnlorcée  par  quelques  artistes  de  Paris,  a  été  vraiment 
irréprochable.  M.  Vervoitte,  l'éininent  maître  de  chapelle  de  Saint-Roch, 
était  venu  veiller  lui-même  à  l'exécution  d'un  Saloe  liegina  de  sa  com- 
position, qui  a  été  fort  apprécié. 

^"if.  On  écrit  de  Metz  :  <i  Anna  Meyer  vient  de  donner  ici  et  aux  en- 
virons une  série  de  concerts  qui  lui  ont  valu  les  plus  brillants  succès. 
Le  Moniteur  de  la  Moselle  s'exprime  ainsi  sur  la  jeune  artiste  :  «<  Mlle 
»  .4nna  Me>er  nous  a  fait  apprécier  son  brillant  talent,  que  nous  n'a- 
»  \ions  plus  entendu  depuis  huit  ans.  L'enfant  est  devenue  une  char- 
»  maure  jeune  fille,  et  nous  a  séduits  par  la  grâce  de  son  mnintien,  le 
»  perlé  de  son  jeu,  la  vigueur  tempérée  de  délicatesse  avec  laquelle  elle 
»  a  fait  valoir  plusieurs  morceaux  de  divers  genres.  »  A  Luxembourg, 
à  la  suite  de  son  concert,  le  prince  et  la  princesse  des  Pays-Bas  ont  vi- 
vement complimenté  l'éminente  pianiste,  et  lui  ont  offert  un  bijou  de 
prix, 

f,*^  On  lit  dans  plusieurs  chroniques  que  Camille  Schubert  vient  de 
publier  son  album,  composé  cette  fois  d'une  valse,  le  Charme,  et  des  Syl- 
phide, qui  seront  le  succès  de  cet  hiver.  Les  deux  quadrilles  :  Faust 
aux  Enfers,  le  Beau  Postillon,  accompagnés  de  Tourbillonnetle,  polka- 
scholtisch,  et  de  la  Rose  de  Sévitle,  polka-mazurka,  charmante  composi- 
tion, n'obtiendront  pas  moins  de  vogue  sur  tous  les  pianos. 

»%  M.  Aloys  Klein,  compo.-iiteur  distingué,  organiste  de  la  métropole 
de  Rouen,  vient  de  faire  paraître  un  recueil  de  cinquante  noëls  choisi» 
et  harmoni.>és  par  lui  pour  l'orgue  ou  l'ocfiue  expressif  et  exécutés  annuel- 
lement aux  offices  de  la  métropole.  S.  Em.  le  cardinal  de  Bonnecho.'se  en 
a  accepté  la  dédicace  et  ils  sont  précédés  d'une  notice  trè.s-curieuse  de 
M.  A.  de  Beauvoir,  sur  l'origine  de  ces  cantiques.  —  Cette  publication 
.■^e  recommande  particulièrement  aux  organistes  de  toutes  les  paroisses  de 
France. 

»*i  .\près  sa  brillante  saison  au  casino  de  Deauville,  oii  son  orchestre 
a  fait  merveille,  De.sgranges  est  de  retour  à  Paris  et  déjà  il  est  demandé 
pour  les  bals  qui  se  préparent;  il  dirigeait  hier  la  belle  fêle  annuelle 
donnée    au  profit    des  pauvres  par  M.  Fr.    Lévy,  maire  du  Xl«  arron- 


bE  PAMS 


407 


dissement,  dans  les  beaux  salons  de  la  mairie.  —  La  semaine  dernière, 
dans  les  salons  du  Louvre,  les  organisateurs  du  beau  bal  donné  par 
la  Sociélé  des  agents  coniplaldes  n'avaient  pas  voulu  a'autre  or- 
chestre que  le  sien.  Jusqu'à  (i  heures  du  matin,  il  a  fait  exécuter  les 
morceaux  les  plus  nouveaux  de  son  répertoire,  au  nombre  de.squels  il  a 
dû  répéter  plusieurs  fois  les  quadrilles,  valses  et  polkas  de  la  Grande- 
Duchesse,  de  Fleur  de  Tlié  et  de  la  Périeholo. 

:,,%  Après  son  séjour  au  Havre  pendant  la  durée  de  l'exposition 
F.  Brisson  vient  de  revenir  à  Paris,  oi'i  il  a  repris  le  cours  de  ses  leçons. 
L'excellent  professeur  d'orgue  et  de  piarjo  réunissait  la  semaine  passée 
ses  élèves  dans  une  charmante  soirée,  oii  ils  ont  exécuté  plusieurs  com- 
positions de  leur  maître  et  oîi  lui-môine  a  joué  quelques  morceaux 
nouveaux. 

^*:i;  M.  Walleufi;],  dont  la  renommée  de  violoncelliste  est  depuis  long- 
temps établie,  vient  de  donner  à  Strasbourg  un  très-beau  concert  où  il 
a  exécuté,  entre  autres,  une  fantaisie  de  Servais  sur  Roméo  et  Juliette, 
et  un  autre  morceau  de  sa  propre  composition.  Un  auditoire  aussi 
nombreux  que  sj'mpathique  a  acclamé  le  violoncelliste  solo  du  théâtre 
et  professeur  au  Conservatoire  de  Strasbourg,  qui  depuis  quelques  an- 
nées n'avait  pas  donné  de  concert,  et  prouvé  ainsi  que  sa  modestie  égale 
son  talent. 

^*^  Le  carnaval  est  court  cette  année.  Il  n'y  aura  que  dix  bals  à 
l'Opéra.  —  Le  premier  a  lieu  ce  soir  et  l'orchestre  de  Strauss  a  mis 
toutes   voiles   dehors  pour  que  cette  inauguration  soit  fulgurante. 


,*«  Cette  semaine  est  mort  à  Bellevue,  près  Paris,  à  l'âge  de  soixanle- 
treize  ans,  M  Empis,  inspecteur-général  des  bibliothèques,  ancien  di- 
recteur de  la  Comédie-Française  et  qui  avait  remplacé  à  l'Académie  M . 
Jouy,  l'un  des  auteurs  du  livret  de  Guillaume  Tell.  Ecrivain  conscien- 
cieux, M.  Empis  avait  débuté  dans  les  lettres  par  quelques  opéras  écrits 
en  collaboration:  Sapho,  entre  autres,  musique  de  Heicha,  Jeanne  d'Arc, 
Hcrcu'.e  à  Trachine,  Romulus,  l'Enlèvement  des  Sabines,  Vendôme  en  lis- 
pagne,  dont  les  musiciens  n'étaient  autres,  pour  ce  dernier  ouvrage, 
qu'Hérold  et  M.  Auber.  —  Ses  obsèques  ont  été  célébrées  à  Bellevue, 
en  présence  d'un  très-grand  nombre  d'amis  intimes,  d'hommes  de  let- 
tres et  d'artistes  dramatiques.  —  Par  une  bien  triste  coïncidence,  la 
fille  de  M.  Empis  est  morte  dans  la  nuit  qui  a  précédé  l'enterrement 
de  son  père. 

^*ig  Nous  avons  également  le  regret  d'annoncer  la  mort  de  M.  Louis 
Desnoyers,  l'un  des  fondateurs  de  la  Société  des  gens  de  lettres,  direc- 
teur de  la  partie  littéraire  du  Siècle  et  l'un  do  ses  propriétaires,  décédé  à 
Paris,  mercredi  dernier,  à  l'âge  de  soixante-six  ans.  M.  Louis  Des- 
noyers avait  signé  le  compte-rendu  des  théâtres  au  Voleur  en  1831,  et 
repris  au  Nationul  le  feuilleton  musical  confié  d'abord  à  M.  Fétis.  On  a 
de  lui  plusieurs  romans  et  vaudevilles.  Depuis  que  sa  maladie  avait  pris 
de  la  gravité,  son  gendre,  M.  Chadeuil  le  remplaçait  au  Siècle,  dont  il 
rédi.'ea.t  habituellement  le  Courrier  musical. 

iif*,^  M.  Jules  Micheli,  ancien  chef  d'orchestre,  auteur  de  plusieurs  mé- 
lodies chantées  avec  succès  dans  les  concerts  vient  de  mourir  à  Paris. 


ÉTRANGER 

.j,*jf  Bruxelles.  —  Mlle  Marimon,  remise  de  l'accident  qui  avait  failli 
lui  coûter  la  vie,  a  reparu  au  théâtre  de  la  Monnaie  dans  le  Premier  Jour 
de  Bonheur.  On  attend  avec  impatience  le  Pardon  de  Pkërmel,  où  cette 


excellente  cantatrice  doit  remplir  le  principal  rOle.  —  [^'Africaine  vient 
d'être  jouée  quatre  fois  on  huit  jours,  et  constanmient  devant  une  .salle 
comble.  La  voix  fraîche,  le  jeu  gracieux  quoique  encore  inexpérimenté 
de  Mlle  Franchiiio,  continuent  à  séduire  le  public  qui  lui  a  fait  un  excel- 
lent accueil.  —  Warot  produit  toujours  la  meilleure  impression  dans  le 
rôle  de  Vasco;  Dumestre  et  Cazeaux  se  tirent  à  leur  honneur  de  ceux  de 
Nélusko  et  de  l'amiral. 

j*^  Colorjne.  -  Le  premier  Jour  de  bonheur  vient  d'être  donné  pour  la 
première  ibis,  et  a  reçu  du  public  le  plus  favorable  accueil. 

,n*^  Rifja.  —  La  première  représentation  de  VAfrimine  a  eu  lieu  ré- 
cemment avec  un  tris  grand  succès. 

^,**  Berlin.  —  Wachtel  a  fait  sa  rentrée  ii  l'Opéra  le  8  décembre  dans 
son  rôle  favori  du  Postillon  de  Lonjumeau.  11  a  été,  comme  toujours, 
très-applaudi,  ainsi  que  Mlle  Grûn,  qui  chantait  îi  côté  de  lui.  —  Mlle  Or- 
geni  a  débuié  le  11  dans  I^ucie  avec  beaucoup  de  succès. 

^*»  Leipzig.  —  Le  neuvième  concert  du  Gewandhaus  a  été  tout  entier 
consacré  à  la  mémoire  do  Rossini.  On  y  a  exécuté  son  Slabat,  des  frag- 
ments de  ses  opéras  et  l'ouverture  de  Guillaume  Tell. 

^""^  Moscou,  a  .septembre.  —  Notre  théâtre  italien  était  en  fête  hier; 
on  donnait  Fausto  au  bénéfice  de  Désirée  ArtOt  dont  l'engagement  tou- 
che à  ta  fin  et  qui  est  sur  le  point  de  nous  quitter.  Depuis  longtemps 
toute  la  salle  était  louée  et  l'on  n'aurait  pu  y  loger  une  personne  ou  en- 
caisser un  rouble  de  plus,  car  la  recette  avait  atteint  20,000  francs!  et 
bien  des  loges  avaient  été  payées  des  prix  fous. — Quoique  accoutumés  aux 
prodiges  de  son  merveilleux  talent,  la  foule  des  admirateurs  de  la  diva 
a  été  transportée  par  l'art  avec  lequel  elle  a  saisi  et  interprété  dans  ses 
nuances  les  plus  tendres  comme  dans  ses  désespoirs  les, plus  dramatiques, 
ce  rôle  de  Marguerite,  l'un  des  plus  beaux  de  son  répertoire.  Aussi 
rendrait-on  diificilement  fenihousiasme  qu'elle  a  excité  pendant  tout  le 
cours  de  la  représentation,  enthousiasme  qui  ne  s'est  pas  seulement  tra- 
duit par  des  bravos  et  des  rappels  sans  fin,  par  une  pluie  de  bouquets 
accompagnés  d'écharpes,  par  les  acclamations  des  spectateurs  agitant 
leurs  mouchoirs  dans  toutes  les  loges,  mais  aussi  par  une  véritable  ova- 
tion après  l'acte  du  jardin  et  pendant  laquelle  il  a  été  offert  à  la  grande 
cantatrice,  par  les  abonnés  qui  avaient  organisé  une  souscription  à  cet 
I  effet  et  réuni  plus  de  3,000  roubles  (12,000  francs),  une  rivière 
et  des  boucles  d'oreilles  en  diamants,  une  chaîne  avec  médaillon 
en  or,  travail  russe,  une  belle  broche  dans  le  style  oriental  garnie 
de  perles  roses,  et,  ce  qui  l'a  le  plus  touchée,  un  présent  des  étudiants 
consistant  en  un  beurrier  en  argent  niellé,  travail  de  Toula,  en- 
touré d'une  devise  portant  ces  mots:  Donné  par  la  jeunesse  de  Moscou 
qui  vous  adore.  Le  gouverneur  de  Moscou  n'avait  pas  voulu  être  en 
reste  de  ces  libéralités  et  il  y  avait  joint  un  beau  bracelet  fermant  par 
un  saphir  entouré  de  diamants.  Enfin,  à  la  sortie  du  théâtre  l'artiste  ido- 
lâtrée de  notre  public  a  été  reconduite  en  triomphe  jusqu'à  sa  demeure 
par  les  étudiants  qui  l'avaient  attendue. 


»*j;  Salle  Valentino.  —  La  Fête  des  fleurs  de  mardi  dernier  a  été 
splendite,  plus  de  deux  mille  personnes  y  assistaient.  Les  concerts  Arban 
font  affluer  le  monde  à  la  salle  Valentino,  dont  la  transformation  est 
une  des  merveilles  de  Paris.  Les  bals  masqués  y  feront  fureur  cette  an- 
née, et  auront  lieu  tous  les  samedis. 


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Itpethovrn.  11  ouvertures..    .    . 

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IVcbcr.  10  ouvertures 

Schubert,  Spohr,  Lindpaintner. 
Ouvertures 


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1  50 
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Schubert.  La  belle   Meunière 1  40 

—  Voyage  en  hiver 1  40 

—  Le  Chant  du  Cygne - 1  40 

—  22  Lieder  célèbres 1  40 


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Beethoven.  11  ouvertures 2  75 

Mozart.    10  ouvertures 2     » 

"Weber.  10  ouvertures ~     " 

Schubert:  Spohr,  Lindpaintner;  8  ouvertures.  2  75 

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Beethoven.  Toutes  les  10  sonates 6    '> 

Mozart.  Toutes  les  18  sonates 14    >' 

Schubert.    La  Helle  Meunière 2  25 

—  Voyage  rn  hiver !*  25 

—  Le  Chant   du  Cygne 2  25 

—  22  Lieder  célèbres 2  25 


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Schubert.  La  Belle  Meunière 2  25 

—  Voyage  en  Iriver 2  25 

—  Le  Chant  du  Cygne 2  25 

—  22   Lieder  célèbres 2  25 

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—  Tous  les  trios  pour  piano 10    » 

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Clementi.  Les  célèbres  sonates 2  75 

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Nicolo,  Offenbach,  Sacchini,  Spolir,  Thomas,  Verdi,  Weber,  etc. 

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Contenant    chacun   six   Mosaïques   sur   des    thèmes  d'opéras   célèbres, 
Par  CKAMEB   et  par  BEYEB. 

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contenant  6  fantaisies  : 

Moïse,  le  Barbier,  le  Stabat  Mater,  le  Comte  Ory,  la  Charité,  Soirées  m. 

Par  Thalberg,  Brinley-Ricliards,  Roscllen,  Paul  Bernard,  Kalkbrenner. 


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Contenant  tiO  morceaux  appropriés  aux  exercices  du  chant  dans  les  Pen- 
sionnats, et  approuvés  parla  supérieure  de  la  congrégation  de  N.-D.  des  Arts. 


année   1S69, 

est  le  cadeau  le  plus  réellement  utile  qu'on  puisse  offrir  aux  jeunes  personnes  qui  étudient  sérieusement  la  musique. 


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27  Décembre  1868. 


ON   S'ABONNE  ; 

Dans  \os  Départements  et  d  l'l':iran{,rLT, 

chez  tous  les  Slarchands  de  Musique,  Us  Libraires, 

et  aux  Bureaux  dep  Messageries  et  des  Postes. 


REVUE 


PRIX    DE    L'ABONNEMENT  ; 

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Départements,  Btil^ique  et  Suisse...     :t(;  " 
ÛtroQger y.   'ii  - 

Le  Journal  parait  le  Dimanche. 


GAZETTE  MUSICALE 


DE     PARIS 


1869 


PRIMES 


1869 


Offertes  aux  Abonnés  de  la  Revue  et  Gazette  musicale, 
A  l'occasion  du  renouvellement  de  l'année. 

6'  ANNÉE    OE  SON   EXISTENCE) 


DE     REQUIEM 

Avec  accompagnement  de  Piano.  Musique  tirée  des  différents  ouvrages  de 

Texte  latin  adapté  à  la  musique  par  Aulagnier  • 

ET  CONTENANT  QUATORZE   MORCEADX. 

OoTrage  approuvé  par  Rossini, 

Et  exécuté  en  partie  à  ses  obsèques,  en  l'église  de  la  Trinité. 
^  volume  in-8°  de  H  5  pages. 

ALBUM 

COUPOSÉ   DB 

MORCEAUX  DE  PIANO  INÉDITS 

SAVOIR   : 

Méditation M.  Bergson. 

■/.Attente,  romance  sans  paroles Paul  Bernard. 

Esquisse Stephen  Heller. 

Elodia.  mazurka  de  salon E.  Ketterer. 

Scherzo  (de  Sonate) D.  Magnus. 

Marche  funèbre E.  Stoeger. 

Chanson  polonaise F..  Woi.ff. 


Un  beau  portrait  de  la  cantatrice 

Dessiné  sur  pierre,  d'après  nature,  par  Desmaisons. 


Dans  le  courant  de  l'année  1869,  la  Gazelle  musicale   donnera 
chaque  mois,  en  supplément,  un  morceau  de  Piano  ou  de  Chant. 

Au  mois  de  janvier  nos  Abonnés  recevront  comme  prime 
exceptionnelle  un  volume  formai  grand  in -S",  contenant: 

Vingt-quatre  Préludes  pour  le  Piano 

Composés  par  STEPHEN  HELLER 


SOMMAIRE.  —  Théâtre  Lyrique  impérial  :  reprise  du  Brasseur  de  Preslon,  par 
Panl  Bernard.  —  Théâtre  impérial  Italien  :  Otello:  la  Serva  padrona, 
par  Elias  de  Bauze.  —  Théâtre  des  Bouffes-Parisiens:  Petit  bonhomme 
vit  encore!  —  Théâtre  des  Fantaisies-Parisiennes:  reprise  de  Gilles  ravisseur. 
—  Nouvelles  séances  théâtrales  à  l'Ecole  spéciale  de  chant.  —  La  Musique  de 
la  Périchole,  par  Paul  Bernard.  —  Nouvelles  des  théâtres  lyriques.  — 
Nouvelles  diverses.  —  Annonces, 


THÉÂTRE  LYRIQUE  ÎMPËRIÂI. 

Beprise  du  Bfaasewr  ae  M*realot», 

Opéra-comique  en  trois  actes,  paroles  de  MM.  de  Leuve.n  et 
Brunswick,  musique  d' Adolphe  Adam. 

11  y  a  juste  trente  ans  que  le  Brasseur  de  Preston  fut  représenté 
pour  la  première  fois  sur  le  théâtre  de  l'Opéra-Comique.  Ce  fut 
Berlioz  qui,  dans  ce  journal,  en  fit  le  compte  rendu. 

L'éminent  critique  constatait  le  succès  de  la  nouvelle  pièce  et  se 
plaisait  à  y  reconnaître  des  qualités  brillantes  agissant  sur  les 
masses,  ainsi  qu'une  grande  entente  de  la  scène  et  de  jolis  effets 
d'orchestration  : 

«  On  peut,  disait-il,  citer  un  duo,  un  trio,  plusieurs  couplets,  la 
scène  entière  où  le  sergent  apprend  à  Robinson  le  maniement  des 
armes,  un  chœur  fugué  dans  lequel  se  trouve  un  effet  de  decres- 
cendo charmant  et  imprévu,  différents  passages  d'instrumentation 
où  les  flûtes  et  les  clarinettes  sont  habilement  groupées  en  trio  et 
en  quatuor.  '  succès  n'a  pas  été  douteux  un  seul  instant,  ajou- 
tait-il, et  '  lOms  des  auteurs  ont  été  proclamés  au  milieu  des 
applaudis      .ents.  » 

Aujoui''  nui  le  goût  du  public  a  un  peu  changé  et  les  habitués 
de  l'Opéra-Comique,  tout  les  premiers,  ne  laisseraient  pas  de 
reconnaître  eux-mêmes  que  certaines  parties  de  l'œuvre  ont 
vieilli  et  sont  moins  en  rapport  avec  nos  appétits  nouveaux.  Le 
[tremier  acte  surtout,  toujours  considéré  comme  le  plus  faible 
d'ailleurs,  garde  l'empreinte  d'une  autre  époque;  son  influence 
un  peu  surannée  n'a  pu  cependant  compromettre  le  succès  de  cette 
heureuse  reprise.  Le  second  acte  est  venu  brillamment  enlever  la 


410 


KEVUE  Ei  GAZETTE  MUSICALE 


position,  c'était  justice.  Il  est  difficile,  comme  poëme,  de  trouver 
un  canevas  d'opéra-comique  plus  amusant,  et  comme  musique, 
des  morceaux  plus  appropriés  aux  situations.  C'est  aimable,  frais, 
gai  et  toujours  de  bon  goût. 

La  pièce,  créée  en  1838;  avait  été  reprise  une  première  t'ois  au 
théâtre  lyrique  du  boulevard  du  Temple  en  1847.  Il  y  avait  donc 
vingt  ans  qu'on  ne  l'avait  entendue  et  la  curiosité  était  vi'aiment 
sui-excitée  par  le  souvenir  de  son  ancien  succès;  il  ne  sera  peut- 
être  pas  indifférent  d'en  connaître  la  distribution  primitive  com- 
parée à  celle  d'aujourd'hui. 

1838  1868 

Robinson M.  Chollet.  M.  Meillel. 

Effie Mlle  Prévost.  Mlle  Daram . 

Toby M.  Henry.  M.  Wartel. 

■lenkins M.  Ricquier.  M.  Legraud. 

Mulgrave M.  Grignon.  M.  Giraudet. 

Lovcl M.  Fosse.  M.  Géraizer. 

Bob M.  Tessier.  M.  Verdcllet. 

En  1847,  ce  fut  Mme  Henri  Potier  qui  joua  le  rôle  d'Eftie  avec 
succès;  le  rôle  de  Robinson  était  tenu  par  Cabel,  plus  illustré  par 
sa  femme  que  par  lui-même. 

Aujourd'hui,  il  était  difficile  de  trouver  un  meilleur  Robinson 
que  notre  excellent  Meillet.  Il  s'est  tiré  à  son  plus  grand  honneui' 
d'une  tâche  ardue  et  périlleuse  en  ce  qu'il  s'agissait  de  concilier 
les  traditions  de  ceux  qui  avaient  vu  Chollet  et  le  goût  rcctilié  de 
ceux  qui  ne  l'ont  pas  connu.  En  effet,  cet  acteur,  enfant  gâté  s'il 
en  fut,  offrait  une  personnalité  très-marquée,  pleine  d'écueils  pour 
ses  imitateurs  et  à  laquelle  les  musiciens  d'alors  sacrifiaient  volon- 
tiers, parce  que  le  public  sanctionnait  ce  genre  évidemment  un 
peu  faux.  Le  chant  de  Chollet,  il  faut  l'avouer,  était  une  espèce  de 
J.a-i-tou  perpétuel,  et  les  rôles  écrits  pour  lui  n'étaient  vraiment 
ni  pour  ténor,  ni  pour  baryton.  L'autre  soir,  nous  avons  surtout 
remarqué  ce  défaut  dans  le  premier  acte  du  Brasseur.  Une  persis- 
tance sur  ré,  mi,  fa  dièze  se  trouve  liors  des  moyens  naturels 
du  baryton  et  les  fusées  en  voix  de  tête  qui  s'y  rencontrent  à 
chaque  instant  sont  aujourd'hui  tout  à  fait  démodées.  La  voix  sini- 
pathique  et  bien  posée  de  M.  Meillet  se  trou\ait  mal  à  l'aise  accro- 
chée à  ces  tours  de  passe-passe  ;  heureusement  le  deuxième  et  le 
troisième  acte,  en  rentrant  dans  de  meilleures  conditions  vocales, 
lui  ont  fourni  amplement  l'occasion  de  mettre  en  relief  ses  qua- 
lités sérieuses.  11  a  délicieusement  dit  sa  romance  du  troisième  acte 
et  un  bis  bien  mérité  dans  l'air  original  du  cheval  est  venu  le  ré- 
compenser de  ses  efforts.  Comme  comédien,  il  est  pariait  ;  ce  l'ùle 
moitié  bouffe,  moitié  sentimental  de  soldat  malgré  lui,  est  une 
création  qui  lui  sera  comptée  et  qui  prouve  une  fois  de  plus  la 
valeur  réelle  de  cet  artiste  consciencieux. 

Tous  nos  compliments  à  Mlle  Daram;  elle  est  charmante  dans 
le  rôle  gracieux  et  mutin  d'Effie.  Le  fameux  trio  du  second  acte,  si 
joli,  si  connu,  a  été  pour  elle  l'occasion  d'un  bis  et  d'un  franc 
succès.  Coiame  chant,  elle  progresse  tous  les  jours,  elle  a  du  feu, 
de  la  verve  ;  qu'elle  tâche  seulement  dans  le  dialogue  de  parler 
plus   naturellement  et  l'avenir  lui  appartient. 

Wartel,  dans  le  personnage  du  sergent  Toby,  a  conservé  sa 
voix  un  peu  cotonneuse  et  ses  grandes  jambes  toujours  pliées. 
Soyons  juste  toutefois,  il  joue  avec  intelligence  et  dépense 
une  forte  somme  de  bonne  volonté. 

Dans  la  catégorie  des  mentions  honorables  se  placent  MM.  Ver- 
dellet,  Legrand  et  Giraudet.  Les  chœurs  ont  chanté  à  tue-tête;  l'or- 
chestre s'est  distingué,  mais  il  joue  toujours  un  peu  fort  ;  il  y  a 
en  lui  comme  une  exubérance  de  jeunesse.  Je  vous  recommande 
un  tambour  qui,  dans  la  partie  militaire  de  l'ouvrage,  fait  du  bruit 
comme  quatre  ;  somme  toute,  un  peu  de  sourdine  à  la  clef  ne 
ferait  pas  de  mal,  au  contraire. 


Pour  nous  résumer,  le  public  ira  voir  le  Brasseur  de  Preston, 
parce  que  la  musique  en  est  cluirmante,  l'interprétation  très-soi- 
gnée, et  la  pièce  fort  amusante  dans  les  deux  derniers  actes  sur- 
tout. 

Paul  BERNARD. 


THEATRE  IMPÉRIAL  ITALIEN. 

OlcIIo<  —  lia  Serva  padrona. 

Le  ténor  au  puissant  ut  dièze  a  fait  sa  rentrée  mardi  dernier, 
salle  Ventadour,  dans  Otello.  Au  premier  acte,  à  l'air  notamment, 
on  se  demandait  si  le  temps  qui  ne  respecte  rien,  pas  même  les 
chefs-d'œuvre  supérieurs  qui,  malgré  d'incontestables  beautés, 
semblent  vieillir  chaque  année,  si  ce  temps,  disons-nous,  n'avait  pas 
commencé  à  entamer  l'organe  auti'efois  si  robuste  de  Tamber- 
lick,  à  l'affaiblir,  sinon  à  l'érailler,  à  l'user  en  un  mot.  Mais  quand 
le' fameux  duo  avec  Yago  est  arrivé,  et  que  l'artiste  a  pu  lancer 
à  deux  reprises  sa  note  exceptionnelle,  la  salle  tout  entière  a  fait 
éclater  des  applaudissements  et  le  triomphe  du  célèbre  ténor  n'a 
plus  été  douteux.  11  a  fallu  cependant  le  fameux  ict  dièze  pour 
l'assurer!  En  somme,  le  talent  est  toujours  le  même;  la  voix  a 
faibli  légèrement  dans  le  chant  (|ue  les  Italiens  appellent  spianato, 
c'est-à-dire  dans  le  largo,  l'adagio,  voire  même  dans  le  récit;  mais,  dans 
les  notes  d'élan  et  partout  où  il  faut  de  la  vigueur,  de  l'énergie, 
partout  oh.  la  voix  est  soutenue  par  le  sentiment  dramatique, 
elle  est  encore  pleine,  forte,  vibrante,  et  elle  trouve  des  effets  sai- 
sissants. 

On  sait  qu'au  troisième  acte  seulement,  l'opéi'a  de  Rossini 
tlevienl  shakspearien.  Les  deux  premiers  actes  sont  plutôt  une 
série  de  superbes  morceaux  de  concert,  que,  s'il  les  avait  écrits 
de  nos  jours,  Rossini  aurait  sans  doute  dépouillé  de  tous  les 
traits,  vocalises  et  fioritures  qui  les  enjolivent.  Mais  au  troisième 
acte,  à  partir  de  l'inimitable  plainte  du  gondolier,  la  musique  suit 
de  près  le  sujet,  le  serre  et  s'identifie  avec  lui.  C'est  ici  que  l'on 
a  pu  admirer  le  talent  des  deux  artistes,  de  Tamberlick,  qu'on 
connaissait  déjà  dans  ce  rôle,  et  de  Mlle  Krauss  qui  s'y  est  montrée 
excellente  cantatrice,    comme  toujours,  et  tragédienne  distinguée. 

MM.  Verger  et  Agnesi  ont  eu  leur  part  du  succès;  mais  une 
part  encore  plus  large  en  a  été  faite  au  jeune  ténor  Palermi,  dont 
le  talent  —  d:ins  le  répertoire  rossinien  surtout  —  s'affirme  chaque 
jour  davantage. 

—  Jeudi  le  spectacle  se  composait  des  deux  derniers  actes  de 
Rigoletto  et  de  la  Serva  padrona  (servante  maîtresse),  non  pas  de 
Pergolèse,  mais  de  Paisiello.  Cette  seconde  Serva  padrona  date  de 
1777.  Le  maître  napolitain  l'écrivit  en  Russie,  un  peu  avant  son 
Barbier. 

Quel  contraste  frappant  avec  la  musique  fougueuse  et  véhémente 
de  Verdi  !  Si  la  direction  a  voulu  viser  à  cet  effet  d'antithèse,  elle 
y  a  parfaitement  réussi,  mais  nous  ne  savons  pas  si  la  musique 
calme,  douce,  un  peu  naïve  et  presque  parlée  de  Paisiello  gagne 
à  être  ainsi  rapprochée  de  celle  de  Verdi  !  On  aurait  dû  au  moins 
commencer  par  la  Serva  padrona.  Quoi  qu'il  en  soit,  celle-ci  gagne- 
rait à  ne  pas  être  donnée  le  môme  soir  qu'un  opéra  de  Verdi. 
Lequel  des  deux  maîtres  veut-on  faire  servir  de  repoussoir  à 
l'autre? 

Ceci  dit,  nous  nous  empresserons  de  constater  que  Mme  Krauss , 
—  toujours  elle  !  —  après  avoir  trouvé  des  accents  déchirants  dans 
le  rôle  de  Gilda  du  Rigoletto,  a  été  ravissante  sous  le  costume  de 
soubrette  de  Zerbine,  tout  à  la  fois  coquette,  enjouée,  accorte,  dé- 
lurée, câline  ;  charmante  en  un  mot.  Qu'elle  chante  Rossini, 
Verdi  ou  Paisiello,  elle  est  toujours  sûre  de  réussir,  car  elle  est  mu- 


DE  PARIS. 


4H 


sicienne  dans  l'âme.  La  basse  comique  Ciampi  l'a  admirablement 
secondée.  Mlle  Urban,  pour  laquelle  on  avait  développé  et 
agrandi  le  rôle  muet  de  Vespino,  a  été  adoral>le  do  verve  et  de 
brio,  tantôt  sous  le  costume  coquet  du  frère  de  Zerbine,  tantôt 
sous  celui  de  la  pensionnaire,  tantôt  enfin  sous  l'habit  militaire 
du  capitaine  Tempesta  ;  il  taquine,  agace,  fait  damner  le  pau- 
vre vieux  Pandolplie  et  aide  de  toute  sa  malice  au  mariage  de  sa 
sœur,  servante  devenue  maîtresse. 

La  Serva  Padvona  sera  un    très-joli   appoint   aux   opéras  trop 
courts,  tels  que  la  Snnnainbula  ou  Lucia,  etc. 

Elias  de  RAUZE. 


THÉÂTRE  DES  BOUFFES-PARISIENS. 

PETIT  BO.^iHOSINE    TIT  ENCOBÉ! 

Opéra-comique  en  deux  actes,  paroles  de  M.  de  Najac,  musique 

de  M.  \ji  Deffës. 

(Première  représentalion  le  19  décembre  1868.) 

L'opéra-comique  de  M.  Deffès  est  la  première  nouveauté  que  la 
direction  des  Bouffes-Parisiens  a  donnée  depuis  sa  soirée  d'ouvei-- 
ture,  ce  qui  semble  dénoter  une  situation  prospère,  et  fait  l'éloge 
de  M.  Jules  Noriac.  Faut-il  aussi  constater,  à  sa  louange,  que  cet 
ouvrage  n'est  pas  tout  à  fait  insensé,  et  qu'il  a  même  des  allures 
presque  raisonnables?  Le  public  est-il  mûr  pour  cette  espèce  de 
renaissance  ?  Nous  souhaitons  que  M.  Jules  Noriac  n'apprenne  pas 
à  ses  dépens  qu'il  s'est  aventuré  trop  tôt  dans  la  voie  de  la  réac- 
tion. 

Le  sieur  Jean  Belleface  a  quitté  sa  femme  à  la  suite  d'une  scène 
de  ménage,  et  il  s'est  mis  à  courir  le  monde.  Mais  lorsque,  un 
jour,  il  a  été  •  conduit  par  la  misère  à  rentrer  au  bercail,  il  a 
trouvé  porte  close.  Mme  Belleface,  s'appuyaut  sur  un  extrait  mor- 
tuaire de  son  coupable  époux^  refuse  de  le  reconnaître.  Ce  n'est 
plus  d'ailleurs  la  marchande  de  modes  d'autrefois;  elle  est  devenue 
une  cantatrice  célèbre,  sous  le  nom  de  la  signora  Florini,  et  elle 
a  autour  d'elle  une  cour  nombreuse  d'adorateurs.  Parmi  ceux-ci 
figure  en  première  ligne  le  prince  russe  Onséky,  dont  elle  a  peine 
à  repousser  les  offres  brillantes.  Enfin,  elle  se  décide  à  partir  avec 
lui,  et  le  pauvre  mari,  pour  veiller  sur  ses  droits  contestés,  ne 
trouve  pas  d'autre  moyen  que  d'entrer  au  service  du  prince  russe 
en  qualité  de  valet  de  chambre. 

Nous  laissons  de  côté  une  folle  qui  le  prend  pour  un  amant 
déguisé,  et  qui  abandonne  son  mari  pour  le  suivre.  A  la  première 
étape,  Jean  Belleface  perd  tout  à  coup  patience;  il  se  débarrasse 
de  sa  folle  en  la  rendant  à  son  époux,  et,  prenant  le  costume 
et  les  manières  d'un  beau  du  Directoire,  il  entre  en  lutte  de  sé- 
duction avec  le  prince,  et  reconquiert  le  cœur  de  sa  femme,  qui 
veut  bien  finir  par  reconnaître  que  Petit  bonhomme  vit  encore! 

Cette  pièce  a  des  parties  plaisantes;  mais  son  principal  mérite 
réside  dans  l'agréable  musique  de  M.  Louis  Deffès.  Si  elle  ne 
brille  pas  par  une  grande  originalité,  on  y  rencontre  du  moins 
les  qualités  ordinaires  de  ce  compositeur,  l'esprit,  la  grâce,  la 
distinction. 

Il  y  a,  au  premier  acte,  dans  le  trio  d'introduction,  de  forts 
jolis  couplets  vocalises  par  la  signora  Florini,  plus  loin,  une  bam- 
boula très  réussie,  une  joyeuse  chanson  de  matelot,  et  sui'tout  un 
finale  qui,  au  talent  de  la  mise  en  œuvre,  joint  le  bonheur  de 
l'inspiration.  C'est,  selon  nous,  le  meilleur  morceau  de  la  parti- 
tion. 

Dans  le  deuxième  acte,  on  peut  encore  citer  un  gentil  duo  pour 
deux  voix  de  femme,  un  quatuor  terminé  en  quintette,  une  chan- 


son de  table,  et  les  couplets  de  la  fin  :  Je  suis  Jejin  Belleface,  qui 
ont  de  la  gaieté  et  de  la  rondeur. 

Le  rôle  de  ce  Jean  Belleface,  ou,  si  vous  voulez,  de  Cocomero, 
qui  prend  toutes  sortes  de  noms  et  de  déguisements,  pour  se  rap- 
procher de  sa  femme,  est  joué  avec  infiniment  de  verve  par 
Berthelier.  Ce  n'est  pas  à  lui  qu'on  reprochera  de  laisser  languir 
la  situation. 

Mlle  Fonti  est  charmante  sous  les  traits  de  la  Florini  ;  elle  est 
bonne  comédienne  et  elle  chante  en  véritable  virtuose  italienne, 
comme  c'est  son  devoir. 

Lanjallais  a  fait  un  type  très-réussi  du  prince  russe  ;  Bon- 
net tire  tout  le  parti  possible  d'un  rôle  baragouiné  et  Mlle  Gilbert 
porte  à  ravir  l'étrange  costume  du  Directoire. 


THEÀTBE  DES  FÂNTÂISIES-PÂRISENNES. 

Reprise  de  CHIlea  waviasetttr. 

Opéra-comique  en  un  acte ,  paroles  de  M.  T.  Sauvage,  musique 
de  M.  A.  Grisar. 

(Le  21  décembre  1868.) 

M.  Martinet  poursuit ,  aux  Fantaisies-Parisiennes  ,  l'œuvre 
qu'il  a  entrepris,  de  ressusciter  quelques-uns  des  bons  opéras  qui 
sont  délaissés,  pour  une  raison  ou  pour  une  autre,  par  nos  grands 
théâtres  lyriques.  Sa  dernière  reprise,  celle  de  Gilles  ravisseur,  ne 
pourrait  être  mieux  choisie,  car  cet  ouvrage  est  un  bijou  musical, 
et  l'un  des  plus  scintillants  de  l'écrin  d'Albert  Grisar. 

Aussi  la  pièce  de  M.  T.  Sauvage,  si  habilement  agencée,  d'a- 
près l'ancien  opéra-coinique  de  D'Hell,  et  la  partition  de  Grisar, 
ont-elles  retrouvé,  aux  Fantaisies-Parisiennes,  leur  succès  de  1848. 

Gabriel  Bonnet  n'a  pas  fait  oublier  Mocker  dans  le  rôle  de 
Gilles,  dont  ce  dernier  fit  une  si  charmante  création,  mais  il  y  a  mis  du 
naturel  et  de  la  gaieté.  11  dit  fort  bien  sa  ronde  de  Joli  Gilles.  Bar- 
nolt  remplace  Sainle-Foy,  adroitement,  mais  il  a  fort  à  faire  encore 
pour  l'égaler.  Crispin  est  joué  parSoto,  dont  nous  avons  plusieurs 
fois  remarqué  l'heureuse  voix  bien  timbrée  et  la  bonne  méthode. 
L'air:  Regardez  à  la  ronde,  a  été  pour  lui  l'occasion  d'un  vrai 
succès.  Les  beaux  yeux  de  Mlle  Persini  sont  un  talisman  qui  la 
protège  dans  le  rôle  d'Isabelle. 

Au  résumé,  l'opéra  de  MM.  Sauvage  et  Grisar  est  très-convena- 
blement monté,  et  il  a  pour  soutien  un  orchestre  irréprochable. 

D. 


NOUVELLES  SÉANCES  THÉÂTRALES 

A  L'ÉCOLE  SPÉCIALE    DE   CHANT. 

Vendredi  dernier,  l'inauguration  à  l'École  spéciale  de  chant,  di- 
rigée par  MM.  Duprez,  des  exercices  d'élèves  avec  orchestre,  a 
bien  été  ce  que  promettait  leur  programme  :  un  spectacle  varié, 
honnête,  intéressant  sous  le  rapport  musical. 

Au  début  delà  séance, M.  G.  Duprez,  dans  un  speech  humoris- 
tique et  qui  a  produit,  quoique  débité  d'une  voix  enrouée,  un  excel- 
lent effet,  a  remercié  les  protecteurs  de  l'école  de  leur^  empresse- 
ment à  encourager  «  les  jeunes  adeptes  de  l'art  sérieuxet  »  à  vouloir 
être  les  témoins  assidus  de  leurs  progrès. 

Le  spectacle,  —  nous  disons  bien,  —  que  M.  Auber  honorait  de 
sa  présence,  se  composait  de  la  grande  et  dramatique  scène  finale 
du  Roméo  et  Juliette,  de  Vaccaï,  et  de  Jéliole,  opéra-comique  en 
un    long   acte,  de  M.  H.  Lucas  et  Ed.  Duprez  pour  les  paroles,  et 


412 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


du  grand  Duprez  lui-même  pour  la  musique.  Sous  le  couvert  du 
quiproquo  classique  et  dans  le  naïf  développement  d'une  intrigue 
à  l'eau  de  rose,  cet  ouvrage  présente  des  situations  musicales 
nombreuses,  trop  nombreuses  peut-être,  et  renferme  plusieurs 
morceaux-études  habilement  combinés  pour  faire  valoir  par  leurs 
contrastes  les  moyens  vocaux  et  dramatiques  des  élèves. 

Les  exécutants,  en  effet,  n'étaient  que  des  élèves,  et  si  nous  les 
nonunons,  c'est  moins  pour  leur  accorder  des  éloges  dangereux 
que  dans  la  pensée  de  les  encourager  simplementet  de  fixer  lepoint 
de  départ  de  leurs  progrès  réels.  Mlle  Mina  Smidt  (Roméo),  nouvelle- 
ment débarquée  d'Allemagne,  possède  une  voix  de  contralto  ma- 
gnifique :  ce  sera,  plus  tard,  quand  on  lui  aura  appris  à  s'en  servir, 
puissant,  étendu  de  registre,  velouté  de  timbre.  L'Ecole  spéciale 
changera  également  en  qualités  la  voix  et  le  jeu  automatiques,  mais 
vigoureux,  de  Mlle  Fogliari.  Quant  à  Mlle  Wugk,  c'est  l'étoile  de 
la  petite  salle  de  la  rue  de  Laval  :  fort  jolie  personne,  gracieuse, 
élégante,  douée  de  naturel  et  de  finesse,  comédienne  d'instinct, 
elle  tire  le  meilleur  parti,  —  et  non  pas  sans  beaucoup  de  cette  assu- 
rance et  de  ce  diable-au-corps  que  donne  la  méthode  de  Duprez, 
—  d'une  voix  remarquablement  belle  et  colorée;  il  y  a  là  tout 
un  avenir  artistique,  si  on  ne  sème  pas  au  vent  la  moisson  labo- 
rieusement amassée.  Du  côté  des  jeunes  gens,  je  citerai  M.  Fau- 
quez  :  la  voix  est  bonne,  mais  exigera  toujours  bien  des  ména- 
gements; il  ne  saurait  donc  trop  connaître  l'art  du  beau  chant. 
Pour  le  jeu,  ce  jeune  ténorino  (Jéliotte)  rappelle  le  mot  de  Ni- 
non, sa  conterapor.aine,  dans  la  pièce  :  vraie  boule  de  neige  fri- 
cassée dans  la  glace.  Un  petit  amoureux  du  théâtre  du  Gymnase, 
M.  Ernest  Vois,  élève  de  l'Ecole,  a  brûlé  les  planches  avec  beaucoup 
d'esprit  et  de  bonne  humeur  dans  le  rôle  du  perruquier  Pingouin. 
MIVL  Duprez  père  et  fils  s'étaient  travestis  pour  donner  la  réplique 
à  leurs  élèves  ;  le  père  a  eu  dans  le  finale  dé  son  propre  opéra  un 
succès  de  professeur  et  de  robe  de  chambre  dont  l'ombre  d'Arnold 
a  paru  satisfaite  ;  mais  à  quelle  étrange  voix  de  Ijasse  peu\ent  donc 
insensiblement  arriver  les  ténors  ! 

Les  costumes  et  les  décors  étaient  d'une  fraîche  simplicité.  J'a- 
jouterai que  l'orchestre  s'est  tiré  à  son  avantage  de  l'orches- 
tration touffue  de  G.  Duprez,  et  que  M.  Auber  a  félicité  ce  der- 
nier. 

Tout  a  donc  marché  pour  le  mieux  dans  cette  petite  fête  de  fa- 
mille que  chaque  mois  ramènera  deux  fois.  En  sortant  à  6  heures 
du  soir  de  cette  matinée  tliéâtrale,  on  était  tant  soit  peu  dérouté 
tant  il  semblait  —  et  c'est  là  le  meilleur  compliment,  je  crois, 
qu'il  convienne  d'adresser  aux  directeurs  et  aux  élèves  d'élite  de 
l'Ecole  spéciale  de  chant  —  tant  il  semblait  avoir  assisté  dans  une 
vraie  salle  de  spectacle  à  une  vraie  représentation  lyrique. 

M.  M. 


£A  MUSIQUE  DE  LA  P£BICH0LE. 

Comme  tout  le  monde,  nous  avons  été  voir  la  Périckole,  rire  de 
cette  pièce  amusante  et  du  jeu  de  ses  désopilants  interprètes  ;  comme 
tous,  nous  avons  remarqué  dès  le  premier  soir  la  musique 
élégante,  alerte  et  facile  que  le  maître  du  genre,  il  maestro  Of- 
fenbach,  a  semée  avec  sa  verve  habituelle  depuis  l'ouverture  jus- 
qu'au dernier  finale;  comme  presque  tous,  séduit  parla  première 
audition,  nous  sommes  retourné  voir  cette  spirituelle  bouffon- 
nerie qui,  sans  en  avoir  l'air,  touche  parfois  ,  comme  la 
Grande-Duchesse,  à  certains  travers  de  notre  société  ,  et 
la  musique,  réentendue  une  seconde  fois,  nous  parut  alors  mériter 
une  étude  spéciale  de  ses  moyens  et  de  ses  effets,  pour  en  appré- 
cier plus  complètement  la  valeur  réelle  et  le  caractère  tout  par- 
ictulier. 


La  partition  étant  parue,  nous  la  prîmes  donc  aussitôt  en  mains, 
et  c'est  avec  un  vrai  plaisir  que  la  lecture  succédant  à  l'audition, 
l'analyse  expliquant  la  sensation,  nous  pûmes  fixer  notre  juge- 
ment sur  la  manière  générale  d'Offenbach,  et  spécialement  sur  la 
musique  de  la  Périchole. 

C'est  une  oeuvre  charmante,  dans  ce  qu'elle  est.  Inutile  de  lui 
demander  plus  qu'elle  ne  donne,  plus  qu'elle  ne  doit  donner. 
L'épopée  n'a  rien  à  démêler  avec  le  madrigal  et  le  poëme  épique 
n'empêche  pas  le  conte  en  vers  d'êti'e  une  agréable  et  délicieuse 
chose.  Laissons  donc  pour  aujourd'hui  dormir  en  paix  le  grand 
genre,  et  de  même  que  nous  lirions  un  chapitre  de  Vert-Vert  ou 
du  Lutrin  vivant,  effeuillons  ensemble  cette  gentille  partition  de 
la  Périr.hole  qui  personnifie  vraiment  la  poésie  légère  en  musique, 
et  qui  peut  en  toute  justice  valoir  à  son  humoristique  auteur  le 
surnom  de  Gi'esset  musical. 

Savez-vous  qUe  ce  genre-là  n'est  pas  si  facile  à  traiter  que  cela 
pourrait  le  paraître  tout  d'abord?  On  peut  bien  avoir  quelques 
idées  mélodiques  dans  le  genre  bouffe,  mais  on  tombe  alors  si 
rapidement  dans  le  trivial,  dans  "le  vulgaire,  dans  la  chanson  de 
carrefour  !  Avec  Off'enbach  il  n'y  a  rien  décela  à  craindre.  Sa  phrase 
conserve  une  saveur  native  qui  annonce  son  parfait  musicien  ;  ses 
harmonies  sont  fines  et  élégantes,  et  il  sait  greffer  avec  un  tact 
que  lui  seul  possède  la  corde  sentimentale  sur  le  canevas  comi- 
que. Nous  citerons  dans  ce  dernier  ordre  la  déclaration  de  la 
Grande-Duchesse  et  la  lef'-e  de  la  Périchole.  Impossible  de  ren- 
contrer des  mélodies  plus  traîches  et  plus  senties.  C'est  le  parfum 
de  la  rose  s'unissant  à  la  simplicité  de  l'églantine  ;  c'est  pur, 
c'est  délicat,  c'est  charmant.  On  ne  sait  s'il  faut  s'attendrir  ou 
continuer  à  plaisanter;  dans  tous  les  cas,  on  s'amuse,  et  c'est  là 
l'essentiel.  La  musique  amusante  !  OfTenbach  en  est  bien  le  créa- 
teur et  le  public  lui  en  a  conféré  le  brevet.  D'autres  y  ont  par 
hasard  réussi  ;  combien,  hélas  !  y  ont  échoué. 

C'est  du  reste  là  qu'il  est  parfaitement  dans  son  centre;  il 
trouve  alors  de  ces  effets  comiques  dont  il  garde  la  clef  et  aux- 
quels personne  n'aurait  pensé,  pas  même  ses  collaborateurs.  Ses 
grands  finales  bouffes  naissent  dans  sa  tête  sans  que  rien  puisse 
les  faire  pressentir.  Les  librettistes  écrivent  une  scène  bien  cou- 
pée, bien  conduite;  le  compositeur  se  met  à  l'œuvre  et  c'est  tout 
autre  chose  qui  sort  de  sa  plume.  Un  seul  vers,  un  seul  mot 
quelquefois  lui  font  trouver  un  effet,  un  morceau  tout  entier  où 
la  partie  musicale  vient  jouer  son  rôle  et  prendre  le  haut  du  pavé. 
Il  surgit  alors  de  ces  cocasseries  qui  savent  arracher  le  rire  aux 
plus  flegmes  et  font  pâmer  les  esprits  joyeux.  Il  y  a  de  tout  là 
dedans  :  de  la  charge  italienne,  de  la  gasconnade,  de  la  farce 
gauloise.  C'est  du  Rabelais  en  musique;  la  note  sautille,  les  ins- 
truments jacassent,  les  accords  jouent  à  saute-mouton  tandis  que 
les  syllabes  jouent  à  cache-cache  ;  la  joie  déborde  et  les  fronts  les 
plus  académiques  sont  déridés. 

Le  plus  remarquable,  c'est  qu'au  milieu  de  toutes  ces  folies 
régnent  une  sûreté  de  touche,  une  entente  de  la  scène,  un  res- 
pect  de  la  forme  qui  classent  les  œuvres  d'Offenbach  dans  le  ré- 
pertoire véritablement  artistique.  Nous  sommes  de  ceux  auxquels 
répugnent  les  bas-fonds  de  l'art,  sans  nommer  rien  ni  personne. 
En  suivant  Offenbach,  si  loin  qu'il  aille  dans  le  domaine  du  ca- 
price et  de  l'excentricité,  on  est  toujours  sûr  de  rester  en  bonne 
compagnie  et  de  n'avoir  pas  les  oreilles  souillées;  mieux  que  cela, 
on  est  certain  d'avoir  entendu  de  bonne  musique,  et  très-souvent 
de  pouvoir  enregistrer  des  inspirations  de  premier  ordre. 
Maintenant  passons  aux  détails. 

L'ouverture  s'annonce  gaiement  et  nous  fait  connaître  de  suite 
deux  des  principaux  motifs  de  l'ouvrage:  le  refrain  de  l'Espagnol 
et  la  lettre  de  la  Périchole;  nous  en  reparlerons  à  leur  place.  Un 
chœur  de  fête  ouvre   brillamment   le   premier  acte,  mais  l'atten- 


DE  PARIS. 


413 


tion  se  porto  davantage  sur  la  chanson  des  trois  cousines.  Ce 
morceau  en  forme  de  valse  est  agencé  d'une  façon  charmante,  et 
la  phi-ase  où  le  cliœui-  répond  :  Versas,  à  nous  versez,  est  d'une 
fraîcheur  sans  égale.  C'est  un  vrai  cliœur  d'opéra-comique.  Les 
couplets  du  vice-roi  qui  viennent  ensuite  sont  d'un  sentiment 
bouffe  de  bon  aloi,  et  sui'  ces  paroles  : 

Je  vais,  je  viens,  je  me  faufile 
Incognito, 

se  pose  un  refrain  traité  fort  spirituellement.  J'aime  moins,  par 
tempérament,  la  complahite  de  l'Espagnol  et  de  la  jeune  Indienne. 
Cependant  je  dois  avouer  qu'elle  porte  bien  le  cachet  d'une  chan- 
son des  rues.  C'était  ce  qu'il  fallait  et  le  compositeur  a  rencon- 
tré juste.  Encore  ici  un  refrain  qui  deviendra  populaire  : 

Il  grandira,  car  il  est  Espagnol. 

En  disant  qu'il  deviendra  populaire  je  ne  suis  guère  sorcier; 
ne  l'est-il  pas  déjà  ? 

Voici  la  letti-e  de  la  Périchole.  En  même  temps  qu'une  perle 
de  mélodie,  c'est  un  petit  bijou  de  sentiment ,  d'originalité ,  de 
diction  et  d'exquise  finesse.  Il  est  vrai  de  dire  que  IMlle  Schneider 
détaille  cela  à  ravir.  La  pau\re  Périchole  explique  à  son  amant 
que,  bien  que  folle  de  lui,  il  faut  se  séparer.  L'amour  est  un 
grand  maître,  mais  la  faim  est  une  mauvaise  conseillère,  et  sur 
des  paroles  inspirées  de  la  Manon  de  l'abbé  Prévost,  se  pose  une 
phrase  musicale  d'une  simplicité  adorable.  C'est  fait  de  rien, 
mais  d'un  rien  d'or.  Tout  le  monde  chantera  cette  bluetle,  et 
chacun  y  trouvera  son  compte,  amateurs  et  artistes,  par  le 
charme  qui  s'adresse  à  tous  et  par  la  valeur  intrinsèque  d'une 
inspiration  vraie. 

Nous  arrivons  au  grand  finale  du  premier  acte,  et  nous  allons 
rencontrer  bon  nombre  de  ces  surprises  dont  je  parlais  tout  à 
l'heure.  Un  chœur  et  le  duetto  des  notaires  préparent  fort  bien 
la  Cbfémonie  funambulesque  de  ce  mariage  en  goguette.  Atten- 
tion! voici  la  fiancée.  Elle  marche  légèrement  de  biais  et  dit  tout 
bas  : 

Je  suis  un  peu  grise. 
Faut  pas  qu'on  le  dise. 
Chut  ! . . .  faut  pas.  = 

La  musique  se  prête  avec  une  grande  finesse  à  cette  confidence 
naïve  !  Voici  maintenant  le  marié  : 

Ah!  les  autres  étaient  bien  gris, 
Mais  il  l'est  tant  celui-là,  gris, 
Qu'à  lui  tout  seul,  il  est  plus  gris 
Que  tous  les  autres  n'étaient  gris. 

La  partie  musicale  relève  encore  la  drôlerie  de  ce  refrain,  puis 
un  point  d'orgue  impossible,  comme  Ofl'enbach  sait  les  trouver  et 
Dupuis  les  chanter,  amène  un  charmant  petit  duo  entre  les  deux 
époux  ;  après  quoi,  la  cérémonie  se  termine  au  milieu  d'un  chœur 
à  tout  casser  sur  un  galop  identique  à  celui  de  la  Belle  Hélène, 
et  dans  lequel  passe  un  charmant  épisode  scénique.  C'est  la  for- 
mule légale  du  mariage  mise  eu  musique;  c'est  vraiment  drôle. 
Enfin,  l'acte  s'achève  sur  le  retour  de  la  phrase  ;  //  grandira,  car 
il  est  Espagnol,  et  l'on  se  demande  comment  tant  de  choses  fol- 
les et  jolies  ont  pu  se  trouver  si  bien  et  si  rapidement  accou- 
plées. 

Une  valse  faite  de  plusieurs  fragments  déjà  entendus  ou  qu'on 
entendra  bientôt  sert  d'entr'acte;  puis  le  rideau  se  lève  sur  le  chœur 
des  dames  de  la  cour,  en  si  bémol  mineur,  un  véritable  petit 
morceau  d'artiste,  une  romance  sans  paroles  de  Mendelssohn; 
vous  voyez  qu'il  y  en  a  pour  tous  les  goûts.  Les  couplets  des  can- 
cans qui  viennent  ensuite  sont  aussi  d'une  couleur  fort  distinguée. 


Mais  changeons  de  point  de  vue.  Le  chœur  des  seigneurs,  imité 
de  la  Favorite,  présente  de  curieuses  modulations,  tout  en  rappe- 
lant la  phrase  de  Donizetti.  Les  couplets  :  f.es  femmes  il  n'y  a 
que  ça,  sont  élégants  et  comiques;  ceux  :  Ah!  Que  les  liommes 
sont  bêtes!  en  font  l'aimable  contre- partie.  Puis  vient  un  très- 
joli  rondo  de  bravoure  pour  la  présentation,  le  galop  de  l'arres- 
tation :  Sautez  dessus  I  une  vraie  folie  ;  enfin  le  mor(»au  des 
maris  récalcitrants,  et  là  le  comique  arrive  à  son  comble.  La  mu- 
sique en  est  charmante;  elle  est,  du  i-esle,  fort  curieusement  cou- 
pée par  une  nouvelle  imitation-charge  de  la  Favorite,  sur  ces 
paroles  :  Dans  son  palais,  ton  roi  t'appelle.  Cette  partie  de  l'ou- 
vrage est  des  plus  entraînantes,  la  mélodie  en  est  franche, 
coulée  d'un  jet  et  l'agencement  des  plus  heureux. 

Dans  la  partition  se  présente  ici  un  duo  qui  ne  se  dit  pas  aux 
Variétés.  Il  est  cependant  charmant,  mais  son  cadre  étant  plutôt 
celui  de  l'opéra-comique,  il  pouvait  paraître  un  peu  froid  aux 
spectateui's  chauffés  à  blanc  par  le  morceau  précédent. 

Ce  qui  reste  maintenant  est  peu  de  chose.  Citons  pourtant  le 
chœur  qui  précède  le  dîner  du  roi  et  une  séguedille  des  plus 
alertes  dite  par-Piquillo  et  la  Périchole.  Cette  séguedille,  dans  les 
premières  représentations,  était  chantée  au  premier  acte  sur  de 
piquantes  paroles  de  couleur  tout  à  fait  espagnole  : 

Vous  a-t-on  dit  souvent  : 
Ecoutez-moi,  la  fille"? 

Cette  guitare  en  deux  couplets,  comme  l'annoncent  les  acteurs,  a 
le  privilège  de  réveiller  l'attention  quand  il  semble  qu'il  n'y  ait 
plus  qu'à  baisser  le  rideau.  Il  baisse  cependant  à  minuit  moins  dix 
sur  le  refrain  dominant  de  la  pièce  : 

il  grandira,  car  il  est  Espagnol. 

Avais-je  raison  de  vanter  l'habileté,  l'adresse,  la  profusion  du 
maestro  Oifenbaclt?  En  comptant  les  choses  charmantes  de  la  Pé- 
richole, les  passages  d'une  valeur  incontestable  qui  s'y  présentent,  en 
appréciant  la  facilité  de  facture,  la  connaissance  des  eff'ets  que  met 
en  œuvre  cet  aimable  musicien,  on  est  forcé  de  l'econnaître  qu'il 
sait  rendre  intéressant  le  genre  léger  et  que  ses  partitions  ont 
plus  de  mérite  que  beaucoup  d'autres  plus  ambitieuses  et  bien 
plus  vides. 

C'est  ce  qui  explique,  sans  plus  chercher,  le  succès  qiii  s'attache 
à  la  plupart  de  ses  œuvres  et  l'intérêt  qui  se  développe  à  l'appa- 
rition de  ses  nouveaux  ouvrages. 

Paul  BERNARD. 


Nous  recevons  trop  tard,  pour  pouvoir  l'insérer  aujourd'hui ,  la 
réponse  de  M.  Fétis  à  la  lettre  de  M.  Gevaert  que  nous  avons 
publiée  dimanche.  Ce  sera  pour  notre  prochain  numéro. 


NOUVELLES  DES  THÉÂTRES  LYRIQUES. 

^*if  La  représentation  de  la  Muette,  dimanche  dernier,  au  théâtre  de 
l'Opéra,  a  été  fort  belle  ;  la  salle  était  comble  et  l'on  a  clialeureusenient 
applaudi  Villaret  et  Devoyod  dans  les  rôles  de  Masaniello  et  de  Pietro. 

^"^^  Lundi  et  vendredi  on  a  joué  les  Huguenots  auxquels  le  public 
continue  de  se  porter  en  foule.  —  Mercredi,  Hamlet.  —  Aujourd'hui, 
par  extraordinaire,  la  Juive. 

^*^  La  représntation  donnée  mercredi  au  bénéfice  de  i\Ime  Ugalde  a 
été  fort  brillante  et  la  recette  a  dépassé  8,000  francs.  Mme  Carlotta  Palti, 
qui  avait  promis  son  concours  à  la  bénéficiaire,  n'a  pu  lui  tenir  parole. 
En  reparaissant  sur  le  théâtre  de  ses  premiers  succès,  Mme  Ugalde  n'a 
pu  se  défendre  d'une  certaine  émotion,  mais  bientôt  remise,  elle  s'est 
montrée,  particulièrement  dans  Galathée,  création  dans  laquelle  elle  est 
restée  inimitable,  à  la  hauteur  de  sa  réputation. 


414 


REVUE  ET  GAZETTE  MUSICALE 


,*^  .leudi,  à  l'Opéra-Comique,  Leroy  a  dû  chanter  au  pied  levé,  dans 
}i' Pirmicr  Jour  de  bonheur,  le  rôle  de  Capoul,  indisposé.  11  s'en  est  fort 
bien  tiré.  —  Le  ténor  Nicot  va  débuter  incessamment  dans  le  Pré  aux 
Clercf:, 

,■**  Les  adieux  d'Adelina  Patti  ;i  la  scène  italienne  de  la  place  Ven- 
tadour  avaient  attiré,  dimanche  dernier,  plus  de  monde  que  la  salle 
n'en  peut  contenir.  La  représentation  n'a  été  qu'une  ovation  perpétuelle 
pour  la  diva,  qui  rst  partie  lundi  pour  Bruxelles,  chargée  de  bravors  de 
bouquets  et  de  couronnes.  —  Une  dépêche  de  cette  dernière  ville  an- 
nonce que  sa  première  apparition,  dans  Lwia,  au  théâtre  de  la  Monnaie, 
acte  splendide.  —  La  recette  a  atteint  le  chiffre  de  16,706  francs. 

^*:;  La  maladie  d'Offenbach  ,  qui  vient  de  le  retenir  deux  semaines 
chez  lui,  a  apporté  du  ralentissement  dans  les  études  de  Vert-Vert  à 
l'Opéra-Comique.—  Le  fécond  compositeur  s'occupe  à  la  fois  de  l'opérette 
en  un  acte  que  va  donner  le  théâtre  des  Variétés,  pour  les  débuts  de 
Zulma  Bouffar  et  de  Mlle  Aimée,  et  de  la  partition  de  la  Dira,  -  la 
pièce  de  rentrée  de  Mlle  Schneider  aux  Bouffes,  —  ce  qui  ne  reuqiêche 
pas  de  songer  déjà  ii  lu  l'rinresse  de  Trébizonde,  de  MM.  Tréfeu  et  Nuitter, 
qui  doit  être  jouée  cet  été  ;i  Bade,  oii  M.  N'oriac  transportera  pour  l'in- 
terpréter sa  troupe,  pendant  la  fermeture  de  son  théâtre.  On  voit  que 
ce  n'est  pas  l'activité  qui  manque  au  maestro. 

***  Toujours  grande  foule  à  l'Athénée  pour  entendre  /-'î  llorretirs  de 
la  (jucrre  de  MM'.  Gille  et  Costé,  interprétés  de  la  façon  la  plus  bouf- 
fonne par  MM.  Léonce  et  Luce  et  la  plus  cliarmante  par  Mlle  Van  (îhell. 

—  Mlle  Lovato  a  pris  depuis  quelques  jours  le  rôle  de  Wilhelmine,  qui 
n'a  rien  perdu  au  changement.  —  Le  Venijeur  complète  wu  ne  peut  mieux 
le  spectacle. 

,%  Le  théâtre  des  l''olies-|)ramalique<  va  mettre  procliainemeiit  en 
répétition  un  opéra-boufté  que  l'on  dit  de  la  plus  excentrique  originalité 
et  qui  est  intitulée  l'Arrachease  de  dents.  Le  poème  est  de  M.  Bernard  de 
Lopez,  et  la  partition  sera  le  début  au  théâtre  d'un  umsicieu  très- 
connu  dans  les  concerts  ei  les  salons,  M.  Jo.seph  O'Kelly. 

^*»  Fleur  de  Thé  vient  d'obtenir  au  Théâtre  français  ;i  llouen  le  succès 
qui  l'accueille  sur  tous  les  théâtres  où  elle  est  montée.  On  a  franchement 
applaudi  tous  les  morceaux  de  la  jolie  partition  de  M.  Lecocq,  gaiement 
enle\és  parles  interprètes  MM.  Thomasse,  Mesmacker  et  Maxime,  Mlles' 
Hurez  et  Debay.  Tous  ont  ont  été  rappelés  à  la  chute  du  rideau. 

.*^  Le  tiibunal  de  première  instance,  dans  son  audience  de  mercredi, 
a  débouté  la  Direction  des  théâtres  impériaux  de  Ru.ssie  de  la  demande 
en  100,000  francs  de  dommages-intérêts  qu'elle  avait  forir.ée  contre  le 
célèbre  ténor  Fraschini,  et  l'a  condanmée  aux  dépens. 

*  Les  journaux  artistiques  italiens  publient  en  ce  moment,  suivant 
leurliabitude,  le  bilan  de  la  Péninsule  en  opéras  non-eaux,  éclos  pen- 
dant l'année  l.S(>8.  Il  y  en  a  vingt-quatre  :  c'est,  à  quelques  umtés  près, 
le  nombre  accoutumé.  Les  succès,  —  succès  italiens,  raie  n  dire  ephe- 
,y,jres, —  et  les  chutes  sont  en  proportion  raisonnable. 

,*^  Notre  correspondant  de  Moscou  ajoute  queUiues  détails  à  ceux  que 
contenait  notre  dernier  numéro  sur  la  représentation  de  Fauslo  donnée  au 
bénéfice  de  Mlle  Désirée  Artôt.  «  Une  d(  s  meilleures  soirées  que  nous  ait 
données  l'opéra  Italien,  dans  le  cours  de  la  saison  qui  va  finir,  a  ete  la 
représentation  des  iVo:;c  di  Figaro.  Mlle  ArtAt,  (Suzanna),  la  Ferrncci 
(Contessa),  laBenati  (Cherubino),  Ucta  et  Rossi,  composaient  un  ensemble 
parfait  sous  tous  les  rapports.  Mlle  Artôt  a  fait  une  merveilleuse  créa- 
tion du  charmant  rôle  de  Suzanne,  qu'elle  chante  et  joue  délicieusement. 

—  Les  Nozzc  di' F/i/cf  1-0  ont  été  rendues  avec  un  soin  religieux,  grâce  au 
chet  d'orchestre,  M.  Joseph  Dupont.  Le  public  reconnaissant  a  voulu  le 
rappeler  après  la  1"-  représentation,  et  l'on  assure  que  l'administration 
de  l'Opéra  russe  aurait  l'intention  d'en  proposer  la  direction  musicale  ii  M. 
Joseph  Dupont.  —  L'opéra  de  Seroff,  «oiyncdo,  vient  d'être  donné  pour  la 
première  fois  ii  Moscou,  avec  un  grand  luxe  de  mise  en  scène  et  de  cos- 
tumes La  musique  de  cet  ouvrage  rencontre  de  très-chauds  partisans,  et 
de  non  moins  ardents  détracteurs,  ce  qui  est  une  preuve  certaine  de  .sa 
valeur.  L'action  de  liogneda  se  passe  à  l'époque  de  l'introduction  du 
christianisme  en  Russie.  La  musique  est  surtout  remarquable  par  la 
couleur  locale,  et  une  originalité  incontestable,  bien  que  fréquemment 
critiquable.  Seroff  est  un  disciple  de  l'école  wagnérienne,  école  peu  en 
faveur  jusqu'à  ce  jour  en-  Russie,  comme  le  prouve  l'accueil  très-froid 
qu'a  rencontré  Lohengrin  dernièrement  à  Petersbourg.  —  La  Société 
des  concerts  de  la  Soaété  musicale  russe  a  donné  ses  premières  séances 
svmphoniques.  Nicolas  Rubinstein  est  l'âme  de  cette  magnifique  institu- 
tion à  laquelle  le  public  moscovite  doit  de  splendides  exécutions  des 
chefs-d'œuvre  classiques.  Le  programme  du  deuxième  concert  offrait,  outre 
la  symphonie  en  la  de  Mendelssohn,  des  fragments  de  Saiil  et  une  ouverture 
de  M  Joseph  Dupont,  auquel,  la  Société,  selon  l'usage,  avait  confié  la 
direction  de  son  œuvre.  Elle  a  eu  un  très-grand  succès.  —  A  Saint-Pé- 
tersbourg, Mme  Lucca  a  fait  sa  première  apparition  dans  l'Africaine,  et  a 
produit  une  énorme  sensation.  Cet  opéra  servait  aussi  de  début  au 
ténor  Slagno,  transfuge  de  l'opéra  Italien  de  Moscou,  qui  a  été  fort  bien 
accueilli. 


NOUVELLES  DIVERSES. 


,i;%  Au  .second  concert  du  Conservatoire,  qui  répétait,  comme  d'habitude, 
le  programme  du  précédent,  on  a  fait  un  accueil  très-favorable  à  la  sym- 
phonie de  M.  Gouvy,  et  le  chœur  îles  pèlerins  du  Tamihœuser  a  été  bissé 
cette  fois  encore.  Orchestre  et  chœurs  se  sont  vaillamment  comportés. 

^*i^  Le  concert  donné  dimanche  à  la  Sorbonne  au  profit  de  l'Institut 
de  la  Providence  a  été  au.ssi  brillant  que  fructueux;  nous  regrettons  de 
ne  pouvoir  disposer  de  plus  d'espace  pour  distribuer  individuellement, 
aux  artistes  appelés  à  concourir  à  cette  bonne  œuvre,  la  part  d'éloges 
qui  leur  revient.  Constatons  seulement  que  Mlle  Brunetti  et  M.  Maro- 
chetti  pour  le  chant,  Mlle  Valérie  Janssen  pour  le  piano,  MM.  Sarrasate 
et  Lasserre  pour  le  violon  et  le  violoncelle,  ont  été  à  la  hauteur  de  leur 
talent  et  qu'on  'es  a  chaleureusement  applaudis. 

^*^  Mme  .Nina  de  Caillas  donnait  dernièrement,  àl'Ecolc  lyrique  une  in- 
téressante soirée,  dans  laquelle,  outre  la  bénéficiaire,  compositeur  et  pia- 
niste de  talent,  on  a  beaucoup  applaudi  Mlle  Nina  deRionnelle  récemment 
arrivée  de  Nice,  où  elle  a  obtenu  de  beaux  succès  dans  les  rôles  drama- 
tiques. La  Jeune  cantatrice  a  chanté  i)lusieurs  morceaux  d'un  genre  dif- 
férent; chacun  d'i^ux,  et  particulièrement  la  Berceuse  de  l'Afrieaine,  lui 
ont  valu  de  chaleureux  bi-avos. 

»*,  M.  Gouffé  a  déjà  donné  chez  lui  plusieurs  matinées  musicales 
intére.îsantes.  A  la  dernière  concouraient  deux  pianistes  distinguées, 
Mmcs  Béguin-Salomon  et  Verdavaine.  Un  quintette  pour  instrumenta*  à 
cordes,  d'Adolphe  Blanc,  tort  bien  interprète  par  MM.  Guerreau,  Ri- 
gnault,  Hcis,  Lebouc  et  Gouffé,  a  été  très-goùté. 

""vT^oici  le  programme  du  onzième  concert  populaire  de  musique 
'hlassiqîV  ,  qui  aura  lieu  aujourd'hui  à  2  heures,  au  cirque  Napoléon, 
sous  la  direction  de  J.  Pasileloup  :  1"  ouverture  de  Médée.  de  W.  Bar- 
gicl  ;  —  2"  symphonie  pastorale,  de  Beethoven;  —  :!"  ouverture  de  la 
Grotte  de  Fingal,  de  Mendelssohn;  —  i"  adagio  du  quintette  en  sol  mi- 
neur, de  .Mozart;  —  5"  suite  d'orchestre  (op.  113),  de  Franz  Lachncr 
(prélude,  menuet,  variations,  marche). 

»%  Quatre  excellentes  .sociétés  chorales  allemandes  de  Paris,  lu  Teu- 
tonia,  la  Liederlafrl.  !a  Germania  t'ia  Coneordia,  réunies  pour  la  première 
fois  sous  le  titre  de  Deutseher  Saugerlnmd,  ont  donné  samedi  dernier  une 
très-belle  fête  dans  la  salle  Dourlans,  sous  la  direction  de  M.  Hugo 
Vittmann,  l'habile  chef  de  la  Teutonia.  Des  chœurs  de  Franz  Abt,  Ri- 
chard Wagner,  Speidel  et  Fischer  ont  été  fort  bien  rendus  et  très-applaudis; 
l'orchestre,  qui  a  exécuté  les  ouvertures  de  liosamunde,  de  Schubert,  et 
à'E-iinjanlhe,  et  accompagne  chorisies  et  .solistes,  s'est  parfuitcraent  ac- 
quitté de  sa  lâche.  Des  bravos  enthousiastes  ont  accueilli  MM.  Henri  Fis- 
sot,  qui  a  admirablement  joué  le  concerto  en  sol  mineur  de  Mendelssohn, 
et  Tafi'anel,  dont  le  beau  talent  de  flûtiste  est  aujourd'hui  dans  toute  sa 
maturité,  lùilin,  le  triple  concerto  de  Beethoven  pour  piano,  violon  et 
violoncelle,  qu'on  entend  tri's-rarement  et  qui  par  conséquent  était  une 
nou'cauté  pour  beaucoup  d'auditeurs,  a  été  exécuté  par  MM.  Delaborde, 
Lamoureux  et  Las.serre;  c'est  un  des  ouvrages  les  plus  faibles  du  maître, 
et  toute  la  virtuosité  et  la  bonne  volonté  des  trois  artistes  n'a  pas  réussi 
à  en  dissimuler  les  longueurs  et  a  lui  donner  l'intérêt  qui  lui  manque. 
Il  n'en  faut  pas  moins  savoir  gré  à  l'éclectisme  de  M.  Wittmann,  grâce 
auquel  on  a  pu  au  moins  emporter  une  opinion  .-iur  une  œuvre  aussi  peu 
connue. 

**,  Le  concert  des  Orphéonistes  d'Amiens  vient  d'avoir  lieu  avec  un 
immense  succès:  le  théâtre  était  comble  et  la  recette  a  dépassé  i.OOO  fr. 
On  avait  demandé  le  concours  de  plusieurs  artistes  de  Paris.  M.  Devoyod 
de  l'Opéra  et  Mlle  Schrœder  du  théâtre  Lyrique  ont  chanté  plusieurs 
morceaux.  Herman,  de  son  côté,  a  électrisé  la  salle  avec  son  violon;  ses 
chants  de  Joseph  et  sa  fantai.'ie  .sur  Rigoletto  lui  ont  valu  plusieurs  rap- 
pels successifs.—  Mme  Victoria  Lafoutaine  et  son  mari,  du  Théâtre-Fran- 
çais, ont  terminé  le  concert  par  une  petite  pièce  qui  a  fait  le  plus  grand 
plaisir. 

^*^,  iVinsi  que  nous  en  avions  déjà  donné  la  nouvelle  sommaire ,  M. 
Bourgault-Ducoudray  cherche  à  recruter  «  parmi  les  personnes  des 
classes  élevées  dévouées  au  culte  du  beau,  »  une  société  orphéonique 
dont  le  but  est  la  vulgarisation  de  la  belle  musique  chorale  :  œuvres  de 
Palestrina,  Bach,  Haendel.  Haydn.  Mozart,  etc.  On  peut  prendre  con- 
naissance des  statuts  de  la  société,  chez  M.  Bourgault-Ducoudray,  136, 
boulevard  de  Magenta.  Les  cents  sociétés  chorales  parisiennes,  pour 
ne  parler  que  de  celles-là,  attendent  à  l'œuvre  dans  les  concours  aux- 
quels «  il  ne  s'interdit  pas  de  prendre  part,  «  l'Orphéon  distingué  de 
M.  Bourgault-Ducoudray. 

,;,*,;,  MM.  Juvin,  \.  Querm,  de  Panette  et  Jessel  ont  remporté  les  prix 
d'un  concours,  ouvert  par  M.  Ad.  Papin,  pour  la  composition  d'une 
messe  chorale  à  quatre  voix  d'homme..  La  messe  de  M.  Juvin,  premier 
prix,  sera  exécutée  à  l'église  de  la  Trinité,  au  bénéfice  de  la  caisse  de 
secours  de  l'Association  des  artistes  musiciens. 

^*^  M.  Henri  Hess,  premier  prix  du  Conservatoire  impérial  de  musi- 
que,*ancien  organiste  de  Saint-Ambroise,  à  Paris,  vient  d'être  nommé 
maître  de  chapelle  de  la  cathédrale  de  Nancy. 


DE  PARIS 


-ilo 


*%  M.  J.-J.  Masset,  proresseiir  ûo  chant  au  Conservatoire,  vient  de 
recevoir,  du  roi  de  Suède,  la  décoration  de  l'ordre  de  Gustave  Wasa. 
C'est  M.  Masset  qui  a  commencé  rédiication  musicale  do  Mlle  iNilsosn. 

/*  Mlle  Nilsson,  qui  a  fait  don  aux  Associatioiisdcs  artistes  musiciens 
et  dramatiques  du  produit  de  la  représentation  à  iiénétice  stipulée  par 
son  nouvel  engagement  à  l'Opéra,  en  a  été  oiïicicllement  remerciée,  au 
nom  des  deux  comités,  par  M.  le  baron  Taylor.  !.c  comilé  des  artistes 
musiciens  a  également  remercié  la  célèbi'e  cantatrice  de  son  concours  h 
la  messe  solennelle  de  Sainte-Cécile. 

^*^,  Après  une  excursion  de  cinq  mois  en  Allemagne  et  dans  le  midi 
do  la  France,  Mlle  Octavie  Caussemille ,  l'cxcellonle  pianiste,  est  de  re- 
tour k  Paris  où  elle  compte  passer  la  saison  d'iiiver. 

**^  Le  couple  Jaell  vient  d'accomplir  une  brillante  tournée  en  Hol- 
lande. Il  est  en  ce  moment  k  Bruxelles  engagé  par  M.  Samuel  au  pro- 
chain Concert  populaire  et  au  gr.ind  concert  de  la  Société  de  la  Grande- 
Harmonie.  Les  deux  éminents  artistes  seront  de  retour  à  Paris  en  jan- 
vier. 

,**  Les  éditeurs  Brandus  et  Dufour  viennent  de  mettre  en  vente  les 
deux  nouvelles  œuvres  d'A.  Dassier  :  Comment  l'esprit  vient  aux  Garçons, 
chansonnette  et  C'est  le  printemps,  romance  dont  Adelina  Patti  a  accepté 
la  dédicace.  Ces  deux  compositions  se  distinguent  autant  par  le  choix 
des  par-oies  que  par  le  charme  des  mélodies  et  un  grand  succès  leur  est 
réservé 

,*^  Un  jeune  compositeur  M.  Albert  Loron,  connu  par  plusieurs  œu- 
vres variées,  vient  de  faire  paraître  quatre  nouvelles  compositions  :  les 
Echos  de  Rotjat,  quadrille;  —  Rcots  de  jeunesse,  nocturne  —  étude;  —  le 
Réveil  de  l'Aurore,  polka-mazurka;  les  Gardes  Mobiles,  quadrille;  nous  les 
recommandons  aux  amateurs. 

^*if  Poésies  charmantes,  inspirations  musicales  exquises,  le  Recueil  dr 
vingt  mélodies  choisies  de  Français  Schubert,  édité  par  H.  Gautier,  62,  rue 
Turenne,  à  Paris  a  sa  place  marquée  dans  les  familles  et  les  pension- 
nats, aussi  bien  comme  cadeau  d'étrennes  que  comme  répertoire  \ociû 
varii'>  pour  les  jeunes  personnes. 

^*j,  L'éditeur  Carlereau,  seul  propriétaire,  du  chef  de  l'auleur  des  pa- 
roles, M.  Sewrin,  de  la  Fête  du  village  voisin,  va  faire  paraître  la  paru- 
tion pour  piano  solo  de  cet  opéra  ,  i-éduite  au  piano  par  M.  Ad.  Boïel- 
dieu. 

-1;*,,  Le  violoncelliste  Emile  Dnnklcr  vient  de  conclure,  avec  M.  Max 
Str-akosch,  à  de  magnifiques  conditions,  un  engagement  de  six  mois  pour 
ilïic  tournée  de  concerts  na-ï  JiItor.c.Ujxis _ 

^*^  L'éminent  pianiste-composileur  D.  Magnus,  recevant  fr'équemment 
des  lettres  et  communications  destinées  à  l'honorable  éditeur  de  musi- 
que du  nrême  nom,  avec  lequel  il  n'est  aucunement  allié,  serait  heur-eux 
que  la  publicité  donnée  à  celte  homonymie  pui'e  et  simple  fît  cesser  les 
légers  inconvénients  qui  en  résultent. 

^**  Le  jury  du  concours  international  de  musique  religieuse  institué 
en  Belgique  sous  le  patronage  du  gouvernement,  arâit,  au  mois  de  sep- 
tembi'e  dernier,  décerné  le  troisième  prix  à  M.  Summers,  de  Paris.  Il 
paraît  que  sous  ce  pseudonyme  il  faut  lire  le  nom  de  M.  Nicou  Choron. 

,|.*^  11  y  avait  un  monde  fou  au  premier  bal  de  l'Opéra;  près  de 
20,000  francs  de  recette,  sur  lesquels  M.  Str-auss  a  versé  à  l'Association 
des  artistes  musiciens  1,700  fr-ancs  prélevés  sur  les  billets  de  faveur.  — 
Hier,  samedi,  deuxième  bal. 


„*^  L'éditeur  de  musique  N.  Simrock,  de  Bonn,   est  mort  le  13  di' 
cerabre  dans  cette  ville,  à  l'âge  de  soixante-seize  ars. 


ÉTRANGER 


,*^  Bruxelles.  —  La  reprise  du  Pardon  de  Ploérmel  a  eu  lieu  avec 
éclat  cette  semaine.  Mlle  Marimon,  entièrement  rétablie  et  en  pleine 
possession  de  ses  moyens,  a  été  charmante  d'un  bout  à  l'autre  de  son 
rôle.  L'air  célèbre  de  «  l'Ombre  »  lui  a  valu  de  chaleureux  applaudisse- 
ments et  un  double  rappel.  M..  Carman  (Hoël),  qui  a  faibli  au  début, 
n'a  pas  tardé  à  se  relever  et  s'est  tiré  d'affaire  à  son  honneur.  M.  Guf- 
froy  a  été  irréprochable  dans  le  rôle  de  Corentin  ;  on  voudrait  seulement 
un  peu  plus  de  volume  à  sa  voix.  —  La  représentation  de  la  Juive,  qui 
a  suivi,  n'a  pas  été  heureuse  pour  Mlle  Fi-anchino  ;  le  public,  qui  l'avait 
applaudie  dans  l'Africaine,  a  refusé  de  lui  continuer  ses  bonnes  grâces. . . 
Warot  a  été  beaucoup  mieux  traité,  et  il  le  méritait  d'ailleurs.  —  Le  pre- 
mier concert  du  Conservatoire  a  eu  lieu  dimanche  dernier.  On  y  a  exé- 
cuté entre  autres  morceaux  une  ouverture  inédite  de  M.  Fétis,  œuvre 
d'une  haute  portée,  et  oij  l'on  sent  par-tout  l'expérience  et  le  talent  du 
maître. 


*"*  Ralen-linden.  —  M.  Duprn.ssoir  ne  veut  ptts  être  pris  au  dépour- 
vu; il  s'est  déjà  occripr'i  des  représentations  d'opéra  allemand  pour  l'au- 
tomne prochain.  On  donnera,  le  M  septembre  ISti'J,  les  Jotjcuscs  corn- 
mitres,  de  Nicolaï;  li;  H,  Tannhwuser,  le  18,  les  Huguenots,  et  le  22,  la 
Juive.  Niemann,  W.'chtel  et  Sonthcim  chanteront  les  principaux  rôles. 

**,j,  Berlin.  —  Mlle  Orgéni  est  loujoui-s  trè.s-fétée.  Klle  a  beaucoup 
gagné  depuis  l'époque  de  son  premier  début  à  Berlin,  il  y  a  trois  ans, 
sous  le  rapport  de  l'expression  dramatique.  Klle  a  clianti:  avrn;  succi's 
cette  semaine  dans  la  Traviata,  Lucie  et  Faust. 

^''.;f  Leipzig.  —  Au  dixième  concert  du  Gewandhaus,  le  llîitisle  De 
Yroyr;  a  obtenu  un  tr'ès-grand  succès  avec  un  concerto  de  Demer^serrran 
et  un  larghetlo  de  Spohr.  La  beauté  du  son  qu'il  tire  de  son  instrument 
et  les  qualilc's  tout  .■u-iistiqucs  de  soir  jeu,  lui  ont  corrcilié  tous  les 
suff'rages. 

**,j  Munich.  —  Un  nouvel  opéra-corrrique,  Dcr  Holhmantel  (le  Manteau 
rouge),  de  Krempel.setzer,  vient  d'être  donrré  avec  succè.-,  au  Bésidenz- 
theatcr. 

^,*^  Vienne.  —  L'art  lyrique  vient  de  faii-e  une  nouvelle  recrue  dans 
le  monde  aristocratique  :  la  baronne  Heiligensttcdt  de  Kœnigsberg,  a  dé- 
buté à  l'Opéra  sous  le  nom  de  Giovannina  Stella,  dans  le  rôle  d'Isabelle 
de  Robert-lc-Diablc.  Sans  être  absolument  iir-éprochables  son  chant  et 
son  jeu  ont  beaucoup  de  charme,  et  le  public  ne  lui  a  [las  mar'clrandé 
les  encouragements.  —  Le  théâtre  An  der  Wien  rnonlelns  Horreurs  de  la 
Guerre. 

»*„;  Milan.  —  La  dir'i^ction  de  la  Scala  a  publié  sorr  cartellone.  La 
saison  durera  du  26  décembr-e  au  30  avril.  On  représentera  Don  Carlos 
et  la  Forza  del  Deslino  de  Verdi,  Mosé  de  Rossini,  Fieschi  de  Montuoro, 
et  Ruij-Blas  de  Marchetti,  outre  deux  ballets  nouveaux  de  Monplaisir. 
Xous  avons  déjà  donné  les  noms  des  artistes  du  chant.  Le  nouveau  chef 
d'orchestre  est  Eugénie  ïerziani  ;  ses  suppléants  :  Franco  Faccio  et  Giano 
Brida.  —  Un  grand  concert  à  la  mémoire  de  Rossini  a  été  donné  à 
ce  théâtre  le  13  décenrbre  ;  trois  ouvertur-es  et  d3  nombi-cux  fr-agments 
des  opér-as  du  maîtr'e  ont  été  exécutés.  Mlle  Rosa  Csillag  et  Pancani  ont 
admirablement  chante'',  la  pr-emière,  un  air  de  Maometto,  le  second,  un 
air  de  Zelmira. 

^*^  Bologne.  —  Une  imposante  cérémonie  or-ganisée  par  la  célèbre 
Académie  pirilharmonique,  a  eu  lieu  le  9  décembre  en  l'honneur  de  Kos- 
sini,  dans  l'égliseSan-Giovanni  in  Monte.  La  composition  des  divers  mor- 
ceaux de  la  messe  avait  été  confiée  à  plusieur\s  maéstri  ;  on  a  particu- 
lièrement remarqué  Vlntroit  et  le  Kyrie  du  profe;^seur  Busi,  le  Dies  irce 
de  C-Aria,  VAgii-us  el  le  Lux.œterna  de  Parisiui. 

,i.*4  Madrid.  —  La  Société  des  quatuors  a  donné  le  0  décembre  sa 
première  séance.  Elle  est  toujours  composée  de  MM.  Monaslerio,  Per'cz, 
Lesta  n ,  Castellano  et  Mendizabal  (piano).  Ces  artistes  ont  exécuté  des 
œuvres  de  Mozart,  Beethoven  et  Haydn..  —  La  direction  de  l'Opér-a,  mu- 
nie d'une  autorisation  préalable,  s'est  décidée  à  suspendre  ses  représen- 
tations jusqu'au  -i  février. 

^*^,  Lisbonne.  —  Les  ténors  Naudin  et  Lefranc  sont  (Migagés  à  San- 
Carlos. 

,p'*^  Saint-Pétersbourg.  —  Après  une  indisposition  de  trois  semaines 
Mme  Lucca  a  pu  enfin  paraître  dans  Bon  Juan.  Pour  dorrner  une  idée 
de  l'accueil  enthousiaste  qui  lui  a  été  fait,  il  suffit  de  dii-o  qu'elle  a  été 
rappelée  vingt-quatre  fois  dans  le  cours  de  la  représentation.  —  Elle  a 
chanté  ensuite  l'Africaine;  nouveau  et  magnifique  triomphe.  —  On  au- 
rait désiré  que,  en  compensation  des  représentations  dont  un  enrouement 
malencontreux  a  privé  le  public,  le  séjour  de  Mme  Lucca  put  être  quel- 
que peu  prolongé  ici,  et  des  démar'ches  ont  été  faites  en  ce  sens;  mais 
le  temps  de  la  célèbre  prima  donna  est  compté  et  mesuré  bien  à  l'a- 
vance, l'intendance  royale  de  Berlin  n'a  donc  pu  donner  son  consen- 
tement 


—  Salle  ValenUno.  —  Le  premier  bal  masqué  a  fait  fur'eur.  -  Ai'ban 
avait  organisé  un  grand  concert  vocal  et  instrumental  pour  le  jour  de 
Noël,  avec  le  concours  de  Mlle  de  Baunay  et  de  la  Société  des  Enfants 
de  Lutèce.  MM.  Arban  et  Dunkler  s'y  sont  aussi  fait  entendre. 


—  ERRATUM.  —  Nos  lecteurs  se  seront  facilement  aperçus  de  la 
faute  d'impression  qui,  dans  l'article  consacré  à  Mlle  Minnie  Hauck,  nous 
a  fait  donner  seulement  treize  ans  à  la  charmante  cantatrice,  tandis 
qu'elle  en  a  dix-sept.  Au  lieu  de  1815,'),  c'est  18,')1  qu'il  faut  lire  comme 
année  de  sa  naissance. 


:  s.  r)llFOr:ll. 


416 


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CHEZ    BRANDUS    ET    DUFOUR,    EDITEURS,     103,    RUE    DE    RICHELIEU., 

LES  HORREURS  DE  Li  GUERRE 


Opéra-bouffe  en  deux  actes, 


MUSIQUE    DE 


Paroles  de  Ph.  Gjlle. 


Les    airs    de    cliant    détachés    avec    accorapagiienient    de    piano. 


Invocatton  à  l'Amour,  chantée  par  Mlle  Van-Ghell  :  Dans 

tous  ses  traits  ta  noblessi^  respire 2  50 

CUant  d'iilliancp,   cli.imi'  par  Mlles  Van-Ghell,    lîonelli, 

MM.  Léonce  et  Luce  :  Moi,  duc  Cédéric  cent-vingt  trois...  4  n 
Cou|>lclN  chantés  par  Mlle  Bonelli:  JenpwKO'/Jcrs  ô.monmena(/p  2  SO 
une    cbaiignltTe    et    Ion    cœur,  couplets  chantés  par 

Mlle  Van-Ghell  :  Dans  iin  désert  nous  irons A    » 

E.e  fuMil  à  uiguillo,  chant  de  guerre  à  deux  voix:  Nous 

avons  un  fusil  se  chargeant  par  la  culasse 3     » 

'  VALSE  par  Strauss.  —  QUADRILLE  par  Arban.        — 


6.  Béverlo,  chantée  par  Mlle  Van-Ghell  :  Adieu  patrie  et  jours 
de  fête r 

7.  Duo,  chaulé  par  Mlle  Van-Ghell  et  M.Léonce:  Non,  ta  beauté 
me  charme 

8.  Eileil  nllomand,  chanté   par    M.  Luce  :  Aiif  eincm  Iknim 
ein  Kuckurk 

9.  Ron<l4i-valNo,  chanté  par   Mlle   Yan-Ghcll  :    //    était   nuit, 
tout  dormait  en  silence . 


2  50 


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